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SOCI - Comité permanent

Affaires sociales, sciences et technologie

 

Santé mentale, maladie mentale et toxicomanie:

Aperçu des politiques et des programmes au Canada

Rapport 1


PARTIE 4

Recherche et éthique

CHAPITRE 10:
LA RECHERCHE DANS LES DOMAINES
DE LA SANTÉ MENTALE, DE LA MALADIE MENTALE ET DE LA TOXICOMANIE AU CANADA

Nous croyons que la recherche constitue notre principale arme pour mieux comprendre les maladies mentales dévastatrices, améliorer les traitements et finir par trouver une cure.

[Fondation canadienne de la recherche en psychiatrie, Today, bulletin, vol. 3, n° 1, printemps 2003.]

INTRODUCTION

Au Canada, le gouvernement fédéral est le principal commanditaire de la recherche sur la santé mentale, la maladie mentale et la toxicomanie, tandis que ce sont surtout des chercheurs universitaires qui effectuent cette recherche dans des instituts de recherche et des hôpitaux universitaires. Les instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), par l’entremise de l’Institut des neurosciences, de la santé mentale et des toxicomanies (INSMT), sont le principal organisme de financement fédéral pour la recherche sur la santé mentale, la maladie mentale et la toxicomanie.

Comme pour toute la recherche sur la santé financée par les IRSC, la recherche dans les domaines de la santé mentale, de la maladie mentale et de la toxicomanie porte sur tout le spectre des activités allant de la recherche biomédicale à la recherche clinique, en passant par la recherche sur les services de santé et la recherche sur la santé de la population :

·        La recherche biomédicale concerne les organismes biologiques, les organes et les systèmes d’organes. Ce type de recherche pourrait porter, par exemple, sur le niveau de sérotonine (substance chimique du cerveau) chez les patients qui souffrent de troubles alimentaires comme la boulimie nerveuse.

·        La recherche clinique consiste à étudier des personnes saines ou malades. Citons, à titre d’exemple, les essais cliniques conduits sur des humains pour déterminer la toxicité et l’efficacité d’un nouveau traitement de la schizophrénie qui a produit des résultats prometteurs lors de recherches biomédicales fondamentales, et ensuite pour comparer un nouveau médicament avec d’autres quant aux bienfaits réels pour les patients.

·        La recherche sur les services de santé englobe la prestation, l’administration, l’organisation et le financement des soins de santé mentale et de traitement de la toxicomanie. Mentionnons, par exemple, la recherche de mécanismes pour traiter les patients qui ont un trouble bipolaire à partir des moyens de diagnostic, pendant le traitement à l’hôpital, en tant que patients externes, ou à la maison, puis pour assurer leur suivi à long terme par l’hôpital et dans le cadre de communautaires.

·        La recherche sur la santé de la population est centrée sur l’étendue des facteurs qui influencent l’état de santé (conditions socio-économiques, sexe, culture, alphabétisation, génétique, etc.). Mentionnons, par exemple, une étude qui, grâce à une importante base de données contenant des informations personnelles sur la santé obtenues de plusieurs sources, doit permettre de déterminer si l’incidence du trouble déficitaire de l’attention et l’hyperactivité sont associés à l’environnement et à d’autres facteurs.

Le présent chapitre donne un aperçu de l’état de la recherche dans les domaines de la santé mentale, de la maladie mentale et de la toxicomanie au Canada. La section 10.1 résume le rôle et le mandat des IRSC et de l’INSMT et décrit quelques problèmes soulevés par les témoins. La section 10.2 fournit des renseignements sur le financement fédéral de la recherche dans les domaines de la santé mentale, de la maladie mentale et de la toxicomanie et pose la question de savoir si le financement devrait refléter le fardeau de la maladie. La section 10.3 examine brièvement les autres sources de financement de la recherche dans les domaines de la santé mentale et de la toxicomanie. La section 10.4 traite des questions relatives à l’application des connaissances acquises grâce à la recherche à des services et des moyens de soutien concrets dispensés aux personnes souffrant de maladie mentale ou de toxicomanie. La section 10.5 porte sur la nécessité d’un plan d’action national pour la recherche dans les domaines de la santé mentale, de la maladie mentale et de la toxicomanie. La section 10.6 présente les observations du Comité.

10.1      IRSC ET  INSMT

Au Canada, on a constaté une nette amélioration depuis trois ans à la suite de la fondation des Instituts de recherche en santé du Canada et du financement de la recherche, surtout en ce qui concerne la santé mentale. Cependant, il y a encore beaucoup d’améliorations à apporter.

[Michel Tousignant, professeur, Centre de recherche et d’intervention sur le suicide et l’euthanasie, Université du Québec à Montréal (14:41)]

Dans le cadre de son engagement à devenir l’une des cinq meilleures nations au monde dans le domaine de la recherche, le gouvernement du Canada a créé en 2000 les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), organismes gouvernementaux autonomes qui relèvent du ministre fédéral de la Santé.

Les IRSC appliquent une démarche novatrice, multidisciplinaire et fondée sur les problèmes à l’égard de la recherche en santé. Cette démarche polyvalente comprend tous les types de recherche (biomédicale, clinique, services de santé, santé de la population) sur les mécanismes, le traitement et la prévention des maladies ainsi que sur la promotion de la santé. La plupart des recherches que subventionnent les IRSC sont entreprises par des chercheurs (70 p. 100); tandis que 30 p. 100 des fonds sont réservés aux initiatives stratégiques pour réagir aux problèmes de santé et exploiter les possibilités scientifiques hautement prioritaires aux yeux des Canadiens.

L’approche des IRSC à l’égard de la recherche est facilitée par leur structure, qui unit des chercheurs provenant de diverses disciplines et qui transcende les frontières géographiques grâce à leurs 13 instituts s’occupant chacun d’un domaine de recherche particulier. L’un d’entre eux est l’Institut des neurosciences, de la santé mentale et des toxicomanies (INSMT).[484]

La création de l’INSMT a établi le premier lieu de convergence de la recherche sur la santé mentale, la maladie mentale et la toxicomanie au Canada. L’INSMT appuie la recherche dont l’objet est d’améliorer la santé mentale et neurologique, la vision, l’audition et le fonctionnement cognitif, et à réduire l’incidence d’autres troubles connexes par le truchement de stratégies de prévention, de techniques de dépistage et de diagnostic, de traitements, de systèmes de soutien et de soins palliatifs. Comme le montre le tableau 10.1, l’INSMT effectue des recherches dans un grand nombre de domaines.

Le plan stratégique de l’INSMT pour 2001-2005 établissait cinq priorités :

1.      Promouvoir l’innovation et créer des capacités d’innovation dans la recherche en neurosciences, en santé mentale et en toxicomanie, de manière à renforcer le milieu de la recherche en santé au Canada dans ces domaines et à améliorer sa position concurrentielle sur la scène internationale. Les champs d’intérêt comprennent la formation, les initiatives stratégiques, la recherche dans de nouveaux domaines et la recherche en bioéthique.

2.      Créer et maintenir des partenariats de collaboration avec les organismes de santé gouvernementaux, non gouvernementaux et bénévoles, ainsi que les sociétés pharmaceutiques et de biotechnologie, qui aideront l’Institut à partager, mettre en valeur, obtenir ou augmenter les ressources requises pour remplir son mandat.

3.      Promouvoir la création de liens et les échanges entre la communauté scientifique, les instances décisionnaires municipales, provinciales et nationales ainsi que les utilisateurs des résultats de recherche, comprenant les organisations non gouvernementales et bénévoles, au moyen d’efforts structurés axés sur la transmission des connaissances (voir la section ci-dessous).

4.      Établir la présence des INSMT sur la scène internationale par des initiatives de recherche, de formation et de financement menées conjointement avec des organismes scientifiques et de financement de la recherche d’autres pays.

5.      Établir une structure organisationnelle et opérationnelle qui permettra à l’INSMT d’atteindre ses objectifs.[485]

TABLEAU 10.1

DOMAINES DE RECHERCHE APPUYÉS PAR L’INSMT

·        Politiques et stratégies de promotion des santés mentale et neurologique

·        Politiques et stratégies de prévention de l’accoutumance

·        Déterminants pour la santé - afin d’expliquer les facteurs multidimensionnels qui affectent la santé des populations et conduisent à une prévalence différentielle des soucis de santé

·        Identification des avantages sanitaires et des facteurs de risque pour la santé reliés à l’interaction avec les environnements (culturel, social, psychologique, comportemental, physique, génétique)

·        Stratégies de prévention de la maladie, des blessures et de l’invalidité aux niveaux de la personne et de la population

·        Prévention, traitement et réadaptation des blessures à la tête

·        Accoutumance, santé mentale et dysfonction du système nerveux affectant la sensation, la cognition, les émotions, le comportement, le mouvement, la communication et le fonctionnement autonome

·        Recherche clinique et recherche sur les résultats des traitements en ce qui a trait aux technologies et méthodes de diagnostic; thérapies; modèles de traitement, soins et réadaptation (à long et court terme)

·        Comorbidité des conditions et impacts sur la prévention, le diagnostic, le traitement, les soins et la réadaptation

·        Conception et mise en ouvre de la prestation des services de santé : de la prévention, au dépistage, au diagnostic, à l’intervention ou au traitement, à la réadaptation et aux soins palliatifs

·        Développement et mise en ouvre des technologies et outils en matière de santé (p. ex. : technologies d’imagerie, de bioingénierie et d’administration des médicaments)

·        Développement, régulation, fonction et dysfonction des systèmes nerveux central, périphérique et autonome

·        Psychologie humaine, cognition et comportement; sommeil et biologie circadienne; douleur

·        Questions d’éthique reliées à la recherche, aux stratégies de soins et à l’accès aux soins (p. ex. : consentement éclairé; hospitalisation; accoutumance, santé mentale et système judiciaire)

Source : Site Internet des IRSC (http://www.cihr-irsc.gc.ca/f/9591.html)

Les témoins et les chercheurs appuient largement la nouvelle approche des IRSC en ce qui a trait à la recherche dans les domaines de la santé mentale, de la maladie mentale et de la toxicomanie. Ils ont également très confiance dans l’équité et la rigueur du mécanisme d’examen par les pairs établi par les IRSC. Par exemple, dans leur mémoire au Comité, les Drs Shitij Kapur et Franco Vaccarino, du Centre de toxicomanie et de santé mentale (Toronto), ont déclaré :

[…] le rôle des Instituts est reconnu et apprécié en recherche [sur la santé mentale, la maladie mentale et la toxicomanie]. La rigueur et la transparence des évaluations et des concours des ICRS sont bien appréciées et considérées comme un mécanisme indispensable dans ce spectre de la recherche où le « chercheur décide de son sujet.[486]

Les témoins ont qualifié l’approche multidisciplinaire des IRSC d’étape positive pour la recherche sur la santé mentale, la maladie mentale et la toxicomanie. Par exemple, le Dr Alan Bernstein, président de l’IRSC, a fait observer ce qui suit :

Le secteur canadien des neurosciences est exceptionnellement fort et reconnu au niveau international. En créant un institut unique voué aux neurosciences, à la santé mentale et aux toxicomanies, nous avons explicitement adopté une démarche intégrée qui contribue à mettre en contact des neuroscientifiques travaillant en laboratoire, des psychologues, des spécialistes des sciences sociales et des chercheurs des services de santé qui se concentrent sur la santé mentale et les toxicomanies.[487]

Le Dr Rémi Quirion, directeur scientifique de l’INSMT, a lui aussi insisté sur l’excellence de la recherche en santé mentale et en maladie mentale au Canada, mais il a ajouté que la capacité de recherche est problématique dans le domaine de la toxicomanie :

Le Canada est l’une des forces en recherche en neurosciences à travers le monde. On est classé deuxième ou troisième à travers le monde pour l’impact de nos découvertes en neurosciences. On a donc une bonne capacité. On est assez fort aussi en santé mentale. Il faut reconstruire du côté toxicomanies: nous avons perdu plusieurs de nos grands chercheurs dans les années 1990.[488]

De plus, la plupart des témoins se sont réjouis de l’ajout de la recherche sur la santé de la population et de la recherche sur les services de santé dans le mandat des IRSC. Ils ont expliqué que cette nouvelle orientation contraste avec l’importance primordiale de la recherche biomédicale chez le prédécesseur des IRSC, le Conseil de recherche médicale. Le Comité a cependant appris que la recherche sur la santé de la population et la recherche sur les services de santé continuent de présenter une relative faiblesse dans la perspective de la santé mentale, de la maladie mentale et de la toxicomanie. Dans leur étude, les Drs Kapur et Vaccarino soutiennent qu’il est important de corriger la situation, étant donné les effets des grands facteurs déterminants de la santé sur la maladie mentale et la toxicomanie.[489]

En ce qui concerne la recherche sur les services de santé, un examen documentaire nous a révélé qu’il reste encore beaucoup à apprendre au Canada relativement aux pratiques exemplaires de soins et de services offerts aux personnes atteintes de maladie mentale ou de toxicomanie, que ce soit dans les domaines des soins en clinique interne ou externe, de l’intervention et des services d’urgence, de l’aide en matière de logement, de l’emploi ou de l’autonomie. [490] Les auteurs de cette étude ont indiqué que, dans le cas des interventions où l’on possède le plus de données sur l’efficacité, il y a toujours un besoin pressant d’information détaillée sur ce qui fonctionne et pour qui. Lorsque les données sur l’efficacité sont moins claires, il faut adopter des démarches novatrices pour évaluer l’efficacité d’interventions particulières là où les essais traditionnels contrôlés sur échantillons aléatoires sont impossibles à réaliser ou inadéquats. Il est essentiel de cerner les pratiques exemplaires afin qu’elles guident les décisions sur les bénéficiaires des ressources de traitement et sur le lieu des interventions, sur les types de traitements qui devraient être offerts et sur la manière de s’assurer que les soins répondent aux besoins des patients ou des clients.

Même si de nombreux témoins ont louangé l’approche canadienne unique en son genre pour encourager la collaboration entre les chercheurs et entre les chercheurs et d’autres organisations, certains se sont plaints des lourdes restrictions et des obstacles importants qui nuisent à la validité et à la qualité de la recherche et qui accaparent trop les chercheurs. Par exemple, Michel Tousignant, professeur au Centre de recherche et d’intervention sur le suicide et l’euthanasie de l’Université du Québec à Montréal, a indiqué au Comité que les chercheurs peuvent passer des mois, voire jusqu’à un an, pour satisfaire à tous les critères de l’INSMT/IRSC, avant de commencer un projet de recherche. Il a expliqué qu’il peut y avoir jusqu’à trois comités d’éthique : dans les universités, les centres de recherche et les hôpitaux, pour examiner une proposition. Bien que les comités d’éthique existent pour protéger les intérêts de chacun, le professeur Tousignant a fait remarquer qu’ils allouent peu de temps à la consultation des chercheurs, qui doivent également remettre des protocoles à la Commission d’accès à l’information, ce qui retarde encore plus le début du projet de recherche et alourdit davantage le fardeau bureaucratique pour les chercheurs.[491]

10.2      FINANCEMENT FÉDÉRAL DE LA RECHERCHE DANS LES DOMAINES DE LA SANTÉ MENTALE, DE LA MALADIE MANTALE ET DE LA TOXICOMANIE

… Le financement actuel de la recherche en maladie mentale et en toxicomanie est insuffisant au Canada. En termes relatifs comme absolus, cette recherche est sous-financée. Si on ajoute à ce sous-financement systémique l’impact de l’ostracisme, les limites des levées de fonds publiques des ONG dans ce domaine ainsi que le manque d’incitatifs commerciaux pour beaucoup de ces activités, le sous-financement devient encore plus criant. Comme ces contraintes sont difficiles à infléchir, il est d’autant plus essentiel que le gouvernement fédéral fasse preuve de leadership en garantissant un financement juste à la recherche sur la maladie mentale et la toxicomanie.

[Dr Shitij Kapur et Dr Franco Vaccarino, Centre de toxicomanie et de santé mentale (2004)]

10.2.1   L’ampleur du financement fédéral

Principale source de financement de la recherche sur la santé mentale et la toxicomanie au Canada, les IRSC ont versé 93 millions de dollars à l’INSMT à même leur budget de base  de 623 millions de dollars pour l’exercice 2003-2004. Environ 33 millions de dollars du budget de l’INSMT est affecté à la recherche sur la santé mentale et les toxicomanies, soit 5,3 p. 100 de l’enveloppe globale du financement de la recherche sur la santé par les IRSC. Les 60 autres millions sont consacrés à la recherche fondamentale en neurosciences, dont une partie, comme d’autres recherches sur la santé, peut également contribuer à une meilleure compréhension de la maladie mentale et de la toxicomanie.

Le Dr Bernstein a indiqué que l’INSMT obtient actuellement la plus grosse part du financement des IRSC. Viennent ensuite l’Institut de la santé circulatoire et respiratoire (64 millions de dollars) et l’Institut des maladies infectieuses et immunitaires (52 millions de dollars).[492]

De concert avec l’Institut de la santé des Autochtones, l’INSMT a créé le Réseau national de recherche en santé mentale chez les Autochtones (RNRSMA) au printemps de 2003, doté d’un budget de 170 000 $ par année pendant quatre ans. Le mandat du Réseau consiste à mener des recherches en partenariat avec les collectivités autochtones et les chercheurs universitaires afin de former de nouveaux chercheurs et de développer les capacités de recherche nécessaires pour s’attaquer aux préoccupations et aux besoins particuliers des Autochtones.

En plus des IRSC, le Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH) constitue une autre source fédérale de financement de la recherche dans les domaines de la santé mentale, de la maladie mentale et de la toxicomanie. Ainsi, le CRSH appuie la recherche dans le domaine général de la psychologie sociale. Environ 1,5 p. 100 (quelque 2,5 millions de dollars) de son budget de base de 167,5 millions de dollars a été consacré à la recherche sur la santé mentale en 2002-2003.[493]

Le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie (CRSNG) est le troisième et dernier organisme fédéral de financement de la recherche sur la santé. La psychologie clinique n’est pas admissible aux subventions du CRSNG et la recherche sur le cerveau ne constitue pas non plus une priorité. Mais le CRSNG peut envisager d’appuyer des projets relatifs aux processus psychologiques fondamentaux, à leurs mécanismes neuronaux sous-jacents, au développement individuel et au contexte évolutif et écologique. Le financement de la recherche dans les domaines de la santé mentale, de la maladie mentale et de la toxicomanie est regroupé dans la catégorie « psychologie », à la rubrique « cerveau, comportement et science cognitive ». En 2003, 113 projets ont été financés dans cette catégorie et ont reçu environ 3,25 millions de dollars,[494] soit 0,5 p. 100 du budget des bourses et des subventions du CRSNG, qui s’est établi à un peu plus de 600 millions de dollars.

D’autres sources de financement fédéral de la recherche dans les domaines de la santé mentale, de la maladie mentale et de la toxicomanie pourraient comprendre Statistique Canada, la Stratégie canadienne antidrogue (qui finance le Centre canadien de lutte contre l’alcoolisme et les toxicomanies), Santé Canada, Services correctionnels Canada (Centre de recherche en toxicomanie), et la Fondation canadienne de la recherche sur les services de santé. Le Comité n’a pas obtenu d’information sur l’ampleur du financement fourni par ces sources.

10.2.2   Combien le gouvernement fédéral devrait-il dépenser?

Plusieurs témoins jugeaient insuffisant le pourcentage du financement de la recherche accordé à la santé mentale, la maladie mentale et la toxicomanie.

Dans leur rapport, les Drs Kapur et Vaccarino font remarquer qu’il n’existe pas de lignes directrices au Canada (ni ailleurs, à vrai dire) sur ce que devrait être l’enveloppe totale de la recherche sur la santé ni de quelle façon le financement de cette recherche devrait être réparti entre les domaines et disciplines. En l’absence de tels repères, ils proposent deux approches : on peut considérer le financement en fonction du fardeau relatif de la maladie, et on peut examiner également le mode de financement d’autres pays aux prises avec les mêmes problèmes.[495]

Comme nous l’avons vu aux chapitres 5 et 6, la prévalence de la maladie mentale et de la toxicomanie au Canada est élevée et le fardeau économique est énorme. On compte presque autant de Canadiens aux prises avec la dépression que de Canadiens ayant une maladie cardiovasculaire. De nombreux témoins ont fait valoir que les effets de la maladie mentale et de la toxicomanie sur la société sont aussi importants que ceux de n’importe quelle autre catégorie de maladies ou de troubles et que ce fardeau devrait se refléter directement dans le financement de la recherche sur la santé mentale, la maladie mentale et la toxicomanie.

Une étude de la Société canadienne de l’autisme a classé 14 maladies en fonction de leur taux de prévalence et des subventions de recherche des IRSC par personne affectée. Le sida, qui frappe 1 Canadien sur 500, est l’un des secteurs de recherche les mieux subventionnés, car il reçoit des IRSC plus de 1 500 $ par personne affectée. Les troubles d’hyperactivité avec déficit de l’attention (THADA), qui affectent 1 Canadien sur 17, arrivent bons derniers avec 0,09 $ par personne affectée. La schizophrénie, probablement la maladie mentale la plus débilitante qui soit, arrive au 7e rang; elle affecte 1 Canadien sur 100 et obtient des IRSC environ 84 $ par personne touchée. L’autisme, avec un taux de prévalence de 1 sur 200, arrive au 8e et le financement des IRSC représente s’établit à 67,10 $ par patient/client.[496]

Dans une lettre au Comité, le Dr Alan Bernstein, président des IRSC, estime que, si le financement était proportionnel au fardeau que représente la maladie, les IRSC devraient consacrer au moins 80 millions de dollars par année à la recherche sur les maladies mentales et la toxicomanie. À cette aune, force est de constater que les dépenses actuelles des IRSC d’environ 33 millions de dollars sont très faibles. Le Dr Bernstein a néanmoins soutenu que la recherche dans les domaines de la santé mentale, de la maladie mentale et de la toxicomanie obtient un pourcentage approprié du budget des IRSC,[497] étant donné qu’il faut tenir compte de nombreux facteurs, notamment de la capacité des chercheurs d’utiliser de manière optimale les subventions de recherche.

La deuxième approche proposée par les Drs Kapur et Vaccarino consiste à comparer le rendement du financement fédéral de la recherche en santé mentale, en maladie mentale et en toxicomanie avec celui d’autres pays industrialisés. Les National Institutes of Health aux États-Unis fonctionnent un peu comme les IRSC, c’est-à-dire par l’entremise de quelques instituts. Les instituts pertinents à la comparaison sont le National Institute of Mental Health (NIMH), le National Institute of Drug Abuse (NIDA) et le National Institute on Alcohol Abuse and Alcoholism (NIAAA). En 2003, le budget total des NIH s’est élevé à 27 milliards de dollars américains. Sur ce montant, le NIMH a reçu 1,4 milliard, le NIDA, 1 milliard et le NIAA 0,4 milliard. La recherche sur la santé mentale, la maladie mentale et la toxicomanie aux États-Unis a donc obtenu 2,8 milliards de dollars américains, soit un peu plus de 10 p. 100 de l’ensemble des fonds consacrés à la recherche sur la santé… proportionnellement deux fois plus que ce qu’ont versé les IRSC (5,3 p. 100).[498]

Au Royaume-Uni, le principal organisme de financement de la recherche biomédicale est le Medical Research Council (MRC), qui subventionne six domaines de recherche : les études sur les personnes et la population, notamment les services de santé et la santé de la population; la génétique, la structure moléculaire et la dynamique; la biologie cellulaire, le développement et la croissance; la physiologie médicale et les processus de la maladie; l’immunologie et les infections; et les neurosciences et la santé mentale. Les données les plus récentes indiquent que, sur le budget total de 292,6 millions de livres du MRC en 2001-2002, quelque 74 millions de livres ont été affectés à la recherche en neurosciences et en santé mentale et 18,9 millions de livres à la recherche sur les maladies mentales. Ces montants représentent 6,5 p. 100 des montants affectés à la recherche biomédicale.[499]

À en juger par ces renseignements, quelques chercheurs dans le domaine ont soutenu que l’investissement du Canada est insuffisant.

Quels critères devraient déterminer le pourcentage des fonds de recherche accordés à une maladie donnée? Simplement la prévalence, la morbidité et la mortalité, l’incapacité ou le fardeau économique découlant de la maladie? Le financement devrait-il être déterminé en fonction d’une analyse comparative internationale? Par concours, en fonction du mérite de la recherche et de ses résultats possibles parmi toutes les demandes reçues par l’organisme de financement concerné? En tenant compte d’une certaine combinaison de ces critères?

Le Dr Bernstein a déclaré que le fait de strictement allouer les dépenses de recherche en fonction du fardeau que représente la maladie pour la société canadienne reviendrait à poser en hypothèse que les recherches effectuées dans un domaine n’ont pas de retombées sur les autres au niveau des concepts, des réactifs, des techniques et des résultats. Il a expliqué que les progrès les plus importants réalisés au sujet d’une maladie donnée ont leur origine dans des recherches dans un domaine tout à fait différent. Il ne conviendrait donc pas d’allouer les dépenses de recherche uniquement en fonction de la prévalence ou du fardeau de la maladie.[500] Le Dr Bernstein a donné deux exemples :

Les IRSC financent plusieurs équipes, à Vancouver, à Toronto et à Québec, qui cherchent à identifier les gènes responsables des maladies affectives bipolaires et de la schizophrénie. La science et la technologie qui permettent de le faire sont issues de travaux de bien plus vaste portée visant à cloner les gènes responsables de n’importe quelle maladie de l’homme. Il est raisonnable d’affirmer que l’identification des gènes responsables des maladies affectives bipolaires constituera la plus importante découverte de l’histoire de la recherche sur la schizophrénie et qu’elle va transformer le diagnostic, le traitement et peut-être même la prévention de la maladie. Pourtant, la recherche fondamentale qui est la condition préalable à ces recherches n’avait à l’origine absolument aucun rapport avec la maladie mentale voire avec la maladie chez l’homme.

Les instituts du vieillissement, de la génétique et de la santé publique et de la population préparent une importante initiative, l’Initiative sur la santé des Canadiens à tous les stades de la vie (ISCSV) – qui suivra des cohortes de nouveau-nés et de personnes âgées et mesurera les déterminants génétiques, psychosociaux, économiques, environnementaux et culturels de la santé et de la maladie. Cette initiative, qui exigera un investissement de plus de 100 millions de dollars sur 20 à 30 ans, permettra de cerner les multiples déterminants du vieillissement sain et de la maladie, en particulier pour des maladies courantes et complexes comme les maladies mentales. Dans quelle catégorie classer nos investissements dans cette initiative – santé mentale, maladies cardiovasculaires, arthrite, vieillissement sain, ou toutes les catégories précitées?[501]

Fixer le montant du financement de la recherche en fonction de comparaisons internationales comporte aussi des inconvénients. Premièrement, il faudrait examiner un grand nombre de pays avant d’effectuer une telle comparaison; deuxièmement, les données devraient être vraiment comparables; et troisièmement, les capacités de recherche des pays en cause devraient elles aussi être vraiment comparables.

10.3      AUTRES SOURCES CANADIENNES DE FINANCEMENT

10.3.1   L’industrie pharmaceutique

L’industrie pharmaceutique est la plus importante source de financement de la recherche sur la santé au Canada. En 2002, elle a investi 1,4 milliard de dollars dans la recherche-développement sur la santé, soit environ 36 p. 100 de toute la recherche sur la santé effectuée au pays.[502]

Nous ne savons pas quelle proportion du financement de la recherche par l’industrie pharmaceutique canadienne est consacrée à la maladie mentale et à la toxicomanie. Mais plus d’une centaine d’agents pharmaceutiques potentiels pour divers troubles mentaux sont actuellement à l’étape des essais cliniques humains ou en attente d’homologation.

Ces investissements de l’industrie pharmaceutique sont effectués dans la recherche en laboratoire (à l’interne, dans les universités et les instituts de recherche), afin de découvrir de nouvelles molécules, et dans les essais cliniques, afin de mesurer l’efficacité et les effets secondaires de nouveaux agents sur les personnes atteintes de maladie mentale ou de toxicomanie. Les essais cliniques pour cette catégorie de patients soulèvent de nombreux problèmes éthiques analysés au chapitre 11.

De plus, les sociétés pharmaceutiques appuient la formation et la recherche dans les domaines de la maladie mentale et de la toxicomanie, par l’entremise des Initiatives stratégiques en partenariat avec l’industrie des IRSC. Des exemples récents d’initiatives de ce genre, alliant les IRSC et l’industrie, comprennent le Programme de subventions de fonctionnement sur les mécanismes biologiques et le traitement de la maladie d’Alzheimer, le Programme de neurobiologie des troubles psychiatriques et des toxicomanies (tous les deux en partenariat avec AztraZeneca) et l’Initiative sur la santé vasculaire et la démence (avec Pfizer).

La recherche pharmaceutique a exercé et continue d’exercer une grande influence sur la prestation des soins de santé aux personnes atteintes de troubles mentaux. Par exemple, au chapitre 7, nous avons vu que la découverte d’agents neuroleptiques dans les années 70 a rendu possible la désinstitutionnalisation sans danger de nombreuses personnes atteintes de maladie mentale. Plus récemment, de nouveaux médicaments pour traiter la schizophrénie et la dépression ont contribué à réduire les coûts de traitement de ces troubles; on estime que ces coûts ont baissé de plus de 15 p. 100 entre 1992 et 1999 en grande partie parce que de nouveaux médicaments thérapeutiques rendent l’hospitalisation inutile.[503]

L’industrie pharmaceutique canadienne poursuit des recherches importantes. Des agents sont actuellement mis à l’essai sous certaines conditions comme la toxicomanie (par exemple, un vaccin thérapeutique pour traiter les cocaïnomanes), ainsi que l’alcoolisme et le tabagisme.[504] La recherche sur de nouveaux antidépresseurs antipsychotiques devrait également améliorer de beaucoup le traitement de ces conditions.[505]

À l’heure actuelle, les sociétés pharmaceutiques canadiennes les plus actives dans les domaines de la maladie mentale et de la toxicomanie sont Wyeth, Lilly, Glaxo-Smith-Kline (GSK) et Lundbeck. Lilly et GSK, ainsi que Pfizer, continueront de jouer un rôle de premier plan dans la recherche sur la maladie mentale et la toxicomanie au Canada, étant donné qu’elles ont une longue liste de médicaments éventuels dans ce domaine et qu,elles investiront probablement massivement dans de futurs essais cliniques.

10.3.2   Les organismes de financement provinciaux et ONG

On recense de nombreuses autres sources de financement de la recherche dans les domaines de la santé mentale, de la maladie mentale et de la toxicomanie. Dans la plupart des provinces, des organismes gouvernementaux effectuent des recherches sur la santé mentale et la toxicomanie (p. ex. le Réseau santé mentale du Québec; la Fondation ontarienne de la santé mentale, l’Alberta Mental Health Board; le Conseil manitobain de la recherche en matière de santé, le Centre de toxicomanie et de santé mentale (Toronto), etc.).

Il existe aussi de nombreux organismes de bienfaisance et fondations (ONG) dans le domaine de la santé qui répondent efficacement aux besoins de divers groupes et individus. Ainsi, le Comité a entendu parler de l’excellente relation de travail qui existe entre la Société canadienne de schizophrénie (SCS) et les IRSC. L’an dernier, la SCS a pu fournir 75 000 $ de fonds de contrepartie affectés à la recherche.

En revanche, le Comité a également appris que les ONG sont rarement capables d’attirer les fonds nécessaires pour parrainer la recherche. De plus, il n’existe que deux organisations nationales sans but lucratif dont le mandat consiste expressément à trouver du financement et à parrainer la recherche sur la santé mentale et la toxicomanie : la Fondation canadienne de la recherche en psychiatrie et NeuroScience Canada. La Fondation canadienne de la recherche en psychiatrie a déclaré au Comité que le caractère honteux de la maladie mentale et de la toxicomanie nuit grandement à une meilleure connaissance de ces troubles, à l’obtention de commandites d’entreprises et de financement pour la recherche. Cette situation contraste avec celles d’autres groupes de maladie comme le cancer et les maladies cardiovasculaires dont les organismes de bienfaisance respectifs sont solides et obtiennent de bons résultats dans leurs campagnes de financement et dans leur appui à la recherche :

La Fondation relève un défi de taille en cherchant à sensibiliser la population au problème des maladies mentales et à recueillir des fonds de recherche pour trouver les causes de diverses maladies mentales, leurs traitements et finalement, leurs remèdes. Malheureusement, le caractère honteux de la maladie mentale persiste. Par conséquent, des millions de personnes souffrent en silence d’un désespoir inimaginable, craignant que la révélation de leur maladie n’entraîne des conséquences néfastes sur le plan personnel. Dans ces conditions, on ne prend guère conscience des maladies mentales, on les comprend mal, les mécanismes de soutien sont peu nombreux, les fausses conceptions sont répandues et le financement essentiel à la recherche est dangereusement bas.[506]

Les organisations bénévoles continuent cependant de jouer un rôle important dans la recherche sur la santé mentale, la maladie mentale et la toxicomanie au Canada, rôle qui doit être reconnu et élargi. Le Dr Quirion a indiqué au Comité que lorsque l’INSMT a été créé, il s’est associé à une soixantaine d’organisations bénévoles et non gouvernementales. Ces groupes ont participé à l’élaboration du plan stratégique de l’Institut ainsi qu’à l’élaboration d’une stratégie pour aller chercher plus de financement.[507]

Le Dr Gray, de la SCS, a également fait valoir que les ONG doivent participer au processus de recherche. Par exemple, elles peuvent parfois participer à la création des questions de recherche, et leurs représentants peuvent siéger aux comités d’examen. Il a expliqué que, de cette façon, les scientifiques sont mieux à même de faire les recherches les plus pressantes en santé mentale et en toxicomanie. Leur participation renforce également l’aspect humain de la science et rappelle sans cesse les bienfaits de la recherche.[508]

Le financement de la recherche sur la santé mentale, la maladie mentale et la toxicomanie soulève une grande préoccupation : il n’existe actuellement pas de base de données centrale sur toutes les sources de financement. Les gouvernements et les organisations non gouvernementales ne tiennent pas de statistiques sur les sujets d’enquête. La Fondation canadienne de la recherche en psychiatrie a fait observer qu’il n’y a pas de coordination entre les organismes de financement de la recherche et aucune responsabilité centrale pour la collecte de données. Les chercheurs ont donc du mal à naviguer non seulement à travers les sources de financement fédérales, mais aussi à travers les sources des secteurs privé et bénévole. Souvent, les chercheurs ne savent pas que des questions de recherche semblables sont étudiées dans différents laboratoires du pays. Dans bien des cas, la possibilité de collaborer améliorerait la productivité et atténuerait les conséquences négatives de la concurrence entre les universités et les hôpitaux. La Fondation a recommandé l’établissement d’une base de données centrale sur les organismes de financement de la recherche, qui inclurait les sources de financement non gouvernementales, la création d’un répertoire des recherches en cours et d’un registre des résultats de la recherche.[509]

10.4      APPLICATION DES CONNAISSANCES

Dans le domaine de l’application dans la vie courante des acquis de recherche […] il faut probablement oser enfreindre un tout petit peu la liberté d’autonomie des professions médicales et enseignantes dans ce domaine.

[Dr Laurent Mottron, professeur, Département de psychiatrie, Université de Montréal (14:21)]

Dans leur étude, les Drs Kapur et Vaccarino font observer au Comité que le principal incitatif de la recherche médicale dans notre société, c’est la promesse d’un sort meilleur pour les malades, leur famille et leur milieu [510] Cela implique que les découvertes sont transposées du laboratoire au milieu dans lequel les soins sont dispensés, processus qu’on appelle aussi « l’application des connaissances ».

Bien que l’application des connaissances relève du mandat des IRSC, de nombreux témoins ont indiqué qu’elle ne se fait pas bien dans la recherche sur la santé mentale et la toxicomanie. La recherche biomédicale, qui a établi que la maladie mentale et la toxicomanie sont des désordres du cerveau, a offert des pistes prometteuses en génétique, élucidé le rôle d’une vaste gamme de facteurs de risque, retenu les meilleures pratiques dans un grand nombre de nouveaux systèmes et confirmé beaucoup de traitements pharmacologiques. Mais beaucoup croient que, trop souvent, ces découvertes restent dissimulées dans les laboratoires et n’ont guère d’impact sur les malades et leur famille.[511]

Cette situation a été mise en évidence dans le rapport de 1999 du directeur du Service de santé publique des États-Unis intitulé Mental Health: A Report of the Surgeon General. Ce document de 500 pages, premier rapport que le directeur du Service de santé publique des États-Unis consacrait à la santé mentale, a confirmé que la recherche a permis d’acquérir les connaissances nécessaires pour offrir un traitement efficace et de meilleurs services pour la plupart des troubles mentaux. Mais il affirme également qu’il existe des lacunes entre les traitements dont l’efficacité optimale a été démontrée par la recherche et ceux que reçoivent en pratique de nombreux patients.[512]

Dans la même veine, la New Freedom Commission on Mental Health, commission du Président des États-Unis présidée par Michael F. Hogan, a signalé en 2003 les longs délais qui s’écoulent avant que la recherche ne soit appliquée dans la pratique. Plus précisément, la Commission a souligné que le délai de 15 à 20 ans entre la découverte d’un traitement efficace et son intégration dans les soins courants aux patients est beaucoup trop long. Elle a également indiqué que, même lorsque l’application de ces découvertes devient monnaie courante au niveau communautaire, les méthodes cliniques sont très variables dans la réalité et souvent incompatibles avec le modèle de traitement d’origine dont l’efficacité a été démontrée.[513]

Le transfert d’une nouvelle idée ou d’une découverte vers une pratique acceptée comporte trois étapes distinctes. La première est la découverte fondamentale : nouvelle association génétique, nouveau traitement, nouvelle façon d’engager les patients dans la thérapie, nouvelle façon d’utiliser un vieux médicament. L’étape suivante est la validation du principe, autrement dit, la transposition de la découverte en soins et la démonstration qu’elle est efficace dans un cadre contrôlé. C’est l’étape des essais cliniques. La troisième étape, celle de la dissémination et de l’application, consiste à faire passer la nouvelle pratique dans le milieu et l’intégrer dans le continuum préexistant des soins.[514] Eric Latimer, économiste de la santé à l’hôpital Douglas (Montréal), a déclaré au Comité que la recherche sur la maladie mentale et la toxicomanie a permis de nombreuses découvertes en regard de l’ampleur du financement et des chercheurs en cause, mais que les deux autres étapes demeurent problématiques et exigent des investissements accrus.[515]

Des essais cliniques s’imposent pour démontrer l’efficacité des découvertes fondamentales et la réalisation de ces essais nécessite des chercheurs-cliniciens bien formés et chevronnés. Certains témoins ont souligné que le trop peu de médecins participent à la recherche et qu’une lacune importante du programme de recherche tient au fait que trop peu de chercheurs-cliniciens sont formés pour réalisés des essais cliniques cruciaux. La principale priorité du plan stratégique de l’INSMT’s pour 2001-2005 consiste notamment à créer plus de possibilités de formation pour les chercheurs-cliniciens.

L’étape de la dissémination et de l’application des connaissances consiste à diffuser au sein de la collectivité les nouvelles idées ou pratiques validées. Comme nous l’avons déjà indiqué, l’une des priorités stratégiques de l’INSMT consiste à promouvoir les liens et les échanges entre les chercheurs et les décideurs municipaux, provinciaux et nationaux ainsi que les utilisateurs des résultats de la recherche, notamment les ONG, par l’entremise de programmes structurés d’application des connaissances. Même si les témoins ont convenu qu’il s’agit d’un objectif non seulement louable mais aussi nécessaire, ils estiment que cet objectif est impossible à atteindre avec le niveau de financement actuel. Dans son témoignage, le professeur Tousignant nous a indiqué que les budgets de recherche devraient réserver une part à la vulgarisation scientifique.[516]

Le Comité a appris que l’application des connaissances et la recherche clinique seront deux des principales priorités des IRSC dans les années qui viennent. Nous appuyons fortement cette politique.

10.5      VERS UN PROGRAMME NATIONAL DE RECHERCHE POUR LA SANTÉ MENTALE, LA MALADIE MENTALE ET LA TOXICOMANIE

La santé mentale et la maladie mentale sont de la plus haute importance, et le programme national devrait inclure la recherche de pointe.

[Dr Rémi Quirion (14:34)]

Le Comité a appris que, dans les domaines de la santé mentale, de la maladie mentale et de la toxicomanie, il n’y a pas de politique ni de stratégie cohérente pour résoudre les problèmes complexes qui se posent et réagir de manière cohérente et coordonnée. Les troubles mentaux sont généralement des maladies complexes et chroniques. Leurs déterminants chevauchent de nombreux secteurs, leur gestion exige l’intervention de différents professionnels de la santé et ils ont une grande incidence sur le fonctionnement de la société. Les témoins ont souligné la nécessité d’une meilleure coordination des efforts, afin de mieux faire face aux nombreux défis face à la maladie mentale et la toxicomanie, présentement relevés par le gouvernement fédéral et provinciaux ainsi que les organisations non gouvernementales et l’industrie pharmaceutique. Les Drs Kapur et Vaccarino ont déclaré :

[…] Les problèmes de la maladie mentale et de la toxicomanie résistent aux solutions simples. Ces maladies ont de multiples déterminants, d’ordre biologique, psychologique et social, et une réponse acceptable exige la coordination de multiples secteurs. À l’heure actuelle, la recherche dans ces domaines est bien intentionnée mais dépourvue de coordination. Nous réclamons vigoureusement une politique ou un cadre directeur national pour jeter les bases d’un effort coordonné en recherche sur la maladie mentale et la toxicomanie.[517]

Les témoins qui ont abordé des questions liées à la recherche sur la santé mentale et la toxicomanie s’entendaient sur la nécessité d’un programme de recherche national. Selon eux, un tel programme ferait fond sur le savoir-faire canadien actuel, coordonnerait les activités de recherche actuellement fragmentées que mènent divers acteurs (gouvernements, organisations non gouvernementales, sociétés pharmaceutiques) et assurerait un équilibre entre la recherche biomédicale, clinique, sur les services de santé et sur la santé de la population appliquée à la santé mentale, à la maladie mentale et à la toxicomanie. Mais surtout, de nombreux témoins ont insisté sur le fait qu’il faut s’attaquer maintenant aux problèmes cruciaux qui touchent à la recherche sur la santé mentale et la toxicomanie. Le Dr Quirion a été très éloquent à ce sujet :

En anglais, on dit souvent: «The time is now.» On a vraiment beaucoup d’expertise au Canada grâce au système de santé national. Cela permet de recueillir des données et d’avoir des banques de données beaucoup plus impressionnantes que celles des États-Unis. Je pense, par exemple, aux nouvelles recherches sur le génome.

Je pense qu’on pourrait avoir un impact énorme et on ne devrait pas avoir peur de foncer. Si on fonce avec l’expertise qu’on a présentement, on va réussir à trouver des causes des maladies du cerveau, des maladies mentales.[518]

10.6      OBSERVATIONS DU COMITÉ

Le Comité reconnaît qu’au cours des dernières décennies, la recherche dans les domaines de la santé mentale, de la maladie mentale et de la toxicomanie a permis de mieux comprendre comment améliorer le sort des personnes atteintes de maladie mentale ou de toxicomanie. De nouveaux traitements permettent de soigner les malades dans la collectivité, sans qu’il faille les confiner pendant de longues périodes dans des institutions publiques. On comprend mieux également la pathophysiologie des troubles mentaux, ce qui a d’importantes implications pour le traitement et la prévention. Le Comité croit également que la recherche dans les domaines de la santé mentale, de la maladie mentale et de la toxicomanie peut jouer un rôle important pour éclairer les décisions stratégiques relatives à l’affectation des ressources aux traitements, aux services et moyens de soutien dont ont besoin les personnes atteintes de maladie mentale ou de toxicomanie.

Le Comité reconnaît aussi la grande contribution des chercheurs canadiens dans les domaines de la maladie mentale et de la toxicomanie. Le Canada est un chef de file national et international dans de nombreux domaines de recherche, notamment en neurosciences, en psychopharmacologie et en génétique. Il est essentiel de préserver et d’accentuer cette puissance historique.

Le Comité reconnaît le rôle du gouvernement fédéral dans la création des IRSC et la décision de créer l’INSMT. Nous nous réjouissons également de l’accroissement du financement fédéral accordé aux IRSC ces dernières années. Nous tenons tout particulièrement à souligner l’importante contribution du Dr Rémi Quirion, directeur scientifique de l’INSMT, dans la promotion et l’exécution de travaux de recherche sur la santé mentale, la maladie mentale et la toxicomanie.

Le Comité est d’avis que la recherche est très importante, qu’elle constitue un bon moyen de trouver des solutions fondamentales au problème de la maladie mentale et de la toxicomanie au Canada et qu’il faut accorder des ressources suffisantes pour progresser dans cette voie. Nous croyons que le gouvernement fédéral devrait financer davantage la recherche sur la santé mentale et la toxicomanie, y compris la formation d’un plus grand nombre de chercheurs et de chercheurs-cliniciens afin de renforcer la capacité du Canada de mener des recherches de haute qualité dans ce domaine. De même, les organisations bénévoles devraient être encouragés à développer ou renforcer leurs activités de levée de fonds afin d’accroître, elles aussi, le financement de la recherche.


CHAPITRE 11:
LA QUESTION DE L’ÉTHIQUE

INTRODUCTION

L’« éthique » désigne habituellement une tentative systématique et raisonnée de comprendre les valeurs et les principes qui sous-tendent les décisions sur des ques­tions d’importance humaine fonda­mentale. Bref, l’éthique vise à déterminer ce qui est juste et bon.

Dans beaucoup de domaines, les décisions difficiles nécessitent l’examen de multiples facteurs, mettant chacun en cause des valeurs, des principes, des points de vue, des convictions, des attentes, des craintes, des espoirs, etc., différents et souvent contradictoires. Face à de telles décisions, différentes personnes vont aboutir à différentes conclusions non seulement parce qu’elles considèrent des facteurs différents, mais aussi parce qu’elles les jugent les uns par rapport aux autres de façons différentes. L’effet pratique de l’éthique, comme discipline, est d’aider ceux qui doivent affronter des décisions complexes à en saisir les valeurs et les principes inhérents et à les peser les uns par rapport aux autres afin d’aboutir à la meilleure décision possible.[519]

Dans le contexte de la santé et des soins de santé – que ce soit dans la pratique, l’exécution ou la recherche – le but ultime de l’éthique consiste à améliorer la santé et la qualité de vie. Dans une étude commandée par le Comité, Gordon DuVal et Francis Rolleston indiquent les valeurs éthiques et principes bien ancrés qui sous-tendent ce but :

·        bienfaisance et non-malfaisance – offrir des services en respectant les normes établies pour des soins de qualité et dans le meilleur intérêt du patient, et ne pas causer de tort à ce dernier;

·        autonomie – respecter le patient en tant que personne et l’encourager dans son autodétermination et ses choix, et protéger les renseignements de nature délicate;

·        justice – faire en sorte que les patients et les sujets de recherche soient traités équitablement et que les ressources médicales soient réparties en toute équité.[520]

Les autres valeurs importantes mentionnées par DuVal et Rolleston comprennent les éléments familiers du comportement vertueux comme : la compassion, l’honnêteté, les promesses tenues, le courage moral, la patience, la tolérance, la protection de la dignité et la responsabilité, sans parler des valeurs communautaires et relationnelles.[521] Ces aspects moraux fondamentaux se traduisent largement dans les codes d’éthique des professions et des institutions ainsi que dans le droit. Collectivement, ces principes et valeurs guident les décisions relatives aux programmes et à la prestation de soins de santé, aux soins cliniques et à la recherche connexe.

Le présent chapitre examine diverses questions éthiques portant plus précisément sur la maladie mentale et la toxicomanie. La section 11.1 analyse les questions éthiques relatives aux services et aux moyens de soutien offerts aux personnes atteintes de maladie mentale. La section 11.2 traite de la capacité de consentir au traitement. La section 11.3 porte sur la protection des renseignements personnels et la confidentialité. La section 11.4 examine les questions éthiques relatives à des groupes particuliers – enfants et adolescents, personnes âgées et patients de médecine légale. La section 11.5 traite des répercussions des progrès en génétique et en neurosciences sur l’éthique. La section 11.6 examine les questions éthiques soulevées par la recherche sur la santé mentale et la toxicomanie. La section 11.7 présente quelques commentaires du Comité.

La stigmatisation sociale qui pèse sur les personnes atteintes de maladie mentale ou de toxicomanie et leur famille est au cœur d’un grand nombre des questions et préoccupations éthiques abordées dans le présent chapitre. En soi, la stigmatisation mène directement à un manque relatif de compassion et à une perte de la dignité et du respect auxquels toutes les personnes ont droit. En bout de ligne, elle est à la source même de l’injustice, de l’absence de bienfaisance et de l’inégalité d’accès aux services et aux soins.

 

 

11.1       ACCÈS AUX SERVICES ET AUX MOYENS DE SOUTIENS

D’après DuVal et Rolleston, le problème éthique associé aux services et aux moyens de soutien tient à ce que « la société n’a pas pris de moyens concrets pour protéger, dans le cas des personnes souffrant de maladies mentales, le droit à la justice et à la bienfaisance, tant dans le système de soins de santé public du Canada qu’ailleurs ».[522] Premièrement, la complexité de la santé mentale ajoute beaucoup à la difficulté de la société d’offrir les soins nécessaires pour traiter la maladie mentale aussi bien que les autres types de maladie. Deuxièmement, en plus des divers professionnels de la santé, beaucoup de professionnels participent à la pose du diagnostic, aux traitements et aux soins continus en cas de troubles mentaux. Ainsi, les enseignants, les responsables de l’application de la loi, le clergé et les travailleurs sociaux ont ici un rôle à jouer beaucoup plus grand qu’à l’égard des autres maladies. En l’absence d’un système de santé bien coordonné, les personnes atteintes de maladie mentale ou de toxicomanie et leurs familles ont plus de mal que la plupart des autres citoyens à avoir accès à des soins de santé adéquats, ce qui entraîne une sorte de discrimination systémique.

Dans leur étude, DuVal et Rolleston soutiennent que la piètre qualité relative des traitements des maladies mentales ne vient pas tant du fait que le public ou les systèmes veulent discriminer ceux qui en souffrent, mais des facteurs directement liés à la nature des troubles mentaux. La maladie mentale et la toxicomanie se manifestent souvent par des comportements plutôt que par des symptômes physiques, contrairement à presque tous les autres types de maladie. Les comportements attribuables à des troubles mentaux engendrent de la peur et de l’incompréhension chez beaucoup de personnes. Ces comportements donnent souvent lieu à des problèmes avec les autorités réglementaires, par exemple, ou à des problèmes scolaires, et c’est ce qui détermine où s’effectuera la première intervention.[523]

Bien que rien ne justifie l’adoption de normes différentes relatives à l’accès, à la qualité des soins ou à l’établissement de priorités pour traiter les maladies mentales ou la toxicomanie par rapport aux autres maladies physiques, la réalité semble différente. Cette distinction est particulièrement problématique dans les situations de crise, où il faut prodiguer des soins opportuns et efficaces. Le Dr James Millar, directeur exécutif des Mental Health and Physician Services au ministère de la Santé de la Nouvelle-Écosse, a déclaré au Comité :

 

[Nous devons] accorder la même importance à la santé mentale que celle que la société accorde à la santé physique. Il est inacceptable pour les personnes qui ressentent une douleur à la poitrine d’attendre qu’on en détermine la cause. S’il s’agit d’une maladie cardiaque, le patient veut être soigné immédiatement. Malheureusement, les personnes qui souffrent émotionnellement n’ont pas les mêmes exigences. En général, elles attendent pour demander de l’aide, elles attendent encore plus pour rencontrer un professionnel de la santé, elles sont traitées selon des méthodes dépassées et inappropriées et elles continuent de souffrir beaucoup plus longtemps que nécessaire.[524]

Carlyn Mackey, Aurise Kondziela et Dorothy Weldon, du Christ the King Family Support Group, ont écrit au Comité que les normes éthiques de la médecine conventionnelle ne sont pas appliquées de manière uniforme dans la prestation de soins de santé mentale :

Les normes éthiques régissant le traitement de la maladie mentale ne semblent pas être conformes à celles auxquelles est assujettie la médecine conventionnelle. Sur le plan de l’éthique, il faut remettre en cause le fait que nous tolérons un système de soins de santé mentale dysfonctionnel ou un système pouvant même être taxé de non-système. Il faudrait donc que tous les ordres de gouvernement s’attaquent aux problèmes d’ordre éthique découlant de la discrimination persistante et délibérée contre le malade mental, afin de pouvoir lui offrir des soins de santé sûrs et opportuns.[525]

Les services et soutiens aux personnes atteintes de maladie mentale posent une autre difficulté, car ils font intervenir un grand nombre de professions et de secteurs de compétence. DuVal et Rolleston ont donné l’exemple de l’enseignant qui est le premier à attirer l’attention de la famille sur la possibilité que le trouble d’hyperactivité avec déficit de l’attention (THDA) soit la cause des difficultés scolaires de l’enfant. Dans les cas d’indiscipline, le système scolaire cherche à protéger les autres élèves. Des mesures disciplinaires, une suspension ou l’expulsion accentuent la tendance à l’ostracisme et à la stigmatisation. Le maintien dans le système scolaire exige des classes spéciales ou une aide à l’enseignement particulière pour réduire au minimum l’impact sur les autres élèves. Si la maladie mentale donne lieu à de la violence, des agents des forces de l’ordre peuvent intervenir. Les membres du clergé peuvent être les premières personnes contactées par des gens qui se sentent possédés par des forces extérieures. Comme il est si important que la personne atteinte de maladie mentale admette son état afin de pouvoir le gérer, enseignants, agents des forces de l’ordre, membres du clergé et autres professions parallèles sont souvent les premiers à poser le diagnostic et à entamer le traitement des personnes atteintes de maladie mentale.[526]

De multiples obstacles découlant de la répartition des champs de compétence entre le régime de santé mentale et le régime des services sociaux empêchent cependant un bon traitement. Par exemple, le Dr Robert Quilty, psychologue agréé travaillant au Durham County School Board, a informé le Comité de l’existence d’une sorte de « flou diagnostique » qui empêche de bien diagnostiquer et, par conséquent, de bien traiter les maladies mentales d’enfants ayant des troubles de développement, de sorte, par exemple, que des troubles d’autisme qui auraient pu être traités s’ils avaient été détectés plus tôt passent inaperçus. Le problème est aggravé par les difficultés que posent l’accès d’enfants ayant une débilité mentale aux organismes qui fournissent des services comportementaux au sein des structures de santé mentale, condamnant ainsi leur avenir déjà incertain. Les enfants autistes de haut niveau (syndrome d’Asperger) s’en tirent peut-être un peu mieux. Toutefois, même si leur traitement a été en partie réussi, à l’âge adulte, les patients qui ont un retard de développement et ont besoin d’autres soins de santé mentale sont rarement perçus comme tels parce qu’ils ont déjà été étiquetés comme nécessitant un soutien communautaire. C’est là un autre exemple du manque de coordination dans la prestation des services entre les divers ministères provinciaux.[527]

En conséquence, la prestation des services de santé mentale et de traitement de la toxicomanie se caractérise par une grande fragmentation, ainsi que par un manque de cohésion et de coordination. Pour les personnes atteintes de maladie mentale, le problème de la navigation dans ce réseau complexe de services et de soins est exacerbé par la nature de leur maladie. De nombreuses personnes atteintes de maladie mentale ou de toxicomanie et d’autres experts ont déclaré au Comité que cette absence de cohésion et de coordination a accru la toxicomanie, l’itinérance et les incarcérations.

DuVal et Rolleston ont fait ressortir que la fragmentation du système est apparente, même lorsqu’il est clair que des soins institutionnels s’imposent. Le cas très médiatisé d’une jeune femme d’Ottawa au comportement violent et autodestructeur est très révélateur. L’hôpital pour enfants de l’Est de l’Ontario ne pouvait la prendre en charge parce qu’il n’est pas équipé d’installations pour accueillir de tels patients; l’hôpital Royal Ottawa, qui lui en a, ne pouvait pas l’accueillir parce qu’elle n’est pas assez âgée. Ce cas fait ressortir les graves problèmes éthiques qui découlent de la fragmentation du « système » en vigueur qui régit les soins de longue durée pour les patients dont l’âge et la condition mentale varient.[528]

Le Comité a appris que c’est surtout la famille qui doit dispenser l’essentiel des soins aux proches atteints de maladie mentale, même s’ils ont accès aux centres de soins à domicile ou de soins communautaires parce que les ressources de ces centres sont trop souvent inadéquates ou insuffisantes. Mark Miller, éthicien au St. Paul’s Hospital (Saskatoon), a écrit :

Et je dirais que le plus grand problème d’éthique au‑delà du système de santé proprement dit est le manque fréquent de ressources pour les membres de la famille qui s’occupent d’un proche à la maison ou dans la collectivité. Bien des parents, des enfants et d’autres aidants sont à toutes fins utiles abandonnés à leur sort, ce qui est tout à fait injuste et crée d’autres problèmes de santé chez les personnes aidantes. Le désespoir n’est pas rare dans les familles aux prises avec un membre en difficulté.[529]

11.2      CONSENTEMENT ET CAPACITÉ DE CONSENTEMENT

La société protège le choix individuel – le droit de consentir à un traitement ou de le refuser – en fonction du droit fondamental de l’individu à l’autonomie. Mais pour que le consentement à des services de santé mentale ou de traitement de la toxicomanie soit valable, l’individu doit être mentalement et légalement apte à faire ce choix.

Bien que la capacité de prendre des décisions soit essentielle à un consentement éclairé valable, les critères qui conviennent pour évaluer la compétence prêtent à controverse, surtout dans le cas de personnes atteintes d’une maladie mentale ou de toxicomanie. La capacité de prendre des décisions est liée à la capacité de comprendre les renseignements pertinents concernant le traitement, de bien en saisir la portée et de raisonner de manière à pouvoir peser logiquement les choix qui s’offrent.

L’évaluation de la capacité décisionnelle soulève des questions particulières de vulnérabilité pour les personnes atteintes de troubles mentaux. Les évaluations cliniques de la capacité à prendre des décisions se concentrent essentiellement sur le fonctionnement cognitif. Comme les maladies mentales et la toxicomanie peuvent miner la cognition, les personnes atteintes, particulièrement dans les cas graves, sont souvent incapables de prendre des décisions. Elles peuvent cependant perdre cette faculté de manière intermittente, comme chez les personnes souffrant de toxicomanie, ou encore graduellement, comme chez les personnes qui vieillissent et tombent lentement dans la démence ou dans un autre processus dégénérescent qui affecte la fonction cognitive. Adapter la prestation des services en fonction des fluctuations ou de la perte graduelle de la capacité de décider constitue un défi de taille pour le système de santé mentale et le système de traitement de la toxicomanie. Le respect de la personne exige que les fluctuations ou la diminution des capacités soit dépistée et diagnostiquée et que le système s’adapte en conséquence, afin de ne pas empiéter indûment sur l’autonomie de la personne en cause.

Les fonctions cognitives et non cognitives peuvent aussi être compromises par des troubles mentaux qui perturbent de diverses manières la prise de décisions. Par exemple, la dépression clinique et d’autres états affectifs pathologiques peuvent réduire la capacité de choisir ou de rejeter un traitement, même si la compréhension de l’information pertinente n’est pas altérée. Les définitions usuelles de la capacité ne rendent pas bien compte des déficits non cognitifs, comme le pessimisme face à l’avenir qui peut caractériser la dépression. L’évaluation de la capacité donne des résultats imprécis en présence de sentiments dominants, mais peut-être passagers, de désespoir, d’impulsivité ou d’auto-dévalorisation, par exemple.

Chez les patients atteints de schizophrénie, la nature délirante et paranoïde de la maladie peut aussi compromettre la capacité de prendre des décisions d’une manière qui n’est pas clairement liée à l’absence ou à la perte de la cognition. Chez les individus qui souffrent d’une dépendance, la capacité de prendre des décisions peut être compromise par leur difficulté à maîtriser l’impulsion qui les pousse au comportement associé à la dépendance. Dans le cas de certains troubles de l’alimentation, où l’on observe une distorsion pathologique de l’image corporelle, l’incapacité peut être très restreinte, et le rôle de cette distorsion dans la détermination de la capacité n’est pas clair.

Par conséquent, l’évaluation clinique de la capacité mentale en présence de maladies mentales ou de toxicomanie est une entreprise complexe. La capacité mentale de prendre des décisions peut exister à divers niveaux et à divers degrés et peut fluctuer dans le temps. Or, en droit, après avoir entendu les témoignages d’experts, un juge détermine qu’à un moment donné la capacité légale de prendre des décisions existe ou n’existe pas à des fins précises (la capacité de prendre soin de ses biens ou de sa personne, par exemple). Il n’y a pas de degrés de capacité ou d’incapacité. La révision d’une décision judiciaire d’établir un régime de protection et de désigner un représentant légal chaque fois que l’état mental fluctue peut prendre beaucoup de temps et être lourde. Dans son mémoire au Comité, l’Institut canadien catholique de bioéthique a expliqué :

Le système juridique tend à faire une distinction très nette entre les individus jugés « capables » de prendre des décisions concernant leur propre santé et ceux qui en sont incapables. Beaucoup d’individus atteints de maladies mentales comme la dépression profonde ou la schizophrénie pourraient ne pas répondre aux critères juridiques permettant de les déclarer « incapables » et pourtant, leur capacité de comprendre leur propre état, d’évaluer leurs possibilités, de prendre des décisions judicieuses à propos des soins à recevoir et de s’en tenir à ces décisions peut être gravement compromise. Puisque l’autonomie des patients est un élément prépondérant de l’éthique médicale contemporaine, il est utile d’envisager les difficultés qui surgissent à ce chapitre quand, d’une part, un patient est jugé incapable alors qu’il conserve un certain degré de capacité, et quand, d’autre part, on présume que le patient a conservé cette capacité alors qu’elle est en réalité gravement compromise.[530]

Le Comité a appris que l’Ontario et certaines autres provinces ont légiféré pour établir des ordonnances de traitement en milieu communautaire (OTC). Une OTC est une ordonnance de médecin obtenue avec le consentement de la personne visée, par laquelle celle-ci accepte de recevoir un traitement ou des soins et une supervision en milieu communautaire. Afin de donner son consentement, il faut être légalement capable de consentir au traitement. Si la personne n’est pas légalement apte à donner son consentement et qu’un mandataire a été autorisé, le mandataire doit consentir à l’OTC, même si la personne inapte n’est pas d’accord. Certaines personnes atteintes de maladie mentale ou de toxicomanie craignent toutefois que la législation relative aux OTC n’empiète sur leurs droits. En revanche, certaines familles qui, parce qu’elles n’ont pas accès à des fournisseurs officiels de soins et qu’elles remplacent donc ces derniers, croient que sans cette mesure législative, elles seraient incapables d’aider un être cher.

Les témoins ont expliqué que, même lorsque les membres de la famille et les prestataires de soins souhaitent protéger la santé et le bien-être de personnes vulnérabilisées par leurs capacités réduites, il n’en demeure pas moins important de respecter l’autonomie de ces personnes. Les témoins ont précisé que les familles et les fournisseurs de soins doivent en arriver à un équilibre délicat dans leurs démarches pour aider une personne souffrant d’une maladie mentale tout en respectant son autonomie, même si elle n’est que partielle. La réponse n’est jamais tranchée, mais l’intervention doit être faite en fonction du patient et des particularités de son état.

Bien plus que les individus souffrant d’autres maladies, ceux qui sont atteints de troubles mentaux n’ont pas conscience de l’existence ni de la nature de leur maladie, à cause même de cette maladie. En conséquence, ils ressentent parfois beaucoup de méfiance à l’endroit des intervenants de la santé mentale et ils sont nombreux à refuser les traitements ou à ne pas s’y conformer. Lorsqu’une intervention ou un traitement est clairement indiqué, à quel moment le respect du refus du traitement devient-il l’abandon d’une personne vulnérable qui a besoin d’aide ou de soins?

Il est évident qu’une personne dont la capacité de prendre des décisions est compromise peut refuser le traitement et que ce refus doit être respecté. La situation peut toutefois être très difficile pour les membres de la famille quand un patient ayant besoin de soins mais refusant le traitement satisfait aux normes juridiques de la capacité, malgré une capacité de prendre des décisions compromise.

Un dilemme semblable se pose lorsqu’un patient, qui a besoin de soins et qui est jugé incapable de prendre une décision, résiste à une intervention nécessaire pour traiter un trouble mental. Même si un mandataire peut légalement autoriser le traitement au nom du patient, il peut demeurer difficile d’administrer le traitement lorsque le patient oppose une résistance acharnée. Les seules options possibles peuvent être alors d’administrer le traitement à l’insu du patient (par exemple, en mélangeant les médicaments à la nourriture ou aux boissons), de recourir à la force ou d’y renoncer complètement.

L’administration d’un traitement par la force ou la tromperie, particulièrement à des personnes vulnérables comme celles souffrant de troubles mentaux, soulève d’importantes questions d’éthique pour les professionnels de la santé. Le recours à la force ou à la duperie peut miner considérablement la confiance, ce qui rend encore plus difficile la communication continue, la coopération et les soins. Pourtant, il peut être tout aussi déplacé de ne pas administrer le traitement à un patient qui, à cause de son incapacité, est vulnérable et a vraiment besoin d’être protégé par une personne de confiance. Les patients seront peut-être reconnaissants par la suite pour des traitements administrés contre leur gré au moment où ils étaient incapables de prendre une décision à cet égard ou, au contraire, ils pourront continuer d’éprouver du ressentiment et ne pas rechercher de traitement par la suite si leurs symptômes réapparaissent.

11.3      RENSEIGNEMENTS PERSONNELS ET CONFIDENTIALITÉ

Dans son rapport d’octobre intitulé Recommandations en vue d’une réforme, le Comité a examiné la nécessité de protéger la confidentialité des dossiers de santé électro­niques et leur utilisation dans la recherche. La protection des renseignements personnels inquiète tout au tant, voire davantage, dans le contexte de la santé mentale, de la maladie mentale et de la toxicomanie.


Dans leur étude, DuVal et Rolleston affirment que la protection des renseignements personnels repose en grande partie sur l’hypothèse cruciale voulant que la société dans son ensemble, et toutes les personnes qui la composent, profitent de la sauvegarde du droit inaliénable de chacun de contrôler l’utilisation des renseignements personnels qui le concernent.[531]

De plus, la relation fiduciaire entre le prestataire de soins de santé et le patient repose sur la confiance et sur le principe fondamental de la confidentialité, comme en témoignent la plupart des codes de déontologie des professions. Les témoignages que nous avons entendus nous obligent cependant à nous demander si nos cadres juridiques et politiques actuels en matière de protection des renseignements personnels – qui, en règle générale, servent bien les personnes mentalement compétentes – peuvent aller à l’encontre des intérêts de ceux qui, à cause de la nature et de l’omniprésence d’une maladie mentale ou de la toxicomanie, deviennent partiellement ou entièrement dépendants de multiples fournisseurs de soins tout au long du continuum de soins. M. John Arnett, chef du Département de santé psychologique à la Faculté de médecine de l’Université du Manitoba, a déclaré :

En tant que clinicien, je ne peux passer au bureau à côté pour demander à un collègue, qui a reçu un patient que je vais voir, ce qu’il sait qui pourrait m’aider à mieux évaluer ce patient. L’intention de la loi est noble, il n’y a pas de doute, mais elle impose réellement des limites qui ont un impact négatif sur les soins aux patients. En grande partie, les soins au patient consistent à avoir accès à ses antécédents et à ses renseignements personnels. La loi impose des limites importantes[532]

Les inquiétudes relatives à l’observation stricte des règles en matière de protection des renseignements personnels et de confidentialité s’appliquent également aux familles des personnes atteintes de maladie mentale ou de toxicomanie. Sans la permission du patient, que ce dernier peut être incapable d’accorder en cas de maladie mentale ou de toxicomanie, un médecin ne peut pas communiquer les renseignements personnels le concernant à ses parents, ses frères et sœurs ou ses enfants, qui doivent en prendre soin. Murray, dont le fils schizophrène paranoïde a été tué par un autobus après s’être évadé de l’hôpital, a posé la question :

Pourquoi les médecins ne sont pas autorisés à informer les membres de la famille quand on sait que le soutien de la famille est bénéfique pour le malade? Le malade prend des médicaments parce que son mode de pensée est perturbé et, pourtant, les médecins estiment que c’est à lui de décider d’informer la famille alors qu’il ne peut pas prendre de décision raisonnable ou réfléchie .[533]

Bronwyn Shoush, commissaire, Institut de la santé des Autochtones, Instituts de recherche en santé du Canada, a ajouté :

Je voudrais mettre l’accent sur un domaine du droit qui, à mon avis, a eu un impact négatif sur le domaine de la santé mentale et sur les stigmates en particulier. Je fais référence à la législation relative à la protection de la vie privée. La législation est perçue, du moins par les communautés autochtones, mais aussi d’ailleurs selon moi, comme un désavantage. Elle préconise la confidentialité quand il est question de santé et les gens ont l’impression qu’elle les empêche de discuter des problèmes et de se voir comme des membres normaux de l’humanité. Les intervenants qui pourraient offrir un soutien ne peuvent le faire en temps opportun.[534]

Ces idées ont été reprises dans le mémoire du Christ the King Family Support Group, de Winnipeg, qui a déclaré que « les exigences en matière de confidentialité sont invoquées pour justifier le manque d’information suffisante au prestataire de soins membre de la famille sur la nature et la gravité de la maladie ». Ce groupe a ajouté que l’on refuse de donner aux membres de la famille la moindre information sur les médicaments à prendre, les questions de sécurité et les plans en matière de soins et de traitements, au moment de donner congé de l’hôpital; que les préoccupations exprimées par les membres de la famille sont arbitrairement rejetées et non consignées dans les dossiers des patients; et que les familles ne sont pas suffisamment soutenues dans leur tentative de composer avec les conséquences dévastatrices d’une maladie mentale profonde et prolongée.[535] Il faut souligner cependant qu’en cas de danger clair, grave et imminent, un médecin peut avoir l’obligation prépondérante, en droit, de rompre la confiance de son patient afin de prévenir des tierces parties, dans le but de protéger la sécurité publique.

11.4      POPULATIONS SPÉCIALES

11.4.1    Les enfants et les adolescents

Dans les chapitres 2 et 9, le Comité a traité d’un certain nombre questions relatives à l’accès aux services de santé mentale et soutiens connexes pour les enfants et les adolescents. En plus de ces questions, le traitement de la santé mentale chez les enfants et les adolescents soulève des difficultés particulières d’ordre éthique relativement à leur vulnérabilité, à leur capacité de prendre des décisions et à l’utilisation et la divulgation de renseignements confidentiels.

Quand ils soignent des enfants et des adolescents, les professionnels de la santé mentale doivent être bien conscients de la vulnérabilité accrue de leurs patients en raison de l’âge et de la présence potentielle de troubles mentaux concomitants et d’antécédents de perturbation sociale.  La capacité de consentir aux interventions de traitement et de le faire volontairement, déjà compromise par la maladie mentale, est encore plus difficile à faire pour les jeunes. La participation des parents et d’autres membres de la famille au traitement peut être extrêmement utile, mais les fournisseurs des soins doivent être pleinement conscients de la possibilité de méfiance, de dysfonctionnement familial ou de pressions indues découlant de la culpabilité ou de l’attitude exagérément protectrice des parents à l’égard de l’enfant. Des questions de confidentialité complexes peuvent se poser lorsqu’il faut déterminer si des circonstances particulières justifient la divulgation de renseignements sur le patient aux parents et/ou à d’autres organismes gouvernementaux ou de services sociaux.

11.4.2   Les personnes âgées

Des questions morales spécifiques se posent dans la prestation de services de santé mentale aux personnes âgées. Par exemple, de nombreux patients dans une unité de malades gériatriques n’ont aucune capacité de prendre des décisions et n’ont aucun proche parent ou peuvent être en conflits avec les membres de leur famille. Les malades gériatriques sont parfois sans abris et les membres de leur famille peuvent être difficiles à trouver ou refuser de collaborer ou répugnent pour le moins de jouer un rôle important. On estime que seulement 10 à 20 p. 100 de ces patients bénéficient de la participation active de leur famille et que les autres n’ont aucun proche qui s’intéresse à leur cas. Beaucoup de malades âgés « passent au travers des mailles du filet », en ce sens que l’hôpital général est mal équipé pour s’occuper de personnes souffrant de maladie mentale, tandis que l’hôpital psychiatrique n’a pas toujours les ressources voulues pour dispenser les soins médicaux généraux voulus aux patients. Ainsi, les malades gériatriques souffrant de troubles mentaux sont souvent mal soignés.

Dans un hôpital psychiatrique, il arrive que le personnel interprète mal les symptômes de la douleur manifestés par des patients psychiatriques âgés, tandis que dans un hôpital général, il arrive souvent que les patients âgés qui souffrent de maladie mentale et se plaignent de douleur ne soient pas pris au sérieux. Le manque d’expérience du soulagement de la douleur à l’aide de médicaments opiacés et les inquiétudes que suscite l’interaction entre ces médicaments, les antipsychotiques et d’autres médicaments utilisés en soins psychiatriques peuvent entraîner une mauvaise gestion de la douleur pour ce groupe de patients. Selon certains témoignages, on trouverait dans ce groupe des exemples de patients mal soignés, notamment quant au soulagement de la douleur, et l’on signale aussi des cas de personnes qui, après avoir attendu longtemps, sont renvoyées à l’hôpital psychiatrique, où les soins peuvent être inadéquats.

 À cause de la stigmatisation, les patients et leurs familles ont souvent de la difficulté à obtenir des soins. Parfois, le personnel n’a pas reçu d’instruction claire quant aux soins psychiatriques à donner aux patients qui touchent au terme de leur vie. Souvent, les soignants ne savent pas trop quand ils doivent appliquer un traitement énergique, par opposition à un traitement visant essentiellement à soulager la douleur. Les infirmières psychiatriques ont généralement moins d’expérience dans l’utilisation des analgésiques et des opiacés et hésitent parfois à les utiliser avec assurance.

11.4.3   Les patients de médecine légale

Dans son mémoire, le Centre for Practical Ethics de l’Université York a déclaré :

Beaucoup de détenus sont en prison parce qu’ils souffrent d’instabilité affective ou de troubles mentaux, et une fois incarcérés, ils ne reçoivent pas les traitements voulus à moins de constituer une menace pour les autres ou pour eux-mêmes. En outre, leur état ne peut manquer de se détériorer dans un environnement aussi inapproprié.[536]

DuVal et Rolleston dégagent deux types de dilemmes moraux dans le contexte de la médecine psychiatrique légale.[537] Premièrement, les troubles mentaux, en particulier lorsqu’ils ne sont pas traités, se manifestent parfois par un comportement qui serait autrement considéré criminel. Dans certains cas, les personnes souffrant de troubles mentaux qui sont accusées d’infraction peuvent être jugées inaptes à subir leur procès ou non criminellement responsables, mais il arrive souvent que la police et les tribunaux doivent choisir entre ordonner que les personnes souffrant de troubles mentaux se fassent soigner et les renvoyer vers le système de justice pénale. L’absence d’une formation efficace chez les policiers et les autres agents de l’appareil de justice pénale peut contribuer au mauvais aiguillage de personnes dans cette situation qui sont ainsi privées des ressources de santé mentale dont elles ont besoin. Bien des gens estiment que trop de personnes atteintes de maladie mentale ou de toxicomanie se retrouvent dans nos prisons et nos pénitenciers alors qu’il serait préférable, autant pour eux-mêmes que pour la société dans son ensemble, qu’ils soient soignés plutôt qu’incarcérés.

Le deuxième problème tient au fait que les professionnels de la santé mentale qui pratiquent en médecine légale ont un problème de dédoublement. Qu’il s’agisse d’évaluer une personne accusée d’une infraction, de prodiguer un traitement suivi à une personne dans le cadre d’une commission d’examen provinciale ou de présenter des preuves devant des organismes administratifs ou devant un tribunal, ces professionnels de la santé ont deux types d’obligations distinctes qui entrent parfois en conflit. D’une part, ils doivent s’acquitter des obligations incontestables du fournisseur de soins, fonctions qu’ils doivent remplir dans le meilleur intérêt des patients en évitant de leur faire du tort. D’autre part, ils ont l’obligation envers la société, tout à fait légitime, d’offrir leur avis et leur jugement d’une manière franche et objective devant des tribunaux, des commissions d’examen et d’autres organismes pénaux et administratifs pour se prononcer sur l’état mental, le diagnostic et le pronostic d’une personne qui reçoit leurs soins. Indubitablement, ces conseils et ces témoignages qui priorisent les avantages pour la société ne sont parfois pas dans le meilleur intérêt de leurs patients/clients.

Ces obligations contradictoires peuvent être difficiles à gérer et mettent en cause la relation clinique à plus d’un égard. De plus, même si le fait de donner une opinion d’expert correspond à un rôle social important, la qualité des soins peut en être diminuée si le fournisseur de soins en santé mentale travaillant dans le contexte judiciaire ne peut assurer la confidentialité au patient, ce qui a clairement des conséquences sur la confiance entre les deux. Le spécialiste peut également être obligé d’utiliser, peut-être au détriment du patient, de l’information qu’il a recueillie dans le cadre de sa relation clinique, dans un contexte de poursuite judiciaire ou administrative.

11.5      RÉPERCUSSION DES PROGRÈS DE LA GÉNÉTIQUE ET DES NEUROSCIENCES SUR L’ÉTHIQUE

11.5.1    La génétique et la santé mentale

D’après DuVal et Rolleston, la stigmatisation sociale importante liée à la maladie mentale donne lieu à des inquiétudes particulières en ce qui concerne la confidentialité de l’information génétique et les effets traumatisants que leur divulgation peut produire sur un groupe de la population qui est déjà vulnérable. La recherche génétique et les diagnostics en ce qui concerne les comportements peuvent être particulièrement inquiétants. Les recherches récentes indiquent que la découverte de liens entre des gènes particuliers et des troubles psychiatriques particuliers est peu probable. Il semble plus probable que les composantes génétiques de certains phénotypes sont le fait d’interactions complexes entre des facteurs génétiques et des facteurs environnementaux.[538] Il faut pourtant mettre en place des balises pour protéger les renseignements personnels confidentiels, en particulier ceux qui, par eux-mêmes ou s’ils sont reliés à d’autres renseignements, révèlent ou peuvent révéler un trouble mental ou de comportement.

DuVal et Rolleston ont expliqué que tenter d’informer adéquatement les patients ou leurs représentants en parlant de susceptibilité ou de risque pose des problèmes difficiles aux personnes atteintes de maladies mentales ou souffrant de toxicomanie. Les personnes atteintes, tout comme les personnes en santé, devront faire face à leur propre vulnérabilité à certains troubles. La stigmatisation sociale et les questions de protection de la vie privée compliquent cette problématique, d’autant plus qu’il peut y avoir un décalage entre les bienfaits thérapeutiques et la fiabilité des diagnostics. La génétique de la maladie mentale soulève également des questions difficiles pour les familles et les parents du patient ou du sujet d’une recherche, parce que les profils d’héritabilité sont souvent difficiles à prévoir. Il faut trouver l’équilibre entre le droit de l’individu de ne pas savoir et la nécessité de l’informer d’une prédisposition génétique. La façon de parvenir à cet équilibre dépendra en partie de la probabilité que le trouble se développe, du moment où il pourrait se manifester et des possibilités de prendre des mesures pour prévenir ou réduire les effets d’une future maladie mentale.[539]

Le Comité a également été renseigné sur l’« essentialisme génétique » – l’idée selon laquelle on peut définir ou caractériser les personnes uniquement à partir de leur matériel génétique. Cette idée soulève des préoccupations particulières en ce qui concerne les personnes atteintes de maladie mentale ou souffrant de toxicomanie. Les personnes ayant des défauts génétiques en viennent à penser qu’elles sont « anormales ». Cela touche également les décisions en matière de procréation, et la disponibilité des dépistages prénataux peut soulever des problèmes eugéniques pour certaines personnes. Étant donné que la stigmatisation sociale liée à la maladie mentale demeure importante, il peut y avoir de grandes inquiétudes par rapport à la discrimination pour les assurances, l’embauche, l’éducation, le logement et d’autres questions.[540] Une bonne gestion de l’information en génétique prévisionnelle n’est généralement pas une tâche facile et elle l’est encore moins quand l’information porte sur des personnes atteintes de maladie mentale et sur qui pèse déjà la stigmatisation sociale.

11.5.2   Les neurosciences et la santé mentale

Les progrès récents de la technologie et des connaissances théoriques en neurosciences soulèvent de délicats problèmes éthiques et mettent en cause les notions traditionnelles du libre arbitre, de la responsabilité et du soi. Les réponses de la société à ces questions auront des effets profonds, peut-être aussi importants sinon plus que les questions relatives aux nouvelles technologies génétiques.

Nous ne présentons ici qu’un survol des problèmes soulevés par DuVal et Rolleston. Notre compréhension accrue des fonctions et des processus cérébraux de même que les progrès de la technologie de l’imagerie permettront de plus en plus d’identifier et de mesurer des comportements, des traits de personnalité et d’autres manifestations cérébrales et de les corréler avec des modifications observables du cerveau. L’emploi, l’éducation, les assurances, les actes judiciaires, l’immigration, le contre-terrorisme et d’autres activités sociales de même que les relations sociales sont autant d’aspects susceptibles d’être touchés par la capacité d’identifier et peut-être de prévoir des dispositions à certains comportements négatifs ou positifs, comme la violence, la dépendance, la malhonnêteté, le stress, la sympathie, la coopération, etc.[541]

Les progrès en neurosciences permettront également de réaliser des améliorations cognitives et comportementales. DuVal et Rolleston soutiennent que, outre les questions éthiques importantes qu’elles suscitent, les technologies de l’amélioration de comportement, de la personnalité et des capacités cognitives soulèvent des préoccupations de justice sociale bien réelles en supposant que de telles technologies d’amélioration coûtent cher et ne soient disponibles qu’aux biens nantis de la société. De plus, alors la structure et les mécanismes cérébraux des manifestations cognitives sont de plus en plus décrits, la société devra peut-être revoir les notions universelles du libre arbitre, de la responsabilité et de l’imputabilité – la neuroscience de l’éthique. Dans un contexte judiciaire, par exemple, si un comportement criminel ou tout autre comportement aberrant s’explique par des différences dans la structure du cerveau ou dans une fonction cérébrale, sur quoi faudra-t-il se baser pour établir la responsabilité criminelle et déterminer la sanction à imposer?[542]

11.6      ÉTHIQUE DE LA RECHERCHE SUR LA SANTÉ MENTALE ET LA TOXICOMANIE

Comme nous l’avons vu dans le chapitre précédent, la recherche clinique sur les maladies mentales et la toxicomanie s’est accélérée au cours des deux dernières décennies et a permis d’importants progrès dans les traitements. Une grande partie de cette importante recherche exige cependant la participation de sujets de recherche souffrant eux-mêmes de troubles mentaux.

Dans leur étude, DuVal et Rolleston insistent sur le fait que l’histoire de la recherche psychiatrique abonde de cas où les secteurs public et privé ont abusé de la vulnérabilité de malades mentaux, d’handicapés neurologiques et de personnes handicapés par un retard de développement qui ont servi de sujets de recherche. Un exemple particulièrement notoire est celui des essais cliniques parrainés par la CIA qui ont été faits dans les années 50 et au début des années 60 au Allan Memorial Institute à l’Université McGill sur des malades mentaux auxquels on avait administré des hallucinogènes à leur insu. L’histoire de ce traitement inacceptable de participants vulnérables a joué un rôle très important dans le mouvement exigeant une surveillance et une réglementation accrues de la recherche sur des sujets humains et constitue un antécédent important pour prendre en considération l’étude de l’éthique dans la recherche sur les maladies mentales et la toxicomanie.[543]

Les progrès de la recherche sur la santé mentale offrent de grands espoirs à ceux qui souffrent ou souffriront de maladies mentales et, dans quelques cas, aux sujets de recherche eux-mêmes. Bien que les personnes atteintes de maladie mentale puissent être vulnérables de diverses façons, les politiques et la réglementation en matière de recherche qui sont principalement axées sur leur vulnérabilité et leur déficience risquent de favoriser et peut-être exacerber la stigmatisation déjà ressentie par ce groupe. En revanche, il peut être injuste qu’une loi trop restrictive exclue les malades mentaux qui pourraient bénéficier d’une participation à la recherche.[544]

La recherche sur des personnes atteintes de maladie mentale ou souffrant de toxicomanie nécessite des précautions particulières. Bien que tous les sujets participant à la recherche clinique soient vulnérables jusqu’à un certain degré, la vulnérabilité des personnes participant à la recherche clinique sur les maladies mentales et la toxicomanie exige une attention particulière. Par contre, la majorité des personnes atteintes de maladie mentale fonctionne raisonnablement bien. En conséquence, il se pourrait qu’une trop grande attention portée à une réglementation spéciale en matière de recherche impliquant la majorité des personnes atteintes de maladie mentale soit inutile et stigmatisante. Toutefois, il ne fait aucun doute que les principes éthiques doivent être appliqués en portant attention aux vulnérabilités spécifiques aux personnes atteintes de maladie mentale.[545]

Un cadre éthique approprié pour l’éthique de la recherche psychiatrique établit un équilibre entre les protections rigoureuses des sujets humains et la reconnaissance des avantages sociaux et individuels considérables issus d’une recherche scientifique bien conçue et moralement acceptable. Les préoccupations éthiques qui sont pertinentes pour la recherche sur la santé mentale et qui font ressortir la nécessité d’une sensibilité et d’un discernement particuliers comprennent la capacité de prendre des décisions et les problèmes de conception de la recherche.

·        Essais contrôlés avec placebo : L’essai contrôlé avec placebo aléatoire est généralement accepté comme le concept « étalon-or » expérimental pour comparer l’efficacité et l’innocuité des médicaments. La comparaison au moyen du placebo est considérée par les organismes de réglementation comme la meilleure preuve d’efficacité et d’innocuité de nouveaux médicaments. Cependant, l’essai contrôlé avec placebo a été vivement critiqué quand un traitement efficace établi existe pour la maladie étudiée. Ces critiques ont surtout visé la recherche en psychiatrie, où le sujet participant au volet placebo ne reçoit pas le traitement efficace établi, dont il a grandement besoin, souffre des éventuels effets de l’élimination du médicament et peut retomber dans un état de maladie mentale pendant la durée de l’étude.

·        Essais avec élimination d’un médicament : Un essai avec élimination est une étude dans laquelle les chercheurs interrompent la médication d’un sujet de manière à étudier ce dernier en l’absence de médicament ou pour entreprendre une nouvelle thérapie, souvent une thérapie expérimentale. Cela étant, la médication existante est interrompue, habituellement après réduction graduelle de la posologie. Typiquement, la période d’élimination doit être suffisamment longue pour que le médicament soit complètement éliminé de l’organisme du sujet, de manière que les effets résiduels de la médication qui a été retirée ne viennent pas fausser les résultats de l’étude ou entraîner des interactions médicamenteuses indésirables. Selon la conception particulière de l’essai ou la médication en cause, l’élimination peut durer indéfiniment ou jusqu’à la réapparition des symptômes aigus.

·        Essais avec provocation : Une étude de « provocation » est un essai dans lequel un agent psychopharmaceutique ou une provocation psychologique est administré à des sujets de recherche dans des conditions contrôlées pour mesurer ou observer la réaction comportementale ou une réaction neurobiologique à l’aide de l’imagerie cérébrale, ou les deux. En psychiatrie, ces études se sont révélées extrêmement précieuses pour tester des hypothèses et caractériser une variété de processus neurochimiques et pathophysiologiques. La recherche de ce type peut mener à des prévisions améliorées de la réponse à un traitement et à de nouvelles thérapies efficaces.[546]

Pour que des essais cliniques contrôlés avec placebo soient considérés éthiquement acceptables, certaines conditions doivent être remplies. À l’heure actuelle au Canada, les cadres réglementaires et les lignes directrices nationales sur l’éthique en recherche imposent des conditions différentes. Une grande différence entre la Directive tripartite harmonisée pour les bonnes pratiques cliniques (E-10) de la Conférence internationale d’harmonisation (CIH) et l’Énoncé de politique des trois Conseils sur l’éthique de la recherche avec des êtres humains est que l’Énoncé de politique permet actuellement les essais contrôlés avec placebo uniquement lorsqu’il n’existe pas de traitement normalisé ou que le sujet est réfractaire au traitement normalisé ou refuse ce traitement, tandis que la Directive tripartite permet les essais contrôlés même lorsqu’il existe un traitement efficace établi, à condition qu’il n’y ait aucun risque de décès ou d’effet secondaire permanent. Les IRSC et Santé Canada ont lancé une grande initiative en vue d’examiner les principes scientifiques, éthiques et juridiques qui sous-tendent ces documents et d’harmoniser les politiques nationales relatives à l’utilisation pertinente des placebos dans les essais contrôlés avec placebo aléatoire. Le Comité encourage fortement les IRSC et Santé Canada à poursuivre ces efforts concertés visant à adopter et mettre en œuvre une politique nationale harmonisée.

Pour des raisons pratiques, les essais avec provocation exigent souvent que les sujets soient gardés dans l’ignorance ou, au mieux, soient partiellement informés des détails de l’étude. Même lorsque la capacité de prendre des décisions n’est pas compromise, cette exigence a clairement des conséquences éthiques en ce qui concerne le consentement informé.

Malgré une histoire qui comprend des abus graves, la recherche sur les maladies mentales et la toxicomanie est cruciale, en premier lieu pour ceux qui souffrent de troubles mentaux et pour ceux qui en souffriront. La recherche psychiatrique clinique soulève des dilemmes très sérieux du point de vue éthique. La vulnérabilité particulière qui entoure les maladies mentales et la toxicomanie exige que l’on fasse très attention dans la conception, l’examen et la conduite de la recherche.

11.7      OBSERVATIONS DU COMITÉ

Comme nous venons de le voir, le Comité est fermement convaincu qu’un trop grand nombre des problèmes éthiques que soulèvent les maladies mentales et la toxicomanie découlent de la stigmatisation liée à ces troubles. Lutter contre la stigmatisation et la discrimination par des campagnes de sensibilisation s’adressant aux professionnels de la santé, aux chercheurs et au grand public constituerait un pas important pour résoudre ces problèmes éthiques.

Les principes éthiques qui sous-tendent la prestation de services de santé mentale et de traitement de la toxicomanie – en particulier ceux de la bienfaisance et de la justice – doivent être examinés avec soin et de manière opportune. Il est évident que les maladies mentales et la toxicomanie accusent un retard par rapport aux autres maladies et troubles pris en charge par le système de santé canadien. Elles sont technologiquement moins avancées et dangereusement plus fragmentées, et l’élaboration de lignes directrices fondées sur des données empiriques afin de faire connaître les pratiques exemplaires n’est pas aussi avancée que dans d’autres spécialités. Pour ces raisons, le Comité est fermement convaincu que la prévention et le traitement des maladies mentales et de la toxicomanie devraient être coordonnés dans l’ensemble du vaste éventail de services potentiels offerts dans le cadre des soins de santé ou en marge de ces soins, et devraient être prioritaires dans les décisions relatives à l’affectation de ressources limitées.

Le Comité reconnaît que la capacité de prendre des décisions peut être affaiblie par la maladie mentale et la toxicomanie et que les troubles mentaux ne réduisent pas tous cette capacité. En outre, la capacité de prise de décisions de ceux qui souffrent d’une maladie mentale ou de toxicomanie peut être réduite à divers degrés et à divers moments. Étant donné la structure des lois actuelles qui tirent des conclusions assez rigides sur la présence ou l’absence de capacité de prise de décision, et la rigidité relative qui empêche de modifier ou d’adapter les régimes de protection, il faudrait un débat plus complet sur la manière de tenir compte de la capacité partielle et variable de prendre des décisions pour soi-même. Il faut trouver un bon équilibre entre le respect du droit individuel à l’autonomie et la nécessité de protéger des personnes vulnérables lorsque leur capacité de prendre des décisions est affaiblie à cause d’une maladie mentale ou de la toxicomanie.

En ce qui concerne la protection des renseignements personnels et la confidentialité, le Comité est bien conscient que toute érosion des mesures de protection dans ces domaines peut avoir de graves conséquences sur la confiance que les patients placent dans ceux qui leur dispensent des soins. Toutefois, comme nous l’avons indiqué ci-dessus, les témoins nous ont déclaré que la stricte observance des règles relatives à la protection des renseignements personnels et à la confidentialité va parfois à l’encontre des intérêts des personnes dont la santé mentale est compromise. Il faut reconnaître les difficultés particulières que les témoins nous ont décrites lorsqu’on élabore, interprète et applique les règles en matière de protection des renseignements personnels et de confidentialité, afin que les prestataires de soins de santé et les aidants membres de la famille puissent donner aux patients l’appui dont ils ont parfois besoin.

Comme il l’a indiqué dans le chapitre 10, le Comité appuie fortement la recherche en maladie mentale et en toxicomanie. Cette recherche constitue la pierre angulaire des futurs progrès des traitements et de la prévention. La recherche sur des sujets humains doit être conçue et exécutée dans le respect des normes scientifiques et éthiques les plus élevées et doit protéger la dignité des individus et des familles qui apportent cette contribution précieuse aux progrès scientifiques.

Le Comité reconnaît que les personnes atteintes d’une maladie mentale ou de toxicomanie constituent des sujets de recherche particulièrement vulnérables. Il est donc primordial de protéger les droits et le bien-être de ces personnes qui participent aux recherches, tout en encourageant la recherche éthiquement responsable. Mais les progrès de la recherche ne devraient pas être poursuivis aux dépens des droits de la personne et de la dignité humaine. Par contre, les protections ne devraient pas non plus être si strictes qu’elles accentueraient la stigmatisation sociale qui découle déjà de la maladie mentale et de la toxicomanie et pourraient exclure cette population vulnérable de recherches cruciales susceptibles d’améliorer les connaissances scientifiques sur son état et même d’être bénéfiques sur le plan individuel.

Il est évident qu’il faut effectuer de la recherche interdisciplinaire pour résoudre correctement un grand nombre des délicats problèmes éthiques, juridiques et socioculturels que posent les maladies mentales et la toxicomanie. Le Comité a été informé de la nécessité d’effectuer ces recherches de manière exhaustive et fondamentale. Dans une lettre au Comité, le Dr Julio Arboleda-Florez, professeur et chef du Département de psychiatrie, Université Queen’s, a indiqué qu’il y a un besoin pressant d’intensifier les recherches en éthique de la santé mentale et en éthique de la recherche afin de trouver des solutions efficaces à des problèmes tels que ceux dont il a été question dans le présent chapitre :

Il ne se fait pas beaucoup de recherches appliquées au Canada ou ailleurs; on ne peut pas parler non plus de capacité d’organisation ou de capacité financière. […] La recherche appliquée qui vérifierait la perception dans la société des concepts éthiques et leur concrétisation, leur portée transculturelle et leurs conséquences en termes de dissonances d’une culture à l’autre, leur acceptation dans la population, leur signification sociale, leur facilité d’application ou même leur utilité, fait cruellement défaut, de sorte que ce domaine de recherche est en passe de s’enliser.[547]

Nous croyons que le Canada pourrait jouer un important rôle de leadership à cet égard, à l’échelle nationale et internationale.

Enfin, le Comité convient avec les experts qu’il faut examiner avec soin les préoccupations sérieuses et complexes soulevées dans le contexte de la recherche en neurosciences et en génétique afin de mieux comprendre les valeurs et principes qui sous-tendent ces technologies et d’autres technologies de la médecine moderne dont l’évolution et les progrès sont très rapides.


CONCLUSION

Le présent rapport est le premier document complet sur les questions de santé mentale, de maladie mentale et de toxicomanie au Canada. Il représente, pour la première fois, une analyse historique, un cocktail unique de survol du problème, de constat de la situation et d’évaluation de la prestation des services de santé mentale et de traitement de la toxicomanie. En décrivant les problèmes auxquels sont confrontées les personnes souffrant de maladie mentale ou de toxicomanie, il jette les bases nécessaires pour mieux appréhender les besoins en santé mentale des Canadiens et des Canadiennes.

Ce rapport est fondé sur le témoignage de nombreux experts de même que sur un examen de la documentation pertinente. Il se veut un document de référence utile pour toute personne qui voudrait participer à la phase d’étude sur la santé mentale, la maladie mentale et la toxicomanie que le Comité entamera au printemps 2005.

À l’occasion de cette prochaine étape, le Comité tiendra de vastes audiences publiques, partout au pays, afin de recueillir le point de vue des Canadiens et des Canadiennes sur la façon de réformer et de restructurer la prestation des services de santé mentale et de traitement de la toxicomanie. Nous espérons que notre rapport final, qui sera publié après ces audiences en novembre 2005, servira de catalyseur à un débat informé sur la santé mentale, la maladie mentale et la toxicomanie.


ANNEXE A:
listE DES TÉMOINS AYANT COMPARUS DEVANT LE COMITÉ
TROISIÈME session DE LA 37E
LÉGISLATURE
(2 FÉVRIER AU 23 MAI 2004)

Organismes

Nom

Date de comparution

fascicule

À titre personnel

David

Loїse

Murray

Ronald

26 février 2003

9

J. Michael Grass, président sortant, Groupe de mise en oeuvre en santé mentale du district de Champlain

5 juin 2003

17

Nancy Hall, conseillère en santé mentale

8 mai 2003

16

Thomas Stephens, expert-conseil

20 mars 2003

11

Académie canadienne d’épidémiologie psychiatrique

Dr Alain Lesage, président sortant

19 mars 2003

11

Académie canadienne de psychiatrie et de droit

Dre Dominique Bourget, présidente

5 juin 2003

17

Association canadienne de la santé mentale de l’Ontario

Patti Bregman, directrice des programmes

12 juin 2003

18

Association des infirmières et infirmiers psychiatriques du Canada

Margaret Synyshyn, présidente

29 mai 2003

16

Centre hospitalier pour enfants de l’est de l’Ontario

Dr Simon Davidson, Chef, Section de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent

1er mai 2003

13

Centre hospitalier universitaire Mère-enfant Sainte-Justine

Dre Joanne Renaud, pédopsychiatre; chercheuse boursière, Instituts de recherche en santé au Canada

30 avril 2003

13

Centre de toxicomanie et de santé mentale

Jennifer Chambers, coordonnatrice du Conseil d’habitation

14 mai 2003

15

Rena Scheffer, directrice, Services d’informations et d’éducation du public

28 mai 2003

16

CN Centre for Occupational Health and Safety

Kevin Kelloway, directeur

12 juin 2003

18

Coalition canadienne pour la santé mentale des personnes âgées

Dr David K. Conn, coprésident; president, Académie canadienne de psychiatrie gériatrique

4 juin 2003

17

Colombie-Britannique, Province de la

Patrick Storey, président, Conseil consultative du minister sur la santé mentale

14 mai 2003

15

Heather Stuart, professeure agrégée, Santé communautaire et épidémiologie

Global Business and Economic, Roundtable and Addiction and Mental Health

Rod Phillips, président et directeur général, Les Consultants Warren Sheppell

12 juin 2003

18

Hamilton Health Sciences Centre

Venera Bruto, psychologue

4 juin 2003

17

Hôpital Douglas

Eric Latimer, économiste de la santé

6 mai 2003

14

Dr James Farquhar, psychiatre

Dre Mimi Israёl, chef, Département de psychiatrie; professeure agrégée, Université McGill

Myra Piat, chercheuse

Hôpital Douglas

Amparo Garcia, chef clinico-administratif, Division des Services ultraspécialisés pour adultes

6 mai 2003

14

Manon Desjardins, chef clinico-administratif, Division des Services sectorisés pour adultes

Jacques Hendlisz, directeur général

Robyne Kershaw-Bellmare, directrice des soins infirmiers

Hôpital Louis-H. Lafontaine

Jean-Jacques Leclerc, directeur, Services de réadaptation et d’hébergement dans la communauté

6 mai 2003

14

Dr Pierre Lalonde, directeur, Clinique des jeunes adultes

Hôpital St. Michaels

Dr Paul Links, titulaire de la chaire Arthur Sommer Rothenberg d’études sur le suicide

19 mars 2003

11

Institut canadien d’information sur la santé

Dr John S. Millar, vice-président, Recherche et analyse

20 mars 2003

11

Carolyn Pullen, expert conseil

John Roch, gestionnaire principale, Protection de la vie privée, Secrétariat de la protection de la vie privée

Instituts de recherche en santé du Canada

Dr Rémi Quirion, directeur scientifique, Institut des neurosciences, de la santé mentale et des toxicomanies

6 mai 2003

14

Bronwyn Shoush, commissaire, Institut de la santé des Autochtones

28 mai 2003

16

Jean-Yves Savoie, président, Conseil consultatif, Institut de la santé publique et des populations

12 juin 2003

18

Santé Canada

Tom Lips, conseiller principal, Santé mentale, Division de la santé des collectivités, Direction générale de la santé de la population et de la santé publique

19 mars 2003

11

Pam Assad, directrice déléguée, Division de l’enfance et de l’adolescence, Centre de développement de la santé humaine, Direction générale de la santé de la population et de la santé publique

30 avril 2003

13

Société Alzheimer du Canada

Steve Rudin, directeur exécutif

4 juin 2003

7

Société canadienne de pédiatrie

Dre Diane Sacks, présidente élue

1er mai 2003

13

Marie-Adèle Davis, directrice exécutive

Statistique Canada

Lorna Bailie, directrice adjointe, Division des statistiques sur la santé

20 mars 2003

11

St.Joseph’s Health Care London

Maggie Gibson, psychologue

4 juin 2003

17

Université de Calgary

Dr Donald Addington, professeur et chef, Département de psychiatrie

29 mai 2003

16

Université de la Colombie-Britannique (par vidéoconférence)

Dre Charlotte Waddell, professeur adjointe, Unité d’évaluation de la santé mentale et des consultations communautaires, Département de psychiatrie, Faculté de médecine

1er mai 2003

13

Université Laval

Dr Michel Maziade, directeur, Département de spychiatrie, Faculté de médecine

6 mai 2003

14

Université du Manitoba

John Arnett, chef, Département de santé psychologique clinique, Faculté de médecine

28 mai 2003

16

Robert McIlwraith, professeur et directeur, Programme de psychologie en milieu rural et nordique

29 mai 2003

Université McGill

Dr Howard Steiger, professeur, Départment de psychiatrie; directeur, Clinique des troubles alimentaires, Hôpital Douglas

1er mai 2003

13

Université de Montréal

Laurent Mottron, chercheur, Département de psychiatrie, Faculté de médecine

6 mai 2003

14

Université de Montréal

Dr Richard Tremblay, titulaire, chaire de recherche du Canada sur le développement des enfants, professeur de pédiatrie, psychiatrie et psychologie, directeur, Centre d’excellence pour le développement des jeunes enfants

6 mai 2003

14

Dr Jean Wilkins, professeur titulaire et pédiatre, Département de pédiatrie, Faculté de médecine

Dre Renée Roy, professeure adjointe de clinique, Département de psychiatrie, Faculté de médecine

Université d’Ottawa

Tim D. Aubry, professeur associé; co-directeur , Centre de recherché sur les services communautaires

5 juin 2003

17

Dr Jeffrey Turnbull, directeur, Département de médecine, Faculté de médecine

Université du Québec à Montréal

Henri Dorvil, professeur, École de travail social

6 mai 2003

14

Dr Michel Tousignant, professeur et chercheur, Centre de recherche et intervention sur le suicide et l’euthanasie

Université Queen’s

Dr Julio Arboleda-Florèz, professeur et chef du Département de psychiatrie

20 mars 2003

11

Université de Toronto

Dr Joe Beitchman, professeur et directeur, Division de la psychiatrie de l’enfant; psychiatre en chef, Hospital for Sick Children

30 avril 2003

13

Université de Toronto

Dr David Marsh, directeur des services cliniques, Médecine des toxicomanies, Centre de toxicomanie et de santé mentale

29 mai 2003

16



ANNEXE B:
ListE DES TÉMOINS AYANT COMPARUS DEVANT LE COMITÉ
DEUXIÈME Session
DE LA 37E LÉGISLATURE
(30 SeptembRE 2002 – 12 NovembRE 2003)

Organismes

Nom

Date de comparution

fascicule

À titre personnel

Charles Bosdet

Pat Caponi

Don Chapman,

29 avril 2004

7

Alberta Mental Health Board

Ray Block, directeur général

28 avril 2004

7

Sandra Harrison, directrice exécutive, Planification, défense des droits et liaison

Alliance de la Fonction publique du Canada

John Gordon, vice-président executive national

1er avril 2004

5

James Infantino, agent des pensions et assurances d’invalidité

Association canadienne des travailleuses et travailleurs sociaux

Stephen Arbuckle, membre, Groupe d’intérêt lié à la santé

31 mars 2004

5

Association canadienne des troubles anxieux

Peter McLean, vice-président

12 mai 2004

9

Association canadienne pour la santé mentale

Penny Marrett, chef de la direction

12 mai 2004

9

Association des infirmières et infirmiers du Canada, la Fédération canadienne des infirmières et infirmiers en santé mentale et l’Association des infirmières et infirmiers psychiatriques du Canada

Nancy Panagabko, présidente, Fédération canadienne des infirmières et infirmiers en santé mentale

31 mars 2004

5

Annette Osted, membre du Conseil d’administration, Association des infirmières et infirmiers psychiatriques du Canada

Association médicale canadienne

Dre Gail Beck, secrétaire générale adjointe intérimaire

31 mars 2004

5

Dr Sunil Patel, président

Association des psychiatres du Canada

Dr Blake Woodside, président du Conseil d’administration

31 mars 2004

5

Australie, Gouvernement d’

(par vidéoconférence)

Dermot Casey, secrétaire adjoint, Direction des priorités sanitaires et de la prévention du suicide, ministère de la Santé et de la Vieillesse

20 avril 2004

6

Jenny Hefford, secrétaire adjointe, Direction de la stratégie contre la drogue, ministère de la Santé et de la Vieillesse

Bureau du Conseil Privé

Ron Wall, directeur des relations parlementaires, Planification de la législation et des travaux de la Chambre/avocat

1er avril 2004

5

Ginette Bougie, directrice, Rémunération et classification

Centre for Suicide Prevention

Diane Yackel, directrice exécutive

21 avril 2004

6

Centre de toxicomanie et de santé mentale

Christine Bois, gestionnaire des priorités provinciales en matière de troubles concourants

5 mai 2004

8

Wayne Skinner, directeur clinique, Programme de troubles concourants

Brian Rush, chercheur, Politique de prévention sociale et de santé

Chambre des communes

L’honorable Jacques Saada, C.P., député, leader du gouvernement à la Chambre des communes et ministre responsable de la Réforme démocratique

1er avril 2004

5

Citoyenneté et de l’Immigration, Ministère de la

Patricia Birkett, directrice générale par intérim, Direction générale de l’intégration

22 avril 2004

6

Cognos

Marilyn Smith-grant, spécialiste en ressources humaines

1er avril 2004

5

Sean Reid, gestionnaire principal, Communication corporatives

Fédération canadienne des contribuables

Bruce Winchester, directeur de recherche

22 avril 2004

6

Fédération des programmes communautaires de la santé mentale et du traitement des toxicomanies de l’Ontario

David Kelly, directeur exécutif

5 mai 2004

8

Hôpital Douglas

Dr Gustavo Turecki, directeur, Groupe McGill d’études sur le suicide, Université MGill

21 avril 2004

6

Institut des neurosciences, de la santé mentale et des toxicomanies

Richard Brière, directeur adjoint

21 avril 2004

6

Justice, Ministère de la

Manon Lefebvre, conseillère juridique

22 avril 2004

6

Mercer consultation en resources humaines

Bernard Potvin, conseiller principal

22 avril 2004

6

Native Mental Health Association of Canada

Brenda M. Restoule, psychologue et représentante du conseil de l’Ontario

13 mai 2004

9

Nouvelle –Zélande, Gouvernement de la

(par vidéoconférence)

Janice Wilson, directrice générale adjointe, Direction générale de la santé mentale, ministère de la Santé

5 mai 2004

8


Organismes

Nom

Date de comparution

fascicule

Nouvelle –Zélande, Gouvernement de la

(par vidéoconférence)

David Chaplow, directeur et conseiller principal en santé mentale

5 mai 2004

8

Arawhetu Peretini, gestionnaire, Santé mentale des Maoris

Phillipa Gaines, gestionnaire, Développement des systèmes de santé mentale

Ontario Hospital Association

Dr Paul Garfinkel, président, Groupe de travail sur la santé mentale

31 mars 2004

5

Ressources humaines et Développement des compétences Canada

Bill Cameron, directeur général, Secrétariat national pour les sans-abri

29 avril 2004

7

Marie-Chantal Girard, gestionnaire de la recherche stratégique, Secrétariat national pour les sans-abri

Royaume-Uni, Gouvernement du

(par vidéoconférence)

Anne Richardson, chef de la Direction des politiques en santé mentale, ministère de la Santé

6 mai 2004

8

Adrian Sieff, chef de la Direction de la législation en matière de santé mentale

Santé, Ministère de la de la Nouvelle Écosse

Dr James Millar, directeur exécutif, Santé mentale et services aux médecins

28 avril 2004

7

Secrétariat du Conseil du Trésor

Joan Arnold, directrice, Élaboration de la législation, Division des pensions

1er avril 2004

5

Service correctionnel du Canada

Larry Motiuk, directeur général, Recherches

29 avril 2004

7

Françoise Bouchard, directrice générale, Services de santé

Services de santé de la Colombie-Britannique, Ministère des

Irene Clarkson, directrice exécutive, Santé mentale et toxicomanie

28 avril 2004

7

Six Nations Mental Health Services

Dre Cornelia Wieman, psychiatre

13 mai 2004

9

Société canadienne de psychologie

John Service, directeur exécutif

31 mars 2004

5

Société canadienne de schizophrénie

John Gray, président élu

12 mai 2004

9

Société pour les troubles de l’humeur du Canada

Phil Upshall, président

12 mai 2004

9

Université McGill

(par videoconférence)

Dr Laurence Kirmayer, directeur, Division de la psychiatrie sociale et transculturelle, Département de psychiatrie

13 mai 2004

9

Université Simon Fraser

(par vidéoconférence)

Margaret Jackson, directrice, Institut d’études en politiques de justice pénale

29 avril 2004

7

U.S. Campaign for Mental Health Reform

William Emmet, coordonnateur

1er avril 2004

 

U.S. President’s New Freedom Commission on Mental Health

(par videoconférence)

Michael Hogan, président

1er avril 2004

5



ANNEXE C:
ListE DES INDIVIDUS QUI ONT RÉPONDU À UNE LETTRE DU COMITÉ AU SUJET DES PRIORITÉS POUR LA RÉFORME DANS LE SECTEUR DE LA MALADIE MENTALE

GROUPE CANADIEN DE RECHERCHE

Action cancer Manitoba

Harvey Max Chochinov, MD, PhD, MCRMC, titulaire d’une chaire de recherche du Canada en soins palliatifs, directeur de la Manitoba Palliative Care Research Unit d’Action cancer Manitoba

Hôpital Douglas, Centre de recherche de l’

Ashok Mall, MD, MCRMC, titulaire d’une chaire de recherche du Canada pour l’étude des premiers stades de la psychose, professeur en psychiatrie à l’Université McGill

Université Carleton

Dr Hymie Anisman, titulaire d’une chaire de recherche du Canada en neuroscience, chercheur supérieur attaché à la Fondation ontarienne de santé mentale

Université de l’Alberta

Glen B. Baker, PhD, DSc, professeur et titulaire d’une chaire de recherche du Canada en neurochimie et en développement de médicaments

Université du Manitoba, Faculté de médecine de l’

Brian J. Cox, docteur en psychiatrie, titulaire d’une chaire de recherche du Canada sur les troubles de l’humeur et sur les troubles anxieux, professeur agrégé de psychiatrie

Université McGill

Eric Fombonne, MD, MCRMC (Psych.), titulaire d’une chaire de recherche du Canada en psychiatrie de l’enfance et de l’adolescence, professeur de psychiatrie à l’Université McGill, directeur du Département de pédopsychiatrie de l’Hôpital pour enfants de Montréal


DOYEN D’UNIVERSITÉ

Centre universitaire de santé McGill

Joel Paris, MD, professeur titulaire et directeur du Département de psychiatrie

Hôpital général de Kingston

Samuel K. Ludwin, MBB, Ch., MCRMC, vice‑président du développement à la recherche

Université de l’Alberta

Dr L. Beauchamp, doyen de la Faculté d’éducation

Université de l’Ouest de l’Ontario

Dr Carol P. Herbert, doyen de la Faculté de médecine et d’art dentaire

Université de Sherbrooke

Pierre Labossière, ing., PhD, vice-recteur adjoint à la recherche

GROUPE RELATIF À LA MALADIE

CRSNG

Thomas A. Brzustowski, président

La Fondation ontarienne de la santé mentale

Howard Cappell, PhD, c. psych., directeur exécutif

Société canadienne de schizophrénie

Fred Dawe, président

INDUSTRIE

Eli Lilly Canada Inc.

Terry McCool, vice‑président des Affaires générales de la société

GlaxoSmith Kline

Geoffrey Mitchinson, vice‑président des Affaires publiques

Les compagnies de recherche pharmaceutique du Canada

Murray J. Elston, président

Merck Frosst Canada Ltée

André Marcheterre, président

Roche Pharmaceutiques

Ronnie Miller, président-directeur général

GROUPE D’ÉTHIQUE EN SANTÉ MENTALE

Armée du Salut - Territoire du Canada et des Bermudes

Glen Shepherd, colonel et secrétaire en chef

Centre de recherche de l’Hôpital Douglas de l’Université McGill

Maurice Dongier, professeur en psychiatrie

Centre de toxicomanie et de santé mentale

Paul E. Garfinkel, MD, FRCP, président-directeur général

Hôpital St-Paul

Mark Miller, éthicien

Office régional de la santé de Winnipeg

Linda Hughes, présidente du Comité d’éthique en santé mentale de l’ORSW

St-Joseph’s Health Care Centre du Parkwood Hospital de London

Maggie Gibson, PhD, psychologue du Programme des soins aux anciens combattants

Université de l’Alberta

Genevieve Gray, doyenne et professeure de la Faculté en soins infirmiers

Université de l’Alberta, Faculté des sciences infirmières et Centre John Dossetor d’éthique en santé de l’

Wendy Austin, inf. aut., titulaire d’une chaire de recherche du Canada

Université de la Colombie‑Britannique

Peter D. McLean, PhD, professeur et directeur de l’Unité des troubles anxieux

Université de l’Ouest de l’Ontario

Nancy Feduk, adjointe exécutive au doyen de la Faculté de médecine et d’art dentaire

Université Queen’s

J. Arboleda‑Florèz, professeur et chef du Département de psychiatrie

Université York

David Shugarman, directeur


PRÉSIDENT D’UNIVERSITÉ

Institut de recherches en santé mentale de l’Université d’Ottawa

Zul Merali, PhD, président‑directeur général

Université de Lethbridge

Lynn Basford, doyenne de la Faculté en sciences de la santé

Université McGill

Heather Munroe-Blum, professeure d’épidémiologie et de biostatistiques

RESPONSABILITÉ GOUVERNEMENTALE

Association canadienne de la santé mentale

Bonnie Pape, directrice des programmes et de la recherche au Bureau national de l’Association canadienne de la santé mentale

Cabinet du vice-recteur à la recherche de l’Université d’Ottawa

Yvonne Lefebvre, PhD, vice-présidente associée à la recherche

Centre de recherche de l’Hôpital Douglas

Rémi Quirion, directeur scientifiques de l’INSMT

Centre universitaire de santé McGill

Juan C. Negrete, MD, MCRMC, professeur de psychiatrie à l’Université McGill, président de la Section des toxicomanies, de l’Association des psychiatres du Canada

Coalition canadienne pour la santé mentale des personnes âgées

David K. Conn, MB, MCRMC, coprésident de l’Académie canadienne de psychiatrie gériatrique, professeur agrégé du Département de psychiatrie de l’Université de Toronto, président de l’Académie canadienne de psychiatrie gériatrique

Coalition canadienne pour la santé mentale des personnes âgées

J. Kenneth Le Clair, MD, MCRMC, coprésident de la Coalition canadienne pour la santé mentale des personnes âgées, professeur et directeur de l’Unité de gériatrie du Département de psychiatrie de l’Université Queen’s, directeur clinique du Programme spécialisé de psychiatrie gériatrique

Développement des ressources humaines Canada

Deborah Tunis, directrice générale du Bureau de la condition des personnes handicapées

The Family Council : Empowering Families in Addictions and Mental Health

Betty Miller, coordonnatrice du Family Council

Global Business and Economic Roundtable on Addiction and Mental Health, affiliée au Centre de toxicomanie et de santé mentale

Bill Wilkerson, cofondateur et directeur général

Hôpital d’Ottawa

Paul Roy, MD, MCRMC, professeur adjoint en psychiatrie à l’Université d’Ottawa, directeur du programme « Premier épisode pour les maladies psychotiques » d’Ottawa

Hôpital royal d’Ottawa

J. Paul Fedoroff, MD, professeur agrégé de psychiatrie à l’Université d’Ottawa, directeur de recherche au Service médico‑légal de l’Institut de recherche en santé mentale

Institut des neurosciences, de la santé mentale et des toxicomanies du Centre de recherche de l’Hôpital Douglas

Michel Perreault, PhD, chercheur à l’Hôpital Douglas

Instituts de recherche en santé du Canada

Dr. Jeff Reading, PhD, directeur scientifique de l’Institut de la santé des Autochtones

Ministère de la Santé et du Mieux-Être du Nouveau‑Brunswick

Ken Ross, sous-ministre adjoint

ONSA : Organisation nationale de la santé autochtone

Judith G. Bartlett, MD, CMFC

Six Nations Mental Health Services

Cornelia Wieman, MD, MCRMC, psychiatre

Sunnybrook & Women’s College Health Sciences Centre de l’Université de Toronto

N. Herrmann, médecin, MCRMC

Syncrude

Eric P. Newell, président‑directeur général

Unité de l’évaluation de la santé mentale et des consultations communautaires du Département de psychiatrie de l’Université de la Colombie-Britannique

Elliot Goldner, MD, MScS, MCRMC, chef de la Division de la politique et des services de santé mentale

Université Dalhousie, Département de psychologie de l’

Patrick J. McGrath, OC, PhD, MSRC, titulaire de la chaire Killam de psychologie, professeur de pédiatrie et de psychiatrie, titulaire d’une chaire de recherche du Canada, psychologue au IWK Hospital

Université Dalhousie, Faculté de médecine de l’

David Zitner, PhD, directeur en informatique médicale

Université d’Ottawa, École de psychologie de l’

John Hunsley, PhD, c. psych., professeur en psychologie

Université d’Ottawa, Faculté de médecine de

Jacques Bradwejn, MD MCRMC, DABPN, président du Département de psychiatrie

Université McMaster

Docteur Richard P. Swinson, MD, MCRMC, titulaire de la chaire Morgan Firestone de psychiatrie et de neurosciences du comportement à l’Université McMaster, chef du Département de psychiatrie du St. Joseph’s Healthcare Centre



[484]   Les trois premiers paragraphes de cette section s’inspirent de renseignements affichés sur le site des IRSC, à la rubrique « À propos des IRSC – Qui nous sommes » (http://www.cihr-irsc.gc.ca/f/7263.html).

[485]   Institut des neurosciences, de la santé mentale et des toxicomanies, Plan stratégique – 2001-2005, décembre 2001.

[486]   Shitij Kapur et Franco Vaccarino, Des découvertes aux soins : Favoriser la recherche sur la maladie mentale et les toxicomanies, document commandé par le Comité, 2004, p. 5.

[487]   Dr Alan Bernstein, lettre au Comité, datée du 8 juillet 2003.

[488]   Dr Rémi Quirion (14:9).

[489]   Kapur et Vaccarino (2004), p. 5.

[490]   Unité de recherche sur les systèmes de santé, Institut psychiatrique Clarke, Examen des meilleures pratiques de la réforme des soins de la santé mentale : Document de discussion, préparé pour le Réseau de consultation sur la santé mentale fédéral, provincial et territorial, Santé Canada, 1997, p. 28.

[491]   Professeur Michel Tousignant (14:43).

[492]   Dr Bernstein (8 juillet 2003).

[493]   Information obtenue par communication personnelle.

[494]   Information tirée du site Internet à : www.crsng.gc.ca.

[495]   Kapur et Vaccarino (2004), p. 3.

[496]   Société canadienne de l’autisme, Programme de recherche et Stratégie d’action pour l’autisme au Canada : un livre blanc, mars 2004. http://autismsocietycanada.ca/finalwhite-french.pdf

[497]   Dr Bernstein (8 juillet 2003).

[498]   Information tirée du site Internet des NIH à : www.gov.nih.

[499]   Information tirée du site Internet du MRC à : www.mrc.ac.uk.

[500]   Dr Bernstein (8 juillet 2003).

[501]   Ibid.

[502]   Statistique Canada, « Estimations des dépenses totales au titre de la recherche et du développement dans le secteur de la santé au Canada, 1988 à 2002 », Statistique des sciences, Bulletin de service, n° 88-001-XIB au catalogue, vol. 27, n° 6, septembre 2003.

[503]   Voir Pharmaceutical Research and Manufacturers of America (PhRMA), “New Medicines for Mental Health Help Avert a Spending Crisis”, Value in Medicines, 14 janvier 2004.

[504]   Voir le site Internet des Compagnies de recherche pharmaceutique du Canada (Rx&D) à : http://www.canadapharma.org/Patient_Pathways/Health_Info/02mentalheal/index_f.html.

[505]   Ibid.

[506]   Fondation canadienne de la recherche en psychiatrie, mémoire au Comité, juin 2003, p. 2.

[507]   Dr Rémi Quirion (14:24).

[508]   Dr John Gray, président, Société canadienne de schizophrénie, mémoire au Comité, 12 mai 2004, p. 3.

[509]   Fondation canadienne de la recherche en psychiatrie (juin 2003), p. 6.

[510]   Kapur et Vaccarino (2004), p. 6.

[511]   Ibid.

[512]   United States Surgeon General, Mental Health: A Report of the Surgeon General, 1999.

[513]   The President’s New Freedom Commission on Mental Health, Achieving the Promise: Transforming Mental Health Care in America, rapport final, 22 juillet 2003, p. 67.

[514]   Kapur et Vaccarino (2004), p. 6.

[515]   Eric Latimer (14:44 à 14:48).

[516]   Professeur Tousignant (14:43).

[517]   Kapur et Vaccarino (2004), p. 11.

[518]   Dr Rémi Quirion (14:15).

[519]   Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, Recommandations en vue d’une réforme, Volume Six, octobre, p. 239-240.

[520]   Gordon DuVal et Francis Rolleston, Questions d’éthique en santé mentale, document commandé par le Comité, 20 avril 2004.

[521]   Ibid.

[522]   Ibid., p. 3.

[523]   Ibid.

[524]   Dr James Millar, directeur exécutif, Mental Health and Physician Services, ministère de la Santé de la Nouvelle-Écosse, p. 9.

[525]   Carlyn Mackey, Aurise Kondziela et Dorothy Weldon (Christ the King Family Support Group - Winnipeg), mémoire au Comité, 24 octobre 2003, p. 2.

[526]   Gordon DuVal et Francis Rolleston (2004), p. 6.

[527]   Ibid., p. 11-12.

[528]   Ibid., p. 6.

[529]   Mark Miller, mémoire au Comité, 27 septembre 2003, p. 2.

[530]   Institut canadien catholique de bioéthique, mémoire au Comité, 20 février 2004, p. 5.

[531]   Gordon DuVal et Francis Rolleston (2004), p. 16.

[532]   John Arnett (16:26).

[533]   Murray (9:18).

[534]   Bronwyn Shoush (16:12).

[535]   Carlyn Mackey, Aurise Kondziela et Dorothy Weldon (Christ the King Family Support Group - Winnipeg), mémoire au Comité, 24 octobre 2003.

[536]   Centre for Practical Ethics, Université York, mémoire au Comité, 2004.

[537]   Gordon DuVal et Francis Rolleston (2004), pp. 19.

[538]   Ibid., p. 20-21.

[539]   Ibid. p. 21.

[540]   Ibid.

[541]   Ibid.

[542]   Ibid.

[543]   Gordon DuVal et Francis Rolleston (2004), p. 22.

[544]   Ibid.

[545]   Ibid. p. 23.

[546]   Ibid., p. 24-25.

[547]   Dr Julio Arboleda-Florez, mémoire au Comité, 5 novembre 2003.

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