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SOCI - Comité permanent

Affaires sociales, sciences et technologie


Politiques et programmes de certains pays en matière de santé mentale

Rapport provisoire
du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie

Rapport 2

L’honorable Michael J.L.Kirby, président
L’honorable Wilbert Joseph Keon, vice-président

Novembre 2004


TABLE DES MATIÈRES

ORDRE DE RENVOI. iv

SÉNATEURS... v

INTRODUCTION: COMPARAISONS INTERNATIONALES. 1

CHAPITRE 1: LES SOINS DE SANTÉ MENTALE EN AUSTRALIE.. 3

1.1    HISTORIQUE ET APERÇU.. 3

1.1.1    La prestation des soins de santé généraux en Australie. 3
1.1.2    La stratégie nationale en matière de santé mentale. 5
    1.1.2.1    L’évaluation de la stratégie nationale en matière de santé mentale 7

1.2    COÛTS ET FINANCEMENT DES SERVICES dE SANTÉ MENTALE   8

1.3    PRESTATION ET ORGANISATION DES SERVICES. 11

1.3.1    L’hébergement au sein de la collectivité, les soins ambulatoires et les ONG   13
1.3.2    Les resources humaines. 14
1.3.3    Les services de santé mentale du secteur privé. 16
1.3.4    La prestation des services de santé mentale aux aborigènes. 17

1.4    TOXICOMANIE ET ABUS DE SUBSTANCES. 18

1.5    PROMOTION ET PRÉVENTION.. 19

1.5.1    La prévention du suicide. 20

1.6    PERSPECTIVES DE RÉFORME.. 21

1.7    OBSERVATIONS DU COMITÉ.. 23

 

CHAPITRE 2:  LES SOINS DE SANTÉ MENTALE EN NOUVELLE-ZÉLANDE.. 25

2.1    HISTORIQUE ET APERÇU.. 25

2.1.1    La stratégie de santé mentale. 27

2.2    COÛTS ET FINANCEMENT DES SERVICES DE SANTÉ MENTALE   30

2.3    PRESTATION ET ORGANISATION DES SERVICES. 31

2.3.1    Les services aux Maoris. 33
2.3.2    Les ressources humaines. 35

2.4    PROMOTION ET PRÉVENTION.. 36

2.4.1    Le projet de lutte contre la stigmatisation et la discrimination associées à la maladie mentale. 37

2.5    PERSPECTIVES DE RÉFORME.. 39

2.6    OBSERVATIONS DU COMITÉ.. 40

 

CHAPITRE 3:  LES SOINS DE SANTÉ MENTALE EN ANGLETERRE.. 43

3.1    HISTORIQUE ET APERÇU.. 43

3.1.1    La santé mentale. 45

3.2    COÛTS ET FINANCEMENT DES SERVICES DE SANTÉ MENTALE   50

3.3    PRESTATION ET ORGANISATION DES SERVICES. 52

3.3.1    Les resources humaines. 55
3.3.2    Les services aux minorités. 55

3.4    PROMOTION ET PRÉVENTION.. 56

3.4.1    La lutte à la stigmatisation et à la discrimination. 56
3.4.2    La prévention du suicide. 58

3.5    PERSPECTIVES DE RÉFORME.. 60

3.6    OBSERVATIONS DU COMITÉ.. 61

 

CHAPITRE 4: LES SOINS DE SANTE MENTALE AUX ÉTATS-UNIS. 63

4.1    HISTORIQUE ET APERÇU.. 63

4.1.1    La santé mentale. 64

4.2    COÛTS ET FINANCEMENT DES SERVICES DE SANTÉ MENTALE   67

4.2.1    Les coûts de la maladie mentale aux États-Unis. 67
4.2.2    L’assurance santé mentale financée par l’État 68
4.2.3    L’assurance santé mentale privée. 69
        4.2.3.1    Les éléments de base de l’assurance santé mentale 69
        4.2.3.2    L’organisation de l’assurance santé mentale privée 70

4.3    ORGANISATION ET FOURNITURE DES SERVICES. 72

4.3.1    Les soins généraux et primaires. 74
4.3.2    Les soins spécialisés. 74
4.3.3    Les services à la personne. 74
        4.3.3.1    L’emploi 75
        4.3.3.2    Le logement 75
        4.3.3.3    Les services aux personnes incarcérées 76
        4.3.3.4    L’accès aux services en milieu rural 76
        4.3.3.5    Les services aux minorités 77
        4.3.3.6    Les services aux enfants 78

4.4    PROMOTION et PRÉVENTION.. 79

4.4.1    La stratégie nationale de prévention du suicide. 79

4.5    PERSPECTIVES DE RÉFORME.. 81

4.6    OBSERVATIONS DU COMITÉ.. 85

 

CHAPITRE 5: COMPARAISON DES SOINS DE SANTÉ MENTALE DANS LES QUATRE PAYS ÉTUDIÉS. 87

5.1    INTRODUCTION.. 87

5.2    HISTORIQUE ET APERÇU.. 87

5.3    COÛTS ET FINANCEMENT DES SERVICES DE SANTÉ MENTALE   88

5.4    PRESTATION ET ORGANISATION DES SERVICES. 90

5.5    PROMOTION ET PRÉVENTION.. 91

5.6    PERSPECTIVES DE RÉFORME.. 93

5.7    OBSERVATIONS DU COMITÉ.. 94

 

ANNEXE A:... LISTE DES TÉMOINS AYANT COMPARUS DEVANT LE COMITÉ TROISIÈME SESSION DE LA 37E LÉGISLATURE
(2 FÉVRIER AU 23 MAI 2004). I

ANNEXE B:... LISTE DES TÉMOINS AYANT COMPARUS DEVANT LE COMITÉ  DEUXIÈME SESSION DE LA 37E LÉGISLATURE
(30 SEPTEMBRE 2002 – 12 NOVEMBRE 2003). IX

ANNEXE C:... LISTE DES INDIVIDUS QUI ONT RÉPONDU À UNE LETTRE DU COMITÉ AU SUJET DES PRIORITÉS POUR LA RÉFORME DANS LE SECTEUR DE LA MALADIE MENTALE.. XV


ORDRE DE RENVOI

Extrait des Journaux du Sénat du jeudi 7 octobre 2004

L’honorable sénateur Kirby propose, appuyé par l’honorable sénateur Losier-Cool,

Que le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie soit autorisé à examiner, pour en faire rapport, les questions qu’ont suscitées le dépôt de son rapport final sur le système des soins de santé au Canada en octobre 2002 et les développements subséquents.  En particulier, le Comité doit être autorisé à examiner la santé mentale et la maladie mentale ;

Que les mémoires reçus et les témoignages entendus sur l’étude de la santé mentale et des maladies mentales par le Comité durant la trente-septième législature soient déférés au Comité ;

Que le Comité présente son rapport final au plus tard le 16 décembre 2005 et qu’il conserve tous les pouvoirs nécessaires pour diffuser ses conclusions jusqu’au 31 mars 2006.

La motion, mise aux voix, est adoptée.

Le greffier du Sénat,

Paul C. Bélisle


SÉNATEURS

Les sénateurs suivants ont participé à l’étude du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologies sur l’état du système de soins de santé (plus particulièrement sur la santé mentale):

L’honorable Michael J. L. Kirby, president du Comité

L’honorable Wilbert Joseph Keon, vice-président du Comité

Les honorables sénateurs:

Catherine S. Callbeck
Ethel M. Cochrane
Joan Cook
Jane Mary Cordy
Joyce Fairbairn, P.C.
Aurélien Gill
Janis G. Johnson
Marjory LeBreton
Viola Léger
Yves Morin
Lucie Pépin
Brenda Robertson (retraitée)
Douglas Roche (retraité)|
Eileen Rossiter (retraitée)
Marilyn Trenholme Counsell

Membres d’office du Comité:

Les honorables sénateurs: Jack Austin P.C. (ou William Rompkey) et Noёl A. Kinsella

(ou Terrance Stratton)

Autres sénateurs ayant participle de temps à autre à cette étude:

Les honorables sénateurs Di Nino, Forrestall, Kinsella, Lynch-Staunton, Milne et Murray.


POLITIQUEs ET PROGRAMMEs
de certains pays en matière
de santé mentale

INTRODUCTION:
COMPARAISONS INTERNATIONALES

L

e présent document est le deuxième d’une série de quatre rapports produits par le Comité sénatorial des affaires sociales, de la science et de la technologie dans le cadre de son étude sur la santé mentale, la maladie mentale et la toxicomanie. Le premier rapport, intitulé Santé mentale, maladie mentale et toxicomanie : Aperçu des politiques et des programmes au Canada, donne une idée générale des politiques et des services concernant la maladie mentale et la toxicomanie au Canada. Il tire les enseignements qui pourraient être utilement appliqués à la réforme de la santé mentale chez nous à partir d’une analyse des politiques et des programmes de quatre autres pays. Le premier et le deuxième rapports combinés nous ont fourni les données de base pour préparer notre troisième rapport : Santé mentale, maladie mentale et toxicomanie : Problèmes et options. Celui-ci décrit les grands défis associés à la prestation des services de santé mentale et de traitement de la toxicomanie au Canada et propose des politiques pour s’attaquer à certains des problèmes soulevés. Dans son quatrième et dernier rapport, qui sera publié en novembre 2005, le Comité formulera ses recommandations de réforme.

Dans son étude du secteur des soins actifs au Canada, à laquelle il a consacré deux ans, le Comité s’est rendu compte à quel point il est important, dans le domaine de la politique de la santé, de ne pas se limiter à ce qui se passe à l’intérieur de nos propres frontières. C’est ainsi qu’il a consacré un volume entier sur les six concernant l’assurance-maladie, à un survol de l’expérience de plusieurs pays afin de tirer des enseignements susceptibles d’être appliqués au contexte canadien. Ayant constaté le retard relatif du Canada dans l’élaboration d’une stratégie nationale de promotion de la santé mentale et du traitement des maladies mentales, le Comité a éprouvé la nécessité d’effectuer des comparaisons internationales afin de disposer d’une référence valable et d’un repère intéressant en matière de formulation de politiques.

Comme la situation de chaque pays est particulière, la comparaison entre les expériences de chacun est forcément très limitée. Il peut être impossible de transposer les mesures prises d’un pays à l’autre à cause de la complexité des réseaux de soins de santé, tant du point de vue des modalités de financement que de celui des mécanismes de prestation de services, et à cause de l’enracinement de ces réseaux dans l’histoire, la politique et la culture de chaque pays. Cependant, étant donné que dans nos sociétés industrialisées les décideurs et le personnel traitant se heurtent à des problèmes semblables, il y a beaucoup à gagner d’une étude attentive de ce qui fonctionne et de ce qui ne fonctionne pas ailleurs dans le monde.

Qui plus est, il peut être extrêmement utile de disposer d’un cadre de comparaison pour dégager les dilemmes et les défis communs. Un tel cadre peut permettre de formuler des questions pour orienter de futures études, cerner les aspects à débattre et proposer des orientations de politiques. Le présent volume de notre rapport s’articule donc autour de quatre études de pays (l’Australie, la Nouvelle-Zélande, l’Angleterre et les États-Unis) et il se conclut par un chapitre établissant la synthèse des principaux enseignements que le Canada doit retenir.

Dans chaque cas, notre analyse porte sur les mêmes sujets de base, mais elle varie forcément dans le détail en fonction de l’expérience de chaque pays et de la documentation qui était disponible. Dans ses travaux, le Comité a bénéficié d’un sérieux coup de pouce venu d’éminents experts et décideurs de chaque pays étudié. Ces personnes, à qui nous adressons ici tous nos remerciements, ont témoigné par vidéoconférence. Pour effectuer la comparaison en question, le Comité ne disposait pas des ressources nécessaires pour effectuer une recherche poussée sur le terrain et il a donc dû s’en remettre aux documents accessibles sur Internet ou à ceux des collections de la Bibliothèque du Parlement.

Pour ce qui est de la consommation abusive de substances et de la toxicomanie, le Comité s’est, autant que possible, fondé sur les témoignages recueillis lors de ses séances. Toutefois, il est bien conscient qu’il faudrait effectuer beaucoup plus de recherches sur les politiques et les programmes de chaque pays avant d’entreprendre une quelconque comparaison internationale valable à ce sujet.

Pour autant que nous sachions, il n’existe pas de comparaison internationale des politiques et des pratiques en matière de santé mentale qui tienne compte des derniers développements dans les pays étudiés. Du moins, il n’en existe pas qui ressemble à celle que nous présentons dans les chapitres suivants. Cela étant, cette partie du rapport pourrait également aider les décideurs d’autres pays qui s’intéressent à la situation de leur propre système de santé mentale. Pour sélectionner les pays étudiés, le Comité a suivi les recommandations d’experts et de gens de terrain, sans compter que nous avons tenu à choisir des pays dont les systèmes de santé étaient à peu près comparables au nôtre. Le fait qu’il existe un système fédéral dans deux de ces pays (en Australie et aux États-Unis) et un système unitaire dans deux autres (Nouvelle-Zélande et Royaume-Uni) constitue un autre élément de comparaison.


CHAPITRE 1:
LES SOINS DE SANTÉ MENTALE EN AUSTRALIE[1]

1.1        HISTORIQUE ET APERÇU

1.1.1      La prestation des soins de santé généraux en Australie

Étant donné que l’Australie, comme le Canada, a un régime politique fédéral, la responsabilité de son système de soins de santé est partagée entre le gouvernement national (ou du Commonwealth) et les gouvernements infranationaux (c’est-à-dire ceux des six États et des deux territoires). Le gouvernement du Commonwealth joue cependant un plus grand rôle à l’intérieur du système de soins de santé que le gouvernement fédéral au Canada. Les États et les territoires dépendent notamment davantage du gouvernement du Commonwealth que les gouvernements provinciaux ne dépendent du fédéral au Canada pour ce qui est du financement de ces soins. En Australie comme au Canada, les gouvernements locaux (les municipalités) jouent un rôle relativement limité dans les soins de santé.

Le gouvernement du Commonwealth est responsable de la formulation, pour l’ensemble du pays, des politiques d’intérêt général dans les domaines de la santé publique, de la recherche en santé et de la gestion à l’échelle nationale de l’information sur la santé. Il administre « Medicare », qui est le régime national d’assurance‑santé financé par l’État, et réglemente l’industrie privée de l’assurance‑santé. Il finance et réglemente également les soins dispensés dans les foyers pour personnes âgées et finance et administre conjointement avec les États et les territoires certains soins de santé communautaires et à domicile. Le gouvernement du Commonwealth finance les soins de santé à partir de l’ensemble des taxes et des impôts ainsi que d’un impôt spécial au titre des soins de santé de 1,5 p. 100 prélevé sur le revenu imposable.

Les gouvernements des États et des territoires sont responsables, au premier chef et dans les limites de leur secteur de compétence, de la gestion et de la prestation des services de santé assurés par l’État. Ils fournissent les services de soins hospitaliers actifs et psychiatriques publics et une vaste gamme de services communautaires et de santé publique, ce qui inclut la santé en milieu scolaire, les soins dentaires et la santé des enfants et des mères. Ils territoires sont également responsables de la réglementation des fournisseurs de soins de santé, de la délivrance des permis et de l’agrément des hôpitaux privés. Le financement des soins de santé par les États et les territoires australiens provient essentiellement de subventions du gouvernement du Commonwealth, de l’ensemble des taxes et des impôts et des frais d’utilisation des services de santé.

En Australie, le régime d’assurance-maladie est obligatoire et il garantit donc une couverture universelle. Le régime public d’assurance‑santé est plus étendu en Australie qu’au Canada, puisqu’il englobe les médecins, les hôpitaux, les médicaments vendus sur ordonnance et certains soins de santé communautaire et à domicile. Contrairement à ce qui se fait au Canada, il permet d’imposer des frais d’utilisation et une surfacturation pour des services de santé assurés par l’État. Le Medicare australien comporte plus exactement trois grands volets :

·        Le Medical Benefits Scheme (MBS), régime d’assurance médicale qui garantit l’accès aux médecins (non rattachés à des hôpitaux). Le MBS répertorie une vaste gamme de services médicaux et prescrit les honoraires qui s’appliquent à chaque élément (les « honoraires prévus »), mais ne rembourse que 85 p. 100 des honoraires inscrits au barème des médecins. Par contre les médecins peuvent charger des honoraires plus élevés que ce qui est prévu au barème.

·        Les Australian Health Care Arrangements (AHCA), accords sur les soins de santé qui servent de fondement au financement fournit par le gouvernement du Commonwealth aux États et aux territoires pour les services hospitaliers. Les fonds versés pour ces derniers par le gouvernement du Commonwealth revêtent la forme de subventions annuelles globales dont les montants sont négociés dans le cadre de l’établissement d’ententes quinquennales avec les États et les territoires, qui, en retour, acceptent de ne pas autoriser l’imposition de frais d’utilisation pour les services des hôpitaux publics.

·        Le Pharmaceutical Benefits Scheme (PBS), régime d’assurance-médicaments reposant sur un formulaire pharmaceutique national qui assure gratuitement l’accès aux médicaments prescrits à l’extérieur des hôpitaux, sous réserve de seuils annuels. Une fois atteints, ces seuils donnent lieu à de nouvelles réductions des sommes que les particuliers doivent assumer.

En Australie, comme au Canada, quelque 70 p. 100 des dépenses affectées à la santé sont financées par le secteur public (46 p. 100 par le gouvernement du Commonwealth et 24 p. 100 par les gouvernements des États et des territoires) et 30 p. 100 par le secteur privé. La Constitution australienne permet au gouvernement du Commonwealth de percevoir des impôts sur le revenu; celui-ci finance une plus grande proportion des soins de santé que ne le fait le gouvernement fédéral au Canada. C’est le principal assureur public de médicaments vendus sur ordonnance et de services de médecins, puisqu’il finance environ 50 p. 100 des dépenses des hôpitaux.

Les États et, dans une moindre mesure, les gouvernements locaux sont responsables du gros des dépenses publiques. Environ 25 p. 100 de leurs budgets sont affectés aux soins de santé et à peu près 69 p. 100 de ces fonds sont alloués aux hôpitaux publics. Le financement des soins de santé par les gouvernements des États provient principalement de deux sources : premièrement, des recettes générales et des crédits limitatifs ciblés accordés par le gouvernement du Commonwealth et, deuxièmement, de l’assiette des revenus généraux des États eux-mêmes. Le gouvernement du Commonwealth finance les États par le biais de subventions globales au titre de la santé, qui sont de plus en plus conditionnelles, et de versements inconditionnels de la TPS (taxe sur les produits et les services).

Par rapport à ce qui se fait au Canada, les régimes privés d’assurance-santé australiens s’inscrivent à la fois en complément et en concurrence du régime d’État. Les assureurs privés peuvent offrir les mêmes prestations que celles prévues par le régime public et les Australiens peuvent compléter la couverture de Medicare, mais ils ne peuvent se retirer du système public financé par leurs impôts. En Australie, les régimes complémentaires d’assurance sont tarifiés sans distinction, ce qui veut dire qu’aucun malus ni bonus n’est imputé aux prestataires en fonction de leur âge, de leur sexe, de leur état de santé ou des risques potentiels qu’ils courent.

Pour ce qui est de la prestation des services, on recense en Australie un petit nombre d’hôpitaux privés à but lucratif bâtis et administrés par des entreprises privées et qui offrent des services hospitaliers en vertu de certaines modalités conclues avec les gouvernements de l’État et des territoires. Il demeure que la plupart des lits pour soins actifs et des cliniques de soins externes d’urgence se trouvent dans les hôpitaux publics. En règle général, les hôpitaux privés offrent des soins non urgents et moins complexes, comme les chirurgies électives simples.

Comme devait l’affirmer M. Dermot Casey, secrétaire adjoint, Direction des priorités sanitaires et de la prévention du suicide au ministère de la Santé et de la vieillesse du gouvernement de l’Australie, durant son témoignage par vidéoconférence :

Nous pensons que le secteur privé fait partie intégrante de notre régime de soins de santé. La politique du gouvernement est telle que les gens ont le choix quant à l'endroit où ils reçoivent leurs soins de santé. [...] Nous essayons d'encourager tous les États et les territoires à avoir des établissements privés, car la politique du gouvernement est d'avoir un seul système, mais de multiples choix.

1.1.2     La stratégie nationale en matière de santé mentale

Depuis 1992, la santé mentale est une priorité pour les gouvernements du Commonwealth, des États et des territoires. Opposition et majorité se sont entendus sur la ligne à tenir pour réformer les soins de santé mentale, ce qui a permis à l’Australie d’appliquer des points de repère internationaux à la définition et l’adoption d’objectifs nationaux en matière de promotion de la santé et de prévention des maladies mentales.

C’est ainsi que la National Mental Health Policy (politique nationale en matière de santé mentale)  a été adoptée par tous les États et les territoires et par le gouvernement fédéral en avril 1992. On a appelé cette politique, mise en œuvre au moyen d’une série de plans nationaux en matière de santé mentale d’une durée de 5 ans, la National Mental Health Strategy (stratégie nationale en matière de santé mentale).

Celle-ci a été la première tentative destinée à coordonner, à l’échelle nationale, la mise en place de services publics de santé mentale. On a commencé en Australie, comme dans d’autres pays occidentaux, au milieu des années 60 à réduire rapidement et sans aucune planification le nombre de lits à l’intérieur du réseau public d’établissements psychiatriques. Comme ailleurs, c’est une combinaison d’éléments (c’est-à-dire des traitements à l’aide de nouveaux médicaments, des progrès du côté des pratiques cliniques et l’émergence du mouvement en faveur des droits de la personne qui préconisait l’abolition des systèmes isolant les personnes handicapées de l’ensemble de la collectivité) qui a entraîné en Australie la marche vers la « désinstitutionalisation ».

Selon certaines estimations, le nombre maximum de lits réservés aux soins psychiatriques, environ 30 000, aurait été atteint au début des années 60, époque où la population de ce pays correspondait à peu près à la moitié de sa population actuelle.[2] À ce moment-là, l’isolement et la garde (en milieu fermé) des gens qui souffraient d’une maladie mentale dominaient la culture thérapeutique et bien des lits réservés aux malades psychiatriques étaient situés dans des « asiles » ruraux, loin de leurs familles et de leurs réseaux sociaux. Le surpeuplement de ces établissements était général, puisqu’on entassait souvent souvent jusqu’à 100 patients dans des pavillons normalement destinés à pourvoir aux besoins de 25 personnes. La réduction de la taille des hôpitaux amorcée dans les années 60 s’est cependant inscrite à l’intérieur du cadre d’une politique qui garantissait aucunement la mise sur pied de services communautaires en relève des établissements en voie de dispariton.

La stratégie nationale en matière de santé mentale (SNSM), en partie pensée pour réagir à l’héritage de la réduction non planifiée du nombre de lits réservés aux soins psychiatriques, visait à établir une orientation cohérente qui guiderait une future réforme des services de santé mentale. Cette stratégie, approuvée en 1992 par tous les ministres australiens de la Santé, a établi un cadre de collaboration entre tous les ordres de gouvernement destiné à assurer la poursuite, échelonnée sur 5 ans, de 12 thèmes prioritaires convenus en vertu du First National Mental Health Plan (1993–1998), premier plan national en matière de santé mentale. Ses objectifs consistaient, entre autres, à :

·        accroître la proportion de soins psychiatriques actifs pour malades hospitalisés fournis dans les hôpitaux généraux par rapport à celle des soins du même type assurés dans les hôpitaux psychiatriques séparés;

·        inclure des services intégrés de santé mentale à l’intérieur de l’ensemble des dispositions relatives à l’organisation des services de santé générale;

·        veiller à ce que chaque État, territoire et région aient un plan relatif à la combinaison des services offerts à sa population;

·        réduire la taille ou fermer des hôpitaux psychiatriques et, en même temps, fournir suffisamment de services de soins actifs en milieu hospitalier, de services d’hébergement et de services de santé communautaire de substitution;

·        accroître le nombre et la gamme de services d’hébergement supervisés offerts en milieu communautaire et assurer d’une gamme suffisante de services pour répondre aux besoins des usagers de soins de santé mentale.

L’adoption du régime national de santé mentale a, par ailleurs, été accélérée par les pressions exercées par le gouvernement du Commonwealth sur l’État et les territoires, comme M. Casey l’a expliqué au Comité :

Il est intéressant de noter que l'élan favorable à un changement en Australie est venu en réalité des États et des territoires qui demandaient au gouvernement fédéral d'assumer un rôle et d'intervenir en matière de soins de santé mentale. […] On a soutenu que le gouvernement fédéral engageait des dépenses très élevées, mais qu'il n'exerçait aucun contrôle en amont, c'est-à-dire en vue d'améliorer ce qui se faisait en santé mentale. Voilà pour le contexte vers la fin des années 80 et au début des années 90.

Le premier plan national en matière de santé mentale a été suivi d’une seconde mouture que tous les ministres australiens de la Santé ont approuvée en juillet 1998. Ce nouveau plan fournissait un deuxième cadre quinquennal d’action (échelonné de 1998 à 2003) aux niveaux national, des États et des territoires. Il s’appuyait sur les réalisations liées à la politique nationale en matière de santé mentale et sur le premier plan national en la matière. Ce deuxième plan national visait principalement à consolider les réformes effectuées et en apporter dans d’autres domaines en mettant fortement l’accent sur les questions et les interventions reliées à la santé de la population.

Trois autres thèmes prioritaires sont apparus dans ce deuxième plan national :

·        promotion et prévention;

·        partenariats en matière de réforme et de prestation des services;

·        qualité et efficacité.

Un troisième plan national vient d’être adopté. L’avant-dernière partie du présent chapitre en donne un aperçu.

1.1.2.1                 L’évaluation de la stratégie nationale en matière de santé mentale

Des experts internationaux qui ont effectué une évaluation à mi-terme de la réalisation du deuxième plan national en matière de santé mentale ont conclu que la Stratégie nationale et les premier et deuxième plans nationaux en matière de santé mentale (qui découlent de la Stratégie) reflètent un leadership exemplaire sur le plan des politiques en matière de santé mentale qui a mené en Australie à d’importantes réalisations dans le domaine, et ce, à tous les niveaux. Parmi les principales réalisations en question, ces consultants internationaux ont souligné l’intégration des évaluations et des interventions en matière de santé mentale à la fourniture des soins ordinaires ainsi que l’inclusion véritable des usagers de services de santé mentale et de leurs soignants dans le processus d’élaboration des politiques en matière de santé mentale, et ce, à tous les niveaux.

Selon les experts internationaux en question, à bien des égards, l’Australie est le chef de file mondial sur le plan de la promotion de la santé mentale, de la prévention de la maladie mentale, des mesures d’intervention précoce adoptées pour la combattre et de la réduction de la stigmatisation s’y rattachant. Ils estiment en outre que l’Australie fixe une norme pour d’autres pays en ce qui a trait à une initiative stratégique nationale qu’il est possible de mettre sur pied, qu’il faudrait lancer et qui montre comment les gouvernements central et les États (ou des provinces) d’un régime fédéral peuvent s’entendre et énoncer des principes en vue pour s’attaquer à des problèmes sociaux et de santé difficiles à régler. Les experts internationaux susmentionnés ont laissé entendre dans leur rapport d’examen qu’aucun autre pays n’a pris le temps de canaliser son capital intellectuel et politique pour élaborer un plan dont les objectifs mesurables sont aussi ambitieux. Ils affirment aussi que la stratégie australienne en matière de santé mentale de même que le premier et le deuxième plan national en matière de santé mentale sont des modèles internationaux pour les politiques dans ce domaine, ce qui a capté l’attention et l’imagination du monde entier.

D’après le Conseil de la santé mentale, principal groupe de pression non gouvernemental en matière de santé mentale, seulement 38 p. 100 des Australiens qui souffraient d’un trouble mental ont cependant pu avoir accès à des services de santé en 1997. Ce conseil a souligné qu’on est encore aujourd’hui grandement insatisfait de bien des aspects des services de santé mentale en Australie, malgré les progrès réalisés dans la foulée de la stratégie nationale en matière de santé mentale.

1.2        COÛTS ET FINANCEMENT DES SERVICES dE SANTÉ MENTALE

Les dépenses pour les services de santé mentale[3] effectuées en Australie par des tierces parties bailleurs de fonds (soit les gouvernements du Commonwealth, des États et des territoires ainsi que les assureurs privés) ont atteint 2,6 milliards de dollars australiens en 1999-2000,[4] ce qui représentait environ 6,6 p. 100 de l’ensemble des dépenses brutes courantes affectées aux services de santé. Sur ces 2,6 milliards de dollars australiens, les États et les territoires en ont dépensé 1,6 en tout, le gouvernement du Commonwealth, 884 millions et les fonds privés de santé, 120 millions, soit, respectivement, 60,8, 34,5 et 4,7 p. 100.

On constate que les dépenses courantes pour les services de santé mentale en Australie, dépenses effectuées par les principaux responsables du financement, ont augmenté de 44 p. 100 en tout dans la période d’application de la SNSM (entre 1993 et 2000; dépenses exprimées ici en prix constants de 2000). Les dépenses allouées aux services de santé se sont accrues de 42 p. 100 dans la même période, ce qui signifie que les dépenses affectées aux soins de santé mentale ont relativement augmenté, mais n’y ont pas grimpé de façon significative.

Si le pourcentage du total des dépenses au titre de la santé consacrées aux services de santé mentale et aux activités qui s’y rattachent est demeuré relativement stable dans la période d’application de la SNSM, le gouvernement du Commonwealth australien a porté sa part du total des dépenses nationales affectées aux services de la santé mentale, passant de 27 p. 100 en 1992-1993 à 35 p. 100 en 1999-2000. Le principal élément moteur de cette augmentation, qui représente 68 p. 100 de la hausse des dépenses du gouvernement du Commonwealth australien, a été la croissance des coûts des médicaments utilisés en psychiatrie et fournis par l’entremise du Pharmaceutical Benefits Scheme. Les dépenses de ce dernier pour les médicaments utilisés en psychiatrie ont augmenté de 402 p. 100 entre 1992-1993 et 1999-2000, ce qui correspond à presque 4 fois le taux d’accroissement de l’ensemble des dépenses du PBS (105 p. 100) enregistrées dans la même période.

L’Australian Institute of Health and Welfare, institut de la santé et du bien-être de l’Australie, estime que pour 1996, il fallait attribuer aux troubles mentaux environ 30 p. 100 du fardeau financier dû aux maladies non mortelles et 27 p. 100 des années de travail et d’études perdues en raison de handicaps. Il estime également que les pertes de productivité découlant de troubles de santé mentale coûtent 5 milliards de dollars australiens par année. Selon cet organisme, les gens qui souffrent de troubles mentaux sont, en Australie, la cause de 5 fois plus de jours de travail perdus annuellement que ceux et celles qui souffrent de troubles somatiques, et que cela représente chaque année 70 millions de jours de travail et d’études.

Depuis l’entrée en vigueur de la politique nationale en matière de santé mentale originale, les Australiens veillent à ce que les économies qui découlent de la réduction planifiée du nombre et de la taille des hôpitaux psychiatriques autonomes soient réaffectées à la mise sur pied de nouveaux services de santé mentale. Tous les ordres de gouvernement ont pris l’engagement de maintenir leurs budgets d’une façon ou d’une autre afin qu’une réduction simultanée du financement des soins de santé mentale par les États et les territoires ne réduise pas à zéro les gains obtenus grâces aux économies ni les fonds additionnels dérivés de la SNSM. L’entente entre gouvernements destinée à conserver les ressources affectées à la santé mentale comportait deux volets :

·        l’engagement de maintenir le niveau des dépenses affectées aux services de santé mentale;

·        l’engagement aussi de réinvestir les ressources libérées à la suite de la fermeture ou de la rationalisation de services de santé mentale dans des programmes de santé mentale.

À cet égard, M. Casey a déclaré au Comité que les tentatives visant à maintenir le niveau de financement des soins de santé mentale ont si bien abouti que plus aucune mesure n’est nécessaire sur ce plan :

En fait, l'une des craintes du gouvernement fédéral, il y a dix ans, c'était que si nous donnions de l'argent pour la santé mentale, les États et les Territoires se contenteraient de le prendre et de le consacrer à autre chose. Nous avions une entente stipulant qu'ils maintiendraient leur niveau de financement si le gouvernement fédéral augmentait le montant total. Nous avons suivi à la trace l'argent dépensé, et les États et Territoires devaient faire rapport à une instance de contrôle des dépenses. Nous n'avons plus besoin de ce système aujourd'hui, dix ans plus tard, parce que conscients de l'importance de cet aspect à leur niveau et de la controverse politique que cela occasionnerait dans les collectivités, les gouvernements ne dépenseraient pas ces montants à d'autres fins.

Les changements apportés dans la période qui a suivi l’adoption de la SNSM visaient à réduire la dépendance de l’Australie envers les soins en établissement, à renforcer les solutions de rechange en matière de soins de santé communautaire et à commencer à combler l’insuffisance des réseaux de services de santé mentale constatée lors des nombreuses enquêtes menées au cours de la décennie précédente. Dans les cinq premières années d’application de la SNSM :

·        les dépenses affectées aux services communautaires ont augmenté de 87 p. 100 en chiffres absolus;

·        les ressources libérées à la suite de la réduction du nombre/de la taille des établissements hospitaliers ont été réinvesties dans des services de rechange et ont fourni environ la moitié des fonds additionnels utilisés pour développer les services communautaires.

À partir de 1998-1999, les dépenses affectées aux hôpitaux psychiatriques séparés ont été réduites de 13 autres pour cent si bien qu’en 1999-2000, les établissements psychiatriques autonomes ne représentaient que 23 p. 100 du total des dépenses allouées aux services de santé mentale (comparativement à 49 p. 100 en 1992-1993). En outre, les dépenses affectées aux services communautaires ont augmenté de 16 p. 100 durant cette période, ce qui a porté l’augmentation des dépenses allouées à ces services depuis l’entrée en vigueur de la SNSM à 117 p. 100 en tout. Étant donné que les trois quarts environ de la hausse des dépenses effectuées depuis le début de l’application de la stratégie en question ont été affectés aux services de soins ambulatoires.[5] En 1999-2000, 49 p. 100 du total des dépenses consacrées aux services de santé mentale étaient alloués à des services communautaires, contre 29 p. 100 au début de l’application de la stratégie.

Dans le septième rapport national sur la santé mentale (publié en 2002), à la suite de son analyse des tendances observées en dépenses de santé mentale depuis l’application de la SNSM, le ministère de la santé et du vieillissement du Commonwealth australien tire les conclusions suivantes :

·        Les engagements pris par tous les gouvernements australiens pour conserver les ressources affectées à la santé mentale durant une période où les choses ont évolué rapidement ont été respectés. Les dépenses qu’ils affectent chaque année à la santé mentale ont progressé de 46 p. 100 en chiffres absolus depuis 1992‑1993. Les dépenses allouées à la santé mentale ont, en moyenne, continué d’augmenter chaque année en vertu aux termes du deuxième plan national en matière de santé mentale.

·        On dépense maintenant en Australie 778 millions de dollars de plus en fonds publics au titre des services de santé mentale – ou 33 $ de plus par personne et par année – qu’on le faisait dans les débuts de la SNSM. Une bonne partie de cette augmentation est affectée au développement des services communautaires.

·        L’augmentation des dépenses affectées à la santé mentale reflète simplement les tendances observées sur le plan de l’ensemble des dépenses allouées à la santé. Résultat : la « part » du total des dépenses en santé consacrée à la santé mentale est demeurée la même et elle n’a pas beaucoup augmenté, même si elle est importante en chiffres absolus.

·        Les subventions qu’accorde le gouvernement du Commonwealth aux États et aux territoires en vertu de la SNSM ne représentent que 3 p. 100 de leurs dépenses annuelles à ce titre, mais elles ont permis de générer des fonds pour de nouveaux services et de guider l’ensemble du processus de réforme. La SNSM, fondée sur la collaboration, semble avoir permis d’empêcher un phénomène de transfert des coûts qui inquiète bien de promoteurs d’initiatives de partenariat entre les gouvernements du Commonwealth et des États australiens.

Certains ont cependant fait observer que la SNSM a permis d’accroître et de réaffecter les dépenses pour les services de santé mentale en Australie, mais qu’on alloue encore trop peu de ressources à ce secteur. Des défenseurs et des promoteurs des services de santé mentale soutiennent, par exemple, que le niveau des dépenses affectées à la santé mentale en Australie (6,6 p. 100 du total des dépenses en santé), demeure inférieur à celui des constaté dans des pays comparables, y compris le Canada, la Nouvelle-Zélande et le Royaume-Uni.

1.3        PRESTATION ET ORGANISATION DES SERVICES

En Australie les services en santé mentale sont offerts par le truchement de tout un éventail de programmes. Dans le secteur public, le modèle type de prestation de services spécialisés en santé mentale donne lieu à la fourniture de services à un bassin de population déterminé et il y a intégration des services entre milieu communautaire et milieu hospitalier. On y fournit des services aux malades hospitalisés dans les hôpitaux généraux et dans les hôpitaux psychiatriques séparés. Les services de soins communautaires dans ce pays comprennent une gamme de types de services, y compris des services cliniques, de suivi et de traitements mobiles et d’intervention d’urgence (mobiles également). On pratique souvent la gestion de cas pour coordonner les services fournis dans différents milieux. Les services de logement, de soutien aux handicapés, d’emploi et de sécurité du revenu sont financés en vertu d’autres programmes gouvernementaux. Les gouvernements des États et des territoires continuent à jouer le rôle le plus important en matière de prestation de services spécialisés en santé mentale parce qu’ils sont, directement ou indirectement, les principaux responsables de la fourniture et de la gestion de la plupart des services.

Le niveau et la combinaison des services fournis aux malades hospitalisés ont énormément changé depuis les débuts de la SNSM. Quand cette stratégie est entrée en vigueur, en 1992 : 

·        73 p. 100 des lits réservés aux soins psychiatriques étaient situés dans des établissements autonomes;

·        29 p. 100 seulement des ressources allouées à la santé mentale étaient affectées aux soins de santé communautaire;

·        les hôpitaux psychiatriques autonomes représentaient la moitié du total des dépenses affectées à la santé mentale par les États et les territoires;

·        moins de 2 p. 100 des ressources étaient allouées à des programmes non gouvernementaux destinés à aider des gens qui vivaient dans la collectivité.

En juin 2000, les 1 991 lits jusque-là`réservés aux soins psychiatriques dans le secteur public avait été diminués de 25 p. 100. Au début de l’application de la SNSM, 55 p. 100 seulement des lits réservés aux soins psychiatriques actifs étaient situés dans les hôpitaux généraux, proportion qui a grimpé à 73 p. 100 à la fin de la mise en œuvre du premier plan national en matière de santé mentale, en 1998. En juin 2000, au moins 80 p. 100 des lits réservés aux soins psychiatriques actifs étaient situés dans les hôpitaux généraux à cause de la réduction alors en cours des services de soins actifs dans les hôpitaux psychiatriques autonomes et d’une augmentation de 13 p. 100 du nombre de lits (par rapport à 330) dans les services de soins actifs des hôpitaux généraux. Depuis l’entrée en vigueur de la SNSM, le nombre de lits réservés aux soins psychiatriques actifs situés dans les hôpitaux généraux a augmenté de 51 p. 100, soit de 990.

La SNSM ne prescrit pas de niveau optimal ni de combinaison optimale pour ce qui est des services aux patients hospitalisés. Elle reconnaît plutôt les conditions et les contextes historiques différents de tous les secteurs de compétence et la nécessité que les plans en matière de santé mentale reposent sur une analyse des besoins de la population locale. Il peut donc exister d’énormes différences sur le plan des services entre les États et les territoires. On soulignait dans les premiers rapports nationaux sur la santé mentale que les États et les territoires australiens s’entendaient généralement pour disposer d’une vingtaine de lits de soins psychiatriques actifs par 100 000 habitants. Il ne s’est pas encore dégagé de consensus semblable au sujet de la fourniture des lits autres que ceux réservés aux soins psychiatriques actifs.

 

Au niveau agrégé à l’échelle nationale, cependant, l’augmentation du nombre de lits réservés aux soins psychiatriques dans les services de logement en milieu communautaire supervisés (558) ne représente qu’un quart environ de la diminution des lits de soins de longue durée dans les hôpitaux psychiatriques (2 285). L’essor des services de logement en milieu communautaire a donc été inégal, variant énormément d’un État ou d’un territoire à l’autre. Aucun consensus entre ces derniers ne s’est encore dégagé au sujet de points de référence en matière de planification pour la fourniture de services spécialisés d’hébergement dans la collectivité. Il a été établi que la création d’un nombre insuffisant de services du genre par la plupart des secteurs de compétence constitue un problème important étant donné l’engagement de tous les États et territoires australiens à mettre sur pied une gamme complète de services communautaires pour prendre la relève des services traditionnellement assurés par les hôpitaux psychiatriques autonomes. À ce sujet, M. Casey devait indiquer au Comité :

Nous avons effectivement réformé toute la prestation des services. Cependant, ce que nous n'avons pas très bien réussi, c'est d'intervenir au niveau de l'emploi, du logement et des soins sociaux pour faire en sorte que ceux qui souffrent de maladie mentale — je crois que c'est l'expression que nous utilisons actuellement puisque la personne ne guérira pas forcément — sont capables de le faire dans un contexte d'interaction sociale maximale et de participation à la vie sociale qui, comme telles, les aideront à demeurer stables et à se rétablir. Le traitement médical à lui seul n'est pas une réponse adéquate aux problèmes des personnes atteintes de troubles mentaux.

1.3.1  L’hébergement au sein de la collectivité, les soins ambulatoires et les ONG

La surveillance de l’hébergement au sein de la collectivité, établie selon la SNSM, consiste principalement à déterminer dans quelle mesure chaque État et chaque territoire mettent sur pied des services de logement communautaires de substitution, supervisés 24 heures sur 24. Il a été a proposé de créer des services de ce genre, connus sous divers vocables comme « community care units » (services de soins communautaires) et « psychiatric hostels » (foyers psychiatriques), pour qu’ils prennent la relève des services traditionnellement assurés dans les services de soins de longue durée des hôpitaux psychiatriques. En juin 2000, l’Australie offrait 1 382 lits à l’intérieur de services communautaires d’hébergement supervisés, soit 68 p. 100 de plus qu’en juin 1993.

Au niveau agrégé à l’échelle nationale, cependant, l’augmentation du nombre de lits réservés aux soins psychiatriques dans les services de logement en milieu communautaire supervisés (558) ne représente qu’un quart environ de la diminution des lits de soins de longue durée dans les hôpitaux psychiatriques (2 285). L’essor des services de logement en milieu communautaire a donc été inégal, variant énormément d’un État ou d’un territoire à l’autre. Aucun consensus entre ces derniers ne s’est encore dégagé au sujet de points de référence en matière de planification pour la fourniture de services spécialisés d’hébergement dans la collectivité. Il a été établi que la création d’un nombre insuffisant de services du genre par la plupart des secteurs de compétence constitue un problème important étant donné l’engagement de tous les États et territoires australiens à mettre sur pied une gamme complète de services communautaires pour prendre la relève des services traditionnellement assurés par les hôpitaux psychiatriques autonomes. À ce sujet, M. Casey devait indiquer au Comité :

Nous avons effectivement réformé toute la prestation des services. Cependant, ce que nous n'avons pas très bien réussi, c'est d'intervenir au niveau de l'emploi, du logement et des soins sociaux pour faire en sorte que ceux qui souffrent de maladie mentale — je crois que c'est l'expression que nous utilisons actuellement puisque la personne ne guérira pas forcément — sont capables de le faire dans un contexte d'interaction sociale maximale et de participation à la vie sociale qui, comme telles, les aideront à demeurer stables et à se rétablir. Le traitement médical à lui seul n'est pas une réponse adéquate aux problèmes des personnes atteintes de troubles mentaux.

Les services de soins ambulatoires désignent tous les services de santé mentale qui consistent exclusivement à évaluer, à traiter, à réadapter et à soigner les malades non hospitalisés. Cette catégorie comprend : les services de consultations externes (des hôpitaux et des cliniques); les équipes mobiles d’évaluation et de traitement; les programmes de jour et les autres services qui visent uniquement à évaluer, à traiter, à réadapter et à soigner les personnes souffrant d’une maladie mentale ou d’une déficience psychique qui vivent dans la collectivité. En 1999-2000, on comptait 90. p. 100 de plsu de personnel clinique affecté à la fourniture de soins ambulatoires en santé mentale que durant l’année de référence (antérieure à la date d’application de la SNSM), ce qui représente environ 3 000 personnes de plus.

Dans le cadre de la SNSM, on a aussi prévu que les organisations non gouvernementales (ONG) à but non lucratif joueraient un rôle clé dans la prestation des services de soutien aux usagers de soins en santé mentale et à leurs soignants. Le secteur des ONG offre une vaste gamme de services, y compris des programmes d’extension des services à domicile pour aider les gens qui emménagent dans leur nouveau chez-soi, des services de remise en état des logements, des programmes de loisirs, des groupes d’entraide et de soutien mutuel ainsi que des services de relève des soignants et de défense et de promotion des droits des malades dans tout le réseau de la santé.

Dans le premier rapport national sur la santé mentale en Australie, on pouvait lire que le financement octroyé aux ONG était limité et que les services nécessaires pour aider les soignants de personnes souffrant de troubles mentaux étaient mal conçus dans les premiers temps de l’application de la SNSM. La base de financement du secteur des ONG s’est relativement améliorée entre 1993 et 1998, sa part des dépenses annuelles consacrées à la santé mentale ayant grimpé de 2 à 5 p. 100 durant cette période, avant de passer à 5,4 p. 100 en 1999-2000.

Le rôle que jouent les ONG varie d’un ressort à l’autre, ce qui reflète les différences sur le plan de l’organisation et de la prestation des services. Dans certains secteurs de compétence, les services fournis par les ONG remplacent de plus en plus ceux jadis assurés par le secteur gouvernemental ou les services cliniques. L’État de Victoria, par exemple, a transformé les ONG à but non lucratif en principaux fournisseurs de programmes de réadaptation psychosociale, dont beaucoup étaient précédemment limités à des services cliniques, et finance les nouveaux types de services de soutien en cas de déficience psychique. La SNSM n’a pas encore permis de dégager un consensus national au sujet des modèles de prestation de services souhaitables pour le développement du secteur des ONG.

1.3.2     Les resources humaines

Le personnel des services de santé mentale en Australie est, actuellement, surtout composé d’omnipraticiens, de psychiatres, d’infirmières et infirmiers spécialisés en santé mentale, d’ergothérapeutes, de psychologues et de travailleurs sociaux. On estime que le personnel clinique employé dans les services publics de santé mentale a augmenté de 15 p. 100 depuis l’adoption de la SNSM, ce qui équivaut à une environ 2 100 employés de plus. La moitié de cette augmentation a été enregistrée pendant l’application du deuxième plan national en matière de santé mentale.

Cet accroissement du personnel s’est accompagné de changements tant sur le plan des installations que sur celui de la composition des effectifs. Une plus grande proportion du personnel clinique travaille maintenant à l’extérieur des hôpitaux et dispense des traitements au sein d’une gamme de milieux communautaires. En outre, le personnel clinique représentait une plus grande proportion (79 p. 100) du total des effectifs en 1999-2000 qu’au début de l’application de la SNSM (70 p. 100, d’après les estimations). Ce changement s’est produit pendant l’intégration des services et leur transfert au milieu communautaire. Depuis le début de l’application de la SNSM :

·        le personnel des services en milieu hospitalier a diminué de 14 p. 100 en tout (il représentait 53 p. 100 de l’ensemble des effectifs en 1999-2000 contre 71 p. 100 en 1992-1993);

·        les effectifs des services de soins ambulatoires et des services en milieu d’hébergement ont augmenté de 87 p. 100 (ils représentaient 47 p. 100 du personnel affecté à la prestation de services en 1999-2000 contre 29 p. 100 en 1992-1993);

·        le personnel médical s’est accru de 27 p. 100 (il équivalait à 11 p. 100 du personnel clinique en 1999-2000);

·        l’effectif paramédical (psychologues, travailleurs sociaux, ergothérapeutes et autres thérapeutes) a augmenté de 55 p. 100 (contre 21 p. 100 du total des effectifs en 1999-2000);

·        le personnel infirmier s’est accru de 7 p. 100 (il constituait 65 p. 100 de l’ensemble du personnel clinique en 1999-2000).

En même temps, tous les ressorts ont signalé des pénuries de personnel qui sont particulièrement graves dans le secteur des soins infirmiers, ce qui influe tant sur la quantité que sur la qualité des soins de santé. Des rapports indiquent que les taux de conservation des effectifs diminuent actuellement dans toutes les disciplines de la santé mentale et que le nombre de nouveaux diplômés n’est peut-être pas suffisant pour faire face au fardeau qu’impose la maladie mentale.

Par ailleurs, il existe encore entre les États et les territoires des iniquités sur le plan du nombre de professionnels de la santé mentale dans le secteur public. Ce sont surtout les États et les territoires qui ont de vastes régions rurales qui éprouvent de la difficulté à recruter suffisamment de personnel qualifié. Comme il existe peu de normes pour aider les États et les territoires australiens à prévoir leurs besoins de main-d’œuvre, il reste bien des défis à relever. Par exemple :

·        L’effectif infirmier semble trop insuffisant pour doter ne serait-ce que les postes actuels. L’avenir est encore plus décourageant, puisque ce personnel vieillit, qu’il n’y a pas suffisamment de recrues pour le remplacer et que la stratégie actuelle des États et des territoires australiens semble consister à débaucher les employés des bassins limités d’autres secteurs de compétence.

·        Les psychiatres sont mal répartis et ils sont, en grande partie, établis dans les régions métropolitaines (86,1 p. 100 d’entre eux exerçant dans les capitales, 5,4 p. 100, dans les grandes régions urbaines, 4,9 p. 100, dans les grands centres urbains et 3,5 p. 100, dans les régions rurales et éloignées).

·        D’après les normes internationales, les psychologues sont relativement peu nombreux à l’intérieur des services de santé mentale des États et des territoires australiens et ils sont beaucoup trop souvent utilisés comme gestionnaires de cas génériques. Leur utilisation comme gestionnaires de cas dilue souvent inutilement leurs compétences et leurs connaissances spécialisées à un moment où de plus en plus d’éléments prouvent l’efficacité des interventions sur le plan des comportements cognitifs pour traiter les troubles dépressifs reliés à l’anxiété et les troubles psychotiques.

M. Casey a précisé au Comité que le gouvernement australien a adopté des mesures destinées à faciliter la prestation de soins aux personnes souffrant de maladie mentale par les médecins primaires. Il nous a notamment décrit un programme adopté par le gouvernement fédéral il y a trois ans dont l’objet est de récompenser financièrement les omnipraticiens qui consacrent davantage de temps aux personnes ayant des problèmes de santé mentale. Ce programme, nous a-t-il déclaré :

[…] donne la possibilité [aux omnipraticiens] de faire intervenir des psychologues comme membres essentiels de l'équipe de traitement de la maladie mentale et cela améliore leur formation et leurs connaissances et leur assure des services de consultation d'urgence de manière qu'ils ne se sentent pas seuls pour régler le problème lorsqu'ils acceptent de s'occuper des problèmes de santé mentale de leurs patients. On nous a dit que si vous êtes omnipraticien et que quelqu'un se présente à votre cabinet et que vous pensez que cette personne a un problème de santé mentale, vous restez silencieux, parce que si vous ouvrez le dialogue, vous serez encore là vingt ou trente minutes plus tard et, évidemment, le paiement à l'acte est le mode de traitement en vigueur. Nous les avons encouragés en leur disant que si cela prend vingt minutes, nous allons les payer davantage pour avoir consacré ce temps aux malades. À l'heure actuelle, environ 15 p. 100 de notre main-d'oeuvre d'omnipraticien s'est inscrite à ce programme. Nous disposons donc de 3 500 omnipraticiens qui participent à ce programme et qui se reconnaissent comme des gens qui peuvent offrir un peu plus de soins en santé mentale et des soins un peu meilleurs. Il s'agit d'un nouveau programme.

1.3.3     Les services de santé mentale du secteur privé

La priorité du deuxième plan national australien en matière de santé mentale était le renforcement des rôles complémentaires en santé mentale entre les services du secteur public et ceux du secteur privé. Ce dernier offre une gamme de services de soins de santé mentale, y compris des services fournis par des psychiatres de pratique privée qui sont financés grâce au Medicare Benefits Schedule du gouvernement du Commonwealth et des services de soins hospitaliers et de santé communautaire assurés par des hôpitaux privés, pour lesquels des fonds privés d’assurance-santé versent des prestations.

Les services du secteur privé incluent également des services limités fournis par les hôpitaux généraux et des services assurés par les omnipraticiens et d’autres professionnels de la santé. Les hôpitaux psychiatriques privés dispensent principalement des soins aux malades hospitalisés, ce qui est conforme à l’historique des services de soins de santé en Australie et à la principale façon dont les fonds d’assurance‑santé versent des prestations pour la fourniture de soins de santé mentale.

Le secteur privé joue donc un rôle clé dans la prestation de l’ensemble des services. En 1999-2000, ce secteur :

·        fournissait 21 p. 100 du total des lits réservés aux soins psychiatriques (par rapport à 14 p. 100 en 1992-1993, en raison d’une augmentation du nombre de lits offerts dans ce secteur combinée à la réduction du nombre de lits offerts dans le secteur public);

·        employait, d’après les estimations, 12 p. 100 de tous les professionnels australiens de la santé mentale;

·        traitait, toujours d’après les estimations, entre 50 et 60 p. 100 de tous les gens vus par les spécialistes du secteur de la santé mentale.

Voici, à ce sujet, ce que M. Casey a expliqué au Comité :

Notre secteur privé est très compliqué, mais il traite une assez grande proportion de la population, et le secteur privé dans son ensemble, psychiatres, médecins de famille et hôpitaux privés, est devenu partie intégrante de la stratégie nationale en matière de santé mentale. Ce n'est pas seulement une stratégie du secteur public. Nous avons obtenu l'adhésion du secteur privé. En un sens, quiconque veut s'occuper de santé mentale dans notre pays doit adhérer au club et être perçu comme partie intégrante de la stratégie, faute de quoi il se retrouve sur la touche quant aux grandes décisions politiques prises à l'échelle nationale.

On a enregistré d’énormes augmentations dans le secteur des hôpitaux psychiatriques privés depuis l’entrée en vigueur de la SNSM. Le nombre de fournisseurs de soins de santé mentale en milieu hospitalier s’est accru de 36 p. 100 et le nombre de lits pour malades hospitalisés de 28 p. 100 en tout, tandis que les recettes ont progressé de 48 p. 100 entre 1992-1993 et 1999-2000 dans ce secteur. Parallèlement à ces changements, le secteur a transformé son modèle général de prestation de soins en un modèle qui consiste à fournir à ses clients une proportion beaucoup plus élevée de services suivant la formule des soins dispensés le jour de l’admission. De 1992-1993 à 1999-2000, le nombre d’admissions d’une journée a grimpé de 39 à 69 p. 100 de toutes les admissions. On estime qu’en 1999-2000 dans le secteur privé, les recettes des services psychiatriques ont atteint 168,2 millions de dollars, soit une augmentation à prix constant de 48 p. 100 depuis 1992-1993.

Même si 1,47 p. 100 des Australiens voit un psychiatre de pratique privée au moins une fois par an, l’accès à ce genre de service est inégal en raison de la concentration des fournisseurs de soins psychiatriques dans les capitales (Melbourne, Adelaïde et Sydney, en particulier). La répartition des services a peu changé depuis l’entrée en vigueur de la SNSM.

1.3.4     La prestation des services de santé mentale aux aborigènes

Mme Jenny Hefford, secrétaire adjointe, Direction de la stratégie contre la drogue au ministère de la Santé et de la vieillesse, a indiqué au Comité que les aborigènes présentent un tableau de santé moins reluisant que celui des Australiens non aborigènes et que leur espérance de vie est de quelque 20 ans inférieure à ces derniers. Elle devait ajouter :

Les aborigènes ont des taux beaucoup plus élevés chez nous pour toutes les toxicomanies. Le taux de tabagisme, par exemple, est beaucoup plus élevé parmi les aborigènes que parmi les autres Australiens. Les problèmes de toxicomanie, surtout l'alcoolisme et l'inhalation d'essence, atteignent des proportions extrêmes dans certaines communautés aborigènes.

Plusieurs rapports soulignent que la prestation de services de santé mentale destinés aux aborigènes n’est actuellement pas assez adaptée aux spécificités culturelles de ces communautés. Voici certaines des raisons avancées pour expliquer ce manque de pertinence culturelle :

·        connaissance et compréhension insuffisantes chez les professionnels de la santé, des points de vue et de la culture des aborigènes;

·        connaissance insuffisante des différentes façons dont les gens conceptualisent et définissent la maladie et la santé;

·        compréhension limitée de la nature et de l’ampleur des besoins en santé mentale au sein des communautés aborigènes;

·        trop petit nombre de consultations menées par les gouvernements et par les professionnels de la santé auprès des aborigènes australiens;

·        manque d’éducation et de formation.

M. Casey, quant à lui, a précisé au Comité que les attitudes évoluent et qu’on admet de plus en plus que « les aborigènes ont beaucoup à nous offrir pour ce qui est de comprendre la relation entre la façon dont on fait l'expérience du monde qui nous entoure sous l'angle psychologique et social, et les répercussions que tout cela peut avoir dans la manière de vivre physiquement sa vie en éprouvant un sentiment de mieux-être ».

1.4        TOXICOMANIE ET ABUS DE SUBSTANCES

Mme Hefford a indiqué au Comité que « les dossiers des toxicomanies sont traités à même le volet santé publique », qu’ils sont considérés comme une question relevant de la santé publique  plutôt qu’en tant que problème exclusif de santé mentale. Elle a précisé que l’approche australienne reposait sur trois piliers : 1) la réduction de l’offre, c’est-à-dire la surveillance des frontières et la fermeture des laboratoires clandestins afin de retirer le produit de la rue; 2) la réduction de la demande par le recours à des campagnes gouvernementales et à une éducation des jeunes dans les écoles axée sur la drogue; 3) la réduction des préjudices, qui concerne les services de traitement et les programmes d’orientation pour les jeunes, afin de leur éviter d’avoir des démêlés avec la justice.

Elle devait ajouter que le secteur des soins de courte durée, en particulier du côté des hôpitaux, ne joue qu’un rôle très limité. Il administre des programmes de désintoxication et s’occupe des décès causés par les surdoses, quand les choses vont au plus mal. Le secteur des soins primaires, quant à lui, cible essentiellement la dépendance envers les opiacés. Les médecins de pratique générale prescrivent de la méthadone et les pharmaciens administrent des programmes de distribution de ce produit, programmes dont 30 000 Australiens bénéficient actuellement.

Mme Hefford devait ajouter que « jusqu’à 60 ou 70 p. 100 de la clientèle des services de traitement de la toxicomanie et de l’alcoolisme ont un trouble mental sous-jacent ou non diagnostiqué ». Elle a conclu son propos en affirmant que, même si certains d’entre eux passent encore au travers des mailles du filet, les choses se sont améliorées ces dernières années. Elle a insisté sur la démarche davantage coopérative qui prévaut entre les secteurs et entre les divers ordres de gouvernement.

Nous avons maintenant une stratégie dans laquelle le gouvernement fédéral a injecté un milliard de dollars au cours des cinq ou six dernières années. Elle englobe la santé, le maintien de l'ordre, l'éducation et les douanes au niveau fédéral, au niveau des États et au niveau local. Nous croyons mieux travailler en réalité à régler les problèmes grâce à cette approche transsectorielle et transdisciplinaire. Cela signifie, par exemple, que nous avons réussi à lancer des programmes de déjudiciarisation hâtive pour les jeunes qui se font prendre par les policiers en possession de cannabis ou de petites quantités d'autres drogues et auxquels on offre la possibilité de ne pas avoir de verdict enregistré contre eux à condition de se soumettre à une évaluation et à un traitement. Certaines de ces mesures ont connu beaucoup de succès. Ainsi, entre 30 000 et 40 000 jeunes ont été écartés du système judiciaire et ont reçu des traitements grâce à ce processus.

1.5        PROMOTION ET PRÉVENTION

À la faveur de la SNSM et parallèlement à cette dernière, les Australiens ont administré toute une diversité de projets de promotion de la santé et de prévention de la maladie.

M. Casey a expliqué au Comité que le fait, pour l’Australie, d’avoir « commencé à tenir compte de la population globale en matière de santé mentale » a donné lieu à de vastes campagnes d’information dans le domaine. Dans le milieu des années 90, des campagnes de publicité ont été entreprises à la télévision, au cinéma et dans les journaux avec, pour seul objectif, de sensibiliser la population aux problèmes de santé mentale. Ces actions ont été suivies par des initiatives plus ciblées, notamment par un programme de promotion de la santé mentale au secondaire, ce qui a donné de bons résultats puisque près de 70 p. 100 des écoles l’offrent.

Par ailleurs, une société privée sans but lucratif, financée par le gouvernement, a été créée en octobre 2000 avec pour objectif de mieux faire connaître la dépression. Ce projet, baptisé « beyondblue » (plus que du cafard), est administré en partenariat avec les services de santé, les écoles, le milieu de travail, les universités, les médias et les organismes communautaires, et en collaboration avec les personnes souffrant de dépression afin de pouvoir bénéficier de leur expérience en la matière. Dans le rapport annuel de 2002-2003, le président de beyondblue, l’honorable Jeff Kennett, écrit :

En 2000, au début du projet, rares étaient ceux qui étaient prêts à prendre publiquement la parole au sujet de la dépression et de leur expérience. Le traitement dans les médias était souvent négatif, les obstacles sur les plans de l’assurance et de l’emploi étaient considérables et il n’existait, à l’échelon national, aucun porte-parole ni aucun service de défense pour ceux et celles atteints de cette maladie. Les médecins généralistes de l’Australie n’étaient pas directement récompensés quand ils offraient de meilleurs services et rien n’était prévu pour favoriser l’accès à des traitements non pharmaceutiques. Si, en 2003, bien des défis demeurent, de grands progrès ont été réalisés sur tous ces plans.

La National Media Strategy (stratégie nationale d’intervention auprès des médias) est un autre projet dans le cadre duquel le gouvernement a collaboré directement avec les médias afin de promouvoir un discours moins négatif sur la santé mentale et la prévention du suicide. Dans le cadre de cette stratégie, appliquée dans les écoles de journalisme et les universités, on enseigne aux futurs journalistes comment ils devraient traiter de ces questions quand ils en rendent compte à la collectivité en sorte de ne pas stigmatiser ceux et celles qui sont atteints de maladies mentales.

M. Casey a indiqué que ces diverses initiatives ont permis d’améliorer « la sensibilisation de la population australienne à l'égard de la maladie mentale d'environ 10 p. 100 depuis 1996 », et il devait ajouter :

[…] nos données sur les prises de contact avec les hôpitaux et sur des prises de contact avec les services de santé révèlent que la proportion de la population qui cherche à obtenir des soins est plus grande qu'au moment où nous avons réalisé notre étude épidémiologique. Nous pourrions en conclure qu'au moins les gens sont maintenant plus prêts à chercher un traitement — et, évidemment, il y a de nombreux traitements efficaces.

1.5.1     La prévention du suicide

L’Australie dispose d’un cadre d’action en matière de prévention du suicide et de l’automutilation baptisé Living Is For Everyone (LIFE) (La vie pour tous). Ce cadre traite du suicide dans toutes les tranches d’âge, mais il concerne particulièrement les adolescents et les jeunes adultes chez qui on peut le plus déplorer le caractère prématuré du décès et la perte de potentiel.

Le cadre LIFE obéit à quatre grands objectifs :

·        Réduire les décès dus au suicide dans toutes les tranches d’âge de la population australienne et réduire les pensées suicidaires, les comportements suicidaires ainsi que les blessures et l’automutilation qui en découlent.

·        Améliorer le ressort psychologique et la capacité d’initiative, le respect, le sens de l’interdépendance et la santé mentale chez les adolescents, leurs familles et la société en général, et réduire la prévalence des facteurs de risque du suicide.

·        Accroître les moyens de soutien mis à la disposition des particuliers, des familles et des collectivités touchés par le suicide ou les comportements suicidaires.

·        Mettre en œuvre un ensemble d’approches communautaires en matière de prévention du suicide et faire en sorte qu’une plus grande partie de la population comprenne le suicide et ses causes.

1.6        PERSPECTIVES DE RÉFORME

Comme nous l’avons souligné précédemment, l’Australie a adopté un nouveau plan national en matière de santé mentale, pour la période 2003 à 2008, qui s’appuie sur les réalisations découlant des deux plans nationaux précédents en la matière. On reconnaît dans ce nouveau plan la complexité du processus de réforme et on y souligne que l’on a été témoin au cours des dix premières années de réformes d’un impressionnant début sur le plan de l’élaboration des politiques, mais qu’il y a encore beaucoup de choses à réaliser au niveau de leur application. Cette conclusion fait écho aux préoccupations de groupes de pression qui craignaient que la SNSM ne soit « en perte de vitesse et chancelante ».([6])

Le plan national en matière de santé mentale 2003-2008 a pour but de consolider les réalisations des premier et deuxième plans nationaux en la matière, de s’attaquer aux lacunes recensées dans ces deux documents et de faire progresser l’application de la SNSM au moyen d’orientations reformulées ou nouvelles. Dans ce plan, on adopte explicitement un cadre de promotion de la santé de la population qui part du principe que la santé et la maladie découlent de l’interaction complexe de facteurs biologiques, économiques, environnementaux, psychologiques et sociaux, et ce, à tous les niveaux : personnel, familial, communautaire, national et mondial.

Le plan en question énumère un certain nombre de principes clés qui étayent le processus de réforme, y compris les suivants :

·        tous ceux et toutes celles qui ont besoin de soins de santé mentale devraient avoir accès dans des délais raisonnables à des services efficaces de santé mentale, indépendamment de l’endroit où ils vivent;

·        les droits des usagers de soins de santé mentale, de leurs familles et de leurs soignants doivent façonner le processus de réforme;

·        le rétablissement devrait orienter la prestation des services de santé mentale;

·        il faut absolument investir dans le personnel affecté aux services de santé mentale;

·        les réformes en matière de santé mentale doivent se produire parallèlement à d’autres progrès à l’intérieur du secteur élargi de la santé;

·        les réformes en matière de santé mentale exigent une approche pangouvernementale.

Quatre thèmes prioritaires guident le nouveau plan national en matière de santé mentale. On y définit les résultats attendus et les orientations clés pour y arriver, même si l’on n’y cherche pas à préciser des projets à financer dans le cadre du nouveau programme de réformes. Ces thèmes sont les suivants :

·        promouvoir la santé mentale et prévenir les problèmes de santé mentale et la maladie mentale;

·        accroître la souplesse des services de santé mentale;

·        renforcer la qualité des services de santé mentale;

·        favoriser la recherche, l’innovation et la viabilité dans le domaine des services de santé mentale.

Voici quelques-uns des résultats que le plan susmentionné vise à atteindre :

·        accroissement du degré d’intégration de la promotion de la santé mentale aux politiques et aux plans en matière de santé mentale en ce qui concerne le Commonwealth, les États, les territoires et les administrations locales;

·        accroissement du degré d’adoption, par les services de santé mentale, du rétablissement comme orientation;

·        entente à l’échelle nationale au sujet des niveaux élevés et de la combinaison des services nécessaires pour harmoniser maintenant et ultérieurement l’offre et la demande de soins de santé mentale;

·        accroissement de l’accès aux soins actifs, aux services d’intervention précoce et à une gamme de solutions de rechange en matière de soins de santé communautaire;

·        amélioration des voies d’accès aux soins pour toute la gamme des soins offerts;

·        réduction des lacunes des réseaux de services et meilleure intégration entre les services publics et les services privés de santé mentale;

·        accroissement de la coordination entre le secteur de la santé mentale et les autres secteurs de la santé;

·        augmentation, à tous les niveaux, du degré de participation utile des usagers de soins de santé mentale, de leurs familles et de leurs soignants à l’élaboration des politiques ainsi qu’à la planification, la prestation et l’évaluation des services de santé mentale; l’amélioration de la qualité de ces services devra être palpable;

·        processus de surveillance du rendement des services de santé mentale sur le plan du bien-être émotif et social, grâce à la collecte et à l’échange d’informations et de données;

·        accroissement de l’offre de professionnels de la santé mentale et amélioration de leur répartition.

1.7        OBSERVATIONS DU COMITÉ

Les membres du Comité ont eu la très nette impression que le Canada avait beaucoup à apprendre de l’Australie dans le domaine de la santé et de la maladie mentale. Ils ont surtout retenu le fait que l’engagement constant des gouvernements du Commonwealth et des États en matière de planification et de suivi des progrès (grâce à des rapports réguliers0, a fixé un modèle international que le Canada est encore loin d’atteindre. De plus, les membres du Comité ont été impressionnés par l’adoption explicite d’un cadre de santé en matière de planification globale.

L’Australie, qui est un État fédéral, nous a aussi prouvé à quel point il est important de resserrer la collaboration entre les divers ordres de gouvernement, puisque tout le monde peut en tirer d’intéressants avantages. De plus, le Comité prend acte de l’importance que les autorités australiennes accordent à la nécessité d’adapter les objectifs nationaux aux réalités régionales et locales et de veiller à ce que la réalisation d’objectifs convenus tienne compte de la situation des différentes collectivités.

Qui plus est, le Comité a été impressionné par les efforts déployés par l’Australie pour faire participer les usagers et le personnel soignant à la formulation de la politique en santé mentale. Le Comité profite de l’occasion pour souligner deux aspects qui concernent le financement. Tout d’abord, les membres ont été frappés de constater à quel point le gouvernement du Commonwealth a abouti dans ses tentatives visant à canaliser le financement de la santé mentale, alors même qu’il a augmenté sa part de financement de la santé mentale et que les services étaient de plus en plus offerts au niveau de la communauté. Selon les témoins, il n’est plus nécessaire, dans ce pays, de prouver le caractère essentiel d’un financement suffisant pour les services de santé mentale et, comme tous les ordres de gouvernement se sont effectivement engagés à ce titre, les ententes officielles qui avaient été conclues à l’origine pour garantir le financement des soins de santé mentale ne sont désormais plus utiles.

Deuxièmement, le Comité se réjouit de constater les succès remportés par le programme qui a récemment été adopté pour améliorer la participation des omnipraticiens au traitement des personnes souffrant de problèmes de santé mentale. L’amélioration de la formation et, surtout, le versement d’une indemnité financière en rapport avec le temps véritablement passé auprès de patients présentant des symptômes de troubles mentaux, de même que l’assouplissement des modalités de renvoi des patients aux spécialistes de la santé mentale nous sont apparues comme des mesures susceptibles de favoriser une véritable intégration de la santé mentale au niveau des soins primaires.

Enfin, le Comité a pris acte des nombreuses approches novatrices adoptées par l’Australie pour sensibiliser le public sur les questions de santé mentale, surtout à la faveur de la campagne beyondblue axée sur la dépression. Les membres du Comité pensent qu’il conviendrait d’étudier de plus près certaines de ces approches pour déterminer dans quelle mesure il serait possible de les adapter au contexte canadien.


CHAPITRE 2:
 LES SOINS DE SANTÉ MENTALE EN NOUVELLE-ZÉLANDE[7]

2.1        HISTORIQUE ET APERÇU

La Nouvelle-Zélande est un petit pays constitué de deux îles. Elle est située dans le sud de l’océan Pacifique et compte 4 millions d’habitants (en 2004). Elle a d’abord été peuplée par les Maoris, dont les ancêtres étaient originaires de Polynésie orientale, au moins 800 ans avant les premiers colons européens. Aujourd’hui, les principaux groupes ethniques sont les Européens d’origine, pour la plupart du Royaume-Uni et de l’Irlande (75 p. 100), les Maoris (15 p. 100), les Polynésiens (6 p. 100) et les Asiatiques (4 p. 100).

Le pays est devenu une colonie de la Grande-Bretagne suite au traité de Waitangi signé en 1840 par la Grande-Bretagne et la majorité des tribus maories. Ce traité, qui est l’un des documents constitutionnels fondateurs de la Nouvelle-Zélande, prend acte d’un partenariat avec les Maoris, puisqu’il reconnaît leur besoin d’autodétermination, énonce les responsabilités des gouvernements et protége les droits des Maoris. La résurgence de l’identité maorie au cours des 20 dernières années a fait de ce traité un pivot du dispositif d’élaboration des politiques.

La Nouvelle-Zélande est une démocratie parlementaire et un État indépendant au sein du Commonwealth britannique. Le Parlement ne compte qu’une chambre, la Chambre des représentants, et le pouvoir exécutif est exercé par un cabinet dirigé par un premier ministre.

Le système de santé néo-zélandais est principalement financé par les recettes fiscales, suppléées par les déboursements des usagers et l’assurance-maladie privée. En 1999-2000, l’État a contribué pour 75 p. 100 au budget de la santé, les usagers pour 15,7 p. 100 et les assureurs privés pour 6,3 p. 100 (bien que les assureurs privés n’offrent quasiment aucune protection pour les maladies mentales). La part publique du budget de la santé diminue depuis une vingtaine d’années, puisqu’elle est passée de 88 p. 100 en 1979-1980 à environ 77 p. 100 en 1994-1995, bien qu’elle soit en légère hausse depuis 2000 (78 p. 100).

Les patients bénéficient gratuitement de soins ambulatoires et hospitaliers, mais ils doivent payer tout ou une partie des soins primaires et payer leur quote-part des médicaments (les patients à faible revenu et ceux souffrant de maladies chroniques ayant droit à une carte dite de concession). Grâce à de nouveaux investissements et à la réforme du système de santé primaire entreprise en 2004, les particuliers ont de moins en moins à payer de leur poche.

Le gouvernement conserve la responsabilité générale du système de santé, mais la prestation des soins est partagée entre les secteurs public, bénévole et à but lucratif. Les omnipraticiens et les spécialistes indépendants assurent le gros des soins ambulatoires et les hôpitaux publics le gros des soins secondaires et tertiaires tandis, les hôpitaux privés se spécialisant surtout dans les chirurgies électives et les soins de longue durée.

Dans les années 90, les gouvernements néo-zélandais ont, plus que dans la plupart des pays, introduit des pratiques de marché dans le secteur de la santé, y compris les concepts de concurrence et de séparation entre acheteur et fournisseur.[8] Cependant, à la fin de la décennie, le gouvernement travailliste-allianciste décidait que le « marché interne » n’avait pas amélioré sensiblement l’efficacité et l’efficience des services. En 2000, il a redonné à des conseils de district la responsabilité financière et la tâche de fournir en partie les soins de santé. Il a ainsi créé 21 District Health Boards (ou DHB, pour Conseils de santé de district) desservant des populations géographiquement définies, qui fournissent les soins eux-mêmes ou financent d’autres pour le faire. Ces autorités autonomes reçoivent leurs ressources dans le cadre d’un régime de financement triennal établi d’après les contrats de fourniture passés et sont responsables, auprès du ministre de la Santé, de leur orientation stratégique, de la nomination de leur directeur, de la santé de leur population et de leur propre rendement. Chaque district compte au moins un grand hôpital public.

On considère que les services de santé néo-zélandais répondent généralement à la demande et qu’ils sont de bonne qualité. En 2004, la majorité des DHB respectent leurs objectifs, mais les gens ont tout de même l’impression que les hôpitaux sont sous-financés, d’où les longues liste d’attente pour les chirurgies électives. En 2001, la Nouvelle-Zélande a entamé la restructuration de son système de soins primaires en mettant sur pied des organismes de soins primaires à but non lucratif financés, du moins en partie, par capitation, c’est-à-dire en fonction du nombre de patients inscrits auprès de chaque organisme. Le but visé est de réduire l’importance de la quote-part que doivent verser les patients. Jusqu’ici, seuls quelques groupes particuliers bénéficient d’un financement complet, autrement dit d’une « couverture universelle », des services de soins primaires parce qu’ils ont de faibles revenus ou souffrent d’une maladie chronique. La Dre Janice Wilson, directrice générale adjointe, Direction générale de la santé mentale au ministère de la Santé, a précisé au comité que l’objectif de la nouvelle stratégie en matière de soins primaires consistait à « étendre progressivement les paiements universels, d'ici cinq à dix ans, à près de 80 p. 100 de la population ».

2.1.1     La stratégie de santé mentale

La Stratégie nationale de santé mentale a été introduite par le gouvernement en juin 1994 par la publication de Looking Forward:  Strategic Directions for the Mental Health Service. Elle a été développée dans un deuxième document publié en juillet 1997, le Plan national de santé mentale, Moving Forward:  The National Mental Health Plan for More and Better Services. Dans l’ensemble, elle poursuit deux grands objectifs :

1.      Réduire la prévalence de la maladie mentale et des problèmes de santé mentale dans la population;

2.      Relever le statut sanitaire des troubles mentaux et réduire leur impact sur les usagers et leurs familles, sur les soignants et sur le grand public.

La Dre Wilson nous a indiqué que « le principal objet de la politique, à ce moment, était de rationaliser ce qu’on appelle la désinstitutionnalisation ». Elle a ajouté que cette politique répond aussi en partie aux pratiques exemplaires adoptées à l’échelle internationale, pratiques qui soulignent la nécessité d’« adopter une approche gouvernementale plus globale en faisant le lien avec d’autres secteurs, comme le logement, l’emploi, la main-d’œuvre, et cetera » afin de rapprocher les services de la collectivité et de les intégrer dans les autres services de santé.

En 1996, une commission de la santé mentale a été chargée de mettre en œuvre la stratégie nationale de santé mentale. Composée de trois commissaires, elle exerce les fonctions suivantes :

·        Mesurer l’efficacité du ministère de la Santé et des 21 conseils de santé de district à mettre en œuvre la stratégie nationale de santé mentale et faire rapport de ses constatations au gouvernement;

·        Travailler en collaboration avec le secteur pour mieux faire connaître la santé mentale au public et pour réduire la discrimination et les préjugés à l’endroit des personnes atteintes de troubles mentaux;

·        Travailler à renforcer le personnel de la santé mentale.

La Commission a publié le Blueprint for Mental Health Services in New Zealand en 1998. Il s’agit d’un plan de mise en œuvre de la stratégie qui a été accepté comme politique gouvernementale. Il est question de donner aux conseils de santé et aux soignants un aperçu clair des mesures qu’ils peuvent prendre pour améliorer la qualité et faire comprendre aux usagers et à leurs familles ce qu’ils sont en droit d’attendre d’un système qui fonctionne bien.

La stratégie nationale comporte sept orientations stratégiques dont voici un bref résumé :

Orientation stratégique 1 : Mettre en œuvre en milieu communautaire des services de santé mentale complets. Il s’agit d’offrir des services de promotion de la santé et de prévention des maladies mentales, d’évaluation et d’intervention précoces, de traitement, de rééducation et de soins continus.

Orientation stratégique 2 : Encourager la participation des Maoris à la planification, à la formulation et à la fourniture des services de santé mentale. Il s’agit d’améliorer la santé mentale des Maoris pour qu’elle soit aussi bonne que celle de l’ensemble de la population néo-zélandaise. La prévalence des troubles mentaux est sensiblement plus élevée chez les Maoris que dans le reste de la population.

Orientation stratégique 3 : Améliorer la qualité des soins. Il est question de combler certaines des lacunes évidentes héritées du passé. On espère que les objectifs nationaux seront atteints grâce à des normes de service, à des programmes d’assurance de la qualité et à des indicateurs d’efficience et d’efficacité.

Orientation stratégique 4 : Concilier les droits individuels avec la protection du public. Il s’agit d’assurer un meilleur équilibre entre le droit des usagers de soins de santé mentale à vivre dans la collectivité et le droit du public à la protection.

Orientation stratégique 5 : Élaborer une politique nationale de lutte contre l’alcoolisme et la toxicomanie. Il s’agit de mieux intégrer les services d’aide aux alcooliques et aux toxicomanes, de mieux exploiter la palette des soins en établissement et des soins ambulatoires et de fournir des soins plus systématiques aux alcooliques ou toxicomanes atteints d’un trouble mental.

Orientation stratégique 6 : Développer l’infrastructure des services de santé mentale. Cette orientation stratégique a été ajoutée en 1997. Il s’agit de l’« infrastructure » nécessaire pour assurer des services plus nombreux et meilleurs – d’éléments comme le perfectionnement de la main-d’œuvre, la collecte et l’analyse de données et la coordination entre les services. Ces éléments relevaient auparavant de l’Orientation stratégique 3, mais ils ont été jugés assez importants et complexes pour faire l’objet de leur propre orientation stratégique.

Orientation stratégique 7 : Renforcer la promotion et la prévention. Cette orientation stratégique a également été ajoutée en 1997 afin de mettre davantage l’accent sur la réduction nécessaire de la prévalence de la maladie mentale et des problèmes de santé mentale.

L’élaboration de la stratégie de santé mentale en Nouvelle-Zélande a été basée sur des données épidémiologiques selon lesquelles un adulte sur cinq souffre d’un problème de santé mentale diagnosticable. On estime qu’environ 3 p. 100 des adultes – et environ 5 p. 100 des enfants et des adolescents de moins de 20 ans – sont atteints d’un trouble mental grave. Par ailleurs, 5 p. 100 des adultes souffrent d’un trouble modéré à grave et 12 p. 100 d’un trouble ou d’un problème léger à modéré.

La stratégie nationale vise à ce que les services soient offerts en qualité et en nombre voulus pour répondre aux besoins de 3 p. 100 des adultes et de 5 p. 100 des enfants et des adolescents souffrant d’un trouble mental grave. Les lignes directrices relatives aux ressources, contenues dans le Blueprint, fournissent une estimation du nombre de lits et d’agents en milieu communautaire dont il faut disposer par 100 000 habitants dans l’hypothèse où 3 p. 100 de la population a besoin de ces services. Ces lignes directrices ont été élaborées surtout pour calculer les budgets et les besoins d’expansion des services à l’échelle nationale, mais elles sont aussi utilisées au niveau régional.

Le modèle de fourniture des services employé dans le Blueprint met l’accent sur les soins en milieu communautaire, mais prévoit aussi des soins actifs en établissement ainsi que des services de rééducation et des soins de longue durée en établissement. Les lignes directrices tiennent également compte du développement des services fournis par les usagers. Le tableau suivant résume les objectifs fixés par le Blueprint en 1998. Les objectifs nationaux sont ajustés en fonction de la croissance démographique.

OBJECTIFS CONCERNANT LES RESSOURCES, 1998

 

 

Ressources

Objectif
national

Niveau national actuel

 
 

En hôpital

Lits ou « postes de soins »[9]

1 535

1 424

 

En établissement

Lits ou « postes de soins »

3 243

2 576

 

En milieu communautaire

ÉTP[10]

3 822

1 923

 

Soutien communautaire

ÉTP

1 284

388

 

Services et initiatives de conseil (usagers et familles)

ÉTP

246

63

 

Accès aux nouveaux anti-psychotiques

Personnes

8 500

3 547

 

Désintoxication

Lits ou « postes de soins »

113

96

 

Services aux alcooliques et toxicomanes en établissement

Lits ou « postes de soins »

378

376

 

Services aux alcooliques et toxicomanes en milieu communautaire

ÉTP

614

262

 

Traitement à la méthadone

Endroits

5 666

3 030

 

Prévention de la maladie mentale

ÉTP

378

0

 


 

2.2       COÛTS ET FINANCEMENT DES SERVICES DE SANTÉ MENTALE

Le Dr David Chaplow, directeur et conseiller principal en santé mentale, gouvernement de la Nouvelle-Zélande, a indiqué au Comité que le fait de disposer d’un « plan assorti de données sur les coûts de réalisation, avec une analyse de l’écart entre ce qui existait et ce dont nous avions besoin, a été un outil de promotion très puissant » dans les négociations avec le Trésor en vue d’obtenir un financement supplémentaire pour la santé mentale. Depuis l’adoption de la stratégie de santé mentale, le budget de la santé mentale a augmenté. Entre 1993-1994 et 2001-2002, le financement public des services de santé mentale en Nouvelle-Zélande est passé de 270 à 725  millions de dollars par an, soit une hausse d’environ 127 p. 100 compte tenu de l’inflation. La Dre Wilson a précisé : « le gouvernement actuel s’est engagé à maintenir le financement à ce niveau au moins jusqu’en 2007 parce que nous n’avons pas encore terminé tous les éléments de notre programme de réforme ».

La Commission de la santé mentale note cependant que, dans l’ensemble, le point de départ des récentes augmentations budgétaires était trop faible. À son avis, les niveaux de services de santé mentale ne sont toujours pas à un niveau acceptable et il y a encore place à l’amélioration pour atteindre les objectifs du Blueprint. Selon la Dre Wilson,

La Commission a fixé des objectifs et nous avons atteint un taux de couverture d'environ 75 p. 100. Le pourcentage est proche de 60 p. 100 dans certaines régions du pays, tandis qu'il est de presque 100 p. 100 dans d'autres. Nous avons des écarts régionaux qui dépendent de la croissance démographique et d'autres facteurs.

 

Le tableau suivant présente les estimations que la Commission a utilisées dans le document d’information qu’elle a adressé au nouveau ministre de la Santé.

POURCENTAGE DES OBJECTIFS DE FINANCEMENT
DU BLUEPRINT EN 2002

Secteur de service

Niveau de financement approximatif en juillet 2002 par rapport aux lignes directrices du Blueprint

Services hospitaliers

89%

Services communautaires en clinique

69%

Services communautaires hors clinique

44–59%

Services communautaires aux alcooliques et aux toxicomanes

74%

Services de méthadone

65%

Services communautaires aux enfants et aux adolescents

63%

Dans le cadre de la tendance à la communautarisation des services, 69 p. 100 des crédits de santé mentale (à l’exclusion des médicaments et des services de santé publique) sont allés aux services dispensés en milieu communautaire en 2001-2002. Ce chiffre représente une hausse de 67 p. 100 par rapport à l’année précédente et inclut 57,4 p. 100 des crédits de prestation des conseils de santé de district (DHB) et la presque totalité des fonds des organisations non gouvernementales (ONG). Comme l’indique le tableau précédent, la proportion du budget de santé mentale affectée aux services fournis par des (ONG) est restée stable au cours des trois dernières années.

En dépit de l’augmentation des budgets, la Commission de la santé mentale continue d’exprimer des préoccupations quant au niveau global de financement et à l’engagement des DHB à dépenser effectivement les crédits affectés à la santé mentale. Elle déplore également que l’effet de l’augmentation des budgets sur les niveaux de service soit restreint par des pénuries de main-d’œuvre. En effet, même quand il y a des fonds, beaucoup de postes restent vacants.

La Commission a donc réitéré ses recommandations :

·        Une filière de financement durable doit être établie pour assurer le développement des services de santé mentale en fonction des orientations de la stratégie nationale de santé mentale, de la mise en œuvre du Blueprint et de la capacité du secteur à se développer.

·        Les crédits de santé mentale affectés aux 3 p. 100 de la population qui sont le plus sévèrement touchés par la maladie mentale doivent être protégés par une obligation de dépenser claire et strictement limitée.

2.3       PRESTATION ET ORGANISATION DES SERVICES

Le but premier du Blueprint est de faire en sorte que 3 p. 100 de la population aient accès aux services de santé mentale. Pour l’ensemble de la Nouvelle-Zélande, l’accès déclaré aux services de santé mentale concernait 1,7 p. 100 de la population en 2001-2002 contre 1,6 p. 100 l’année précédente. Cependant, comme les données n’ont pas été obtenues de toutes les ONG pendant cette période, il se peut que l’accès aux services soit sous-estimé.

En Nouvelle-Zélande comme ailleurs, la désinstitutionnalisation des malades psychiatriques se poursuit depuis un quart de siècle. Bien que la situation varie d’une région à l’autre, la plupart des services de santé mentale sont fournis en milieu communautaire, notamment par des équipes mobiles d’intervention d’urgence de 24 heures et par les hôpitaux généraux dotés de services de soins psychiatriques actifs. En 2000, tous les services de soins psychiatriques actifs (à une exception près) étaient intégrés aux hôpitaux généraux et la quasi-totalité des 10 établissements psychiatriques étaient complètement fermés, seuls quelques-uns ayant conservé des services de psychiatrie légale ou d’autres services spécialisés.

Voici ce que le Dr Chaplow a tout de même déclaré au Comité

nous n'avons jamais diminué le nombre total de lits qu'il y avait dans les anciens asiles. Nous avons réparti ces places sous diverses formes: il y en a encore dans les hôpitaux et il y en a dans la collectivité.

Il existe quelques services de rééducation en milieu hospitalier et un éventail croissant de formules d’hébergement et de formation professionnelle assistés ainsi que des programmes de jour et des centres d’accueil, souvent administrés par les usagers. La plupart des adultes qui reçoivent des services de santé mentale sont encadrés par un gestionnaire de cas ou un travailleur de soutien en milieu communautaire.

Le dernier Report on Progress publié par la Commission de la santé mentale contient les statistiques suivantes pour 2001-2002 :

·        Le nombre de personnes hospitalisées est faible comparativement à celui des personnes qui reçoivent des services de santé mentale. Dans les six premiers mois de 2002, 0,14 p. 100 de la population totale (5 546 personnes) a été traitée en milieu hospitalier contre 1,7 p. 100 par les services de santé mentale (63,271).

·        En 2001-2002, il n’y a pas eu d’expansion des services cliniques communautaires pour adultes hors établissement. Le nombre des postes de personnel clinique financés dans ces services atteignait 85 p. 100 de l’objectif du Blueprint contre 87 p. 100 en juin 2001.

·        Les services non cliniques dispensés en milieu communautaire englobent le soutien à domicile, le soutien à l’emploi et à l’éducation, les activités de jour et l’acquisition des compétences psychosociales, les services d’entraide et de soutien familial. Ces services sont assurés surtout par des travailleurs de soutien, des aides-infirmières et des travailleurs de soutien culturel travaillant pour des ONG dans un rôle de thérapie ou de soutien. Les ressources affectées aux services de soutien non cliniques dispensés en milieu communautaire sont passées de 59 p. 100 l’année précédente à 65 p. 100 de l’objectif du Blueprint.

·        Dans l’ensemble du pays, le nombre de lits résidentiels offerts aux adultes en milieu communautaire a diminué, passant de 93 p. 100 de l’objectif du Blueprint en 2000-2001 à 83 p. 100 en 2001-2002. Comme cette réduction tient en grande partie au fait qu’une grosse ONG a cessé d’offrir des services résidentiels pour ne plus offrir que des soins à domicile, il n’y a pas eu réduction de la capacité.

Comme ailleurs dans le monde, en Nouvelle-Zélande, l’accès aux services de santé mentale passe par les omnipraticiens. Cependant, nombreux sont les Néo-Zélandais (notamment parmi les Maoris et les Polynésiens) qui ne s’adressent pas aux omnipraticiens et ils n’ont donc pas accès aussi rapidement qu’il le faudrait aux services de santé mentale.

L’impact des frais d’utilisation au titre des soins primaires sur l’accès aux services de santé mentale pose également problème. Il est admis que ces frais peuvent constituer un obstacle à l’utilisation des soins primaires et qu’ils peuvent donc inciter les gens atteints d’une maladie légère ou modérée à s’adresser aux services de santé mentale spécialisés (qui n’ont pas les mêmes frais d’utilisation) alors qu’ils pourraient être traités convenablement par les fournisseurs de soins primaires. On craint même que les frais d’utilisation ne découragent complètement les gens de s’adresser au système de santé. Comme nous l’avons vu plus haut, des efforts sont en cours pour réorganiser la prestation des soins primaires en fonction d’un modèle de capitation qui pourrait réduire l’impact des frais d’utilisation.

2.3.1     Les services aux Maoris

Mme Arawhetu Peretini, gestionnaire en santé mentale des Maoris au gouvernement de la Nouvelle-Zélande, a expliqué ce qui suit au Comité :

Ils (les Maoris) vivent surtout en milieu urbain. Nous n'avons pas de réserves. Les aborigènes sont dans une grande mesure intégrés dans le reste de la société. La majorité vit probablement dans une ville du nord de l'île. Ces 10 dernières années, nous avons eu un mouvement préconisant le retour des Maoris dans leurs terres tribales, dont environ 90 p. 100 se trouvent dans des régions rurales. Toutefois, beaucoup n'ont pas suivi le mouvement parce qu'ils travaillent dans des agglomérations urbaines.

Un grand spécialiste, le professeur Mason Durie[11] estime que les troubles mentaux sont devenus le problème de santé numéro un des Maoris. Les séjours en hôpital psychiatrique, l’alcoolisme et la toxicomanie, le suicide et la tentative de suicide sont en hausse alors que les autres problèmes de santé comme la cardiopathie sont en baisse. Les Maoris ont de nombreux besoins auxquels ne répondent pas les services de santé mentale. Bien qu’on ne dispose pas de données exactes et actuelles sur la prévalence de la maladie mentale chez les Maoris, on sait qu’il y a un nombre disproportionné de Maoris dans les services de crise, de soins actifs et de psychiatrie légale. Comme devait le préciser Mme Peretini :

Certains des problèmes découlent du fait que beaucoup de Maoris tendent à se présenter dans les services à des stades aigus de maladie mentale.

Qui plus est, les taux de réadmission des Maoris sont sensiblement plus élevés que ceux des non-Maoris et ils ne cessent d’augmenter depuis plusieurs années. Les Maoris sont également sur-représentés dans les services d’aide aux alcooliques et aux toxicomanes; c’est d’ailleurs le plus souvent pour cause d’alcoolisme, de toxicomanie ou de psychose qu’ils sont admis dans les services ou les hôpitaux psychiatriques.

Entre le 1er janvier et le 30 juin 2002, environ 10 500 Maoris ont été accueillis par les services de santé mentale, soit 1,9 p. 100 de tous les Maoris. Les Maori s’adressent aux services généraux de santé mentale ainsi qu’aux services axés sur leurs besoins. Tout en reconnaissant qu’il « reste encore des lacunes dans notre connaissance de chose tels que les taux d’admission et de réadmission », Mme Peretini devait nous préciser :

Ayant réalisé une enquête il y a trois ans, nous savons que certains des 21 districts répondent vraiment aux besoins des Maoris parce qu'ils ont inclus dans leur évaluation clinique une composante d'évaluation culturelle. Très peu le faisaient auparavant. Sur neuf commissions de santé de district, sept seulement avaient, à un moment ou un autre, envisagé d'adopter des politiques visant à répondre aux besoins des aborigènes admis dans les services généraux. Sur ces 7, trois seulement avaient des outils d'évaluation culturelle assez développés pour être utiles.

Depuis 1998, on constate une amélioration sensible du nombre de fournisseurs de soins maoris et de la disponibilité des services destinés expressément aux Maoris. On a également pris un certain nombre d’initiatives pour augmenter le nombre de Maoris qualifiés au sein du personnel de santé mentale. Mme Peretini nous a apporté une précision à cet égard :

Il y a deux ans, le ministère de la Santé a pris la décision, dans le cadre de notre stratégie de développement de la main-d'œuvre, d'établir une organisation axée sur les Maoris pour la formation et le perfectionnement de la main-d'œuvre. Il y a environ un an, cette organisation a réalisé une série d'enquêtes sur notre population active. Plutôt que de vous donner les détails des résultats, je dirai que nous n'avons pas une main-d'œuvre très importante. À l'heure actuelle, elle se limite probablement à cinq psychiatres en formation.

[…] nous avons fixé des quotas pour l'enseignement de certaines disciplines en Nouvelle-Zélande. Nous le faisons depuis au moins 20 ans. Nous avons également quelques leaders maoris du domaine de la santé qui sont devenus psychiatres.

Le Cadre stratégique national pour la santé mentale des Maoris a été publié en avril 2002 après de vastes consultations. Voici les objectifs à atteindre en cinq ans :

·        fournir des services cliniques, culturels et auxiliaires complets à au moins 3 p. 100 des Maoris, notamment à ceux dont les besoins en santé mentale sont les plus grands;

·        veiller à ce que la participation active des Maoris à la planification et à la prestation des services de santé mentale reflète les modèles de santé maoris et les critères maoris de santé mentale;

·        veiller à ce que 50 p. 100 des adultes maoris en quête de mieux-être aient le choix entre les services de santé mentale généraux et les services destinés à leur communauté;

·        augmenter de 50 p. 100 par rapport aux niveaux de 1998 le nombre des travailleurs maoris en santé mentale, y compris les cliniciens,

Le Dr Chaplow a indiqué que la Nouvelle-Zélande est « dans une étape de transition » où « il faudra augmenter le nombre de psychiatres aborigènes ou leurs adjoints ou d’autres ». Toutefois, le témoin a ajouté qu’« un des aspects les plus importants des progrès réalisés est que les Maoris s’occupent eux-mêmes de leur service et relèvent eux-mêmes les défis ».

La Dre Wilson a expliqué l’importance de ce genre d’évolution :

La maladie mentale a ceci de particulier qu'elle touche la façon dont vous vous envisagez vous-même ainsi que vos croyances sur le plan spirituel et culturel. Les gens communiquent beaucoup mieux avec ceux de leur propre culture. Si vous êtes un patient, votre relation avec la personne qui vous soigne, que ce soit un médecin ou une infirmière, est probablement le facteur le plus critique qui agisse sur la guérison. Si cette personne peut comprendre votre culture et vos croyances, les chances d'un résultat positif sont sensiblement meilleures.

2.3.2    Les ressources humaines

Plusieurs commissions et rapports ont fait remarquer que le développement de la main-d’œuvre est en mesure de contribuer grandement à régler les problèmes de prestation des services de santé mentale en Nouvelle-Zélande. Il est généralement admis que, bien que le personnel de santé mentale ait augmenté considérablement grâce à la mise en œuvre de la stratégie nationale, il ne suffit toujours pas pour répondre aux besoins de la population. Par exemple, il y a en Nouvelle-Zélande une pénurie de psychiatres par rapport aux autres pays occidentaux semblables. Le Dr Chaplow a indiqué au Comité que « dans les statistiques sur la santé dans le monde, on dit qu'il faudrait avoir un psychiatre pour 10 000 personnes. Nous n'en avons qu'un pour 15 000 », tout en insistant sur le fait suivant :

Le problème, c'est de savoir comment utiliser les psychiatres comme membres de l'équipe. De plus, les psychiatres ont tendance à se regrouper autour des universités ou établissements d'enseignement. Souvent, il y a déséquilibre entre la ville et la campagne, pour ce qui est de l'accès à de bons services de psychiatrie.

La Dre Wilson devait ajouter que la pénurie de ressources humaines a gagné tous les secteurs :

Dans l'ensemble de l'effectif, il va sans dire que nous sommes à court dans tout le système. Il n'y a pas que les psychiatres. Nous avons des pénuries d'infirmières, de psychologues et de toutes sortes d'autres professionnels. C'est pourquoi nous avons une initiative importante qui porte sur le recrutement et le maintien à l'effectif.

Des rapports de 2000-2001 indiquent que les postes vacants budgétisés en milieu communautaire comptaient pour 6 à 7 p. 100 du total. Il est également difficile de recruter et de conserver du personnel en dehors des grands centres, les conditions de travail étant rendues difficiles par la nécessité d’assurer les services 24 heures sur 24, par le manque de soutien des pairs et par l’isolement professionnel.

Établi au début de 1998, le Comité national de coordination du personnel de santé mentale a pour tâche de coordonner le développement de la main-d’œuvre dans l’ensemble du secteur, d’élaborer et de mettre en place un cadre définitif de réglementation nationale et de dotation en ressources du développement du personnel de santé mentale. Il est dirigé par les fournisseurs de soins et représente les principaux intervenants du secteur. Cependant, il n’y a toujours pas de plan global de développement du personnel de santé mentale.

Selon la Dre Wilson, de nouveaux types de travailleurs en santé mentale ont été formés au cours des dernières années.

Nous avons un nouveau groupe de travailleurs, les travailleurs du soutien communautaire en santé mentale, qui reçoivent une formation depuis probablement cinq ans. Ils travaillent surtout dans le secteur des ONG, mais ils travaillent aussi dans le secteur public principal. Ils reçoivent une formation pour aider les patients ou consommateurs qui ont des troubles mentaux, que ce soit à domicile ou dans des unités résidentielles communautaires, ou pour les aider à se débrouiller avec le système. Ils peuvent par exemple les accompagner au service du soutien du revenu, au service de l'emploi, pour les aider à surmonter les obstacles sociaux.

Ces travailleurs du soutien communautaire en santé mentale sont dûment qualifiés en vertu du cadre national de certification. Ils sont ainsi environ 2 000 à avoir reçu un certificat en travail de soutien communautaire en santé mentale.

2.4       PROMOTION ET PRÉVENTION

En décembre 2002, après deux années de consultation auprès de plus de 200 particuliers et organisations, le ministère de la Santé a publié un document intitulé Building on Strengths (S’appuyer sur nos forces) qui décrivait l’approche nationale en matière de promotion de la santé pour les cinq années suivantes. Building on Strengths vise à promouvoir le bien-être mental des Néo-zélandais et à réduire les inégalités sur ce plan en améliorant les milieux sociales, économiques, culturels, politiques et physiques au pays.

La stratégie néo-zélandaise en matière de promotion de la santé mentale prend acte de la nécessité d’instaurer une collaboration entre les secteurs de la santé et les autres secteurs, notamment les administrations locales, les autres ministères et les Maoris, les groupes communautaires du Pacifique et les autres et il invite le secteur de la santé à prendre l’initiative en coordonnant la promotion de la santé mentale.

Building on Strengths vise à réaliser trois objectifs :

1.      Permettre aux particuliers et aux collectivités d’agir de leur propre chef.

2.      Décrire les actions prioritaires que le ministère de la Santé envisage de conduire au chapitre de la promotion de la santé mentale.

3.      Donner une orientation aux fournisseurs de services en santé et aux autres secteurs d’activité afin qu’ils puissent contribuer à l’amélioration de la santé mentale et du bien-être mental des Néo-zélandais.

La stratégie décrite dans Building on Strengths énonce trois objectifs bien précis :

·        Réduire les inégalités dont sont victimes certains groupes en matière de santé mentale.

·        Créer un environnement favorable à l’amélioration de la santé mentale.

·        Améliorer le ressort psychologique des particuliers et des collectivités.

Pour permettre la réalisation de ces objectifs, cinq priorités ont été énoncées :

1.      Réorienter les services de santé afin de réduire les inégalités entre les différents groupes socioéconomiques.

2.      Renforcer l’action communautaire en matière d’activité de promotion de la santé mentale.

3.      Instaurer un milieu favorable et sûr grâce à des mesures destinées à resserrer la cohésion sociale au sein des villes, des petites agglomérations, du milieu de travail, des écoles et des foyers.

4.      Améliorer les compétences personnelles en agissant sur les facteurs favorables à la santé mentale comme le ressort psychologique, le soutien social et les compétences psychosociales.

5.      Instaurer une politique publique saine par l’amélioration de la recherche et de l’évaluation en vue de recenser les besoins en matière de promotion de la santé mentale et de répondre à ces besoins.

Le ministère de la Santé est en train de consacrer plusieurs millions de dollars chaque année sur le chapitre de la promotion de la santé mentale et Building on Strengths a justement été publié pour proposer un cadre national de financement soutenu. Il n’est pas prévu que la campagne fasse l’objet d’un financement supplémentaire.

2.4.1     Le projet de lutte contre la stigmatisation et la discrimination associées à la maladie mentale

Le projet de lutte contre la stigmatisation et la discrimination associées à la maladie mentale appelé « Like Minds, Like Mine » (Tu penses, donc je suis!) a été lancé pour cinq ans en 1996 et financé par la suite en permanence par le gouvernement. Depuis le début, les activités parrainées par « Like Minds, Like Mine » visent à sensibiliser le public à la maladie mentale et notamment à la stigmatisation dont sont victimes ceux qui en souffrent ou en ont souffert. Le projet est ainsi parvenu à faire évoluer de façon quantifiable les attitudes dans la plupart des secteurs de la population.

La Dre Wilson a permis aux membres du Comité de comprendre les fondements des progrès réalisés :

D'abord, il est très important de comprendre qu’au tout début de cette initiative ou de ce programme, des recherches de base considérables ont été entreprises. Elles ont porté sur les attitudes dans la population et sur les réactions que susciterait une campagne de sensibilisation. Cette démarche s'est déroulée parallèlement à notre approche de développement communautaire.

La Dre Wilson a permis aux membres du Comité de comprendre les fondements des progrès réalisés :

D'abord, il est très important de comprendre qu’au tout début de cette initiative ou de ce programme, des recherches de base considérables ont été entreprises. Elles ont porté sur les attitudes dans la population et sur les réactions que susciterait une campagne de sensibilisation. Cette démarche s'est déroulée parallèlement à notre approche de développement communautaire.

La première campagne nationale a eu lieu, et les recherches qui ont suivi ont révélé une évolution étonnante de l'attitude. On semblait mieux comprendre les troubles mentaux courants comme la dépression, les troubles anxieux, l'alcoolisme, et cetera.

Comme on estime avoir fait des progrès substantiels en matière de sensibilisation, le tout dernier plan (2003-2005) vise plutôt à réduire la discrimination. Il allie un modèle des droits de la personne à un modèle social de la déficience, qui a une forte analogie avec la discrimination dont sont victimes ceux qui font l’expérience de la maladie mentale.

Voici les grands objectifs du projet :

·        Permettre à tous ceux qui font l’expérience de la maladie mentale d’obtenir l’égalité et le respect et de jouir des mêmes droits que les autres.

·        Modifier la politique des secteurs public et privé de manière à valoriser et à inclure tous ceux qui font l’expérience de la maladie mentale.

·        Mieux faire comprendre, accepter et appuyer tous ceux qui font l’expérience de la maladie mentale.

Voici quelques-uns de ses objectifs plus précis :

·        Assurer le leadership et la participation des particuliers et des groupes qui ont l’expérience de la maladie mentale.

·        Préconiser des politiques et des pratiques non discriminatoires au sein des organisations responsables du logement, de l’éducation, de l’emploi, du revenu et de l’accès aux biens et services et au sein des organisations responsables des services de santé mentale.

·        À l’aide des médias de masse, de l’éducation communautaire et d’autres moyens, favoriser l’inclusion sociale de ceux qui font l’expérience de la maladie mentale.

·        En reconnaissance de leur statut aux termes du traité de Waitangi, faire mettre au point par les Maoris des stratégies de lutte contre la discrimination dont sont victimes les Maoris qui font l’expérience de la maladie mentale.

La Dre Wilson nous a précisé que la première version de la campagne avait fait « appel à des Néo-Zélandais très connus qui étaient disposés à parler publiquement de leurs problèmes de dépression et de troubles anxieux » mais que « La campagne actuellement en cours a laissé tomber les personnalités connues pour faire appel à des gens ordinaires qui ont été atteints de maladies assez graves, comme la manie-dépression ou le trouble bipolaire, la schizophrénie, et cetera. L'accent est mis sur ces personnes, leur famille, leur vie »

2.5       PERSPECTIVES DE RÉFORME

La Dre Wilson nous a appris qu’un second plan national en matière de santé mentale était en cours de préparation et qu’une première mouture serait bientôt soumise au Cabinet avant d’entreprendre de vastes consultations avec le milieu. Elle espère que celui-ci sera mené à terme et qu’il sera accepté par le gouvernement avant la fin de 2004.

En avril 2004, la Commission de la santé mentale a publié un document de consultation pour obtenir des idées sur les meilleurs moyens de poursuivre et de consolider les progrès déjà réalisés en matière de soins de santé mentale en Nouvelle-Zélande et pour faire en sorte que le Blueprint s’adapte à l’évolution des circonstances et serve de base à l’avenir. Parmi les moyens possibles à employer, mentionnons :

·        améliorer l’application du Blueprint;

·        modifier le Blueprint afin d’en faciliter l’application;

·        modifier sensiblement le contenu de Blueprint;

·        modifier les modalités de financement, de planification, d’adjudication des contrats et de prestation des services.

Élaboré entre 1997 et 1998, le Blueprint a plus de cinq ans. Le document de consultation note que, pendant cette période, beaucoup de choses ont changé dans le secteur de la santé et dans la société néo-zélandaise. Voici quelques-uns des facteurs qu’on estime devoir prendre en compte au moment de mettre à jour le Blueprint :

·        Changements structurels – quatre régies régionales de la santé, puis l’Autorité de financement de la santé ont été remplacées par 21 District Health Boards, dont trois desservent moins de 50 000 habitants et quatre seulement desservent plus de 400 000 habitants.

·        Des processus de planification régionaux se sont fait jour en utilisant de multiples réseaux d’intervenants qui se sont superposés à la structure législative des DHB.

·        L’accent mis sur la concurrence dans le secteur de la santé a été remplacé par des attentes en matière de coordination et de collaboration et de développement des capacités des fournisseurs.

·        Les attentes du public, des politiciens, des usagers, des familles et des cliniciens en matière de services de santé mentale ont augmenté.

·        Un nouveau personnel non clinique s’est constitué, principalement dans le cadre d’ONG, personnel dont la formation est assujettie à des normes nationales.

·        Il y a eu des changements dans la pratique clinique, y compris l’adoption d’un modèle de rétablissement et de la Norme nationale du secteur de la santé mentale et l’utilisation répandue des antipsychotiques de la nouvelle génération.

La discussion et le débat vont orienter la Commission dans la tâche qui lui incombe à présent, soit de rédiger une note d’accompagnement ou d’interprétation à l’appui du Blueprint et d’adapter sa mise en œuvre à l’évolution des circonstances.

2.6       OBSERVATIONS DU COMITÉ

Le Comité a été fortement impressionné par les progrès réalisés par la Nouvelle-Zélande depuis l’adoption de sa stratégie en matière de santé mentale, en 1994. L’expérience néo-zélandaise est une autre preuve de l’importance déterminante que revêt une planification suivie dans le domaine de la santé mentale. Le Comité a particulièrement pris note du fait que l’existence d’un plan détaillé, soigneusement chiffré, assorti d’objectifs bien précis, a aidé le milieu de la santé mentale à obtenir du gouvernement qu’il augmente sensiblement son niveau de financement.

De plus, le fait que la Nouvelle-Zélande se soit attardée à mettre sur pied des services communautaires complets lors du processus de désinstitutionnalisation a permis la réaffectation des ressources en sorte d’éviter une diminution du nombre de lits occupés par ceux et celles qui en ont besoin. Nous avons aussi été frappés par le rôle très important joué par un organisme indépendant, la Commission de la santé mentale, dans le cadre de ce processus et par la détermination du gouvernement d’adopter les recommandations de cette commission.

C’est sans doute l’attention régulière que la Nouvelle-Zélande a accordée au cours de la dernière décennie aux besoins de la population Maori qui a surtout impressionné le Comité. Il semble que le fait d’avoir tablé sur la participation des Maoris à l’orientation stratégique a permis de réaliser des gains notoires parce qu’il a ainsi été possible à cette communauté de s’approprier les programmes qui lui étaient destinés et d’y apposer son empreinte culturelle. Qui plus est, l’aboutissement récent des efforts de formation de professionnels maoris en santé mentale nous donne à penser qu’il existe des façons de s’attaquer à ces délicates questions.

Les programmes adoptés en vue de conférer des titres officiels aux travailleurs communautaires en santé mentale constituent une autre dimension des initiatives de formation d’un personnel nécessaire, initiatives qui semblent porter fruit en Nouvelle-Zélande. Le Comité a pris note que les efforts déployés par ce pays en vue d’améliorer l’accès aux services de soins primaires et de réduire la demande de services de soins secondaires a nécessité l’adoption de mesures pour atténuer l’impact des frais d’utilisation sur le comportement de ceux et de celles qui ont besoin de soins de santé. L’expérience néo-zélandaise constitue donc une autre preuve que les tickets modérateurs ont un effet dissuasif sur les patients potentiels.

Par ailleurs, nous serions curieux de voir s’il est possible de s’inspirer de l’expérience des conseils de santé de district en Nouvelle-Zélande pour améliorer la prestation des services de santé mentale aux Canadiens qui résident dans les régions rurales et éloignées.

Enfin, les membres du Comité ont été impressionnés par l’évolution des efforts déployés par la Nouvelle-Zélande pour combattre la stigmatisation et la discrimination dont souffrent les personnes atteintes de maladie mentale, surtout par l’engagement du gouvernement d’assurer un financement à long terme à cet égard. L’expérience néo-zélandaise nous rappelle l’importance de constituer des bases de données et d’évaluer l’information recueillie pour concevoir des campagnes de lutte contre la stigmatisation en vue de tirer les enseignements qui s’imposent de chaque expérience et de corriger le tir au besoin.


CHAPITRE 3:
 LES SOINS DE SANTÉ MENTALE EN ANGLETERRE[12]

3.1        HISTORIQUE ET APERÇU

Bien que, jusqu’à la création récente des parlements écossais et gallois, son système parlementaire ait été le même que celui du Canada, le Royaume-Uni a tout de même été un État unitaire comprenant la Grande-Bretagne (Angleterre, Écosse et pays de Galles) et l’Irlande du Nord. Le système de santé publique – le National Health Service, soit le Service national de la santé (SNS) – est le même partout au Royaume-Uni, mais son administration relève de chaque juridiction qui le compose. Dans le présent chapitre, nous traiterons presque exclusivement des soins de santé en Angleterre et nous ne parlerons du Royaume-Uni que pour décrire les éléments communs. Établi en 1948, le SNS figure toujours parmi les systèmes de soins de santé dont l’administration et le financement sont les plus centralisés au monde.[13] Le gouvernement central assure non seulement le financement des services de santé, mais aussi une partie importante de la gestion et de la prestation des services.

Comme au Canada, toutes les personnes qui résident normalement au Royaume-Uni sont admissibles aux garanties de l’assurance maladie en vertu du SNS. Le SNS n’a pas une liste précise des services qu’il garantit. Cependant, il est plus complet que le régime d’assurance-maladie canadien car il garantit les services offerts par les médecins, les services hospitaliers, les médicaments délivrés sur ordonnance, les soins dentaires et d’optique. Il n’existe pas de frais d’utilisation à l’égard des services des médecins au Royaume-Uni et les services hospitaliers et des spécialistes sont offerts gratuitement. Des frais d’utilisation s’appliquent aux médicaments délivrés sur ordonnance, aux services dentaires et aux services optiques, et, contrairement au Canada, le Royaume-Uni autorise l’achat d’assurance-maladie privée offrant les mêmes garanties que le SNS si ces services sont offerts par des fournisseurs qui travaillent hors du SNS.

Au Royaume-Uni, la partie des dépenses relatives aux soins de santé financée par le secteur public (82 p. 100) est plus importante qu’au Canada (70 p. 100). Le SNS est financé principalement par le système général d’imposition du gouvernement central, ainsi que par un élément de contribution au fonds national auquel participent les employeurs et les employés. Les frais d’utilisation comptent pour moins de 3 p. 100 du financement total du SNS.

De nombreuses réformes importantes de la gestion et de la prestation des services de santé au Royaume-Uni ont été entreprises dans les années 90. Celles-ci ont initialement créé un « marché intérieur », c’est-à-dire que certains principes axés sur le marché ont été insérés dans le régime des soins de santé financés publiquement. Un « partage acheteur-fournisseur » a modifié les relations entre les autorités régionales de la santé et les hôpitaux, tandis que l’établissement « d’enveloppes budgétaires pour les omnipraticiens » a modifié l’organisation et la forme des pratiques de médecine générale. Le gouvernement travailliste de Tony Blair, élu la première fois en 1997, était contre l’existence d’un marché intérieur en matière de santé; il a depuis lors modifié un certain nombre de caractères importants du régime, mais n’a pas cherché à retourner à la formule d’origine.[14]

Mme Anne Richardson, chef de la Direction des politiques en santé mentale, ministère de la Santé au gouvernement du Royaume-Uni, nous a expliqué que, depuis 2001, le Service national de la santé comporte trois niveaux, le ministère de la Santé chapeautant le tout. Elle a précisé que « le rôle du ministère de la Santé est d'élaborer des politiques ainsi que les systèmes et les structures nécessaires pour assurer les services. Cependant, il ne s'occupe pas directement de la mise en oeuvre de ce changement ». On dénombre par ailleurs 28 autorités sanitaires stratégiques (ASS) qui sont chargées d’administrer le bon fonctionnement des services locaux.  Elles sont de taille variable (de 20 à 30 employés par emplacement) et peuvent assumer la responsabilité d’une trentaine de groupes de soins primaires (GSP), lesquels constituent le troisième niveau.

Les GSP, qui sont chargés de la gestion des services de santé, sont maintenant au centre du SNS et ils bénéficient de 75 p. 100 du budget du SNS. La plupart des GSP desservent des populations de 50 000 à 250 000 personnes, un GSP moyen servant quelque 100 000 personnes. On dénombre actuellement 302 GSP en Angleterre qui n’ont pas tous le même niveau d’expérience ni de compétence.

Les GSP offrent directement les soins primaires, ainsi que les services de santé communautaires et ils commandent des services[15] aux groupes hospitaliers et à d’autres fournisseurs de soins secondaires et tertiaires. Les GSP peuvent également commander d’autres services de soins primaires (services de physiothérapie, thérapies alternatives et counselling) et, comme nous le verrons, des services de santé mentale. Mme Richardson a indiqué au Comité que le travail des GSP sert « à interpréter les normes et les objectifs nationaux en fonction des besoins de leur population locale ».

3.1.1     La santé mentale

Jusqu’aux années 50, la principale forme de soin des personnes atteintes de maladie mentale était l’asile de type victorien. Comme ailleurs, avec l’arrivée de nouveaux médicaments et une prise de conscience publique voulant que les personnes atteintes de maladie mentale ont le droit de vivre dans la société, cette situation a commencé à changer à partir des années 60. On a commencé à fermer les vieux hôpitaux afin d’installer des unités psychiatriques plus modernes dans les hôpitaux généraux locaux. Ainsi, le nombre de lits d’hôpital avait diminué considérablement en 1978, passant de 129 000 en  1968 à 91 000 en 1978, à 63 000 en  1988‑1989 et à 36 000 en  1998-1999.

Il est fort possible que le débat politique continuera de porter sur la meilleure façon d’administrer le processus de désinstitutionnalisation et sur ses nombreuses ramifications. Dans les premières années de l’application de cette politique, il semble que les décideurs aient sous-estimé le niveau de soutien requis par un groupe relativement petit de personnes lourdement handicapées qui vivaient auparavant dans des asiles datant d,une autre époque. On n’a pas prévu les ressources nécessaires pour accueillir ces personnes dans la collectivité. En particulier, il n’existait ni soutien intensif à la santé et aux services sociaux, ni logement subventionné. Cette situation a contribué à entretenir, dans certains cercles, l’impression que la politique elle-même, celle des « soins communautaires », était mauvaise, malgré l’évidence sur le plan international des résultats améliorés obtenus grâce aux soins communautaires pour la grande majorité des personnes atteintes de maladie mentale.

Au cours des dernières années, la politique relative à la santé mentale a été modifiée considérablement pour créer un système de soins efficace adapté aux personnes souffrant de problèmes de santé mentale de tous les genres et de tous les niveaux de gravité. La série d’initiatives politiques prises au cours des années 90 a visé à consolider les services communautaires par la recherche d’un équilibre approprié entre les soins et le contrôle, et entre le soutien et la sécurité publique.

La politique a été promulguée dans les publications suivantes produites par le gouvernement :

·        Un livre blanc, paru en 1998 sous le titre Modernising mental health services: safe, sound and supportive, avait pour objet de recenser et de combler les lacunes en matière de prestation de services. Il exprimait une vision pour la création de services de santé mentale axés sur la sécurité, le bon sens et le soutien, par le biais de différentes mesures, y compris la création de services de soutien communautaires plus actifs, comme les « équipes d’intervention affirmative » afin de s’occuper des problèmes des personnes vivant dans la collectivité et dont les besoins sont complexes.

·        Ce livre blanc a été suivi du document sur le cadre du service national intitulé National Service Framework for Mental Health (NSF-MH), soit le Cadre national de service en matière de santé mentale, qui fixait des normes et des objectifs détaillés pour les services de santé mentale des adultes de 18 à 65 ans ayant des problèmes de santé mentale (voir ci-après);

·        Le NHS Plan, c’est-à-dire le plan du SNS, publié en 2000, prévoyait l’amélioration du programme décrit dans le National Service Framework en y ajoutant de nouveaux services, notamment l’intervention affirmative, la résolution des situations de crise (parfois appelée traitement à domicile) et l’intervention précoce dans les services psychotiques. Ce plan prévoyait l’arrivée de diplômés en soins primaires de santé mentale, de travailleurs qui orientent la clientèle et de travailleurs d’appui aux fournisseurs de soins et il favorisait les modifications structurelles comme la création de groupes de soins. Il contenait également les exigences relatives à la main-d’œuvre en santé mentale et les questions liées au recrutement et au maintien en poste, au leadership et à la formation. Le Plan du SNS comportait un financement nouveau de 300 millions de livres pour les services de santé mentale.

Le National Service Framework for Mental Health est un programme décennal. Mme Richardson a décrit au Comité les sept normes autour desquelles il s’articule :

·        La première concerne la promotion de la santé mentale — c'est-à-dire toutes les mesures nécessaires pour vous aider à lutter contre les préjugés qui entourent la maladie mentale et réduire les risques que les personnes développent une maladie mentale.

·        Les normes deux et trois portaient sur la santé mentale et les soins primaires, afin de prendre les mesures nécessaires pour améliorer l'accès aux services par des personnes atteintes de ce qu'on appelle des troubles mentaux courants.

·        Les normes quatre et cinq concernent les personnes ayant une grave maladie mentale — la proportion relativement faible du groupe total de personnes ayant des problèmes de santé mentale — qui néanmoins présentent le plus de risques de décès par suicide et autres causes, et qui présentent aussi les taux les plus élevés de morbidité. Je songe entre autres aux personnes diagnostiquées schizophrènes, bipolaires ou très gravement déprimées.

·        La norme six portait sur les mesures nécessaires pour améliorer les services et les mécanismes de soutien à l'intention des personnes qui prodiguent des soins.

·        La norme sept mettait l'accent sur toutes les mesures nécessaires dans l'ensemble du réseau des soins de santé et des services sociaux pour réduire le risque de suicide.

L’encadré suivant présente les sept normes en question.


NORMES « NSF-MH »

1.       Les services de santé et les services sociaux devraient :

·         favoriser la santé mentale pour tous, grâce au travail auprès des personnes et des collectivités;

·         lutter contre la discrimination à l’égard des personnes et des groupes ayant des problèmes de santé mentale, et favoriser leur insertion sociale.

2.       Tout utilisateur de services qui communique avec son équipe de soins de santé primaires et qui souffre d’un problème de santé mentale commun devrait :

·         faire identifier et évaluer ses besoins en santé mentale

·         se voir offrir des traitements efficaces, y compris le renvoi aux services spécialisés afin d’obtenir une évaluation plus poussée, ainsi que les traitements et les soins dont il a besoin.

3.       Toute personne souffrant d’un problème de santé mentale devrait :

·         pouvoir communiquer en tout temps avec les services locaux qui peuvent répondre à ses besoins afin de recevoir les soins appropriés;

·         pouvoir utiliser le service NHS Direct, à mesure qu’il sera mis en place, afin d’obtenir une opinion de premier niveau et le renvoi à des lignes secours spécialisées ou aux services locaux.

4.       Tout utilisateur de services de santé mentale rattaché au service « Care Programme Approche (CPA) » devrait :

·         recevoir des soins qui optimisent la responsabilisation, préviennent ou anticipent les crises et qui réduisent les risques;

·         posséder un exemplaire écrit d’un plan de soins qui

—     inclue les mesures à prendre, en situation de crise, par les utilisateurs, par leurs fournisseurs de soins et par leurs coordonnateurs de soins;

—     informe l’omnipraticien des mesures à prendre si l’utilisateur a besoin d’autres services;

—     soit révisé régulièrement par le coordonnateur de soins;

—     permette d’accéder aux services 24 heures sur 24, toute l’année durant.

5.       Tout utilisateur de services qui a fait l’objet d’une évaluation et qui a besoin de recevoir des soins hors de son domicile pendant un certain temps devrait :

·         pouvoir accéder en temps voulu à un lit ou à un local, dans un hôpital ou dans un autre lieu approprié, qui soit :

—     situé dans un environnement qui soit le moins contraignant possible, compte tenu de la nécessité de le protéger et de protéger le public,

—     situé le plus près possible de son domicile;

·         posséder un exemplaire écrit d’un plan du suivi convenu après le congé, document dans lequel sont indiqués les soins et la réadaptation à recevoir, le nom du coordonnateur de soins et les mesures à prendre en cas de situation de crise.

6.       Toute personne qui prodigue régulièrement des soins importants à une personne en vertu du CPA devrait :

·         subir une évaluation de ses besoins en matière de soins de santé et de ses besoins physiques et mentaux, au moins une fois par année;

·         posséder son propre plan de soins qui lui est remis et qui est appliqué après discussion avec elle.

7.       Les collectivités locales de soins de santé et de services sociaux devraient prévenir le suicide :

·         en favorisant la santé mentale pour tous, en travaillant avec les individus et avec les collectivités (norme un);

·         en dispensant des soins primaires de haute qualité (norme deux);

·         en s’assurant que toute personne qui a un problème de santé mentale puisse communiquer avec les services locaux par l’entremise du Groupe de soins primaires, d’une ligne secours ou à un service d’urgence (norme trois);

·         en s’assurant que les personnes atteintes de maladie mentale grave et prolongées possèdent un plan de soins qui réponde à leurs besoins particuliers, y compris l’accès aux services en tout temps (norme quatre);

·         en offrant des locaux sûrs dans les hôpitaux aux personnes qui en ont besoin (norme cinq);

·         en permettant aux personnes qui s’occupent des personnes atteintes de maladie mentale grave d’obtenir l’appui sont elles ont besoin pour continuer de s’en occuper (norme six);

et enfin :

·         en appuyant le personnel des prisons locales en matière de prévention du suicide chez les prisonniers;

·         en s’assurant que le personnel possède les compétences nécessaires pour évaluer le risque de suicide chez les personnes les plus à risque;

·         en élaborant des systèmes locaux d’examen des suicides afin d’en tirer des leçons et améliorer la prévention.

Le NSF-MH était le premier document à indiquer ce qu’on attendait des services de santé et des services sociaux en Angleterre. Un nouvel organisme, l’Institut national de santé mentale (NIMHE, pour National Institute for Mental Health in England) a été chargé de superviser la mise en œuvre du cadre de service. Comme Mme Richardson l’a expliqué, le NIMHE

… compte une série de huit centres de développement régional dispersés un peu partout en Angleterre. Le travail de ces centres consiste particulièrement à aider les services locaux à mieux atteindre leurs objectifs. Ils établissent des modèles de pratiques exemplaires, visitent les services locaux et font appel à des porte-parole chargés de mieux faire connaître le nouveau modèle de services et les besoins des personnes qui ont une maladie mentale. Il existe environ 26 programmes de travail qui relèvent de l'Institut national de la santé mentale et qui disposent tous d'un financement central. Ces programmes sont destinés à appuyer la réforme.

Mme Richardson a donné l’exemple suivant pour l’un des programmes administrés par le NIMHE :

[N]ous avons un programme de santé mentale à l'intention des Noirs et des minorités ethniques, dont le financement à l'heure actuelle est de 2,5 millions de livres jusqu'en 2006. Ce programme emploiera du nouveau personnel affecté au développement communautaire et servira à mettre sur pied environ 80 projets de développement communautaire, ce qui nous permettra d'améliorer les services de santé mentale à l'intention des Noirs et des groupes de la minorité ethnique qui ont des problèmes de santé mentale.

Le NIMHE comprend huit bureaux régionaux qui travaillent chacun directement au contact des collectivités locales, des GSP, des ONG et des utilisateurs de service. Ce faisant, le NIMHE est en mesure d’organiser sa contribution pour mettre en œuvre le NSF-MH ainsi que ses programmes d’assistance dans le cadre d’une approche d’intégration communautaire.

Le NSF-MH prévoyait en outre la création, dans tous les domaines visés, d’équipes locales de mise en oeuvre (ÉLMO) composées de représentants des utilisateurs de services, du personnel soignant, des autorités locales compétentes, des Groupes de soins primaires, des Groupes du SNS et des autorités de la santé, ayant pour mandat d’élaborer un plan local de mise en oeuvre. Initialement, 126 ÉLMO ont été créées, certaines ayant fonctionné mieux que d’autres. À cet égard, Mme Richardson nous a précisé ce qui suit :

Sans ces équipes de mise en oeuvre locales, nous n'aurons absolument pas pu apporter tous les changements que nous avons réussi à instaurer. Je ne veux pas brosser un tableau trop optimiste car il nous reste encore beaucoup de chemin à parcourir. Il y a maintenant presque cinq ans que le programme a été lancé, et nous avons apporté des changements considérables, mais il reste encore beaucoup à faire. Les équipes de mise en oeuvre locales ont joué un rôle essentiel à cet égard, et il est très important dans le cadre du programme de réforme de s'assurer dès le départ d'avoir l'infrastructure qui convient.

De plus, le gouvernement a depuis lors produit un Guide détaillé de la mise en œuvre de la politique afin de soutenir le NSF-MH (en 2001) et il a publié des propositions de réforme du Mental Health Act (Loi sur la santé mentale) en 2002.

Malgré les nombreuses réactions positives au NSF-MH, certains s’inquiétaient de l’insuffisance des ressources disponibles par rapport à la tâche à accomplir, tandis que d’autres pensaient que le NSF-MH ne prenait pas en compte le débat en cours sur les modèles médicaux et les modèles sociaux en santé mentale. Ces critiques pensaient que l’appellation « maladie mentale » donnée aux problèmes de santé mentale révélait une incapacité de considérer les clients actuels et les ex-clients comme des personnes ayant des points forts et pas uniquement des problèmes. Malgré les différentes critiques, pour la plupart des commentateurs du NSF-MH, il y avait lieu de se montrer optimiste quant à l’avenir des services de santé mentale au Royaume-Uni.

3.2       COÛTS ET FINANCEMENT DES SERVICES DE SANTÉ MENTALE

Un rapport, publié en juin 2004 par l’Unité de santé mentale et d’exclusion sociale, qui relève du cabinet du vice-premier ministre, donne les chiffres suivants quant aux coûts de la maladie mentale en Angleterre :

·        Le coût global annuel des problèmes de santé mentale dans ce pays est évalué à 77,4 milliards de livres. L’incidence sur la qualité de vie, notamment à cause de la mortalité prématurée, représente plus de la moitié de ce chiffre.

·        Les pertes de rendement, associées aux chances d’emploi ratées, sont estimées à plus de 23 milliards de livres par an.

·        Les coûts économiques du suicide seraient de quelque 5,3 milliards de livres.

En 2000, le Secrétaire d’État à la Santé a déclaré devant le Select Committee sur la santé que les services de santé mentale représentaient 12 p. 100 du budget total des services de santé hospitaliers et communautaires. Mme Richardson a indiqué au Comité qu’en 2001, 2002, cette proportion est passée à 13 p. 100. D’un autre côté, elle a insisté sur le fait qu’il ne faut pas perdre une chose de vue :

[L]es dépenses en services de santé communautaires et hospitaliers ne représentent qu'une partie des fonds consacrés à la santé mentale. Nous avons aussi des dépenses en soins sociaux, qui sont engagées séparément par les administrations locales pour les services sociaux, les services d'éducation et d'autres.

Plus récemment, une estimation du Sainsbury Centre for Mental Health[16] (2003) indiquait qu’environ 80 p. 100 des dépenses totales au chapitre des services de santé mentale étaient financées par le SNS. Quant au reste, 15 p. 100 proviennent des budgets relatifs aux services sociaux de compétences locales, 3 p. 100 sont assurés par la Subvention pour la santé mentale (réservée aux services de santé mentale offerte aux administrations locales par le gouvernement central) et le reste provient d’autres sources, y compris les frais d’utilisation.

Le Centre Sainsbury a en outre estimé qu’environ 75 p. 100 des dépenses totales relatives aux services de santé mentale correspondent aux coûts directs de la prestation des services (surtout en personnel), tandis que les 25 p. 100 restant correspondent aux coûts indirects, aux frais généraux et aux intérêts et remboursements des emprunts.

Comme nous l’avons indiqué plus haut, le plan du SNS a prévu l’accroissement du financement de la santé mentale afin de permettre l’expansion des services. Dans son rapport sur les dépenses en santé mentale, le Centre Sainsbury a calculé que les charges en trésorerie pour les services de santé mentale des adultes (du SNS et des autorités sanitaires locales combinées) ont augmenté de 7,1 p. 100 en 2002-2003 et qu’une augmentation de 6,3 p. 100 est prévue pour 2003-2004. Au cours de ces deux exercices, cependant, l’analyse indique que la croissance des dépenses relatives aux services de santé mentale est beaucoup plus lente que la croissance globale des dépenses relatives à l’ensemble des soins de santé et des services sociaux. Cela signifie que, compte tenu de l’augmentation des salaires et des prix, les dépenses relatives aux services de santé mentale augmenteront de moins de la moitié du taux des dépenses totales pour le SNS et les services sociaux au cours des deux années 2002-2003 et 2003-2004.

Le Centre Sainsbury a ainsi conclu que, malgré le statut de service prioritaire de la santé mentale, la part qui accordée à ce secteur dans les budgets relatifs au SNS et aux services sociaux est en baisse. Il souligne que l’augmentation des dépenses sont très inférieurs au taux moyen d’augmentation annuelle de 11.5 p. 100 nécessaire à la mise en œuvre du cadre national de services en santé mentale (NSF-MH) selon le calendrier du gouvernement. D’après le Centre, pour que le calendrier soit respecté, il faudrait que le taux d’augmentation des dépenses annuelles en espèces pour les services de santé mentale soit deux fois supérieur à ceux de 2002-2003 et de 2003-2004.

Le Centre Sainsbury constate bien des différences locales dans les régimes de dépense, mais il conclut qu’elles ne doivent pas obscurcir la conclusion la plus importante de son étude qui indique qu’au niveau national, la tendance actuelle en matière de dépenses laisse prévoir un écart croissant entre les promesses et les résultats dans le domaine de la prestation de meilleurs services de santé mentale. Selon le Centre, les décideurs doivent de toute évidence choisir entre ralentir le programme de réforme et affecter davantage de ressources à la santé mentale.

Toutefois, dans son témoignage, Mme Richardson a déclaré au Comité :

Tout d'abord, je dois contester vivement la notion selon laquelle le cadre du service national n'a pas prévu une augmentation des ressources destinées à la santé mentale. Comme je crois l'avoir dit plus tôt, le plan du SNS établit qu'un montant de 300 millions de livres supplémentaires, en sus du financement de base, sera investi dans le service national de santé pour accélérer sa mise en oeuvre d'ici 2003-2004.

Et elle a souligné :

Les indications dont nous disposons corroborent le fait que ces fonds ont effectivement été affectés aux services de santé mentale. Nous savons que jusqu'en avril de l'année dernière, un montant supplémentaire de 262 millions de livres a été consacré à la santé mentale en plus du financement de base prévu pour 2001.

À l’échelon local, il semblerait que l’écart entre les ambitions du programme de réforme et la réalité des restrictions du financement de la santé mentale soit amplifié par les nouvelles façons dont les fonds sont maintenant attribués pour les besoins locaux. Comme nous l’avons vu, les Groupes de soins primaires (GSP), gérés localement, obtiennent maintenant leur financement du SNS directement du gouvernement central plutôt que des autorités sanitaires. Les GSP sont responsables de la répartition de ces fonds entre les différents services de santé, y compris les services de santé mentale, et aussi de l’établissement des priorités locales pour le développement futur des services. Les GSP sont la principale source de financement des soins de santé mentale et en principe, ils peuvent réorienter les ressources vers les services et vers les fournisseurs en fonction des priorités locales.

Une étude récente a été menée par le King’s Fund on mental health services à Londres en 2003. Elle indique qu’en dépit du fait que la responsabilité de commander la plupart des services de santé mentale soit passée des mains des autorités sanitaires à celles des GSP, la plupart des GSP semblent avoir été incapables de consacrer beaucoup de temps à cette obligation, contrairement à que ce qu’on attendait d’eux en raison de la taille de leurs budgets ou contrairement aux exigences, en raison de l’état du développement des services de santé mentale. Le Centre Sainsbury a effectué un sondage auprès des Équipes locales de mise en œuvre (ÉLMO), qui sont chargées de mettre en place les réformes en matière de santé mentale. L’analyse suggère que, dans l’ensemble, 58 p. 100 des ÉLMO pensent que le financement pour 2003-2004 sera vraisemblablement insuffisant, tout compte fait, pour maintenir les services de base et appliquer le programme de réforme du gouvernement, tandis que 42 p. 100 d’entre elles se disaient plus optimistes. Les chiffres des plans locaux de prestation pour trois ans, jusqu’en 2005-2006, indiquent aussi que le rendement sera vraisemblablement inférieur aux objectifs nationaux et à ceux des politiques.

Plus généralement, les budgets pour la santé mentale sont comprimés à cause d’un certain nombre de pressions, dont les principales sont la pénurie de personnel (qui occasionne des dépenses supérieures pour l’embauche de personnel temporaire), l’augmentation rapide des coûts de prescription et l’obligation de rembourser les dettes accumulées. Par exemple, le Centre Sainsbury a présenté un cas de dépassement extrême du cadre du budget : un groupe du sud de l’Angleterre a déclaré avoir dépensé en trop 145 000 £ pour de la publicité de recrutement et 1 672 000 £ pour des médecins suppléants.

Dans un rapport présenté devant le Mental Health Providers Forum (MHPF) en 2002, on estimait que les dépenses effectuées pour et par le secteur bénévole pour la prestation des services de santé mentale correspondent à environ 10  p. 100 des dépenses publiques pour la santé mentale. Les recettes combinées des membres du MHPF en 2001/2002 s’élevaient à 320 millions de livres, la majorité de ces fonds provenant du SNS et des autorités sanitaires locales en matière de services de santé mentale offerts dans le cadre de marchés de service. Les soins à domicile constituaient la partie la plus importante des activités confiées par commande, avec 69 p. 100 des dépenses totales, suivis par les services communautaires, avec 23 p. 100. Le reste des dépenses s’étalait sur différents services, dont l’information, la défense des droits, la recherche, les campagnes, la formation et l’appui aux soignants.

3.3       PRESTATION ET ORGANISATION DES SERVICES

La modernisation des services de santé mentale au Royaume-Uni se fait dans le contexte d’une réorganisation importante des services. Le principal changement apporté dans le secteur public ces dernières années a été l’émergence de groupes de spécialistes de la santé mentale qui, dans plusieurs cas, sont toujours en voie de développement alors que diverses agences ont été amalgamées en vue de constituer un fournisseur unique pour l’ensemble des services de santé mentale dans chaque localité. Certains de ces fournisseurs sont constitués en groupes de soins de santé et de services sociaux ayant un budget unifié pour la santé et les services sociaux et un personnel et des locaux communs.

La création de tels groupes de spécialistes de la santé mentale est un phénomène nouveau puisque la majorité d’entre eux n’existent que depuis avril 2002. Ils remplacent toute une gamme de services qui étaient jusque là fournis et gérés par des groupes de soins actifs, des groupes communautaires et certains groupes de spécialistes de la santé mentale. Ces groupes présentent une grande diversité de caractéristiques comme l’importance de leur budget d’ensemble, le nombre d’employés, le nombre de malades hospitalisés, le nombre de lieux de prestation de services et le territoire géographique desservi.

Ces groupes se différencient aussi par la clientèle desservie. Plusieurs s’intéressent aux difficultés d’apprentissage et la plupart offrent des services aux personnes âgées, de même qu’aux enfants, aux adolescents et aux adultes en âge de travailler. De plus en plus, ces groupes offrent des soins à domicile ou des « services d’urgence » pour répondre à des cas individuels de souffrance morale aiguë, afin que ces personnes puissent demeurer dans la collectivité, le plus souvent chez elles, au lieu d’être hospitalisées. Les groupes du SNS qui assurent la prestation de services de santé mentale généraux peuvent souvent avoir accès à une unité de soins fermée à clé ou à une unité de soins intensifs pouvant accueillir les patients qui ont besoin d’une sécurité physique accrue ou de la présence d’un personnel plus nombreux que dans une aile de soins actifs.

Dans leurs témoignages devant le Select Committee sur la santé, en 2000, le Royal College of Nursing et le Royal College of Psychiatrists ont soutenu que la qualité des soins communautaires n’est possible que si les malades peuvent aussi être hospitalisés dans un établissement de qualité. Divers témoins ont dit au Comité que ces centres de soins sont encore de qualité inférieure. On a renvoyé le Comité à une étude du Centre Sainsbury selon laquelle les pressions exercées pour l’utilisation de lits de soins actifs sont telles que le milieu n’a rien de « thérapeutique », que les services n’ont pas de buts précis et que les liens avec la collectivité sont médiocres. La Mental Health Foundation a aussi laissé entendre au Comité que la « faiblesse réelle » des services de santé mentale se situe dans les unités de soins actifs.

Une bonne partie des services de santé mentale sont aussi offerts dans un cadre de soins primaires. Selon les chiffres avancés dans le Rapport sur la santé mentale et l’exclusion sociale, 90 p. 100 des patients ayant des problèmes de santé mentale et un quart de ceux atteints de troubles graves de santé mentale sont traités dans le cadre de soins primaires, et 30 p. 100 des consultations en pratique générale comportent un élément de santé mentale (il s’agit le plus souvent de dépressions, de troubles de l’alimentation et de troubles anxieux).

D’un autre côté, Mme Richardson nous a déclaré « Le fait est que nous n'avons pas de stratégie en tant que telle pour l'intégration des soins primaires et secondaires ». Toutefois, elle a décrit au Comité une initiative particulière destinée à améliorer la prestation des services au niveau de soins primaires. Le plan du SNC pour 2000 fixe à 1 000 le nombre de travailleurs en santé mentale qui devront être diplômés dans le domaine des soins primaires d’ici décembre 2004, afin d’aider les omnipraticiens à consulter et à traiter les gens de tous âges atteints de problèmes de santé mentale communs. Pour Mme Richardson, « le travailleur diplômé est une nouvelle espèce». Elle devait d’ailleurs nous décrire le programme en ces termes :

[…] nous avions dans le système un groupe de diplômés aptes qui voulaient travailler au SNS et qui pouvaient recevoir une formation, selon les données recueillies, pour fournir brièvement et efficacement en matière de soins primaires des traitements fondés sur des données probantes aux patients souffrant de troubles courants. Nous avons […] constitué 12 nouveaux programmes de formation dans toute l'Angleterre pour leur offrir un programme externe de formation d'un an menant à l'obtention d'un certificat d'études supérieures.

[…] Nos travailleurs qui font des études plus poussées ont généralement une formation en sciences sociales ou en psychologie et ne sont pas des infirmiers ou des infirmières. La formation supplémentaire d'un an qu'ils reçoivent après l'obtention de leur diplôme les prépare à donner des conseils en matière d'auto-assistance, à diffuser de l'information et à traiter efficacement sur de courtes périodes les personnes atteintes de troubles communs en tentant d'agir sur leur comportement cognitif.

Le plan du SNS fait également état d’autres objectifs particuliers, dont la mise sur pied de 50 autres équipes d’intervention d’urgence, objectif qui, selon Mme Richardson, a été atteint. Elle nous a d’ailleurs expliqué ce qu’est une équipe d’intervention affirmative :

[…] Il s'agit d'une petite équipe multidisciplinaire composée de neuf à quinze personnes. Elle s'occupe particulièrement des quelque 1 500 patients du système de services de santé mentale qui ont une maladie mentale grave ou qui risquent plus particulièrement de perdre contact avec les services ou de ne plus communiquer avec leurs travailleurs principaux. Ce groupe particulier d'utilisateurs de services compte parmi ceux qui posent le plus de défis. Ils ont habituellement une longue histoire, une maladie mentale grave, sont atteints de schizophrénie, par exemple. Il s'agit assez souvent d'itinérants, sans domicile fixe.

L'équipe d'intervention affirmative commence son travail après une période d'admission. Par exemple, généralement, un utilisateur de services est admis à un hôpital psychiatrique, reçoit un traitement pendant un certain temps et suit un plan d'intervention. L'équipe d'intervention affirmative assure un suivi, de façon assez affirmative, comme son titre l'indique. Elle rend visite à la personne chez elle; si la personne ne se rend pas à un rendez-vous, elle vérifie ce qui s'est passé. Ses membres peuvent rencontrer l'utilisateur de services, le patient, à l'endroit de son choix. Nous connaissons des équipes d'intervention affirmative qui travaillent à la buanderie du coin, et ces travailleurs essaient de faire en sorte que l'utilisateur de services suive son plan d'intervention et ne s'isole pas.

En plus des grands organismes, on trouve habituellement des fournisseurs indépendants dans la plupart des localités. Bien souvent, ce sont des organismes du secteur bénévole qui font partie d’organisations nationales. Le secteur privé peut aussi être actif sur la scène locale, surtout dans un rôle de fournisseur d’installations sécuritaires et d’installations répondant à des besoins spéciaux. De même, il y a des propriétaires privés qui offrent des logements spécialisés aux personnes qui ont des besoins en santé mentale dans certaines régions.

3.3.1     Les resources humaines

Le Royaume-Uni fait toujours face à de sérieux problèmes de recrutement et de maintien en poste de travailleurs de la santé mentale. Les importantes pénuries de personnel, surtout de psychiatres et d’infirmières et d’infirmiers dans les hôpitaux, continuent d’avoir des conséquences majeures sur le leadership clinique et sur la qualité des soins offerts. Comme nous l’avons indiqué précédemment, les problèmes de recrutement et de maintien du personnel entraînent le recours à un nombre élevé d’employés temporaires et à du personnel d’agences. Toutefois, les expériences locales varient selon les conditions de travail, les stratégies de recrutement et l’attrait qu’exercent certaines organisations et localités.

En 2000, le Secrétaire d’État à la Santé parlé, devant un comité parlementaire, des pénuries d’infirmières et d’infirmiers, de psychiatres et « d’autres personnels spécialisés » mais il a ajouté que la situation variait aux niveaux local et régional et que les chiffres sur le nombre de postes vacants en soins infirmiers en santé mentale (2,1 p. 100) étaient inférieurs au nombre de postes vacants en soins infirmiers généraux (2,6 p. 100). Dans son témoignage devant ce même comité, le Royal College of Psychiatrists a estimé qu’en moyenne, le taux de vacances pour les psychiatres consultants est d’environ 15 p. 100.

Une étude menée en 2003 par la Commission for Health Improvement (Commission sur l’amélioration de la santé – CAS) indique que plusieurs employés permanents travaillent de trop longues heures. La Commission a aussi été impressionnée par l’engagement et le dévouement du personnel clinique, non clinique et chargé d’administrer des soins, à offrir des soins de haute qualité aux usagers dans l’ensemble du secteur, bien que plusieurs employés aient été soumis à des pressions considérables dans des milieux de travail difficiles.

3.3.2    Les services aux minorités

Le rapport sur la santé mentale et l’exclusion sociale précise qu’au Royaume-Uni :

·        les membres de groupes minoritaires ethniques sont six fois plus susceptibles d’être détenus en vertu du Mental Health Act (loi sur la santé mentale) que les Blancs;

·        on estime que l’on diagnostique deux fois plus de troubles psychotiques chez les Afro-antillais que chez les Blancs, même s’ils sont trois à cinq fois plus susceptibles que ces derniers d’être admis dans les hôpitaux après un diagnostic de schizophrénie;

·        les femmes sud-asiatiques nées en Inde et en Afrique de l’Est présentent des taux de suicide qui sont 40 p. 100 plus élevés que celles nées en Angleterre et au pays de Gales.

Les données statistiques présentées par la British Psychological Society dans son témoignage devant le Select Committee sur la santé en 2000 soulignent la tendance chez les patients de minorités ethniques à tarder pour obtenir des services : ils attendent que la maladie se soit aggravée et risquent davantage d’être hospitalisés. D’autres témoins ont indiqué que les services offerts aux minorités visibles sont souvent « inappropriés » ou « dépourvus d’humanité ». Certains groupes minoritaires sont également sous-représentés dans les services. Par exemple, les femmes de communautés sud-asiatiques recourent moins que la moyenne aux services de santé mentale officiels et affichent un taux de suicide supérieur à la moyenne.

Les motifs avancés par les témoins devant ce comité du Parlement britannique pour expliquer que les membres de minorités ethniques ont moins souvent recours aux services de santé mentale diffèrent grandement de celles qui caractérisent les patients de race blanche et sont de deux ordres : les services ne seraient pas adaptés et les fournisseurs de services ne comprennent pas les besoins des patients de minorités visibles. Le Select Committee s’est dit préoccupé par la lenteur des changements bien que ces problèmes soient connus depuis quelques années déjà.

3.4       PROMOTION ET PRÉVENTION

3.4.1     La lutte à la stigmatisation et à la discrimination

Comme nous l’avons indiqué précédemment, la première norme du Cadre national de service en matière de santé mentale vise à faire en sorte que les services de santé et les services sociaux fassent la promotion de la santé mentale et de la lutte à la discrimination et à l’exclusion sociale. Mme Richardson a indiqué au Comité que son gouvernement avait débuté le tout

… en mars 2001, par une campagne nationale intitulée « Mind Out for Mental Health ». Par cette campagne, nous voulions lutter contre la stigmatisation et la discrimination auxquelles se heurtent les personnes qui ont des problèmes de santé mentale. La campagne visait à favoriser leur inclusion dans la société.

Cette campagne, qui a duré trois ans, s’est terminée en mars 2004. Dans le rapport sur la santé mentale et l’exclusion sociale, on apprend qu’elle a surtout donné lieu à l’instauration d’un « bureau de porte-parole » composé de plus de 40 personnes ayant une expérience des troubles en santé mentale et qui ont été formées pour faire part de leur expérience aux médias et aux employeurs. L’évaluation réalisée au terme du programme a révélé que ces ambassadeurs avaient donné un côté « humain et personnel » à la campagne et que les idées fausses avaient été mises à mal par ces témoins directs.

L’autre projet de lutte à la stigmatisation, la campagne « Changing Minds » (Changer d’esprit) du Royal College of Psychiatrists, s’est terminée à la fin 2003, après avoir été lancée cinq ans plus tôt. Un certain nombre d’organismes bénévoles poursuivent d’ailleurs cette campagne et, au sein de l’appareil gouvernemental, c’est l’Institut national de santé mentale (NIMHE) qui est chargé de la lutte contre la stigmatisation et la discrimination associées à la santé mentale.

Malgré les efforts considérables déployés en Angleterre pour lutter contre la stigmatisation, on note cependant, dans le rapport sur la santé mentale et l’exclusion sociale, que cette campagne n’est pas toujours bien coordonnée et qu’elle a été essentiellement axée sur l’information et la sensibilisation du public plutôt que sur les changements de comportement. Le rapport conclut que les deux principales leçons qu’il faut retenir de la campagne « Mindout » sont : la nécessité de disposer de stratégies de financement à long terme et la nécessité de conduire une évaluation solide. Le même rapport cite un examen documentaire contenu dans un document international qui a été commandé par le NIMHE et qui constate que le niveau moyen de dépenses au chapitre de la sensibilisation à la santé mentale en Angleterre est inférieur et qu’il s’étale sur moins longtemps que dans les pays administrant des programmes qui donnent de meilleurs résultats (voir le tableau ci-dessous). Bien que le rapport qualifie la stigmatisation et la discrimination de plus importants obstacles à l’inclusion sociale des personnes souffrant de problèmes de santé mentale, il conclut que, malgré les campagnes menées jusqu’alors, on n’a pas constaté de changement marqué d’attitude.

DÉPENSES INTERNATIONALES DANS LES CAMPAGNES SUR LA SANTÉ MENTALE,
PAR HABITANT (POPULATION GÉNÉRALE)*

Mindout for mental health

1,44 pence  

See Me, Scotland**

13 pence

Like Minds, Like Mine, New Zealand

1 $NZ1 (environ 36 pence)

* Les chiffres sont une approximation des dépenses globales divisées par la population, les dépenses annuelles moyennes étant établies pour la durée de la campagne. La livre britannique, qui vaut environ 2,43 $CAD, comporte 100 pence.

**  Voir le cadre ci-dessous.

La nouvelle stratégie décrite dans le rapport en vue de lutter contre la stigmatisation et la discrimination part donc de l’hypothèse selon laquelle, pour véritablement composer avec les problèmes de santé mentale, il faut recourir à plus qu’une solution médicale. Le rapport soutient notamment qu’il faut obtenir de la société qu’elle réagisse positivement aux besoins des particuliers et à la promotion du bien-être mental. Pour y parvenir, il fixe un plan d’action en 27 points qui vise à coordonner l’action des ministères et des autres organismes concernés en vue de modifier les attitudes, de permettre aux gens de réaliser leurs aspirations et d’améliorer les possibilités et la situation globale de ce groupe d’exclus.

LA CAMPAGNE ÉCOSSAISE See Me


See Me est une campagne de lutte contre la stigmatisation, administrée par un regroupement de cinq organisations écossaises de santé mentale, qui est financée par la branche exécutive de l’Écosse. Lancée en octobre 2002, elle est un élément important du programme national d’amélioration de la santé mentale et du bien-être. Elle est dotée d’un budget de 3 millions de livres sur quatre ans (jusqu’en 2005-2006). Elle est notamment le produit de consultations poussées avec des personnes qui ont connu les affres de la maladie mentale. Bien que d’envergure nationale, elle s’appuie sur des activités locales et repose sur de la publicité multimédia ainsi que sur l’intervention, auprès des médias, de porte-parole qui ont eux-mêmes eu des problèmes de santé mentale. See Me comporte un volet sur la stigmatisation qui consiste à inciter la population à réagir aux attitudes et aux propos discriminatoires relevés dans les médias. La reconnaissance de la campagne est régulièrement de 28 p. 100.

Le plan comporte un programme destiné à lutter contre les attitudes négatives et à sensibiliser la population aux droits des gens. Ce nouveau programme de lutte contre la stigmatisation a fait l’objet d’un investissement de 1,1 million de livres par le ministère de la Santé et d’un financement additionnel provenant d’autres ministères. Il sera orchestré par le NIMHE et, selon le rapport :

·        il sera fondé sur les expériences internationales qui ont donné des résultats et sera inspiré des leçons tirées de campagnes de promotion antérieures dans le domaine de la santé et de la santé mentale;

·        il ciblera des auditoires clés, surtout les employeurs, les jeunes et les médias;

·        il proposera des messages cohérents et éprouvés, sous une seule et même bannière;

·        il fera la promotion de la contribution que les personnes souffrant de problèmes de santé mentale peuvent apporter à la société;

·        son avenir sera assuré par un financement suivi;

·        il traitera des questions d’ethnicité et de questions propres à chacun des sexes;

·        il proposera un cadre et des documents d’appui au travail local par l’accent placé sur les questions particulières auxquelles sont confrontées les communautés démunies;

·        il sera clairement évalué à la faveur de sondages réguliers.

Le premier rapport d'étape relatif à la stratégie a été publié l'an dernier. Le rapport était encourageant en ce sens que le taux de suicide est à la baisse. Les données des deux dernières années montrent qu'il est au plus bas niveau jamais atteint. La moyenne sur trois ans pour 2000 à 2002 était le plus bas niveau par rapport au niveau de référence que nous avons établi en 1995. À l'heure actuelle, le taux est de 8,9 décès par 100 000 habitants. C'est un taux qui se compare assez favorablement avec le taux européen, qui s'élevait à 8,8 selon les dernières données, si je ne m'abuse

STRATÉGIE NATIONALE DE PRÉVENTION DU SUICIDE EN ANGLETERRE

OBJECTIF 1   Réduire le risque chez les groupes à haut risque.

·         Réduire le nombre de suicides chez les personnes qui sont ou ont été récemment en contact avec des services de santé mentale.

·         Réduire le nombre de suicides dans l’année suivant une tentative délibérée d’automutilation.

·         Réduire le nombre de suicides chez les jeunes hommes.

·         Réduire le nombre de suicides chez les prisonniers.

·         Réduire le nombre de suicides dans les groupes professionnels à haut risque.

OBJECTIF 2   : Promouvoir le bien-être mental au sein de la population en général.

·         Promouvoir la santé mentale des exclus sociaux et des démunis.

·         Promouvoir la santé mentale auprès des personnes appartenant aux minorités noires et ethniques, notamment auprès des femmes asiatiques.

·         Promouvoir la santé mentale chez les personnes qui consomment des drogues ou de l’alcool à mauvais escient.

·         Promouvoir la santé mentale chez les victimes et les ex-victimes de violence, notamment chez ceux et celles ayant subi des actes de violence sexuelle dans leur enfance.

·         Promouvoir la santé mentale auprès des enfants et des adolescents (de moins de 18 ans).

·         Promouvoir la santé mentale auprès des femmes pendant et après une grossesse.

·         Promouvoir la santé mentale auprès des personnes âgées.

·         Promouvoir la santé mentale chez les personnes endeuillées par un suicide.

OBJECTIF 3   Réduire l’accessibilité et la létalité des méthodes de suicide.

·         Réduire le nombre de suicides par pendaison ou strangulation.

·         Réduire le nombre de suicides par auto-empoisonnement.

·         Réduire le nombre de suicides par inhalation de gaz d’échappement de véhicule.

·         Réduire le nombre de suicides sur les voies ferrées.

·         Réduire le nombre de suicides par des sauts dans le vide.

·         Réduire le nombre de suicides par armes à feu.

OBJECTIF 4   Améliorer la façon dont les comportements suicidaires sont traités dans les médias.

·         Faire la promotion d’une représentation responsable des comportements suicidaires dans les médias.

OBJECTIF 5   Promouvoir la recherche sur le suicide et la prévention du suicide.

·         Améliorer les données de recherche sur la prévention du suicide.

·         Diffuser les données actuelles sur la prévention du suicide.

OBJECTIF 6   Améliorer le suivi des progrès réalisés en fonction de l’objectif énoncé dans Saving Lives: Our Healthier Nation afin de réduire le nombre de suicides.

·         Assurer un suivi des statistiques sur le suicide au regard des objectifs principaux et secondaires de la stratégie.

·         Évaluer la stratégie nationale en matière de prévention du suicide.

3.5       PERSPECTIVES DE RÉFORME

Bien que les services de santé mentale en soient maintenant à mi-chemin du programme de dix ans décrit dans le cadre du National Service Framework (NSF), plusieurs interrogations demeurent quant à la possibilité de réaliser les ambitieux objectifs établis au début. Certaines questions restent sans réponse à propos des points faibles hérités du passé et des répercussions des changements déjà amorcés. Par exemple, en 2000 le Comité spécial des Communes sur la santé a dit du système qu’il était une « courtepointe en patchwork » comportant d’énormes variations en matière de normes de services et de méthodes de prestation de services dans l’ensemble du pays. En 2003, la Commission pour l’amélioration de la santé concluait que l’héritage historique de négligence des services de soin de santé n’avait toujours pas été surmonté.

 Le débat a toujours cours relativement à l’orientation de la réforme et à la mise en œuvre de changements concrets au sein de l’organisation de même que la prestation de services. Des rapports récents font état de préoccupations concernant la priorité accordée à la santé mentale dans le système de santé et le recours au processus de commande pour les services de santé mentale. Il semble que l’on insiste davantage sur le secteur des soins actifs, particulièrement en vue de parvenir à réduire les périodes d’attente et d’ouvrir les choix offerts aux patients, ce qui fait des objectifs en santé mentale du NSF et du SNS des points relativement mineurs dans la liste des priorités.

Le transfert du pouvoir de commander les services de santé mentale aux groupes de soins locaux, afin de récupérer tous les avantages associés à ce type de changement, continue de faire problème. Il a surtout été question de la dilution de l’expertise entre un grand nombre de centres de commande. Malgré les développements positifs constatés au sein de ces centres, plusieurs observateurs soutiennent qu’il reste encore beaucoup à faire en matière d’efficacité. Dans le domaine de la santé mentale, le processus de commande semble particulièrement irrégulier et sous-développé.

Dans un rapport récent, le Centre Sainsbury fait état d’un système soumis à des pressions diverses qui, collectivement, entraînent une remise en question de la capacité de donner suite au programme de réforme du gouvernement. Le rapport précise aussi que la situation financière de nombreux fournisseurs de soins de santé mentale est précaire. En conclusion, il y a des écarts importants entre les exigences pour la mise en oeuvre d’une politique nationale et la disponibilité des ressources pour y parvenir.

3.6       OBSERVATIONS DU COMITÉ

Les membres du Comité ont été très impressionnés par l’ampleur de la planification réalisée en Angleterre depuis l’adoption du Cadre national de services en matière de santé mentale, en 1999, surtout par la planification sur 10 ans et par l’adoption des normes précises destinées à encadrer la prestation des services.

Le Comité a également été frappé par le rôle important des équipes locales de mise en œuvre créées pour appliquer le cadre en l’adaptant aux conditions locales de même que par les nouveaux groupes de soins primaires qui se veulent des fournisseurs locaux uniques de services de santé mentale. Dans le même ordre d’idée, le Comité a été impressionné par la décision de mettre sur pied une branche distincte chargée de la mise en œuvre du cadre, l’Institut national de santé mentale (NIMHE), qui a pour tâche de contribuer à la formation, à la diffusion du savoir et à la propagation des pratiques exemplaires.

Le Comité n’a pas manqué de prendre note du défi énorme auquel le gouvernement est confronté en matière de financement et d’organisation de la réforme dans le secteur de la santé mentale. Nous avons aussi été impressionnés par tout le soin qui a été apporté en Angleterre à l’évaluation de réforme de la santé mentale, tant par les organismes gouvernementaux que par les organisations non gouvernementales.

On pourrait également conclure, d’après la récente expérience anglaise, que la pénurie de ressources humaines risque d’avoir de graves conséquences financières à court terme sur l’ensemble du réseau et de menacer l’aboutissement des plans de réforme. À cet égard, le Comité n’a pas manqué de remarquer que la formation des travailleurs en santé mentale, qui doivent contribuer à la prestation des services de soins primaires, est une initiative importante.

Enfin, le Comité a été impressionné par l’engagement soutenu à combattre la stigmatisation et la discrimination dont sont victimes les personnes qui souffrent de troubles de santé mentale. C’est surtout l’ampleur des initiatives annoncées dans le rapport sur la santé mentale et l’exclusion sociale, en juin 2004 qui a retenu notre attention. L’expérience du Royaume-Uni nous montre aussi, malheureusement, qu’il n’est pas simple de changer les attitudes et qu’il faut, pour y parvenir, faire preuve de persévérance et déployer les ressources nécessaires. Le Comité a aussi remarqué que, récemment, la promotion de la santé mentale et la prévention du suicide semblent avoir contribué à faire fléchir les taux de suicide en Angleterre.


CHAPITRE 4:
LES SOINS DE SANTE MENTALE AUX ÉTATS-UNIS[17]

4.1        HISTORIQUE ET APERÇU

Le système de soins de santé des États-Unis est unique en ce sens qu’il repose exclusivement sur le secteur privé, à la fois pour la prestation des services et pour la couverture des soins. Les sources privées, qui assument 55 p. 100 du financement des soins de santé, comprennent les assurances privées, les quote-parts des particuliers au chapitre des régimes publics et privés (17 p. 100) et d’autres sources (5 p. 100). La majorité des Américains sont assurés dans le cadre de régimes offerts par leurs employeurs.

Le gouvernement fédéral contribue à hauteur de 33 p. 100 environ aux dépenses totales de soins de santé, les gouvernements des États et les administrations locales assumant la différence (12 p. 100). L’administration et le bon fonctionnement de Medicare (régime d’assurance-maladie) sont assumés par le gouvernement national qui administre une assurance de soins de santé pour les personnes âgées. En collaboration avec les États, il finance Medicaid (pour les pauvres) ainsi que le State Children’s Health Insurance Program (SCHIP), soit le programme d’État d’assurance-santé pour les enfants. Dans l’ensemble, le régime public d’assurance-santé couvre environ 24 p. 100 de la population américaine.

Medicare est un régime d’assurance-santé fédéral qui s’adresse aux 65 ans et plus, à certaines personnes de moins de 65 ans mais qui sont invalides de même qu’à des personnes atteintes de maladies rénales en phase terminale. Medicaid est un régime d’assurance-santé conjoint, gouvernement fédéral-États, fondé sur les moyens et qui est offert aux personnes à faible revenu. Le gouvernement fédéral assume de 50 à plus de 75 p. 100 de la note des différents États. Washington fixe également les lignes directrices nationales en matière d’admissibilité et de services de Medicaid. Toutefois, chaque État administre son propre programme et fixe les montants qu’ils assument pour chaque service. Tous les États sont tenus de respecter des critères minimums en matière d’admissibilité et de services obligatoires mais, dans le cadre d’une entente conclue avec le gouvernement fédéral, ils peuvent être plus généreux dans les niveaux d’admissibilité et les services offerts. Ce faisant, le programme Medicaid peut varier d’un État à l’autre.

4.1.1     La santé mentale

Pour reprendre le contenu d’un rapport récent de la President’s New Freedom Commission on Mental Health (commission sur la santé mentale mise sur pied dans le cadre de l’initiative Liberté nouvelle), le système actuel de soins de santé mentale aux États-Unis est une relique faite d’éléments disparates qui nécessite une réforme dynamique parce qu’il ne dessert pas de façon appropriée les millions de personnes qui ont besoin de soins. Les analystes s’accordent à dire qu’il est difficile de décrire simplement le système américain de soins de santé mentale. En fait, dans son rapport, la Commission insiste sur le fait que le système de soins de santé mentale s’apparente davantage à un labyrinthe qu’à un système de soins coordonné.

Aux États-Unis, les troubles mentaux et les problèmes de santé mentale sont traités par tout un éventail de fournisseurs de soins qui travaillent dans divers établissements ou  services – tant publics que privés – relativement indépendants et vaguement coordonnés que les chercheurs désignent collectivement sous le vocable de « système de facto des services en santé mentale ». Ces programmes existent dans tous les ordres de gouvernement et dans l’ensemble du secteur privé, et leur mission, leur cadre de réalisation de même que leur cadre financier varient de l’un à l’autre.

Chaque année, environ 15 p. 100 de la population adulte et 21 p. 100 des enfants et des adolescents aux États-Unis utilisent des services offerts dans le cadre du système de facto. On décrit généralement ce système comme un ensemble comportant quatre grandes composantes ou secteurs principaux :

·        Le secteur des soins spécialisés de santé mentale regroupe les professionnels de la santé, comme les psychiatres, les psychologues, les infirmières psychiatriques et les travailleurs sociaux en psychiatrie qui ont reçu une formation spécialisée axée sur le traitement des personnes souffrant de troubles mentaux.

·        Le secteur des soins médicaux généraux et des soins primaires regroupe les professionnels de la santé, comme les internistes généraux, les pédiatres et les infirmiers praticiens oeuvrant dans des cabinets, des cliniques, des hôpitaux de soins actifs et spécialisés en chirurgie et dans des maisons de soins infirmiers.

·        Le secteur des services à la personne comprend les services sociaux, les services de counselling en milieu scolaire, les services de réadaptation en établissement, la réadaptation professionnelle, la justice pénale et les services en milieu carcéral, de même que les conseillers religieux professionnels.

·        Le secteur du réseau de soutien bénévole, qui comprend les groupes d’entraide comme les programmes en 12 étapes et les pairs-conseillers, est une composante en croissance rapide du système de traitement de la maladie mentale et de la toxicomanie.

Le système de facto des services en santé mentale se divise en outre entre secteur public et secteur privé. Dans ce contexte, le terme « secteur public » renvoie tant aux services fournis directement par des organismes gouvernementaux (comme les hôpitaux psychiatriques des États et des comtés) qu’aux services financés par des ressources gouvernementales (par ex., Medicaid et Medicare). Il arrive que des services financés par l’État soient fournis par des organismes privés. Le terme « secteur privé » englobe les services fournis directement par des organismes privés et les services financés au moyen de ressources privées (comme les régimes d’assurance des employeurs).

La plupart des Américains (84 p. 100) sont assurés d’une façon ou d’une autre, le plus souvent par un régime privé offert par leurs employeurs. Cependant, l’efficacité de ce type d’assurance dans le cas des soins de santé mentale varie grandement d’un régime et d’un promoteur à l’autre. Le secteur public prend en charge les personnes qui n’ont pas d’assurance maladie, celles dont le régime d’assurance ne couvre pas les soins de santé mentale  et  celles qui ont atteint leur plafond d’indemnités dans le cadre de leur régime d’assurance santé.

Chaque secteur du système de facto réunit des programmes et des types de soins différents et utilise différents modes de financement. Selon la Commission présidentielle (ci-après la Commission), la fragmentation du système actuel n’est pas causée par le manque d’engagement ni de compétences des fournisseurs de soins mais découle plutôt de problèmes structuraux, financiers et organisationnels sous-jacents, dont les racines remontent aux années 50 lorsque les soins en établissement ont été abandonnés au profit des soins dans la communauté.

La désinstitutionnalisation, motivée par le désir des réformateurs d’assurer des services aux patients dans leur collectivité, a eu comme effet pervers de disperser la responsabilité entre les différents ordres de gouvernement et entre de multiples organismes. Le processus a débuté sous la présidence de Dwight D. Eisenhower, mais s’est accéléré lorsque le président John F. Kennedy a signé le Community Mental Health Centers Construction Act (loi sur la construction de centres communautaires de santé mentale) en 1963. Cette loi prévoyait la mise en place d’un mécanisme de financement pour les programmes locaux et avait comme objectif de réduire de moitié le nombre de malades internés dans les hôpitaux psychiatriques des États.

Cet objectif a été largement dépassé puisque, de nos jours, les hôpitaux n’ont plus que 40 000 lits pour malades mentaux, com­parativement à quelque 550 000 en 1955. Malheureusement, la création des centres communautaires de santé mentale n’a pas donné les résultats escomptés. En effet, la moitié seulement des centres prévus ont été construits et le financement assuré par le fédéral n’a couvert que les sept premières années. En 1981, le programme des centres de santé mentale a été remplacé par une subvention globale pour la santé mentale.

En revanche, les collectivités n’ont pas accueilli les malades mentaux qui se sont retrouvés sur leur territoire et une petite partie seulement des économies réalisées grâce à la fermeture des hôpitaux d’État a pas été réinvestie dans des programmes communautaires. Darrel A. Regier, directeur de la recherche de l’American Psychiatric Association, a affirmé  devant la Commission fédérale sur la santé mentale que les prisons et autres lieux de détention sont devenus les nouveaux établissements pour de nombreuses personnes souffrant de troubles mentaux graves, tandis que nombre d’autres malades ont été laissés à eux-mêmes et sont devenus des sans-abri.

À la même époque, M. William Emmet, coordonnateur de la campagne pour la réforme de la santé mentale aux États-Unis, déclarait à notre Comité :

À bien des égards, la désinstitutionnalisation a été une grande réussite. Bien des gens qui n'auraient pas dû se trouver en institution en sont partis et ont commencé à mener des vies productives — ou tout au moins à avoir des vies beaucoup plus intéressantes que celles qu'ils auraient menées en institution. Le problème qui s'est posé avec le temps, c'est que des gens qui autrefois auraient été placés en institution n'ont pas été nécessairement en mesure d'obtenir les services dont ils avaient besoin.

Pour sa part, Michael Hogan, président de la Commission sur la santé mentale, devait ajouter :

… aucun de ceux qui oeuvrent dans ce domaine n'oserait prétendre un seul instant que nous devrions faire machine arrière. Le système des institutions n'est pas parvenu à joindre la plupart des gens. Dans les cas où il y est arrivé, ces gens étaient gardés à grands frais et n'ont pas vu leur condition s'améliorer. Ils avaient trois repas chauds par jour, un lit et des soins de santé, mais ils n'ont jamais pu vraiment vivre. Nous ne pouvons pas revenir à cette situation mais nous n'avons pas encore réglé le problème qui consiste à créer un système de soins bien organisé et suffisamment solide pour faire du bon travail.

Les programmes Medicare et Medicaid  ont été créés deux ans après le discours du président Kennedy. Au fil des ans, les États ont eu de plus en plus recouru à Medicaid pour les soins de santé mentale, ce qui a eu pour résultat que ce programme est devenu le plus important acheteur de soins de santé mentale aux États-Unis. Les critiques ont dit que les États avaient placé les soins de santé mentale sous l’ombrelle de Medicaid sim­plement parce que le gouvernement fédéral assume la moitié des frais sous la forme d’une contribution de contrepartie et paie jusqu’à 75 p. 100 des coûts dans les États les plus pauvres.

L’introduction de Medicaid a également contribué de trois façons au déclin des hôpitaux psychiatriques d’État. D’abord, Medicaid ne remboursait pas la plupart des soins offerts par ces établissements. Deuxièmement, ce régime ne payait pas pour les soins actifs dispensés dans les unités psychiatriques des hôpitaux généraux qui étaient devenus les emplacements de choix pour les traitements de courte durée. Enfin, Medicaid payait pour les soins dans les foyers d’accueil et une grande partie de l abaisse de fréquentation des hôpitaux psychiatriques d’État est attribuable au transfert de patients âgés des hôpitaux d’État à des foyers.

Aux États-Unis, les soins de santé mentale se distinguent des autres soins de santé parce qu’ils sont offerts dans le cadre de systèmes administrés par l’État ou par le comté qui sont conçus spécialement pour une catégorie donnée de maladie. Le gouvernement fédéral paie maintenant pour la plupart des services dispensés aux personnes atteintes d’une maladie mentale grave, tandis que les États et les municipalités se chargent de subvenir à leurs besoins. Cependant, la majeure partie des ressources fédérales sont regroupées dans des programmes réguliers (par ex., Medicaid, Medicare, réadaptation professionnelle, logement) qui ne sont pas nécessairement adaptés aux exigences précises des soins de santé mentale et qui sont, le plus souvent, administrés par différentes agences gouvernementales. Pour cette raison, les consommateurs et les familles sont souvent obligés de se débattre pour obtenir les services voulus.

Qui plus est, comme la fourniture des services de soins de santé mentale est maintenant dévolue aux cinquante États et aux centaines de comtés et de collectivités locales, la disponibilité de ces services varie largement d’un endroit à l’autre. Dans une entrevue, Michael F. Hogan devait déclarer à cet égard : « Quand vous avez vu un État, eh bien, vous n’en avez vu qu’un seul ».

Dernièrement, d’importants changements ont également été apportés dans le secteur privé, notamment à la suite de la mise en place du régime de soins gérés en tant que principal moyen d’organisation de la couverture dans le cadre des régimes d’assurance privée,  dans le courant des années 90.

4.2       COÛTS ET FINANCEMENT DES SERVICES DE SANTÉ MENTALE

4.2.1     Les coûts de la maladie mentale aux États-Unis

La maladie mentale impose des coûts tant directs qu’indirects à l’économie. Ainsi, en 1990, l’économie américaine a subi une perte de près de 79 milliards de dollars à cause des coûts indirects de la maladie mentale (prise dans son ensemble). La plus grande  partie de ce montant (63 milliards de dollars) reflète la perte de la productivité attribuable à la maladie. Cependant, les coûts indirects englobent également près de 12 milliards de dollars en frais liés à la mortalité (perte de productivité due au décès prématuré) et près de 4 milliards de dollars au titre de la perte de productivité dans le cas des détenus et des aidants naturels pour le temps que ces derniers consacrent aux soins à la famille.

En 1996, les États-Unis ont dépensé plus de 99 milliards de dollars pour le traitement direct des troubles mentaux de même que pour la toxicomanie, la maladie d’Alzheimer et d’autres formes de démence. De ce montant, 69 milliards de dollars ont été consacrés au diagnostic et au traitement de la maladie mentale seule, soit 7 p. 100 de la totalité des dépenses en soins de santé cette année-là. Plus de 70 p. 100 des dépenses directes en santé mentale ont été affectées aux services de fournisseurs spécialisés tandis que le reste a été en majeure partie consacré aux fournisseurs de services médicaux généraux.

En 1997, dans l’ensemble, les sources publiques assumaient 57 p. 100 des dépenses en santé mentale tandis que les sources privées se chargeaient des 43 p. 100 restant (figure 1). Entre 1986 et 1996, les dépenses en santé mentale ont progressé à un rythme annuel moyen de plus de 7 p. 100, par rapport au taux global pour les soins de santé qui était, lui, supérieur à 8 p. 100. Selon le Directeur du Service de santé publique des États-Unis, cet écart est peut-être attribuable au fait que, pendant cette période, les méthodes de limitation des coûts des soins gérés ont été appliquées avec plus de rigueur dans le secteur des services de santé mentale. Les médicaments prescrits aux malades externes, soit environ 9 p. 100 de la totalité des coûts directs des services de santé mentale, sont au nombre des dépenses qui ont connu la hausse la plus rapide dans le secteur des services de santé mentale.

Tout le secteur privé 43% Tout le secteur public 57%
 

 

4.2.2    L’assurance santé mentale financée par l’État

Au cours des vingt dernières années, d’importants changements ont été apportés en matière d’attribution des responsabilités pour le paiement des coûts des soins de santé mentale aux États-Unis. Le rôle de chaque État dans le financement direct des soins de santé mentale a été réduit tandis que le financement des soins de santé mentale dans le cadre de Medicaid s’est relativement élargi. Cette situation est due en partie à l’aide financière importante que Washington consent aux États. Cependant, M. Emmet devait nous déclarer ce qui suit à ce sujet : « Medicaid est un programme d'assurance-maladie qui ne couvre cependant que […] certains services approuvés et il dépend de contributions de contrepartie des États, que ces derniers ont de plus en plus de mal à verser en cette période de difficultés financières ». Cette réorientation a notamment comme conséquence que Medicaid assume maintenant la majeure partie des coûts des services de santé mentale aux États-Unis et que, de ce fait, il exerce une très grande influence sur la prestation des soins de santé mentale. Ces dernières années, les régimes d’assurance privés ont joué un rôle plus limité au chapitre du financement des services de santé mentale.

Le gouvernement fédéral offre une aide financière qui est spécialement destinée aux programmes de santé mentale. C’est notamment le cas du Community Mental Health Services Block Grant (programme de subventions globales aux services communautaires de santé mentale), financé par le Department of Health and Human Services (HHS) (ministère de la Santé et des Services sociaux), par le truchement de la Substance Abuse and Mental Health Services Administration (SAMHSA) (administration des services de santé mentale et de lutte contre la toxicomanie), qui offre une aide financière aux 59 États et territoires. Au total, l’aide financière accordée dans le cadre de ce programme s’est chiffrée à quelques 433 millions de dollars en 2002, mais ce montant représente moins de 3 p. 100 des revenus de ces agences d’État.

En fait, les grands programmes fédéraux qui ne sont pas axés sur les soins de santé mentale jouent un rôle beaucoup plus important au chapitre du financement des services de santé mentale. Par exemple, par le seul truchement des programmes Medicare et Medicaid, le ministère de la Santé et des services sociaux dépense près de 24 milliards de dollars chaque année pour la fourniture de soins de santé mentale aux bénéficiaires (cette proportion n’inclut pas la part des États au chapitre de Medicaid). En outre, les deux plus importants programmes fédéraux d’aide aux personnes atteintes d’une maladie mentale ne sont pas des programmes de services de santé. Il s’agit du Supplemental Security Income (SSI) (supplément de revenu garanti) et de la Social Security Disability Insurance (SSDI) (assurance invalidité de la sécurité sociale) administrés par la Social Security Administration (administration américaine de la sécurité sociale).

La hausse vertigineuse des coûts, surtout dans le cas des médicaments prescrits, impose des pressions énormes tant sur les particuliers que sur les États. La National Association of State Budget Officers (association nationale des agents de budget des États) a annoncé qu’en 2002, 25 États ont dépensé davantage pour les services Medicaid qu’ils ne l’avaient prévu dans leur budget et que 28 États prévoyaient une insuffisance de ressources lorsque les données de 2003 ont été produites. Le gouvernement fédéral est intervenu de façon ponctuelle et a injecté des fonds supplémentaires dans les programmes Medicaid des États : 10 milliards de dollars en tout versés l’an dernier et cette année. Selon le Federal Center for Medicare and Medicaid Services (centre fédéral des services Medicare et Medicaid), entre 1990 et 2000, les coûts des prescriptions assumés par Medicaid ont quadruplé, passant de 5,1 milliards de dollars à 20,9 milliards de dollars.

4.2.3    L’assurance santé mentale privée

La plupart des Américains (84 p. 100) sont assurés d’une façon ou d’une autre – dans la majorité des cas, ils le sont par une assurance privée offerte par leur employeur. Cependant, en ce qui concerne les soins de santé mentale, la couverture consentie par ces assurances varie beaucoup d’un régime et d’un promoteur à l’autre.

4.2.3.1               Les éléments de base de l’assurance santé mentale

La couverture offerte pour les services de santé mentale a toujours été plus limitée que celle disponible pour les autres soins médicaux. En règle générale, les régimes de soins médicaux prévoient des quotes-parts plus élevées et limitent davantage le nombre autorisé de journées d’hospitalisation et de consultations externes pour les soins de santé mentale. Ils prévoient aussi une couverture limitée pour les services de santé mentale (sous la forme de plafonds financiers annuels et maximums à vie.

Ces dernières années, des dispositions législatives réglementant les assurances et des changements fondamentaux apportés dans la fourniture des services de santé mentale ont eu pour effet de modifier l’environnement dans lequel s’effectuent les achats et les ventes dans le domaine de l’assurance santé mentale. Les lois déposées au Congrès et dans de nombreux autres organes législatifs aux États-Unis, vise à réglementer la parité pour gommer les écarts entre la couverture assurée pour les soins de santé mentale et celle prévue pour d’autres problèmes de santé. Toutefois, les efforts déployés jusqu’à présent pour parvenir à la parité n’ont pas tous abouti puisque le Congrès, par exemple, n’a pas encore adopté de loi dans ce sens.

Dans le même ordre d’idée, les soins gérés ont transformé la fourniture des services de santé mentale au cours des dix dernières années. De nos jours, il n’est pas rare que les employeurs et les administrateurs des régimes de soins de santé confient l’administration des indemnités pour maladie mentale à des organismes spécialisés de soins gérés de santé comportementale (MBHO). Ainsi, on fait appel à une expertise spécialisée pour la gestion de l’utilisation et pour l’orientation des soins afin d’assurer la prestation de traitements efficaces dans les réseaux de fournisseurs. On dit que la santé mentale est le seul secteur des soins de santé où les soins gérés ont effectivement permis de contrôler les coûts.

Selon un sondage récent, en 2002, 98 p. 100 des travailleurs américains ayant une assurance santé de l’employeur bénéficiaient d’une couverture pour des services de santé mentale. Quatre-vingt-seize pour cent des travailleurs assurés avaient une assurance hospitalisation pour des soins de santé mentale tandis que 98 p. 100 d’entre eux avaient une assurance pour des services de santé mentale en consultation externe. Entre 1991 et 2002, la proportion des travailleurs détenteurs d’une assurance santé à qui des indemnités pour cause de maladie mentale ont été offertes a, en fait, augmenté.

Cependant, bien que la plupart des travailleurs ayant une assurance santé générale se soient vu offrir une couverture pour des services de santé mentale en 2002, les entreprises ont continué de plafonner les indemnités consenties pour maladie mentale. Ces dernières années, l’administration fédérale et les États ont adopté des lois sur la parité dans le dessein de mettre un frein aux limites imposées par les assureurs. Malgré tout, à cause de lacunes dans les lois sur la parité édictées par le gouvernement fédéral et par les États, des différences persistent entre les indemnités pour cause de maladie mentale et les indemnités pour cause de maladie générale. Les données disponibles indiquent que 74 p. 100 des travailleurs assurés avaient droit à une consultation externe par an et que 64 p. 100 d’entre eux avaient droit à un jour d’hospitalisation par an. Bien que, par le passé, les administrateurs des régimes d’assurance santé se soient efforcés de limiter les coûts en exigeant que les souscripteurs versent une quote-part supérieure au point de service pour les soins de santé mentale que pour les autres services médicaux, un sondage récent révèle qu’en 2002, 22 p. 100 seulement des travailleurs assurés bénéficiaient d’une participation accrue au titre des indemnités pour cause de maladie mentale.

4.2.3.2              L’organisation de l’assurance santé mentale privée

Les soins gérés ont grandement modifié l’organisation et la fourniture des services de santé mentale. Comme nous venons de le voir, les entreprises sont de plus en plus nombreuses à confier l’administration des indemnités pour cause de maladies mentales à des sociétés spécialisées. Ces organisations ont recours à une expertise spécialisée pour établir des réseaux de fournisseurs, négocier des contrats à rabais en fonction du volume, établir des protocoles de traitement fondés sur les résultats et élaborer d’autres programmes d’encouragement pour la gestion de l’utilisation et des coûts.

Les organisations de soins de santé intégrés (HMO) ont été la première forme de soins gérés. Elles ont instauré la négociation de contrats portant sur la fourniture de l’ensemble des services médicaux dans le cadre d’un régime de coûts prépayés, calculés par tête. Aujourd’hui, il existe un certain nombre de types différents de soins gérés, par exemple les Preferred Provider Organizations (PPO) (organismes dispensateurs de services à tarifs préférentiels) [dans le cadre de programmes de soins gérés, des contrats sont conclus avec des réseaux de fournisseurs de services] et les programmes Point-of-Service (POS) (programmes au point de service), qui sont des programmes de soins gérés présentant des caractéristiques à la fois du paiement par capitation et du paiement à l’acte. En 1988, l’assurance fondée sur le paiement à l’acte était encore la principale méthode utilisée dans le secteur des soins de santé mais, de nos jours, la majorité des Américains sont couverts par des ententes concernant les soins gérés (programmes des HMO, des PPO ou des POS).

Dans le cadre des programmes de soins gérés de santé comportementale dits « sur mesure », certains éléments du risque assuré – défini par service ou par maladie – sont séparés du risque assuré global et couverts dans le cadre d’un contrat distinct conclu entre le payeur (l’assureur ou l’employeur) et le fournisseur retenu. D’après les données, le tiers environ des détenteurs d’une assurance santé de l’employeur se seraient vu offrir une assurance santé mentale dans le cadre de tels contrats sur mesure. Il est établi que la formule des soins gérés permet de réduire les coûts des services de santé mentale, mais on commence tout juste à étudier dans quelle mesure les techniques de réduction des coûts de soins gérés influent sur l’accès et sur la qualité des services.

D’aucuns craignent en effet que les stratégies restrictives visant à endiguer les coûts, associées aux diverses mesures destinées à inciter les fournisseurs et les établissements à réduire le nombre de patients aiguillés vers des spécialistes, le nombre d’admissions en milieu hospitalier ainsi que la durée ou l’importance des traitements dispensés, ne contribuent à une dégradation de l’accès à des soins de qualité. L’autorisation préalable est une autre caractéristique organisationnelle des soins gérés de santé comportementale. Certes, si elle peut avoir pour résultat d’inciter les omnipraticiens à appliquer des protocoles fondés sur l’expérience clinique, l’autorisation préalable risque aussi d’influer sur le niveau d’utilisation. Suivant les règles d’autorisation préalable, les médecins doivent obtenir l’autorisation des responsables de l’assurance santé ou du fournisseur du contrat sur mesure avant de prescrire un traitement. En 2002, la moitié des travailleurs assurés étaient tenus d’obtenir une autorisation avant d’utiliser des services spécialisés de santé mentale en consultation externe.

En outre, malgré la hausse des soins gérés et des programmes de soins de santé comportementale sur mesure, les employés continuent d’assumer eux-mêmes une part des coûts des services de santé mentale qui plus élevée que pour toute autre maladie. La seule indemnité pour cause de maladie mentale qui demeure sur le même pied que l’assurance médicale générale est la couverture pour les médicaments prescrits (bien que cela soit peut-être dû au fait que les médicaments psychotropes font désormais partie de l’ensemble des avantages sociaux de Medicaid et qu’ils ne sont pas visés par les contrats sur mesure). Les médicaments psychotropes prescrits dans les services de consultations externes représentent le coût qui connaît la croissance la plus rapide dans le secteur des soins de santé mentale. D’après une étude récente, le coût des médicaments prescrits a augmenté, passant de 22 p. 100 des dépenses totales pour les soins de santé mentale en 1992 à 48 p. 100 en 1999 chez les détenteurs d’une assurance santé de l’employeur.

En résumé, le plafonnement des restrictions aux indemnités combinée à des techniques solides de soins gérés pour le contrôle de l’utilisation ont contribué à réduire la croissance des dépenses en santé mentale comparativement à l’ensemble des dépenses en santé; cependant, ces mesures pourraient également causer des problèmes sur le plan de l’accès. À cet égard, M. Hogan nous a fait remarquer ce qui suit :

Les soins gérés, s'ils sont financés de façon adéquate et bien pratiqués, semblent être la meilleure approche. Le problème est que souvent, aux États-Unis, ils ne sont pas financés de façon adéquate, et si l'on s'y prend mal, cela devient un désastre.

4.3       ORGANISATION ET FOURNITURE DES SERVICES

Comme nous l’avons vu, dans son dernier rapport, la Commission sur la santé mentale a conclu que le système de fourniture des services de santé mentale aux États-Unis a besoin d’une sérieuse réforme. De nombreux consommateurs reçoivent des traitements et des services efficaces, mais ce n’est pas le cas pour tous et beaucoup font face à un système dans lequel les services disponibles sont fragmentés, assujettis à des règles et à des règlements financiers complexes et restreints par des lourdeurs bureaucratiques. M. Hogan devait d’ailleurs nous affirmer à cet égard :

Paradoxalement, il existe beaucoup plus de services maintenant qu'il y a une dizaine d'années, et ceux qui ont la bonne fortune d'y recourir s'en portent bien. Cependant, la multiplication de tous ces services fait que les choses se sont beaucoup compliquées à l'échelle communautaire, si bien que les familles ne savent pas à qui s'adresser quand un problème surgit. C'est l'inconvénient de la fragmentation.

Le rapport de la Commission présidentielle laisse entendre que bon nombre de ces problèmes sont attribuables à la stratification de programmes multiples bien intentionnés mais sans aucune orientation, coordination, ni harmonisation globale. À cause de cette situation, les consommateurs se sentent souvent dépassés et déroutés lorsqu’ils doivent obtenir et intégrer des soins de santé mentale, des services de soutien et des prestations d’invalidité par le truchement des multiples programmes distincts qui sont offerts par divers organismes – qui fédéraux, qui des États et qui locaux – de même que par le secteur privé. Des rapports récents reconnaissent que les lacunes du système ont des conséquences tant inutiles que coûteuses, par exemple l’invalidité, l’itinérance, l’échec scolaire et l’incarcération. M. Hogan a décrit ainsi la situation :

Nous en sommes ainsi arrivés à une mosaïque de programmes où les soins de santé mentale relèvent d'une multitude d'organismes fédéraux différents. Ces organismes exercent généralement leur activité en collaboration avec l'organisme étatique correspondant. […] Il existe donc des structures et des systèmes différents au niveau étatique et au niveau local qui assurent la prestation des soins, de sorte que les malades mentaux et leurs familles doivent essayer de s'y retrouver dans ce qui est devenu un véritable dédale de programmes, et ce, alors qu'ils sont généralement plus vulnérables.

Nombreux sont ceux qui reçoivent de bons soins et qui parviennent à se rétablir mais, dans les faits, selon le rapport de la Commission présidentielle,[18] aux États-Unis, environ une personne sur deux ayant besoin d’un traitement pour un problème de santé mentale ne le reçoit pas. En outre, il peut arriver que la personne qui parvient à accéder à des soins constate que de nombreux traitements et services ne sont tout simplement pas disponibles, notamment en milieu rural. Aussi, il peut arriver que la qualité des soins laisse à désirer. Il arrive parfois qu’un diagnostic ne soit pas établi comme il le devrait, que la médication soit mal dosée ou que la durée du traitement soit trop brève. Dans le cas des minorités ethniques et raciales, le taux de traitement est encore plus bas que dans la population générale et la qualité des soins est moindre.

D’un autre côté, un article récent soulignait que l’accès aux services aux États-Unis est en voie d’amélioration dans certains domaines, surtout pour les personnes souffrant de maladies mentales graves (MMG). Selon les auteurs David Mechanic et Scott Bilder :

La bonne nouvelle c’est que – contrairement au genre d’hypothèse que l’on pose fréquemment dans le milieu de la santé mentale – l’accès aux soins pour les personnes souffrant de MMG s’est amélioré, et tout indique que la situation s’est encore améliorée tout récemment, entre 1997 et 2001. Les personnes souffrant de MMG étaient plus susceptibles en 2001 qu’en 1997 de recevoir des services spécialisés en santé mentale, mais celles souffrant d’autres maladies mentales ou n’étant pas atteintes de telles maladies avaient plus difficilement accès à ces services. Comme les deux derniers groupes sont plus importants que celui des personnes souffrant de MMG, le fléchissement constaté au niveau agrégé pourrait contribuer à entretenir la perception que les services sont moins accessibles.

Les deux auteurs font par ailleurs remarquer ce qui suit :

En outre, le nombre de fournisseurs de soins de santé mentale a considérablement augmenté. Bien que celui des professionnels traditionnels, comme les psychiatres et les infirmiers en psychiatrie n’aient connu qu’une augmentation modeste, force est de constater que les augmentations ont été importantes surtout dans le secteur de la psychologie et du travail social et que l’augmentation a même été très forte du côté du counselling et de la réadaptation psychosociale. L’effectif des professionnels s’occupant des patients (exprimé en équivalents temps plein) dans les organismes de santé mentale est passé de 347 000 en 1986 à 532 000 en 1998.

4.3.1     Les soins généraux et primaires

Le secteur des soins médicaux généraux et des soins primaires regroupe les professionnels de la santé, par exemple les internistes généraux, les pédiatres et les infirmiers praticiens travaillant dans des cabinets, des cliniques, des hôpitaux de soins actifs et spécialisés en chirurgie et dans des maisons de soins infirmiers. Plus de 6 p. 100 de la population adulte aux États-Unis a recours au secteur des soins médicaux généraux pour obtenir des soins de santé mentale, ce qui donne une moyenne d’environ 4 consultations par an. Depuis longtemps, le secteur des soins médicaux généraux est considéré comme le premier point de contact pour de nombreux adultes atteints de troubles mentaux et environ la moitié des soins fournis pour des troubles mentaux courants sont prodigués dans des établissements de médecine générale. En fait, les fournisseurs de soins primaires prescrivent la majeure partie des médicaments psychotropes administrés tant chez les enfants que chez les adultes.

Les fournisseurs de soins primaires semblent en mesure de jouer un rôle fondamental pour le traitement des maladies mentales mais, d’après des rapports récents, des problèmes persistent sur les plans du dépistage, du traitement et de l’aiguillage. Malgré leur prévalence, il n’est pas rare que les troubles mentaux ne soient pas diagnostiqués ou qu’ils soient mal ou pas traités dans le secteur des soins primaires. Bien que le nombre de cas signalés soit en hausse, le nombre de diagnostics posés dans les services de soins primaires demeure faible et il n’est pas rare que ces services n’orientent pas les patients vers le secteur du traitement spécialisé en santé mentale.

4.3.2    Les soins spécialisés

Le secteur des soins spécialisés en santé mentale regroupe les professionnels de la santé mentale, par exemple les psychiatres, les psychologues, les infirmières psychiatriques et les travailleurs sociaux en psychiatrie qui ont reçu une formation spécialisée pour le traitement des personnes atteintes de troubles mentaux. À l’heure actuelle, les traitements spécialisés sont en grande partie fournis dans des services de consultations externes, comme des cabinets privés, ou dans des cliniques privées ou publiques. La majeure partie des soins actifs dispensés en milieu hospitalier est actuellement fournie dans des unités psychiatriques spéciales à l’intérieur des hôpitaux généraux ou dans des lits répartis dans les différentes unités des hôpitaux généraux. À cela s’ajoutent les soins intensifs fournis dans les hôpitaux psychiatriques privés et les centres privés de traitement en établissement pour les enfants et les adolescents. Les installations publiques comprennent les hôpitaux psychiatriques des États et des comtés de même que des établissements de santé mentale polyvalents qui, souvent, coordonnent un large éventail de services de consultations externes, de gestion intensive des cas, d’hospitalisation à temps partiel et de services aux hospitalisés. Dans l’ensemble, un peu moins de 6 p. 100 de la population adulte et environ 8 p. 100 des enfants et des adolescents (de 9 à 17 ans) utilisent des services spécialisés de santé mentale au cours d’une année

4.3.3    Les services à la personne

Le secteur des services à la personne comprend les services sociaux, les services de counselling en milieu scolaire, les services de réadaptation en établissement, la réadaptation professionnelle, la justice pénale et les services en milieu carcéral ainsi que les conseillers professionnels religieux. Au début des années 80, environ 3 p. 100 des adultes américains ont utilisé les services de santé mentale offerts dans ce secteur.

4.3.3.1               L’emploi

Le taux d’emploi des personnes atteintes de maladie mentale est l’un des plus faibles parmi ceux et celles qui sont atteints d’incapacité aux États-Unis – seule une personne sur trois environ ayant un emploi. Le chômage demeure élevé malgré les sondages qui révèlent que la majorité des adultes souffrant de maladies mentales graves veulent travailler et que beaucoup de malades pourraient travailler s’ils recevaient une aide. Malheureusement, selon les rapports récents, la plupart des personnes atteintes de  maladies mentales graves ne reçoivent absolument aucun service de réadaptation professionnelle.

Nombreuses sont les personnes souffrant de maladies mentales graves qui continuent de compter sur l’aide financière du gouvernement fédéral afin de conserver leur couverture pour soins de santé, même si elles désirent grandement avoir un emploi. Elles font face à un facteur dissuasif d’ordre financier, car si elles occupent un emploi à temps complet, elles  n’ont plus droit aux prestations fédérales. Étant donné que la plupart des emplois auxquels ces personnes ont accès n’offrent pas de couverture pour les soins de santé mentale (d’après une vaste étude portant sur 8 États, seulement 8 p. 100 des personnes atteintes de maladie mentale ayant réussi à retourner à temps complet sur le marché du travail bénéficiaient d’une assurance santé mentale), elles doivent choisir entre l’emploi et la couverture. En conséquence, ces personnes dépendent de leur rente d’invalidité et de Medicaid (ou Medicare) mais elles préfèreraient travailler et être autonomes. En fait, elles composent la cohorte la plus importante – 35 p. 100 – des bénéficiaires des prestations d’aide au revenu versées par le gouvernement fédéral par le truchement du programme de sécurité sociale pour les personnes invalides, le Supplemental Security Income (SSI) (supplément de revenu garanti). À cet égard, M. Hogan devait préciser au Comité :

Quelle est la plus grosse dépense liée à la maladie mentale chez nous? Ce sont les paiements d'invalidité versés aux gens devenus invalides du fait de la maladie mentale. Nous leur envoyons un chèque chaque mois — pas assez pour vivre décemment. Cela revient à leur dire qu'ils doivent rester invalides pour bénéficier de ce chèque, ce qui est une situation terrible. Si nous leur donnions de meilleurs soins et si nous les aidions à trouver un travail — pas nécessairement un travail à plein temps, à raison de 40 heures par semaine — chacun s'en porterait beaucoup mieux.

4.3.3.2              Le logement

Le manque de logements intégrés décents, sécuritaires et abordables est l’un des plus importants obstacles à la pleine participation à la vie communautaire qui se pose aux personnes souffrant de maladies mentales graves. Actuellement, des millions de personnes aux États-Unis atteintes de maladies mentales graves ne disposent pas d’un logement répondant à leurs besoins. À cause de la pénurie de logements abordables et de services de soutien connexes, les personnes souffrant de maladies mentales graves font la navette entre les prisons, les établissements, les abris et la rue, elles restent plus longtemps que nécessaire en établissement ou elles demeurent dans des logements dangereusement insalubres. Les personnes souffrant de maladies mentales graves forment également une grande proportion des sans-abri à répétition ou de longue durée.

Sur plus de deux millions d’adultes américains qui ont été sans-abri pendant un temps au cours d’une année donnée, 46 p. 100 ont fait état d’un problème de santé mentale dans les douze mois ayant précédé leur itinérance. Une étude récente montre que les personnes qui comptent uniquement sur les prestations du programme SSI – ce qui est le cas de nombreuses personnes souffrant de maladies mentales graves – ont un revenu égal à seulement 18 p. 100 du revenu médian et qu’elles n’ont pas les moyens d’avoir un logement décent dans un des 2 703 marchés du logement définis par le U.S. Department of Housing and Urban Development (HUD) (ministère de l’Habitation et du Développement urbain).

Aux termes des politiques fédérales en matière de logement social, il peut être difficile pour des personnes ayant de mauvais antécédents de locataire, des problèmes de toxicomanie et des casiers judiciaires – autant de problèmes courants chez de nombreuses personnes atteintes de maladies mentales graves – de satisfaire aux exigences pour l’obtention d’une aide au logement ou d’unités de logement social.

4.3.3.3              Les services aux personnes incarcérées

Environ 7 p. 100 de tous les détenus aux États-Unis sont atteints d’une maladie mentale grave et la proportion des détenus souffrant de formes graves est encore beaucoup plus élevée. Aux États-Unis, les personnes atteintes de maladies mentales graves qui ont maille à partir avec le système de justice pénale sont souvent :

·        pauvres

·        sans assurance

·        membres de groupes minoritaires en nombre disproportionné

·        sans abri

·        toxicomanes et en même temps atteintes de troubles mentaux.

Il est probable que ces personnes demeureront dans le cycle sempiternel du système de santé mentale, de la toxicomanie et de la justice pénale.

Il est fréquent que les personnes atteintes de maladies mentales ne reçoivent pas de services appropriés à leur cas après leur incarcération. Nombre d’entre elles perdent leurs droits à l’aide au revenu et aux prestations d’assurance santé dont elles ont besoin pour réintégrer la société après leur mise en liberté.

4.3.3.4              L’accès aux services en milieu rural

Pour de nombreux Américains souffrant de maladies mentales, qui vivent en milieu rural et dans les autres régions éloignées, l’accès aux soins est difficile, la disponibilité de fournisseurs de soins compétents est insuffisante, le revenu familial est faible et un stigmate social plus grand frappe les personnes qui doivent être traitées pour un problème de santé mentale, comparativement à leurs homologues vivant en milieu urbain. En conséquence, les personnes ayant des besoins en santé mentale et résidant en milieu rural aux États-Unis :

·        entament le processus de soins plus tard que leurs homologues urbains, une fois la maladie déjà bien installée;

·        entament le processus de soins alors que les symptômes se sont aggravés, sont plus persistants et plus handicapants;

·        nécessitent un traitement plus coûteux et intensif.

S’ajoute au problème de la disponibilité et de l’accès le fait que les Américains vivant en milieu rural ont un revenu familial inférieur et sont moins susceptibles d’avoir une assurance santé privée couvrant les soins de santé mentale que leurs homologues en milieu urbain. En outre, si la plupart des grandes villes où se trouvent des facultés de médecine regorgent de psychiatres, c’est loin d’être le cas dans les petites villes où ils sont en nombre insuffisant et pire encore en milieu rural où il n’y en a généralement pas.

4.3.3.5              Les services aux minorités

Des rapports récents indiquent que le système de santé mentale aux États-Unis ne suit pas le rythme des divers besoins des minorités raciales et ethniques et que, le plus souvent, il répond de façon insuffisante ou inappropriée aux besoins de cette clientèle. Par exemple, chez les Afro-américains, la schizophrénie est souvent sur-diagnostiquée tandis que la dépression est fréquemment sous-diagnostiquée. En règle générale, les rapports indiquent que, dans le cadre du système, on ne respecte pas ou l’on ne comprend pas les antécédents, les traditions, les croyances, les langues ni les systèmes de valeurs des groupes différents sur le plan culturel. L’incompréhension et la mauvaise interprétation des comportements ont eu des conséquences tragiques, y compris le fait que des membres des minorités ont été placés, à tort, entre les mains des systèmes de justice pénale ou du système judiciaire pour les jeunes. À ce sujet, voici ce que M. Emmet a indiqué au Comité :

Aux États-Unis, on constate que certaines communautés — les Afro-américains et les Latino-américains — font rarement appel aux systèmes de soins de santé quand il s'agit de maladies mentales. La stigmatisation y est pour beaucoup. Toutefois, on sait aussi qu'ils s'adressent aux églises et à d'autres organismes communautaires pour essayer de faire face à leurs problèmes.

En conséquence, les Amérindiens, les autochtones de l’Alaska, les Afro-américains, les Américains d’origine asiatique, les insulaires du Pacifique et les Hispano-américains tendent à porter un fardeau excessivement lourd, par rapport aux autres groupes, pour ce qui est de l’incapacité due aux troubles mentaux. On ne saurait attribuer cette situation à la prévalence accrue ou à la gravité des maladies dans ces populations. Selon des rapports récents, le problème serait plutôt dû au manque de soins fournis à ces personnes et à la piètre qualité des soins offerts.

4.3.3.6              Les services aux enfants

Aux États-Unis, près de 21 p. 100 des enfants et des adolescents (de 9 à 17 ans) montrent des signes de détresse ou d’incapacité associés à un diagnostic précis et une invalidité minimale par rapport à une échelle d’évaluation globale. Presque la moitié de ce groupe (près de 10 p. 100 des enfants et des adolescents) a reçu un traitement dans un ou plusieurs secteurs du système de services de santé mentale de facto, le reste (plus de 11 p. 100 de la population) n’a reçu aucun traitement dans aucun des secteurs du système de soins de santé. Ainsi, la majorité des enfants et des adolescents atteints de troubles mentaux aux États-Unis ne reçoivent aucun soin. Toutefois, Mechanic et Bilder soulignent que, d’après les données disponibles, les enfants souffrant de problèmes de santé mentale reçoivent plus d’attention que par le passé. Ils citent plus particulièrement l’analyses de Sherry Glied et Alison Evans Cuellar des Enquêtes nationales de 1987 et de 1998 sur les dépenses médicales, analyse selon laquelle le nombre d’enfants traités pour de tels troubles a augmenté de 60 p. 100.

En outre, le General Accounting Office (GAO) (Bureau de comptabilité générale) a récemment publié un rapport mettant en exergue l’une des graves conséquences de l’état des services de santé mentale pour les enfants et les adolescents aux États-Unis. Il semble que des milliers de parents sont obligés de confier leurs enfants, année après année, à des organismes de protection de la jeunesse ou du système judiciaire pour jeunes afin qu’ils puissent obtenir les services de santé mentale dont ils ont besoin. Les parents qui ont épuisé leurs économies et leurs indemnités d’assurance santé doivent prendre une décision déchirante : renoncer à leurs droits de parents et briser leur famille afin que leurs enfants perturbés reçoivent des soins en santé mentale. D’après les estimations du rapport du GAO, en 2001, plus de 12 700 enfants ont dû être confiés – par leurs parents – à des organismes de protection de la jeunesse ou au système de justice pour jeunes, en dernier recours pour que ces enfants reçoivent les soins de santé mentale dont ils avaient besoin. Selon la Commission sur la santé mentale, ces chiffres sont probablement inférieurs à la réalité parce que 32 États, y compris les cinq États les plus grands, n’ont pu fournir de données sur le nombre d’enfants touchés.

D’après le rapport du GAO, plusieurs facteurs contribuent à la décision d’« échanger la garde contre des services », y compris :

·        les restrictions des assurances santé publiques et privées;

·        l’offre insuffisante de services de santé mentale;

·        la disponibilité restreinte de services par le truchement des organismes de santé mentale et des écoles;

·        les difficultés à satisfaire aux critères d’admissibilité aux services.

Ainsi, à cause du manque d’accès aux soins en santé mentale, des milliers de parents doivent abandonner la garde de leurs enfants atteints de troubles mentaux graves aux organismes d’aide sociale à l’enfance et aux centres de détention des jeunes seulement pour obtenir un traitement.

4.4       PROMOTION et PRÉVENTION

Plusieurs projets ont été lancés aux États-Unis au titre de la promotion de la santé mentale et de la prévention de la maladie mentale, de l’abus de substances et de la toxicomanie. Ainsi, le Comité a appris que la National Association of State Mental Health Program Directors (Association nationale des directeurs de programme de santé mentale dans les États) est en train d’approuver un document de position réclamant l’adoption de politiques et de pratiques en matière de :

·        promotion de comportements propices à une bonne santé mentale;

·        détection des problèmes de santé mentale et d’interventions les plus précoce possibles;

·        réduction de l’incidence des maladies mentales et du suicide;

·        prévention de l’incapacité due à la maladie mentale et aux états de co-morbidité;

·        prévention des états couramment associés à la maladie mentale, notamment les autres maladies, la consommation abusive de substances et les traumatismes.

Afin de mieux illustrer les efforts réellement entrepris dans ce domaine, nous allons à présent nous attarder sur la stratégie nationale de prévention du suicide.

4.4.1     La stratégie nationale de prévention du suicide

La National Strategy for Suicide Prevention (Stratégie nationale de prévention du suicide ou SNPS) est le résultat d’une série d’initiatives entreprises par des acteurs gouvernementaux et non gouvernementaux à la fin des années 90. Au début 2000, le secrétaire à la Santé et aux services sociaux a mis sur pied un groupe directeur au niveau fédéral, chargé de lancer la stratégie nationale en question.

Celle-ci poursuit les objectifs généraux suivants :

·        Prévenir les morts prématurées dues au suicide à tous les âges.

·        Réduire les taux d’autres comportements suicidaires.

·        Réduire les effets délétères associés aux comportements suicidaires et les traumatismes qu’occasionne le suicide chez les membres de la famille et les amis.

·        Cultiver les occasions et les lieux susceptibles d’améliorer le ressort psychologique, la débrouillardise, le respect et le sens de l’interdépendance pour les suicidaires, leurs familles et leur milieu.

Le document intitulé Goals and Objectives for Action (Objectifs d’action), publié en 2001, était destiné à présenter un ensemble d’objectifs principaux et secondaires et à proposer une feuille de route pour l’action. Celui-ci présente donc 11 objectifs principaux et 68 objectifs secondaires pour cette dimension de la stratégie nationale. Dans la prochaine phase de la SNPS, un ensemble d’activités sera élaboré pour chaque objectif secondaire.

Les objectifs principaux de la stratégie se présentent sous la forme d’énoncés généraux, de niveau supérieur, destinés à orienter la planification sur les différents thèmes abordés, en fonction du résultat visé. Les objectifs secondaires de la stratégie précisent les objectifs principaux en indiquant qui doit faire quoi, quand et où pour parvenir à l’objectif principal. Enfin, les activités précisent la façon dont les objectifs secondaires seront réalisés

Les onze objectifs principaux de la stratégie sont les suivants :

·        Promouvoir l’idée que le suicide est un problème de santé publique pouvant être évité.

·        Élaborer des moyens de soutien à la prévention du suicide qui reposent sur une assise large.

·        Élaborer et mettre en œuvre des stratégies destinées à réduire la stigmatisation associée au fait que l’on fréquente les services de santé mentale, de traitement des toxicomanies ou de prévention du suicide.

·        Élaborer et mettre en œuvre des programmes communautaires de prévention du suicide.

·        Promouvoir les efforts déployés en vue de rendre plus complexe l’accès aux méthodes et moyens d’automutilation létaux.

·        Organiser une formation axée sur la détection des comportements à risque et sur la prestation de traitements efficaces.

·        Élaborer et promouvoir l’adoption de pratiques cliniques et professionnelles efficaces.

·        Améliorer l’accès aux services de lutte contre l’abus de substances et aux services de santé mentale, et favoriser les liens au niveau communautaire.

·        Améliorer la façon dont le comportement suicidaire, la maladie mentale et l’abus de substances sont présentés dans les médias de divertissement et d’information, et améliorer la façon dont les médias traitent de ces aspects.

·        Promouvoir et financer la recherche sur le suicide et la prévention du suicide.

·        Améliorer et étendre les systèmes de surveillance.

La stratégie nationale se veut un modèle que les États, les collectivités et les tribus souhaitant se doter de leur propre plan de prévention du suicide pourront appliquer ou modifier. Ainsi, la stratégie nationale proposerait un cadre d’action national, mais serait aussi un moyen d’aider les groupes locaux à faire en sorte que la prévention du suicide soit davantage prioritaire.

L’importante étape suivante envisagée dans le cadre de la stratégie nationale est la création d’une structure d’administration ou d’un organisme de coordination qui chapeautera l’ensemble des activités de prévention et fournira un mécanisme de mobilisation de la population. Goals and Objectives for Action donne une idée de ce à quoi pourrait ressembler cet organisme, produit d’un partenariat secteur public-secteur privé. Celui-ci pourrait se charger de formuler un programme d’action, même si l’on se rend bien compte que, pour accélérer les choses, il faudra peut-être mener de front la mise sur pied de cet organisme et la préparation du programme d’action.

4.5       PERSPECTIVES DE RÉFORME

La President’s New Freedom Commission sur la santé mentale, première commission présidentielle chargée de ce sujet en 25 ans, a publié son rapport final en juillet 2003. La création de la Commission a été annoncée par la Maison blanche en février 2001 dans le cadre d’un vaste plan d’action sur les handicaps multiples baptisée New Freedom Initiative. Cette initiative comportait dix propositions visant à abattre les barrières auxquelles se heurtent aujourd’hui les Américains ayant une déficience.

Étant donné que la présidence s’attarde rarement sur la santé mentale, la Commission s’est fixé comme objectif de galvaniser le changement à tous les niveaux et pas seulement au sein du gouvernement fédéral. Tirant profit de l’expérience de commissions passées, la New Freedom Commission s’est fixé pour but de favoriser le progrès par des changements échelonnés et progressifs au sein des grands programmes fédéraux comme Medicaid, Medicare et la sécurité sociale, plutôt que de viser des mesures de réforme chocs ou un soutien accru à divers programmes de santé mentale. Voici en quels termes M. Hogan nous a décrit la stratégie qui sous-tend ce rapport :

Ce que notre commission a fini par proposer reposait sur l'idée qu'il fallait essayer de contourner la notion de réforme ou de restructuration. Nous avions l'impression que la réforme était à l'origine du fouillis actuel et qu'il nous fallait trouver un nouveau concept ou un nouveau terme. Nous avons fini par opter pour le concept de transformation, qui nous a galvanisés. Nous ne savons pas exactement ce que cela veut dire, mais nous pensons que la transformation exige des mesures différentes à bien des niveaux différents. Le problème n'est pas que fédéral, et il ne faut donc pas compter que la sagesse va surgir de la capitale nationale et se répandre à l'échelle locale où les gens devront s'y adapter. Il faut aussi des mesures à l'échelle locale, et il faut des mesures de grande envergure et de moindre envergure, les mesures d'une portée très vaste et irréalisables ne suffisant pas. Ainsi, cela peut paraître mineur comme changement que de créer un contexte dans lequel les patients à titre individuel et leurs familles peuvent davantage décider eux- mêmes de leur traitement, mais ce changement pourrait avoir un effet beaucoup plus important, voire révolutionnaire, que des changements de plus grande envergure. Nous proposons l'idée d'une vision nationale des soins de santé mentale et l'établissement d'objectifs nationaux, qui serviraient, nous l'espérons, à motiver et à organiser les gens …

En plus de son rapport provisoire (octobre 2002) et de son rapport final, la Commission a produit une série de rapports détaillés sur certains aspects des soins de santé mentale. Ces rapports seront publiés ultérieurement en tant que documents de travail dans l’espoir que cela facilitera l’élaboration d’un programme d’action utile pour l’avenir.

Le rapport provisoire relève cinq obstacles majeurs aux soins :

·        la fragmentation et les lacunes dans les soins aux enfants;

·        la fragmentation et les lacunes dans les soins aux adultes souffrant de différentes maladies mentales;

·        les taux élevés de chômage et d’incapacité chez les personnes souffrant de graves maladies mentales;

·        le manque de soins aux personnes âgées souffrant de maladies mentales;

·        l’absence de priorité nationale en santé mentale et prévention du suicide.

Toutefois, l’aspect du rapport provisoire qui semble avoir le plus attiré l’attention est la déclaration de la Commission selon laquelle le système est dans un état pitoyable. Certains estimaient que c’était aller trop loin, mais la Commission a maintenu son constat d’échec du système et pavé la voie à des recommandations bien senties que son rapport final allait contenir.

 Le rapport final se caractérise par l’accent mis sur le rétablissement. M. Hogan a raconté que la Commission s’est inspirée d’une remarque de l’ex-première dame des États-Unis, Rosalynn Carter, pour adopter cette orientation :

Mme Carter nous a dit que nous avions un avantage dans notre réflexion qui n'existait pas il y a une génération. Le changement le plus important qui soit survenu, c'est que nous savons maintenant que le rétablissement est une possibilité pour n'importe quelle personne qui a une maladie mentale.

Le rétablissement est considéré par la Commission comme un processus d’adaptation positive à la maladie et à l’incapacité, fortement lié à la conscience de soi et au sens de l’autonomisation susceptibles de conférer aux personnes souffrant d’une maladie mentale le moyen de vivre une vie satisfaisante, remplie d’espoir et utile, malgré les contraintes imposées par leur état. Les membres de la Commission ont fait bloc autour de l’opinion selon laquelle toutes les personnes qui souffrent d’une maladie mentale devraient avoir la possibilité de s’améliorer et d’espérer. M. Hogan nous a précisé ce dont il retournait, dans son témoignage :

Il s'agit là d'une déclaration simple mais puissante qui recouvre plusieurs notions, de l'avis de la commission. Premièrement, les gens peuvent améliorer leur état de santé mentale même si, auparavant, on les considérait comme des «cas désespérés». Deuxièmement, même ceux qui ont une maladie grave qui les suivra pendant des années ils peuvent atteindre une bonne qualité de vie s'ils ont le soutien qu'il leur faut. Le rétablissement n'est pas nécessairement une guérison miraculeuse; il peut s'agir simplement de savoir bien composer avec une maladie dévastatrice. Troisièmement, s'il y a possibilité de rétablissement, c'est que l'espoir doit être une composante essentielle des soins en santé mentale, qui, de ce fait, ne seront plus aussi passifs et axés sur les soins d'entretien.

Dans son rapport, la Commission indique à quel point le système est fragmenté et reconnaît que la réforme des soins de santé mentale est une tâche déconcertante, étant donné la complexité des changements à apporter. Pour la Commission, il est clair qu’aucune mesure de réforme unique n’engendrera le changement nécessaire, mais il est également clair que la réforme simultanée et à grande échelle de plusieurs programmes ne procurerait pas non plus le changement souhaité. Plus précisément, la Commission a insisté sur l’importance de formuler des plans de traitement individualisés bien que, comme M. Hogan nous l’a dit :

Nous ne savons pas exactement comment la chose pourrait se faire, mais nous sommes d'avis qu'il faut s'orienter vers des soins plus individualisés et davantage axés sur un effort personnalisé afin que la famille et le patient aient davantage leur mot à dire dans le plan de traitement. Ce que nous préconisons, ce n'est pas un pouvoir de décision absolue, mais plutôt un véritable partenariat avec les professionnels, au lieu que le rôle du patient se limite à recevoir le diagnostic et à subir les traitements.

Afin d’établir une liste restreinte de repères à respecter, la Commission propose six objectifs nationaux en soins de santé mentale et oriente ses 19 grandes recommandations sur l’atteinte de ces objectifs (voir l’encadré ci-après). M. Emmet a tenu à insister sur ce qui suit dans son témoignage devant notre Comité :

Les six objectifs de la transformation du système qui ont été énoncés par la commission dans son rapport final peuvent être réalisés, comme l'a expliqué le Dr Hogan, par des mesures prises aux niveaux local, étatique et fédéral. Si elle a évité à dessein d'entrer dans le détail dans ce rapport, la commission y élabore un cadre bien pensé et axé sur une vision à long terme qui permettra de s'attaquer au nœud du problème, tel qu'il avait été défini dans le rapport du directeur du Service de santé publique, à savoir que les services donnent de bons résultats mais que nous en rendons l'accès très difficile pour ceux qui en ont besoin.

Les membres de la Commission ne se font pas d’illusion; ils ne croient pas que leur rapport, malgré l’excellent accueil que lui a réservé le milieu de la santé mentale, suffira à lui seul à transformer un système fragmenté et souvent perturbé. Toutefois, certains signes tendent à montrer que le gouvernement actuel est disposé à donner suite au rapport. Le directeur du Centre des services en santé mentale du SAMHSA a été chargé de diriger l’élaboration d’une méthode de mise en oeuvre des recommandations. L’administration actuelle prévoira un crédit de 44 millions de dollars dans son projet de budget pour 2005 en vue de financer les plans de mise en oeuvre de ses recommandations dans tous les États. Bien que cet engagement budgétaire n’aie pas encore abouti, la proposition a reçu un fort appui du milieu d’intervention communautaire en santé mentale.

La Commission espère que son diagnostic et son plan de traitement permettront de mettre à profit les nombreuses forces du système : des traitements efficaces, des cliniciens consciencieux, des intervenants passionnés et – ingrédient indispensable – l’espoir. Comme l’a indiqué M. Hogan dans une entrevue, « l’élaboration d’un bon plan de traitement est une chose nécessaire, mais cela ne suffit certainement pas à assurer le progrès et le rétablissement ».

M. Hogan avance en outre que, pour réussir, les interventions doivent être descendantes et montantes. Une direction nationale est requise pour les activités comme les campagnes de lutte contre la stigmatisation et la modification des programmes fédéraux, et les gens qui récupèrent d’une maladie mentale ont le droit de réclamer une plus grande participation à l’élaboration des plans de traitement qui les concernent. À son avis, le temps seul nous dira si les bénéficiaires de soins de santé mentale pourront s’engager conjointement face aux changements requis et si les contextes politique et économique dans lesquels nous évoluons permettront le changement, le favoriseront ou y feront obstacle.

Il convient ici de souligner que deux autres mesures sont en cours d’étude avec l’appui des deux partis. Celles-ci ont été adoptées par le Sénat et attendent de passer devant la Chambre des représentants. La première vise la prévention du suicide chez les adolescents et la prestation de conseils aux étudiants. La deuxième, le Mentally Ill Offender Treatment and Crime Reduction Act (loi sur le traitement et la réduction de la criminalité chez les délinquants malades mentaux) permettrait de verser des subventions destinées à stimuler tous les efforts communautaires déployés en vue d’éviter que les personnes souffrant de maladies mentales n’aient des démêlés avec le système de justice pénale.

OBJECTIFS ET RECOMMENDATIONS DE LA President’s New Freedom Commission on Mental Health

OBJECTIF 1   Les Américains comprennent que la santé mentale est indispensable à la santé globale.

·         Élaborer et réaliser une campagne nationale visant à réduire les stigmates associés au fait de réclamer des soins, ainsi qu’une stratégie nationale de prévention du suicide.

·        Aborder la santé mentale avec le même sentiment d’urgence que dans le cas de la santé physique.

OBJECTIF 2   Les soins de santé mentale répondent au consommateur et à la famille.

·         Élaborer un plan individualisé de soins pour chaque adulte souffrant d’une maladie mentale grave et chaque enfant souffrant d’un trouble émotionnel grave.

·         Faire intégralement participer les consommateurs et les familles à l’orientation du système de soins de santé mentale vers le rétablissement.

·         Orienter les programmes fédéraux pertinents en sorte d’améliorer l’accès aux services en santé mentale et la reddition de comptes en la matière.

·         Créer un plan global de santé mentale.

·        Protéger et améliorer les droits des personnes souffrant de maladies mentales.

OBJECTIF 3   Les inégalités dans les services de santé mentale sont éliminées.

·         Améliorer l’accès à des soins de qualité qui tiennent compte des sensibilités culturelles.

·        Améliorer l’accès à des soins de qualité dans les régions rurales et éloignées.

OBJECTIF 4   Le dépistage précoce, l’évaluation et le renvoi à des services sont monnaie courante.

·         Promouvoir la santé mentale des jeunes enfants.

·         Améliorer et élargir les programmes scolaires de santé mentale.

·         Dépister la cooccurrence de maladies mentales et de troubles liés à la consommation de drogues et établir des liens avec des stratégies intégrées de traitement.

·        Dépister les maladies mentales dans le cadre des soins de santé primaires, tout au long de la vie, et établir des liens avec le traitement et les soutiens.

OBJECTIF 5   Des soins de santé mentale d’excellente qualité sont prodigués et la recherche est intensifiée.

·         Intensifier la recherche en faveur du rétablissement et de la résilience et trouver finalement un remède et des moyens de prévention.

·         Favoriser des pratiques fondées sur des faits au moyen de projets de diffusion et de démonstration et créer une association publique-privée pour orienter leur réalisation.

·         Améliorer et élargir les effectifs qui fournissent des services de santé mentale et un soutien fondés sur des faits.

·        Développer la base de connaissances dans quatre sous-domaines étudiés : inégalités en santé mentale, effets à long terme des médications, traumatismes et soins actifs.

OBJECTIF 6   La technologie est utilisée pour donner accès aux soins de santé mentale et à l’information.

·         Utiliser la technologie de la santé et la télésanté pour améliorer l’accès aux soins de santé mentale et leur coordination, spécialement pour les Américains résidant dans des régions éloignées ou au sein de populations mal desservies.

·         Concevoir et réaliser des systèmes électroniques intégrés de dossiers de santé et de renseignements personnels sur la santé.

4.6       OBSERVATIONS DU COMITÉ

Le Comité estime que nous avons beaucoup à apprendre des tentatives déployées aux États-Unis pour s’attaquer aux conséquences de la fragmentation des services de soins en santé mentale qui sont répartis entre différents niveaux de compétence et plusieurs ministères. Une telle fragmentation limite l’accès aux services et entrave la capacité des fournisseurs de services à bénéficier mutuellement de ce qui est novateur et à miser sur l’excellence.

Les membres du Comité ont été très impressionnés par l’orientation générale du rapport de la President’s New Freedom Commission sur la santé mentale, surtout par son intérêt à trouver des solutions axées sur les patients. Nous n’avons notamment pas manqué de remarquer le désir de favoriser la guérison chez tous et toutes, de même que l’insistance placée sur la nécessité de faire participer les usagers à la conception et à la réalisation de régimes de soins individualisés. Le Comité prend acte des nombreux obstacles qui s’opposent à la réalisation de la vision de la Commission, obstacles dont plusieurs découlent de la fragmentation du système que la Commission a décrit dans son rapport.

Le Comité prend également note de la place prépondérante accordée à la stimulation de la recherche sur la santé mentale et la maladie mentale et à la promotion de technologies dont l’adoption permettra d’améliorer la prestation des soins et des services. Nous constatons que ces aspects sont conformes au rôle international de premier plan que jouent les chercheurs et les scientifiques américains.

Qui plus est, les membres du Comité estiment que la place prépondérante que ce rapport accorde à la prestation de services communautaires adaptés est à la fois appropriée et extrêmement importante. Dans le même ordre d’idées, l’expérience américaine nous rappelle à quel point il importe de promouvoir la collaboration entre les divers ordres de gouvernement de même qu’entre leurs différents ministères ou services.

Enfin, les membres du Comité constatent qu’une telle orientation exige une mobilisation nationale afin de mettre en œuvre le plus grand nombre de ressources possible sans perdre de vue que, pour aboutir, les réformes entreprises doivent être soutenues à tous les échelons. En évitant de proposer la solution de la « table rase », la New Freedom Commission a rejoint les conclusions auxquelles notre Comité était parvenu au sujet du secteur des soins actifs au Canada, dans son rapport d’octobre 2002 sur la santé des Canadiens.


CHAPITRE 5:
COMPARAISON DES SOINS DE SANTÉ MENTALE
DANS LES QUATRE PAYS ÉTUDIÉS

5.1        INTRODUCTION

Comme nous l’avons fait remarquer dans l’introduction du présent rapport, à cause de la complexité des systèmes de soins de santé (tant pour ce qui est des modalités de paiement que des mécanismes de prestation des services) et des liens inextricables qui existent entre ces systèmes et l’histoire, les politiques et la culture de chaque pays, la transposition des mesures d’un pays à l’autre ne peut se faire simplement. Le caractère commun de la plupart des enjeux auxquels les décideurs et les praticiens sont confrontés dans le domaine des politiques de soins, partout dans le monde industrialisé, signifie toutefois qu’il y a beaucoup à gagner d’une étude attentive de ce qui fonctionne et de ce qui ne fonctionne pas ailleurs. Dans le présent chapitre, le Comité part de son examen de l’expérience de quatre pays pour tirer certains enseignements sur ce qui se fait au Canada en vue de réformer la prestation des soins de santé mentale et d’améliorer la santé mentale des Canadiennes et des Canadiens. La structure du présent chapitre reprend celle utilisée dans les études de pays.

5.2       HISTORIQUE ET APERÇU

Le Comité a été frappé de constater que la désinstitutionalisation a été vécue un peu de la même façon dans tous les pays examinés. Tout d’abord, ce sont presque toujours les mêmes facteurs qui ont poussé ces pays à opter pour la désinstitutionalisation :

·        adoption d’une nouvelle méthode de traitement, surtout de nouveaux médicaments, accompagnée

·        d’un changement d’attitudes envers la nature de la maladie mentale

·        d’une conviction croissante que les traitements sont plus efficaces en milieu communautaire.

Deuxièmement, dans chaque pays étudié (tout comme au Canada), la fermeture des hôpitaux psychiatriques est intervenue plus rapidement que le déploiement de nouvelles ressources communautaires, ce qui a donné lieu à de nombreuses situations où les personnes souffrant de maladie mentale ont dû se débrouiller seules. Qui plus est, les difficultés soulevées par le manque de ressources pour passer à des soins communautaires ont souvent été compliquées par la résistance à ce transfert dans les collectivités urbaines où de vieilles attitudes ne changeaient que lentement.

Il convient, en troisième lieu, de remarquer que dans de nombreux pays étudiés la désinstitutionalisation a été un des facteurs qui a stimulé l’adoption de stratégies nationales dont l’objet était d’améliorer la prestation de services aux personnes souffrant de maladie mentale. Il y a donc lieu de se poser la question suivante : Pourquoi la désinstitutionalisation au Canada n’a-t-elle pas donné lieu aux mêmes résultats, puisque nous n’avons pas encore de stratégie nationale en matière de santé mentale, de maladie mentale et de toxicomanie, contrairement à tous les autres pays du G8?

On pourrait être tenté de pointer du doigt le fédéralisme canadien parce qu’il peut-être empêché que la santé mentale ne devienne une priorité nationale. Toutefois, comme l’un des pays fédéraux étudiés (l’Australie) a entamé dès 1992 une planification nationale cohérente, le fédéralisme, en tant que tel, n’explique pas le parcours différent suivi par le Canada.

Il y aurait sans doute une explication plus valable : le fait que, le gouvernement fédéral au Canada ne prenant pas part à la prestation des services à la population en général, il n’a pas ressenti la nécessité de réagir aux profonds changements survenus dans la prestation des services sur le terrain. On pourrait tout de même se demander pourquoi, étant donné son rôle dans la prestation des services à certains groupes de la population (voir le chapitre 9 du volume 1), le gouvernement fédéral n’a pas tiré les enseignements qui s’imposaient des faiblesses que présente son propre système de prestation de services et pourquoi il ne s’est pas rendu compte que les provinces étaient confrontées à des problèmes identiques.

Enfin, il convient de remarquer qu’à cause de la tendance d’Ottawa de transférer des fonds aux provinces sans exigence de contrepartie (ce qui a abouti à la création du TCSPS au milieu des années 90), les provinces ont dû composer de leur mieux avec le contexte changeant dans lequel s’inscrivait la prestation des services de santé mentale.

5.3       COÛTS ET FINANCEMENT DES SERVICES DE SANTÉ MENTALE

Pour ce qui est des comparaisons relatives aux coûts et au financement entre les différents pays, le Comité tient d’abord à souligner les problèmes qui se posent sur le plan de la comparabilité des données. En présentant leurs données sur les dépenses en santé mentale, les auteurs du National Mental Health Report (2002) (Rapport national sur la santé mentale) en Australie ont bien précisé que tous les pays ne mesurent pas les dépenses en santé mentale de la même façon et qu’il et donc extrêmement difficile d’établir des comparaisons directes. Ainsi, les auteurs de ce rapport (comme nous l’avons vu dans le chapitre sur l’Australie) font remarquer que certains pays incluent des montants qui sont spécifiquement exclus des estimations australiennes, comme les services dispensés aux alcooliques, aux toxicomanes et aux handicapés intellectuels, les soins fournis aux personnes souffrant de démence ou concernant les logements de ces dernières et les versements des prestations de sécurité du revenu aux usagers des soins de santé mentale.

Il ne semble donc généralement pas possible d’établir des lignes directrices fondées sur des pratiques exemplaires en matière de dépenses globales en santé mentale. Toutefois, il existe suffisamment de données sur les tendances que présentent ces dépenses dans le temps, dans chaque pays, pour qu’on puisse tirer certaines conclusions a priori relativement aux facteurs qui méritent qu’on accorde plus d’attention aux besoins de financement de la santé mentale et sur les façons de garantir la pérennité de ce financement. On peut également comparer les priorités de financement des différents pays, bien qu’il existe ici certaines variations dans la mesure où, comme il est difficile d’obtenir des données comparables d’un pays à l’autre, les conclusions qu’on peut tirer ne sont pas aussi solides.

Le lecteur se sera peut-être rendu compte que les données présentées dans le cas de l’Australie sont remarquables par leur degré de détail et par le fait qu’elles permettent des comparaisons longitudinales. Les Australiens viennent de produire leur septième rapport national sur la santé mentale qui rentre encore plus dans le détail et qui permet de comprendre mieux que pour n’importe quel autre pays étudié l’évolution dans le temps des dépenses en santé mentale. Le Comité estime que cela montre bien à quel point il importe de faire preuve de régularité dans la collecte et la diffusion des données.

Qui plus est, comme l’illustre le débat sur l’adéquation du financement de la santé mentale en Angleterre, il convient également non seulement d’examiner les augmentations en chiffres absolus du niveau de financement de la santé mentale, mais aussi de se demander si les nouveaux investissements dans ce domaine progressent au rythme de ceux effectués dans le secteur plus général des soins de santé. Ainsi, si la croissance des dépenses en santé mentale traîne de l’arrière derrière celles des dépenses globales en soins de santé, la position relative du secteur de la santé mentale est affectée, même si ce secteur reçoit davantage d’argent que dans le passé. Cette considération revêt une importance particulière dans le contexte d’un projet de réforme en profondeur ou d’une tentative visant à aligner les dépenses en santé mentale sur celles de la santé en général.

Parallèlement à cela, il y a la question du bien-fondé du ciblage des dépenses en santé mentale pour s’assurer que les fonds vont bien au traitement des maladies mentales et qu’ils ne sont pas absorbés dans les dépenses générales de la santé ou pour garantir que les transferts d’un ordre de gouvernement à un autre constituent de véritables augmentations des dépenses en santé mentale qui ne sont pas ensuite amputées par la disparition de services offerts jusque-là, même si de nouveaux sont ajoutés. À cet égard, l’expérience australienne est chargée d’enseignement. Comme des témoins l’ont indiqué au Comité, les fonds fédéraux supplémentaires ont d’abord été ciblés, mais comme ce financement a été de plus en plus apprécié par les différents ordres de gouvernement au fil du temps, il a fallu adopter des mesures particulières pour protéger les ressources en santé mentale qui n’étaient plus nécessaires.

Les membres du Comité ont tout de même trouvé remarquable que, dans les trois ou quatre pays examinés, l’adoption de stratégies nationales en matière de santé mentale s’est accompagnée d’une augmentation du niveau de financement des services et des activités dans le domaine. Comme les témoins l’ont indiqué, des documents qui informent sur les besoins du secteur de la santé mentale peuvent être de puissants instruments de pression politique sur les gouvernements afin de les amener à augmenter les ressources nécessaires. Qui plus est, il faut pouvoir s’appuyer sur des repères et des objectifs clairs afin de contrôler la mise en œuvre d’une stratégie nationale et de s’assurer que les engagements financiers seront respectés dans le temps. D’après les témoignages et les documents que nous avons recueillis, la formulation et l’application d’une stratégie nationale en matière de santé mentale ne peuvent aboutir que si elle s’accompagne d’une affectation suffisante des ressources.

Le Comité prend également note des importants efforts déployés dans certains pays pour décentraliser les décisions de financement et pour les aligner davantage sur les besoins des collectivités dans lesquelles les gens vivent et utilisent les services. L’expérience anglaise, qui a consisté à confier la responsabilité de « commander » les services de santé mentale aux groupes de soins primaires, peut être un point de référence utile pour toute tentative visant à confier davantage la maîtrise du financement à la base et à mieux adapter le financement aux priorités locales. D’un autre côté, les témoignages et la documentation nous indiquent aussi que ce transfert de responsabilité est une tâche complexe et que la décentralisation de la prise de décision doit être accompagnée d’une répartition plus générale des compétences pour favoriser l’administration des budgets supplémentaires.

Les mesures destinées à contrôler l’augmentation des coûts sont également importantes, surtout dans le cas des produits pharmaceutiques dont la hausse des prix est une préoccupation constante. Au Canada, il faudra apporter une attention toute particulière à cette question étant donné les écarts importants qui existent chez nous entre les différents régimes provinciaux d’assurance-médicament. Enfin, l’expérience américaine dans le cas des soins gérés est tout aussi intéressante, parce qu’elle vise à réaliser un équilibre entre les efforts déployés pour contenir les coûts et la garantie d’un accès aux services et aux thérapies nécessaires.

5.4       PRESTATION ET ORGANISATION DES SERVICES

Nous avons vu qu’en matière de prestation de services en santé mentale, il fallait commencer par reconnaître que tous les pays étudiés sont passés d’un régime de soins essentiellement institutionnel à un régime de soins de type communautaire. Cette transition a soulevé des préoccupations quant à l’adéquation des ressources disponibles à l’échelon communautaire pour faire face à la demande. On s’est aperçu également qu’il fallait coordonner et intégrer la prestation des services pour parvenir à abatte les nombreuses cloisons existantes et faire en sorte que chacun ait accès aux services dont il a besoin, peu importe quel ministère ou organisme ministériel (ou organisme non gouvernemental) est responsable de la prestation des soins.

La Mental Health Commission (Commission de la santé mentale) en Nouvelle-Zélande et le National Institute for Mental Health (ou NIMHE) en Angleterre sont les deux institutions qui se distinguent pour avoir facilité ce genre de transition. Le Comité a pris plus particulièrement note du fait que la commission néo-zélandaise a joué un rôle important, tant pour instaurer des normes de service que pour contrôler la mise en œuvre de la planification en santé mentale, tandis que l’institution britannique a joué un rôle déterminant dans l’application et la diffusion des pratiques exemplaires. Il convient, ici, de remarquer que les deux pays se sont fixé des normes et des objectifs élevés et précis (le Blueprint en Nouvelle-Zélande et le Cadre national de service en santé mentale en Angleterre) dans le contexte de leurs stratégies respectives.

L’accent placé sur l’individualisation des régimes de soins en Nouvelle-Zélande, aux États-Unis et en Angleterre est un autre aspect digne de mention. L’importance croissante accordée à la capacité des personnes souffrant d’une maladie mentale de se rétablir, de même qu’à la nécessité pour les praticiens d’élaborer des plans personnalisés, axés sur les clients (et contrôlés) a un effet marqué sur l’approche retenue dans la prestation des services communautaires en santé mentale.

On pourrait donc conclure, comme l’a fait Michael Hogan des États-Unis, que pour compenser l’éclatement survenu dans la prestation des services, il faudra que les interventions soient descendantes et montantes. Il est possible, pour administrer la pléthore d’agences et d’organismes gouvernementaux prenant part à la prestation des services, de faire appel à des organismes extérieurs, indépendants, en mesure d’adopter un point de vue d’ensemble sur le fonctionnement du gouvernement. D’un autre côté, la personnalisation des régimes de soins et la coordination de la prestation des services pourraient aider ceux et celles qui ont besoin de ce genre de service à s'en prévaloir à la demande.

Dans tous les pays examinés, les médecins et les autres fournisseurs de soins primaires assument la plupart des responsabilités du gros des clients des services de soins de santé mentale. D’un autre côté, les personnes souffrant d’une maladie mentale grave et persistante continuent de dépendre de l’accès à des services de santé mentale plus spécialisés. Cette situation a été un problème dans tous les pays étudiés. Tout d’abord, il est inquiétant de constater que les systèmes de rémunération à l’acte ne permettent pas de dédommager suffisamment les médecins de famille pour qu’ils traitent les maladies mentales ou donnent des conseils dans ce domaine. Deuxièmement, il y a le problème soulevé par le fait que les médecins de famille n’ont pas accès à suffisamment de ressources pour pouvoir véritablement composer avec l’ampleur de la demande en matière de soins de santé mentale. Enfin, le défaut de coordination entre les soins primaires et les soins secondaires est un problème régulièrement soulevé, problème qui souligne l’importance primordiale d’offrir des soins intégrés et efficaces.

En dépit – ou devrait-on peut-être dire plutôt, à cause – du basculement à la faveur des soins et des services communautaires, les inégalités d’accès persistent sur plusieurs plans. Nombre de pays ont constaté que les résidents des régions rurales ont accès à beaucoup moins de services que ceux des régions urbaines.

Par ailleurs, presque tout le monde s’entend pour dire que les services qui sont censés s’adresser spécifiquement aux minorités ne sont pas vraiment adaptés à leurs besoins. Il faut que ces services soient adaptés sur le plan culturel afin de les rendre accessibles à ces minorités, comme c’est le cas pour la majorité. Plusieurs pays ont déterminé que la formation de professionnels de la santé appartenant à des groupes minoritaires, surtout aux communautés autochtones ou aborigènes, était une façon d’améliorer la pertinence culturelle des services de santé mentale.

Cela nous amène au dernier aspect que le Comité tient à mentionner, c’est-à-dire la pénurie de ressources humaines constatée dans tous les pays étudiés, pénurie qui touche presque tous les fournisseurs de services de santé mentale. Le phénomène a été constaté même dans des pays comme l’Australie et la Nouvelle-Zélande où l’augmentation des budgets de la santé mentale a donné lieu à un accroissement de l’offre par certains groupes de fournisseurs. Sur une note plus positive, les membres du Comité ont été impressionnés par les tentatives déployées en vue de décerner et de reconnaître officiellement le titre de travailleur communautaire en santé mentale en tant que moyen d’augmenter les ressources humaines.

5.5       PROMOTION ET PRÉVENTION

La situation constatée dans quatre pays semble appuyer les enseignements tirés dans un récent rapport britannique (juin 2004), sur la santé mentale et l’exclusion sociale. Ce rapport conclut que des campagnes non coordonnées de durée limitée ne donnent pas lieu à des changements notoires dans les attitudes qui sont source de stigmatisation, et il précise que pour combattre la stigmatisation et la discrimination, un engagement budgétaire à long terme est nécessaire. D’un autre côté, d’après les témoins que nous avons entendus et les documents que nous avons examinés au sujet de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande, force est de constater que ces deux pays sont parvenus à modifier de façon visible les attitudes et les comportements grâce à des campagnes de lutte contre la stigmatisation et la discrimination qui durent depuis plusieurs années.

Il faut se garder de sauter aux conclusions à partir de ces constats, mais nous avons toutes les raisons de croire que, si nous voulons que les campagnes de lutte contre la stigmatisation et la discrimination produisent un maximum d’effet, il faudra y consacrer un financement et une planification à long terme prolongée par une évaluation suivie. Qui plus est, il semble que ce genre de campagne soit particulièrement efficace quand on peut l’adapter à toute une diversité de situations en sorte qu’elle puisse être reprise par différents pays.

Ainsi, pour le lancement de leur campagne « Like Minds, Like Mine », les Néo-Zélandais ont fait appel à une figure emblématique native du pays, avant de mettre ensuite l’accent sur des gens ordinaires et sur leurs familles. En outre, quand les Néo-zélandais ont constaté certains progrès du côté des attitudes stigmatisantes, ils ont décidé de mettre davantage l’accent sur la lutte contre la discrimination. L’expérience australienne, quant à elle, nous a enseigné les bienfaits de campagnes menées simultanément aux échelons national, régional et local de même que la nécessité de cibler la stigmatisation sur certaines maladies selon des thèmes assez larges.

Aux États-Unis, la stratégie nationale de prévention du suicide fait fond sur l’exploitation des ressources nationales afin de donner un exemple que les États et administrations locales peuvent reprendre et pour les inciter à adapter les modèles nationaux à leurs besoins propres. Dans la même veine, l’expérience de plusieurs pays souligne l’importance qu’il y a de pouvoir compter sur un organisme apte à être le point de convergence des efforts déployés à l’échelle nationale pour combattre la stigmatisation et la discrimination et à assurer la coordination de ces efforts à l’échelon national.

Nous avons conclu de notre examen de la situation internationale qu’il y a tout à gagner à voir ce que donne ce genre d’effort et à bâtir les campagnes à partir des constats posés. Autrement dit, il convient de tenir de vastes consultations, dès le début, auprès des divers ordres de gouvernement, des fournisseurs, des ONG ainsi que des utilisateurs des services de santé mentale et leurs familles. En outre, nous avons constaté les bienfaits de faire témoigner les personnes souffrant de troubles mentaux afin de combattre la stigmatisation et de collaborer avec les médias pour essayer d’éliminer les stéréotypes négatifs et de les remplacer par des récits plus positifs de personnes souffrant de maladie mentale.

Enfin, le Comité a trouvé que la nouvelle campagne anglaise proposée dans le rapport sur la santé mentale et l’exclusion est très complète, et il désire profiter de l’occasion pour en rappeler les principaux axes. Cette campagne :

·        ciblera des auditoires clés, surtout les employeurs, les jeunes et les médias;

·        proposera des messages cohérents et éprouvés, sous une seule et même bannière;

·        fera la promotion de la contribution que les personnes souffrant de problèmes de santé mentale peuvent apporter à la société;

·        sera assurée par un financement suivi;

·        traitera des questions d’ethnicité et de problématique hommes-femmes;

·        proposera un cadre et des documents d’appui au travail local par l’accent placé sur les questions particulières auxquelles sont confrontées les communautés démunies;

·        sera clairement évaluée à la faveur de sondages réguliers.

5.6       PERSPECTIVES DE RÉFORME

À partir de cette étude de quatre pays, il est apparu clairement aux membres du Comité que toute stratégie de réforme doit être soigneusement adaptée à la situation particulière de chaque pays. Il faut non seulement évaluer soigneusement l’état des services et des soins de santé mentale afin d’établir des priorités d’action, mais il faut aussi tenir compte des réalités complexes du système politique et des valeurs sociales de chaque pays pour formuler un plan de réforme.

À ce sujet, nous pensons qu’il risque d’être difficile d’adapter au contexte fédéraliste canadien des stratégies de réforme conçues et mises en œuvre dans des pays dotés de formes de gouvernement unitaire puisque, chez nous, la prestation des services de soins de santé au grand public demeure une responsabilité constitutionnelle relevant des provinces. Quoi qu’il en soit, les objectifs et les normes précises et détaillées qui ont été la marque des programmes de réforme en Angleterre et en Nouvelle-Zélande (deux États unitaires) sont d’excellentes références. Qui plus est, le système de soins de santé d’un pays, qu’il s’agisse d’un État unitaire ou d’un État fédéral, comporte de multiples paliers et les tentatives régulières visant à coordonner la réforme de la santé mentale entre ces différents paliers sont une autre indication de l’importance qu’il y a d’agir à tous les niveaux.

Le Comité a également constaté que tous les pays étudiés ont eu intérêt à entreprendre une planification intégrée à long terme afin d’améliorer l’état de la santé mentale et de la prestation des services de soins en santé mentale. Ce n’est qu’ainsi que l’on peut parvenir à s’appuyer sur chaque strate précédente de la réforme et donc à augmenter considérablement les chances d’adapter cette réforme aux circonstances changeantes.

Enfin, la complexité et l’éventail des services entrant en jeu dans la promotion de la santé mentale et dans la réponse aux besoins des personnes qui souffrent d’une maladie mentale permettent de penser qu’une réforme du type « table rase » ne peut qu’être vouée à l’échec. En outre, la réforme doit consister à régler les problèmes par le haut et par le bas.


5.7       OBSERVATIONS DU COMITÉ

Le Comité a retenu un certain nombre de tendances des grandes orientations adoptées dans les stratégies de santé mentale des quatre pays étudiés :

·        tendance à miser sur le rétablissement. Il s’agit ici d’une vision propre au raisonnement appliqué en santé mentale où l’on envisage le rétablissement comme un processus d’adaptation positive à la maladie et à l’incapacité pour que les personnes souffrant d’une maladie mentale puissent vivre une vie satisfaisante, pleine d’espoir et contribuer à la société malgré les limitations que leur impose la maladie;

·        une insistante croissante sur les plans individualisés de traitement et de soins (surtout pour les personnes souffrant de maladie mentale grave), de même que la reconnaissance du fait qu’il faut inciter les membres de la famille et les patients eux-mêmes à participer à la planification des traitements;

·        la réaffirmation de la nécessité d’offrir des services au sein de la collectivité et l’importance accrue accordée au contrôle suivi de la prestation de services et de l’effort mis pour les intégrer, dans la mesure du possible (pour que l’on puisse s’affranchir des limitations caractéristiques d’une prestation de service « cloisonnée »;

·        l’importance de mettre à disposition des ressources nationales pour promouvoir la santé mentale, surtout dans le cas des campagnes contre la stigmatisation et la lutte contre la discrimination;

·        la nécessité d’éliminer les disparités dans la limite des services offerts, que ces disparités soient dues au fait que les services ne tiennent pas compte des différences culturelles ou qu’ils ne soient pas offerts dans certaines régions rurales du pays.

Le facteur qui semble unir tous ces éléments est l’insistance accrue que l’on place sur l’organisation des services en vue de mieux répondre aux besoins des patients ou des utilisateurs du service, formule à laquelle le Comité adhère pleinement et qui rappelle, d’ailleurs, l’approche axée sur le patient que le Comité avait recommandée pour le secteur des soins actifs. Pour réaliser les objectifs qui se dégagent de notre étude des quatre pays en question, il nous faudra fixer des buts atteignables auxquels tout le milieu de la santé mentale devra adhérer et établir des critères mesurables afin de contrôler en permanence le travail de réforme. Il semble, d’un autre côté, qu’une stratégie nationale d’amélioration de la santé mentale et du traitement de la maladie mentale doive notamment s’appuyer sur les piliers suivants : planification détaillée concernant les ressources humaines dans le domaine de la santé mentale et financement suffisant pour la recherche et pour la diffusion du savoir.


ANNEXE A:
LISTE DES TÉMOINS AYANT COMPARUS DEVANT LE COMITÉ
TROISIÈME SESSION DE LA 37E
LÉGISLATURE
(2 FÉVRIER AU 23 MAI 2004)

Organismes

Nom

Date de comparution

fascicule

À titre personnel

David

Loїse

Murray

Ronald

26 février 2003

9

J. Michael Grass, président sortant, Groupe de mise en oeuvre en santé mentale du district de Champlain

5 juin 2003

17

Nancy Hall, conseillère en santé mentale

8 mai 2003

16

Thomas Stephens, expert-conseil

20 mars 2003

11

Académie canadienne d’épidémiologie psychiatrique

Dr Alain Lesage, président sortant

19 mars 2003

11

Académie canadienne de psychiatrie et de droit

Dre Dominique Bourget, présidente

5 juin 2003

17

Association canadienne de la santé mentale de l’Ontario

Patti Bregman, directrice des programmes

12 juin 2003

18

Association des infirmières et infirmiers psychiatriques du Canada

Margaret Synyshyn, présidente

29 mai 2003

16

Centre hospitalier pour enfants de l’est de l’Ontario

Dr Simon Davidson, Chef, Section de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent

1er mai 2003

13

Centre hospitalier universitaire Mère-enfant Sainte-Justine

Dre Joanne Renaud, pédopsychiatre; chercheuse boursière, Instituts de recherche en santé au Canada

30 avril 2003

13

Centre de toxicomanie et de santé mentale

Jennifer Chambers, coordonnatrice du Conseil d’habitation

14 mai 2003

15

Rena Scheffer, directrice, Services d’informations et d’éducation du public

28 mai 2003

16

CN Centre for Occupational Health and Safety

Kevin Kelloway, directeur

12 juin 2003

18

Coalition canadienne pour la santé mentale des personnes âgées

Dr David K. Conn, coprésident; president, Académie canadienne de psychiatrie gériatrique

4 juin 2003

17

Colombie-Britannique, Province de la

Patrick Storey, président, Conseil consultative du minister sur la santé mentale

14 mai 2003

15

Heather Stuart, professeure agrégée, Santé communautaire et épidémiologie

Global Business and Economic, Roundtable and Addiction and Mental Health

Rod Phillips, président et directeur général, Les Consultants Warren Sheppell

12 juin 2003

18

Hamilton Health Sciences Centre

Venera Bruto, psychologue

4 juin 2003

17

Hôpital Douglas

Eric Latimer, économiste de la santé

6 mai 2003

14

Dr James Farquhar, psychiatre

Dre Mimi Israёl, chef, Département de psychiatrie; professeure agrégée, Université McGill

Myra Piat, chercheuse

Hôpital Douglas

Amparo Garcia, chef clinico-administratif, Division des Services ultraspécialisés pour adultes

6 mai 2003

14

Manon Desjardins, chef clinico-administratif, Division des Services sectorisés pour adultes

Jacques Hendlisz, directeur général

Robyne Kershaw-Bellmare, directrice des soins infirmiers

Hôpital Louis-H. Lafontaine

Jean-Jacques Leclerc, directeur, Services de réadaptation et d’hébergement dans la communauté

6 mai 2003

14

Dr Pierre Lalonde, directeur, Clinique des jeunes adultes

Hôpital St. Michaels

Dr Paul Links, titulaire de la chaire Arthur Sommer Rothenberg d’études sur le suicide

19 mars 2003

11

Institut canadien d’information sur la santé

Dr John S. Millar, vice-président, Recherche et analyse

20 mars 2003

11

Carolyn Pullen, expert conseil

John Roch, gestionnaire principale, Protection de la vie privée, Secrétariat de la protection de la vie privée

Instituts de recherche en santé du Canada

Dr Rémi Quirion, directeur scientifique, Institut des neurosciences, de la santé mentale et des toxicomanies

6 mai 2003

14

Bronwyn Shoush, commissaire, Institut de la santé des Autochtones

28 mai 2003

16

Jean-Yves Savoie, président, Conseil consultatif, Institut de la santé publique et des populations

12 juin 2003

18

Santé Canada

Tom Lips, conseiller principal, Santé mentale, Division de la santé des collectivités, Direction générale de la santé de la population et de la santé publique

19 mars 2003

11

Pam Assad, directrice déléguée, Division de l’enfance et de l’adolescence, Centre de développement de la santé humaine, Direction générale de la santé de la population et de la santé publique

30 avril 2003

13

Société Alzheimer du Canada

Steve Rudin, directeur exécutif

4 juin 2003

7

Société canadienne de pédiatrie

Dre Diane Sacks, présidente élue

1er mai 2003

13

Marie-Adèle Davis, directrice exécutive

Statistique Canada

Lorna Bailie, directrice adjointe, Division des statistiques sur la santé

20 mars 2003

11

St.Joseph’s Health Care London

Maggie Gibson, psychologue

4 juin 2003

17

Université de Calgary

Dr Donald Addington, professeur et chef, Département de psychiatrie

29 mai 2003

16

Université de la Colombie-Britannique (par vidéoconférence)

Dre Charlotte Waddell, professeur adjointe, Unité d’évaluation de la santé mentale et des consultations communautaires, Département de psychiatrie, Faculté de médecine

1er mai 2003

13

Université Laval

Dr Michel Maziade, directeur, Département de spychiatrie, Faculté de médecine

6 mai 2003

14

Université du Manitoba

John Arnett, chef, Département de santé psychologique clinique, Faculté de médecine

28 mai 2003

16

Robert McIlwraith, professeur et directeur, Programme de psychologie en milieu rural et nordique

29 mai 2003

Université McGill

Dr Howard Steiger, professeur, Départment de psychiatrie; directeur, Clinique des troubles alimentaires, Hôpital Douglas

1er mai 2003

13

Université de Montréal

Laurent Mottron, chercheur, Département de psychiatrie, Faculté de médecine

6 mai 2003

14

Université de Montréal

Dr Richard Tremblay, titulaire, chaire de recherche du Canada sur le développement des enfants, professeur de pédiatrie, psychiatrie et psychologie, directeur, Centre d’excellence pour le développement des jeunes enfants

6 mai 2003

14

Dr Jean Wilkins, professeur titulaire et pédiatre, Département de pédiatrie, Faculté de médecine

Dre Renée Roy, professeure adjointe de clinique, Département de psychiatrie, Faculté de médecine

Université d’Ottawa

Tim D. Aubry, professeur associé; co-directeur , Centre de recherché sur les services communautaires

5 juin 2003

17

Dr Jeffrey Turnbull, directeur, Département de médecine, Faculté de médecine

Université du Québec à Montréal

Henri Dorvil, professeur, École de travail social

6 mai 2003

14

Dr Michel Tousignant, professeur et chercheur, Centre de recherche et intervention sur le suicide et l’euthanasie

Université Queen’s

Dr Julio Arboleda-Florèz, professeur et chef du Département de psychiatrie

20 mars 2003

11

Université de Toronto

Dr Joe Beitchman, professeur et directeur, Division de la psychiatrie de l’enfant; psychiatre en chef, Hospital for Sick Children

30 avril 2003

13

Université de Toronto

Dr David Marsh, directeur des services cliniques, Médecine des toxicomanies, Centre de toxicomanie et de santé mentale

29 mai 2003

16



ANNEXE B:
LISTE DES TÉMOINS AYANT COMPARUS DEVANT LE COMITÉ
DEUXIÈME SESSION
DE LA 37E LÉGISLATURE
(30 SEPTEMBRE 2002 – 12 NOVEMBRE 2003)

Organismes

Nom

Date de comparution

fascicule

À titre personnel

Charles Bosdet

Pat Caponi

Don Chapman,

29 avril 2004

7

Alberta Mental Health Board

Ray Block, directeur général

28 avril 2004

7

Sandra Harrison, directrice exécutive, Planification, défense des droits et liaison

Alliance de la Fonction publique du Canada

John Gordon, vice-président executive national

1er avril 2004

5

James Infantino, agent des pensions et assurances d’invalidité

Association canadienne des travailleuses et travailleurs sociaux

Stephen Arbuckle, membre, Groupe d’intérêt lié à la santé

31 mars 2004

5

Association canadienne des troubles anxieux

Peter McLean, vice-président

12 mai 2004

9

Association canadienne pour la santé mentale

Penny Marrett, chef de la direction

12 mai 2004

9

Association des infirmières et infirmiers du Canada, la Fédération canadienne des infirmières et infirmiers en santé mentale et l’Association des infirmières et infirmiers psychiatriques du Canada

Nancy Panagabko, présidente, Fédération canadienne des infirmières et infirmiers en santé mentale

31 mars 2004

5

Annette Osted, membre du Conseil d’administration, Association des infirmières et infirmiers psychiatriques du Canada

Association médicale canadienne

Dre Gail Beck, secrétaire générale adjointe intérimaire

31 mars 2004

5

Dr Sunil Patel, président

Association des psychiatres du Canada

Dr Blake Woodside, président du Conseil d’administration

31 mars 2004

5

Australie, Gouvernement d’

(par vidéoconférence)

Dermot Casey, secrétaire adjoint, Direction des priorités sanitaires et de la prévention du suicide, ministère de la Santé et de la Vieillesse

20 avril 2004

6

Jenny Hefford, secrétaire adjointe, Direction de la stratégie contre la drogue, ministère de la Santé et de la Vieillesse

Bureau du Conseil Privé

Ron Wall, directeur des relations parlementaires, Planification de la législation et des travaux de la Chambre/avocat

1er avril 2004

5

Ginette Bougie, directrice, Rémunération et classification

Centre for Suicide Prevention

Diane Yackel, directrice exécutive

21 avril 2004

6

Centre de toxicomanie et de santé mentale

Christine Bois, gestionnaire des priorités provinciales en matière de troubles concourants

5 mai 2004

8

Wayne Skinner, directeur clinique, Programme de troubles concourants

Brian Rush, chercheur, Politique de prévention sociale et de santé

Chambre des communes

L’honorable Jacques Saada, C.P., député, leader du gouvernement à la Chambre des communes et ministre responsable de la Réforme démocratique

1er avril 2004

5

Citoyenneté et de l’Immigration, Ministère de la

Patricia Birkett, directrice générale par intérim, Direction générale de l’intégration

22 avril 2004

6

Cognos

Marilyn Smith-grant, spécialiste en ressources humaines

1er avril 2004

5

Sean Reid, gestionnaire principal, Communication corporatives

Fédération canadienne des contribuables

Bruce Winchester, directeur de recherche

22 avril 2004

6

Fédération des programmes communautaires de la santé mentale et du traitement des toxicomanies de l’Ontario

David Kelly, directeur exécutif

5 mai 2004

8

Hôpital Douglas

Dr Gustavo Turecki, directeur, Groupe McGill d’études sur le suicide, Université MGill

21 avril 2004

6

Institut des neurosciences, de la santé mentale et des toxicomanies

Richard Brière, directeur adjoint

21 avril 2004

6

Justice, Ministère de la

Manon Lefebvre, conseillère juridique

22 avril 2004

6

Mercer consultation en resources humaines

Bernard Potvin, conseiller principal

22 avril 2004

6

Native Mental Health Association of Canada

Brenda M. Restoule, psychologue et représentante du conseil de l’Ontario

13 mai 2004

9

Nouvelle –Zélande, Gouvernement de la

(par vidéoconférence)

Janice Wilson, directrice générale adjointe, Direction générale de la santé mentale, ministère de la Santé

5 mai 2004

8

Nouvelle –Zélande, Gouvernement de la

(par vidéoconférence)

David Chaplow, directeur et conseiller principal en santé mentale

5 mai 2004

8

Arawhetu Peretini, gestionnaire, Santé mentale des Maoris

Phillipa Gaines, gestionnaire, Développement des systèmes de santé mentale

Ontario Hospital Association

Dr Paul Garfinkel, président, Groupe de travail sur la santé mentale

31 mars 2004

5

Ressources humaines et Développement des compétences Canada

Bill Cameron, directeur général, Secrétariat national pour les sans-abri

29 avril 2004

7

Marie-Chantal Girard, gestionnaire de la recherche stratégique, Secrétariat national pour les sans-abri

Royaume-Uni, Gouvernement du

(par vidéoconférence)

Anne Richardson, chef de la Direction des politiques en santé mentale, ministère de la Santé

6 mai 2004

8

Adrian Sieff, chef de la Direction de la législation en matière de santé mentale

Santé, Ministère de la de la Nouvelle Écosse

Dr James Millar, directeur exécutif, Santé mentale et services aux médecins

28 avril 2004

7

Secrétariat du Conseil du Trésor

Joan Arnold, directrice, Élaboration de la législation, Division des pensions

1er avril 2004

5

Service correctionnel du Canada

Larry Motiuk, directeur général, Recherches

29 avril 2004

7

Françoise Bouchard, directrice générale, Services de santé

Services de santé de la Colombie-Britannique, Ministère des

Irene Clarkson, directrice exécutive, Santé mentale et toxicomanie

28 avril 2004

7

Six Nations Mental Health Services

Dre Cornelia Wieman, psychiatre

13 mai 2004

9

Société canadienne de psychologie

John Service, directeur exécutif

31 mars 2004

5

Société canadienne de schizophrénie

John Gray, président élu

12 mai 2004

9

Société pour les troubles de l’humeur du Canada

Phil Upshall, président

12 mai 2004

9

Université McGill

(par videoconférence)

Dr Laurence Kirmayer, directeur, Division de la psychiatrie sociale et transculturelle, Département de psychiatrie

13 mai 2004

9

Université Simon Fraser

(par vidéoconférence)

Margaret Jackson, directrice, Institut d’études en politiques de justice pénale

29 avril 2004

7

U.S. Campaign for Mental Health Reform

William Emmet, coordonnateur

1er avril 2004

 

U.S. President’s New Freedom Commission on Mental Health

(par videoconférence)

Michael Hogan, président

1er avril 2004

5



ANNEXE C:
LISTE DES INDIVIDUS QUI ONT RÉPONDU À UNE LETTRE DU COMITÉ AU SUJET DES PRIORITÉS POUR LA RÉFORME DANS LE SECTEUR DE LA MALADIE MENTALE

GROUPE CANADIEN DE RECHERCHE

Action cancer Manitoba

Harvey Max Chochinov, MD, PhD, MCRMC, titulaire d’une chaire de recherche du Canada en soins palliatifs, directeur de la Manitoba Palliative Care Research Unit d’Action cancer Manitoba

Hôpital Douglas, Centre de recherche de l’

Ashok Mall, MD, MCRMC, titulaire d’une chaire de recherche du Canada pour l’étude des premiers stades de la psychose, professeur en psychiatrie à l’Université McGill

Université Carleton

Dr Hymie Anisman, titulaire d’une chaire de recherche du Canada en neuroscience, chercheur supérieur attaché à la Fondation ontarienne de santé mentale

Université de l’Alberta

Glen B. Baker, PhD, DSc, professeur et titulaire d’une chaire de recherche du Canada en neurochimie et en développement de médicaments

Université du Manitoba, Faculté de médecine de l’

Brian J. Cox, docteur en psychiatrie, titulaire d’une chaire de recherche du Canada sur les troubles de l’humeur et sur les troubles anxieux, professeur agrégé de psychiatrie

Université McGill

Eric Fombonne, MD, MCRMC (Psych.), titulaire d’une chaire de recherche du Canada en psychiatrie de l’enfance et de l’adolescence, professeur de psychiatrie à l’Université McGill, directeur du Département de pédopsychiatrie de l’Hôpital pour enfants de Montréal


DOYEN D’UNIVERSITÉ

Centre universitaire de santé McGill

Joel Paris, MD, professeur titulaire et directeur du Département de psychiatrie

Hôpital général de Kingston

Samuel K. Ludwin, MBB, Ch., MCRMC, vice‑président du développement à la recherche

Université de l’Alberta

Dr L. Beauchamp, doyen de la Faculté d’éducation

Université de l’Ouest de l’Ontario

Dr Carol P. Herbert, doyen de la Faculté de médecine et d’art dentaire

Université de Sherbrooke

Pierre Labossière, ing., PhD, vice-recteur adjoint à la recherche

GROUPE RELATIF À LA MALADIE

CRSNG

Thomas A. Brzustowski, président

La Fondation ontarienne de la santé mentale

Howard Cappell, PhD, c. psych., directeur exécutif

Société canadienne de schizophrénie

Fred Dawe, président

INDUSTRIE

Eli Lilly Canada Inc.

Terry McCool, vice‑président des Affaires générales de la société

GlaxoSmith Kline

Geoffrey Mitchinson, vice‑président des Affaires publiques

Les compagnies de recherche pharmaceutique du Canada

Murray J. Elston, président

Merck Frosst Canada Ltée

André Marcheterre, président

Roche Pharmaceutiques

Ronnie Miller, président-directeur général

GROUPE D’ÉTHIQUE EN SANTÉ MENTALE

Armée du Salut - Territoire du Canada et des Bermudes

Glen Shepherd, colonel et secrétaire en chef

Centre de recherche de l’Hôpital Douglas de l’Université McGill

Maurice Dongier, professeur en psychiatrie

Centre de toxicomanie et de santé mentale

Paul E. Garfinkel, MD, FRCP, président-directeur général

Hôpital St-Paul

Mark Miller, éthicien

Office régional de la santé de Winnipeg

Linda Hughes, présidente du Comité d’éthique en santé mentale de l’ORSW

St-Joseph’s Health Care Centre du Parkwood Hospital de London

Maggie Gibson, PhD, psychologue du Programme des soins aux anciens combattants

Université de l’Alberta

Genevieve Gray, doyenne et professeure de la Faculté en soins infirmiers

Université de l’Alberta, Faculté des sciences infirmières et Centre John Dossetor d’éthique en santé de l’

Wendy Austin, inf. aut., titulaire d’une chaire de recherche du Canada

Université de la Colombie‑Britannique

Peter D. McLean, PhD, professeur et directeur de l’Unité des troubles anxieux

Université de l’Ouest de l’Ontario

Nancy Feduk, adjointe exécutive au doyen de la Faculté de médecine et d’art dentaire

Université Queen’s

J. Arboleda‑Florèz, professeur et chef du Département de psychiatrie

Université York

David Shugarman, directeur


PRÉSIDENT D’UNIVERSITÉ

Institut de recherches en santé mentale de l’Université d’Ottawa

Zul Merali, PhD, président‑directeur général

Université de Lethbridge

Lynn Basford, doyenne de la Faculté en sciences de la santé

Université McGill

Heather Munroe-Blum, professeure d’épidémiologie et de biostatistiques

RESPONSABILITÉ GOUVERNEMENTALE

Association canadienne de la santé mentale

Bonnie Pape, directrice des programmes et de la recherche au Bureau national de l’Association canadienne de la santé mentale

Cabinet du vice-recteur à la recherche de l’Université d’Ottawa

Yvonne Lefebvre, PhD, vice-présidente associée à la recherche

Centre de recherche de l’Hôpital Douglas

Rémi Quirion, directeur scientifiques de l’INSMT

Centre universitaire de santé McGill

Juan C. Negrete, MD, MCRMC, professeur de psychiatrie à l’Université McGill, président de la Section des toxicomanies, de l’Association des psychiatres du Canada

Coalition canadienne pour la santé mentale des personnes âgées

David K. Conn, MB, MCRMC, coprésident de l’Académie canadienne de psychiatrie gériatrique, professeur agrégé du Département de psychiatrie de l’Université de Toronto, président de l’Académie canadienne de psychiatrie gériatrique

Coalition canadienne pour la santé mentale des personnes âgées

J. Kenneth Le Clair, MD, MCRMC, coprésident de la Coalition canadienne pour la santé mentale des personnes âgées, professeur et directeur de l’Unité de gériatrie du Département de psychiatrie de l’Université Queen’s, directeur clinique du Programme spécialisé de psychiatrie gériatrique

Développement des ressources humaines Canada

Deborah Tunis, directrice générale du Bureau de la condition des personnes handicapées


The Family Council : Empowering Families in Addictions and Mental Health

Betty Miller, coordonnatrice du Family Council

Global Business and Economic Roundtable on Addiction and Mental Health, affiliée au Centre de toxicomanie et de santé mentale

Bill Wilkerson, cofondateur et directeur général

Hôpital d’Ottawa

Paul Roy, MD, MCRMC, professeur adjoint en psychiatrie à l’Université d’Ottawa, directeur du programme « Premier épisode pour les maladies psychotiques » d’Ottawa

Hôpital royal d’Ottawa

J. Paul Fedoroff, MD, professeur agrégé de psychiatrie à l’Université d’Ottawa, directeur de recherche au Service médico‑légal de l’Institut de recherche en santé mentale

Institut des neurosciences, de la santé mentale et des toxicomanies du Centre de recherche de l’Hôpital Douglas

Michel Perreault, PhD, chercheur à l’Hôpital Douglas

Instituts de recherche en santé du Canada

Dr. Jeff Reading, PhD, directeur scientifique de l’Institut de la santé des Autochtones

Ministère de la Santé et du Mieux-Être du Nouveau‑Brunswick

Ken Ross, sous-ministre adjoint

ONSA : Organisation nationale de la santé autochtone

Judith G. Bartlett, MD, CMFC

Six Nations Mental Health Services

Cornelia Wieman, MD, MCRMC, psychiatre

Sunnybrook & Women’s College Health Sciences Centre de l’Université de Toronto

N. Herrmann, médecin, MCRMC

Syncrude

Eric P. Newell, président‑directeur général

Unité de l’évaluation de la santé mentale et des consultations communautaires du Département de psychiatrie de l’Université de la Colombie-Britannique

Elliot Goldner, MD, MScS, MCRMC, chef de la Division de la politique et des services de santé mentale

Université Dalhousie, Département de psychologie de l’

Patrick J. McGrath, OC, PhD, MSRC, titulaire de la chaire Killam de psychologie, professeur de pédiatrie et de psychiatrie, titulaire d’une chaire de recherche du Canada, psychologue au IWK Hospital

Université Dalhousie, Faculté de médecine de l’

David Zitner, PhD, directeur en informatique médicale

Université d’Ottawa, École de psychologie de l’

John Hunsley, PhD, c. psych., professeur en psychologie

Université d’Ottawa, Faculté de médecine de

Jacques Bradwejn, MD MCRMC, DABPN, président du Département de psychiatrie

Université McMaster

Docteur Richard P. Swinson, MD, MCRMC, titulaire de la chaire Morgan Firestone de psychiatrie et de neurosciences du comportement à l’Université McMaster, chef du Département de psychiatrie du St. Joseph’s Healthcare Centre



[1]     À moins d’indication contraire, les renseignements contenus dans le présent chapitre proviennent des sources suivantes : Commonwealth Department of Health and Ageing (2002) National Mental Health Report 2002: Seventh Report. Changes in Australia’s Mental Health Services under the First Two Years of the Second National Mental Health Plan 1998-2000; Australian Health Ministers, National Mental Health Plan 2003–2008; Thornicroft, G. et V. Betts 2002, International Mid-Term Review of the Second National Mental Health Plan for Australia; Whiteford, Harvey, Ian Thompson et Dermot Casey, « The Australian Mental Health System, » International Journal of Law and Psychiatry, vol. 23, no 3-4, 2000; Whiteford, Harvey, Bill Buckingham et Ronald Manderscheid, « Australia’s National Mental Health Strategy, » British Journal of Psychiatry (2002) 180; Groom, Grace, Ian Hickie et Tracey Davenport « Out of Hospital, Out of Mind! » avril 2003; SANE Mental Health Report 2002-03, SANE Australia; The Mental Health Council of Australia, Promoting the mental health of all Australians, a 2001 Federal Election Submission.

[2]     En juillet 2004, la population de l’Australie était estimée à 19 913 000 habitants.

[3]     Les estimations de dépenses fournies ici sont tirées du National Mental Health Report (2002) et n’englobent que la fourniture des « specialized mental health services » (services spécialisés de santé mentale). Elles excluent une vaste gamme de services dont ont besoin les gens atteint d’une maladie mentale, comme les services médicaux et hospitaliers généraux, de logement, de sécurité du revenu, d’emploi et de formation et les programmes généraux de soutien communautaire. On a noté dans le rapport susmentionné que les comparaisons au niveau international des dépenses au titre de la santé mentale de l’Australie exprimées sous forme de part du total des dépenses au titre de la santé ne sont pas fiables, parce qu’on utilise d’un pays à l’autre des méthodes différentes pour comptabiliser de telles dépenses. On inclut, par exemple, dans certains pays dans les limites des dépenses en question pour des montants qui sont expressément exclus des estimations australiennes comme les sommes consacrées aux services assurés aux alcooliques, aux toxicomanes et aux handicapés intellectuels, aux soins fournis aux personnes souffrant de démence ou au logement de toutes ces catégories de patients et aux versements de prestations de sécurité du revenu aux usagers de soins de santé mentale.

[4]     Le 9 août 2004, le dollar australien valait un peu plus de 94 cents canadiens.

[5]     Les soins ambulatoires s’appliquent à tous les services de santé mentale consacrés à l’évaluation, au traitement, à la réhabilitation ou aux soins de patients traités en externe.

([6])    SANE Mental Health Report, 2002-2003, p. 2.

[7]     À moins d’indication contraire, les renseignements contenus dans le présent chapitre proviennent des sources suivantes : Wilson, Janice, « Mental Health Services in New Zealand, » International Journal of Law and Psychiatry, vol. 23, no 3-4, 2000; French, Sian, Andrew Old et Judith Healy HiT Summary: New Zealand, Observatoire européen des sytèmes de soins de santé, 2002; Conference Board du Canada, « La Nouvelle-Zélande », in Challenging Health Care System Sustainability: Understanding Health System Performance of Leading Countries, juin 2004; Powell, Gayla, « New Zealand’s National Mental Health Strategy: Report on Progress 2000-2001, » août 2002; ministère de la Santé, Nouvelle-Zélande, Looking Forward: Strategic Directions for Mental Health Services, juin 1994; ministère de la Santé, New Zealand, Moving Forward: The National Mental health Plan for More and Better Services, juillet 1997; Service de l’information de la Nouvelle-Zélande, Mental Health Data, 1994, ministère de la Santé, Nouvelle-Zélande, 1998; Commission de la santé mentale, Blueprint for Mental Health Services in New Zealand: How Things Need to Be, décembre 1998; ministère de la Santé, Nouvelle-Zélande, National Plan 2001-2003 – Project to Counter Stigma and Discrimination Associated with Mental Illness, juin 2001; Commission de la santé mentale, Briefing to the Incoming Minister of Health, août 2002; ministère de la Santé, Nouvelle-Zélande, Building on Strengths: A New Approach to Promoting Mental Health in New Zealand/Aotearoa, décembre, 2002; Commission sur la santé mentale, Report on Progress 2001-2002: Towards Implementing the Blueprint for Mental Health Services in New Zealand, avril 2003; ministère de la Santé, Nouvelle-Zélande, Like Minds, Like Mine – National Plan 2003-2005, septembre 2003.

[8]     Cette expression rappelle le fait que, dans les années 90, plusieurs pays où les mêmes institutions étaient chargées à la fois d’assurer le financement et d’offrir les services de soins de santé ont opté pour une séparation de ces fonctions afin d’accroître l’efficacité des services et de stimuler la concurrence.

[9]     Selon le « Blueprint », si la mesure la plus répandue pour ces services est celle du nombre de lits, il est nécessaire d’offrir désormais un « assortiment de soins » (p. 41 du plan néo-zélandais qui ne définit cependant pas ce à quoi doit ressembler chaque service).

[10]    Poste « équivalent temps plein ».

[11]    Cité dans Blueprint, p. 56.

[12]    À moins d’indication contraire, les renseignements contenus dans le présent chapitre proviennent des sources suivantes : ministère de la Santé, National Service Framework for Mental Health, 1999; Select Committee on Health, Fourth Report: Provision of NHS Mental Health Services, 2000; McCulloch, Andrew, Matt Muijen et Heather Harper, « New Developments in Mental Health Policy in the United Kingdom » International Journal of Law and Psychiatry, vol. 23, no 3-4, 2000; The Sainsbury Centre for Mental Health, « Mental Health Policy: the challenges facing the new Government, » juillet 2001; ministère de la santé, The Journey to Recovery – The Government’s Vision for Mental Health Care, novembre 2001; National Institute for Mental health in England, Cases for Change – Policy Context, 2002; ministère de la Santé, National Suicide Prevention Strategy for England, septembre 2002; Levenson, Ros, Angela Greatley et Janice Robinson, London’s State of Mind, King’s Fund Mental Health Inquiry, 2003; The Sainsbury Centre for Mental Health, Money for Mental Health: A review of public spending on mental health care, 2003; Commission for Health Improvement, What CHI has found in mental health trusts (sector report), 2003; Social Exclusion Unit, Mental Health and Social Exclusion, cabinet du vice-premier ministre, 2004.

[13]    Paul Wallace dans The Economist (17 juillet 2004) fait remarquer qu’avec ses 1,4 million d’employés, le SNS est le troisième plus important employeur au monde, derrière l’armée rouge chinoise et les chemins de fer indiens.

[14]    En fait, certains analystes soutiennent que le gouvernement travailliste vient d’entreprendre un retour au « marché interne », ce qui a amené Paul Wallace à écrire que ce mouvement de balancier s’inscrit dans la foulée de l’important basculement politique qui a suivi les élections de 2001. (Ibid.)

[15]    Même au Royaume-Uni, il règne encore une certaine confusion quant au sens exact à donner au terme « commissioning » (que nous avons traduit ici par commander) et à son rapport avec le terme plus familier « purchasing » (acheter). Tant conceptuellement que dans les faits, ces deux mots semblent être employés assez librement. Il existe cependant une définition commune : Commander correspond à l’activité stratégique qui consiste à évaluer un besoin, des ressources et des services courants et à élaborer une stratégie afin d’utiliser au mieux les ressources disponibles pour satisfaire les besoins constatés. Qui dit commander, dit déterminer des priorités, acheter les services appropriés et les évaluer. Acheter est l’activité opérationnelle qui s’inscrit dans le contexte d’une commande et qui consiste à mettre des ressources en œuvre afin d’acquérir des services en sorte de satisfaire des besoins, soit à un niveau macro, ou à celui de la population, soit à un niveau micro ou à celui de l’individu.

[16] Le Sainsbury Centre for Mental Health (SCMH) est un organisme de bienfaisance qui cherche à améliorer la qualité de vie des personnes atteintes de problèmes de santé mentale graves. Il effectue des recherches et conduit des activités de développement et de formation afin d’influencer les politiques et les pratiques dans le domaine des soins de santé et du bien-être. Le SCMH est affilié à l’Institute of Psychiatry du King’s College, à Londres. Ses travaux sont très respectés dans le monde entier.

[17]    À moins d’indication contraire, les renseignements contenus dans le présent chapitre proviennent des sources suivantes : Mental Health: A Report of the Surgeon General (1999), plus particulièrement le chapitre 6, « Organizing and Financing Mental Health Services »; département de la santé des services humains, National Strategy for Suicide Prevention: Goals and Objectives for Action (2001); The President’s New Freedom Commission on Mental Health Final Report (juillet 2003) et Interim Report (octobre 2002); Tanner, Jane « Mental Illness Medication Debate, » The CQ Researcher, 6 février 2004, p. 109-118; Cunningham, Robert « The Mental Health Commission Tackles Fragmented Services: An Interview With Michael Hogan, » Health Affairs, Web Exclusive, 9 septembre 2003; Barry, Colleen L. et Jon R. Gabel, Richard G. Frank, Samantha Hawkins, Heidi H. Whitmore et Jeremy D. Pickreign « Design Of Mental Health Benefits: Still Unequal After All These Years, » Health Affairs, vol. 22, no 5, septembre-octobre 2003, p. 127-37; Hogan, Michael F. « The President’s New Freedom Commission: Recommendations to Transform Mental Health Care in America, » Psychiatric Services, vol. 54, no 11, novembre 2003, p. 1467-1474; Mechanic, David et Scott Bilder, « Treatment Of People With Mental Illness: A Decade-Long Perspective, » Health Affairs, vol. 23, no 4, juillet-août 2004.

[18]    Interim Report, p. 3.


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