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SOCI - Comité permanent

Affaires sociales, sciences et technologie

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie

Fascicule 1 - Témoignages du 31 mars 2010


OTTAWA, le mercredi 31 mars 2010

Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit aujourd'hui à 16 h 23 pour une étude sur la question de l'accessibilité à l'éducation postsecondaire au Canada.

Le sénateur Art Eggleton (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Bienvenue aux travaux du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie. Le sujet à l'étude aujourd'hui est l'accès des peuples autochtones à l'éducation postsecondaire. Nous avons traité de cette question à l'occasion d'une séance tenue en décembre 2009 et nous y revenons aujourd'hui.

D'abord, permettez-moi de présenter Michael Mendelson, chercheur principal au Caledon Institute of Social Policy, que le comité connaît très bien. M. Mendelson nous a aidés à produire le rapport sur la pauvreté, le logement et l'itinérance. Il a publié en 2006 Aboriginal Peoples and Postsecondary Education in Canada, qui s'intéresse aux résultats scolaires des étudiants autochtones dans les établissements d'enseignement postsecondaire et expose des stratégies à adopter pour améliorer les résultats en question. Plus récemment, il a écrit Improving Education on Reserves : A First Nations Education Authority Act.

Jane Preston, qui est doctorante à l'Université de la Saskatchewan, témoigne à titre personnel. Dans ses recherches, elle s'intéresse à l'engagement des parents et des collectivités dans les écoles, à l'éducation en milieu rural et aux affaires autochtones. Elle a publié The Urgency of Postsecondary Education for Aboriginal Peoples et Overcoming the Obstacles : Postsecondary Education and Aboriginal Peoples. Mme Preston a préparé pour le compte du ministère de l'Éducation de la Saskatchewan un rapport sur l'éducation postsecondaire des Premières nations et des Inuits.

Andrew Sharpe est très bien connu lui aussi au comité. Il est directeur exécutif du Centre d'études des niveaux de vie, établissement de recherche qu'il a fondé en 1995. Il a occupé divers postes, dont ceux de directeur de la recherche et rédacteur du Quarterly Labour Market and Productivity Review au Centre canadien du marché du travail et de la productivité. Il a récemment coécrit un rapport intitulé The Effect of Increasing Aboriginal Education Attainment on the Labour Force, Output and the Fiscal Balance. De même, il a présidé récemment une conférence à propos de notre rapport sur la pauvreté, le logement et l'itinérance.

David Snow vient témoigner lui aussi à titre personnel. Il est chercheur à l'Institut de politiques publiques Macdonald-Laurier et doctorant au département de sciences politiques de l'Université de Calgary, où il se spécialise dans le droit constitutionnel et en politique comparée. Il est également boursier d'études supérieures à l'Institute for Advanced Policy Research et associé de recherche au Frontier Centre for Public Policy. Il est l'auteur d'un rapport sur l'accessibilité du logement et l'itinérance pour la Canada West Foundation.

M. Snow a coécrit avec Calvin Helin Free to Learn : Giving Aboriginal Youth Control over Their Post-Secondary Education, ouvrage très intéressant dont nous allons entendre parler dans quelques instants.

Michael Mendelson, chercheur principal, Caledon Institute of Social Policy : Mesdames et messieurs les sénateurs, je vous ai remis un feuillet que j'ai préparé il y a plusieurs années de cela, et que j'ai intitulé Carte des enjeux de la politique d'éducation postsecondaire des peuples autochtones. C'est une référence utile pour qui veut avoir un aperçu des enjeux en question, même si ce n'est pas tout à fait complet, vu que je l'ai préparé de mémoire et, comme nous le savons tous, ma femme y comprise, je suis faillible.

Au milieu, il y a la première série de questions entourant l'accès, puis, dans la case du milieu, vous verrez exposés les types d'obstacles auxquels les Autochtones font face. J'ai divisé cela en obstacles financiers et obstacles non financiers — et, sous la rubrique des obstacles non financiers, il y a les obstacles éducationnels et les obstacles sociaux. Comme je l'ai dit, ma liste d'obstacles sociaux n'est peut-être pas tout à fait complète. Tout de même, il est utile d'avoir une vue d'ensemble du terrain à couvrir, étant donné que nous avons souvent l'habitude de nous concentrer tout à fait sur une série particulière de questions au détriment des autres. Il est valable de s'attacher à une question particulière, mais il importe toujours de se rappeler que les étudiants autochtones font peut-être face à d'autres types d'obstacles.

Quand je regarde cette carte, je me demande quels sont les obstacles les plus importants qui se dressent devant les étudiants autochtones. Les obstacles financiers sont ceux dont nous entendons le plus souvent parler, mais je ne trouve pas beaucoup de données empiriques là-dessus. Peut-être mes collègues connaissent-ils quelques études empiriques sur la question. Quand je converse à bâtons rompus avec les étudiants autochtones que je rencontre dans les universités où je suis appelé à donner des conférences, notamment, ils sont enclins à affirmer que les obstacles sociaux sont aussi importants que les obstacles financiers. Ils déclarent se trouver en butte à des obstacles sociaux du fait de provenir, souvent, de petites localités. À leurs yeux, chaque aspect de la vie dans une ville constitue un obstacle social en soi. Ils sont aussi enclins à parler de questions sociales et de questions familiales que de questions financières.

J'aimerais voir davantage d'études et de données empiriques. J'aimerais me pencher sur les données administratives et interviewer un échantillon représentatif d'étudiants autochtones qui parleraient de leurs propres expériences avec un certain recul. Si ces études existent, je ne les connais pas, mais cela ne veut pas dire qu'elles n'existent pas.

Je demande, entre autres, quel est le véritable taux d'abandon comparatif des étudiants autochtones admis à l'université ou dans un collège communautaire. On m'a déjà donné des statistiques ahurissantes à propos du taux d'abandon des étudiants non autochtones dans les universités. On m'a dit que, dans certaines universités, c'est près de 50 p. 100 des étudiants admis en première année qui n'obtiennent jamais leur diplôme, mais je ne sais pas si l'affirmation est vraie dans tous les cas. Dans le cas particulier des universités moins sélectives, je crois que ce ne serait pas 50 p. 100; ce serait probablement 40 p. 100. Je n'ai jamais vu d'analyses du taux d'abandon des étudiants autochtones par comparaison à celui des autres étudiants. Si le taux d'abandon des autres étudiants se situe à 50 p. 100, le taux d'abandon des étudiants autochtones s'élève-t-il à 60 p. 100, 70 p. 100 ou 80 p. 100, sinon 50 p. 100 aussi?

Avoir accès à des données empiriques sur la question serait utile et, de ce point de vue là, je veux parler de la question de l'aide financière : nous avons entendu parler récemment dans les actualités d'une proposition très novatrice provenant de MM. Snow et Helin. Ceux parmi vous qui connaissez M. Helin savez que c'est une personne intéressante et dynamique, comme l'est aussi M. Snow, j'en suis sûr.

C'est une proposition intéressante et certes stimulante, mais je me demande ce qui nous porterait à croire que cela fonctionnerait mieux que le soutien communautaire. Le savons-nous? Quelque chose nous permet-il de croire que cela vaudrait mieux, en présumant que les coûts seraient égaux?

Je n'ai pas de réponse à cette question-là. Peut-être que M. Snow peut y répondre, mais, d'après moi, quelle que soit la mesure que nous adoptons, il ne faut pas imposer de changements aux Premières nations. Je crois que l'histoire vécue depuis une centaine d'années devrait nous confronter au fait qu'imposer et user de coercition n'est tout simplement pas la voie à prendre. Il existe des situations extrêmes où il peut être nécessaire d'intervenir, mais il faut que ce soit visiblement une situation extrême, et je ne crois pas que nous nous trouvions dans une telle situation en ce qui concerne l'actuel programme de soutien des études postsecondaires.

Selon une proposition particulière, il faudrait élaborer un programme de rechange et permettre aux collectivités des Premières nations d'y adhérer ou non. Qu'ils mettent la question aux voix et qu'ils prennent une décision. Je ne sais pas si quelqu'un a déjà exprimé cette idée-là, mais c'est une nouvelle idée pour vous. Les gens pourraient avoir un choix à faire, et la bande elle-même pourrait avoir à choisir quel genre de programme il faut adopter. Si c'est équivalent d'un point de vue financier, je crois que c'est le chemin qu'il faut emprunter en rapport avec cette décision. Il ne devrait pas nous appartenir à nous de prendre cette décision-là. La collectivité devrait prendre les décisions du genre. Bon, cela ne compte pas les étudiants des Premières nations qui vivent en dehors d'une réserve, question à laquelle nous devons réfléchir.

Je veux consacrer le temps qui m'est alloué au plus important obstacle à l'éducation postsecondaire des étudiants des Premières nations et autochtones. Je soupçonne que c'est l'obstacle éducationnel, c'est-à-dire les études secondaires à terminer, pour être plus précis. Si vous ne terminez pas vos études secondaires, les probabilités que vous obteniez un diplôme d'études collégiales ou universitaires sont minces. Il arrive que les gens soient admis comme étudiants adultes, mais c'est une exception qui est rare.

En étudiant les données du recensement de 2001, j'ai constaté que le nombre d'étudiants obtenant un diplôme d'études postsecondaires parmi ceux qui détenaient un diplôme d'études secondaires était le même chez les Autochtones et les autres, et c'est là une constatation très importante. Je n'ai pas refait le travail dans le cas du recensement plus récent; peut-être que ça ne se confirmera pas, mais la conclusion que j'en ai tirée, c'est que l'écart du côté des études postsecondaires terminées était presque entièrement attribuable à des études secondaires inachevées. Je souhaite ajouter à cela que le taux d'obtention des diplômes était beaucoup plus élevé dans les collèges que dans les universités, mais, globalement, le taux de réussite des études postsecondaires parmi les détenteurs d'un diplôme d'études secondaires était le même chez les uns et les autres.

Si notre but est d'en arriver à la parité entre les étudiants des Premières nations, Métis et Inuits et le reste de la population pour ce qui est du diplôme d'études, on ne saurait y arriver tant que le taux d'obtention du diplôme d'études secondaires n'a pas augmenté.

Chaque jeune Autochtone qui arrive à terminer ses études secondaires et à être admis dans une université ou un collège est merveilleux, une ressource précieuse qu'il faut chérir et qui, espérons-le, obtiendra son diplôme d'études postsecondaires, mais même si chaque jeune arrivait ainsi au but, il n'y aurait jamais parité si le nombre de jeunes terminant leurs études secondaires, lui, n'augmente pas. À mon avis, la véritable difficulté se situe entre la maternelle et la 12e année, particulièrement dans les réserves.

Jane Preston, doctorante, Université de la Saskatchewan, à titre personnel : Je veux d'abord remercier le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie de l'occasion qui m'est offerte d'exprimer mes idées sur les obstacles aux études postsecondaires chez les peuples autochtones.

Je crois que l'éducation est le pilier central d'une nation, ce qui la fortifie. L'éducation donne à chacun des moyens d'action; ce faisant, elle vivifie une collectivité. L'éducation est liée à une plus grande satisfaction au travail et à des revenus plus élevés. L'éducation réduit la nécessité de l'assistance sociale, elle améliore la santé et accroît la longévité. L'éducation favorise la cohésion sociale entre les groupes, ce que je considère comme très important pour notre pays. L'éducation est le chemin qui mène non seulement à l'épanouissement intellectuel, mais aussi à l'épanouissement physique, spirituel et social d'une société.

L'éducation recèle un potentiel particulièrement important chez les peuples autochtones du Canada. Selon certaines statistiques, les Autochtones constituent le groupe ethnoculturel le plus jeune et dont la croissance est la plus rapide au Canada. Entre 1996 et 2006, les populations de Premières nations et d'Inuits ont crû de 29 et de 26 p. 100, respectivement, par rapport aux autres membres de la population générale, dont l'augmentation s'est située à 8 p. 100. L'âge moyen des Autochtones du Canada est de 26,5 ans, par rapport à 39,7 ans pour les autres membres de la population. Ces données laissent entrevoir toutes sortes de conséquences sur le plan social. La vitalité économique et le bien-être social de la société canadienne dépendent de la réussite des Autochtones à l'école.

Malheureusement, pour de nombreux Autochtones, il existe en ce moment une multitude d'obstacles qui se dressent sur le chemin des études postsecondaires. Je divise ces grands obstacles en quatre groupes : les obstacles éducationnels, comme M. Mendelson en a parlé; les obstacles socioéconomiques; les obstacles pédagogiques de nature culturelle; et les obstacles financiers.

À propos des obstacles éducationnels, je suis tout à fait d'accord avec M. Mendelson quand il dit que, pour s'inscrire dans un établissement d'études postsecondaires, les Autochtones doivent d'abord avoir terminé leurs études du secondaire. Selon le recensement canadien de 2006, le taux d'obtention du diplôme d'études secondaires chez les jeunes autres qu'autochtones ayant entre 20 et 24 ans se situe à peu près à 52 p. 100. À titre de comparaison, il s'élève à 88 p. 100 chez les Autochtones. Les jeunes Autochtones sont nombreux à vivre dans une localité éloignée où la qualité des études est souvent inférieure à ce qui est offert dans les régions situées plus près du centre, où la population est plus nombreuse. L'insuffisance des connaissances de base, surtout en mathématiques, en sciences et en technologie de l'information, en informatique, si vous voulez, empêche les étudiants autochtones d'accéder aux études postsecondaires. Ajoutons à cela que le processus de sélection dans les établissements postsecondaires jure avec la réalité de nombreuses écoles des Premières nations.

Comme nous le savons, les Autochtones ont eu à supporter toute une série de difficultés sociales et économiques, ce qui a eu un effet néfaste sur eux et sur leur famille. Par rapport au reste du pays, ils présentent un taux de mortalité infantile qui est le double. En tant que mère, je trouve cela horrible. Le taux de suicide est cinq à sept fois plus élevé chez les jeunes des Premières nations; chez les jeunes inuits, le taux de suicide est jusqu'à 11 fois plus élevé que la moyenne nationale et, encore une fois, en tant que mère, je trouve cela horrible.

Les gangs de rue autochtones connaissent une croissance vertigineuse, phénomène sans pitié; 96 p. 100 des membres des gangs de rue en Saskatchewan et 58 p. 100 des membres des gangs de rue au Manitoba et en Alberta sont autochtones. Le chômage, la pauvreté et les piètres conditions sanitaires sont monnaie courante chez les Autochtones. Parmi ceux qui tentent d'accéder aux études supérieures, bon nombre sont obligés d'aller vivre en milieu urbain. Lorsqu'ils arrivent en ville, les Autochtones font face à une myriade d'obstacles supplémentaires dont la pénurie de logements, la pénurie de services de qualité pour la garde d'enfants et une augmentation marquée du coût de la vie. Ces manifestations horribles de l'inégalité ont un impact évident sur le taux d'obtention des diplômes d'études postsecondaires chez les Autochtones.

Pour ce qui est des questions pédagogiques de nature culturelle, disons que la langue, les méthodes d'enseignement et les styles d'apprentissage caractérisant la plupart des programmes d'études postsecondaires diffèrent énormément de la culture et de la pédagogie classique des Autochtones. Comme le montrent les statistiques de 2006, 51 p. 100 des Autochtones vivant dans une réserve parlent d'abord et avant tout leur langue maternelle indigène. Néanmoins, peu d'établissements d'études postsecondaires proposent des cours dans une langue autochtone.

Le paradigme pédagogique qui caractérise les programmes d'études postsecondaires privilégie l'apprentissage en tant que processus compétitif individualisé assujetti à des tests. À l'inverse, la pédagogie autochtone insiste sur un apprentissage acquis grâce à la coopération, à la narration d'histoires, à des discussions de groupe, à la modélisation et à l'observation. Dans de nombreux établissements d'enseignement postsecondaire, les cours, les programmes et les contenus ne sont pas en phase avec la culture et la pédagogie autochtones.

Le dernier obstacle est celui des finances. Faire des études supérieures est coûteux, et de nombreux étudiants autochtones ne disposent pas des finances nécessaires pour y arriver. Le gouvernement fédéral propose du financement aux gens des Premières nations et Inuits par le truchement du Programme d'aide aux étudiants de niveau postsecondaire, mais les candidats doivent satisfaire à plusieurs exigences. D'abord, pour recevoir l'aide financière voulue, le candidat aux études doit être un membre inscrit d'une bande; ensuite, le financement est assujetti à l'approbation du conseil de bande.

Comme l'a dit Lyle Whitefish, ex-vice-chef de la Federation of Saskatchewan Indian Nations, « Dans chaque réserve, il y a une liste d'attente pour les étudiants qui souhaitent étudier au-delà de la 12e année et [faute de financement] nous ne pouvons les accommoder tous ». Les Autochtones qui vivent en dehors d'une réserve et les Autochtones qui ne sont pas affiliés à une réserve ont de minces chances d'obtenir une aide financière.

Le malaise économique étant ce qu'il est en ce moment, il est impératif que les dirigeants gouvernementaux fassent des investissements judicieux. Je comprends cela. Investir dans les études postsecondaires des Autochtones procure d'importantes retombées économiques et sociales. La sombre réalité sociale et économique que vivent de nombreux Autochtones met en évidence l'importance capitale que comportent les études postsecondaires pour les Autochtones, pour leur bien-être futur. En somme, investir dans les études postsecondaires des Autochtones, c'est investir dans un avenir prospère pour tous les Canadiens.

Andrew Sharpe, directeur exécutif, Centre d'étude des niveaux de vie : Je tiens à remercier le comité de m'avoir invité à venir témoigner aujourd'hui. Je vais parler de la question des études postsecondaires chez les Autochtones. Je m'attacherai à la question d'accès, mais pas autant que les autres témoins.

Premièrement, je veux parler de l'écart important qui existe entre les Autochtones et les autres membres de la population du point de vue des études postsecondaires. Je veux m'attacher à la signification de cet égard du point de vue du bien-être des Autochtones, puis examiner le rôle de l'éloignement par rapport aux grands centres dans la scolarité. Enfin, je m'attacherai à ce que signifiera le fait de combler l'écart en question du point de vue du bien-être des Autochtones du Canada.

Il est très important ici de voir de plus près en quoi consiste cet écart entre les Autochtones et les autres quant aux études postsecondaires. Le phénomène touche presque entièrement les études universitaires. De fait, dans les métiers et les programmes d'apprentissage, le pourcentage d'Autochtones ayant réussi est légèrement supérieur à celui des autres. Dans le cas des collèges, la différence représente environ trois points de pourcentage, ce qui n'est pas si important. C'est à l'université que l'écart se situe vraiment. Selon le recensement de 2006, 23 p. 100 des Canadiens autres qu'autochtones ayant 20 ans ou plus possèdent un diplôme d'études universitaires, par rapport à 9 p. 100 seulement des Autochtones du pays. C'est là un écart absolu qui s'accroît au fil du temps, étant donné que les Canadiens autres qu'autochtones sont de plus en plus nombreux à fréquenter l'université. Le nombre augmente chez les Autochtones aussi, mais, certes, l'écart absolu s'élargit. C'est pire encore dans les réserves, où 3 p. 100 seulement environ de la population a fait des études universitaires.

Quelles sont les conséquences de cet écart? Cela est assez évident : là où la scolarité est faible, le taux d'emploi sera relativement moins élevé, le taux de participation aussi; et le taux de chômage sera plus élevé. Le taux d'emploi des Canadiens d'origine autochtone se situe essentiellement à 10 points de pourcentage en deçà de celui des autres Canadiens. Le taux de participation est inférieur de 4 p. 100. Le taux de chômage en 2006 se situait à 15 p. 100 chez les Autochtones, mais à 6 p. 100 chez les autres Canadiens. Ce sont des écarts qui s'expliquent en grande partie par la différence quant à la scolarité entre les groupes.

Les expériences nationales ont permis de démontrer que, si une politique officielle relève le degré de scolarité d'une population, la population en question en ressent des bienfaits pendant toute sa vie. Bien entendu, il y a un lien avec le revenu et la participation à la population active, mais il faut songer aussi aux nombreux effets indirects de l'éducation.

Dans l'ensemble, les dirigeants des collectivités autochtones ont fait des études universitaires. Il nous faut des dirigeants qui soient plus forts et il nous en faut en plus grand nombre; à ce chapitre, les études universitaires prennent donc une importance particulière. Il faut compter aussi de nombreux avantages externes non liés au marché. La criminalité est associée à un manque d'instruction, à l'absence d'études secondaires en particulier. Si le degré de scolarité des Autochtones était plus élevé, leur taux de criminalité chuterait.

Il y a aussi la question de la santé. Il existe une forte corrélation entre l'éducation et la santé, quoi qu'il en soit du revenu. De même, les effets intergénérationnels entrent en ligne de compte. Les parents instruits s'attendent à ce que leurs enfants s'instruisent eux aussi; à leur tour, les enfants s'instruisent davantage. Encore une fois, c'est ce que l'éducation représente de bon pour tous les membres de la société.

Quant à la question de l'éloignement, nous avons réalisé récemment une étude pour AINC intitulée The Labour Market and Economic Performance of Canada's First Nation Reserves : The Effect of Educational Attainment and Remoteness. J'espère pouvoir vous en faire parvenir une copie bientôt.

Nous nous sommes penchés sur les données se rapportant aux réserves en particulier — revenu, degré de scolarité, participation au marché du travail et ainsi de suite. Nous disposons de données très détaillées. L'éloignement figurait parmi les variables. On peut diviser les réserves en trois catégories : une réserve située dans un rayon de 50 km d'un grand centre urbain; une réserve située à plus de 50 km d'un grand centre urbain, mais disposant d'un accès par la route toute l'année durant; et, en troisième lieu, une réserve ne comptant pas d'accès par la route, mais seulement un accès par voie aérienne. Si on s'attache au degré de scolarité des différents types de collectivités en question, en tenant compte de l'éloignement, cela n'a rien d'étonnant : presque 4 p. 100 des gens des réserves près des centres urbains possèdent un diplôme d'études universitaires, à peu près 3 p. 100 de ceux qui ont accès par la route en possèdent un, et seulement 2 p. 100 de ceux qui restent possèdent un diplôme d'études universitaires. L'éloignement a un effet sur la scolarité.

Cela n'est pas étonnant : les étudiants qui habitent sur une réserve éloignée des grands centres quittent la réserve pour aller fréquenter l'université, mais n'y reviennent pas. Puis, il y a une autre décision : si vous habitez une réserve en région éloignée et que vous obtenez un diplôme d'études postsecondaires, y a-t-il là des possibilités d'emploi pour vous une fois vos études terminées? Là où les possibilités d'emploi sont peu nombreuses, l'encouragement à investir dans les études est moins grand. Nous constatons cela dans le cas des régions éloignées. Bien entendu, les réserves en régions éloignées présentent un marché du travail beaucoup plus faible et des résultats économiques beaucoup plus faibles que les réserves en milieu urbain.

Enfin, pour ce qui est des conséquences de mesures visant à combler l'écart constaté, nous avons procédé à une analyse économétrique des facteurs déterminants du degré global de participation au marché du travail et d'autres variables liées à la population active dans les réserves. Il est étonnant de constater à quel point l'accroissement de la proportion d'Autochtones titulaires d'un diplôme d'études universitaires se répercute sur le bien-être global. Par exemple, si cela augmente d'un point de pourcentage, passant de 3 à 4 p. 100 de la population, cela donne essentiellement une augmentation de 0,9 point de pourcentage du taux d'emploi, une réduction de 0,9 point de pourcentage du taux de chômage et une augmentation de 0,5 point de pourcentage du taux de participation à la population active. Ce sont trois points de pourcentage de moins environ en lien avec les études universitaires. Si vous éliminez l'écart en question par rapport à la population générale, ce qui est un rêve fou — il faudrait de nombreuses années pour y arriver —, vous réduisez bon nombre des disparités économiques qui touchent la population autochtone.

Le même raisonnement vaut pour les revenus. Là où il y a une augmentation d'un point de pourcentage de la proportion de diplômés universitaires au sein de la population, il y a une augmentation moyenne de 383 $ au chapitre des revenus. Quant au PIB par habitant, l'augmentation est de l'ordre de 567 $. En dernière analyse, les données nous permettent de démontrer l'impact d'un degré de scolarité relativement plus élevé sur la population autochtone.

J'encourage le comité à se pencher sur les données administratives d'AINC et du Programme d'aide aux étudiants de niveau postsecondaire. C'est le programme principal d'AINC. Je ne suis pas certain que les données soient du domaine public. Ce devrait certainement être le cas. J'encourage le comité à étudier ces données-là pour constater les tendances en matière d'aide financière versée aux étudiants autochtones.

Pour conclure, je dirai que les études universitaires sont capitales pour améliorer le bien-être économique de la collectivité autochtone. Je crois que la société ne peut trouver un meilleur investissement que les études autochtones.

Le président : Nous allons maintenant accueillir M. Snow, coauteur de Free to Learn, qui propose une nouvelle approche pour aider financièrement les habitants des collectivités autochtones à accéder aux études postsecondaires. Nous sommes impatients de vous entendre.

Dave Snow, chercheur, Institut de politiques publiques Macdonald-Laurier, à titre personnel : Merci de m'accueillir. Au nom de mon coauteur, Calvin Helin, qui ne pouvait malheureusement pas être là aujourd'hui, je vous remercie aussi.

Nous venons d'entendre mes trois cotémoins donner de très bonnes raisons morales d'accroître les études postsecondaires chez les Autochtones au Canada, que j'ai notées pour certaines pour éviter de les répéter. Avant d'aborder les éléments particuliers de notre proposition, je dirais qu'il existe de bonnes raisons démographiques d'accroître le degré de scolarité de tous les étudiants autochtones.

Le Canada subit une profonde mutation démographique où l'arrivée à la retraite des membres de la génération de l'après-guerre, l'amenuisement de la population active et la faiblesse du taux de fécondité sont tels que la croissance de la population commencera à dépasser la croissance de la population active pour une période de 40 ans à compter de 2011. À mesure que diminue le ratio travailleurs-retraités, comme Brian Lee Crowley l'a dit, [Traduction] « Nous sommes au bord de la falaise démographique et voilà que nous faisons un pas en avant. »

Par contre, à l'inverse de la population canadienne, la population autochtone connaît une croissance vertigineuse. Le taux de naissance y est élevé, la population est beaucoup plus jeune. Les Autochtones comptent pour 3,3 p. 100 de la population canadienne, mais les enfants autochtones comptent pour 5,6 p. 100 des enfants du pays. Dans un ses livres, mon coauteur Calvin Helin qualifie le phénomène de « tsunami démographique » imminent. D'où un paradoxe : le taux de chômage chez les Autochtones est élevé, mais nous avons plus que jamais besoin des Autochtones au sein de la population active du Canada. Comme les trois autres témoins l'ont déjà démontré, les effets d'un accroissement éventuel de la participation des Autochtones au marché du travail et de leurs études sont extraordinaires.

À une époque où les frais de scolarité augmentent, l'aide financière est également un enjeu. Or, nous savons que les étudiants autochtones et les Autochtones en général ont des revenus inférieurs à ceux des autres membres de la population. Je me reporte à un rapport de M. Blair Stonechild et R. W. Malatest and Associates, réalisé pour la Fondation des bourses canadiennes du millénaire. Quarante discussions de groupe ont permis de constater que le refus de s'endetter et d'assumer un fardeau financier figurait parmi les raisons principales pour lesquelles les Autochtones disent ne pas vouloir faire d'études postsecondaires.

Tout de même, le gouvernement fédéral applique une série de mesures dont le Programme d'aide financière aux étudiants de niveau postsecondaire est le principal élément. À tous les ans, 314 millions de dollars sont consacrés à ce programme, qui est conçu pour faciliter les études postsecondaires des étudiants qui sont des Indiens inscrits. L'argent n'est toutefois pas remis aux étudiants eux-mêmes. Ce sont plutôt les conseils de bande qui les reçoivent, puis distribuent l'argent aux étudiants.

Comme notre rapport le montre, ce programme est fondamentalement un échec du point de vue de la transparence et de l'imputabilité. Parmi les problèmes touchant le Programme d'aide financière aux étudiants de niveau postsecondaire, ou PAFENP, citons le fait que les conseils de bande prennent des fonds excédentaires pour assumer des dépenses non admissibles, par exemple des frais d'administration, des frais de garde d'enfants, les salaires et avantages sociaux du personnel, les frais de déplacement pour les membres du conseil, les frais pour articles de bureau et services publics. Or, c'est un programme conçu pour aider les étudiants qui sont Indiens inscrits à faire des études postsecondaires.

De plus en plus, les étudiants figurent sur une liste d'attente. Comme le dit Shawn Atleo, chef national de l'Assemblée des Premières Nations, c'est le rêve de plus de 10 000 étudiants qui est retardé ou refusé. Il y a une grande variation dans l'aide financière accordée aux étudiants d'une région à l'autre; selon certaines données, l'aide financière par habitant accordée aux étudiants éventuels en Ontario est deux fois plus élevée qu'elle l'est dans la région de l'Atlantique, même si certaines provinces de cette région exigent les frais de scolarité les plus élevés qui soient au pays. Selon certaines allégations, pour citer encore une fois le rapport de la Fondation des bourses d'études canadiennes du millénaire et diverses autres sources, notamment une vérification interne d'AINC, les Indiens inscrits vivant hors-réserve en particulier se voient refuser l'aide financière demandée pour cause de népotisme et de favoritisme, et le programme dans son ensemble est soustrait à toute forme de mesure du rendement et d'imputabilité. Les bandes sont seulement tenues de préciser combien d'étudiants reçoivent l'aide financière. Elles n'ont pas à révéler combien ont essuyé un refus, ni quel est le montant de l'aide financière accordée à chaque étudiant.

Selon moi, et selon Calvin Helin, c'est scandaleux : certaines bandes mettent les étudiants sur une liste d'attente, alors que d'autres ont des fonds excédentaires. De fait, certains étudiants reçoivent le total prévu de l'aide financière pour les études postsecondaires et les frais de subsistance, alors que d'autres étudiants ne reçoivent rien. Bien entendu, certaines bandes distribuent les fonds équitablement. Par contre, comme d'innombrables données anecdotiques et l'étude de R.W. Malatest and Associates le montrent, bon nombre d'entre elles ne le font pas. À notre avis, un programme dont la structure d'imputabilité repose entièrement sur la bonne volonté des administrateurs n'est pas un programme efficace.

Il y a eu transfert de pouvoir du gouvernement aux bandes, mais, selon nous, le transfert n'est pas allé assez loin, dans le sens où ça ne s'est pas rendu où il le faut vraiment, soit les jeunes Indiens inscrits eux-mêmes.

Nous proposons la création du régime d'épargne-études autochtone, ou REEA. Nous proposons l'élimination progressive du Programme d'aide financière aux étudiants de niveau postsecondaire au profit d'un compte d'épargne — chaque étudiant qui était inscrit aurait droit à un compte créé à sa naissance et dans lequel la somme de 4 000 $ a été versée. Chaque fois qu'une année d'études est réussie, la 6e à la 12e, 3 000 $ supplémentaires seraient versés dans le compte dans un établissement financier enregistré. Au moment de l'attribution du diplôme, la somme représenterait au moins 25 000 $, sans tenir compte de l'intérêt accumulé ni des autres suppléments — privés ou sans but lucratif — donc l'administration serait facile avec un tel compte.

Ça n'éliminerait pas tous les obstacles à la disponibilité aux études postsecondaires chez les Autochtones, j'en conviens, mais savoir qu'il y a 3 000 $ versés dans le compte par année scolaire et au moins 25 000 $ d'accumulés au terme des études secondaires inciterait fortement les étudiants à terminer leurs études secondaires et leurs parents à les encourager à le faire.

Une fois l'étudiant inscrit à un programme d'études postsecondaires en bonne et due forme — que ce soit une école de métier, un collège, une université ou je ne sais quoi encore —, l'argent serait disponible par le truchement d'un système semblable à ceux qui s'appliquent actuellement aux subventions et bourses d'études, et l'application de contrôles stricts permettrait de s'assurer que les frais de scolarité sont versés directement à l'établissement sous forme de paiements mensuels ou semestriels, à condition que l'étudiant demeure inscrit. Il serait possible de verser aussi des allocations mensuelles de subsistance.

D'après les renseignements obtenus d'Affaires indiennes et du Nord Canada, nous croyons qu'il y a autour de 105 000 étudiants autochtones prêts à entamer le cycle secondaire cette année et durant les années à venir. Le coût des programmes proposés représenterait environ 315 millions de dollars, soit exactement le coût du programme aujourd'hui. Bien entendu, il y aurait des frais de transition, dont nous disons qu'ils seraient temporaires, bien qu'importants, liés à l'établissement des comptes d'épargne et à l'aide versée aux étudiants ayant terminé plus ou moins la sixième année, pour l'instant, et qui souhaitent faire des études postsecondaires. Dans notre document, nous proposons que tout étudiant répondant à ce critère reçoive les 25 000 $ dans un compte.

Les fonds inutilisés versés pour les étudiants qui choisissent de ne pas faire d'études postsecondaires pourraient servir à rembourser certains des frais de transition. Je soulignerais que le remboursement se ferait aux étudiants individuels et non pas à quelque autre forme de financement, comme les détracteurs de notre rapport l'ont laissé entendre. Si le gouvernement se sent prêt à assumer les frais de transition directement, les fonds inutilisés pourraient servir à suppléer les comptes des autres étudiants. La récompense serait un système efficient, transparent et universel. Les étudiants seraient au courant du financement qui leur est remis, et ce ne sont pas les dirigeants du conseil, et notamment le chef, qui détermineraient le financement.

Il faut souligner en même temps que ces chiffres ne sont pas coulés dans le bronze. Nous ne faisons certainement pas valoir que ces fonds seraient les seuls à pouvoir être utilisés. Nous cherchons seulement à savoir comment utiliser avec plus d'efficacité les fonds actuellement consentis.

Notre proposition a donné lieu à des réponses prévisibles, et particulièrement des critiques provenant de plusieurs chefs et regroupements de chefs, qui craignent perdre une partie de leur pouvoir et la possibilité d'utiliser la rhétorique de l'autonomie gouvernementale. L'idée que les Autochtones contrôlent leur éducation revient dans toutes ces critiques. Pour répondre à cela, comme nous le disons dans le document, nous affirmons que la meilleure façon pour les Autochtones de contrôler leur éducation, c'est d'habiliter les étudiants autochtones individuels.

Je vous le demande : si le fait d'habiliter les Autochtones économiquement à la base même ne constitue pas un contrôle indien de l'éducation, alors qu'est-ce qu'il faut faire? En quoi le système actuel habilite-t-il les milliers d'étudiants dont le nom figure sur une liste d'attente, comment leur donne-t-il le contrôle sur leur éducation?

Nous avons constaté que notre proposition a droit à un soutien extraordinaire de la part des étudiants autochtones à la base. De nombreux étudiants se sont manifestés et sont venus signer notre déclaration de soutien; il en va de même d'enseignants et même de certains chefs, sans oublier votre collègue, le sénateur Patrick Brazeau. Nous avons reçu d'innombrables courriels provenant d'étudiants, dont bon nombre n'étaient pas prêts à se manifester et à soutenir publiquement la cause, par crainte de ne pas recevoir l'aide financière voulue de leur bande à l'avenir.

Pour conclure, étant donné l'extrême pauvreté et les possibilités limitées qui sont le lot de nombreux Autochtones, nous croyons qu'il y a là un impératif moral : les décideurs canadiens doivent travailler à améliorer l'accès aux études postsecondaires. Le Programme d'aide financière aux étudiants de niveau postsecondaire laisse en plan beaucoup trop d'étudiants autochtones prospectifs; il n'atteint pas son but. Nous appliquons un programme qui est conçu pour favoriser les études postsecondaires sans avoir la moindre idée du montant d'argent qui est réellement dépensé. C'est un scandale.

Au nom de mon coauteur Calvin Helin et Institut de politiques publiques Macdonald-Laurier, j'incite vivement le comité à étudier sérieusement notre proposition comme façon d'améliorer l'accès aux études postsecondaires des étudiants autochtones au Canada.

Le président : Merci beaucoup des déclarations liminaires présentées. Nous allons maintenant entamer la discussion avec le comité.

Je tiens aussi à souhaiter la bienvenue au sénateur Rivard, qui remplace le sénateur Demers, et au sénateur Mercer, qui remplace le sénateur Cordy.

Je veux m'attacher à certaines des observations formulées par Mme Preston et M. Mendelson à propos d'une statistique que l'on attribue à M. Mendelson. Dans la mesure où ils terminent leurs études secondaires, les étudiants autochtones sont admis à l'université dans la même proportion que les membres de la population générale. Cependant, la difficulté réside dans le fait qu'ils abandonnent leurs études secondaires avant cela.

Nous formons une entité fédérale. Le système d'éducation en tant que tel relève des provinces, mais l'administration fédérale est beaucoup plus présente au niveau postsecondaire. Tout de même, si c'est un problème relativement plus profond qui se situe au niveau de l'école secondaire et peut-être même à un niveau précédent, que pouvons-nous faire, en tant qu'entité fédérale, pour essayer de régler ce problème-là?

Il est manifestement dans notre intérêt que les Autochtones soient plus nombreux à faire des études postsecondaires. Si nous pouvions faire en sorte que le nombre d'Autochtones qui obtiennent leur diplôme d'études postsecondaires, que ce soit à l'université ou dans un collège, soit équivalent à ce qui est dans le reste de la population, nous économiserions probablement des milliards de dollars en coûts pour l'assistance sociale et ainsi de suite. Nous pourrions certainement accroître la productivité. Nous réglerions certainement le problème démographique que pose l'amenuisement de la population active, lié au vieillissement de la population, grâce à une population plus jeune qui croît à un rythme plus rapide que celle du reste du pays.

Les raisons positives à évoquer pour justifier un accroissement du taux d'obtention d'un diplôme d'études postsecondaires chez les Autochtones sont nombreuses. Que faut-il faire? Que proposez-vous que nous fassions au niveau de l'école secondaire?

M. Mendelson : Permettez-moi de répondre directement à cette question. Les réserves des Premières nations relèvent de la compétence du gouvernement fédéral. Il y a bel et bien un système d'éducation de compétence fédérale au même titre que dans les autres ordres de gouvernement. Il y a environ 540 écoles dans les réserves, et bon nombre d'étudiants en dehors des réserves fréquentent une école qui n'est pas une école de réserve, ce sont surtout des écoles secondaires, mais c'est le gouvernement fédéral qui assume leurs frais de scolarité par le truchement des bandes.

Il y a bel et bien un système scolaire soutenu par le gouvernement fédéral et, si vous me permettez de le dire, le soutien accordé comporte d'importants problèmes. Cela me désole de devoir parler d'argent tout de suite, mais la question de l'argent est un problème. En Ontario, le financement de l'enseignement primaire et secondaire a augmenté d'environ 50 p. 100 depuis 2003, puis il y a beaucoup d'ajouts. Aujourd'hui, j'examinais un programme qui comporte des subventions ciblées établies à partir de données socioéconomiques à l'intention d'écoles particulières, un programme dont le budget s'élevait à 300 millions de dollars, ce qui n'est pas rien.

À l'inverse, dans les réserves, je crois qu'il y a eu probablement, en Ontario, une augmentation de 25 p. 100 du financement depuis 2003, je dirais. C'est peut-être 26 p. 100. De fait, un des problèmes qui se posent dans ce cas, c'est qu'il est très difficile d'obtenir des données sur la question.

Je ne crois pas que le financement soit le seul problème qui se pose, mais je voudrais en parler de façon très précise et très nette. Il y a un système où le gouvernement fédéral assume tout au moins une responsabilité conjointe avec les Premières nations, et qui s'applique sur les réserves, et c'est là que le bât blesse.

Au Manitoba, en 2001 — vous disposez de données plus récentes — 70 p. 100 des jeunes adultes ayant entre 20 et 24 ans n'avaient pas terminé leurs études secondaires. C'est une statistique ahurissante qui a des conséquences ahurissantes pour la société canadienne, étant donné que la plupart de ces jeunes adultes ne pourront travailler de manière significative pendant le reste de leur vie. Voilà la réalité pour qui n'a pas de diplôme d'études secondaires.

Le président : Bien sûr, la plupart des Autochtones vivent maintenant en dehors des réserves; voici que les provinces entrent en jeu.

M. Mendelson : Oui. Les provinces sont responsables. Tout de même, quand on parle de la plupart des Autochtones, il faut savoir qu'il y a une augmentation importante du nombre de personnes qui se déclarent autochtones. Chaque recensement voit des gens de plus en plus nombreux qui sont prêts à se présenter comme étant autochtones; les données relatives à la croissance démographique tiennent en partie à ce que nous qualifions de croissance naturelle, mais aussi en partie au fait que les gens se déclarent autochtones, en dehors de la réserve dans presque tous les cas. Il s'agirait donc presque toujours du cas d'une personne qui se considère comme autochtone ou qui se considère comme métisse, mais les collectivités des Premières nations ne connaissent pas une croissance si rapide. Tout de même, il y a croissance sur les réserves.

Mme Preston : Votre question portait sur ce que le gouvernement peut faire à propos du taux d'obtention du diplôme d'études secondaires.

Mon métier, c'est l'enseignement. J'ai enseigné pendant une douzaine d'années dans le système d'écoles publiques. De fait, j'ai enseigné aussi dans une école de bande. Je crois que les meilleurs enseignants doivent se trouver dans les écoles de bande en question. Je crois que la qualité de l'éducation dans les écoles de bande, la qualité de l'enseignement, doit s'améliorer. Je crois que les enseignants doivent être mieux préparés aux réalités culturelles des Premières nations et à l'éloignement de nombreuses collectivités. Notre éducation et notre pédagogie s'améliorent dans l'ensemble, mais la pédagogie autochtone comporte des dimensions brillantes et merveilleuses qui s'appliquent à l'ensemble du Canada, à tous les étudiants, et qui sont très efficaces. Il y a la narration, la discussion, le travail concret en groupe et ainsi de suite. Pour une bonne part, notre programme de formation des maîtres — je viens du ministère de l'Éducation — vise à faire en sorte que tous nos diplômés de l'Université de la Saskatchewan, dans le programme de formation des maîtres, enseignent d'une façon nouvelle, et cela tient pour une grande part à la pédagogie autochtone. Pour résumer, je crois que nous devons soutenir les enseignants, autochtones et autres, dans les écoles de bande.

En Saskatchewan, quatre étudiants autochtones sur cinq fréquentent une école publique. Encore et toujours, les parents des Premières nations vivant dans les réserves me disent qu'ils doivent inscrire leurs enfants à une école publique financée par la province parce qu'ils préfèrent l'enseignement qui est dispensé dans le système des écoles publiques.

En Saskatchewan, le financement par étudiant se situe entre 8 500 et 9 000 $, et le financement des écoles de bande dont nous parlons est nettement plus faible. Je sais que je suis revenue à la question du financement, mais voilà, grosso modo, ce qu'il en est des écoles de bande et de ce que nous pouvons faire pour améliorer l'éducation offerte. Les gens ont besoin des ressources et ils ont besoin du perfectionnement professionnel qui s'impose. Il leur faut toutes ces mesures de soutien pour améliorer l'éducation dispensée dans les écoles de bande.

Par ailleurs, nous devons soutenir les programmes du genre ITEP : les Indian Teacher Education Programs, soit les programmes de formation des enseignants autochtones. Il existe plusieurs programmes de formation des enseignants, de programmes ITEP, de programmes de formation des enseignants autochtones, au pays. Dans le volet enseignement postsecondaire, nous devons aider un plus grand nombre d'Autochtones à devenir enseignants et, parallèlement, encore une fois, soutenir les établissements d'enseignement postsecondaire, mais pas au moyen de financement instable, pour que les programmes de formation en question puissent bénéficier d'une certaine constance et inciter les enseignants autochtones à retourner dans les réserves pour enseigner dans les écoles de bande, s'ils souhaitent le faire.

M. Mendelson a parlé des taux de persévérance et du fait qu'il est très difficile d'obtenir des données là-dessus. J'ai fait une recherche sur les taux de persévérance des étudiants du niveau postsecondaire. Ça se rapporte au programme d'arts et de sciences de l'Université de la Saskatchewan. Selon l'Université de la Saskatchewan, qui compte la plus nombreuse population étudiante autochtone au Canada, entre 1988 et 1999, 43,9 p. 100 des étudiants autochtones en première année au College of Arts and Science ont abandonné leurs études ou ont été contraints de le faire. À titre de comparaison, ce sont 20 p. 100 des étudiants des autres groupes qui ont abandonné leur programme ou ont été contraints de le faire.

Au programme de formation des enseignants autochtones à l'Université de la Saskatchewan, il y a certaines mesures de soutien. Le directeur affirme qu'il faut offrir un soutien affectif, culturel et matériel — en pensant à l'ensemble des enseignants du programme de formation au niveau postsecondaire. Le soutien doit y être. D'après ce qu'il m'a dit, le taux de persévérance dans ce programme ITEP se situe entre 80 et 90 p. 100, ce qui est très différent des 43,9 p. 100 constatés au College of Arts and Science.

Le président : Merci. Encore une fois, permettez-moi de réitérer la chose. Je veux arriver à comprendre ce qu'il faut faire pour que les jeunes Autochtones n'abandonnent pas leurs études secondaires — particulièrement ce que nous pouvons faire à ce sujet au niveau fédéral.

M. Snow : Notre étude porte d'abord et avant tout sur l'enseignement postsecondaire. Je crois que nous offrons un incitatif important, même si je sais que le seul incitatif financier ne suffira pas pour convaincre tout le monde de terminer ses études secondaires. Tout de même, je signalerai que toutes les parties à ce débat admettent de façon très nette que l'éducation postsecondaire des Autochtones est une responsabilité fédérale.

D'après l'information que nous pouvons tirer de l'étude de 2007 de la Chambre des communes intitulée Notre priorité la plus haute : l'éducation postsecondaire des Autochtones au Canada, le gouvernement fédéral conteste l'idée que l'éducation postsecondaire soit un droit garanti par traité.

Selon nous, que l'éducation postsecondaire financée par le gouvernement fédéral soit un droit garanti par traité ou non, c'est une chose que le gouvernement fédéral devrait faire de toute façon. C'est une façon indirecte de s'occuper de la question, selon laquelle le programme serait imposé aux étudiants autochtones.

Dans l'état actuel des choses, selon le gouvernement fédéral, si je comprends bien, le programme actuel présente un caractère discrétionnaire, et le gouvernement fédéral peut en accroître ou en diminuer le budget comme il l'entend, sinon carrément l'éliminer. Dans ce sens-là, notre programme n'a rien de différent.

Le sénateur Eaton : Monsieur Snow, ce que vous faites, ce que vous avez imaginé me paraît merveilleux, de tout premier ordre. Merci.

Dans le discours du Trône, le gouvernement a affirmé clairement qu'il s'engage à travailler avec les collectivités autochtones et les provinces à réformer et à raffermir le système d'éducation. Peut-être votre programme prendra-t-il son envol avec cela?

Madame Preston, je crois que vous avez soulevé des questions très intéressantes à propos de la pédagogie culturelle. Nous devrions vraiment diviser cela en deux volets à bien y penser, n'est-ce pas? Nous devrions songer au cas des écoles secondaires en dehors des réserves; pour que les enfants autochtones hors réserve se retrouvent en ville à l'école secondaire, il faudra un type particulier de programme, qu'il s'agisse de mentorat ou de ce que vous pouvez suggérer. Dans un pays bilingue, je dirais que si vous êtes un étudiant qui ne vit pas sur une réserve, la langue autochtone est quelque chose de merveilleux du point de vue de la culture, mais ce n'est pas forcément un instrument que vous allez pouvoir utiliser sur le marché du travail.

Puis, vous avez parlé de l'éducation dans les réserves, où les langues autochtones sont employées. Cela supposerait un programme ou un enseignement différent, n'est-ce pas?

Mme Preston : Nous avons une version nouvellement révisée du programme de formation des enseignants à l'Université de la Saskatchewan. Un des volets du programme exige des étudiants-enseignants qu'ils intègrent une perspective autochtone aux modules qu'ils sont appelés à enseigner. Chaque stagiaire appelé à enseigner pendant quatre mois doit satisfaire à cette exigence.

Le sénateur Eaton : Pouvez-vous nous en dire un peu plus là-dessus?

Mme Preston : Voici un autre exemple. En Saskatchewan, au Bureau du commissaire aux traités, nous avons conçu un programme obligatoire de la maternelle à la 12e année à propos des traités. À chaque niveau, on aborde la question des peuples autochtones et des traités. Les enseignants doivent en être conscients eux aussi. Ils doivent examiner les programmes. Ils doivent examiner le contenu autochtone des modules qu'ils sont appelés à préparer.

Le sénateur Eaton : Ça se fait dans les écoles ordinaires, celles que tout le monde fréquente?

Mme Preston : Oui. L'idée du cercle de la parole, de la modélisation, de l'autoévaluation de l'étudiant — ce sont toutes des idées qui s'intègrent à la pédagogie autochtone — à notre façon d'enseigner. Ces idées-là figurent également dans nos programmes réguliers de formation des enseignants.

Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question, mais voilà pour le contexte.

Le sénateur Eaton : Trouvez-vous que ces programmes sont utiles à l'étudiant autochtone qui fréquente l'école publique locale de son quartier?

Mme Preston : C'est utile dans le sens où c'est bon pour la cohésion sociale de tous les peuples au Canada, selon moi, Plus particulièrement, je crois que la marginalisation et la discrimination auxquelles les Autochtones font face expliquent en partie pourquoi ils ne sont pas aussi nombreux que nous le voudrions dans les établissements d'enseignement postsecondaire. Ils ne se voient pas dans ce monde-là, certains d'entre eux; et il appartient à tous d'accueillir les Autochtones dans les établissements d'enseignement postsecondaire.

Voilà le lien que je fais entre les choses : l'éducation des étudiants dans les écoles publiques ordinaires favorisera directement et indirectement la cohésion sociale dont j'ai parlé entre les Autochtones et les autres membres de la population. Cela débouchera sur un milieu plus accueillant du point de vue des Autochtones dans les établissements d'enseignement postsecondaire.

Le sénateur Eaton : Lorsque vous avez parlé de la bande, j'ai pensé à la séance plénière que nous tenons tous les ans au Sénat, à laquelle l'APN vient nous présenter un rapport. Quel genre de mesures la bande peut-elle prendre selon vous? Il est très bien de venir nous voir, mais nous, nous nous tournons vers les bandes. Quelles mesures concrètes prennent-elles pour conseiller leurs jeunes? Oubliez le truc financier de M. Snow, qui me paraît être une excellente idée, mais les bandes prennent-elles des mesures pour agir à titre de mentors auprès des étudiants ou de travailler avec les écoles?

Mme Preston : Pour donner un exemple, je sais que le Meadow Lake Tribal Council travaille en partenariat avec diverses universités, dont l'Université de Victoria, qui collaborait avec cette université à un programme d'extension. Les gens de l'université allaient dans la collectivité, de concert avec les aînés, le chef, le directeur des études de l'école de bande, créaient un programme d'études postsecondaires qui répondait aux exigences scolaires strictes de l'université et aux réalités de la bande tout à la fois. Les gens travaillaient ensemble à un programme d'études postsecondaires reflétant le programme et les réalités de la bande. Il y avait des partenariats et la plus grande part, si ce n'est l'intégralité du programme en question — le First Nations Partnership Program comme on l'appelait — était un programme d'extension.

C'est un exemple où la bande et les universités se concertent pour former des enseignants autochtones. Nous ne parlons pas de charpentiers ici ni d'autres métiers. Ce sont précisément des enseignants autochtones, et c'était axé sur l'éducation à la petite enfance — les enseignants de l'école élémentaire et les éducateurs à la petite enfance qui enseignent dans leur collectivité. Ils pouvaient rester dans leur collectivité et accéder à un enseignement postsecondaire.

Le sénateur Seidman : Merci beaucoup d'être venus ici discuter des questions très importantes concernant l'accès à l'éducation pour les Autochtones. Évidemment, les obstacles auxquels les Autochtones font face sont nombreux, mais, de toute évidence, parmi les plus difficiles, il y a les obstacles pédagogiques, tels que vous nous les avez présentés — plus particulièrement, le fait que les Autochtones ne terminent pas leurs études postsecondaires. Les statistiques que vous avez présentées le confirment vraiment.

Là où il est question d'enseignement postsecondaire, nous avons tendance à en discuter dans les paramètres habituels — le programme universitaire classique pour étudiants ayant terminé leurs études secondaires autour de l'âge de 18 ans.

J'aimerais que vous nous en disiez plus sur l'accès à l'éducation postsecondaire du point de vue d'un adulte relativement plus vieux. Au risque de me faire dire encore une fois que je m'éloigne du sujet, je dirais que, en réalité, il importe de se pencher sur le cas de l'apprenant plus âgé dans toutes les situations, surtout dans celles dont vous parlez ici, là où les études secondaires incomplètes représentent l'obstacle le plus important.

Il y a tout un segment de la société autochtone qui profiterait des études postsecondaires dans la mesure où il s'agit de recyclage ou qu'il est question de nouvelles technologies, de métiers ou de programmes atypiques, voire d'achèvement des études secondaires.

M. Mendelson : Les données laissent quand même voir que les étudiants autochtones sont relativement plus âgés dans l'ensemble et qu'ils terminent leurs études à un âge relativement plus avancé, lorsqu'ils les terminent. Il existe au Canada de nombreuses initiatives permettant aux adultes, et particulièrement les jeunes adultes, d'avoir une deuxième chance et de retourner à l'école, d'obtenir un diplôme d'études secondaires, puis d'arriver à l'université à titre d'étudiant adulte. Les étudiants en question doivent posséder certaines connaissances et compétences avant de profiter de cette occasion-là.

Il y a de nombreuses initiatives à ce chapitre en ce moment. Autant que je le sache, ce n'est pas dans les réserves en tant que telles qu'elles se déroulent, quoique certaines des grandes réserves en ont probablement. Il y a des centres d'éducation des adultes à Winnipeg, à Brandon et ailleurs. Je suis sûr que la Saskatchewan et l'Ontario appliquent des programmes semblables.

Cela dit, ça ne sera pas suffisant. Nous ne devrions pas nous nourrir d'illusions. Cela veut dire que la personne aura une deuxième occasion de se faire valoir, et je crois beaucoup à cela, l'ayant fait moi-même à quelques reprises. Cependant, ce sera une amélioration de 10 p. 100 seulement, peut-être. Ça ne touche pas au problème fondamental, soit que les étudiants doivent d'abord faire de bonnes études secondaires plus ou moins dans le délai habituel, de façon à pouvoir accéder aux études postsecondaires plus ou moins dans le délai habituel.

Il importe de soulever cette question, mais je m'inquiète du fait que, dans les discussions du genre, nous nous égarions souvent. Nous commençons par parler de financement des études postsecondaires, ce qui est important, mais ce n'est pas là le problème fondamental. Nous parlons d'éducation des adultes, ce qui est important, mais ce n'est pas le problème fondamental. Le problème fondamental tient à la période entre la maternelle et la 12e année, et au diplôme à aller chercher.

Vous m'avez posé une question à laquelle je n'ai pas répondu correctement. Dans ma dernière communication sur le sujet, intitulée Why We Need a First Nations Education Act, je formule une proposition particulière sur ce qu'il faut faire entre la maternelle et la 12e année. La proposition fait appel presque à tout le monde, depuis l'ex-ministre des Affaires indiennes et du Nord, M. Prentice, à la Commission royale sur les peuples autochtones. Nous avons tous souligné ce que M. Prentice a souligné lui-même : les étudiants des Premières nations sont les seuls à n'avoir pas de système d'éducation. Ma proposition porte sur la façon d'édifier un système d'éducation dans les réserves, l'élément manquant.

À mon avis, le financement est une question qui se pose, mais le financement doit être au service d'un système d'éducation efficace.

Le président : Quelqu'un souhaite-t-il aborder le sujet? Il y a aussi la question des Autochtones relativement moins jeunes.

M. Sharpe : Nous avons fait une étude sur la façon de combler l'écart entre les résultats scolaires des Autochtones et ceux des autres membres de la population. Il est extrêmement difficile d'y arriver si on s'attache uniquement aux jeunes qui arrivent dans le réseau. Littéralement, ce sont des générations qu'il faut pour y arriver en procédant de cette façon. Je ne sais pas jusqu'à quel âge les gens peuvent retourner à l'école, mais nous pouvons en faire beaucoup pour combler l'écart du point de vue de l'éducation en incitant les jeunes dans la vingtaine à reprendre leurs études.

Il est difficile de le faire, et il existe des initiatives à cet égard, mais ce doit être un élément clé de l'équation. Je crois que l'effet sera supérieur à 10 p. 100. À mon avis, améliorer les résultats scolaires des Autochtones relativement plus âgés constitue un élément clé pour combler l'écart en question.

M. Snow : J'ai oublié de mentionner une chose au sujet de notre proposition : pendant dix ans après l'achèvement des études secondaires, le compte d'épargne serait accessible à l'étudiant, qui, rendu là, serait un jeune adulte, bien entendu, et à ce moment-là les fonds inutilisés seraient transférés dans le compte d'autres étudiants. Évidemment, ça peut être 10 ans ou un autre nombre d'années. Comme M. Sharpe le disait, jusqu'à quel âge peut-on aller? Ce n'est pas vraiment clair, mais nous croyons que ce serait là un bon âge à retenir.

Pour réfuter certaines des critiques que notre rapport a suscitées, j'aimerais souligner que nous n'écartons pas la possibilité de programmes complémentaires. Aucun élément de notre rapport ne fait obstacle à un système d'enseignement efficace de la maternelle à la 12e année ou à un quelconque programme préparatoire à l'université/au collège qui existe actuellement pour permettre aux jeunes Autochtones de progresser et de fréquenter des universités et des collèges.

Notre programme peut très bien coexister avec d'autres types de programmes efficaces, comme la formation des adultes.

Le sénateur Seidman : C'est très intéressant, monsieur Snow. Les jeunes sont admissibles au programme pendant 10 ans, à partir de quel âge?

M. Snow : Selon notre proposition, ce serait à partir de l'obtention de leur diplôme d'études secondaires, ce qui veut généralement dire de 17 à 19 ans, selon l'âge de l'étudiant au moment où il termine ses études secondaires. Le compte demeurerait au nom du jeune pendant 10 ans après l'obtention de son diplôme d'études secondaires.

Le sénateur Seidman : Souvent, les jeunes décident de retourner aux études pour avoir une seconde chance dans les cinq ou six ans suivant l'obtention de leur diplôme d'études secondaires. Cependant, il y a bien sûr des adultes beaucoup plus vieux qui décident de retourner aux études. Cela est intéressant parce que les obstacles financiers sont évidemment beaucoup plus importants pour les adultes plus âgés. Ils ont souvent une forme de revenu quelconque qu'ils doivent sacrifier pour retourner aux études.

Mme Preston : En ce qui concerne l'accès aux études postsecondaires pour les apprenants adultes, un certain nombre de personnes autochtones âgées de 40 ans et plus sont grands-parents. Les services de garde d'enfants sont donc un autre facteur important qu'il faut envisager.

Les programmes de transition, comme les programmes de tutorat et les ateliers supplémentaires pour les adultes âgés qui entament des études postsecondaires sont importants. Une forme de guérison est également nécessaire. Cela s'applique aux adultes autochtones âgés, de même qu'aux Autochtones en général. Compte tenu des statistiques inquiétantes que j'ai fournies, je crois qu'un quelconque type de programme de guérison pour ces personnes doit faire partie intégrante d'un programme d'études postsecondaires pour les Autochtones.

Le président : Pour ceux qui nous regardent et qui se demandent pourquoi tous ces gens portent les mêmes cravates et les mêmes foulards, j'aimerais vous informer que nous soulignons aujourd'hui les efforts déployés en vue de collecter des fonds pour la recherche contre le cancer de la prostate.

Le sénateur Ogilvie : Monsieur Snow, je trouve votre proposition très intéressante. Non seulement votre proposition est-elle bien ciblée, mais, si vous réussissez, elle pourrait avoir des répercussions sur un très grand nombre d'autres problèmes, y compris la notion de démocratie telle que nous la pratiquons dans divers domaines. Je suppose que chaque étudiant pourrait choisir l'établissement d'enseignement postsecondaire qu'il souhaite fréquenter.

M. Snow : Certainement, oui.

Le sénateur Ogilvie : Il s'agirait évidemment d'un modèle ou d'un exemple à suivre en ce qui concerne le financement des études postsecondaires axé sur l'étudiant, plutôt que sur l'établissement. L'étudiant devrait recevoir une subvention qui lui permettra de payer ses frais de scolarité quel que soit l'établissement qu'il choisisse. Ainsi, il pourra prendre les fonds et choisir l'établissement qui lui convient. Souhaitez-vous commenter cela?

M. Snow : Bien sûr. Votre point est intéressant. Nous n'avons pas prévu cette réaction à notre travail, mais c'est probablement celle que nous avons le plus souvent reçue, que ce soit par courriel, sur le babillard ou dans les lettres à la rédaction. Les gens ont été nombreux à dire qu'il s'agissait d'une excellente idée qui devrait également s'appliquer aux autres étudiants.

Je ne peux pas parler au nom de Calvin Helin ou de l'institut, mais, à mon avis, il s'agit d'une excellente idée. Cela inciterait les universités et les autres établissements postsecondaires à attirer les étudiants parce que, si ces établissements ne sont pas choisis par les étudiants, ils n'atteindront pas leurs quotas. En somme, je crois effectivement qu'il s'agit d'un excellent modèle et d'un exemple à suivre, et que, si ce système était mis en place et fonctionnait, il s'agirait d'un excellent moyen de financer les études.

Le sénateur Ogilvie : Merci. Il y a un large éventail d'options d'apprentissage au niveau postsecondaire. M. Mendelson a souligné que, dans le secteur des études postsecondaires, les membres des Premières nations sont plus nombreux dans les collèges. C'est ce que j'ai cru comprendre. J'aimerais faire une observation. Vous avez tendance à parler de la valeur de l'enseignement universitaire. Je voudrais toutefois souligner, comme je l'ai fait dans une autre séance, que nous ne valorisons pas suffisamment les autres formes d'enseignement postsecondaire au Canada. Je ne veux aucunement critiquer l'idée selon laquelle l'enseignement universitaire est d'une grande valeur, mais je crois que nous sous-estimons les autres secteurs à notre détriment et au détriment d'un grand nombre d'enjeux.

J'ai apprécié tous vos exposés. J'ai tout compris. Vos commentaires correspondent aux enjeux globaux que nous pouvons observer dans toutes les sphères de la société en ce qui concerne l'enseignement postsecondaire, mais je crois qu'il faut davantage cibler cet autre type d'enseignement postsecondaire. Merci.

M. Sharpe : Je ne crois pas qu'on ait voulu sous-estimer l'enseignement collégial. Cependant, c'est à l'université que l'on observe le plus grand écart entre les Autochtones et les Canadiens non autochtones. Le taux de participation globale des Autochtones dans les collèges est presque équivalent à celui des Canadiens non autochtones. En ce qui concerne l'amélioration du taux de participation autochtone dans les établissements postsecondaires, c'est à l'université qu'il y a la plus grande lacune.

Le sénateur Ogilvie : J'apprécie votre commentaire, mais une partie de notre étude montre clairement que nous avons un problème relatif à l'enseignement postsecondaire dans tous les secteurs de la société. Dans ce contexte général, quand nous parlons d'enseignement postsecondaire, nous valorisons souvent l'enseignement supérieur. Je connais les statistiques que vous mentionnez. Cela ne veut pas dire que nous n'avons pas un problème social très grave parce que nous ne réussissons pas à faire participer de plus en plus de Canadiens aux études et à la formation postsecondaires. C'est ce que je voulais dire à ce sujet. Nous avons tendance à accorder une plus grande valeur à l'enseignement universitaire dans nos discussions. C'est seulement ça que je voulais dire.

M. Mendelson : J'aimerais rapidement ajouter quelque chose. Il est important de désagréger certaines des données par groupe d'identité autochtone. Ce faisant, on constate que les Indiens de l'Amérique du Nord, comme nous les appelons, c'est-à-dire les membres des Premières nations, ne réussissent pas aussi bien dans les collèges communautaires que les Métis. C'est le haut niveau de réussite des Autochtones qui ne font pas partie des Premières nations, comme les Inuits, qui a donné lieu à une équivalence des taux de réussite dans les collèges communautaires. Parfois, il faut creuser un peu pour avoir un véritable aperçu de certains problèmes.

Le sénateur Callbeck : Je vous remercie tous d'être venus aujourd'hui. Monsieur Mendelson, vous avez dit que les Autochtones ne finissent pas leurs études secondaires et que cela constitue l'obstacle le plus important. Puis, vous avez dit que votre solution ou votre proposition consiste à implanter un système d'enseignement dans les réserves. Qu'y a-t-il dans les réserves à l'heure actuelle? Chaque réserve décide-t-elle de son système d'enseignement?

M. Mendelson : Oui. Il y a ce que j'appelle le modèle de l'école du village. Je ne suis pas le seul à le dire, soit dit en passant. Dans la mesure où ces questions ont été étudiées, et la Commission royale a dit la même chose, sur les réserves, nous avons ce qui existait jadis dans les sociétés rurales de tout le Canada, c'est-à-dire une école qui est essentiellement dirigée par le maire. Peut-être vous souvenez-vous de cette époque. Je suis assez vieux pour me souvenir de certains changements qui ont eu lieu quand on a regroupé les écoles rurales malgré les objections d'un grand nombre de personnes. Je suis de Winnipeg, au Manitoba.

Dans chaque province, nous avons réorganisé nos arrondissements scolaires dans les communautés rurales et créé des arrondissements unifiés. La taille de ces arrondissements et le nombre de personnes compétentes devaient être suffisants pour que des directeurs soient nommés parmi les enseignants et pour que l'on puisse créer un effectif d'enseignants efficace. Au bout du compte, ce qui importe, c'est la qualité de l'enseignement. C'est l'enseignant dans la salle de classe qui compte, mais pour qu'il y ait un bon enseignement dans la salle de classe, il faut une structure solide au-dessus de tout ça, et c'est ce que nous n'avons pas. Le modèle d'enseignement chez les Premières nations est identique à celui que nous avons rejeté pour les autres Canadiens il y a environ 70 ou 80 ans.

Des bandes partout au Canada mettent en œuvre de nombreuses initiatives. Elles essaient de faire quelque chose. Je crois avoir compté quelques douzaines d'initiatives distinctes lancées par des bandes qui tentaient de se regrouper et de créer un meilleur système d'enseignement. Il est très difficile pour elles de le faire dans le cadre du système de financement actuel de l'enseignement des Premières nations.

En fait, AINC essaie de les aider. Il est très difficile pour le ministère d'aider les bandes à améliorer leur système d'enseignement de manière efficace en raison de la structure en place. C'est la raison pour laquelle je soumets une proposition pour tenter de structurer un système qui est compatible avec l'autorité et les responsabilités des Premières nations, mais qui reflète le meilleur système scolaire possible.

Le sénateur Callbeck : Autrement dit, à l'heure actuelle, au sein d'une province, s'il y a cinq différentes réserves, il y a cinq différents systèmes?

M. Mendelson : Il y a environ 608 réserves, selon les dénombrements, et les systèmes sont incroyablement hétérogènes. En Nouvelle-Écosse, les Mi'kmaq ont une association de huit écoles, et ils la dirigent comme une commission scolaire. Cette association a connu beaucoup de hauts et de bas, principalement des bas, mais je crois qu'elle fonctionne bien maintenant. Il existe des exemples de regroupements qui fonctionnent, mais, en général, les bandes individuelles dirigent une ou deux écoles.

Le sénateur Callbeck : Madame Preston, vous avez parlé de la nécessité de former plus d'Autochtones afin qu'ils enseignent dans leurs propres écoles. Fait-on quelque chose dans ce sens à l'heure actuelle?

Mme Preston : Je n'ai pas de données comparatives pour répondre à cette question. Je sais qu'il y a un certain nombre de programmes de formation pour les enseignants indiens en Saskatchewan. C'est ce qu'on appelle les ITEP. Il y aussi les SUNTEP pour les Métis. À l'Université de la Saskatchewan, les taux de persévérance scolaire sont élevés. Il y a un sentiment d'appartenance dans le bureau. On organise de grandes célébrations quand les enseignants autochtones obtiennent leur diplôme. Je vois des progrès.

Le sénateur Callbeck : Vous avez énuméré quatre obstacles. Étaient-ils en ordre de priorité?

Mme Preston : Je suis d'accord avec M. Mendelson en ce qui concerne le premier obstacle aux études postsecondaires. L'obtention d'un diplôme d'études secondaires est essentielle, que vous fréquentiez un collège ou une université par la suite. Je considère donc qu'il s'agit de l'obstacle le plus important. Je n'ai pas présenté les autres dans un ordre particulier.

Le sénateur Callbeck : Monsieur Sharpe, vous avez suggéré qu'on examine un document sur la situation financière des étudiants autochtones.

M. Sharpe : Oui. AINC rassemble des données administratives sur les programmes. Cette année, je travaille avec AINC sur une étude pour le Conseil national de développement économique des Autochtones. Nous avons eu accès à un certain nombre de documents. Ces statistiques sont utiles, car elles nous permettent de déterminer le nombre d'étudiants qui reçoivent un financement. L'aspect financier a moins d'importance que le nombre d'étudiants. Le comité gagnerait à examiner ces données sur le plan du programme de recherche. À ma connaissance, l'information n'a pas encore été rendue publique, mais elle devrait l'être.

Le sénateur Callbeck : Monsieur Snow, vous avez dit que les étudiants de l'Ontario reçoivent deux fois plus de financement que ceux de la région de l'Atlantique. Est-ce à cause du conseil de bande?

M. Snow : La raison n'est pas évidente. Ces données proviennent d'une vérification interne réalisée au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien en 2009. Je n'ai pas les chiffres précis, mais, dans la cohorte des 18 à 34 ans, les Indiens inscrits de l'Ontario qui faisaient des études recevaient environ 1 600 $, tandis que ceux de la région de l'Atlantique ne recevaient que 800 $. Bien sûr, même le montant de 1 600 $ n'est pas très élevé, et seul un petit pourcentage des étudiants ont touché l'argent au bout du compte, mais c'est ce nombre d'étudiants qui figure dans la vérification du ministère. Il s'agit de l'argent que le ministère a remis aux bandes.

Le sénateur Callbeck : Vous dites que les conseils doivent rendre compte au ministère seulement du nombre d'étudiants qui reçoivent une aide et non du montant qui leur est donné et ainsi de suite. Comment le gouvernement détermine-t-il combien d'argent il donnera aux conseils?

M. Snow : Il se fonde sur les rapports qui indiquent combien d'étudiants il y avait, combien d'argent était nécessaire pour financer ces étudiants et le nombre projeté d'étudiants pour l'année qui suit. Enfin, c'est ce que je crois. Peut-être que certains de mes collègues peuvent vous fournir plus de détails sur cette formule. Je me fonde surtout sur des renseignements qui proviennent des vérifications internes actuelle et précédente d'AINC.

En ce qui concerne l'information rendue publique ou celle contenue dans cette vérification, je n'ai vu nulle part une ventilation des fonds versés par une bande particulière. Nous savons seulement qu'environ 21 000 ou 22 000 étudiants ont reçu un financement en 2008. Nous ne savons pas combien ils étaient en Ontario, dans le nord de l'Ontario ou ailleurs.

Le sénateur Callbeck : En ce qui concerne les vérifications, la directrice générale de l'éducation pour AINC, Kathleen Keenan, a comparu en tant que témoin avant la prorogation. Mme Keenan a parlé d'un examen réalisé au sein du ministère pour évaluer les programmes d'enseignement pour lesquels des fonds avaient été engagés dans le budget de 2008. Le ministère a diffusé un rapport de vérification avec 14 recommandations, ce qui a mené à d'autres examens.

Savez-vous ce que sont ces recommandations? Si oui, pouvez-vous les commenter?

M. Snow : J'ai bien sûr lu les recommandations. Un grand nombre d'entre elles traitaient de la structure interne d'AINC. À mon avis, aucune des recommandations ne touchait au cœur du problème. Un bon nombre d'entre elles étaient d'ordre général. Je parle de la vérification de 2009. Elles traitaient de la nécessité d'améliorer la responsabilisation dans ce domaine. Il n'y avait pas beaucoup de détails. C'est à l'égard des propositions d'AINC sur la réforme du Programme d'aide aux étudiants de niveau postsecondaire que j'ai été le moins satisfait.

Le sénateur Mercer : Je remercie les témoins d'être venus aujourd'hui. J'aimerais répondre au commentaire du sénateur Ogilvie sur le fait que l'argent doit suivre les étudiants plutôt que l'établissement. En Nouvelle-Écosse, nous nous plaignons de cette situation depuis longtemps parce que nous avons plus d'étudiants par rapport à notre population que toute autre province au pays. Ils ne sont pas tous de la Nouvelle-Écosse. L'argent versé à un étudiant de l'Ontario va à l'Ontario, et non à la Nouvelle-Écosse, où il ou elle fait ses études. Cependant, ce n'est pas notre propos aujourd'hui.

Je n'ai vraiment qu'une seule question. Là où j'ai grandi, à Halifax, les Néo-Écossais africains composaient la minorité visible la plus importante. Je suis allé à l'école avec un grand nombre de jeunes hommes et de jeunes femmes de cette communauté. Quand nous allions à l'école, les enseignants me ressemblaient ou ressemblaient à ma sœur. Les Néo-Écossais africains n'avaient pas d'enseignants qui leur ressemblaient.

Pendant que j'écoutais ce que Mme Preston et les autres avaient à dire, je me suis dit que c'est la même situation dans les écoles autochtones. Ne devrions-nous pas nous assurer que les jeunes Autochtones ont des modèles de comportement et que les écoles dans tout le pays sont en mesure d'attirer les Autochtones?

L'autre jour, j'ai rencontré des étudiants en médecine de la Dalhousie Memorial Medical School. Ils ont parlé de l'importance d'approcher les collectivités autochtones et, dans le cas des étudiants de Dalhousie, les étudiants néo-écossais africains qui sont admissibles.

Ces établissements d'enseignement — écoles de droit, de médecine, ainsi de suite — refusent des milliers d'étudiants qui demandent à être admis. Pourtant, un grand nombre de ces étudiants répondent aux critères d'admission. Ne devrions-nous pas déployer des efforts pour nous assurer que les Autochtones sont admis dans les écoles de médecine et de droit, et, en particulier, dans les facultés d'enseignement, afin que les élèves puissent enfin avoir des enseignants qui leur ressemblent?

Il y a un certain nombre d'années, j'étais dans une école dans le centre de Winnipeg. Dans cette école, il y avait un programme qui m'a fasciné. Dans la salle de classe, il n'y avait pas que l'enseignant et les élèves. Il y avait aussi un aîné. J'ai rencontré l'administration et j'ai parlé à des enseignants qui étaient arrivés avant les aînés et qui étaient restés après leur intégration dans les salles de classe. Ils ont affirmé que c'était comme la nuit et le jour, comme si quelqu'un avait allumé la lumière. Tout d'un coup, les jeunes étaient motivés. Les enseignants ont également appris beaucoup de choses parce que les aînés reflétaient la culture des jeunes. Comme nous le savons tous, une grande partie de la culture autochtone est transmise oralement.

Ne s'agit-il pas d'un des enjeux majeurs dont nous devrions parler, c'est-à-dire la nécessité de créer de tels modèles de comportement? C'est ma seule question.

Mme Preston : Merci de ce commentaire. Je suis d'accord avec vous. Vous avez vous-même répondu à votre question. Ces modèles de comportement dans la salle de classe qui participent avec les étudiants sont très importants. Cela est encore une fois relié à la promotion des programmes de formation pour les enseignants indiens.

Vous avez parlé des aînés dans la salle de classe. Il y a quelques semaines, AINC et la province de la Saskatchewan ont financé une conférence autochtone à laquelle j'ai participé. J'ai rencontré une aînée et lui ai parlé pendant environ une heure. Elle travaillait dans les écoles. Quand elle a commencé ce travail, les élèves juraient beaucoup. Elle a demandé au directeur qu'il y ait une minute de silence pendant l'entrée des aînés dans les salles de classe. Beaucoup d'Autochtones ont un sentiment de respect particulier pour les aînés. Quand cette aînée est entrée dans les salles de classe, elle a parlé aux élèves du langage qu'ils utilisaient à l'école. En quelques semaines, ce type de langage avait disparu parce qu'un aîné plutôt qu'un enseignant en avait parlé aux élèves.

C'est un exemple de ce que vous disiez. Je suis d'accord. Il est essentiel de faire une place aux Autochtones en tant que modèles de réussite.

M. Mendelson : Je suis entièrement d'accord. Cependant, je dois apporter une précision.

Il est très difficile pour les écoles sur les réserves de retenir leurs meilleurs enseignants. Actuellement, il y a de moins en moins de financement, et les salaires des enseignants dans ces écoles sont moins élevés que ceux dans les écoles à l'extérieur des réserves. Les écoles dans les réserves ont de la difficulté à faire concurrence à presque tous les égards. Les réserves sont parmi les milieux où il est le plus difficile d'enseigner.

Les enseignants autochtones sont en demande, surtout quand ils ont de l'expérience. S'ils ont une famille, s'ils veulent toucher un salaire convenable comme tous les autres enseignants et que la commission scolaire de Winnipeg leur offre un poste intéressant avec une sécurité d'emploi et des possibilités d'avancement professionnel, il est très difficile pour eux de refuser. Il est important d'examiner le problème systémique dans les réserves.

Il y a un grand nombre d'initiatives qui existent à l'extérieur des réserves. À mon avis, un grand nombre de commissions scolaires publiques ont fait preuve d'innovation et de créativité. Somme toute, elles sont bien financées. Il y a d'excellents programmes à Winnipeg, à Vancouver et à la commission scolaire catholique d'Edmonton.

Le sénateur Mercer : La Fondation de Winnipeg a financé un autre bon programme.

M. Mendelson : Il est important d'obtenir la participation et le financement de la collectivité.

Le sénateur Champagne : Vos exposés étaient très intéressants. En tant que nouveau membre du comité qui n'a pas eu la chance d'entendre d'autres témoins au cours des derniers mois ou des dernières années, j'en ai beaucoup appris.

Je crois que nous reconnaissons tous qu'il est essentiel de voir les jeunes Autochtones finir leurs études secondaires. La situation des jeunes qui habitent sur les réserves est considérablement différente de celle des autres jeunes Autochtones.

Le projet de loi C-33, à la fin des années 1980, a redonné le statut d'Indien à de nombreuses femmes qui s'étaient mariées et qui habitaient à l'extérieur des réserves. Ces femmes et la génération suivante ont pu obtenir le statut d'Indien. Maintenant, nous parlons de leurs petits-enfants.

Prenons l'exemple d'un étudiant qui n'habite pas sur une réserve et qui a facilement obtenu son diplôme d'études secondaires parce que l'école n'était pas sur la réserve. Si l'élève veut aller à l'université, cet étudiant est admissible à un programme qui paiera ses frais de scolarité, son hébergement dans une bonne maison de fraternité de même qu'un grand nombre de ses dépenses. L'étudiant qui habite sur la réserve devra subir la politique du conseil de bande, qui déterminera s'il devrait recevoir de l'argent pour aller à l'université.

Un étudiant qui habite sur la réserve aurait-il avantage à s'installer à l'extérieur de la réserve pour pouvoir profiter de ce programme qui permet à certains Indiens inscrits à l'extérieur des réserves de faire des études gratuitement?

M. Snow : J'aimerais de nouveau faire référence à l'étude qu'ont réalisée sur des groupes R. A. Malatest et Blair Stonechild pour la Fondation canadienne des bourses d'études du millénaire. En préparant notre proposition, nous avons découvert que, le plus souvent, les Indiens inscrits qui n'habitaient pas sur des réserves étaient plus nombreux à dire qu'ils ne pouvaient pas recevoir de financement par l'entremise du Programme d'aide aux étudiants d'un niveau postsecondaire parce qu'ils ne vivaient pas sur des réserves. Pour recevoir un financement, il était important de connaître quelqu'un dans le conseil de bande, particulièrement s'il semblait ne pas y avoir beaucoup de fonds.

Je ne crois pas avoir entendu parler du contraire, c'est-à-dire d'étudiants qui n'habitent pas sur une réserve et qui sont, pour cette raison, avantagés en ce qui concerne le financement de leurs études. Quoi qu'il en soit, notre proposition rectifierait ces situations d'iniquité, qu'elles avantagent les jeunes sur les réserves ou ceux à l'extérieur des réserves. Tous les étudiants qui sont des Indiens inscrits, qu'ils vivent sur une réserve ou non, seraient en mesure de recevoir un financement, quelles que soient leurs relations avec le chef et le conseil.

Le sénateur Champagne : C'est une très bonne idée. Appliquons-la dès maintenant.

Le président : J'aimerais poser quelques questions à M. Snow sur sa proposition. Vous parlez des étudiants qui sont des Indiens inscrits. Cette proposition ne s'applique-t-elle pas aux Métis et aux Inuits?

M. Snow : C'est exact en ce qui concerne ce programme. Je crois qu'il serait une bonne idée d'appliquer la même politique aux étudiants métis ou inuits.

La majeure partie du financement accordée dans le cadre de ce programme était versée à des étudiants qui étaient Indiens inscrits. Le programme ne visait pas les autres étudiants autochtones. Nous avons tenté de déterminer comment nous pourrions financer les étudiants de manière plus efficace dans le cadre du programme en vigueur, compte tenu des niveaux de financement actuel et des étudiants ciblés par les programmes.

Dans une question antérieure, on a demandé si la proposition pourrait s'appliquer aux étudiants non autochtones. Elle pourrait également très bien s'appliquer aux Métis et aux Inuits.

Le président : Selon vos chiffres, chaque étudiant pourrait recevoir 25 000 $ dans le cadre de ce programme. Avec les intérêts, ce montant pourrait atteindre 30 000 $. Cela est-il suffisant pour couvrir le coût des études d'un étudiant?

Certains étudiants iront à l'université tandis que d'autres fréquenteront les collèges communautaires. Les coûts des déplacements et de l'hébergement varieront, particulièrement pour ceux qui viennent de régions éloignées, qu'il s'agisse de réserves ou non.

M. Snow : L'étudiant peut également avoir des enfants. Le cas échéant, ce montant pourrait ne pas suffire pour couvrir toutes les dépenses de l'étudiant pendant la période de deux à quatre ans où il fait ses études postsecondaires. Selon des données publiées par Statistique Canada il y a quelques semaines, les frais de scolarité dans les universités canadiennes sont de 4 900 $, en moyenne. À tout le moins, ce montant couvrirait des frais de scolarité supérieurs à la moyenne pendant une période de quatre ans.

Alex Usher, qui a également écrit un rapport sur le Programme d'aide aux étudiants de niveau postsecondaire, a critiqué notre rapport. Il a suggéré certaines politiques en vue d'une réforme. Il a affirmé que les fonds versés dans le cadre de ce programme ne sont pas du tout suffisants, particulièrement pour les étudiants autochtones qui ont des enfants. Quand l'on tient compte des frais de subsistance, et cetera, il est clair que ces montants ne suffisent pas. Il a également critiqué le fait que notre proposition pourrait mener à une hausse de coûts.

D'aucuns affirment que l'on devrait augmenter le financement afin de couvrir tous les frais de subsistance de chaque étudiant qui est un Indien inscrit ou un Autochtone. C'est une position qu'il est possible d'adopter. Cependant, si l'on ne veut pas que les coûts augmentent, je préfère une proposition qui fournit à chaque Indien inscrit aux études les fonds nécessaires pour payer ses frais de scolarité pendant quatre ans à un programme qui couvre tous les frais de scolarité et les frais de subsistance de certains étudiants et qui en laisse d'autres en plan.

Le président : Dans le cadre du Programme d'aide aux étudiants de niveau postsecondaire actuel, quel est le montant moyen versé aux étudiants, par rapport à votre proposition? Je sais que vous critiquez le programme. Il y a un plafond, et de nombreuses personnes ne reçoivent rien. Mis à part ces facteurs, comment le montant versé à chaque étudiant dans le cadre de votre proposition se compare-t-il au montant actuel?

M. Snow : Ma seule source à ce sujet est la réponse d'Alex Usher à notre proposition. Il a indiqué que chaque étudiant recevait en moyenne environ 13 000 $.

Je ne sais pas où il a obtenu ses données, mais il a écrit son rapport sur la réforme du Programme d'aide aux étudiants de niveau postsecondaire pour le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Même si je ne suis pas d'accord avec M. Usher et que je m'oppose à sa réponse à notre proposition, je présume que ce chiffre est à peu près exact.

Le président : Il s'agit d'une comparaison valide, selon vous, en ce qui concerne les coûts qui seraient couverts dans le cadre des deux propositions? Vous dites que la vôtre couvrirait presque le double des coûts.

M. Snow : On parle ici de 13 000 $ par année. Au bout d'un diplôme de quatre ans, c'est 52 000 $, ce qui représente le double des coûts.

Le président : D'accord, je comprends. Pour finir, vous avez critiqué les bandes et leur administration des coûts, mais quelqu'un doit administrer le programme. Comment devrait-il être administré, selon vous?

M. Snow : C'est l'une des questions qu'on nous pose le plus souvent. Selon notre proposition, le gouvernement fédéral verserait les sommes dans des comptes administrés par des établissements financiers enregistrés, un peu comme d'autres comptes pour les particuliers, c'est-à-dire les REEE, les REER et les REEI.

Il y aurait un arrangement avec l'établissement pour que l'argent soit directement déposé dans le compte tant et aussi longtemps que l'étudiant présente une preuve de son inscription dans un programme, et chaque mois, l'étudiant pourrait en retirer un montant précis.

Notre proposition a été critiquée par certaines personnes qui affirment qu'il s'agirait d'un cadre administratif très difficile à administrer. J'aimerais souligner que les universités administrent actuellement un grand nombre de bourses et de subventions qui proviennent de sources extérieures.

Par exemple, pour les subventions versées par le Conseil de recherches en sciences humaines, le CRSNG et IRSC — c'est-à-dire les trois principaux organismes subventionnaires fédéraux — il existe un cadre administratif, et cet argent est administré par les universités. L'argent pour les frais de scolarité est versé directement aux universités, et un montant X par mois est retiré du compte, à condition que l'étudiant soit toujours inscrit à l'université.

C'est l'un des exemples que je connais, en tant qu'étudiant au niveau postsecondaire. Je connais d'autres personnes qui sont dans la même situation. Nous sommes bien sûr ouverts à tout autre arrangement qui fonctionne.

Le président : Vous êtes évidemment d'avis qu'il s'agit d'un meilleur moyen d'administrer cet argent; c'est une option plus ouverte et plus transparente qui est axée sur l'étudiant, plutôt que sur le conseil de bande. Toutefois, nous voulons également que les Autochtones soient plus nombreux à faire des études postsecondaires. Comment croyez-vous que votre programme permettra de réaliser cet objectif?

M. Snow : Comme je l'ai dit plus tôt, notre proposition ne réglera pas tous les problèmes de l'enseignement de la maternelle à la 12e année. Néanmoins, il est important de souligner que les étudiants auront une motivation financière pour terminer leurs études, de la 6e à la 12e années, puisqu'ils sauront que 3 000 $ seront versés dans leur compte et puisqu'ils seront certains d'avoir au moins 25 000 $ pour poursuivre leurs études postsecondaires au moment de recevoir leur diplôme d'études secondaires. Je crois qu'il s'agit d'une mesure incitative très motivante.

L'étude que j'ai déjà mentionnée à quelques reprises a révélé que, en partie, certains étudiants ne voulaient pas faire d'études postsecondaires parce qu'ils connaissaient des gens qui avaient essayé d'obtenir du financement et parce qu'ils ne croyaient tout simplement pas qu'ils en recevraient.

Le président : C'est intéressant.

Le sénateur Callbeck : Est-ce que vous dites que votre proposition s'appliquerait aux Métis?

M. Snow : Non, madame le sénateur. Les Métis ne sont pas visés par notre proposition. Notre proposition concerne les Indiens inscrits. Le Programme d'aide aux étudiants de niveau postsecondaire ne s'applique pas aux Métis.

Le sénateur Callbeck : Avez-vous des suggestions pour faire augmenter le taux de participation des Métis à l'université?

M. Snow : Je crois que notre proposition constitue un bon cadre de travail pour les Métis ou tout autre groupe d'étudiants que le gouvernement fédéral pourrait décider d'aider.

Le sénateur Callbeck : Y aurait-il d'autres témoins qui aimeraient commenter la proposition de M. Snow?

M. Mendelson : Il y a des questions techniques que j'aimerais aborder, mais je ne le ferai pas tout de suite. Je ne suis pas entièrement contre la proposition en elle-même. Je crois qu'elle est intéressante, innovatrice et utile. Toutefois, l'histoire coloniale du Canada a plus de 100 ans, et si nous avons appris une chose, c'est qu'il ne faut pas utiliser la force et la coercition. Nous croyons tous qu'il s'agit d'une bonne idée, alors nous allons tout changer et éliminer le programme qui versait des fonds par l'entremise des bandes parce que cette nouvelle idée est bien meilleure. Vous n'avez rien à dire. C'est nous qui tenons les cordons de la bourse. Nous prendrons la décision. Vous n'avez pas voix au chapitre. Ce programme est bien meilleur. Vous n'avez pas été responsables, et c'est bien dommage. Vous n'avez aucun pouvoir.

Je crois qu'il s'agirait d'une énorme erreur. La relation entre les Premières nations et le gouvernement du Canada en souffrirait sans aucun doute. Une telle mesure effacerait une part des progrès que les Premières nations ont faits pour prendre leur propre avenir en main.

J'ai beaucoup de bonnes idées pour une meilleure gouvernance des Premières nations. En fait, j'ai des idées pour améliorer la gouvernance du Canada, mais je ne peux pas les imposer. Malheureusement, le gouvernement du Canada, lui, peut imposer tout ce qu'il veut.

Même s'il s'agit d'une très bonne idée — et c'est une bonne idée — ne l'imposez pas. Je suggérerais qu'on établisse un programme comme celui-ci et qu'on laisse les bandes voter, ou même qu'on demande un vote.

Il faut qu'il y ait proportionnalité pour les questions qui se rapportent à la Charte et aux autres questions de droit. Il y a des situations dans lesquelles une intervention coercitive doit être utilisée à l'égard d'une Première nation, mais cette intervention doit être proportionnelle au problème. Il doit s'agir d'un problème très grave, comme l'envahissement d'une réserve par un groupe criminel.

On ne peut pas tout simplement s'imposer en tant que colonialistes et déclarer qu'on a une meilleure idée. Je trouve que la proposition comporte également certains problèmes techniques, mais mon objection principale est celle-là.

Le président : Monsieur Snow, souhaitez-vous répondre à M. Mendelson?

M. Snow : Selon moi, notre programme n'est pas plus coercitif que le programme qui existe actuellement. Le gouvernement fédéral donne 314 millions de dollars aux Premières nations et leur dit comment ils doivent les dépenser. Le gouvernement donne l'argent aux bandes individuelles. Il décide combien d'argent chaque bande recevra et exige que des rapports annuels soient remis pour que le financement soit renouvelé.

Il se trouve que le processus de reddition de comptes exigé par l'entremise de ces rapports n'est pas rigoureux. On pourrait bien sûr imposer des exigences plus rigoureuses aux bandes, mais il s'agira toujours d'un programme que le gouvernement fédéral considère comme discrétionnaire. Il le considère comme un programme facilement modifiable, et le nôtre le serait également.

En ce qui concerne les Autochtones individuels, je ne crois pas qu'il soit coercitif de leur donner 25 000 $ ou plus et de leur dire qu'ils peuvent s'en servir s'ils le souhaitent. S'ils ne veulent pas de cet argent, quelqu'un d'autre s'en servira.

Par conséquent, je ne suis pas d'accord; mon coauteur, Calvin Helin, est lui-même membre d'une Première nation, et il croit qu'il s'agit d'une bonne proposition — évidemment, puisqu'il en est le coauteur. Je ne pense pas que les relations entre les Premières nations et le reste du Canada en souffriraient nécessairement.

À l'émission The Current, Shawn Atleo a exprimé ses préoccupations relatives à notre rapport, mais il a refusé d'affirmer catégoriquement qu'il n'aimait pas notre proposition. Bien sûr, les nombreux étudiants autochtones qui nous ont appuyés, qui nous ont écrit des lettres et qui ont commenté notre proposition dans des lettres aux rédacteurs en chef ont dit que notre idée était bonne. Selon moi, il y a de nombreux Autochtones qui considéreraient ce programme comme une avancée en ce qui a trait aux relations avec le reste du Canada.

Le président : Il y aurait sans aucun doute des consultations, quelle que soit la direction que nous décidons d'adopter.

Le sénateur Martin : Je suis désolée. J'ai été retenue à la Chambre et je suis arrivée après la fin de vos exposés. J'ai l'intention d'intervenir malgré le fait que je n'ai pas tout entendu, mais j'ai une question pour M. Snow et un commentaire pour tous les témoins. Premièrement, je voulais vous remercier.

Dans vos réponses, j'ai détecté de l'espoir et j'ai compris qu'il était possible de trouver des solutions fondées sur les ressources qui existent déjà. La notion de mentorat ou de modèles de comportement que vous avez mentionnée existe depuis toujours. Comme le sénateur Mercer le disait, nous savons qu'il est important pour les jeunes d'avoir des modèles de comportement qui leur ressemblent. Quand on est témoin de ce genre de chose, ça nous marque. C'est très important.

Monsieur Mendelson, j'ai hâte d'en lire davantage sur cette loi sur l'enseignement des Autochtones ou de vous en parler. J'ai enseigné pendant 21 ans, et je comprends l'importance du système. Je trouve qu'il est ironique et malheureux que les écoles régulières à l'extérieur des réserves en fassent davantage pour ces élèves autochtones que, peut-être, les écoles sur les réserves.

Les ressources existent, et il faut peut-être, comme vous le dites, un cadre ou un système qui fonctionne tout en respectant les différences culturelles et les traditions des gens. Ma question s'adresse à M. Snow.

Je suis désolée, parce que je n'ai pas lu tout votre rapport, mais je le connais. J'ai vu une partie de votre exposé sur CPAC, et je connais Calvin Helin.

Le programme dont vous parlez constitue-t-il un tout nouveau modèle ou a-t-il déjà été mis en œuvre et réussi ailleurs? Je ne sais pas s'il a eu des retombées positives dans le milieu des affaires ou dans d'autres pays. Dans ce cas, il pourrait peut-être fonctionner ici aussi. Savez-vous s'il s'agit d'un tout nouveau programme?

M. Snow : Je ne connais pas de programme qui s'applique à tout un groupe, qu'il s'agisse d'un groupe régional ou ethnique, et qui accorde un financement à chaque étudiant dans un groupe particulier. Ce programme serait facile à mettre en œuvre en partie parce que les Indiens inscrits au Canada sont inscrits en vertu de la Loi sur les Indiens, et il y aurait donc une liste d'étudiants admissibles au financement.

Cependant, Calvin Helin traite abondamment de ce sujet dans son livre. L'école secondaire Grandview, à Vancouver, qui comptait, parmi ses élèves, de 40 à 50 p. 100 de membres de minorités ethniques, dont une grande proportion d'Autochtones, a introduit un programme d'incitations financières. La directrice de l'école à l'époque a signé à l'appui de notre rapport. Dans sa déclaration, elle a affirmé avoir été témoin de l'efficacité de ces mesures incitatives pour les élèves autochtones au Canada, en particulier. Les élèves savent que, s'ils terminent leur année d'études, s'ils font leurs travaux, ils seront récompensés, et ça fonctionne. Je crois que c'est la raison principale pour laquelle elle appuie notre rapport.

Comme toute orientation novatrice proposée, on doit en faire l'essai à un moment donné, même si l'initiative proposée n'est pas répandue.

M. Mendelson : J'aimerais faire un dernier commentaire parce que je ne veux pas sembler trop négatif à l'égard de M. Snow et d'autres. Je crois qu'il s'agit d'une bonne proposition qu'il vaudrait la peine d'explorer. J'aimerais que certaines bandes l'adoptent, et, dans les faits, je crois qu'elles le feraient. Toutefois, je m'oppose à l'annulation du programme actuel parce que ce genre de mesure serait considérée comme coercitive, et le budget donne à penser que c'est ce qui se passera.

J'ai un dernier commentaire. Je ne veux pas donner la mauvaise impression. Le système d'enseignement de la maternelle à la 12e année sur les réserves est actuellement sous-financé. Pour que ces écoles rattrapent les autres, il faut plus d'argent. Je ne parle pas de milliards. Je parle de centaines de millions. Ce n'est pas rien, mais ce n'est pas exagéré. Je suis d'accord avec M. Sharpe quand il dit que nous devons améliorer les résultats scolaires des élèves autochtones et qu'il s'agit du meilleur investissement que nous puissions faire actuellement pour l'avenir du Canada. Or, il faut plus d'argent.

Mme Preston : Pour conclure, j'aimerais rappeler à tout le monde qu'il faut également mettre l'accent sur la maternelle à la 12e année. Cela est essentiel si on veut faire augmenter le taux de participation aux études postsecondaires.

Le président : Je vous remercie tous de vos exposés et de vos réponses à nos questions. Vous nous avez aidés à comprendre le problème de l'accès aux études postsecondaires, particulièrement pour les Autochtones.

Honorables sénateurs, la séance est levée.

(La séance est levée.)


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