Aller au contenu
SOCI - Comité permanent

Affaires sociales, sciences et technologie

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie

Fascicule 6 - Témoignages du 12 mai 2010


OTTAWA, le mercredi 12 mai 2010

Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit aujourd'hui, à 16 h 17, pour étudier une proposition de Santé Canada soumise au Parlement au sujet des frais d'utilisation et des normes de service pour les programmes des médicaments pour usage humain et des matériels médicaux, datée avril 2010, conformément à la Loi sur les frais d'utilisation, L.C. 2004, ch. 6, par. 4(2).

Le sénateur Kelvin Kenneth Ogilvie (vice-président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le vice-président : Je vous souhaite la bienvenue au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.

[Traduction]

Je vais inviter chaque sénateur à se présenter en commençant par ma gauche.

[Français]

Le sénateur Champagne : Je suis Andrée Champagne, du Québec.

Le sénateur Eaton : Je suis Nicole Eaton, de l'Ontario.

[Traduction]

Le sénateur Martin : Je m'appelle Yonah Martin et je suis de la Colombie-Britannique.

Le sénateur Raine : Je m'appelle Nancy Greene Raine, de la Colombie-Britannique.

Le sénateur Seidman : Judith Seidman, de Montréal.

Le sénateur Merchant : Je m'appelle Pana Merchant, de la Saskatchewan.

Le sénateur Dyck : Je suis le sénateur Lillian Dyck, également de la Saskatchewan.

Le sénateur Cordy : Je m'appelle Jane Cordy et je suis de la Nouvelle-Écosse.

Le vice-président : Je m'appelle Kelvin Ogilvie et je présiderai la séance d'aujourd'hui.

Nous entamons notre étude de la proposition de Santé Canada soumise au Parlement au sujet des frais d'utilisation et des normes de service pour les programmes des médicaments pour usage humain et des matériels médicaux.

Nous accueillons trois témoins sous la direction de la sous-ministre adjointe. Je les invite d'ailleurs à se présenter à commencer par Mme Ballantyne.

Meena Ballantyne, sous-ministre adjointe, Direction générale des produits de santé et des aliments, Santé Canada : Je m'appelle Meena Ballantyne et je suis sous-ministre adjointe à la Direction générale des produits de santé et des aliments qui se charge de réglementer toutes sortes de produits de santé et d'aliments.

Dre Supriya Sharma, directrice générale, Direction des produits thérapeutiques, Direction générale des produits de santé et des aliments, Santé Canada : Je m'appelle Supriya Sharma et je suis directrice générale des Produits thérapeutiques. Notre direction est chargée de réglementer les drogues, les produits pharmaceutiques et les instruments médicaux.

[Français]

Étienne Ouimette, directeur par intérim, Division des politiques stratégiques horizontales, Santé Canada : Mon nom est Étienne Ouimette, je suis le directeur de l'intiative de recouvrement des coûts de la direction générale.

[Traduction]

Le vice-président : Nous allons donc céder la parole à nos témoins. J'ai cru comprendre que c'est Mme Ballantyne qui fera l'exposé et qu'à l'étape des questions, elle désignera celui de ses collaborateurs qui nous répondra.

Mme Ballantyne : Je vous remercie de me permettre de donner un aperçu de la proposition de Santé Canada visant à actualiser les frais d'utilisation actuels imputés à l'industrie pour les activités de réglementation reliées aux médicaments et aux matériels médicaux. Ces frais d'utilisation sont imposés à l'industrie aux termes de la Loi sur les frais d'utilisation de 2004.

Comme le prescrit la Loi sur les aliments et drogues, la Direction générale des produits de santé et des aliments de santé est responsable de la réglementation de la sécurité, de l'efficacité et de la qualité des produits thérapeutiques. Pour vous donner une idée de la gamme des produits que nous réglementons, sachez qu'on retrouve les médicaments pour traiter le cancer et les maladies cardiovasculaires, les vaccins, comme le vaccin contre la grippe (A) H1N1 qui a été homologué à l'automne dernier, et les appareils médicaux qui vont de la simple brosse à dents au stimulateur cardiaque en passant par les cotons-tiges. Nous réglementons tout un éventail de produits.

[Français]

Nos activités réglementaires incluent des évaluations scientifiques avant que des produits soit autorisés pour la vente, et leur surveillance une fois qu'ils sont mis à la disposition des Canadiens et des inspections pour vérifier la conformité de l'industrie.

[Traduction]

Depuis le milieu des années 1990, nous imputons des frais d'utilisation à l'industrie afin de financer une part des coûts de nos services. Les législateurs d'autres pays imputent eux aussi des frais pour des services similaires. Cependant, les frais imputés à l'industrie n'ont pas été mis à jour depuis qu'ils ont été établis il y a plus d'une décennie, malgré une augmentation des coûts.

Dans le contexte réglementaire actuel, Santé Canada doit composer avec un nombre accru de produits plus complexes. Ceci a imposé davantage de pressions sur les coûts de nos opérations et a imposé des pressions sur nos capacités d'assurer la prestation de services.

Depuis 2003, nos coûts accrus ont été compensés par le gouvernement, par le biais d'un financement à durée limitée dans l'attente de la modernisation des frais d'utilisation. Cependant, nous avons observé ces dernières années que l'absence d'une base de financement stable et prévisible nous a empêchés d'éliminer le travail en retard persistant relié aux soumissions. Ceci a comme conséquence des délais à l'accès à de nouvelles thérapies sûres et efficaces pour les Canadiens. De plus, le ratio initial de partage des coûts de 50-50 entre le gouvernement et l'industrie a été érodé au cours des années, au point où les payeurs de taxes financent 75 p. 100 de nos activités, comparativement à seulement 25 p. 100 par l'industrie.

Contrairement à nos partenaires internationaux, le Canada est le seul pays à ne pas avoir gardé ses frais à jour. En fait, les revenus des frais couvrent 100 p. 100 d'activités similaires en Australie et au Royaume-Uni, 60 à 70 p. 100 en Europe et 50 p. 100 aux États-Unis.

La vérificatrice générale a fait part de préoccupations dans ses rapports de 2004 et de 2006 au sujet de la capacité de Santé Canada à protéger la santé et la sécurité des Canadiens sous le cadre actuel de frais d'utilisation. La proposition de frais d'utilisation devant vous répond à ces aspects. Guidée par le processus décrit par la Loi sur les frais d'utilisation de 2004, cette proposition décrit des frais actualisés qui sont basés sur les coûts de nos activités réglementaires, qui sont liés à des normes de rendement et qui sont comparables sur le plan international. De plus, nous rapporterons annuellement au Parlement la façon dont nous utiliserons nos frais afin de démontrer notre imputabilité envers les Canadiens.

La proposition a été informée par des consultations exhaustives faites auprès de plus de 5 000 intervenants de l'industrie, des professionnels de la santé, des patients et des consommateurs ainsi que par les recommandations des comités consultatifs indépendants faites à notre égard.

Les frais actualisés rétabliraient le ratio de partage des coûts entre le gouvernement et l'industrie de 50-50 en augmentant nos revenus de 47 millions de dollars à 112 millions de dollars annuellement. En conservant les recettes provenant des frais révisés et nos niveaux actuels de crédit, nous serions mieux positionnés afin d'acquitter notre mandat de santé et de sécurité tout en respectant les normes de service bien établies.

Il est logique de moderniser les frais d'utilisation. Pour les Canadiens, cela signifie un meilleur accès à des thérapies sécuritaires et efficaces pour maintenir et améliorer leur santé. Pour l'industrie, cela signifie une meilleure prévisibilité du processus réglementaire.

Avant de répondre à vos questions sur la proposition, j'aimerais conclure par carrément me prononcer sur la perception que les payeurs de frais imputés dicteront les décisions de Santé Canada. Rien ne pourrait être plus loin de la réalité. Nous travaillons pour les Canadiens, pas pour les compagnies de médicaments et de matériels médicaux. La santé et la sécurité des Canadiens restent et continueront d'être notre priorité ultime à Santé Canada. Nous n'autoriserons aucun produit dont la sécurité, l'efficacité et la qualité ne peuvent être démontrées scientifiquement. Nos décisions sont rigoureuses et indépendantes et les frais sont payés même si un médicament ou un matériel médical n'est pas approuvé.

Notre engagement à réglementer dans le meilleur intérêt des Canadiens est important. Internationalement et ici à la maison, nous sommes des législateurs très respectés. Les Canadiens ne s'attendent à rien de moins et ne méritent rien de moins.

[Français]

Je vous remercie encore une fois de m'avoir donné l'occasion de vous présenter la proposition de frais d'utilisation de Santé Canada. Nous répondrons maintenant à toutes les questions que les membres du comité aimeraient nous poser.

[Traduction]

Le vice-président : Merci beaucoup. Nous allons tout de suite passer à nos questions.

Le sénateur Cordy : Merci de vous être déplacés pour nous renseigner au sujet du régime des frais d'utilisation.

Vous nous avez indiqué que vous réglementez tout un éventail de produits parmi lesquels vous avez mentionné les cotons-tiges. D'après des renseignements dont nous disposons, les frais concernant les désinfectants, les instruments médicaux et les médicaments, tous visés par le régime de frais d'utilisation, n'ont pas été modifiés depuis 10 ans. Comment déterminez-vous ces frais; est-ce que tous les organismes acquittent les mêmes frais ou est-ce que celui qui vend des cotons-tiges paie moins que celui qui vend un instrument médical ou un médicament?

Mme Ballantyne : Je vais inviter M. Ouimette à répondre à votre question pour ce qui est du barème.

Le barème est établi à partir de plusieurs variables. Il est fondé sur le risque ainsi que sur le temps que nous consacrons à examiner les produits. Les activités font l'objet d'un calcul du prix de revient en fonction du temps que nous consacrons à chaque étape.

M. Ouimette : À l'époque, quand nous avons consulté l'industrie, les frais étaient fixés en fonction de nos coûts de fonctionnement. Nous avons engagé une firme à contrat afin de déterminer les frais en question. Pour cela, nous avons appliqué un modèle de calcul du prix de revient de chaque activité. Sur une période d'une année financière, nous avons ainsi calculé le prix de revient de chaque activité de la direction générale ayant trait à la réglementation de la sécurité et de la qualité des produits.

Le sénateur Cordy : Avez-vous calculé les coûts de toutes ces activités par catégorie? Je ne comprends encore pas bien ce calcul.

Celui qui vend des cotons-tiges paie-t-il les mêmes frais que celui qui vend des instruments médicaux?

Vous avez dit que c'était fondé sur chaque activité. Regroupez-vous tout cela dans une seule et même catégorie et faites-vous ensuite un calcul de moyenne ou avez-vous différentes catégories?

Dre Sharma : L'éventail des produits et des types de présentations est énorme. Pour vous donner un exemple, prenons la catégorie des instruments médicaux. Celle-ci regroupe des centaines de milliers de produits.

Les cotons-tiges appartiennent à la 1re catégorie. Ils ne sont pas soumis à la procédure d'examen, mais nous veillons à ce que les lieux de production soient inspectés et nous exigeons des frais pour cela. Pour les stimulateurs cardiaques, par exemple, les fabricants doivent fabriquer leurs produits dans des installations appropriées, mais avant de les mettre sur le marché, ils doivent nous soumettre toutes les données exigées. C'est à partir de là que nous effectuons un examen complet du produit.

Dans ce cas, on parle d'un instrument de 4e catégorie, qui est la catégorie où le risque est le plus élevé, tandis que le coton-tige appartient à la catégorie des instruments à risques les moins élevés. Il y a aussi les instruments de 2e catégorie que nous ne soumettons pas à un examen complet, mais que nous agréons au vu d'une attestation de qualité que le fabricant nous soumet en même temps que d'autres renseignements. Et puis, il y a des instruments de 3e catégorie.

Nos activités sont fonction du risque que présente chaque produit. Si un prix de revient est établi pour chaque activité, c'est surtout le risque qui détermine les frais que nous imposons. Un produit présentant un risque faible est en général soumis à des frais d'utilisation faibles.

Le sénateur Cordy : Merci, c'était clair.

J'ai reçu des informations de l'Association canadienne des produits de consommation spécialisés et je suis certaine que tous les membres du comité ont reçu la même chose. Je vais vous lire ce que l'association m'a envoyé. Elle est favorable au principe du recouvrement des coûts mais ajoute : « Nous estimons que les frais doivent être le reflet des coûts associés au service offert et qu'ils ne doivent pas servir à subventionner d'autres produits entièrement différents ». L'association mentionne tout particulièrement les désinfectants ménagers et industriels.

Pouvez-vous réagir à la position de l'association? Elle estime déplacé de répartir les coûts sur l'ensemble des produits réglementés quand les désinfectants de base représentent moins de 1 p. 100 du total. Que devons-nous dire aux gens qui nous envoient ce genre d'informations?

Dre Sharma : Les désinfectants peuvent tomber dans la catégorie des drogues selon les allégations des fabricants. Pour les nettoyants ou désinfectants, il existe différentes catégories selon les allégations du fabricant. Si le désinfectant est présenté comme une drogue, nous devons le soumettre à un examen complet et, selon le niveau d'intervention nécessaire, la procédure est alors plus ou moins poussée. Je ne parlerai pas au nom de l'ACPCS, parce qu'elle est la mieux placée pour le faire.

Pour en revenir à ce que nous appelons le droit de vendre, chaque entreprise paie des frais moyens sur une base annuelle et nous avons normalisé les frais en question pour un certain nombre de catégories de produits. Ces frais couvrent en partie le fait que nous prenons en compte les présentations de produits et que nous nous occupons des notifications annuelles ainsi que de l'administration de la base de données publique; ces frais sont les mêmes pour tous les produits. Ils couvrent aussi d'autres activités, comme en cas de problème après la mise sur le marché parce qu'il est évident que, même si les désinfectants appartiennent à une catégorie où on enregistre généralement moins de complications que d'autres, à l'usage, ils ne sont pas complètement exempts de risques. Il y a déjà eu des problèmes de stérilisation.

Nous voulons réaliser un équilibre en imposant des frais distincts par catégorie et en regroupant ensuite toutes les catégories. Pour vous situer en contexte, sachez que les frais associés au droit de vendre ont augmenté, mais qu'ils sont demeurés collés à 720 $ pendant à peu près 10 ans. Ils viennent de passer à environ 3 000 $. Par rapport au prix des produits, ce n'est pas énorme, même si en pourcentage absolu l'augmentation peut sembler importante.

Le sénateur Cordy : Le groupe chargé des frais d'utilisation avait recommandé de maintenir les frais afférents au droit de revendre aux niveaux de 1995, mais vous n'avez pas repris cette recommandation même si je sais que vous avez suivi un grand nombre de recommandations de ce groupe. Pourquoi avez-vous accepté certaines recommandations mais pas celle-là?

Mme Ballantyne : C'est à cause de ce que la Dre Sharma vous a dit. Nous devons effectuer un certain travail pour chaque présentation que nous recevons. Il faut soumettre les produits à un certain examen parce que tous les produits présentent un risque. Le risque peut être faible, mais il n'y a pas de risque zéro, si bien que nous devons effectuer un certain contrôle. Certes, les nouveaux frais représentent une forte augmentation en pourcentage absolu, mais quand on considère qu'ils ont été d'environ 700 $ pendant 10 ou 15 ans, il était nécessaire d'implanter un barème de frais forfaitaires. Nous veillons à faire en sorte que des produits sûrs soient écoulés sur le marché et nous surveillons ensuite s'il y a des effets indésirables.

Par exemple, à l'automne dernier, à la faveur de la vaccination H1N1, nous avons dû examiner la situation et étudier les effets indésirables occasionnés par des désinfectants. Il y a toujours du travail à faire et nous ne pouvons prévoir ce qui va se passer dans l'année, raison pour laquelle nous devons maintenir notre surveillance après la mise sur le marché. Nous nous étions dit que, plutôt que d'essayer de dégager des différences entre les produits, il valait mieux adopter un barème tarifaire forfaitaire, que cette formule serait plus acceptable. Nous reconnaissons que ce n'est pas ce que désirait le groupe consultatif qui voulait maintenir le même barème, mais nous nous sommes dit qu'il était temps de moderniser ce barème et d'adopter un nouveau régime.

Le sénateur Cordy : Qui aurait pu penser que les gels désinfectants allaient connaître un tel succès?

Le sénateur Merchant : Comme mes questions étaient presque identiques à celles que vous a posées le sénateur Cordy, je ne vous demanderai pas pourquoi vous avez adopté un barème forfaitaire, puisque vous venez de nous l'expliquer.

Dans votre exposé, vous nous avez donné l'impression que nous faisons à peu près la même chose au Canada que dans les grands pays européens et en Australie, que nos frais sont les mêmes et que nous appliquons le même pourcentage de recouvrement.

Mme Ballantyne : Comme je le disais dans mes remarques d'introduction, le Royaume-Uni et l'Australie récupèrent la totalité de leurs frais de fonctionnement. L'industrie paie 100 p. 100 et le gouvernement ne paie rien. En Europe, c'est 60 à 70 p. 100 et, aux États-Unis, où l'on est en train de réexaminer la loi sur les frais d'utilisation, le recouvrement est d'environ 50 p. 100.

Il est difficile de nous comparer à d'autres pays en ce qui concerne le calcul des frais d'utilisation à cause de la structure de nos lois, de nos règlements et des activités qui sont prises en compte dans le calcul des coûts. C'est difficile à dire. Dans certains cas, nous facturons moins que les Américains et que certains autres pays, mais dans d'autres cas, nous facturons un peu plus. Quoi qu'il en soit, dans l'ensemble, nous sommes à peu près comparables et nous appliquons tous les mêmes normes fonctionnelles internationales de sorte que tout le monde applique les mêmes règles du jeu. Ailleurs dans le monde, l'industrie paie la même chose que ce qu'elle va payer au Canada en vertu de cette proposition.

Le sénateur Eaton : Les produits de santé naturels et les produits vétérinaires font-ils partie de votre mandat?

Mme Ballantyne : Non. Cette proposition concerne uniquement les médicaments à usage humain et les instruments médicaux. Elle ne crée pas de nouveaux frais. Les rubriques sont les mêmes que celles que nous avions en 1995; nous nous sommes contentés de les actualiser pour tenir compte de nos actuels frais de fonctionnement.

S'agissant des produits de santé naturels et des médicaments vétérinaires, nous essayons d'éliminer le travail en souffrance qui ne cesse de s'accumuler dans le cas des produits de santé naturels. Pour ce qui est des médicaments vétérinaires, nous avons éliminé l'arriéré le 31 mars 2009 et avons depuis établi des objectifs de rendement pour veiller à examiner ces médicaments dans des délais comparables à ceux d'autres pays. Dans notre proposition, nous avons estimé qu'un des principaux inducteurs de coûts est associé aux médicaments à usage humain et aux instruments médicaux, si bien que notre proposition ne vise qu'à augmenter ces frais en fonction des coûts que représentent nos activités.

M. Ouimette m'a rappelé que vous avez parlé de mandat. Était-ce votre question ou vouliez-vous parler de la proposition?

Le sénateur Eaton : Ces produits ont-ils été inclus dans la proposition et font-ils partie de votre mandat?

Mme Ballantyne : Ils font effectivement partie de notre mandat, car nous réglementons les produits de santé naturels et les médicaments vétérinaires. En revanche, ils ne sont pas visés par cette proposition. Celle-ci ne concerne que les médicaments à usage humain et les instruments médicaux.

Le sénateur Eaton : Est-ce qu'on vous reverra l'année prochaine en train de nous proposer le même genre de restructuration dans le cas des produits vétérinaires et des produits homéopathiques?

Mme Ballantyne : C'est à voir. L'un des enseignements de cette proposition, c'est qu'il ne faudrait pas attendre 10 ou 15 autres années avant d'augmenter les frais. Une fois que nous aurons éliminé les arriérés et que nous respecterons les normes de rendement, nous nous pencherons sur le ratio gouvernement-industrie. Pour les Canadiens, il est important, tant pour leur santé que pour leur sécurité, de pouvoir accéder à ces produits dans des délais raisonnables.

Le sénateur Eaton : Je suis entièrement d'accord. Merci beaucoup.

Le sénateur Martin : À en juger d'après l'épaisseur de ces documents, il est évident que vous avez fait un énorme travail sur cette proposition. Vous avez dit avoir consulté quelque 5 000 intervenants du milieu. À l'occasion d'autres réunions de notre comité, nous avons entendu des témoins — des intervenants n'ayant pas eu la chance d'être consultés — sur la question de l'adéquation des consultations. Pouvez-vous nous expliquer un peu mieux votre démarche consultative? J'imagine que vous avez tenu des consultations poussées, mais pourriez-vous nous en dire davantage à ce sujet?

Mme Ballantyne : Bien sûr. La première étape de notre proposition de recouvrement des coûts a consisté à calculer le prix de revient de chaque activité, ce que nous avons fait comme M. Ouimette vous l'a expliqué, en faisant appel à des conseillers externes. Puis, nous avons affiché la proposition sur le web pour inviter les intervenants à la commenter. Nous avons aussi organisé un certain nombre de rencontres individuelles au Canada. Nous pourrions vous remettre une liste complète de ceux et de celles que nous avons consultés jusqu'à tout récemment en préparation de notre proposition au Parlement, puisque nous voulions que tout le monde soit bien informé.

Nous avons tenu des consultations poussées en 2007 et 2008. Aux termes de la Loi sur les frais d'utilisation, les intervenants ont été invités à nous faire part de leurs plaintes — c'est ainsi qu'on appelle ça —, c'est-à-dire des problèmes qu'ils jugeaient importants. Nous avons reçu un certain nombre de plaintes et avons d'ailleurs des statistiques à cet égard.

Puis, nous avons mis sur pied un groupe consultatif sur les médicaments à usage humain et sur les instruments médicaux. Ce groupe de trois membres était composé d'un représentant de l'industrie et d'un représentant du gouvernement qui ont désigné le président. Après avoir lu notre proposition, le groupe nous a adressé des recommandations que nous avons examinées en vue de prendre certaines décisions, comme celle concernant les désinfectants dont nous avons parlé tout à l'heure. Notre proposition était dès lors prête à être diffusée, mais nous ne pouvions le faire avant que votre comité l'ait examinée, comme le prévoit la procédure.

Si cela peut vous être utile, je vais demander à M. Ouimette de vous préciser qui nous avons consulté à l'époque.

Le sénateur Martin : Merci.

M. Ouimette : Comme l'a dit Mme Ballantyne, le processus a été entamé en 2007. Permettez-moi de situer le contexte dans lequel nous avons consulté 5 000 intervenants du milieu. Nous avons préparé un document de consultation et, à la faveur des activités de consultation, comme des rencontres individuelles ou des sondages, nous avons sollicité et reçu des commentaires qui apparaissent dans les documents. La Loi sur les frais d'utilisation exige qu'un avis officiel soit publié à la suite des consultations. En juillet 2007, après des consultations poussées, Santé Canada a donc publié un avis officiel de proposition concernant les frais d'utilisation. La loi indique très clairement qu'en cas de plainte relative à l'avis officiel, il faut mettre sur pied des groupes consultatifs indépendants chargés d'entendre les plaintes et de recommander à Santé Canada des façons de les régler.

L'avis officiel que nous avions émis a fait l'objet de plaintes tant pour ce qui est des médicaments à usage humain que des instruments médicaux. Même si nous n'avons pas retenu la recommandation concernant la tarification du droit de vendre, nous avons été dans le sens de la plupart des autres recommandations. Nous avons dû examiner chaque recommandation et évaluer dans quelle mesure elle était réalisable d'un point de vue financier et du point de vue des politiques. Nous avons reçu le rapport du groupe consultatif au début de 2008 et c'est par la suite que nous avons entamé la préparation de notre proposition au Parlement.

Le sénateur Martin : Vous avez également répondu à ma deuxième question concernant la période qui s'est écoulée après les premières consultations et la rétroaction éventuelle des intervenants tout au long du processus. La prise en compte et le suivi des plaintes ont été efficaces.

M. Ouimette : La Direction générale des produits de santé et des aliments entretient des échanges permanents non seulement avec l'industrie qu'elle réglemente, mais aussi avec des groupes de patients et de consommateurs. Nous tenons des rencontres régulières lors desquelles nous faisons le point sur notre proposition de recouvrement de coûts et notre proposition relative aux frais d'utilisation. Quand nous en sommes arrivés au point de déposer notre proposition, nous avons fait plus régulièrement le point avec ceux que nous consultions — c'est-à-dire les entreprises qui paient les frais d'utilisation — afin de les tenir au courant. Cette proposition ne vise qu'à actualiser les actuels frais d'utilisation. Nous avons été proactifs dans la communication de l'information et, depuis lors, nous sommes transparents.

[Français]

Le sénateur Champagne : Je pense que personne ne mettrait en doute l'utilité de votre travail. Je pense qu'on peut parler d'un travail essentiel. Dans votre présentation, vous avez soulevé un point qui revient souvent. Au Canada, cela prend beaucoup de temps avant l'approbation d'un nouveau médicament. Vous dites, dans votre présentation :

[Traduction]

« Ceci a imposé des pressions sur notre capacité à assurer la prestation des services » et « nous a empêchés d'éliminer le travail en retard persistant relié aux soumissions ».

[Français]

Donc, il y a un problème à un moment donné concernant le temps que cela vous prendra pour donner la certification à un médicament ou à un outil chirurgical ou quelque chose comme cela. Est-ce le manque d'argent qui fait que vous avez des retards et que cela prend tant de temps?

M. Ouimette : Je vais probablement vous donner le début de la réponse et Mme Sharma donnera plus de détails. La réalité est qu'on a des activités règlementaire à faire pour, entre autres, la revue de médicaments et de matériel médical et cela prend des ressources. Une grande partie de notre budget est basée sur des experts, qui font la revue de ces présentations. Un des éléments est vraiment que les frais n'ont pas été mis à jour. Pour les médicaments, on parle de 1995, la première date à laquelle les frais ont été mis en place, donc 15 ans. Les frais n'ont pas été mis à jour et le coût de nos activités a augmenté, pas nécessairement à cause de l'inflation mais à cause du volume de soumissions que nous recevons et du nombre d'inspections que nous devons faire, mais aussi de la complexité des produits auxquels on a affaire depuis les années 1990. Mme Sharma peut donner plus de détails.

[Traduction]

Dre Sharma : La plupart des monographies qui accompagnent les présentations de drogues nouvelles ou de nouveaux instruments médicaux pourraient remplir cette pièce. C'est pour cela qu'il faut tant de temps. Cependant, le temps que nous consacrons à chaque dossier peut varier d'un produit à l'autre.

Comme M. Ouimette l'a dit, nous dépendons de la capacité du personnel à évaluer la sécurité de même que le fonctionnement et la qualité des produits. Il arrive que le nombre de produits soumis à notre évaluation augmente. Au cours des dernières années, nous avons ainsi enregistré une augmentation de 57 p. 100 du nombre de présentations de drogues nouvelles, une augmentation de 143 p. 100 du nombre de présentations de médicaments génériques et de 30 p. 100 du nombre de demandes applicables aux instruments médicaux. Si l'on tient compte de tout cela de même que des demandes de renseignements complémentaires, l'augmentation totale de notre charge de travail a été de 93 p. 100. En volume seulement, le pourcentage de présentations que nous recevons est plus élevé que celui auquel d'autres pays ont affaire.

Par ailleurs, la complexité des dossiers évolue. On peut affirmer sans craindre de se tromper qu'il y a quelques années, le nombre de présentations de produits était moindre. De nos jours, nous recevons des études sur différentes populations, davantage d'études en gériatrie, davantage d'études en pédiatrie et plus d'études sur les femmes enceintes. Nous voyons aussi des nouveaux types d'études en cardiologie. À l'échelle internationale, toute nouvelle étude dans le domaine cardiaque entraîne l'apparition de nouveaux produits.

Le travail que nous effectuons coûte davantage parce qu'il est plus intense, mais nous maintenons les mêmes normes en ce qui concerne la protection de la santé et de la sécurité des Canadiens. Pour nous, c'est une question de ressources, à cause des salaires et du travail exigé pour les examens.

[Français]

Le sénateur Champagne : Vous avez prononcé un mot magique pour quelqu'un du Québec, vous avez parlé de la différence entre un médicament breveté et un médicament générique. En ce moment, il y a une énorme bataille, comme vous le savez au Québec, entre les deux. Un médicament générique est censé, à l'expiration du brevet, être la même chose que le médicament breveté. Vous recommencez au cas où il y a une différence entre le médicament générique et le médicament original qui était breveté? Il faut recommencer à neuf selon le cas?

[Traduction]

Dre Sharma : Dans le cas d'une drogue nouvelle, il faut de 15 à 20 ans, selon sa durée de mise au point qui va de l'étape de la molécule à celle des essais sur des animaux ou sur l'homme, en passant par les essais en laboratoire.

L'information que nous voyons passer au sujet d'un produit destiné à être mis en marché ressemble beaucoup à ce que je vous ai montré. Dans le cas d'un produit générique, le parcours est différent.

Le laboratoire qui veut vendre un produit générique n'a pas à recommencer toutes les études, mais il doit faire la preuve que la drogue qu'il veut fabriquer est essentiellement la même qu'une autre drogue brevetée, qu'elle contient le même ingrédient actif, que c'est la même substance de base ayant les mêmes effets sur l'organisme. C'est ce qu'on appelle la bioéquivalence.

Dans ce cas, il faut environ deux ans, mais la présentation est différente de même que les essais que nous imposons, et puis les frais d'utilisation sont également différents parce que les présentations et les examens ne sont pas les mêmes.

[Français]

Le sénateur Champagne : Si on attend l'arrivée au Canada d'un médicament qui est déjà en vente aux États-Unis ou ailleurs, je comprendrais pourquoi cela peut prendre du temps. Si l'écart entre les frais se situe entre 700 $ à 3 000 $, il faudrait le faire plus souvent pour éviter cette situation, la différence est énorme. Si la certification coûte plus cher, les fabricants augmenteront le coût de leurs médicaments. Les gens croiront que c'est dû au fait que le gouvernement n'a pas mis assez d'argent. De toute façon, le gouvernement ne peut pas gagner. Je le comprends et vous l'avez bien expliqué. Mais passer de 700 $ à 3 000 $ ferait sourciller n'importe qui, n'est-ce pas? Je ne dis pas que vous n'en avez pas besoin, mais je sais que cela surprendra beaucoup de gens.

M. Ouimette : Je suis tout à fait d'accord, malgré que les frais n'aient pas changé depuis 15 ans. En réalité, les compagnies payaient des frais désuets depuis ce temps alors que dans d'autres juridictions ces frais ont été mis à jour automatiquement tous les ans. Dans d'autres juridictions, les compagnies s'attendent à une augmentation annuelle des frais. Une augmentation sur une base annuelle est beaucoup moindre.

On a implanté les frais à partir de 1995. En l'année 2000, après révision, il a été recommandé de mettre les frais à jour. On a fait beaucoup de travail pour s'assurer que l'augmentation soit justifiée. En 2004, l'arrivée de la Loi sur les frais d'utilisation a imposé un processus rigoureux de mise à jour des frais. On a dû passer à travers ce processus. On a des excuses et en même temps on n'en a pas.

Le sénateur Champagne : Je suis très consciente de la nécessité de faire cela, mais, si vous permettez un conseil provenant d'une profane en la matière : n'attendez pas dix ans avant d'augmenter les frais, l'écart est trop grand.

[Traduction]

Le sénateur Raine : C'est fascinant. J'aimerais savoir pourquoi vous avez fixé vos frais à un niveau qui devrait vous permettre de récupérer environ la moitié de vos coûts, tandis que l'Australie et le Royaume-Uni, par exemple, visent un recouvrement de 100 p. 100. Comment en êtes-vous arrivés à ce pourcentage, à cette répartition?

Mme Ballantyne : C'est une question d'équilibre entre le bien public et les intérêts du secteur privé. C'est la même chose partout ailleurs dans le monde, les lois sur les frais d'utilisation visent à trouver un équilibre entre le bien public et les intérêts privés.

Nous aurions pu viser 100 p. 100, mais, en 1995, quand les frais d'utilisation ont été adoptés, le Canada a décidé qu'il convenait d'adopter un ratio de 50-50. Nous avions estimé que l'équilibre était la bonne solution.

En ce qui concerne le bien public, les Canadiens ont accès à des produits sûrs dans des délais raisonnables. Plutôt que d'attendre quatre ans pour obtenir le même produit au Canada, nous voulons nous assurer que nos normes de rendement permettent un accès aux produits dans des délais raisonnables. La sécurité prime et la rapidité vient en second. Les Canadiens peuvent en avoir la certitude.

D'un autre côté, l'industrie a besoin de prévisibilité parce qu'elle souhaite que les Canadiens aient accès aux mêmes produits que ceux offerts ailleurs dans le monde et que c'est aussi une question de parts de marché. Comme elle a accès au marché et à des parts de marché, l'industrie y voit un intérêt. Au Canada, on a décidé il y a bien des années que la bonne répartition était de 50-50.

Vous êtes saisis de cette proposition dont l'avenir est sujet à la volonté du Parlement. C'est à vous de décider, en dernière analyse, du genre de ratio que nous devons retenir au Canada.

Le sénateur Raine : Je m'interroge un peu parce que je suis certaine que les compagnies ne se plaignent pas de ne pas avoir à payer 100 p. 100. Nous pourrions être critiqués pour ne pas leur facturer ce qu'elles sont, de toute évidence, prêtes à payer au Royaume-Uni et en Australie.

Mme Ballantyne : Vous avez tout à fait raison et je suis certaine que vous entendrez ce que les gens de l'industrie en pensent demain. Toutefois, compte tenu du bien public qu'on retire de tout cela, nous nous sommes dit que ce ratio donnait un bon équilibre entre la partie que doit assumer le gouvernement et celle qui revient à l'industrie.

Ce ratio a fonctionné pendant 15 ans. Nous ne faisons qu'actualiser le barème des frais en essayant de maintenir le même niveau d'accès. Toutefois, il vous appartient entièrement de rendre la décision finale, à la faveur de l'examen parlementaire.

Le sénateur Raine : Estimez-vous que ce ratio vous permettra de récupérer suffisamment d'argent pour que Santé Canada fasse du bon travail, un travail efficace?

Mme Ballantyne : Oui, dans la mesure où nous n'attendons pas 10 à 15 autres années, que les choses ne s'érodent avec le temps et qu'on en vienne à 25-75. Dans la mesure où c'est ce qu'elle nous permettra de faire, nous estimons que cette proposition est rigoureuse, comme vous l'avez constaté; elle a fait l'objet de consultations et nous avons respecté la Loi sur les frais d'utilisation, dans son esprit et la lettre. Le Canada a estimé dans le passé que ce ratio constituait le bon équilibre pour notre pays et nous verrons ce qu'il va advenir.

Le sénateur Raine : Votre barème prévoit-il une indexation des frais et donc des ajustements réguliers?

Mme Ballantyne : Oui, nous avons demandé un ajustement annuel de 2 p. 100, ce qui correspond au taux d'inflation et pas plus. Cet ajustement est destiné à éviter que les avantages de l'augmentation se perdent au fil du temps.

Sénateurs, j'attire votre attention sur le fait que cette proposition au Parlement s'articule autour d'un ratio de 50-50. Après votre étude, nous devrons nous adresser au Conseil du Trésor pour demander à conserver les sommes que la mise en œuvre de cette proposition permettra de dégager. La politique gouvernementale donne aux ministres du Conseil du Trésor le pouvoir de conserver les recettes obtenues de cette façon.

Même après une augmentation des frais d'utilisation et du niveau de contribution de l'industrie, le gouvernement pourrait reprendre le crédit correspondant, ce qui veut dire que nous nous retrouverions dans la même situation qu'aujourd'hui. Comme nous l'avons déclaré, nous proposons de conserver cet équilibre de 50-50, ce qui veut dire que les gouvernements ne doivent pas réduire leurs niveaux de financement au moment où l'industrie augmente sa contribution.

C'est ça la prochaine étape importante dans le cadre de cette proposition. Quand vous aurez terminé votre étude, nous bâtirons un dossier solide à l'intention des ministres du Conseil du Trésor pour les convaincre de la nécessité de laisser cet argent au ministère. Comme nous vous l'avons dit, tout ce processus repose sur les ressources humaines. Notre activité ne consiste pas à verser des subventions ou des contributions. Notre personnel doit examiner les produits qui nous sont soumis et nous nous efforçons de faire tout cela de la façon la plus efficace qui soit. Nous essayons d'être efficaces de différentes façons, mais nos gains d'efficacité ne compenseront pas notre actuel manque de ressources.

Le sénateur Seidman : Nous comprenons tous l'importance du rôle de Santé Canada dans la protection et la promotion de la santé et de la sécurité des Canadiens, surtout en ce qui concerne la mise au point de drogues nouvelles et d'instruments médicaux.

Nous comprenons aussi à quel point l'innovation, la recherche et le développement sont importants pour l'avenir des traitements médicaux. Pouvez-vous nous dire quelles mesures vous prenez pour vous assurer que les petites entreprises de recherche et de développement, par exemple celles qui fabriquent des instruments médicaux, ne soient pas désavantagées à cause de ces augmentations de frais; comment vous assurez-vous que ces augmentations ne décourageront pas la recherche et le développement?

Mme Ballantyne : Je vais demander à M. Ouimette de vous parler des mesures d'atténuation que nous avons prévues, mais sachez que notre proposition tient compte du fait que certaines entreprises ne seront pas en mesure de payer les frais que nous exigeons, surtout celles qui débutent, et c'est pour cela que nous avons adopté des mesures d'atténuation. Nous avons prévu une réduction des frais grâce à des mesures d'atténuation d'environ 23 millions de dollars pour aider les entreprises qui ne peuvent payer les frais exigés, entreprises qu'on retrouve surtout dans le secteur des instruments médicaux. Les décisions ne sont pas prises en fonction de la taille des entreprises, mais plutôt de leur chiffre d'affaires. Une compagnie peut être petite, mais avoir un important chiffre d'affaires.

M. Ouimette va vous donner plus de détails sur nos mesures d'atténuation.

M. Ouimette : Comme Mme Ballantyne vient de l'indiquer, nous avons adopté une série de mesures visant à réduire les frais qui équivaudront à environ 23 millions de dollars. C'est une somme que la direction générale ne recevra pas des compagnies sous la forme de frais d'utilisation. Cependant, nous sommes prêts à ce genre de réduction et nous l'avons prévue dans notre proposition relative aux frais d'utilisation, puisque nous avons déterminé que nous pourrions tout de même respecter nos normes de rendement.

Les mesures de réduction des frais d'utilisation sont généralement liées aux produits, mais elles sont aussi fonction du chiffre d'affaires. Nous nous sommes dit que, ce n'est pas parce qu'une entreprise est petite qu'elle ne va pas réaliser de bénéfices. Les bénéfices sont liés à la vente des produits. Si une compagnie a 10 produits lui rapportant peu, elle pourra faire 10 demandes de réduction de frais. Elle pourra faire une demande de réduction pour chacun de ses produits. Nous avons aussi prévu des stratégies d'atténuation des frais pour les entreprises en démarrage. Dans leur premier exercice, les compagnies n'auront pas à payer la totalité des frais et pourront même différer leur paiement.

Afin de ne pas freiner l'innovation, comme les essais cliniques, nous avons clairement décidé de ne pas percevoir de frais d'utilisation dans le cadre de certaines de nos activités. Nous n'imposerons de frais pour aucune de nos activités ayant trait aux essais cliniques, comme le traitement des demandes d'essais cliniques ou d'inspection des établissements effectuant des essais cliniques, justement pour ne pas freiner l'innovation.

Dre Sharma : Je vais ajouter une petite chose au sujet du secteur des instruments médicaux. D'après Industrie Canada, quand nous avons examiné les coûts de R-D associés aux instruments médicaux, le Canada arrivait au dernier rang des pays du G7, ce qui veut dire que nous offrons un climat favorable à la R-D. Nous avons une petite industrie des instruments médicaux très dynamique dont le chiffre d'affaires total dépasse les 7 milliards de dollars et qui accuse actuellement un déficit commercial. Cette industrie fabrique et expédie ses produits. Il y a une dimension innovation. Nous sommes bien dans ce contexte, ce qui n'empêche que nous devons effectuer nos examens. Nous tentons de réaliser cet équilibre grâce aux mesures d'atténuation que M. Ouimette vous a décrites.

Le sénateur Seidman : Merci. L'équilibre est important et je suis rassurée.

Le sénateur Dyck : Merci pour votre exposé. À la lecture des différents frais que vous proposez, je me suis aperçue que le plus important concerne les nouvelles substances actives dans la catégorie des drogues. Vous avez dit que vous n'imposez pas de frais dans le cas des essais cliniques. Étant donné que les frais associés à la procédure d'homologation des nouvelles substances actives sont élevés, quel genre d'activités effectuez-vous à ce titre? S'agit-il d'essais en laboratoire ou examinez-vous ce que la compagnie a fait pour démontrer l'innocuité et l'efficacité de sa nouvelle drogue?

Dre Sharma : Dans le cas des nouvelles substances actives, les frais proposés sont d'environ 300 000 $ pour l'examen du dossier complet. Un dossier du même genre soumis à la Food and Drug Administration aux États-Unis coûte 1 million de dollars. Voilà qui vous situe un peu en ce qui concerne les examens effectués.

Nous examinons les données que nous transmettent les fabricants à l'appui de leur projet de mise en marché. Ils nous communiquent leurs études en laboratoire, leurs études de toxicologie au stade préclinique, toutes les études qu'ils ont effectuées sur des animaux ainsi que les essais cliniques et cela que les résultats soient positifs ou négatifs. Nous nous attardons sur deux essais charnières, les deux plus importants qui étayent le plus souvent l'utilisation du produit. Nous examinons donc les données que nous soumettent les compagnies à qui nous posons un certain nombre de questions pour obtenir des clarifications ou des informations additionnelles.

À la suite de toute cette recherche, nous examinons la question de l'étiquetage. Nous décidons ce pour quoi le produit pourra être utilisé, dans quelles conditions, comment il sera étiqueté et ainsi de suite. Nous examinons les trois principaux aspects de la sécurité au regard du risque, de l'efficacité — le produit fait-il ce qu'il est censé faire — et de la qualité — c'est-à-dire la façon dont le produit est fabriqué. Il s'agit là d'un volet distinct de la présentation qui traite de la façon dont le produit est fabriqué et des installations qui servent à sa production.

Le sénateur Dyck : Ma deuxième question concernera la fabrication. Est-ce qu'une nouvelle substance active doit être fabriquée au Canada ou peut-elle l'être aux États-Unis, en Allemagne ou ailleurs?

Dre Sharma : Elle peut être fabriquée en divers endroits et, compte tenu de la mondialisation de la production, la fabrication peut se faire en plusieurs endroits; le plus gros du produit pouvant être fabriqué en un lieu et être transporté ailleurs pour l'assemblage final. Nous appliquons des frais d'utilisation pour tout ce qui sera vendu au Canada et, même si le produit vient d'un autre pays, nous l'examinons.

Le sénateur Dyck : Si les frais d'utilisation sont inférieurs au Canada qu'aux États-Unis, cela veut-il dire que les Canadiens auront accès à plus de médicaments ou qu'on peut s'attendre à un élargissement de l'éventail des médicaments disponibles ici?

Dre Sharma : Tout cela procède d'un ensemble de décisions complexes que doit prendre tout laboratoire désireux d'écouler un produit sur notre marché. Par ailleurs, le Canada représente environ 3 p. 100 du marché mondial. Quand nous examinons un produit qui finit par être vendu au Canada, c'est toute la population qui en bénéficie. Aux États- Unis, qui a une population 10 fois supérieure à la nôtre, le marché est différent.

Dans les périodes où il nous a été impossible de respecter nos normes de rendement, cette situation a dissuadé les compagnies de s'adresser à nous parce qu'elles n'étaient pas en mesure de faire des prévisions et qu'elles risquaient de se heurter à des délais. En revanche, dans les périodes où nous avons respecté les normes de rendement, les compagnies nous ont adressé leurs présentations en même temps qu'elles le faisaient dans d'autres pays, ce qui veut dire que les Canadiens ont eu accès plus rapidement aux produits candidats à l'homologation.

Le sénateur Dyck : S'agissant des frais d'utilisation applicables aux drogues nouvelles, ne pensez-vous pas que le fait d'augmenter ces frais pour parvenir à un recouvrement de 100 p. 100, comme le sénateur Raine l'a suggéré — c'est-à- dire pour aller chercher davantage — pourrait décourager l'industrie de produire des médicaments ici au Canada?

Dre Sharma : Dans le cas d'une drogue nouvelle, par exemple, avec un programme de développement de 20 ans — et d'après les statistiques, on sait que l'investissement moyen dépasse le milliard de dollars entre la phase de développement et la phase de mise en marché — je ne vois pas vraiment en quoi les frais d'utilisation en vigueur au Canada pourraient constituer un frein. Par rapport aux coûts de développement, nos frais représentent une goutte d'eau dans l'océan. Comme je le disais, de nombreux facteurs interviennent dans la décision d'une compagnie de mettre un produit en vente sur le marché canadien.

M. Ouimette : Je dois apporter une précision au sujet du ratio de partage de coûts, surtout dans le cas des présentations concernant les drogues. Quand nous disons que la proposition relative aux frais d'utilisation et l'actualisation de nos barèmes nous ramèneront à un ratio de coûts de 50-50, c'est que nous partons des sommes que la direction générale touchera effectivement. Cela tient compte du fait que certaines compagnies demanderont des réductions de frais pour un total, comme je le disais, de 23 millions de dollars. Les recettes projetées tiennent compte de ces réductions.

Les frais dont il est question dans cette proposition ne couvriront pas nécessairement la moitié de nos coûts. Dans le cas des présentations concernant les drogues, ils pourraient dépasser les 75 p. 100. Je crois que c'est d'ailleurs le cas pour une présentation de drogue nouvelle. Cependant, compte tenu des réductions de frais et donc des recettes globales de la direction générale, le ratio de partage de coûts est de 50-50 étant entendu que nous aurons un manque à gagner de 23 millions de dollars à cause des mesures d'atténuation.

Mme Ballantyne : Permettez-moi d'ajouter une chose. Cela dépendra aussi si nous effectuons les essais en laboratoire. Les vaccins, que nous réglementons également, sont visés par cette proposition. Comme la vaccination s'adresse à des personnes saines, nous effectuons nous-mêmes certains essais. Par exemple, dans le cas du vaccin H1N1, le fabricant GlaxoSmithKline a effectué des essais en amont, mais nous avons testé chaque lot avant de le distribuer aux provinces et territoires. Le Dr Elwyn Griffiths est aussi avec nous aujourd'hui pour répondre à toute question particulière que vous auriez au sujet de ce vaccin. À l'automne dernier, nous avons commencé à accuser des retards du côté des produits biologiques parce que nous avons dû consacrer beaucoup de temps et d'efforts à faire en sorte que le processus d'approbation et la campagne de lancement du nouveau vaccin se déroulent sans heurt et sans danger. Avec les vaccins, il arrive souvent que nous autorisions des lots complets après les avoir testés.

Aujourd'hui encore, nous continuons de contrôler les vaccins dans le cadre de notre activité de surveillance après la mise sur le marché. Vous avez peut-être entendu dire qu'il faut modifier le délai de péremption du vaccin. C'est parce que nous avons demandé à GSK d'effectuer des essais. Nous poursuivons les nôtres, de notre côté, qui ont recoupé les résultats de GSK et établi que la qualité du vaccin s'altère au bout d'un certain temps, ce qui est normal, puis qu'elle se stabilise. Il nous fallait donc parler de ces résultats avec GSK. Nous nous chargeons de ce genre de tests parce que c'est un aspect critique.

Le sénateur Eaton : Pourriez-vous, pour mémoire, nous expliquer une chose à laquelle le sénateur Cordy a fait allusion. Compte tenu de toutes les présentations que vous recevez — des cotons-tiges aux instruments médicaux, comme les appareils cardiaques, en passant par les encaustiques, les agents d'assainissement et les médicaments pour le cœur —, est-ce que les présentations sont regroupées par catégorie de risques?

Mme Ballantyne : Oui.

Le sénateur Eaton : Je vais enchaîner sur la question des agents d'assainissement. Ce produit appartient à une catégorie et les instruments médicaux à une autre. La classification est fonction de la sophistication du médicament ou de l'instrument médical, c'est-à-dire des risques et du temps nécessaire à l'examen et au suivi. Dans ces circonstances, aucune catégorie n'en subventionne une autre, n'est-ce pas?

Dre Sharma : Oui.

Mme Ballantyne : C'est ce qu'on peut dire. Nos scientifiques sont regroupés en fonction de leurs compétences particulières. Certains sont des chercheurs universitaires, d'autres sont des médecins, certains sont des toxicologues et d'autres des biologistes. La Dre Sharma, par exemple, s'occupe des médicaments pour le cancer tandis que d'autres s'intéressent à tout ce qui touche à la gastroentérologie ou aux désinfectants ou encore aux instruments médicaux. Au sein de ces groupes d'examinateurs, nous effectuons une autre répartition en fonction des risques associés à nos examens. Pour les désinfectants, nous ne mobilisons pas énormément de gens pour s'occuper des mêmes produits. On ne parle pas du même volume, ni des mêmes risques. Il y en a qui peuvent estimer que certaines catégories servent à en subventionner d'autres, mais nous voyons la chose exactement comme vous venez de l'exprimer.

Le sénateur Cordy : Vous nous avez beaucoup aidés cet après-midi. La mise en œuvre du nouveau barème signifiera une augmentation marquée des frais dans bien des cas, mais je ne suis ni en faveur ni contre cette augmentation. Selon le barème actuel, les frais sont de 2 200 $ et ils pourraient passer à 17 000 $. Pour faire reclassifier une drogue, de médicament vendu sur ordonnance à médicament en vente libre, les frais pourraient passer de 17 000 $ à 41 000 $.

Je veux être certaine que les ressources additionnelles que tout cela procurera seront bien utilisées. Vous m'avez rendue un peu nerveuse quand vous avez dit que vous devrez rencontrer le gouvernement pour vous assurer qu'il ne réduira pas de beaucoup le budget qu'il accorde au ministère de la Santé. Allez-vous engager plus de personnel pour accélérer les évaluations et les examens et peser les avantages et les risques de chaque produit avant d'en permettre la mise sur le marché au Canada?

Si j'étais responsable d'une compagnie constatant que ses frais d'utilisation vont augmenter de beaucoup, j'aimerais en avoir pour mon argent. Si je faisais une présentation pour une drogue, un instrument médical ou un gel désinfectant, je m'attendrais à ce que le niveau de service offert par le ministère de la Santé augmente dans la même proportion que mes frais.

Vous m'avez rendue nerveuse quand vous avez dit que vous alliez devoir parler des frais d'utilisation avec le gouvernement. Pourriez-vous nous en dire davantage à ce sujet?

Mme Ballantyne : La Loi sur les frais d'utilisation porte que l'argent que nous recevons doit être consacré aux services offerts et que nous devons faire rapport de ces dépenses annuellement. Il est évident que les fonds dérivés des frais d'utilisation seront consacrés aux services correspondants.

Les entretiens avec le gouvernement s'inscrivent simplement dans le cadre de la politique du gouvernement du Canada. Les ministres du Conseil du Trésor discutent de ce genre de chose et de toute proposition relative à des frais d'utilisation. Pour l'heure, toute proposition de ce type doit être soumise à un examen parlementaire avant de passer devant le Conseil du Trésor. C'est à ce moment-là que nous établissons le bien-fondé de notre proposition en partant de l'approbation et de l'appui du Parlement. Le fait que notre direction générale soit aux prises avec un problème d'intégrité du programme, qu'elle ait besoin de plus de ressources et qu'elle doive bénéficier des recettes additionnelles envisagées sont autant d'éléments qui apportent de l'eau à notre moulin.

La décision ne nous appartient pas parce que c'est une question de politique gouvernementale. Nous n'avons d'autre choix que de passer par cette étape et nous ferons de notre mieux pour avancer des arguments convaincants. Il appartiendra ensuite au gouvernement du Canada de décider si nous pouvons ou non conserver cet argent. Si ce n'est pas possible, nous nous retrouverons alors dans la même situation délicate que celle que nous connaissons aujourd'hui parce que nos arriérés augmenteront et que nous ne serons pas en mesure de respecter les normes de rendement internationales. À terme, cela voudra dire que les Canadiens n'auront pas accès à certaines thérapies dont ils ont besoin. S'il n'en était que de nous, nous ferions en sorte que cet argent nous revienne. Je vais demander à M. Ouimette de vous apporter quelques précisions à ce sujet.

M. Ouimette : Nous étions également nerveux à l'idée de nous présenter devant votre comité avant de savoir si nous pourrions conserver cet argent. Pour être précis d'un point de vue technique, il faut dire que nous avons besoin de l'autorisation du Conseil du Trésor pour percevoir des recettes additionnelles.

Ce qui nous inquiète davantage, c'est le financement public. Il faut être juste envers le Conseil du Trésor et sa politique consistant à ne pas systématiquement laisser aux ministères qui augmentent leurs droits d'utilisation la possibilité de conserver les fonds ainsi récupérés. C'est logique, car on ne peut permettre qu'un ministère augmente ainsi ses recettes si ce n'est pas nécessaire. Le Conseil du Trésor veut que les ministères justifient la récupération des sommes ainsi obtenues.

Nous sommes un peu nerveux, mais nous avons passé les 18 derniers mois à travailler avec les organismes centraux et avec le Secrétariat du Conseil du Trésor. Nous avons donné notre version que nous avons étayée des informations voulues. Nous pensons que notre dossier est solide, mais nous devons suivre la procédure établie qui consiste à solliciter le point de vue des parlementaires avant d'aller devant le Conseil du Trésor. Nous avons fait notre part du travail.

Le sénateur Cordy : Vous avez été ouverts et je l'apprécie. Je crois comprendre que vous devez utiliser et déclarer annuellement les sommes que vous rapportent les frais d'utilisation, ce qui se tient tout à fait parce que tout doit être transparent et faire l'objet d'une reddition de comptes. J'espère que, si les frais augmentent de beaucoup, le gouvernement ne diminuera pas son niveau de financement actuel. J'espère que les compagnies qui paieront des frais d'utilisation nettement supérieurs recevront des services améliorés. Merci beaucoup pour votre ouverture.

Le sénateur Raine : Est-ce que des produits pharmaceutiques au Canada sont prescrits à des fins non indiquées sur l'étiquette et est-ce que ce genre d'utilisation non prévue fait l'objet d'une nouvelle étude de votre part?

Mme Ballantyne : Les utilisations hors étiquette sont une pratique médicale. Nous homologuons les drogues pour des fins particulières. Nous en précisons le mode d'emploi et la posologie. Puis, les médecins et d'autres professionnels de la santé peuvent décider de l'utiliser différemment — en fonction de renseignements qu'ils obtiennent par ailleurs — autrement dit pour des fins non indiquées sur l'étiquette. Il s'agit là d'une pratique médicale qui est réglementée par les provinces et les territoires et avec laquelle nous n'avons rien à voir.

Toutefois, nous recueillons les déclarations d'effets indésirables, c'est-à-dire des données qui nous renseignent sur les résultats de l'utilisation d'une drogue. Par exemple, a-t-on constaté des problèmes graves exigeant une hospitalisation? On parle alors d'activités après la mise sur le marché.

Nous recueillons donc des données sur l'utilisation effective des médicaments, données que nous utilisons parfois pour émettre des avis, en notre qualité d'organisme de réglementation, afin de rappeler aux praticiens, par la persuasion ou par le biais de pressions, qu'il faut respecter les usages recommandés.

Nous dialoguons avec les provinces et les territoires afin de déterminer pour quelle raison un médicament peut être utilisé hors étiquette et quels problèmes cela peut engendrer, mais nous ne pouvons pas réglementer cet aspect. Je vais maintenant inviter la Dre Sharma à vous en dire un peu plus.

Dre Sharma : Comme vous l'a dit Mme Ballantyne, quand nous étudions une présentation, nous avons en main toutes les données nécessaires et nous réglementons l'étiquetage. L'étiquette est le reflet des données qui nous ont été communiquées et elle précise le mode d'emploi du produit ainsi que ses éventuels effets secondaires. En cas de problème à cause d'une utilisation hors étiquette — soit en cas de concrétisation du risque — nous l'indiquons éventuellement sur l'étiquette.

Par exemple, si nous constatons qu'une utilisation hors étiquette ne permet pas de traiter certains types de maladies ou qu'elle a occasionné des effets indésirables, nous pouvons l'indiquer sur l'étiquette pour préciser qu'il ne faut pas employer le produit de cette façon.

À l'inverse, il peut y avoir des utilisations hors étiquette qui sont justifiées, ce que nous confirmons grâce à certaines données supplémentaires et à des essais cliniques ou à d'autres informations. Quand la présentation nous parvient, nous décrétons qu'au vu des données dont nous disposons, l'utilisation hors étiquette peut être une bonne chose et qu'il y a lieu de le préciser sur l'étiquette.

À moins que l'usage de la drogue soit spécifié dans la présentation, tout est question de pratique médicale, ce qui n'empêche que nous intervenons en cas de problème de sécurité relativement à un usage hors étiquette nécessitant une action réglementaire de notre part.

Le sénateur Raine : Vous réglementez un certain usage et si le produit est utilisé à d'autres fins par le milieu médical, Santé Canada n'est pas tenu de tirer la sonnette d'alarme, de faire ou de dire quoi que ce soit, d'exiger le rappel du produit et la tenue de nouveaux essais pour l'utilisation hors étiquette?

Dre Sharma : Ce choix revient à chaque médecin, en fonction du patient qu'il traite. En revanche, nous intervenons si le traitement atypique cause des problèmes.

Le sénateur Raine : Si je ne m'abuse, au début le Viagra a été utilisé hors étiquette.

Dre Sharma : La grande majorité des médicaments destinés aux enfants sont d'abord utilisés hors étiquette, le nouvel usage étant agréé par la suite. De plus, il existe différents types d'utilisations hors étiquette.

Le vice-président : À la lecture de vos documents, j'ai été impressionné par votre résumé qui, selon moi, illustre très bien l'ampleur de l'étude que vous avez effectuée.

Il est évident que chaque fois qu'on veut augmenter des frais d'utilisation, personne ne se porte volontaire pour payer davantage, mais j'estime qu'il faut reconnaître qu'en matière de réglementation de ces types de produits, il n'est pas uniquement question de viser l'innocuité pour le consommateur — ce qui est évidemment de la plus haute importance — mais aussi du temps que vous passez pour examiner ces produits et qui a un effet sur la compétitivité de l'industrie.

Pour ce qui est des problèmes permanents des délais nécessaires à l'approbation des produits — délais dont vous parlez très clairement dans votre documentation — nous sommes conscients que tous vos clients de l'industrie ne sont pas satisfaits du temps que prend le processus, mais j'ai l'impression que beaucoup seront d'accord avec vous sur le fait que vous avez besoin de ressources afin d'effectuer les examens dans des délais raisonnables.

À la lecture de vos documents, et même de votre résumé, j'ai eu le sentiment que vous avez su tenir compte du fait que vous seriez critiqués de vouloir augmenter les frais d'utilisation. Je comprends un peu le domaine et je sais à quel point celui-ci est important pour l'industrie et, au final, pour la protection des consommateurs canadiens.

Au nom du comité, je tiens à vous remercier pour la franchise avec laquelle vous avez répondu à nos questions — du moins, vos réponses nous ont semblé franches. Nous découvrirons sans doute demain si mon interprétation est bonne. Quoi qu'il en soit, au nom du comité, je vous remercie pour vos témoignages.

(La séance est levée.)


Haut de page