Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie
Fascicule 14 - Témoignages du 18 octobre 2010
OTTAWA, le lundi 18 octobre 2010
Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit aujourd'hui à 18 h 31 pour étudier l'état de préparation du Canada en cas de pandémie.
Le sénateur Art Eggleton (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Il m'a fallu donner plusieurs coups avec mon marteau, cette salle étant si vaste. J'ignore combien de temps il faut pour que le bruit soit renvoyé jusqu'au fond de la pièce. Bienvenue à tous.
[Français]
Bienvenue au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.
[Traduction]
Ce soir, nous poursuivons nos audiences portant sur l'état de préparation et de réaction aux pandémies. Nous allons entendre ce soir plusieurs représentants fédéraux et provinciaux réunis en deux groupes d'experts. Nous allons tout de suite commencer avec le premier groupe, tel que vous le voyez installé au bout de la table. Puis, à 20 heures, nous passerons au deuxième groupe, dont la comparution comprendra une vidéoconférence depuis la Colombie- Britannique.
Pour commencer avec le premier groupe, nous accueillons devant nous Allison Stuart, sous-ministre adjointe, Division de la santé publique, ministère de la Santé et des soins de longue durée de l'Ontario. Toujours pour la province de l'Ontario, nous avons la Dre Arlene King, médecin hygiéniste en chef. Pour la province de la Saskatchewan, nous avons la Dre Moira McKinnon, chef des Services de santé. Nous avons également une entité qui est ici représentée à presque chacune de nos réunions, l'Agence de santé publique du Canada. Aujourd'hui, nous allons entendre le Dr Gregory Taylor, directeur général, Bureau de la pratique en santé publique. Est également ici pour répondre à nos questions le Dr John Spika, directeur général, Centre de l'immunisation et des maladies respiratoires infectieuses. Je crois que nous avons fait mention du Dr Spika au cours de réunions antérieures. Bienvenue à vous cinq.
Je vais vous entendre dans ce même ordre, à tour de rôle, à moins que vous n'ayez une préférence autre. Je vais commencer avec Mme Stuart. Si vous pouviez nous livrer vos remarques liminaires en l'espace de sept minutes environ, nous vous en serions reconnaissants.
Si je vous appelle docteure, je peux appeler tout le monde docteur. Cela vous convient-il?
Allison Stuart, sous-ministre adjointe, Division de la santé publique, ministère de la Santé et des soins de longue durée, province de l'Ontario : Je ne suis pas médecin, mais allez-y.
Merci de l'invitation qui a été faite à l'Ontario de discuter de l'état de préparation aux pandémies depuis la perspective ontarienne.
L'expérience de l'Ontario lors de l'éclosion du syndrome respiratoire aigu sévère, ou SRAS, en 2003, nous a exposés à un certain nombre de douloureuses réalités relativement à notre système de soins de santé. En dépit des mesures extraordinaires prises par de nombreuses personnes, le système dans son entier s'est avéré insuffisant face aux besoins existant à l'époque.
Après la crise du SRAS, il a été mené des études et des examens exhaustifs pour analyser les leçons apprises, et celles- ci ont aidé à influer sur et à façonner le programme de gestion des situations d'urgence sanitaires de l'Ontario, ainsi que nos efforts de préparation aux pandémies. Ces actions ont été au cœur de la réaction de l'Ontario au H1N1.
Depuis l'éclosion du SRAS, l'Ontario a consenti d'importants investissements dans des activités de renouveau de la santé publique, notamment gestion des urgences sanitaires, prévention de l'infection et capacité face aux maladies transmissibles, ressources humaines en santé et infrastructure de préparation du système de soins de santé.
L'expérience du SRAS a concentré l'attention de la province sur la nécessité d'une coordination et de communications efficaces.
En vue d'appuyer ce besoin, il a été spécialement établi au ministère un centre des opérations, réunissant du personnel de tous les services du ministère de la Santé et des Soins de longue durée de l'Ontario, pour offrir encadrement, gestion opérationnelle et appui au secteur de la santé en cas de crise, et ce centre a été le principal lieu d'exécution de notre réaction au H1N1.
Le centre des opérations a adopté le système de gestion des incidents, ou SGI, en vue de renforcer davantage encore la capacité de la province de réagir aux urgences complexes. Comme vous l'avez déjà entendu dire, le SGI favorise la communication et la collaboration avec et entre les organisations en vue de monter une action concertée en cas de situation d'urgence.
Pendant les années intervenues depuis l'éclosion du SRAS de nouveaux intervenants se sont implantés sur le terrain de la santé publique en Ontario. C'est le cas notamment de l'Agence ontarienne de protection et de promotion de la santé, un centre qui offre des conseils scientifiques et techniques en vue de la protection et de la promotion de la santé des Ontariens.
Bien qu'âgé de moins d'un an au tout début de la pandémie du H1N1, l'agence a joué un rôle important, notamment en dirigeant l'équipe d'intervention scientifique qui a fourni des conseils d'expert relativement au nouveau virus émergent. Ce travail a été mené conjointement avec d'autres collègues aux niveaux provincial et fédéral.
Ayant vécu le SRAS sans avoir le bénéfice d'une Agence de santé publique, et ayant vécu le H1N1 sans le bénéfice de l'existence d'une Agence de santé publique, je considère que nous n'avons pas encore pleinement utilisé les merveilleuses ressources qui sont à notre disposition aux niveaux national, provincial et territorial par le biais des agences de santé publique de la Colombie-Britannique, du Québec et de l'Ontario, pour œuvrer conjointement avec l'Agence de santé publique du Canada. Il nous faut intégrer et formaliser les services que peuvent offrir ces agences aux fins de nos plans. Cette intégration nous bénéficiera à tous.
Je vais maintenant vous entretenir un moment du Plan ontarien de lutte contre la grippe pandémique. La province œuvre présentement à la sixième version du plan. Ce plan définit les rôles et responsabilités à l'échelle du système de soins de santé de l'Ontario et pour les différents paliers de gouvernement, offrant lignes directrices et outils à l'appui d'activités de préparation et de réaction.
La plupart des décisions et des stratégies que nous avons mises en œuvre en réponse au H1N1 avaient été envisagées et inscrites dans le plan de lutte contre la grippe pandémique de l'Ontario. C'est grâce à nos années de planification que nous avions en place avant la pandémie des objectifs clairs en matière de politique. Le principal défi était celui du titrage des réactions à une pandémie légère alors que notre plan, comme celui d'autres zones, avait été conçu en vue d'une pandémie modérée à sévère.
Il se fait à l'heure actuelle du travail à tous les paliers pour refléter un éventail de degrés de sévérité et un éventail de réactions. En d'autres termes, il nous faut être en mesure de faire un réglage à la hausse ou à la baisse selon le besoin.
Notre consultation permanente auprès d'intervenants et d'associations de première ligne pendant le processus de planification a été au cœur de notre succès en Ontario. Les relations que nous avons établies tout au long de ce processus nous ont permis d'alimenter l'étroite collaboration que nous avons constatée dans la réaction au H1N1. L'on ne veut pas rencontrer les gens pour la toute première fois au beau milieu d'une situation d'urgence.
Une collaboration efficace est tout aussi importante aux niveaux fédéral-provincial-territorial. Pour ce qui est du futur, il importe de clarifier davantage les rôles et responsabilités, notamment en ce qui concerne les communications et l'échange d'informations. Par exemple, pendant la pandémie du H1N1, certains professionnels de la santé étaient confus quant à la question de savoir quels conseils suivre lorsqu'ils recevaient des lignes directrices cliniques sur le même sujet de sources provinciales et fédérales, ainsi que de leurs propres associations professionnelles, et peut-être même du médecin conseil en santé publique local. La bonne nouvelle est que les messages ont, pour la plupart, été uniformes. Cependant, il est injuste de s'attendre à ce qu'un professionnel de la santé très occupé ait le temps de lire tous les documents pour en conclure qu'ils disent tous plus ou moins la même chose.
Il nous faut mieux coordonner et mettre à profit les forces et les spécialités des différents paliers, tout en permettant des rajustements pour refléter les besoins uniques et différents de chaque autorité.
Nous avons, par le biais de l'Agence de la santé publique du Canada et du Conseil du Réseau pancanadien de santé publique, une tribune pour l'élaboration de plans et de réactions intégrés à l'intérieur du secteur de la santé publique. Les liens avec d'autres éléments du système de prestation des soins de santé sont moins bien développés, mais auraient été utiles dans le cadre de notre réaction face au H1N1. Je pense qu'il est généralement convenu qu'il s'agit là d'un aspect auquel il nous faut travailler davantage aux niveaux national, provincial et local.
En Ontario, nous sommes en train de faire le bilan de notre expérience face au H1N1. Trois rapports qui examinent certains volets de la réponse au H1N1 ont été préparés ou sont en train de l'être. Un rapport initial a été rédigé par la Dre King, dans son rôle en qualité de médecin hygiéniste en chef, en tant que mise à jour pour tous les Ontariens. Un deuxième rapport, portant sur la réaction du ministère de la Santé et des Soins de longue durée de l'Ontario, à titre de ministère directeur pour la province de l'Ontario, a été préparé par une équipe de vérification interne. Un autre rapport, qui sera bientôt finalisé, tissera ensemble les conclusions des deux rapports antérieurs ainsi que la rétroaction glanée dans le cadre de sondages, d'études par des groupes de consultation, et de discussions avec des fournisseurs de services de première ligne, des associations professionnelles, les médias, le public et nos ministères partenaires.
Les leçons apprises, d'abord face au SRAS, puis face au H1N1, nous aideront à continuer de peaufiner et d'améliorer nos stratégies de planification et de préparation en cas de pandémie, car nous savons que la question n'est pas celle de savoir s'il s'en présentera de nouvelles, mais bien quand. Merci beaucoup.
Le président : Merci. Représentant encore l'Ontario, nous allons passer à la Dre Arlene King, médecin hygiéniste en chef.
Dre Arlene King, médecin hygiéniste en chef, province de l'Ontario : Bonsoir. Merci de nous avoir invités ici pour traiter de la question fort importante qu'est celle de l'état de préparation aux pandémies et de ce que nous avons appris de notre réaction à la pandémie du H1N1 en 2009.
Bien qu'ayant déjà servi au poste de directrice générale du Centre de l'immunisation et des maladies respiratoires infectieuses à l'Agence de la santé publique du Canada, les observations que je vais vous livrer aujourd'hui s'inscrivent dans ma perspective en tant que médecin hygiéniste en chef de l'Ontario.
Comme vous le savez peut-être, j'ai diffusé en juin un rapport intitulé Pandémie de grippe H1N1 — Répercussions pour l'Ontario. Aujourd'hui, je vais me concentrer sur certains des défis qu'a vécus la province pendant la campagne d'immunisation lancée en réaction à la pandémie.
Il est important de souligner que le programme d'immunisation lancé en réponse à la pandémie a été le programme d'immunisation le plus vaste et le plus rapidement exécuté dans toute l'histoire du Canada. Elle a été caractérisée par une application en temps réel de la science à l'élaboration de politiques et de programmes, et par l'éducation et la communication en temps réel auprès du public et des professionnels, souvent en l'espace de quelques heures ou de quelques jours. Nous avons commandé largement assez de vaccins, et l'on estime que jusqu'à cinq millions d'Ontariens ont ainsi été immunisés. Chaque personne désireuse de se faire vacciner l'a été.
Chose guère surprenante, cependant, tout n'a pas fonctionné comme sur des roulettes. Dès le départ, il y a eu un décalage entre l'offre et la demande de vaccins. Très tôt, la demande a été forte, catalysée par la mort tragique et très publicisée de deux enfants ontariens, et l'offre était alors limitée, voire inexistante. Plus tard dans la campagne, nous avions amplement assez de vaccins, mais le désir des Ontariens de se faire immuniser s'était estompé.
Deuxièmement, nous avions sous-estimé l'organisation matérielle de l'exécution d'une campagne de vaccination de masse à l'intérieur de délais très serrés.
Troisièmement, bien que les partenaires fédéraux, provinciaux et territoriaux aient convenu que certains groupes devaient recevoir prioritairement le vaccin, l'établissement d'une telle liste a suscité chez le public la crainte qu'il y ait iniquité sur le plan de l'administration du vaccin. Par ailleurs, le jalonnement de la distribution a posé de nombreux problèmes pour les distributeurs de vaccins dans de nombreuses régions de l'Ontario et a, je pense, réduit en fin de compte l'enthousiasme à l'égard de la vaccination.
Enfin, l'emballage en cartons à chaussures de 500 doses a posé des problèmes pour de nombreux fournisseurs de vaccins.
On peut tirer de l'expérience ontarienne avec son programme provincial d'immunisation contre le H1N1 un certain nombre d'autres leçons pouvant être utiles à d'autres territoires de compétence et au gouvernement fédéral. Les perceptions par le public de l'innocuité du vaccin et de la sévérité de la maladie ont joué un rôle important sur le plan du désir des Ontariens de recevoir le vaccin contre le H1N1. Est venue s'ajouter à ces perceptions une confusion quant aux différences entre le vaccin antigrippal avec adjuvant et celui sans adjuvant. Tous ces éléments font ressortir qu'il importe que nous travaillions ensemble à tous les paliers en vue de mieux promouvoir l'innocuité des vaccins antigrippaux et de communiquer des messages clairs et uniformes à l'appui de futures campagnes d'immunisation au Canada.
Je vais également vous entretenir un instant de la surveillance. La définition des caractéristiques de toute nouvelle maladie infectieuse émergente, et le suivi et la gestion de la stratégie d'immunisation mise à exécution en conséquence, sont choses importantes pour toute autorité. J'applaudis aux efforts consentis par le gouvernement fédéral pour adopter une solution pancanadienne de gestion de l'information sur la santé publique, dans le but d'assurer un suivi et une réponse plus efficaces aux maladies infectieuses. J'attends avec impatience le jour où cette technologie, appelée Panorama, sera mise en application en Ontario.
Cette technologie améliorera la capacité de la province de recueillir, de partager et d'analyser des informations au sujet de maladies infectieuses et de nos programmes d'immunisation. Ce niveau de renseignement accru sera bénéfique aux paliers locaux, provinciaux et fédéral. Une fois un système robuste d'information sur la santé publique mis en œuvre en Ontario, la province sera beaucoup mieux en mesure de fournir des renseignements plus courants et plus exhaustifs au sujet de maladies infectieuses et de nos programmes d'immunisation. Ce système viendra également rehausser sensiblement nos efforts de gestion de toute nouvelle éclosion de maladie infectieuse.
Comme dans le cas de l'adoption de la technologie Panorama, le palier fédéral est également bien placé pour coordonner des activités telles l'acquisition de vaccins et d'antiviraux, la mise en commun de données épidémiologiques sur les maladies infectieuses et la liaison avec l'Organisation mondiale de la santé.
En conclusion, j'aimerais insister sur le constat qu'il nous faut mettre à profit les leçons apprises lors de la pandémie du H1N1 et, surtout, y donner suite rapidement pour veiller à ce que nous ne passions pas à côté de cette occasion de renforcer davantage l'état de préparation du Canada en cas d'urgence sanitaire. Le moment est venu de prendre des mesures pour veiller à ce que nous puissions faire face à la prochaine pandémie d'influenza ou autre urgence sanitaire avec une réponse robuste et hautement efficace pour le bien de tous les Canadiens.
L'Ontario demeure engagé à continuer d'appuyer la préparation en cas de pandémie, et nous envisageons avec plaisir de travailler en partenariat avec nos partenaires fédéraux, provinciaux, territoriaux et locaux pour appliquer les leçons apprises lors de la pandémie du H1N1.
Le président : Nous passons maintenant à la Saskatchewan et allons entendre la Dre Moira McKinnon, chef des Services de santé.
Dre Moira McKinnon, chef des Services de santé, Province de la Saskatchewan : Je remercie les membres du comité sénatorial de l'occasion qui m'est ici donnée de vous entretenir de questions relatives à l'état de préparation aux pandémies et des leçons apprises du point de vue de notre province.
La Saskatchewan, comme vous le savez, compte environ un million d'habitants. Elle diffère de plusieurs autres provinces en ce que sa population est principalement rurale. Les deux plus grandes villes, Saskatoon et Regina, comptent chacune environ 200 000 habitants.
Le ministère de la Santé a été avisé le 19 avril qu'un nouveau virus d'influenza avait été identifié et que celui-ci était lié à des foyers d'infection respiratoire grave au Mexique. La réaction de l'Agence de la santé publique du Canada a été vive, et elle a joui d'une excellente collaboration entre les provinces et les territoires.
Le comité clé, le Comité consultatif scientifique, s'est réuni presque quotidiennement. Il était principalement composé des leaders clés au sein de l'Agence de santé publique et des administrateurs en chef de la santé publique, et était présidé par le Dr David Butler-Jones, administrateur en chef de la santé publique du Canada, et le Dr Perry Kendall, administrateur en chef de la santé publique de la Colombie-Britannique.
L'excellent travail de l'Agence de la santé publique du Canada et du réseau de professionnels de la santé publique partout au Canada a résulté en une réponse efficace à la pandémie du H1N1.
À l'époque, le ministère de la Santé de la Saskatchewan était en train de revoir son plan d'intervention en cas de pandémie. Ce processus a été accéléré, et, du fait de l'incertitude quant à la sévérité de la pandémie, le plan a été nuancé pour englober une gamme de degrés de sévérité clinique et pour intégrer l'évaluation du risque comme facteur clé dans la détermination de la réponse, au lieu de prévoir une réponse normative.
Il a été créé un comité interministériel, et la réponse à la pandémie virale est devenue une réponse pangouvernementale. Ces premières conversations et délibérations, notamment avec des sociétés d'État, ont fait que les discussions et interventions ont été plus faciles que prévu, surtout en ce qui concerne le maintien de l'ouverture des écoles, la mise en œuvre de mesures de contrôle de l'infection dans les lieux de travail et l'acceptation du jalonnement de la vaccination.
La réaction d'urgence de la Saskatchewan à la pandémie au quotidien a été mobilisée autour des réunions fédérales, et attendait les décisions clés émanant des différents comités.
Les réunions du Comité consultatif scientifique étaient souvent ardues, animées par des débats en profondeur au sujet de lignes directrices fort longues. Une amélioration en la matière aurait été d'extraire des lignes directrices les points clés pour en discuter, pendant que le reste était examiné en parallèle. Au fil du temps, il n'a pas été possible de s'entendre sur nombre des lignes directrices, et différentes autorités ont commencé à prendre des décisions en l'absence de lignes directrices. Les lignes directrices en matière de prévention des infections, y compris le port de masques N-95, sont un exemple de ces décisions.
Nous avons vécu des défis majeurs en matière de flux, de cueillette et d'analyse rapide d'informations. Il nous manque, au niveau national, certains éléments d'infrastructure nécessaires à la fourniture d'informations presque en temps réel, afin de pouvoir prendre des décisions au jour le jour, surtout lorsque confrontés à des limitations sur le plan des ressources. L'insuffisance de l'information était surtout évidente relativement aux ramifications cliniques, aux tableaux cliniques et au taux d'admissions aux soins intensifs. Il n'y avait par exemple pas de définition constante de ce qui constituait une hospitalisation, ce qui a créé des écarts analytiques au niveau des données pour les différentes provinces. Dans certains territoires de compétence, une hospitalisation était définie comme étant l'admission à une salle d'urgence; ailleurs, comme en Saskatchewan, nous avons choisi de définir une hospitalisation comme étant un séjour de plus de 24 heures dans un hôpital.
Le Manitoba a vécu de nombreux cas graves pendant la première vague. La Saskatchewan a eu de la difficulté pendant la première vague à obtenir de l'information sur le nombre d'admissions à l'hôpital et la gravité des cas au Manitoba. Ces cas sont survenus tôt dans la pandémie, plusieurs d'entre eux avant que ne soit disponible un test diagnostique. Des membres inquiets du personnel de la Direction de la santé des Premières nations et des Inuits ont offert une série de webinaires qui ont commencé à faire la lumière sur le tableau clinique. L'Agence de la santé publique a emboîté le pas en tenant en septembre, à Winnipeg, un symposium clinique avec, comme conférenciers invités, des chercheurs et fonctionnaires chargés de la politique de l'hémisphère Sud — Chili et Australie —, ainsi qu'une discussion approfondie sur l'expérience manitobaine pendant la première vague.
Il nous a été possible de déterminer qu'un nombre important de personnes atteintes étaient originaires de collectivités des Premières nations et que les collectivités touchées comprenaient celles proches de la frontière nord de la Saskatchewan. Notre réponse a été de rehausser la surveillance dans ces localités, tant pour la première que pour la deuxième vagues. Bien que la Saskatchewan ait, de manière générale, suivi les conseils en matière d'antiviraux diffusés par le Comité consultatif scientifique, nous avons décidé que, dans le cas des collectivités vulnérables, surtout celles des Premières nations, les antiviraux seraient distribués gratuitement aux personnes présentant de légers symptômes de la maladie, et non pas seulement à celles présentant des symptômes modérés. Nous avons encouragé les conseillers médicaux régionaux à travailler avec les chefs et les conseils pour évaluer le risque dans les collectivités et en améliorer la vigilance d'ensemble. Cette approche a bien fonctionné, et des décisions ont été prises conjointement avec les chefs et les conseils, par exemple, pour promouvoir la prévention de l'infection et pour décourager la tenue d'événements festifs.
La Saskatchewan a décidé que seraient dispensés gratuitement tous les antiviraux alors en pharmacie, sans même de frais d'exécution d'ordonnance. La distribution gratuite d'antiviraux a été offerte à tous les résidents de la Saskatchewan, y compris ceux et celles pour qui de tels médicaments auraient normalement été non assurés. Un petit volant de la réserve d'antiviraux a été dégagé et des mécanismes ont été établis dans les collectivités isolées pour faciliter l'exécution d'ordonnances par des infirmières grâce à un système de commande par téléphone.
Il y a également eu des manquements côté disponibilité d'information en ce qui concerne le détail technique sur les vaccins. Je me suis sentie très mal à l'aise de devoir déclarer au public saskatchewanais qu'un vaccin était sûr, alors que je ne possédais pas toute l'information relative au vaccin en question. Le Groupe de travail sur les vaccins pandémiques avait accès à ces informations, mais ce n'était pas le cas des médecins hygiénistes en chef, à qui l'on demandait de faire confiance au groupe d'experts. Les inquiétudes exprimées ont été telles que certaines des informations ont été rendues disponibles et que l'on a recouru au Comité consultatif national de l'immunisation, organe très respecté, pour qu'il intervienne en vue d'examiner les données techniques et de faire rapport aux médecins hygiénistes en chef.
La discussion quant au jalonnement de la vaccination a demandé énormément de temps et, dans l'intervalle, l'on a commencé à mieux connaître l'épidémiologie du virus. Nous prenions des décisions sur la base de données qui n'étaient vieilles que de quelques jours. Si nous avions eu en main les données en temps réel, les décisions auraient peut-être été quelque peu différentes.
Comme vous le savez, le vaccin a été distribué par blocs de quantités relativement limitées, les premiers envois étant enregistrés le 26 octobre. La Saskatchewan avait décidé que les résidents de localités éloignées et isolées et les travailleurs en soins de santé devaient être vaccinés en premier, suivis par les femmes enceintes, les femmes ayant accouché dans les quatre semaines et les enfants âgés de six mois à cinq ans. L'on a utilisé les établissements existants de l'infrastructure de soins de santé pour offrir ces vaccinations.
Des cas de H1N1 ont été rapportés, principalement dans le Nord-Ouest, alors que nous mettions en œuvre le programme de vaccination. Cinq personnes modérément et gravement atteintes par le H1N1 ont été évacuées depuis des collectivités éloignées. L'on vaccinait en même temps les résidents de ces collectivités. Il n'y a pas eu d'autres évacuations suite à ces cinq premières. Je vois là une mesure de l'efficacité du programme de vaccination dans le nord. Des taux de vaccination d'entre 70 et 80 p. 100 ont été atteints dans la plupart des collectivités du nord pendant le premier stade de la deuxième vague. Cependant, l'influenza se propageait vers le sud et les régions étaient nombreuses à établir des centres d'évaluation de la grippe.
Le groupe prioritaire suivant, aux fins de la vaccination, désigné par le Comité consultatif scientifique, était celui de toutes les personnes âgées de moins de 65 ans atteintes de maladies chroniques. L'on avait estimé que ce groupe comptait environ 300 000 personnes, soit près de la moitié de la population de la Saskatchewan. Le nombre de vaccins dans chaque distribution était généralement communiqué un ou deux jours seulement avant réception et, dans la deuxième semaine de novembre, il n'était que de 30 000 doses. Ce facteur a été de ceux qui ont résulté en un réexamen de la distribution jalonnée des vaccins en Saskatchewan.
Trois facteurs ont amené la Saskatchewan à décider de vacciner les enfants de jusqu'à 13 ans au lieu d'ouvrir des cliniques pour les personnes souffrant de maladies chroniques. Premièrement, le nombre de vaccins était insuffisant pour pouvoir vacciner équitablement les membres du groupe de personnes atteintes de maladies chroniques; deuxièmement, des données émanant des États-Unis indiquaient que les admissions d'enfants pour infection grave étaient à la hausse; et, troisièmement, la population avait clairement exprimé son désir de voir ses enfants protégés. Les enfants ont ainsi été vaccinés en faisant appel à l'infrastructure et au processus scolaires. L'offre de vaccins s'est améliorée et la Saskatchewan a ouvert des cliniques communautaires dans ses principaux centres pendant la troisième semaine de novembre, passant rapidement d'un ciblage des personnes âgées de moins de 35 ans présentant des pathologies associées à celles âgées de moins de 65 ans présentant des pathologies associées, pour ensuite englober toutes les personnes désireuses de se faire vacciner. Nous n'avons pas vécu de problèmes de distribution, ni de difficultés avec des files d'attente.
L'évaluation quotidienne des taux de vaccination a été possible grâce au Saskatchewan Immunization Management System, un système de collecte de données en place depuis plus de 10 ans. Avant la pandémie, il avait été apporté au système des améliorations qui ont permis l'obtention rapide et facile de données par région et par sous-groupe. Le taux d'immunisation d'ensemble pour la Saskatchewan a approché les 50 p. 100. Le taux a été élevé chez les personnes âgées, les travailleurs en soins de santé et les enfants. Les taux d'immunisation les plus bas ont été enregistrés chez les jeunes adultes. La Saskatchewan s'est engagée à travailler étroitement avec les partenaires fédéraux-provinciaux-territoriaux pour examiner les leçons apprises lors de la pandémie.
Le président : Merci. Deux médecins sont ici pour le compte de l'Agence de la santé publique du Canada, mais c'est le Dr Taylor qui va prendre la parole dans ce dossier, au nom de l'agence.
Dr Gregory Taylor, directeur général, Bureau de la pratique en santé publique, Agence de la santé publique du Canada : Je tiens à remercier le comité sénatorial de m'avoir invité à partager certaines des leçons apprises de la réponse pancanadienne à l'épidémie de grippe H1N1 du point de vue de l'Agence de la santé publique du Canada, de même qu'en ce qui a trait aux rôles joués par les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux.
Tout au long de l'intervention relative à la grippe H1N1, j'ai occupé diverses fonctions, notamment des postes à titre de gestionnaire des événements du Centre des opérations d'urgence du portefeuille de la Santé, et de coprésident fédéral substitut du Comité consultatif spécial fédéral-provincial-territorial sur le virus de la grippe H1N1, ou CCS. En outre, j'ai apporté mon aide en ce qui concerne la formation de notre personnel pour qu'il puisse travailler au sein du centre des opérations d'urgence, en plus d'avoir participé aux décisions de la direction à l'agence.
Durant les présentations antérieures de témoins de l'ASPC et des provinces et territoires, le comité a pris connaissance des progrès importants réalisés par les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux en travaillant ensemble depuis l'éclosion du SRAS afin d'améliorer la planification et la capacité d'intervention globales en cas de pandémie. Ma présentation d'aujourd'hui portera principalement sur certains des mécanismes et des modalités en place, ou qui ont évolué des suites de l'épidémie de grippe H1N1, en vue de faciliter la collaboration entre les gouvernements ainsi qu'un processus décisionnel uniforme orienté par des données probantes.
Comme vous l'avez déjà appris dans le cadre de vos délibérations, la responsabilité en matière de santé publique au pays se partage entre les gouvernements locaux, provinciaux, territoriaux et fédéral. Lorsque survient un événement de santé publique ou une épidémie de maladie infectieuse impliquant plus d'une province ou d'un territoire, ou susceptible de toucher d'autres pays, le gouvernement fédéral prendra la tête de la coordination de la réponse nationale.
Le Canada a réalisé d'importants progrès dans l'établissement de réseaux de santé publique efficaces au sein des administrations en vue de se préparer et d'intervenir en cas d'épidémie de maladie infectieuse. La mise sur pied du Réseau de santé publique, qu'ont évoquée mes collègues, en 2005, a été un jalon clé et a fourni la structure pour faciliter une intervention nationale cohérente pendant l'éclosion de la grippe H1N1.
Le Réseau de santé publique est un important mécanisme fédéral-provincial-territorial dont le mandat est de servir de tribune pour la collaboration multilatérale intergouvernementale sur les questions de santé publique. Il est un organe permanent qui se réunit régulièrement et qui compte des participants de toutes les provinces et des territoires, de la Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits de Santé Canada et du Conseil des médecins hygiénistes en chef.
Comme cela a déjà été indiqué, le Plan canadien de lutte contre la pandémie d'influenza dans le secteur de la santé était déjà en place lors de l'apparition du virus H1N1. Le Réseau de santé publique ayant participé à l'élaboration de ce plan, la réponse initiale à l'épidémie de H1N1 a été très prompte. À mesure que les premiers rapports concernant un nouveau virus potentiel de la grippe commençaient à affluer de sources multiples, un certain nombre de groupes de travail fédéraux-provinciaux-territoriaux ainsi que d'experts en santé publique ont mis en branle leurs procédures et protocoles d'intervention en cas de pandémie. Cette réaction nous a permis de collaborer afin de synthétiser et d'interpréter les renseignements émergents en santé publique, en plus de fournir aux décideurs des conseils opportuns et éclairés. L'approche transparente, collaborative et fondée sur des données probantes, adoptée par les sous-ministres fédéral, provinciaux et territoriaux de la santé en réponse à la pandémie de H1N1, a été reprise par les ministres de la santé et d'autres fonctionnaires à travers le pays, tant au sein de leurs propres gouvernements que dans leurs communications publiques. Cette approche a permis d'assurer une intervention plus efficace.
Pendant la pandémie du H1N1, les sous-ministres et le Réseau de santé publique se sont réunis plus fréquemment qu'à l'habitude, et les structures de gouvernance fédérales, provinciales et territoriales ont évolué afin de permettre la prise de décisions en temps opportun. Au fur et à mesure que l'ampleur éventuelle de la crise se précisait, les sous- ministres ont instauré une structure de type commandement et contrôle qui a facilité une collaboration efficace dans plusieurs volets clés d'intervention. Cette collaboration a été rendue possible par le bon niveau de confiance entre les différentes autorités.
L'un des plus importants comités fédéraux-provinciaux-territoriaux à émerger pendant la pandémie du H1N1 a été le Comité consultatif spécial fédéral-provincial-territorial sur le virus de la grippe H1N1. Ce groupe, coprésidé par le Dr David Butler-Jones et le Dr Perry Kendall, l'agent provincial de la santé de la Colombie-Britannique, a réuni des membres du Conseil du Réseau de santé publique et du Conseil des médecins hygiénistes en chef. Le groupe s'est réuni tous les jours au début de la pandémie, puis moins fréquemment au fil de l'évolution de la pandémie. Le Conseil consultatif spécial est devenu un centre de liaison clé pour l'offre de conseils opportuns en santé publique concernant la grippe H1N1 aux sous-ministres de la santé et, par leur intermédiaire, aux ministres fédéraux-provinciaux-territoriaux.
Un autre comité important, relevant du CCS, a été le Comité de coordination de la lutte contre la pandémie, qui a surveillé l'exécution d'un vaste plan de travail fédéral-provincial-territorial faisant intervenir plusieurs groupes de travail et des centaines d'employés et qui a résulté en une liste exhaustive de matériel, dont des lignes directrices et des recommandations au CCS. Cette approche de gestion novatrice a, depuis, été reconnue pour sa capacité de fournir des conseils en temps opportun à tous les paliers de gouvernement grâce à sa nomination en tant que finaliste pour le Prix 2010 de l'Institut d'administration publique du Canada pour gestion innovatrice. La mise en œuvre de cette structure de gouvernance a ajouté de la stabilité à l'intervention fédérale-provinciale-territoriale relative à la grippe H1N1 et permis aux sous-ministres d'exercer une surveillance accrue et d'intervenir davantage dans le processus décisionnel.
Pendant la pandémie, la communication a peut-être été notre meilleur atout. Il y a eu un degré de collaboration sans précédent entre les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux en vue de veiller à ce que les Canadiens reçoivent des informations claires, uniformes et en temps opportun, afin d'être en mesure de prendre les bonnes décisions pour se protéger, eux-mêmes et leurs familles, contre l'infection. Les agents fédéraux, provinciaux et territoriaux responsables des communications ont bénéficié d'un plan détaillé, qui se trouve à l'Annexe K du Plan canadien de lutte contre la pandémie d'influenza dans le secteur de la santé. Cette annexe présente les objectifs communs de communication pour chaque étape d'une pandémie déclarée par l'Organisation mondiale de la santé et précise les rôles et responsabilités des administrations.
Je souhaite également souligner que des représentants des Premières nations, des Inuits et des Métis ont pris part au Réseau de santé publique dans le cadre de la réponse au virus H1N1. L'intervention rapide de leur leadership a été perçue comme faisant partie intégrante d'une réponse efficace sur le plan de la communication.
Dans un contexte où la preuve scientifique relativement au virus évoluait sans cesse, le succès de notre réponse est, dans une large mesure, attribuable à l'effort soutenu de toutes les administrations de tirer des leçons de l'expérience des autres et de fonder leurs décisions sur les meilleurs conseils offerts par les médecins chefs ainsi que les agents de la santé publique et les experts. L'absence d'un système électronique pancanadien de surveillance de la santé publique a créé des défis pour les administrations durant l'éclosion et a entravé la capacité d'adaptation en temps réel des interventions à une situation sans cesse changeante. Cette situation a fait ressortir la nécessité de l'établissement d'un système pancanadien de surveillance de la santé publique plus robuste, travail qui est déjà en cours.
Un protocole d'entente sur les rôles et responsabilités en matière de préparation et de réaction à une pandémie d'influenza pour le secteur de la santé, dans le contexte de l'éclosion du H1N1 en 2009, a été entériné en principe par tous les ministres de la santé fédéraux-provinciaux-territoriaux, exception faite du Québec, en septembre 2009. Cet important jalon fait fond sur d'autres ententes délimitant les rôles et responsabilités des administrations, qui ont été adoptées suite à l'éclosion du SRAS, et a été un élément clé du mandat d'ensemble du Réseau de santé publique. Par exemple, le protocole d'entente a facilité la négociation de l'accord fédéral-provincial-territorial de partage des coûts 60/40 pour le vaccin antigrippal et les antiviraux. Les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux travaillent déjà d'arrache-pied pour finaliser un protocole d'entente post-H1N1 en cas de pandémie.
La finalisation d'accords formels relatifs aux rôles et responsabilités des paliers fédéral, provincial et territorial et d'autres initiatives, telles l'entente multilatérale sur l'échange d'informations, viendront renforcer encore les efforts de préparation coopérative. Un organe fédéral-provincial-territorial pleinement établi a déjà examiné et ratifié l'orientation proposée, en vue de l'élaboration d'ententes de mise en commun d'informations, et le Conseil du Réseau de santé publique a convenu d'une approche multilatérale, de l'inclusion des substances biologiques et d'un protocole principal générique pour les maladies infectieuses, complété par des annexes techniques traitant de certaines maladies infectieuses et de certains événements de santé publique.
Les ententes collaboratives multipartites continueront d'être renforcées, et les gouvernements appliqueront les leçons apprises de l'expérience du H1N1 pour mettre à jour et peaufiner le plan national en cas de pandémie. Des travaux sont en cours dans ces domaines et les gouvernements fédéral-provinciaux-territoriaux continueront d'œuvrer ensemble à la résolution de plusieurs des questions que nous avons étayées aujourd'hui. Par exemple, le Réseau pancanadien de santé publique a entrepris un examen en profondeur et une mise à jour du Plan canadien de lutte contre la pandémie d'influenza dans le secteur de la santé.
Au niveau fédéral, le portefeuille de la santé a l'occasion de tirer des leçons de son expérience acquise dans le cadre de son intervention durant la pandémie, et il œuvre présentement à un examen du portefeuille sur la base des leçons apprises. Les renseignements recueillis dans le cadre de cet exercice orienteront la réponse à toute nouvelle pandémie ou autre urgence sanitaire nationale.
En conclusion, je suis fier de la réponse à la pandémie du H1N1 livrée par les gouvernements, nos partenaires et la population. À chacune des étapes, tous les intervenants ont compris la nécessité de travailler ensemble pour mieux protéger la santé des Canadiens. Nous avons eu le bonheur de pouvoir compter sur un réseau assurant le lien entre tous ces intervenants ainsi que les parties prenantes et gouvernements provinciaux, territoriaux et fédéral.
Dans le cas de l'agence plus particulièrement, la pandémie du H1N1 a été un test critique de nos capacités à tous les niveaux. La relation entre les gouvernements provinciaux et territoriaux et le gouvernement du Canada, surtout, a été un facteur clé dans l'atténuation de l'incidence de l'éclosion du virus H1N1 sur la santé des Canadiens.
Le président : Merci beaucoup à vous tous. Je tiens également à souhaiter la bienvenue au Dr Butler-Jones, qui a déjà été des nôtres ici. Il est ce soir dans l'assistance. Est également présent, à titre d'invité, le sénateur Kochhar. Bienvenue.
Nous allons maintenant passer aux questions et allons, comme à l'habitude, commencer avec le premier segment, puis passer aux membres du comité.
J'aurai tout d'abord une question pour Mme Stuart. Vous avez fait état de trois rapports que vous êtes en train de préparer en Ontario et dont l'un devrait être diffusé sous peu. Quand ce rapport paraîtra-t-il? À l'intérieur du calendrier prévu pour notre étude? Est-ce un document qui nous serait peut-être utile? Pourrions-nous en obtenir des copies?
Mme Stuart : Nous pourrions nous engager à vous fournir le rapport dès sa publication, et je compte que cela se fera d'ici la fin de l'année civile.
Le président : S'il paraissait plus tôt, cela nous rendrait service. Nous aussi allons terminer avant la fin de l'année civile. Nous vous serions reconnaissants de nous fournir toute information faisant partie de votre examen et qui pourrait nous être utile.
Un élément dont chacun d'entre vous a traité est le protocole d'entente fédéral-provincial-territorial. Ces protocoles d'entente sont censés assurer une meilleure coordination entre les différentes entités responsables de la préparation et de la réaction aux pandémies; or, selon plusieurs observations qui ont été faites, il y aurait place à l'amélioration.
Madame Stuart, vous avez dit qu'il importe de faire un meilleur travail de coordination et de mise à profit des forces et des orientations à tous les niveaux, tout en permettant des rajustements pour refléter les besoins uniques et divers de chaque autorité. Vous avez parlé de la confusion des professionnels de la santé quant à savoir quels conseils suivre lorsqu'ils reçoivent des lignes directrices cliniques.
Docteure McKinnon, vous avez parlé de l'absence d'information relativement aux données techniques sur les vaccins et déclaré avoir été mal à l'aise avec l'idée de déclarer au public saskatchewanais qu'un vaccin était sans risque alors que vous ne possédiez pas toute l'information à son sujet. Le Groupe de travail sur les vaccins pandémiques avait accès à cette information, mais ce n'était pas le cas des médecins hygiénistes en chef, à qui on demandait de faire confiance au groupe d'experts.
Ce protocole d'entente sur la mise en commun d'informations est-il un outil efficace? Quels en sont les éléments qui doivent être améliorés? Qui aimerait commencer? Je vais peut-être faire appel à la Dre McKinnon. Pour reprendre le dernier commentaire que j'ai fait, où pensez-vous que les améliorations doivent être apportées?
Dre McKinnon : Pour commencer, l'Agence de la santé publique du Canada a réagi rapidement à ces préoccupations et on nous a fourni des renseignements supplémentaires. Dans le contexte des relations complexes entre l'industrie des vaccins, le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux, certaines informations détaillées peuvent être simplifiées afin que certains intervenants puissent recevoir des données supplémentaires au sujet de certains aspects techniques importants des vaccins, surtout lorsque nous devons distribuer très rapidement le vaccin.
Le président : Quelqu'un de l'Agence de la santé publique du Canada aurait-il quelque commentaire à faire?
Dr John Spika, directeur général, Centre de l'immunisation et des maladies respiratoires infectieuses, Agence de la santé publique du Canada : Il y avait des problèmes quant à ce qui pouvait être communiqué et ce qui ne le pouvait pas. En ce qui concerne les informations sur le vaccin, il y en avait beaucoup qui étaient le fruit d'études en propriété exclusive. Les groupes qui ont été mentionnés et qui examinaient les vaccins devaient, pour avoir accès à l'information, signer des ententes de confidentialité. Il nous faut examiner de plus près la façon de mieux partager certaines de ces informations et, peut-être, avec qui elles doivent être partagées.
Les personnes utilisant le vaccin souhaitaient bien évidemment avoir un meilleur accès et ne voulaient pas que l'accès soit limité aux seules personnes faisant les recommandations. Cet accès est un aspect dont il faudra discuter davantage, car il s'agit clairement d'un problème.
Le président : Ces personnes qui n'avaient pas en main ces informations étaient les médecins hygiénistes en chef. Il s'agit, ce me semble, de postes plutôt élevés. Je ne sais pas pourquoi on ne leur ferait pas confiance avec ces informations.
Un aspect qui a été soulevé est qu'il n'y avait pas un volume important de vaccin disponible au début, au moment où la demande était forte, et que lorsque le vaccin a été disponible par la suite, la demande avait sensiblement diminué.
Comment faire en sorte que le vaccin soit plus rapidement disponible et comment veiller à ce que l'information soit distribuée afin que les médecins hygiénistes en chef puissent en disposer et jouir d'une confiance suffisante pour pouvoir la disséminer selon les besoins?
Dr Spika : Je suis d'accord. Le problème était en partie d'ordre davantage mécanique. Une compagnie a exigé des ententes de confidentialité signées, et peut-être que le problème a été qu'il n'y avait pas en place de mécanisme pour satisfaire rapidement cette exigence, mais ce pourrait être réglé pour l'avenir.
Dr Taylor : Je pourrais peut-être faire une observation générale au sujet du protocole d'entente. Ce protocole d'entente, et l'accord en matière d'information signé par toutes les autorités, comportent des conditions générales quant au partage d'informations en situation d'urgence. Nous œuvrons présentement à l'élaboration du menu détail des ententes sur l'échange de renseignements, qui sont censées être exécutoires et multilatérales, c'est-à-dire, au moins au départ, être uniques et signées par toutes les administrations, celles-ci pouvant convenir d'échanger entre elles les renseignements. Ces ententes renferment une intention de couvrir certains éléments du détail. Cependant, quelle que soit la situation, il ne nous est jamais possible de prévoir chaque élément d'information qu'il nous faudra communiquer, alors il s'agit d'un jeu d'équilibre entre des arrangements formels, instaurant une communication d'information de gouvernement à gouvernement — et c'est ce que seront ces protocoles d'entente et ces ententes sur l'échange de renseignements —, et des arrangements informels. Lorsque quelque chose survient, alors il faut que s'établisse entre les administrations une relation de confiance telle qu'elles peuvent appeler pour obtenir l'information dont elles ont besoin.
Le président : Une autre question qui a été soulevée est que certains pensaient qu'il y avait une contradiction sur le plan des messages entre l'Agence de la santé publique du Canada et les provinces ou les gens au niveau local, et je veux parler ici des messages concernant l'innocuité des vaccins dont nous parlions, à titre d'exemple.
Comment proposez-vous de régler ce problème? Le public peut devenir confus avec les différents messages, et les médias livreront, bien sûr, tous les messages en circulation.
Dr Spika : Du point de vue fédéral, nous avons fait de notre mieux pour veiller à ce que les messages soient uniformes, en tout cas entre les gouvernements provinciaux et territoriaux et nous-mêmes. Nous avons entendu dire qu'il y avait des différences quant aux messages sur la base des situations locales, mais il y avait également beaucoup de messages autres que ceux distribués par les provinces, les territoires et le gouvernement fédéral, ce en partie du fait, comme nous en avons fait état, de l'ère de la technologie d'Internet que nous vivons. Les gens ont utilisé leur téléphone cellulaire. L'information avec laquelle nous travaillions n'était pas définitive. Nous faisions face à de nombreuses inconnues. Peut-être que c'est là que réside le vrai défi. Il nous faut nous appliquer à l'avenir à la façon de livrer le message et de créer des messages communs, alors même qu'il intervient un si grand nombre d'inconnues. Il serait intéressant de savoir comment les gouvernements provinciaux-territoriaux envisageraient une meilleure livraison des messages.
Les voix que l'on entendait étaient fort nombreuses. Certaines des plus grosses provinces, notamment, ont fait face à de grosses difficultés du fait de la multitude d'intervenants traitant de toutes sortes de choses.
Le président : Qu'auraient à dire les représentants des provinces au sujet de ce défi?
Dre King : Je vais vous entretenir des défis liés à l'introduction d'un nouveau vaccin au beau milieu d'une pandémie. Dans notre province, nous n'avions eu aucune expérience préalable de l'utilisation d'un vaccin antigrippal avec adjuvant, et donc, en plus des messages habituels au sujet de l'innocuité des vaccins que nous avons communiqués, il nous a également fallu fournir des explications au sujet du nouveau phénomène, c'est-à-dire l'adjuvant.
Cette recommandation d'utiliser un vaccin avec adjuvant, ou un vaccin dosifié, est venue de l'OMS. Le Canada a accepté et appuyé ces recommandations, et le produit que nous avons utilisé largement était un produit avec adjuvant.
L'une des leçons apprises est qu'il est difficile de mettre en œuvre quelque chose de nouveau au beau milieu d'une urgence. À l'avenir, donc, il nous faudra réfléchir sérieusement aux genres de technologies que nous introduirons sous l'impulsion du moment. Je pense que nous comprenons mieux les défis liés à l'introduction de nouvelles technologies au beau milieu d'une crise, alors même que nous nous efforçons en même temps d'exécuter un programme. Voilà le commentaire initial que je ferais quant à l'idée d'essayer de convertir la science en politiques, en programmes et en communications publiques et professionnelles, tout cela à l'intérieur d'un cadre temporel très comprimé. Ce défi à relever a pour nous tous été sans précédent.
Une grande leçon apprise est qu'il nous faut essayer d'éviter d'introduire quoi que ce soit de tout à fait nouveau au beau milieu d'une situation d'urgence.
Mme Stuart : Une partie de la question que vous avez posée concernait les messages contradictoires. Une leçon qu'il nous faut tous bien assimiler est qu'en cette ère de messagerie instantanée, il nous faut changer nos approches en matière de communication. Je ne peux que me prononcer pour la Province de l'Ontario, mais les mécanismes d'approbation pour livrer le nouveau message, veiller à ce qu'il soit bien formulé et ainsi de suite, demandent plus de temps que le simple envoi de petits gazouillages entre deux personnes à tout un tas d'autres parties. La situation exige de nous tous que nous repensions notre communication — que nous acceptions et comprenions qu'il y aura des messages contradictoires, surtout du fait du phénomène de la messagerie instantanée, et déterminions comment gérer ces messages contradictoires.
Dr Spika : Pour revenir sur une chose qu'a mentionnée la Dre King au sujet des vaccins, la chose que nous ne voulons pas faire pendant une pandémie c'est introduire quelque chose de nouveau. C'est malheureusement ce que nous avons fait. Il nous faut adopter une approche davantage stratégique quant aux genres de vaccins que nous utilisons sur une base annuelle afin d'éviter, je l'espère, que pareille situation ne se reproduise.
Il y a 10 ans, lorsque nous avons établi le contrat sur 10 ans que nous avons à l'heure actuelle pour notre approvisionnement de vaccins en cas de pandémie, un vaccin avec adjuvant était déjà autorisé en Europe pour les personnes âgées. Un vaccin de culture cellulaire était déjà en voie de développement, et le vaccin nasal était sous brevet aux États-Unis. Cependant, en 2009, lorsque nous avons été confrontés à la pandémie, aucune de ces technologies n'était encore disponible au Canada. Nous aurions aimé avoir eu accès à ces genres de technologies, notamment le vaccin de culture cellulaire, car cela aurait peut-être retranché quatre semaines au temps qu'il nous a fallu attendre pour obtenir le vaccin.
Si nous avons une approche plus stratégique à l'avenir pour faire rentrer ces vaccins au Canada, même si une telle approche venait peut-être augmenter les coûts, du fait que ces vaccins soient plus chers, nous serons mieux placés à l'avenir.
Le sénateur Eaton : Je trouve cette discussion fascinante.
L'ensemble des agents de santé publique et Santé Canada avaient-ils une conversation téléphonique chaque matin pour discuter des dernières nouvelles au sujet de la pandémie, de la façon dont les choses se déroulaient ainsi que de la communication de messages?
Dr Taylor : Au début, oui, le Comité consultatif spécial s'est réuni quotidiennement.
Le sénateur Eaton : Les systèmes de livraison de certaines provinces semblent avoir mieux fonctionné que ceux d'autres. Avez-vous discuté depuis pour échanger sur ce qui a fonctionné et sur ce qui n'a pas fonctionné?
Dre King : Oui, vous faites là une observation importante. L'une des trois plus importantes leçons apprises, que nous avons identifiées lors de discussions entre nous, est celle de l'échange d'informations sur nos stratégies pour le déploiement des programmes d'immunisation, de manière à pouvoir identifier les pratiques aux fins de l'exécution de ces programmes. Cette question a été débattue lors de notre plus récente réunion du Conseil du Réseau de santé publique, et j'ai cru comprendre qu'il se tiendra une séance spéciale au cours de laquelle nous discuterons de cette question.
Cet aspect a été identifié comme étant un dossier important. Nous n'avons pas encore eu de discussion approfondie sur ce qui a fonctionné et sur ce qui n'a pas fonctionné chez nous, afin d'être en mesure de cerner les pratiques exemplaires.
Le sénateur Eaton : Ces renseignements nous seraient d'une énorme utilité aux fins de notre rapport.
Docteur Spika, une chose que vous avez dite m'a troublée, et c'est peut-être le fait de ma propre ignorance. Vous parliez de la santé, et de la mise en pratique de processus et de politiques. Les Canadiens qui écoutaient les annonces publicitaires à la télévision et à la radio avaient l'impression que la pandémie était en quelque sorte une guerre.
J'habite Toronto et je siège au conseil d'administration de l'Hôpital St. Michael's, où le SRAS a été une grosse affaire. Les pandémies sont une forme de guerre, n'est-ce pas? Nous faut-il apprendre à bouger plus rapidement? Oui, vous avez introduit un vaccin au beau milieu d'une pandémie, mais il importe d'être flexible en temps de guerre, n'est- ce pas? Il faut savoir prévenir les coups et s'adapter rapidement. Pensez-vous avoir travaillé du mieux possible dans les circonstances, ou bien croyez-vous que vous auriez pu mieux gérer la situation? Vous ne revivrez cependant jamais les mêmes conditions, n'est-ce pas?
Dr Spika : Nous avons appris qu'il nous faut prendre des décisions, même en présence de nombreuses inconnues. Je considère que nous avons fait un travail extra de communication des décisions au public, compte tenu du nouveau paradigme en matière de communication dans lequel nous nous trouvons, mais il y a bien sûr place à beaucoup d'amélioration. Il nous faut trouver de meilleurs moyens de cerner les autres sources de conseils qui existent, être plus proactifs et donner suite.
Le sénateur Eaton : Docteure King, les hôpitaux de soins tertiaires en Ontario disposent-ils de tout ce dont ils auraient besoin en cas de nouvelle pandémie? Ces hôpitaux sont-ils suffisamment équipés pour pouvoir faire face à une pandémie cet hiver, s'il devait en survenir une?
Dre King : Comme l'a indiqué Mme Stuart : nous sommes en train de cerner toutes les leçons apprises, et nous allons produire un rapport consolidé intégrant la participation de tous les secteurs du milieu de la santé en Ontario, y compris les organismes de santé et de soins tertiaires.
Cela étant dit, je suis arrivée le 15 juin, au beau milieu de la première vague de la pandémie, mais une infrastructure impressionnante qui était en place en Ontario était le Secrétariat des soins aux malades en phase critique. Cette infrastructure permet à la province de travailler au niveau local, puis régional, puis provincial, en vue de l'identification des lits pour soins intensifs dans la province, de telle sorte qu'en cas de demande excédentaire de soins intensifs dans des hôpitaux locaux, il soit possible de diriger des malades vers différents lits pour soins intensifs à l'intérieur de la même région et, en fin de compte, au niveau provincial.
Ce modèle est important pour optimiser l'utilisation faite de ressources rares. Cette optimisation est également en train de se faire au niveau provincial. Cela étant dit, les systèmes de soins de santé étaient, sans conteste, surchargés. Nous nous sommes débrouillés, mais les systèmes de soins de santé étaient grevés. Il nous faut donc réfléchir davantage à la façon de rendre ces mécanismes encore plus robustes, au niveau non seulement provincial, mais également national.
Pour répondre à une question que vous avez posée plus tôt, oui, nous menons une guerre, mais je crois qu'il nous faut sans cesse réfléchir aux « si ». Nous savons que l'innocuité des vaccins est une préoccupation et un défi croissants, et du fait de l'attention constante portée par les médias à nos campagnes d'immunisation, la question de l'innocuité des vaccins a fait l'objet d'examens et de discussions à un niveau que nous n'avions pas prévu. En Ontario, nous savons qu'il nous faut parler davantage de l'innocuité des vaccins, et nous espérons que cette discussion servira de base pour une discussion nationale, car la communication et l'assurance de l'innocuité des vaccins au Canada sont une responsabilité fédérale-provinciale-territoriale conjointe. Une part importante de la planification est le fait d'anticipation. Il y aura toujours quantité de surprises, mais il nous faut dès le départ réfléchir à ces choses dont nous savons qu'elles poseront des défis.
Le sénateur Callbeck : En réponse à une question du sénateur Eaton quant à la fréquence de vos communications, docteur Taylor, vous avez mentionné que le Comité consultatif spécial se réunissait quotidiennement au début. J'ai relevé dans votre déclaration que la fréquence de ces réunions a par la suite diminué.
Quelle a été la fréquence de vos discussions? Au début, vous discutiez quotidiennement : cela a-t-il été le cas pendant deux semaines? À quelle fréquence avez-vous eu des discussions par la suite?
Dr Taylor : Au départ, c'était une fois par jour, mais ce n'était pas notre seule façon de communiquer. Comme cela a été mentionné, le Comité consultatif spécial avait plusieurs autres comités relevant de lui, et ces comités étaient peuplés par des intervenants fédéraux-provinciaux-territoriaux. Toute une toile de communication bourdonnait en permanence. Le Conseil consultatif spécial communiquait deux fois par semaine jusqu'en janvier de cette année. Le Réseau de santé publique, dont deux éléments ont servi à la formation du CCS, continue de tenir des réunions. La fréquence a varié. Par ailleurs, il y avait sans cesse des appels téléphoniques. Le CCS n'était pas la seule tribune aux fins de communication.
Le sénateur Callbeck : Le fait que vous n'ayez pas eu de prise de contact au quotidien, ou en tout cas plus fréquent que cela n'a été le cas, n'a-t-il pas créé des problèmes? Deux fois par semaine, ce ne me semble pas être beaucoup.
Dr Spika : La communication entre les provinces, les territoires et le gouvernement fédéral se faisait au moins une fois par jour, mais certains comités, comme le CCS, communiquaient peut-être deux fois par semaine. Le Comité de coordination de la pandémie se réunissait chaque semaine, et les groupes de travail relevant de ce comité se rencontraient eux aussi régulièrement. L'on discutait beaucoup.
Le sénateur Callbeck : Je me rends bien compte qu'il y avait quantité de comités, mais c'est le CCS qui chapeautait le tout, n'est-ce pas, en ce qui concerne la prise de décisions?
Dr Spika : Le Conseil consultatif spécial faisait des recommandations, s'il y avait lieu, jusqu'aux sous-ministres. Les sous-ministres se réunissaient eux aussi, et vous allez en entendre parler pendant la deuxième partie de la séance.
Le sénateur Callbeck : Que pensent les provinces de ce groupe? Y avait-il communication? Le groupe communiquait- il à une fréquence suffisante?
Dre McKinnon : La communication était bonne. N'importe lequel des médecins hygiénistes en chef pouvait, à tout moment, alerter l'agence fédérale d'une préoccupation, et une réunion extraordinaire pouvait alors être convoquée.
Comme l'a indiqué le Dr Spika, le groupe se réunissait officiellement deux fois par semaine, mais il se réunissait à l'occasion trois ou quatre fois pendant une même semaine. Nous estimons que la communication avec l'Agence de la santé publique était bonne.
Le sénateur Callbeck : Docteure King, vous avez dit que très tôt, lorsque la demande était forte, vous n'aviez pas le vaccin, et que lorsque vous avez eu le vaccin, le désir du public de se faire vacciner s'était estompé. Que pourrait-il être fait à cet égard si nous nous trouvions à nouveau confrontés à pareille situation? Je constate que vous avez préparé un rapport en Ontario.
Dans certaines provinces, le pourcentage de vaccination chez les adolescents a été très inférieur à celui enregistré chez les personnes âgées. J'aimerais que vous me disiez comment nous pourrions mieux réaliser ce travail de vaccination de la population.
Dre King : Vous posez là une importante question. L'un de nos plus gros défis a été la mise en œuvre d'une liste de groupes prioritaires et d'un accès jalonné au vaccin. Vous pouvez vous imaginer, au niveau local, la maman avec deux enfants et d'autres parents désireux de se faire vacciner, mais il était exclu d'administrer le vaccin à des personnes autres que celles faisant partie des groupes prioritaires initiaux. Cette situation a posé de nombreux problèmes aux fournisseurs de soins de santé locaux, qu'il s'agisse de médecins ou d'agents de santé publique.
La solution est indubitablement l'obtention plus rapide de beaucoup plus de vaccins. Il importe qu'un système d'immunisation de masse bien pensé soit mis en œuvre et prêt à être enclenché dès le départ. La solution est une combinaison d'approvisionnement suffisant et de capacité d'exécution adéquate.
Chose qui ne m'étonne guère, l'établissement de groupes prioritaires est un défi pour nombre de raisons. Les gens croient, cela peut se comprendre, qu'ils méritent d'être immunisés rapidement, qu'ils comptent dans la société et qu'ils méritent d'être protégés. Il y a également l'aspect crainte. Essayer d'atténuer ces défis dans toute la mesure du possible la prochaine fois contribuera grandement à faire correspondre offre et demande. L'on œuvre déjà en la matière à essayer d'augmenter l'offre que nous aurons dès le départ, de manière à pouvoir satisfaire la demande.
L'Ontario a consenti de gros efforts sur le plan des communications pour essayer d'améliorer le taux de participation chez les adolescents. Nous avons lancé une campagne appelée Résistez! pour tenter de promouvoir l'immunisation chez les jeunes, une fois que nous étions en mesure d'offrir le vaccin aux jeunes. Nous étions confrontés au même défi : lorsque nous avons fini par disposer de volumes suffisants de vaccin, il y avait moins d'inquiétude quant à la sévérité de la pandémie, et le taux de participation a donc été inférieur à ce que nous aurions souhaité.
La campagne a été un effort valable et c'est le genre de campagne qu'il vaudrait la peine d'envisager, en cas de future pandémie, non seulement au niveau provincial, mais également à l'échelon national.
Le sénateur Callbeck : Cette campagne a-t-elle été menée à la télévision ainsi que dans les journaux?
Dre King : Il y a eu des affiches dans le métro et dans les cinémas. Je n'ai plus en tête tout le détail de son rayonnement, mais nous pourrions vous fournir cette information. La campagne a été menée en français et en anglais. Je me ferai un plaisir de vous fournir des détails au sujet de cette campagne.
Le sénateur Callbeck : Madame Stuart, je vais lire la dernière phrase que vous avez prononcée :
Je considère que nous n'avons pas encore pleinement utilisé les merveilleuses ressources qui sont à notre disposition aux niveaux national, provincial et territorial par le biais des agences de santé publique de la Colombie-Britannique, du Québec et de l'Ontario [...]
Pourriez-vous s'il vous plaît expliquer cela davantage.
Dre King : Les agences de ces administrations ont joué un rôle important pendant la pandémie du H1N1, mais leur intervention a été quelque peu ponctuelle du fait que leur rôle n'ait pas été planifié au départ. Les agences se sont efforcées d'intervenir là où elles pouvaient être utiles. Il est arrivé qu'elles se considèrent le plus utile à un endroit, mais qu'il ait pu y avoir d'autres perspectives en la matière.
Ce qu'il nous faut retenir est que nous avons au Canada le bonheur de disposer de ces ressources, et que celles-ci doivent être inscrites à l'intérieur de nos plans d'intervention en cas de pandémie. Il nous faut définir des rôles précis pour ces agences, au lieu que celles-ci ne fassent qu'offrir leur aide en fonction de leurs moyens. Les agences doivent avoir un rôle concret afin de nous permettre de canaliser les activités.
Le sénateur Callbeck : Docteure McKinnon, vous avez parlé du manque d'uniformité quant aux définitions. Comment pourrions-nous corriger ou améliorer ces définitions pour l'avenir?
Dre McKinnon : Il s'agit là d'une question importante. En matière de santé publique, nous intervenions dans un domaine qui aurait peut-être davantage dû être du ressort des cliniciens. Un réseau de cliniciens semblable à un réseau de santé publique aurait été utile aux fins de l'établissement de paramètres autour des hôpitaux cliniques, ainsi que de l'obtention et de l'analyse rapide d'informations à l'intérieur d'un cadre adapté à la population. Il s'agit définitivement là d'un volet qu'il nous serait possible d'améliorer, ce qui aiderait sur le plan de l'information.
Comme je l'ai mentionné, en Saskatchewan, nous étions particulièrement préoccupés par ce qui se passait dans le Nord-Ouest du Manitoba. Nous souhaitions avoir des renseignements cliniques de manière à déterminer notre réponse. Cette région est ressortie, lors de discussions et de débreffages, comme en étant une pour laquelle des améliorations s'imposent.
Le sénateur Kochhar : Je remercie les membres du panel pour l'excellent travail qu'ils ont fait en préparant leurs exposés.
Je suis troublé. Cette pandémie n'a pas été la première au Canada. Avons-nous tiré de la crise du SRAS des leçons que nous aurions pu appliquer ici? Nous avions tellement de vaccins que nous n'avons pas utilisés. Avons-nous déployé suffisamment d'efforts pour éduquer les gens quant à la nécessité de se faire vacciner? Que s'est-il passé? La pandémie du H1N1 n'a pas été la première pandémie au Canada.
Dre King : Il nous faut clairement continuer d'apprendre et d'appliquer chaque leçon apprise de chaque éclosion de maladie infectieuse émergente à laquelle nous nous trouvons confrontés. Il est important de se rappeler que cette pandémie d'influenza a été différente parce que nous avions un vaccin pour la contrer. Or, il n'a pas figuré de vaccin dans la réponse au SRAS, car il n'avait pas été possible de mettre assez rapidement au point un vaccin.
Heureusement, certaines de nos méthodes éprouvées en soins de santé publique, comme l'isolement et la quarantaine, ont porté fruit, et nous avons été en mesure de stopper la propagation du SRAS à l'échelle mondiale et à l'intérieur du Canada.
La question en ce qui concerne les vaccins a été celle de leur disponibilité, c'est-à-dire la quantité que nous avions au début et la demande. Il n'y a jamais eu concordance à cet égard, du moins pas en Ontario. L'offre et la demande n'ont jamais coïncidé. Il nous faut travailler fort pour que la situation soit meilleure à cet égard la prochaine fois.
Il y a indubitablement des défis à relever dans ce domaine. Avec les technologies de production de vaccins que nous avons, il est difficile de réduire le délai entre l'identification initiale d'un nouveau virus grippal et la production à plein du vaccin. Le délai est d'environ 16 semaines. Il est difficile, avec les technologies existantes, de raccourcir ce délai.
Il nous faut examiner chaque stade dans la pandémie, notamment avec quelle rapidité nous avons déterminé qu'il y avait dans le monde un nouveau virus, un point c'est tout, puis combien de temps il nous a fallu pour identifier la filière cellulaire, la rendre utilisable, puis produire nos nouvelles doses de vaccin.
Il nous faut envisager de nouvelles technologies pour accélérer ce processus, afin d'être en mesure de livrer plus rapidement un vaccin au Canada.
Chaque pas dans ce cheminement nous aurait permis de mieux réagir, et c'est pourquoi il nous faut disséquer de très près notre expérience.
Dre McKinnon : Nous pouvons dire que nous avons atteint les groupes les plus vulnérables. La plupart des groupes vulnérables, en tout cas en Saskatchewan, ont affiché des taux de vaccination élevés. L'autre chose remarquable — mais je ne sais pas ce qu'il en est au niveau fédéral — est que nous n'avons reçu aucun rapport d'infection au H1N1 après Noël. En Saskatchewan, nous avons eu un volume de cas normal à partir de la troisième semaine de décembre, environ, ce qui est remarquable. Cette situation correspondait à la saison grippale habituelle de six semaines, ce qui est presque du jamais vu. Nous avons réalisé une vaccination suffisante pour protéger la population, de telle sorte qu'un nombre suffisant de personnes étaient vaccinées pour stopper la propagation de la maladie.
Nous n'avons pas atteint le seuil de 75 ou de 80 p. 100 que nous aurions souhaité atteindre, mais les populations vulnérables ont été protégées et le taux de transmission a été contenu à un point tel que la propagation a été stoppée. Je pense qu'il faut garder cela en tête.
Dr Spika : Il est important de souligner que les pandémies ne surviennent que trois ou quatre fois par siècle. Il y en a eu trois au XXe siècle, la dernière survenue en 1968, soit il y a 41 ans. Si l'on compare ce qui s'est passé cette fois-ci à la situation en 1968, nous avons affiché de bien meilleurs résultats en disposant encore de vaccins lors de la deuxième vague.
Ce que nous avons peut-être appris est que nous avons presque, comme cela a été mentionné, épuisé toutes nos interventions possibles fondées sur les technologies existantes. Il nous faut changer ces technologies et obtenir des vaccins qui soient disponibles plus rapidement, en utilisant soit la culture cellulaire, soit des technologies ADN. Ce genre de chose est en cours d'élaboration.
En ce qui concerne la communication, en 1968, nous avions la télévision, la radio et les journaux. Il était alors beaucoup plus facile de contrôler les messages. Aujourd'hui, l'information est tout de suite disponible sur Internet. Nous nous sommes trouvés confrontés à de gros défis s'agissant de faire en sorte que notre message livre concurrence à tous les autres messages en circulation. Nous avons appris énormément de choses. Nous avons beaucoup mieux travaillé, mais il nous reste encore du chemin à faire.
Le sénateur Kochhar : Pour notre gouverne, combien le vaccin contre le virus H1N1 a-t-il coûté au contribuable? Quel pourcentage du vaccin a été utilisé en Saskatchewan, où 51 p. 100 de la population ont été vaccinés? Ce pourcentage est-il le même pour toutes les régions du pays? Dans la négative, pourquoi? Si l'Ontario n'a atteint qu'un taux de vaccination de 25 p. 100, pourquoi avons-nous pris du retard par rapport à la Saskatchewan? Qu'a-t-il été fait du vaccin non utilisé et quelle est sa durée de vie? Peut-être que je vous pose trop de questions à la fois, mais j'ai terminé.
Dr Spika : Certaines de ces questions ont été soulevées lors de séances antérieures. Pour ce qui est du coût du vaccin, il me faudra vous faire parvenir cette information, mais cela s'est chiffré à plus de 300 millions de dollars. Ce coût doit être compris dans le contexte de départ, soit que, selon la meilleure information disponible, nous pensions qu'il allait falloir deux doses du vaccin, alors qu'une seule dose a été suffisante. Si nous avions su cela avant de passer commande, nous aurions fait des économies de moitié, voire plus, compte tenu du taux de participation qui a été enregistré.
Nous avons pu, grâce à une renégociation avec GlaxoSmithKline, notre fournisseur, réduire certains de nos coûts de vaccination. Pour un important volume de vaccin, nous avons pu économiser au moins l'adjuvant, par opposition à l'adjuvant plus antigène, qui est une combinaison. L'adjuvant représente environ sept huitièmes du coût du vaccin. Cet adjuvant est en ce moment entreposé et nous espérons pouvoir l'utiliser au cours des années qui viennent pour le vaccin saisonnier.
Quant aux coûts réels à ce stade-ci, il me faudrait vous faire parvenir ces informations, car je ne les ai pour l'instant pas sur le bout de la langue.
Le président : Les représentants provinciaux pourraient peut-être nous entretenir des différences quant au nombre de personnes vaccinées d'une province à l'autre.
Dre King : En Ontario, nos taux de couverture ont été évalués à environ 38 p. 100. Nous avons utilisé environ 5 millions de doses de notre dernière distribution, qui a été négociée, et je crois que nous avons fini par acheter environ 9,3 millions de doses à la fin. Nous avons utilisé environ 5 millions de doses sur 9,3 millions.
J'aimerais revenir sur une chose qu'a dite la Dre McKinnon. Je suis fière de la façon dont nous avons travaillé et œuvré en collaboration avec Santé Canada dans notre réponse auprès des Premières nations et des collectivités éloignées et isolées du nord de la province. Nous avons atteint une couverture sans précédent, bien supérieure au niveau de 38 p. 100 enregistré dans la plupart de nos collectivités isolées et éloignées. Cette population m'avait beaucoup inquiétée du fait de toute une gamme de facteurs environnementaux et de pathologies préexistantes la caractérisant. Nous avons réussi à obtenir un bon taux de participation au sein de ces populations.
Au total, notre couverture de la population a été d'environ 38 p. 100. Le pourquoi des différences, le pourquoi des 50 p. 100 en Saskatchewan, le pourquoi des 38 p. 100 en Ontario et le pourquoi des taux de participation extrêmement élevés dans le Canada atlantique sont des questions qu'il nous faut examiner. Revenant à la question posée par les autres membres du comité, à savoir pourquoi il y a eu des différences si marquées — de plus du double d'une région à l'autre dans le pays — quant au taux d'immunisation enregistré pendant la pandémie, j'ai mes propres théories, mais il serait préférable que nous ayons une discussion et une évaluation approfondie de la situation.
Le sénateur Ogilvie : Je mentionnerai peut-être, pour la gouverne de notre collègue, que nous avons eu une discussion approfondie sur la question des différences entre les provinces et les raisons de nombre de ces différences, et nous pourrons donc vous fournir les tableaux qui ont été déposés.
Madame Stuart, vous avez fait un commentaire intéressant, en tout cas il a été intéressant pour moi. Vous avez dit que vous, comme d'autres, aviez envisagé une pandémie modérée à sévère, mais que lorsque celle-ci s'est avérée moins sévère, cela vous avait déroutée. J'ai l'habitude de l'idée de planifier en fonction du pire, et si les choses tournent mieux, alors on s'en tire mieux. En quoi le fait de vous être préparée pour le pire scénario possible vous a-t-il posé un dilemme lorsque s'est dessinée une version moins grave?
Mme Stuart : C'est une bonne question. En gestion générale des situations d'urgence, l'on planifie pour les pires cas et l'on espère que les plans ainsi esquissés ne seront pas nécessaires.
Le travail de préparation pour cette pandémie modérée à sévère reposait sur l'utilisation de certaines approches, tandis que la planification de quelque chose de moins sérieux, dans le continuum, n'aurait pas du tout inclus ces approches-là; d'autres stratégies seraient indiquées.
Par exemple, dans le cas d'une pandémie modérée à sévère, il peut notamment être question de la fermeture d'écoles. Si nous préparons tous nos plans, mais que se dessine une pandémie légère, alors il nous faut disposer des bonnes stratégies, élaborées à l'avance, de manière à pouvoir les appliquer à cette situation moins grave.
Nous avons commencé à élaborer de telles stratégies pour certains aspects de notre plan en cas de pandémie, mais clairement pas pour un nombre suffisant d'entre eux. Les intervenants sur le terrain nous ont fourni comme rétroaction qu'il serait utile de pouvoir faire le titrage en fonction du comportement du virus de façon à nous assurer de répondre au bon niveau. Il s'agit là d'une chose que nous ferons dans le cas de plans futurs de lutte contre la pandémie.
Le sénateur Ogilvie : Je pense que la Dre King a répondu à ma question. Je pensais avoir lu que l'Ontario, en tout cas au départ, n'avait pas eu de stratégie pour cibler des groupes choisis. Cependant, je comprends, d'après les propos de la Dre King, que cette information n'est pas juste.
Dre King : Oui, c'est juste; nous savons suivi fidèlement le processus national d'établissement des groupes prioritaires.
Le sénateur Ogilvie : Merci. Docteure King, vous avez mentionné que le conditionnement par boîte de 500 doses a posé des problèmes à nombre de fournisseurs de vaccins. Je suppose que lorsque vous dites « fournisseurs de vaccins », vous parlez de ceux qui distribuaient le vaccin et non pas de la société qui le fabriquait, n'est-ce pas? Vous parlez de la distribution à l'intérieur des districts sanitaires, n'est-ce pas?
Dre King : Oui, je parlais de la faculté du vaccinateur d'utiliser les boîtes à chaussures de 500 doses.
Le sénateur Ogilvie : C'est-à-dire l'usager final.
Dre King : Oui.
Le sénateur Ogilvie : Est-ce que ces boîtes de 500 doses étaient composées d'unités de 10 doses chacune?
Dre King : Oui, effectivement.
Le sénateur Ogilvie : Pourquoi était-ce un problème majeur que de les distribuer par boîtes de 500 doses, composées de 50 paquets de 10 doses?
Dre King : Il fallait un reconditionnement. Il nous fallait du temps pour réemballer. De fait, il y avait également des problèmes réglementaires qu'il nous a fallu régler pour que les nouveaux emballages pour la distribution soient satisfaisants. Je crois qu'il nous a fallu trois semaines pour obtenir l'autorisation de reconditionner la boîte à chaussures de 500 doses en nouveaux emballages envoyés aux vaccinateurs.
Du côté des vaccinateurs, la principale difficulté concernait les médecins. Les médecins étaient prêts à participer. Cependant, ils ne pouvaient pas gérer des quantités aussi vastes; la boîte n'entrait tout simplement pas dans leurs réfrigérateurs.
Le sénateur Ogilvie : Ma dernière question s'adresse au Dr Taylor et au Dr Spika. On nous a beaucoup parlé des difficultés rencontrées sur le plan de l'acheminement de l'information sur le vaccin. Cependant, si l'on regarde l'historique de la mise au point de vaccins en réponse à une nouvelle épidémie, et même si nous avons un vaccin annuel contre la grippe, chaque fois le vaccin est différent et donc représente un nouveau défi d'élaboration.
Selon votre expérience, est-ce que le délai pour obtenir un vaccin fonctionnel a été inhabituellement long ou court, par rapport à la tendance historique?
Dr Spika : Du point de vue de la planification pour la pandémie, connaissant le cycle de production d'un vaccin antigrippal, nous prévoyions qu'il allait falloir environ 20 semaines entre le moment où le laboratoire recevrait la lignée cellulaire jusqu'au début de la livraison. De ce point de vue, le vaccin a répondu à nos attentes. Le délai de disponibilité du vaccin était à peu près conforme aux prévisions.
Un vaccin antigrippal est nouveau sans l'être, en ce sens qu'on en fabrique chaque année. Les changements de souches qui interviennent annuellement n'exigent pas beaucoup d'ajustements, du point de vue de la réglementation. Ce qui était nouveau dans ce cas, c'était que le vaccin était adjuvanté, ce qui a introduit une complication dans le processus d'autorisation.
Pour ce qui est des délais, bien qu'il se soit agi d'un vaccin avec adjuvant, nous avons néanmoins respecté le délai de 21 semaines pour la disponibilité du vaccin.
Le sénateur Ogilvie : Merci. Je suis un peu inquiet. La science fondamentale a réussi à mettre au point un vaccin pouvant être cultivé et produit en grandes quantités en un délai relativement court, d'après ce que je peux voir. Je crains que nous alimentions l'attente que, pour chaque nouvel agent viral qui se présentera, nous pourrons répondre avec la même rapidité avec un vaccin qui pourra être identifié et facilement cultivé et qui sera stable et sûr.
J'aimerais entendre vos réactions car à mon point de vue, rétrospectivement, je trouve que nous avons eu de la chance.
Dr Spika : Je suis d'accord, si l'on reste avec la technologie existante. À l'avenir, avec le vaccin à l'ADN, nous pourrions l'avoir peut-être huit semaines plus tôt. La technologie utilisée pour les vaccins ADN — où l'on établit la séquence génomique du composant qui nous intéresse, pour l'introduire dans un autre organisme que l'on va cultiver — sera plus facilement transférable à d'autres vaccins antiviraux que le procédé actuel.
J'espère que nous ne nous sommes pas trop avancés. Nous n'avons toujours pas trouvé de vaccin contre le VIH et cela fait maintenant 30 ans que le virus a été isolé.
Le sénateur Ogilvie : Un petit commentaire. J'espère que le concept ADN va nous conduire à des vaccins rapidement. Je sais pas mal de choses sur l'ADN et je ne suis pas convaincu que tous les agents pathogènes que nous identifierons conduiront soudain à un vaccin simplement parce que nous connaîtrons une séquence génétique qui nous est utile. J'ai bien compris votre propos. J'espère, moi aussi, mais je suis inquiet.
Le président : Il nous reste cinq minutes, et deux sénateurs ont encore des questions.
Le sénateur Martin : Je vais me concentrer sur une question, dans ce cas, et ferai un bref commentaire. Docteur Taylor, lorsque vous parlez de la toile de communication, j'imagine la complexité de cette tâche en situation de pandémie. Je vous félicite tous pour le travail que vous accomplissez, celui que vous avez abattu et celui que vous continuerez de faire.
Ma question porte sur ce que Mme Stuart disait des ressources disponibles dans les diverses provinces, notamment la Colombie-Britannique. Lors de la dernière pandémie, la Colombie-Britannique est intervenue ponctuellement mais l'une des recommandations est qu'elle joue un rôle concret. Je sais que dans le prochain panel figure un représentant de la Colombie-Britannique.
Cependant, selon votre optique, quel rôle concret ces autres agences pourraient-elles jouer la prochaine fois?
Mme Stuart : Je pense que mes collègues sont peut-être mieux placés pour répondre à cette question. Je sais que les agences ont des connaissances très développées dans le domaine de la science et de la technologie et des impacts connexes pouvant être déterminés grâce à la connaissance du virus, ce qui permettra de faire les choses voulues et d'avoir les bons plans d'action.
Il importe d'utiliser les agences pour focaliser sur la science et sur les impacts, au fur et à mesure que l'on connaîtra mieux le virus et son comportement et ses effets sur la population. Nous serons alors en mesure de mieux exploiter cette information pour prendre les décisions stratégiques appropriées pour l'avenir.
Rien de ce que je dis ne donne à entendre que les agences n'ont pas été de pleines participantes à notre action. Mais je pense que nous pouvons formaliser cela et la collaboration sera encore plus fructueuse la prochaine fois.
Dr Taylor : Nous sommes pleinement d'accord et, actuellement, quantités d'interactions ont lieu avec des organisations. Par exemple, nous plaçons nos stagiaires en épidémiologie auprès de l'agence ontarienne, comme nous l'avons fait avec succès pendant des années auprès du Centre de contrôle des maladies de la Colombie-Britannique.
Mme Stuart a préconisé de formaliser ces interactions. Il se trouve justement que la haute direction de l'agence, et notamment notre administrateur en chef de la santé publique, va se rendre à Toronto la semaine prochaine pour mettre en route des pourparlers officiels avec l'agence ontarienne, pour faire précisément ce que vous préconisez. Il s'agit de mettre à profit de manière aussi stratégique que possible l'expertise que nous avons dans le pays, tout en œuvrant de manière concertée.
Le sénateur Martin : Dites-vous que nous entreprenons de formaliser des rôles précis mettant à profit l'expertise? Vous espérez que ces rôles seront fixés avant la prochaine pandémie?
Dr Taylor : C'est notre intention. Nous avons des arrangements officieux. Nous travaillons déjà avec les organisations dans deux domaines différents, mais la semaine prochaine nous entamerons les pourparlers pour officialiser ces arrangements avec les agences, alors restez à l'écoute. Nous cherchons une meilleure approche.
Le sénateur Braley : En parcourant la documentation, je me suis intéressé aux rôles respectifs des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux. Vous avez signé un protocole d'entente en septembre 2009, soit immédiatement avant que le nombre des cas indiqués sur ce diagramme ne grimpe en flèche. A-t-on tiré les leçons de cette expérience et des changements s'imposent-ils? Est-ce que ce protocole d'entente couvre également les communications destinées au public?
Dr Taylor : Parlez-vous du protocole d'entente sur les rôles et responsabilités pendant l'épidémie de H1N1?
Le sénateur Braley : Oui.
Dr Taylor : C'est exact. Nous travaillons maintenant à un protocole d'entente plus large. Celui-ci se limitait à cette pandémie particulière. Le protocole d'entente sur les rôles et responsabilités au sens large est en cours d'élaboration et nous avons eu quelques heurts à propos des formules de partage de coûts, mais celui-ci était propre au H1N1.
Le sénateur Braley : Est-ce que les rôles et responsabilités à l'égard des pandémies sont définis?
Dr Taylor : Oui, les protocoles sont destinés à cela. Nous n'avons pas achevé le plus récent.
Le sénateur Braley : Vous apportez des ajustements.
Dr Taylor : Absolument.
Le sénateur Braley : Est-ce que ce PE englobe les communications à destination du public?
Dr Taylor : Je le crois. Je crois que les communications sont comprises.
Mme Stuart : Je suis la coprésidente provinciale du groupe de travail sur le PE établissant les rôles et responsabilités lors d'une pandémie d'influenza.
Nous avons travaillé par à-coups sur ce PE depuis 1998, je crois. Nous avons abattu beaucoup de travail à son sujet, mais nous nous engluons sur la question des responsabilités financières et du partage de cette responsabilité financière. C'est toujours là où nous nous enlisons. Nous continuons à travailler sur ce problème mais, comme cela a été dit plus tôt, restez à l'écoute.
Nous envisageons de restructurer le PE lui-même de façon à avoir moins de délimitation ligne par ligne et davantage un document axé sur des principes de répartition des rôles. En vérité, un document comportant des annexes multiples et ainsi de suite ne serait probablement pas utilisé.
Nous avons une répartition des rôles et responsabilités dans le Plan canadien de lutte contre la pandémie d'influenza. Il délimite les rôles et responsabilités, notamment dans le domaine des communications. Chaque groupe ayant des attributions dans ces domaines, qu'il s'agisse des communications, des vaccins ou d'autre chose, procède à un réexamen sur la base de ce que nous avons vécu. Ce sera merveilleux si nous pouvons parachever notre PE et le faire signer, afin de pouvoir mettre cette question de côté et passer à autre chose.
Le président : Merci infiniment. Cela nous amène à la fin de cette séance avec le premier panel. Je vous remercie tous d'être venus et des renseignements que vous avez fournis.
Honorables sénateurs, sur ce deuxième panel nous avons trois participants, l'un comparaissant par vidéoconférence. Depuis Vancouver, nous avons le Dr Perry Kendall, administrateur des soins de santé de la province de Colombie- Britannique. Je l'ai bien connu en une autre capacité. Lorsque j'étais maire de Toronto, il était médecin conseil en santé publique de Toronto, et je suis donc ravi de le revoir.
De la Nouvelle-Écosse, et présent ici dans la salle, nous avons Duff Montgomerie, sous-ministre, Promotion et protection de la santé, province de la Nouvelle-Écosse. De Santé Canada, notre ministère fédéral, nous avons Glenda Yeates, sous-ministre, Santé Canada.
Nous avons jusqu'à 9 h 30 avec vous trois. Je vais commencer par demander à chacun d'entre vous de faire une déclaration liminaire d'environ sept minutes.
Nous allons commencer avec le Dr Kendall, à Vancouver.
Dr Perry Kendall, administrateur Provincial de la santé, Province de la Colombie-Britannique : Merci de m'avoir invité à contribuer aux délibérations du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie dans le cadre de son étude sur l'état de préparation et de la réponse du Canada à la pandémie de grippe H1N1 de 2009.
Je suis l'administrateur provincial de la santé de la Colombie-Britannique, soit le médecin hygiéniste en chef de la province. Le gouvernement fédéral m'a confié le premier rôle au sein du secteur de la santé sur le plan de la préparation et de la réaction à une pandémie. Pendant cinq ans, depuis sa création en 2005, j'ai également été le coprésident provincial-territorial du Conseil du réseau pancanadien de santé publique, qui a été créé après le SRAS à titre de mécanisme de coordination de la capacité et de l'action fédérale, provinciale et territoriale face aux maladies tant transmissibles que non transmissibles au Canada.
En mars, peu après la détection des virus pandémiques en Nouvelle-Écosse, en Californie et au Mexique, j'ai été nommé coprésident provincial-territorial du Comité consultatif spécial sur le H1N1, le CCS, mis sur pied par les sous- ministres de la santé canadiens avec pour mission de conseiller, guider, recommander et coordonner au cours de la pandémie.
Le CCS comprenait tant des membres du Conseil du réseau pancanadien de santé publique que tous les directeurs de la santé provinciaux et territoriaux. Le comité était coprésidé par le Dr Butler-Jones et je vous montre là un certain nombre de diagrammes qui indiquent et la structure du réseau et la structure de gouvernance mises en place pour gérer la pandémie.
Nous avions le Comité consultatif spécial sur le H1N1 et un comité de coordination de la pandémie. Cette structure de sous-comités complexe faisait rapport par le biais d'un comité de coordination de la pandémie. Cette structure apparaît également dans un autre diagramme que je vous ai fait parvenir, qui montre bien la complexité des tâches, du sujet et des domaines cliniques que nous avons coordonnés pendant de nombreux mois. Cette structure a extraordinairement bien fonctionné, vu tout ce à quoi elle était confrontée; je profite de l'occasion pour féliciter publiquement le comité de coordination de la pandémie et ses membres pour leur travail. Je pense que le Canada a une dette envers eux. Je vous ai également remis une copie du rapport sommaire sur l'expérience de la Colombie-Britannique avec le H1N1.
Pour vous donner des exemples des aspects que le comité a coordonnés et étudiés, ils comprenaient les lignes directrices et les renseignements sur les localités éloignées et isolées, les lignes directrices sur les soins cliniques et la gestion et l'emploi des antiviraux; la gestion des stocks d'antiviraux — le problème des xylanases et des porcs albertains est un exemple —, les mesures de santé publique, depuis le lavage des mains, l'éloignement, les fermetures d'écoles; des questions touchant les aspects techniques et médicaux des vaccins; la logistique de la distribution des vaccins — des communications complexes portant sur une science qui évoluait parfois quotidiennement; des lignes directrices et des conseils sur le contrôle de l'infection et la santé au travail — un gros volet était la surveillance, l'épidémiologie et le fonctionnement et la coordination des laboratoires; et enfin, une révision continue du Plan canadien de lutte contre la pandémie d'influenza de façon à en évaluer l'utilité et à l'actualiser.
En résumé, les difficultés sont nombreuses mais je pense que le Canada s'en est bien tiré comparé aux pays étrangers; et contrairement à ce que d'aucuns pensent, je ne crois pas que notre réaction ait été excessive. Je pense que nos réponses étaient mesurées.
Cependant, un certain nombre de problèmes ont été mis en lumière et je vais le faire de nouveau. À l'avenir, nous avons besoin d'un plan de réaction à la pandémie échelonné, avec des activités qui répondent à ce qui se passe réellement plutôt qu'au pire scénario possible. Il serait bon d'avoir un plan avec une échelle de gravité légère, modérée ou forte de la pandémie pour guider nos réponses à ces scénarios.
Il nous faut renforcer nos capacités de surveillance, épidémiologiques et analytiques. Il nous faut une information fiable, quasi en temps réel. J'imagine que la prochaine fois nous pourrons mieux coordonner le travail des organismes qui existent à travers le Canada, en conjonction avec l'Agence de la santé publique du Canada.
Il faut renforcer la capacité mondiale de production de vaccins et veiller à ce que l'approvisionnement canadien dispose d'une capacité de distribution plus robuste, avec des moyens de secours.
Nous devons accroître notre capacité à effectuer en temps réel l'évaluation scientifique — ce qui suppose la concertation entre nos agences — et nous devons pouvoir transmettre les résultats aux responsables politiques et communiquer rapidement avec nos publics.
Nous devons veiller à maintenir une infrastructure de prestation des services de santé publique et nous avons besoin de liaisons avec le volet soins actifs du système de santé qui soient aussi solides que celles que nous avons construites du côté santé publique. Nous devons mieux coordonner notre mécanisme d'élaboration de lignes directrices de façon à bénéficier d'un apport clinique plus rapide et assurer la distribution en temps plus opportun.
Le président : C'est une longue liste que vous avez dressée là. C'était très bien fait. Merci, docteur Kendall.
Duff Montgomerie, sous-ministre, Promotion et protection de la santé, Province de la Nouvelle-Écosse : La liste du Dr Kendall me rappelle quantité de souvenirs. En sus d'être le sous-ministre du ministère de la Promotion et de la Protection de la santé de la Nouvelle-Écosse, j'ai eu le rare privilège d'être le coordonnateur et le sous-ministre provincial-territorial du Réseau de santé publique. Lorsque le H1N1 est survenu, j'ai été amené à participer à chaque téléconférence et à chaque réunion du Conseil consultatif spécial coprésidé par le Dr Kendall et le Dr Butler-Jones.
Étant profane, cela a été pour moi un privilège révélateur de regarder ces responsables effectuer des évaluations de risque quotidiennes sur la base des indications à leur disposition au moment considéré, de façon à recommander des procédures et mesures aux sous-ministres et ministres intéressant la sûreté des Canadiens. Nous devons être reconnaissants à ces responsables pour leur professionnalisme et pour la manière dont ils ont interagi et se sont démenés quotidiennement pour prendre les bonnes décisions.
Le 21 avril 2009, le Dr Butler-Jones, à titre d'administrateur en chef de la santé publique du Canada, a tenu et présidé une téléconférence avec les directeurs de la santé du Canada, pour nous avertir du fait qu'un nouveau virus de la grippe était apparu au Mexique. Les premiers renseignements semblaient indiquer qu'il frappait particulièrement les jeunes gens. J'étais l'un des participants à cette téléconférence, et j'ai été frappé de voir que tout d'un coup nous voyions apparaître un virus qui fonctionnait à l'envers de la normale.
Le 22 avril, grâce à cet appel, nous avons pu informer notre premier ministre, nos ministres et nos responsables des mesures d'urgence en Nouvelle-Écosse et les prévenir que nous pourrions être confrontés à de vastes défis dans les jours suivants, et non pas les semaines suivantes. L'Agence de la santé publique du Canada a continué de fournir des mises à jour régulières; puis, le 23 avril, on a vu apparaître dans les médias canadiens les premiers reportages sur le nouveau virus de la grippe au Mexique.
En Nouvelle-Écosse, le district sanitaire de la capitale nous a informés d'une maladie de type grippal dans une école privée, la King's-Edgehill School. Certains des élèves revenaient du Mexique. Le 24 avril, la Nouvelle-Écosse a décidé d'activer son centre des opérations d'urgence au ministère de la Promotion et de la Protection de la santé.
Nous avions reçu l'avertissement du Dr Butler-Jones le 21 avril. Le 24 avril, nous activions notre propre système d'urgence. Des séances de breffage complètes ont été tenues avec les élus, y compris ceux de l'opposition, les sous- ministres, et Gestion des situations d'urgence Ontario.
Le 24 avril, un laboratoire de la Nouvelle-Écosse nous a fait part de sa crainte que des prélèvements qu'ils envoyaient au laboratoire national de Winnipeg, identifiés comme influenza A inclassable, risquaient fort d'être identifiés comme H1N1. Nous avons commencé à nous préparer pour l'éventuelle réception de résultats positifs au H1N1, les premiers au Canada.
Le Dr Robert Strang, administrateur en chef de la santé publique de la Nouvelle-Écosse, a rencontré les journalistes pour la première fois — non pas au sujet de cette information en particulier mais pour un breffage concernant le H1N1. Les téléconférences de communication à l'échelle nationale quotidiennes ont alors commencé.
Le 25 avril, à 23 h 30, le Dr Strang et moi-même avons été informés par le Dr Butler-Jones et le laboratoire de Winnipeg que les tests de la Nouvelle-Écosse étaient effectivement positifs au H1N1. Le 26 avril, à 7 heures du matin, les préparatifs ont commencé pour travailler avec le district sanitaire de la capitale, l'école King's-Edgehill et, surtout, pour préparer le Dr Strang et son équipe à annoncer publiquement aux Néo-Écossais et aux Canadiens que le H1N1 avait été décelé au Canada.
Vers le milieu de la matinée, nous avons été informés par le réseau de communication normal que nos collègues de la Colombie-Britannique avaient eux aussi des tests positifs au H1N1. Nous avons commencé à travailler avec la Colombie-Britannique et l'Agence de la santé publique du Canada, mais en même temps nous continuions à communiquer avec l'école King's-Edgehill, le district sanitaire de la capitale et à préparer une grande conférence de presse pour l'après-midi.
Dès midi, rien que la Nouvelle-Écosse avait reçu plus de 100 appels de journalistes parce que nous avions annoncé que le Dr Strang allait donner une conférence de presse à 14 heures. Rien au monde n'est plus satisfaisant que de dire au New York Times qu'il devait attendre son tour. Nous avions CNN et tous les médias imaginables qui nous appelaient.
À 14 heures, le Dr Strang s'est présenté devant les médias à Halifax, et donc devant les réseaux nationaux. À 15 heures, ses collègues de la Colombie-Britannique faisaient de même. À 17 heures, le Dr Butler-Jones a rencontré les médias.
De nos jours, ce qui nous importe le plus est de donner l'assurance aux Canadiens que nous sommes compétents, préparés et que nous leur donnons la bonne information.
Ma femme a été la meilleure juge. Elle m'a dit : « Je n'en croyais pas mes yeux. J'ai vu trois responsables gouvernementaux dire la même chose lors de trois grandes conférences de presse ».
Songez aux questions que vous avez posées sur le partage de l'information et sa rapidité. Le fait que dans un délai de 24 heures, trois provinces aient pu parler d'une seule voix au Canada sur ce sujet incroyablement complexe, dès les premiers jours, en dit long sur la solidité de l'Agence de la santé publique du Canada dans l'ère post-SRAS et sur les relations nouées entre les divers services de santé publique à travers le Canada.
Je vous fais cette chronologie simplement pour démontrer à quel point nous avons progressé depuis la crise du SRAS. La mise en garde que je fais même à nos propres fonctionnaires en Nouvelle-Écosse est de ne pas oublier les capacités que nous avons édifiées pour que le système fonctionne bien. Je leur dis de ne pas perdre de vue ces capacités.
Brièvement, et vous avez entendu cette expression à maintes reprises, cet événement a été géré en temps réel. Tout le monde demande ce que signifie cette expression. Du fait que les connaissances scientifiques ne cessaient d'évoluer et que nous cherchions toujours à comprendre l'ampleur de l'épidémie et le travail immédiat qui avait commencé pour mettre au point un vaccin, nous savions que les connaissances scientifiques continueraient d'évoluer et de changer presque quotidiennement. Le Dr Strang, lors de sa deuxième conférence de presse après la grande première, a adopté une phrase qu'il allait répéter aux médias de la Nouvelle-Écosse jour après jour : « Ce que je vous dis aujourd'hui peut changer demain ». Cela peut changer parce que la science et l'information peuvent changer.
Permettez-moi de conclure en vous relatant les interactions fédérales-provinciales-territoriales d'une journée pour démontrer la volonté de travailler en temps réel. Je sais que de nombreux sénateurs ont posé des questions aux témoins précédents sur le volet communication.
Lors d'une journée typique, nous commencions à 10 h 45 du matin, heure de l'Est. Nous avions une téléconférence préalable des coprésidents des sous-ministres de la Santé fédéraux-provinciaux-territoriaux, qui étaient à l'époque le sous-ministre Rosenberg de Santé Canada, Arlene Wilgosh du Manitoba comme coprésidente provinciale, le Dr Butler-Jones en tant qu'administrateur en chef de la santé publique du Canada et aussi sous-ministre de l'Agence de la santé publique du Canada, et moi-même comme sous-ministre chargé de la liaison au sein du Réseau de santé publique. Nous avions une téléconférence 15 minutes avant la téléconférence plénière des sous-ministres, et nous y faisions le point de notre action respective, de quelques difficultés rencontrées et déterminions si l'ordre du jour pour l'heure suivante était approprié et si tout était en place.
Puis, de 11 heures à midi — et le sous-ministre Rosenberg et le sous-ministre Wilgosh en tant que coprésidents s'efforçaient habituellement de canaliser la discussion — les sous-ministres étaient mis au courant des recommandations émanant de la réunion du CCS, que je vais expliquer dans un instant.
À la table des sous-ministres, nous entendions les présentations du Dr Kendall, coprésident du CCS, et du Dr Butler-Jones, et le cas échéant nous les transmettions à nos ministres respectifs. Dans la plupart des cas, nos ministres nous avaient habilités, lorsqu'il était question de données, de simplement prendre les décisions.
À 13 h 45, nous avions une conférence téléphonique préalable à la réunion du Comité consultatif spécial. Ce comité était la cheville ouvrière de cette organisation. Le Dr Kendall et le Dr Butler-Jones le présidaient. Il faut rendre hommage au gouvernement de la Colombie-Britannique qu'il ait permis au Dr Kendall de consacrer autant de temps et d'énergie à cet effort national tout en s'occupant de sa propre juridiction, mais surtout au Dr Kendall et à son engagement.
Puis, à 14 heures, la téléconférence plénière était en route, et elle pouvait durer entre une heure et trois heures. De nombreux groupes d'experts alimentaient les administrateurs en chef de la santé avec les derniers chiffres et renseignements. Les administrateurs étaient aux prises avec la difficulté de ne pas disposer de toute l'information, car celle-ci continuait d'évoluer, tout en devant évaluer le risque et faire des recommandations aux décideurs et, surtout, aux Canadiens. Ils communiquaient ensuite aux Canadiens les nouvelles mesures prises. Ces discussions étaient immenses et rudes. Très souvent, elles étaient incroyablement détaillées.
À 16 heures, les responsables des communications fédéraux-provinciaux-territoriaux tenaient une discussion. Puis, nous avions la téléconférence des sous-ministres, la téléconférence du CCS, et nos responsables des communications prenaient les résultats de ces deux téléconférences et commençaient à veiller à ce que, du point de vue des messages transmis, nous disions tous la même chose aux Canadiens.
Je ne vais pas entrer dans le détail des mesures prises par chaque province après ces téléconférences. Par exemple, la Nouvelle-Écosse, à 17 heures chaque jour, tenait une grande téléconférence de tous les directeurs généraux de nos autorités sanitaires et leurs équipes pour partager l'information provenant de ces autres téléconférences.
Le CCS faisait des recommandations aux sous-ministres, les sous-ministres les acceptaient puis les transmettaient aux administrations, aux médecins dans leurs cabinets et aux soignants qui piquaient les bras ou informaient les citoyens.
Enfin, il y avait un petit groupe composé du sous-ministre Rosenberg, du sous-ministre Wilgosh, du Dr Butler-Jones et de moi-même qui avions convenu de convoquer une réunion à la demande de l'un ou l'autre des membres de ce groupe, et cet accord valait également pour le comité CCS. Le Dr Kendall savait que si l'administrateur en chef de la santé publique de la Nouvelle-Écosse disait avoir un problème, il pourrait partager cette information avec le Dr Butler- Jones et il veillerait alors à ce que ces communications aient lieu.
Pour abréger, il y avait un système de communication relativement ouvert, transparent et facilement accessible au plus haut niveau des gouvernements lors de cette flambée.
Le président : Merci beaucoup de nous avoir fait cette description du système de communication et de la manière dont il fonctionnait lors d'une journée typique, comme vous l'avez appelée
Glenda Yeates, sous-ministre, Santé Canada : Merci infiniment de cette occasion de vous rencontrer aujourd'hui.
[Français]
Je suis ravie de témoigner devant ce comité aujourd'hui avec mes homologues provinciaux de la santé. Lorsque je suis entrée en fonction à Santé Canada, le 1er mai 2009, nous étions au cœur de la première vague de grippe H1N1.
[Traduction]
L'une des premières activités de ma première journée, le 1er mai, a été de participer à l'une des téléconférences que M. Montgomerie a décrites. J'étais alors sous-ministre associée, et la téléconférence sur ce sujet était avec les sous- ministres fédéraux-provinciaux-territoriaux de la santé. À ce stade, ces téléconférences avaient lieu chaque jour.
J'ai été précédemment sous-ministre de la santé de la Saskatchewan, et je peux donc dire que je comprenais, pensais- je, certaines des difficultés provinciales-territoriales rencontrées, et j'ai été frappée par l'étendue de la collaboration entre les gouvernements que j'ai observée.
Avant d'aborder le grand sujet d'aujourd'hui, celui de la collaboration fédérale-provinciale-territoriale, je veux évoquer brièvement le rôle de Santé Canada à l'égard du H1N1, puisque je ne serai pas là pour la suite de vos délibérations.
Premièrement, sur le plan réglementaire, nous étions responsables de l'autorisation du vaccin et des antiviraux, par exemple. Je sais que certains de mes collègues de Santé Canada vous ont déjà expliqué ce processus.
Deuxièmement, nous avons aussi des responsabilités particulières à l'égard de la prestation des services de santé dans les réserves des Premières nations, en collaboration et en partenariat avec les administrateurs de la santé locaux et provinciaux et d'autres. Je sais que vous avez parlé avec le Dr Paul Gully, de Santé Canada, et que vous traiterez de cette fonction avec d'autres collègues lors de séances futures.
Troisièmement, Santé Canada avait un rôle de coordination au sein du gouvernement fédéral. Nous étions la courroie de transmission entre ce mécanisme fédéral-provincial-territorial et d'autres ministères fédéraux — Agence canadienne d'inspection des aliments, ministère de la Défense nationale, Citoyenneté et Immigration Canada, Agence des services frontaliers du Canada et tous les autres ministères fédéraux — qui, avec notre partenaire du portefeuille de la santé, l'Agence de la santé publique, se rencontraient pour mettre au point les actions du gouvernement du Canada.
Quatrièmement, nous devions travailler avec nos collègues pour assurer une coordination aussi étroite que possible. À cet égard, nous avons aussi commencé un travail que beaucoup d'autres provinces ont évoqué, à savoir tirer les leçons de l'expérience. Nous, dans le portefeuille de la santé, et je crois que le Dr Butler-Jones en a déjà parlé, travaillons à un rapport sur les leçons à retenir dans notre domaine.
À la table fédérale-provinciale-territoriale, nous nous sommes également réunis spécifiquement pour coordonner l'exploitation des leçons apprises au niveau FPT. Nous nous sommes réunis en avril à Terre-Neuve et avons passé en revue les leçons apprises à ce stade et déterminé quel travail reste à faire, et ce travail est en cours.
Je formulerai quatre observations concernant l'examen que nous avons effectué jusqu'à présent en tant que sous- ministre FPT, sur les domaines suivants : premièrement, la gouvernance FPT et la prise de décision; deuxièmement, les communications; troisièmement, les questions relatives au vaccin; enfin, quatrièmement, les rôles, responsabilités et relations entre les gouvernements provinciaux et territoriaux et le gouvernement du Canada.
Premièrement, au sujet de la gouvernance FPT et de la prise de décision, comme on l'a fait remarquer, dès les premiers jours nous avons opté pour une structure de commandement et de contrôle permettant une collaboration et une supervision efficaces dans les nombreux domaines d'intervention qui ont été évoqués ici : la planification, les opérations, la logistique, les communications et les services de santé. De nombreuses personnes ont mentionné le rôle clé joué par le Comité consultatif spécial sur le H1N1, dont les délibérations et recommandations remontaient au niveau des sous-ministres pour leur décision.
[Français]
Bien que la structure de gouvernance mise en place ait été utile, nous travaillons avec les experts en gestion d'urgence pour voir comment on pourra l'appliquer lors d'événements auxquels le secteur de la santé sera confronté dans le futur.
[Traduction]
Deuxièmement, pour ce qui est des communications, plusieurs témoins du panel précédent, ainsi que M. Montgomerie et le Dr Kendall, les ont qualifiées d'atout précieux. Cependant, nous savons que des améliorations restent possibles. Plusieurs personnes ont parlé du fait que l'information évoluait sans cesse. Il se posait toutes sortes de problèmes techniques au cours des premières phases de la pandémie, des aspects qu'il était difficile de communiquer au public, par exemple la raison pour laquelle les enfants avaient besoin de deux piqûres et les adultes une seulement, ou bien pourquoi on recommandait le vaccin sans adjuvant aux femmes enceintes plutôt que le vaccin avec adjuvant. Les responsables des communications ont déployé des efforts considérables pour assurer une coordination soutenue et efficace des messages émanant des pouvoirs publics. Nous avions tous conscience que la cohérence des messages était primordiale.
En ce qui concerne les Premières nations et les Inuits, nous savions également que pour communiquer efficacement avec eux il nous fallait la participation des collectivités ou des organisations nationales. Dans le cadre de l'examen que nous avons mené au niveau des sous-ministres FPT, nous avons conclu que nous avons réussi généralement à communiquer efficacement avec la population, mais avons constaté aussi que même des divergences mineures dans nos messages ou nos communications entraînaient des difficultés. Cet examen va nous permettre de tirer les leçons pour l'avenir.
Le troisième aspect que j'aborderai est celui des vaccins. Cet enjeu-là aussi a retenu l'attention. Un nombre important de Canadiens se sont fait vacciner, mais avec des taux variables à travers le pays, comme le panel précédent l'a fait remarquer. Nous pensons que nos campagnes de vaccination ont été très fructueuses, en comparaison avec d'autres pays. Le Canada a affiché un fort taux de vaccination. Je pense que mes collègues provinciaux et territoriaux conviendront que certains problèmes liés à la production et à la distribution du vaccin ont mis à l'épreuve nos relations.
[Français]
À l'apogée de la pandémie, les retards dans la production du vaccin ont piqué l'intérêt des médias et suscité l'inquiétude dans la population.
[Traduction]
D'un point de vue opérationnel, cette situation a été difficile pour toutes les administrations.
Au niveau fédéral, nous étions confrontés à des renseignements extrêmement variables donnés par le fabricant, renseignements qui changeaient parfois non seulement d'un jour à l'autre, mais d'heure en heure. Nous avons admis l'importance pour les provinces et territoires d'avoir des renseignements fiables afin qu'ils puissent procéder à la planification voulue, notamment réserver des locaux pour les cliniques, réserver du personnel et informer le public du moment où le vaccin sera disponible. Nous avons fait de notre mieux pour diffuser en temps opportun l'information dont nous disposions.
Tout au long de ce processus, je crois que nous en avons appris beaucoup sur ce qu'implique la fabrication d'un vaccin. Nous nous sommes rendu compte de la volatilité de ce processus. Nous avons depuis apporté des améliorations grâce à la mise au point d'un nouveau système de passation de contrats pour la fourniture de vaccins qui permet une meilleure concertation avec les provinces et territoires dès le départ. Les responsables tiendront compte aussi de la variation des taux de vaccination à travers le pays et dans certaines populations afin de cerner les pratiques exemplaires. Je pense que ce point a été mentionné par le panel précédent.
Enfin, en ce qui concerne les rôles et responsabilités des pouvoirs publics, nous avons distingué quelques domaines dans lesquels nous recherchons les moyens d'améliorer la collaboration entre les secteurs. Encore une fois, nous pensons que la collaboration a été bonne mais, par exemple, un certain nombre de personnes ont estimé qu'elle avait été excellente avec les responsables de la santé publique, mais que dans le domaine des soins actifs et cliniques il y aurait lieu d'améliorer les réseaux de collaboration et les méthodes de communications.
[Français]
Nous cherchons aussi une façon d'améliorer notre système de surveillance afin d'améliorer notre capacité d'adapter notre intervention à des milieux évolutifs.
[Traduction]
Si des améliorations demeurent possibles, notre capacité globale d'intervention lors de la pandémie H1N1 témoigne des efforts déployés par les administrations pour être prêtes à y faire face, et ce bien avant que la pandémie soit déclarée. Mes collègues provinciaux et territoriaux et moi-même sommes déterminés à maintenir cette collaboration et à apporter des améliorations pour que le secteur de la santé soit encore mieux préparé à la prochaine pandémie ou urgence sanitaire.
Le président : Merci infiniment de ces utiles suggestions. De fait, vous tous nous avez été très utiles aujourd'hui.
Je vais poser la première question au Dr Kendall. Vous avez cité un certain nombre de possibilités d'amélioration mettant en jeu les leçons apprises. Je les ai notées rapidement pendant que vous dressiez la liste. Je veux vous donner l'occasion de nous en dire plus sur celles qui vous paraissent les plus importantes, afin que nous comprenions mieux ce que vous voulez dire.
Dr Kendall : Nous travaillons sur notre capacité à saisir l'information et à utiliser les capacités de modélisation que nous avons. Par exemple, le Québec a l'Institut national de santé publique du Québec; l'Ontario a son Centre de contrôle des maladies et d'autres provinces ont une capacité intellectuelle et analytique. Ces agences ont commencé dans le courant de l'été à mettre en commun leurs renseignements et leurs ressources. Cependant, si nous avions réfléchi davantage au préalable et si ces agences avaient été en mesure de travailler dans les domaines de la modélisation mathématique, en se fondant sur les expériences internationales dans l'hémisphère sud et en extrapolant ces modèles dans le scénario canadien, nous aurions pu être un peu plus intelligents, plus malins et mieux informés que nous ne l'avons été. Nous avons bien rassemblé l'information pendant l'été et l'automne, mais si nous commençons les discussions maintenant, on peut espérer que nous nous en souviendrons encore lorsque la prochaine pandémie frappera. Je veux dire par là qu'il s'agit de voir quels accords nous pouvons conclure pour utiliser la capacité des modèles mathématiques, des épidémiologistes et des spécialistes de l'influenza et comment, lorsque nous avons besoin de lancer des enquêtes spécifiques sur des questions d'épidémiologie, sur les causes ou les effets ou l'impact d'une pandémie sur des sous-groupes particuliers, nous aurons la capacité de mobiliser ces ressources plus rapidement et de manière plus coordonnée. Ce n'est pas que nous ne les ayons pas utilisées, mais vu ce que nous savons aujourd'hui, nous pourrions prépositionner les agences de façon à pouvoir lancer ces études plus rapidement.
Il nous faut également un moyen de disséminer plus rapidement des renseignements inattendus ou même des renseignements que nous ne voulons pas entendre pour les faire examiner et accepter par les pairs. Je songe en particulier aux études faites en Colombie-Britannique, en Ontario et au Québec qui donnent à penser que les personnes vaccinées antérieurement pour la grippe saisonnière sont peut-être plus susceptibles de contracter une infection au H1N1, cette infection étant encore plus grave. Nous avons appris cela dans le courant de l'été. Des évaluations par les pairs ont été faites mais si nous avions eu un mécanisme d'avalisation par les pairs rapide, cette information aurait été reçue peut-être avec une meilleure acceptation. Nous aurions pu l'éprouver davantage. En l'état des choses, les décideurs — les membres du CCS, les médecins, et cetera — ont eu connaissance des rapports des scientifiques des rares provinces qui avaient achevé le travail, mais il n'y avait pas réellement d'accès public à ces données avant janvier ou février. Si nous pouvions établir un mécanisme rapide de génération de l'information, avec un examen, une critique et une réévaluation rigoureux par les pairs, je pense que cela nous aiderait à l'avenir. Nous n'avions jamais songé à mettre en place un tel mécanisme auparavant. Franchement, c'était là des renseignements surprenants que nous n'attendions pas. Il en a résulté des changements dans le programme de vaccination contre la grippe saisonnière; dans ma province, cela a changé la façon dont nous faisons les choses, et c'est le cas aussi d'autres provinces.
C'est un exemple où nous pouvons mettre en œuvre un peu plus rapidement et plus facilement que nous ne l'avons fait au cours des six mois de la crise notre intelligence et notre capacité intellectuelle et analytique. Nous avons eu la chance d'avoir eu l'été comme période de répit entre la première et la deuxième vague. Cela nous a permis d'actualiser notre information, de tirer les leçons de ce qui se passait dans l'hémisphère sud et d'appliquer certaines de ces leçons aux leçons que nous avons nous-mêmes apprises dans le domaine de la santé publique.
Il faut travailler sur les liaisons avec le système des soins actifs. Ce dernier est ce que l'on pourrait appeler un système faiblement intégré. Les médecins sont des spécialistes individuels et les hôpitaux travaillent souvent chacun de leur côté. Il est difficile dans un système faiblement intégré de collecter l'information auprès des unités de soins intensifs, de la rassembler et de l'analyser. Nous avons fini par obtenir cette information, mais il a fallu attendre jusqu'en septembre pour pouvoir rassembler les experts pour examiner les leçons de ce qui s'est passé en mai ou juin à l'unité des soins intensifs du Manitoba. La prochaine fois, nous devrons pouvoir nous connecter plus vite et avoir une information plus précise. Je préconise de nous pencher sur ces trois aspects.
Le président : Merci beaucoup. Est-ce que l'un ou l'autre des deux autres témoins souhaiterait intervenir sur ce point?
M. Montgomerie : Je souscris au propos du Dr Kendall sur les ressources existantes; nous pourrions les prépositionner afin d'y accéder plus rapidement, particulièrement celles des trois provinces qu'il a mentionnées.
La structure de gouvernance résulte du fait qu'un groupe restreint de sous-ministres se sont rendu compte qu'il n'existe pas de structure de gouvernance robuste. Je crois que c'est en juillet que nous avons finalement pu solidifier cette structure.
Enfin, ce que dit le Dr Kendall sur le système des soins actifs est tout à fait vrai. Le système de santé publique a une tradition de collaboration en raison de la nature de notre mission. Ce n'est pas le cas des systèmes de soins actifs. Par exemple, le Manitoba avait besoin d'appareils respiratoires et ainsi de suite. Il n'y avait pas de système de communication évident auquel le Manitoba pouvait s'adresser en dehors de ses frontières. L'on vous a dit que l'Ontario avait son propre mécanisme interne.
C'est un domaine dans lequel nous sommes résolus, en collaboration avec nos collègues fédéraux, à réaliser une meilleure communication.
Le sénateur Seidman : Docteur Kendall, vous avez parlé de la nécessité de renforcer les systèmes de surveillance. Madame Yeates, vous avez également parlé d'améliorer les systèmes de surveillance. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur les systèmes de surveillance que nous avions, si nous avions une surveillance en temps réel et la déclaration obligatoire des réactions indésirables? Pourriez-vous également parler de la normalisation des données entre provinces, du partage des données, et peut-être des changements que vous recommanderiez pour améliorer la surveillance?
Dr Kendall : L'absence de surveillance en temps réel, de collecte de données et de mise en relation a été constatée après le SRAS. De fait, le gouvernement fédéral a investi des sommes considérables, par l'intermédiaire d'Inforoute, dans l'édification d'un Réseau de santé publique sur les maladies contagieuses et un système électronique de collecte de données sanitaires, qui vont tous deux nous aider à rassembler les données en temps réel, à gérer les épidémies et les stocks de vaccins, et cetera. C'est le système Panorama. La plupart des provinces acceptent le système et vont l'appliquer. Nous avons mis en place l'un de ces modules au Centre de contrôle des maladies de la Colombie- Britannique pour la gestion des stocks. La collecte des données de vaccination doit commencer en 2011. Ce système est complexe, mais il est en cours de construction. Il a fait l'objet d'un investissement considérable, probablement supérieur à 100 millions de dollars.
En Colombie-Britannique, nous avons mis au point un système qui nous permet de suivre les facturations des médecins pour des maladies de type influenza, en les comparant aux tendances historiques des saisons grippales. Nous avons pu utiliser ce système pour suivre les consultations médicales pour des maladies de type influenza. Une fois que nous avons couplé ce système avec les tests de laboratoire, nous avons pu tracer sur une base quotidienne les facturations des 24 heures précédentes. Cette information nous donnait essentiellement notre courbe épidémique. Nous pouvions déterminer quand les gens tombaient malades. Les données de laboratoire nous indiquaient la nature de leur maladie. Nous savions qu'à l'apogée de l'épidémie, la moitié des consultations de médecins pour des maladies de type influenza étaient dues au H1N1 et l'autre moitié à un mélange d'autres virus. Nous avons construit nos courbes épidémiques et déterminé nos réponses sur la base de cette information.
Nous avons également cinq administrations sanitaires régionales. Elles nous faisaient rapport quotidiennement sur la situation dans leurs salles d'urgence et leurs unités de soins intensifs ainsi que leur capacité d'appareils respiratoires. Cette information était coordonnée dans nos centres de commandement, en quelque sorte. Nous avons ensuite pu communiquer cette information à nos collègues de l'Agence de santé publique, qui pouvait l'intégrer à son programme de surveillance de l'influenza.
La plupart des provinces peuvent fournir une partie de cette information. Je ne suis pas sûr que la capacité de suivi de la facturation médicale existe dans toutes les provinces.
En outre, par l'intermédiaire de notre programme de soins automatisé d'automne, nous avons pu suivre de près qui recevait des traitements antiviraux, à quel groupe d'âge appartenaient les patients et dans quelles régions de la province ces traitements étaient dispensés. Nous pouvions cartographier cette information et la corréler aux facturations, ce qui nous permettait de savoir assez bien si nous répondions aux besoins thérapeutiques et si cette information correspondait à ce que les médecins voyaient dans leur cabinet. Nous avons également utilisé cette information comme outil pour actionner le triage téléphonique. Nous avons introduit des tarifs spéciaux pour les cabinets de médecins parce que nous ne voulions pas que les gens malades aillent voir leur médecin uniquement pour des conseils. Nous avons introduit des honoraires de consultation téléphonique. Une fois que nous avons atteint un certain niveau d'activité grippale, nous avons actionné ces honoraires. Une fois que nous avons dépassé l'apogée de la pandémie et que celle-ci refluait, nous avons pu annuler ces honoraires parce que nous revenions à la situation normale.
Mme Yeates : Je conviens avec le Dr Kendall qu'il y avait beaucoup de bons renseignements dans certaines provinces. En ce qui concerne votre question sur l'uniformité, c'était souvent un problème de mise en commun. Les données qu'avait la Colombie-Britannique étaient différentes, disons, de celles dont disposait le Québec. Les deux provinces pouvaient avoir de bons systèmes de surveillance, mais encore une fois cette information devait être mise en commun pour compléter le mécanisme de surveillance permanent de l'Agence de santé publique. Je crois que nous tous sommes convaincus qu'un moyen plus robuste et plus systématique de collecter ces données serait utile.
Je vais parler de certains des problèmes que nous avons rencontrés lorsque nous avons atteint la phase de vaccination, par exemple. Une question raisonnable que pouvaient se poser les Canadiens, et la question que posaient les médias, était de savoir combien de personnes avaient été vaccinées jusqu'à ce jour. Nous pouvions répondre que nous savions combien de vaccins avaient été produits et expédiés, sachant qu'il y a plusieurs étapes à franchir entre l'expédition du vaccin et sa réception par une province et son administration aux patients. Nous avons fini par recevoir l'information qui permettait de répondre à cette question, qui semble élémentaire, à savoir combien de personnes avaient été vaccinées jusqu'à ce jour, mais nous ne l'avions pas en temps réel. Ces dossiers de vaccination en temps réel en cours de planification seront importants pour notre ciblage, lorsque nous déterminons quels groupes nous joignons et quels groupes nous manquons.
Je vais traiter de nos responsabilités à l'égard des Premières nations. Nous suivions les maladies de type influenza sur une base quotidienne. Je recevais des rapports quotidiens. Parfois nous pouvions suivre cette information par le biais de nos évacuations sanitaires, par exemple, dans les collectivités autochtones isolées et rurales. Là encore, ce suivi était laborieux. Le travail se faisait manuellement dans bien des cas. Ce n'était pas le genre de données de surveillance que nous souhaitions. Nous avons fait en sorte que cela marche. Nous avions de bons renseignements pour prendre les décisions, même s'ils n'étaient pas toujours rassemblés d'une manière optimale et comme nous souhaiterions les avoir pour l'avenir, ce qui est la raison de certains des investissements évoqués.
Le sénateur Seidman : Avez-vous d'éventuels changements à recommander?
Mme Yeates : Le renforcement de l'information et des données est évidemment un engagement primordial. Je ne connais pas précisément les besoins du système Panorama à ce stade, mais c'est l'Agence de la santé publique qui en a la responsabilité et vous pourriez lui demander lorsqu'elle reviendra. Je pense que nous sommes tous en faveur de la plus grande uniformité possible et d'autant d'information en temps réel que nous pouvons en avoir dans ce pays.
Le sénateur Seidman : Est-ce que les réactions nocives ont été suivies?
Mme Yeates : Oui, cela a été fait de deux manières. La principale, pour ce qui est des vaccins, a été le fait de l'Agence de la santé publique, qui reçoit les déclarations de réactions novices, lesquelles ont été suivies de très près, et les répercute. Nous-mêmes, en tant qu'autorité de réglementation au sein de Santé Canada, étions à l'affût de déclarations de réactions nocives, par exemple aux antiviraux, ce genre de choses. Il existe des mécanismes de déclarations des réactions nocives. Dans tous les cas, cette information était disséminée à travers le réseau.
Le président : Permettez-moi de demander si le Dr Kendall ou M. Montgomerie souhaite donner un complément de réponse à la question du sénateur Seidman.
Dr Kendall : Je n'ai rien à ajouter.
M. Montgomerie : Selon l'optique d'un sous-ministre, dans la mesure où en 2010 nous n'avons pas de système national de surveillance électronique, il nous en faut un. Nous devons collaborer avec nos collègues fédéraux et entre nous pour en établir un. Je suis un profane, mais si ce genre de système de communication avait été en place, cela aurait fait toute une différence.
Dr Kendall : Nous pouvons suivre l'utilisation des antiviraux en Colombie-Britannique parce qu'il y existe un système de dossiers médicaux électroniques, et donc je sais au quotidien combien de doses d'antiviraux ont été prescrites et administrées. Je n'en avais pas la moindre idée dans le cas du vaccin. Nous connaissions le nombre de doses distribuées aux autorités sanitaires, nous connaissions le nombre de doses distribuées aux médecins, mais ce n'est que lorsque nous avons effectué un sondage auprès de 8 000 ménages en avril et interrogé 15 000 personnes que j'ai pu dire que nous avions probablement vacciné 40 p. 100 de la Colombie-Britannique. Ce n'est qu'en avril, mai ou juin que j'ai reçu les chiffres indiquant que nous n'avions vacciné que 41 p. 100 de la population. Cependant, lorsqu'on ventile par groupes cibles, nous avons joint environ 75 p. 100 des femmes enceintes, 66 p. 100 des travailleurs de la santé et 68 p. 100 des personnes souffrant d'une maladie chronique sous-jacente. De fait, le ciblage a bien fonctionné, mais j'étais dans le flou total avant d'avoir ces chiffres. Nous n'avions que des conjectures.
Le sénateur Ogilvie : Ma question s'adresse à Mme Yeates et je vais passer des vaccins aux antiviraux pendant un moment.
Pouvez-vous me confirmer que votre ministère est responsable de l'homologation des médicaments au Canada?
Mme Yeates : Oui.
Le sénateur Ogilvie : Ma question porte sur le processus. Une fois qu'un médicament est homologué, en l'occurrence le Tamiflu — il a été agréé pour usage au Canada mais il est fabriqué à l'étranger — il est importé dans notre pays. Est- ce que Santé Canada effectue régulièrement des tests sur des échantillons prélevés au hasard du médicament importé?
Mme Yeates : Je ne connais pas la réponse dans le cas spécifique du Tamiflu. Je peux dire que, en général, une fois qu'un médicament reçoit un avis de conformité, nous n'effectuons pas de tests aléatoires sur les produits pharmaceutiques. Nous testons les procédés généraux de fabrication ou bien nous vérifions la certification des usines qui les produisent, par exemple. Si le médicament est fabriqué à l'étranger, si le médicament est produit par une société américaine, nous nous fions à la norme de ce pays. Dans le cas des États-Unis, cette norme sera une norme de la U.S. Food and Drug Administration, par exemple.
Le sénateur Ogilvie : Je craignais qu'il en soit ainsi. Si le médicament était produit en Amérique du Nord, je ne vous poserais pas la question. Cependant, la réponse à une question que j'ai posée à Jim Hall, de Roche Canada, m'a réellement inquiété. Je lui ai demandé où le médicament était fabriqué et il a refusé de répondre en disant que c'était un renseignement commercialement sensible.
Je connais un peu l'industrie pharmaceutique et cette réponse m'a réellement surpris. Je me suis ultérieurement renseigné et ai découvert que la société a un certain nombre d'usines de fabrication dans des pays plutôt intéressants. Ce renseignement m'a amené à réellement m'inquiéter du contrôle que nous exerçons sur la composition des médicaments une fois qu'ils sont homologués dans notre pays. En rapport avec votre réponse, effectivement, si le médicament était fabriqué en Amérique du Nord nous pourrions être raisonnablement assurés de la qualité des procédés de fabrication car nous avons divers moyens de vérifier. Cependant, dans la quelque douzaine de pays que j'ai relevés, je doute que nous y ayons jamais mis les pieds, sans même parler des usines de fabrication.
Je vais m'en tenir là, mais je vais approfondir cette question par d'autres canaux. Merci de votre réponse.
Le président : Avez-vous quelque chose à ajouter?
Mme Yeates : Non, mais je serai ravie de communiquer au comité la pratique générale — et je n'ai pas tous les détails ici — suivie à l'égard des médicaments produits à l'étranger, par exemple, pour obtenir ce genre d'assurance de la qualité. Je me ferai un plaisir de rassembler de plus amples renseignements pour vous.
On vient de me passer une note disant que des médicaments comme le Tamiflu qui sont importés au Canada sont sujets à des épreuves d'identité, c'est-à-dire que des essais sont effectués pour confirmer qu'il s'agit bien du bon produit, et c'est l'agence canadienne qui est responsable de ces tests. Nous serons ravis de vous envoyer de plus amples renseignements sur la nature précise de ce processus.
Le sénateur Ogilvie : Monsieur le président, c'est la question que j'ai posée : Est-ce que nous analysons effectivement la composition du médicament importé dans le pays, pour en vérifier la pureté et la composition? Si la réponse est oui, au moyen d'épreuves régulières et aléatoires, alors j'ai la réponse que je recherchais, mais ce n'était pas la réponse initiale qui m'a été donnée.
Mme Yeates : Je ne pense pas que les épreuves portent sur des échantillons prélevés au hasard. Je m'engage à vous communiquer, à vous et aux autres membres du comité, les renseignements indiquant quelle sorte d'essais nous effectuons, avec quelle fréquence, et si les tests portent sur des échantillons aléatoires ou s'ils sont systématiques.
Le sénateur Ogilvie : Merci.
Le sénateur Martin : Docteur Kendall, moi qui suis britanno-colombienne, je veux vous remercier du rôle de premier plan que vous avez joué dans l'élaboration du plan de lutte contre la pandémie, et sa bonne exécution à travers le pays. Ce succès est dû à votre initiative et à celle de beaucoup d'autres, et je vous en remercie au nom des Britanno- Colombiens.
Je m'interroge sur le rapport sommaire que vous nous avez remis, docteur Kendall, et j'ai également une question pour Mme Yeates, soit celle de savoir si chaque province et territoire a rédigé un tel rapport sommaire et si tous ces rapports ont été rassemblés et examinés. J'imagine le volume d'informations qu'il faut réunir, en ce sens que nous effleurons à peine la complexité du travail que vous avez abattu, et de celui qu'il faut entreprendre pour se préparer à la prochaine pandémie.
Ce rapport est un bon récapitulatif. Nous avons reçu d'autres témoins, mais nous n'avons pas nécessairement vu un rapport de chaque province. Existe-t-il d'autres rapports comme celui-ci? Si oui, est-ce Santé Canada qui les reçoit? Est-ce un autre organisme qui recueille, analyse et rassemble les rapports, et ainsi de suite? Je pose la question car je puis imaginer l'intérêt de rassembler ces renseignements précieux.
Mme Yeates : Lorsque nous nous réunissions comme groupe FPT, il était admis que chaque administration rédigerait ses propres rapports. Comme le Dr Kendall l'a indiqué, ils sont partagés au fur et à mesure qu'ils sont achevés.
Nous avons aussi estimé qu'il nous fallait éviter les lacunes au niveau de la coordination et de la compilation. C'est ce que nous avons entrepris de faire. Je ne puis vous dire quels sont les plans de chacune des juridictions pour ce qui est de leur rapport, mais je crois savoir que la vaste majorité de ces rapports, voire tous, seront rendus publics et que nous pourrons les examiner.
M. Montgomerie pourra peut-être en dire plus selon la perspective FPT.
M. Montgomerie : Chaque province rédige un rapport, selon sa législation et ses besoins, et certaines, comme la Colombie-Britannique et l'Ontario, ont déjà présenté le leur et l'ont communiqué à nos collègues fédéraux. En Nouvelle-Écosse, le Dr Strang est sur le point de publier son rapport à l'intention des Néo-Écossais, mais il est sous- tendu par un rapport détaillé de 35 pages sur les leçons apprises que nous allons communiquer aux responsables du système de santé de la Nouvelle-Écosse ainsi qu'à nos collègues fédéraux.
Ce qui compte le plus, selon l'optique provinciale, est de savoir si nous avons mis en lumière les aspects primordiaux. Est-ce que, suite à nos discussions avec nos collègues fédéraux et provinciaux, nous avons mis le doigt sur les aspects primordiaux, de façon à pouvoir tous avancer ensemble? Le Dr Kendall a mis le point sur plusieurs aspects clés aujourd'hui : la gouvernance, les dossiers médicaux électroniques, les contrats pour les vaccins et d'autres aspects revenant constamment.
D'ici Noël, presque toutes les provinces et tous les territoires auront fait leur travail. Nous vérifierons de nouveau à la table FPT pour voir si nous avons omis quelque chose.
Le sénateur Martin : Les témoins ayant comparu devant le comité ont abordé des thèmes récurrents. Vous dites que votre femme a trouvé remarquable que trois porte-parole aient traité à peu près des mêmes points.
Cette question s'adresse à vous tous. Avez-vous une requête à présenter au comité? Nous avons entrepris cette étude pour améliorer cet important plan national, améliorer ce qui existe déjà. Du point de vue de l'information que nous rassemblons, devrions-nous demander certaines choses? Je sais que vous ne participez qu'à la séance d'aujourd'hui, mais ayant suivi nos travaux jusqu'à présent, pouvez-vous suggérer une manière pour nous de focaliser et de jouer un rôle national?
Dr Kendall : C'est une question difficile.
Je ne vois pas de domaine que vous auriez négligé. Les témoins qui comparaissent ici ont une expérience commune. Nous avons terminé nos « lavages à chaud » comme nous les appelons au Réseau de la santé publique et au Comité consultatif spécial, et nombre des enjeux que j'ai soulevés ont également fait surface en ces occasions. Nous avons vécu des expériences quelque peu différentes au sein des provinces et territoires, et c'est pourquoi nous devons chacun tirer nos propres leçons. Je pense que vous ferez un rapport objectif et franc sur ce que vous aurez entendu, et cela nous rendra service.
Mme Yeates : Je me fais l'écho de ce propos. En parcourant la liste des panels, des témoins et des sujets, il m'est apparu que vous menez là une étude exhaustive, et nous sommes tous impatients de connaître vos conclusions, car vous êtes particulièrement bien placés pour nous répercuter ces constats. J'ai trouvé très complète la liste de vos sujets.
M. Montgomerie : Je pense que chaque fois qu'un organe externe comme le vôtre, qui n'est pas directement impliqué dans un événement comme cette pandémie, dispose des ressources et du temps voulus pour rassembler une myriade de personnes, c'est une chance exceptionnelle. Comme le Dr Kendall, je suis impatient de lire votre rapport. Il nous aidera à garantir que nous n'avons rien oublié.
Le sénateur Martin : Je m'interroge quant à la réalité mondiale. Nous examinons ce qui s'est passé au Canada et notre plan canadien. Cependant, nous le savons bien, ce qui se passe à l'étranger entraîne des effets en cascade et peut se répercuter sur nous, surtout lorsqu'il s'agit de virus.
Nous avons parlé à des Mexicains et nous savons qu'il existe un réseau international de laboratoires et de partage de l'information, mais est-ce que quelqu'un est chargé de suivre ce qui se passe dans le monde pour voir dans quelle mesure le Canada pourrait s'en ressentir? Nous aurons beau avoir un excellent plan, mais ce qui se passe en dehors de nos frontières va se répercuter sur nous.
Mme Yeates : Absolument, et c'est pourquoi nous appuyons le travail de l'Organisation mondiale de la santé. Elle fait le même travail que nous à l'échelle internationale pour tirer les leçons de la pandémie, mais nous voulons participer à sa planification pour l'avenir. Un certain nombre de personnes estiment que l'OMS, qui avait planifié en fonction d'une épidémie grave, doit modifier ses signaux. Nous avons tous axé notre planification sur ses signaux, et dans la mesure où ces derniers étaient fondés presque exclusivement sur l'étendue, par opposition à la force ou la gravité, de la pandémie, nous réalisons qu'un affinement est nécessaire et c'est ce que nous avons proposé à l'OMS, comme beaucoup d'autres pays. Notre connexion avec l'OMS est importante.
Le sénateur Cordy : C'est la soirée de la Nouvelle-Écosse, me semble-t-il. Merci d'être venus nous aider avec notre étude des enseignements. C'est toujours une bonne idée, après un événement comme le H1N1, de faire une analyse rétrospective pour voir si nous aurions pu mieux faire les choses.
Je vais parler d'abord de la communication, car presque tous les témoins que nous avons entendus ont parlé de la façon d'améliorer la communication.
Monsieur Montgomerie, vous nous avez très bien expliqué la chronologie, la concertation fédérale-provinciale- territoriale qui a permis que la main droite sache ce que faisait la main gauche. Cependant, je ne crois pas que cette concertation ait filtré jusqu'au grand public, et je ne sais pas à qui en revient la faute. Le Dr Butler-Jones était à la télévision nationale et le Dr Strang était à la télévision en Nouvelle-Écosse et tous deux diffusaient d'excellents messages, mais dès qu'ils avaient terminé, les médias interviewaient un autre médecin qui avait un point de vue opposé, si bien que le grand public ne savait plus qui croire. Les messages étaient divergents.
Comment surmonter ce genre de choses? Les responsables au sommet, en Nouvelle-Écosse et dans les autres provinces aussi, j'en suis sûr, et à l'échelle nationale, s'efforçaient de faire passer le message.
Comment intéresser les médias, aujourd'hui et demain, à se familiariser avec les préparatifs que nous faisons en vue de la prochaine pandémie, qui est inévitable. Est-il possible de les intéresser maintenant, ou bien les vannes ne s'ouvriront-elles que lorsque la prochaine pandémie frappera?
Nous recevions des messages contradictoires.
M. Montgomerie : La réalité est que, quoi que nous fassions, il y aura toujours des « têtes parlantes », il y aura toujours des experts, il y aura toujours d'autres personnes.
Nous, en Nouvelle-Écosse, avant décidé très tôt de mettre en avant le Dr Strang en tant qu'administrateur en chef de la santé publique de la Nouvelle-Écosse. Je connais bien le milieu journalistique et j'assistais fréquemment aux mêlées. Je porte un énorme respect aux journalistes. On peut déterminer très vite d'après leurs questions le moment où ils perdent confiance. J'ai assisté à la plupart des conférences de presse pour cette raison.
Nous savions que nous devions mettre le Dr Strang à la disposition des médias chaque fois qu'ils le demandaient, car ils faisaient appel à lui. Lorsqu'ils entendaient un autre point de vue d'un autre expert sur l'Internet ou aux nouvelles, ils voulaient de la clarté. Ils ne voulaient pas entendre l'avis du Dr Montgomerie ou du ministre de la Santé de la Nouvelle-Écosse. Ils voulaient celui du Dr Strang.
Je sais que le Dr Butler-Jones a vécu la même chose chaque jour, et probablement dans un cadre plus rude, celui des médias nationaux. Mon conseil est de garder son sang-froid, de rester calme, d'être disponible, d'énoncer les faits démontrés et ensuite advienne que pourra.
Si nous avions gravement dérapé dans ce domaine, nous aurions perdu la confiance des Néo-Écossais et des Canadiens. Je félicite la structure politique d'avoir eu le courage de soutenir au quotidien les administrateurs en chef de la santé publique.
Les conversations que j'ai eues avec mon premier ministre concernant le fait que les États-Unis d'Amérique disaient qu'ils auraient assez de vaccins pour tous les Américains d'ici le 1er octobre n'ont pas été faciles. Les États-Unis affirmaient que 80 p. 100 des Américains seraient vaccinés à la mi-octobre, ou bien les États-Unis recommandaient de fermer les écoles. Il est légitime que le premier ministre et le ministre posent ce genre de questions politiques. C'était à eux qu'il incombait d'expliquer à leurs électeurs pourquoi les États-Unis avaient en main le vaccin le 1er octobre alors que nous ne recevions les nôtres qu'en novembre, ce qui était la réalité.
J'applaudis les élus d'avoir soutenu les administrateurs en chef de la fonction publique qui continuaient à répondre à ces questions chaque jour. Une pression incroyable s'exerçait sur ces personnes qui devaient affronter les médias chaque jour. J'ai une petite anecdote amusante à vous raconter : pendant la période de vaccination des groupes à haut risque, nous avons eu un appel téléphonique où l'on nous a dit que des infirmières de la santé publique avaient ouvert un flacon de vaccin de trop en plein jour. Une fois ouvert, il fallait l'utiliser. Elles sont allées dans une taverne de l'autre côté de la rue pour recruter des gens qu'elles percevaient comme à haut risque. Les médias nous sont tombés dessus. Le lendemain, le Dr Strang a rencontré les journalistes et a dit « J'applaudis à l'initiative de ces infirmières qui ont veillé à ce que ces vaccins soient utilisés ». L'un des journalistes a demandé : « Alors, docteur Strang, est-ce qu'on a vidé des flacons dans cette taverne? »
Le Dr Strang, a répondu, du tac au tac : « Je suis sûr que des flacons ont été vidés, mais ce n'était pas les nôtres ».
Il n'y a pas de réponse facile à votre question, hormis pour dire mon admiration pour le pouvoir politique qui a appuyé les directeurs de la santé.
Dr Kendall : Il est inévitable que des points de vue opposés soient exprimés. Cela aide si nous avons des porte-parole qui ont le plus souvent raison — qui ne se trompent jamais de manière dogmatique — et qui sont crédibles, disponibles, ouverts, et aussi bien renseignés que possible. Si nous sommes en désaccord avec ce que dit une « tête parlante », nous avons alors de bonnes raisons sur lesquelles nous appuyer. Dire « Faites-moi confiance, j'appartiens au gouvernement », ou bien « Faites-moi confiance, je suis médecin » ne marche pas. Il faut asseoir un niveau de crédibilité supplémentaire, qui est la récompense d'un travail acharné.
Le sénateur Cordy : Nous savons que si nous disons que nous appartenons au gouvernement et que nous sommes là pour aider, nous ne sommes pas toujours crus.
Je veux parler de la vaccination et de la distribution des vaccins. Madame Yeates, vous avez dit plus tôt que vous aimeriez en avoir de plus grandes quantités. Vous avez dit qu'il fallait préparer la distribution des vaccins et l'infrastructure de leur administration de manière à pouvoir traiter un plus gros volume en faisant appel à divers fournisseurs de services et lieux de vaccination.
Les pharmaciens qui ont comparu devant le comité nous ont dit aussi que pendant une pandémie il faudrait utiliser la chaîne de distribution déjà en place et non pas vouloir en créer une nouvelle pendant une pandémie. C'est ce qu'ils nous ont dit. Pourriez-vous nous parler de l'utilisation de la chaîne d'approvisionnement déjà en place, plutôt que d'en organiser une différente pendant une pandémie?
Pourriez-vous également nous parler des divers fournisseurs de services et lieux de vaccination? Lorsque survient une pandémie ou une grippe, nous avons coutume de vacciner d'abord les personnes âgées et les enfants. Cette grippe a été différente parce que les plus de 65 ans jouissaient d'une immunité préalable et les plus jeunes avaient une immunité résiduelle. Cette grippe était un peu différente dès le départ, et les gens voulaient venir avec leurs enfants.
Pouvez-vous parler de la distribution du vaccin à la lumière de certains des aspects que j'ai mentionnés?
M. Montgomerie : En ce qui concerne l'approvisionnement, je vais me placer dans l'optique du sous-ministre. En Nouvelle-Écosse, nous n'avons cessé de dialoguer avec nos pharmaciens, nos médecins et d'autres, car nous avons modifié la façon de distribuer les vaccins.
Nous avons dû changer les choses. Si nous avions suivi la filière normale des cabinets de médecins, il aurait fallu une éternité pour vacciner tous les Néo-Écossais. Nous avons opté pour des lieux publics ouverts par nos autorités sanitaires de district. Cela a causé des problèmes, surtout au début, mais nous les avons résolus. Lorsque nous avons ouvert la vaccination à la population générale, nous sommes repassés par les cabinets de médecins traditionnels et avons veillé à ce que les médecins soient approvisionnés. Au début, il y a eu des difficultés.
Le président : Y a-t-il d'autres commentaires?
Dr Kendall : Oui; nous avons utilisé une chaîne d'approvisionnement standard pour les vaccins financés par l'État à cause des quantités massives, des problèmes de capacité, et du fait que les boîtes de 500 doses devaient être reconditionnées en lots plus petits avec tous les renseignements. Nous devions dispenser les instructions d'administration à l'intention des autorités sanitaires, qui pouvaient redistribuer les doses à des cliniques de masse, à des cabinets de médecins ou plus tard à des pharmaciens. Nous avons utilisé la chaîne d'approvisionnement que nous utiliserions normalement pour des raisons de volume et de capacité.
La question des enfants a été un défi. Nous avons priorisé les enfants à risque à travers le pays, ceux souffrant d'une affection sous-jacente. Les enfants en bonne santé se voyaient infectés, mais ils connaissaient le plus faible taux de complications, du moins en Colombie-Britannique. Même si le Globe and Mail nous reproche encore de ne pas avoir donné priorité aux enfants en bonne santé, il n'y avait aucune raison épidémiologique de vacciner des enfants en bonne santé alors que d'autres personnes étaient beaucoup plus susceptibles de tomber gravement malades et d'aboutir à l'hôpital. Nous avons ajouté les enfants entre six mois et cinq ans lors de la deuxième vague de vaccination, une fois que nous avions une quantité suffisante de vaccins.
Mme Yeates : J'ajoute, selon l'optique de l'autorité de réglementation, que nous avions un lieu prédéterminé, ou parfois deux lieux dans les plus grosses provinces, auxquels le vaccin était livré une fois produit. Malgré les délais très serrés, nous avons pu tester chaque lot, ce qui était impératif. Le fabricant livrait le vaccin à ces lieux désignés et les gardait en attente pendant que nous faisions simultanément les tests, de façon à ne pas perdre de temps dans le transport. Nous pouvions donner le feu vert, une fois que nous avions satisfait aux contraintes de sécurité, aux lots qui étaient prépositionnés et en place. Les provinces et territoires pouvaient utiliser le mécanisme d'approvisionnement qu'ils jugeaient le plus propice. Certaines provinces ont opté pour des cliniques de masse alors que d'autres ont opté pour les cabinets de médecins. Nous avons jugé que les provinces et les territoires étaient les mieux à même de prendre ces décisions.
Nous avons fait preuve d'innovation pour réduire les délais dans la chaîne d'approvisionnement, mais les raccourcis étaient exclus sur le plan de la sécurité. Le prépositionnement nous a permis de comprimer les délais de transport, ce qui ne serait pas un problème avec un vaccin saisonnier ordinaire, tout en garantissant l'innocuité des vaccins.
Le sénateur Callbeck : Madame Yeates, vous avez mentionné un certain nombre d'améliorations grâce à un nouveau mécanisme de passation des marchés de vaccins qui donnera un plus grand rôle aux provinces et territoires. J'aimerais que vous nous en disiez plus sur ces améliorations.
Mme Yeates : Une difficulté que nous avons rencontrée était due aux délais très serrés, alors que dans une situation saisonnière nous avons des délais beaucoup plus longs. Je ne crois pas que nous ayons jamais été confrontés aux aléas quotidiens de la production des lots. Nous disposons habituellement de délais longs et le fabricant s'occupe de ces choses.
Par exemple, Santé Canada a envoyé quelqu'un chez le partenaire de Sainte-Foy afin d'avoir quelqu'un sur place qui soit averti plus vite lorsque des difficultés de production survenaient. Cette information supplémentaire nous permettait de savoir quand nous étions susceptibles de recevoir des expéditions plus grosses ou plus petites, car toutes les mesures d'assurance de la qualité qui doivent intervenir à l'usine étaient prises. Une partie de ce processus était typiquement du ressort du gouvernement du Canada, qui recevait le vaccin et le redistribuait aux provinces.
Pour l'avenir, nous avons convenu d'avoir une représentation provinciale-territoriale au niveau, d'abord, de la définition des besoins dans les conditions du contrat, par exemple. En faisant intervenir les provinces et territoires plus précocement, nous avons mieux pu cerner certaines de leurs contraintes et ils étaient ainsi associés à ce processus.
Nous avons créé initialement davantage un processus fédéral-provincial, sur le plan de la définition des besoins avec les fabricants. Nous ne savons pas si ce processus sera important lors d'une pandémie future mais il se pourrait bien qu'il y ait davantage de transparence et de réflexion dès le départ.
Le sénateur Callbeck : Cette fois-ci, est-ce que les provinces ont eu un rôle dans la définition des besoins en rapport avec les conditions du contrat?
Mme Yeates : L'Agence de la santé publique du Canada est responsable des contrats et connaît mieux les détails.
Nous savions que les provinces avaient eu leur mot à dire, mais sans participer d'aussi près que ce sera le cas dorénavant. Les contrats n'étaient jamais passés sans consultation des provinces, mais dorénavant ce sera un partenariat plus étroit et plus égal à chaque étape du processus. Nous avons appris cette leçon.
M. Montgomerie : Nous félicitons le gouvernement fédéral car c'est une leçon apprise qui a rapidement été suivie d'effets. Nos collègues ont collaboré avec le gouvernement fédéral sur ce nouveau contrat. Il est très différent de l'ancien. Cela a été utile et s'est fait vite.
Le président : Avez-vous quelque chose à ajouter, docteur Kendall?
Dr Kendall : Non; je conviens que l'établissement des conditions du contrat, la négociation des contrats et l'évaluation des soumissions font maintenant l'objet d'un partenariat. Le coût des vaccins est partagé et nous partageons maintenant la responsabilité de la négociation et des modalités contractuelles.
Le président : À moins que mes collègues aient d'autres questions, je vais terminer avec une question sur les listes de priorités de vaccination : Cette liste des priorités a-t-elle bien marché? Y avait-il des variations entre les provinces pour ce qui est de cette liste?
Nous avons entendu les doléances des pompiers, parmi les premiers intervenants. Je crois que les premiers intervenants étaient placés plus loin sur la liste, encore que ce rang ait pu varier d'une province à l'autre. Il s'est produit également des controverses, telles que les athlètes professionnels qui passaient avant les autres, ou des membres des conseils d'administration des hôpitaux qui se glissaient dans la file d'attente, et cela a irrité le public. Les médias adorent monter en épingle ce genre de situations.
Où pensez-vous que des améliorations sont possibles dans l'établissement de la liste des priorités, particulièrement sous l'angle des variations provinciales?
M. Montgomerie : Pour situer le contexte, il faut savoir que le 23 juillet, le CCS a passé une après-midi à déterminer combien de vaccins il fallait commander pour les Canadiens, parce que la commande devait être passée très vite. Je crois que le Dr Spika a mentionné le chiffre de 20 ou 21 semaines. Nous savions ce jour-là que dans 20 ou 21 semaines nous allions recevoir notre vaccin, mais pas tout à la fois, les livraisons seraient étalées dans le temps. Cet étalement signifiait qu'il nous fallait établir des priorités.
Ce séquençage a été incroyablement difficile. Les premiers répondants sont un bon exemple, car ceux d'entre nous qui étions sur le terrain dans les provinces avons essuyé tous les coups. Les policiers et d'autres disaient qu'ils devaient être servis en priorité. C'était aux responsables de la santé publique de s'en tenir au message ou non. Oui, certaines provinces ont dérogé à ces groupes à risque et cela a donné lieu à des objections.
Le président : Comment peut-on régler ce problème?
M. Montgomerie : Au bout du compte, comme le Dr Kendall l'a dit, nous vivons en démocratie et les gouvernements prennent des décisions. Notre administrateur en chef de l'Agence de la santé publique du Canada et moi-même formulons des recommandations à nos gouvernements et ces derniers prennent les décisions. En Nouvelle-Écosse, nous avons de la chance : nous avons vu se succéder deux gouvernements et tous deux ont pleinement appuyé le message.
Dr Kendall : Pendant des années, les priorités du plan de lutte contre les pandémies ont été, premièrement, de réduire la morbidité et la mortalité chez les populations vulnérables et, deuxièmement, d'assurer le maintien des piliers d'une société civique. Ces priorités tournaient donc autour du maintien de la réactivité et des capacités du système de santé.
Le dilemme survient lorsque nous devons placer un groupe devant un autre groupe parce que nous avons un approvisionnement limité. Cherchons-nous d'abord à minimiser les hospitalisations en espérant que nous aurons suffisamment de personnel soignant pour gérer les cas, ou bien protégeons-nous les soignants pour leur permettre de s'occuper d'un plus grand nombre de patients gravement malades? Notre décision a été d'essayer de protéger les plus exposés au risque de mort et de maladie. La deuxième priorité a été ensuite de protéger les soignants essentiels.
Un grand nombre d'intervenants d'urgence sont venus réclamer. J'avais cinq groupes, qui voulaient tous être les premiers dans la file d'attente. Je leur ai donc demandé s'ils voulaient m'aider à décider lesquels de leurs collègues seraient placés au deuxième, troisième ou quatrième rang. Cette suggestion s'est avérée mal avisée, mais j'ai fait face aux conséquences.
Mme Yeates : J'ai décrit comment le Comité consultatif spécial a suivi ce processus consistant à rassembler les données et l'information disponibles sur les personnes les plus vulnérables et susceptibles d'être touchées, pour nous communiquer ensuite, nous les sous-ministres, les groupes prioritaires choisis.
Les sous-ministres ont eux-mêmes posé beaucoup de questions. C'était un bon processus, très réfléchi; nous savions que l'avis des responsables de la santé publique faisait l'objet d'un consensus à travers le pays. Il était clair que nous allions accepter cet avis et le suivre collectivement.
Je ne doute pas que, dans certaines circonstances, il pourrait y avoir d'autres considérations pratiques. Par exemple, dans le Nord, tout le monde a convenu que dans une localité isolée, il fallait vacciner toute la population. C'est l'approche qui a été recommandée pour les populations rurales et isolées. Certaines circonstances ont fait que des juridictions ont appliqué des priorités légèrement différentes, en fonction de leurs capacités de distribution et leurs préoccupations propres.
En tant que sous-ministres, nous avons été rassurés par le fait que cette question difficile avait fait l'objet d'une si grande réflexion et analyse des faits.
Le président : Nous arrivons à la fin de notre séance.
Je vous remercie infiniment tous les trois — vous deux qui étiez sur place avec nous, ainsi que le Dr Kendall dans une zone horaire légèrement plus agréable sur la côte Ouest.
Vous nous avez été très précieux et nous apprécions les renseignements que vous nous avez apportés. Nous nous en servirons, après avoir parlé à d'autres personnes encore, pour rédiger un rapport avant la fin de l'année.
Merci. Là-dessus, je déclare la séance levée.
(La séance est levée.)