Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie
Fascicule 22 - Témoignages du 10 mars 2011
OTTAWA, le jeudi 10 mars 2011
Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit aujourd'hui, à 10 h 28, pour étudier les progrès réalisés dans la mise en œuvre du Plan décennal pour consolider les soins de santé 2004.
Le sénateur Art Eggleton (président) occupe le fauteuil.
[Français]
Le président : Bienvenue au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.
[Traduction]
Nous entamons aujourd'hui notre examen de l'Accord de 2004 sur la santé, appelé également plan décennal pour consolider les soins de santé au Canada. C'est le second examen auquel nous procédons, puisque nous sommes tenus de le faire tous les trois ans. Le dernier a été fait par le Comité permanent de la santé de la Chambre des communes, et nous prenons soin de celui-ci. Ce comité est habitué de longue date à traiter des questions de santé, au moins depuis 2002, et même peut-être auparavant, alors que mon prédécesseur, Michael Kirby, présidait ce comité. Il a produit un rapport important qui a été publié en même temps que le rapport Romanow. Nous avons d'ailleurs en main les documents appelés Rapport Romanow et Rapport Kirby. Ce dernier a été, comme il se doit, produit par ce comité.
Nous allons tenir de nombreuses réunions d'ici la mi-juin, avant le congé d'été. Une douzaine sont prévues pour l'instant. Il faudra bien évidemment pour cela que rien ne vienne stopper nos travaux à un moment quelconque, comme le déclenchement d'une élection. Nous terminerons et présenterons notre rapport à l'automne. Cela nécessitera, sans surprise, un prolongement du délai que nous avions prévu au départ pour terminer cette étude. Ce n'est qu'à la fin janvier que le ministre de la Santé nous a demandé de produire ce rapport.
Nous allons commencer aujourd'hui en entendant les représentants de quatre organismes pour mettre à jour les informations dont nous disposons. Deux de ceux-ci ont été créés dans le prolongement de l'accord précédent sur la santé, et un autre l'a été en 2003. Nous avons donc parmi nous le président, le Dr Jack Kitts, et le chef de la direction, M. John Abbott, du Conseil canadien de la santé. La création de cet organisme a été prévue dans l'Accord de 2003 sur le renouvellement des soins de santé et son rôle a été élargi dans le plan décennal de 2004. Ils vont nous faire rapport sur les progrès du renouvellement des soins de santé, sur l'état de santé des Canadiens et sur les résultats de notre système sur la santé. Leur objectif est d'éclairer le public canadien sur la réforme des soins de santé dans l'ensemble du système, en accordant une attention particulière à la responsabilisation et à la transparence.
L'Institut canadien d'information sur la santé, ou ICIS comme je l'appelle en m'inspirant du Dr Keon, l'ancien vice- président de ce comité, est un organisme indépendant et sans but lucratif qui fournit des renseignements essentiels sur le système de santé du Canada et sur la santé des Canadiens. Il a pour objectif de contribuer à l'amélioration du système de santé de notre pays et du bien-être de ses habitants en étant une source de tout premier choix de renseignements impartiaux, crédibles et comparables pour permettre aux responsables de la santé de prendre leurs décisions dans les meilleures conditions possibles.
Santé Canada est le ministère responsable de l'administration de la Loi canadienne sur la santé. Abby Hoffman, sous-ministre adjointe déléguée, et Gigi Mandy, directrice de la Division de la Loi canadienne sur la santé, sont parmi nous aujourd'hui.
Des représentants de Statistique Canada sont également ici, comme toujours. À chaque fois, ils nous remettent quantité de graphiques. Gary Catlin est directeur général de la Direction de la santé, de la justice et des enquêtes spéciales alors que Claudia Sanmartin est analyste principale à la Division de l'analyse de la santé.
Bienvenue à vous tous.
J'ajoute que James Gauthier et Karin Phillips sont présents à titre d'analystes de la Bibliothèque du Parlement.
Dr Jack Kitts, président, Conseil canadien de la santé : Merci de m'accorder cette occasion de formuler des observations sur les progrès du plan décennal pour consolider les soins de santé. Plus seront nombreuses les voix qui interviendront dans ce bilan, particulièrement alors que nous nous rapprochons de 2013-2014, plus nous pourrons prendre des décisions opportunes à l'avenir.
Faire rapport des progrès est notre fonction, et c'est ce que nous faisons systématiquement depuis la création du conseil, il y a sept ans. Nous sommes uniques en cela que nous formulons une évaluation et un éclairage pancanadiens indépendants sur la réforme de la santé. De plus en plus, nous ciblons l'identification des pratiques exemplaires et des innovations, afin que les planificateurs, les prestateurs, les administrateurs et le public puissent savoir qui fait ce qu'il faut, et comment il le fait.
Nous parlons souvent du système canadien de soins de santé, mais, en réalité, il s'agit d'un ensemble de 14 systèmes particuliers, qui profitent du partage de leurs connaissances. Notre système de soins de santé a largement évolué depuis 2004, mais il reste beaucoup à faire pour réaliser la vision des premiers ministres — en fait, la vision de tous les Canadiens : un système de soins de santé plus accessible, de plus haute qualité et durable.
En 2008, nous avons publié un rapport d'étape sur tous les engagements pris dans l'Accord sur le renouvellement des soins de santé de 2003 et dans le plan décennal pour consolider les soins de santé. Si nous avons relevé beaucoup de raisons de nous réjouir, bien des choses restaient en deçà de ce qui aurait pu — et aurait dû — s'accomplir. Ce printemps, trois ans plus tard, nous allons publier un rapport de suivi sur cinq des engagements des accords sur la santé.
Où en sommes-nous actuellement? La réponse n'est pas simple. Je vais prendre cinq minutes pour vous présenter certains points saillants, selon la perception du conseil. Nous avons fait des progrès dans les temps d'attente, parce que les gouvernements ont fixé des objectifs et fourni le financement permettant de s'y attaquer. Dynamisés par leur succès dans les cinq premiers domaines prioritaires, les gouvernements ont décidé d'agir maintenant sur les temps d'attente d'autres secteurs. Ainsi, pour donner suite à son étude Patient First, le gouvernement de la Saskatchewan a promis que d'ici à 2014, aucun patient ne devra attendre plus de trois mois pour une intervention chirurgicale, quelle qu'elle soit. Les temps d'attente offrent un bon exemple des progrès que l'on peut accomplir et pérenniser quand les chefs de file des soins de santé élaborent un plan d'action et l'appliquent. Cette approche permet aussi de gagner la confiance du public.
Les soins de santé primaires sont d'une énorme importance pour la durabilité de notre système de soins de santé. Malgré cela, nous sommes loin de mesurer les résultats comme il le faudrait. Le nombre de Canadiens atteints de maladies chroniques est plus élevé que jamais et ils ont besoin du soutien d'un solide système de soins de santé primaires. Des enquêtes récentes montrent que le Canada a un retard à rattraper par rapport aux autres pays de l'OCDE : les Canadiens ont de la difficulté à obtenir des soins de santé primaires après les heures normales de travail et pendant les fins de semaine, et ont plus tendance à utiliser les salles d'urgence.
Le plan décennal prévoyait que la moitié des Canadiens aurait accès à une équipe de soins primaires en 2011. En 2009, nous avons signalé que seulement 32 p. 100 des Canadiens avaient accès à plus d'un prestateur de soins de santé primaires. Les avantages des équipes sont bien connus : elles améliorent l'accès et la qualité des services et réduisent à la fois les pressions exercées sur le système de soins de courte durée et les coûts de celui-ci. C'est ainsi que, à Peterborough, en Ontario, un virage au niveau de la région vers des soins dispensés en équipe a permis de faire baisser les visites au service des urgences de 15 000 par année, ce qui a permis d'offrir 17 000 accès de plus à des soins de santé primaires.
Nous estimons que les secteurs de compétence commencent à remonter la pente en matière de soins de santé primaires et se sont mis à réinvestir et à chercher des pistes pour améliorer la prestation des services. Avec le soutien des organisations de prestateurs, nous pouvons nous attendre à de plus nombreuses avancées dans les années à venir.
À la fin de 2010, près de la moitié des Canadiens disposait d'un dossier de santé électronique. Beaucoup de médecins continuent de s'en remettre à des dossiers papier, et tant qu'ils ne passeront pas au numérique, nous ne parviendrons pas à exploiter le plein potentiel des dossiers de santé électroniques. Il sera essentiel de pouvoir compter sur un financement fédéral à long terme et sur de solides orientations des divers paliers de gouvernement pour accélérer l'adoption des dossiers de santé électroniques à l'échelle du pays.
La création d'une Stratégie nationale relative aux produits pharmaceutiques constituait un élément critique du plan décennal. Malheureusement, force est de constater qu'aujourd'hui, en 2011, les progrès sont lents. Cela dit, des instances particulières partout au Canada prennent des mesures visant à étendre la couverture des programmes publics d'assurance- médicaments et à faire face à leurs coûts croissants en limitant le coût des médicaments génériques. Parallèlement, la portée de la pratique des pharmaciens s'élargit, bien que cela se fasse selon des approches différentes de part et d'autre du pays. Une autre stratégie prometteuse est celle des appels d'offres communs. Les premiers ministres provinciaux préconisent une alliance nationale pour unifier l'approvisionnement du secteur public en médicaments courants et en fournitures et équipements médicaux.
Bien que le plan décennal ait abordé les thèmes de la prévention et de la promotion de la santé et de leur rôle dans l'amélioration de la santé des Canadiens, c'est maintenant seulement qu'ils prennent de l'ampleur au Canada. Par exemple, nous nous sentons encouragés par le fait que plusieurs gouvernements, dont ceux du Yukon, de l'Ontario et de Terre-Neuve-et-Labrador, ont créé des stratégies de réduction de la pauvreté qui devraient faire beaucoup pour répondre aux besoins de santé fondamentaux de leurs citoyens vulnérables.
Votre comité a produit des rapports décisifs sur l'importance des approches fondées sur les déterminants de la santé et sur une démarche pangouvernementale. De même, le Conseil canadien de la santé a publié récemment un rapport sur l'application d'une approche pangouvernementale à la promotion de la santé. Nous ne pouvons pas, et ne devrions pas, nous attendre à ce que les ministères de la Santé puissent résoudre tous les problèmes de santé du Canada, y compris celui de l'état de santé des Autochtones.
Outre les progrès que je viens de citer, nous avons aussi vu des améliorations dans notre capacité à rassembler, interpréter et utiliser des données sur la santé. Ces activités sont absolument essentielles pour résoudre les problèmes touchant la prestation de soins appropriés, la participation des patients et l'amélioration de la qualité.
En préparation du prochain bilan, les gouvernements doivent privilégier la planification des ressources humaines de la santé, le développement et l'intégration des soins à domicile, l'amélioration de la présentation de rapports au public et continuer d'accorder la priorité à la qualité de l'ensemble du système.
Finalement, nous avons besoin que les gouvernements conservent leur rôle moteur. Une grande partie des progrès accomplis depuis le plan décennal a été le fait de secteurs de compétence particuliers, mais pour que les progrès soient réels, il faut que tous les gouvernements collaborent dans l'intérêt de tous les Canadiens. Nous avons bon espoir que ces audiences du comité sénatorial vont inciter nos responsables à se mobiliser de nouveau en faveur des engagements annoncés haut et fort en 2004.
John Wright, président et directeur général, Institut canadien d'information sur la santé : L'ICIS est un organisme pancanadien, autonome et sans but lucratif. Nous nous efforçons avant tout de fournir des données permettant d'élaborer des politiques de santé avisées, de gérer efficacement le système de santé et de sensibiliser le public aux facteurs qui influent sur la santé.
Le rôle confié à l'ICIS, dans le cadre du plan décennal, était de réduire les temps d'attente dans les domaines prioritaires et d'améliorer l'accès aux soins. Les cinq domaines prioritaires sont le cancer, le coeur, l'imagerie diagnostique, les remplacements d'articulation et la restauration de la vue. Nous publions depuis 2006 des rapports annuels. Plus tard ce mois-ci, ce sera le sixième qui sera consacré aux temps d'attente. Comme nous avons disposé pour sa préparation de plus de données et d'informations que pour les précédents, il donnera une vision plus claire de la situation.
La question qui se pose est de savoir si les soins sont dispensés dans les délais prescrits. Comme on le voit à la diapositive no 4, ils le sont pour les pontages et pour la radiothérapie.
La diapositive no 5 montre si les délais prescrits sont bien respectés dans chacune des provinces. Le signe de pointage signifie que la cible est atteinte pour l'objectif correspondant. Si 100 p. 100 constitueraient une cible parfaite, nous avons retenu, à des fins pratiques, un seuil de 90 p. 100. C'est une façon de prendre en compte les réalités du domaine de la chirurgie. Il arrive qu'un patient soit malade à la date prévue et ne puisse subir la chirurgie, ou qu'il veuille être opéré à une autre date, ou encore qu'il soit en vacance à cette date.
Dans l'ensemble du pays, les délais prescrits pour les pontages et la radiothérapie ont été respectés dans 90 p. 100 des cas. Dans certaines provinces, comme le Québec, le signe de pointage est remplacé par un tiret pour les pontages. Cela signifie que les données ne sont pas comparables parce que leurs modalités de cueillette sont différentes de celles des autres provinces. Dans le cas de l'Île-du-Prince-Édouard, le tiret pour les pontages signifie qu'on n'en pratique pas dans cette province.
Il y a davantage de signes de pointage sur la diapositive no 6. Ceux-ci correspondent à l'atteinte d'une cible de 75 p. 100. Étant donné la taille des populations de la Colombie-Britannique, de l'Ontario et du Québec, ces provinces déterminent dans une large mesure le portrait pancanadien. En Ontario et en Colombie-Britannique, toutes les cases comportent des signes de pointage. Cela signifie que 75 p. 100 des patients sont pris en charge dans les délais prescrits. Les autres provinces n'obtiennent pas de si bons résultats.
Passons maintenant à la diapositive no 7. En résumé, pour l'initiative des temps d'attente, les trois provinces les plus peuplées déterminent dans une large mesure le résultat à l'échelle nationale. On observe des variations importantes entre les provinces et, également, au sein de chacun des domaines prioritaires.
Les provinces et les territoires devaient étudier le domaine de l'imagerie diagnostique. On n'a pas encore de repères probants pour l'imagerie diagnostique. C'est pourquoi nous ne faisons pas rapport sur ce domaine, même si, en 2009, deux provinces l'ont fait. En 2010, elles étaient cinq à le faire, ainsi que sur leurs temps d'attente. Nous continuons à travailler avec les autres provinces pour les amener à produire ces données.
Les chiffres obtenus sont très bons pour les pontages. Nous avons une cote de classement pour les urgences au sein de cette catégorie. Les données de toutes les provinces ne sont pas parfaitement compatibles et nous avons dû utiliser la priorité la plus facile, signifiant que tous les patients ayant cette priorité ont été vus. Nous devons encore travailler avec les provinces pour harmoniser les données afin d'assurer la compatibilité de toutes.
La diapositive no 8 traite de la répartition des fonds. De 2004 à 2010, le total des dépenses de santé du Canada a augmenté de 45,6 p. 100. À partir de là, nous avons isolé les chiffres des provinces et des territoires. En 2010, les provinces et les territoires ont dépensé 125 milliards de dollars. La hausse globale atteint presque 48 p. 100 au cours de cette période.
Voyons maintenant les services que les Canadiens ont pu se procurer grâce à l'injection des fonds fédéraux. La diapositive no 9 montre une hausse importante des chirurgies, sans parler des améliorations des temps d'attente dont j'ai parlé précédemment. Dans le cas des chirurgies de la hanche, du genou et de la cataracte, les augmentations entre 2004 et 2010 sont passablement marquées. Le Québec n'est pas comptabilisé dans la catégorie de la revascularisation parce que ses données nous posent encore quelques problèmes. Toutefois, année après année, nous enregistrons des progrès avec les provinces et avec les territoires grâce à leur coopération.
On constate à l'examen de la diapositive no 10 que les fonds fédéraux ont permis de réaliser beaucoup plus de scintigrammes et d'examens d'imagerie diagnostique. De 2003 à 2004, le nombre de tomodensitogrammes a augmenté de près de 50 p. 100. Davantage d'appareils d'IRM et de tomodensitographie ont été achetés. Les provinces utilisent ces machines de façon plus efficiente. Au Canada, on les utilise de façon plus intensive et plus longtemps que dans d'autres pays.
La diapositive no 11 montre la hausse du nombre de médecins. De 2008 à 2009, celle-ci a été de 4,1 p. 100. Un nombre record de diplômes de médecine ont été accordés en 2009, soit un peu plus de 2 300. On a enregistré une hausse de 47 p. 100 des diplômés en médecine depuis 1999.
L'ensemble des dépenses consacrées aux médecins a augmenté de façon marquée. Si le secteur enregistrant la hausse la plus rapide des dépenses était celui des médicaments, c'est maintenant celui des médecins. Le nombre d'infirmières réglementées a également augmenté brusquement depuis 2004. Ces chiffres, ramenés par habitant, ne sont plus ce qu'ils étaient en 1992. Il y avait alors 824 infirmières pour 100 000 patients et, en 2009, elles n'étaient plus que 789. Il y a donc eu une diminution. Je parle ici des infirmières autorisées, des infirmières psychiatriques autorisées dans les provinces de l'Ouest, des infirmières auxiliaires autorisées et des infirmières praticiennes.
La diapositive no 12 montre que les dépenses totales en médicaments ont augmenté de façon très importante. Dans le secteur public, cette hausse s'est chiffrée en milliards de dollars. On observe cependant une tendance au ralentissement de cette croissance. Pour la croissance des dépenses, la seconde place va à la catégorie des médicaments, juste après celle des médecins.
De nombreux médicaments brevetés, comme le Lipitor et le Crestor, ne seront plus protégés par des brevets. Ils représentent des dépenses de 8,3 milliards de dollars et il se peut donc que l'arrivée de médicaments génériques pour les remplacer permette de réaliser des économies à l'avenir.
Qu'en est-il maintenant de la mesure du rendement? Avec Statistique Canada, nous publions un rapport annuel traitant de plus de 40 indicateurs différents de la santé. Nous en avons élaboré quelques nouveaux cette année dans le domaine de la santé mentale. Nous avons élaboré un Projet de production de rapports sur les hôpitaux canadiens. Il n'est pas encore public. Nous travaillons encore à préciser un certain nombre de points et nous nous efforçons de vérifier le caractère comparable des données. Il comporte 33 indicateurs dont bon nombre portent sur la qualité des soins, sur la dimension financière et sur le niveau de satisfaction des patients.
L'indicateur au « gros point » a été élaboré en 2007 : c'est le Ratio normalisé de mortalité hospitalière ou RNMH. C'est un indicateur d'égalité. Nous sommes ravis de vous dire que, depuis 2007, 80 p. 100 des hôpitaux ont réduit leurs taux de mortalité.
Abby Hoffman, sous-ministre adjointe déléguée, Santé Canada : Mes commentaires portent sur la Loi canadienne sur la santé. Je me permets de vous rappeler dès le début que cette loi est mentionnée deux fois dans l'Accord de 2004 — une fois implicitement, et une autre fois, explicitement.
Au début, à la page 2, les premiers ministres ont précisé qu'ils s'étaient entendus sur un plan d'action fondé sur un certain nombre de principes. La première série de principes cités est celle des principes de la Loi canadienne sur la santé, soit l'universalité, l'accessibilité, la transférabilité, l'intégralité et la gestion publique qui sont inscrits dans la LCS.
La seconde mention se trouve près de la fin du texte de l'accord, à la page 10. C'est l'engagement définitif des premiers ministres dans le cadre de l'accord qui porte également sur la Loi canadienne sur la santé et qui se lit comme suit :
En l'incluant dans ce communiqué, les gouvernements officialisent l'entente sur la prévention et la résolution des différends relevant de la Loi canadienne sur la santé qui a été conclue dans un échange de correspondance en avril 2002.
C'est une forme d'officialisation de ce processus qui a été codifiée auparavant dans un échange de lettres.
Nous avons cru comprendre que vous vouliez de l'information au sujet du Processus de prévention et de règlement des différends de la Loi canadienne sur la santé qui a été officialisé dans l'accord. C'est un engagement qui a été pris dans l'accord, et je vais vous en parler.
Le mécanisme de prévention et de règlement des différends de la Loi canadienne sur la santé, en vigueur aujourd'hui, a été élaboré à la suite d'un engagement pris en février 1999 à la suite de l'Entente-cadre sur l'union sociale. L'Entente- cadre sur l'union sociale, qui a été signée par tous les gouvernements à l'exception du Québec, comprenait un ensemble de principes sur les politiques sociales et les approches de collaboration quant à l'utilisation du pouvoir de dépenser du gouvernement fédéral. Elle établissait des règles de base pour la collaboration intergouvernementale, y compris des mécanismes de règlement des différends entre les gouvernements.
Plus précisément, l'entente-cadre engageait les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux à se soumettre à un processus de prévention et de règlement des différends conçu précisément pour l'« interprétation des principes de la Loi canadienne sur la santé ». Les fonctionnaires ont ensuite entrepris de concevoir un mécanisme de prévention et de règlement des différends. Santé Canada et l'Alberta ont coprésidé les travaux qui ont abouti à un échange de lettres entre le ministre fédéral de la Santé et le ministre de la Santé de l'Alberta, et ensuite entre le premier ministre de l'Alberta et le premier ministre Chrétien en avril 2002.
Dans sa lettre, rédigée au nom de tous les premiers ministres, sauf celui du Québec, le premier ministre Ralph Klein signifiait l'appui de ceux-ci au processus fédéral proposé de prévention et de règlement des différends relatifs à la Loi canadienne sur la santé. L'acceptation de ce processus a été officialisée dans l'Accord de 2004.
Quant au processus lui-même, trois sections y sont consacrées. Elles traitent de la prévention des différends, du règlement des différends et des rapports publics. Chaque année, en annexe au rapport annuel sur la Loi canadienne sur la santé déposé au Parlement, les détails des processus de prévention et règlement des différends sont décrits en détail. Le rapport de 2009-2010 a récemment été présenté au Parlement.
Je vais aborder rapidement ces trois éléments. Concrètement, la prévention des différends est le mécanisme le plus fréquemment utilisé. C'est que toutes les parties aspirent à éviter les différends et qu'elles ne tiennent pas à devoir s'en remettre aux modalités officielles de règlement. Le processus de prévention des différends officialise la façon dont les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux travaillent pour éviter les différends dans l'administration et l'interprétation de la Loi canadienne sur la santé.
Cela implique trois volets. Le premier est celui de la participation active des gouvernements à des comités sur les questions relatives à la Loi canadienne sur la santé. Ce sont là des questions qui présenteraient un intérêt pour tous les gouvernements. Le second est celui de l'échange d'informations de gouvernement à gouvernement, de discussions et de clarification des questions à mesure qui se posent avec le gouvernement concerné par la question. Enfin, sur demande d'une province ou d'un territoire, nous procéderions à une évaluation préalable d'une proposition ou d'une initiative afin d'indiquer à cette province ou à ce territoire si, à notre avis, un tel projet serait conforme à la loi. Cela régit la plupart de nos activités normales concernant la Loi canadienne sur la santé.
Vient ensuite le mécanisme même de résolution des différends. Si les activités de prévention des différends sont infructueuses, le ministre fédéral, ou le ministre provincial ou territorial de la Santé concerné, peut lancer le processus de résolution du différend. Le ministre de la province ou du territoire concerné doit alors écrire à son homologue pour l'informer clairement de la question qui fait l'objet du différend.
Il est important de comprendre que, s'il est utilisé, le processus de règlement des différends prévaudra sur toute autre mesure prise en vertu des dispositions de non-conformité de la Loi canadienne sur la santé. En d'autres termes, aucune pénalité, qu'elle soit obligatoire ou discrétionnaire en vertu de la loi, ne sera imposée pendant le processus de règlement du différend.
L'étape initiale de règlement des différends n'engage que les gouvernements concernés. Dans les 60 jours suivants la date de la lettre que j'ai évoquée il y a un moment, qui lance le processus, les gouvernements concernés recueillent conjointement et échangent tous les faits pertinents sur la question, préparent un rapport établissant les faits et entament des négociations pour tenter de résoudre l'objet du différend. Si la question est résolue, ils vont préparer un rapport sur la manière dont cela a été fait.
Toutefois, s'il n'y a pas d'accord sur les faits, ou si les négociations visant à résoudre la question échouent, l'un ou l'autre des ministres de la Santé concernés peut choisir de passer à l'étape suivante, soit de porter l'affaire devant un comité tiers. Cela aussi doit se faire par écrit.
Le comité doit être mis sur pied dans les 30 jours suivant la réception des lettres officielles. Il est composé d'une personne nommée par la province ou le territoire et d'une autre nommée par le gouvernement fédéral. Ces deux personnes désignent ensemble un président. Le rôle du comité est d'examiner la question conformément à la Loi canadienne sur la santé, d'établir les faits et de fournir des avis. Cela fait, le comité doit présenter un rapport aux gouvernements concernés dans les 60 jours suivant sa constitution.
Même si le ministre fédéral de la Santé tiendra compte du rapport du comité dans sa décision d'invoquer ou non les dispositions de non-conformité de la loi, lui seul a en définitive le pouvoir d'interpréter et d'appliquer la Loi canadienne sur la santé.
Enfin, le troisième élément de ce processus de prévention et de règlement des différends est celui des rapports publics. À la fin du processus, les gouvernements rendront publiques les activités de prévention et de règlement des différends en vertu de la Loi canadienne sur la santé, y compris tout rapport de comité spécial.
Cela met fin à mes commentaires formels.
Gary Catlin, directeur général, Direction de la santé, de la justice et des enquêtes spéciales, Statistique Canada : Bien que l'accord n'ait confié aucun mandat particulier de surveillance à Statistique Canada, nous avons des données à vous présenter qui, nous l'espérons, contribueront à alimenter vos délibérations, aussi bien aujourd'hui qu'à l'avenir.
La seconde diapositive traite de deux domaines que nous allons essayer d'aborder plus en détail aujourd'hui. Le premier est celui de la réforme des soins primaires et le second celui de la prévention et de la promotion.
Passons maintenant à la diapositive suivante. Pour obtenir des soins médicaux, la première personne à laquelle s'adressent de nombreux Canadiens est leur médecin. Le fait de ne pas avoir de médecin régulier amène à se rendre moins souvent chez des généralistes ou des spécialistes en mesure de diagnostiquer et de traiter dès le début des états pathologiques.
Cette diapositive donne les pourcentages de Canadiens, de toutes les provinces et de tous les territoires, qui déclarent ne pas avoir de médecin de famille régulier. En 2009, quelque 84 p. 100 des Canadiens âgés de 12 ans et plus signalaient avoir un médecin régulier. Le motif le plus souvent évoqué par les répondants qui n'avaient pas de médecin régulier était qu'ils n'en avaient pas cherché. Cette réponse venait surtout de jeunes Canadiens. Toutefois, 44 p. 100 des répondants, soit près de 1,9 million de personnes, indiquaient aussi ne pouvoir trouver un médecin aux motifs qu'il n'y avait pas de médecin disponible dans leur région, que les médecins de leur région n'acceptaient pas de nouveaux patients ou encore que leur médecin était parti ou avait pris sa retraite.
Sur les 4,3 millions de Canadiens sans médecin régulier en 2009, environ 82 p. 100 déclaraient savoir où se rendre quand ils avaient besoin de soins de santé ou de conseils en la matière. Quand ils avaient besoin de soins médicaux, la plupart se rendaient à une clinique sans rendez-vous. S'ajoutait à cela 13 p. 100 qui se rendaient dans des salles d'urgence, et environ 10 p. 100 allant dans des centres de santé communautaires ou, au Québec, dans des CLSC.
La diapositive suivante a été préparée à partir des données de l'Enquête canadienne sur l'expérience des soins de santé primaires. En vérité, cette enquête est le fruit d'une excellente collaboration entre les groupes présents ici aujourd'hui. En 2007 et 2008, elle a été financée à la fois par le Conseil canadien de la santé et par l'ICIS, et réalisée par Statistique Canada. Elle était destinée à mesurer, entre autres, dans quelle mesure l'objectif mentionné précédemment, selon lequel 50 p. 100 des Canadiens devraient avoir accès à des soins multidisciplinaires 24 heures par jour et sept jours par semaine, est atteint.
Nous n'avons pu mesurer ce résultat directement au moyen de cette étude, mais nous avons tenté de le déduire au moyen des réponses à une série de questions posées dans l'étude. Comme vous pouvez le voir, plus de 30 p. 100 de la population dispose d'un certain accès à d'autres professionnels de la santé dans le cabinet, outre le médecin qui fournit les soins primaires.
La diapositive suivante porte sur les difficultés d'accès aux services de santé. L'analyse détaillée a été faite à partir des données d'une enquête antérieure. Toutefois, comme vous pouvez le voir, nous n'avons pas constaté beaucoup d'évolution dans ce domaine précis au cours de la période pendant laquelle nous avons recueilli de l'information.
L'étude s'intéressait avant tout à deux types de services lors de la première rencontre, soit, et c'est la barre bleue, les soins immédiats pour un problème de santé mineur, ne présentant pas de danger de mort, comme la fièvre, une coupure ou une brûlure, et ensuite les soins de routine ou de suivi fournis par un médecin de famille ou un généraliste, comme les examens annuels ou de prévention, et les soins constants en cas de maladie.
L'étude a permis d'observer que les répondants qui avaient un médecin de famille régulier étaient tout aussi exposés que ceux qui n'en avaient pas à éprouver quelques difficultés dans le cas de problèmes de santé mineurs. Les Canadiens sans médecin de famille régulier risquaient d'éprouver deux fois plus de difficultés à accéder à des soins de santé de routine que ceux qui avaient un médecin de famille régulier.
L'un des résultats encourageants de ce rapport était que la difficulté à accéder à des soins était sans lien avec les revenus. Le principal motif de difficulté à accéder à des soins de routine mentionné par les répondants était la disponibilité de médecins et, pour les soins immédiats pour un problème de santé mineur, des temps d'attente plus longs.
La diapositive suivante donne, par province, les pourcentages de personnes qui ne subissent pas de test de dépistage du cancer colorectal au cours de la période recommandée. Les écarts entre les pourcentages obtenus dans les diverses provinces et territoires sont importants. En règle générale, la probabilité d'avoir suivi un test de dépistage est plus faible à l'Est de l'Ontario et dans les territoires et nettement plus élevée au Manitoba et en Ontario.
En 2007, l'Ontario a lancé sur toute l'étendue de son territoire un programme de dépistage du cancer colorectal. Le Manitoba a lancé la même année un programme pilote comparable à Winnipeg sous la direction de l'autorité régionale de la santé Assiniboine.
Dans le cas du cancer colorectal, la probabilité d'avoir suivi un test de dépistage en temps voulu était plus importante chez les personnes appartenant à des ménages à revenus élevés, ayant un médecin de famille régulier, ne fumant pas et pratiquant des activités pendant leurs loisirs. Les pourcentages de personnes âgées de 65 ans et plus ayant suivi un test de dépistage étaient plus élevés que ceux des personnes âgées de 50 à 64 ans.
La réalisation de tests de dépistage du cancer colorectal en temps voulu était liée à la présence d'autres facteurs de risque pour la santé. Environ 30 p. 100 des personnes fumant tous les jours avaient subi le test alors que ce n'était le cas que de 42 p. 100 des non-fumeurs. Les personnes faisant de l'activité physique avaient plus de chances d'avoir subi le test que celles qui n'en faisaient pas.
La diapositive suivante est consacrée aux mammographies de dépistage. Elle aussi présente le pourcentage de femmes qui n'ont pas suivi les directives s'appliquant à leur groupe d'âge. En 2008, 72 p. 100 des femmes âgées de 50 à 69 ans déclaraient avoir subi une mammographie au cours des deux dernières années, alors que ce pourcentage était de 40 p. 100 en 1990. La hausse s'est produite au cours de la décennie écoulée entre 1990 et 2000-2001, où leur nombre a atteint un sommet. Les taux se sont par la suite stabilisés. Depuis cette époque, les taux des diverses provinces sont devenus beaucoup plus proches.
La diapositive suivante traite de la santé perçue. D'après les résultats de l'Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes — Vieillissement en santé, 76 p. 100 des Canadiens ayant entre 45 et 64 ans, et 56 p. 100 des personnes âgées, se déclaraient en bonne santé en 2009. La définition de « bonne santé » utilisée ici intégrait l'état de santé perçue par la personne, aussi bien physique que mentale, ses capacités fonctionnelles et son indépendance dans les activités de la vie quotidienne. Une personne peut être en bonne santé même si elle souffre d'un problème chronique comme l'hypertension artérielle, l'arthrite et des problèmes de dos, qui sont tous des problèmes courants chez les personnes âgées de 45 ans et plus.
Les huit facteurs associés à la bonne santé sur lesquels nous pouvons agir sont le fait de fumer ou non, l'indice de masse corporelle, l'activité physique, le régime alimentaire, le sommeil, la santé bucco-dentaire, le stress et la participation sociale. Quatre-vingt-quatre pour cent du groupe d'âge plus jeune et 91 p. 100 des personnes âgées faisaient état de tendances favorables pour quatre ou plus de ces facteurs. Il y avait manifestement une corrélation entre la probabilité de se dire en bonne santé et ces facteurs.
La dernière diapositive fait état d'autres indicateurs disponibles qui pourraient présenter un intérêt pour vos délibérations ultérieures.
Le président : Permettez-moi de m'adresser en premier au Dr Kitts ou à M. Abbott du Conseil canadien de la santé. L'accord vous confiait le mandat de faire rapport chaque année, mais vous n'avez produit aucun rapport depuis 2008. Pourquoi?
Ensuite, lorsqu'on lit le rapport du Comité permanent de la santé de la Chambre des communes de 2008, on découvre que ses auteurs sont assez critiques sur les tentatives d'analyse de ce qui se passe dans ce domaine. Les repères étant différents d'une province à l'autre, les rapports s'en ressentent. Les auteurs critiquent à la fois le gouvernement fédéral et ceux des provinces dans ce domaine. Ils rappellent que l'un des organismes ou des comités qui ont été mis sur pied, un comité fédéral-provincial, a fini par être démantelé. Cela doit vous compliquer la tâche pour recueillir l'information dont vous avez besoin.
Bien que vous n'ayez pas produit de rapport depuis 2008, quelles sont les priorités qui ont enregistré le plus de progrès depuis le dernier rapport du comité de la santé, et quelles sont celles qui ont le moins progressé et justifient qu'on y accorde une attention particulière?
John Abbott, chef de la direction, Conseil canadien de la santé : Depuis 2008, au lieu de faire rapport chaque année sur l'ensemble du système, le Conseil canadien de la santé a étudié des domaines précis couverts par l'Accord de 2003 et le plan décennal afin de permettre une analyse et des rapports plus détaillés.
En même temps, puisque nous sommes maintenant rendus à l'expiration de la période de trois ans, nous allons nous pencher sur l'ensemble des progrès enregistrés. Pour l'avenir, nous collaborons maintenant avec les provinces pour préparer des rapports annuels sur les divers éléments traités dans les accords.
L'une des difficultés auxquelles nous nous sommes heurtés a été de localiser les données et de déterminer la meilleure façon d'y accéder et de les utiliser. Comme on vous l'a dit dans l'autre exposé, nous réussissons à améliorer nettement les données qui nous servent à produire nos rapports.
En 2008-2009, le conseil a déjà signalé que les nouvelles données justifiant de produire des rapports sur une base annuelle ne sont pas nombreuses et que nous ne ferions alors que répéter ce que d'autres sources ont déjà dit. C'est dans ce contexte que nous avons concentré nos travaux sur des points précis. Nous nous sommes penchés sur des sujets précis comme les produits pharmaceutiques, les soins de santé primaires et les temps d'attente. Actuellement, nous travaillons sur les soins à domicile. Nous sommes d'avis que ces travaux permettront de mieux éclairer le public et les gouvernements quand ils auront à traiter de ces questions.
Quant au rapport produit par le comité permanent de la Chambre des communes en 2008, nous avons déjà indiqué, lors des audiences qu'il a tenues, que nous avions des problèmes de données, qu'il était difficile de faire rapport sur certains des sujets que nous aimerions traiter. Ce commentaire visait toutes les provinces et tous les territoires.
Avec la mise en place de conseils de la qualité au niveau provincial, y compris au Québec, les administrations provinciales se sont dotées de moyens. Elles sont maintenant en mesure de faire rapport et nous pouvons dorénavant utiliser leurs données et réaliser des analyses plus poussées au niveau national. Nous avions besoin de ces séries de données de base. Nous sommes enfin en mesure de produire de bien meilleurs rapports, même si ce n'est pas encore la perfection.
Le président : Docteur Kitts, est-ce à dire que le mandat que vous donnait à l'époque l'accord, soit de produire chaque année tous ces rapports sur les progrès réalisés, n'était pas réaliste? N'avez-vous d'autre choix que de vous adapter aux nouvelles réalités? En tenant compte des provinces et du fédéral, cela donne 14 entités différentes. Est-ce tout simplement qu'elles ne respectent pas leurs obligations?
Dr Kitts : C'est une question tout à fait pertinente. Il ne fait aucun doute que les orientations traduites par les dispositions de l'accord sont les bonnes. Nous devons effectivement faire ce qui y est énuméré pour améliorer la santé, la durabilité des services de santé, l'accès des Canadiens à ceux-ci et leur qualité.
En 2004, nous ne savions que très peu de choses sur l'efficacité de notre façon de procéder et il était donc très difficile de mesurer les progrès réalisés.
J'ai pratiqué la médecine pendant 23 ans et suis administrateur depuis 10 ans. Je dirais que c'est probablement à compter de 2005 que les gens ont commencé à réaliser l'état de la situation, que celle-ci n'était pas durable et que les résultats obtenus n'étaient pas de bonne qualité. La priorité pour nous est de mesurer les résultats que nous obtenons.
Je dirige aujourd'hui l'un des plus importants centres universitaires de soins de la santé au pays, et je peux vous assurer que nous fournissions des soins de grande qualité. Si vous vous demandez d'où je tiens cette information, sachez que je ne peux pas encore vous communiquer ces données.
Depuis 2005, nous avons tous fait énormément d'efforts, ce que Statistique Canada et l'ICIS peuvent vous confirmer, j'en suis sur, pour nous doter des moyens de mesurer le rendement, de nous procurer les données, de nous assurer qu'elles sont bonnes, opportunes, précises et comparables et pour nous permettre de procéder à des analyses comparatives à travers le pays, mais nous n'en sommes pas encore là. Nous nous approchons de ce point, mais nous n'y sommes pas encore.
La plupart des données citées aujourd'hui datent probablement de 18 mois à deux ans. Il s'agit de données agrégées donnant une vision d'ensemble. Nous devons être capables d'examiner la situation au niveau des prestataires de services de santé. Je suis convaincu que nous mettons en place les composants de base pour y parvenir, mais je pense aussi que la tâche du Conseil canadien de la santé, qui est de faire rapport tous les ans de façon précise, en décrivant la réalité de ce qui se passe, est une tâche difficile. En 2004, nous espérions que ce serait plus facile maintenant.
Le président : Vous aviez un comité fédéral-provincial-territorial qui devait vous donner des orientations et travailler sur la responsabilisation, mais qui a été démantelé. Pourquoi l'a-t-il été? Quelle est l'ampleur du problème qui en a découlé? Je suppose que ce fut perçu comme un recul par les gens mêmes de qui vous tentez d'obtenir l'information.
Dr Kitts : Cela fait six semaines que j'occupe la présidence, ce qui m'autorise à faire preuve d'innocence pour les quelques mois à venir, mais je vais demander à M. Abbott de vous répondre.
M. Abbott : C'est un élément sur lequel le Conseil de la santé n'exerce aucun contrôle. Notre capacité à faire rapport vient essentiellement des données dont disposent l'ICIS et Statistique Canada, des recherches réalisées par la collectivité et des données que les provinces, les territoires et Santé Canada peuvent nous fournir. Nous dépendons de tous ces intervenants pour faire notre travail. Nous prenons tous ces éléments d'information et les resituons dans leur contexte pour préparer nos rapports.
Nous entretenons d'excellentes relations de travail avec les diverses autorités en la matière et la situation s'est améliorée avec le temps. Comme vous l'a dit le Dr Kitts, tous reconnaissent maintenant la nécessité d'obtenir de meilleures mesures et de préparer de meilleurs rapports, et sont désireux d'y participer. Nous constatons d'ailleurs que les conseils de la qualité qui ont été mis sur pied dans les provinces commencent à jouer un rôle important dans celles-ci et c'est là une très bonne chose. Nous pouvons collaborer avec eux pour permettre à tous d'atteindre un niveau national.
Le président : L'accord parle des temps d'attente dans les domaines prioritaires que sont le cancer, le coeur, l'imagerie, le remplacement d'articulations et la restauration de la vue. Ils sont énumérés ici.
Les mesures sur la radiothérapie sont-elles les seules dont vous disposez pour le cancer?
M. Wright : Oui. À la suite de la signature de l'accord, les provinces, les territoires et le gouvernement fédéral ont dû s'entendre sur des points de repère fondés sur des preuves. Il y en a très peu. La radiothérapie en est un sur lequel les provinces et les territoires étaient en mesure, en décembre 2005, de produire des rapports fondés sur des preuves.
Le président : Dans le domaine du coeur, il n'y en a qu'un, les pontages?
M. Wright : C'est exact.
Le président : Quels sont les autres points de repère sur lesquels vous travaillez dans ces deux domaines?
Le sénateur Martin : Les Instituts de recherche en santé du Canada, ou IRSC, se sont vu confier la recherche d'indicateurs comparatifs de remplacement. Ils ont cherché et cherché. Ceux-ci devaient reposer sur des preuves, et non pas sur un consensus ou sur la perception de la situation un jour donné. Ce fut un échec.
Le président : Madame Hoffman, vous nous avez détaillé les modalités de prévention et de règlement des différends. N'y a-t-on jamais fait appel? Avez-vous des exemples? N'avez-vous jamais eu recours à ce comité tiers?
Mme Hoffman : Comme je l'ai indiqué dans mes commentaires, nous travaillons en permanence à la prévention des différends. C'est ce que fait la Division de la Loi canadienne sur la santé au quotidien. Nous communiquons constamment avec les provinces et les territoires sur les questions qui sont portées à notre attention. Elles peuvent être soulevées par une province ou par un territoire, prendre la forme de lettres adressées au ministre ou être abordées dans les médias. Des problèmes sont portés à notre attention dans quantité d'occasions diverses. Comme c'est pratique courante chez nous, cela nous amène à beaucoup interagir avec les provinces ou les territoires concernés. Le volet de la prévention des différends constitue l'essentiel de notre travail au jour le jour.
Aucun comité n'a été convoqué officiellement jusqu'à maintenant pour produire un rapport. Dans une certaine mesure, vous pouvez y voir un succès et non pas un échec. Pour que l'approche à la prévention des différends donne de bons résultats, il fallait néanmoins disposer d'une soupape de sûreté sous forme de comité officiel, tout en souhaitant n'avoir à y recourir que le moins souvent possible. Cela a effectivement été le cas jusqu'à maintenant.
Le président : Pour terminer cette série de questions, j'aimerais vous demander si les provinces et les territoires ont respecté leurs obligations. S'ils ne l'ont pas fait, quelle a été la pénalité? Qu'est-ce qui est prévu dans ce domaine? Le gouvernement fédéral n'a-t-il jamais dit « Vous n'avez pas fait ceci ou cela et nous allons donc geler les fonds jusqu'à ce que vous respectiez vos obligations? »
Mme Hoffman : Tout à fait. En vérité, le rapport annuel sur la Loi canadienne sur la santé, publié chaque année, est un rapport sur les déductions imposées aux provinces à même les versements du Transfert canadien en matière de santé pour le non-respect de ces conditions, en particulier celles touchant la surfacturation et les frais d'utilisation dont il est question dans la loi. C'est une activité permanente.
Quant à savoir si les provinces et les territoires se conforment à leurs obligations de rapport, ce sont précisément ces obligations qui nous permettent de préparer et de présenter le rapport annuel sur la Loi canadienne sur la santé. Nous pouvons dire que nous nous occupons en permanence des questions de conformité et d'application de la loi. Nous essayons de le faire conjointement avec les provinces et les territoires, dans un esprit de collaboration.
Le sénateur Demers : Nous avons parlé des examens de l'accord réalisés en 2004 et en 2008. Combien de programmes gouvernementaux ont été mis en place à la suite de l'entrée en vigueur de cet accord?
M. Abbott : Je ne peux répondre à cette question. De tels programmes s'inscrivent éventuellement dans le contexte de chacun des éléments, et toutes les provinces et tous les territoires ont élaboré des programmes et des services adaptés à leurs contextes.
Le sénateur Demers : Diriez-vous que des progrès ont été réalisés?
M. Abbott : Comme nous l'avons indiqué dans notre mémoire, des progrès ont été réalisés dans tout le processus. Ils ont été plus marqués dans certains domaines que dans d'autres.
Le sénateur Eaton : Monsieur Wright, le délai d'attente pour les pontages est de 26 semaines, ou six mois. C'est très long.
M. Wright : Oui.
Le sénateur Eaton : Dans le prochain accord, ne devrions-nous pas nous efforcer d'avoir un moins grand nombre de repères qui seraient en même temps différents et plus exigeants?
M. Wright : Il y a en vérité trois repères pour les pontages. Nous n'en montrons qu'un ici. Ces trois repères s'étalent de deux semaines à 26 semaines. Malheureusement, les provinces ne recueillent pas toutes les données de la même façon et, à des fins de présentation, nous ne vous montrons qu'un seul repère, celui des 26 semaines.
Le sénateur Eaton : En d'autres termes, vous ne pouvez nous dire si 10 ou 50 p. 100 des gens qui ont besoin de pontages sont vus dans les deux semaines. Étant donné l'incohérence des modalités de rapport d'une province à l'autre, vous ne pouvez nous fournir aucune indication.
M. Wright : C'est exact. La seule indication que nous pouvons vous donner est une synthèse à 26 semaines.
Le sénateur Eaton : Ne serais-je pas décédée au bout de 26 semaines si j'ai besoin d'un pontage?
M. Wright : Vous vous seriez vue attribuer la priorité la plus faible des trois. Nous espérons que vous ne seriez pas décédée.
Le sénateur Eaton : Docteur Kitts, j'ignore si vous avez lu le rapport sur la santé produit par ce comité l'an dernier. Dans votre exposé, vous dites que les Canadiens éprouvent de la difficulté à accéder à des soins primaires en dehors des heures normales et pendant les fins de semaine et que les salles d'urgence sont embouteillées.
Je suis la directrice de la fondation de l'Hôpital St. Michael de Toronto, et j'ai une bonne idée de la façon dont les choses se passent dans un grand hôpital tertiaire.
Y aurait-il avantage à favoriser la mise sur pied d'un plus grand nombre de cliniques communautaires ou, en d'autres termes, de donner des soins en dehors des hôpitaux? Cela relève-t-il de votre domaine? Cela pourrait-il être inscrit dans le prochain accord?
Dr Kitts : Je crois que cela commence déjà à se faire. L'apparition d'équipes de santé familiale est une étape très importante dans la bonne direction. Tout le monde n'a pas besoin d'un médecin de famille. Les gens ont besoin d'avoir accès à une équipe de santé familiale. Nous devons modifier en profondeur le modèle de prestations de service et, comme vous le savez tous, apporter des changements aux soins de la santé est pratiquement impossible sans bonnes données et sans mesures du rendement pour nous assurer que nous mettons en oeuvre les bonnes solutions.
Avec tous les médecins de famille dont nous disposons maintenant, avec une hausse de 47 p. 100 des inscriptions en faculté de médecine, nous n'avons d'autre choix que de modifier la façon dont nous procédons. Il faut du leadership dans tous les secteurs et nous devons réformer les soins primaires. Nous ne devons pas nous occuper uniquement des médecins dispensant des soins primaires, mais aussi de l'équipe dont vous parlez. Il faut non seulement faire sortir les patients hospitalisés, mais également réduire les hospitalisations. C'est de la plus haute importance.
Comme je l'ai dit dans le rapport, de plus en plus de Canadiens souffrent de maladies chroniques. Ceux-ci ne devraient pas séjourner longtemps dans des hôpitaux si nous procédons de la bonne façon. S'ils doivent être hospitalisés pendant la phase aiguë, ils doivent ensuite quitter l'hôpital. L'hôpital est le lieu où nous dispensons les soins primaires, et c'est tout! Nous pouvons faire beaucoup mieux.
La bonne nouvelle est que, maintenant, à l'Hôpital d'Ottawa, nous recrutons des médecins de famille conjointement avec les régions rurales. Les résidents en médecine et les médecins de famille sont maintenant sur appel une fois par semaine. Ils bénéficient de la protection de l'environnement d'un grand hôpital, ont accès aux tomodensitogrammes et aux autres appareils et services. Quand ils vont pratiquer la médecine dans les régions rurales du pays, ils se sentent complètement isolés et perdus.
Il incombe aux grands centres académiques, les tours d'ivoire, de faire du recrutement conjoint et de s'assurer que les médecins obtiennent l'aide et les services dont ils ont besoin. Je crois que si nous pouvions procéder de cette façon, un grand nombre de jeunes médecins voudraient s'installer dans les régions rurales du Canada parce qu'ils feraient partie d'une équipe.
Le sénateur Eaton : Est-il possible de modifier le statut de celui qu'on appelle le médecin de famille? Les étudiants en médecine semblent vouloir devenir des spécialistes, et nous avons besoin de spécialistes. Est-ce une question d'argent ou de statut? Quelqu'un qui fournit des soins complets, comme médecin de famille, ne pourrait-il pas avoir le même statut qu'un chirurgien cardiaque, par exemple?
Dr Kitts : Vous avez bien saisi. Dans nos hôpitaux, les médecins de famille ont le sentiment d'être des citoyens de seconde classe, et cela ne devrait pas être le cas. Malheureusement, alors que, il y a 25 ans, le médecin de famille était un Dieu pour tout le monde, aujourd'hui, il est de plus en plus cantonné à un rôle de triage et il perd ses capacités.
Une équipe de santé familiale devrait avoir des médecins très compétents mettant l'accent sur le diagnostic, le traitement et le contrôle des maladies chroniques. Ils ne devraient pas avoir à s'occuper de promotion, de prévention et de régime alimentaire. Les autres prestataires de services de santé devraient s'occuper de toutes ces questions alors que les médecins de famille se concentreraient sur leurs tâches premières.
Le problème est que le médecin de famille essaie de tout faire pour tout le monde, et il est probable que l'essentiel de son travail est consacré au volet social plutôt qu'à celui du diagnostic. Il faut apporter des changements fondamentaux dans l'équipe et dans l'attribution des responsabilités.
Le sénateur Eaton : Aurions-nous des leçons à apprendre dans d'autres pays?
Dr Kitts : J'ai visité quelques pays. Des gens viennent nous visiter parce qu'ils estiment que nous obtenons de très bons résultats. Je suppose qu'il y a maintenant des domaines d'excellence dans tous les pays. Ce qui se fait à Peterborough en est un bon exemple. À une époque où tous nos services d'urgence font face à des hausses annuelles de 15 000 visites, Peterborough a fait baisser les siennes de 15 000. Il y a donc là une expérience riche d'enseignement.
Je ne crois pas qu'un seul pays ait tout bon, mais il y a des centres d'excellence, même dans notre pays. Je crois que c'est pour cela que le mandat du Conseil canadien de la santé a été adapté pour mettre davantage l'accent sur les pratiques exemplaires et sur l'innovation, et pour le faire savoir. Ce qui s'est fait à Peterborough est important.
[Traduction]
Le sénateur Champagne : Je peux personnellement témoigner de la qualité des soins que nous recevons au Québec ainsi que de la disponibilité et de la qualité des soins à domicile qui nous sont offerts par les CLSC. Mais où il n'y a vraiment pas d'amélioration, c'est dans la disponibilité des médecins de famille.
En janvier dernier, j'ai essayé d'avoir un rendez-vous. La date la plus proche qu'on a pu m'offrir était à la mi-juin. Il ne faut pas se surprendre que les urgences d'hôpitaux soient remplies. Les gens ne peuvent pas voir leur médecin, ils vont donc à l'urgence de l'hôpital.
Il y a un groupe de médecins de famille qui existe, mais tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas informatisé tous les dossiers, il faudra toujours recommencer à donner l'histoire de notre vie, notre histoire médicale, et cela prend un temps énorme, et pour le médecin et pour les gens qui attendent.
Est-ce qu'on pourrait faire de l'informatisation des dossiers une des priorités? Je sais que le gouvernement du Québec a voulu faire sa part en admettant un nombre plus important d'étudiants dans les facultés de médecine. On devrait donc avoir davantage de médecins, mais comme le disait le sénateur Eaton, un nombre invraisemblable de ces jeunes s'en vont en spécialité. Il est très difficile d'avoir un médecin de famille, et si on a la chance d'en avoir un, il faut attendre quatre mois et demi afin d'avoir un rendez-vous, ce qui n'est guère mieux.
S'il y avait des sommes disponibles dans notre nouvel accord pour l'informatisation des dossiers, cela faciliterait les choses, et à ce moment-là, si dans la clinique où se trouve normalement mon médecin, il y a cinq ou six autres médecins que je peux consulter, et qu'ils ont accès à mon dossier sur leur ordinateur, cela faciliterait beaucoup les choses et on perdrait moins de temps.
[Traduction]
Dr Kitts : Je suis tout à fait d'accord avec vous. Vous avez touché à deux choses essentielles auxquelles il va falloir apporter des modifications importantes à l'avenir. L'une est la disponibilité des soins primaires, et du dossier de santé électronique. Cela revient à la même chose. Pourquoi ne pouvez-vous pas obtenir un rendez-vous avez un médecin de famille? Si vous vous présentez à l'hôpital, vous voyez un médecin. Ça devrait être la même chose pour les soins de santé primaires. Si nous voulons vous empêcher de vous rendre à l'urgence ou d'être admis dans un hôpital, il faut que vous puissiez téléphoner à votre médecin quand vous avez mal à l'oreille et que vous soyez vu le même jour.
Le sénateur Champagne : Il faut que je puisse joindre mon médecin par téléphone.
Dr Kitts : C'est exact. Mais que font-ils alors? Ils sont occupés à quantité d'autres choses qui, à mon avis, pourraient fort bien être prises en charge par une équipe. Si nous voulons vraiment réformer les soins primaires, nous ne pouvons pas nous satisfaire d'un médecin de famille ayant à examiner 12 personnes en bonne santé et n'ayant pas de places pour un patient qui doit le voir rapidement. Nous devons apporter des changements fondamentaux, et ceux-ci toucheront les mesures incitatives et leurs modalités de travail. Il est difficile d'apporter des changements dans le domaine des soins de la santé, mais je suis convaincu que nous avons les médecins de famille dont nous avons besoin, mais tout simplement qu'ils ne font pas les bonnes choses.
C'est à nous qu'il incombe d'apporter des changements. Il faut harmoniser les modalités au niveau du fédéral, des provinces et des prestataires des services de santé qui sont sur la brèche, de l'Association médicale canadienne, et cetera. Tout le monde doit être d'accord. Nous avons beaucoup de médecins de famille, mais ils ne font pas les bonnes choses. Ils doivent être en mesure de voir les patients quand les patients ont besoin de les voir.
Un autre problème est celui du dossier de santé électronique. En ce moment même, nous sommes en train de finaliser les responsabilités en matière de protection des renseignements personnels, de caractère confidentiel, et cetera. J'espère que, dans les six semaines qui viennent, tous les médecins de famille d'Ottawa pourront consulter le dossier de santé électronique de leurs patients à l'Hôpital d'Ottawa, pour se tenir informés des développements concernant ces patients. Beaucoup de choses se passent dans ce domaine, mais si nous voulons relever la barre dans le domaine des améliorations, de la durabilité et de la qualité, il faut à tout prix avoir cette harmonisation du gouvernement fédéral jusqu'aux prestataires de service de première ligne et aux prestataires de soins de la santé, en passant par les gouvernements provinciaux, pour affirmer « Voici ce que nous allons faire. » Je crois que nous pouvons le faire.
[Français]
Le sénateur Champagne : J'espère que l'informatisation des dossiers deviendra quelque chose d'important lorsqu'on refera cette entente. Parce que, autrement, si vous arrivez très malade dans les urgences de nos hôpitaux, le triage va vous amener à l'avant beaucoup plus rapidement qu'une personne qui souffre d'otite.
Ce n'est pas que l'otite ne fait pas mal, mais une méningococcémie vous rendra plus malade. J'ose espérer que nous pourrons informatiser les dossiers et que, d'ici un an ou deux, on nous offrira des rendez-vous à moins de trois ou quatre mois d'attente.
[Traduction]
Le sénateur Seidman : Les choses débutent vraiment très bien parce que vous nous avez fait une série d'exposés très riches en information. Comme je suis toujours très intéressée par les données, je vais commencer avec le Dr Kitts.
Docteur, vous dites vous concentrer sur l'identification des pratiques exemplaires en innovation. Avez-vous observé la volonté d'échanger les pratiques exemplaires à travers le pays? Y a-t-il un endroit où celles-ci sont regroupées ou y en aura-t-il un?
Dr Kitts : C'est une question très pertinente. Si vous parlez à n'importe quel cadre supérieur, médecin en chef ou infirmière en chef, tous vous diront qu'ils tiennent absolument à échanger ces pratiques. Nous voulons faire connaître les pratiques exemplaires.
Vous pouvez également leur demander s'il devrait y avoir une forme de recueil ordonné des pratiques exemplaires, et tous vous diront « Absolument ». Cela ne s'est jamais fait parce que le sujet n'est jamais devenu prioritaire dans n'importe lequel de ces domaines. C'est une idée tout à fait bonne et tout à fait possible, mais dont la réalisation est peu probable sans directive énergique venant d'en haut.
Je vais vous donner l'exemple de ce qui se passe maintenant en Ontario, avec la Loi de 2010 sur l'excellence des soins pour tous. Certains des hôpitaux se sont dotés depuis un certain temps de plans de qualité. Il s'agit de plans accompagnés de stratégies concrètes, d'investissements, de tactiques, de cibles et de résultats sur un certain nombre de choses. La plupart des hôpitaux n'ont pas de plan de qualité. Il y a une pratique exemplaire. Le 1er avril de cette année, 150 hôpitaux ontariens auront affiché un plan de qualité sur leurs sites web avec des mesures de rendement, des cibles et les résultats qu'ils obtiennent. Ce résultat est imputable au fait qu'une législation a été adoptée. Tout le monde convenait que cela devrait et pourrait se faire, mais ça n'a pas été le cas auparavant.
L'ICIS, Statistique Canada et le Conseil canadien de la santé ne peuvent faire rapport que sur les données dont ils disposent. J'observe de plus en plus en première ligne des prestataires individuels de soins de la santé qui mettent en place des collaborations à l'échelle nationale en déclarant qu'ils savent pouvoir faire mieux et qu'ils se demandent si d'autres le font. Ils poussent cette idée de l'avant.
Votre idée et votre suggestion sont tout à fait valides, mais cela ne se fera pas tant que quelqu'un n'en fera pas une priorité. L'adoption d'une loi est peut-être la solution la plus énergique, mais elle donne des résultats.
Le sénateur Seidman : Votre réponse m'amène à me tourner naturellement vers l'ICIS.
Votre mandat est si important. Les objectifs déclarés doivent être mesurables, disposer de données objectives et être comparables si nous voulons comprendre comment notre système de santé s'y prend pour nous en donner pour notre argent, ce qui est le résultat final recherché.
Des données spécifiques sur les hôpitaux et les médecins sont-elles recueillies? Le Dr Kitts a déjà commencé à répondre à cette question. De façon plus précise, je m'intéresse aux données basées sur les résultats pour mesurer les objectifs et la qualité des soins. Si nous n'avons pas ces données, les aurons-nous bientôt? Allons-nous dans cette direction?
M. Wright : En ce qui concerne les établissements de soins de courte durée, soit les hôpitaux, j'ai parlé du « Projet de production de rapports sur les hôpitaux canadiens ». Celui-ci concerne 547 hôpitaux de tout le pays situés dans 10 provinces ou territoires. Il a commencé sous forme de projet-pilote. Nous espérions amener deux ou trois provinces à y participer et il y a eu affluence. Nous avons eu des discussions avec les provinces et les territoires qui ne sont pas impliqués, et ils envisagent d'adhérer à ce projet.
Ce projet fait appel à 33 indicateurs répartis en trois grandes catégories. L'une met l'accent sur les indicateurs cliniques, qui sont des mesures de résultats dans de nombreux cas avec, par exemple, les taux de mortalité au bout d'un séjour de 30 jours dans les hôpitaux, les taux de réadmission après une crise d'asthme, et cetera. Nous avons également des indicateurs de la sécurité des patients, qui constituent aussi des résultats, et des données financières.
Nous allons ajouter d'autres indicateurs. Ces données ne sont pas publiques pour l'instant parce que nous y travaillons encore et, comme je l'ai indiqué, nous espérons rendre le tout public d'ici mars de l'an prochain. C'est un projet qui permet à une personne de la célèbre ville de Podunk, en Saskatchewan, de comparer le rendement, les résultats, la qualité des soins et la situation financière de son hôpital à ceux de l'hôpital de l'autre ville bien connue d'Oddsock, en Nouvelle-Écosse.
Pour les médecins, la situation est différente et c'est dû au dossier médical électronique. L'ICIS ne recueille que des données simples sur les médecins comme leur âge, l'endroit où ils ont obtenu leur diplôme, leur nombre d'années de pratique, les conditions dans lesquelles ils prennent leur retraite ou le moment où ils la prennent. C'est une base de données simple de chiffres, indiquant les spécialités, qui pratiquent la médecine de famille, le montant de la rémunération, précisant si des frais de service sont facturés ou s'il y a d'autres solutions. Nous ne recueillons pas de données sur les résultats imputés aux traitements.
Dr Kitts : Pour poursuivre avec les données sur les médecins, il faut savoir que, aujourd'hui, les mesures des résultats sont agrégées au niveau de l'hôpital. Les gens veulent savoir comment les choses se passeront pour eux avec ce médecin. C'est l'objectif ultime que nous devons atteindre. Nous ne parviendrons à apporter réellement les importantes modifications nécessaires à nos modalités de prestation des services de santé que lorsque nous serons capables de mesurer les coûts et les résultats, aussi bien au niveau d'un patient que d'un médecin en particulier.
Sans cette information, la pratique de la médecine restera pour beaucoup approximative. Le médecin continuera à appliquer ce qu'il aura appris, dans le meilleur intérêt de son patient. Sans données objectives en temps réel prouvant qu'une autre méthode est meilleure, nous continuerons à pratiquer l'art de la médecine, ce qui pourrait fort bien ne pas être toujours la solution la plus rentable, ni celle donnant les meilleurs résultats.
Le sénateur Seidman : J'en conviens et, si nous essayons de cerner les pratiques exemplaires et de définir des normes, pouvons-nous étudier, par exemple, ce que font les chirurgiens et les résultats qu'ils obtiennent lorsqu'ils opèrent?
Dr Kitts : Oui, si nous avons ces résultats.
M. Wright : Malheureusement, nous n'avons pas ces données. On espère, avec la mise en place du dossier de santé électronique et du dossier médical électronique, que ces données seront disponibles à des fins cliniques. Cependant, la gestion du volet de la protection des renseignements personnels des données destinées à la gestion d'ensemble du système de santé est délicate, même si ces données sont très importantes.
J'aimerais vous faire rapidement part d'un autre point sur la qualité. Le Dr Kitts et moi-même travaillons sur un projet consacré aux centres universitaires de sciences de la santé à travers le pays. Nous tentons d'élaborer des indicateurs de qualité qui n'utilisent pas d'anciennes données afin de pouvoir obtenir les résultats en moins d'un mois. C'est un projet tout aussi important pour le Dr Kitts, qui dirige cette collaboration, que pour l'ICIS. Cette collaboration va donner de bons résultats.
Le sénateur Seidman : Si nous voulons parvenir à quantifier l'optimisation des ressources, il est important que nous disposions de ce genre de données. Vous nous avez parlé du caractère comparable des données en précisant que, dans le cas du Québec, celles-ci ne sont pas comparables dans plusieurs domaines. Quels sont les problèmes que cela pose?
M. Wright : Les données dont nous ne disposons pas dans une forme comparable sont celles concernant les réparations de la fracture de la hanche. Cela dit, ils s'y prennent de façon sensiblement différente pour recueillir leurs données. Nous allons publier un document en avril sur lequel nous avons collaboré étroitement avec le Québec, l'Alberta et l'Ontario pour permettre de procéder réellement à des comparaisons. Nous travaillons avec ces provinces dans ce sens.
L'autre série de données est celle sur les pontages, car elles sont recueillies de façon différente au Québec. Nous avons réalisé collectivement des progrès importants, y compris avec le Québec, pour élaborer les bases de données, mais cela prend plus de temps étant donné les modalités utilisées dans cette province pour administrer ses systèmes.
Le sénateur Cordy : Je reviens aux commentaires du sénateur Eaton sur les repères. En lisant à ce sujet, j'ai découvert que les repères utilisés par les provinces et les territoires ne sont plus ceux définis par la collectivité médicale. Est-ce vrai?
M. Wright : Il y a divers types de repères. Il y a par exemple les repères probants, soit le cas dans lequel une étude de la littérature universitaire a permis de constater une preuve manifeste de résultats et de définir un repère. Les provinces et les territoires ont fait rapport sur cette question en décembre 2005. Ils n'ont pu en trouver pour les examens par IRM ni pour les tomodensitogrammes. Un autre type de repères émanant de la collectivité médicale serait celui d'un repère reposant sur un consensus. C'est ainsi que la collectivité médicale pourrait convenir que toute personne devant passer un examen par IRM devrait le faire dans un délai précis. Il faut convenir que les points de vue divergent au sein de la collectivité médicale sur les temps d'attente des diverses chirurgies quand on ne dispose pas de repères probants.
Dr Kitts : Je peux vous donner un exemple concret pour illustrer cette problématique. M. Wright a tout à fait raison de dire que nous avons réellement besoin de points de repère fondés sur des preuves. Il faut que nous sachions que, si nous définissions un repère de quatre semaines pour le cancer de la prostate, le patient n'aura pas à en souffrir. On peut prétendre que ce temps d'attente ne devrait pas dépasser deux, quatre ou six semaines. Il est certain que si je dois subir une opération, je vais vouloir qu'elle ait lieu demain. Pour la vaste majorité des repères de qualité, nous n'avons pas les éléments probants que nous voudrions avoir. Un groupe de spécialistes se réunit et affirme que la chirurgie devrait intervenir dans un délai de quatre ou six semaines, mais nous ne pouvons mesurer les résultats dans la vaste majorité des cas.
Voici l'exemple d'une pratique exemplaire bien connue à l'échelle internationale. Il y a quelques années, un urgentiste de l'Hôpital d'Ottawa a posé la question suivante : est-ce que tous les patients qui se sont foulé la cheville et se présentent à l'urgence avec une cheville enflée doivent subir des rayons x? Pour être en mesure de trouver la réponse, il a présenté une demande à l'IRSC et a reçu une subvention pour étudier la question. Il a élaboré un algorithme pour diagnostiquer l'état de la cheville en procédant à des palpations à divers endroits. Si le patient répond, oui, oui, oui, non, il n'est pas nécessaire de lui faire subir des rayons x car la cheville n'est pas cassée. Vous pouvez alors le renvoyer chez lui. La question a été étudiée de façon scientifique et la preuve a été faite à 100 p. 100 que le patient n'a pas besoin de passer de rayons x et que vous n'envoyez pas chez lui quelqu'un ayant la cheville brisée. Cette étude a été publiée dans le New England Journal of Medicine, diffusée partout au Canada et adoptée dans tous les services d'urgence à travers le monde. Elle a permis d'économiser des milliards de dollars en soins de la santé et a évité à des gens d'attendre longtemps aux urgences pour faire radiographier une cheville foulée. Dans ce cas, le repère probant est le New England Journal of Medicine. Toute personne appliquant cette méthode sait qu'elle ne renvoie pas chez elle une personne à la cheville brisée.
Il y a quelques années, mes spécialistes de la prévention des infections m'ont informé que le staphylocoque doré résistant à la méthicilline, la super bactérie, posait un problème important. Ils n'étaient plus en mesure de définir qui pouvait amener cette bactérie à l'hôpital en fonction de l'endroit d'où la personne venait et de qui elle était. La bactérie est présente dans la collectivité et nous n'avons d'autre choix que de procéder à un dépistage universel. Toute personne se rendant à l'hôpital doit subir un tel dépistage. Tous les spécialistes de la prévention des infections, d'excellents médecins parmi les meilleurs au pays, sinon en Amérique du Nord, ont déclaré que c'était une bonne idée, une pratique exemplaire de pointe. Le Réseau universitaire de santé de Toronto a été du même avis.
Un an et demi plus tard, nous avons réalisé une évaluation à partir des données. Les coûts avaient augmenté de 400 $ par patient, soit un million de dollars pour mon hôpital. Il n'y avait pas de réduction du nombre de cas et pas d'effet mesurable. La solution n'était donc pas rentable et nous avons cessé de l'appliquer. C'est une bonne chose qu'elle n'ait pas été adoptée comme une pratique exemplaire à travers le pays, en s'appuyant sur un consensus, à ce coût d'un million de dollars par hôpital. Nous devons être prudents lorsque nous commençons à mettre en oeuvre des pratiques exemplaires parce que, si elles ne reposent pas sur des éléments probants et sur des résultats, il se pourrait que nous fassions plus de mal que de bien. C'est la difficulté à laquelle nous sommes toujours confrontés. L'élément absolument indispensable pour élaborer un meilleur système est celui des données produites par l'ICIS tenant compte de ce qui se passe réellement au niveau de chaque patient.
Le sénateur Cordy : Étudions-nous des points de repère fondés sur des preuves par l'imagerie diagnostique? Cela était inscrit dans l'Accord de 2004, il y a sept ans. Quel progrès avons-nous fait en sept ans?
M. Wright : En 2005, les provinces ont demandé aux Instituts de recherche en santé du Canada de trouver des preuves qui conviennent. Une analyse détaillée de la littérature n'a pu que constater qu'il n'y a pas de points de repère fondés sur des preuves pour les tomodensitogrammes, les IRM et les TEP. Je crois que personne n'étudie cette question actuellement. Certaines lignes directrices de nature générale ont été préparées, mais elles ne sont pas adoptées par tous.
Dr Kitts : Ce qui est bien avec ces types de repères est que chacun sait en cinq minutes si vous avez besoin d'un examen par IRM lorsque vous avez subi un grave accident vasculaire cérébral ou que avez été heurté par une voiture. La question ne se pose pas, même si un examen par IRM doit être réalisé en moins d'une semaine. Nous ignorons complètement combien de temps vous pouvez attendre sur la liste d'attente des examens par IRM sans avoir à en souffrir. Votre priorité augmente et cela vous fait avancer sur la liste d'attente. Nous avons de longues listes d'attente pour ces examens et c'est pourquoi j'ai posé la question à tous nos meilleurs chercheurs sur les services de santé : quels sont les risques pour les personnes qui doivent attendre huit mois pour passer un tomodensitogrammes? La réponse est qu'on les déplace vers le haut de la liste d'attente quand leur niveau de priorité change, ce qui ne constitue pas un bon système. Au bout du compte, j'ignore quel est le bon temps d'attente pour un examen par IRM.
Le sénateur Cordy : Des cliniques privées d'imagerie diagnostique apparaissent dans toutes les provinces, et la réaction du public y est favorable. En Nouvelle-Écosse, les gens ont accepté de payer 500 $ à une clinique privée pour passer un examen par IRM le lendemain. Si l'accord le prévoyait, il semble néanmoins que ce genre de pratique nous mène vers un système de soins de santé à deux vitesses.
Dr Kitts : Comme pour la plupart des temps d'attente pour des chirurgies, pour les examens par IRM ou pour les pontages, les priorités attribuées sont de un quand vous ne pouvez pas attendre et que vous devez passer en tête de liste immédiatement. La priorité numéro deux signifie que vous pouvez attendre deux semaines et la priorité numéro trois que vous pouvez attendre six semaines. Je déteste avoir à le dire, mais les gens à qui on a attribué la priorité numéro quatre doivent attendre si longtemps qu'on va devoir finir éventuellement par leur accorder la priorité numéro trois.
Lorsque nous parlons de repères, nous devons parler du niveau d'acuité de l'état des patients. Les preuves sont passablement claires quand cette acuité est élevée, mais, quand ce n'est pas le cas, je ne crois pas que nous sachions ce qui constitue un temps d'attente raisonnable pour une personne souffrant d'une douleur chronique au bas du dos.
Le sénateur Cordy : La réponse variera selon qu'elle est donnée par le patient ou par quelqu'un d'autre.
Dr Kitts : C'est exact. Si un chirurgien orthopédique vous prévient qu'il y a 99,5 chances sur 100 que cette grosseur ne soit pas cancéreuse, et que la seule façon d'en avoir la certitude est de passer un examen par IRM, combien de temps allez-vous devoir attendre pour le savoir?
Le sénateur Ogilvie : Ce que nous cherchons à savoir, comme vous le savez fort bien, parce que vous vous occupez plus souvent que nous de ces questions, est si l'accord, c'est-à-dire l'entente conclue entre un organisme qui verse beaucoup d'argent et un groupe d'organismes qui reçoivent cet argent pour fournir des services, donc si la réussite de cet accord est au bout du compte fonction de la mesure dans laquelle les gens tirent profit de ce transfert de fonds.
Nous avons consacré un certain temps à parler des repères, qui sont absolument essentiels. Toutefois, comme vous l'avez fort bien dit à mon avis, le choix de ces repères est peut-être tout aussi important. Nous savons qu'il y a des domaines, comme ceux des remplacements des articulations de la hanche et du genou, dans lesquels les temps d'attente sont beaucoup plus manifestes et peuvent constituer une mesure directe, alors que ce n'est pas le cas pour l'accès aux services dans d'autres domaines.
C'est ainsi que si nous prenons le dépistage du cancer colorectal, et l'exemple de la cheville enflée du Dr Kitts, je crois savoir qu'il y a quatre indicateurs essentiels dont le médecin de famille va tenir compte pour déterminer si le patient présente des risques importants quand il se présente la première fois. L'un de ces indicateurs est l'historique familial. Toutefois, il va falloir deux ou trois générations avant de disposer d'assez de données chronologiques. En d'autres termes, il faut que les gens vivent assez longtemps pour que cela puisse devenir réellement un indicateur. Il y a aussi la situation dans laquelle un dépistage hâtif permet d'éliminer complètement une situation dans laquelle la survie est en cause. Je dirais que les résultats que nous obtenons au pays avec cette maladie sont décevants.
Je suppose que les résultats ont commencé à s'améliorer au cours des trois à cinq dernières années. Ils étaient réellement très médiocres au Canada jusqu'à il y a trois à cinq ans. Pouvez-vous, vous ou M. Catlin, nous dire si vous enregistrez une amélioration des résultats chez les personnes de plus de 50 ans subissant un dépistage du cancer colorectal.
Dr Kitts : Je peux vous dire que je crois que la prochaine fois qu'ils publieront des statistiques, on verra une amélioration marquée, parce qu'il y a un programme fédéral-provincial de traitement du cancer et un prestataire de soins intervenant en première ligne, ainsi qu'une harmonisation des méthodes. C'est ce qu'il faut faire et cela devrait être fait. Lorsque vous le ferez, vous obtiendrez un taux de 100 p. 100. Cela ne fait aucun doute. Il y a quelques années, les gens se contentaient pour l'essentiel de paroles. Je crois que tout le monde a bien compris maintenant et j'espère que les statistiques vont beaucoup s'améliorer.
Le sénateur Ogilvie : C'était bien mon hypothèse. J'ai étudié les résultats de l'examen de 2008, et il m'a semblé que la coopération entre les provinces n'était pas extraordinaire pour élaborer des indicateurs et faire rapport comme il convient. J'espère qu'enfin, dans les domaines que nous avons abordés ce matin, comme les rapports sur le cancer, qu'il s'agisse de la radiographie, de la chimiothérapie, des doses de traitement, et cetera, l'indicateur réel sera le pourcentage de gens survivant à certains types de cancer. Il me semble que la tâche de Santé Canada est de prendre connaissance du rendement des prestataires de soins de la santé pour nous assurer que les résultats des indicateurs réels évoluent grâce à un effort global.
J'ai une question à vous poser qui conviendrait mieux, j'en conviens, à un autre groupe que le vôtre. Je m'adresse au Dr Kitts et à M. Wright. Il s'agit des produits pharmaceutiques. Je sais fort bien que, pour l'essentiel, vous produisez des rapports de chiffres, mais certains d'entre vous ont une formation médicale et scientifique. C'est pourquoi je tiens à vous la poser.
Quand j'examine les données, j'observe dans un certain nombre de rapports que les effets indésirables des médicaments sont la quatrième ou la cinquième cause de décès. Nous savons également que l'on prescrit beaucoup trop de produits pharmaceutiques. C'est une pratique qui s'avère très coûteuse, qui ponctionne énormément les budgets alors que nous savons qu'il y a des effets indésirables sur la santé et qu'il s'agit de produits destinés à traiter les patients et non pas le contraire.
À propos, je tiens à dire clairement que je suis convaincu que les dossiers électroniques vont jouer un rôle déterminant pour enregistrer des progrès dans la plupart des domaines dont nous avons parlé aujourd'hui, et ils me paraissent absolument essentiels dans ce domaine-ci.
Alors que vous étudiez les effets éventuels du dépistage génétique, et en particulier ses conséquences sur le dossier de santé individuel, vous semble-t-il que nous pourrons améliorer la santé des Canadiens grâce à de telles orientations et, ensuite, réduire sensiblement le coût global du système de soins de santé? Si c'est à vous deux que je pose cette question, toute personne qui le désire peut aussi me répondre.
Dr Kitts : La réponse est oui, tout à fait, à 100 p. 100. Je crois toutefois que nous en sommes encore loin. La théorie de la médecine personnalisée me paraît excellente. Chacun de nous a un bagage génétique complètement différent. Donc, si je vous donne un médicament, vous pourriez avoir une réaction différente quatre fois plus importante que celle du président, par exemple, et c'est une chose que nous ignorons. Il n'y a pas de médicament sans effets indésirables.
Je crois que, à l'avenir, les médicaments pourront être fabriqués en fonction du bagage génétique de la personne grâce à la médecine personnalisée. Toutefois, nous en sommes encore loin. D'ici là, à chaque fois qu'une personne se fait prescrire un médicament, le médecin fait implicitement une analyse risques-avantages. Le chef d'équipe en fait peut-être une aussi s'il s'agit d'un médicament particulièrement toxique. Au bout du compte, ce sont vos professionnels de la santé qui jugent si les avantages l'emportent sur les risques. Si c'est le cas, vous aurez peut-être les avantages, mais vous subirez également certains des effets indésirables. C'est une situation sans issue. Il n'y a pas de médicament sans risque, mais les avantages l'emportent de beaucoup sur les risques dans la plupart des cas.
M. Wright : Je n'ai pas grand-chose à ajouter. Dans certains cas, des médicaments coûteux pour traiter des maladies rares se manifestent lors de l'identification d'une maladie particulière et il s'avère alors qu'on peut utiliser une molécule donnée. De tels médicaments peuvent être très coûteux et j'imagine que les provinces sont très préoccupées par ce type de développement. C'est tout ce que j'avais à ajouter.
Claudia Sanmartin, analyste principale, Division de l'analyse de la santé, Statistique Canada : Je souhaite aborder un point important, qui est celui des médications multiples. Lorsque nous avons réalisé l'enquête sur les soins de santé primaires, nous avons enregistré un résultat déterminant chez les répondants, et en particulier chez ceux souffrant de maladies chroniques et de comorbidité multiples. Il y a des gens qui font de l'hypertension, d'autres qui ont du diabète ou qui font de l'arthrite, mais le fait de réunir trois de ces conditions, ou plus, augmente sensiblement votre risque de devenir handicapé.
Nous avons constaté que, même si les risques de subir des effets indésirables à la suite de l'ingestion d'un médicament sont faibles, lorsque vous devez en prendre cinq ou six de plus, le risque augmente beaucoup. La capacité du médecin à bien connaître cette information à ce moment-là, à savoir quels autres médicaments la personne prend, est essentielle. Il est essentiel d'assurer des soins coordonnés à ces personnes, à celles souffrant de maladies chroniques ou de comorbidités.
Le sénateur Ogilvie : Je conviens avec vous que ce n'est pas pour tout de suite. Cela risque cependant de se produire plus rapidement que nous l'imaginons, à mon avis. Mon dernier commentaire est pour rappeler que je suis convaincu que le dossier de santé électronique est de la plus haute importance pour faire face aux problèmes dus à la prise de doses multiples. Nous commençons à avoir des preuves qu'environ 30 à 40 p. 100 des médicaments qui nous sont prescrits n'ont pas d'effets favorables, et cela laisse entrevoir d'énormes retombées très avantageuses pour la santé dans l'avenir.
Le sénateur Dyck : La presse a fait état de quelques cas, et je me souviens en particulier d'un dans lequel un patient souffrant d'une maladie rare, et je ne me souviens pas s'il s'agissait d'un bébé ou d'un jeune enfant ayant une rare maladie métabolique, mais il y avait un médicament précis qui aurait permis de le traiter. Cela relèverait alors de la couverture des médicaments onéreux.
A-t-on enregistré des progrès dans l'élaboration d'une couverture des médicaments onéreux? Avez-vous entendu parler des types de plans qui pourraient être proposés? Quels progrès ont été faits pour aider des familles se trouvant dans des situations comme celle-ci, qui sont confrontées à une situation unique et terrible avec des factures qui ne sont pas prises en charge par les régimes d'assurance-maladie, et qui peuvent être très élevées?
Dr Kitts : Je laisse M. Abbott vous répondre.
M. Abbott : La couverture des médicaments onéreux varie d'une province à l'autre. La plupart d'entre elles ont adopté une forme quelconque de couverture pour les cas tels que celui que vous avez décrit. La Stratégie nationale relative aux produits pharmaceutiques envisage de se doter d'un plan ou d'une approche dans tout le pays. Face à ces cas entraînant des coûts très élevés, certaines provinces ont mis en oeuvre des politiques pour s'assurer qu'elles peuvent y faire face, en particulier dans les cas de maladies rares. Il y a eu beaucoup de discussions au niveau fédéral-provincial de ces questions, tout comme avec les fabricants de médicaments, parce qu'ils jouent un rôle tout aussi essentiel que la collectivité des chercheurs.
La diversité des mesures en vigueur à travers le pays me fait penser à une courte pointe. Il n'y a pas de cohérence. Selon la province dans laquelle vous résidez, la couverte offerte ne sera pas la même. Il arrive, quand un tel cas se présente, que des mesures particulières soient prises.
Le sénateur Dyck : Je suis originaire de la Saskatchewan. Quand j'ai regardé les données que nous a présentées M. Wright sur les temps d'attente, je me suis dit, « Je ne suis pas dans la bonne province, je devrais déménager en Colombie-Britannique ou en Ontario. » Je crois que je choisirais la Colombie-Britannique parce que le climat y est plus agréable.
Avez-vous constaté, dans les données recueillies, une indication quelconque de la raison pour laquelle les résultats sont moins bons en Saskatchewan? Y ayant vécu la plus grande partie de ma vie, j'imagine que cela tient dans une large mesure à la pénurie de médecins. Nous en manquons continuellement dans les collectivités du Nord et dans les régions rurales. Les hôpitaux ruraux ferment et il y a beaucoup de concurrence pour trouver des médecins. Est-ce une des raisons?
Les provinces peuvent-elles tirer parti d'une façon quelconque de cet accord? Est-ce qu'il les aide à venir à bout de ce genre de situations? Y a-t-il un mécanisme nous permettant de tirer parti de l'accord pour résoudre un problème au niveau d'une province?
M. Wright : Je viens moi aussi de la Saskatchewan. J'y ai été sous-ministre de la Santé pendant un certain temps.
Ce qu'il y a d'intéressant avec la Saskatchewan est que, en prenant la tendance sur trois ans, on enregistre une amélioration dans chacun des domaines. On pourrait donc dire que la Saskatchewan avait du retard sur d'autres provinces et territoires aux alentours de 2004, mais, en nous fiant aux tendances récentes, et celles-ci seront confirmées plus tard ce mois-ci, on peut dire que les résultats de la Saskatchewan s'améliorent dans tous les secteurs.
On peut invoquer quantité de raisons pour expliquer une telle situation, comme les caractéristiques de santé de la population, la présence de collectivités des Premières nations dans la province. Ces caractéristiques peuvent sous- tendre toute une série d'autres facteurs, qui sont tous légitimes à leur façon.
En ce qui concerne l'accord lui-même, les fonds additionnels prévus par celui-ci pour réduire les temps d'attente ont été bienvenus dans toutes les provinces et dans tous les territoires et ont permis de réduire ces temps d'attente, et très certainement dans les cinq domaines identifiés et dans d'autres secteurs de la chirurgie.
Le sénateur Dyck : Vous avez répondu à une autre question moins importante que je m'apprêtais à vous poser, en vous demandant si les données prenaient ou non en compte les peuples autochtones. Il semble donc qu'elles le fassent.
M. Wright : Oui. Elles couvrent les peuples autochtones. Malheureusement, nous ne pouvons pas les identifier comme peuples autochtones parce qu'il n'y a pas d'identificateurs bien définis dans tout le pays. Nous travaillons avec les Premières nations, Statistique Canada et avec d'autres pour déterminer ce que nous pourrons faire à l'avenir au sujet des identificateurs.
Le sénateur Dyck : Monsieur Catlin, j'aimerais vous demander, au sujet de votre graphique de la page 8 sur la santé perçue, si ce type d'information a été communiqué au grand public. Je pourrais l'interpréter en me disant « Eh bien, il y a huit facteurs qui m'aident à améliorer ma santé, mais il semble que je n'ai besoin d'en avoir que cinq ou six ». Quels sont ces cinq ou six facteurs? Quand vous les avez groupés, s'il y en a qui en ont six, peut-il s'agir de n'importe quelle combinaison ou êtes-vous en mesure de prédire, à partir de ces données, quel est le facteur qui joue le rôle le plus déterminant? J'imagine que c'est l'activité physique.
M. Catlin : Je n'ai pas les détails ici, mais je crois me souvenir que nous avons constaté que, aussitôt que les gens disposent de quatre attributs ou plus, cela permet de s'attendre à ce qu'ils soient en bonne santé, et nous entendons par là, aussi bien la santé perçue que la santé fonctionnelle.
Je vais prendre le risque de dire que le tabagisme est probablement le facteur le plus important, mais que l'activité physique et l'indice de masse corporelle jouent aussi des rôles déterminants.
Le sénateur Dyck : Vous paraît-il possible d'analyser ces facteurs et de parvenir à une affirmation de nature générale à utiliser pour la promotion de la santé? Bien qu'il s'agisse ici de la santé perçue, ce n'est pas réellement une mesure de la santé, mais ce sont des facteurs sur lesquels nous pourrions nous concentrer.
M. Catlin : Oui. Cela a déjà été publié l'an dernier dans un rapport de Statistique Canada qui s'appuyait sur l'Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes — Vieillissement en santé. D'autres rapports seront publiés au cours des mois à venir.
Le sénateur Martin : J'ai dû mal à faire le point sur toutes ces informations. J'ai dû mal à m'imaginer à votre place pendant une journée, ou encore pendant une année. Je me sens personnellement concernée parce que les questions de santé touchent chacun de nous. J'ai eu à prendre soin de parents vieillissants et d'un père qui a dû avoir recours au système. J'ai pu constater que le transfert de son dossier électronique entre les intervenants aurait permis à mon père d'éviter beaucoup de difficultés.
Je reviens à la question sur l'accord lui-même. Le sénateur Demers vous a demandé si nous avons fait des progrès et quels programmes ont été créés. Vous avez répondu par l'affirmative en termes généraux, mais sans donner de précisions. J'imagine bien que chaque secteur de responsabilité peut élaborer divers types de programmes dont la mise en oeuvre varie, selon la province ou le territoire. Mais qui dispose de cette information? Qui la recueille et qui en est responsable?
Nous parlons de statistiques et de données, mais, pour que cet accord soit plus efficace qu'il l'était il y a huit ans, ou quand il a été conclu, nous devons savoir quels progrès ont été enregistrés. Les données se trouvent-elles quelque part? Si oui, qui les a recueillies?
Dr Kitts : Je ne crois pas que nous ayons de données permettant de répondre précisément à votre question. Nous pouvons parler dans l'approximation des données et des résultats. Est-ce une priorité dans les programmes de gouvernement? Est-ce une directive? Est-on parvenu à l'harmonisation entre les gouvernements provinciaux et les prestataires locaux de services de santé? Est-ce une priorité? Est-ce une loi?
À mon avis, la meilleure façon de répondre est de dire que, du fait de l'existence de l'accord, on y a accordé beaucoup d'attention et on a fait beaucoup d'efforts pour tenter d'y parvenir, ou au moins pour comprendre que nous devons y parvenir. Beaucoup de composantes de base sont mises en place. Je ne peux tout vous décrire en détail, mais je peux vous donner des bribes d'information sur les endroits où cela se produit. La Loi ontarienne de 2010 sur l'excellence des soins pour tous en est la composante finale.
Ce qui importe est que tous les intervenants, aussi bien le gouvernement fédéral que les gouvernements provinciaux, les prestataires de services de santé que l'Association médicale canadienne, se sont ralliés aux efforts pour élaborer un meilleur système de santé. Nous ne sommes pas loin du moment où nous pourrons vous communiquer des données précises qui vous montreront que nous avons relevé les critères et que la qualité s'améliore.
Pour l'essentiel, sachez que des centaines de milliers de Canadiens ont bénéficié d'au moins une des cinq procédures importantes depuis l'entrée en vigueur de l'accord. Je ne suis pas en mesure de vous dire si les résultats ont tous été bons. Sachez cependant que les volumes ont augmenté.
Au cours des six dernières années, tous se sont ralliés à un objectif central. Les choses continueront à aller de l'avant à partir de là.
Le sénateur Martin : L'ICIS est l'un des organismes les mieux positionnés pour assurer ce genre de coordination. Pour parler comme un ancien enseignant, les curriculums ont des résultats d'apprentissage.
Il y a des provinces qui ont accusé des retards pour diverses raisons, qui peuvent nous échapper en partie. Si c'est le cas d'une province donnée, comment la ramener au niveau des autres? Comment nous y prenons-nous pour identifier le besoin et quelle est la meilleure façon de ramener cette province au niveau des autres?
Le volet de la coordination est celui qui présente le défi le plus important pour nous tous qui sommes concernés parce que nous vivons dans un pays très étendu dans lequel chaque administration a des besoins qui lui sont propres. Le montant du transfert en santé est énorme. Les provinces et les territoires s'en servent pour mettre en oeuvre les programmes qui conviennent le mieux à leurs yeux. Dans quelle mesure les provinces et les territoires sont-ils responsables, pas uniquement devant le gouvernement fédéral, mais également devant les Canadiens quant à l'emploi qu'ils font de ces fonds?
L'accord prévoit-il la possibilité de renforcer la responsabilisation pour nous assurer que les progrès sont clairs? Je réalise fort bien la complexité d'une telle tâche.
Dr Kitts : Plus nous produisons de mesures décrivant précisément la réalité de ce qui se passe, et plus chacun des secteurs de responsabilité définira ses priorités et relèvera ses cibles. C'est une question fort complexe. Tout le système de santé est complexe. Il se peut qu'un secteur accuse du retard dans les temps d'attente pour les chirurgies de la hanche et de l'avance en chirurgie cardiaque. Dans l'ensemble du système, il y a des évolutions dans les deux sens.
Ce qu'il y a de bien dans le domaine des soins de la santé est que vous n'avez pas à pousser les gens à faire quelque chose. Je ne connais aucun professionnel qui soit plus concurrentiel que les médecins ou cadres qui soient plus concurrentiels que les cadres d'hôpitaux. Donnez-nous les données sur notre performance, assurez-vous qu'elles soient précises, fiables et réalistes, et nous déplacerons des montagnes pour franchir le prochain gué.
Nous n'avons pas encore ces données. Nous en avons certaines sur les volumes. Le gouvernement de la Saskatchewan a promis que, d'ici 2014, le délai d'attente maximal sera de trois mois pour tout le monde.
C'est là un exemple de ce que les données et la transparence peuvent faire.
M. Wright : Il y a eu des développements très importants dans la collecte des données. Les effets de l'accord s'y sont fait sentir sur des données comme celles concernant les temps d'attente, et d'autres formes de données, comme des données chronologiques, celles sur les soins à domicile et à long terme et celles sur les médicaments, qui sont comparables partout au pays. Il est vrai qu'il y a des lacunes. C'est le travail de l'ICIS de les combler lorsque les ressources disponibles le permettent. Dans tout le système, des gens demandent des données, des indicateurs et des rapports comparables. Nous travaillons avec certains chirurgiens cardiovasculaires à élaborer des indicateurs de résultats de la qualité. Il reste encore beaucoup de travail à faire.
Le sénateur Martin : Y a-t-il autre chose que nous devrons faire, pendant que nous nous livrons à cet examen, pour nous assurer de bien recueillir ces données?
Dr Kitts : Le Conseil canadien de la santé vous transmettra les données au fur et à mesure que nous les obtiendrons des prestataires de service. Il y a maintenant beaucoup de composantes et pas beaucoup de substances.
Le sénateur Martin : Dans la formulation actuelle de l'accord, y a-t-il des éléments que nous devrions resserrer?
M. Abbott : Je ne le crois pas. Nous devons rester concentrés et améliorer les rapports publics. Nous devons nous y consacrer à la fois dans la dimension politique et dans celle des prestations.
Le sénateur Braley : J'aimerais obtenir des précisions sur quelques points. Docteur Kitts, vous avez parlé de la façon dont les soins primaires peuvent être améliorés en intégrant les infirmières, les infirmières praticiennes, les physiothérapeutes et les travailleurs sociaux à une équipe. Cela pourrait libérer jusqu'à 50 p. 100 du temps des médecins de famille. Vous ai-je bien entendu? Parlons-nous bien ici de l'étendue de leur pratique?
Dr Kitts : Oui, c'est bien ça.
Le sénateur Braley : Le rapport de 2008 indique que le choix d'orientations différentes par les provinces est un sujet de préoccupation. Cela a-t-il été réglé ou a-t-il encore besoin de l'être? S'il vous plaît, ne pointez pas du doigt une province, mais répondez-moi simplement par oui ou par non.
Dr Kitts : La réponse est plus complexe parce que, une fois encore, nous n'avons pas un seul système. Nous avons 14 systèmes qui sont tous conçus pour une province ou pour un territoire. Nous ne partageons pas les pratiques exemplaires. Nous devons donc nous assurer que, quoi que nous fassions, cela repose sur les meilleures preuves de résultats et sur les pratiques exemplaires. Je n'essayerai pas de tout combiner en un seul système, mais j'utiliserai certainement ce qui se fait dans les 14 pour améliorer chacun d'eux.
Le sénateur Braley : Imaginons que l'un de mes employés doive subir un examen par IRM demain. Sachant qu'il devrait attendre trois ou quatre mois, nous allons annuler le rendez-vous et l'envoyer aux États-Unis. Tenez-vous compte dans les données du pourcentage de gens qui vont subir leurs examens ailleurs en les payant? J'imagine que non.
Mme Sanmartin : Lorsque nous avons commencé à recueillir les données sur les temps d'attente, il y a plusieurs années, nous avons envisagé la possibilité de nous procurer ces données. C'est difficile à faire dans une enquête qui repose sur un échantillon de la population. En réalité, il est assez rare que cela se produise.
Le sénateur Braley : À Hamilton et dans le sud de l'Ontario, si on dit à un de nos employés qu'il doit passer un examen par IRM, nous, comme entreprise, l'envoyons le passer et payons la facture. Nous voulons qu'il sache qu'il va bien ou qu'on le traite rapidement. Nous tenons à ce que le diagnostic soit posé pour offrir les soins médicaux qui conviennent à nos employés. Cela se produit beaucoup plus souvent que vous ne l'imaginez. C'est ce que font la plupart des entreprises et des gens dans le Sud de l'Ontario.
C'est quelque chose que vous devriez étudier. Imaginez que j'essaie de gérer mon entreprise et que je dise « Il fait ceci et il fait cela. » Avons-nous un responsable de cet accord sur la santé? Avons-nous un plan d'affaires qui est étudié tous les trimestres et toutes les semaines pour nous assurer que les choses auxquelles nous voulons nous consacrer sont bien faites? Quelqu'un est-il tenu de veiller à ce que la coordination soit bien faite? Il y a peut-être dix éléments qui sont gérés et contrôlés dans la mesure où des ajustements sont apportés. Lorsque vous vous heurtez à un mur, vous devez prendre des mesures correctrices. Je ne vois pas la plupart de ces éléments. Je vois des morceaux d'information ici et là qui ne sont pas cohérents. Y a-t-il quelque chose qui m'a échappé?
Dr Kitts : Non, rien ne vous a échappé.
Le sénateur Braley : Nous avons peut-être besoin d'un plan d'affaires.
Dr Kitts : Nous n'avons pas de leader.
Le président : Quelqu'un veut-il répondre à cela?
Dr Kitts : Il l'a très bien expliqué.
Le sénateur Braley : Nous aboutissons à cette recommandation. Je suis navré d'être si direct.
Le président : Il y a le problème des 14 secteurs de responsabilité.
Le sénateur Braley : Il y a aussi les fonds fédéraux, si vous les mettez dans le plan d'affaires.
M. Abbott : Les gouvernements se sont entendus et ont préparé un plan. C'était une bonne chose. Ils ont ensuite identifié la nécessité d'une stratégie sur les produits pharmaceutiques ou une série d'engagements pour aller de l'avant. Le système fonctionnait comme un tout. Lorsque les ministres et les gouvernements joignent leurs efforts, on enregistre des progrès. Quand ces efforts commencent à se dissiper, pour quelque raison que ce soit, on se retrouve avec 14 systèmes organisationnels individuels évoluant chacun à son rythme.
Le sénateur Braley : Désignez une personne ou un organisme responsable de tout le travail à faire et réorientez les priorités en fonction de ce qui doit être fait.
Je vous donne un exemple. Dans le domaine de la recherche, l'Université McMaster était classée au dixième rang. J'ai pris la présidence de la recherche avec le Dr John Kelton. Nous sommes maintenant les seconds au Canada. Nous serons bientôt les premiers et nous nous retrouverons alors dans le groupe des cinq premiers à travers le monde. C'est tout simplement quelque chose que nous avons décidé de faire. C'est ainsi que nous avons amélioré la réputation de l'université.
Vous avez besoin d'un plan d'affaires pour aller là où vous le voulez. Je ne connais pas d'autre façon de procéder. Vous pouvez avoir des idées, des visions et des choses en place, mais comment vous rendre là? Vous avez besoin de quelqu'un pour gérer le tout.
Dr Kitts : Vous avez bien enfoncé le clou.
Le président : S'il n'y avait eu qu'une organisation, nous n'aurions pas eu besoin d'un accord, mais il y en a 14.
Monsieur Wright, vous nous avez dit au début que vous avez des informations que vous ne nous donnerez pas aujourd'hui. Je ne me souviens plus à quel propos vous l'avez dit. Pouvez-vous nous donner des précisions?
M. Wright : Elles font l'objet d'un embargo jusqu'au 21 mars. Ce sont des informations intéressantes.
Le président : L'un des objectifs était de s'assurer que la moitié des Canadiens aurait accès à des équipes multidisciplinaires 24 heures par jour et sept jours par semaine d'ici 2010. Dans votre exposé de 2009, docteur Kitts, vous avez dit que nous en étions à 32 p. 100. Vous deviez continuer à faire rapport sur cette question.
L'une des questions soulevées précédemment était la définition de « équipe multidisciplinaire », et celle de « soins de santé primaires » a également été abordée. Je ne crois pas qu'il s'agisse nécessairement de la même chose.
La définition continue-t-elle à poser problème? Allons-nous atteindre ce seuil de 50 p. 100?
Dr Kitts : Je sais que l'Ontario a accordé beaucoup d'importance à la mise sur pied d'équipes de santé familiale, qui sont des équipes multidisciplinaires de soins de santé primaires. Je crois que c'est aussi le cas dans d'autres secteurs de responsabilité. Je vais laisser M. Abbott vous répondre sur ce que nous savons jusqu'à maintenant concernant le rapport à venir.
M. Abbott : Nous avons sélectionné comme exemple le cas de Peterborough. Nous savons qu'il fonctionne. Il y a un bon nombre d'autres exemples, aussi bien en Ontario qu'ailleurs au pays, où cela fonctionne concrètement. Il semble que ce qui s'avère difficile soit l'adoption par les collectivités voisines de ce type de modèle. Elles ont du mal à apprendre comment mettre en place et utiliser ces équipes. Les équipes de soins de santé primaires, les équipes de santé familiale et les groupes interprofessionnels de pratique sont, pour l'essentiel, des solutions assez proches les unes des autres.
Nous enregistrons beaucoup de progrès. La Fondation canadienne de la recherche sur les services de santé travaille beaucoup dans ce domaine pour aider les divers systèmes à adopter ce modèle et à aller de l'avant.
Dans notre rapport d'avril 2009, nous avons étudié cette question plus en détail et avons parcouru le pays pour voir ce qui a été mis en oeuvre, découvrir comment les choses fonctionnaient afin de déterminer ce qui donnait les meilleurs résultats. La question qui s'est alors posée était de savoir si la cible de 50 p. 100 de la population était bien la cible adaptée, ou si c'était la population même à desservir. Cela nous ramène aux personnes souffrant de maladies chroniques. Ce sont elles qui tireront le plus parti de soins assurés en équipe. S'ajoutent à cela la télémédecine, le triage téléphonique et d'autres services cliniques. Si vous prenez, par exemple, les éléments dont le gouvernement ontarien fait la promotion pour y assurer l'accès, cela constitue une liste assez complète de points d'accès aux services. Donc, pour les services réellement donnés, nous constatons que le nombre de ces points de service a augmenté. Le nombre d'équipes et de professionnels collaborant a augmenté.
Nous essayons de déterminer si nous avons atteint ce chiffre magique de 50 p. 100.
Le président : J'ai une dernière question qui s'adresse au Conseil de la santé et à l'ICIS.
Ceci est notre première réunion et c'est aussi la première fois que nous entendons le Conseil de la santé et l'ICIS. J'espère que nous aurons d'autres occasions de nous rencontrer. Quelles sont, à votre avis, les deux ou trois choses les plus utiles que ce comité pourrait faire dans son examen de cette question pour relever les attentes et permettre de progresser davantage?
Je vous prie de m'excuser de m'en prendre ainsi à vous, mais c'est une question importante. Votre réponse nous serait utile lorsque nous tiendrons d'autres réunions sur ces 10 secteurs.
À votre avis, dans l'éventail des choses que nous pouvons faire, quelle serait la plus utile?
Dr Kitts : Personne ne peut s'en prendre aux priorités accordées aux 10 secteurs. Personne ne va s'opposer à vous en disant qu'ils ne sont pas importants. Ce qui importe est la façon de parvenir à une mise en oeuvre harmonisée de cet accord dans tous les secteurs de compétence, dans toutes les agences, chez les prestataires de service de santé de première ligne et chez les médecins. Si vous parvenez à cette harmonisation, vous allez voir des choses extraordinaires se produire.
Actuellement, chacun de ces intervenants importants peut se retirer. Il ne devrait pas en avoir le droit. Il faut relever la barre dans ces 10 secteurs.
Le président : Monsieur Wright?
M. Wright : Monsieur le président, je n'ai pas pour habitude d'esquiver les questions, mais, avec votre permission, je vais m'abstenir de répondre à celle-ci.
Le président : Pouvez-vous m'adresser une note à ce sujet si vous avez quelque chose à dire?
M. Wright : Peut-être.
Le sénateur Cordy : J'aimerais maintenant revenir à la Stratégie nationale relative aux produits pharmaceutiques. C'était un élément important de l'accord en 2004. Une partie importante du rapport de la Commission Romanow traitait de la couverture des médicaments onéreux. Ce fut également un volet important du rapport de ce comité rédigé sous la présidence du sénateur Kirby. J'ai fait partie de ce comité. Il proposait que les patients versent un pourcentage du coût des produits pharmaceutiques, mais plafonné à 1 500 $. Dans votre exposé d'aujourd'hui, Dr Kitts, vous nous dites que les choses n'ont pas bougé. J'ai lu que le calcul des coûts a été fait, tout comme le travail sur quelques éléments mineurs, mais que, concrètement, rien n'en est sorti.
Au Canada, le coût des produits pharmaceutiques est couvert à environ 90 p. 100. Cela peut être un peu plus ou un peu moins. Toutefois, quand vous procédez à la décomposition par province, les chiffres des provinces Atlantique sont différents. Quelles qu'en soient les raisons, plus de 20 p. 100 des gens n'ont aucune couverture. Quand vous vous penchez plus attentivement sur les chiffres de ma province, la Nouvelle-Écosse, ou de l'Île-du-Prince-Édouard, vous constatez qu'un pourcentage plus élevé de personnes n'a qu'une faible couverture ou aucune couverture. Cette question a-t-elle été laissée de côté?
À ce que j'ai lu, très peu de travail a été fait dans ce domaine. Est-ce bien le cas?
Dr Kitts : Je ne crois pas pouvoir vous dire avec précision ce qui se fait parce que, à ma connaissance, nous l'ignorons. Des choses décrites dans le rapport sont réalisées, mais je crois qu'il faudrait beaucoup plus d'efforts des centres de responsabilité pour parvenir à concrétiser ce qui était prévu dans l'accord.
Cela nous ramène à la question du président : que pouvons-nous faire? Nous pourrions peut-être mettre cette question sous les projecteurs?
Le sénateur Cordy : C'est dans votre rapport que j'ai lu que le calcul des coûts avait été fait.
Dr Kitts : Oui.
Le sénateur Cordy : Il s'agissait de genres de choses superficielles.
Dr Kitts : Le rôle joué par les pharmaciens dans les soins de la santé était bon. Il en allait de même pour les approvisionnements et les appels d'offres. Je ne suis toutefois pas sûr que cela ait des effets favorables sur la personne qui paie ses médicaments.
M. Abbott : On peut citer un bon exemple de ce qui se passe avec les prix des médicaments génériques. La Stratégie nationale relative aux produits pharmaceutiques avait relevé que les coûts des médicaments et des médicaments génériques posaient un problème auquel elle voulait s'attaquer. Par la suite, l'Ontario s'est attaqué à cette tâche et les autres provinces l'ont alors suivie.
La question qui se pose alors est de savoir pourquoi, puisque tous savaient dès le départ qu'il y avait là un problème, ils n'ont pas pu, n'ont pas voulu ou n'ont tout simplement pas agi ensemble plus rapidement? C'était pourtant ce que promettait la Stratégie nationale relative aux produits pharmaceutiques.
Je dirais que ce fut une occasion perdue, sans croire pour autant que ce soit définitif. Les gouvernements travaillent sur ces questions. Dans l'idéal, nous serions rendus beaucoup plus loin si tous avaient collaboré.
Le sénateur Cordy : Il me semble que c'est un secteur dont nous devrons tenir compte dans notre rapport.
M. Abbott : Oui.
Le président : Je vous remercie de nous avoir permis de démarrer d'un si bon pied. Nous avons beaucoup de sujets de réflexion.
(La séance est levée.)