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SOCI - Comité permanent

Affaires sociales, sciences et technologie

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie

Fascicule 16 - Témoignages du 9 mai 2012


OTTAWA, le mercredi 9 mai 2012

Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit aujourd'hui, à 16 h 16, pour faire une étude sur les produits pharmaceutiques sur ordonnance au Canada. SUJET : Essais cliniques.

Le sénateur Kelvin Kenneth Ogilvie (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Bienvenue au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.

[Traduction]

Je me nomme Kelvin Ogilvie, et je suis un sénateur de la Nouvelle-Écosse et président du comité. Je vais demander à mes collègues de se présenter, en commençant à ma gauche avec le vice-président.

Le sénateur Eggleton : Sénateur Art Eggleton, de Toronto, et vice-président.

Le sénateur Cordy : Sénateur Jane Cordy, de la Nouvelle-Écosse.

[Français]

Le sénateur Verner : Mon nom est Josée Verner, je suis sénatrice du Québec.

Le sénateur Demers : Jacques Demers, sénateur du Québec.

Le sénateur Rivard : Michel Rivard, des Laurentides, au Québec.

[Traduction]

Le sénateur Wallace : John Wallace, du Nouveau-Brunswick.

Le sénateur Seidman : Bonjour. Je suis Judith Seidman, de Montréal, Québec.

Le président : Je souhaite la bienvenue à nos éminents invités. Je vous présenterai à tour de rôle lorsque vous serez appelés à parler au nom de votre association. Il a été convenu que nous commencerions en partant de ma gauche. Sans plus tarder, je vais donner la parole à l'Association canadienne des institutions de santé universitaires. Elle est représentée par le Dr David Hill et la Dre Tina Saryeddine. Le Dr Hill est le coprésident du Groupe des vice-présidents de recherche sur la santé, et la Dre Tina Saryeddine est vice-présidente adjointe chargée de l'analyse des recherches et des politiques. Je crois savoir que l'exposé sera présenté par le Dr Hill.

Dr David Hill, coprésident, Groupe des vice-présidents de recherche sur la santé, Association canadienne des institutions de santé universitaires : Bonjour. Je vous remercie de nous avoir invités à contribuer à cette séance importante. Aujourd'hui, nous voulons vous parler essentiellement du Sommet national sur les essais cliniques organisé conjointement par notre organisation, les compagnies de recherche pharmaceutique du Canada, c'est-à-dire Rx&D, et les Instituts canadiens de recherche en santé, les IRSC, en septembre 2011.

Je vais vous parler de ce qui a motivé cette initiative, des recommandations en découlent et de ce que le gouvernement pourrait faire pour aider.

L'Association canadienne des institutions de santé universitaires, l'ACISU est le porte-parole national de 40 organisations universitaires de recherche en santé, soit les hôpitaux de recherche, les régies régionales de la santé ainsi que leurs instituts de recherche. Nous avons des membres dans tout le pays. Vous avez sans doute eu affaire à l'une de ces organisations à un moment ou à un autre. Vous les connaissez parce que vous-mêmes, votre famille, vos amis, vos voisins ou vos collectivités avez profité des soins d'avant-garde dispensés par ces établissements. Cependant, ces organisations sont également des ressources nationales et des moteurs économiques. Elles recueillent des louanges à l'échelle internationale et jouent un rôle de premier plan dans le système de santé ainsi que dans notre économie.

Les essais cliniques sont un exemple pratique de la manière dont les institutions de santé universitaires contribuent à créer des avantages sur les plans humain, social et économique. Les essais cliniques nous permettent d'offrir aux patients et aux familles des soins d'avant-garde et, ce faisant, ils attirent les meilleurs cliniciens désireux d'explorer toutes les possibilités de leur profession. Des études ont montré que les organisations qui participent aux essais cliniques produisent de meilleurs résultats pour les patients. Parallèlement, ces essais permettent de créer des produits, des services et des emplois, tout en fournissant des revenus.

Par exemple, en 2008-2009, les nouveaux contrats d'essais cliniques conclus par les membres de l'ACISU avaient une capacité potentielle de production de revenus de 340 millions de dollars, selon les estimations. Cependant, il n'est pas acquis que le Canada puisse préserver sa tradition d'excellence en matière d'essais cliniques. Une concurrence mondiale accrue, surtout en provenance d'Asie, limite notre capacité d'obtenir le type d'essais cliniques que nous souhaitons. Cette concurrence, conjuguée à nos propres particularités dans nos propres cadres de travail, nous coûte cher en occasions perdues. Par exemple, lorsqu'une société est intéressée à mener un essai clinique ici, au Canada, elle est confrontée à des administrations, multiples, des formulaires multiples, des procédures multiples et des normes multiples avant de pouvoir entamer un essai. Les examens du même protocole effectués par les divers comités d'éthique peuvent être assortis de nombreuses exigences différentes et produire des résultats divergents dans des délais variables. Il peut être difficile de trouver, de recruter et de maintenir dans les essais des patients admissibles. Après tout, notre population est relativement faible. Les contrats peuvent différer d'un centre à l'autre. Tout cela entraîne des frais et des délais et peut décourager l'investissement dans les essais cliniques au Canada.

Des foyers d'excellence et d'innovation existent un peu partout au pays, mais que peut faire le Canada au niveau national pour essayer de surmonter ce problème? C'est la question posée par 130 représentants des universités, des organismes de santé, des gouvernements et de l'industrie lors du Sommet national sur les essais cliniques. Il faut partir de la prémisse que si nous commençons à améliorer le coût, la qualité, la rapidité et les relations pour ce qui est du lancement d'un essai clinique, alors nous serons mieux en mesure d'attirer le partenaire commercial de choix pour le marché international des essais cliniques.

Le document Nouer la conversation figure dans votre documentation et contient beaucoup plus de renseignements généraux sur la raison d'être de cette initiative.

La synthèse du Sommet sur les essais cliniques est intitulée : Pour votre santé et prospérité. Il s'agit d'un projet de plan d'action résultant des consultations du Sommet. Il n'est destiné qu'à être un point de départ, mais la finalité du plan d'action est d'aider les entreprises menant des essais cliniques à réussir et à demeurer au Canada. Les objectifs sont de trois ordres : premièrement, enrayer et inverser la tendance à la baisse des investissements — nous avons calculé que les investissements dans les essais cliniques reculent d'environ 12 p. 100 par an dans notre pays —; deuxièmement, améliorer les pratiques commerciales en rapport avec le fonctionnement des essais cliniques; et troisièmement, créer un cadre stable et tourné vers l'avenir pour les essais cliniques du futur.

La plupart des neuf recommandations du plan exigent une action menée par nous, les gens sur le terrain. Nous devons démanteler les barrières entre les administrations, les domaines, les secteurs et les organisations, mais que peut faire le gouvernement fédéral pour donner à ce plan une meilleure chance de succès? Nous pensons qu'il devrait assumer trois rôles. Le premier est le leadership. Le gouvernement fédéral a un intérêt à l'échelle nationale à reconquérir la position de chef de file mondial du Canada dans le domaine des essais cliniques, et cela va réellement énergiser le secteur. Le deuxième est d'offrir des encouragements. Il peut encourager la collaboration plutôt que la concurrence et la réglementation. Cela améliorera l'efficience en combinant la souplesse et la normalisation. Le troisième rôle prend la forme de ressources. Le gouvernement peut offrir des ressources de coordination qui permettront aux gens sur le terrain d'exécuter les recommandations de ce plan d'action.

Nous pensons que, par une attention soutenue et la collaboration, le Canada peut faire revitaliser sa tradition d'excellence dans les essais cliniques, ce qui se traduira par une amélioration de la santé et de la prospérité de tous.

Le président : Je donne maintenant la parole au Dr Robin Walker, vice-président intégré, Affaires et formation médicales, London Health Sciences Centre et St Joseph's Health Care.

Dr Robin Walker, vice-président intégré, Affaires et formation médicales, London Health Sciences Centre et St. Joseph's Health Care, à titre personnel : J'ai l'honneur de présider le Comité consultatif d'experts sur les initiatives pédiatriques à la Direction générale des produits de santé et des aliments de Santé Canada. Le Dr MacLeod est également membre de ce comité. Je vais parler de notre travail et présenter nos recommandations en vue d'améliorer la prescription de médicaments aux enfants et aux adolescents au Canada.

Partout dans le monde, les organismes de réglementation des produits de santé et des aliments se préoccupent de la sûreté des enfants. Dans la foulée, Santé Canada a mis sur pied le Comité consultatif d'experts sur les initiatives pédiatriques. Celui-ci fournit au ministère une expertise pour mieux protéger la santé et la sûreté des enfants ainsi que des femmes enceintes et allaitantes, conformément aux travaux de la direction générale.

Ce comité, que je vais désigner dorénavant par son sigle CCEIP, compte 15 membres, dont des spécialistes en pédiatrie, des professeurs d'université, des pharmaciens, des chercheurs, des représentants tant de l'industrie et des groupes de patients, que des organisations sans but lucratif et des parents. Le comité se réunit depuis février 2009.

La plupart des dossiers complexes que le sous-ministre adjoint responsable de la Direction générale des produits de santé et des aliments a confiés au CCEIP portent sur les défis actuels liés aux produits de santé, soit les médicaments, les matériels médicaux, les produits biologiques comme les vaccins, et les produits de santé naturels. Tous exigent d'être mis au point, testés, évalués et étiquetés de manière à dispenser les renseignements appropriés pour leur utilisation sans danger chez les enfants, et, pour tout cela, nous avons besoin de consulter l'industrie, les cliniciens, les parents et les organismes de réglementation.

Permettez-moi de vous parler un peu de moi. Je suis arrivé au Canada dans les années 1970 après avoir terminé mes études de médecine et mes deux premières années de formation spécialisée à Manchester, en Angleterre. J'ai ensuite été formé en pédiatrie et en néonatalogie à l'Université Dalhousie — je suis heureux de voir ici les sénateurs des Maritimes. J'ai ensuite travaillé à Moncton, à Kingston, à Ottawa, à Halifax de nouveau jusqu'à l'année dernière, et je suis maintenant à London, en Ontario. Outre le titre officiel que vous avez entendu, je suis également professeur de pédiatrie à la Schulich School of Medicine and Dentistry de l'Université Western et, à titre bénévole, président du conseil de l'Institut canadien de la santé infantile.

La véritable raison pour laquelle j'ai été appelé à présider le CCEIP est que j'ai travaillé comme néonatalogiste spécialisé dans les soins intensifs aux nouveau-nés pendant près de 30 ans et que j'exerce aujourd'hui dans le suivi du développement des nouveau-nés. Je suis très conscient de la difficulté de prescrire un traitement aux enfants, en particulier aux plus petits qui commencent leur vie. Les enfants réagissent différemment aux produits de santé et aux aliments ainsi qu'à leurs ingrédients.

On ne peut tirer de conclusions sur l'efficacité, l'innocuité et les interactions entre médicaments chez les enfants à partir des données obtenues chez l'adulte. Bon nombre de produits de santé et de produits alimentaires ne sont pas conçus ou formulés spécifiquement pour les enfants. Bien que les autorités de réglementation du monde entier se penchent davantage sur les besoins pédiatriques, des études cliniques ne sont pas systématiquement menées pour les groupes d'âge pédiatrique, à quelques exceptions près. De ce fait, il est difficile d'établir un étiquetage précis pour guider leur utilisation chez les enfants. La plupart des médicaments administrés aux enfants sont d'ailleurs utilisés « hors indication ». Même lorsqu'il existe des résultats de recherche qui guident leur utilisation chez l'enfant, ces informations ne figurent généralement pas sur l'étiquette, de sorte qu'il est difficile pour les pédiatres d'en faire une utilisation adéquate.

En néonatalogie, par exemple, j'ai pris part à des essais cliniques poussés sur l'oxyde nitrique gazeux, un gaz produit naturellement par l'organisme et que l'on administre aux nouveau-nés en détresse respiratoire. Il ouvre les vaisseaux sanguins lorsque ceux-ci ne se dilatent pas spontanément après la naissance. Lorsque l'oxyde nitrique gazeux ne suffit pas, on a recours à des médicaments dont l'effet est mieux connu chez l'adulte. Je vais peut-être surprendre les membres du comité en disant qu'un de ces médicaments, le Sildenafil, mieux connu sous le nom de Viagra, a également pour effet de dilater les vaisseaux sanguins. Lorsque nous l'utilisons pour aider les nouveau-nés à respirer, nous n'en savons toujours pas beaucoup sur son efficacité ou son innocuité chez eux, ce qui rend son utilisation problématique. Lorsque des informations relatives à l'utilisation d'un produit chez les enfants sont enfin obtenues, les fabricants hésitent souvent à les inscrire sur l'étiquette, si bien qu'un bon médicament pourrait ne pas être utilisé chez les enfants parce que les renseignements ne sont toujours pas connus du prescripteur. J'ajouterai qu'à titre de néonatalogiste je suis très au fait de difficultés similaires touchant les femmes enceintes et allaitantes.

Au sujet de l'étiquetage, nous vous avons remis un excellent article du Dr Robert Peterson, ancien directeur général à la Direction des produits thérapeutiques de Santé Canada et dont la vice-présidente du CCEIP, Dre Noni MacDonald, est la co-auteure. Il a pour titre « Industry's Neglect of Prescribing Information for Children ». Nous vous avons également fourni un autre précieux document, à savoir une déclaration de 2011 de la Société pédiatrique canadienne dont je suis un ancien président. L'auteur principal en est le Dr Michael Rieder, un pharmacologiste pédiatrique du Children's Hospital de London, Ontario.

J'attire aussi votre attention sur une initiative du CCEIP au terme de laquelle le ministre de la Santé a demandé au Conseil des académies canadiennes de produire une évaluation factuelle et faisant autorité de l'état des produits thérapeutiques utilisés chez les enfants. L'évaluation tentera de répondre à la question suivante : « Quel est l'état de la pharmacologie clinique, au Canada et à l'étranger, applicable à la mise au point de produits pharmacologiques et biologiques sûrs et efficaces étiquetés comme thérapeutiques chez le nouveau-né, l'enfant et l'adolescent, dans le respect de l'éthique? »

Les résultats de l'évaluation seront extrêmement utiles pour la mise au point de produits pharmaceutiques et biologiques étiquetés comme thérapie pour les nouveau-nés, les enfants et les adolescents.

Enfin, je tiens à remercier le Bureau des initiatives pédiatriques de Santé Canada pour son appui à l'égard des besoins thérapeutiques des enfants et des adolescents ainsi que des femmes enceintes et allaitantes. Le travail du bureau est essentiel à la sûreté et au soin de ces populations vulnérables et, sans son appui constant, notre comité consultatif n'aurait pas pu soulever ces préoccupations avec autant d'efficacité.

Je vous remercie de votre invitation à comparaître.

Dr Stuart MacLeod, professeur, Institut de recherche sur l'enfant et la famille, Université de la Colombie-Britannique, à titre personnel : Je me suis lancé dans l'étude des médicaments chez les enfants en 1969 à l'Université McGill, comme étudiant de troisième cycle en pharmacologie. Je suis réellement ravi de cette occasion de faire comprendre au comité ce que j'estime être l'énorme potentiel qui s'offre aux autorités canadiennes de contribuer aux efforts déployés afin de fournir de meilleurs traitements médicamenteux pour les enfants.

Je vais situer un peu le contexte. Le monde compte aujourd'hui 7 milliards d'habitants, et vous ne verrez peut-être pas cette réalité au Canada, mais environ 35 p. 100 de la population mondiale se compose d'enfants de moins de 18 ans. Dans certains pays africains, la proportion est même encore plus élevée. Je vais souvent en Ouganda, et 50 p. 100 de la population de ce pays est âgée de moins de 15 ans.

Une énorme proportion d'enfants ont besoin d'un traitement médicamenteux approprié et du type de recherche que nous appuyons ici aujourd'hui afin que les médicaments soient convenablement étiquetés de façon à pouvoir être administrés aux enfants de la manière décrite par le Dr Walker.

Le Canada est en mesure d'apporter une contribution particulière à cet égard. Nous sommes depuis 30 ans le chef de file mondial en matière de pharmacologie pédiatrique, un rang que nous devons à nombre de nos grandes institutions pédiatriques. Au cours de cette période, nous avons mis sur pied des réseaux efficaces. Nous avons des liens internationaux étroits avec nos homologues aux États-Unis, en Europe, à l'Organisation mondiale de la santé et dans de nombreux pays à revenu faible et moyen. Nous avons un très large savoir-faire, qui va de l'épidémiologie et des sciences de la santé des populations jusqu'à la pharmacologie très fondamentale et aux aspects génétiques de la pharmacologie.

En 2006, les 17 Centres universitaires des sciences de la santé se sont regroupés et ils ont créé ce que l'on appelle le RRSEM, le Réseau de recherche en santé des enfants et des mères. Nous avons donc déjà en place un réseau qui se consacre à l'étude des médicaments sur les enfants et à la mise en valeur des essais cliniques pancanadiens.

Comme le Dr Hill l'a indiqué, on s'inquiète du recul de la recherche clinique au Canada et cela a bien été noté. Cependant, dans le domaine de la santé des enfants et des adolescents, nous jouons dans la cour des plus grands. Le Canada est un chef de file mondial sur le plan des essais cliniques. Nous arrivons au deuxième rang derrière seulement les États-Unis pour ce qui est du nombre d'essais cliniques en cours chez nous. Nous faisons bien plus que ce que l'on pourrait attendre sur la base du nombre d'enfants compris dans notre population.

Nous avons un avantage concurrentiel, et nous devons le mettre à profit.

Je pense que des résultats déterminants sont à notre portée à court terme. Nous pourrions élaborer un grand réseau privilégiant les essais cliniques chez les patients obstétriques, ceux de la période périnatale, soit les nouveau-nés, ainsi que les enfants et les adolescents. Nous avons prouvé que nous pouvons rassembler les diverses disciplines à cette fin et nous sommes déjà un leader mondial de la formation du personnel hautement qualifié requis pour cela, particulièrement à l'Hôpital des enfants de Toronto.

Je pense que nous pouvons devenir des leaders dans les travaux de science appliquée indispensables pour appliquer le savoir que nous avons accumulé dans le domaine de la pédiatrie, de la thérapeutique pédiatrique et de la toxicologie à la mise au point de meilleurs traitements médicamenteux. Nous pouvons élaborer de meilleurs modèles d'évaluation des innovations thérapeutiques et apporter les données probantes nécessaires à la prise de décisions.

J'arrive ce matin de Winnipeg, bien que ce ne soit pas ma ville de résidence, où s'est tenue une réunion ces deux derniers jours de ce que l'on appelle StaR Child Health, Standards on Research in Child Health. Des participants de 20 pays sont venus parler de la conception de meilleurs essais chez les enfants. Le Canada est un leader dans ce domaine.

Je pense que si nous jouons correctement notre rôle, nous pouvons grandement influencer la survie des enfants dans le monde en développement et largement améliorer la santé de l'enfant dans les pays à revenu faible et moyen.

Je pense que nous avons quelque chose à exporter. Cette expertise que je décris est très demandée dans d'autres régions du monde, les pays tant en développement que développés. Nous nous distinguons dans un certain nombre de disciplines primordiales : néonatologie, maladies infectieuses, développement de vaccins, nutrition et emploi des micronutriments, épidémiologie clinique et pharmacologie clinique. Mais surtout, nous avons un grand savoir-faire au Canada en matière de télécommunications, ce qui est très important sur le plan du transfert des connaissances au monde en développement.

Qu'aimerions-nous voir votre comité recommander? Nous avons besoin d'un cadre réglementaire plus solide, modernisé de manière à encourager davantage d'études sur l'efficacité et l'innocuité des médicaments en obstétrique et en néonatalogie, et en pédiatrie plus généralement. Nous avons besoin d'un financement spécifique afin de renforcer la capacité de formation dans les diverses disciplines mises en jeu par l'évaluation thérapeutique des médicaments pédiatriques et obstétriques. Nous devons exporter cette expertise dans les pays en développement, particulièrement ceux d'Asie du Sud et de l'Afrique subsaharienne.

Comme le Dr Walker l'a indiqué, le Comité consultatif d'experts en pédiatrie est un bon point de départ. Nous pensons que ce comité devrait être chargé de promouvoir l'amélioration des stratégies de mobilisation du savoir, pour que les connaissances que nous possédons maintenant soient disséminées auprès des praticiens de tout le pays, de façon à encourager de meilleures pratiques de prescription sur la base des meilleures données scientifiques.

Merci beaucoup.

Le président : Merci.

La parole est maintenant à la représentante de l'Association médicale canadienne, la Dre Maura Ricketts, qui est accompagnée de Millicent Toombs, première analyste des politiques, Politiques de santé et recherche.

[Français]

Dre Maura Ricketts, directrice, Politiques de santé et recherche, Association médicale canadienne : L'AMC est heureuse de pouvoir témoigner devant le comité aujourd'hui dans le cadre de son étude sur les essais cliniques et l'approbation des médicaments.

[Traduction]

L'AMC représente environ 76 000 médecins au Canada et a pour mission de servir et d'unir les médecins du Canada et de défendre sur la scène nationale les normes les plus élevées de santé et de soins de santé, en collaboration avec toute la population. Les médicaments d'ordonnance sont un élément essentiel des soins de santé et nous avons donc élaboré de nombreuses politiques sur les enjeux pharmaceutiques.

Il est possible de résumer tout ce travail en un principe fondamental : l'AMC considère que le Canada a besoin d'une stratégie pharmaceutique nationale de façon à ce que tout un chacun ait accès en temps opportun à des médicaments d'ordonnance sûrs, efficaces et abordables. Même si les premiers ministres se sont engagés à créer une telle stratégie, dans l'Accord sur la santé de 2004, les Canadiens continuent d'attendre que le gouvernement fasse preuve de leadership dans ce dossier. Les médicaments remplacent des interventions médicales plus coûteuses et invasives et sont un outil essentiel dans la panoplie du médecin.

Afin d'assurer la sécurité et l'efficacité, l'AMC croit aussi qu'il faut un système de recherche et d'approbation factuel, impartial et solide. Cette conviction se trouve au cœur même de notre engagement envers les soins axés sur les patients. Lorsqu'il doit déterminer s'il convient de prescrire un nouveau médicament à un patient, le médecin évalue plusieurs facteurs. Le produit offre-t-il des avantages par rapport à celui que je prescris maintenant? Sera-t-il plus efficace? Sera-t-il plus sûr? Réglera-t-il des problèmes cliniques délicats comme les interactions entre les médicaments, ou bien réduira-t-il les effets secondaires qui empêchent d'utiliser un médicament comme il doit l'être? Le médecin peut aussi se demander : Qu'est-ce qui prouve que ce nouveau médicament constitue une amélioration? Puis-je faire confiance aux données probantes? Où trouver des données et des renseignements fiables et exacts sur ce médicament? La recherche préalable à l'homologation d'un médicament doit fournir les réponses à toutes ces questions fondamentales.

Au sujet des essais cliniques, je vais me concentrer sur deux préoccupations particulières des médecins au sujet des essais cliniques. Premièrement, que compare-t-on à quoi? Les essais cliniques peuvent suffire aux fins de la réglementation de Santé Canada, mais ils ne produisent pas nécessairement toute l'information dont un médecin a vraiment besoin. Par exemple, un nouveau médicament contre le cholestérol est-il efficace chez tous les patients ou seulement chez certains d'entre eux? Est-ce que d'autres patients tireraient autant d'avantages d'un médicament qui existe déjà ou d'un changement dans leurs habitudes de vie, comme l'alimentation ou l'exercice? L'AMC recommande que les chercheurs comparent un nouveau produit à d'autres médicaments sur le marché, mais aussi à d'autres interventions.

Deuxièmement, des renseignements en temps opportun, fiables et objectifs sont-ils disponibles sur tous les résultats d'essais cliniques et non seulement sur ceux qui sont positifs? Les Canadiens doivent être informés lorsqu'un médicament a produit des résultats décevants au cours des essais cliniques, afin d'être en mesure de prendre des décisions éclairées concernant leurs soins de santé. Par conséquent, l'AMC recommande que les résultats de tous les essais cliniques, et non seulement de ceux qui sont positifs, soient mis à la disposition de professionnels de la santé et du public.

J'ajouterais que la documentation courante n'est pas très conviviale. Nous recommandons que Santé Canada résume les données les plus essentielles non seulement à l'intention des médecins mais aussi des Canadiens, afin que tous puissent avoir accès aux renseignements dont ils ont besoin.

En ce qui concerne le processus d'approbation des médicaments, l'Association médicale canadienne croit que les principes suivants devraient s'appliquer : les principaux critères d'approbation devraient être de savoir si le médicament améliore les résultats pour la santé et constitue une amélioration par rapport à des produits déjà sur le marché; le processus d'étude devrait être aussi rapide que possible tout en garantissant des résultats optimaux par la santé et la sécurité de l'approvisionnement en médicaments; le mécanisme d'évaluation devrait être impartial et fondé sur les meilleures données scientifiques disponibles; le mécanisme d'évaluation devrait être ouvert et transparent.

Enfin, l'homologation d'un médicament n'est pas un aboutissement, mais plutôt une étape du cycle de vie du médicament concerné. Il n'est pas rare que des dangers sérieux apparaissent après l'approbation d'un médicament, car c'est à partir de ce moment que son usage se généralise. Il importe que le processus d'approbation soit complété par un processus de surveillance post-commercialisation vigoureuse et vigilante. Nous avons hâte de vous présenter nos recommandations à ce sujet au cours d'une séance future du comité.

[Français]

Avant de terminer, j'aborderai brièvement deux autres questions.

[Traduction]

Il y a d'abord celle des médicaments contre les maladies rares. Nous savons que les processus actuels d'essai clinique et d'approbation, qui attachent une grande valeur aux études portant sur des échantillons importants de la population, peuvent se révéler inefficaces pour saisir adéquatement la valeur des médicaments prescrits à une poignée de personnes seulement. Des groupes de patients comme la Société canadienne des MMA et Alpha-1 Canada, qui sont très actifs dans le dossier des maladies rares, nous ont fait part de leurs préoccupations et, je suppose, qu'ils en ont fait autant avec vous, dans une certaine mesure. Ces groupes, de concert avec l'Association canadienne des maladies rares, demandent depuis des années un processus équitable pour l'évaluation des médicaments prévus pour traiter les maladies rares. Parce que le Canada n'a pas de stratégie en ce sens, les patients canadiens ont accès à moins de médicaments contre les maladies rares que ceux vivant dans d'autres pays développés. Il faut analyser de plus près la question de l'approbation des médicaments contre les maladies rares. L'AMC recommande que le gouvernement fédéral élabore une politique sur les médicaments contre les maladies rares qui encourage leur mise au point, prévoit une évaluation continue de leur efficacité et garantit l'équité afin que tous les patients qui pourraient en bénéficier y aient accès dans une mesure raisonnable.

Deuxièmement, le processus d'examen de Santé Canada renseigne peu sur une autre question que les médecins se posent de plus en plus : mon patient a-t-il les moyens de payer ce médicament? Il ne suffit pas que le Programme commun d'évaluation des médicaments se penche sur le rapport coût-efficacité des médicaments et que les responsables provinciaux ou territoriaux des listes de médicaments remboursables fassent des études similaires, car le coût est un des facteurs dont les médecins doivent tenir compte lorsqu'ils décident s'il convient de prescrire un médicament.

C'est particulièrement vrai dans le cas des nouveaux produits biologiques qui coûtent très cher. Les médecins canadiens estiment qu'il est difficile de prescrire les bons médicaments s'ils n'en connaissent pas les coûts et qu'il faut s'attaquer à ce problème. Cela ne fait que ressortir la nécessité d'une stratégie pharmaceutique nationale.

[Français]

Je vous remercie. Nous serons heureux de répondre à vos questions.

[Traduction]

Le président : Je remercie les témoins d'avoir couvert tout un éventail d'aspects. Avant de passer à la période des questions, je rappelle à tous que nous menons une étude en quatre parties sur le processus pharmaceutique, et nous allons donc effectuer une étude distincte des utilisations hors indication et de la surveillance post-homologation, et cetera. Aujourd'hui, je vais limiter strictement les questions au mécanisme des essais cliniques de phase I et de phase II. Alors, passons aux questions.

Le sénateur Eggleton : J'aimerais traiter principalement des enfants. À titre de remarque générale concernant les essais cliniques, le Dr Hill nous a dit tout d'abord que nous perdons du terrain et que nous devons enrayer et inverser cette tendance, améliorer les pratiques commerciales et réduire les coûts et les délais. Le Dr MacLeod s'est inscrit dans la perspective pédiatrique. Il a dit que nous faisons plus que notre part et que nous sommes à l'avant-garde à bien des égards. Peut-être ai-je mal saisi de quoi il parlait précisément, par opposition à ce que disait le Dr Hill.

L'AMC a publié un éditorial dans son journal du 14 juin 2011. L'auteur ne mâche pas ses mots. Il commence par dire :

L'industrie pharmaceutique ne fournit pas de façon générale à Santé Canada les données en sa possession appuyant les doses pédiatriques sûres et les espacements des doses.

Même lorsqu'il existe des données pédiatriques, elles ne sont communiquées que pour aider les professionnels des provinces et territoires dans lesquels les fabricants choisissent de demander des indications pédiatriques. Les enfants et les adolescents canadiens peuvent faire les frais d'erreurs d'administration de médicaments et de traitements inappropriés simplement à cause d'un accès à l'information limitée.

L'article poursuit :

De fait, une interrogation récente du site Internet de l'US Food and Drug Administration (FDA) a révélé que de nombreux médicaments qui ont obtenu un étiquetage pédiatrique spécifique aux États-Unis sont assortis d'une mention « preuves insuffisantes » au Canada.

L'article dit que les essais effectués pour produire des données probantes aux fins de l'homologation de médicaments par la FDA sont menés sur des enfants canadiens, alors que les seuls bénéficiaires de ces études sont les enfants américains. Un tel comportement opportuniste et de telles règles permissives font que les enfants canadiens sont exposés à des risques dans des essais réglementés, alors qu'ils sont privés des avantages produits par ces mêmes recherches.

La conclusion finale dit qu'il est totalement inacceptable que les fabricants de produits pharmaceutiques tirent profit de l'administration hors indication risquée de médicaments aux enfants parce qu'ils n'ont pas réalisé les études et qu'ils ont choisi de refuser la communication de ces importants renseignements sur la sûreté des médicaments aux autorités de réglementation des médicaments d'un pays, d'autant plus qu'il suffirait pour le faire de copier-coller la demande d'homologation adressée à la FDA sur un formulaire de Santé Canada. Malheureusement, les lois semblent être la seule façon de contrôler de tels comportements contraires à l'éthique.

Ce sont des mots assez forts. Nous devrions demander à nos politiciens de protéger les enfants canadiens en promulguant une loi stricte similaire au Pediatric Research Equity Act des États-Unis.

Docteur MacLeod, il y a là un article de vous. D'après ce que je peux voir, vous y exprimez quelques critiques et des préoccupations concernant des problèmes semblables.

Docteure Ricketts, est-ce que l'AMC approuve le contenu de cet éditorial de son journal? J'aimerais entendre la réaction de tous à ce que je viens de dire.

Dre Ricketts : Le Canadian Medical Association Journal est indépendant de l'Association médicale canadienne. Cependant, il est difficile de contester une position raisonnable. Je crois que si nous réclamons une stratégie pharmaceutique nationale, c'est justement pour que des problèmes comme celui-ci soient réglés aussi rapidement que possible et de manière rationnelle. Le problème dont le Dr Bob Peterson fait état dans le Canadian Medical Association Journal renvoie en partie à un autre problème que nous avons mentionné ici dans notre mémoire : les résultats de tous les essais cliniques devraient être publiés et rendus accessibles. Ils ne devraient pas être occultés par les compagnies pharmaceutiques. Nous avons fourni quelques renseignements concernant deux aspects à cet égard. Mais je m'efface absolument devant mes collègues pédiatres qui ont beaucoup plus d'expérience dans ce domaine que moi.

Dr MacLeod : Le président a indiqué que vous voulez traiter aujourd'hui seulement des essais cliniques. Cependant, en pédiatrie, tout tourne autour de votre troisième question, soit l'utilisation hors indication des médicaments sur ordonnance.

Le président : Eh bien, nous allons étudier cela de manière très détaillée. C'est l'une des raisons pour lesquelles nous avons une étude distincte...

Dr MacLeod : Je comprends, mais permettez-moi de dire qu'en pédiatrie, les trois quarts des traitements médicamenteux sont hors indication parce que les essais cliniques n'ont pas été effectués. Vous avez mis en évidence certaines contradictions et je pense qu'elles sont une question de proportion. Le Canada est bien placé dans le domaine des essais pédiatriques, mais ces essais ne sont pas financés pour la plupart par l'industrie. L'industrie pharmaceutique ne s'intéresse pas particulièrement aux enfants parce qu'elle considère qu'ils représentent un petit marché qui n'est pas très profitable. À quelques exceptions près — comme les antibiotiques — elles ne sont pas intéressées à réaliser de grands essais cliniques. Au Canada, nous réalisons beaucoup d'essais auprès des enfants en bas âge et des nouveau-nés, mais la plupart de ces essais sont effectués sous le parrainage de chercheurs, des pouvoirs publics ou d'institutions. Nos hôpitaux peuvent avoir une question sur l'utilisation de l'oxyde nitrique dans la pouponnière des nouveau-nés, et ils vont donc lancer un essai. Nous avons un très grand savoir-faire à cet égard, mais nous sommes handicapés parce que quantité d'essais de l'industrie ne peuvent être mis en marche faute de chercheurs qualifiés pour les mener.

Le verre est à demi plein. Nous avons le savoir-faire pour mener les essais. La demande est infime par rapport à ce qu'elle est en médecine pour adultes ou en gériatrie où l'éventail des maladies et affections nécessitant un traitement médicamenteux est plus large.

Concernant l'éditorial, le Dr Peterson a absolument raison, bien entendu. Nous nous intéressons à l'effet des médicaments chez les enfants depuis bon nombre d'années et quantité d'essais internationaux ont fait appel à des enfants canadiens. Cependant, aucune loi n'exige une compagnie pharmaceutique à rapatrier ces données une fois qu'un essai est achevé et à demander un changement d'étiquetage à Santé Canada.

Le sénateur Eggleton : Le préconisez-vous? Seriez-vous d'accord avec cela?

Dr MacLeod : Santé Canada pourrait certainement les y contraindre.

Dr Walker : Il faudrait également modifier la réglementation pour faire placer les données sur l'étiquette et appuyer les essais cliniques à tous les niveaux, et en pédiatrie notamment, par l'intermédiaire de groupes tels que le RRSEM. J'ajouterais aussi que nous devons emboîter le pas aux États-Unis et à l'Union européenne, qui ont promulgué des lois spécifiques. L'éditorial fait état de la loi américaine, le Pediatric Research Equity Act, qui contribue à amener l'industrie à procéder à des essais dans la population pédiatrique pour des médicaments qui pourraient être précieux dans cette population. Elle prévoit des mesures précises pour encourager les compagnies à faire cela.

C'est là l'autre pièce de ce casse-tête particulier, outre celles que les autres intervenants ont mentionnées.

Dr Hill : Je n'ai pas grand-chose à ajouter, mais j'aimerais vous faire part de mon expérience purement personnelle des études d'intervention pour le diabète infantile, où nous examinons l'utilisation hors indication de médicaments pour adultes chez les adolescents prédiabétiques. Il a été incroyablement difficile de faire de la recherche novatrice parce que les responsables de Santé Canada nous sont revenus en nous demandant de leur montrer les données pédiatriques. Il nous a fallu littéralement attendre de disposer de deux ou trois publications européennes — la réglementation est bien meilleure en Europe — pour établir que cette approche est sûre, mais une fois à ce stade, où est l'innovation? Les données sont déjà publiées.

Le sénateur Seidman : Si je peux juste m'attarder un peu là-dessus, j'ai une autre question. Cependant, cette question de l'inclusion des enfants et des femmes enceintes — et même des femmes — dans les essais cliniques est l'une des plus difficiles que nous ayons rencontrée au cours de ces semaines d'auditions de témoins. Je suis très intéressée par le sujet, car vous dites qu'il y a là des encouragements à donner et des problèmes de réglementation à résoudre, soit des choses que le gouvernement pourrait faire pour encourager l'industrie privée, les sociétés pharmaceutiques, et peut-être même les institutions et les chercheurs universitaires de ce secteur à travailler dans ce domaine.

Pourriez-vous nous dire plus précisément quels sont ces encouragements et ces règlements?

Dr Walker : Les différents pays utilisent de nombreuses approches, accordant notamment la prolongation d'un brevet à la compagnie qui fait de la recherche en pédiatrie, par exemple. L'avantage que va retirer la compagnie faisant la recherche durera plus longtemps, ce qui lui permet d'amortir l'investissement. Il faut regarder les choses en face. Nous avons une population relativement faible, dont 20 p. 100 seulement est âgée de moins de 19 ans. Nous sommes une société plus âgée, et donc nul encouragement ne garantira que les compagnies pharmaceutiques entreprendront de vastes essais au Canada sur toutes les tranches d'âge. Il n'est pas réaliste de le croire.

Ce qui nous manque, c'est tout ce qui pourrait aider les sociétés intéressées à examiner au moins les besoins de la population pédiatrique et surtout — comme le Dr MacLeod l'a souligné — à suivre le processus réglementaire, dans les cas où les études ont été faites ailleurs, afin de faire figurer les renseignements sur les étiquettes pour que nos prescripteurs y aient accès. C'est à l'heure actuelle une lacune fondamentale de notre approche pour les médicaments à l'égard de toutes les populations sous-représentées, car il n'y a pas que les enfants, il y a aussi les femmes enceintes et les femmes en général.

C'est donc là un des éléments où il existe un besoin particulier.

Le sénateur Seidman : Vous avez dit assez clairement que si un médicament a été homologué pour la vente aux États-Unis, par exemple, il n'y a aucune raison de ne pas l'approuver aussi au Canada, sans essais cliniques chez nous?

Dr Walker : Je devrais passer en revue notre processus réglementaire, mais si l'information provenant d'ailleurs résulte d'essais sur une population comparable — il est difficile de prétendre que les États-Unis et l'Europe ne sont pas au moins comparables — ces données devraient suivre le processus réglementaire pour être inscrites sur les étiquettes. Ce n'est pas le cas à l'heure actuelle.

Le sénateur Seidman : J'ai posé la question aux compagnies pharmaceutiques lorsqu'elles ont comparu et c'est effectivement ce qu'elles ont répondu à cette même question. Elles ne comprenaient pas pourquoi les médicaments pédiatriques n'étaient pas approuvés au Canada et mis à la disposition des enfants canadiens comme ils le sont aux États-Unis, du fait de ce très gros problème.

Dr MacLeod : Choisissez bien vos mots. Ce n'est pas tant que les médicaments ne soient pas disponibles. Les essais cliniques, peu importe de quel côté de la frontière ils sont réalisés, peuvent être utilisés aux fins de la réglementation. Ce n'est pas un problème, et la plupart des médicaments disponibles aux États-Unis le sont aussi au Canada dans un délai relativement court. La même chose vaut pour l'Europe. Le problème que nous signalons, c'est l'étiquetage, dont vous parlerez ultérieurement. Les compagnies possèdent des données qui amélioreraient la prescription des médicaments et les résultats qu'elles ne partagent pas avec les praticiens.

Puis-je dire un mot en réponse à votre première question? Ce qui a produit des résultats en Europe et aux États-Unis est un mélange de mesures incitatives et coercitives, et les mesures coercitives sont assez fortes dans les deux cas. Les compagnies pharmaceutiques ne peuvent réellement enregistrer un médicament aux États-Unis ou en Europe aujourd'hui sans recevoir l'ordre d'effectuer des études sur les enfants lorsque cela est approprié. Aux États-Unis, la PREA et, en Europe, l'EMA imposent le dépôt de ce que l'on appelle un plan d'enquête pédiatrique — et ce à un stade précoce de la mise au point du médicament. Voilà pour l'aspect coercitif. Du côté des mesures incitatives, celles-ci sont principalement employées aux États-Unis : les compagnies pharmaceutiques peuvent obtenir six mois de prolongation de brevet, ce qui peut valoir beaucoup d'argent dans le cas d'un médicament important.

Dre Ricketts : Pour ce qui est des avantages à tirer d'une stratégie pharmaceutique nationale dans le domaine spécifique de la recherche, un point revient lorsqu'on parle de pédiatrie et de maladies rares et même d'études internationales et transfrontalières, c'est la manière dont nous choisissons de soutenir les réseaux. Comme les pédiatres vous l'ont dit, ils sont tout particulièrement forts dans la formation de réseaux. Je suis très impressionnée par l'ampleur du bénévolat en pédiatrie. L'atmosphère de collaboration qui règne dans ce milieu impressionne au plus haut point, et il y a donc là une occasion idéale. Les frais d'infrastructure pour le maintien de réseaux sont extrêmement élevés, et ces frais d'infrastructure portent sur des aspects comme l'informatique et le maintien en poste d'un personnel formé, pour éviter que celui-ci, au terme d'un essai clinique de neuf mois, soit privé de travail pendant trois mois et se volatilise. On a alors perdu tout ce personnel essentiel. J'espère que la stratégie permettra au moins d'avoir des candidats au doctorat dans le programme, d'attirer de nouveaux chercheurs — tous ces divers besoins — et d'avoir en place une infrastructure, et cetera, et j'espère que vous y réfléchirez.

Le sénateur Seidman : C'est merveilleux car vous m'amenez à la deuxième partie de ma question, qui porte sur l'infrastructure. Je vous en remercie, docteure Ricketts.

Docteur Hill, vous avez parlé de fragmentation de l'infrastructure des essais cliniques au Canada. Vous dites qu'il y a une multiplicité de tout : d'acteurs, d'administrations, de normes, de comités d'éthique, et cetera. La Dre Ricketts vient d'insister largement sur cette fragmentation et toute la question de l'infrastructure.

Lorsque vous avez parlé de ce que le gouvernement fédéral peut faire, vous avez dit qu'il peut exercer un leadership, encourager la collaboration et fournir des ressources de coordination. Considérez-vous qu'il devrait également prendre des mesures pour remédier à cette fragmentation de l'infrastructure?

Dr Hill : Oui, exactement. Si nous voulons devenir les plus compétitifs, nous devons réduire les délais de négociation des contrats d'essais cliniques et d'obtention de l'agrément du comité d'éthique de la recherche pour le démarrage des études. Le temps requis pour recruter le premier patient est un facteur crucial pour les compagnies pharmaceutiques commanditaires. Plus la compagnie est petite, et souvent plus le médicament est novateur, plus il est crucial de boucler rapidement les essais sur les patients, parce que la compagnie brûle rapidement ses fonds de recherche.

Au nombre des mesures pratiques que nous pourrions prendre, il y aurait l'établissement d'un système national d'agrément réciproque par les comités d'éthique de la recherche. Si une étude met en cause 12 centres à travers le Canada, elle doit, à l'heure actuelle, être soumise à 12 comités d'éthique de la recherche. Dans le cas des sites secondaires, il faut obtenir encore plus d'agréments. Si nous avions un système de réciprocité, de façon à avoir un comité d'éthique de la recherche principal dont les recommandations seraient acceptées par les autres centres, cela réduirait radicalement les délais. Pour cela, il nous faut un système d'accréditation, il nous faut quelques normes et un mécanisme commun de soumission des requêtes aux comités d'éthique de la recherche. Cela suppose d'employer le même type de formulaire afin de pouvoir combiner les données par le biais de registres électroniques, et cetera. Ces outils élémentaires permettraient de réduire les délais et d'accroître énormément notre compétitivité. Cela pourrait être mis en place pour un montant relativement faible investi par le gouvernement fédéral dans ce projet précis. C'est un projet de durée limitée, les principaux éléments constitutifs pourraient être en place dans trois ans, probablement.

La même chose s'applique aux contrats d'essais cliniques. Il existe aujourd'hui un contrat d'essais cliniques normalisé expérimental, qui a été coparrainé par les IRSC, l'ACISU et Rx&D. Il est mis à l'essai en différents lieux, notamment à London. Selon les résultats de ce projet pilote, nous pourrons essayer d'en faire une norme nationale. Évidemment, chaque hôpital pourra ajouter quelques clauses particulières, mais nous devrions être en mesure de normaliser le cadre général du contrat. Là encore, cela pourrait réduire de plusieurs semaines le délai avant le recrutement des premiers patients.

Un faible investissement consacré à la création de ces gabarits et de ces registres communs nous donnerait un bon départ pour mettre au point une approche de type Équipe Canada pour les essais cliniques. Imaginez, avoir un registre coordonné des patients disponibles à l'échelle nationale pour un type d'essais particulier? Ce serait incroyable et cela nous donnerait une avance mondiale qu'aucun autre pays ne pourrait égaler. Nous ne parlons pas ici d'un montant énorme, mais d'un investissement ciblé.

Le sénateur Cordy : Sachez que notre comité a effectivement recommandé une stratégie pharmaceutique nationale, et nous sommes donc bien d'accord avec vous.

Je m'intéresse aux essais cliniques et, docteure Ricketts, ce que vous avez dit au sujet des points de comparaison et sur le fait que les essais peuvent n'apporter qu'une partie de l'information nécessaire était intéressant.

Lorsqu'un essai clinique est effectué, dans quelle mesure l'information sur les points de comparaison est-elle communiquée? Je crois que vous avez recommandé que les chercheurs comparent un produit nouveau à d'autres produits déjà sur le marché. Nous entendons souvent dire que des patients qui prenaient un médicament depuis des années ne le trouvent soudainement plus, parce qu'un nouveau a fait apparition sur le marché. Cependant, le nouveau médicament est trop coûteux pour ce patient, qui n'a peut-être pas d'assurance-médicaments. S'il s'agit d'un médicament extrêmement coûteux, il dépasse souvent son plafond de remboursement.

Dans quelle mesure sommes-nous informés — les médecins particulièrement, mais aussi les patients — des points de comparaison? Le nouveau médicament est-il réellement nécessaire? Je crois que vous avez parlé des répercussions possibles sur des personnes âgées ou atteintes de certaines maladies. Quelle est la situation pour ce qui est de cette information? Est-elle disponible?

Dre Ricketts : En fait, je crois que vous avez presque répondu à la question en la posant. À cet égard, je pense que ceux qui ont davantage l'expérience des résultats des essais cliniques aimeraient peut-être utiliser leur temps de parole. L'un de vous préférerait-il répondre? Je sais que nous sommes à court de temps.

Dr MacLeod : Je dirais que l'accès à l'information des chercheurs n'est pas un problème. Cependant, nous nous situons à la fin d'un mouvement d'enregistrement des essais cliniques partout dans le monde. Un essai clinique important tombe presque certainement dans le domaine public avant même de commencer. Les résultats de l'essai seront également dans le domaine public, mais ils ne seront clairement pas accessibles aux patients ni aux médecins de soins primaires de la manière qu'ils aimeraient probablement. Nous devons améliorer la capacité de transfert des connaissances. Les essais eux-mêmes sont menés de manière assez ouverte et transparente.

Le sénateur Cordy : On dirait un discours en langue de bois de politicien, n'est-ce pas, ou plutôt de médecin?

Dr MacLeod : Les experts savent, mais ils ne communiquent pas nécessairement à d'autres ce qu'ils savent.

Le sénateur Cordy : Ma question suivante porte sur la documentation. Docteure Ricketts, vous avez dit qu'elle n'est pas conviviale pour les médecins. Si elle ne l'est pas pour les médecins, je suis sûr qu'elle n'est pas conviviale non plus pour les malades ni pour quiconque n'a pas de connaissances médicales. Est-ce que les choses changent, de telle façon que la documentation devient plus conviviale ou bien reste-t-il encore beaucoup à faire par le ministère de la Santé pour la rendre plus conviviale?

Millicent Toombs, première analyste des politiques, Politiques de santé et recherche, Association médicale canadienne : Je pense qu'il y a eu quelques améliorations. Ceux qui travaillent au département du transfert des connaissances de l'AMC entendent fréquemment, de la bouche des médecins praticiens par opposition aux médecins chercheurs, qu'ils veulent l'information sous forme télégraphique, aussi concise et conviviale que possible. Quelque part dans les milieux de la recherche et de la pratique médicale, il faut un autre processus de diffusion de l'information pour rendre les données essentielles disponibles. Elles doivent être accessibles non seulement aux médecins, mais aussi aux patients.

Il y a eu quelques progrès à cet égard, mais nous espérons en voir plus.

Le sénateur Cordy : De nombreux pays demandent que les essais cliniques soient enregistrés. Nous avons un marché mondial et des sociétés pharmaceutiques multinationales. Si un essai clinique a lieu aux États-Unis ou au Royaume-Uni, ou en Chine ou dans quelque autre pays, que se passe-t-il si nous voulons utiliser ce médicament au Canada? Devons-nous recommencer à zéro ou pouvons-nous commencer à l'étape trois?

Dr MacLeod : Cela dépend des circonstances. Pour qu'un médicament soit homologué au Canada, il faut un parrain, quelqu'un doit demander l'agrément. Normalement, il s'agit d'une société privée. Si une société privée choisit d'introduire un médicament mis au point en Chine, elle pourrait utiliser jusqu'à un certain point au moins les résultats des essais cliniques en Chine. Ces essais ne répondraient probablement pas aux normes nord-américaines ou européennes, mais c'est possible. Quelqu'un qui voudrait importer un médicament américain n'aurait certainement aucune difficulté du tout.

Le sénateur Cordy : Est-ce que la société pourrait simplement l'importer et le distribuer dans les pharmacies?

Dr MacLeod : Non; la compagnie doit passer par le processus réglementaire de Santé Canada.

Le sénateur Cordy : Mais pas les essais cliniques?

Dr MacLeod : Non, elle n'a pas à répéter les essais cliniques.

Le sénateur Cordy : Docteur Hill, vous avez parlé de la nécessité de stopper le recul de l'investissement dans les essais cliniques. Nous avons déjà entendu dire que les essais cliniques au Canada ont sensiblement diminué par rapport à il y a quelques années. Vous avez parlé de leadership, et je devine que vous vouliez parler de leadership fédéral...

Dr Hill : C'est exact.

Le sénateur Cordy : ... de Santé Canada.

Vous avez parlé de leadership, d'incitatifs et de ressources. Vous avez parlé des trois éléments. Pourriez-vous expliquer davantage ce que vous entendez par là?

Dr Hill : Pour ajouter à la question antérieure du sénateur, le leadership est important, car ce qu'il nous faut réellement est un centre de coordination national qui assure l'exécution de ces différents volets du travail à faire, afin de nous permettre de devenir une communauté de recherche clinique intégrée. Cela pourrait être fait par le biais de Santé Canada ou des Instituts de recherche en santé du Canada, qui ont déjà une stratégie de recherche axée sur le patient.

Encore une fois, l'établissement d'un bureau de coordination national n'exigerait pas des ressources énormes, mais nécessiterait un leadership très visible de la part du gouvernement fédéral, pour signifier que les essais cliniques non seulement sont essentiels pour pouvoir livrer à la population canadienne les meilleurs médicaments, mais qu'ils représentent en même temps une importante composante de notre secteur économique.

Cette seule déclaration serait précieuse. Un premier pas très important serait ensuite de montrer la voie en appuyant la création d'un appareil de coordination.

Le sénateur Martin : Je pense que vous avez répondu à certaines des questions que j'avais, mais j'ai le sentiment que nous pourrions aborder quantité d'autres aspects également, car ils sont tous interreliés.

Je vais revenir sur un élément de votre dernière réponse, docteur Hill, lorsque vous avez parlé d'un centre de coordination national. Je devine que des problèmes se posent dès qu'on envisage de normaliser un système, par exemple la création de matrices et de registres communs. Cependant, compte tenu des différents secteurs qui auraient à s'entendre entre eux, d'aucuns nous ont également dit qu'un modèle de type taille unique ne conviendrait pas partout, et j'imagine donc qu'il y aurait des problèmes à ce niveau-là également.

Ma question est peut-être hors propos, mais c'est de cela que nous avons jusqu'ici discuté dans la réunion d'aujourd'hui. Je suis curieuse de connaître les problèmes qu'il y aurait à surmonter, et j'aimerais savoir si ce que vous envisagez a été tenté par le passé, car il ne s'agit pas d'un nouveau problème, mais bien d'un problème auquel nous sommes déjà confrontés au Canada.

Dr Hill : Nous avons déjà une matrice pilote pour un contrat national d'essais cliniques. Si nous pouvons procéder de la sorte dans ce contexte-là, nous pouvons également le faire dans le cas des comités d'éthique de la recherche.

Différentes provinces cheminent dans le même sens. L'Alberta et l'Ontario ont déjà fait des progrès énormes, par exemple en déterminant comment parvenir à un système réciproque de comités d'éthique de la recherche. Ce n'est peut-être pas aussi compliqué que de coordonner 50 ou 60 hôpitaux ou systèmes de santé régionaux différents. Il serait peut-être possible d'y parvenir en réunissant simplement les provinces et les territoires.

Cependant, encore une fois, il nous faut en la matière un réel leadership fédéral pour véritablement donner le coup d'envoi, ainsi qu'un petit budget pour créer des incitatifs, qui nous permettrait d'élaborer les systèmes.

Dre Ricketts : J'ajouterais, à l'appui de ce qui vient d'être dit, que le Réseau canadien pour les essais VIH est un exemple classique. Il est vieux de plus de 20 ans. L'essai clinique 001 visait l'AZT pour le VIH-sida. C'est le gouvernement fédéral qui en avait eu l'initiative. Je le connais très bien, car c'était mon premier emploi au gouvernement fédéral. Le réseau a fort bien réussi, alors je pense que vous avez toutes les raisons de croire que ce serait possible.

Dr MacLeod : Ce dont vous parlez a été mis en place en raison des lois américaines et européennes concernant les médicaments pour enfants. Il existe aujourd'hui des réseaux nationaux d'essais pédiatriques aux États-Unis, au Royaume-Uni, en France, en Allemagne, aux Pays-Bas — dans plusieurs pays. Ces réseaux ressemblent fort, dans leur conception, à ce qu'a décrit le Dr Hill, à la différence qu'ils sont axés sur la pédiatrie.

Il s'agit donc de créer une infrastructure partagée, et ensuite d'adopter des matrices communes pour l'éthique et d'autres éléments contractuels. Vous espérez alors pouvoir entreprendre une étude avec un minimum de discussions préalables.

Le sénateur Martin : Pour ce qui est des sous-groupes qui sont soit sous-représentés, soit peut-être même écartés des essais cliniques pour diverses raisons, y a-t-il des problèmes particuliers les concernant, ou bien les problèmes sont-ils semblables dans le cas des essais cliniques visant ces sous-groupes? Il y a des petits groupes, mais existe-t-il des problèmes particuliers dans le cas, par exemple, des aînés? J'aurais tendance à penser que oui, mais pourriez-vous nous indiquer s'il existe des problèmes communs et des problèmes particuliers?

Dr Walker : Je tiens à rappeler au comité que, lorsque nous parlons de sous-groupes, les enfants ne comptent que pour 19 p. 100 de notre population, mais ils peuvent difficilement être considérés comme étant un sous-groupe du fait que nous avons tous été enfants. On est un enfant avant de devenir un adulte. Vous pourriez présenter exactement le même argument, bien sûr, dans le cas des personnes âgées. Il est à espérer que la plupart d'entre nous atteindront un âge avancé.

Les lois et les règlements qui tiennent les médecins à l'écart du flux d'information sont mal avisés et clairement inéquitables. Je pense que c'est ce qui a inspiré le propos de l'éditorial : il y a ici un manque de justice fondamentale. Voilà la première chose que je dirais.

Cela dépend clairement du sous-groupe. Il y a des sous-groupes, si c'est le terme que vous voulez employer, pour lesquels le problème est cependant aggravé par leur nature et par le fait qu'ils réagissent différemment aux médicaments. Voilà quelle est la question fondamentale qui se pose ici : les enfants sont différents, et les nouveau-nés sont encore différents des enfants. Les personnes âgées sont sensiblement différentes également. Et il y a encore d'autres distinctions. Nous avons une population autochtone dont l'état de santé est si mauvais que c'en est choquant. Il y a des situations dans lesquelles ces personnes réagiraient peut-être différemment des hommes blancs de classe moyenne, qui représentent le gros des participants à de nombreux essais cliniques.

Tout dépend du sous-groupe dont il est question.

Je tenais à souligner que ces sous-groupes font partie de nous et que, dans le cas de groupes importants qui font partie de notre population totale, je pense qu'il importe de reconnaître l'iniquité de notre système actuel. Ce n'est pas une question à caractère médical; je suppose que j'avance ici un argument social.

Le sénateur Martin : Je suis intéressée par les technologies naissantes et par la façon dont celles-ci sont en train de changer la nature des essais cliniques. Au Canada, suivons-nous le rythme de ces changements? Je vous ai entendu dire que nous obtenons de bons résultats à certains égards, mais je me demande ce que nous faisons avec les technologies émergentes à notre disposition.

Dr MacLeod : Il y a de nombreuses technologies, certes, qui pourraient avoir une incidence sur les essais cliniques, mais ce qui suscite sans doute aujourd'hui le plus d'enthousiasme est la possibilité de mettre à profit ce que nous avons appris au sujet du génome humain ou de la constitution génétique complète des humains. Nous tendons probablement vers un nouveau genre d'essais cliniques, qui sera davantage conçu pour les personnes ayant une prédisposition génétique particulière pour réagir à une thérapie donnée.

Dans ce domaine — et le président en sait probablement autant que moi —, le Canada est très bien placé. Nous pouvons dire que nous avons une force réelle par l'intermédiaire de Génome Canada et des organismes génomiques provinciaux en Ontario, au Québec et en Colombie-Britannique. Je pense que nous pourrions très bien réussir dans cette ère de la médecine personnalisée. Mais soyons clairs : cela exigera une approche tout à fait différente en ce qui concerne les essais cliniques.

Le sénateur Callbeck : J'aimerais vous interroger au sujet des participants aux essais cliniques. Nous avons entendu dire qu'il est souvent difficile de trouver des gens intéressés à participer à un essai clinique. Des préoccupations ont été soulevées relativement à l'offre d'incitatifs pour recruter un nombre donné de personnes, et au sujet du versement d'argent aux patients — cette pratique est en train de devenir plus courante. J'ai en fait vu une annonce dans le journal la semaine dernière.

J'aimerais vous inviter à nous dire ce que vous prônez relativement à tout cet aspect. Nous pourrions peut-être commencer avec vous, docteure Ricketts. L'AMC a-t-elle une politique en matière d'indemnisation par l'industrie lors des essais cliniques?

Dre Ricketts : Je ne suis pas certaine de comprendre ce que vous entendez par une politique d'indemnisation par l'industrie dans le cadre des essais cliniques.

Le sénateur Callbeck : Je lisais un article dans le Journal de l'Association médicale canadienne dans lequel on disait que, bien que de nombreux documents traitent du dilemme éthique de l'indemnisation des participants, les restrictions ne sont que des lignes directrices. Avez-vous des lignes directrices?

Dre Ricketts : Oui, absolument.

Le sénateur Callbeck : Pensez-vous qu'il devrait y avoir quelque chose de plus fort que cela?

Dre Ricketts : Non, je ne le pense pas. Je pense que les lignes directrices bien rédigées, bien comprises, ont été très efficaces jusqu'ici. Dans le cas de nombreuses situations, le recours à des règlements ou à une loi n'est pas nécessairement une bonne façon de faire. Cela peut enlever la souplesse qui est essentielle à la créativité dans la conception des essais cliniques. Les lignes directrices régissant les interactions des médecins avec l'industrie ont été élaborées il y a plus de 20 ans, et il s'agit d'un document excellent, d'une bonne approche. Non, je ne pense pas qu'il nous faille davantage de lignes directrices.

Dr MacLeod : Je dirais qu'il est très peu habituel au Canada que des patients se fassent payer pour leur participation à des essais cliniques. En règle générale, les patients sont très désireux d'y participer, du fait que cela leur procure un traitement novateur et, potentiellement, meilleur. Des paiements sont habituellement versés dans le cadre d'études volontaires normales, de certains types d'études de phase I, mais rarement au-delà. Comme je l'ai déjà dit, en pédiatrie, 75 p. 100 des essais sont le fait des chercheurs. Or, les chercheurs n'ont pas d'argent pour payer les patients pour qu'ils participent à leurs essais. Nous adhérons tous au principe qu'il ne devrait y avoir aucune coercition, implicite ou autre. Je ne pense pas que ce soit un gros problème.

Les lignes directrices suffisent sans doute, et elles sont examinées de très près par les comités d'éthique de la recherche des différentes institutions. Aucune institution de bonne réputation au Canada ne vous autoriserait à mener un essai si elle pensait que vous faites pression sur des patients en leur offrant de l'argent.

Dr Hill : Aucune des institutions membres de l'ACISU n'entreprendrait un essai clinique pour lequel les participants seraient rémunérés. Le remboursement des frais de stationnement serait acceptable, tout comme celui des frais de voyage d'une personne devant venir de loin pour participer à un essai, mais il ne serait certainement jamais question de verser un paiement. Ce serait impensable.

Dre Ricketts : Je pense qu'il serait très difficile d'imaginer qu'une personne puisse donner son plein consentement éclairé dans une situation dans laquelle elle serait payée. Peut-être que c'est là une question importante à laquelle réfléchir. Est-ce possible de donner son consentement éclairé si on se fait payer pour sa participation? Cela ne me paraît pas logique.

Le sénateur Callbeck : Aucun d'entre vous ne préconise donc de changements dans ce domaine?

Dr Hill : Je ne pense pas que le système soit détraqué. Bien franchement, je pense qu'il fonctionne bien en ce moment à cet égard.

Le président : Je pense que nous devrions clarifier ce que vous êtes en train de dire ici. Il y a une distinction entre les phases I/II et la phase III et les phases subséquentes. Vous avez dit que, pour trouver des volontaires pour vérifier la simple innocuité du médicament à la phase I, il se peut qu'il y ait des incitatifs en place, mais que la chose est en même temps fortement déconseillée et que ce n'est de toute façon pas une formule pour devenir riche. Tout le monde adhère-t-il à cet éclaircissement?

Dr MacLeod : Vous avez tout à fait raison.

Le sénateur Wallace : Merci de vos exposés. Je suis nouveau au comité, alors tout ceci est nouveau pour moi. Une chose qui me frappe lorsque j'entends vos observations est que l'on aurait pensé que le Canada, parmi tous les pays, aurait été un chef de file en matière de collaboration ciblée. Nous sommes des chefs de file en technologie médicale et en savoir-faire médical; or, mon impression est que nous accusons du retard par rapport à ce qui est en train de se faire aux États-Unis et en Europe. Je me demande pourquoi il en est ainsi. Comment se fait-il que nous ne soyons pas à la tête du peloton?

J'ai, bien évidemment, l'impression que vous considérez qu'il faudrait au Canada un régime de réglementation plus solide, et que cela relève du gouvernement fédéral, mais qu'en est-il des associations du secteur privé, de l'AMC, des associations qui réglementent les compagnies pharmaceutiques? Quel a été leur rôle en la matière? N'ont-elles pas pris les devants comme elles l'auraient dû pour forger cette collaboration?

En disant cela, je songe à un certain nombre d'autres professions, par exemple le génie et d'autres encore, dont les associations exercent un leadership actif pour assurer une coordination et l'application de normes communes, au lieu de tout simplement s'en remettre au gouvernement pour s'occuper de tout.

Y a-t-il quelque chose d'unique dans l'expérience canadienne? Y a-t-il d'autres boutons sur lesquels il faudrait appuyer pour amener cet effort commun, au lieu de simplement compter sur le gouvernement fédéral pour montrer la voie et tout mettre en place?

Dr Hill : Entre autres problèmes, les compagnies pharmaceutiques internationales, comme vous le savez, ne tendent pas à investir beaucoup dans la R-D au Canada. Souvent, les pipelines les plus novateurs n'arrivent pas au Canada en premier. D'habitude, on estime que, si les études importantes des phases I et II sont effectuées aux États-Unis, alors cela viendra favoriser la situation sur le plan de la réglementation. Je ne suis pas de cet avis, mais, en fin de compte, les filiales canadiennes de multinationales n'ont pas tendance à parler fort au siège social mondial.

Il y a moyen de contrer cela, soit en aidant les filiales canadiennes, si vous voulez, à parler d'une seule voix, en leur fournissant la preuve que nous avons bel et bien une machine performante et bien intégrée, capable de livrer à l`avenir de bonnes ventes en dépit du fait que nous soyons un marché relativement petit.

D'autres pays ont appris à se vendre. Il existe aujourd'hui des hôpitaux spécialisés dans les essais cliniques, des hôpitaux qui, littéralement, ne font rien d'autre que des essais cliniques, en Inde, au Pakistan et dans d'autres pays émergents, et qui non seulement concurrencent exceptionnellement bien le Canada sur le plan des coûts, mais offrent également aujourd'hui une qualité hors pair. Il fut un temps où nous pouvions dire que notre structure de coûts était plus lourde, mais que nous obtenions au Canada un niveau de qualité qui n'existait nulle part ailleurs dans le monde. Je ne crois pas que ce soit encore le cas. D'autres parties du globe nous ont rattrapés.

L'autre moyen évident d'améliorer notre compétitivité est d'améliorer l'intégration de la population, de manière à ce que notre population devienne, en fait, le banc d'essai potentiel pour les compagnies pharmaceutiques internationales. Ainsi, ces compagnies auraient, en phase II, non pas simplement un centre comme Toronto ou Vancouver, mais une nation véritablement intégrée qui puisse servir leurs besoins.

Dr Walker : Le Dr Hill a parlé très éloquemment du rôle de l'industrie. Ce que j'aimerais souligner est que, dans de nombreux secteurs, les chercheurs canadiens ne sont pas tout simplement restés assis à attendre que quelqu'un vienne subventionner leur travail, mais qu'ils ont créé les collaborations. Vous avez entendu parler du réseau pour les essais VIH-sida et vous avez entendu parler des réseaux dans le domaine de la pédiatrie.

Permettez-moi de vous donner une perspective depuis la ligne de front. En ma qualité de chercheur ayant facilité le lancement des études sur l'oxyde nitrique dont j'ai fait état dans mes remarques liminaires, j'ai participé à la création du groupe canadien d'étude de l'oxyde nitrique inhalée. Ce groupe, composé d'une dizaine de membres d'un peu partout au Canada, a si bien travaillé que les deux essais sur l'oxyde nitrique qui étaient en cours aux États-Unis et qui étaient en difficulté ont fini par être intégrés à notre essai, le tout aboutissant à un travail majeur dans ce domaine.

Cela n'a pas été facile. Cela n'a pas été facile parce que, bien que nous ayons fait tout ce travail pour instaurer une collaboration fort réussie, les choses n'ont pas été simples, précisément pour les raisons évoquées par le Dr Hill. Il nous avait fallu traiter non pas avec 10 mais plutôt avec 20 comités d'éthique de la recherche différents, car à l'époque, chaque hôpital avait le sien. Il y en aurait eu deux ou trois à London, et, jusqu'à tout récemment, il y en avait trois à Halifax.

Ces investissements relativement petits peuvent faire toute la différence en éliminant des barrières là où la communauté de la recherche a déjà fait le travail pour forger les relations de collaboration, mais où des difficultés subsistent à cause de cette infrastructure non intégrée qui nous entrave.

Dr MacLeod : Pour revenir un peu en arrière, vous avez indiqué qu'il n'est pas simplement question d'obtenir un appui gouvernemental. Cela est vrai, mais il est impossible de faire de la recherche clinique d'avant-garde en l'absence d'infrastructure. La réalité est qu'au Canada nous ne possédons pas l'infrastructure, ni le mécanisme d'obtention de cette infrastructure. Aux États-Unis, les National Institutes of Health appuient une unité de recherche clinique dans la quasi-totalité des grands hôpitaux américains. Ces instituts ont, au cours des cinq dernières années, tenu un vaste concours pour décerner ce qu'ils appellent des prix de recherche clinique et translationnelle, et qui sont d'importantes bourses annuelles à l'intention de grands centres universitaires qui s'adonnent à de la recherche clinique et au transfert de cette recherche.

Nous n'avons tout simplement rien de tel ici. Ce que nous avons, nous l'avons improvisé avec nos hôpitaux existants. Nous avons un certain nombre d'hôpitaux extraordinaires, ainsi que des installations, mais nous n'avons aucun financement réservé. Nous avions espéré que cela viendrait, il y a quelques années, avec le Fonds des hôpitaux de recherche. Malheureusement, ce n'est pas à cette fin que l'argent a été utilisé.

Le sénateur Wallace : Docteur MacLeod, si on compare simplement notre situation pour les établissements de recherche clinique avec celle qui existe aux États-Unis, peut-on dire que le gros de ces établissements seraient détenus par des intérêts privés plutôt que publics?

Dr MacLeod : Aux États-Unis, les grands hôpitaux d'enseignement appartiennent généralement à des universités. Il n'est pas clair s'ils sont privés ou publics. Ils sont plus privés que les nôtres. Les gouvernements provinciaux pourraient, bien sûr, intervenir au même titre et financer ce travail, mais ils considèrent que leur contribution est de livrer des services aux patients, ce qui est vrai, et ils ne considèrent pas forcément qu'il est essentiel d'investir dans l'infrastructure de recherche clinique. Je pense que, dans le monde de la pédiatrie, les provinces qui ont exprimé un intérêt ont toutes reçu une contribution financière nationale pour établir une infrastructure destinée aux essais cliniques.

Le président : J'aimerais poursuivre un petit peu la discussion, car le sénateur a posé une question très précise au sujet du rôle des associations professionnelles. En vérité, dans le cas de toutes les organisations dont vous parlez, les intervenants directs dans l'organisation et la conduite des essais cliniques sont des médecins, qui sont membres de l'association professionnelle, et qui, je présume, sont tous, ou presque, membres de l'AMC. Je pense que, comme l'a indiqué le sénateur, il faut parler, précisément de la situation suivante : l'association des ingénieurs, l'association des chimistes et ainsi de suite mobilisent souvent leurs membres pour ces questions, qu'il s'agisse d'approbation de normes ou d'autres choses. J'aimerais faire intervenir cela dans la discussion, car vous avez donné deux ou trois exemples de groupes qui, selon ce que vous avez dit, se sont organisés, qu'il s'agisse du groupe qui s'est penché sur le VIH, ou de celui qui a étudié l'oxyde nitrique, mais, comme l'a souligné le Dr Walker, il faut néanmoins obtenir quantité d'approbations auprès des comités d'éthique, et, j'imagine également, des contrats avec chacun d'entre eux, et ce sont là, pour revenir au propos de tout à l'heure, deux des principaux obstacles à la réalisation d'essais cliniques au Canada.

J'aimerais élargir un petit peu la discussion. J'aimerais revenir sur les raisons pour lesquelles l'AMC n'a pas un rôle à jouer pour aider ses propres membres à accéder plus facilement aux essais cliniques en appuyant la normalisation. Deuxièmement, le gouvernement fédéral a déjà plusieurs organismes qui traitent de ces questions. Les IRSC, par exemple, sont des instituts financés par le gouvernement fédéral et qui jouent dans le domaine un rôle direct.

J'aimerais donc reprendre la question du sénateur et vous demander précisément ceci : l'AMC a-t-elle un rôle à jouer pour faire avancer les choses dans ce domaine? Les IRSC, à titre d'exemple, ont-ils aussi un rôle à jouer à cet égard?

Dre Ricketts : Nous essayons de profiter de la présence de l'AMC à la table pour donner du poids aux pressions exercées par nos membres. Vous voyez devant vous un investissement de la part de l'organisation et de la part des membres pour essayer de vous convaincre qu'il nous faut une stratégie pharmaceutique nationale, qu'il nous faut davantage de recherche, et cetera.

En 2009, avec l'éclosion de la grippe H1N1, nous avons constaté une insuffisance d'informations cliniques à l'intention des médecins au sujet de l'utilisation d'antiviraux, par exemple, chez les enfants et les femmes enceintes. La Société canadienne de pédiatrie et la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada ont pris les devants et ont en vérité produit nombre des choses qu'il nous fallait. De quoi ont-elles eu besoin pour faire cela? De connaissances spécialisées.

Le président : Puis-je vous demander de vous concentrer uniquement sur la question des exigences normalisées des comités d'éthique et des contrats normalisés, en laissant de côté le reste?

Dre Ricketts : Ce que je vous dirais, c'est que l'AMC ne dispose ni des connaissances spécialisées, ni des ressources requises, pour entreprendre le travail que vous décrivez. Voilà ce qu'il en est : nous ne possédons ni les connaissances spécialisées, ni les ressources.

Le président : Qu'en est-il des IRSC?

Dre Ricketts : Il s'agit là d'une question tout à fait différente.

Le président : Cela est vrai, mais je vous la pose.

Dre Ricketts : J'ai vu les IRSC faire de l'excellent travail pour réunir des groupes aux fins d'essais cliniques; je songe notamment aux technologies d'imagerie. Les IRSC, c'est tout à fait autre chose. Ils sont financés par le gouvernement fédéral. Le message que je tiens à livrer ici est qu'il faut quelque chose au niveau national. Il n'est pas impératif que cela se fasse au gouvernement fédéral, mais il importe qu'il y ait un centre national qui soit prêt à assumer ce travail et qui dispose des ressources et des compétences requises.

Le président : Docteur Hill, c'est vous qui avez soulevé ces questions au départ.

Dr Hill : Je conviens tout à fait avec vous que les IRSC devraient jouer un rôle de leader en harmonisant nos comités d'éthique de la recherche et en faisant avancer le projet d'un contrat normalisé pour les essais cliniques, en ne se limitant pas tout simplement à faciliter la rencontre des parties, mais en dirigeant véritablement le travail. Or, il faudra des fonds pour cela.

Je dirais, pour la défense des IRSC, que cela figure depuis au moins trois ans dans leur plan stratégique, avec la Stratégie de recherche axée sur le patient, ou SRAP, comme on l'appelle. Cette stratégie comporte deux volets. Le premier est l'élargissement de la création de réseaux du type dont ont parlé le Dr MacLeod et le Dr Walker. Le deuxième volet de la stratégie est la création d'unités d'appui centrales. Une fois en place les unités d'appui centrales, pour faire un travail de facilitation et aider les chercheurs à mener de la recherche normalisée, l'étape logique suivante serait de les intégrer dans une plate-forme nationale. Il me semble que cela devrait être soutenu par de nouvelles ressources.

Dre Tina Saryeddine, vice-présidente adjointe, Analyse de recherches et des politiques, Association canadienne des institutions de santé universitaires : Pour répondre à cette question et aux points soulevés par le Dr Hill au sujet du leadership, des incitatifs et des ressources, et du rôle du gouvernement fédéral, le plan d'action sur les essais cliniques issu du sommet, qui vous a été remis, vous montre réellement l'effort déployé par l'industrie pour se regrouper. Il y a des institutions de santé universitaires, des entreprises qui mènent des essais dirigés par l'industrie et les IRSC, qui se regroupent pour demander comment nous pourrions nous organiser, car il revient aux intervenants dans le milieu de s'organiser entre eux. Les recommandations que vous voyez dans le plan d'action, et il y en a neuf résumées sur une page qui figure dans la trousse de documentation qui vous a été fournie, exigeraient, en outre, un appui et un leadership pour lancer une commercialisation stratégique et pour recueillir l'adhésion et la participation de la population canadienne , parce qu'il y a beaucoup à faire.

L'autre élément que j'ajouterais est que certaines des questions intéressant les examens éthiques ne concernent pas uniquement les médecins, et c'est ainsi qu'il faut se pencher sur le rôle des organisations et sur celui des comités d'éthique de la recherche. Un merveilleux exemple du rôle des organisations nous est donné par le Réseau des réseaux, qui est une organisation de base, réunissant des personnes engagées dans la réalisation d'essais cliniques qui se sont mobilisées autour d'un projet de normalisation. Il en est question dans le plan d'action, car une grosse partie de leur travail constitue la base de ce que nous cherchons à mettre en place. Peut-on réellement mettre à profit leur capacité à l'échelle nationale et de façon officielle?

Le président : J'aimerais revenir sur certaines des questions et des réponses que nous avons entendues. J'aimerais interroger le Dr MacLeod au sujet de la participation de jeunes aux essais et de la disponibilité des résultats obtenus. Nous avons appris, à la lecture de documents qui nous sont parvenus, que, dans différents cas, des jeunes Canadiens ont participé à des essais cliniques internationaux. Comme vous l'avez souligné, le médicament en question sera peut-être en bout de ligne approuvé, par exemple aux États-Unis, mais le promoteur ne fait aucun effort pour demander l'homologation du produit au Canada. Même si des jeunes Canadiens ont participé à l'essai, les résultats ainsi obtenus ne contribuent en rien à améliorer la santé des jeunes Canadiens.

Je ne voudrais pas vous conduire dans cette discussion, alors je vais m'arrêter là.

Dr MacLeod : Je comprends votre propos. Il y a une distinction entre l'homologation et l'étiquetage.

Le président : J'y viendrai.

Dr MacLeod : Je devine que vous entendez par le terme « jeunes » des personnes âgées de 0 à 18 ans, et je vous dirais que la plupart des médicaments qui sont étudiés pour utilisation en pédiatrie ont déjà été homologués aux États-Unis, au Canada, ou ailleurs, pour utilisation chez l'adulte. L'homologation n'est en règle générale pas le problème. La question survient lorsqu'il y a approbation en vue d'une nouvelle indication, disons pour soigner des nouveau-nés.

Le président : Aux États-Unis.

Dr MacLeod : Aux États-Unis. La société pharmaceutique n'est assujettie à aucune obligation. Même si elle a intégré dans son étude 100 enfants à Montréal et 100 autres à Toronto, elle n'est aucunement tenue d'intervenir auprès de Santé Canada pour dire qu'elle souhaite modifier l'étiquette afin que les Canadiens puissent utiliser légalement le produit dans leurs unités de soins intensifs pour nouveau-nés. Ces unités de soins intensifs s'en servent probablement de toute façon, étant donné que les intervenants auront lu la documentation correspondante.

Le président : Nous allons aborder cet aspect. Docteur Walker, j'ajouterais un petit quelque chose au sujet de ce point particulier. Je vais enfreindre brièvement ma propre règle, car je souhaite obtenir tout de suite une réponse, vu que la question a été soulevée. Lorsque vous avez parlé de l'ajout d'informations sur l'étiquette, je présume que vous parliez d'indications tant positives que négatives.

Dr Walker : Ce devrait certainement être le cas, mais vous avez déjà entendu dire que la publication des résultats est biaisée et que cela a une incidence sur les essais cliniques, et cetera. La réponse est oui.

Le président : Nous fouillerons davantage la question dans la phase suivante, mais je tenais à ce que cette partie soit traitée ici.

Docteure Ricketts, vous avez présenté de très bons arguments au sujet de la connaissance de la pharmacopée au Canada et de la valeur d'un nouveau médicament par rapport aux médicaments existants, et cetera. Vous n'avez pas dit ceci explicitement, et je vais donc vous poser la question : même si cela était peut-être implicite dans votre réponse, aimeriez-vous que l'accent soit mis sur les essais cliniques dans les cas où il existe sur les marchés des médicaments visant l'indication en question? Aimeriez-vous que, dans de tels cas, l'essai clinique inclue toujours dans le groupe de participants des patients qui se voient donner des doses clairement identifiées des médicaments existants, au lieu que ce soit juste l'étalon or historique du nouveau médicament versus le placebo?

Dre Ricketts : Madame Toombs, souhaitez-vous répondre à cette question? Je décèle chez ma collègue un certain désir de répondre à cette question.

Mme Toombs : La réponse courte est oui, si l'exécution d'un tel essai serait susceptible de produire des informations nouvelles. Plus le médecin pratiquant peut en savoir au sujet du médicament, mieux c'est. C'est ce qui se passerait dans le cas où un chercheur aurait reconnu une lacune sur le plan de l'information.

Le président : Lorsque le brevet d'un médicament approche de sa limite, l'incitatif est, certes, énorme pour que la compagnie pharmaceutique fasse éprouver, aux fins d'une nouvelle indication, une modification du médicament. Lorsqu'il est éprouvé comparativement au placebo, son action est positive. La question pour la société est la suivante : si un médicament approuvé, dont le brevet approche de sa fin, est disponible et a procuré des bienfaits à la société, n'est-il pas clairement dans l'intérêt de la société de savoir si le nouveau médicament se compare favorablement ou pas au médicament existant?

Dre Ricketts : Tout à fait.

Le président : Envisageriez-vous cela comme étant une possibilité?

Dre Ricketts : Il faudrait probablement des précisions pour déterminer s'il s'agit d'un nouveau médicament comparativement à un placebo ou d'un nouveau médicament comparativement à un médicament existant.

Dr MacLeod : Nous tous qui prescrivons des médicaments serions en faveur de données comparatives sur l'efficacité des médicaments, ce qui est ce que vous décrivez. Comment le nouveau médicament se compare-t-il aux thérapies standard en vigueur? Il y a cependant de nombreuses situations dans lesquelles il n'existe pas de thérapies standard ou pour lesquelles les preuves sont plutôt faibles en ce qui concerne le médicament habituellement utilisé.

Le président : J'aimerais que l'on s'en tienne à mon propos, car vous avez raison et je ne voudrais pas embrouiller les choses. Le scénario sur lequel je vous interroge est celui d'un médicament sur ordonnance existant.

Dr MacLeod : Il existe des médicaments sur ordonnance pour lesquels les preuves ne sont, bien franchement, pas très bonnes.

Le président : C'est peut-être une raison de plus de faire ce travail.

Dr MacLeod : Nous ne voulons pas nous prononcer définitivement en disant : tu ne mèneras jamais un essai placebo. Ce ne serait pas un bon résultat pour le Canada.

Dr Hill : Je soulignerais qu'une part importante des travaux de recherche menés par les chercheurs compare en fait un nouveau médicament avec le médicament étalon, afin qu'il y ait de la recherche. Les compagnies pharmaceutiques n'ont pas tendance à parrainer ces travaux. Il n'y a donc pas de vide en la matière, ce travail étant fait.

Le président : Je vais redonner la parole au sénateur Seidman, pour des questions supplémentaires.

Le sénateur Seidman : Vous avez porté à notre attention cette trousse de documentation que vous nous avez fournie, et je viens de jeter un coup d'œil sur les recommandations contenues dans le plan d'action. Je constate que la cinquième recommandation vise l'élaboration d'une base de données de registre et l'adoption d'une stratégie nationale de recrutement de patients. La Dre Ricketts et le Dr Hill en ont d'ailleurs fait état. La Dre Ricketts a parlé de la question de la transition et d'un registre d'essais cliniques. Il s'agit là d'une question dont nous avons abondamment traité ici. Il y a eu beaucoup de confusion au sujet du registre; on se demande qui devrait avoir la responsabilité de le créer et de le garder à jour et quel genre d'informations devraient y être entrées.

Docteur Hill, vous êtes allé plus loin et dit à quel point ce serait une merveilleuse innovation et une initiative formidable pour le pays qu'il y ait un registre de patients pour les essais cliniques. Si nous pouvions combiner ces deux choses et si vous pouviez nous donner les réponses à ces questions, ce serait fort bien.

Dr Hill : Il s'agit de deux objectifs distincts. L'intérêt de l'enregistrement d'un essai serait que les professionnels de la santé en connaîtraient le résultat, que celui-ci soit positif ou négatif. D'autre part, aucun journal sérieux ne publierait les résultats d'un essai clinique qui n'aurait pas été enregistré. Le problème est que de nombreuses compagnies pharmaceutiques ne sont pas convaincues de la nécessité de publier, et que ce n'est de toute façon pas pour elles une grande priorité. J'estime pour ma part que tous les essais devraient être enregistrés, y compris ceux que mènent les compagnies pharmaceutiques.

Le registre de patients nous permettrait de rassembler rapidement des cohortes de patients, ce qui nous permettrait d'être compétitifs pour obtenir le genre d'essais cliniques que nous souhaiterions mener au Canada. Ce pourrait être difficile d'obtenir rapidement le nombre voulu de recrues à partir d'un petit nombre de centres, mais si nous avions un registre central pour des types particuliers d'essais, au départ peut-être, alors nous pourrions avoir un consensus sur les patients qui seraient qualifiés au Canada. Il importerait, bien sûr, que ces données soient traitées de manière très sécuritaire. Il existe des modèles pour la façon dont cela pourrait être fait au Canada, et nous serions ainsi en mesure de réunir très rapidement d'importantes cohortes. Cela nous procurerait un réel avantage concurrentiel.

Le sénateur Seidman : Qui en serait responsable?

Dr Hill : Je recommanderais que les IRSC soient l'organe organisateur.

Le sénateur Seidman : Il est clair qu'un registre de patients serait tout à fait différent du registre des essais cliniques. Le registre des essais cliniques a souvent été discuté ici : on a parlé de toute la question de la transparence et des raisons pour lesquelles nous sommes, au Canada, plus ou moins isolés par rapport aux États-Unis et à l'Europe du fait que nous n'ayons pas un registre pour les essais cliniques qui fournisse l'information pleinement transparente que les gens jugent nécessaire. Je pense que la Dre Ricketts a parlé de cela.

Dre Ricketts : J'ai simplement voulu dire qu'il est essentiel de posséder ces outils. Plusieurs choses peuvent en découler. Premièrement, si vous publiez la méthodologie de votre essai clinique suffisamment à l'avance, vous découvrirez peut-être que d'autres ont déjà entrepris l'essai, et vous pourrez ainsi éviter le double emploi. Vous pouvez créer des possibilités pour des chercheurs de talent de se prononcer sur les méthodes que vous utilisez, ce, de manière à être certain que les résultats obtenus seront valides à long terme. Parfois, ce sont les méthodes qui ne sont pas bonnes. Il s'agit de travaux délicats.

Enfin, vous sauriez qu'il y a véritablement eu un essai clinique et si le résultat était négatif. Vous pourriez obtenir l'information au sujet des ces résultats négatifs sans avoir à être un expert de grand renom assistant aux réunions les plus obscures, visitant les sites les plus originaux et vous entretenant dans le couloir avec quelqu'un. Cela n'est pas approprié. Vous devriez, dans l'intérêt de la transparence, être au courant de tout ce qui est en train de se faire.

En dehors de cela, je n'ai pas vraiment grand-chose d'autre à dire. Nous aimerions voir créer le registre, mais nous n'avons pas discuté au niveau interne de ce à quoi nous aimerions qu'il ressemble.

Le sénateur Seidman : Vous n'avez pas parlé du genre de données que vous aimeriez voir consignées au registre, ni de qui serait responsable de la collecte et du contrôle des données?

Dre Ricketts : Non, pas à proprement parler. Je suis tout à fait convaincue qu'il y en a d'autres qui sauraient répondre à ces questions.

Dr MacLeod : Je ne sais trop si vous êtes en train de laisser entendre que le Canada réussit mieux ou moins bien?

Le sénateur Seidman : D'après ce que nous croyons comprendre, la situation est pire ici, mais vous, vous êtes en train de dire que non.

Dr MacLeod : Je ne le pense pas. Il existe un registre international. Il y a essais et il y a essais. Si nous parlons de la couche supérieure d'essais — essais importants, essais significatifs sur le plan international —, ceux-ci sont aujourd'hui presque universellement enregistrés lorsqu'ils proviennent de l'Europe, de l'Amérique du Nord, du Japon ou de l'Australie. Les essais en provenance de la Chine et de l'Inde ne sont pas universellement enregistrés, mais il existe aujourd'hui une norme pour le monde développé, et l'OMS maintient un registre. Celui-ci renferme un nombre énorme d'essais, et le Canada compte parmi les meilleurs pour ce qui est de l'enregistrement des essais.

Il y a par ailleurs un site Web, du nom de clinicaltrials.gov, que l'on peut consulter pour se renseigner sur les plus importants essais. Ce qui manque, ce sont un grand nombre d'essais qui sont l'initiative de chercheurs ou d'institutions. Ceux-ci n'ont nulle intention d'en publier les résultats dans le New England Journal of Medicine ou le Journal de l'Association médicale canadienne, alors ils ne sont pas tenus de les faire enregistrer.

Le sénateur Seidman : S'agit-il de compagnies qui travaillent sous contrat?

Dr MacLeod : Non, il s'agit principalement de praticiens œuvrant en milieu hospitalier et qui ont une question à laquelle ils souhaitent une réponse. Bien souvent, il s'agit du projet d'un étudiant — mené dans le cadre de sa formation — visant la conduite d'un essai dans une unité de soins intensifs pour nouveau-nés ou une salle d'urgence pédiatrique. Ces essais ne se font pas nécessairement enregistrer, mais à l'heure actuelle, les essais concernant de nouvelles thérapies, des thérapies contrôlées ou encore les essais de contrôle sont enregistrés dans tous les pays développés.

Le sénateur Seidman : D'après vous, l'information qui est conservée est-elle complète?

Dr MacLeod : Je ne peux pas me prononcer là-dessus. Je pense que l'idée est de faire enregistrer le protocole. J'ignore dans quelle mesure les gens se conforment à cela, mais ils font certainement enregistrer l'essai, le nombre de patients y participant et le genre d'institution dans laquelle se déroule l'essai.

Le sénateur Seidman : L'essai est-il enregistré s'il est interrompu ou s'il y a retrait de participants?

Dr MacLeod : Oui, absolument. Une fois l'enregistrement effectué, il est obligatoire de faire rapport sur ce qui se passe.

Le sénateur Seidman : On collecte donc des données normalisées?

Dr MacLeod : Oui. Cependant, le principal incitatif pour cela est que l'enregistrement est obligatoire pour publier les résultats des essais dans un journal bien coté. Si vous n'avez pas fait enregistrer votre essai, alors les résultats ne seront pas publiés. Le secteur privé tient en fait plus que quiconque à faire cela, car il veut faire publier les résultats qu'il obtient.

Le sénateur Eggleton : J'aimerais faire un rapide commentaire là-dessus, et on y revient sans cesse. Il y a quelque chose qui ne ressort pas. Peut-être qu'on enregistre une part importante des essais et qu'il y a un bon degré de transparence, mais il arrive de temps à autre que nous entendions parler d'un essai qui n'a pas été enregistré, et vous avez même fait état d'éléments qui font défaut. D'aucuns disent que l'enregistrement devrait être obligatoire, comme c'est le cas en Europe et aux États-Unis.

J'aimerais vous interroger au sujet de déclarations faites à l'occasion d'une séance antérieure par des porte-parole de Santé Canada et selon lesquels les essais cliniques ne débouchent en définitive que sur très peu de médicaments considérés comme des découvertes. Ce qui en résulte souvent, ce sont des produits qui présentent peut-être une certaine valeur ajoutée. Ils sont légèrement supérieurs et le promoteur les verse dans le processus et considère qu'ils apportent quelque valeur. Or, il semble que l'élément valeur ajoutée ne soit pas évalué par Santé Canada.

Je devine que le médicament doit passer par le processus d'essais cliniques dans son entier, même s'il n'est que marginalement supérieur à un médicament qui est déjà sur le marché. Y aurait-il moyen de resserrer les choses pour ce que l'on pourrait peut-être appeler les médicaments d'imitation? Peut-être que ce serait possible. Que recommanderiez-vous en la matière? Devrions-nous, dans le cas de tels produits, procéder autrement par rapport à l'infrastructure traditionnelle des essais cliniques?

Dr MacLeod : Si vous saviez à l'avance que le médicament en question ne serait, pour finir, qu'un produit d'imitation, il serait facile de dire « Ne perdez pas votre temps ». Le problème est que, tant et aussi longtemps que l'essai n'a pas été effectué, vous ne savez pas si le produit en question est sensiblement supérieur ou inférieur aux autres traitements disponibles, alors je dirais qu'il est difficile de préjuger de la situation.

Dr Hill : Les centres universitaires membres de l'ACISU choisiraient de consacrer leurs ressources à des innovations ou à des innovations attendues dont ils jugeraient qu'elles seraient susceptibles d'avoir un effet, par opposition à des améliorations mineures. Je pense que c'est ce qui se passe. Arrêtons-nous sur le domaine de la pédiatrie — si vous regardez les essais qui sont en cours au Canada, il y a un essai visant un traitement à l'insuline d'action prolongée à posologie unique, et on est également en train de mettre à l'essai des pompes à insuline reliées à des senseurs de glucose pour déterminer si cela peut réduire le taux de complications diabétiques. De telles pompes devraient-elles être proposées au moment du diagnostic, ou quelques mois plus tard? Ce sont là des questions importantes qui auront des ramifications pour la santé pendant de nombreuses années à venir. Je contesterais la thèse voulant que nous ne choisissons pas d'éprouver des innovations à forte incidence.

Dr MacLeod : À la réunion sur les normes en matière de recherche pour la santé infantile à laquelle j'ai assisté à Winnipeg, il a beaucoup été question de ce que les gens appellent aujourd'hui le « gaspillage » en matière de recherche clinique. Encore une fois, il est facile de voir, rétrospectivement, qu'il se fait de nombreux essais et études qui n'en valaient pas la peine. Le problème est qu'il est difficile d'en juger à l'avance.

Le président : À la grande frustration des investisseurs et des compagnies les parrainant.

Dr MacLeod : On nous a dit à Winnipeg qu'il est chaque année dans le monde produit quelque 1,5 million de publications traitant de questions cliniques. Cela fait beaucoup de publications, et nous pourrions certainement nous débrouiller avec beaucoup moins que cela, et beaucoup moins d'essais.

Le président : Merci beaucoup. Nous avons entendu beaucoup de questions sur les raisons pour lesquelles le Canada n'est pas mieux organisé dans ces domaines. De fait, cela a été soulevé tout à l'heure concernant différents secteurs. Je pensais vous raconter, de manière anecdotique, une petite expérience que j'ai vécue il y a de cela quelques années. Un premier ministre de la Nouvelle-Écosse qui était médecin et qui était très désireux de lancer ce genre d'activité dans le Canada atlantique a cherché à organiser une initiative de promotion économique du Canada atlantique autour d'essais cliniques. C'était le Dr John Savage, qui était premier ministre. Il a réussi à faire venir en Nouvelle-Écosse, pour une réunion de fin de semaine, un groupe de représentants d'hôpitaux et de praticiens d'avant-garde de partout dans le Canada atlantique, et il m'a demandé de présider la séance.

J'ai remarqué à cette occasion qu'il y avait énormément de frictions entre les différents hôpitaux du Canada atlantique lorsqu'il était question de fournir des fonds à quelqu'un d'autre dans le cadre d'un projet collectif. Je n'avais guère relevé de désir de coopération parmi nombre des participants face à l'idée de s'organiser, et ce, en dépit du fait que le Dr Savage était entouré d'un certain nombre de conseillers. Il était, bien sûr, très calé dans nombre des domaines à l'étude, et il existe, bien sûr, dans le Canada atlantique, des sous-groupes de population, présentant des caractéristiques génétiques particulières, qui auraient pu offrir des possibilités intéressantes pour les essais cliniques.

Je suis encouragé par les témoignages que nous avons entendus, selon lesquels nous avons marqué quelques petits progrès, mais pour ce qui est d'organiser ce pays balkanisé, et ce même dans un domaine susceptible de nous bénéficier clairement à tous, sur les plans tant économique que social, il nous reste encore beaucoup de chemin à faire.

Honorables sénateurs, avant de remercier les témoins pour votre compte, il y a une petite information dont je tiens à vous faire part relativement au Règlement du Sénat et dont je vais maintenant vous faire lecture afin que cela figure au compte rendu.

Honorables sénateurs, ce matin, le sénateur Merchant a présenté une déclaration écrite d'intérêts personnels relativement à l'étude spéciale sur les produits pharmaceutiques sur ordonnance au Canada. Conformément à l'article 32.1 du Règlement du Sénat, la déclaration sera publiée dans le procès-verbal du comité.

Voilà qui met fin à l'intervention qu'il me revenait de faire conformément au Règlement du Sénat.

Cela étant maintenant chose faite, je tiens à tous vous remercier. Cette séance a été fort bonne. Je vous suis reconnaissant de votre franchise et de tout le savoir dont vous nous avez fait part. Vous avez beaucoup d'intérêts semblables, mais vous nous avez livré aujourd'hui des témoignages très variés. J'espère que vous aurez pu constater que mes collègues ont beaucoup apprécié votre participation aujourd'hui. Je tiens à vous remercier en leur nom d'avoir comparu devant nous aujourd'hui. S'il vous venait ultérieurement à l'esprit autre chose, un de ces exemples uniques, le genre de chose qui vous amènerait à vous dire « Dommage que je n'aie pas pensé à cet exemple particulier », ou s'il y a autre chose dont vous pensez que nous pourrions bénéficier et que vous pourriez nous exposer, je vous demanderais de communiquer avec la greffière du comité et de nous en fournir le détail, à moins que nous ne soyons pas autorisés à en prendre connaissance.

Sur ce, je clos la séance.

(La séance est levée.)


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