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SOCI - Comité permanent

Affaires sociales, sciences et technologie

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie

Fascicule 23 - Témoignages du 24 octobre 2012


OTTAWA, le mercredi 24 octobre 2012

Le Comité permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit aujourd'hui, à 16 h 18, pour mener son étude sur les produits pharmaceutiques sur ordonnance au Canada (sujet : surveillance après approbation).

Le sénateur Kelvin Kenneth Ogilvie (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Honorables sénateurs, je déclare la séance ouverte.

[Français]

Je vous souhaite la bienvenue au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.

[Traduction]

Le président : Je m'appelle Kelvin Ogilvie. Je suis sénateur de la Nouvelle-Écosse et président du comité. Je vais demander à mes collègues de se présenter eux-mêmes, en commençant par ceux à ma gauche.

Le sénateur Eggleton : Sénateur Art Eggleton, de Toronto, vice-président du comité.

Le sénateur Dyck : Sénateur Lillian Dyck, de la Saskatchewan.

Le sénateur Enverga : Sénateur Tobias Enverga, de l'Ontario.

[Français]

Le sénateur Verner : Josée Verner du Québec.

[Traduction]

Le sénateur Seth : Asha Seth, de Toronto, en Ontario.

Le sénateur Martin : Yonah Martin, de la Colombie-Britannique.

Le sénateur Seidman : Judith Seidman, de Montréal, au Québec.

Le président : Je tiens à souhaiter la bienvenue aux témoins. Ce sont eux qui ont décidé de l'ordre dans lequel ils présenteront leur exposé, et je vais les accueillir dans cet ordre. Je souhaite la bienvenue à Carole Bouchard, directrice générale, Association nationale des organismes de réglementation de la pharmacie.

Carole Bouchard, directrice générale, Association nationale des organismes de réglementation de la pharmacie : Bon après- midi, honorables sénateurs. Je suis heureuse de me présenter devant le comité aujourd'hui. L'association que je représente croit comprendre que le comité mène une étude globale sur les produits pharmaceutiques sur ordonnance au Canada, et que la présente discussion porte sur le système de surveillance post-approbation relatif à ces produits. Nous sommes heureux d'avoir été invités à exposer notre point de vue sur cet important sujet. Permettez-moi d'abord de vous expliquer qui nous sommes. L'ANORP — l'Association nationale des organismes de réglementation de la pharmacie — est une organisation sans but lucratif qui représente tous les organismes provinciaux et territoriaux de réglementation de la pharmacie. Son mandat est de protéger le public. Parmi ses organisations membres, mentionnons les services de pharmacie des Forces canadiennes.

Nos membres jouent un rôle clé pour veiller à ce que des méthodes de réglementation optimales soient en place afin d'assurer un milieu de pratique sécuritaire, et ce, dans l'intérêt de tous les Canadiens.

À titre informatif, je vous signale que plus de 35 000 pharmaciens ont reçu une licence de nos membres pour pratiquer la pharmacie partout au pays et exercer leurs activités dans le cadre de pratiques et d'exigences réglementaires précises.

L'exposé que je présenterai aujourd'hui aux membres du comité se divise en quatre parties principales. Tout d'abord, je vais vous donner une vue d'ensemble des activités de surveillance post-approbation; ensuite, je vous parlerai du rôle que jouent les pharmaciens dans le cadre de la surveillance post-approbation, plus particulièrement en ce qui concerne la déclaration des effets indésirables; après cela, j'aborderai la question des difficultés que pose la déclaration des effets indésirables et des occasions à saisir en la matière; enfin, je me pencherai sur d'autres questions que le comité devrait, selon nous, examiner dans le cadre de son étude.

Durant mon exposé, j'utiliserai le terme « produits de santé » au lieu du terme « produits pharmaceutiques » de manière à englober l'ensemble des produits approuvés par Santé Canada qui se trouvent sur le marché canadien et qui doivent faire l'objet d'une surveillance. Il est important de souligner que l'ANORP soutient l'ensemble du système d'assurance de l'innocuité des médicaments en place au Canada, à savoir toutes les activités menées avant et après l'approbation des médicaments. Nous estimons que les activités menées au cours de la période post-approbation sont aussi importantes que celles qui font partie du processus d'approbation des médicaments, à savoir les activités qui précèdent la commercialisation.

La déclaration des effets indésirables constitue un élément fondamental des activités de surveillance post- approbation.

Cela me mène à la deuxième partie principale de mon exposé. Les pharmaciens continuent de jouer un rôle important sur le plan de la déclaration des effets indésirables. Cette activité s'appuie sur un éventail de normes professionnelles, de codes d'éthique et de règlements administratifs élaborés par nos membres. On s'attend d'un pharmacien en exercice qu'il déclare les effets indésirables des médicaments. En tant qu'experts de la gestion des médicaments, les pharmaciens jouent un rôle clé au sein du système de soins de santé. Ils travaillent en collaboration avec d'autres professionnels de la santé pour veiller à ce que le meilleur traitement médicamenteux possible soit dispensé aux patients. La déclaration des effets indésirables est une activité que les professionnels de la santé exécutent de façon volontaire. Selon les pharmaciens, d'un point de vue réglementaire, il n'existe aucune raison impérieuse de modifier le régime de manière à ce que la déclaration des effets indésirables devienne une activité obligatoire. À notre avis, cela aurait pour effet d'accroître non pas la qualité des déclarations des effets indésirables, mais l'ampleur des difficultés, par exemple en ce qui concerne l'incapacité d'appliquer de telles mesures.

J'ai assisté tout récemment au congrès mondial tenu à l'occasion du centenaire de la Fédération internationale pharmaceutique, où des représentants du Centre collaborateur de l'OMS pour la pharmacovigilance internationale ont insisté sur l'importance de la déclaration spontanée et volontaire des effets indésirables des médicaments par les professionnels de la santé. Même si je viens d'indiquer que nous continuons de soutenir l'actuelle stratégie canadienne en matière de surveillance post-approbation, j'aimerais parler aux membres du comité — il s'agira de la troisième partie de mon exposé — des difficultés et des occasions liées à la déclaration des effets indésirables des médicaments.

Au cours des dernières années, des améliorations ont été apportées à l'ensemble du système de pharmacovigilance de Santé Canada. Les priorités du gouvernement devraient être de continuer à améliorer le système et de s'assurer que Santé Canada dispose du pouvoir nécessaire pour imposer des changements en ce qui concerne des produits donnés. Un changement profond de culture demeure requis. Il faut continuer, au moyen d'activités d'éducation et de communication, à mieux faire connaître l'importance de la déclaration des effets indésirables à établir clairement les attentes. L'élaboration accrue de solutions technologiques conviviales contribuera à la déclaration des effets indésirables des médicaments et à l'intégration de cette activité aux tâches quotidiennes des praticiens. Des mécanismes efficaces d'analyse et de communication des données faisant en sorte que les professionnels de la santé ont accès, de façon opportune, à des rétroactions éclairées, permettront de soutenir la pratique de la déclaration.

Nous devons également réfléchir au rôle joué par les divers intervenants. Si l'attention et la volonté de toutes les parties concernées sont axées sur le fait de rendre prioritaire la déclaration des effets indésirables, cette activité continuera d'être de plus en plus pratiquée, comme cela s'est produit dans le passé, sans qu'il soit nécessaire de la rendre obligatoire.

Enfin, j'aimerais aborder d'autres questions que nous aimerions soumettre à l'attention du comité, et sur lesquelles il devrait, selon nous, se pencher dans le cadre de son étude. Comme le comité semble se concentrer principalement sur les produits pharmaceutiques d'ordonnance, il est impératif que nous insistions sur le fait que les activités de surveillance post-approbation doivent également s'appliquer aux produits pharmaceutiques en vente libre, c'est-à-dire les produits qui n'exigent aucune ordonnance. Sur le marché canadien, il y a plus de produits de santé en vente libre que de produits de santé sur ordonnance. Selon les chiffres publiés en février dernier, on trouvait sur ce marché quelque 8 400 produits sur ordonnance, et près de 47 000 produits en vente libre, y compris les produits de santé naturels. Ces chiffres concernent les produits destinés à la consommation humaine.

On ne peut pas faire abstraction de ces produits en vente libre en faisant valoir qu'aucune pharmacovigilance n'est requise à leur sujet. En fait, c'est le contraire qui est vrai : tous ces produits doivent être visés par les activités de pharmacovigilance, car ils posent divers degrés de risque.

Le nombre de produits de santé en vente libre augmentera probablement dans l'avenir, comme on l'a expliqué durant le congrès auquel j'ai assisté récemment. Un nombre croissant de membres de l'industrie soumettent des demandes pour que certains de leurs produits sur ordonnance deviennent des produits en vente libre — il s'agit d'une tendance mondiale. Dans certains cas, il s'agit de médicaments que les patients doivent prendre de façon permanente. Si l'on garde cela présent à l'esprit, et selon la nature des produits faisant l'objet de telles demandes qu'examine Santé Canada, les activités de pharmacovigilance deviennent d'autant plus impératives.

Notre association administre un programme dans le cadre duquel on élabore des recommandations à l'intention des gouvernements provinciaux et territoriaux en ce qui a trait aux meilleurs points de vente et aux meilleures modalités de vente des produits sans ordonnance. Ce programme, créé dans les années 1990 par Santé Canada et d'autres intervenants, y compris l'industrie, peut être touché par des changements apportés à l'échelon fédéral. Pour renforcer la surveillance post-approbation des produits en vente libre, le gouvernement du Canada doit collaborer avec notre association et d'autres intervenants afin de veiller à ce que le système et le programme en place fassent partie d'un ensemble d'activités essentielles menées avant et après l'approbation des produits.

Un autre élément de la plus haute importance pour l'association que je représente tient au fait de veiller à ce que l'approvisionnement en médicaments au Canada permette de répondre aux besoins continus des Canadiens. Au cours des quelques dernières années, le Canada a été aux prises avec des pénuries de médicaments, ce qui peut poser des problèmes pour les Canadiens. Nous devons prévenir cela. L'ANORP a souscrit aux recommandations formulées dans un rapport rédigé plus tôt cette année par quatre organisations de professionnels de la santé du Québec, y compris notre organisation membre de réglementation de la pharmacie. Dans ce rapport, les auteurs demandent expressément au gouvernement du Canada de prendre, dans l'intérêt public, un certain nombre de mesures. Entre autres, les auteurs demandent que les ministères fédéral, provinciaux et territoriaux de la Santé élaborent une vision et un plan d'action nationaux pour garantir l'accès aux produits médicalement nécessaires, que Santé Canada adapte ses règlements et ses programmes pour régler le problème des pénuries de médicaments, et que l'on adopte des dispositions législatives exigeant que les fabricants fournissent un préavis de un an avant de cesser volontairement de fabriquer un médicament. Certes, les avantages et les profils de risque des produits de santé sur ordonnance et en vente libre doivent faire l'objet d'une surveillance, mais le maintien d'un stock de produits de santé suffisant pour répondre aux besoins essentiels des Canadiens est tout aussi impératif. Nous espérons que les membres du comité se pencheront sur cette question, car on peut faire valoir, sous l'angle de la protection du public, que le repérage des pénuries anticipées fait partie des activités de pharmacovigilance.

Monsieur le président, honorables sénateurs, la surveillance post-approbation comprend d'autres éléments, par exemple le mauvais usage des médicaments sur ordonnance et l'intégrité de notre chaîne d'importation et distribution de médicaments. Je suis consciente du fait que j'ai élargi la portée des activités de pharmacovigilance d'une manière qui contraste peut-être avec celle des autres témoins qui se sont présentés devant vous. Toutefois, il est essentiel de faire cela, car les activités de surveillance devraient être axées non pas sur les médicaments, mais sur les patients.

Le comité se penche aujourd'hui sur un vaste sujet sur lequel il y a bien des choses à dire. Cependant, vu le temps qui m'est alloué, je m'arrêterai ici. Je vous remercie une fois de plus d'avoir donné l'occasion à notre association de se présenter devant vous. Je serai heureuse de répondre à vos questions.

Le président : Merci beaucoup.

Nous allons maintenant passer aux représentantes de l'Association médicale canadienne, à savoir la Dre Reid, présidente, et Millicent Toombs, directrice, Département de la santé publique.

Dre Anna Reid, présidente, Association médicale canadienne : Bon après-midi, monsieur le président, et merci beaucoup.

L'Association médicale canadienne est heureuse de témoigner devant le comité dans le cadre de la deuxième phase de son étude concernant les médicaments sur ordonnance. En tant que nouvelle présidente de l'AMC, je tiens à mentionner que nous sommes reconnaissants au comité de son invitation.

Durant notre précédent témoignage devant le comité, nous avions exposé notre position sur les essais cliniques et le processus d'homologation des médicaments. Aujourd'hui, je parlerai du système de surveillance post-commercialisation.

Les médicaments sur ordonnance constituent un élément crucial de la prestation de soins de santé de haute qualité et rentables, et c'est pourquoi l'AMC continue d'exhorter le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et territoriaux à tenir leur promesse de longue date d'élaborer une stratégie nationale sur les produits pharmaceutiques. Tous les Canadiens auraient ainsi accès en temps opportun à un approvisionnement adéquat en médicaments sur ordonnance efficaces et sûrs, et c'est la recommandation globale que nous formulons aujourd'hui.

J'utiliserai le temps qui m'est alloué aujourd'hui pour parler des deux éléments constitutifs de cette recommandation, à savoir « des médicaments sur ordonnance efficaces et sûrs » et « un approvisionnement adéquat ».

En ce qui concerne le fait de veiller à l'innocuité et à l'efficacité des médicaments, je mentionnerai que l'AMC appuie un cadre réglementaire solide et un système de recherche et d'homologation de nouveaux produits pharmaceutiques. Or, même le meilleur système de précommercialisation n'est pas en mesure de repérer tous les problèmes que peut poser un nouveau médicament; bien des problèmes ne se manifestent qu'après une utilisation généralisée et à long terme. C'est pourquoi il est essentiel que le Canada se dote d'un cadre réglementaire solide et d'un système permettant de surveiller les médicaments sur ordonnance après leur commercialisation.

Nous croyons qu'un tel système devrait comporter trois éléments. Le premier consiste en des mécanismes complets de collecte de données sur l'innocuité et l'efficacité des médicaments. Vu que les déclarations des effets indésirables des médicaments par les médecins et les autres professionnels de la santé sont une source importante de données, Santé Canada devrait encourager de telles déclarations en rendant le système le plus convivial possible. À cette fin, on pourrait notamment incorporer le formulaire de déclaration directement dans les systèmes de dossiers médicaux électroniques au moment de leur mise au point.

Le deuxième élément est la capacité d'analyse rigoureuse des données. La collecte de renseignements ne constitue pas en soi une surveillance post-commercialisation. La surveillance et l'analyse effectuées après la réception d'une déclaration d'effet indésirable de médicament importent davantage. Nous croyons que Santé Canada devrait cultiver une capacité d'analyse prompte et rigoureuse, ce qui lui permettrait de repérer rapidement les déclarations qui indiquent un risque grave pour la santé.

La surveillance post-commercialisation doit aussi fournir de l'information sur l'efficacité et l'efficience d'un médicament. Produit-il pour la santé les résultats pour lesquels il est mis sur le marché? Offre-t-il un meilleur rendement que d'autres médicaments ou thérapies pour ce qui est de traiter un problème semblable?

Le troisième élément essentiel consiste en une communication efficace. Quand un risque pour la santé ou d'autres nouveaux renseignements au sujet d'un médicament sur ordonnance sont découverts, il faut communiquer cette information aux médecins et aux autres professionnels de la santé aussi rapidement que possible et les conseiller sur ce qu'ils doivent faire : devraient-ils surveiller plus étroitement ou interrompre la prise d'un médicament? Près du quart des nouveaux médicaments homologués au Canada finiront par faire l'objet d'un avertissement sérieux concernant l'innocuité.

Compte tenu des risques pour la sécurité des patients, l'AMC est également d'avis que Santé Canada devrait avoir le pouvoir, entre autres, d'imposer des études post-commercialisation sur les médicaments nouvellement homologués si des études cliniques établissent qu'ils peuvent poser des risques, et d'intervenir en conséquence, ce qui pourrait se traduire par le retrait d'un produit du marché dans le cas où la recherche post-commercialisation révèle de nouveaux problèmes d'innocuité.

Je voudrais maintenant parler de l'élément essentiel que constitue le fait de veiller à un approvisionnement adéquat en médicaments. L'AMC, comme bien d'autres organisations, est profondément préoccupée par les pénuries de médicaments qui persistent au pays. Nous estimons que la surveillance de l'approvisionnement en médicaments et le suivi des pénuries de médicaments sont essentiels à l'efficacité de la surveillance post-approbation.

Dans le cadre d'une enquête menée par l'AMC auprès de médecins en septembre 2012, les deux tiers des répondants ont déclaré que les pénuries de médicaments avaient des répercussions importantes sur le soin des patients et leur état de santé. Une proportion de 70 p. 100 de ces médecins a mentionné qu'ils avaient dû prescrire un médicament moins efficace, et que 20 p. 100 des patients avaient subi une détérioration clinique occasionnée par la substitution de médicaments. En outre, environ un quart des répondants ont déclaré que leurs patients avaient connu des difficultés financières en raison du coût du médicament substitué, car bon nombre des médicaments en rupture de stock sont des médicaments génériques moins récents qui coûtent moins cher.

Les médecins ont aussi exprimé leur frustration face au temps que prend la recherche de médicaments de remplacement appropriés, temps qui pourrait être mieux employé à soigner les patients. Bien que les compagnies pharmaceutiques appuient à présent un site Web sur le signalement des pénuries de médicaments, le site en question ne semble pas répertorier toutes les pénuries de médicaments, et il ne comporte pas de fonctions de recherche permettant aux utilisateurs de trouver facilement des produits. En outre, il serait utile pour les médecins qu'un tel site offre un mécanisme permettant d'obtenir des informations sur des médicaments de remplacement, le cas échéant.

Enfin, l'AMC préconise l'ouverture d'une enquête sur les causes sous-jacentes des pénuries de médicaments sur ordonnance. Nous recommandons que Santé Canada collabore avec les gouvernements provinciaux et territoriaux, les groupes de l'industrie et les professionnels de la santé pour trouver des solutions.

En conclusion, l'AMC tient à féliciter le comité de porter ces questions importantes à l'avant-scène. Nous, médecins du Canada, sommes prêts à travailler avec les gouvernements, les professionnels de la santé et le public pour renforcer le système canadien de surveillance post-approbation et faire en sorte que les médicaments sur ordonnance soient efficaces, sûrs et accessibles aux gens qui en ont besoin.

Le président : Merci beaucoup.

Je cède maintenant la parole à Mme Barbara Mildon, présidente de l'Association des infirmières et infirmiers du Canada.

Barbara Mildon, présidente, Association des infirmières et infirmiers du Canada : Merci de me donner l'occasion d'exposer le point de vue des infirmières et infirmiers sur l'importance de la surveillance post-approbation des produits pharmaceutiques sur ordonnance.

L'Association des infirmières et infirmiers du Canada représente plus de 146 000 infirmières et infirmiers autorisés — le principal groupe de fournisseurs de soins de santé au pays. Le personnel infirmier autorisé a des rapports plus fréquents et plus réguliers avec les patients que la plupart des autres professionnels de la santé. Par conséquent, nous estimons que nos points de vue sur deux questions clés sont importants.

Premièrement, un nombre insuffisant de cas d'effets indésirables des médicaments sont déclarés, et il est possible d'accroître ce nombre au moyen de processus conviviaux et de campagnes d'information de Santé Canada. Deuxièmement, la surveillance post-commercialisation des produits pharmaceutiques sur ordonnance doit être financée et analysée adéquatement de manière à ce qu'elle puisse être effectuée de manière sûre et efficace. Un effet indésirable est une réaction imprévue et néfaste à un médicament sur ordonnance. Les effets indésirables constituent une grave menace pour une multitude de Canadiens qui prennent des produits pharmaceutiques sur ordonnance en vue de maîtriser et traiter leur état de santé. Les effets indésirables des médicaments sont l'une des 10 principales causes de décès au Canada. Lorsqu'ils sont consommés et gérés de façon appropriée, les produits pharmaceutiques contribuent de façon notable à la santé des Canadiens. Les médicaments sur ordonnance ont permis à de nombreux patients de prévenir une maladie grave, de réduire la durée de leur séjour à l'hôpital, d'éviter une intervention chirurgicale, d'accéder à un plus grand bien-être et d'améliorer leur capacité de fonctionner de manière productive dans la collectivité. Ces avantages atténuent souvent d'autres coûts liés aux soins de santé.

En 2011, Santé Canada a reçu plus de 27 000 déclarations d'effets indésirables au Canada. D'après les experts, cela ne représente qu'un faible pourcentage — entre 1 et 10 p. 100 — des effets indésirables occasionnés par des médicaments.

La Fondation canadienne de la recherche sur les services de santé estime que 95 p. 100 des effets indésirables des médicaments ne sont pas déclarés au Canada. On croit que plusieurs facteurs contribuent à ce faible taux de déclaration. Tout d'abord, les fournisseurs de soins de santé ne sont pas tenus de faire de déclaration d'effets indésirables des médicaments, laquelle est facultative. Selon les données probantes, la gravité de la réaction et la charge de travail des fournisseurs de soins de santé influent sur les taux de déclaration. Les fournisseurs ont diverses tâches difficilement conciliables à effectuer durant leurs heures de travail, ce qui rend difficile le signalement des effets indésirables, d'autant plus que ces fournisseurs sont déjà submergés par des tâches administratives.

Les protocoles institutionnels ont également une incidence sur les taux de déclaration. Certains obstacles doivent être supprimés, par exemple la multiplicité des échelons au sein des filières hiérarchiques ou l'absence de politiques claires et accessibles. Une norme applicable à tous les secteurs du système de soins de santé doit être fixée en ce qui a trait à la déclaration des effets indésirables.

L'Association des infirmières et infirmiers du Canada — l'AIIC — recommande que le personnel infirmier autorisé participe davantage au signalement des effets indésirables des médicaments. Dans les hôpitaux, les cliniques de santé communautaires, les établissements de soins de longue durée et bien d'autres établissements, les infirmières et infirmiers autorisés sont les professionnels de la santé qui sont le plus fréquemment en contact avec les patients. En raison de leur présence constante, ils sont susceptibles d'être les mieux à même de comprendre les symptômes et la réaction d'un patient qui subit ou a subi un effet indésirable d'un médicament.

Le personnel infirmier autorisé est un maillon essentiel de la chaîne d'innocuité, et son savoir et son leadership doivent faire partie intégrante de l'élaboration d'un mandat national exhaustif en ce qui a trait à la sûreté et à la qualité de soins de santé et des services de santé.

L'AIIC recommande également que les dossiers électroniques de santé comprennent un mécanisme de déclaration des effets indésirables des médicaments qui permettrait de faire en sorte que les déclarations soient plus opportunes et plus cohérentes.

Les taux de déclaration sont bas, mais ils ont augmenté considérablement au cours de la dernière décennie. Cela est attribuable notamment aux efforts qui ont été déployés pour encourager les consommateurs à signaler les effets indésirables. L'AIIC recommande que Santé Canada accroisse le taux de déclaration par les consommateurs au moyen de processus de déclaration conviviaux et accessibles aux patients et au public, de campagnes d'information encourageant la déclaration et d'initiatives de sensibilisation à la surveillance post-commercialisation.

En outre, l'AIIC recommande que Santé Canada prenne des mesures pour faire en sorte que le système de surveillance post-approbation comprenne des processus simples, exhaustifs et conviviaux qui permettent aux fournisseurs de soins de santé de signaler promptement les effets indésirables des médicaments. À l'heure actuelle, la pharmacovigilance relève de la Direction des produits de santé commercialisés de la Direction générale des produits de santé et des aliments de Santé Canada.

Cette direction est considérablement moins importante que l'organisation de cette direction générale chargée du processus d'approbation des médicaments. Par conséquent, le personnel infirmier a soulevé des préoccupations concernant la capacité de la Direction des produits de santé commercialisés d'étudier et d'analyser adéquatement les rapports et de renvoyer les renseignements requis aux médecins et au personnel infirmier pertinents. De fait, le personnel infirmier autorisé a indiqué que la déclaration d'effets indésirables des médicaments ressemble souvent à une communication à sens unique, vu qu'aucun résultat d'enquête ni aucune recommandation ne lui sont transmis.

Des ressources adéquates doivent être allouées au Programme Canada Vigilance pour que l'on puisse analyser rigoureusement les rapports de manière à ce que les menaces importantes en matière d'innocuité des médicaments soient repérées et que les systèmes de communication transmettent des renseignements utiles et une rétroaction aux fournisseurs de soins de santé et au public.

Comme d'autres témoins l'ont mentionné au comité, tant les médicaments approuvés récemment que les traitements médicamenteux de longue date peuvent occasionner des effets secondaires ou indésirables lorsqu'ils sont utilisés sur une longue période. Vu que la plupart des essais cliniques sont menés sur de courtes périodes et auprès de populations relativement saines, les effets que les médicaments auront à long terme sur des Canadiens jeunes ou âgés, sur les femmes et sur les personnes présentant de multiples troubles de santé et prenant plusieurs médicaments n'ont pas toujours été étudiés à fond. Au bout du compte, aucun effort ne doit être ménagé pour évaluer l'efficacité et l'innocuité réelles et concrètes des produits pharmaceutiques sur ordonnance.

La prestation de soins sûrs, judicieux et éthiques aux patients du système de santé est une responsabilité partagée. Elle exige la mobilisation et la participation de toutes les instances — y compris les patients, le public, les fournisseurs de soins, les équipes multidisciplinaires, les professions de la santé et le système de santé —, de même que le leadership et le soutien de tous les échelons de gouvernement. Une collaboration et un échange de renseignements accrus entre les professionnels des soins de santé sont absolument indispensables pour assurer et promouvoir la sûreté des patients au Canada.

Les commentaires que j'ai formulés s'inscrivent dans le contexte plus large de la nécessité d'une stratégie pharmaceutique nationale comprenant un plan exhaustif portant non seulement sur la consommation sûre et appropriée des médicaments, mais également sur l'accès universel et équitable de tous les Canadiens aux produits pharmaceutiques. Le comité a reconnu qu'il était important d'aller de l'avant avec cette stratégie dans la recommandation 28 de son étude sur l'accord de santé de 2004. Nous appuyons les efforts que vous déployez pour faire progresser les choses en ce qui concerne une stratégie pharmaceutique nationale exhaustive, et les infirmières et infirmiers du Canada sont prêts à jouer le rôle de partenaires dans l'avenir et à contribuer à l'élaboration de cette stratégie. Je vous suis reconnaissante de nous avoir offert l'occasion de nous présenter ici, et j'ai hâte de répondre à vos questions. Merci.

Le président : Merci à tous. Je crois que les renseignements très intéressants que vous nous avez transmis correspondent à ce que nous souhaitions entendre. Je suis certain que mes collègues auront beaucoup de questions à vous poser.

Le sénateur Eggleton : Merci de vos exposés. Vous avez formulé de nombreuses bonnes recommandations. J'ai remarqué qu'au moins deux d'entre vous ont évoqué les pénuries de médicaments. Il s'agit d'un sujet dont nous devrions probablement parler un peu plus. Je constate que l'industrie pharmaceutique veut que nous traitions non seulement des médicaments sur ordonnance, mais également des médicaments en vente libre — il y en a quelque 46 000, soit un très grand nombre. Il nous faudrait un bon moment pour examiner cela, mais j'estime que vous avez soulevé quelques bons points à ce propos.

Je vous sais gré de vos commentaires concernant la stratégie pharmaceutique nationale. Oui, nous avons absolument besoin d'une telle stratégie.

J'aimerais vous poser une question à propos des déclarations d'effets indésirables des médicaments. On nous a dit que, d'après les estimations, plus de 50 p. 100 des médicaments nouvellement approuvés ont de graves effets secondaires, mais que seulement 10 p. 100 de ces effets sont signalés. Je crois que Mme Mildon a souligné qu'il y avait un problème de sous-déclaration, et vous avez formulé quelques recommandations sur les mesures à prendre pour tenter d'y remédier.

Deux d'entre vous ont également suggéré que l'on ait davantage recours aux dossiers médicaux électroniques, que l'on utilise la technologie de manière plus efficace. On a également soulevé l'idée de rendre la déclaration obligatoire — cette idée figurait dans le projet de loi C-51 que le gouvernement a déposé en 2008, et qui est mort au Feuilleton. Mme Bouchard, je crois, a mentionné qu'elle n'était pas d'avis que cela devait être obligatoire, mais j'aimerais que les deux autres témoins nous donnent leur avis sur cette question, et qu'ils nous indiquent quelles mesures devraient être prises pour hausser le nombre de déclarations si celles-ci ne sont pas obligatoires.

Vous avez fait observer que divers éléments, par exemple les dossiers médicaux électroniques contribueraient à cela. Toutefois, des représentants de Santé Canada se sont présentés devant le comité et lui ont dit que les mesures qu'ils ont prises n'ont toujours pas permis de hausser le taux de déclarations à un seuil convenable. Si la déclaration des effets indésirables n'est pas obligatoire, qu'est-ce qui permettra de stimuler vraiment le système de déclaration?

Dre Reid : En effet, l'AMC n'a pas réclamé l'instauration d'un système de déclaration obligatoire, et cela s'explique par un certain nombre de raisons. L'une d'entre elles tient à ce qu'il ne sert à rien de mettre en place un système de déclaration obligatoire s'il n'existe aucun mécanisme d'application de l'obligation. À notre avis, il est préférable de déployer des efforts pour améliorer le système de déclaration volontaire.

En tant que clinicienne active, je peux vous dire que, au fil des ans, le fait de tenter de trouver comment signaler un effet indésirable d'un médicament était une expérience ahurissante. Il fallait fouiller sur le site Web de Santé Canada, et ce n'était pas convivial. Nous croyons comprendre que Santé Canada commence à utiliser un système de déclaration électronique en ligne. Il n'est plus nécessaire d'envoyer les rapports par télécopieur comme nous devions le faire jusqu'à tout récemment, procédure qui nous semblait très archaïque. Santé Canada a apporté des changements, et nous félicitons le ministère. Nous croyons que les choses doivent changer encore plus rapidement. Il s'agit d'un problème très grave.

L'un des problèmes tient au fait qu'il est difficile de trouver le formulaire, et aux tracas occasionnés par la procédure de transmission.

Comme nous ne disposons pas d'un bon système d'étiquetage, les médecins reçoivent peu de renseignements à propos des médicaments qui pourraient être commercialisés et qui sont susceptibles de causer un problème. Par exemple, la FDA appose sur l'étiquette de certains médicaments un encadré noir contenant une mise en garde. Il s'agit du genre de mesures qui permettraient aux médecins d'être mieux informés d'un problème pouvant être occasionné par un médicament, et nous permettraient de suivre d'un peu plus près ce qui se fait ailleurs.

Une foule de mesures peuvent être prises, entre autres avec les dossiers médicaux électroniques, pour intégrer directement ces formulaires dans les dossiers médicaux de manière à vraiment améliorer les choses. S'il ne suffit que d'appuyer sur une autre touche, cela rend les choses beaucoup plus faciles.

Le sénateur Eggleton : Qu'en est-il des rétroactions de Santé Canada? Est-ce que vous en recevez beaucoup?

Dre Reid : Non. Je dois dire que, au cours de mes 25 années de carrière, j'ai transmis plus qu'une poignée de déclarations d'effets indésirables des médicaments, mais que je n'ai jamais reçu la moindre rétroaction. Elles ont été transmises dans le vide, pour ainsi dire.

Le président : Madame Mildon, auriez-vous l'amabilité de répondre à la question?

Mme Mildon : L'Association des infirmières et infirmiers du Canada ne croit pas que le fait de rendre ce processus obligatoire soit la chose à faire. Plusieurs raisons expliquent cette position : les signes et les symptômes de multiples maladies peuvent se recouper; des soins épisodiques peuvent entraîner des retards; en outre, certains médicaments ont des effets secondaires prévus. Par exemple, il est bien connu que les antibiotiques ont des effets secondaires sur le système gastro-intestinal. Cela risque de créer de la confusion.

On doit également se poser la question suivante : à qui s'appliquera cette obligation? À celui qui a prescrit le produit pharmaceutique ou au membre du personnel infirmier qui prodigue des soins? Le fait de rendre obligatoire la déclaration soulève plusieurs questions.

Nous sommes assurément d'avis que, comme la Dre Reid vient de le mentionner, le renforcement des processus et la mise au point d'autres processus constitueraient des mesures beaucoup plus efficaces au moment d'accroître le taux de déclarations.

Le président : Merci.

Sénateur?

Le sénateur Eggleton : Je pense qu'elle a fait valoir son point de vue sur cette question.

Mme Bouchard : Je pourrais en dire davantage.

Le sénateur Eggleton : Au fil des ans, nous avons dû déployer des efforts considérables pour amener les gens à participer à la mise en œuvre des dossiers médicaux électroniques. J'imagine que l'on peut dire qu'Inforoute Santé Canada a joué un rôle de premier plan à ce chapitre. Est-ce que cette organisation fait ou peut faire quelque chose pour améliorer le système de déclaration des effets indésirables?

Le président : Docteure Reid, avez-vous des commentaires à formuler à propos de ce qu'a fait Inforoute Santé Canada à cet égard?

Le sénateur Eggleton : Je me demande si nous ne devrions pas recommander que quelque chose soit fait dans le cadre de son travail.

Dre Reid : À mon avis, ce n'est pas à Inforoute Santé Canada qu'il revient de faire cela. Il y a de nombreux systèmes de dossiers médicaux électroniques au pays. Certains fonctionnent bien, d'autres non. Ces systèmes ne sont pas bien coordonnés, et dans certaines administrations, il n'y a pas de volonté politique d'aider les médecins et les autres professionnels de la santé à mettre ces systèmes en route ni de financement à cette fin.

Je ne crois pas que ce soit nécessairement la responsabilité d'Inforoute Santé Canada de faire cela. Toutefois, si nous décidons effectivement que nous voulons rendre plus facile la déclaration des effets indésirables par les professionnels de la santé, les pharmaciens et le public, j'estime que nous devrons réfléchir à la manière dont nous intégrerons cela aux dossiers médicaux électroniques. C'est faisable, mais je ne pense pas qu'Inforoute Santé Canada soit nécessairement l'organisation qui devrait diriger cela.

Mme Bouchard : Il n'est pas nécessaire que cela soit fait par Inforoute Santé Canada. Cela dit, nous soutenons les mesures visant à faciliter la déclaration électronique des effets indésirables des médicaments. Cela est vraiment essentiel. En outre, j'aimerais insister sur le fait qu'il est important que le gouvernement, plus particulièrement Santé Canada, s'assure de prendre également en considération l'incidence que peuvent avoir les modifications des politiques, des lignes directrices et des dispositions législatives sur les systèmes électroniques en place.

Par exemple, l'entrée en vigueur du Règlement sur les produits de santé naturels a créé, dans un premier temps, quelques difficultés, et continue d'en occasionner. De fait, ce texte législatif a instauré une nouvelle catégorie de produits, les « produits de santé naturels », mais quelques-uns des fournisseurs de logiciels offrant des services aux établissements de santé avaient supprimé cette catégorie de produits de leur système. Par conséquent, les pharmaciens, qui utilisent parfois ces systèmes pour mettre le doigt sur une interaction médicamenteuse ou un autre problème posé par un produit, n'étaient plus en mesure de le faire.

Ces renseignements nous provenaient de la base de données sur les produits pharmaceutiques de Santé Canada. Il nous a fallu un bon moment pour réussir à convaincre le ministère de modifier sa base de données sur les produits pharmaceutiques de manière à faire en sorte qu'elle contienne les outils et les renseignements appropriés de manière à ce qu'elle aide et soutienne réellement les professionnels de la santé, plus particulièrement les pharmaciens. Tout cela est lié à la question des effets indésirables des médicaments. Au bout du compte, ce que nous voulons éviter, c'est que des patients utilisent deux produits occasionnant une interaction médicamenteuse parce qu'aucune mise en garde concernant un tel effet ne figurait sur l'étiquette de ces produits. Je pense que tout le monde aimerait et accepterait que nous tentions d'éviter les situations de ce genre. Cela devrait être l'objectif.

[Français]

Le sénateur Verner : Merci d'être ici aujourd'hui. Mes questions vont dans le même sens que celles du sénateur Eggleton au sujet des déclarations des effets indésirables. Dans la population, pour une majorité, à part les patients qui sont hospitalisés ou qui sont dans des centres pour personnes âgées, on sait que souvent, la première porte d'entrée dans le système, ce sont les pharmaciens.

Tu vas chercher une prescription d'un médicament que ton médecin a prescrit et ton premier contact avec ton médicament, c'est le pharmacien. Madame Bouchard, vous faites une déclaration assez claire à la page 5 de votre déclaration. Vous dites que vous ne voyez pas l'utilité de rendre les déclarations obligatoires. Je comprends très bien votre point là-dessus.

Mais à partir du moment où ce n'est pas obligatoire, sachant que les pharmaciens sont, bien souvent, la première porte d'entrée du système lorsqu'il y a un problème avec un médicament, comment fait-on pour améliorer ça?

De façon très personnelle, j'ai regardé ma mère d'heure en heure en train de mourir parce qu'elle ne pouvait pas obtenir un rendez-vous avec son médecin. La seule porte d'entrée médicale qu'elle avait, c'était son pharmacien. Elle n'est pas la seule. Je ne dis pas que la majorité de la population a des effets secondaires qui entraînent la mort, mais quand même, comment fait-on pour améliorer ça?

En plus des médicaments prescrits, pour les produits disponibles dans les comptoirs, les produits naturels, est-ce qu'il y a une façon de s'assurer que l'information va aux patients?

Mme Bouchard : Je vais répondre en français parce que ma première langue est le français, cela me fait plaisir.

Le sénateur Verner : Nous sommes dans un pays bilingue.

Mme Bouchard : Premièrement, je suis navrée d'entendre qu'il y a eu des problèmes avec la santé de votre mère. J'aimerais apporter une clarification parce que vous apportez des points important, et j'aimerais clarifier les points soulevés dans notre présentation.

Lorsqu'on parle d'un cadre de notification des effets indésirables obligatoires, il est sûr qu'on entend quelque chose au sujet du fédéral et cela n'amène nécessairement pas une augmentation de la qualité des rapports de notification des effets indésirables, mais ça va amener aussi beaucoup de difficultés par rapport à la façon dont on va s'assurer que les gens notifient. Ce serait le gouvernement fédéral qui viendrait dans les pharmacies et les cliniques médicales. Je crois que le gouvernement a déjà assez de choses à faire par rapport à des inspections et pour la question de la protection des renseignements personnels, ce ne serait pas vraiment idéal.

Il faut voir que c'est de cette perspective qu'on dirait que ce ne soit pas obligatoire. Par contre, nous disons que les pharmaciens ont, comme d'autres professionnels de la santé, comme profession auto-réglementée, des standards de pratique. Il y a des codes d'éthique, et d'autres choses. Notre association fait la promotion de certains standards que nos membres adoptent ou adaptent complètement. Oui, c'est un point important pour les pharmaciens dans leur pratique de s'assurer que les effets indésirables sont notifiés lorsque cela devient quelque chose dont ils sont au courant. Oui, des fois, le pharmacien est la première porte d'entrée pour donner un médicament, mais lorsqu'il y a des effets indésirables sérieux qui peuvent amener des hospitalisations, d'autres vont le voir avant, mais pas nécessairement dans la pharmacie communautaire.

Votre autre point par rapport à ce qu'on peut faire pour améliorer ce processus, ce n'est pas de le rendre obligatoire, mais c'est plutôt de travailler pour atteindre une plus grande facilité d'accès à pouvoir notifier, mais aussi de fournir de la rétroaction, sur ce qui est reçu. Qu'est-ce que ça veut dire et de façon assez rapide? Les professionnels de la santé sont capables de faire une évaluation des bénéfices et des risques d'une situation particulière.

Il faut avoir l'information. Et la promotion, c'est vraiment de continuer à changer la culture au niveau de la communauté des professionnels de la santé. Si vous regardez à ce groupe c'est de leur fournir les outils nécessaires pour que ce soit facile, rapide et pour qu'ils puissent savoir ce que leur contribution a apporté au système. Ce sont des points qui ont été vus dans certaines études et qui sont importants pour motiver les gens à notifier. Je parle de chaque professionnel de la santé.

Je suis aussi pharmacienne de profession. Chaque professionnel de la santé a à cœur l'intérêt du patient qui est devant lui pour s'assurer qu'il sera bien. La notification n'est pas obligatoire du point de vue fédéral, mais c'est bien de donner les outils nécessaires pour continuer à le faire, et on se doit de viser la thérapie optimale du patient. Avec tous les changements dans les provinces et les territoires concernant le champ de pratique des pharmaciens, ils vont jouer un rôle plus grand dans le futur.

Je sais que votre question avait différents angles dont le troisième concernait les médicaments en vente libre. Pour mettre plus d'emphase sur ce que nous avons dit, il s'agit d'une catégorie de produits assez grande sur le marché canadien et malgré qu'on puisse peut-être dire qu'ils ne sont pas du même risque, il y a quand même un risque associé à ces produits, particulièrement lorsqu'ils sont pris dans la population par des patients affligés par une condition médicale ou qui ont une autre thérapie. Il est très important de regarder cet aspect dans le programme des activités de surveillance postcommercialisation au Canada.

Le sénateur Verner : Savez-vous si c'est déclarations sont obligatoires dans d'autres pays ou s'ils ont des systèmes? J'imagine que vous êtes au courant?

Mme Bouchard : Il y a quelques pays dans le monde qui mettent la notification des effets indésirables de façon obligatoire pour les professionnels de la santé, mais il y en a très peu. Je n'ai pas l'information avec moi, mais c'est peut-être de l'ordre de quatre ou cinq. Peu de pays le fait de façon obligatoire au niveau fédéral, par contre, il faut aussi prendre en considération que les systèmes de soins de santé et la culture de ces pays peuvent être différents de ce que nous avons au Canada. Il est important d'avoir un système adapté aux besoins de la population et du système de soins de santé que nous avons au Canada.

[Traduction]

Le président : Je vais maintenant céder la parole au sénateur Seidman. Nous entendrons ensuite le sénateur Martin et le sénateur Seth.

Le sénateur Seidman : J'aimerais aborder directement une question que vous avez toutes évoquée. En règle générale, certains sous-groupes, par exemple les femmes enceintes, les enfants et les aînés, ne participent pas aux essais cliniques. À votre avis, est-ce qu'un système de déclaration post-commercialisation obligatoire devrait être mis en place pour faire en sorte que les effets indésirables subis par les membres de ces sous-groupes soient enregistrés? Je sais que vous avez indiqué que vous étiez généralement peu enthousiaste à l'idée d'un système de déclaration obligatoire, mais j'aimerais que vous nous donniez votre avis sur l'instauration d'un système obligatoire qui viserait expressément les sous-groupes de la population qui ne participent pas aux essais cliniques et qui permettrait de recueillir des renseignements sur ce que vous appelez les effets dans le « monde réel ». Que vous soyez d'accord ou non avec l'instauration d'un tel système, pourriez-vous nous dire comment vous envisagez d'accroître notre capacité de recueillir ces renseignements sur les effets indésirables subis par les membres de ces sous-groupes?

Dre Reid : Je ferais valoir qu'il existe une multitude de sous-groupes au sein de la société. Il y a des sous-groupes de personnes âgées. Il y a des populations marginalisées, notamment les femmes enceintes, qui n'ont pas suffisamment accès aux professionnels de la santé et qui courent toutes des risques élevés. Par conséquent, je ne pense pas nécessairement que nous devrions isoler certains groupes.

J'aimerais revenir sur une chose qu'a dite Mme Bouchard, à savoir que la rétroaction de Santé Canada à propos des déclarations d'effets indésirables était très importante pour les médecins. Si nous transmettons un rapport ou si d'autres médecins l'ont fait, il faut que l'on nous avise promptement et en temps opportun d'un problème éventuel.

Nous savons que 25 p. 100 des nouveaux médicaments risquent d'occasionner des effets indésirables graves. Nous aimerions que des études post-commercialisation soient obligatoirement menées à propos des nouveaux médicaments qui ont soulevé des préoccupations relatives à l'innocuité durant les essais cliniques dont ils ont fait l'objet. Nous aimerions que ces médicaments fassent l'objet d'études post-commercialisation, et que les résultats des études sur ces produits soient transmis aux médecins, aux autres professionnels de la santé, aux pharmaciens et à la population de manière à ce que l'on dispose d'un moyen de savoir à l'avance quels médicaments peuvent causer des problèmes. Si nous disposons également d'un mécanisme permettant d'intégrer ces renseignements au dossier médical électronique, de façon à ce que, si Santé Canada nous transmet en temps opportun une mise en garde concernant un nouveau médicament, nous puissions la verser dans le dossier des pharmacies, le dossier des médecins et le dossier médical électronique, cela mettra en évidence tous les patients qui prennent ce médicament. Nous pourrions communiquer avec eux, et leur demander de nous indiquer s'ils ont eu un problème qu'ils n'ont peut-être pas encore signalé. Nous aimerions qu'un système de ce genre soit instauré. À notre avis, cela serait plus avantageux que d'isoler tel ou tel groupe à risque élevé.

J'ai pris bonne note de ce que vous avez dit, à savoir qu'il existait des groupes vulnérables, mais je ferais valoir qu'il en existe un très grand nombre, à tout le moins dans le domaine où j'évolue.

Mme Mildon : Je suis d'accord pour dire que la chose à faire consisterait non pas à rendre la déclaration obligatoire, mais plutôt à ajouter une étape au processus post-commercialisation. Dans mon milieu, c'est ce qu'on appelle une « évaluation ». On met quelque chose en place, et ensuite, on l'évalue. Sur le plan de l'organisation, l'étape manquante est celle de l'évaluation. Si cette étape était intégrée à celle de la commercialisation du médicament et qu'elle était obligatoire au sein non pas de la direction générale chargée de la surveillance, mais de celle qui s'occupe de l'approbation, les choses pourraient peut-être progresser à ce chapitre. À coup sûr, j'avancerais que l'évaluation doit être liée au processus d'approbation, et qu'elle devrait être obligatoire à cet échelon.

Mme Bouchard : J'appuie ce que mes collègues ont dit sur cette question précise.

Dans les cas où des sous-groupes particuliers n'ont pas fait l'objet d'essais cliniques liés à un médicament précis, et qu'il serait important qu'ils fassent l'objet de tels essais, il serait certainement utile que l'on signale, durant le stade préalable à l'approbation, le besoin de mener ces essais supplémentaires au cours de l'étape post-approbation. Si j'ai bien compris — là encore, le cadre juridique en vigueur impose parfois des limites à Santé Canada —, si l'industrie était obligée de mener des études post-commercialisation à propos de tel ou tel médicament, elle serait également tenue de signaler les effets indésirables des médicaments observés durant ces études. Je le répète, c'est ce que je crois comprendre, mais je ne suis pas certaine de ce que j'avance. Je suis d'accord pour dire que cela devrait faire partie du processus préalable à l'approbation, que cela devrait être nécessaire et que cela dépend également de la nature du produit qui fera l'objet d'une étude.

Si j'ai bien compris ce qu'ont dit ses représentants, Santé Canada élabore des plans de gestion du risque à propos de quelques-uns des produits dont la mise en marché au Canada pourrait être approuvée. Par exemple, l'une des étapes du processus de surveillance post-approbation, qui ne serait pas nécessairement une étude, pourrait consister en l'établissement des autres types de caractéristiques que tel ou tel médicament devrait présenter, comme on le fait dans le cadre du plan de gestion des risques liés à ces médicaments. À mon avis, ces plans ont leur utilité, pour autant que leurs divers éléments peuvent être surveillés, appliqués et liés à ce que font toutes les autres organisations pertinentes. Je dis cela parce que je sais qu'il est arrivé que les pharmaciens se retrouvent quelque peu pris entre l'arbre et l'écorce; en effet, il y a eu un cas où un médicament disponible sur le marché canadien ne pouvait être prescrit, selon ses modalités de vente, que par un médecin ayant suivi une formation spécifique; toutefois, les pharmaciens n'avaient aucun moyen de savoir si le médecin ayant prescrit le médicament en question avait reçu la formation requise. Tout doit être intégré, et tout doit pouvoir se savoir.

Le sénateur Martin : D'après ce que vous dites, je crois comprendre que les rôles que vous jouez se recoupent assurément, mais qu'ils sont aussi complémentaires. J'estime que toutes les professions que vous représentez sont essentielles pour la prestation de soins aux patients.

Même si l'on dispose d'une technologie de pointe et même si l'on tente de mettre en place de meilleurs systèmes, il faudra coordonner tout cela. Qui serait le mieux à même de le faire? Vous avez toutes évoqué les chevauchements. Vous recueilleriez différents types de renseignements complémentaires, mais il y aurait également des chevauchements.

Je songe à des conversations que j'ai eues avec des pharmaciens, des membres du personnel infirmier et des médecins. Au sein d'un système plus vaste, qui serait le mieux placé pour coordonner l'information et le système proprement dit?

Mme Mildon : Je suis tout à fait d'accord pour dire que la création d'équipes interprofessionnelles est la voie à suivre. Des soins axés sur le patient et l'excellence au chapitre des résultats passent par cela. Je suis très heureuse d'être ici avec mes collègues.

Je propose que l'on revienne aux fournisseurs de soins de première ligne. La plupart des gens ont accès à un tel fournisseur de soins, même si nous savons que ce n'est pas le cas pour de nombreuses personnes dans certaines régions du pays. Qu'il s'agisse d'un médecin, d'une infirmière praticienne ou d'un membre du personnel interprofessionnel d'une clinique, le fournisseur de soins de première ligne est celui qui devrait connaître le mieux le patient. Il faut que l'on recommence à s'en remettre à la première personne qui entre en contact avec le patient. Cela explique également pourquoi nous devons disposer d'un nombre suffisant de ressources médicales et infirmières : il faut que les patients disposent d'un fournisseur de soins de première ligne, qu'ils comprennent à qui ils doivent s'adresser et à quel moment ils doivent le faire. En outre, le fournisseur de soins de première ligne doit être en lien avec une équipe interprofessionnelle comprenant des pharmaciens et des membres des autres professions de la santé.

Dre Reid : Je suis totalement d'accord avec Mme Mildon. Ce rôle doit être joué par le fournisseur de soins de première ligne, lequel est, en quelque sorte, le capitaine de l'équipe, et celui qui en sait le plus à propos du patient. Nous entrons dans une nouvelle ère où les médecins doivent faire équipe avec leurs collègues du personnel infirmier et leurs collègues pharmaciens, et nous travaillons fort là-dessus. Nous nous apprêtons à commencer un nouveau chapitre en ce qui a trait à la manière dont les soins de santé de première ligne sont dispensés au Canada, et cela ne fera qu'améliorer la qualité des soins.

Le sénateur Martin : J'ai souvent l'impression que je suis le fournisseur de soins de première ligne, dans la mesure où il existe une multitude d'éléments. En ce qui concerne les effets indésirables des médicaments, il serait judicieux que l'on mette en place un service ou une personne qui jouerait un rôle de coordinateur et qui disposerait des renseignements exacts pertinents.

Qu'en est-il des produits à l'origine d'un problème? Je sais qu'il n'existe aucun mécanisme de rappel obligatoire de ces médicaments. Est-ce que l'une ou l'autre d'entre vous serait favorable à l'instauration de dispositions législatives prévoyant un processus de rappel obligatoire? Dans la négative, dans quels cas le ministre devrait-il avoir le pouvoir, comme c'est le cas dans d'autres administrations, d'ordonner un rappel obligatoire? Il devrait y avoir un mécanisme permettant d'assurer la sécurité des autres patients.

Dre Reid : Monsieur le président, je vais demander à Millicent Toombs, experte de l'AMC en la matière, de répondre à cette question.

Millicent Toombs, directrice, Département de la santé publique, Association médicale canadienne : En ce qui concerne le rappel obligatoire, il arrive souvent que nous établissions qu'un médicament pose des risques pour la santé, et que Santé Canada décide que le fait de ne pas retirer le médicament du marché présente certains avantages, malgré les effets indésirables qu'il peut occasionner. Champix, par exemple, est un médicament qui provoque de graves effets secondaires psychologiques. Bon nombre de personnes estiment qu'il est probablement plus sécuritaire pour une personne de prendre ce médicament que de continuer à fumer, pour autant qu'elle soit informée de l'existence de ces effets secondaires.

Si l'on met en place un système de rappel, il faudrait que celui-ci soit souple et intégré au plan de gestion des risques dont Mme Mildon a parlé. À mes yeux, un tel système devrait être un mécanisme auquel on pourrait recourir dans le cadre des processus d'examen et d'approbation du plan de gestion des risques.

Mme Bouchard : En ce qui concerne votre question sur l'instauration de dispositions relatives au rappel ou au retrait obligatoires de médicaments commercialisés, je vous dirai que, il y a quelques années, Santé Canada a tenu des discussions sur la modernisation des dispositions législatives et réglementaires touchant les aliments et les médicaments. Si je ne m'abuse, cette question avait été abordée durant ces discussions, et, à notre avis, il sera nécessaire de conférer à Santé Canada de plus vastes pouvoirs pour ce qui est de la prise de certaines mesures exigées par les circonstances. Il faudrait que l'on définisse très clairement les circonstances dans lesquelles ces mesures peuvent être prises, car cela ne peut pas se produire sans raison; cependant, lorsque les risques sont suffisamment graves pour justifier que l'on remette en question certaines choses, il serait probablement judicieux que l'on puisse retirer un produit du marché en attendant que l'on mène des études et des examens supplémentaires. Tout dépend du degré de risque, mais j'estime que, à l'heure actuelle, bien souvent, les mesures que peut prendre Santé Canada sont limitées, et cela peut créer des retards, comme on a pu le constater à certaines occasions dans le passé.

Il est important que Santé Canada dispose au moins du pouvoir requis pour prendre des mesures lorsque les circonstances l'exigent, et peut-être aussi pour réduire la durée des pourparlers avec l'industrie pharmaceutique en ce qui concerne les mesures qui seront prises, les renseignements qui seront communiqués et la manière dont s'effectuera leur communication.

Le sénateur Martin : Madame Bouchard, durant votre exposé, vous avez fait brièvement allusion à la nécessité d'un profond changement de culture. Est-ce que cela est une préoccupation au Canada? Notre culture est-elle très différente de celle d'autres administrations qui s'en tirent peut-être mieux que nous? Notre culture est-elle actuellement bien vue?

Mme Bouchard : Nous avons probablement ajouté ce mot de manière à ce que notre propos soit un peu plus provocant, mais il n'en demeure pas moins qu'un changement de culture est nécessaire. Les statistiques montrent que le nombre de déclarations d'effets indésirables des médicaments a augmenté au cours des 10 dernières années, de sorte que nous avons réalisé des progrès en ce qui concerne le système de pharmacovigilance et d'approbation post-commercialisation. Il y a encore des progrès à faire, et nous travaillons chaque jour à changer la culture. Mes collègues du secteur de la santé, l'industrie, le public et le milieu universitaire doivent participer au changement de culture. Nous devons faire en sorte que la déclaration des effets indésirables des médicaments s'effectue en tout temps pour le plus grand profit des patients. Cela passe inévitablement par un changement de culture, mais nous avons besoin d'outils pour aider les professionnels de la santé et les autres intervenants concernés à réaliser ce changement.

Ce qui se fait dans les écoles est également important, car il faut que nous présentions cette idée aux futurs professionnels de la santé dans le cadre de l'enseignement qu'on leur dispense. De plus, la déclaration doit être intégrée à l'énoncé des compétences qu'a élaboré l'Institut canadien pour la sécurité des patients à l'intention des professionnels, où l'on fait la promotion de la déclaration des effets indésirables et des activités connexes.

À ce moment-ci, il est peut-être exagéré de qualifier de « profond » le changement nécessaire, mais j'estime que nous ne devons pas nous arrêter. Je crois que nous devons poursuivre notre travail.

Le sénateur Seth : Ce que l'on a entendu était très intéressant.

Docteure Reid, je vois que vous avez une vaste expérience de pratique dans les Territoires du Nord-Ouest. Comment les médecins et les patients de cette région du pays reçoivent-ils des renseignements sur la manière d'utiliser les médicaments et sur les médicaments à propos desquels un essai clinique est suggéré?

Dre Reid : On reçoit les renseignements de la même manière que tous les autres professionnels de la santé du Canada les reçoivent. Santé Canada nous transmet des communiqués, mais nous n'obtenons aucune rétroaction à la suite de la déclaration d'un effet indésirable ni aucun renseignement à propos des médicaments posant des risques élevés.

Je crois que cela vaut également pour les autres professionnels de la santé du Canada. Je peux vous dire que, à l'heure actuelle, dans les Territoires du Nord-Ouest, nous disposons d'un système de dossiers médicaux électroniques extrêmement intégré qui nous permettra très bientôt de communiquer avec chacune de nos 33 petites collectivités de manière à ce que nous puissions transmettre des renseignements concernant nos patients qui sont en train d'être transportés — comme vous pouvez l'imaginer, ces patients sont très mobiles. Je ne saurais assez insister sur le rôle crucial que jouent les dossiers médicaux électroniques pour ce qui est de la diffusion de l'information. Je vais peut-être paraître excessivement optimiste, mais je pense que, si nous pouvons obtenir les formulaires et les renseignements relatifs aux médicaments que prennent les patients, la moitié du problème sera réglée.

Le sénateur Seth : Vous avez dit que les médecins sont souvent surchargés de travail. J'aimerais que vous nous parliez de cela. Quelle est la solution? Que peuvent-ils faire pour participer davantage aux programmes, et quelle est la solution à ce problème?

Dre Reid : Je vais revenir une fois de plus aux dossiers médicaux électroniques. Si j'examine un patient et que je constate qu'il subit des effets secondaires d'un médicament, je peux rapidement accéder au formulaire pertinent et le transmettre par courriel quelques secondes plus tard. En revanche, attendre la fin de la journée pour télécharger un formulaire de Santé Canada et passer de nouveau en revue les dossiers des patients, cela exige beaucoup de temps. Il faut que cela soit disponible au point de service, et il faut que cela soit accessible aux médecins et au personnel infirmier de la collectivité. Je crois que notre technologie nous permettra de faire cela beaucoup mieux.

Le sénateur Seth : Pourquoi la mise en place si importante de ce système de données électroniques prend-elle autant de temps? Ce système vous permettrait d'obtenir des renseignements beaucoup plus exhaustifs que ceux dont vous disposez actuellement, car je dirais qu'environ 50 p. 100 des médecins n'ont toujours pas accès à un tel système.

Dre Reid : Je le dis avec une pointe d'humour, mais si nous tentons de répondre à cette question, nous n'aurons peut- être pas terminé à 18 heures — il s'agit d'une question complexe. Dans certaines petites administrations, par exemple dans les Territoires du Nord-Ouest, où je travaille, nous avons été en mesure de recourir aux services d'un fournisseur pour déployer notre programme dans l'ensemble de nos collectivités. Comme vous pouvez l'imaginer, dans les autres provinces, il y a divers fournisseurs pour les différentes régions; les médecins utilisent des systèmes différents, et bon nombre d'entre eux ne communiquent pas ensemble. On a parfois constaté que les gouvernements provinciaux et territoriaux n'avaient pas la volonté d'aider les professionnels de la santé en finançant la mise en œuvre des dossiers médicaux électroniques, qui coûte très cher. Dans certaines régions, cela s'explique probablement par une absence de volonté politique, et dans d'autres, par une absence de ressources financières. En outre, il y a les problèmes liés aux technologies de l'information — nos systèmes ne sont pas interconnectés. Tout cela est très complexe, mais l'AMC et l'AIIC travaillent fort là-dessus pour faire en sorte que cela fonctionne mieux.

Le sénateur Raine : Je suis heureuse d'être ici. Je ne suis pas membre régulier du comité, mais je trouve que le sujet dont on parle aujourd'hui est très intéressant.

Ma question porte sur une chose à laquelle le sénateur Martin a fait allusion. À votre avis, quel est le rôle que le patient ou les membres de sa famille doivent jouer sur le plan de la surveillance des effets indésirables des médicaments et du lancement du processus? S'ils disposent des renseignements voulus, comme je l'imagine, je suppose que l'ordonnance informe les patients des effets secondaires éventuels du médicament qu'ils vont prendre; s'il y avait un moyen de déclencher immédiatement le système plutôt que l'on doive attendre que les patients puissent consulter leur médecin et leur signaler ces effets, est-ce que cela serait utile?

Mme Bouchard : Merci de la question. Tout d'abord, en ce qui concerne les patients et les membres de leur famille, oui, ils ont assurément un rôle à jouer dans tout cela, car ils ont une responsabilité individuelle à assumer au moment de prendre un médicament. Là encore, ils n'assument pas seuls cette responsabilité — ils reçoivent le soutien des professionnels de la santé et, comme nous l'avons dit plus tôt, le point d'entrée pour l'obtention d'une ordonnance, d'un médicament ou d'autres conseils sur des produits en vente libre est le pharmacien.

Dans un premier temps, avant de commencer à prendre un médicament, les patients reçoivent des renseignements, mais lorsqu'ils constatent certains effets, il arrive souvent qu'ils retournent consulter leur pharmacien pour en discuter. Toutefois, les patients peuvent lancer le processus à tout moment et, d'après ce que je crois comprendre, ils peuvent signaler les effets indésirables des médicaments à Santé Canada, qui dispose de centres régionaux destinés à recueillir les renseignements transmis par les consommateurs. Il s'agit d'une bonne chose, car cela leur permet de faire part des effets qu'ils subissent; par contre, ils doivent réellement savoir ce qu'ils doivent faire. Est-ce que les effets sont d'une gravité telle qu'ils doivent cesser de prendre le médicament, ou s'agit-il d'effets bénins qui peuvent peut-être être maîtrisés par d'autres moyens?

En outre, les patients doivent assurément être en mesure de consulter un fournisseur de soins de santé. Bien souvent, ils s'adresseront d'abord à leur pharmacien puisque c'est lui qui leur a fourni le médicament. Ils peuvent également consulter d'autres fournisseurs de soins de santé dans d'autres établissements. Cela arrive tous les jours. Des patients font part des effets indésirables qu'ils subissent, puis on leur pose des questions pour établir ce dont ils ont vraiment besoin. Cela dit, les patients ont quand même un rôle à jouer, en collaboration avec l'ensemble des autres fournisseurs de soins de santé, en ce qui concerne la surveillance de leur propre état de santé et du traitement qu'ils reçoivent.

Mme Mildon : Merci de votre question, sénateur Raine. Ce que vous avez dit m'a rappelé le commentaire évocateur formulé par le sénateur Martin selon lequel elle avait l'impression de devoir jouer le rôle de personne-ressource pour les membres de sa famille.

Tout d'abord, il faut être informé. Le patient et les membres de sa famille doivent être informés, et ils doivent poser des questions. En ce qui a trait à la culture dont parlait Mme Bouchard, je constate qu'il existe un écart générationnel. L'attitude traditionnelle de nos aînés en matière de réception de soins était assez passive. À présent, les membres des nouvelles générations sont à tout le moins tentés de prendre part au processus, et il arrive qu'ils aillent consulter un médecin ou une infirmière praticienne avec des documents trouvés sur Internet.

Il est important que les gens soient informés et qu'ils sachent à qui ils doivent s'adresser pour obtenir de l'aide. Il y a des ressources locales, par exemple les pharmacies et les programmes de soins à domicile, et des services de renseignements téléphoniques en matière de santé sont à présent disponibles dans la plupart des collectivités du Canada. Je ne suis pas certaine que ces services sont utilisés de manière optimale. Il s'agit de services accessibles 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, de sorte qu'une personne dont les premiers symptômes apparaissent au beau milieu de la nuit peut les utiliser. Le patient et les membres de sa famille ont la responsabilité d'avoir un fournisseur de soins de première ligne, et de ne pas s'en remettre aux cliniques sans rendez-vous. Le problème tient à ce que ces fournisseurs dispensent des soins de manière épisodique; les gens ne sont pas en mesure de consulter chaque fois le même fournisseur, et celui-ci n'a pas sous les yeux l'ensemble du dossier médical du patient, de sorte qu'il est plus difficile pour lui de rassembler toutes les pièces du casse-tête. Il s'agit là d'éléments qui, d'après moi, aideraient les patients et les familles à être plus informés.

Dre Reid : J'ai une chose à ajouter. Lorsque ma mère devait prendre un nouveau médicament sur ordonnance, elle me téléphonait, car le document qui accompagnait le médicament comptait plusieurs pages. Elle avait peur parce qu'elle subissait tous les effets secondaires du médicament. Je pense que nous devons faire en sorte que les renseignements que nous fournissons aux familles et aux patients soient beaucoup plus clairs. Nous devons leur remettre une liste précise d'effets graves dont ils doivent surveiller l'apparition, et peut-être les aviser du fait que les essais cliniques préalables à la commercialisation du médicament qu'ils s'apprêtent à prendre ont révélé qu'il pouvait occasionner des problèmes, de manière à ce qu'ils soient plus vigilants.

Les gens ne savent plus où donner de la tête lorsqu'ils examinent ce document de trois pages. Il est difficile de lire tout cela. Les familles et les patients sont accablés à l'idée de retourner à la pharmacie pour poser des questions à ce sujet. Je suis d'accord avec ce qu'ont dit les autres intervenantes.

Le sénateur Raine : Ma deuxième question porte sur les médicaments éprouvés qui disparaissent du marché et sont remplacés par de nouvelles versions améliorées. L'avantage des anciennes versions, c'est qu'on connaissait à tout le moins leurs effets secondaires. Le milieu médical avait constitué un ensemble de connaissances à propos des effets attendus. Les gens sont réellement traumatisés lorsqu'ils ne peuvent plus obtenir leur médicament pour une raison ou une autre, par exemple parce qu'il n'est plus fabriqué ou que son brevet est arrivé à échéance. S'agit-il d'un problème grave? Quelles mesures prenons-nous lorsque cela arrive?

Le président : Je vais vous interrompre. Cette question ne concerne pas la surveillance — elle porte sur un autre sujet. Par conséquent, je vais vous demander de vous en tenir à la surveillance post-approbation proprement dite.

Le sénateur Raine : Je vais revenir à la question de la surveillance. Est-ce que l'étiquette des produits pharmaceutiques et des produits en vente libre est munie de codes à barres fournissant une description des propriétés moléculaires des produits et indiquant leurs éventuels effets indésirables? Est-ce que cela fait partie du régime?

Je pense à cela parce que j'ai assisté l'autre soir à une cérémonie où l'on remettait des prix à des innovateurs. L'un des récipiendaires avait conçu un système permettant de faire le suivi du sang dans un hôpital, du moment où le don de sang est fait jusqu'au moment où ce sang est utilisé. Il s'agit d'un système très novateur. Il s'agit peut-être d'une chose à laquelle on pourrait réfléchir.

Le président : Pour ce qui est des codes à barres et des produits pharmaceutiques, je crois que, de façon générale — je vous vois toutes hocher la tête —, les codes à barres ne fournissent pas de renseignements concernant les propriétés chimiques. Est-ce exact?

Mme Mildon : Je vais laisser ma collègue répondre à la question.

Mme Bouchard : Je ne peux pas vous fournir une réponse exhaustive puisque les questions relatives à l'étiquetage relèvent également de l'industrie pharmaceutique et des fabricants. Certains produits sur ordonnance ne peuvent être obtenus que d'un pharmacien. Quant aux produits en vente libre, leur étiquetage respecte les exigences de Santé Canada selon lesquelles ces renseignements doivent être fournis. Ainsi, à ma connaissance, ils sont probablement munis de numéros de suivi. Certains produits pharmaceutiques et d'autres produits de santé naturels sont munis d'un numéro d'identification du médicament, mais ce numéro ne fournit pas nécessairement de renseignements sur les propriétés moléculaires et les effets du médicament.

Cela dit, il y a au Canada quelques programmes — à tout le moins en ce qui concerne les médicaments en vente libre, et l'un d'eux est administré par notre association — dans le cadre desquels nous examinons les produits et formulons des recommandations relatives aux points de vente les plus appropriés et aux modalités de vente les plus judicieuses. Nous faisons cela pour contribuer à ce que le patient puisse obtenir toute l'aide possible d'un professionnel de la santé, au besoin, en ce qui concerne un médicament.

Dans une certaine mesure, on pourrait dire qu'il existe quatre catégories. En pharmacie, on trouve des produits sur ordonnance qui ne peuvent être fournis que par un pharmacien, qui posera un certain nombre de questions et fournira des directives sur la manière de les prendre. Il y a des produits que l'on ne trouve qu'en pharmacie, de même que des produits en vente libre que l'on peut se procurer dans d'autres types de commerces. Au Québec, il y a un programme administré par l'Office des professions du Québec. L'autre programme est administré par notre association.

Dans le cadre de ces programmes, on aide les patients à faire un choix judicieux parmi le vaste éventail de médicaments en vente libre en leur posant un certain nombre de questions.

Le sénateur Dyck : Je vous remercie des exposés que vous nous avez présentés. À coup sûr, les propos que vous avez tenus étaient très cohérents.

Tout d'abord, j'aimerais savoir si les différents corps professionnels s'entendent sur ce que constitue un effet indésirable d'un médicament. La définition est-elle claire? Dans la négative, est-il possible que cela explique en partie le faible taux de déclaration des effets indésirables, dans la mesure où les gens ont probablement tendance à ne signaler que les effets qu'ils considèrent comme les plus graves? Est-ce que Santé Canada, par exemple, dispose d'une liste ou d'une échelle graduée des effets indésirables indiquant à partir de quel seuil un effet indésirable doit être signalé?

Dre Reid : Merci de cette question pénétrante. D'après ce que j'ai pu observer en matière de déclaration, pour l'essentiel, il n'y avait aucune règle à respecter. Je crois que vous avez visé juste, dans la mesure où un médecin praticien peut recevoir un patient qui a, si je peux me permettre, une petite diarrhée, ou tel ou tel autre symptôme. Il peut se révéler qu'il s'agit d'un effet indésirable sans gravité. Par contre, un autre médecin peut recevoir un patient qui prend le même médicament et qui subit, lui, d'accablants effets secondaires de nature gastro-intestinale qui sont réellement graves, et il se peut que le premier patient subissait lui aussi des effets graves, mais dont les symptômes ne se manifestaient pas de manière aussi violente que chez le deuxième patient. À mon avis, cela fait partie du problème.

En outre, j'estime que l'une des préoccupations que soulève la déclaration obligatoire tient à la façon dont on s'y prendra pour démêler tout cela. Il existe un vaste éventail d'effets indésirables, et à ma connaissance, c'est généralement au médecin qu'il revenait de décider ce qu'il convenait de signaler.

Le sénateur Dyck : Y a-t-il d'autres commentaires?

Mme Mildon : Je serais heureuse d'ajouter que, selon moi, la définition est claire. Le personnel infirmier a une bonne compréhension de cette définition. Cependant, je suis tout à fait d'accord avec la Dre Reid pour dire que l'apparition des symptômes varie d'une personne à l'autre, de sorte que, même si l'on dispose d'une liste de symptômes, ceux-ci peuvent se manifester de manière différente chez diverses personnes. Cela complique les choses sur le plan de la déclaration.

Le sénateur Dyck : Vous avez toutes parlé du système de déclaration et de la mesure dans laquelle il ne fonctionnait pas. Vous avez avancé que l'on devrait améliorer le système de déclaration volontaire. D'après ce que j'ai entendu ce soir, j'ai la très forte impression que toutes les professions que vous représentez devraient participer au processus de conception d'un système amélioré. Si un système amélioré est requis, qui devrait le concevoir? Si Santé Canada s'occupe de cela, ne devrait-il pas faire appel à des représentants des groupes de patients, des familles, des médecins, des pharmaciens et du personnel infirmier? Vous devrez tous accéder à ce système à un moment ou à un autre, et vous souhaitez tous recevoir des renseignements sur des supports différents. Comment le système devrait-il être amélioré, et qui devrait participer au processus d'amélioration?

Dre Reid : Oui, je suis d'accord avec vous. En général, si l'on se penche sur les problèmes que connaît le système de santé, on constate que le personnel de première ligne — qu'il s'agisse d'infirmières, de médecins ou d'un autre type de professionnels de la santé — n'a pas véritablement été mis à contribution dans le cadre du processus de recherche de solutions aux problèmes.

Je vous suis très reconnaissante des observations que vous avez formulées à propos des patients et des familles, car une foule de choses qui ne fonctionnent pas à de multiples égards au sein du système ont été relevées par les groupes de patients et les familles, et non pas par les professionnels de la santé, et assurément pas par les fonctionnaires.

Pour répondre à votre question, je vous dirai qu'il serait très utile que Santé Canada crée un groupe de travail comprenant des représentants de tous les groupes que vous avez mentionnés. Là encore, j'estime que vous avez visé juste.

Le président : Madame Mildon ou madame Bouchard, avez-vous quelque chose à ajouter?

Mme Mildon : J'ai une petite chose à ajouter. Si nous examinons quelques-uns des outils adoptés par l'Institute for Healthcare Improvement — les méthodes simplifiées, entre autres —, on constate qu'il a toujours fait participer les patients et les groupes d'utilisateurs à leur mise en œuvre. Cela permet d'éviter le travail en vase clos. Ainsi, j'estime que la démarche que vous avez décrite est merveilleuse, et nous l'appuierions totalement.

Le sénateur Enverga : Vous avez indiqué que 10 p. 100 des effets indésirables étaient signalés. Qui signale ces cas? Le personnel infirmier? Qui fait le plus de déclarations : le personnel infirmier, les pharmaciens ou les médecins praticiens?

Mme Toombs : Je crois que la majeure partie des déclarations sont faites par divers professionnels de la santé, j'entends par là des membres de l'ensemble de la communauté des professionnels de la santé — les médecins, le personnel infirmier et les pharmaciens contribuent tous à cela. Si je ne m'abuse, à ce moment-ci, le tiers des déclarations sont faites par les patients et les consommateurs.

Le sénateur Enverga : Ainsi, ce sont les consommateurs, ceux qui, fort probablement, ont été victimes d'effets indésirables, qui ont fait des déclarations.

Je ne sais pas si ma prochaine question vous concerne. Le 3 octobre, le vérificateur général a indiqué au comité qu'une certaine forme de mise en œuvre avait débuté. Avez-vous été touché par cela? Le 3 octobre, on a dit au comité que la mise en œuvre du système de déclaration des effets indésirables des médicaments avait été lancée.

Le président : Je pense que les représentants de Santé Canada ont indiqué qu'ils avaient commencé à mettre en œuvre des pratiques requises pour donner suite aux problèmes mentionnés dans le rapport du vérificateur général. Le vérificateur général n'a pas dit que Santé Canada était allé de l'avant à certains chapitres; ce sont plutôt les représentants de Santé Canada qui ont indiqué que, selon eux, ils avaient passablement progressé sur certains points.

Le sénateur Enverga : J'aimerais savoir s'ils ont été touchés...

Le président : Oui, je comprends votre question. À mes yeux, les représentants de Santé Canada ont mentionné, en partie, qu'ils étaient en train de mettre en place l'infrastructure requise pour la mise en œuvre du système. Ainsi, je vais tenter de restreindre la portée de la question, et je vais demander aux témoins, et tout d'abord à la Dre Reid, d'y répondre.

Est-ce que Santé Canada a apporté une quelconque modification substantielle au cours des six derniers mois en ce qui a trait aux exigences que les médecins doivent respecter en matière de déclaration?

Dre Reid : D'après ce que je crois comprendre, la principale mesure qui a été prise par suite du rapport du vérificateur général est la mise en ligne par Santé Canada du système de déclaration électronique. Il s'agit d'une mesure merveilleuse, et nous félicitons le ministère de cela.

Madame Toombs, aviez-vous quelque chose à ajouter?

Mme Toombs : Je n'ai pas vraiment de commentaires à ajouter là-dessus.

Le sénateur Enverga : Vous avez mentionné que le système de déclaration était accessible. A-t-il été utilisé? Est-ce que les praticiens utilisent cet outil qu'on leur a fourni?

Dre Reid : Je ne peux pas répondre à cette question. Nous n'avons pas encore mené de sondage à propos de l'ampleur de l'utilisation du formulaire électronique. Nous savons seulement que ce formulaire est disponible depuis peu.

Le sénateur Enverga : Serait-il possible de nous fournir un rapport sur l'utilisation de ce système?

Le président : Il s'agit d'une question qu'examineront ensemble les membres du comité. À ce moment-ci, notre tâche est de poser des questions aux témoins qui se sont présentés devant nous aujourd'hui. Nous nous pencherons ensuite sur les questions de suivi découlant des témoignages.

Le sénateur Enverga : Merci.

Le sénateur Eggleton : J'aimerais revenir sur quelques-unes des dispositions du projet de loi dont il a été question plus tôt, lorsque nous parlions de la modernisation du cadre réglementaire de Santé Canada. Comme on l'a souligné, il s'agit d'un projet de loi qui a été déposé en 2008, et qui est mort au Feuilleton peu de temps après son dépôt.

Je connais votre opinion sur la déclaration obligatoire, mais ce projet de loi comportait deux ou trois autres exigences obligatoires, dont l'une selon laquelle les fabricants de médicaments étaient tenus de mener des études post- approbation. Il y avait également une exigence selon laquelle des modifications devaient être apportées aux étiquettes, et il était aussi question des rappels obligatoires de médicaments — toutefois, je ne sais plus si cela faisait partie du projet de loi. Je crois que vous avez déjà formulé des commentaires à ce sujet.

Le ministère a d'autres moyens qui lui permettent de faire valoir son point de vue dans les cas où il estime qu'un médicament soulève des préoccupations, mais le rappel obligatoire de médicaments est un mécanisme dont disposent certains pays d'Europe et les États-Unis, si je ne m'abuse. Pourriez-vous formuler des observations sur ces possibilités et les dispositions obligatoires qui permettraient de les concrétiser?

Mme Mildon : Je ne me sens pas tout à fait apte à répondre à cette question. Je crois que le principe que nous tentons de faire valoir, c'est que, si les exigences relatives aux effets à signaler, les circonstances où ils doivent l'être et les personnes à qui il incombe de faire les déclarations ne sont pas clairement définies, cela créera de la confusion, et les gens feront trop de signalements — ce qui n'aide pas à régler le problème —, ou alors ne sauront pas dans quelles circonstances il convient de signaler des effets. Je tenais simplement à souligner cela.

Le sénateur Eggleton : Mes questions ne portent plus sur la déclaration. Je suis passé aux autres éléments que j'ai mentionnés.

Dre Reid : L'AMC réclame assurément l'instauration de l'obligation de mener des études post-approbation relativement aux médicaments dont les essais cliniques préalables à la mise en marché ont révélé qu'ils pourraient provoquer de graves effets indésirables.

À coup sûr, nous réclamons également un meilleur étiquetage des médicaments.

À ce jour, l'AMC n'a toujours pas adopté de politique en ce qui a trait au rappel obligatoire des médicaments.

Mme Bouchard : J'aimerais ajouter quelque chose à propos des trois éléments dont il a été question au cours des discussions relatives à la modernisation de la réglementation. D'après ce que Santé Canada a indiqué au cours de ces discussions, nous avons estimé que ces éléments renforçaient quelque peu les mesures que pourrait pendre Santé Canada dans le cadre de l'ensemble des activités préalables et consécutives à l'approbation.

À mes yeux, l'étiquetage est l'une des questions importantes, particulièrement en ce qui concerne les médicaments en vente libre, vu que, à ce moment-ci, il y a une limite à ce que Santé Canada peut faire à certaines étapes sur le plan de l'étiquetage. Cela a entraîné, à quelques occasions, une certaine incohérence, dans la mesure où l'information n'était pas présentée de la même manière pour tous les produits. Nous sommes à présent mieux informés de ces incohérences puisque nous administrons le programme dans le cadre duquel sont examinées certaines présentations de drogues soumises par des fabricants pour ce qui est de médicaments en vente libre.

Le président : J'aimerais revenir sur quelques-uns des points que nous avons abordés.

Madame Bouchard, c'est à vous que je veux m'adresser en premier, au sujet de la déclaration des effets indésirables. Je vais formuler un commentaire de portée générale. Tout d'abord, je comprends très bien votre point de vue à propos de la déclaration obligatoire — il ne sert peut-être à rien d'instaurer une procédure si elle ne peut pas être appliquée d'une façon ou d'une autre. En revanche, on doit trouver un moyen d'encourager la déclaration des effets indésirables possibles de manière à ce que le taux de déclarations soit beaucoup plus élevé qu'il ne l'est actuellement.

Madame Bouchard, vous avez mentionné, entre autres, que vous aviez l'impression que les pharmaciens seraient en mesure de contribuer assez considérablement à cela, pour autant qu'il existe un mécanisme simple — peut-être un mécanisme électronique — leur permettant de transmettre des observations relatives aux effets indésirables des médicaments.

Avez-vous la moindre idée du pourcentage de pharmaciens du pays qui ont soumis une déclaration d'effets indésirables d'un médicament? En d'autres termes, si nous laissons tomber l'idée d'un système de déclaration obligatoire et que nous nous en tenons à un système de déclaration volontaire, nous devons pouvoir constater, d'une façon ou d'une autre, que tel ou tel groupe participe réellement au système.

Nous savons que, dans l'ensemble, à l'heure actuelle, les résultats sont médiocres. Je ne tente pas de mettre les pharmaciens dans une classe à part; de fait, d'après ce que nous avons entendu, ils disposent de l'un des meilleurs systèmes électroniques du système de santé, toutes professions confondues. Bien entendu, le comité a entendu des témoignages en ce sens de représentants des pharmaciens.

Il ne s'agit pas de déterminer s'ils ont absolument raison. Toutefois, leurs propos laissent entendre qu'ils estiment qu'ils devraient être en mesure de transmettre ces déclarations. Je vous demande non pas de me fournir une explication détaillée, mais simplement de m'indiquer si vous avez une idée de la proportion de pharmaciens qui transmettent des déclarations relatives aux effets indésirables des médicaments.

Mme Bouchard : Les renseignements dont je dispose proviennent non pas de notre association, mais de Santé Canada, qui constitue, d'après moi, la meilleure source d'information. J'ai sous les yeux les statistiques de 2011, où figure le nombre de déclarations transmises par chaque groupe professionnel du secteur de la santé. Les pharmaciens ne sont pas nécessairement au sommet de la liste — ce sont les consommateurs et les patients qui occupent ce rang. Le taux de déclaration des pharmaciens s'élève très précisément à 12,9 p. 100. Là encore, pendant des années, les pharmaciens ont été le groupe professionnel dont le taux de déclaration des effets indésirables des médicaments était le plus élevé et, en outre, j'estime que ces statistiques devraient être réexaminées à la lumière des modifications qu'a pu apporter Santé Canada, particulièrement en ce qui a trait aux centres des effets indésirables, qui étaient auparavant des établissements externes privés, et qui sont à présent intégrés au ministère. Ils représentent un nombre important.

Combien de déclarations sont transmises chaque jour par les pharmaciens? On ne le sait pas. À mon avis, on doit également tenir compte du fait que toutes ces déclarations concernent des effets indésirables soupçonnés d'un médicament. Nous transmettons des déclarations — et, à mes yeux, tout professionnel de la santé a le devoir de signaler des effets indésirables lorsqu'il en observe —, mais ces déclarations doivent être examinées et analysées ultérieurement. Nous devons également garder présent à l'esprit que des mesures supplémentaires doivent être prises à l'égard de ces rapports si l'on veut que ceux-ci soient valables.

Le président : Exact, je comprends.

Docteure Reid, vous avez répondu en grande partie à la question que je voulais vous poser en répondant à la question du sénateur Dyck au sujet de la déclaration des effets indésirables par les médecins et du type de directives que peuvent recevoir les travailleurs de la santé — à ce moment-ci, je m'intéresse plus particulièrement aux médecins. J'aimerais savoir si l'AMC dispose d'un processus lui permettant, dans le cadre de ses communications avec ses membres, d'encourager les médecins à être proactifs en matière de déclaration des effets indésirables des médicaments.

Dre Reid : Pour autant que je sache, à ce jour, aucun processus de ce genre n'a été mis en place, mais je peux vous dire que l'une des grandes initiatives lancées par l'Association médicale canadienne consiste en un programme d'éducation en ligne auquel nos membres peuvent s'inscrire pour obtenir gratuitement de l'information sur diverses parties de la médecine. Il serait peut-être intéressant que nous donnions une ampleur accrue à ce module.

J'aimerais également mentionner qu'il s'agit là du genre de choses que l'on doit ramener dans les facultés de médecine. Nous devons commencer à en parler. Je ne me souviens pas de n'avoir jamais entendu parler à l'école, durant ma formation ou à tout autre moment de ma carrière, de la déclaration des effets indésirables. Je ne me rappelle pas que cela n'ait jamais été un sujet de discussion. Je crois que je n'en ai entendu parler que par accident, dans le cadre de l'exercice de mes fonctions. De toute évidence, nous disposons de moyens qui nous permettent de mieux éduquer les gens. L'AMC pourrait très bien se pencher sur la possibilité de demander à son bureau de l'éthique de concevoir un module d'éducation portant spécifiquement sur la déclaration.

Le président : Vous avez fait allusion à la déclaration électronique et au fait que, même au sein d'un cabinet donné du système médical, quelques-uns des systèmes étaient, si l'on peut dire, incompatibles. On nous a beaucoup parlé de cela lorsque nous avons mené notre étude sur l'accord en matière de santé de 2004; toutefois, on nous a clairement indiqué que les districts de votre coin de pays — les districts du Nord — figuraient parmi ceux qui s'en étaient le mieux tirés à ce chapitre. Cela s'explique notamment par le fait qu'ils avaient tendance à normaliser davantage leurs systèmes d'exploitation, de sorte qu'ils étaient au moins en mesure de communiquer ensemble et d'une partie de la région à une autre.

Nous savons que la nature humaine entre en ligne de compte. Il s'agit d'un élément intéressant. À vos yeux, est-ce que les districts de santé contribuent davantage à faire en sorte que les médecins de leur territoire adoptent des systèmes d'exploitation compatibles ou, à tout le moins, des systèmes logiciels, en ce qui concerne les divers volets de la déclaration électronique?

Dre Reid : Votre question porte-t-elle précisément sur les systèmes de santé publics, ou sur les districts de santé?

Le président : Je ne suis pas en train d'essayer de vous coincer. Je vous demande simplement de nous donner des conseils pour ce qui est des mesures que nous pouvons prendre pour encourager les membres de votre association à commencer à communiquer entre eux lorsque leurs systèmes logiciels ne sont pas compatibles au sein de leur propre organisation de communications médicale, et, par conséquent, au sein du système de santé lui-même.

Dre Reid : Je crois que la réponse à cette question comporte deux volets. Tout d'abord, les associations médicales provinciales et territoriales s'efforcent, en collaboration avec leurs membres, de faire en sorte que les systèmes approuvés par chaque province soient des systèmes interconnectés. Dans certaines provinces, par exemple en Saskatchewan, les systèmes utilisés proviennent de deux fournisseurs différents. Le gouvernement soutient financièrement les médecins qui acquièrent ces systèmes. Je ne parle que des médecins. Ils s'approvisionnent auprès de deux fournisseurs, car les systèmes qu'ils fournissent sont compatibles. En outre, dans d'autres administrations, par exemple dans les Territoires du Nord- Ouest, où je demeure, c'est le gouvernement — et non pas l'association médicale — qui a été l'intervenant clé. Je crois que les deux parties déploient des efforts à cette fin. Nous reconnaissons qu'il s'agit d'un problème de taille, et nous avons constitué des groupes de travail comprenant des membres de l'industrie des TI, du gouvernement et des associations médicales de toutes les régions du pays et qui s'efforcent de trouver des solutions pour régler cet énorme problème.

Le président : Merci.

Je vais demander aux trois témoins de réagir aux observations que je m'apprête à formuler. Je ne veux pas que vous formuliez des commentaires détaillés — je souhaite simplement que vous réagissiez spontanément à l'idée que je vais présenter.

Au cours des deux dernières semaines, les médias nous ont appris que, dans un autre pays, des districts de santé utilisent Twitter pour recueillir les commentaires de patients concernant les effets indésirables des médicaments. L'un des éléments que notre étude est en train de mettre clairement en évidence tient à ce que le problème du faible taux de déclaration est attribuable, entre autres, à la difficulté de transmettre une déclaration. Il semble que le phénomène Twitter ait pris le monde d'assaut et touche toutes les générations.

J'aimerais que chacune d'entre vous, et tout d'abord Mme Bouchard, réponde brièvement à la question suivante : croyez-vous que ce serait une bonne idée que Santé Canada se dote d'un compte Twitter portant sur les effets indésirables possibles des médicaments?

Mme Bouchard : Nous devrions avoir pour objectif de renforcer tous les outils que nous pouvons utiliser, mais j'estime qu'il faudrait procéder à une évaluation des questions relatives à la protection de la vie privée et à l'utilité des renseignements fournis. Nous devons suivre l'évolution de la technologie, et cela doit être pris en considération.

Mme Mildon : Je serais tout à fait d'accord avec cela. Tout ce qui nous permet d'accroître l'ampleur des communications est une bonne idée, mais il faut tenir compte des questions qui viennent d'être mentionnées.

En outre, j'aimerais mentionner au sénateur Ogilvie que je dispose d'un rapport sur le pourcentage de déclarations faites par les divers professionnels de la santé, et je serai heureuse de le fournir au comité.

Le président : Cela serait merveilleux. Vous pourrez nous le transmettre après la réunion. Merci beaucoup.

Docteure Reid?

Dre Reid : Eh bien, tous mes amis me considèrent comme une personne déphasée — je n'ai jamais utilisé Twitter, et je ne suis donc pas certaine d'être bien placée pour répondre à cette question. Cela dit, je suis tout à fait d'accord avec ce que les autres témoins ont dit. Nous devons utiliser toutes les méthodes possibles pour tenter de communiquer, mais la question de la protection des renseignements personnels dans le cadre d'échanges de renseignements de nature médicale par voie électronique est extrêmement importante. Nous devons faire preuve d'une grande prudence au moment d'aller de l'avant pour respecter les dispositions législatives en matière de protection de la vie privée.

Le président : On sait qu'il y a toute sorte de modalités, par exemple en ce qui concerne le nombre de caractères que l'on peut utiliser, de sorte que je tentais simplement de communiquer l'idée.

Je ne veux pas compromettre Santé Canada, mais je crois me rappeler que ses représentants nous ont indiqué que, au cours des derniers mois, ils avaient accru leurs communications aux fournisseurs de soins de santé en ce qui a trait aux risques. Est-ce que ma mémoire est bonne? Est-ce que l'une ou l'autre d'entre vous a constaté que les communications relatives aux risques posés par les produits pharmaceutiques avaient été améliorées?

Mme Bouchard : Je n'ai pas pris connaissance de tout, mais j'ai l'impression que le nombre de communications relatives aux risques a incontestablement augmenté au cours des quelques derniers mois. On déploie probablement des efforts afin d'accroître le nombre de communications sur certains sujets, mais à ce chapitre, le nombre de communications a certainement augmenté, vu que nous les affichons sur notre site Web à l'intention des pharmaciens et d'autres intervenants.

Le président : Merci beaucoup. Vous nous avez présenté des exposés remarquablement clairs, et vous nous avez fourni des réponses réfléchies. Mme Mildon a quelques documents à nous transmettre, comme elle l'a indiqué. Il se peut que, un peu plus tard, comme cela arrive souvent, de nouvelles réflexions surgissent dans votre esprit, ou que vous regrettiez de ne pas avoir abordé une question dont vous souhaitiez nous parler, de ne pas avoir parlé de tel ou tel document ou de ne pas avoir formulé une observation précise.

Nous souhaiterions que vous nous fassiez part de toute réflexion que vous pourrez avoir à propos de quoi que ce soit qui a été dit aujourd'hui et qui pourrait nous aider à élaborer des recommandations et à mettre le doigt sur les processus qui contribueraient à faciliter la communication des effets indésirables possibles des médicaments.

Je tiens également à remercier mes collègues des questions claires qu'ils ont posées.

(La séance est levée.)


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