Délibérations du Sous-comité des Anciens combattants
Fascicule 9 - Témoignages du 28 novembre 2012
OTTAWA, le mercredi 28 novembre 2012
Le Sous-comité des anciens combattants du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense se réunit aujourd'hui, à 12 h 10, pour étudier les services et les prestations dispensés aux membres des Forces canadiennes; aux anciens combattants; aux membres et anciens membres de la Gendarmerie royale du Canada et leurs familles.
Le sénateur Roméo Antonius Dallaire (président) occupe le fauteuil.
[Français]
Le président : Bonjour à tous. Nous continuons aujourd'hui notre étude sur les services et les prestations dispensés aux anciens combattants suite à leur réintégration dans la société, tant pour ceux qui sont blessés que ceux qui ne le sont pas mais qui ont de l'expérience militaire.
Dans ce contexte, nous rencontrons aujourd'hui et peut-être la semaine prochaine des témoins qui vont clore, à moins d'un changement, notre audition de témoins, après quoi nous finaliserons notre étude.
[Traduction]
Nous accueillons aujourd'hui Brian McCarthy, vice-président des ressources humaines, Les Chantiers Maritimes Irving, qui va témoigner par vidéoconférence, du chantier naval même. Nous accueillons également Peter Hart, administrateur délégué de La Compagnie Canada. Je ne sais pas si cette organisation a le statut d'ONG, mais elle répond certainement à la définition.
Nous vous invitons à présenter brièvement le sujet, ainsi que les activités que vous organisez dans ce contexte. Nous allons commencer par M. McCarthy, qui sera suivi de M. Hart. Ensuite, nous passerons aux questions des sénateurs.
Monsieur McCarthy, vous avez la parole.
Brian McCarthy, vice-président, ressources humaines (Construction navale), Irving : Je me propose aujourd'hui de vous faire une brève présentation du chantier naval Irving et des projets que nous avons entrepris; je dirai également quelques mots sur nos activités futures. Ensuite, je pourrai répondre aux questions sur nos plans de recrutement, notamment en ce qui concerne les anciens combattants et les anciens militaires.
Avez-vous le texte de ma déclaration? Je vous l'ai envoyé.
Le président : Non, nous ne l'avons pas reçu. Le courrier électronique n'a pas dû fonctionner. Je vous invite à nous en présenter les grandes lignes, et notre comité l'examinera de plus près lorsque nous le recevrons.
M. McCarthy : Merci. Les Chantiers Maritimes Irving disposent d'un effectif dynamique d'environ 1 400 employés, dont un peu moins de 1 200 dans nos chantiers navals de Halifax et de Shelburne, et environ 200 chez nos fournisseurs de services de génie, Fleetway et Oceanic, qui ont des bureaux à Ottawa, Halifax, St. John's et Victoria. La plupart des employés travaillent à nos projets en cours, qui sont implantés dans quatre sites : le chantier naval d'Halifax, où nous faisons essentiellement de la construction et de la réparation de navires; les Industries Woodside, qui s'occupent de la construction et de la conversion d'installations de forage; le bassin de radoub Shelburne Ship Repair; et le chantier naval East Isle Shipyard de l'Île-du-Prince-Édouard, qui est spécialisé dans la construction de petits navires comme les remorqueurs.
Dans le chantier naval d'Halifax, nous sommes en train de construire les navires qui nous ont été commandés dans le cadre des deux plus gros projets canadiens de notre époque, sans oublier le programme FELEX de prolongation de vie des frégates, pour lequel nous sommes en train de mettre à niveau sept frégates de la classe Halifax de la Marine royale canadienne. Le NCSM Halifax est terminé, il a été remis en service l'été dernier. Le NCSM Fredericton et le NCSM Montréal sont encore au chantier naval, et le NCSM Charlottetown devrait y arriver en avril 2013. Nous avons à peu près 575 employés rémunérés à l'heure qui travaillent uniquement pour le programme FELEX, lequel devrait être achevé en 2017.
Nous sommes également en train de construire neuf patrouilleurs semi-hauturiers de la classe Héros, pour la Garde côtière canadienne. Le premier de ces vaisseaux, le Private Robertson, a été livré au client en juillet 2012; le deuxième, le Caporal Kaeble, a été livré au client en novembre 2012. Autrement dit, sept navires sur neuf ont été livrés ou sont en cours de construction au chantier naval d'Halifax, où travaillent environ 250 employés rémunérés à l'heure. Ce programme devrait s'achever en 2014.
Les Chantiers Maritimes Irving, et l'industrie en général, ont réclamé pendant des années que soit élaborée une stratégie nationale. Vu le caractère continu de nos activités et la nécessité, pour le Canada, de disposer de ressources compétentes et efficaces en matière de construction navale pour répondre aux besoins des militaires, il était en effet nécessaire de repenser toute la façon dont les programmes et les projets de grande envergure sont mis en œuvre. Le fait de choisir un ou deux chantiers navals pour en faire des centres d'excellence va favoriser le maintien d'une industrie dynamique et prospère au Canada. En juin 2010, le gouvernement fédéral a annoncé l'adoption de la Stratégie nationale d'approvisionnement en matière de construction navale, la SNACN, et un investissement de 35 milliards de dollars dans la flotte fédérale au cours des 30 prochaines années. Dans cette optique, le gouvernement a mis en place un processus équitable, ouvert et transparent, en recourant notamment à un surveillant de l'équité et à des spécialistes indépendants. Le processus a abouti à la sélection de deux chantiers navals pour construire les grands navires, un pour les navires de combat et l'autre pour les navires non destinés au combat. Le 19 novembre 2011, nous avons reçu la nouvelle que nous n'osions espérer, c'est-à-dire que nous avions été choisis par le gouvernement canadien pour négocier le droit de construire la nouvelle flotte de navires de combat pour le Canada.
Depuis, nous avons signé en janvier 2012, avec le gouvernement fédéral, un accord de principe sur une entente- cadre, ce qui représente un pas important dans nos négociations avec ce gouvernement, et permet de commencer à préparer des contrats officiels pour les navires de patrouille extracôtiers pour l'Arctique. Parallèlement, il a été décidé que le programme des NPEA ferait l'objet de deux contrats distincts, un pour l'étude de conception, et l'autre pour la construction. Le fait d'avoir deux contrats séparés permet de faire une conception plus aboutie et plus précise avant le début de la construction.
En juin de cette année, nous avons signé un contrat auxiliaire avec le gouvernement fédéral d'une valeur de 9 millions de dollars, qui nous permet essentiellement de mener à bien les nombreuses activités que nous avons dû entreprendre pour nous préparer à la phase de conception et de génie du programme des NPEA. Une petite équipe de chez nous est en train de préparer le plan d'exécution des NPEA, c'est-à-dire de vérifier la conception et de préparer des estimations détaillées des coûts du travail de conception. Nous poursuivons également nos négociations avec le gouvernement fédéral pour ce qui est du contrat de définition, et nous espérons qu'elles aboutiront à temps pour que nous puissions commencer la conception assez tôt en 2013.
À partir de ce moment-là, les grandes échéances seront, conformément au calendrier publié par le MDN, l'octroi du contrat de mise en œuvre des NPEA en 2015; le début de la construction du premier NPEA en 2015; la signature du contrat de conception en 2016; la livraison du premier navire en 2018; la livraison du premier navire pour les FC en 2022; et livraison du dernier NPEA en 2024.
Ces grandes échéances nécessitent énormément de travail au sein de notre organisation pour nous préparer à la mise en œuvre de ces programmes. Depuis la décision d'octobre 2011, nous avons mis sur pied notre propre équipe des programmes de la SNACN et avons entrepris une étude approfondie de nos processus et de nos systèmes — comme les ressources humaines, la technologie de l'information, et cetera — pour savoir où nous devions investir et améliorer les choses. Nous continuons de travailler avec des spécialistes internationaux et avec notre client pour peaufiner nos plans de modernisation de nos installations.
S'agissant de la modernisation de nos installations, nous faisons tout ce qu'il faut pour être prêts à temps. Le fait que nous ayons déjà beaucoup investi dans ce domaine nous facilitera les choses plus tard. En effet, J.D Irving, Limited, et Les Chantiers Maritimes Irving ont investi plus de 100 millions de dollars dans les installations, les employés et la technologie au cours des cinq dernières années, de sorte que nous sommes bien placés, maintenant, pour entreprendre les gros investissements que nécessite la SNACN.
Nous pensons qu'il faudra y consacrer un total de 300 millions de dollars. Nous nous sommes également assurés que nous avions les permis et autorisations législatives nécessaires. En juillet 2012, nous avons lancé une demande de propositions pour des services d'ingénieurs-conseils, et nous avons retenu ceux du cabinet Hatch Mott MacDonald, lequel nous aidera à peaufiner nos plans pour que nous soyons prêts à démarrer la construction. Ces plans vont continuer d'évoluer au fur et à mesure de nos rencontres avec les ingénieurs-conseils et avec notre client, et nous espérons pouvoir les présenter, ainsi que les esquisses des installations à rénover, au début de l'année prochaine.
Nos effectifs sur le chantier ont été ajustés chaque semaine, afin de répondre aux besoins particuliers sur le chantier. C'est ce qui caractérise notre industrie, d'où l'importance de programmes comme la SNACN. Quand il aura atteint son rythme de croisière, le programme de la SNACN assurera un volume de travail régulier sur plusieurs années et même plusieurs décennies. Il faut en effet bien comprendre que nos effectifs continueront d'être cycliques tant que nous n'aurons pas atteint le rythme de croisière de ce programme de 30 ans.
Entre-temps, nous avons rencontré des groupes communautaires, des établissements d'enseignement et des ministères gouvernementaux pour commencer à planifier nos besoins futurs de main-d'œuvre. Nous continuons d'encourager les personnes intéressées à déposer leur candidature en ligne pour des postes existants aussi bien que pour des postes futurs. Pour l'instant, nous avons à peu près 20 000 curriculum vitae dans nos dossiers, dont la plupart sont arrivés après la signature de notre dernier protocole d'entente.
Nous avons élaboré une stratégie des ressources humaines, parce que nous savons que nos effectifs vont augmenter d'environ 1 500 personnes tous les 8 ou 10 ans. Il est difficile pour l'instant de faire des prévisions plus précises, car tout dépend de la signature des contrats et du début des travaux pour le programme de la SNACN.
Nous espérons pouvoir combler ces postes en nous appuyant sur les trois volets de notre stratégie : former des travailleurs chez nous — c'est-à-dire en collaboration avec les collèges communautaires et les universités de la région; ramener des travailleurs chez nous, c'est-à-dire rapatrier les Canadiens qui ont quitté la région pour aller trouver un emploi ailleurs; et enfin, attirer des travailleurs chez nous, c'est-à-dire faire venir des travailleurs étrangers qualifiés pour qu'ils puissent poursuivre leur carrière dans les chantiers navals du Canada. La grande majorité de nos postes seront comblés par des Canadiens, mais pour un petit nombre de postes, il sera nécessaire d'aller chercher des spécialistes de la construction de navires de combat dans les grands chantiers navals étrangers.
Nous pensons qu'une grande partie de nos effectifs viendront des Maritimes, parce que chacun préfère travailler près de chez soi, et il faudra se préparer en conséquence.
Nous sommes toujours le premier employeur d'apprentis en Nouvelle-Écosse, et ils sont plus de 300 dans notre effectif actuel. Le milieu d'apprentissage que nous leur offrons joue un rôle crucial car il permet à nos travailleurs expérimentés de transmettre leur savoir-faire à ceux qui devront à leur tour le transmettre à la génération suivante, dans 10 ou 15 ans.
Les Chantiers Maritimes Irving ont accepté d'investir 250 000 $ par an dans le Centre d'excellence Irving, au Collège communautaire de la Nouvelle-Écosse. Ce centre a pour mandat d'attirer dans notre secteur des groupes sous- représentés, notamment des Autochtones, des Néo-Écossais d'origine africaine, des femmes et des personnes handicapées. Le 19 octobre, nous avons signé un protocole d'entente avec la SNACN qui va permettre d'entreprendre des consultations avec des groupes sous-représentés. Le financement de ce projet commencera en même temps que le début des travaux de construction pour le programme de la SNACN.
Nous nous sommes également fermement engagés à aider les organisations qui offrent des services aux militaires et à leurs familles. Notre entreprise a à cœur les causes qu'elles défendent, et depuis un certain nombre d'années, nous nous efforçons d'en aider le plus possible. Ainsi, Irving a versé environ 500 000 $ pour les célébrations du centenaire de la Marine royale canadienne, à Halifax, en 2010. Les Chantiers Maritimes Irving appuient également les Journées d'appréciation de la famille qu'organise le MDN à Ottawa et à Halifax, la Ligue navale du Canada, le Mur du souvenir et la Fondation True Patriot Love, ainsi que le Centre de ressources pour les familles des militaires d'Halifax et de la région, au moyen de notre campagne du Vendredi rouge. Au total, les Chantiers Maritimes Irving et leurs employés ont investi plus de 167 000 $ en 2011-2012 pour aider nos militaires et leurs familles.
Cela met un terme à ma déclaration. Je suis prêt maintenant à répondre à vos questions.
Le président : Merci beaucoup. Vous nous avez bien décrit votre plan de travail, ce qui nous donne une bonne idée de ce que sera la demande. Je vous remercie également d'entreprendre une analyse de nos futurs besoins de main- d'œuvre.
Je vais maintenant donner la parole à M. Hart.
Peter Hart, administrateur délégué, La Compagnie Canada : Merci beaucoup, monsieur le président, messieurs et mesdames les sénateurs. Je suis heureux de comparaître devant votre comité aujourd'hui pour vous parler de La Compagnie Canada. À ceux d'entre vous qui ne le savent pas, je tiens à dire que la Compagnie Canada est une organisation à but non lucratif. Elle a été fondée en 2006 par un certain Blake Goldring, qui est président et directeur général d'AGF Management Limited, ainsi que colonel honoraire de l'Armée de terre. Nous rassemblons environ 450 dirigeants industriels et communautaires du Canada. Nous avons des chapitres dans presque toutes les provinces, et nous comptons bien en avoir dans toutes d'ici quelque temps. Les chapitres sont dirigés par un président bénévole et réunissent de 30 à 100 membres par province.
La Compagnie Canada administre cinq grands programmes. Nous finançons également un certain nombre d'initiatives ponctuelles, mais nous essayons de nous concentrer sur ces programmes, qui font suite aux suggestions que nous ont faites les responsables des Forces canadiennes au cours des années.
Dans le domaine de l'éducation, nous avons lancé deux initiatives. La première a commencé en 2006; il s'agit d'un programme de bourses d'études pour les enfants des soldats canadiens morts au combat. L'objectif était d'offrir à tous les enfants se trouvant dans cette situation une allocation de 4 000 $ chaque année, pendant un maximum de quatre ans, pour leur permettre de poursuivre des études postsecondaires au Canada.
Parallèlement à cette initiative, nous avons un programme que vous connaissez certainement puisqu'il s'agit du Projet Héros, qui a été mis sur pied par le général Hillier et le lieutenant-colonel Kevin Reed il y a un certain nombre d'années. Depuis deux ou trois ans, ce programme est administré par La Compagnie Canada. Il regroupe environ 75 collèges et universités du Canada qui offrent de payer les frais d'admission et même parfois les frais d'hébergement des enfants des soldats morts au combat.
Grâce à ces deux programmes, nous pouvons nous assurer que tous les enfants se trouvant dans cette situation peuvent recevoir une bonne éducation postsecondaire.
Au chapitre de l'emploi, qui est le principal objectif de notre réunion aujourd'hui, nous administrons deux programmes. Le premier, Partageons le sacrifice, concerne l'emploi des réservistes. C'est une initiative personnelle de M. Goldring, qui lui tient beaucoup à cœur et à laquelle il a travaillé pendant un certain nombre d'années. Elle a en fait été intégrée au budget déposé en mars de cette année. Comme ce n'est pas mon programme, je vais vous lire les quatre grands volets de cette initiative.
La Compagnie du Canada a recommandé au gouvernement du Canada de reconnaître le rôle fondamental et les sacrifices de nos réservistes et des employeurs dans la protection de nos valeurs, au Canada comme à l'étranger, en proposant des politiques d'indemnisation qui seront plus équitables parce que les coûts de déploiement des employés seront répartis sur toute la société au lieu d'un petit nombre d'employeurs; deuxièmement, qui garantiront un bassin actif de réservistes parce qu'elles permettront d'améliorer leurs possibilités d'emploi et leurs conditions de travail; troisièmement, qui faciliteront le déploiement des réservistes et leur transition à la vie civile; et quatrièmement, qui permettront au MDN de prendre de meilleures décisions en matière de dotation en personnel et de prévoir l'avenir. Comme je l'ai dit, cette recommandation a été intégrée au budget de 2012.
La quatrième initiative des cinq grands programmes concerne aussi l'emploi des anciens militaires puisqu'il s'agit du Programme d'aide à la transition, que nous appelons communément le PAT. Elle a été lancée à la suite d'une table ronde, en avril 2011, qui réunissait le chef du personnel militaire, le contre-amiral Smith, le lieutenant-général Devlin, une dizaine de grands responsables des ressources humaines du Canada, et un certain nombre d'officiers des Forces canadiennes qui avaient réussi leur transition vers le secteur privé. Nous avions appris — et je ne sais pas si ces chiffres sont encore valides, mais à l'époque, ils l'étaient — que 4 000 à 5 000 militaires effectuaient cette transition chaque année et qu'ils avaient vraiment besoin d'aide pour la réussir.
C'est comme ça que le programme a pris forme. Il nous a fallu à peu près un an pour le mettre sur pied, avant son lancement officiel le 15 juin dernier. Nous sommes heureux d'avoir réussi à rallier l'appui de plus de 40 employeurs.
Ce qui distingue le PAT, c'est que nous ne nous contentons pas de rallier l'appui des entreprises. Ce n'est jamais très difficile à faire, car les gens sont toujours pleins de bonne volonté. Ce qu'il faut, c'est que ces gens-là deviennent des membres, car à ce moment-là, leur perspective change complètement. Les rencontres se font en personne, qu'il s'agisse d'aider le militaire à rédiger un curriculum vitae ou à se préparer à une entrevue, ou bien, de façon générale, de l'aider à vivre la période qui sépare le moment où il décide de quitter les Forces canadiennes et le moment où il est convoqué à une entrevue pour, espérons-le, décrocher un emploi. Nous recevons surtout des militaires qui nous sont envoyés par l'équipe de transition du MDN, avec laquelle nous avons des relations de travail depuis un certain nombre de mois. Notre objectif est de réunir plus de 300 employeurs au cours des trois prochaines années et d'élargir notre champ d'action à toutes les provinces du Canada.
Croyez-moi, ce ne sont pas des paroles en l'air, nous agissons. Nous avons confié à un ancien capitaine des Forces canadiennes la responsabilité de gérer le programme. Comme il a aussi travaillé dix ans à Bay Street, il a l'expérience du public et du privé, ce qui est très utile. Shawn Thompson, c'est son nom, est en train de constituer une équipe de représentants régionaux dans tout le Canada. C'est une initiative gigantesque, mais nous pensons qu'elle aura pas mal de retombées positives.
Le cinquième grand programme, auquel on va peut-être devoir mettre un terme — nous n'en sommes pas encore sûrs —, est le Camp pour enfants de soldats déployés. En 2009, nous avons envoyé 67 enfants au Camp Muskoka en Ontario. Forts de ce succès, nous avons envoyé l'an dernier plus de 300 enfants de parents déployés dans des camps de la Colombie-Britannique, de l'Alberta, de l'Ontario et du Québec. Un certain nombre de ces enfants avaient des besoins spéciaux. Nous n'avons jamais refusé un seul enfant. Je sais qu'il y a d'autres organisations qui font elles aussi un travail extraordinaire dans ce domaine.
Enfin, avant de revenir sur le PAT, j'aimerais dire quelques mots sur nos activités ponctuelles. Nous appuyons les CRFM qui ont besoin d'aide, si cela correspond à notre mandat, quelle que soit la région où ils sont implantés. Nous parrainons les Journées de la famille d'Halifax, qui sont organisées par le MDN, et accordons un grand nombre de subventions, de bourses d'études et de dons. Nous examinons chaque demande, au cas par cas. Mais il est certain que nous allons consacrer de plus en plus de ressources au Programme d'aide à la transition des militaires, parce que ça représente une tâche considérable, que nous la prenons au sérieux, et que nous voulons avoir des résultats.
Voilà un résumé de nos activités. Nous sommes tout à fait disposés à répondre à vos questions.
Le président : Avant de donner la parole aux sénateurs, j'aimerais que vous me donniez une petite précision. Vous avez dit que vous aviez quatre grands programmes : l'éducation, l'emploi... quel est le troisième?
M. Hart : Un programme de bourses d'études et le Projet Héros, pour ce qui est de l'éducation.
Le président : Non, je voulais avoir les titres des grands programmes : éducation, emploi et quel est le troisième?
M. Hart : Le Programme d'aide à la transition des militaires, la politique Partageons le sacrifice, pour l'emploi des réservistes, et les camps pour les enfants des militaires déployés.
Le président : Merci beaucoup. Merci d'avoir été bref.
Le sénateur Wallin : Merci. J'aimerais m'adresser à M. McCarthy. Je vous remercie de votre exposé. Nous reconnaissons tous que c'est un bon programme et que c'est tout à fait ce qu'il faut faire.
J'aimerais cependant parler plus précisément des programmes d'aide à l'emploi pour les militaires qui quittent les Forces canadiennes, car c'est ça que nous sommes censés étudier. Nous avons déjà passé en revue les programmes qui existent dans la fonction publique, et cetera.
Vous nous avez parlé de la stratégie de main-d'œuvre que vous avez élaborée, mais avez-vous prévu un volet particulier pour les anciens combattants ou les militaires en transition?
M. McCarthy : Nous n'avons pas de programme axé précisément sur les anciens militaires, mais nous employons un certain nombre d'anciens combattants dans notre organisation.
Le sénateur Wallin : Pensez-vous qu'ils viennent tout naturellement vous voir parce que ce sont d'anciens militaires, et que vous n'avez donc pas besoin d'un programme pour eux?
M. McCarthy : Nous sommes toujours prêts à envisager de lancer un nouveau programme. Nous avons avec eux un lien assez naturel car, à Halifax, nous sommes situés juste à côté des chantiers de la marine, et les emplois que nous offrons, en construction navale, sont assez semblables. Il y a donc un lien naturel.
Le sénateur Wallin : Je vais maintenant m'adresser à M. Hart. Si vous cherchez à rallier l'appui de 300 employeurs, en voici un.
M. Hart : J'étais en train d'en prendre note. Nous en reparlerons.
Le sénateur Wallin : Pouvez-vous nous dire quelques mots là-dessus? Comme je l'ai dit, nous avons passé en revue les programmes qui existent dans la fonction publique, et qui assurent une priorité d'embauche aux anciens militaires et à ceux qui peuvent souffrir de divers handicaps. On constate, et ce n'est pas surprenant, qu'ils préfèrent travailler pour le MDN, ACC ou les Forces canadiennes, parce qu'ils ont l'impression de se retrouver en famille, ils se sentent davantage chez eux.
Vos 40 employeurs actuels, qui seront bientôt 300, sont-ils en mesure d'offrir la même atmosphère de travail aux anciens militaires?
M. Hart : Vous avez mis le doigt sur notre plus grand défi. Nous organisons à l'intention de l'employeur un séminaire d'agrément des FC, si l'on peut dire. Généralement, l'employeur désigne une ou plusieurs personnes dans l'équipe de RH pour s'occuper de l'ancien militaire. On s'entend à l'avance sur le fait que le curriculum vitae ou l'entrevue seront peut-être un peu différents, mais ce qui est important, c'est le calibre incroyable de ces gens-là, leurs compétences, et la formation poussée qu'ils ont reçue, il n'y a pas de meilleurs candidats qu'eux. Tout cela, nous le faisons au préalable, de façon à ce que les contacts soient plus personnels quand les candidatures arrivent.
Il faut bien reconnaître que si le C.V. d'un ancien militaire parvient à l'une des grandes banques qui en reçoivent 650 000 par an, il n'a aucune chance de franchir la première étape du processus car il sera écarté d'office par le programme informatique. Mais nous avons trouvé un moyen d'éviter ça.
Deuxièmement, nous essayons d'abord d'avoir le soutien du PDG pour qu'ensuite, ça se répercute dans toute l'organisation. Par conséquent, nous ne nous contentons pas d'afficher le nom de l'entreprise sur notre site Web, car c'est un employeur non seulement qui est disposé à embaucher des anciens militaires mais qui a aussi été sensibilisé à la nécessité d'adapter son processus d'embauche.
Le sénateur Wallin : C'est important ce que vous dites. Il n'y a pas que les C.V. et la façon de les rédiger, il faut aussi que le secteur privé ou le monde civil soit en mesure de reconnaître les compétences qu'ils ont, pour qu'on puisse établir des équivalences avec les diplômes des collèges et universités. Est-ce que vous vous occupez de ça aussi? Qui s'en occupe?
M. Hart : C'est une question intéressante, car nous sommes justement en train de plancher là-dessus. Nous avons déjà un tableau d'équivalences, mais je ne suis pas sûr qu'il soit assez précis. Il faut que nous soyons capables d'expliquer à un recruteur du secteur privé qu'un caporal d'infanterie ayant telle spécialisation correspond à tel poste dans le secteur privé. Que voici ce qu'il gagne et voici ce qu'il devrait gagner chez vous. C'est utile aussi pour l'ancien militaire, qui sait ainsi à quoi s'attendre. Les grades inférieurs vont souvent toucher un salaire moindre, et nous devons alors leur expliquer qu'avec leurs qualifications et leur formation, s'ils profitent des programmes de formation offerts par l'entreprise — toutes les grandes et moyennes entreprises en offrent —, ils regagneront rapidement leur salaire d'avant et même plus. Il faut donc gérer les attentes de part et d'autre.
Le sénateur Wallin : Je vais vous poser une dernière question. Une fois que vous aurez établi ce tableau d'équivalences pour vos propres besoins, allez-vous essayer de convaincre les universités de l'adopter? Vous aurez en quelque sorte fait leur travail, et elles n'auront plus qu'à l'utiliser pour attester que telle personne a l'équivalent de tel diplôme.
M. Hart : Je vois où vous voulez en venir. Nous n'y sommes pas encore. Nous nous intéressons plutôt à la reconnaissance des compétences d'un militaire canadien par un employeur du secteur privé.
Le sénateur Wallin : Oui, mais une fois que vous aurez fait tout ce travail...
M. Hart : C'est vrai, ça serait logique.
Le sénateur Wallin : ... et il faut vous adresser au bureau des inscriptions, car c'est là qu'il y a un problème. Vous voulez embaucher un chauffeur de camion qualifié, il n'a ni les heures ni le diplôme, mais il a fait quatre déploiements en Afghanistan.
M. Hart : Oui, ce serait une très bonne chose. Pour nous, ce serait d'abord une question de ressources. Pour l'heure, nous essayons de mobiliser nos membres sur ce dossier, et une fois que nous aurons leur appui, nous aurons les ressources pour le faire. Je suis entièrement d'accord avec vous.
Le sénateur Wallin : Merci.
Le sénateur Nolin : Il y a quelques mois, nous avons entendu des témoins de l'Alberta qui offrent exactement ce service, des cours d'équivalence entre l'université et le marché du travail. Ça existe déjà, vous devriez peut-être vous renseigner sur ce qu'ils font.
M. Hart : C'est ce que nous sommes déjà en train de faire. Nous voulons notamment avoir accès à leur portail Web, et nous sommes actuellement en discussion avec le BCIT de la Colombie-Britannique. Ils n'ont pas assez d'argent, mais leur programme est exactement ce qu'il nous faut. Vous savez, tout le travail de sensibilisation que nous faisons auprès de nos membres pour leur faire mieux comprendre ce que ressentent les anciens militaires, ça nous prend beaucoup de temps et beaucoup d'argent. Mais nous aimerions bien nouer des liens avec des organisations du Canada qui travaillent dans le même domaine, et je sais qu'il y en a une à Terre-Neuve qui fait exactement la même chose.
Le président : Si je comprends bien, vous n'avez pas de système de placement, mais vous aidez les anciens militaires en leur donnant les outils nécessaires pour se trouver un emploi. Vous ne faites pas du placement en emploi, vous les aidez simplement à être plus efficaces dans leur recherche d'emploi. C'est bien cela?
M. Hart : Oui, mais nous leur proposons aussi des passerelles vers des employeurs potentiels. Nous ne nous contentons pas de leur donner une petite formation avant de les laisser se débrouiller tout seuls. Nous leur donnons tous les outils nécessaires et nous les aidons du mieux que nous pouvons. À partir de notre site Web de La Compagnie Canada, ils ont accès au Programme d'aide à la transition des militaires et à la liste des employeurs qui y figure. Ces employeurs ont tous suivi notre séminaire d'une heure ou presque, nous les avons sensibilisés à la question et ils comprennent ce que c'est que d'embaucher un militaire.
Le président : Mais vous ne les accompagnez pas d'un bout à l'autre du processus, jusqu'à l'embauche. C'est ce que fait l'organisation de l'Alberta qui a comparu devant nous, ils les accompagnent jusqu'au bout.
Le sénateur Nolin : Vous auriez sans doute intérêt à prendre contact avec eux.
M. Hart : C'est ce que nous allons faire. Quand on voit qu'il y en a 4 000 à 5 000 par an, on essaie de parer au plus pressé.
Le sénateur Day : Merci. Vos deux exposés ont été instructifs, et je souhaite simplement avoir quelques précisions. Ma collègue le sénateur Wallin a abordé une des questions que je voulais poser.
Nous cherchons tous une solution pour trouver des équivalences entre les qualifications des militaires et celles qu'on demande dans le secteur privé. Nous savons bien qu'avec un C.V. de militaire, vous avez peu de chances d'entrer dans le processus d'embauche, même si vous avez suivi les mêmes cours. Il y a donc un lien important qu'il faut établir avec le secteur privé.
Monsieur McCarthy, pourriez-vous nous en dire davantage sur ce que vous faites avec le Collège communautaire de la Nouvelle-Écosse? Vous avez dit qu'il avait un nouveau programme pour la formation en construction navale, et vous avez ajouté qu'il avait un mandat spécial en ce qui concerne les personnes souffrant de handicaps. Pouvez-vous nous en dire davantage?
M. McCarthy : Volontiers. Ça commence à peine. Nous venons de signer un protocole d'entente avec le Collège communautaire de la Nouvelle-Écosse, le 19 octobre dernier. Nous avons déjà défini que les groupes sous-représentés étaient les Autochtones, les Néo-Écossais d'origine africaine, les femmes et les personnes souffrant de handicaps, entre autres. Nous allons donc travailler avec le collège communautaire pour attirer des membres de ces groupes sous- représentés vers un emploi dans le secteur privé. Le programme commence à peine, nous sommes en train de nous organiser. Nous avons signé le protocole d'entente il y a un mois environ, et nous entamons maintenant des consultations avec ces groupes et le collège communautaire. Nous aimerions établir des contacts avec tous les groupes afin de faciliter le plus possible leur transition vers le marché du travail.
Le sénateur Day : Avez-vous un programme spécial pour les anciens militaires qui souffrent de handicaps physiques?
M. McCarthy : Non, nous n'avons pas de programme spécial pour les anciens combattants. Nous en employons un grand nombre et nous les encourageons du mieux que nous pouvons, mais nous n'avons pas de programme spécial.
Le sénateur Day : C'est un autre problème qui nous préoccupe, mais nous vous en parlerons.
Avez-vous, vous ou Les Chantiers maritimes Irving, des liens directs avec le ministère des Anciens Combattants ou celui de la Défense nationale?
M. McCarthy : Nous sommes prêts à en avoir. Nous n'avons pas de liens officiels au niveau de l'employabilité des anciens militaires. Mais nous sommes certainement disposés à travailler avec eux pour faciliter la transition des anciens militaires à la vie civile. Mais encore une fois, nous n'avons pas de liens officiels.
Le sénateur Day : Ces deux ministères nous disent qu'ils ont des programmes en place pour aider leurs futurs retraités à trouver un emploi lucratif et intéressant dans le secteur privé. Il me semble qu'il serait logique que vous, les Anciens Combattants et la Défense nationale ayez des contacts à ce niveau-là.
M. McCarthy : Oui, ça paraît logique, et nous sommes disposés à en avoir.
Le sénateur Day : Merci, monsieur McCarthy, et bonne chance à vous pendant toutes ces décennies qui vont être très prometteuses pour les chantiers navals d'Halifax.
M. McCarthy : Merci.
Le sénateur Day : Mon seul regret est qu'il n'y ait pas plus d'activités prévues à Saint John, au Nouveau-Brunswick.
M. McCarthy : Mon père aurait bien aimé lui aussi.
Le sénateur Day : Donc vous comprenez pourquoi je dis ça.
Le président : Sénateur, avez-vous d'autres questions?
Le sénateur Day : Oui. M. Hart et moi avons eu l'occasion d'échanger quelques mots, et j'ai donc une petite idée de ce que fait La Compagnie Canada. Ce qui me préoccupe un peu, c'est que beaucoup d'ONG et beaucoup de gens de bonne volonté essaient d'offrir peut-être pas exactement mais à peu près les mêmes services aux militaires qui prennent leur retraite, dont certains souffrent de handicaps, pour les aider à trouver un emploi dans le secteur privé.
Je voudrais donc savoir si vous faites quelque chose pour essayer d'éviter les chevauchements.
M. Hart : C'est une excellente question. Quand nous avons commencé, nous avons essayé de faire l'inventaire de ce qu'il y avait sur le marché, si je puis m'exprimer ainsi. Il y a par exemple le groupe Treble Victor, je ne sais pas si vous en connaissez l'existence. Ce sont d'anciens officiers des Forces canadiennes qui offrent une aide personnalisée à leurs collègues pendant les deux ou trois premières années de leur transition vers le secteur privé. Il y a aussi la Fondation True Patriot Love, avec laquelle nous avons des contacts. Nous avons donc essayé de faire un inventaire, pour constater finalement qu'il y avait beaucoup de bonnes intentions et d'excellentes initiatives, mais qu'il n'y avait rien de structuré à l'échelle nationale.
Du régiment aux bâtiments Canada en est un très bon exemple, que vous connaissez bien. Nous avons eu beaucoup de discussions avec eux, et je crois qu'ils ont un lien vers notre site Web. Quand un militaire visite notre site, de là il peut se rendre sur celui Du régiment aux bâtiments ou d'un autre groupe spécialisé dans les métiers, si c'est ce qu'il cherche; du moment que ces groupes sont légitimes et observent les mêmes normes de travail que nous, nous sommes prêts à les inclure dans notre programme, à les inscrire sur notre site et à faire d'eux des partenaires. S'ils font du bon travail, nous sommes prêts à collaborer avec eux.
Le sénateur Day : Avez-vous des mécanismes informels d'échanges d'informations sur ce que font les autres groupes?
M. Hart : À l'exception des groupes True Patriot Love et Treble Victor, je ne connais l'existence d'aucun autre groupe de même envergure que nous. Peut-être que c'est simplement parce que nous ignorons leur existence. Mais bien sûr, nous serions prêts à collaborer avec eux, le cas échéant.
Le sénateur Day : Avez-vous des contacts avec le Corps canadien des commissionnaires?
M. Hart : Oui. Ils sont officiellement sur notre site, nous avons suivi tout le processus et c'est le parfait exemple d'une organisation qui fait un superbe travail et avec laquelle nous avons maintenant des liens officiels.
Le sénateur Day : Cette organisation existe depuis pas mal de temps déjà, et elle est en train d'élargir son champ d'action, ce qui est vraiment intéressant.
M. Hart : Oui, c'est une organisation formidable.
Le sénateur Day : Il y a un autre groupe qui s'appelle le Conseil de liaison des Forces canadiennes.
M. Hart : Je suis allé les rencontrer quand c'était Sonja Bata qui était encore présidente, si je me souviens bien. C'était à la fin de son mandat, et depuis, le président de notre chapitre d'Ottawa est devenu président du chapitre de l'Ontario. Je suis donc allé les voir, et nous avons eu une très bonne discussion. Il n'en a rien résulté pour le moment, mais nous sommes prêts à examiner toutes les suggestions. La balle est en quelque sorte dans leur camp, et nous attendons qu'ils nous fassent des propositions de collaboration. Mais nous n'en sommes pas encore là. Nous essayons de nous faire une idée d'ensemble, et le CLFC existe depuis pas mal de temps, c'est sûr.
Le sénateur Day : Enfin, quels contacts avez-vous avec les ministères des Anciens Combattants et de la Défense nationale, à propos de ce que vous essayez de mettre en place?
M. Hart : Pour ce qui est du MDN, nous avons commencé par rencontrer le chef du personnel militaire, le contre- amiral Smith, pour ensuite travailler directement avec l'un de ses colonels, Gerry Blais, qui dirige l'équipe de transition du MDN. Nous avons des contacts hebdomadaires, voire quotidiens, avec cette équipe. Le processus est le suivant : une fois qu'un militaire est inscrit dans le système du MDN, il est orienté vers le site PAT de La Compagnie Canada. Nous avons donc des liens étroits avec le MDN.
Nous ne sommes pas allés plus loin parce que nous avons conclu de nos discussions avec eux que c'était le moyen le plus efficace d'instaurer un lien direct entre les militaires et notre programme. Si on peut en faire autant avec le ministère des Anciens Combattants, nous serons ravis de le faire, mais ça serait une nouvelle initiative pour nous.
Le président : Merci, sénateur Day. Je vais donner la parole au sénateur Nolin avant de poser moi-même une question.
Le sénateur Nolin : Je remercie infiniment les deux témoins de leurs exposés. Je vais commencer par M. McCarthy. Est-ce que vous embauchez des réservistes? Puisque vous êtes le principal employeur à Halifax, je suis sûr que vous en avez déjà embauché, mais combien?
M. McCarthy : En effet, nous en avons déjà embauché et nous avons actuellement un certain nombre d'anciens réservistes militaires dans notre organisation, mais je ne peux pas vous dire combien exactement.
Le sénateur Nolin : Beaucoup d'employeurs au Canada embauchent des réservistes. Est-ce parce que vous ignorez que ce sont des réservistes ou est-ce que vous préférez embaucher des anciens réservistes?
M. McCarthy : Non, je suis désolé, nous embauchons aussi bien des réservistes que des anciens militaires.
Le sénateur Nolin : Vous ne pouvez pas nous donner ne serait-ce qu'un chiffre approximatif?
M. McCarthy : Alors là, ce serait vraiment très approximatif. Je suppose qu'il y en a des dizaines, mais je ne suis pas sûr. C'est vraiment très approximatif.
Le sénateur Nolin : Avez-vous mis en place un programme spécial ou un processus spécial pour aider les réservistes qui sont à votre effectif?
M. McCarthy : Nous avons l'obligation, en tant qu'employeur, de leur accorder du temps pour la formation et ce genre de choses, et bien entendu, nous nous acquittons de cette obligation.
Le sénateur Nolin : Monsieur McCarthy, vous avez entendu l'exposé de M. Hart. Pensez-vous que vous pourriez collaborer?
M. McCarthy : Oui, je le pense. Comme l'a dit M. Hart...
Le sénateur Nolin : Je vous ai vu prendre des notes, et j'espère que c'est bien ce que vous faisiez.
M. McCarthy : En effet, c'est ce que je faisais.
Le sénateur Nolin : Bien. Pensez-vous que vous pourriez collaborer?
M. Hart : Sans doute.
Le sénateur Nolin : Merci beaucoup.
Monsieur Hart, vous avez certainement des défis à relever.
M. Hart : En effet.
Le sénateur Nolin : Quels sont-ils?
M. Hart : Passer la vitesse supérieure.
Le sénateur Nolin : Si vous obtenez l'appui d'Irving, ça sera déjà ça.
M. Hart : Ça nous aidera énormément, c'est sûr. Mais pour nous, trouver des employeurs bien disposés, ce n'est pas difficile. Nos 450 membres sont de grands industriels du pays, et nous avons donc accès à tout ce milieu. Je sais qu'il y a encore des employeurs qui seraient très intéressés à faire partie de notre organisation, mais sur ce plan-là, nous n'avons pas de problème. Notre défi, c'est d'aider le militaire à partir du moment où il décide de quitter les Forces canadiennes et d'opérer la transition vers le secteur privé, jusqu'au moment où il est convoqué à une entrevue pour un emploi. Je ne sais pas si on peut vraiment parler de changement d'état d'esprit, mais c'est à peu près ça, surtout si les hommes et les femmes concernés sont restés dans les Forces canadiennes pendant longtemps. Je n'ai pas employé le terme « institutionnalisé » parce qu'il a une connotation négative, qui n'est pas méritée d'ailleurs. C'est simplement une certaine façon de faire les choses. Il faut leur faire comprendre que c'est vraiment formidable de travailler dans le secteur privé, il faut les sensibiliser à cela, sinon, ils risquent de s'y sentir un peu mal à l'aise. Supposons que le recruteur ait cinq C.V. en main; celui du candidat des Forces canadiennes est nettement meilleur, mais en revanche, il ou elle connaît les autres candidats car ce sont des gens qui viennent du secteur privé. Ils ont le même langage, la même façon de s'habiller. Le militaire, lui, a le meilleur curriculum vitae, mais avec lui, ce n'est pas la même chose. Et c'est là-dessus qu'on travaille. C'est en fait très facile de régler ce problème, il faut prendre le temps d'éduquer les gens.
Le sénateur Nolin : L'une des principales compétences que les militaires ont à offrir, c'est le leadership. Comment mettez-vous en valeur cette compétence auprès des employeurs? Il me semble que cela devrait les intéresser.
M. Hart : Vous avez tout à fait raison. Bien sûr qu'on peut mettre en valeur, mais je préfère employer le mot éduquer. Il faut éduquer les gens. Il faut qu'ils comprennent qu'un ancien militaire, même le moins gradé, a acquis au cours de sa carrière une formation qui représente entre 100 000 et 200 000 $. Tous les militaires acquièrent une formation de base qui est vraiment solide. Ce n'est pas toujours le cas de ceux qui travaillent dans le secteur privé. On se demande toujours comment faire pour inculquer la discipline, l'intégrité, le caractère, le leadership. Mais regardez comment se comportent les simples soldats au combat, c'est phénoménal. Ce sont des meneurs, ils mènent les autres, et ce que nous recherchons dans le secteur privé, c'est justement le leadership, l'organisation, le bon sens, la capacité d'analyse. Et les militaires ont exactement ce que nous recherchons. Pour répondre à votre question, je dirai que c'est une question d'éducation. Nous emmenons nos employeurs à Petawawa, 80 à 100 par an avec notre programme Executrek, pour qu'ils puissent discuter avec des militaires, en personne. C'est l'outil le plus puissant que nous ayons.
Le sénateur Nolin : Je suis content que vous parliez d'ExecuTrek, car j'étais du nombre, à Valcartier, il y a une quinzaine de jours. J'ai découvert notamment que certains employeurs étaient un peu réticents à l'idée d'embaucher quelqu'un qui est prêt à exercer du leadership mais qui a besoin d'un cadre bien défini. C'est ce que recherchent parfois les militaires dans le secteur privé, et comme ils ne le trouvent pas, ils se disent : « Ce n'est pas pour moi. Je vais aller voir ailleurs. » Est-ce que vous l'avez constaté vous aussi?
M. Hart : Je suis sûr que ça arrive souvent. J'aime à croire que...
Le sénateur Nolin : Telle organisation peut convenir à celui qui a besoin d'un cadre bien défini pour pouvoir exercer son leadership.
M. Hart : Ça arrive probablement assez souvent. Je suis allé aux États-Unis, à la conférence Veterans on Wall Street. Je ne sais pas si vous êtes au courant, mais c'est une énorme conférence qui a lieu chaque année aux États-Unis. Ils avaient un millier d'anciens combattants, et ils ont réussi à en placer 150 par jour. Ils organisent des séminaires toute la journée, sur ce que font les grandes entreprises américaines. Ils ont notamment parlé des difficultés qu'il y a à faire comprendre aux responsables des ressources humaines du secteur privé que, si c'est un ancien militaire, le candidat qu'ils ont en face d'eux correspond exactement au profil qu'ils recherchent. Ils passent leur temps à faire des comparaisons et à expliquer qu'un sergent peut avoir 15, 20 ou 30 personnes sous ses ordres, qu'il a aussi un bon budget, et qu'il doit gérer des millions de dollars d'équipements. C'est le genre de discussions qu'il faut avoir avec les employeurs pour qu'ils acquièrent des notions d'équivalence. Et la meilleure façon de le faire, à notre avis, c'est de les emmener rencontrer les militaires dans les bases militaires ou sur les navires de la Marine, pour qu'ils puissent discuter avec les soldats aussi bien que les hauts gradés, et qu'ils puissent constater d'eux-mêmes que ces gens-là possèdent du leadership et des compétences techniques, et que c'est précisément le type d'employés qu'ils recherchent.
Le sénateur Nolin : Comment vous organisez-vous pour rencontrer les simples soldats, par exemple dans les régiments de la réserve? Comment faites-vous? Vous frappez à la porte et vous dites : « Me voilà »?
M. Hart : Ça se fait plus ou moins par l'intermédiaire de l'équipe de transition du MDN. Lorsque nous avons obtenu leur reconnaissance officielle, ils ont publié un avis indiquant que La Compagnie Canada était maintenant en mesure d'aider les militaires à faire la transition vers le secteur privé. Donc, si vous voulez savoir comment les militaires apprennent notre existence, c'est par l'équipe de transition du MDN. Mais votre question est intéressante, car l'une des réserves qui avaient été émises au départ — j'avoue ne pas bien comprendre, mais c'est ce qui se passe aux États-Unis —, c'est la crainte du maraudage. Les militaires ne veulent surtout pas se faire voler leurs meilleurs éléments. Nous n'offrons pas des emplois. Nous ne sommes ni un bureau de placement ni un organisme de recrutement. Nous sommes plutôt un intermédiaire. Le militaire qui est prêt à faire la transition doit s'inscrire au MDN, et c'est à ce moment-là qu'il apprend l'existence de La Compagnie Canada. Est-ce que nous faisons de la promotion dans les régiments? Nous le faisons officieusement par l'intermédiaire des colonels honoraires et lors de nos déplacements dans les régions du pays, mais officiellement, c'est l'équipe de transition du MDN qui s'en occupe.
Le président : Avant d'entamer une deuxième ronde de questions, j'aimerais avoir quelques éclaircissements. Monsieur McCarthy, le deuxième navire que vous avez construit pour la Garde côtière a été baptisé Caporal Kaeble, à la mémoire d'un soldat du Royal 22e, qui était originaire du Bas-Saint-Laurent et qui a reçu la Croix de Victoria. Le gouvernement tenait ainsi à honorer la mémoire des récipiendaires de la Croix de Victoria. C'est une belle initiative.
Vous avez consacré un certain temps à nous parler de ce que vous alliez faire, et je sais que ce n'était pas pour vous vanter mais plutôt pour nous donner une idée de l'ampleur des travaux. Vos effectifs vont augmenter considérablement.
Je me pose toutefois une question : puisque vous savez que vous allez devoir construire un grand nombre de navires pour les Forces canadiennes et pour la Garde côtière, notamment le brise-glace, vous devriez, il me semble, négocier plus activement avec les collèges communautaires pour qu'ils mettent l'accent sur les militaires et surtout les anciens combattants qui essaient de se recycler et qui n'ont pas accès à des subventions des AC, afin que ces gens-là deviennent vos employés privilégiés en quelque sorte. En fait, étant donné la panoplie de compétences que vous recherchez, il me semble que votre politique de recrutement devrait mettre clairement l'accent sur les militaires encore en activité, ceux qui vont prendre leur retraite et surtout ceux qui ont subi des blessures.
Pourquoi votre entreprise ne l'a-t-elle pas annoncé clairement dès le départ? Vous y travaillez depuis 2011, pourquoi n'avez-vous pas été plus volontaristes sur ce plan-là?
M. McCarthy : Nous en sommes à l'étape de la planification. Nous finalisons nos plans de recrutement. Nous allons continuer de connaître des périodes de vaches grasses et des périodes de vaches maigres, comme ça a toujours été le cas dans la construction navale. L'un des avantages de la SNACN et de ce programme de construction, c'est que ça va stabiliser nos effectifs d'une certaine façon. Pour le moment, ils varient d'une semaine à l'autre. Il faut faire des mises à pied, notamment, quand il y a moins de projets à réaliser. Maintenant que nous savons que le travail va être plus régulier, nous ajustons nos plans de recrutement en conséquence.
Nous sommes d'ardents partisans des militaires, et un certain nombre de personnes de chez nous travaillent avec les militaires. Vous avez parlé d'établir des plans volontaristes, mais ils sont en cours de préparation, et ils deviendront certainement des éléments clés de nos futures politiques.
Le président : Oui, car nous voulons savoir si les employeurs ciblent vraiment ces employés potentiels qui possèdent toute une panoplie de compétences. Nos anciens combattants ont déjà largement fait leur part de citoyens, certains en ont physiquement payé le prix. Même si vous devez vous conformer aux règlements sur les droits de la personne en embauchant un ancien combattant souffrant d'un handicap, il me semble que ces gens-là devraient être les employés privilégiés d'une entreprise qui fait partie intégrante du complexe militaro-industriel du Canada. Pensez-vous qu'une entreprise de votre taille puisse l'affirmer ouvertement et servir ainsi d'exemple à d'autres?
M. McCarthy : Nous allons bien sûr inclure ce groupe dans nos plans de recrutement. Comme je l'ai dit, nous avons toujours été ouverts à des possibilités de partenariat avec les militaires. Cela ne s'est pas encore traduit par un programme concret, mais cela ne veut pas dire que le Groupe Irving ne soutient pas les militaires et leurs familles, bien au contraire. Donc, pour répondre à votre question, je dirai que cela fera assurément partie de notre stratégie de recrutement.
Le président : N'oubliez pas que vous allez gagner des montagnes d'argent avec ces contrats, contrairement à d'autres entreprises qui, elles, recrutent pourtant déjà des anciens combattants. Vous devez donner l'exemple, nous comptons sur vous, surtout dans les Maritimes, où retournent beaucoup d'anciens combattants après avoir servi dans les trois forces.
Quels sont les critères d'admissibilité à votre programme d'apprentissage? Un soldat de la marine peut-il présenter sa candidature, ou faut-il qu'il ou elle soit d'abord à votre effectif ou qu'il ou elle ait un certain niveau de compétence?
M. McCarthy : Ils doivent au préalable être admis au programme du Collège communautaire de la Nouvelle-Écosse, ce qui leur permet de suivre des cours théoriques au collège et de faire un stage pratique aux Chantiers Maritimes Irving.
Le président : Il faudrait peut-être envisager de leur accorder une subvention pour suivre ce programme. Ce serait peut-être une solution. Merci beaucoup.
Monsieur Hart, vous nous avez fait une description détaillée de ce que fait votre organisation. En revanche, vous ne nous avez pas donné de chiffres précis, si ce n'est que le taux d'attrition des Forces canadiennes est d'environ 6 000 membres par an, en moyenne. De plus, un grand nombre d'anciens combattants sont en phase de transition. Sur combien de candidatures travaillez-vous en ce moment?
M. Hart : Nous avons reçu plusieurs dizaines de candidatures au cours des deux ou trois premiers mois. Vous savez, le traitement d'un dossier ne se limite pas à un simple coup de téléphone. Par exemple, M. Shawn Thompson en a actuellement une quarantaine. En moyenne, il a au moins trois ou quatre discussions au téléphone avec ces gens-là, il les rencontre personnellement, et il appelle des entreprises pour présenter leurs candidatures. Le contact personnel joue un rôle important. J'ai dit tout à l'heure que nous allions bientôt passer la vitesse supérieure. À l'heure actuelle, nous n'avons qu'une seule personne pour traiter ces dossiers, mais nous allons en embaucher une deuxième. Une fois que les représentants régionaux seront désignés, ce n'est plus une quarantaine mais bien des centaines de dossiers que nous pourrons traiter. Je suis convaincu que le Programme d'aide à la transition des militaires ne pourra pas assurer le placement de 80 p. 100 de ces gens-là.
Il faut dire aussi que, dans certains cas, les anciens militaires que nous avons réussi à placer n'ont pas fait l'affaire, peut-être parce que leurs attentes étaient trop grandes. C'est un autre genre de problème auquel nous faisons face.
M. Thompson a des antécédents militaires et il savait pertinemment, quand nous avons commencé ce programme, que sans le plein accord des participants, ce type de programme n'a aucune valeur. Pendant les trois ou quatre derniers mois, il a sillonné le Canada pour parler de ce programme dans des séminaires. C'était le meilleur moyen de rencontrer personnellement un maximum de militaires en transition, tous réunis dans une même salle. Il a pu ainsi présenter le programme, pendant deux à trois heures, à près de 1 000 soldats au cours des derniers mois.
Le président : Cherchez-vous encore du financement ou bien ne s'agit-il plus que de donner le coup d'envoi?
M. Hart : Nous avons la capacité de nous développer rapidement. Nous avons la chance d'avoir des membres qui comptent parmi les plus grands industriels du pays. Nous n'avons donc pas besoin de leur dire quoi faire et comment le faire. Il suffit de leur dire quel est l'obstacle à surmonter, avec les paramètres et les objectifs, et ils savent comment se débrouiller.
Pour accélérer ce programme, nous ne pouvons pas nous contenter de faire appel à nos membres employeurs. Je vais vous dire franchement. Notre budget annuel s'élève à environ 600 000 $, et ça couvre les déplacements, le personnel et tout le reste. C'est un budget très efficient pour un programme quinquennal qui est financé pour l'essentiel par nos membres — nous n'avons plus qu'à agir. C'est là où nous en sommes pour l'instant. Nous espérons pouvoir obtenir tout le financement nécessaire auprès du secteur privé, parce que ça marche bien de cette façon. C'est comme ça que nous fonctionnons.
Le président : Comment faites-vous pour convaincre les syndicats que les militaires peuvent être syndiqués, car c'est une culture qui leur est tout à fait étrangère?
M. Hart : Nous n'en sommes pas encore là. Je ne sais pas si Du régiment aux bâtiments Canada ont une meilleure approche parce que c'est une organisation créée en partenariat avec les syndicats.
Le sénateur Day : J'aimerais avoir quelques précisions sur votre initiative. La première concerne l'embauche prioritaire. Monsieur Hart, vous avez dit espérer atteindre le chiffre de 300 membres employeurs. Le gouvernement fédéral a adopté une loi selon laquelle, toutes choses étant égales par ailleurs, il accordera la priorité d'embauche à un ancien militaire, en reconnaissance de ce qu'il a fait pour son pays.
Nous avons parlé tout à l'heure de l'équivalence à donner aux compétences des militaires afin qu'ils puissent avoir des chances égales de trouver un emploi dans le secteur privé. Moi, j'aimerais aller un peu plus loin pour que, toutes choses étant égales par ailleurs, l'ancien militaire ait la priorité d'embauche. Est-ce que c'est quelque chose que vous envisagez actuellement?
M. Hart : Oui, pour toutes les organisations avec lesquelles nous travaillons — ou tout au moins 80 p. 100 d'entre elles —, nous procédons de la même façon : nous commençons par avoir une première conversation avec le PDG ou même le conseil d'administration, lesquels prennent alors un engagement qui se répercute dans toute l'organisation, jusqu'au service de recrutement. Certes, le département des ressources humaines peut faire des recommandations, mais ce sont les agents qui font le recrutement. Ce serait bien d'adopter ce qui se fait aux États-Unis, mais ça a pris beaucoup de temps : les responsables des ressources humaines ont dit aux agents recruteurs que s'ils embauchent des candidats autres que ceux qu'ils auraient normalement embauchés, en l'occurrence des anciens militaires, et que cela ne donne pas les résultats escomptés pendant la première année, ils n'en seront pas sanctionnés pour autant. C'est quelque chose qu'ils sont en train de mettre en place. Nous savons, par expérience, que ça a de bonnes chances de marcher, mais, comme chaque fois qu'on expérimente quelque chose de nouveau, il faut supprimer toute menace de sanction en cas d'échec. Pour beaucoup de ces gens-là qui n'ont pas embauché beaucoup d'anciens militaires, c'est vraiment quelque chose de nouveau.
C'est donc avec la direction de l'entreprise que nous avons notre premier contact. Vous savez, c'est une décision importante, pour une entreprise, de modifier sa philosophie fondamentale qui est axée sur la performance. Nous aimerions pouvoir lui proposer d'embaucher ces anciens militaires pendant un an, pour voir si ça marche. Nous savons pertinemment que ça va marcher, mais si ce n'est pas le cas, vous ne serez pas pénalisés financièrement. C'est ce que nous aimerions leur dire. C'est comme ça que les choses se débloquent, quand vous supprimez tout risque financier pour l'entreprise.
Le sénateur Day : Voulez-vous dire que le gouvernement devrait avoir un programme pour encourager ce genre de chose?
M. Hart : N'y a-t-il pas un programme coop? L'équipe de transition du MDN a parlé d'un programme coop qui permet de verser une subvention pendant six mois, dans certaines circonstances.
Le sénateur Day : Ça relève du dispositif d'assurance-emploi.
M. Hart : Nous aimerions bien savoir comment fonctionne ce programme car ça éliminerait pratiquement les risques pour l'entreprise, puisque ça donnerait six mois aux militaires pour faire leurs preuves, et je suis convaincu qu'ils n'ont pas besoin de plus. J'aimerais bien en savoir davantage sur ce programme.
Le sénateur Day : Toute cette discussion sera consignée au compte rendu, et nous pourrons donc revenir là-dessus.
L'autre question que je voulais vous poser est un peu plus terre-à-terre. Avez-vous des données concrètes sur l'expérience des entreprises qui ont embauché des anciens militaires? Montez-vous un dossier là-dessus? Quand vous discutez avec les responsables de vos 300 entreprises membres, se disent-ils satisfaits des militaires qu'ils ont recrutés, dans l'ensemble?
M. Hart : Je pense qu'il y a encore beaucoup de travail de sensibilisation à faire. Les plus grandes entreprises de certains secteurs sont sans doute davantage sensibilisées au problème. Je sais que nous allons avoir beaucoup d'activité dans le secteur du gaz et du pétrole en Alberta. Notre chapitre local compte une trentaine de membres. C'est un secteur où se retrouvent beaucoup d'anciens militaires qui ont fait la transition, c'est donc un secteur qui leur est assez familier. Il y en a d'autres qui vont travailler dans le secteur financier, ou dans d'autres organisations avec lesquelles nous collaborons. Mais il y a tout un travail de sensibilisation à faire.
Heureusement que les gens ont le désir et la volonté de faire en sorte que ça marche. Ils veulent pouvoir aider eux qui ont fait des sacrifices pour nous. Ça, c'est fantastique. Il faut simplement que nous obtenions quelques succès, et ça commence à venir, pour que l'objectif se réalise. C'est une question d'éducation. Il faut sensibiliser les employeurs.
Le sénateur Day : Monsieur McCarthy, avez-vous quelque chose à dire en réponse à mes deux questions?
M. McCarthy : Je dirai simplement qu'en général, il n'est pas difficile de convaincre les entreprises d'embaucher des anciens militaires, en transition ou non. Étant donné les compétences et l'expérience qu'ils ont acquises, et leurs qualités personnelles, la plupart des organisations sont tout à fait disposées à les embaucher. Je ne pense pas qu'elles aient nécessairement besoin d'être convaincues, car les anciens militaires ont beaucoup à offrir à un employeur, au niveau de leurs antécédents, de leur expérience et de leur formation. Notre expérience nous montre qu'ils s'intègrent très bien dans notre organisation, et que cela ne nous a pas posé de problèmes.
Le président : Sénateur Day, vous permettez?
Le sénateur Day : Je vous en prie. Je voulais entendre sa réponse sur la priorité d'embauche, mais je ne pense pas qu'ils ont des programmes de ce genre.
Le président : Merci, sénateur.
Le sénateur Wallin : J'aimerais faire un dernier commentaire. Ne pensez surtout pas que c'est à vous que nous en attribuons la responsabilité, car nous apprécions beaucoup ce que vous faites, en tant que citoyens, avec les employeurs de notre pays, et vous ne ménagez ni votre temps ni votre argent. Nous ne vous demandons pas d'adopter des quotas ou des embauches obligatoires, car cela a des conséquences négatives. Je m'intéresse aussi à l'autre côté de la médaille. Nous allons devoir expliquer aux militaires que, d'après de nombreux témoignages que nous avons entendus, il faudrait mieux gérer les attentes des membres des Forces canadiennes qui vont faire la transition. Généralement, ce sont des gens qui se sont enrôlés à un jeune âge, avec une carrière et un avenir tout planifiés pour eux. Ils s'imaginent peut-être que ce sera la même chose dans le secteur privé, mais ce n'est pas le cas, et il faudrait mieux gérer ces attentes. Peut-on leur parler franchement de cela? Peut-on leur dire la vérité en face?
M. Hart : Notre directeur de projets est convaincu que c'est ce qu'il faut faire. C'est un ancien militaire, donc ça ne lui pose aucun problème.
Je vais vous soumettre une question intéressante. Nous sommes prêts à intervenir, mais ne pensez-vous pas, comme moi, que c'est une responsabilité partagée? Ce serait bien qu'avant de quitter les Forces canadiennes, les militaires aient quelqu'un qui leur dise : « Écoute-moi, voilà comment ça marche dans la vraie vie. » Je sais qu'on a essayé de le faire avec plusieurs programmes, mais ça ne se traduit guère dans la réalité. Je pense donc qu'il faut mieux gérer ces attentes, et que c'est une responsabilité partagée.
Le sénateur Wallin : C'est vrai de n'importe quelle profession. Les jeunes qui sortent de l'université s'imaginent que des emplois les attendent. Nous devrions peut-être recommander d'étudier le problème sous cet angle, la prochaine fois.
Le président : Je ne voudrais pas donner l'impression que nous nous sommes déjà entendus sur le contenu de notre rapport, car certains d'entre nous estiment que l'industrie canadienne a une grande responsabilité à l'égard de ceux qui la protègent contre toutes sortes de menaces, et que cette responsabilité devrait se traduire par une aide accrue à ceux qui ont déjà fait leur part au service de la nation.
Je vous remercie, monsieur Hart, des efforts que vous déployez, avec votre PDG, et de l'appui considérable que vous accordez aux centres de ressources pour les familles. Monsieur McCarthy, je vous remercie. Nous avons bien compris qu'à propos des réservistes, vous estimez qu'il faut protéger leurs emplois lorsqu'ils sont déployés pendant de longues périodes? C'est bien cela?
M. McCarthy : Oui, c'est ça.
Le président : Parfait. Merci beaucoup. J'apprécie grandement.
Mesdames et messieurs, la séance est levée.
(La séance est levée.)