Aller au contenu
AEFA - Comité permanent

Affaires étrangères et commerce international

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires étrangères et du commerce international

Fascicule 5 - Témoignages du 5 février 2014


OTTAWA, le mercredi 5 février 2014

Le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international se réunit aujourd'hui, à 16 h 18, pour étudier les conditions de sécurité et les faits nouveaux en matière d'économie dans la région de l'Asie- Pacifique, leurs incidences sur la politique et les intérêts du Canada dans la région, et d'autres questions connexes.

La sénatrice A. Raynell Andreychuk (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente : Mesdames et messieurs, nous constituons le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international.

Nous avons un témoin qui nous rejoint par vidéoconférence. Pour ce qui est de notre deuxième témoin de Victoria, je dois vous dire qu'il y a eu un problème avec le système de vidéoconférence et que malheureusement, on ne pourra pas le résoudre à temps. Nous allons devoir résoudre le problème pour pouvoir accueillir le témoin, probablement la semaine prochaine, mais nous sommes heureux que l'autre lien de vidéoconférence marche.

Nous poursuivons notre étude sur les conditions de sécurité et les faits nouveaux en matière d'économique dans la région de l'Asie-Pacifique, leurs incidences sur la politique et les intérêts du Canada dans la région, et d'autres questions connexes. Rex Hughes, professeur invité, du Centre canadien des études sur la sécurité mondiale, de l'École Munk des affaires internationales de l'Université de Toronto, nous rejoint de Seattle par vidéoconférence.

Nous n'allons pas vous poser des questions sur Seattle, mais nous vous souhaitons la bienvenue au comité. Ici au Parlement, nous vous demandons de faire des remarques liminaires, et ensuite les sénateurs vont vous poser des questions.

Bienvenue au Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international. Vous avez la parole.

Rex Hughes, professeur invité, Centre canadien des études sur la sécurité mondiale, École Munk des affaires internationales, Université de Toronto, à titre personnel : Merci beaucoup. D'abord j'aimerais remercier le comité de m'avoir donné l'occasion de parler du cyberespace au Canada et en Asie-Pacifique.

Nous vivons dans un monde intimement lié au cyberespace. Chaque jour, l'économie mondiale crée des liens plus vastes et plus profonds dans le cyberespace. Ça fait maintenant 30 ans que l'auteur américano-canadien William Gibson a popularisé le terme cyberespace dans son roman de science-fiction steampunk de 1984, Neuromancien. En 1984, l'Internet ne comptait que 1 000 hôtes et un téléphone cellulaire pesait plusieurs livres et coûtait plusieurs milliers de dollars.

Étant donné le sujet de notre discussion aujourd'hui, il convient de mentionner que M. Gibson a écrit Neuromancien lorsqu'il vivait sur la côte Pacifique du Canada, à Vancouver.

La région Asie-Pacifique apporte de grandes contributions à la cyberéconomie mondiale. En 2014, il y a près de 3 milliards d'internautes dans le monde, dont près de la moitié se situe dans la région Asie-Pacifique. Comme la plupart de ceux qui fréquentent le cyberespace, les peuples de la région Asie-Pacifique se servent de l'Internet à des fins de commerce, d'éducation, de santé, d'interaction sociale, et de divertissement. Selon l'OCDE et d'autres organisations d'études économiques, la cyberéconomie représente entre 1 et 8 p. 100 du produit intérieur brut des économies de la Coopération économique Asie-Pacifique, ou APEC. Le Canada représente entre 1 et 4 p. 100 du PIB, mais croît à un taux d'environ 10 p. 100 par an, donc il s'agit d'une tendance positive.

L'extension du cyberespace est une évolution positive sur le plan de la croissance du PIB, mais elle peut également réduire le PIB si on s'en sert à des fins illégales. On estime que la cybercriminalité coûte chaque année à l'économie mondiale entre 100 milliards et un billion de dollars américains.

Au Canada, l'entreprise de cybersécurité américaine Symantec, estime que la cybercriminalité coûte plus de 3 milliards de dollars à l'économie canadienne chaque année.

L'incident qui a eu lieu dans les magasins américains Target pendant la période des fêtes de 2013, où des cartes de crédit ont été compromises, montre à quel point le système banquier est devenu vulnérable aux cyberattaques. Heureusement, le Canada est très en avance sur les États-Unis pour la qualité de ses cartes à puce et technologies NIP.

Hélas, vu l'expansion démographique naissante et la croissance économique rapide de la région de l'Asie-Pacifique, les États qui la composent sont à la fois de majeures sources et victimes de cybercrimes. Vu le caractère interrelié de la cyberéconomie, ainsi que la multiplication des liens économiques entre le Canada et la région de l'Asie-Pacifique ou région de l'APEC, la cybersécurité de l'APEC devrait préoccuper le gouvernement du Canada.

Protéger les ressortissants canadiens des cybermenaces du XXIe siècle va exiger une vigilance perpétuelle et un engagement actif de tous les organismes responsables de la sécurité publique et de la défense au Canada. Vu qu'Internet est à 90 p. 100 aux mains du secteur privé, les partenariats public-privé efficaces sont des outils essentiels de lutte contre le cybercrime. Des organisations économiques régionales comme l'APEC et l'ANASE, l'Association des Nations de l'Asie du Sud-Est, et des organisations internationales comme Interpol ou Swift sont appelées à jouer un rôle important dans la lutte contre le cybercrime.

Plus cela ira, plus le cyberespace sera un volet important des questions de sécurité nationale de l'APEC. Qu'il s'agisse de la gestion des flux d'information étrangers, de l'exercice ou de la projection de leur force, les États élaboreront de nouvelles façons de faire un usage stratégique du cyberespace. Le Canada et ses partenaires économiques devraient se préparer pour le prochain « cygne noir » cybernétique.

Nous avons récemment assisté au déroulement dans le cyberespace de différends régionaux touchant la péninsule de Corée et l'est de la mer de Chine ou encore de manifestations antigouvernementales locales : campagnes patriotiques, surveillance des dissidents ou attaques ciblées de maliciels. S'il y avait escalade et que l'un des différends mentionnés devenait un véritable conflit armé, le cybercontrôle serait un facteur décisif de victoire dans le champ de bataille sur réseau du XXIe siècle.

Le Canada, comme les autres pays riches du G20, disposent de toute une gamme de stratégies et de politiques dans ses tentatives pour maximiser les intérêts nationaux et/ou les partenariats internationaux dans le cyberespace d'Internet.

Quand je travaillais au Centre canadien des études sur la sécurité mondiale de l'Université de Toronto, j'ai eu le grand plaisir de rencontrer de nombreux hauts fonctionnaires canadiens et de m'entretenir avec eux. Ces gens participent à l'élaboration de cyberstratégies et politiques nationales, dans le domaine des affaires étrangères, de la défense nationale, de la sécurité publique, des finances, du transport et d'autres. Nous avons hâte d'accueillir certains de ces hauts responsables lors de notre quatrième conférence sur le cyberdialogue, qu'organise le Centre canadien en mars.

Quand on compare la région de l'Asie-Pacifique avec d'autres régions ayant un poids économique important, on constate qu'elle figure parmi les plus technologiquement avancées dans le monde et qu'elle fabrique la majorité des circuits électroniques et des appareils qui assurent le fonctionnement du cyberespace. Grâce à l'un des modèles de développement économique les plus réussis jamais vu, bon nombre d'économies de l'APEC progressent dans la chaîne de valeur de l'industrie du savoir, notamment l'Inde, la Corée du Sud et Singapour. Il n'y a donc rien d'étonnant à ce que le nouveau PDG de Microsoft, prenant les rênes à Seattle, soit Satya Nadella, qui vient d'Hyderabad, en Inde.

Toutefois, malgré le succès économique retentissant de bon nombre d'économies de l'Asie-Pacifique depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale et la décolonisation, de nombreux pays ont encore beaucoup de chemin à parcourir avant de devenir des cyberdémocraties dignes de ce nom. C'est là un domaine où l'aide au développement du Canada peut changer les choses de façon positive, surtout en ce qui concerne les droits de la personne universels.

Étant donné le nombre grandissant de cyberdépendances dans l'économie mondiale et vu les défis pour les institutions que représentent certaines de ces dépendances pour les États en voie de développement de l'Asie-Pacifique, il est important que les agences de développement du Canada se penchent attentivement sur la façon dont les politiques d'aide au développement peuvent être plus cyberpropices. Je l'ai dit et je le répète : nous vivons vraiment dans un monde cybernétique interrelié.

Comme son voisin au sud, le Canada est une nation qui commerce à la fois avec l'Atlantique et le Pacifique. Elle a des liens géographiques, économiques et culturels uniques avec la région de l'Asie-Pacifique. La côte Ouest du Canada est particulièrement bien placée pour exploiter ces liens, surtout au fur et à mesure qu'immerge une cyberindustrie du savoir local.

L'investissement direct étranger et bilatéral peut profiter au Canada et à ses partenaires cybercommerciaux en Asie- Pacifique; cependant il reste des préoccupations légitimes en matière de sécurité dans certains secteurs sensibles, et des nouvelles mesures pour instaurer la confiance seront nécessaires afin d'apaiser certaines de ces préoccupations plus graves en matière de sécurité.

Je vous remercie encore une fois de m'avoir donné l'occasion de partager avec vous certaines de mes observations personnelles sur le cyberespace en Asie-Pacifique. Je suis prêt à répondre à vos questions et à discuter plus en détail de la façon dont le Canada et ses provinces peuvent le mieux profiter de leurs avantages naturels et comparatifs pour en arriver à un cyberespace plus prospère et plus sûr.

La présidente : Merci de votre exposé.

[Français]

La sénatrice Fortin-Duplessis : Monsieur Hughes, ma question a trait à la cybersécurité.

Lors de la dernière réunion du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense a comparu M. John Forster du Centre de la sécurité des télécommunications Canada.

Lors de son témoignage, M. Forster a affirmé que les menaces cyberattaques le gardaient éveillé toute la nuit. Il a donné l'exemple de l'Estonie qui a fait les frais de cyberterroristes il y a quelques années, des États-Unis qui sont régulièrement visés par les attaques, sans oublier les Iraniens qui ont eu beaucoup de difficultés avec Stuxnet.

Croyez-vous que le Canada fait suffisamment dans le domaine de la cyberdéfense pour faire face aux menaces qui pourraient provenir d'acteurs étatiques? Et croyez-vous que le Canada devrait se méfier de certains pays asiatiques?

[Traduction]

M. Hughes : M. Forster a raison de s'inquiéter de certaines des menaces auxquelles le Canada fait face dans le cyberespace. Qu'elles viennent particulièrement de la région de l'Asie-Pacifique ou d'ailleurs dans le monde d'aujourd'hui, ces menaces sont très réelles.

Encore une fois, cela dépend des secteurs qui sont menacés. En haut de la liste, les infrastructures essentielles sont probablement ce qui l'empêche de dormir. Prenons l'exemple de la Colombie-Britannique pour parler des infrastructures essentielles en Amérique du Nord. Il y a beaucoup d'hydroélectricité qui se rend vers les États-Unis et qui y revient. On a parlé au cours des derniers jours d'une station en Californie, dont le système a subi certaines anomalies. Si cela devait se produire, que ce soit au sud ou au nord de la frontière, l'effet d'entraînement serait assez grave.

Les bonnes nouvelles de ce côté, c'est que les gens responsables de ces systèmes, que ce soit pour l'infrastructure essentielle en matière d'électricité, les transports ou les réseaux aériens civils — pour passer en revue la liste — sont conscients des défis. La base technologique de l'infrastructure essentielle date dans de nombreux cas d'avant l'Internet. Maintenant que notre monde interrelié élimine les tampons dans de nombreux cas, même là où nous pensions qu'il y en a, les risques pour ces systèmes se sont accrus avec leur complexité lorsque nous sommes passés à des réseaux intelligents et ce genre de choses. Voilà probablement le genre de défi qui empêche M. Forster de dormir.

Nous pouvons discuter des menaces provenant de la région de l'Asie-Pacifique en général, mais les partenariats seront nécessaires. Ce n'est pas parce qu'il y a un réseau au Canada, un autre aux États-Unis et un autre au Mexique que ces réseaux fonctionnent de façon indépendante. Les partenariats seront essentiels sur le continent nord-américain. Puis il faudra se retourner vers la région de l'Asie-Pacifique, l'Atlantique, l'hémisphère sud, et maintenant l'Arctique, qui présente des défis pour l'infrastructure de la défense.

Nous avons discuté avec des officiers généraux du Canada et des États-Unis pour examiner les systèmes comme celui du NORAD, un héritage de la guerre froide, pour savoir quels genres de capteurs et de systèmes de surveillance seront nécessaires à l'avenir? La défense aérienne est-elle suffisante? Devrait-on tenir compte de la cyberdéfense? Voilà les choses qui tiennent occupés les planificateurs militaires, parce que s'il y avait une attaque grave, ces systèmes seraient mis à l'épreuve comme ils l'ont été lors des attaques du 11 septembre, et leur performance à l'époque n'a pas été très bonne. Heureusement, le Canada a répondu à l'appel. Les États-Unis ne seraient pas passés à travers cette crise sans le Canada.

Voilà les bonnes questions à poser. Je suis désolé de ne pas avoir de réponse précise en ce qui concerne la grille de menace ou l'ampleur des conséquences; nous continuons de nous pencher sur ces choses et nous faisons de notre mieux pour collaborer avec nos partenaires à l'extérieur du monde universitaire. Nous travaillons beaucoup avec l'OTAN et l'Union européenne, par le biais de Cambridge. J'imagine qu'il y aura des liens avec la recherche que nous faisons à l'École Munk, également.

[Français]

La sénatrice Fortin-Duplessis : Le cyberterrorisme vous inquiète-t-il?

[Traduction]

M. Hughes : Je le suis, mais peut-être pas pour les raisons que vous imaginez. Pour citer l'exemple des infrastructures critiques, historiquement il n'y a pas eu — au moins en Amérique du Nord, en Europe, ou dans les régions plus nanties de l'Asie-Pacifique — un grand nombre d'attaques terroristes sur les infrastructures critiques où sont les réseaux bancaires ou sur les autres aspects du commerce qui seraient les plus vulnérables.

Mais cela ne veut pas dire que c'est impossible. Des prophètes de malheur qui parlent d'un cyber Pearl Harbour ou d'un cyber 11 septembre qui s'en vient et qui serait encore plus sévère. Il y a d'autres éléments qui devraient davantage nous préoccuper dans la matrice des menaces, tels l'erreur humaine, ou simplement des systèmes compliqués qui sont au-delà de la capacité des humains.

Par contre, la dimension extrémiste me préoccupe, et nous avons vu dans ce monde changé par le 11 septembre que les natifs numériques dans les communautés extrémistes savent très bien se servir de la technologie. En même temps, les documents d'Edward Snowden ont révélé que la NSA et ses homologues au Canada font beaucoup d'efforts pour suivre l'utilisation des technologies des médias sociaux, tels Facebook, Twitter et Instagram, qui seraient utilisés par de jeunes extrémistes et par des terroristes en formation.

Alors la préoccupation est légitime. Peut-être qu'on peut parler de trouver un équilibre par rapport aux libertés civiles, parce que si on veut dépister ces acteurs sur ces réseaux, il faut le faire d'une façon qui respecte nos principes démocratiques et nos libertés civiles.

Le sénateur Downe : Vous êtes l'expert dans ce domaine, donc j'apprécie la leçon. Il me semble, en tant que non- initié, que nous dépendons énormément de cette infrastructure interconnectée. Est-ce qu'on ne devrait pas investir dans un réseau de secours, un réseau parallèle qui n'est pas aussi interconnecté?

M. Hughes : C'est une excellente question, monsieur. Nous vivons dans le monde de l'Internet, et l'Internet touche quasiment à tout. Je crois que cette vidéoconférence se fait grâce à un réseau numérique à intégration de services, le RNIS, qui est un héritage du réseau de téléphonie publique. Les compagnies téléphoniques gardent ces lignes parce qu'il existe un certain groupe d'utilisateurs qui ne veulent pas utiliser le réseau interconnecté, que ce soit pour des raisons de sécurité ou pour disposer d'un système de rechange.

Nous utilisons un deuxième réseau aujourd'hui, couplé avec Internet et d'autres protocoles. Je ne sais pas pourquoi nous avons perdu Vancouver ou Victoria, mais des réseaux redondants ont fait preuve de leur utilité, alors félicitations d'avoir gardé votre RNIS.

Bien évidemment, les infrastructures du ministère de la Défense nationale et de l'OTAN sont très intéressantes. L'OTAN est responsable d'un des plus grands réseaux d'infrastructures au monde. Il s'agit d'un réseau international à l'œuvre non seulement dans le cyberespace et dans les télécommunications, mais qui représente également des réseaux d'énergie et de gaz naturel.

Les organisations chargées de la défense savent que certains éléments des infrastructures critiques doivent être soit séparés, soit indépendants. Oui, dans certains domaines tels la médecine, la santé, où une crise pourrait éteindre de grandes parties de l'Internet, il faut ces systèmes de rechange.

Mais comme l'on a vu suite au passage de l'ouragan Katrina aux États-Unis et à la Nouvelle-Orléans, en particulier, des parties de l'Internet se sont montrées plus fortes que certaines parties des réseaux cellulaires ou de télécommunications dans certains cas. Il ne s'agit pas d'un choix entre deux alternatives, mais c'est une bonne idée d'avoir de la capacité. Dans la communauté universitaire, on a le réseau Internet 2, qui est un réseau séparé à haute vitesse. Et il y aura bientôt Internet 3. On fait de la recherche là-dessus, et les agences canadiennes devraient se tenir au courant pour pouvoir en tirer profit lorsque c'est possible.

Enfin, lors de la récente tempête à New York, on a vu qu'il y a eu un tel transfert vers les réseaux à large bande que certains fournisseurs de télécommunications de la région de New York enlèvent maintenant les vieilles lignes de téléphone en cuivre, et cela présente des défis. Les réseaux à large bande demandent beaucoup d'électricité, et si vous étiez à la maison pendant la tempête de verglas qui s'est abattue récemment sur Toronto, vous auriez constaté qu'une grande partie des réseaux à large bande ne peuvent demeurer en ligne que pendant cinq ou six heures, parce qu'il y a une pile dans votre modem. Une fois la pile morte, vous n'avez plus accès au réseau. Vous devez alors espérer que la tour cellulaire de votre voisinage demeure en service ou qu'un appui d'urgence a été prévu.

C'est très important. Il semble que Bell et les organismes de réglementation des télécommunications s'occupent du problème, mais c'est un problème économique et les bons incitatifs doivent être en place pour que les fournisseurs de réseau continuent de s'occuper des anciens réseaux afin que les nouveaux acteurs puissent concevoir des réseaux à large bande plus résistants à l'avenir.

J'espère que cela répond à votre question, qui était très pertinente.

Le sénateur Downe : Il y a deux domaines : la défense, protéger le pays, et l'économie. Parfois ces deux domaines sont distincts. Dans une réponse précédente, vous avez fait allusion à une attaque économique. Nous sommes tous devenus très dépendants des communications mobiles, dans mon cas, c'est le BlackBerry. Il y a 15 ans, je connaissais les numéros de téléphone de tous les gens que j'appelais. Maintenant je ne fais qu'appuyer sur leur nom sur mon BlackBerry; je ne connais plus les numéros.

Dans un pays européen, les systèmes sont tombés en panne il y a quelques années, et on a soupçonné les Russes pour différentes raisons, sans jamais pouvoir le prouver. Combien dépensons-nous pour éviter que cela se produise? Quel est le coût économique de la protection de nos systèmes?

M. Hughes : C'est une autre question intéressante, monsieur. Je suis désolé; je ne peux pas vous donner de chiffre exact. Je ne saurais même pas où le trouver actuellement.

Cependant, les entreprises de télécommunications et les fournisseurs de technologies de l'information comme BlackBerry en tiennent compte dans la conception de leurs réseaux pour déterminer quel niveau de redondance ils peuvent se permettre. En ce qui a trait aux événements exceptionnels — et vous avez parlé de menaces économiques, disons, envers la Bourse de Toronto — cela ne change rien qu'ils soient provoqués par une erreur humaine ou des machines ou, disons, un groupe extrémiste ou un État-nation qui est particulièrement malicieux et qui décide d'injecter des faux renseignements dans le système. Il y aura des conséquences et des coûts qui en découlent.

Au Royaume-Uni, en collaboration avec le bureau du cabinet, nous les avons aidés à élaborer un registre national des risques. Je ne sais pas si vous connaissez ce registre national des risques britannique qui provient du bureau du cabinet. Lorsque j'étais à Chatham House, nous les avons aidés à évaluer les cyberdépendances par rapport à une panoplie de menaces, allant des pandémies aux inondations aux attaques extraterrestres. C'était une nouvelle façon de penser, et je pense que cela a eu un effet positif au Royaume-Uni. Il serait intéressant d'en savoir plus à propos de l'approche canadienne conjointe avec le gouvernement pour répondre à ce défi. Il est important.

Le sénateur Downe : Je sais que la CIA fait des simulations semblables aux États-Unis dans de nombreux cas. Je ne sais pas si le Canada en fait.

Je vais poser ma dernière question. Suite à des fuites récentes dans les médias, nous avons entendu parler de la cueillette de renseignements qui se fait à différents niveaux. Devrions-nous nous inquiéter, particulièrement d'un pays comme la Chine, où beaucoup d'entreprises de technologies semblent avoir des liens forts avec l'armée, que des appareils dans cet équipement qui nous est vendu servent à d'autres fins?

M. Hughes : Selon moi, la Chine devrait être un sujet de préoccupation dans toute stratégie nationale prudente. En fin de compte, la question est de savoir à quel point nous avons confiance dans la Chine, véritable géant économique. En Chine, le système est mixte. La Chine est une entité qui regroupe de multiples économies. Prenez l'exemple de Microsoft dans la région. Cette entreprise jouit d'une très bonne confiance en Chine parce qu'une proportion de plus en plus importante de sa R.-D. s'effectue maintenant à Pékin et à Shanghai. La confiance règne dans certains domaines, ce qui représente une source d'inquiétude pour les agences de sécurité. On peut toujours avoir à faire à des moyens détournés. C'était le cas, entre autres, dans l'affaire BlackBerry au Canada ainsi que dans l'affaire Nortel, entreprise avec laquelle nous avons étroitement collaboré à l'Université Cambridge. Leur siège social ressemblait à une de ces ambassades de l'époque de la guerre froide. Il y avait tellement d'appareils d'écoute électronique qu'on ne savait plus où aller pour parler librement. Qu'il s'agisse ou non de l'œuvre d'un pays en particulier, ces exemples montrent que l'espionnage économique peut faire partie de l'équation. À l'avenir, il nous faudra penser à la manière de concevoir les systèmes virtuels et physiques qui sauront le mieux résister à ce type d'espionnage. Ce qui se fait à l'heure actuelle pour prévenir la pose d'appareils d'écoute électronique lorsque les pays font construire des ambassades est fort intéressant. La manière de s'y prendre a considérablement évolué.

En effet, c'est préoccupant. L'introduction, par des moyens détournés, dans des systèmes d'infrastructure essentielle risquerait de causer le plus de dommages. Cela nous ramène à l'observation que j'ai faite plus tôt au sujet de la confiance et, dans la région de l'Asie-Pacifique, de l'importance de se tourner vers les institutions auxquelles le Canada participe déjà, comme le Forum régional de l'ANASE en matière de défense. Il faudrait promouvoir la confiance dans ce domaine. Je crois que la Marine royale du Canada participe à l'exercice RIMPAC. Il s'agit de défense pure et dure, mais cela peut être intéressant pour les institutions économiques. Le programme Strategic Defence Review du gouvernement britannique a rompu avec ce qui se faisait auparavant, soit élaborer les stratégies en matière de sécurité et d'économie séparément, et cette approche conjointe est de plus en plus courante au Royaume-Uni et parmi les pays de l'OTAN. Il est maintenant important de considérer ces enjeux comme allant de pair.

Le Canada est membre de l'APEC et a accueilli un de ces sommets. L'APEC est un forum économique, mais j'aimerais attirer votre attention sur le fait que, comme après le 11 septembre, il se produit souvent une situation de crise de pouvoir lors de l'arrivée des dirigeants au forum. La question de la sécurité se joue en parallèle au sommet. Les réseaux logistiques sont au cœur de nos préoccupations. Quand j'étais à Singapour, je voyais par la fenêtre de ma chambre d'hôtel une série de navires, côte à côte, qui se profilaient pendant des kilomètres à l'horizon. Des centaines de navires empruntent le Détroit de Malacca. J'ai rédigé un article au sujet de la cybersécurité maritime, et c'est une question qui devrait intéresser le Canada en tant que nation du Pacifique. On pourrait également aborder la question des menaces à l'endroit de la chaîne d'approvisionnement logistique. Je fais allusion aux menaces qui pourraient toucher tous les maillons de la chaîne, depuis le port de Vancouver jusqu'à celui de Seattle, du bureau au couloir marchandise en passant par les aéroports et les ports, nous n'y avons pas suffisamment réfléchi. Il serait intéressant de collaborer davantage avec les organisations canadiennes, ainsi qu'avec nos partenaires commerciaux vulnérables. Le port de Singapour est l'un des plus avancés au monde. IBM, Sun Microsystems et d'autres s'y sont pris très tôt et ont conçu une installation portuaire moderne très sophistiquée. Le fait qu'on puisse exploiter ces vulnérabilités en temps de paix doit les empêcher de dormir la nuit. En temps de guerre, le risque est encore plus important, puisque les organisations de défense comptent sur le réseau commercial et Internet. Quatre-vingt-dix pour cent de ce qu'elles acheminent se fait par transporteurs commerciaux, même chose pour les réseaux logistiques. C'est inquiétant en raison de la complexité des systèmes. Il peut se produire des choses dont nous n'entendrons parler que beaucoup plus tard. C'est pourquoi, selon moi, ce domaine devrait figurer parmi nos préoccupations et nous devrions l'aborder avec énormément de précautions.

[Français]

La sénatrice Verner : J'aimerais enchaîner avec un article publié par la Presse canadienne en septembre 2012, qui faisait état des inquiétudes de Sécurité publique Canada indiquant que des systèmes informatiques situés au Canada étaient de plus en plus infiltrés, puis utilisés par des pirates informatiques pour lancer des cyberattaques ailleurs dans le monde.

Pouvez-vous nous dire si c'est une pratique qui semble se répandre de plus en plus?

[Traduction]

M. Hughes : On retrouve d'excellents rapports sur le site de Citizen Lab de l'Université de Toronto, et je vous encourage à les télécharger. On y recense les cas où des pirates informatiques opportunistes ont abusé de certains systèmes canadiens partenaires. Les fournisseurs de services courent toujours le risque de se faire piéger et d'être utilisés à des fins malveillantes. Cela nous inquiète. Selon moi, la protection doit reposer sur un mélange équilibré de règlements et de mesures incitatives. Je le répète, je ne puis parler au nom du gouvernement canadien, mais il me semblerait que ce dernier est encore en train d'ajuster la formule afin d'atteindre ce juste équilibre. Et voilà où le comité entre en jeu. Le contrôle démocratique et l'orientation que vous pouvez fournir sont cruciaux car les fournisseurs de services ne veulent pas être aux prises avec d'abominables clients qui leur causeront des problèmes, et il n'est pas dans l'intérêt du gouvernement de mettre en place des mesures incitatives ou des règlements à outrance. Cela nuirait à ces types de services.

La situation est difficile. Nous l'avons vu par le passé, les répercussions sont plutôt négatives pour toutes les parties prenantes. J'espère que le comité pourra étudier la question de près. Le Citizen Lab et le groupe du professeur Deibert seraient enchantés de vous aider dans vos démarches, ils disposent d'une grande quantité de données qui pourraient vous être fort utiles.

[Français]

La sénatrice Verner : Depuis 2010, le Canada a mis en œuvre trois initiatives concernant la cybersécurité nationale et internationale : la stratégie de cybersécurité du Canada, la table ronde transculturelle sur la sécurité et un plan d'action sur la cybersécurité entre Sécurité publique Canada et le Département américain de la sécurité intérieure.

Selon vous, ces trois initiatives sont-elles vraiment efficaces pour contrer les menaces provenant de la région Asie- Pacifique?

[Traduction]

M. Hughes : Merci, madame la sénatrice. Je dois avouer que je n'ai pas consulté ces documents et ces rapports depuis longtemps, mais je crois que les initiatives dont vous parlez permettent de synchroniser les divers paliers du gouvernement, à l'échelle nationale ainsi qu'à l'international. Je ne crois pas qu'on y mette l'accent sur la région de l'Asie-Pacifique, mais je passerai en revue les rapports et je serai en mesure de mieux répondre à votre question plus tard, si vous le désirez.

La collaboration avec des pays aux vues similaires et les efforts déployés en matière de cybersécurité se sont concentrés sur la région de l'Atlantique, sur l'OTAN, et nous avons probablement négligé quelque peu la question de la région de l'Asie-Pacifique. Il ne faudrait pas tarder à le faire.

Quant au travail des universitaires, les sujets d'étude sont également très diversifiés. Certaines des conférences que nous avons organisées de concert avec le MIT et Harvard se sont concentrées sur la région de l'Atlantique. Il est difficile de faire venir des représentants de la région de l'Asie-Pacifique. J'ai fait allusion à la quatrième conférence annuelle sur le cyberdialogue que nous organisons. Les représentants de la région de l'Asie-Pacifique y seront plus nombreux, mais ce n'est pas suffisant. C'est un legs de l'alliance atlantique de l'après-guerre froide. Le virage économique que nous connaissons placera les événements principaux du siècle en cours dans la région de l'Asie- Pacifique, c'est pourquoi, selon moi, nous devrions tous nous tourner vers cette région.

En résumé, le manque actuel d'intérêt à l'égard de la région de l'Asie-Pacifique ne place pas cette dernière au centre de notre attention. J'espère qu'avec l'aide de votre comité on pourra faire changer les choses.

Le sénateur Dawson : La sénatrice Fortin-Duplessis et le sénateur Downe ont tous deux évoqué la cyberattaque qui s'est produite en Estonie. C'est le prix à payer. L'Estonie est, de loin, le pays le plus connecté au monde. La qualité des services Internet sans fil y est nettement supérieure que dans les autres pays d'Europe. Leur cabinet se sert exclusivement d'ordinateurs, ils n'utilisent plus de documents papier. Tous les Estoniens ont l'Internet sans fil. Ils paient les parcomètres à l'aide de leur téléphone depuis déjà 10 ans. Ici, c'est une nouveauté.

C'est le prix à payer au nom du progrès. Ils avaient une longueur d'avance, ce qui faisait d'eux une cible facile de cette attaque qui, selon certains, aurait été orchestrée par les Russes. C'est le prix à payer. Ils étaient en avance, ce qui leur a permis d'intégrer la communauté européenne avant les autres pays baltes. Ils ont également intégré la zone euro plus rapidement. C'est le prix à payer pour le progrès. Ils ont inventé Skype, réussite peu banale.

Il fut un temps où nous étions à la fine pointe de la technologie. Ils ont une politique numérique, ils ont une stratégie numérique gouvernementale. Je ne critique pas l'administration existante. Le gouvernement précédent n'avait pas de plan numérique non plus. Nous n'avons pas de stratégie numérique au Canada. Or, nous étions en avance sur tous les autres. Je suis président du Comité des transports et des télécommunications, et je peux vous dire que nous avons étudié la question du numérique au Canada. Nous étions des pionniers pour ce qui est du téléphone et de la télévision. Cela nous avait mis à risque, car dès lors qu'on est pionnier, on est vulnérable. Tout le monde sait ce qui s'est passé à Nortel, qui était la plus grande organisation de ce genre au monde.

Comme mes deux collègues, je conviens qu'il y a un risque lié à une dépendance sur le numérique, mais il y a également des avantages. Par exemple, sans le numérique, il n'y aurait pas de progrès. L'inflation serait plus élevée sans la concurrence que peut livrer Internet, qui nous permet d'acheter des produits à moindre coût. Oui, bien entendu, le numérique a ses conséquences. Certes, il exerce des pressions sur le secteur des livres et des librairies au Canada, mais il représente un progrès net. Je ne suis pas en désaccord avec mes collègues, je dis tout simplement que c'est le prix à payer.

Je voudrais que vous me disiez comment nous pouvons nous assurer de revenir à la tête du peloton technologique, tout en surveillant et en contrôlant l'exploitation des mégadonnées, comme nous l'avons vu une fois de plus cette semaine. Je possède un grand nombre de ces outils. Je ne sais pas si des gens me surveillent, mais si c'est le cas, ils n'auront aucun mal à me retrouver. Comment pouvons-nous donc être en tête du peloton, sans toutefois nous rendre trop vulnérables?

M. Hughes : Merci, sénateur. Je crois que vous avez raison. Les Estoniens se sont montrés un peu trop ambitieux pendant cet incident avec la Russie, et ils ont bien vu combien on peut être vulnérable lorsqu'on est la cyberéconomie européenne la plus avancée et qu'on subit une attaque des réseaux bancaires, des systèmes de point de vente et des parcomètres électroniques. Ça peut se convertir en véritable crise, surtout si l'échelle avait été plus grande, comme cela aurait été le cas au Canada ou aux États-Unis. En fin de compte, nul ne peut arrêter le progrès. Même les meilleurs réglementateurs seront toujours devancés.

Mais je crois que vous voulez surtout savoir comment le Canada et ses partenaires ont pu perdre leur avance dans ces domaines. C'est probablement une question d'incitatifs économiques. Je peux vous parler de ce qui se passe au Royaume-Uni, car, vivant à Cambridge, que l'on appelle la Silicon Valley du Royaume-Uni, on y pense tout le temps. Le gouvernement local, régional et national, ainsi que l'Union européenne, cherchent toujours à trouver des moyens de créer des incitatifs pour assurer la compétitivité, sinon l'excellence. Je peux vous dire qu'au niveau universitaire, et je pense que ceci sera vrai également pour l'Université de Toronto, le projet MaRS, les incubateurs, et ensuite BlackBerry, à Waterloo, on y trouve beaucoup d'innovations. C'est peut-être même vrai sur la côte du Pacifique, puisque l'on doit livrer concurrence aux pays de l'Asie-Pacifique, et donc je pense que ce sont vraiment les incitatifs qui rendent possible la création de nouveaux capitaux.

Ce matin, en chemin, je pensais justement au fait que la côte Ouest est orientée vers l'Asie, et ce au nord comme au sud de la frontière. Ainsi, les investissements viendront naturellement de la région de l'Asie-Pacifique. On constate déjà une présence croissante des investissements de la Banque de Chine. Regardez donc Vancouver, et son développement. J'étais à la conférence Asie-Pacifique organisée par la Fondation Asie-Pacifique au mois de juin l'année dernière. Il était intéressant de voir combien de banques parlaient des nouveaux capitaux qui affluaient; même des banques britanniques y étaient : la Bank of Hong Kong, la Barclay's, et cetera. Et quels investissements les intéressent? Eh bien, l'immobilier, bien entendu, et tous ces nouveaux immeubles doivent être occupés.

Je pense que les compagnies de haute technologie commencent à laisser leur marque sur l'économie canadienne, surtout en Colombie-Britannique. D'ailleurs, le secteur du cinéma représente un tremplin vers le numérique à Vancouver. En fait, le secteur du cinéma est si étroitement intégré à celui du numérique et des médias que ces trois secteurs ne font plus qu'un.

Mais si vous voulez vous concentrer sur les secteurs canadiens ancrés dans le cyberespace et la technologie Internet, il faut livrer concurrence à d'autres régions qui cherchent à attirer ces industries : il faut donc atteindre un juste équilibre de bonne réglementation, d'incitatifs fiscaux et économiques, et de stratégies de développement régional. Mais il existe déjà de nombreux exemples à suivre.

Par exemple, dans la région de l'Asie-Pacifique, il y a le miracle de croissance asiatique, que vous n'êtes pas sans connaître. Tout a commencé par de bonnes politiques d'utilisation des terres — il y a d'ailleurs des livres et des articles très intéressants sur le sujet — ensuite, ces politiques ont été suivies de politiques de formation des capitaux, et d'investissements étrangers directs. Même les pays développés ne peuvent pas se reposer sur leurs lauriers. Même si le Canada, comme vous l'avez dit, a perdu du terrain, il se peut que la prochaine Nortel ou le prochain BlackBerry pointe à l'horizon et qu'ils ne demandent qu'un petit coup de pouce du gouvernement. Ce sera d'ailleurs le thème de la prochaine conférence INET (Institute for New Economic Thinking) qui doit avoir lieu à Toronto en avril. Il y aura un module INET à l'Université de Cambridge, au Royaume-Uni, qui va aborder cette question du point de vue technologique. Ils ont d'ailleurs organisé leur conférence annuelle l'année dernière en Asie pour la première fois, à savoir à Hong Kong.

En ce qui concerne les incitatifs, j'aimerais savoir comment le comité va aborder la question, car le commerce avec l'Asie-Pacifique représente une mine d'or. Il y a tellement d'occasions qu'il est difficile de savoir par où commencer. À la conférence de l'Asie-Pacifique, ainsi qu'ailleurs, j'ai parlé à un grand nombre de banquiers et d'entrepreneurs riches en capitaux d'investissements qui ne demandent qu'à faire affaire avec le Canada et avec l'ensemble de la côte Ouest. La côte Ouest de l'Amérique du Nord est un pôle de technologie grâce à Silicon Valley, mais toutes les régions d'un bout à l'autre de la côte en profitent. La Silicon Valley s'étend virtuellement jusqu'à Guadalajara, au Mexique, qui est en train de créer son propre pôle technologique, et jusqu'à Vancouver, voire plus loin encore, et c'est ce qui alimente la transformation et la collaboration. Il s'y passe toutes sortes de choses intéressantes et je pense que les sénateurs sont encore mieux renseignés que moi sur le nombre et la nature d'entreprises et d'organisations qui profitent de toutes ces nouvelles occasions.

Je pense que votre question, qui est très pertinente, est de bon augure.

Le sénateur Dawson : Très brièvement, vous citiez quelqu'un d'autre, mais la prochaine guerre commencera dans le cyberespace, ce qui est probablement vrai, et lorsque j'ai critiqué le gouvernement, j'ai critiqué le gouvernement précédent ainsi que le gouvernement actuel.

Étant donné que nous n'avons pas de plan numérique, qu'allons-nous faire lorsqu'il y aura une cyberguerre et que le Canada est sans défense? Quelle sera notre stratégie d'approvisionnement? Nous connaissons tous les problèmes que le gouvernement a eus avec sa politique d'approvisionnement pour la Défense nationale. Le gouvernement a enfin agi cette semaine, et je pense que c'est un pas dans la bonne direction.

Mais l'approvisionnement pour une cyberguerre doit se fonder sur une politique numérique du gouvernement, et bien que je m'écarte de notre sujet, si nous examinons nos futurs concurrents asiatiques, l'on constate très vite qu'ils ont tous des politiques numériques. Ils ont même des ministres responsables de la gestion des politiques numériques de leur pays.

Nous n'avons pas la partie facile. Si la prochaine guerre doit commencer dans le cyberespace, j'aimerais savoir que nous avons au moins une politique d'approvisionnement qui prévoit comment nous allons y réagir.

Je ne sais pas si vous avez des commentaires à faire là-dessus, mais l'un des avantages de l'internet, maintenant, c'est qu'il peut me renseigner. J'en sais probablement plus sur vous grâce à ce que je peux y lire que vous en savez sur vous- même, parce que j'ai tout cela ici, dans Google. Mais c'est une réalité, et je trouve que nous avons un certain retard.

M. Hugues : Merci, sénateur. Je suis heureux que vous ayez trouvé certains de mes articles sur Internet. Les universitaires s'inquiètent de n'être lus que par une seule personne, alors il est bon de savoir que nos articles atteignent les plus hautes sphères du gouvernement.

La seule chose que j'ai à dire, c'est qu'il n'y a jamais de mal à avoir une stratégie, même si elle n'est pas appliquée à la lettre. Il existe de bons exemples pour l'illustrer. Je pense que le Royaume-Uni fait un meilleur travail d'élaboration de stratégies que peut-être les États-Unis et le Canada. Elles ne sont pas toujours mises en œuvre, et parfois, les ressources manquent pour le faire.

Mais du haut de la hiérarchie, du bureau des politiques du premier ministre, et cela remonte aux premiers jours de l'Internet, les gens de l'industrie et de la BBC ont été consultés, qui avaient de l'expérience et qui avaient aussi une vision de tous les objectifs à atteindre, et cette expertise a été intégrée au gouvernement et centrée pour déterminer s'il s'agissait d'une stratégie d'administration en ligne, ou de l'élaboration de ce qui est appelé Ofcom, le bureau des communications, qui est l'organisme britannique de réglementation des télécommunications. C'est vraiment exemplaire, pour le Commonwealth.

J'ai travaillé pendant un certain temps, et les délégations venaient les unes après les autres voir comment fonctionnait le modèle britannique. Il a fallu cinq autorités de réglementation avant que les médias imprimés, les télécommunications et la radio soient fusionnés en un super organisme de réglementation, qui a consacré ses premières années uniquement à l'élaboration de la stratégie. J'ai eu la chance de collaborer à un examen stratégique des télécommunications qui, vraiment, a placé le Royaume-Uni à l'avant-garde sur le plan de la libéralisation du spectre sans fil, et le pays a été l'un des premiers de l'Europe à être dotés de la technologie sans fil 4G, prenant ainsi plusieurs longueurs d'avance sur d'autres pays.

Je pense que vous avez tout à fait raison, et je suis heureux que vous fassiez des recherches sur Google, parce qu'on peut y trouver certaines de ces stratégies, et peut-être s'y trouve-t-il aussi des exemples que le Canada peut suivre.

Les écoles de guerre du Canada font à mon avis un très bon travail, sur le plan de la défense, quand elles étudient les défis à relever. Je lisais des articles hier soir, et j'y ai trouvé une réflexion de très grande qualité, aussi bonne que partout ailleurs, mais là où le bât blesse, c'est qu'on a un peu de mal à les traduire en politiques publiques et en stratégies nationales.

Il pourrait y avoir des occasions de le faire plus rapidement, mais c'est une excellente question. Je serais heureux de vous orienter vers celles sur lesquelles nous avons travaillé, du moins à Cambridge, si cela vous intéresse.

Le sénateur Demers : J'aimerais que vous me disiez s'il y a du vrai dans ces propos : le Canada a la réputation en Asie d'assurer une présence, sans établir des relations à long terme pour autant.

Apparemment, d'après ce que j'ai lu, ce n'est pas toujours le cas. Le Canada est un pays puissant. Qu'en dites-vous?

M. Hugues : Eh bien, je dois dire que mon expérience de la représentation du Canada dans la région Asie-Pacifique a été bonne. Mais je ne suis peut-être pas le mieux placé pour parler de ses retombées à long terme.

Le Canada a joué un rôle déterminant dans le renforcement des institutions et des forums régionaux de l'APEC, où sa présence est solide et où il jouit d'un grand respect.

Je ne peux, je le répète et j'en suis désolé, citer d'exemples précis d'occasions où j'ai pu voir le gouvernent échouer dans cette démarche, mais c'est intéressant, et c'est probablement une perspective que nous devrions garder à l'esprit dans nos rapports avec les Affaires étrangères et d'autres ministères qui pourraient en avoir connaissance.

De façon générale, on a peut-être le sentiment qu'on ne s'intéresse pas suffisamment à la cybernétique et que les programmes ne se rendent pas suffisamment jusqu'en région. Cela est possible, mais cette perspective est très intéressante, et j'aimerais que vous puissiez m'en dire plus sur votre point de vue là-dessus.

La présidente : J'ai deux questions pour vous, professeur. Vous avez parlé du cyberespace et de certains de ces avantages et inconvénients. Quand je pense à l'Asie-Pacifique, ce qui me préoccupe, ce sont les pays. Si nous prenons une orientation négative, pour parler des gouvernements qui doivent protéger leurs données, et cetera.

Quand on pense à l'Asie-Pacifique, est-ce une question de politiques et d'idéologies, ou est-ce plutôt une question du manque d'institutions et de capacités qui fait obstacle à la collaboration avec les pays?

M. Hughes : Parlez-vous des politiques et des idéologies du côté Asie-Pacifique, de celles du Canada, ou peut-être même des deux?

La présidente : Oui. Dans tellement de domaines on dit que la Chine, par exemple, et certains autres pays se développent, mais que leurs institutions ne sont pas compatibles avec les nôtres. Leurs lois et mesures protectrices n'existent pas. On soulève constamment la question de la propriété intellectuelle. Est-ce un obstacle? Ma deuxième question porte sur les avantages dont nos industries et notre gouvernement pourraient tirer profit.

Donc, quels sont les obstacles? Vous avez certainement bien exposé les avantages pour le monde réel dans lequel nous vivons.

M. Hughes : Je vous remercie pour cette précision.

Vous avez touché en plein dans le mille à propos des domaines les plus contestés des études asiatiques dans les universités, à savoir les incitatifs ou le fossé culturel entre l'Occident et certaines parties de l'Asie. C'est là le thème d'un débat qui dure depuis des siècles.

Il existe de nos jours, je pense, plusieurs écoles de pensées. J'ai lu un article intéressant du professeur Ikenberry, de l'Université Princeton, sur le libéralisme et le type de valeurs occidentales des démocraties ouvertes et systèmes capitalistes, qui se demandait si des pays comme la Chine finiraient par adopter ces mentalités. Selon lui, oui, même si certaines de leurs politiques les plus ouvertes en font douter. Tout montre en effet, si l'on observe ce que font la Chine et d'autres pays à l'idéologie différente de celle de l'Occident, qu'ils prennent la voie des institutions libérales, alors que l'Organisation mondiale du commerce ou l'APEC ont été créées largement selon un modèle occidental.

C'est là un point de vue. Mais il y en a un autre, comme celui de Samuel Huntington, si on se reporte à son excellent ouvrage intitulé The Clash of Civilizations. Sa thèse singulière a fait forte impression. Parlant des États-Unis et de l'Amérique du Nord, il émet l'hypothèse que c'est l'immigration en provenance du sud de la frontière américaine qui représenterait un défi en ce sens que le choc des cultures créerait des tensions qui iraient jusqu'à modifier la perspective du pays sur l'extérieur. Il existe donc toutes sortes d'écoles de pensées et il n'y a probablement pas de réponse juste, parce que l'histoire est encore en train de se faire.

Tout comme le professeur Ikenberry, je crois personnellement que l'Occident a connu diverses réussites lors de la création d'institutions, surtout dans la foulée de la Seconde Guerre mondiale, et que l'idéologie de certains pays est bien différente de la nôtre. Regardez ce qui se passe avec l'Iran, qui essaie tout d'un coup de trouver des moyens d'intégrer des organisations comme l'OMC. Ces organisations sont fortement occidentalisées et se situent certes à l'opposé de la position qu'adoptent le clergé et les fonctionnaires face à la population du pays, mais on se dirige en quelque sorte vers un accommodement mutuel, une certaine coopération qui serait positive pour tous et qui permettrait, du moins, de rallier ces pays du point de vue économique. Les résultats sont plutôt bons mais ça ne sera pas toujours facile.

La crise en mer de Chine orientale, qui risque de s'étendre bientôt à la mer de Chine méridionale, représente évidemment un sérieux obstacle, et si la situation dégénérait véritablement, l'économie de certains pays pourrait même s'effondrer.

Je ne sais pas si mon point de vue vous intéresse, mais il s'avère que le Canada et ses partenaires pourraient prendre des mesures, du moins dans le cadre des institutions, qui faciliteraient la coopération avec les pays aux idéologies distinctes. Mais personne ne peut prédire ce qui se passera dans les cas les plus difficiles.

La question cybernétique est intéressante; nous distinguons aujourd'hui le cyberespace de l'espace réel, et c'est souvent plus pratique sur le plan conceptuel, mais la prochaine génération, ceux qui seront nés à l'ère numérique ainsi que les agents du service extérieur de l'avenir auront, eux, une perspective bien différente. Comparez la perception de la vie privée des jeunes qui utilisent Facebook et d'autres médias sociaux à la nôtre, même si l'approche des médias sociaux est maintenant bien différente. Tout comme le secteur privé, l'espace cybernétique a évolué. Amazon, qui a vu le jour il y a à peine 10 ans, est maintenant le premier détaillant au monde. Cette année marque les 20 ans de la commercialisation d'Internet, année où la Fondation nationale des sciences des États-Unis avait permis sa mise en marché aux États-Unis et ailleurs.

Il faudra, à l'avenir, que le Canada tire profit de l'arrivée de la nouvelle génération, surtout dans le milieu universitaire. Lorsque je repense à la conférence sur le cyberespace qui s'est tenue à Londres il y a quelques années, je constate que le Royaume-Uni s'en est déjà rendu compte. Je crois que cette conférence se tiendra peut-être au Canada sous peu. Il est très important de faire participer ceux qui formeront la prochaine génération d'agents du service extérieur et de leur donner les moyens de concevoir des stratégies numériques pour l'avenir.

C'est ce qui pose problème au Canada et à de nombreux autres pays. C'est la même chose aux États-Unis. Au sein du département d'État, un tout petit bureau est responsable de la gestion des stratégies en matière de liberté numérique héritée du gouvernement précédent. Les ressources et le savoir-faire se font rares. Le Canada, si tel était son intention, pourrait dégager les ressources appropriées ce qui lui permettrait de se placer devant plusieurs de ses pays voisins en plus d'y apporter sa perspective unique. Les liens géographiques, économiques et culturels sont déjà en place. Pourquoi ne pas chercher de nouveaux moyens de les exploiter afin de réduire l'écart à l'origine de ces tensions de nature idéologique, ce qui contribuerait à un avenir cybernétique meilleur et même à un avenir meilleur pour l'Asie-Pacifique en général?

La présidente : La recommandation que vous faites concernant le service extérieur est fort intéressante. Y a-t-il d'autres domaines dans lesquels nous pourrions nous démarquer avec un peu d'efforts, et qui nous permettraient d'avoir un avantage sur les autres pays, stratégiquement parlant bien sûr, dans le Pacifique?

M. Hughes : Oui. En plus des mesures que pourrait prendre le ministère des Affaires étrangères, et je repense à mes visites récentes à Vancouver, on pourrait faciliter la vie des entrepreneurs de la région de l'Asie-Pacifique, surtout de ceux qui proviennent d'économies insulaires telles que Hong Kong et Singapour et qui ont des tonnes d'argent à investir. En discutant avec eux je me suis aperçu qu'ils ressentaient une certaine affinité culturelle. Ils adorent se rendre dans les meilleurs restaurants de la ville pour manger du dim sum et contempler les magnifiques condos où ils pourraient vivre, tout cela les attire bien évidemment. Les connexions aériennes entre la côte du Pacifique du Canada et l'Asie sont de plus en plus nombreuses, mais il pourrait y avoir d'autres possibilités, à l'échelon régional ou municipal, de créer des plateformes pour faciliter ces échanges.

Pensez à Silicon Valley, à l'expérience de participer à des événements qui se tiennent dans les universités Stanford et Berkeley. En plus des événements formels, on y organise des événements informels. Je n'ai pas passé suffisamment de temps à l'Université de la Colombie-Britannique. C'est incroyable de voir à quel point le campus a changé, et l'apport de capital asiatique y a évidemment contribué.

Il faudrait peut-être mettre en place des mécanismes formels qui se combineraient bien à ce qui se fait de manière informelle. Selon notre expérience à Cambridge, au Royaume-Uni, les agences de développement régional travaillent de concert avec le ministère du Commerce, maintenant ministère des Affaires, de l'Innovation et des Compétences, afin de faire venir des délégations comme nous l'avons fait à Ofcom et ensuite, ils prennent les délégations en charge. Je crois que le système est déjà en place.

Je n'ai pas d'idées révolutionnaires pour vous, veuillez m'en excuser. Je crois qu'il y a des modèles valables dans le monde que nous pourrions étudier. Nous avons travaillé avec la Irish Development Agency. Ils font du très bon travail pour un petit pays de 6 millions d'habitants — dont la population a doublé depuis 20 ans — en se concentrant sur les secteurs de haute technologie. L'Irlande se taille une place de plus en plus importante malgré la crise économique qu'elle a connue, comme celle de l'Islande. Le pays s'en sort petit à petit, attire les investissements étrangers, de nombreuses entreprises américaines de haute technologie, et de plus en plus d'entreprises chinoises et japonaises également. Les agences de développement irlandaises se démènent pour attirer ces entreprises, leur priorité est d'attirer l'investissement direct étranger, surtout dans le domaine des hautes technologies. Il existe des modèles dont nous pourrions nous inspirer.

Les incitatifs comptent pour beaucoup. Au final, il s'agit de gens d'affaires qui investiront là où on leur oppose le moins de résistance. Il est donc important de mettre en place les bonnes mesures incitatives et de gagner leur confiance.

Nous aimerions bien mettre nos idées en commun avec celles de divers fonctionnaires à ce sujet. C'est évidemment la côte Ouest qui en profitera. Regardez ce que Microsoft et d'autres entreprises sont en train de faire à Seattle, de l'autre côté de la frontière. Les Jeux olympiques ont été une occasion en or. Je crois comprendre que le département de la Sécurité intérieure des États-Unis a développé un dispositif intéressant, une espèce de mini NORAD qui permet une surveillance hautement technologique et sophistiquée de la frontière. Il faut profiter de la présence des sociétés technologiques sur la côte Ouest, elles sont nombreuses et c'est vrai également pour les États-Unis. Je le répète, notre attention était tournée vers l'Atlantique, mais à l'heure où le développement dans le domaine de la haute technologie fait du surplace en Europe en raison des difficultés que connaissent les marchés financiers, l'euro et ainsi de suite, un virage vers le Pacifique serait probablement opportun. On pourrait redistribuer les budgets pour affecter des sommes à cette fin. J'espère que mes observations vous sont utiles.

La présidente : Merci. C'est utile. J'aurais une question de la part de la sénatrice Fortin-Duplessis avant d'ajourner.

[Français]

La sénatrice Fortin-Duplessis : Existe-t-il des instruments internationaux, légaux ou encore des conventions, des traités ou autres qui permettraient au Canada de promouvoir l'action étatique et supranationale pour renforcer la cybersécurité en Asie?

[Traduction]

M. Hugues : Voilà encore une bonne question. Je ne peux pas citer d'exemple d'initiative qui serait comparable au travail effectué par un groupe d'experts gouvernemental et par les Nations Unies dans le domaine du contrôle des armes ou sur la Convention européenne sur la cybercriminalité. Rien d'équivalent n'a été développé qui vise en particulier la région de l'Asie-Pacifique. Mais je peux vous dire que lors d'une visite récente au siège de l'APEC à Singapour, j'ai rencontré certains des dirigeants du groupe de travail. Leurs gouvernements nationaux sont en train d'élaborer certaines propositions. Même la Russie en a de bonnes. On ne pense pas à la Russie comme une puissance du Pacifique, mais elle l'est, à travers Vladivoltok.

D'après moi, certaines propositions pourraient mener à quelque chose de plus grande envergure, ce qui pourrait offrir au Canada aussi une opportunité. Vous pouvez bien penser que la Russie et ses rapports avec l'Occident demeurent plutôt turbulents, mais rien n'empêche qu'il s'agit d'une cyberpuissance, qui gère très bien sa technologie. C'est vrai qu'elle a des défis à relever du côté commercial.

Ces pays ont soumis leurs propositions à travers des institutions régionales telles que l'APEC et l'ANASE, et je suis convaincu que le ministère des Affaires étrangères sait très bien de quoi il s'agit. Cependant, il serait peut-être possible de promouvoir certaines de ces initiatives, et le Canada en a peut-être à offrir de son côté, qu'il s'agisse du contrôle des armes ou des droits de la personne.

Je sais que le professeur Ron Diebert croit fermement que le Canada a une occasion unique de promouvoir ses valeurs en matière de droits de la personne autour du monde. C'est vrai qu'il est difficile de trouver le modèle et le forum pour le faire, mais l'heure est venue de chercher au-delà de Bruxelles et de l'ancien accès atlantique à Londres et à Berlin. Ces derniers demeurent importants, mais il faudrait probablement déplacer certaines choses vers les pays de l'Asie-Pacifique, qui pourraient s'avérer plus réceptifs.

Le Japon demeure la deuxième ou troisième plus grande économie mondiale et représente sans doute une occasion d'avancer des propositions. Il serait intéressant de voir ce qui pourrait être développé, quelque chose qui serait peut- être plus attirant pour les pays de l'Asie-Pacifique et qui pourrait être développé à l'APEC et à l'ANASE puis mis de l'avant auprès d'organismes plus mondiaux. Ce serait une belle occasion.

Mais récemment, il n'y a pas vraiment eu d'initiative sérieuse qu'on pourrait comparer à celle provenant de votre région euro-atlantique.

La présidente : Monsieur Hugues, je vous remercie d'être venu aujourd'hui et d'avoir témoigné pendant toute la réunion. Vos commentaires ont été extrêmement utiles et ont porté sur de nombreux domaines. J'imagine que certaines de nos questions étaient inattendues pour vous, mais vous vous en êtes très bien tiré. Je vous remercie de vos commentaires. Vous avez indiqué que vous pourriez avoir d'autres informations à nous fournir; vous pouvez certainement les déposer auprès du greffier, puisque cette étude se poursuivra.

Je vous remercie, et merci de toute l'information que vous nous avez fournie.

Chers collègues, la séance est levée jusqu'à demain matin.

(La séance est levée.)


Haut de page