Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts
Fascicule no 12 - Témoignages du 15 mai 2014 (séance de l'après-midi)
OTTAWA, le jeudi 15 mai 2014
Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts, auquel a été renvoyé le projet de loi C-30, Loi modifiant la Loi sur les grains du Canada et la Loi sur les transports au Canada et prévoyant d'autres mesures, se réunit aujourd'hui à 14 heures pour procéder à l'étude du projet de loi.
Le sénateur Percy Mockler (le président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Bienvenue à cette séance du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts. Je m'appelle Percy Mockler. Je suis un sénateur du Nouveau-Brunswick et le président du comité. Avant de laisser la parole aux témoins, je demanderais aux sénateurs de se présenter en commençant par le vice-président.
Le sénateur Mercer : Je suis le sénateur Terry Mercer, de la Nouvelle-Écosse.
[Français]
Le sénateur Robichaud : Fernand Robichaud, de Saint-Louis-de-Kent au Nouveau-Brunswick.
[Traduction]
La sénatrice Tardif : Bonjour. Claudette Tardif de l'Alberta.
[Français]
Le sénateur Maltais : Bonjour, Ghislain Maltais, de Québec.
[Traduction]
Le sénateur Plett : Bonjour. Je m'appelle Don Plett et je viens du Manitoba.
Le sénateur Ogilvie : Kelvin Ogilvie, de la Nouvelle-Écosse.
Le président : Merci.
Je tiens à remercier les témoins d'avoir accepté notre invitation à venir témoigner dans le cadre de notre étude du projet de loi C-30, la Loi sur le transport ferroviaire équitable pour les producteurs de grain.
Honorable sénateur, nous avons aujourd'hui trois témoins sur place et un qui participera par vidéoconférence. Les témoins feront leur présentation et nous passerons ensuite aux questions des sénateurs.
Sans plus tarder, accueillons nos témoins : M. Kevin Bender, directeur de la Commission, Alberta Wheat Commission; M. Phil de Kemp, président de la Malting Industry Association of Canada — il représente aujourd'hui le Barley Council of Canada —; M. Greg Cherewyk, directeur de l'exploitation, Pulse Canada; et, par vidéoconférence, M. Humphrey Banack, vice-président, Canadian Federation of Agriculture.
Notre greffier, M. Kevin Pittman, m'informe que M. de Kemp sera le premier à faire son exposé, suivi de MM. Cherewyk, Bender et Banack.
Monsieur de Kemp, vous avez la parole.
Phil de Kemp, président de la Malting Industry Association of Canada, Barley Council of Canada : Monsieur le président, chers sénateurs, bonjour. Je vous remercie de m'avoir invité aujourd'hui à parler de cette question importante qui, très sincèrement, me tient beaucoup à cœur. Cette question est indispensable à l'agriculture canadienne et à la prospérité économique du pays.
Je suis le président de la Malting Industry Association of Canada ainsi que le conseiller politique et commercial du Barley Council of Canada. Je vous transmets d'ailleurs les salutations de notre président, Brian Otto. Il ne pouvait être ici aujourd'hui, car, si tout va bien, l'hiver sera bientôt terminé au sud de Lethbridge; il est dans les champs à faire son vrai travail, celui d'agriculteur.
Pour ceux d'entre vous qui ne connaissent pas le Barley Council of Canada, nous représentons des agriculteurs de partout au pays, ainsi que toute la chaîne d'approvisionnement de l'orge, y compris des membres de la communauté de recherche et des sciences de la vie, le secteur du maltage et du brassage, le secteur des aliments du bétail, le secteur du bétail et certaines entreprises de manutention du grain. Nous sommes la seule organisation nationale où tous les intervenants sont à la table. Nous représentons tous les aspects de la chaîne de valeur. C'est la raison pour laquelle nous sommes si heureux d'avoir l'occasion de partager avec vous notre perspective unique dans ce dossier.
Pour être bien clair, selon le BBC, le projet de loi C-30 constitue une étape importante dans la bonne direction. Nous remercions le gouvernement des efforts qu'il a déployés pour faire adopter ce projet de loi et de tout le travail qu'il a accompli afin de réduire les retards dans la livraison du grain dans les Prairies. Cependant, nous sommes conscients qu'il ne s'agit que d'une première étape. Il faut poursuivre les efforts afin de mettre sur pied un système ferroviaire viable, transparent et concurrentiel pour tous.
Le Barley Council of Canada comprend que ce dossier ne touche pas uniquement le grain; il touche toutes les marchandises. Nous savons que tous nos partenaires des autres secteurs de marchandises subissent les conséquences de cette crise du transport et nous poursuivrons les efforts afin de trouver des solutions à long terme pour régler cette question. Nous sommes particulièrement conscients des défis que doivent relever nos collègues des secteurs des forêts, minier, de la potasse et du charbon, entre autres. Nous voulons que l'industrie du grain ait un accès juste et équitable à un système transparent et qu'elle puisse prospérer en même temps que nos partenaires du secteur du transport ferroviaire et les secteurs des marchandises qu'ils représentent. Notre objectif, c'est de travailler avec ces groupes de façon à ce que les exigences de notre industrie en matière d'expédition soient satisfaites. Nous ne sommes pas venus ici pour monter les agriculteurs les uns contre les autres. Nous sommes tous concernés par ce dossier et voulons simplement faire progresser l'économie.
Nous désirons trouver une solution qui convient à tous. Nous sommes conscients également que certains éléments de ce projet de loi doivent être précisés. Selon nous, si nous voulons disposer d'un système ferroviaire fort, fiable et transparent, nous devons utiliser une terminologie qui reflète cet objectif. À notre avis, les termes « adéquats » et « convenable » et l'expression « obligation de la compagnie » que l'on retrouve dans le libellé actuel du projet de loi sont trop ambigus et laissent place à une interprétation subjective. Nous devons employer un langage qui définit clairement les droits et les obligations de toutes les parties. Nous demandons à ce que cette mesure législative tienne compte de cet élément. Si cela est impossible en raison de contraintes de temps, nous demandons au comité d'en tenir compte dans le cadre de son étude de la Loi sur les transports au Canada.
Le BBC est satisfait des mesures adoptées jusqu'à maintenant par le gouvernement et de l'accent que celui-ci a mis sur la reddition de comptes. Nous appuyons les amendements qu'il a apportés récemment au projet de loi C-30 qui obligent les sociétés ferroviaires à indemniser quiconque engage des dépenses découlant de l'incapacité de ces sociétés à remplir leurs obligations. Nous espérons que ces mesures dissuasives seront suffisantes. Sinon, nous appuyons l'imposition de dommages-intérêts punitifs supplémentaires. La reddition de comptes est au cœur des valeurs du Barley Council of Canada et nous serions très heureux si le projet de loi traitait de cette question.
Finalement, j'aimerais souligner à quel point il est important pour nous de pouvoir expédier nos marchandises là où elles sont destinées. Ce n'est pas simplement une question d'expédier notre grain vers la côte Ouest ou vers Thunder Bay. Le pays subit les conséquences du manque de fiabilité de l'expédition du grain dans les couloirs ferroviaires. Bien qu'un meilleur accès est/ouest se traduise par une augmentation du transport du grain dans ces couloirs, il est important pour le gouvernement de comprendre que cela se fait aux dépens des expéditeurs dans les couloirs nord/sud. Il ne faut pas oublier que notre plus important partenaire commercial, qui se trouve au sud, joue un rôle essentiel dans ce dossier, et le décret adopté le 7 mars a eu de sérieuses conséquences sur les couloirs de transport. Il faut favoriser l'expédition vers tous les ports, pas seulement vers Vancouver, Prince-Rupert et Thunder Bay.
Nos problèmes de transport sont plus faciles à gérer quand nous faisons intervenir nos expéditeurs vers le sud. Certains de nos expéditeurs — en particulier ceux qui transportent le malt et l'orge — n'ont pas encore pu acquérir les voitures qu'il faut pour les expéditions vers le sud ou l'ouest. Franchement, dans certains cas, ils ont été forcés de s'approvisionner à l'étranger. C'est un problème qui ne se limite pas au Canada. Malheureusement, cela commence à se savoir un peu partout dans le monde, et notre réputation de fournisseur fiable de services de transport international commence à en souffrir.
J'ai récemment participé à une mission commerciale en Corée du Sud et au Japon, avec le ministre Ritz. Le voyage avait entre autres objectifs de fournir l'assurance que le Canada fait tout ce qui est possible pour répondre aux besoins de ses acheteurs internationaux. Les clients internationaux du Canada qui achètent des aliments pour animaux et pour les humains et de l'orge de brasserie craignent que nous ne puissions pas expédier nos produits de manière fiable et en temps opportun. Vous pouvez être sûrs qu'ils iront ailleurs : c'est ce qui commence déjà à se produire. Le Canada est axé sur le commerce, mais il nous faut prouver que nous sommes des partenaires commerciaux fiables, et les enjeux ne pourraient être plus élevés.
L'industrie de l'orge est prête pour la croissance et la prospérité. Nous avons formé une organisation nationale qui englobe l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement et nous avons réuni tous les partenaires. Nous avons l'adhésion de toute la chaîne de valeur, et nous avons l'offre et la qualité. Malheureusement, nos problèmes de transport ferroviaire freinent considérablement notre capacité de faire de bonnes affaires. C'est la raison pour laquelle nous voulons, au Canada, une solution de transport qui mise sur un effort de collaboration.
Nous croyons qu'il est dans l'intérêt de la sécurité économique du Canada de se doter d'un réseau de transport ferroviaire concurrentiel, fiable et transparent répondant aux besoins de tous les secteurs producteurs.
Je le répète, car c'est une chose que nous aimerions certainement voir dans le préambule de la Loi sur les transports au Canada : nous croyons que c'est dans l'intérêt de la sécurité économique du Canada. Elle dépend de notre capacité de répondre à la demande croissante de nos produits de qualité. Notre réputation internationale s'est bâtie au fil du temps et exige un investissement de taille de la part des divers intervenants, d'un océan à l'autre. Il n'est pas question de trouver une solution pour demain ou pour l'année prochaine, même. Ce qu'il faut, c'est une solution à long terme qui garantira la sécurité économique de l'ensemble du Canada.
Merci. Je serai ravi de répondre à vos questions.
Le président : Merci, monsieur.
Greg Cherewyk, directeur de l'exploitation, Pulse Canada : Je remercie le comité de me donner l'occasion de venir parler du projet de loi C-30.
Je suis ici au nom de Pulse Canada, qui représente 30 000 agriculteurs de partout au Canada, de l'Alberta à l'Ontario, les producteurs de légumineuses à grains et de cultures spéciales, ainsi que les gens de métier et fournisseurs de services qui traitent et exportent les légumineuses à grains et les cultures spéciales.
À ma dernière comparution, je suis venu parler du projet de loi C-52 devant le Comité sénatorial permanent des transports et des communications. J'ai alors parlé de ce que Peter Hall, économiste en chef à EDC, avait dit aux membres du Partenariat du commerce et des exportations de la Saskatchewan, le 29 mai, avant les récoltes et avant les expéditions qui se font en automne. Il avait dit que, selon les indicateurs économiques, on pouvait s'attendre à une importante croissance économique, ce qui allait accroître la confiance des consommateurs et entraîner des conditions favorables au sein de l'économie mondiale.
Cependant, réfléchissant tout haut devant ce public, en Saskatchewan, il s'était demandé si nous avions assez de ressources humaines, dans la province, pour faire le travail à prévoir. Et même si nous avions ce qu'il fallait, avions-nous l'infrastructure de transport qu'il fallait pour apporter sur le marché ce que nous produisions dans la province?
Nous sommes ici aujourd'hui parce que la réponse est non. Nous n'avions pas la capacité ferroviaire requise pour transporter vers le marché ce qui est produit en Saskatchewan ou dans n'importe quelle autre région de production du Canada. Nous sommes ici parce que ce n'est tout simplement pas convenable pour les agriculteurs, les transformateurs et les exportateurs canadiens, non plus que pour leurs clients en Amérique du Nord ou ailleurs dans le monde.
Mark Hemmes, de Quorum Corporation, vous a donné un aperçu des lacunes du transport ferroviaire des marchandises, et les grands titres des médias spécialisés en agriculture et des médias nationaux, conjugués aux exposés de mes collègues des derniers jours et des jours à venir, auront couvert l'ensemble des répercussions des retards dans l'expédition du grain sur les agriculteurs, pour la présente saison. Il est donc inutile de répéter les mêmes choses.
Je dirai que le projet de loi C-30 envoie un message clair — qu'un réseau de transport ferroviaire qui ne peut répondre aux demandes du marché de l'industrie agricole et qui ne peut se remettre des effets des intempéries est tout simplement inacceptable. C'est contraire à la stratégie de croissance économique du Canada, ainsi qu'à notre Politique nationale des transports qui déclare, à l'article 5, « qu'un système de transport national compétitif et rentable... est essentiel à la satisfaction des besoins de ses usagers et au bien-être des Canadiens et favorise la compétitivité et la croissance économique dans les régions rurales et urbaines partout au Canada. »
Dans ce contexte, et compte tenu du peu de temps que j'ai, j'aimerais me concentrer sur un élément et en souligner la grande importance pour nos membres, concernant le projet de loi C-30.
Comme je l'ai dit, le décret du 7 mars et l'inclusion du décret dans le projet de loi C-30 envoient un message clair au sujet des attentes relatives à la capacité du transport ferroviaire. Il faut immédiatement accroître la capacité et la maintenir à un niveau correspondant aux besoins de l'industrie.
Le volume minimum hebdomadaire de 500 000 tonnes métriques représente une cible que les compagnies ferroviaires ont soutenu pouvoir atteindre pendant la haute saison de transport, à l'automne, et qu'elles ont souligné avoir atteinte pendant des semaines, au cours des deux dernières années. Cependant, ce que les expéditeurs du secteur agricole et de tous les secteurs reçoivent comme message des compagnies ferroviaires maintenant, c'est que le décret aura un effet négatif sur le service.
On dit aux expéditeurs que les commandes destinées au corridor de l'est, aux États-Unis et au Mexique ne seront pas livrées puisque ce ne sont pas des corridors privilégiés.
Des exportateurs de légumineuses à grains et de cultures spéciales m'ont indiqué avoir été exclus pour des commandes destinées au Mexique et aux États-Unis, et l'un d'eux m'a signalé qu'il y a une totale discrimination concernant les États-Unis et le Mexique. Cette partie du commerce de cultures spéciales subit des dommages tels qu'elle ne s'en remettra peut-être jamais.
Les données que nous avons recueillies sur le rendement pour nos participants, dans le cadre de notre initiative, pendant les huit semaines qui ont suivi le décret, confirment cela. Le CP envisageait de livrer 70 p. 100 des commandes destinées aux États-Unis et au Mexique, alors que le CN ne comptait qu'en livrer 25 p. 100, aux États-Unis et au Mexique. Les deux compagnies ferroviaires comptent livrer la totalité des commandes destinées au corridor de Vancouver.
Il ne fait aucun doute que l'intention du décret était de faire bouger le grain, mais nous avons aussi la certitude que le but était de garantir un service juste et équitable aux expéditeurs de toutes tailles cherchant à livrer des marchandises diverses à toutes les destinations. Le décret n'atténue en rien les obligations de transporteur public d'une compagnie de chemin de fer.
À cet égard, nous devons nous assurer que le décret aide l'industrie à concrétiser son plan de répondre aux commandes des clients. Je vais donc poser la même question que j'ai posée au Comité sénatorial permanent des transports et des communications le 12 juin 2013 : comment savoir si nous atteignons nos objectifs?
Nous ne nous attendons pas à ce que vous acceptiez des données agrégées de la part des compagnies ferroviaires, pas plus à ce que vous vous appuyiez sur des informations anecdotiques fournies par quelques expéditeurs.
Nous nous attendons à ce que les cibles actuelles et futures de volume minimum établies par le gouvernement soient assorties d'un programme de mesures qui ne se limite pas à indiquer si oui ou non les cibles mensuelles ont été atteintes. Les mesures doivent faire état de l'allocation et de la distribution des ressources en fonction de la demande actuelle, selon la taille de l'expéditeur et la destination ou le corridor de la commande, et conformément à une série chronologique qui est reliée aux cibles établies.
Ce système doit être mis en place immédiatement de sorte que toutes les entreprises canadiennes et leurs clients bénéficient d'un service juste et équitable, ce qui nous assurera que le décret n'est pas appliqué à des fins discriminatoires.
Merci. Je suis disposé à répondre à vos questions à ce sujet ou sur tout élément du projet de loi C-30 que nous appuyons et que nous avons l'intention de mettre en application.
Le président : Merci.
Kevin Bender, directeur de la commission, Alberta Wheat Commission : Merci au comité de me permettre de témoigner au nom de l'Alberta Wheat Commission et des agriculteurs qu'elle représente dans la province. Je suis directeur de la Commission, et je suis agriculteur dans la région centre-ouest de l'Alberta, près de Bentley.
L'Alberta Wheat Commission est satisfaite des mesures prises récemment par le gouvernement fédéral pour remédier aux problèmes de transport que vivent les producteurs de grains de l'Ouest canadien.
Le 7 mars, le gouvernement a annoncé l'adoption d'un décret qui obligerait les compagnies ferroviaires à accroître la quantité de grains expédiés; le non-respect des seuils minimums pourrait ainsi entraîner des sanctions pour les compagnies fautives. L'adoption de ce décret serait la première d'une série de mesures clés pour veiller à ce que le Canada demeure un fournisseur fiable de produits agricoles.
Le dépôt du projet de loi C-30, la Loi sur le transport ferroviaire équitable pour les producteurs de grains, constitue un pas important vers l'élaboration de solutions à long terme qui sont nécessaires à l'établissement d'un système de transport ferroviaire durable et fiable au Canada. Nous sommes reconnaissants envers le gouvernement pour les mesures qu'il a prises, et nous voulons remercier le Sénat de nous permettre de formuler des commentaires sur cette loi importante.
Le 28 mars, l'Alberta Wheat Commission s'est jointe à ses partenaires d'expédition pour témoigner devant le Comité permanent de l'agriculture de la Chambre des communes, et nous lui avons demandé d'intégrer différentes recommandations au projet de loi C-30. Nous espérons toujours que les recommandations que nous avons proposées seront mises à contribution pour la présente loi et le règlement connexe, ou dans le cadre de l'examen prochain de la Loi sur les transports au Canada.
Comme M. Kemp l'a déjà indiqué, l'Alberta Wheat Commission demande toujours à ce qu'on adopte une définition plus claire du terme « installations convenables » et qu'on précise la référence aux « obligations en matière de service ». Les définitions actuelles sont trop ambiguës, laissant place à une interprétation subjective. Ces termes devraient définir clairement les droits et les obligations de toutes les parties concernées.
Nous avons aussi demandé qu'on accentue la concurrence en ajustant les limites d'interconnexion, et nous sommes heureux de voir que le gouvernement a décidé de hausser ces limites à 160 kilomètres.
Nous félicitons également le gouvernement pour l'amendement apporté au projet de loi C-30 qui ordonne à la compagnie ferroviaire d'indemniser toute personne lésée des dépenses qu'elle a supportées en conséquence du non-respect des obligations de la compagnie. En permettant à tous, à l'expéditeur et au producteur, de déposer une plainte de service auprès de l'OTC, cet amendement reconnaît que les expéditeurs ne sont pas les seuls à subir de tels dommages, comme en témoignent les pertes des producteurs de grains de l'Ouest canadien, estimées à 2 milliards de dollars cette année seulement.
Cependant, l'amendement à l'étape du comité ne prévoit pas l'inclusion de dispositions prévoyant des sanctions aux accords sur les niveaux de service, pas plus qu'il ne modifie les dispositions énoncées à l'article 169.31 de la Loi sur les transports au Canada. Nous pensons que la loi doit prévoir des sanctions pour que la réglementation connexe puisse guider clairement les arbitres.
L'Alberta Wheat Commission, ainsi que tous les intervenants de l'industrie du grain, vont suivre de près l'élaboration du dossier réglementaire qui mettra en œuvre le projet de loi C-30, pour veiller à ce que soit respectée l'intention derrière les sanctions réciproques en cas de non-respect des obligations.
Le projet de loi C-30 s'appuiera sur les dispositions temporaires mises de l'avant par le décret en conseil annoncé le 7 mars. L'une d'elles prévoit que si les compagnies ferroviaires manquent à leurs obligations, le gouvernement du Canada peut imposer des volumes minimums et des sanctions de l'ordre de 100 000 $ par jour pour non-respect des volumes établis. Il s'agit uniquement d'un préalable au transport du grain des Prairies et ne précise pas où le grain doit être transporté. Comme M. Cherewyk le signalait, tous les corridors sont importants, et il coûte aussi cher de perdre un client aux États-Unis que d'en perdre un en Asie.
En plus des exigences générales relatives à l'expédition énoncées dans le projet de loi C-30, nous aimerions que soient incluses des exigences portant précisément sur les corridors. Ces exigences propres aux corridors garantiraient que tous les marchés sont desservis efficacement, en éliminant la tentation de restreindre les déplacements aux plus efficaces de ces coûteux corridors.
Plus tard, nous pourrions soutenir la participation de groupements de producteurs pour atteindre les seuils minimums, car nous sommes bien placés pour comprendre les réalités entourant la demande à long terme et la production immédiate. Il a été proposé d'inclure cette option à la réglementation, et nous serions en faveur d'une telle solution.
De plus, nous demandons au gouvernement d'envisager la possibilité d'accroître le montant des sanctions quotidiennes si aucune amélioration n'est notée, et d'affecter les fonds ainsi recueillis à des programmes soutenant l'infrastructure de transport, comme le Fonds Chantiers Canada.
L'Alberta Wheat Commission estime que le projet de loi C-30 est un pas important dans la bonne direction, et elle remercie toutes les parties concernées d'avoir accepté d'accélérer l'adoption de cette loi. Il est crucial que la réglementation connexe reçoive aussi une attention immédiate, et l'Alberta Wheat Commission a hâte de pouvoir contribuer de manière constructive à cette discussion. Il est par ailleurs très important que le gouvernement entreprenne l'examen de la Loi sur les transports au Canada le plus rapidement possible. Cet examen est la prochaine étape logique pour bâtir un système de transport qui permettra de desservir efficacement les expéditeurs et les clients canadiens et qui contribuera à l'essor économique du Canada.
La réputation du Canada à titre de fournisseur fiable et constant de produits de qualité dépend d'un système ferroviaire efficient, qui assure des livraisons à temps à nos précieux clients à l'échelle du pays et partout dans le monde. Nous sommes encouragés par les efforts du gouvernement en vue de favoriser l'essor de l'agriculture canadienne sur le marché international, notamment par la conclusion récente d'accords de libre-échange avec l'Union européenne et la Corée du Sud. Les producteurs de l'Ouest canadien sont prêts à répondre à la demande croissante pour leurs produits, mais nous avons besoin d'un système de transport efficient pour que nous puissions bel et bien répondre à la demande et poursuivre l'expansion de l'économie canadienne.
Il nous a fallu des années et d'importants investissements de la part de divers intervenants pour gagner notre réputation internationale. Nous devons travailler ensemble pour protéger ces investissements et répondre à la demande croissante en produits canadiens.
Encore une fois, je remercie toutes les parties concernées pour les efforts qu'elles ont déployés afin d'accélérer l'adoption de ce projet de loi, et nous serons prêts à passer aux prochaines étapes dès que la loi aura obtenu la sanction royale. Merci de nous avoir invités à témoigner devant vous aujourd'hui.
Le président : Merci, monsieur Bender.
Le quatrième témoin sera M. Banack, de la Fédération canadienne de l'agriculture.
Humphrey Banack, premier vice-président, Fédération canadienne de l'agriculture : Merci, monsieur le président, merci, mesdames et messieurs les membres du comité. Je suis le premier vice-président de la Fédération canadienne de l'agriculture, ou FCA. Nous dirigeons une exploitation agricole de troisième génération de 5 500 acres dans la région de Round Hill, en Alberta, et cultivons environ 3 800 acres de la terre. Je suis ravi de comparaître devant le comité pour discuter du projet de loi C-30.
Je suis déçu de ne pas pouvoir comparaître en personne; j'ai reçu l'invitation tard hier après-midi, et il aurait été très difficile de trouver un vol à destination d'Ottawa à une heure si tardive. Toutefois, j'ai reçu un coup de fil à 15 h 30 pour organiser la vidéoconférence, alors je suis très heureux de pouvoir participer à la discussion de cette manière.
En ce moment, nous faisons les semailles, mais j'ai temporairement quitté le tracteur pour prendre le temps de vous parler. Nous considérons qu'il est important de faire avancer ce projet de loi. Comme Phil de Kemp a dit, le transport de nos produits à nos clients est un aspect très important de notre commerce. Sur notre ferme, nous avons commencé à ensemencer les cultures de cette année en octobre dernier. Nous avons déjà conclu des contrats pour une partie de la production prévue, et nous voulons faire en sorte que le système de transport des grains ne sera pas le maillon faible dans la chaîne d'approvisionnement de nos clients.
La FCA a mis sur pied un comité du transport et de la logistique des grains, composé de producteurs et d'expéditeurs de grains de l'Ouest du Canada. Le comité a formulé des recommandations visant non seulement à régler les problèmes à court terme des producteurs de céréales de l'Ouest, mais aussi à trouver des solutions pour renforcer toute la chaîne logistique. Aujourd'hui, je vais donc vous faire part de ces recommandations.
La FCA comprend que le projet de loi C-30 vise à réduire les surplus de grains dans l'Ouest et à renforcer les dispositions concernant les services ferroviaires pour éviter que, à l'avenir, les producteurs se trouvent dans la même situation. Nous savons aussi que, lorsque le gouvernement commencera son examen accéléré de la Loi sur les transports au Canada cet été, on procédera à un examen plus rigoureux et plus approfondi du transport et du système de logistique des grains. Par conséquent, mes remarques et mes recommandations au sujet du projet de loi C-30 porteront sur les problèmes encore en suspens et sur lesquels il faudrait se pencher.
Premièrement, j'aimerais parler des pénalités prévues en cas de non-respect des dispositions relatives au rendement, y compris les ententes de niveau de service. Le projet de loi C-30 modifié permet à l'Office des transports du Canada d'ordonner aux compagnies de chemin de fer d'indemniser toute personne ayant subi des effets négatifs du non-respect de leurs obligations en matière de service. La FCA appuie pleinement cette disposition, parce qu'elle oblige les compagnies de chemin de fer à rendre des comptes concernant leur rendement — ce qui n'est pas le cas à l'heure actuelle.
Or, cette disposition prévoit le paiement d'amendes pour les dépenses qui ont déjà été effectuées. Il faudrait mettre en place un mécanisme qui évite aux producteurs de faire des dépenses de ce genre pour commencer. La FCA croit que le règlement dont il est question dans le projet de loi devrait permettre de prévoir des pénalités réciproques suffisamment élevées pour faire en sorte que les compagnies de chemin de fer respectent les normes de service établies dans les ententes de service. Un excellent exemple de mesure proactive, serait de prévoir des pénalités bien précises à l'appui de ces normes de service; cela réduirait ou éviterait les risques de dommages dus à des services ferroviaires de mauvaise qualité. À l'heure actuelle, le projet de loi ne prévoit qu'une mesure réactive.
Deuxièmement, j'aimerais aborder les besoins en matière de wagons de producteurs. Comme vous avez entendu le président-directeur général de Battle River Railway, Ken Eshpeter, le dire hier, les wagons de producteurs sont un élément tout à fait essentiel du système de transport des grains dans l'Ouest. Ils donnent aux agriculteurs de bonnes options pour livrer leurs grains. Non seulement l'option des wagons de producteurs donne aux agriculteurs un accès à des moyens de transport efficaces, mais il établit aussi un plafond concurrentiel des frais de base que les silos exigent pour emménager nos grains.
Le nombre record de commandes placées en 2013 pour des wagons de producteurs montre bien l'importance que revêt ce moyen de transport pour les producteurs des Prairies. Toutefois, les surplus de grains perturbent aussi le système des wagons de producteurs. Si le projet de loi C-30 n'a pas suffisamment de mordant pour assurer la disponibilité de wagons de producteurs et obliger les compagnies de chemins de fer à rendre des comptes concernant l'aiguillage de ces wagons, nous avons peur que ces wagons tombent dans l'oubli.
Pour remédier à cette situation, le projet de loi C-30 devrait être modifié de façon à obliger les compagnies de chemins de fer à toujours garder en réserve un certain nombre de wagons ouverts destinés aux expéditeurs de wagons de producteurs. Par ailleurs, le projet de loi C-30 stipule que, après consultation des compagnies de chemins de fer et des entreprises de manutention de grain, l'Office des transports du Canada recommandera la quantité minimum de grain que les compagnies de chemins de fer devront transporter durant les campagnes agricoles de 2014-2015 et de 2015-2016. Pour satisfaire les besoins des expéditeurs de wagons de producteurs, le projet de loi devrait être modifié de façon à ce que les expéditeurs soient consultés avant que les recommandations soient présentées au ministre.
Troisièmement, les marchés intérieurs devraient avoir accès à un service prioritaire. Le projet de loi devrait stipuler que les consommateurs canadiens de grain locaux sont des marchés prioritaires, qui devraient être desservis par les compagnies de chemin de fer — surtout compte tenu des problèmes auxquels font face les éleveurs de bétail de la Colombie-Britannique. Jusqu'à présent, toutes les discussions ont porté sur le transport des surplus de grain à des fins d'exportation. Qu'en est-il de la valeur ajoutée des installations d'élevage et des meuneries qui ont besoin de grains pour nourrir les animaux et procéder à la transformation des grains? Dans les basses terres continentales de la Colombie-Britannique, nous avons un secteur de l'élevage de 2 milliards de dollars qui dépend des grains des Prairies. Ce secteur a toujours besoin de 100 wagons par semaine, 52 semaines par année. À l'heure actuelle, le secteur de l'élevage dépend des wagons de producteurs et des livraisons de petits terminaux indépendants, deux sources qui ont eu du mal à obtenir des services ferroviaires suffisants.
À l'heure actuelle, les quatre grandes sociétés céréalières ne prennent aucune commande de livraison locale. Maintenant, compte tenu du décret du projet de loi C-30, presque tous les efforts sont axés sur l'acheminement des grains aux points d'exportation.
Pour compenser ce manque à gagner, il a été proposé que la Colombie-Britannique fasse simplement venir les grains par camion. D'une part, il est douteux qu'il y ait assez de camions pour répondre aux besoins. D'autre part, le camionnage coûte 40 à 70 $ de plus par tonne que le transport ferroviaire. Si les éleveurs de la Colombie-Britannique devaient y avoir recours pour combler leurs besoins en céréales fourragères, compte tenu de leurs énormes besoins, les coûts annuels du secteur de l'élevage pourraient bien augmenter de 18 à 34 millions de dollars. De toute évidence, cette solution n'est pas défendable.
Il faut reconnaître que les secteurs canadiens de l'élevage et de meuneries traversent aussi une crise puisqu'ils dépendent de la fiabilité du transport des grains des Prairies. Par conséquent, pour assurer leur viabilité, nous recommandons d'inclure au projet de loi des dispositions visant à accorder la priorité aux céréales fourragères canadiennes et à d'autres marchés à valeur ajoutée du pays.
En résumé, la Fédération canadienne de l'agriculture recommande que le règlement qui s'applique aux conditions d'exploitation des ententes de niveau de service prévoie l'établissement de pénalités réciproques suffisamment élevées pour faire en sorte que les compagnies de chemins de fer respectent les normes de service fixées dans ces ententes.
Le projet de loi devrait aussi être modifié de façon à, premièrement, obliger les compagnies de chemins de fer à réserver un nombre minimum de wagons à l'usage des expéditeurs de céréales et, deuxièmement, à obliger l'Office des transports du Canada à consulter les expéditeurs avant de rencontrer le ministre pour fixer la quantité minimum de grains qui devraient être transportés pendant une campagne agricole.
Enfin, le projet de loi C-30 devrait contenir des dispositions visant à répondre aux besoins du marché canadien des céréales fourragères et d'autres marchés canadiens à valeur ajoutée afin d'assurer leur viabilité.
Merci beaucoup. Je me réjouis à l'idée de pouvoir discuter avec vous à ce sujet.
Le président : Merci beaucoup, monsieur Banack.
Sénateur Mercer, nous commençons par vous.
Le sénateur Mercer : Je remercie nos quatre témoins. Vos exposés ont été très instructifs. Certaines constantes s'en dégagent, notamment un appui général du projet de loi C-30, mais aussi d'importantes réserves. Bien sûr, le dernier témoin, M. Banack, a recommandé certaines modifications. Je ne sais pas si d'autres témoins en auraient proposé si nous leur avions accordé plus de temps. D'après ce que je comprends, nous n'avons pas beaucoup de temps à cause d'une tactique procédurale adoptée à la Chambre des communes. On ne nous a pas renvoyé ce projet de loi avant la semaine dernière. C'est malheureux, mais il nous reste d'autres questions à aborder.
Un certain nombre de personnes nous ont dit que les ententes de niveau de service prévues aux termes du projet de loi C-30 ne fonctionnent pas. D'autres n'ont pas pris la peine d'en conclure à cause de la durée et des coûts des négociations. Je cherche quelqu'un au pays qui aurait quelque chose de bon à dire au sujet de ces ententes de niveau de service. Est-ce que quelqu'un ici aurait quelque chose de positif à dire à ce sujet?
M. Cherewyk : Je vais répondre à cette question.
Oui, je connais certaines entreprises qui explorent à fond le concept des ENS. Vous avez entendu dire que les gens n'ont pas conclu d'ententes de ce genre parce qu'elles sont trop coûteuses ou parce qu'ils ont l'impression qu'elles ne répondront pas à leurs besoins. Il s'agit justement là de certaines des principales préoccupations qui ont été exprimées depuis la présentation de ce concept dans le cadre du projet de loi C-52.
Tout d'abord, il faut comprendre qu'il s'agit d'un tout nouveau processus pour les expéditeurs dans l'industrie agricole. Il s'agit d'un niveau d'engagement sans précédent du transporteur à l'égard du contrat; c'est tout nouveau pour eux, alors ils ne prennent pas cela à la légère. Ils savent que le processus sera long et détaillé, alors ils veulent s'assurer de bien faire les choses. Quand je dis que des entreprises explorent le concept, je veux dire que l'industrie a investi beaucoup d'argent pour comprendre exactement ce qu'elle aimerait tirer des ENS. Les entreprises ont investi beaucoup d'argent pour se consulter et se mettre d'accord sur ce que les ENS devraient prévoir pour les expéditeurs en vrac, les expéditeurs en wagons et les expéditeurs qui utilisent différents modes de transport. Elles veulent déterminer ce qu'elles devraient proposer au juste quand elles commenceront à négocier une entente avec un transporteur.
Il s'agit d'un travail de grande envergure. Les entreprises le comprennent très bien, et elles ne prennent pas ce processus à la légère. L'industrie travaille donc à ce dossier.
Certains se disent inquiets du fait que le cadre des négociations et les directives énoncées dans le projet de loi ne les rassurent pas suffisamment sur les résultats des ententes. Le fait de commencer des négociations très longues et possiblement très coûteuses comporte donc certains risques. Par conséquent, les gens aimeraient que le projet de loi leur fournisse des explications plus détaillées. Ils aimeraient que les obligations en matière de service soient clarifiées de manière à ce que, au moment de se lancer dans des négociations, ils comprendront le cadre dans lequel ils négocient. Ils comprendront qu'ils ont le droit d'imposer des normes en matière de rendement et qu'ils peuvent tenir la compagnie de chemin de fer responsable du non-respect de toute obligation en matière de service qui a été clairement définie. Oui, certains craignent que, s'ils entament un processus très long et possiblement très coûteux, ils n'obtiendront pas forcément ce qu'ils veulent. Par conséquent, les organisations et les expéditeurs eux-mêmes prennent très au sérieux le travail d'élaboration du règlement concernant la définition des conditions d'exploitation. Nous demandons au gouvernement de clarifier le cadre des négociations pour nous éviter de devoir avoir recours à l'article 116 et aux nouvelles dispositions qui ont été ajoutées concernant le remboursement des dépenses. Nous voulons conclure un contrat qui définit clairement les obligations en matière de service des deux parties et les conséquences du non-respect de celles-ci.
M. de Kemp : Sénateur, permettez-moi d'ajouter que sans définitions claires, personne, et certainement pas nos membres, ne touchera au moindre accord sur les niveaux de service jusqu'à ce que tout le monde en connaisse les règles et sache ce que chaque disposition et chaque mot signifient.
Vous parlez du temps qu'il reste, et nous reconnaissons l'urgence de la situation. Nous demandons tous des modifications qui ne peuvent manifestement pas être apportées; tout le monde comprend que ce n'est pas possible par manque de temps. Permettez-moi toutefois de proposer au Sénat ou à votre comité d'envoyer un message. Il s'agirait d'un retour en arrière et d'une sorte d'entrée en matière où vous diriez : « Nous reconnaissons ne pas avoir le temps de le faire en raison de la situation, mais nous aimerions au moins enjoindre le Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire de la Chambre de se pencher sur ces questions et de les régler dans le cadre ou non de son examen de la Loi sur les transports au Canada. » Votre comité doit bien lui faire comprendre qu'il faut discuter de ces problèmes et les résoudre; et je pense qu'il s'agirait là d'une sorte de mise en garde générale.
Le sénateur Mercer : Merci beaucoup, c'est une bonne suggestion.
Monsieur Bender?
M. Bender : Mon confrère a plutôt bien répondu.
Le sénateur Mercer : Avez-vous quoi que ce soit à ajouter, monsieur Banack?
M. Banack : Oui. D'après ce que j'ai compris de mes échanges avec les sociétés céréalières et les autres expéditeurs, ceux-ci examinent la question de leur côté, mais je pense que les négociations sont unilatérales. Je ne crois pas que les sociétés ferroviaires souhaitent vraiment venir discuter d'accords sur les niveaux de service pour la suite des choses. Les expéditeurs de céréales canadiens sont à la merci des transporteurs. Puisque nous ne pouvons faire affaire qu'avec un chemin de fer pour le transport du produit, les sociétés ferroviaires n'ont aucun intérêt à venir négocier ces accords. Comme pour toute négociation, je les encourage à faire bouger les choses et à participer activement à la conclusion des accords sur les niveaux de service; j'encourage également le gouvernement à les presser d'agir.
Le sénateur Mercer : Je pense que tout le monde convient qu'il faut également une définition précise de l'expression « installations convenables ».
Monsieur de Kemp, vous avez dit en exposé avoir été témoin de clients qui allaient déjà ailleurs. Veuillez nous donner des noms ou des exemples concrets.
M. de Kemp : Bien sûr. Une certaine compagnie — que je ne nommerai pas, mais j'ai parlé à ses représentants hier — fournit énormément d'orge brassicole à sa société mère dans le sud et en Chine. Cette année, elle a dû en faire venir plus de 150 000 tonnes de l'Australie et de l'Argentine puisqu'elle ne pouvait pas expédier le produit jusqu'au brasseur du sud ou au brasseur partenaire en Chine. La société ne possède pas d'actifs. N'ayant pas de silo-élévateur, elle dépend des compagnies céréalières. Or, celles-ci n'obtiennent pas de wagons. Et lorsqu'elles commencent à en recevoir, elles priorisent le transport de leurs contrats de blé et de canola, ce que nous pouvons comprendre. Que pouvait faire la société? Elle a dû s'approvisionner ailleurs pour des questions de certitude et de fiabilité. C'était mon premier exemple.
En deuxième lieu, je peux parler de la société de Calgary Canada Malting Company, qui possède sa propre flotte. Je comprends les remarques du représentant de la Fédération canadienne de l'agriculture à l'effet de prioriser la transformation à valeur ajoutée; chaque tonne de malt nécessite 1,3 tonne de céréales. Dans l'Ouest canadien, la transformation se fait directement dans les usines. La société fait affaire avec Columbia Containers pour expédier son malt à l'aide de sa flotte, puis envoie le produit par conteneur en haute mer. Actuellement, les conteneurs accusent toutefois un retard de cinq ou six semaines en raison de la grève des camionneurs au port.
Le sénateur Mercer : Vous parlez du port de Vancouver?
M. de Kemp : Oui, du port Metro Vancouver. Jusqu'à l'adoption du décret, la société avait toujours obtenu 40 wagons supplémentaires en plus de sa flotte, même par temps froid. Or, elle n'en obtient plus autant. Elle a dû insister pour en avoir 10 la semaine dernière. Pour cette société et toutes les autres, la situation touche le Japon et la Corée. Nous arrivons tout juste de là-bas, où nous avons dit nous pencher sur les dispositions législatives et le reste. Ce n'est pas comme avec le charbon, où il est possible de décharger 300 000 ou 500 000 tonnes sur le bord d'un quai. Il s'agit de malt pour les brasseurs de bière, et il n'y a aucune capacité d'entreposage durable en plein cœur de Tokyo. Il s'agit de livraisons juste-à-temps, tout comme avec les constructeurs de véhicules automobiles.
Le président : Pourriez-vous répondre un peu plus brièvement? Il y a bien des sénateurs qui aimeraient vous poser des questions.
Le sénateur Plett : J'ai plusieurs questions. Si vous pouviez répondre avec précision et concision, je pourrais toutes les poser.
Le sénateur Mercer a mentionné les modifications, et je pense que MM. de Kemp et Banack en ont parlé, et d'autres aussi. M. de Kemp a clairement dit que c'est en raison du manque de temps que les modifications ne peuvent pas être adoptées; il a compris. M. Banack a été un peu plus ferme au sujet de la modification. Ma question s'adresse donc à lui.
Le projet de loi comporte une disposition de caducité pour août 2016. Compte tenu de nos contraintes de temps, nous devons l'adopter, monsieur. Nous pouvons blâmer les coupables, quels qu'ils soient, mais le projet de loi doit être adopté d'ici le 2 juin en raison de l'échéance du décret. Si nous souhaitons aller de l'avant et essayer d'améliorer les choses, ne convenez-vous pas qu'il est préférable de l'adopter sans modification compte tenu de la disposition de caducité?
M. Banack : Nous croyons que le projet de loi comporte des failles qui n'ont pas été corrigées. Il faut s'y attarder, que ce soit au moyen du règlement qui suivra le projet de loi, ou du règlement et des modifications concernant la loi elle-même. Nous sommes très inquiets. Des membres de la FCA appartenant au conseil des producteurs d'œufs de la Colombie-Britannique sont très inquiets de la situation des céréales fourragères, et n'ont pas l'impression que le projet de loi ne règle la question. Comme M. Ken Eshpeter vous l'a dit hier, nos expéditeurs de wagons céréaliers s'inquiètent qu'on ne réponde pas à leurs préoccupations. Nous comprenons que le décret parvient à échéance le 2 juin et que la loi doit être en place, mais il est important pour nous de faire valoir les inquiétudes de nos membres et de souligner que certaines questions ne sont pas abordées.
Le sénateur Plett : Je comprends, et vous les avez très bien fait valoir — pour autant que vous compreniez que nous avons en quelque sorte les mains liées.
Monsieur Cherewyk, vous avez parlé de la capacité ferroviaire. Pourriez-vous expliquer brièvement ce que vous voulez dire? Nous semblons avoir cette capacité. Les sociétés ferroviaires transportent actuellement les céréales qui doivent être transportées, n'est-ce pas?
M. Cherewyk : Tout d'abord, permettez-moi de parler de ce que les sociétés ferroviaires ont dit, à savoir qu'elles respectent désormais le décret, qu'elles transportent tout ce qu'elles peuvent, mais qu'elles se heurtent aux limites de la chaîne d'approvisionnement. Ce que nous avons sous les yeux laisse entendre que rien n'appuie cette affirmation. Le 4 mai, les stocks du silo terminal de Vancouver correspondaient à 63 p. 100 de sa capacité; celui de Thunder Bay était utilisé à 73 p. 100; et celui de Churchill, à 30 p. 100. Les chemins de fer ne se heurtent pas à la limite des silos. Nous savons qu'ils n'approvisionnent ni le couloir Est, ni les États-Unis, ni le Mexique; avons-nous constaté une augmentation de la capacité? Absolument pas. Nous avons été témoins d'un réaménagement de la capacité actuelle faisant défaut depuis septembre vers certains corridors, comme Vancouver, mais même cette chaîne d'approvisionnement n'est pas utilisée à plein rendement. Nous avons encore 24 navires en attente au port Metro Vancouver.
Je pourrais parler davantage de l'exécution des commandes, mais les besoins de l'industrie ne sont pas comblés.
Le sénateur Plett : Je vais rapidement poser mes deux autres questions; M. Bender pourra se préparer pendant que M. de Kemp répondra à la première.
Monsieur de Kemp, vous avez dit en exposé que nous avons besoin de sociétés ferroviaires justes et concurrentielles. Nous en avons deux au Canada, en plus d'un certain nombre de lignes secondaires. Étant donné qu'il y a deux compagnies principales au Canada, que voulez-vous dire par « justes et concurrentielles »? Comment peut-on y arriver?
Avant de vous laisser répondre, j'aimerais simplement poser une question à M. Bender. Une des modifications recommandées que vous souhaitez porte sur les exigences propres au corridor; c'était assez important. Lors de son étude visant à fixer les nouvelles exigences en matière de volume pour le 1er août, le gouvernement a promis que les exigences propres au corridor seraient au cœur des négociations. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
M. de Kemp : J'ai parlé de sociétés ferroviaires justes, concurrentielles et « transparentes ». Lorsqu'on prend la situation dans son ensemble, et surtout du côté de la transparence, j'aimerais demander à n'importe qui la quantité exacte de matériel roulant que les sociétés ferroviaires ont à leur disposition pour transporter tous les produits, qu'on parle de l'industrie céréalière, du secteur minier, et ainsi de suite — personne ne connaît la réponse. Quelle est l'étendue de leur pouvoir? Nous avons entendu des chiffres concernant un nombre de locomotives en moins, et je ne sais quoi encore, mais personne n'a une idée juste des chiffres exacts pour la suite des choses, même avec une augmentation annuelle de 3 p. 100. Nous avons parlé de sociétés ferroviaires justes et concurrentielles, mais elles doivent être transparentes aussi.
Le sénateur Plett : La transparence est importante.
M. de Kemp : Tout à fait. Une des sociétés effectue des compressions, ce qui aura assurément une incidence.
Pour l'amour du ciel, je ne comprends toujours pas pourquoi les sociétés affirment que leur freinage pneumatique ne fonctionne pas à -30 ºC. Nous avons envoyé Rovers sur Mars alors qu'il y fait -200 ºC. Même les piles du lapin Energizer fonctionnent toujours à cette température, alors je ne comprends vraiment pas.
Le sénateur Plett : Nous sommes d'accord avec vous sur ce point.
M. Bender : Pour ce qui est des mesures propres au corridor, nous sommes ravis d'apprendre qu'il y en aura. Comme M. Cherewyk l'a déjà dit, les ventes aux États-Unis ne sont pas moins importantes que celles vers la côte, ou inversement. Nous avons des partenaires dans la vallée du Fraser au sein de l'Association de nutrition animale du Canada, dont M. Banack aussi a parlé. Ses membres ont besoin d'un approvisionnement en céréales fourragères autant que les ports ont besoin de marchandises à envoyer outre-mer. Les mesures propres au corridor sont essentielles. Nous avons besoin de ces mesures législatives pour veiller à ce que tous les fournisseurs obtiennent ce dont ils ont besoin.
La sénatrice Tardif : Merci d'être avec nous aujourd'hui et de présenter aussi clairement les points qu'il reste à régler.
J'aimerais poser une question à M. Banack. Une de vos remarques m'a surprise. Nous avons beaucoup parlé de transport à des fins d'exportation, mais nous avons quelque peu négligé le marché national. J'étais ravie que vous souligniez l'importance du marché du bétail, par exemple, et de la nécessité d'envoyer nos céréales là où le bétail en a besoin. Je pense que vous avez également parlé du marché du malt.
Vous avez aussi dit avoir l'impression qu'il était important d'assigner des wagons-trémies aux expéditeurs de wagons céréaliers, n'est-ce pas? Je me trompe peut-être de termes; je n'emploie pas souvent ces expressions, mais je commence à apprendre le jargon. Vous avez dit que c'était une année exceptionnelle pour les wagons de producteurs.
Je viens de l'Alberta, et je sais qu'il y a beaucoup d'agriculture dans le nord de la province, de même qu'au sud et au centre de celle-ci. La plupart des agriculteurs albertains utilisent-ils des wagons de producteur? Comment ceux-ci s'intègrent-ils aux chemins de fer d'intérêt local?
M. Banack : Les expéditeurs de wagons céréaliers utilisent habituellement les chemins de fer d'intérêt local. L'Alberta n'en a qu'un, soit la société Battle River Railway. Vous avez entendu hier le témoignage de Ken Eshpeter, président de cette société. J'en suis membre. Nous utilisons bel et bien nos wagons de producteur sur cette voie ferroviaire.
En Saskatchewan, il y a 12 ou 13 chemins de fer d'intérêt local en activité, et bien plus de wagons de producteur qu'en Alberta. La quantité totale de wagons de producteur et de céréales expédiées est probablement très modeste. Probablement 5 p. 100 ou moins des céréales sont transportées au moyen de wagons de producteur. Puisque bien des producteurs n'ont pas vraiment accès aux voies d'évitement dans les Prairies, les wagons de producteur ne sont pas très prisés par bon nombre d'entre eux dans l'Ouest canadien. Mais pour les producteurs qui les utilisent, des études de notre région ont démontré qu'on diminue les coûts et les niveaux de base d'un silo en le chargeant au moyen d'un wagon de producteur.
Il y a deux possibilités. Nous avons ainsi l'occasion de nous rencontrer. Pour les expéditeurs de céréales, c'est sur le marché intérieur de la vallée du Bas-Fraser en Colombie-Britannique qu'on a accès à la majeure partie des céréales fourragères à l'heure actuelle, auprès des expéditeurs et des lignes de wagons céréaliers, c'est-à-dire les petits chemins de fer. En effet, comme MM. Cherewyk et de Kemp l'ont dit, les grandes sociétés céréalières font la manutention des produits après avoir approvisionné les autres marchés. Ils s'intéressent donc à combler les besoins des marchés d'exportation sans nécessairement en faire autant pour le marché national. À l'heure actuelle, c'est donc grâce aux petits chemins de fer et aux wagons de producteur que les marchés locaux obtiennent la plupart des céréales transportées par train.
La sénatrice Tardif : Les chemins de fer locaux couvrent-ils cette distance? Je crois qu'un des témoins d'hier parlait d'environ 270 kilomètres, ce qui était considéré comme assez long pour une voie ferroviaire locale.
M. Banack : Oui. Les expéditeurs utilisant les petits chemins de fer ne font le chargement qu'à un seul endroit. Pour notre part, le chargement va jusqu'à Kamloops. C'est près du collège que les wagons sont laissés, puis déplacés par le CN jusqu'à l'autre voie. Les expéditeurs de wagons céréaliers ne parcourent donc que de petites lignes secondaires et tributaires se rattachant au réseau principal.
La sénatrice Tardif : Avez-vous l'impression d'avoir suffisamment de wagons à votre disposition sur les petites lignes?
M. Banack : Je suis certain que M. Eshpeter a mentionné hier — je pense qu'il s'agissait de 2 000 wagons la dernière fois que je lui ai parlé. À l'heure actuelle, il en manque encore 400 ou 500 pour le transport des contrats de l'année. Je suis persuadé que M. Eshpeter avait de bien meilleurs chiffres, mais il y a un retard par rapport aux engagements.
La sénatrice Tardif : Avez-vous pu acheminer vos céréales jusqu'au marché, monsieur?
M. Banack : Pour notre part, nos céréales ont plutôt bien été expédiées. Nous avons tout de même deux ou trois mois de retard pour le transport de certains produits. Il nous reste un contrat de blé du mois de mars que nous n'avons pas pu livrer. Le canola a pu être expédié grâce à la demande et à la force de l'ensemble du système. Dans notre région, les contrats de blé ont beaucoup de retard chez pratiquement toutes les sociétés céréalières, même du côté des chemins de fer d'intérêt local.
La sénatrice Tardif : Ce matin, des témoins ont dit que l'augmentation de l'interconnexion risquait de créer des problèmes pour le marché canadien. Qu'en pensez-vous? Qui veut répondre? Je sais que cela accroît la concurrence, mais, d'autre part, cela pourrait créer des problèmes dans certains ports canadiens. C'est ce qu'on nous a dit.
M. de Kemp : La question a été posée au président de notre conseil, M. Brian Otto, au début d'avril, devant le comité permanent, relativement à une interconnexion portée à 160 kilomètres. Il a répondu qu'un très bon ami à lui, très haut placé dans une certaine société ferroviaire, lui avait dit que c'était possible, tout à fait, mais une seule fois; que, si on essayait une deuxième fois avec les wagons, ce sera très difficile; que ce sera possible une fois. Et la deuxième fois? Les wagons risquent de rester là où ils se trouveront.
Le sénateur Robichaud : Pourriez-vous nous donner un peu plus de précisions? On complique l'opération d'une certaine manière?
M. de Kemp : Je ne crois pas. Je pense qu'il essayait de faire comprendre que si on déplace les wagons d'un tiers jusqu'à un certain endroit — habituellement, le CN le faisait et ça ira désormais au CP — c'est faisable une première fois. Mais une deuxième fois ou même pour d'autres wagons, ultérieurement... Ils ont une mémoire d'éléphant : ils pardonnent, mais ils n'oublient pas.
La sénatrice Tardif : Le fait que les distances, les zones, passent de 30 à 160 kilomètres?
M. de Kemp : Je ne peux rien dire au sujet des distances.
La sénatrice Tardif : Quelqu'un a-t-il des observations à faire là-dessus?
M. Bender : Je pense que ça multiplie énormément les possibilités. Actuellement, six points seulement de livraison des grains sont accessibles par les deux réseaux. Le chiffre n'est peut-être pas juste, mais l'opération permet d'augmenter sensiblement ce nombre. Greg a peut-être quelque chose à ajouter.
La sénatrice Tardif : D'après vous, il n'y a pas de problème?
M. Bender : Pour nous, cela accroît la concurrence, mais je ne peux pas parler pour les autres.
Le sénateur Robichaud : Monsieur Cherewyk, ai-je bien compris quand vous avez dit que le décret en vigueur vous faisait perdre des clients aux États-Unis et au Mexique?
M. Cherewyk : Le problème à résoudre maintenant par les compagnies est le suivant : chaque wagon commandé correspond à la demande d'un client pour le grain canadien. Pour nous, une baisse des commandes pour le corridor de l'est, pour le Mexique, pour les États-Unis équivaut à des contrats non honorés et à une menace pour nos relations avec notre clientèle. Quand les expéditeurs canadiens se font dire que ce ne sont pas les corridors préférés et qu'ils ne devraient pas se soucier de commander des livraisons par ces corridors, on leur dit, en fait, qu'ils ne peuvent pas desservir ces clients et que les contrats en question sont en péril. Voilà les difficultés qu'ils affrontent aujourd'hui.
Le sénateur Robichaud : Ça n'a pas d'importance que le projet de loi C-30 soit rapidement adopté. Ça ne sera d'aucune aide, n'est-ce pas?
M. Cherewyk : Tout ce que j'ai dit, pendant les cinq minutes qui m'ont été accordées, ç'a été que nous ne devons plus nous contenter seulement d'un objectif général et que nous devons commencer à établir des attentes précises à l'égard de tous les expéditeurs qui envoient des produits par tous les corridors, vers toutes les destinations qui méritent un service juste et équitable. Si nous faisons une déclaration en ce sens et que nous exprimons clairement ces attentes, nous devons nous doter d'un programme de mesures et le mettre en place pour nous aider à déterminer si nous avons atteint ou non cet objectif. Comme nous n'en sommes pas là, l'objectif, pour nous, n'est pas atteint.
Le sénateur Robichaud : D'après vous, ce sera pour quand?
M. Cherewyk : J'ai entendu dire, par le sénateur Plett, qu'il semble que le prochain décret sera accompagné de prévisions concernant les volumes transportés dans les corridors. Je pense que c'est une amélioration, mais, en plus des attentes concernant la circulation dans tous les corridors, il faut un instrument de mesure. Nous devons connaître la demande pour le transport par ces corridors. Nous devons pouvoir mesurer en temps opportun comment on répond à cette demande.
Le sénateur Robichaud : L'avez-vous entendu dire par le ministre?
M. Cherewyk : J'aurais tendance à croire que le ministre devrait convenir que si le décret visait à favoriser le transport du grain, il visait aussi à fournir un service juste et équitable aux expéditeurs canadiens et à tous leurs clients.
Le sénateur Robichaud : Mais ce n'est pas la situation qu'il a créée?
M. Cherewyk : C'est la situation que nous demandons de corriger, maintenant que nous connaissons l'effet du premier décret annoncé le 7 mars. En ce qui concerne le reste du décret et tous les décrets ultérieurs qui fixent des objectifs hebdomadaires ou mensuels minimaux, il faut fixer ces attentes claires.
Le sénateur Robichaud : Vous avez recommandé des amendements. Je ne crois plus au père Noël. Je ne pense donc pas que nous pourrons amender le projet de loi, mais une note, insérée quelque part, devrait mentionner que certains points méritent examen. D'habitude, quand nous faisons rapport du projet de loi, il s'agit du projet de loi modifié. S'il n'a pas été modifié, il passe directement à la troisième lecture.
Je demande maintenant à notre président s'il existe une façon d'ajouter des observations à notre rapport du projet de loi? Les témoins ici présents aimeraient entendre ce que nous pouvons faire.
Le sénateur Mercer : Si vous permettez, monsieur le président, peut-être que la question à poser aux témoins devrait être : le sénateur Robichaud a-t-il raison? Si nous tenions à modifier le projet de loi, nous pourrions probablement proposer des modifications, mais nous ne les intégrerions pas dans le texte et, si nous interrompions le processus, je ne voudrais pas être celui qui irait dans l'Ouest expliquer la situation aux agriculteurs. Ça, je ne le ferai pas.
Mais il arrive très souvent qu'on joigne des observations à un projet de loi qu'on retourne au Parlement, pour communiquer des renseignements obtenus de personnes comme vous. Je sais bien que ce n'est pas ce que vous voulez, mais pensez-vous que ce serait mieux si nous pouvions joindre des observations au projet de loi dont nous ferons rapport? Cela n'a pas d'autre utilité que d'attirer l'attention sur certains témoignages.
Le président : Nous avons reçu des observations de ces témoins et d'autres témoins. La présidence en tiendra compte pendant l'étude article par article. Dans cinq minutes, nous pourrons en discuter davantage, à huis clos, entre sénateurs, avant de faire rapport du projet de loi à la Chambre la semaine prochaine.
Avez-vous une autre question, sénateur Robichaud?
Le sénateur Robichaud : Seulement une observation. Nous essaierons.
M. Cherewyk : Merci.
Le président : Messieurs Bender, de Kemp, Cherewyk et Banack, merci beaucoup pour vos observations et vos opinions sur le projet de loi C-30, Loi sur le transport ferroviaire équitable pour les producteurs de grain.
Sur ce, chers collègues, nous poursuivons à huis clos.
(La séance se poursuit à huis clos.)