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AGFO - Comité permanent

Agriculture et forêts

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts

Fascicule no 26 - Témoignages du 31 mars 2015


OTTAWA, le mardi 31 mars 2015

Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts se réunit aujourd'hui, à 17 h 1, pour effectuer l'étude sur les priorités pour le secteur agricole et agroalimentaire canadien en matière d'accès aux marchés internationaux.

Le sénateur Maltais (président suppléant) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président suppléant : Je souhaite à tous la bienvenue au Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts.

[Français]

Je suis le sénateur Ghislain Maltais, du Québec, président suppléant du comité. J'aimerais commencer la séance en demandant aux sénateurs de se présenter.

[Traduction]

La sénatrice Beyak : Sénatrice Lynn Beyak, de l'Ontario.

Le sénateur Moore : Bonjour. Wilfred Moore, de la Nouvelle-Écosse.

Le sénateur Oh : Sénateur Oh, de l'Ontario.

Le sénateur Enverga : Tobias Enverga, de l'Ontario.

La sénatrice Unger : Betty Unger, de l'Alberta.

[Français]

Le président suppléant : Ce soir, le comité poursuit son étude sur les priorités du secteur agricole et agroalimentaire canadien en matière d'accès aux marchés.

Le secteur agricole et agroalimentaire canadien joue un rôle prédominant dans l'économie canadienne. En 2012, un travailleur sur huit au pays, représentant 2,1 millions de personnes, était employé dans ce secteur, qui a d'ailleurs contribué à près de 6,7 p. 100 du produit intérieur brut.

À l'échelle internationale, le Canada a signé, et est en voie de signer, plusieurs accords commerciaux; l'avenir s'annonce donc prometteur. Ce soir, pour nos premiers témoins, nous accueillons l'Association canadienne des exportateurs à l'alimentation, dont Mme Susan Powell est la présidente, et l'Association pour le commerce des produits biologiques au Canada, dont M. Matthew Holmes est le directeur exécutif. Madame Powell, à vous la parole.

[Traduction]

Susan Powell, présidente, Association canadienne des exportateurs à l'alimentation : Merci de m'avoir invitée aujourd'hui.

L'Association canadienne des exportateurs à l'alimentation est une association sans but lucratif fondée en 1996 pour aider les petits et moyens fabricants canadiens dans leur démarche d'exportation. L'organisation s'occupe d'abord et avant tout de la promotion des aliments, des boissons et des ingrédients canadiens à l'étranger et offre un guichet unique à ses membres pour accéder à l'information nécessaire sur les marchés et la réglementation afin d'exporter avec succès.

Le secteur de la transformation des aliments et boissons est le secteur de la fabrication le plus vaste au Canada quant à la valeur de production, avec 98,8 milliards de dollars d'expéditions. Le Canada compte environ 6 500 installations de traitement, qui emploient quelque 283 000 Canadiens. À peu près 90 p. 100 des acteurs du secteur industriel entrent dans la catégorie de la petite et moyenne entreprise, avec des effectifs de 100 employés et moins. Les membres de notre association entrent essentiellement dans cette catégorie.

En 2014, les exportations canadiennes de produits alimentaires transformés dans le monde ont été évaluées à 25,7 milliards de dollars, soit une augmentation de plus de 2 milliards par rapport à l'année précédente. Nos trois principaux marchés sont les États-Unis, le Japon et la Chine. Nos membres ciblent ces trois marchés ainsi que d'autres en Asie, au Moyen-Orient et en Europe.

Nous avons été très heureux de l'intérêt manifesté par ce gouvernement pour ouvrir les marchés aux fabricants canadiens. Cependant, nous nous interrogeons sur la manière dont ces échanges pourraient réellement bénéficier à certains de nos membres, en particulier à ceux qui ne sont pas en mesure de trouver des fournisseurs pour tous leurs ingrédients au Canada. Nous considérons cela comme étant un problème, en particulier avec l'AECG. Comme vous le savez, nous avons des limites quant à ce que nous pouvons cultiver au Canada, ce qui veut dire qu'il faut trouver ailleurs certains ingrédients. Ces produits, bien qu'entièrement fabriqués au Canada, ne pourront être admissibles aux tarifs préférentiels ou à l'équivalence de produits biologiques.

J'en ai avec moi aujourd'hui. Vous pouvez voir que ce sont des produits merveilleux qui sont fabriqués au Canada et, malheureusement, en raison de quelques-uns des ingrédients, ils ne sont pas admissibles à ce tarif.

Dans l'avenir, nous espérons que notre gouvernement pensera aux fabricants de ces divers produits, de sorte qu'ils puissent, eux aussi, profiter des accords en cours de négociation. Cela permettra une hausse des exportations et la création d'emplois au Canada.

Enfin, je parlerai du degré de soutien gouvernemental fourni à notre industrie. Les produits de pays comme les États-Unis et les pays de l'Union européenne, par exemple, sont plus connus dans le monde que les produits canadiens. Nous croyons que cela est dû en partie au niveau de soutien gouvernemental consacré particulièrement à la promotion. Le Canada, bien qu'il offre un certain soutien promotionnel, ne va pas aussi loin que ces autres pays. Pour faire mieux connaître les produits canadiens et pour que nos fabricants soient sur le même pied que leurs concurrents internationaux, nous croyons qu'il faut consacrer plus de soutien promotionnel à l'industrie des produits alimentaires transformés.

Je vous remercie.

[Français]

Le président suppléant : Merci beaucoup, madame Powell. Nous allons maintenant entendre M. Matthew Holmes.

[Traduction]

Matthew Holmes, directeur exécutif, Association pour le commerce des produits biologiques au Canada : Merci, bonjour, mesdames et messieurs les sénateurs. Je suis heureux de me trouver de nouveau devant vous encore une fois.

Et de vous faire part de notre point de vue sur les marchés internationaux. À titre de directeur exécutif de l'Association pour le commerce des produits biologiques au Canada, j'ai également siégé au Conseil mondial de la Fédération internationale des mouvements d'agriculture biologique, au Comité international du Codex sur l'étiquetage des denrées alimentaires et je fais aussi et notamment partie du Panel consultatif sur l'industrie d'Exportation et Développement Canada.

L'Association pour le commerce des produits biologiques au Canada est une mutuelle qui représente les cultivateurs, les fabricants, les inspecteurs, les exportateurs, les distributeurs et les organisations provinciales en agriculture biologique. Nous considérons toute mesure commerciale progressiste comme étant un moyen de faire avancer notre objectif d'élargissement et d'expansion du marché des produits biologiques, tant au Canada qu'à l'étranger, tout en améliorant la compétitivité de nos cultivateurs et entreprises.

Selon les derniers chiffres, le marché mondial de l'agriculture biologique dépasserait nettement les 72 milliards de dollars américains par année en ventes de produits de grande consommation. Le Canada est le cinquième marché en importance avec des ventes annuelles évaluées à plus de 4 milliards de dollars.

L'association a récemment collaboré avec AAC pour évaluer les exportations de produits biologiques et nos calculs ont permis d'établir que ces dernières s'élèvent à plus de 550 millions de dollars par année, soit une hausse de 20 p. 100 en deux ans.

L'agriculture biologique est sur le point de passer à une croissance se stabilisant à plus de 10 p. 100, mais notre défi le plus important demeure l'approvisionnement qui est inadéquat. Il y a plus de 5 000 fermes, manutentionnaires et fabricants certifiés au pays, mais la croissance est quasiment nulle au niveau de base, celui de la production. Nous n'avons pas suffisamment d'ingrédients ni de cultivateurs pour répondre à la demande. Ce matin, j'ai parlé à un de nos membres des Prairies qui m'a dit qu'il pourrait exploiter à contrat plus de 10 000 acres de nouvelles cultures dès aujourd'hui, si c'était possible. C'est là une entreprise parmi les centaines qui vivent la même situation.

Quoi que vous pensiez de l'agriculture biologique, il est absolument indéniable qu'elle fait partie des secteurs témoignant de la plus forte croissance et qu'elle offre un potentiel économique colossal pour l'agriculture au Canada. Notre partenariat avec le gouvernement au cours des dernières années dans le cadre du programme Agri-marketing a été très important pour définir une stratégie visant les marchés internationaux et soutenir les efforts de nos exportateurs de produits biologiques.

Les premiers marchés sont les États-Unis, l'Union européenne, le Canada et le Japon, lesquels, ensemble, représentent près de 95 p. 100 des ventes mondiales. C'est pourquoi nous sommes évidemment très intéressés à resserrer les liens commerciaux afin de permettre aux cultivateurs et transformateurs de produits biologiques canadiens d'avoir un meilleur accès à ces marchés et autres marchés cruciaux.

La signature d'accords d'équivalence constitue l'un des principaux instruments utilisés pour ouvrir les marchés au secteur biologique canadien. Le Canada a été un précurseur de ces accords fondés sur la réciprocité et la reconnaissance mutuelles. Ils permettent à nos producteurs d'avoir accès à de multiples marchés grâce à leur seule certification canadienne, ce qui représente une économie de temps et d'argent et donne un avantage concurrentiel important. En fait, la première équivalence de produits biologiques a été citée comme constituant un précédent lors de la formation du Conseil de coopération Canada-États-Unis en matière de réglementation.

Nous avons maintenant cinq accords du genre avec les États-Unis, l'Union européenne, la Suisse, le Costa Rica et, depuis janvier, le Japon. Cependant, ces accords ne sont pas tous équivalents. Par exemple, comme Susan Powell vient juste de l'indiquer, notre accord avec l'Union européenne est asymétrique, étant donné les règles d'origine rigides s'appliquant aux exportations canadiennes, de sorte que notre secteur manufacturier n'est pas en mesure de profiter de cet accord. De notre côté, nous n'imposons aucune restriction du genre sur les importations de produits biologiques en provenance d'Europe. Il y a donc matière à amélioration pour avoir accès à ce marché, mais le secteur biologique en a fait une priorité et espère que cette démarche se poursuivra avec votre soutien.

Pour revenir à la question de savoir comment mieux se positionner pour profiter au maximum d'un marché international en pleine croissance et continuer d'adapter notre secteur ici à domicile, il faut examiner les formes de soutien national qui sont en place. Le passage au biologique risque d'être coûteux et d'avoir des effets perturbateurs pour un cultivateur, car cela fait appel à de nouvelles compétences et méthodes et oblige quelquefois à une réduction temporaire des rendements. En l'absence d'accès à la prime dont peuvent jouir les cultivateurs de produits biologiques, ce passage peut prendre jusqu'à trois ans. Actuellement, les cultivateurs canadiens assument tous les frais de cette transition vers le biologique. Par comparaison, l'Union européenne et les États-Unis aident leurs cultivateurs à absorber ce coût de transition depuis au moins 15 à 20 ans et jouissent donc maintenant d'une solide base de producteurs. Les États-Unis consacrent 57,5 millions de dollars à cette fin cette année seulement, dans le cadre du Farm Bill.

Un programme canadien de transition vers le biologique, défendu par le gouvernement fédéral et offert dans le cadre d'une stratégie fédérale-provinciale-territoriale pour l'agriculture, assurerait aux cultivateurs canadiens la capacité de répondre à la demande intérieure et de combler le fossé actuel sur le plan de l'approvisionnement des produits biologiques. Le Canada est l'un des premiers marchés mondiaux en produits biologiques, mais il reste un peu de travail à faire pour s'assurer que nos propres producteurs continuent à offrir les meilleurs prix sur ce marché. Le fait d'aider notre secteur à rassembler plus de sources d'approvisionnement représente sans doute le meilleur point de départ. Cela fournira aux cultivateurs de solides débouchés économiques tout en augmentant la transparence et la sécurité alimentaire, ici, au Canada.

Je vous remercie beaucoup pour l'intérêt manifesté aujourd'hui et je serai heureux de répondre à toutes vos questions.

Le président suppléant : Merci, madame Powell et monsieur Holmes, pour vos excellents exposés.

Le sénateur Moore : Je vous remercie tous les deux pour votre présence.

Madame Powell, vous avez indiqué que l'AECG posait problème, en affirmant que certains produits canadiens ne sont pas admissibles. Pouvez-vous nous donner des précisions à ce sujet et nous dire de quels produits on parle?

Mme Powell : Actuellement, en vertu de l'accord, les produits doivent contenir uniquement des ingrédients canadiens. Les produits transformés, comme les deux que j'ai apportés aujourd'hui, ne contiennent pas uniquement des ingrédients canadiens, parce que chaque produit prend divers profils. Leurs fabricants doivent importer une partie des ingrédients parce qu'ils ne les cultivent pas eux-mêmes. Ce produit contient des bananes. Nous ne cultivons pas la banane. Pour constituer un profil de flaveur intéressant, ils ont ajouté de la banane. Le produit est destiné aux enfants, et les enfants aiment la banane.

Le sénateur Moore : Les adultes aussi.

Mme Powell : Malheureusement, ces produits ne seront pas admissibles à un traitement préférentiel par l'Union européenne qui les importe.

Le sénateur Moore : Y a-t-il beaucoup de produits dans cette situation?

Mme Powell : Beaucoup. Presque tous nos fabricants, à moins qu'ils n'aient un seul produit, comme le sirop d'érable, sont dans cette situation. Même le jus de canneberge est discutable parce qu'il contient du sucre et que nous ne cultivons pas le sucre. La situation touche la majorité de l'industrie manufacturière du Canada. Fondamentalement, l'accord commercial a été mis au point pour les marchandises, mais pas pour les produits transformés.

Le sénateur Moore : Que pouvons-nous y faire? Qu'est-ce que vous proposez à notre comité?

Mme Powell : Je crois qu'une renégociation est nécessaire, si ce n'est avec l'Union européenne, du moins dans le cas des autres accords de libre-échange envisagés, et je sais que l'Inde est une cible, de sorte que ce ne soit plus un problème pour nos fabricants et qu'ils soient en mesure d'être sur les rangs. Ce qui nous préoccupe en ce qui concerne l'Union européenne en particulier, c'est que les États-Unis sont en train de négocier avec elle. On leur garantit de pouvoir favoriser leurs aliments transformés, et nos fabricants seront, encore une fois, désavantagés sur ce marché.

Le sénateur Moore : Laissez-moi vous demander une chose : quel pourcentage de nos produits est admissible? Y en a-t-il? Parlons-nous de 100 p. 100?

Mme Powell : C'est un chiffre plutôt important. Chez nos membres, ce serait probablement autour de 95 p. 100. Nous avons un ou deux de nos membres qui ont des produits contenant un seul ingrédient. Ces entreprises adoreraient s'approvisionner complètement au Canada, mais nous ne cultivons pas tout.

Le sénateur Moore : Je me demande si les négociateurs ont pris cela en considération. Je veux dire, il me semble que c'est évident.

Monsieur Holmes, vous avez indiqué que l'AECG n'est pas réciproque; nous venons d'en entendre parler pour la première fois. Vous avez également affirmé, ce que je trouve intéressant, que les cultivateurs canadiens doivent payer le coût du passage au biologique. Vous avez dit, je crois, que ces 15 dernières années, le gouvernement américain a aidé les agriculteurs et que cette année, il consacrera 55 millions de dollars à cet effet dans le cadre de son Farm Bill. Parlez-moi de la transition vers la culture biologique et de ce qu'il en coûterait aux cultivateurs.

M. Holmes : Les coûts sont généralement assimilés à l'inspection et à la certification. Un cultivateur doit se placer sous la gouvernance d'un organe de certification et payer les services d'inspection et de vérification de conformité aux normes canadiennes de certification et aux règlements en agriculture biologique. En même temps qu'il fait cela, il modifie ses pratiques à la ferme pour se conformer complètement aux exigences réglementaires en matière d'agriculture biologique. Donc, il n'utilise aucune des substances interdites par la norme et il met en place toute autre pratique exigée.

Durant cette période, qui est cruciale, il peut lui arriver de subir une baisse temporaire de rendement. Il ne peut pas non plus envisager de prélever ni empocher aucune prime pour ses produits biologiques, parce qu'il n'est pas autorisé par la loi à vendre ses produits comme étant biologiques avant la fin de la période de transition, laquelle dure généralement trois ans environ.

D'autres pays, d'une manière très stratégique, offrent de l'aide seulement pendant cette période de transition pour encourager de nouveaux venus. À ce moment-là, une fois la conversion au biologique terminée, on s'attend à ce que le modèle d'affaires des nouveaux venus leur permette d'assumer les coûts caractéristiques d'une exploitation commerciale.

Le sénateur Moore : Pourriez-vous nous donner une idée des montants? Je suppose que les coûts attendus dépendent du produit agricole cultivé.

M. Holmes : Tout est fonction de la taille et du type de production. Ça peut varier de 600 $ à 2 000 $ par année, selon la ferme, plus les frais d'inspection. Si vous habitez une région éloignée, vous devez payer les frais d'inspection par une tierce partie qui vient sur place.

Le sénateur Moore : Est-ce que le processus de certification est onéreux? Est-ce rapide? Est-ce que les inspecteurs passent un jour ou deux sur l'exploitation? Est-ce que l'information leur est transmise d'avance et est-ce qu'ils viennent pour dire que tout va bien et confirmer qu'ils sont biologiques? Comment cela fonctionne-t-il?

M. Holmes : Il y a deux inspections. L'une est annuelle et est exigée pour la certification. L'autre consiste en un pourcentage minimum d'inspections au hasard, qui varie selon la taille de l'exploitation et le genre de production, par exemple dans le cas d'une ferme à production mixte complexe, c'est-à-dire qu'il y a beaucoup plus de choses que doit examiner l'inspecteur. Si c'est un seul produit ou une rotation unique, c'est assez simple. La durée sera en moyenne de un à trois jours.

Le processus comporte beaucoup de tâches administratives pendant toute l'année, pour attester de la conformité à la norme et pour tout mettre en bon ordre en vue de l'inspection. Cela se situe entre une inspection sur place et un audit juricomptable complet. C'est ce qui décrit le mieux une inspection.

Le sénateur Moore : Ça ressemble au Sénat du Canada.

M. Holmes : Certains jours, ça se pourrait.

Le sénateur Moore : Où est le siège de l'Association pour le commerce des produits biologiques au Canada?

M. Holmes : Nous sommes ici, à Ottawa.

Le sénateur Moore : Est-ce que les gens qui effectuent la certification viennent de votre bureau à Ottawa?

M. Holmes : Il existe différents organes de certification. Certains sont sans but lucratif et d'autres sont privés. Ils offrent leurs services d'une manière concurrentielle sur le marché du secteur biologique.

Le sénateur Oh : Pour poursuivre sur la question du biologique, l'Union européenne a le même problème. On n'y cultive pas non plus la banane. Comment se qualifie-t-elle pour la marque biologique?

M. Holmes : C'est un scénario très intéressant. En 2011, nous avons obtenu une équivalence avec l'Europe. Elle n'est pas inscrite dans l'Accord économique et commercial global. C'est un accord technique ou administratif en vertu duquel nous reconnaissons le système de certification biologique des Européens et où eux reconnaissent le nôtre. Cependant, lors de la mise en application, ils ont ajouté une règle d'origine : tous les produits devaient être canadiens à 100 p. 100. Ça fonctionne bien pour les marchandises, mais, dès que le secteur manufacturier entre en jeu, à moins d'avoir un produit qui ne contient ni sucre, ni cannelle, ni vanille, ni fruit tropical tel que la banane, vous n'obtenez pas un produit qui se rend en Europe dans ce cadre. Il faut alors subir une nouvelle certification. Vous devez obtenir la certification pour une seconde fois.

Nous n'avons pas imposé la même restriction en toute bonne foi aux Européens, donc ils peuvent s'approvisionner en banane là où on en trouve et acheminer les produits finis chez nous.

Il est utile de noter que, six mois plus tard, les États-Unis ont conclu un accord similaire avec l'Europe, et que cette disposition n'était pas dans cet accord. Les États-Unis ont attendu. Ils ont regardé l'accord que nous avons conclu avec l'Europe et ensuite ils en ont conclu un meilleur. Cela a sérieusement nui à notre capacité concurrentielle dans le secteur de la transformation.

Le sénateur Oh : Ne pouvez-vous pas acheter des bananes certifiées biologiques quelque part?

M. Holmes : Oui, bien sûr, nous pouvons obtenir des bananes biologiques. Cette société est une entreprise de produits biologiques dont le produit contient des bananes biologiques. Pour aller en Europe, vous devez acheter des bananes certifiées biologiques par l'Union européenne et ensuite vous devez faire homologuer toute votre usine et chaque ingrédient de votre produit par le système européen. Vous ne pouvez pas utiliser le système canadien.

Le sénateur Enverga : Merci pour vos exposés.

J'ai été surpris d'apprendre que vous n'êtes pas en mesure de vendre avec certains ingrédients. Fondamentalement, ce dont vous parlez, c'est simplement un arôme. Est-ce que l'entreprise a apporté des ajustements? Disons qu'elle a remplacé la banane par la cerise du Canada. Ce que je veux dire, c'est que je pense que nous devons être souples. Est-ce que l'entreprise ou l'industrie le sont suffisamment pour s'ajuster de manière à pénétrer graduellement les marchés? Y a-t-il une possibilité à cet égard?

Mme Powell : Spontanément, ma réponse serait négative. Je suppose qu'ils le pourraient, et cette entreprise a un ou deux produits qui sont entièrement canadiens, mais c'est plutôt difficile de changer tout un produit pour en faire un entièrement canadien et être en mesure de le commercialiser de cette façon, même au Canada. Le produit contenant de la banane contient une portion entière de légumes et il cible les enfants. Je ne sais pas quel équivalent on pourrait mettre à la place de la banane. Il y a du chocolat aussi dedans, et nous ne cultivons pas le chocolat, donc le produit ne se qualifie définitivement pas.

Le sénateur Enverga : Quelles sont les occasions manquées à cet égard? Qu'avons-nous perdu à l'échelle de l'industrie? Pouvons-nous quantifier la perte? Combien de millions de dollars avons-nous perdus à cause de cela?

Mme Powell : Étant donné que l'accord est en cours de ratification, ce n'est pas vraiment une perte pour le moment. Je crois que ce le sera une fois que l'accord avec les États-Unis entrera en vigueur, parce qu'à ce moment-là, les États-Unis auront l'avantage sur le Canada. Les Américains vont négocier un accord qui convient à l'industrie des aliments transformés, ce que nous n'avons pas fait. Pour le moment, ils sont encore...

Le sénateur Enverga : En train de négocier, n'est-ce pas?

Mme Powell : Nos manufacturiers continuent de payer des droits pour pouvoir exporter vers l'Union européenne, et ils exportent. Ils avaient misé sur des droits moins élevés se disant qu'ensuite, leurs produits auraient été plus présents sur le marché parce qu'ils auraient été offerts à un prix concurrentiel comparativement, disons, à ceux d'un fabricant local de l'Union européenne, ce qui en retour amènerait plus de production au Canada et créerait d'autres emplois.

Le sénateur Enverga : Vous avez parlé de l'Union européenne, mais qu'en est-il de nos chances pour la croissance de nos exportations vers, mettons, la Corée? Pouvez-vous me dire ce qu'il en est en particulier des produits biologiques? Avez-vous un bon marché actuellement à cet endroit?

M. Holmes : Le marché coréen est en croissance rapide. Nous prévoyons qu'il représentera un marché très important dans les années à venir. Cependant, au cours de la dernière année, le ministère coréen a mis en place une nouvelle réglementation qui rend le système coréen de certification obligatoire, donc tout doit être certifié conforme aux normes coréennes pour être commercialisé en tant que produit biologique.

Souvent, avec le biologique, à mesure que de nouveaux pays arrivent avec de nouvelles réglementations pour favoriser le biologique, ils introduisent des barrières techniques au commerce. C'est pourquoi nous avons conclu ces accords d'équivalence avec d'autres partenaires commerciaux majeurs, tels ceux déjà mentionnés. La Corée serait l'une de nos prochaines priorités, et nous travaillons certainement avec les autorités de notre côté pour leur fournir l'expertise technique nécessaire pour négocier avec les Coréens.

Nous avons été très heureux d'obtenir un accord avec le Japon en janvier dernier et nous avons reçu des appels de plusieurs entreprises qui ont immédiatement, dans la première semaine de janvier, lancé les pourparlers en vue de conclure des contrats avec le Japon. Nous voyons la Corée comme offrant un potentiel similaire, une fois que nous aurons obtenu un accord négocié.

Le sénateur Enverga : Madame Powell, avez-vous un commentaire au sujet du marché coréen?

Mme Powell : La Corée est un nouveau marché pour nos membres. Nous y sommes allés en fait en avril dernier pour voir quels étaient les débouchés, et il nous a semblé bon qu'ils soient intéressés par nos produits canadiens. On en revient encore une fois à la promotion, au soutien et à l'aide du gouvernement canadien pour augmenter les exportations des produits canadiens à cet endroit.

La sénatrice Merchant : Je vais revenir sur ce que vous venez de dire, madame Powell. Vous vous tournez vers le gouvernement canadien pour qu'il vous aide. Parce que nous assurons le soutien, qu'est-ce que le gouvernement canadien peut faire exactement? Pouvez-vous nous dire ce que vous aimeriez qu'il fasse?

Mme Powell : J'aimerais voir un peu plus de financement pour la promotion, que ce soit des foires commerciales, des missions ou des promotions en magasin. Nous devons mieux faire connaître ce que le Canada a à offrir.

Nous ne sommes pas très bien connus à l'échelle internationale, sauf pour de rares produits clés, comme le sirop d'érable ou le vin de glace. Nous devons étendre cela. Nous avons un très vaste secteur de transformation. Peu importe où l'on entre, les pays sont très surpris de ce que nous avons. Ils ne sont pas au courant et c'est parce que nous n'en faisons pas assez la promotion. Les fabricants essaient, mais il en coûte très cher de pénétrer un marché, en particulier si c'est un nouveau marché et qu'il vient d'ouvrir. Tout soutien reçu serait utile.

La sénatrice Merchant : J'ai lu un rapport cette semaine disant que la chambre de commerce de la région de Toronto a un bulletin annuel sur l'état de prospérité et qu'on y affirme que les Canadiens se laissent aller : parce qu'il est tellement facile pour nous de commercer avec nos partenaires américains, nous ne profitons pas des marchés en Asie, et c'est une région qui jouit d'une croissance très rapide. L'autre chose dont il était question, c'est que, malheureusement pour nous, l'économie américaine, ces dernières années, n'a pas été bonne, donc nous n'avons pas fait si bien là-bas. Nous avons ignoré le marché asiatique et n'en faisons pas assez.

On disait également que nous ne profitons pas du fait que nous avons plusieurs groupes ethniques au Canada et de s'en servir pour accéder aux marchés. Si nous regardons autour de la table, le sénateur Oh en sait beaucoup sur le marché chinois, et nous avons le sénateur Enverga. Nous n'utilisons pas ces communautés et nous pourrions avoir un grand avantage si nous pouvions les utiliser. Que pensez-vous de ce commentaire voulant que nous soyons trop suffisants?

Mme Powell : J'en conviens, et c'est pourquoi notre association a une stratégie à long terme qui met l'accent sur les marchés émergents tels que l'Asie et le Moyen-Orient. Nous invitons nos membres et ils s'intéressent de plus en plus à ces marchés. Nous ne mettons pas beaucoup l'accent sur les États-Unis. En fait, nous les encourageons à ne pas s'en occuper. C'est un marché facile à pénétrer parce que nous sommes tout près, juste la porte d'à côté, mais il y a tellement plus de débouchés ailleurs. Il s'agit simplement d'éduquer et de les amener là-bas.

Au Moyen-Orient en particulier, la croissance est considérable. Nous venons d'avoir 35 entreprises qui se sont rendues avec nous au Moyen-Orient en février.

La sénatrice Merchant : Monsieur Holmes, est-ce que cela vous dit quelque chose?

M. Holmes : Oui, dans bien des cas, nous y faisons face lorsque nous développons notre stratégie internationale. On a été amené à examiner les marchés nouveaux et émergents plutôt que les marchés traditionnels. Cependant, dans bien des cas, le biologique est, en soi, un marché en émergence, donc la croissance est rapide. C'est vraiment en démarrage sur nos marchés traditionnels en Europe et aux États-Unis ainsi qu'au Japon. Donc ce n'est pas encore quelques-uns de ces autres marchés que nous ciblons, lorsque nous parlons en termes généraux du secteur des aliments et des boissons, de l'agriculture en général. Nous en sommes encore au point de départ avec les États-Unis et l'Europe et nous étendons actuellement nos activités au Japon.

Nous sommes très intéressés et nous avons accompli beaucoup au cours des deux dernières années pour mieux comprendre le marché brésilien, coréen et même le marché mexicain. Au cours des 15 prochaines années probablement, nous pensons que 95 p. 100 des ventes mondiales en produits biologiques en Amérique du Nord, en Europe et au Japon seront réduites à 60 p. 100, quelques-uns des pays BRICS constituant une grande part du reste.

La sénatrice Merchant : Est-ce que vos organisations ont des programmes d'éducation des petits entrepreneurs sur la façon de se frayer un chemin sur ce marché mondial des exportations?

Mme Powell : Nous offrons des ateliers de formation et nous organisons également des missions commerciales qui sont éducatives. Pour les plus expérimentés, nous offrons des foires commerciales dans les marchés également. Nous en avons une qui s'en vient en Chine, en mai. Nous les encourageons à regarder au-delà de l'Amérique du Nord.

La sénatrice Merchant : Vous les organisez où?

Mme Powell : Les séminaires ont lieu à Toronto, et les missions et foires commerciales sont organisées sur les marchés.

M. Holmes : Nous organisons différentes choses, comme des webinaires, des cours et des missions, habituellement des missions d'initiation où nous essayons de présenter les personnes à des fournisseurs de services de logistique, des points d'entrée, des aperçus du marché local et peut-être des acheteurs, des distributeurs ou des importateurs établis.

Également, nous amenons les sociétés ou les groupes à des foires commerciales que nous ciblons et que nous subventionnons. Nous allons faire un peu d'information commerciale également. Pour une grande partie de ces événements, non pas tous, nous recevons le soutien du programme Agri-marketing d'Agriculture et Agroalimentaire Canada.

Le sénateur Enverga : Nous parlons de l'aide gouvernementale. Il y a deux semaines, le gouvernement a fait part de la nomination d'un grand nombre de délégués commerciaux. En avez-vous entendu parler?

Mme Powell : J'étais présente lors de l'annonce par le premier ministre, qui a également parlé d'autres formes de soutien financier, mais je ne sais pas où sera dirigé cet argent. Nous ne savons pas s'il va aux aliments, aux fabricants d'automobiles ou à qui ça va. C'est très vague.

Le soutien du délégué commercial est très bien accueilli. Nous avons recours à ses services tout le temps, donc nous sommes très contents de cette nouvelle.

La sénatrice Beyak : Nous vous remercions pour vos excellents exposés. Chaque fois que je pense que notre comité a entendu à peu près tout ce qui pose un défi au secteur agricole, nous entendons parler de nouveaux problèmes. Je n'étais pas au courant au sujet des ingrédients.

D'autres témoins nous ont dit qu'il y aura des changements pour les céréales. Les droits de douane seront diminués peu à peu sur sept ans, une fois l'AECG entré en vigueur. L'Union européenne éliminera les droits de douane qu'elle semble imposer actuellement sur les produits alimentaires transformés. Voyez-vous un créneau dans un comité ou un groupe? Ils disent qu'il va y avoir un groupe de travail sur la biotechnologie qui sera en mesure de se pencher sur vos préoccupations concernant l'accord actuel.

Mme Powell : À moins que l'accord ne soit modifié, il ne s'appliquera pas à nos membres, sauf pour ceux du secteur céréalier. Nous en avons plusieurs, mais les produits alimentaires transformés ne sont pas visés par l'accord actuel. Je ne suis pas sûre pour le groupe de travail — mais si ses travaux aboutissent, le changement serait à notre avantage.

M. Holmes : Du point de vue biologique, l'arrangement équivalent est indépendant de l'AECG, ce qui permet d'en négocier les conditions, par exemple pour la règle d'origine. Dans ce contexte, les gouvernements, c'est-à-dire les autorités compétentes de la Commission européenne et de l'Agence canadienne d'inspection des aliments, se sont rencontrés et poursuivent le dialogue, et nous faisons tout notre possible pour les aider. Comme il y a environ quatre ans que l'accord original a été rédigé, nous commençons à nous impatienter, mais nous demeurons très optimistes.

La sénatrice Beyak : Je suppose que tant que les gens continuent à dialoguer, on peut espérer qu'ils finiront par bien faire les choses.

M. Holmes : Absolument.

La sénatrice Unger : Combien de membres comptez-vous et représentez-vous dans chacune de vos organisations?

Mme Powell : En ce moment, nous comptons 150 membres dans la catégorie des exportateurs. Nous avons trois catégories, mais il y a quelque 150 membres du secteur manufacturier.

La sénatrice Unger : Ils sont de partout au Canada?

Mme Powell : Oui, de partout.

M. Holmes : Nous avons quelque 175 membres, mais ils ne sont pas tous exportateurs. Ce chiffre comprend la plupart des organisations provinciales qui représentent un groupe très vaste. Il y a quelque 3 700 agriculteurs biologiques au Canada et 1 300 manufacturiers et manutentionnaires dans toute la chaîne d'approvisionnement.

La sénatrice Unger : Ce qui me surprend, et je crois que vous l'avez fait remarquer, madame Powell, c'est que le reste du monde ne sait pas vraiment grand-chose du Canada malgré l'existence de groupes innombrables. Je sais que les provinces et le gouvernement fédéral organisent leurs propres missions commerciales et que chacun de vous représente un certain nombre d'organisations, mais il y en a beaucoup dans le secteur agricole et agroalimentaire. Il semble tout simplement que le Canada devrait maintenant être en tête de liste pour tout le monde. Comment conciliez-vous ces idées?

Mme Powell : Je voyage beaucoup. Nous faisons beaucoup de missions commerciales chaque année. C'est la même chose chaque fois que nous rencontrons de nouveaux acheteurs : ils sont surpris de constater ce que nous avons à offrir. Ils ont entendu parler du Canada. Ils savent à quel point c'est un pays merveilleux, mais ils ne sont pas au courant de la diversité des produits que nous avons à offrir.

Du côté des aliments transformés, cette diversité est importante pour le consommateur. Dans les supermarchés à l'étranger, on trouve de nombreuses promotions organisées par d'autres pays, mais pas tellement par le Canada, à une exception près. Je dois reconnaître les efforts du service des délégués commerciaux à Singapour. Il est très actif et les produits canadiens sont bien connus à Singapour grâce aux nombreuses promotions qu'il organise dans les magasins. Mais cela ne se reproduit nulle part ailleurs. Je crois qu'il s'agirait d'envisager des moyens de mieux faire connaître nos produits.

M. Holmes : Je suis d'accord. Dans mes voyages à l'étranger, il m'a semblé que c'est avec confiance et bonne volonté que l'on fait des affaires avec les Canadiens. Notre sécurité alimentaire est perçue comme une des meilleures au monde. Nous sommes connus pour notre modernité en matière de transformation et de transport des aliments. Il semble donc qu'une bonne partie des ingrédients essentiels dont nous pourrions avoir besoin sont là, mais on en reste à une connaissance superficielle de certains articles stéréotypés pour lesquels nous sommes connus, dont le sirop d'érable, les canneberges ou des produits de ce genre. On connaît mal l'ampleur et la diversité des produits extrêmement modernes et cosmopolites que nous pouvons offrir. Ce sont des produits extrêmement dynamiques et novateurs qui présentent de multiples possibilités de promotion de l'image de marque du Canada.

La sénatrice Unger : Madame Powell, vous avez utilisé le mot « acheteur ». Donc, quand vous allez au Japon ou en Corée, par exemple, est-ce que vous rencontrez un, deux ou trois acheteurs plutôt que des organisations comme la vôtre qui pourraient avoir de nombreux membres?

Mme Powell : Nous participons souvent à des salons commerciaux et nous y rencontrons des milliers d'acheteurs. Nous nous installons dans un pavillon du Canada. Nous insistons beaucoup sur l'image de marque et nous montrons ce que nous avons à offrir. Des milliers d'acheteurs visitent nos kiosques et ils sont toujours surpris.

Quant à nos missions commerciales, nous travaillons de concert avec les chambres de commerce. Nous organisons des réunions personnelles entre un acheteur et nos membres qui se trouvent dans le pays même pour mieux les sensibiliser aux attraits des produits canadiens. Mais c'est un effort constant de longue haleine. Les acheteurs commencent à le voir, mais si les produits n'arrivent pas au marché et ne sont pas assez commercialisés, ils finissent par se retrouver dans un coin quelque part.

La sénatrice Unger : Les salons commerciaux, quand vous y êtes présents, sont donc un moyen de diffusion. Vous vendez des produits concrets fabriqués par des entreprises. Visitez-vous également les épiceries et les grandes chaînes de supermarchés?

Je pense à la dernière fois où je suis allée en Europe et que je suis entrée dans un supermarché. J'ai été étonnée de voir le nombre de produits qu'il y avait. Je me suis aperçue que nous n'avions pas autant de diversité chez nous. Ce serait une réaction typique, je crois, si les gens venaient ici et allaient dans un supermarché et s'étonnaient de la quantité des aliments. Il est pratiquement impossible de pénétrer dans le marché de tout un pays quand on vise des acheteurs concrets pour des produits bien spécifiques. Il y a beaucoup de cela.

Je me souviens quand je siégeais au Comité des pêches il y a quelque temps. Ils envoyaient des gens en Chine. Ils essayaient de se frayer un chemin en Chine et ils faisaient certaines promotions. Ils misaient beaucoup sur l'image de marque canadienne, mais il s'agissait de homard et, bien entendu, ils invitaient des délégations à venir ici. Vous avez raison pour ce qui est de la perception que les gens ont des produits canadiens. Dans le cas des fruits de mer, ils évoquent les eaux immaculées au large de la côte Est du Canada. J'essaie simplement de comprendre comment vous mesurez le succès de vos activités.

Mme Powell : Nous visitons des supermarchés dans tout le pays. Nous accompagnons nos membres au supermarché. Nous présentons les acheteurs des supermarchés à nos membres. Nos membres emportent des échantillons avec eux et encouragent les gens à acheter leurs produits.

Des acheteurs sont également venus au Canada grâce aux gouvernements provinciaux de l'Ontario et du Québec qui les font venir au Canada pour contribuer à les sensibiliser, en organisant des visites d'usines et de supermarchés pour leur montrer ce que nous avons sur nos étagères par rapport aux leurs.

Il y a beaucoup de promotions dans les deux sens, mais je pense que tout se décide au niveau du consommateur. Le consommateur, celui qui va acheter le produit, ne sait pas toujours qu'il s'agit d'un produit canadien. Je crois que c'est un aspect sur lequel il faudrait se pencher.

La sénatrice Unger : L'image de marque est importante.

Mme Powell : Nous devons promouvoir les marques. Nous devons faire de l'échantillonnage. Nous devons faire de la publicité, tout ce qui permet aux gens de mieux connaître les produits canadiens.

La sénatrice Unger : Monsieur Holmes, avez-vous quelque chose à ajouter?

M. Holmes : Je me fais l'écho des commentaires de Mme Powell. Nous nous efforçons de faire connaître les marchés aux bons groupes d'acheteurs, qu'il s'agisse d'importateurs, de distributeurs, de détaillants ou de manufacturiers, suivant le client.

Dès que l'un des membres commence à vendre ou à faire des affaires, mon travail à moi consiste à m'effacer. Nous ne sommes pas là pour faciliter les ventes. Nous essayons seulement de leur donner l'information dont ils ont besoin et de leur ouvrir cet espace. Certains membres ont fait leur première exportation internationale et d'autres ont réussi à pénétrer tout de suite un nouveau marché national important grâce à l'une de nos missions. Ensuite, nous assurons le suivi en leur demandant de nous tenir au courant des ventes attribuables au voyage pour avoir des indicateurs qui nous permettent de mesurer le succès de chaque voyage.

La sénatrice Unger : Vous avez dit tout à l'heure qu'il serait bon que le gouvernement consacre davantage de fonds à cette industrie. Si vous étiez le gouvernement, un décideur, par où commenceriez-vous? Qui financeriez-vous?

M. Holmes : Je l'ai mentionné et je sais que Mme Powell a aussi travaillé avec le Programme Agri-marketing. Avant cela, il y a eu l'Initiative de promotion de l'image de marque Canada, qui a beaucoup fait pour la commercialisation des produits canadiens dans certains marchés cibles. Ces deux initiatives sont positives. Je verrais la suite du programme Cultivons l'avenir, en espérant que les deux programmes se poursuivent sur les mêmes bases.

Nous cherchons également à inciter davantage d'agriculteurs à opter pour les cultures biologiques, car ce marché présente un énorme potentiel. Nous aimerions une nouvelle initiative qui tenterait d'intégrer cet aspect dans un futur programme.

Le sénateur Oh : Le Japon est actuellement le plus vaste marché asiatique pour les produits biologiques.

M. Holmes : Oui.

Le sénateur Oh : Je pense aux marchés de la Corée et de la Chine — le marché chinois est probablement encore plus important. Le revenu moyen des Chinois ne cesse d'augmenter. Je crois que ce sont les jeunes qui optent pour les produits biologiques. Combien de voyages avez-vous faits en Chine l'an dernier dans le cadre de missions ou de salons commerciaux?

M. Holmes : Nous avons été régulièrement en contact avec des collègues en Chine pour évaluer le marché. Je crois que votre instinct ne vous trompait pas lorsque vous disiez qu'il y a un très vaste marché pour les produits biologiques, mais il n'a pas été quantifié jusqu'au mois dernier, quand nous avons pu disposer pour la première fois de données fiables sur le marché chinois. Il correspond plus ou moins actuellement à la taille du marché canadien, mais sa croissance est probablement plus rapide en ce qui concerne la vente des produits biologiques au niveau du consommateur.

Pour le moment, le marché se concentre dans certaines villes. Shanghaï et Beijing sont évidemment des centres très importants. Mais la question, c'est qu'à l'instar de la Corée depuis deux ou trois ans, la Chine a adopté de nouveaux règlements obligatoires pour l'importation de produits biologiques. Il est donc devenu pratiquement impossible de pénétrer ce marché. Cette mesure a de lourdes conséquences pour les exportateurs canadiens. Je ne connais pas un seul producteur ou manufacturier canadien qui se rende actuellement en Chine dans le cadre du système actuel pour les produits biologiques, alors qu'à un moment donné, certains y allaient.

Encore une fois, ces problèmes d'accès au marché qui se produisent indépendamment de tout autre accord de libre-échange que nous avons dans le secteur des produits biologiques sont préoccupants et rendent très difficile l'accès au marché.

Nous voulons aller au Japon parce que nous avons un accord avec eux. Nous en avons un avec les États-Unis et avec l'Europe, respectivement, et nous essayons d'en avoir un avec la Corée. Il reste à voir si la Chine est ouverte à l'idée de négocier un accord de son côté.

Le sénateur Oh : Quand j'étais à Singapour au bureau du délégué commercial, j'ai vu beaucoup de produits canadiens sur les étagères. Je me suis longuement entretenu avec les gens et on m'a appris qu'il y avait des produits canadiens dans le marché de Singapour.

M. Holmes : Nos produits semblent également bien se vendre à Taïwan. On y fait beaucoup de démonstrations de produits canadiens au niveau de la vente au détail. C'est très bien.

Le sénateur Oh : Qui est-ce qui exporte le plus de produits biologiques vers la Chine?

M. Holmes : Ce sont sans doute les Australiens qui l'emportent sur le marché chinois. Je sais que les Européens sont en pourparlers avec la Chine, mais je ne crois pas que la Chine ait déjà conclu un accord sur les produits biologiques.

Le sénateur Oh : Nous devons travailler là-dessus pour pouvoir vendre nos produits en Chine.

M. Holmes : C'est un marché très vaste.

La sénatrice Beyak : Nos autres témoins nous ont parlé de l'image de marque et nous avons pris bonne note de vos commentaires. D'autres témoins nous ont fait également d'excellentes suggestions, et je crois qu'il serait bon d'y consacrer des fonds. Notre comité peut formuler des recommandations.

Nous avons parlé du drapeau canadien et du fait qu'il soit si connu. Le drapeau représente déjà une image de marque. Il y a beaucoup de beaux drapeaux dans le monde, mais le drapeau canadien ressort parmi les autres, comme l'a dit Betty, car il rappelle les eaux immaculées et l'excellente qualité.

Le sénateur Merchant et moi avons parlé d'échantillonnage, et je crois que vous touchez là un point important. Une fois que les gens goûteront à quelque chose d'autre que le sirop d'érable, ils se rendront compte des produits que nous avons. Je crois que la formule serait bonne aussi au Canada. Je n'ai pas vu ces produits, car j'habite dans une petite ville du nord-ouest de l'Ontario. Ce serait une bonne idée de mettre le drapeau sur les produits pour que les Canadiens sachent qu'ils ont été fièrement fabriqués au Canada.

Pouvez-vous me dire ce que vous faites pour commercialiser les produits et ce que nous pourrions faire pour vous aider davantage?

Mme Powell : En ce moment, l'association s'occupe essentiellement des missions et des salons commerciaux, mais comme nous recevons des fonds du programme Agri-marketing, nous avons demandé à faire des promotions dans les magasins du Moyen-Orient, ce qui a été approuvé. Nous en sommes ravis. Il y a là une large communauté de Canadiens expatriés. Je crois que ces ressortissants canadiens vont être très contents parce qu'ils vont voir beaucoup plus de produits sur les étagères et les autres habitants de ces pays seront également sensibilisés. Nous allons travailler avec les délégués commerciaux dans ces marchés pour organiser ce projet. Nous visons le jour de l'Action de grâces pour montrer ce que nous faisons au Canada.

M. Holmes : C'est parfois un dilemme intéressant. D'abord, si on dit à une entreprise ce qu'elle doit mettre sur son emballage, elle sortira toute une litanie sur les pressions qu'elle subit et sur son espace de conditionnement. Vous ne voulez pas que cela se produise. Mais la plupart sauront reconnaître la valeur de la feuille d'érable.

À ce propos, l'ACIA donne des instructions très claires indiquant que si l'on place la feuille d'érable sur un produit, il faut ajouter des énoncés très bureaucratiques qui expliquent que le produit contient également des ingrédients importés ou des ingrédients de tel ou tel pays, ce qui peut dissuader les entreprises d'opter pour ce genre d'image de marque. Au lieu d'agir au niveau du conditionnement, nous devons prendre du recul et voir comment fournir une toile de fond, un pavillon ou un échantillonnage thématique qui peut diffuser le message canadien sans que ce soit le produit lui-même qui le fasse.

Nous sommes souvent trop gentils ou trop pointilleux dans notre démarche. Pour un produit analogue aux États-Unis, on vous annonce fièrement qu'il s'agit d'un produit américain. Ils y accolent des étoiles et toutes sortes de choses, ce qui n'est pas un problème puisque cela crée des emplois, développe l'industrie et que les produits se vendent. Je crois que nous sommes un peu plus prudents ici.

Le sénateur Enverga : Ma question se rapporte davantage aux produits biologiques et à l'équivalence biologique. Vers 2009, nous avions un accord avec les États-Unis concernant les équivalents biologiques, mais avec certaines exceptions, notamment pour les produits contenant des nitrates de sodium qui ne peuvent être vendus au Canada. Pourriez-vous nous en parler plus longuement? Avez-vous pu le mettre en œuvre facilement de votre côté?

M. Holmes : Vous abordez un aspect technique, sénateur. Le nitrate de sodium est également appelé nitrate ou salpêtre du Chili. Il s'agit d'une source d'azote extrêmement soluble récoltée dans les mines et qui est utilisée dans le secteur agricole aux États-Unis. Il s'agit simplement d'un engrais d'origine naturelle. Les normes des États-Unis en permettent l'utilisation. Les normes canadiennes et pratiquement toutes les autres normes mondiales relatives aux produits biologiques l'interdisent.

Je crois que cela représente une véritable mesure de la réussite de cette équivalence. Quand nous avons conclu l'accord avec les États-Unis en 2009, nous avons précisé que la différence nous semblait importante et que c'était un sujet de préoccupation pour nous. La solution consistait à dire aux entreprises qu'elles pouvaient faire certifier leurs produits biologiques en fonction des normes des États-Unis, mais que pour entrer dans notre pays, elles devraient également nous assurer par écrit qu'elles n'avaient jamais utilisé du nitrate de sodium pour la fabrication du produit en question. Nous étions prêts à accepter leur norme avec cette réserve qui répond au résultat que nous recherchons, sans les obliger à respecter nos propres normes. L'approche s'est avérée extrêmement souple et dynamique. C'est une des raisons pour lesquelles elle a servi de modèle au Conseil de coopération en matière de réglementation. Elle garantit le respect mutuel des normes des deux pays tout en permettant d'obtenir les autres résultats qui peuvent être importants pour un pays par rapport à l'autre.

Le sénateur Enverga : Pour le bien des millions de téléspectateurs qui nous regardent aujourd'hui...

M. Holmes : Les supporters.

Le sénateur Enverga : Oui. Quand vous dites « biologique », pouvez-vous le définir? Nous avons l'impression que l'on n'utilise ni engrais ni pesticides.

M. Holmes : Si vous voulez le décrire de cette façon, techniquement parlant, la coccinelle peut être perçue comme un pesticide. Il y a des fermes biologiques qui lâchent toute une armée de coccinelles dans leurs serres ou sur leurs terres pour chasser certains insectes ravageurs.

L'agriculture biologique moderne est une pratique agronomique extrêmement scientifique qui fait appel à la rotation des cultures pour la gestion des nutriments. Elle n'utilise habituellement pas d'engrais ni de pesticides synthétiques, toxiques et persistants. Ce que nous appelons un pesticide peut provenir de sources naturelles. Ils ne sont pas omniprésents et ne restent pas dans l'environnement.

On parle habituellement de gestion intégrée des ravageurs. Vous pouvez favoriser une culture qui sert à éloigner un insecte ou retirer une autre culture qu'ils préfèrent pour les attirer et les éloigner de la culture que vous voulez récolter.

Au niveau manufacturier, les consignes sont très rigoureuses sur le type de nettoyants et d'additifs. Il n'y a pas de colorants, de saveurs ni d'agents conservateurs artificiels, et les produits de nettoyage utilisés pour l'équipement se limitent rigoureusement aux produits naturels.

[Français]

Le président suppléant : Je vais faire un commentaire. La porte m'a été ouverte par la sénatrice Beyak.

Dans le cas des produits biologiques, vous cherchez des marchés sur le plan international, que ce soit en Europe, en Chine ou ailleurs.

Malheureusement, au Canada, il y a un grand marché qui n'est pas exploité en matière de produits biologiques. Je vais vous donner des exemples. Je viens de la ville de Québec; dans certains supermarchés, il y a une section consacrée aux produits biologiques. Je ne nommerai pas la chaîne. Cependant, dans d'autres supermarchés, il n'y en a pas du tout. Entre le fait de consacrer une section complète à ces produits et ne pas avoir de petits comptoirs, il y a une marge.

Je me dis que vous avez beaucoup de promotion à faire au Canada et, avant d'aller à l'étranger, il faudrait convaincre les Canadiens que les produits qu'ils consomment sont exportables, d'autant plus que vos produits coûtent un peu plus cher que les produits ordinaires. Il faut convaincre la population canadienne, et c'est un travail qui appartient aux producteurs et à vos associations.

Le gouvernement peut bien y mettre le pied, mais c'est à vous que revient le rôle d'impulsion. Dans toutes les provinces, il y a des associations de producteurs biologiques. Malheureusement, ils ne sont pas perçus d'un bon œil; ils sont perçus comme des « chialeux » alors qu'ils devraient être parties prenantes de l'alimentation des Canadiens. C'est le travail que je vous demande de faire. Vous avez une gamme de bons produits. Lesquels parmi nous les connaissent? Personne autour de la table. C'est triste, parce qu'il y a beaucoup d'avenir dans les produits biologiques.

Je crois sincèrement que, en menant un travail de promotion au sein de chacune de nos provinces et dans l'ensemble du Canada, vous n'aurez peut-être pas besoin d'aller sur les marchés étrangers, parce que nous, les bananes ou le sucre, peu importe d'où ils viennent, si les enfants les aiment, on leur en donne. De plus, les critères énoncés dans les traités de libre-échange ont le temps de changer.

Je vous invite à faire la promotion des produits auprès des Canadiens, à organiser une offensive dans les supermarchés, à faire connaître vos produits même dans les écoles. C'est biologique, donc c'est bon pour la santé. Je vous invite à retourner à la base, et je suis certain que vous aurez de la difficulté à répondre à la demande.

Honorables sénateurs, nous recevons maintenant M. Cam Dahl, président de Cereals Canada, par vidéoconférence.

Monsieur Dahl, nous vous souhaitons la bienvenue. Nous écouterons votre mémoire de présentation, et ensuite, il y aura une période de questions de la part des sénateurs. Vous avez maintenant la parole.

[Traduction]

Cam Dahl, président, Cereals Canada : Merci beaucoup monsieur le président et sénateurs. Je suis heureux de cette occasion de comparaître par vidéoconférence. Je sais que ce n'est pas l'idéal, mais cela me permet de gérer mon temps, ce que j'apprécie. Au nom de Cereals Canada, je tiens à remercier le comité permanent de m'avoir invité à comparaître aujourd'hui.

La libre circulation des marchandises au Canada ainsi que vers nos clients internationaux est essentielle à la croissance et à la compétitivité du secteur des céréales canadien. Je m'appelle Cam Dahl et je dirige Cereals Canada. Cereals Canada réunit un ensemble vaste et diversifié de partenaires issus de tous les secteurs de la chaîne de valeur de l'industrie des céréales, qui collabore afin d'accroître la capacité concurrentielle de notre industrie céréalière, tant au pays qu'à l'étranger. Cereals Canada compte parmi ses membres des associations agricoles, des sociétés de manutention des grains et des entreprises de développement de semences et de cultures.

Notre conseil d'administration se compose d'agriculteurs à 37,5 p. 100, d'entreprises du secteur de la manutention des grains, de la transformation et de l'exportation, à 37,5 p. 100 et d'entreprises de développement des productions végétales et de semenciers, à 24 p. 100. Notre budget est réparti dans la même proportion que la représentation au conseil d'administration. Cereals Canada se concentre sur le soutien et la coordination des efforts de développement des marchés, la promotion de l'innovation dans le secteur céréalier et l'appui des initiatives stratégiques qui assureront la rentabilité et la viabilité à long terme de tous les éléments de la chaîne de valeur de l'industrie céréalière.

Je vais revenir en arrière et vous présenter mes commentaires résumés d'abord.

Les producteurs et les exportateurs du Canada dépendent de la libéralisation et de l'ouverture des échanges commerciaux dans le monde. Un accès accru au marché soutient l'intégralité de la chaîne de valeur canadienne, qu'il s'agisse des entreprises de développement des productions végétales et des semenciers, des agriculteurs, des expéditeurs ou des exportateurs. La prospérité future de ce secteur névralgique de l'économie canadienne dépend de l'accès libre et prévisible aux marchés internationaux.

L'ouverture de nouveaux marchés profitera non seulement aux agriculteurs et à l'industrie à court terme, mais elle fera aussi du Canada un choix attrayant pour investir dans l'innovation et le développement, ce qui rehaussera notre avantage concurrentiel à long terme. C'est pour cette raison que Cereals Canada appuie vivement l'établissement d'accords commerciaux internationaux qui réduiront les entraves à l'accès aux marchés. Parmi les exemples récents, pensons à l'Accord économique et commercial global entre l'Union européenne et le Canada et à l'accord commercial avec la Corée du Sud. C'est aussi pour cette raison que Cereals Canada appuie la participation active du Canada dans les négociations du Partenariat transpacifique.

Tous les futurs accords commerciaux comprendront des mécanismes reposant sur des principes scientifiques qui permettront de résoudre les modalités des échanges relativement aux mesures sanitaires et phytosanitaires. Si les accords excluent ces mécanismes, les conditions sanitaires et phytosanitaires serviront d'outils politiques pour bloquer les échanges commerciaux et elles finiront par remplacer les tarifs douaniers et les quotas qui auront été supprimés à force de négociations.

Un accès ouvert ne se résume pas à la conclusion d'échanges commerciaux. Il consiste également au soutien des marchés une fois qu'ils ont été ouverts. C'est pourquoi Cereals Canada s'est tourné vers l'Institut international du Canada pour le grain, la Commission canadienne des grains, des producteurs et l'industrie pour créer les missions « Équipe Canada ». L'automne dernier, Équipe Canada a établi un dialogue avec une vingtaine de pays d'Europe, du Moyen-Orient, d'Afrique du Nord, d'Amérique latine et d'Asie.

J'aimerais parler un peu plus longuement des échanges commerciaux et des négociations commerciales. Les échanges commerciaux et l'ouverture des marchés sont absolument indispensables aux producteurs céréaliers de tout le pays. Près de 60 p. 100 de notre production est exportée. Au cours de la campagne agricole de 2013-2014, le Canada a exporté plus de 22 millions de tonnes de blé et de blé dur sur une récolte totale de 37,5 millions de tonnes.

Pour le blé boulanger, les marchés les plus importants en dehors du Canada sont les États-Unis, le Japon et l'Indonésie. Les pays d'Amérique latine, comme le Pérou et la Colombie, prennent de plus en plus d'ampleur, de même que les marchés asiatiques comme la Chine. Aucun des membres du comité ne sera surpris d'apprendre que les marchés d'Asie prennent de plus en plus d'importance en raison, d'une part, du volume de leurs importations et, d'autre part, de la demande croissante pour des importations de qualité supérieure. Voilà un détail pertinent si l'on pense à l'importance des négociations comme celles qui sont en cours en vue de la conclusion du Partenariat transpacifique.

Pour le blé dur, les clients les plus importants pourraient vous surprendre quelque peu. L'Afrique du Nord, l'Algérie, le Maroc et la Tunisie importent collectivement chaque année plus de 1,5 million de tonnes métriques de blé dur de qualité supérieure. Si vous consommez du couscous de Casablanca, il y a de fortes chances que vous souteniez le blé dur d'un agriculteur canadien. L'Italie et les États-Unis sont eux aussi d'importants clients de blé dur, qu'ils transforment en pâtes, bien entendu.

Et étant donné que les exportations canadiennes de céréales dépendent des échanges commerciaux, l'accès aux marchés est un élément crucial de notre avenir. C'est pourquoi Cereals Canada appuie vivement les négociations commerciales comme l'Accord économique et commercial global entre l'Union européenne et le Canada et l'accord commercial avec la Corée du Sud.

L'accord commercial entre le Canada et la Corée est lui aussi un exemple de ce qui se produit lorsque nos concurrents parviennent à un accord avec nous. De grands concurrents comme l'Australie et les États-Unis sont parvenus à un accord avec la Corée du Sud avant le Canada. Cela signifie que leurs produits jouissent d'un accès sans restrictions au marché sud-coréen alors que nous nous heurtons à des obstacles. Cette situation désavantage le Canada sur le plan de la concurrence.

Il s'agit là d'un élément crucial qu'il ne faut pas oublier au sujet des négociations en vue du Partenariat transpacifique. Le Canada a beaucoup à gagner du retrait des obstacles commerciaux dans ces marchés névralgiques en croissance, et je vous rappelle en passant que les pays du Partenariat transpacifique représentent 40 p. 100 du PIB mondial. Nous devrions nous concentrer sur cet énorme potentiel, mais nous devons aussi garder à l'esprit ce qu'il en coûte de tirer de l'arrière. Si des concurrents comme l'Australie et les États-Unis sont capables d'obtenir un accès préférentiel à de précieux clients existants comme le Japon, les agriculteurs canadiens en pâtiront. Ce contrecoup ne fera que s'appesantir à mesure que nos concurrents trouveront des débouchés dans les marchés en développement rapide de l'Asie. Nous ne pouvons tout simplement pas nous permettre qu'une telle situation se produise. Le Canada doit faire partie de cet accord, à la fois pour les retombées positives que nous tirerons de l'ouverture des marchés et pour les grands torts que nous pourrions nous causer si nous ne demeurons que de simples spectateurs.

J'aimerais parler brièvement maintenant des échanges commerciaux fondés sur des principes scientifiques, car c'est un sujet qu'il importe d'aborder. Pourquoi est-ce essentiel aux négociations commerciales? Historiquement, les négociations commerciales ont été axées sur les barrières tarifaires et les quotas, qui sont des éléments importants. Toutefois, dorénavant les règles sanitaires et phytosanitaires vont devenir tout aussi importantes que les obstacles tarifaires, sinon plus.

De temps à autre tous les gouvernements sentent une pression politique de restreindre les échanges commerciaux. Dans le passé, les tarifs douaniers et les quotas ont été leurs outils privilégiés et ils sont toujours mauvais pour l'agriculture canadienne. À mesure que ces obstacles seront écartés, au fil des négociations, les gouvernements se tourneront vers d'autres moyens, notamment des règles de santé et de sécurité n'ayant aucun fondement scientifique. Il est absolument essentiel d'inclure les règles sanitaires et phytosanitaires dans les négociations. Il est inacceptable pour notre industrie de voir les murs tarifaires s'abaisser pour devoir ensuite faire face à des restrictions sans fondement scientifique qui sont tout aussi imperméables.

Tous les futurs accords commerciaux doivent comprendre des règles sur la salubrité des aliments fondées sur des données scientifiques et d'autres règles commerciales, notamment sur les conditions environnementales. Par ailleurs, il faut mettre en place un processus solide de règlement de différends qui garantira une résolution rapide et indépendante de tout litige commercial découlant d'une interprétation divergente des règles commerciales en matière sanitaire et phytosanitaire.

Par conséquent, comme je l'ai dit, il ne s'agit pas seulement d'ouvrir de nouveaux marchés mais de les appuyer. Une fois les marchés ouverts et l'accès garanti, les clients doivent recevoir les soutiens dont ils ont besoin. Une nouvelle Équipe Canada œuvre sur la scène internationale pour atteindre cet objectif. La nouvelle équipe a deux grandes visées : d'abord, promouvoir les qualités du blé et du blé dur canadiens dans chaque région du monde; ensuite, recevoir la rétroaction des clients qui nous servira à garantir que le blé et le blé dur canadiens continuent d'obtenir un prix élevé sur les marchés mondiaux.

Équipe Canada est une collaboration de Cereals Canada, de l'Institut international du Canada pour les grains, de la Commission canadienne des grains, des commissions des récoltes des provinces, et des exportateurs et agriculteurs canadiens. L'automne dernier, Équipe Canada s'est rendue en Asie, en Amérique latine, en Europe, en Afrique du Nord et au Moyen-Orient pour tenir des séminaires auxquels ont participé des clients clés, des responsables gouvernementaux et des organismes publics. Au total, Équipe Canada a visité 20 pays.

La réussite du lancement de cette nouvelle équipe est le résultat de la coordination et de la concertation de tous les maillons de la chaîne de valeur du blé et du blé dur, à savoir le gouvernement, les chercheurs, l'industrie et les producteurs. Ensemble, les membres d'Équipe Canada offrent aux clients du monde entier un aperçu complet du rendement du blé et du blé dur canadiens dans leurs moulins et de la qualité supérieure des pains, des pains cuits à la vapeur et des nouilles qui seront produits à partir de chaque catégorie de blé et de blé dur canadiens.

Le grand objectif d'Équipe Canada est de fournir des renseignements techniques et du soutien à ses clients du monde entier. Toutefois, les missions sur les nouvelles cultures ne s'en tiennent pas à transmettre des renseignements à leurs clients. Les séminaires sont également une excellente occasion pour les clients de faire part de leurs commentaires et de leurs préoccupations au sujet de la chaîne de valeur canadienne. Dans le passé, la Commission canadienne du blé était le seul guichet où les clients pouvaient faire part de leurs préoccupations et poser des questions. L'accord de la nouvelle Équipe Canada est conçu pour garantir aux clients que le Canada maintient ses mécanismes d'assurance de la qualité et que la chaîne de valeur canadienne tient compte de leurs besoins et y répondra. L'inclusion de la totalité de la chaîne de valeur dans Équipe Canada nous donne l'occasion de retransmettre ces renseignements directement aux agriculteurs canadiens ainsi qu'aux chercheurs et aux entreprises privées de développement de semences du pays.

L'approche d'Équipe Canada ne s'arrête pas aux missions sur les nouvelles cultures. Afin de mieux comprendre les besoins de nos clients, l'Institut international canadien pour les grains et Cereals Canada a amorcé un examen exhaustif de leurs besoins futurs. Les conclusions de cette étude orienteront notre soutien et nos interventions auprès de notre clientèle et elles aideront la chaîne de valeur canadienne à mettre au point une stratégie d'investissement public et privé dans l'innovation.

La création de la nouvelle Équipe Canada permet à la chaîne de valeur canadienne d'offrir un soutien essentiel à la clientèle et d'orienter le développement de l'industrie. Ces deux éléments sont indispensables pour maintenir l'avantage concurrentiel du Canada.

Monsieur le président, voilà qui conclut mes remarques; je répondrai volontiers à vos questions.

Le président suppléant : Merci beaucoup, monsieur Dahl pour votre excellent exposé.

Le sénateur Merchant : Merci beaucoup, monsieur Dahl. Je crois que vous appartenez à un secteur qui s'y prend très bien pour la promotion. Les nombreuses années où nous avons été connus comme le grenier du monde y sont peut-être pour quelque chose.

Nos invités antérieurs ici ont été l'Association pour le commerce des produits biologiques au Canada et l'Association canadienne des exportateurs à l'alimentation. La question pourrait ne pas s'appliquer aux céréales, mais je leur ai demandé si le fait de se retrouver juste à côté de nos grands amis et partenaires commerciaux, les États-Unis, nous avait rendus complaisants et si le fait de nous retrouver à côté d'eux est un bienfait mais aussi peut-être un handicap. Pouvez-vous nous dire ce que vous en pensez?

M. Dahl : Pour nous, les États-Unis sont un excellent client ainsi que notre concurrent numéro un. Mes homologues de l'association U.S. Wheat Associates ont plusieurs bureaux partout dans le monde, et je crois qu'ils ont 10 fois plus de personnel que moi, voire beaucoup plus encore.

Les États-Unis sont un marché important pour nous, car ils importent du blé canadien qu'ils mélangent au leur pour rehausser la qualité de la farine produite, et le blé dur canadien n'a simplement pas de pareil au monde. Les pâtes sont faites de blé dur canadien.

Mais ils sont également nos concurrents, et nos principaux concurrents dans des marchés tels le Japon et l'Asie. En fait, U.S. Wheat Associates a pour objectif explicite de remplacer les exportations canadiennes dans ces marchés, et nous ne voulons pas qu'il en soit ainsi.

Je ne dirais pas que nous sommes complaisants. En fait, je dirais que nous sommes très conscients qu'en plus d'être un client très apprécié, ils sont également notre principal concurrent dans les marchés étrangers.

Le sénateur Merchant : Mais cette concurrence pourrait être un bienfait également puisqu'elle nous oblige à explorer de nouveaux marchés. S'ils nous obligent à devenir plus concurrentiels, ce pourrait être une bonne chose.

M. Dahl : C'est quelque chose que l'industrie est en train de faire. Je viserais quant à moi les nouveaux marchés dans l'Asie du Sud et l'Amérique latine. On s'efforce intensément de développer ces marchés.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Vous avez fait allusion aux marchés internationaux, et j'aimerais justement revenir sur les différents accords qui ont été signés. Vous en semblez satisfait, mais quels sont pour vous les défis qu'ils représentent, et qu'est-ce que le gouvernement pourrait faire pour vous aider à les surmonter?

[Traduction]

M. Dahl : Je crois qu'il y a des défis. L'un de ceux que j'ai mentionnés, et qui se trouve probablement en tête de liste, ce sont les règles sanitaires et phytosanitaires relatives à la sécurité et à la salubrité des aliments. Nous devons veiller à ce que ces normes internationales soient fondées sur des données scientifiques solides.

À certains égards, nous sommes plus aptes à faire des essais qu'à comprendre les effets. Nous sommes en mesure de tester des parts par billion. Pour vous donner une idée de ce que cela signifie, une part par billion représente une seule seconde par rapport à 32 000 ans. C'est un nombre infime. Un élément indésirable trouvé à raison d'une part par billion ne pose pas nécessairement une inquiétude à l'égard de la salubrité de l'aliment. Le degré de risque est scientifiquement déterminé.

Nous devons nous assurer que nos partenaires commerciaux s'en tiennent à la science. Autrement, ces normes de santé et sécurité et les règles phytosanitaires et sanitaires vont tout simplement venir remplacer les tarifs et les quotas comme obstacles au commerce. C'est ce que je placerais quant à moi en tête de liste.

L'autre chose qu'il nous faut faire c'est de veiller à avoir un soutien permanent du marché une fois ouvert et de voir à ce que les organismes de réglementation, dont l'Agence canadienne d'inspection des aliments ou la Commission canadienne des grains, disposent des ressources nécessaires pour régler ce genre de différends et de problèmes au fur et à mesure. Ainsi, il n'est pas seulement bon d'ouvrir les marchés, bien que ce soit un élément critique, mais il nous faut un soutien de suivi de la part de nos organismes de réglementation également.

Ce sont les deux recommandations que je vous fais.

La sénatrice Unger : Pour ce qui est de passer du souci des tarifs à celui des règles sanitaires et phytosanitaires, comment peut-on l'éviter dans les faits? Si vous soupçonnez ou savez que quelqu'un est en train de le faire, que pouvez-vous faire à ce sujet?

M. Dahl : Voilà pourquoi il est tellement important d'énoncer les processus de règlement des différends dans les accords commerciaux que nous signons pour pouvoir composer avec les problèmes qui pourraient surgir, par exemple si les pays ne suivent pas les lignes directrices du Codex. Il existe des organismes internationaux expressément établis pour fixer ces limites et définir les approches scientifiques. Il nous faut donc incorporer les processus de règlement des différends aux accords. C'est absolument essentiel.

La sénatrice Unger : Et est-ce la seule chose ou la meilleure des choses à faire?

M. Dahl : C'est la meilleure des choses, veiller à ce que notre commerce soit fondé sur des principes scientifiques et si des règles de santé et de sécurité sont en place, qu'elles le soient elles aussi. C'est notre meilleure défense contre les nouveaux obstacles qui sont en train d'être mis en place.

La sénatrice Tardif : Bonsoir, monsieur Dahl. Je sais à quel point les transports sont importants pour votre industrie. L'industrie céréalière est-elle en train de connaître des difficultés en termes de transport ferroviaire, et comment ce genre de difficultés au Canada affecte-t-il les exportateurs?

M. Dahl : Eh bien, pour commencer, vous avez absolument raison. Vous êtes sans doute tous au courant des difficultés que notre réseau de transports et notre système logistique ont connues l'an dernier. Il est manifeste que la situation a eu un effet sur notre renommée à l'étranger, et nous ne pouvons tout simplement pas nous permettre que cela se reproduise.

Les choses vont beaucoup mieux cette année. J'étais tout récemment au Japon avec le ministre Ritz pour rencontrer certains de nos principaux clients au Japon et partout dans le monde, et les choses vont beaucoup mieux; elles sont plus réjouissantes. Il est toujours plus agréable de rencontrer des clients quand ils sont plus contents.

Nous accusons encore des insuffisances à l'heure de répondre aux commandes placées par les entreprises et nous devons encore apporter des améliorations à long terme au système. Il nous faut faire l'équilibre entre le pouvoir de marché des chemins de fer et la capacité des expéditeurs et exportateurs de veiller à ce que les sociétés de chemin de fer soient responsables de satisfaire la demande des clients.

La sénatrice Tardif : Et que dire d'une pénurie de main-d'œuvre? Les témoins du secteur agricole et de l'agroalimentaire nous ont appris qu'il leur était difficile de recruter suffisamment de travailleurs. Votre secteur est-il en train de connaître une pénurie de main-d'œuvre?

M. Dahl : Le problème est probablement plus important pour le secteur des viandes et de la transformation de la viande plus particulièrement, alors je pense que c'est surtout là que la pénurie de main-d'œuvre se fait sentir dans le domaine agricole. Mais en effet, les agriculteurs ont parfois de la difficulté à obtenir les travailleurs et l'aide qui leur sont nécessaires, particulièrement pour certaines activités liées aux cultures.

C'est quelque chose qui nous préoccupe, mais je dirais que le problème n'est pas aussi aigu que dans le secteur de l'élevage et de la viande.

Le sénateur Enverga : Je vous remercie de vos remarques.

Quand vous parlez de blé, voulez-vous dire du blé entier, ou transformé en farine toute prête à mettre au four?

M. Dahl : La plupart de nos exportations sont des produits bruts. Nous n'exportons pas beaucoup de farine ou de semoule, et ce pour une raison toute simple. Le blé ne se détériore pas beaucoup; en revanche, la farine peut être endommagée pendant le transport. Si vous pouvez charger tout un bateau de blé qui peut transporter jusqu'à 60 000 tonnes sur l'océan, il n'est pas possible d'en faire autant avec de la farine. Par conséquent, la transformation en farine se fait habituellement plus près des clients. Nous avons tendance à exporter du blé et non pas de la farine.

Le sénateur Enverga : J'ai relevé dans vos remarques que les produits comme le blé dur ont un marché régional. Le pain est destiné aux Asiatiques et le blé dur aux Nord-Africains.

Le Canada étant un pays multiculturel, avez-vous déjà essayé d'évoquer notre communauté multiculturelle pour vendre davantage à d'autres pays? Y avez-vous réfléchi? Travaillez-vous dessus?

M. Dahl : Oui, les entreprises commercialisent leurs produits de la sorte. Quand nous parlons de l'importance de clients de pays tels le Japon ou l'Afrique du Nord, ils sont des clients très importants, certes, mais nos principaux et plus nombreux clients demeurent des Canadiens. Notre marché national et nos usines de transformation demeurent nos clients les plus importants. Ce marché ne saurait être négligé.

Le sénateur Enverga : Vous avez dit que les États-Unis sont un de nos principaux concurrents.

M. Dahl : En effet.

Le sénateur Enverga : Les États-Unis exportent-ils vers le Canada?

M. Dahl : Je regrette mais je ne me souviens pas de ces chiffres, mais il existe des échanges entre le Nord et le Sud où certains produits des États-Unis sont importés dans l'est du Canada et nous les envoyons de là à l'ouest du Canada. Mais nous expédions beaucoup plus de marchandises vers les États-Unis qu'ils ne le font vers le Canada, nous sommes donc un exportateur net vers le marché des États-Unis.

Le sénateur Enverga : Pourquoi ne pouvons-nous pas tout simplement contrôler notre marché ici? Pourquoi ne pouvons-nous pas vendre de meilleurs produits aux Canadiens?

M. Dahl : Nous le pouvons. Le blé n'est pas simplement du blé; il existe des produits différents pour des besoins différents. Le blé utilisé pour fabriquer des biscuits soda n'est pas le même qui est utilisé pour faire une miche de Wonder Bread. Ce sont en réalité des marchandises différentes.

Nous ne saurions nous passer des marchés étrangers pour la simple et bonne raison que nous produisons beaucoup plus que nous consommons. Ainsi, si nos frontières devaient fermer demain, 40 p. 100 des producteurs canadiens n'auraient plus à qui vendre leurs produits.

Le sénateur Mockler : Vos remarques, monsieur Dahl, portaient sur les marchés émergents et aussi sur les accords que nous avons conclus. À ce que j'ai compris, dans le cadre de l'Accord de libre-échange avec l'Union européenne, un groupe de travail biotechnologique sera chargé de régler un important sujet d'inquiétude, ou si ce n'est pas une inquiétude, un grand sujet de discussion, à savoir l'approbation des OGM. Participez-vous à ce groupe de travail? Quand vous parlez de 37,5 p. 100 d'entreprises céréalières, exportateurs et processeurs, 37,5 p. 100 d'agriculteurs et 34 p. 100 d'entreprises de développement de semences, y participez-vous? Quelles étapes avez-vous franchies pour le moment? Que recommandez-vous?

M. Dahl : Je suis au courant de l'existence de ce groupe de travail. En fait, c'est un exemple de ces accords parallèles sur les enjeux sanitaires et phytosanitaires qu'il s'agit d'incorporer aux accords de libre-échange.

Nous n'y participons pas directement, et une des raisons c'est que Cereals Canada — c'est-à-dire moi, je ne fonctionne que depuis un an. Les négociations pour l'AGCE se sont déroulées bien avant la fondation de Cereals Canada.

Ce sont ce genre d'accords qui font partie de nos négociations commerciales et qui sont absolument essentiels pour nous. Par conséquent, oui, voilà un exemple où il nous faut veiller à ce que nos échanges soient fondés sur de solides données scientifiques. C'est notre objectif dans le cadre de ces accords.

Le sénateur Mockler : Monsieur Dahl, penchons-nous sur les marchés internationaux et émergents et les accords de libre-échange que nous avons conclus, en songeant notamment à l'Accord avec l'Union européenne, et faisons un petit exercice. Vous occupez la présidence et vous devez formuler trois recommandations. Quelles seraient vos trois recommandations au gouvernement fédéral pour qu'il s'occupe des aspects les plus prioritaires en vue d'obtenir des marchés étrangers pour le secteur agricole canadien?

M. Dahl : Ma recommandation numéro un est un commentaire que j'ai fait en ce qui a trait aux négociations dans le cadre du Partenariat transpacifique : Nous ne pouvons pas tirer de l'arrière. C'est un aspect sur lequel je ne saurais assez insister.

Ma deuxième recommandation importante serait que comme nous sommes un pays à vocation commerciale nous devons dans la mesure du possible chercher à obtenir un accès sans tarif ni quota partout dans le monde.

Ma troisième recommandation se rapporterait aux mesures sanitaires et phytosanitaires dont j'ai parlé. Il s'agirait de veiller à intégrer aux accords des processus de règlement de différends fondés sur des données scientifiques solides pour résoudre ces différends, le cas échéant.

Ce sont les trois principaux commentaires que je ferais.

La sénatrice Tardif : Monsieur Dahl, parmi vos propos, vous avez dit que Cereals Canada ainsi que l'Institut international canadien pour le grain avaient lancé une étude exhaustive des besoins futurs des clients et que vous espériez que cette étude servirait d'orientation au soutien et à la diffusion qui se poursuivent auprès des clients ainsi qu'à maintenir la solidité de la chaîne de valeur canadienne. Ce que vous espérez, c'est l'introduction d'un plan stratégique pour des investissements publics et privés dans le secteur de l'innovation.

M. Dahl : Oui.

La sénatrice Tardif : Qu'espérez-vous? Que cherchez-vous quand vous parlez d'un plan stratégique pour des investissements publics et privés et l'innovation dans votre secteur?

M. Dahl : Monsieur le président, je me demande si nous pourrions avoir une autre heure pour pouvoir répondre à cette question. Elle est excellente.

Cereals Canada a commencé à diriger un processus au moyen de la Table ronde sur l'industrie des grains, qui est une collaboration parmi les participants de l'industrie et les gouvernements fédéral et provinciaux pour aider à élaborer un plan stratégique pour les recherches sur le blé au Canada.

Les exigences de nos clients, c'est-à-dire ce que le projet de l'IICG et Cereals Canada va révéler, est un élément qui servira d'assise à ce plan stratégique. Un des moments vedettes de la démarche sera un atelier qui se déroulera à l'automne et où nous rassemblerons les bailleurs de fonds, les gouvernements fédéral et provinciaux ainsi que les organisations telles la Western Grains Research Foundation, des chercheurs et des instituts de recherche, publics et privés, pour répondre très précisément à ces questions. Quels doivent être les buts de la recherche stratégique du Canada? Sur quoi faisons-nous des recherches aujourd'hui? Où sont les failles? Où sont les lacunes? Sur quoi devons-nous nous concentrer pour satisfaire les besoins des utilisateurs ultimes que sont nos clients?

En définitive, ce sera quelque chose d'utile pour les gouvernements aussi bien que pour l'industrie. À mon avis, il est moins utile de se contenter d'aller au gouvernement et de lui demander de bien vouloir financer l'innovation parce que cela revêt une importance essentielle. Au terme de ce processus, nous serons en mesure de dire « Voici nos objectifs stratégiques, voici ce que nous voulons accomplir et voici ce que le gouvernement peut faire ». C'est une forme très différente de dialoguer. Tel est notre but ultime.

Le sénateur Tardif : Merci de l'avoir précisé.

Le président suppléant : Merci beaucoup, monsieur Dahl pour votre excellente intervention. Tous les sénateurs ont été très heureux de vous entendre.

(La séance est levée.)


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