Aller au contenu
AGFO - Comité permanent

Agriculture et forêts

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts

Fascicule no 27 - Témoignages du 23 avril 2015


OTTAWA, le jeudi 23 avril 2015

Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts se réunit aujourd'hui, à 8 heures, pour examiner la proposition de Santé Canada relative aux frais d'utilisation concernant le recouvrement des coûts liés aux pesticides.

La sénatrice Claudette Tardif (vice-présidente) occupe le fauteuil.

[Français]

La vice-présidente : Je vous souhaite la bienvenue à la réunion du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts. Je suis la sénatrice Claudette Tardif, de l'Alberta, vice-présidente du comité. J'aimerais commencer en demandant aux sénateurs de se présenter.

[Traduction]

Le sénateur Moore : Wilfred Moore, de la Nouvelle-Écosse.

Le sénateur Enverga : Tobias Enverga, de l'Ontario.

[Français]

Le sénateur Maltais : Je m'appelle Ghislain Maltais, sénateur du Québec.

[Traduction]

Le sénateur Oh : Sénateur Victor Oh, de l'Ontario.

[Français]

La sénatrice Fortin-Duplessis : Je m'appelle Suzanne Fortin-Duplessis, sénatrice du Québec.

[Traduction]

La sénatrice Unger : Betty Unger, de l'Alberta.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Je m'appelle Jean-Guy Dagenais, sénateur du Québec.

La vice-présidente : Aujourd'hui, le comité examinera la proposition de Santé Canada relative aux frais d'utilisation concernant le recouvrement des coûts liés aux pesticides, conformément à la Loi sur les frais d'utilisation, L.C. 2004, ch. 6, paragraphe 4(2). Conformément au paragraphe 4(4) de la Loi sur les frais d'utilisation, la proposition qui avait été déposée au Sénat a été renvoyée à notre comité le jeudi 2 avril 2015.

Aux termes de l'article 5 de la Loi sur les frais d'utilisation, le comité peut examiner la proposition reçue et présenter au Sénat, s'il le souhaite, un rapport faisant état de ses recommandations quant aux frais d'utilisation en question. Le Sénat peut alors adopter une résolution approuvant, rejetant ou modifiant les recommandations faites par le comité en vertu de l'article 5 de la Loi sur les frais d'utilisation.

Honorables sénateurs, nous avons le plaisir d'accueillir des cadres supérieurs de l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire de Santé Canada : M. Richard Aucoin, directeur exécutif, et M. Jason Flint, directeur général intérimaire, Division des politiques et des affaires réglementaires.

Je vous remercie tous les deux d'avoir accepté de comparaître devant notre comité. Je vous invite maintenant à prendre la parole. Votre présentation sera suivie d'une période de questions.

Richard Aucoin, directeur exécutif, Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, Santé Canada : Honorables sénateurs, je suis le directeur exécutif de l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire de Santé Canada. Je suis très heureux d'être ici aujourd'hui en compagnie de Jason Flint, mon directeur des politiques et des affaires réglementaires, pour discuter des révisions proposées au régime de recouvrement des coûts liés aux pesticides en vertu de la Loi sur les frais d'utilisation.

À titre d'organisme de réglementation des pesticides, nous sommes chargés de gérer les risques liés à un large spectre de produits, comme les insectifuges personnels, les produits chimiques utilisés en agriculture et en foresterie, ainsi que les produits utilisés en aquaculture. Les pesticides jouent un rôle clé relativement à la santé et au bien-être de nombreux Canadiens et aussi à l'égard de la profitabilité d'un grand nombre de secteurs de l'économie, en particulier le secteur de l'agriculture. Le domaine de l'agriculture est l'un des plus grands utilisateurs de pesticides, et ses besoins servent souvent de fondement à la conception et à la mise en marché de nouveaux pesticides.

À titre d'organisme de réglementation, nous connaissons très bien les risques et les valeurs de ces produits pour l'agriculture canadienne.

[Traduction]

Madame la présidente, dans le domaine des pesticides, comme vous le savez probablement, le Canada occupe une petite place sur la scène mondiale, ne représentant qu'environ 3 p. 100 du marché mondial. Dans le passé, les producteurs canadiens ont toujours eu de la difficulté à avoir accès aux nouvelles technologies à des fins d'utilisation, sauf pour les cultures à grande échelle comme les céréales et les oléagineux. Or, cette situation a changé au cours des dernières années. De plus en plus, les produits sont homologués au Canada en même temps que dans les principaux marchés comme les États-Unis et l'Union européenne — et avec les mêmes profils d'emploi; c'est grâce à un système règlementaire plus mondialisé, soit une réalisation à l'égard de laquelle nous sommes particulièrement fiers d'avoir joué un rôle de chef de file.

Le Canada est depuis longtemps vu comme un chef de file pour ce qui est de sa démarche axée sur les risques dans le cadre de la réglementation des pesticides, et il est reconnu par les intervenants pour son engagement envers l'harmonisation règlementaire et sa collaboration internationale en matière de réglementation. L'ARLA fête ses 20 ans au sein de Santé Canada, et les changements qui se sont produits au cours de cette période sont remarquables, selon nous. Le Canada est passé de la conduite de projets pilotes d'examens conjoints et de la collaboration avec des organismes de réglementation des États-Unis à la réalisation d'examens conjoints avec les organismes de réglementation de plusieurs pays comme principale activité d'affaires.

Même si les producteurs cherchent toujours une solution aux problèmes de ravageurs en constante évolution, leur point de mire s'est tourné vers l'accès aux nouvelles technologies, et ils ont constaté que l'accès aux marchés d'exportation pourrait être compromis si ces marchés n'acceptent pas cette technologie, les résidus de pesticides ou cette denrée.

Récemment, l'ARLA a commencé à travailler plus étroitement avec Agriculture et Agroalimentaire Canada afin de relever les obstacles au commerce les plus prioritaires qui sont propres aux pesticides et qui sont importants pour les producteurs canadiens. Nous espérons fournir au besoin beaucoup plus de connaissances scientifiques spécialisées en vue de contribuer à résoudre ces différends relatifs à l'accès au marché. Nous nous servons également de notre expertise en matière de réglementation afin de contribuer à l'établissement de normes internationales en matière de la salubrité des aliments par l'entremise du Comité du Codex Alimentarius sur les résidus de pesticides, et nous cherchons à effectuer plus de travaux bilatéraux avec les autorités étrangères afin d'éliminer certaines différences dans les normes en matière de limite maximale de résidus, lorsque ces normes créent des obstacles à la libre circulation d'aliments sains et nutritifs.

Le rôle de plus en plus important de l'ARLA dans la collaboration internationale règlementaire sur la sécurité des pesticides et la salubrité des denrées alimentaires a nécessité beaucoup de ressources, et il sera nécessaire de continuer de faire activement preuve de leadership et d'y participer. L'harmonisation règlementaire à l'échelle internationale de nos politiques et de nos démarches sera essentielle afin d'atteindre nos vastes objectifs en matière de santé et de sécurité.

Les intervenants ont offert un soutien solide dans le cadre des efforts déployés dans ces domaines et sont d'accord qu'il faut continuer à moderniser le régime de recouvrement des coûts qui se veut un moyen possible de contribuer à l'atteinte de ces objectifs. Voilà qui nous amène ici aujourd'hui.

[Français]

Je vais maintenant céder la parole à Jason Flint qui fournira des renseignements contextuels sur la proposition de recouvrement des coûts liés aux pesticides, laquelle fait l'objet d'un examen par le présent comité.

Jason Flint, directeur général intérimaire, Division des politiques et des affaires réglementaires, Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, Santé Canada : Le règlement en vigueur relatif aux frais à payer pour le traitement des demandes et qui soutient le système réglementaire établi en 1997 n'a pas changé depuis 18 ans. Comme vous pouvez l'imaginer, la complexité et la charge de travail associées aux activités de réglementation des pesticides ainsi que les coûts qui y sont liés se sont accrus durant ces années.

Nous espérons que le comité appuiera les changements proposés.

[Traduction]

Il y a quatre ans, lorsque l'ARLA a commencé à mettre au point cette proposition, elle a d'abord établi en détail les coûts liés aux diverses activités règlementaires entreprises par le ministère en ce qui a trait aux pesticides. De plus, nous avons fait participer massivement les intervenants à des discussions sur le système règlementaire régissant les pesticides, et nous avons recueilli leurs points de vue sur son fonctionnement. Nous nous sommes adressés à une variété d'intervenants, y compris les fabricants de pesticides qui paient des frais, mais aussi les universités, les organisations non gouvernementales, les groupes de producteurs agricoles et les autres utilisateurs de pesticides.

Certains commentaires découlant de ces discussions ont servi à renforcer un grand nombre de nos démarches au fil des années. Nous avons reçu de nombreux messages de félicitations de l'industrie concernant notre capacité à respecter nos normes publiées en matière de rendement relativement au traitement des demandes réglementaires. Nous avons reçu aussi beaucoup de soutien dans le cadre de nos travaux de collaboration internationale par l'entremise du Programme de l'OCDE sur les pesticides, du Groupe de travail technique de l'ALENA sur les pesticides et, plus récemment, du Plan d'action du Conseil de coopération Canada-États-Unis en matière de réglementation. Nos efforts continus dans le cadre des examens conjoints internationaux ont suscité beaucoup d'intérêt chez plusieurs intervenants.

Les intervenants ont reconnu les incidences possibles sur les exportations agricoles canadiennes découlant des normes internationales en matière de salubrité des aliments ayant trait aux pesticides et ont recommandé que l'ARLA accélère ses travaux à l'appui des objectifs canadiens en matière de commerce en participant à l'élaboration de ces normes.

Les intervenants ont aussi pressé l'ARLA d'accroître sa participation à d'autres travaux internationaux afin d'harmoniser les politiques scientifiques réglementaires avec les organismes dont j'ai déjà fait mention. Ils ont recommandé d'entreprendre plusieurs améliorations organisationnelles, la plupart ayant trait aux technologies de l'information et à la sensibilisation auprès du public.

Fait à noter, les intervenants ont convenu que l'accroissement du financement de ces activités prioritaires doit être envisagé en parallèle avec toute révision potentielle des frais de l'ARLA.

La proposition qui a été déposée le 2 avril a été rédigée à la suite d'une série de consultations avec les payeurs de frais et la communauté plus large d'intervenants, y compris le Conseil consultatif de la lutte antiparasitaire de la ministre de la Santé. La majorité des frais liés aux demandes de l'industrie ont été établis à environ 30 p. 100 de ce que la prestation du service coûte au ministère. Les frais ont été établis en fonction des frais fixés par d'autres autorités pour des demandes similaires, et des modifications ont été apportées afin de réduire certains montants en fonction des différences. Des réductions de frais sont également prévues afin d'appuyer les petites entreprises et de compenser la taille du marché canadien. La proposition est abordable pour l'industrie et n'aura pas de conséquence importante pour les principaux utilisateurs de pesticides comme les producteurs agricoles. Nous nous sommes fondés sur la grille tarifaire existante en adaptant les frais comme nous l'avons décrit et en y apportant quelques changements, soit des ajouts ou des suppressions, afin de mieux représenter le travail actuel de l'ARLA.

L'allocation budgétaire actuelle de l'ARLA est d'environ 43 millions de dollars, comprenant à peu près 5,5 millions de dollars en recettes provenant des frais. Si elle est approuvée, la nouvelle grille tarifaire permettra de générer des recettes additionnelles de 4,5 à 5 millions de dollars. Les intervenants appuient la proposition à une condition. Il faut que toutes les ressources publiques dégagées grâce à l'augmentation des frais soient réinvesties au sein de l'ARLA afin de traiter des priorités qu'ils ont cernées et qu'elles ne servent pas à compenser des réductions du budget de l'ARLA.

[Français]

Pour conclure, madame la présidente, nous sommes d'avis que le nouveau régime de recouvrement des coûts liés à la réglementation des pesticides est raisonnable et s'appuie sur des preuves solides et abordables. Nous sommes aussi d'avis que les fonds supplémentaires pourraient servir à réaliser les objectifs liés aux priorités du gouvernement et des intervenants.

Ce régime de recouvrement des coûts actualisé nous aidera à répondre aux besoins des Canadiens grâce à un système de réglementation des pesticides qui les protège continuellement contre les risques inacceptables pour la santé humaine et l'environnement et qui est à la fois moderne, efficace et viable sur le plan économique.

La vice-présidente : Merci beaucoup, messieurs, pour votre présentation intéressante et succincte. Nous allons maintenant passer aux questions que les sénateurs veulent poser. Alors, je commencerais par le sénateur Maltais, suivi du sénateur Enverga.

Le sénateur Maltais : Merci, madame la présidente. Bienvenue, messieurs. On nous a donné un tableau comparatif pour les coûts. Il est assez difficile à comprendre, car nous ne sommes pas des spécialistes en matière de coûts de récupération. Avez-vous ces tableaux? J'imagine que oui. On parle de frais proposés, de frais actuels et de coûts moyens pour le Canada. Je remarque qu'il y a des écarts considérables. Par exemple, prenons les frais de demande de base concernant l'examen ou le traitement de l'étiquette. Les frais proposés sont de 1 133 $, les frais actuels sont de 262 $, et le coût moyen pour le Canada est de 3 777 $. Il y a des écarts qui sont difficiles à comprendre, et j'aimerais que vous me donniez des explications sur ces écarts et sur le fonctionnement.

[Traduction]

M. Aucoin : Merci de votre question, sénateur. Je crois que les frais ont été établis en 1996-1997. Nous avons donc utilisé longtemps ces frais. Le travail est devenu considérablement plus complexe, et les données scientifiques ont également considérablement évolué au cours de cette période. Les types de renseignements et d'études dont nous devons maintenant tenir compte avant de prendre des décisions réglementaires ont évolué et se sont étendus considérablement. Nous reconnaissons que le coût de la vie ainsi que la nature du travail ont considérablement augmenté.

Le travail à la hâte et les demi-mesures sont maintenant chose du passé lorsqu'il est question de pesticides, parce que ce sont des produits chimiques dangereux pour l'environnement. Nous devons donc faire preuve d'une grande prudence lorsque nous prenons des décisions réglementaires les concernant. Comme Jason l'a mentionné plus tôt, nous avons réalisé un exercice exhaustif d'établissement des coûts pour comprendre ce qu'il nous en coûte réellement de nos jours dans les années 2000 pour faire ce travail. Nous sommes arrivés à ce nouveau coût. Nous avons tenu compte d'un certain nombre de principes, comme Jason l'a mentionné. Par exemple, nous devions comprendre les répercussions de ces modifications sur l'industrie, en particulier les petites entreprises et les fabricants, et nous devions déterminer si, au final, ce seraient les utilisateurs qui absorberaient les hausses. Nous avons soigneusement examiné toutes les modifications dans la grille tarifaire et les répercussions qu'elles pourraient avoir.

Nous avons également examiné la manière dont ces types d'activités sont menés dans d'autres grands pays comparables, comme les États-Unis, l'Australie et le Royaume-Uni. Nous avons essayé de nous servir de ces pays comme points de référence, en particulier les États-Unis, qui sont, comme vous le savez, notre principal partenaire commercial, pour nous assurer que, lorsque les fabricants lancent de nouvelles technologies, ils tiennent compte des besoins des producteurs canadiens et américains. Nous voulions nous assurer d'avoir un cadre réglementaire et une grille tarifaire pour ces activités réglementaires qui ressemblent à ce à quoi les gens s'attendent aux États-Unis.

Notre marché est beaucoup plus petit. Nous avons donc établi les frais à 30 p. 100 de ce qu'il nous en coûte pour accomplir le travail, selon notre évaluation. Ces frais se comparent à ceux des autres pays dans le monde, sans toutefois nous coûter des parts de marché, pour ainsi dire. Si nos frais étaient trop élevés, cela pourrait dissuader l'industrie d'entrer sur le marché canadien.

[Français]

Le sénateur Maltais : Pour m'assurer d'avoir bien compris, les frais n'avaient pas augmenté depuis 18 ans?

M. Aucoin : Oui.

Le sénateur Maltais : Aujourd'hui, sur une période de 17 ans, la question des pesticides a varié beaucoup, elle est devenue beaucoup plus importante, beaucoup plus complexe et beaucoup plus internationale. Cela coûte un peu plus cher aussi, c'est tout à fait normal. Quel est l'impact de cette évolution sur le consommateur, non pas l'individu, mais le producteur de grain, par exemple, le producteur de soja, de maïs ou de blé? Quel est l'impact que cela peut avoir sur ses coûts à lui?

[Traduction]

M. Aucoin : Je vais laisser Jason Flint vous répondre, parce qu'il a réalisé le gros du travail directement avec les groupes d'intervenants en vue d'examiner les répercussions possibles. Je vais peut-être lui demander de vous répondre.

M. Flint : Le coût des frais réglementaires n'est pas le coût prédominant lors de la commercialisation d'un pesticide. Nous avons réalisé certaines analyses coûts-avantages et avons déterminé que le coût qui pourrait être transmis aux consommateurs ou aux producteurs agricoles, dans le cas présent, était d'environ 0,1 p. 100. Pour les agriculteurs, cela équivaut à quelques cents l'acre pour la majorité des produits qu'ils utilisent. Bref, cela ne devrait pas avoir de répercussions majeures sur leur bilan financier.

[Français]

Le sénateur Maltais : Merci, monsieur Flint. J'aurais une dernière petite question. Est-ce que Santé Canada travaille en collaboration avec vous en ce qui concerne l'homologation des nouveaux pesticides, et l'évaluation de ceux qui sont retirés, de ceux qui sont à venir, et de ceux qui sont homologués par les entreprises et fabricants de pesticides et les groupes d'associations d'agriculteurs? Est-ce que Santé Canada a son mot à dire dans ce dossier pour s'assurer que tout est conforme en ce qui a trait à la santé des Canadiens et des Canadiennes et, bien sûr, aux exigences de ceux à qui on exporte nos produits?

[Traduction]

M. Aucoin : L'ARLA est en gros une direction générale de Santé Canada. Nous faisons partie du ministère, et notre mandat principal est en fait de veiller à la protection de la santé et de l'environnement. C'est notre principal mandat. Tous nos examens, toutes nos études et tous nos travaux scientifiques à l'appui des décisions réglementaires visent à remplir ce mandat en vertu de la Loi sur les produits antiparasitaires. Nous collaborons étroitement avec nos intervenants. Comme vous êtes à même de le comprendre, les pesticides sont importants dans le milieu agricole. Nous collaborons donc étroitement avec le ministère de l'Agriculture et toutes les associations et tous les groupes d'intervenants agricoles. Nous faisons partie du ministère pour veiller à la réalisation des travaux d'évaluation des risques.

Le sénateur Enverga : Merci de votre présentation. Lors d'une étude sur l'innovation dans le secteur agricole, certains témoins ont parlé des initiatives de l'ARLA en vue d'harmoniser à l'échelle internationale le processus pour les nouveaux produits. Par exemple, l'ARLA est membre du Groupe de travail technique de l'ALENA sur les pesticides. L'ARLA collabore également avec le Groupe de travail de l'Organisation de coopération et de développement économiques sur les pesticides et le Conseil de coopération en matière de réglementation. Voici ma question. Comment l'augmentation des recettes découlant de la hausse des frais d'utilisation aidera-t-elle l'ARLA à poursuivre ses initiatives en matière d'harmonisation à l'échelle internationale?

M. Aucoin : L'une des plus grandes réussites de l'ARLA concerne notre contribution et notre soutien quant à l'harmonisation réglementaire au sujet de l'examen des pesticides dans le monde. Nous avons commencé par être très actifs au sein du groupe de travail technique de l'ALENA, et nous collaborons étroitement depuis de nombreuses années avec l'EPA aux États-Unis et nos collègues mexicains pour essayer non seulement d'harmoniser le travail que nous faisons, mais aussi de répartir la charge de travail entre les divers pays.

Nous avons ensuite importé cette pratique au sein de l'OCDE et nous sommes actuellement très actifs au sein de l'organisme. Nous nous partageons le travail et nous participons à des examens conjoints mondiaux en compagnie de divers pays. Nous en tirons des avantages. Cela nous permet certes d'avoir accès aux meilleures données scientifiques dans le monde. Nous nous assurons aussi que les producteurs canadiens ont le meilleur accès possible aux nouvelles technologies qui sont lancées à l'échelle mondiale.

Voilà des exemples de ce que nous faisons actuellement. Par contre, nous nous rendons compte que nous devrons en faire encore plus dans l'avenir. Nous devons continuer d'accroître nos initiatives sur la scène internationale pour veiller à ce que les Canadiens aient accès aux données scientifiques mondiales, que les utilisateurs de pesticides aient une voix à la table lorsque certains fabricants mondiaux discutent de certaines nouvelles technologies et qu'il y ait des discussions sur l'endroit et le moment de lancer ces technologies dans les divers pays.

Le Canada est actuellement un important chef de file dans le Groupe de travail de l'OCDE sur les pesticides. Nous devons continuer sur cette voie, et c'est l'un des domaines qu'il faudra continuer de soutenir grâce aux recettes tirées du régime de recouvrement des coûts. Nos travaux en matière d'élaboration de normes de salubrité des aliments sont un deuxième domaine très important. Comme je l'ai mentionné plus tôt, même si notre participation aux groupes de travail de l'OCDE et de l'ALENA a permis d'accroître considérablement l'accès aux nouvelles technologies disponibles pour les producteurs canadiens — nous avons facilité en grande partie ces travaux —, les résidus de pesticides sur les denrées alimentaires sont un secteur au sujet duquel le Canada comprend qu'il doit aussi faire ses devoirs dans les marchés étrangers, parce que certains pesticides ou certaines quantités de résidus de pesticides peuvent être acceptés ou non ailleurs. Cela peut nuire aux exportations agricoles du Canada.

C'est un autre domaine important qui reçoit l'appui des intervenants. Grâce à cette proposition de recouvrement des coûts, nous redoublerons d'efforts en vue de faire ce que nous pouvons pour offrir au moins une expertise spécialisée aux ministères, y compris Agriculture Canada, qui essaient d'accroître l'accès aux marchés pour les producteurs canadiens.

Le sénateur Enverga : J'ai une question complémentaire. Il semble important pour l'ARLA de réinvestir les recettes additionnelles que l'organisme générera de l'augmentation des frais. J'aimerais que vous nous parliez des activités additionnelles que prévoit l'ARLA en vue de mieux servir les intervenants du milieu.

M. Flint : Mme Richard a déjà commencé à avancer la possibilité de soutenir le commerce international et de nous attaquer aux obstacles commerciaux, en particulier en ce qui a trait aux résidus de pesticides sur les aliments. C'était l'un des secteurs dans lesquels les intervenants ont vraiment demandé qu'il y ait des investissements.

Un autre secteur est l'harmonisation des approches concernant les données scientifiques et les politiques. Nous avons fait beaucoup au sein de l'OCDE en vue d'améliorer cet aspect, en particulier dans le cadre des examens conjoints mondiaux. Nous constatons vraiment que nous avons travaillé durant de nombreuses années pour harmoniser les exigences en la matière. Maintenant, les examens conjoints sont réalisés en utilisant les mêmes données. Tout le monde examine les mêmes études. Si nous nous penchons sur une étude au Canada, nos partenaires font de même dans l'Union européenne, aux États-Unis et possiblement au Mexique, en Chine et ailleurs.

Pendant l'évaluation, nous pouvons remarquer qu'il persiste certaines différences mineures dans les manières de voir les choses, les approches ou les politiques de divers pays. À ce stade, lorsque vous participez aux examens conjoints mondiaux, c'est le moment idéal de dire : « Nous devons nous demander ce qui explique de telles différences. Sont-elles nécessaires? Devrions-nous adopter une autre approche qui se fonde sur ce que font d'autres pays? » Bref, il faut investir dans les secteurs où de telles différences existent peut-être encore.

Les pratiques commerciales sont le troisième secteur important dans lequel nous envisageons d'investir. Par exemple, la majorité de nos normes de rendement sont déjà harmonisées avec ce qui se fait ailleurs dans le monde.

Cependant, il y avait deux ou trois normes qui étaient un peu plus élevées, et les intervenants voulaient voir une réduction de certaines normes de rendement avec l'augmentation des frais. Nous envisageons donc d'en réduire deux ou trois.

Nous devons également moderniser notre infrastructure électronique. Comme vous pouvez vous en douter, nous recevons des demandes énormes. Cela se fait donc maintenant de manière électronique, et ce, depuis au moins 10 ans. Il faut moderniser ce système et le rendre plus compatible avec ceux des autres pays. Si vous vous penchez sur un document qui compte de 10 à 30 000 pages d'études scientifiques et que vous communiquez avec des organismes de réglementation étrangers, vous devez vous assurer d'avoir un système qui le permet. Nous envisageons donc des investissements à cet égard.

Le dernier secteur dans lequel les intervenants nous ont demandé d'investir davantage, c'est la sensibilisation, à savoir nous assurer que le public et les intervenants canadiens ont une meilleure compréhension de nos travaux et de nos décisions et nous assurer d'être transparents et de dire clairement que les Canadiens peuvent consulter nos renseignements.

Voilà les secteurs importants dans lesquels les intervenants nous ont demandé d'investir.

Le sénateur Moore : Monsieur Flint, je tiens à m'assurer d'avoir les bons chiffres. Je crois vous avoir entendu dire que l'ARLA génère actuellement 43 millions de dollars par année grâce aux frais. Est-ce plutôt votre budget?

M. Flint : C'est le budget total.

Le sénateur Moore : À combien les recettes annuelles que vous générez actuellement grâce aux frais s'élèvent-elles?

M. Flint : Environ 8,5 millions en moyenne. Bref, nos recettes provenant des frais représentent 8,5 millions de dollars des 43 millions.

Le sénateur Moore : Si l'augmentation proposée est adoptée, cela vous permettra de générer 5 millions de dollars de plus, n'est-ce pas?

M. Flint : Ce sera de 4,5 à 5 millions de dollars de plus.

Le sénateur Moore : Selon ce que j'en comprends, vous voulez deux choses. Vous voulez augmenter les frais liés aux demandes en fonction des grilles tarifaires incluses dans le document, et vous proposez la mise en place d'un ajustement annuel des frais.

M. Flint : Oui.

Le sénateur Moore : Bien. Il y a deux choses. Il y a une chose que je ne comprends pas, et j'aimerais que vous me l'expliquiez. Dans le sommaire que votre bureau a préparé, je présume, vous dites que l'ARLA demandera l'autorisation de réaffecter les recettes et vous dites plus bas que les recettes additionnelles générées grâce à l'augmentation des frais seront réinvesties. Qu'entendez-vous par « réaffecter »? Si vous obtenez des fonds, vous les dépenserez dans les secteurs mentionnés. Que voulez-vous dire par « réaffecter »? C'est la première fois que j'entends ce terme. Vous ne pouvez pas dépenser de l'argent ou les mêmes fonds deux fois. C'est impossible.

M. Aucoin : Vous soulevez un bon point.

Le sénateur Moore : Qu'en est-il? Qu'entendez-vous par « réaffecter »? C'est un frais.

M. Aucoin : Comme vous êtes à même de le savoir, dans le cadre du processus, nous demanderons l'autorisation de réaffecter ces recettes. C'est normalement...

Le sénateur Moore : Vous demandez l'autorisation de les dépenser. Vous recevrez de l'argent des gens qui présentent des demandes et qui paient des frais, et vous investirez ces fonds dans les différentes initiatives dont vous avez parlé.

M. Aucoin : En effet. C'est exact. Comme vous le savez, les recettes sont normalement versées dans le Trésor. Nous devons donc suivre un processus en vue de demander l'autorisation de ne pas verser directement ces fonds dans le Trésor, mais de plutôt les affecter ou de les réaffecter.

Le sénateur Moore : Je tiens à mettre l'accent sur cet aspect pour que les contribuables comprennent l'endroit où l'argent s'en va. « Réaffecter » n'est pas un terme que nous entendons fréquemment.

En ce qui a trait à l'ajustement annuel des frais que vous demandez, c'est fondé sur le calcul moyen des cinq dernières années des rajustements salariaux de la fonction publique. Quelles sont les cinq années dont il est question?

M. Flint : Ce n'est pas l'année dernière; ce sont l'avant-dernière année et les cinq années précédentes. Une part considérable de nos dépenses provient des salaires, et c'était bien entendu passablement comparable à l'augmentation générale du coût de la vie partout au Canada.

Le sénateur Moore : C'est donc la période de cinq ans qui se termine à l'exercice financier 2013-2014.

M. Flint : Oui.

Le sénateur Moore : J'ai peut-être tort, mais il me semble qu'au cours de cette période nous avons connu une année où l'augmentation de l'IPC était tout au plus négligeable. Je ne suis donc pas certain de ce 2 p. 100. Je ne veux pas appuyer quelque chose d'inflationniste. Avez-vous ces chiffres et pourriez-vous les remettre au greffier pour nous permettre d'avoir la base de ces chiffres?

M. Flint : Oui. Nous pouvons vous montrer ces chiffres.

Le sénateur Moore : Vous avez mentionné que le Canada détient 3 p. 100 du marché mondial des pesticides. Qui sont les gros joueurs dans le monde? Quel pourcentage détiennent-ils?

M. Aucoin : Les États-Unis sont probablement le plus gros marché, puis nous avons la Chine, et je crois qu'actuellement le Brésil est probablement l'un des gros joueurs dans l'industrie des pesticides. Les Brésiliens ont connu une énorme croissance de leur production agricole au cours des dernières années. Ce sont vraiment de gros joueurs dans le milieu.

Le sénateur Moore : Si vous n'avez pas ces chiffres, pourriez-vous aussi les remettre au greffier? J'aimerais savoir où nous nous situons et le pourcentage du marché que détiennent les gros joueurs. Avez-vous ces données avec vous aujourd'hui? Pourriez-vous nous les envoyer?

M. Flint : Les États-Unis et l'Union européenne détiennent chacun environ le tiers du marché. Ce sont les deux plus gros joueurs dans le marché des pesticides.

Le sénateur Moore : D'accord. Lorsque vous avez réalisé des consultations pancanadiennes par l'entremise du site web de Santé Canada, avez-vous organisé des audiences publiques?

M. Flint : Nous avions le document qui a été publié. Nous n'avons pas organisé d'audiences publiques au sens large, comme des assemblées publiques. Cependant, nous avons organisé des rencontres avec divers groupes d'intervenants, et des webinaires étaient disponibles. Les choses se sont passées sur Internet pour que les gens puissent y participer, s'ils le souhaitaient.

Le sénateur Moore : Vous avez dit n'avoir reçu des commentaires que de sept intervenants. J'aimerais savoir le nom de ces intervenants et leur nature. Si vous pouviez nous en envoyer la liste, cela nous serait également utile.

Il y a un dernier élément. Comme vous le savez probablement ou peut-être que vous ne le savez pas, mais notre comité a réalisé une étude sur la santé des abeilles, et nous sommes sur le point de mettre la touche finale à notre rapport. Nous avons entendu certains témoins nous parler du délai interminable qu'il faut pour traiter une demande et l'homologuer. Si nous adoptons cette augmentation des frais, cela accélérera-t-il le traitement et l'homologation des demandes? Nous avons entendu dire que cela prend de 10 à 20 ans.

M. Aucoin : Sénateur, à titre de précision, certains ont exprimé des inquiétudes dans le cadre des études sur les abeilles au sujet de certains pesticides qui étaient déjà homologués pour la lutte antiparasitaire. Certains de ces pesticides avaient une homologation conditionnelle. Bref, un petit nombre de ces produits chimiques ont reçu une homologation conditionnelle de 1 an, de 2 ans ou de plus de 10 ans. Des groupes d'intervenants nous ont fait part de leurs préoccupations et de la nécessité de l'expliquer et de le comprendre. Nous sommes en train d'examiner comment et quand approuver des homologations conditionnelles et comment essayer de les éviter.

À l'heure actuelle, nous délivrons très peu de certificats d'homologation conditionnelle. Ces produits chimiques constituent une légère anomalie. Ils découlent d'un ensemble de motifs et d'événements liés à la chimie des néonicotinoïdes et à ses effets sur les abeilles, y compris le fait que la science a considérablement progressé dans le domaine des pollinisateurs et des abeilles. Aucun protocole scientifique n'avait encore été élaboré pour mener certaines des études que nous avons demandées au début du processus.

Le sénateur Moore : Vous attendrez que ces études soient menées. Délivrez-vous un certificat d'homologation conditionnelle une fois par année? Vous ne semblez pas procéder ainsi très souvent.

M. Aucoin : Je crois qu'à l'heure actuelle, seulement 2 p. 100 des décisions réglementaires aboutissent à la délivrance d'un certificat d'homologation conditionnelle. Dans le passé, ce pourcentage était beaucoup plus élevé, mais nous nous sommes soigneusement employés à le réduire. Cela est dû en partie au fait que nous avons besoin de données et de renseignements extrêmement normalisés pour prendre des décisions, par exemple, au moyen de...

Le sénateur Moore : Cette normalisation est-elle de nature internationale?

M. Aucoin : Elle l'est compte tenu des données que nous recevons. Par conséquent, les occasions où nous pensons avoir encore besoin d'un peu plus d'information pour confirmer nos conclusions sont beaucoup moins nombreuses.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Le sénateur Moore avait déjà entamé la question que je voulais poser et qui portait sur une évaluation annuelle ou une prévision sur cinq ans du financement de l'ARLA.

Vous tentez de prévoir les coûts. Le sénateur Maltais mentionnait qu'il n'y avait pas eu d'ajustement depuis 18 ans. Dans le cadre du financement de votre organisme, prévoyez-vous un fonds de réserve, une réserve actuarielle de sorte que, si les coûts excèdent ce que vous aviez prévu, vous aurez un fonds de réserve sur lequel vous ne pourrez pas empiéter?

[Traduction]

M. Aucoin : Je crois comprendre qu'aucune disposition ne nous permet de créer un fonds que nous pourrions reporter. Nous avons de la chance qu'au cours des cinq dernières années, par exemple, les recettes que nous avons touchées en raison des frais d'homologation et des droits réglementaires, c'est-à-dire les quelque 8,5 ou 9 millions de dollars, sont demeurées relativement stables. La charge de travail liée à ces demandes d'homologation est donc restée relativement constante et, en conséquence, nous avons été en mesure de prévoir et de gérer efficacement notre situation financière. Cependant, pour le moment, aucune disposition n'autorise l'établissement d'un fonds de réserve ou le report de fonds.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Vous ne prévoyez pas non plus qu'il puisse y avoir des écarts défavorables qui pourraient empiéter sur vos réserves à un moment donné? Vous dites que la situation est tout de même assez stable chaque année.

[Traduction]

M. Aucoin : C'est exact. Toutefois, nous ne devons pas perdre de vue le fait qu'en proposant ces frais d'utilisation, nous serons soumis à la Loi sur les frais d'utilisation et que cette loi prévoit des dispositions particulières qui décrivent ce qui se passe lorsque l'on cesse de respecter les normes de rendement que l'on a établies et que l'on soutient en recouvrant ces coûts. Par conséquent, nous pourrions nous retrouver dans une situation où, si nous ne sommes pas en mesure de respecter nos normes de rendement, il nous faudra envisager plus tard de réduire les frais perçus pour les demandes dont l'examen n'a pas respecté nos normes.

Donc, nous risquons légèrement de provoquer un genre de cercle vicieux en ce sens que, si nous commençons à être forcés de rembourser des frais, il ne s'agira pas d'un véritable remboursement, mais, s'il est nécessaire de réduire les frais d'examen des demandes parce que nous ne répondons pas à nos propres attentes, alors nous pourrions nous retrouver dans une sorte de maelstrom encore plus problématique. Cependant, nous avons été en mesure de gérer notre situation financière d'une façon très satisfaisante. En général, nous respectons nos normes de rendement. Nos recettes sont relativement stables, et elles augmentent, ce qui, selon moi, rend compte du fait que de nouvelles technologies sont continuellement élaborées dans le secteur agricole et que le Canada participe régulièrement au lancement de ces nouvelles technologies en Amérique du Nord. Donc, nous faisons en quelque sorte partie de la communauté des utilisateurs, si vous voulez, ou des fabricants. Nous constatons maintenant que nous devons actualiser ces frais afin d'établir un équilibre raisonnable entre les coûts publics et privés du travail que nous accomplissons. Comme nous l'avons indiqué, les intervenants reconnaissent la nécessité de réinvestir dans un certain nombre de domaines essentiels, s'ils souhaitent que notre secteur agricole continue d'être concurrentiel et rentable dans les années à venir.

Le sénateur Oh : Nos produits agroalimentaires sont exportés vers le marché international. Il est donc important que nous assurions la qualité de la salubrité alimentaire des produits destinés à ce marché. La qualité de la salubrité et de la surveillance de nos produits agroalimentaires ne doit pas être compromise. C'est très important en raison de l'énormité du marché. Lorsque je voyage à l'étranger, je demande toujours d'où viennent les aliments. Si ce sont des produits du Canada, j'en mange. Je vous remercie donc de votre excellent travail.

Vous dites que vos coûts de fonctionnement s'élèvent à 43 millions de dollars par année. Quels sont vos effectifs?

M. Aucoin : La main-d'œuvre de l'ARLA oscille entre 375 et 380 ETP.

Le sénateur Oh : Travaillez-vous étroitement avec les ministères provinciaux de l'Agriculture?

M. Aucoin : Nous travaillons très étroitement avec nos collègues provinciaux des ministères de l'Agriculture et des ministères de l'Environnement qui, habituellement, jouent un rôle dans la réglementation provinciale des pesticides. Nous avons tendance à collaborer à la fois avec les ministères de l'Agriculture et les ministères de l'Environnement.

Le sénateur Oh : Parfois je visite des agriculteurs, et je leur demande qui inspecte leur exploitation. Ils répondent qu'à l'occasion, un inspecteur vient l'inspecter.

M. Aucoin : C'est exact.

Le sénateur Oh : Cela se produit pendant la saison des récoltes. Qui sont ces inspecteurs? Relèvent-ils du gouvernement fédéral ou des gouvernements provinciaux?

M. Aucoin : Ils peuvent relever de l'un ou des autres, mais l'ARLA met en œuvre un solide programme de conformité et d'application de la réglementation. Avec l'aide de nos collègues régionaux et des programmes qui relèvent d'un bureau de Santé Canada, nous disposons d'un grand nombre d'inspecteurs affectés à l'examen des pratiques agricoles. Ils inspectent en particulier les pesticides utilisés par les producteurs et s'assurent qu'ils sont appliqués correctement. Nous mettons en œuvre un programme annuel d'inspection à l'échelle nationale afin de veiller à ce que tous les produits soient utilisés de la façon dont ils devraient l'être. Le programme reconnaît que leur utilisation incorrecte peut avoir des répercussions sur la santé humaine et sur l'environnement. Le programme est robuste.

En outre, les provinces ont souvent un rôle à jouer dans la certification et la formation des agriculteurs. Par conséquent, certaines provinces peuvent avoir un rôle à jouer dans la façon dont les agriculteurs utilisent les produits chimiques.

Le sénateur Oh : Avez-vous une idée du volume total de pesticides utilisé dans le secteur agricole canadien?

M. Aucoin : Je crois que les ventes de pesticides sont de l'ordre de 2 à 2,2 milliards de dollars au Canada.

Le sénateur Oh : De combien vos frais augmenteront-ils par rapport à ce volume?

M. Aucoin : De 30 p. 100. Je pense que vous m'interrogez sur l'augmentation que connaîtront les frais?

Le sénateur Oh : Oui, j'aimerais que vous me citiez un chiffre approximatif. Vous imposerez de nouveaux frais. Quel sera le pourcentage d'augmentation des frais?

M. Flint : Nos frais actuels génèrent des recettes de 8,5 millions de dollars, et nous imposerons 4,5 millions de dollars de frais supplémentaires.

Le sénateur Oh : Cela n'aura pas une incidence considérable sur le total.

M. Flint : Non.

M. Aucoin : Il s'agit de 4,5 millions de dollars, soit une hausse des frais de 50 p. 100. Pour les payeurs de frais, cette somme pourrait sembler substantielle. Jason a mentionné plus tôt que nous avons effectué une analyse afin de nous assurer que les frais refilés aux agriculteurs seront extrêmement faibles.

Le sénateur Oh : La salubrité alimentaire ne peut pas être compromise.

M. Aucoin : Non.

[Français]

La sénatrice Fortin-Duplessis : Soyez les bienvenus. C'est vraiment un sujet qui est intéressant. Je voudrais en savoir un peu plus sur le sondage.

Dans votre présentation, vous parlez d'analyses coûts-avantages. En août 2014, vous avez demandé une analyse des coûts-avantages pour estimer les frais et les droits proposés dans le présent APP pour les titulaires d'homologation, les fabricants, les distributeurs, et les utilisateurs de pesticides. Cet exercice comprenait un sondage visant à évaluer l'incidence des changements proposés. J'ai vu plus tard que sur 45 titulaires, qui provenaient d'entreprises très variées, seulement 24 ont répondu.

Ma question est simple : prévoyez-vous dans le futur de demander encore d'autres sondages? Si oui, à quel rythme, au bout d'un, de deux ou de trois ans?

[Traduction]

M. Flint : Je crois que le sondage auquel vous faites allusion correspond au test de l'impact sur les entreprises qui a été effectué à l'avance afin de mesurer les répercussions que la hausse des frais aura sur chaque entreprise qui devra les assumer. Nous prévoyons réexaminer les frais après trois ans afin de constater l'incidence que leur hausse aura eue et de tenter de déterminer si les frais doivent être rajustés ou modifiés d'une manière ou d'une autre.

[Français]

La sénatrice Fortin-Duplessis : Il y aurait un autre sondage au bout de trois ans, c'est bien cela?

[Traduction]

M. Flint : Oui.

La sénatrice Unger : Monsieur Flint, vous avez parlé de l'examen effectué par les intervenants, et vous avez déjà répondu à des questions. Lorsque vous avez procédé à cet examen, les réponses à vos questions étaient-elles uniformes, ou certains intervenants avaient-ils des points de vue complètement différents des autres? Quel était le degré d'uniformité de leurs réponses?

M. Flint : Je vous signale de nouveau qu'une série de consultations se sont déroulées au cours d'un certain nombre d'années. Au début, les questions étaient plus divergentes et nombreuses. Toutefois, comme le sénateur Moore l'a indiqué, vers la fin, nous n'avons reçu que sept commentaires écrits au sujet de notre proposition, parce que nous avions déjà consulté l'industrie à plusieurs reprises et clarifié notre approche. En fin de compte, seulement quelques frais ont soulevé des questions.

Dans la plupart des cas, les intervenants soutiennent notre approche concernant la hausse des frais et souhaitent aussi que l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire en fasse davantage pour que les investissements augmentent dans certains domaines.

La sénatrice Unger : Plus vous avez mené de consultations, moins les questions étaient nombreuses et divergentes.

M. Flint : Quelques frais en particulier ont fait l'objet de commentaires.

La sénatrice Unger : Vous étiez en train d'établir des frais d'utilisation pour les agents microbiens et les substances sémiochimiques de lutte antiparasitaire. En raison d'un manque d'expérience dans le domaine, vous avez décidé que l'imposition de frais d'utilisation était prématurée. Pourriez-vous expliquer la différence entre ces deux produits?

M. Flint : Les substances sémiochimiques de lutte antiparasitaire sont utilisées pour communiquer et modifier des comportements. Les phéromones, par exemple, sont l'une des substances employées communément. Elles sont un attractif sexuel pour les insectes, et elles peuvent être utilisées pour attirer et attraper tous les insectes mâles d'une espèce particulière, au lieu d'avoir recours à un pesticide traditionnel, qui serait conçu pour être toxique et qui pourrait nuire davantage à d'autres insectes.

Les agents microbiens sont des micro-organismes qui, dans certains cas, sont transmis par le sol. Ils peuvent être utilisés pour rivaliser avec d'autres parasites, ou ils peuvent avoir certains effets insecticides. Le Bacillus thuringiensis, ou BT, par exemple, est fréquemment utilisé par les producteurs biologiques et a un effet pesticide sur certains types d'insectes. Voilà la différence fondamentale entre les deux. En général, il s'agit d'un secteur que nous avons tenté d'appuyer dans le passé parce que les substances sémiochimiques offrent un moyen non toxique de lutter contre les parasites, et que les agents microbiens sont, en règle générale, une catégorie de produits moins dangereux.

La sénatrice Unger : J'espère que les substances sémiochimiques ne s'appliquent pas aux humains, car certains parfums renferment ces phéromones.

Vous avez essentiellement expliqué leur importance. Appliqueriez-vous cela aux abeilles domestiques? Évidemment, les agents microbiens seraient plus toxiques, à mon avis. Pourriez-vous nous donner des exemples, ou un exemple?

M. Flint : Par exemple, bon nombre des substances sémiochimiques, notamment les phéromones, visent les phalènes et les ravageurs de ce genre. Étant donné qu'il s'agit d'un attractif, nous n'appliquons pas un pesticide susceptible de nuire aux abeilles domestiques. Les abeilles sont des organismes non ciblés. En règle générale, nous ne tentons pas de les tuer. Par conséquent, les substances sémiochimiques et les agents microbiens s'attaquent habituellement à un certain type d'insectes, auquel cas leur application à proximité des abeilles serait plus bénéfique.

Le nombre de ces produits est limité, et ces produits ne sont pas nécessairement efficaces dans toutes les situations. Nous devons donc concilier cela avec le fait qu'ils font partie des nombreux outils que les agriculteurs doivent utiliser pour contrôler parfois un problème de parasites.

La sénatrice Unger : Vous ciblez donc les parasites et non les abeilles, mais cela a un effet sur les abeilles. Je présume que les substances sémiochimiques n'auraient pas vraiment de répercussions sur les abeilles, mais que les autres produits en auraient.

M. Aucoin : Sénateur, je pourrais peut-être ajouter qu'un grand nombre de pesticides microbiens ciblent un type d'insectes très précis. Par exemple, certains pesticides microbiens touchent seulement les chenilles qui se nourrissent de feuilles. Par conséquent, ces pesticides n'ont absolument aucun effet sur les abeilles, car leur biologie est très différente de celle des chenilles. Bon nombre de ces pesticides agissent sur les parasites d'une façon très ciblée, et c'est l'une de leurs merveilleuses caractéristiques bénéfiques. Les effets des autres pesticides sont beaucoup plus vastes, et ils peuvent éventuellement nuire à tous les insectes. C'est donc la raison pour laquelle il faut vraiment faire attention à la façon dont nous les utilisons.

La sénatrice Unger : Pour en revenir aux frais, prévoirez-vous pour ces pesticides un ensemble d'annexes sur la tarification différentes, maintenant que vous avez eu la chance de les étudier plus longtemps?

M. Flint : Oui, nous proposons en fait de mettre en œuvre un ensemble de frais pour ces pesticides microbiens et ces substances sémiochimiques. Il s'agit d'un tarif beaucoup moins élevé que celui que nous prévoyons pour les autres produits chimiques. Nous espérons favoriser l'utilisation et l'homologation de ces produits, en particulier parce que, la plupart du temps, ils sont créés par des entreprises plus petites pour des marchés plus spécialisés. Nous avons donc élaboré un ensemble distinct de frais que, bien entendu, nous avons aussi comparé au système américain. Nous avons utilisé les frais les plus faibles que le système américain peut imposer comme base pour établir les frais canadiens.

La sénatrice Unger : Certains pesticides sont problématiques lorsqu'il s'agit de commercer avec l'UE. Toutes les normes devraient être fondées sur des données scientifiques. Par conséquent, je me demande si, lorsque vous menez vos consultations — et vous avez mentionné que votre travail était plus axé sur la collaboration que jamais — vous êtes en mesure de faire quelque chose si vous soupçonnez qu'un pays ne négocie pas de bonne foi pour une raison ou une autre, une raison qui est habituellement liée à une barrière commerciale ou qui pourrait l'être.

M. Aucoin : Notre rôle consiste vraiment à fournir les données et les connaissances scientifiques requises pour expliquer les fondements des normes canadiennes de salubrité alimentaire. En examinant les fondements des normes de salubrité alimentaire d'un pays étranger, nous pouvons aussi, avec un peu de chance, découvrir les données et les renseignements dont il s'est servi et comprendre comment il est arrivé à la décision d'adopter une norme différente. Il s'agit là de notre rôle principal. D'autres ministères, comme Agriculture Canada, jouent un rôle central dans la négociation d'accords commerciaux. Nous aidons ces ministères à mener des négociations de ce genre lorsqu'ils ont découvert ce qu'ils croient être une barrière commerciale non fondée sur des données scientifiques. Nous pouvons leur fournir un plus grand nombre de spécialistes pour contribuer à faciliter cette discussion.

La sénatrice Unger : Arrive-t-on habituellement à régler ces différends?

M. Aucoin : À mon avis, nous travaillons maintenant à l'établissement de nouvelles normes en collaboration avec un si grand nombre de pays que nous harmonisons également avec eux la façon dont nous choisissons ces normes. Par conséquent, il est de plus en plus difficile de justifier les raisons pour lesquelles certaines de ces normes diffèrent. Ces pays sont mis au défi de nous montrer les données scientifiques qu'ils ont utilisées pour établir ces normes. Il y a également un organisme international de normalisation appelé Codex qui offre une autre tribune pour ces mises au défi. Je pense que nous sommes utiles à cet égard, et nous avons proposé ce recouvrement des coûts en partie pour pouvoir aider davantage les autres ministères, en tant que meneurs dans certaines de ces discussions.

La sénatrice Unger : À mon avis, cela devrait être votre premier objectif. Merci beaucoup.

Le sénateur Moore : Messieurs, dans le mémoire rédigé par notre adjointe de la Bibliothèque du Parlement, nous voyons trois tableaux qui présentent les frais proposés, les frais actuels et le coût moyen. L'un des tableaux porte sur les demandes de certificat d'homologation ou de modification du certificat d'homologation d'un produit antiparasitaire. Le deuxième tableau porte sur les autres demandes en lien avec un produit antiparasitaire, et le troisième, sur les demandes que la sénatrice Unger a mentionnées à propos des produits antiparasitaires microbiens et des substances sémiochimiques. Quelle est la ventilation par type de demandes en pourcentage? Quelles sont les demandes présentées le plus fréquemment? Avez-vous ces renseignements en main?

M. Flint : Tableau 1.

Le sénateur Moore : Il s'agit de la demande de certificat d'homologation ou de modification du certificat d'homologation d'un produit antiparasitaire. Est-ce celui que l'on demande le plus fréquemment?

M. Flint : Oui.

Le sénateur Moore : Quel pourcentage des demandes totales cela représenterait-il?

M. Aucoin : Il est probable que 90 p. 100 d'entre elles concernent ces types de demandes. Vous remarquerez que le tableau 2 porte surtout sur les autorisations de recherche.

Le sénateur Moore : Je vois cela. De quoi cela s'agit-il? En quoi consiste le dernier? Comment les 10 p. 100 qui restent sont-ils répartis entre les types de demandes aux tableaux 2 et 3?

M. Aucoin : Les tableaux 2 et 3 ont des objectifs très différents. Je n'ai pas les chiffres pour vous dire comment ces demandes sont réparties. Nous ne délivrons qu'environ 150 permis de recherche par année. Nous recevons des milliers de demandes chaque année, mais ne délivrons qu'une centaine de permis de recherche.

Le sénateur Moore : Je ne connais rien à tout cela, alors je trouve cela intéressant. Au tableau 1, à l'élément 5b), les frais actuels se chiffrent à 24 000 $ et descendent jusqu'à un peu moins de 6 000 $ pour les données sur l'exposition qui accompagnent une demande relative à de nouvelles utilisations importantes. Alors qu'est-ce que c'est et comment expliquez-vous cette baisse marquée?

M. Flint : Tous les frais qui figurent dans le tableau 1 se rapportent à différents éléments. Alors si quelqu'un homologuait un produit antiparasitaire, nous aurions différentes exigences en matière de données en fonction de la demande et nous leur imposerions des frais en conséquence pour examiner les données présentées. Vous remarquerez qu'aux éléments 5a), b) et c), tous les frais se rapportent à l'examen de données sur l'exposition. Ces types de données nous permettraient de mieux comprendre comment, par exemple, un utilisateur serait exposé à un pesticide. Il pourrait notamment s'agir d'absorption par voie cutanée, de la quantité de pesticide absorbée par la peau et différents renseignements à ce sujet.

Le sénateur Moore : Comme les conséquences potentiellement négatives de ce pesticide pour la personne qui l'utilise?

M. Flint : C'est exact. Vous constaterez que lorsque nous sommes retournés en arrière pour refaire les évaluations étant donné que nous avons normalisé les données au fil des ans, l'élément 5a), les données d'exposition initiales, est devenu plus robuste au fur et à mesure que nous avons acquis des connaissances à ce sujet. Nous n'avons pas à utiliser l'élément 5b). Il ne sert pas beaucoup, car il nous faut moins de données qu'auparavant puisque nous comprenons mieux comment fonctionnent les normes d'exposition. Il faut moins de données au départ, si bien que l'examen nous coûte moins cher.

Le sénateur Moore : Ces normes ont-elles été rehaussées par les normes internationales que l'on utilise davantage dans votre travail?

M. Flint : En partie, oui.

Le sénateur Moore : Il n'y a pas de frais actuels au no 11. Protégeons les données. Aucuns frais actuels ne se chiffrent maintenant à 2 000 $, alors qu'est-ce que cela signifie?

M. Flint : C'est pour l'homologation de produits antiparasitaires génériques. Nous avons donc instauré un système, nous l'avons récemment modifié et nous avons adopté un règlement en 2010, je crois, ou en 2012 qui crée un système distinct pour l'homologation des produits génériques. Les pesticides génériques sont ceux pour lesquels, après un certain nombre d'années, les entreprises peuvent présenter une demande et dire qu'elles souhaitent s'en remettre à toutes les données fournies par un détenteur d'homologation précédent.

Le sénateur Moore : Il n'y a plus d'actif de propriété intellectuelle?

M. Flint : C'est exact. Il y a le concept du brevet qui protège l'innovation même. Nous offrons aussi une protection en raison du fait qu'il arrive souvent que des millions de dollars servent à générer les études qu'ils présentent à l'organisme de réglementation, alors nous assurons la protection de leurs données.

Pendant un certain nombre d'années, il est impossible de se fier à ces données. Elles ne servent qu'à la personne qui les a générées. Après un certain temps, nous permettons à d'autres entreprises d'homologuer un produit générique. Si on a fourni des données supplémentaires pour améliorer ou...

Le sénateur Moore : L'original?

M. Flint : Après qu'il a été homologué à l'origine. Si le titulaire de l'homologation initiale fournit de nouvelles données et qu'une entreprise générique souhaite homologuer un produit, nous sommes d'avis que celle-ci devrait être tenue de verser des droits à la première. Nous évaluerions les demandes que nous avons reçues au cours des 12 dernières années et nous leur demanderions s'il y a des données nous ayant été présentées qui militent en faveur de la demande d'homologation dont vous avez besoin pour obtenir l'accès à titre de demandeur d'homologation générique. Nous fournissons ces données à ce type de demandeur. Il serait alors tenu de négocier l'accès en se servant des données qu'il a reçues.

Le sénateur Moore : Sur quelle période le brevet est-il protégé avant qu'il devienne générique et que les gens puissent demander de l'utiliser?

M. Flint : Lorsqu'une personne demande à homologuer un nouvel ingrédient actif, un nouveau pesticide, elle jouit d'une protection exclusive de 10 ans. C'est donc dire que l'on ne peut pas exiger d'elle qu'elle autorise une autre personne à utiliser ses données. Elle a l'exclusivité du marché.

Le sénateur Moore : Personne d'autre ne peut les consulter?

M. Flint : C'est exact.

Le sénateur Moore : Disons qu'après 10 ans, j'ai une idée pour rehausser ce produit. Que dois-je faire?

M. Flint : Si vous avez exactement le même produit et aimeriez en offrir une version meilleur marché aux agriculteurs et produire quelque chose qui soit équivalent au plan chimique au produit original — une version générique —, alors vous pouvez vous en remettre aux données originales 10 ans après l'homologation sans devoir payer les moindres droits.

Tout ce que vous avez à faire c'est de montrer que votre produit est l'équivalent chimique du produit précédent sur lequel vous voulez vous appuyer pour demander l'homologation de votre produit. Si le détenteur des droits du produit précédent a fourni des renseignements supplémentaires, élargi la méthode d'utilisation et ajouté des usages limités pour appuyer l'agriculture, et si vous souhaitez que ces usages limités figurent sur votre étiquette, vous devez alors payer des droits si ces ajouts sont survenus au cours des 12 dernières années.

Le sénateur Moore : Verser des droits au propriétaire original des données?

M. Flint : Le propriétaire des données, c'est-à-dire celui qui les a générées. Ou si nous demandons, dans le cadre d'un nouvel examen, qu'il présente une nouvelle étude scientifique pour montrer que son produit reste sécuritaire et qu'on peut continuer à en autoriser la vente, alors le détenteur d'un produit générique serait aussi tenu de lui verser des droits pour les nouvelles données qu'il a dû présenter.

Le sénateur Moore : En ce qui concerne l'élément 11, les données protégées : est-ce que les droits s'appliquent aux éléments supplémentaires que je présente? Ils ne s'appliquent pas aux données dont l'on dispose déjà?

M. Flint : Ils s'appliquent au produit générique. Si le détenteur du produit générique dit vouloir l'homologuer, il devrait normalement présenter une demande qui comprendrait les droits prévus à l'élément 1, à savoir les frais de demande de base. Cette demande comprendrait un examen des données sur les propriétés chimiques pour montrer qu'elles sont équivalentes. Il paierait ces frais pour que l'ARLA épluche tous ses dossiers et veille à ce qu'il me fournisse une liste de toutes les données que vous avez utilisées pour appuyer les décisions réglementaires pendant la période dont je dispose pour demander qu'on me paie des droits.

Le sénateur Moore : Il s'agit de frais uniques, n'est-ce pas?

M. Flint : Oui, lorsque le détenteur d'un produit générique présente sa demande, il doit payer ces frais.

Le sénateur Moore : D'accord. Il y en a deux autres au tableau 2. Il s'agit de petits éléments — l'avis de recherche et l'avis en tant que tel —, mais aucuns frais actuels n'y sont associés. Alors j'en déduis que, jusqu'à présent, vous n'avez pas imposé le moindre...

M. Flint : C'est exact.

Le sénateur Moore : ...frais pour traiter deux éléments?

M. Flint : Tout à fait.

Le sénateur Moore : Mais ils font partie intégrante de cette demande de recherche?

M. Flint : Oui. En fait, c'est la différence entre un avis et une autorisation, n'est-ce pas? Alors pour un avis de recherche, si vous respectez certains critères, vous n'avez qu'à nous informer que vous le ferez. C'est habituellement un processus moins exigeant qu'une autorisation qui nécessiterait la présentation d'un surcroît de renseignements. C'est un processus beaucoup plus important.

Par le passé, nous avons permis la présentation d'avis sans frais et, maintenant, nous allons recouvrer une partie des coûts y étant associés.

[Français]

La sénatrice Fortin-Duplessis : Dans votre mémoire, à la page 26, à l'article 6.7, vous parlez de structures de pénalités proposées; comme c'est une chose compliquée, pour moi en tout cas, j'aimerais avoir plus d'explications.

J'aimerais savoir s'il arrive souvent que vous deviez appliquer une pénalité relativement à l'écart par rapport à la cible. La pénalité peut être pécuniaire ou autre, mais est-ce qu'il arrive que certains ne tiennent pas compte de la pénalité?

[Traduction]

M. Flint : Dans le cas de la structure de pénalité proposée, il s'agit plutôt d'une pénalité imposée à l'ARLA au titre de la Loi sur les frais d'utilisation. Lorsque cette loi a été rédigée et adoptée par le Parlement, elle contenait l'exigence voulant que les frais d'utilisation soient assortis d'une norme de rendement publique et que si cette norme n'était pas respectée, les frais seraient réduits l'année suivante.

À titre d'exemple, si nous traitons un certain type de demande et que nous respectons nos normes de rendement pour ce qui est du temps qu'il faut pour procéder à ces évaluations, 90 p. 100 du temps, alors nous continuons à imposer les frais totaux pour évaluer cette demande.

Cependant, si notre rendement n'atteint pas le seuil des 90 p. 100, nous aurons une pénalité : il nous faudra réduire nos frais au cours de l'année suivante pour ne pas avoir respecté les normes de rendement publiées.

En conséquence, toute personne qui présenterait un type de demande semblable l'année suivante paierait des frais réduits. Si nous n'avions eu une norme de rendement que de 80 p. 100 l'an dernier, nous ne pourrions imposer que 80 p. 100 des frais pour cette catégorie de demandes l'année suivante. Ensuite, à la fin de cette année, on réévaluerait notre rendement et, s'il était à nouveau supérieur à 90 p. 100, nous pourrions imposer les frais complets. En cas de baisse de rendement, nous aurions peut-être à réduire nos frais, jusqu'à 50 p. 100 des frais complets dans certains cas.

Ce n'est pas vraiment quelque chose qui soit dépendant de notre volonté. En modifiant cette réglementation, nous sommes assujettis à la Loi sur les frais d'utilisation; il s'agit de l'une des dispositions de cette loi pour laquelle nous devrons maintenant rendre des comptes.

[Français]

La sénatrice Fortin-Duplessis : À l'heure actuelle, y en a-t-il beaucoup qui font fi de cette pénalité? Est-ce que vous en donnez souvent, des pénalités?

[Traduction]

M. Aucoin : Comme nous ne sommes pas actuellement assujettis à la Loi sur les frais d'utilisation, nous ne sommes pas non plus sujets à ces pénalités. Nous jouissons maintenant, en quelque sorte, de droits acquis, je crois que c'est le mot juste. Une fois que la réglementation aura été révisée, nous serons visés par la Loi sur les frais d'utilisation; nous aurons donc à nous inquiéter de cette disposition à l'avenir.

[Français]

La sénatrice Fortin-Duplessis : Actuellement, ce n'est pas en vigueur.

M. Aucoin : Non, pas présentement.

[Traduction]

Le sénateur Enverga : Ma question porte sur le tableau 2, qui s'intéresse davantage à l'élément recherche. Lorsqu'on prend les frais actuels, on constate qu'ils sont vraiment modiques. Où nous situons-nous par rapport à d'autres pays? Pensez-vous que le fait d'augmenter les frais réduira notre investissement dans la recherche et le développement au Canada?

M. Flint : En fait, certaines personnes ont exprimé des préoccupations, alors nous n'avons pas augmenté le nombre de catégories d'autorisations de recherche. À l'origine, nous n'en avions que deux — autorisation ou avis. Nous en avons maintenant d'autres, des autorisations de recherche complètes et des frais moins élevés pour d'autres catégories. Nous l'avons fait pour essayer de reconnaître que dans certaines situations, nous pouvons peut-être encourager des frais plus bas pour certains types d'autorisations de recherche afin d'éviter de faire obstacle à l'innovation.

Les frais les plus élevés servent généralement à financer les essais à grande échelle qui profitent davantage à l'industrie, pour montrer l'efficacité du produit aux clients potentiels, par exemple. On mène généralement les recherches novatrices en tant que telles sur des petites superficies. Un certain nombre d'entre elles pourraient être présentées sous forme d'avis, en fonction des produits. Nous ne croyons pas que l'augmentation que nous proposons aura une incidence considérable sur l'innovation.

Le sénateur Enverga : Arrive-t-il que des étrangers viennent au Canada simplement en raison de nos frais moins élevés pour investir davantage dans la recherche et le développement? Pouvez-vous envisager une baisse ou une augmentation du financement de la recherche provenant de l'extérieur du Canada en ce qui touche ce type de travail?

M. Aucoin : La quantité de recherche sur les pesticides au Canada est considérable. Je pense que nous avons accompli beaucoup de travail pour que l'on comprenne que ces augmentations de frais ne nuiront pas à ce type de recherche. Comme Jason l'a mentionné, beaucoup de recherches sont menées dans des petites installations, des laboratoires fédéraux ou provinciaux, ou même dans certains petits laboratoires et installations des fabricants.

Une bonne partie de la recherche qui est menée est faite sur avis ou est exempte des frais plus élevés. Nous avons accompli pas mal de travail pour veiller à ce que l'augmentation des frais ne dissuade pas la recherche et que, lorsqu'ils sont appliqués, ces frais — comme les 5 000 $ — visent un nombre relativement peu élevé de permis de recherche.

Le sénateur Enverga : Où vous situez-vous par rapport à d'autres pays? Êtes-vous sur un pied d'égalité?

M. Aucoin : Je crois que tous nos frais sont semblables aux frais pratiqués dans d'autres pays. Nous avons veillé à ce qu'ils équivalent à ceux de nos principaux pays de référence, comme les États-Unis, ou qu'ils y soient inférieurs, de façon à ne pas décourager l'homologation ou la recherche.

Il arrive que des entreprises procèdent à certaines études dans le cadre de leur recherche, en fonction de la nature de celle-ci. Elles les joignent ensuite aux demandes d'approbation qu'elles présentent au pays en question. Selon la structure, vous accomplissez ce travail dans le cadre de votre recherche, alors il est avantageux de le faire et de payer dès le départ. Nous ne croyons pas qu'il s'agisse là d'éléments dissuasifs.

La vice-présidente : Je voudrais en revenir à votre commentaire, monsieur Aucoin, concernant une question que le sénateur Moore vous a posée au sujet de l'homologation conditionnelle. Lorsque la Commissaire à l'environnement et au développement durable est venue témoigner devant le comité pendant son étude sur les abeilles, elle a mentionné que, selon son étude de 2008, sept ou huit produits figuraient sur la liste d'homologation conditionnelle. Depuis, je crois que l'un de ces produits a fini par être homologué. Il resterait donc environ sept produits sur cette liste conditionnelle.

Vous avez mentionné que le nombre d'homologations conditionnelles avait baissé. À l'époque — on remonte parfois de 10 à 20 ans en arrière parce que certains de ces produits se trouvent toujours sur cette liste —, on accordait des homologations conditionnelles, car aucune étude scientifique n'avait été présentée dans le cadre de la demande. C'est une déclaration assez surprenante. Pourquoi ces homologations conditionnelles ont-elles été accordées sans études scientifiques à l'appui?

M. Aucoin : À titre de précision, madame la présidente, un nombre relativement peu élevé d'ingrédients actifs sont associés à des produits qui sont homologués conditionnellement. Le nombre de produits homologués conditionnellement au cours de cette décennie est très peu élevé.

J'ai besoin de préciser que dans le cas des pesticides de la catégorie des néonicotinoïdes, par exemple, qui suscitent maintenant beaucoup d'intérêt, nous avions des études scientifiques sur lesquelles fonder notre décision à l'époque. Nous avons décidé que les risques étaient acceptables en fonction de ces études, mais nous avons fait en sorte que ces homologations soient conditionnelles, car nous savions qu'il nous fallait un complément d'informations. Nous voulions des confirmations. Nous étions toujours incertains dans une certaine mesure au plan scientifique, mais pas suffisamment pour que nous nous inquiétions outre-mesure d'homologuer les pesticides de la catégorie des néonicotinoïdes, qui remplaçaient des pesticides beaucoup plus dangereux à l'époque. Nous estimions avoir suffisamment de renseignements pour prendre une décision réglementaire selon laquelle les risques n'étaient pas inadmissibles, pour autant que les fabricants nous fournissent des études supplémentaires, notamment concernant la santé des abeilles et les répercussions à long terme sur celles-ci, qui ont évolué de façon assez considérable au cours des 10 dernières années.

En ce qui concerne une partie de l'information, nous savions que nous voulions suivre des protocoles scientifiques précis qui n'avaient pas encore été élaborés. La grande majorité des protocoles, par exemple ceux qui supposent la génération de données sur les pesticides pour les organismes de réglementation du monde entier, sont normalisés par le truchement d'un mécanisme de l'OCDE. C'est un domaine pour lequel on ne disposait pas déjà de bons protocoles. Au fur et à mesure que les études étaient élaborées, nous devions nous entendre avec les entreprises sur les protocoles pour aborder certaines des questions relatives aux répercussions à long terme. Nous avons donc travaillé en étroite collaboration avec elles. Certaines de ces études ont été présentées rapidement, tandis que d'autres ont pris plus de temps.

Une partie des études dans lesquelles nous devons comprendre les répercussions à long terme peuvent prendre plus de deux ou trois ans à produire, c'est clair. Nous étions conscients des incertitudes, mais nous estimions à l'époque que les risques n'étaient pas inadmissibles.

La vice-présidente : A-t-on reçu les résultats d'autres études pour que ces produits puissent maintenant être homologués définitivement?

M. Aucoin : Nous avons reçu un certain nombre d'études à différents stades pendant cette période. Il est arrivé qu'elles aient besoin d'être refaites, par exemple, parce qu'elles n'avaient pas donné les résultats escomptés. Nous avons donc demandé que certaines d'entre elles soient à nouveau menées.

Nous attendons toujours plus de données et de renseignements sur certains des produits chimiques homologués conditionnellement. Et nous travaillons étroitement avec l'agence de protection environnementale des États-Unis, dans le cadre d'une réévaluation très harmonisée, pour réexaminer les données scientifiques, y compris les nouvelles données que nous recevons de façon à ce que, au cours de l'année qui vient ou des deux prochaines années, nous puissions vraiment comprendre s'il existe des risques que nous n'avons pas pris en compte.

La vice-présidente : Merci de cette précision.

Le sénateur Moore : Pour enchaîner sur la question de la vice-présidente, en ce qui touche le processus, revient-il au demandeur de respecter certaines dates limites que vous avez fixées ou faites-vous avancer le dossier de temps à autres?

M. Aucoin : Nous fixons les attentes. Une condition s'accompagne d'un délai précis.

Le sénateur Moore : S'ils ne les lisent pas, le produit n'est pas homologué, mais est-ce que cela leur cause du tort au plan commercial?

M. Aucoin : Au plan commercial, le produit reste sur le marché à moins que nous prenions des mesures réglementaires pour l'en retirer. Comme je l'ai mentionné, dans ces cas, ce n'était pas que les risques étaient inadmissibles, mais plutôt que nous voulions des renseignements supplémentaires pour confirmer notre décision originale.

La sénatrice Unger : Pour en revenir à ce dont vous parliez, monsieur Aucoin, vous arrive-t-il d'avoir des divergences d'opinion lorsque vous discutez d'un produit qui a mis beaucoup de temps à traverser le processus d'homologation? Au sein de votre organisme, y a-t-il des désaccords quant à la sûreté d'un produit?

M. Aucoin : Il y a certainement des divergences d'opinion au sein du personnel scientifique. Nous avons une vaste communauté scientifique et, oui, il peut y avoir des divergences d'opinion. Cependant, notre but est de gérer le processus, et nous disposons d'un comité de gestion scientifique. Nous avons des comités de haut niveau. Nous avons des processus d'examen par les pairs dans les différentes disciplines scientifiques pour faire en sorte que, lorsque nous arrêtons une décision, elle découle d'un consensus entre les différentes disciplines scientifiques.

Ces démarches sont intégrées à notre processus d'homologation de façon à ce que nos décisions fassent l'objet d'un consensus au sein de l'agence.

La sénatrice Unger : Cela se produit-il souvent ou seulement de temps à autres quand il est question d'un produit comme les néonicotinoïdes?

M. Aucoin : Je pense que le cas des néonicotinoïdes est unique pour ce qui est de la durée de l'homologation conditionnelle et de la nature des études. La question de la santé des abeilles et des pollinisateurs gagne en importance depuis un certain nombre d'années. Cependant, même il y a 10 ans, elle n'était pas dans notre champ de mire. C'est un nouveau domaine scientifique que nous — et d'autres organismes de réglementation dans le monde — examinons de plus près.

La sénatrice Unger : Merci.

La vice-présidente : Étant donné qu'il n'y a pas d'autres questions, au nom du comité, je suis heureuse de remercier les personnes qui ont témoigné devant nous aujourd'hui.

Merci, monsieur Aucoin et monsieur Flint, pour votre exposé très intéressant et instructif.

Honorables sénateurs, nous poursuivrons la séance à huis clos.

(La séance se poursuit à huis clos.)


Haut de page