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ENEV - Comité permanent

Énergie, environnement et ressources naturelles

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles

Fascicule 6 - Témoignages du 11 février 2014


OTTAWA, le mardi 11 février 2014

Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd'hui, à 17 heures, pour étudier la teneur du projet de loi C-15, Loi remplaçant la Loi sur les Territoires du Nord-Ouest afin de mettre en œuvre certaines dispositions de l'Entente sur le transfert des responsabilités liées aux terres et aux ressources des Territoires du Nord-Ouest et modifiant ou abrogeant la Loi sur les terres territoriales, la Loi sur les eaux des Territoires du Nord-Ouest, la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie, d'autres lois et certains décrets et règlements.

Le sénateur Richard Neufeld (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Je m'appelle Richard Neufeld. Je représente la province de la Colombie-Britannique au Sénat et je suis le président du comité.

J'aimerais souhaiter la bienvenue aux honorables sénateurs et aux membres du public présents dans la salle ou à ceux qui nous écoutent par l'entremise de la diffusion Web.

Je demanderais maintenant aux sénateurs de se présenter, et je vais commencer par le vice-président, le sénateur Grant Mitchell, de l'Alberta.

Le sénateur Wallace : Sénateur John Wallace, du Nouveau-Brunswick.

Le sénateur Black : Doug Black, de l'Alberta.

Le sénateur Sibbeston : Sénateur Nick Sibbeston, des Territoires du Nord-Ouest.

Le sénateur Ringuette : Pierrette Ringuette, du Nouveau-Brunswick.

Le président : J'aimerais présenter le personnel de soutien de la Bibliothèque du Parlement, Marc LeBlanc et Sam Banks, ainsi que notre greffière, Lynn Gordon.

C'est notre septième séance d'étude préliminaire du projet de loi C-15, dont le titre abrégé est Loi sur le transfert de responsabilités aux Territoires du Nord-Ouest. Il a été déposé à la Chambre des communes le 3 décembre 2013.

Pour la première partie de la séance d'aujourd'hui, je suis très heureux de souhaiter la bienvenue à nos témoins de l'Association canadienne des producteurs pétroliers, qui se joignent à nous de Calgary par vidéoconférence : M. Alex Ferguson, vice-président, Politique et Environnement, et M. Aaron Miller, gestionnaire, Nord du Canada. Cette partie de la séance durera 45 minutes, et la dernière heure sera consacrée à une vidéoconférence.

Monsieur Ferguson, nous avons reçu et fait circuler une copie de vos notes d'allocution. Veuillez commencer votre déclaration, et nous vous poserons ensuite des questions. Nous sommes heureux de vous revoir parmi nous. Vous avez la parole.

Alex Ferguson, vice-président, Politique et Environnement, Association canadienne des producteurs pétroliers : Je vous remercie beaucoup, monsieur le président, de même que les membres du comité. Nous sommes très heureux de pouvoir vous faire part de notre point de vue et de nos idées concernant le projet de loi C-15. Comme on l'a dit, je suis le vice- président, Politique et Environnement, de l'Association canadienne des producteurs pétroliers. Pour ceux qui ne le savent peut-être pas, nous représentons le secteur pétrolier et gazier en amont du Canada. Nos membres découvrent et exploitent environ 90 p. 100 des ressources en pétrole et en gaz naturel du pays. Ensemble, ils investissent plus de 60 millions de dollars chaque année et emploient plus d'un demi-million de personnes aux quatre coins du pays.

Nous sommes ravis de pouvoir exprimer notre point de vue au sujet du projet de loi C-15, la Loi sur le transfert de responsabilités aux Territoires du Nord-Ouest.

C'est sans aucun doute un projet de loi historique, puisqu'il permettra à la population des Territoires du Nord- Ouest de décider de l'orientation future de l'exploitation de leurs abondantes ressources naturelles.

Je vais donner la parole à M. Miller, qui abordera le sujet un peu plus en détail. Vos questions et vos commentaires seront les bienvenus.

Aaron Miller, gestionnaire, Nord du Canada, Association canadienne des producteurs pétroliers : Je vous remercie, monsieur le président, ainsi que les membres du comité. Comme vous le savez, le projet de loi C-15 a été déposé l'année dernière au début de décembre, et, même si nous sommes encore en train d'évaluer les répercussions qu'il pourrait avoir à court et à long terme, nous pouvons dire que l'association en appuie l'intention et l'esprit. Il s'agit selon nous d'un pas dans la bonne direction pour soutenir le développement du Nord.

Jusqu'à présent, l'association a principalement examiné la partie 4 du projet de loi, qui porte sur les modifications proposées à la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie, la LGRVM.

Les initiatives de réforme de la réglementation du gouvernement fédéral sont un pas dans la bonne direction pour accroître l'efficience et l'efficacité tout en maintenant, cela va de soi, de hauts niveaux de performance en matière d'environnement, comme s'y attendent maintenant les Canadiens. Il importe que les réformes gagnent les Territoires du Nord-Ouest afin d'attirer des investissements qui peuvent créer des emplois et favoriser la croissance et la prospérité économiques dans les Territoires du Nord-Ouest ainsi que partout ailleurs au pays.

L'engorgement du processus réglementaire a souvent retardé des projets et, malheureusement, il a même causé l'abandon de certains d'entre eux, ce qui a eu pour effet d'anéantir les attentes d'avantages économiques et sociaux pour les collectivités concernées.

Par conséquent, l'association appuie fermement les objectifs du gouvernement visant l'amélioration de l'efficience et de l'efficacité du régime de réglementation en vigueur dans le Nord.

La LGRVM est un élément essentiel de la réglementation dans les Territoires du Nord-Ouest, et les modifications qui la visent sont très importantes pour notre industrie. Par exemple, les modifications récentes pourraient avoir des retombées très positives. L'une d'elles serait la capacité du ministre à donner certaines directives à tous les offices relevant de la LGRVM, y compris les offices des terres et des eaux, les offices d'aménagement territorial ou les bureaux d'examen des répercussions environnementales, ce qui devrait donner lieu à un processus d'examen plus cohérent, homogène et exhaustif. Toutes les parties intéressées devraient en bénéficier.

L'ACPP respecte pleinement les accords existants sur les revendications territoriales et les droits issus de traités des Autochtones et soutient la protection que leur offre le gouvernement fédéral en proposant des modifications à la LGRVM.

L'association croit que les organismes de réglementation du Nord devraient être efficaces et rapides, et qu'ils devraient veiller à ce que le processus d'examen des projets proposés tienne compte du savoir régional.

Dans la même veine, l'association appuie la mesure d'adaptation prévue dans les modifications à la LGRVM selon laquelle le président de l'Office des terres et des eaux de la vallée du Mackenzie, l'OTEVM, doit veiller à inclure des représentants régionaux au sein des comités de trois membres qui sont affectés à l'évaluation de projets proposés.

Compte tenu du regroupement des offices qui est proposé, la représentation régionale revêtira une importance particulière, et le maintien de cette composition régionale des offices des terres et des eaux était essentiel pour nos membres.

La proposition qui vise à clarifier les échéanciers d'évaluation des répercussions environnementales est également très positive. L'imprévisibilité des échéanciers d'examen constitue depuis longtemps une préoccupation importante pour les promoteurs qui ont des projets pour la région centrale de la vallée du Mackenzie.

La prévisibilité du processus d'examen est avantageuse pour les décisions relatives aux investissements et aux opérations, particulièrement en ce qui concerne la portée et le moment de l'examen. Cette prévisibilité est essentielle à la gestion des activités, lesquelles doivent se dérouler à l'intérieur d'une courte saison de travail. C'est là une des particularités des activités menées au nord du 60e parallèle.

Les autorisations qui tardent de manière inattendue peuvent changer les plans, ce qui peut mener à d'importants retards et, éventuellement, à des occasions ratées. Les décisions sur le cheminement critique et les échéanciers d'investissement représentent des défis systématiques dans le Nord, et ils sont encore plus prononcés quand on les compare aux échéanciers qui prévalent dans d'autres endroits où il se fait de l'exploitation pétrolière et gazière. Notre industrie est mondiale, et les projets d'exploration et d'exploitation gazière et pétrolière doivent livrer une concurrence féroce pour obtenir leur part des investissements que les marchés canadiens et mondiaux se disputent, non seulement au Canada, mais aussi partout ailleurs dans le monde. Ce que propose le projet de loi — réduire les risques et les incertitudes liés aux échéanciers d'examen des projets — permettra au Nord d'être plus concurrentiel.

Conjugué à l'accroissement de l'intérêt à l'égard de l'exploration dans la région centrale de la vallée du Mackenzie, le transfert de responsabilités fédérales aux Territoires du Nord-Ouest facilite les améliorations nécessaires à l'efficience et à l'efficacité du processus de réglementation. La période de transition, qui débutera le 1er avril 2014, sera cruciale, et l'ACPP se réjouit de ce que les responsabilités territoriales prévues dans l'entente sur le transfert de responsabilités correspondent aux responsabilités fédérales, ce qui, de toute évidence, favorisera la stabilité, la continuité et la prévisibilité du régime de réglementation.

Il faut absolument un tel régime de réglementation pour créer un climat propice à l'investissement, ce qui, en retour, favorise la création d'emplois et la croissance économique et permet au gouvernement qui soutient les programmes sociaux qui nous tiennent tous à cœur de percevoir des redevances et de bénéficier de rentrées fiscales.

L'industrie a investi environ 600 millions de dollars dans le Nord au cours des trois dernières années et devrait dépenser encore 650 millions de dollars, si l'on se fie seulement aux engagements actuels relatifs à l'acquisition de terres. L'amélioration du cadre de réglementation devrait contribuer à encourager d'autres investissements.

Le Nord est un secteur de grand intérêt pour notre industrie. C'est un secteur au grand potentiel pétrolier et gazier, qui comporte toutefois des défis. C'est pourquoi l'efficacité et l'efficience du régime de réglementation sont si essentielles à la réussite. Étant donné que le Nord est une région peu explorée, on y trouve peu d'infrastructures, et c'est là le facteur qui restreint le plus l'exploration et l'exploitation dans cette région. Il manque d'infrastructures matérielles comme les routes, les pipelines et les installations, d'infrastructures communautaires liées, notamment, au logement et aux activités récréatives, de main-d'œuvre et de services.

Les possibilités qu'offrent ces ressources sont grandes, mais on ne sait toujours pas si leur exploitation est économiquement viable. On ne pourra les exploiter qu'après une évaluation opportune par l'exploration.

Je dois préciser que le Nord n'est pas la seule région à rencontrer de telles embûches. Il suffit de penser aux provinces productrices comme la Colombie-Britannique, l'Alberta, la Saskatchewan et Terre-Neuve, et à ceux qui découvrent leur potentiel, comme le Québec, le Nouveau-Brunswick et d'autres régions peu explorées. Le secteur de l'exploitation gazière et pétrolière du Canada a des défis communs, dont l'accès aux marchés nationaux, nord-américains et internationaux, la concurrence à l'égard des politiques fiscales et réglementaires, la disponibilité de la main-d'œuvre, l'accès au capital et, bien entendu, l'obtention de l'approbation sociale, c'est-à-dire de la confiance du public.

Compte tenu du transfert de responsabilités devant commencer le 1er avril 2014 et des changements législatifs prévus dans le projet de loi C-15, les Territoires du Nord-Ouest ont une occasion historique de relever ces défis et de faire progresser leur vision de l'exploitation gazière et pétrolière. Il faudra continuer d'améliorer la réglementation à cette fin, car il demeurera important d'assurer la mise en œuvre rapide des changements nécessaires aux règlements et aux politiques à l'appui de l'intention du législateur.

L'ACPP soutient les efforts déployés par le gouvernement fédéral pour améliorer le cadre réglementaire des Territoires du Nord-Ouest. Il a fallu des années de travail et de consultation pour préparer ces modifications, dans le cadre du Plan d'action visant à améliorer les régimes de réglementation dans le Nord d'AADNC. Ces modifications constituent un pas de plus sur la longue route menant à l'accroissement de l'exploitation gazière et pétrolière dans les Territoires du Nord-Ouest. Nous comptons bien poursuivre les consultations auprès du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et du gouvernement fédéral afin de concrétiser ensemble cette vision.

Je vous remercie de nous avoir donné l'occasion de nous adresser à vous aujourd'hui. Je serai ravi de répondre à vos questions.

Le président : Merci à vous deux. Nous allons commencer avec le vice-président, le sénateur Mitchell.

Le sénateur Mitchell : Merci, messieurs. Merci de cette présentation très instructive. J'ai plein de questions, mais il y a beaucoup de personnes intéressées, et je vais donc n'en poser que deux rapidement.

Monsieur Miller, vous avez dit au début de votre déclaration que l'engorgement du processus réglementaire a souvent retardé des projets ou causé l'abandon de projets. C'est un point important, car certains témoins, et ce nombre est plutôt élevé, que nous avons entendus ont parlé de la structure des offices, des superoffices par rapport aux offices régionaux et ainsi de suite. On soutient que la rationalisation est très importante.

Pouvez-vous nous donner une idée du genre d'engorgement et nous dire à quoi c'est attribuable? Est-ce une question de capacité? Autres choses? À quoi les retards sont-ils attribuables, — un manque de leadership?

M. Miller : Permettez-moi de parler des permis de prospection nécessaires à l'exploitation pétrolière et gazière dans le Nord.

La marge de manœuvre pour mener des activités dans le Nord est limitée en raison du climat, de la géographie de la région et des infrastructures. Prenons par exemple les premières étapes très banales du travail d'exploration. Je vais vous dire à quoi ressemblent les cinq premières années. Vous aurez ainsi une idée générale de l'ampleur réelle des travaux.

La première année est essentiellement consacrée à la négociation d'ententes relatives aux avantages et à l'accès; à la compilation de données de forage géologiques et géophysiques existantes; à la modélisation de systèmes pétroliers; à l'acquisition d'éventuelles données de terrain; ainsi qu'à la préparation d'études sur l'état des sites avant la perturbation et d'études patrimoniales pour pouvoir obtenir des permis d'acquisition de données sismiques. L'obligation de négocier des ententes relatives aux avantages et à l'accès avant que des opérations liées au carburant ne soient menées avec un permis de prospection valide peut prendre à elle seule plus d'un an. Comme je l'ai dit, il s'agit là de la première année. Pendant la deuxième, il faut évidemment acquérir, traiter et interpréter de nouvelles données sismiques en 2D; évaluer l'état du terrain avant la perturbation de même que le patrimoine; et obtenir un permis d'acquisition de données sismiques en 3D. Au cours de la troisième année, il faut acquérir et traiter les données sismiques en 3D et passer aux autres étapes qui y sont liées. Pendant la quatrième année, il faut encore une fois évaluer l'état du terrain avant la perturbation de même que le patrimoine en plus d'obtenir des permis de forage d'exploration. Pendant la cinquième année, il faut, dans la mesure du possible, forer et mettre à l'essai les puits d'exploration. Toutefois, si une évaluation environnementale doit être faite, cela peut prendre deux ans. Dans les meilleures conditions possible, le cheminement essentiel associé aux permis de prospection est très restreignant.

Pour en revenir à votre question, je crois que c'est l'équilibre entre les réalités propres au Nord et le processus de réglementation qui est en cause. Le processus doit être conçu de manière à ce que les prospecteurs puissent faire leur travail.

Le sénateur Mitchell : Merci. Ma prochaine question porte sur la manière dont le lien entre le superoffice et le type de processus dont vous parlez concerne également l'obligation de consulter. À votre avis, qui devrait assumer cette responsabilité? Je parle de l'obligation constitutionnelle de consulter. Serait-ce l'office? L'industrie? Des membres de votre association? Y avez-vous pensé?

M. Miller : La question du superoffice, c'est-à-dire la fusion des offices régionaux des terres et des eaux, a été la plus controversée. Nous en sommes tous conscients. L'ACPP et ses membres le savaient bien. Nos membres ont travaillé très fort pour établir des liens avec les offices des terres et des eaux concernés.

C'était une question très importante pour eux. Peu importe la forme que devaient prendre les offices ou l'office — qu'il y en ait un ou plusieurs —, notre principale préoccupation était encore une fois de garantir la représentation régionale. En lisant les modifications concernées, nous nous sommes réjouis de constater que le président de l'Office des terres et des eaux de la vallée du Mackenzie pourra, en regroupant trois comités, inclure des représentants régionaux dans les sous-comités du superoffice.

M. Ferguson : Sénateur, si je puis,

Le président : Soyez bref, car nous n'avons vraiment pas beaucoup de temps. Allez-y.

M. Ferguson : Avant de demander un permis et de mener des activités à grande échelle, tous les membres de l'Association des producteurs pétroliers accordent énormément d'importance à leur engagement auprès des collectivités et du public, notamment les Premières Nations.

En plus des processus qui seront obligatoires en vertu des ententes et de la loi, l'Association et tous ses membres dépensent beaucoup d'énergie pour mener eux-mêmes des consultations aussitôt que possible.

Le sénateur Mitchell : Merci.

Le sénateur Black : Monsieur Ferguson, monsieur Miller, je suis heureux de vous revoir parmi nous. Je vous remercie de votre excellente déclaration.

Auriez-vous l'obligeance de dire au comité quelles seraient vos recommandations pour améliorer le projet de loi?

M. Ferguson : Je vais commencer, puis je demanderai à M. Miller d'aborder quelques points précis.

Nous examinons les premières étapes pour notre secteur dans le Nord. Nous faisons de la prospection pour essayer de trouver des débouchés commerciaux. C'est un excellent début, à notre avis. Nous croyons fermement que, peu importe où nous travaillons, le modèle de réglementation doit être un cycle d'amélioration continu, car notre industrie évolue et fait accélérer l'émergence de nouvelles technologies, de nouvelles méthodes de développement, passant d'un mode d'exploration conventionnel à un mode d'exploration non conventionnel. Nous voyons d'abord et avant tout la nécessité de mettre en place un modèle de réglementation qui soit capable de répondre aux pressions changeantes de la population, des Premières Nations et de l'industrie des technologies. Le projet commence à se concrétiser et nous espérons qu'il se matérialisera de plus en plus à mesure que nous allons de l'avant.

Monsieur Miller, avez-vous une remarque précise à faire?

M. Miller : Oui, merci de cette question, sénateur Black. En ce qui concerne les dispositions relatives à la LGRVM, j'ajouterais que nos membres ont encore des réserves concernant les articles 124 et 125. Compte tenu du libellé actuel du projet de loi, il est très facile d'invoquer une évaluation environnementale précoce. À l'article 125 plus précisément, qui énonce deux critères à respecter, on s'inquiète du critère lié aux préoccupations pour le public, qui est assorti de très peu de balises. On peut l'interpréter de façon très large. J'aimerais parler de ce critère plus tard, mais je sais qu'il nous reste peu de temps.

Le sénateur Black : Ce que vous faites valoir, monsieur Miller, c'est que nous devrions examiner les préoccupations pour le public pour nous assurer qu'elles ne sont pas totalement subjectives.

M. Miller : Oui. C'est exact.

Le sénateur Black : Merci beaucoup. Si vous le permettez, monsieur le président, j'aimerais poser une dernière question très rapidement. Puis-je?

Le président : Oui.

Le sénateur Black : Dans ces audiences, on nous a dit qu'il existe une différence entre les investissements au Yukon et ceux dans les Territoires du Nord-Ouest. Pourriez-vous en expliquer la raison, dans le contexte de l'exposé que vous avez fait aujourd'hui?

M. Ferguson : Certainement, monsieur le sénateur. La différence qui existe actuellement entre les deux territoires est principalement liée aux ressources et à la quantification des ressources. Il y a des activités au Yukon qui sont très semblables à des données supplémentaires disponibles juste au sud, en Colombie-Britannique. Il y a également des investissements plus importants faits dans des projets conventionnels liés au gaz naturel dont on tire parti dans le Yukon.

Je pense que les investissements que nous voyons avec nos membres des Territoires du Nord-Ouest vont probablement accélérer — sans doute beaucoup plus rapidement — en raison des possibilités que présente le pétrole de réservoirs dans la région. Je pense que ce sont des occasions importantes, et si l'on regarde les marchés, c'est manifestement un catalyseur.

Le sénateur Black : Vous dites que c'est pour une raison technique que le Yukon augmente ses investissements plutôt que pour une préoccupation réglementaire? Je ne veux pas vous prêter de propos, mais nous avons déjà entendu ce discours.

M. Ferguson : À ce stade-ci — rappelez-vous que nous en sommes à l'étape de la prospection —, le degré de maturité des données et des possibilités est un peu plus élevé maintenant au Yukon, mais je ne pense pas qu'il en sera forcément toujours ainsi.

Le sénateur Black : Merci beaucoup.

Le sénateur Sibbeston : Ce projet de loi est plutôt positif pour les habitants du Nord, et plus particulièrement ceux d'entre nous qui se sont engagés dans la lutte en faveur d'un gouvernement responsable dans le Nord. Ce projet de loi conférera la gestion des terres et des ressources aux habitants du Nord, ce qui est une très bonne chose.

Des inquiétudes persistent cependant. D'une part, on dirait que le gouvernement cède la responsabilité et la compétence des terres et des ressources, mais d'autre part, on conserve un certain contrôle à Ottawa. Je remarque que vous vous réjouissez du fait que le ministre à Ottawa continuera de prendre des décisions stratégiques et d'émettre des directives exécutoires à tous les offices établis en vertu de la LGRVM, que vous jugez comme une bonne chose.

Êtes-vous en train de dire que le fait que le ministre à Ottawa prenne des décisions dans le Nord et que vous siégiez à des conseils d'administration est une bonne chose pour les habitants du Nord? Est-ce parce que vous préférez traiter avec le gouvernement fédéral, où est-ce parce que vous ne faites pas du tout confiance aux habitants du Nord pour prendre des décisions dans ce dossier?

M. Ferguson : Je peux certainement comprendre l'interprétation, sénateur.

Tout d'abord, nous séparons les directives de la mise en œuvre et de l'orientation par voie réglementaire. C'est bien que ce soit séparé, selon nous. L'Association canadienne des producteurs pétroliers préfère depuis de nombreuses années être réglementée par ceux qui sont les plus près de la terre.

Dans le cadre de la transition, nous espérons qu'il faille émettre de bonnes directives pour faire en sorte qu'il y ait une bonne orientation stratégique, de manière à respecter l'intention et l'objet du transfert des responsabilités. Au bout du compte, nous entrevoyons une excellente occasion à mesure que le Nord en bénéficiera, assurément dans notre secteur, grâce à des investissements, mais aussi grâce à une augmentation de la capacité dans les modèles de réglementation et l'expérience dans le Nord. Nous espérons qu'Ottawa et Calgary auront moins de contrôle et que les Territoires du Nord-Ouest en auront plus.

Le sénateur Sibbeston : Lorsque vous dites que l'Association canadienne des producteurs pétroliers respecte pleinement les ententes sur les revendications territoriales globales, les droits issus de traités, et cetera, le pensez-vous vraiment? Si l'on considère que les groupes autochtones dans le Nord sont contre le regroupement des offices parce que cela réduirait les pouvoirs qu'ils détiennent actuellement, lorsqu'un office régional est mis sur pied pour s'occuper de l'environnement, cette mesure législative fusionne tous les offices et confie les pouvoirs à un superoffice, transformant ainsi les régions en groupes dans la mesure du possible, puis on assigne une personne de la région pour s'en occuper.

Lorsque vous dites que vous appuyez les revendications territoriales et les droits issus de traités, le pensez-vous? J'ai l'impression que la mesure législative réduit les pouvoirs et les droits.

M. Ferguson : Merci. Tout d'abord, nous respectons profondément l'objet, la teneur et l'orientation de ces revendications territoriales et de ces traités.

Nous suggérons au gouvernement de tenir ces discussions. Si nous avons une occasion de simplifier les processus pour pouvoir passer plus de temps à examiner la teneur et la nature de nos interactions et notre engagement à l'égard du territoire, c'est là où nous voyons l'occasion de simplifier le processus ou de regrouper ces offices.

Cela n'exclut certainement pas la nécessité de prêter attention aux intérêts individuels et collectifs sur ce territoire. Nous disons que nous pouvons consacrer plus de temps à la teneur s'il y a possibilité de simplifier le processus.

Le président : Merci, sénateur Sibbeston. J'ai oublié de mentionner une chose quand j'ai fait les présentations. Deux anciens premiers ministres des Territoires du Nord-Ouest siègent à notre comité. L'un d'eux est le sénateur Sibbeston, qui vient de prendre la parole, et l'autre ancien premier ministre des Territoires du Nord-Ouest, le sénateur Patterson, posera maintenant quelques questions.

Le sénateur Patterson : Merci et bienvenue aux témoins.

J'ai lu les transcriptions de la réunion du comité de la Chambre qui a eu lieu à Yellowknife le mois dernier, et je veux mentionner que j'ai été franchement consterné par la façon dont un membre du comité a réprimandé votre représentant. Ce n'est pas ainsi que les comités parlementaires sont censés fonctionner. Je suis donc vraiment heureux que vous ayez accepté de comparaître devant notre comité.

J'ai quelques courtes questions à poser.

Je sais que vous avez participé à l'élaboration de ce projet de loi, et nous vous en remercions. Je sais que les organisations de l'industrie ont soulevé une préoccupation dans la version antérieure du projet de loi au sujet de la rigidité des certificats. Le projet de loi renferme maintenant des dispositions qui permettent de réexaminer les certificats. Je me demande si ces dispositions sont satisfaisantes. Vous pourriez peut-être parler de la préoccupation qui a été soulevée tout à l'heure.

M. Miller Cette préoccupation particulière n'était pas au sommet de la liste des priorités de nos membres. Conjointement avec les membres de l'Association canadienne des producteurs pétroliers, il s'agissait d'un cheminement critique assorti de délais. D'abord, comme je l'ai mentionné avec le sénateur Black, il était possible de réaliser des évaluations environnementales dès le stade d'exploration. Cependant, sénateur cette question particulière ne figurait pas parmi nos priorités.

Le sénateur Patterson : J'ai une autre courte question à poser. Le projet de loi prévoit un régime de gestion de l'exploitation des gisements pétrolifères et gaziers qui pourraient chevaucher la compétence territoriale de la région intracôtière et la compétence fédérale de la région extracôtière dans la mer de Beaufort et dans la région visée par le règlement de la revendication des Inuvialuit. Je comprends que le projet de loi propose que les parties travaillent ensemble pour faire en sorte qu'un champ comme celui-ci soit exploité en tant qu'opération unique, et je pense qu'on parle d'exploitation en commun.

Cette approche sera-t-elle adéquate pour l'industrie? Avez-vous une remarque à faire sur cette disposition?

M. Ferguson : Nous sommes aux prises avec une situation similaire à Terre-Neuve en ce moment, notamment avec le chevauchement des compétences responsables de certaines ressources de la région intracôtière et de la région extracôtière. Du point de vue de l'industrie, nous n'avons certainement aucun problème à collaborer entre nous pour faire en sorte que l'exploitation des ressources se fasse adéquatement.

Nous suggérerions le même système — c'est-à-dire discuter avec deux des dirigeants des compétences. Dans le Nord, le système serait semblable à un système efficace que nous avons à Terre-Neuve en ce moment.

La sénatrice Seidman : Je pense que j'ai raté les présentations, car il y avait un accident de la route et je suis arrivée quelques minutes en retard. Je suis la sénatrice Judith Seidman, et je suis de Montréal, au Québec.

Vous avez parlé des défis auxquels est confronté le Nord, défis qui auraient une incidence sur l'Association canadienne des producteurs pétroliers en les empêchant d'exploiter les ressources dans le Nord. L'un des défis que vous avez mentionnés, c'est d'avoir le permis social pour obtenir la confiance du public.

Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur ce défi particulier, et si des mécanismes sont prévus dans le projet de loi actuel qui pourraient faciliter le processus?

M. Ferguson : Je vais commencer par faire une déclaration générale concernant la disposition relative au permis social et la façon dont nous examinons la question parmi nos membres. Tout repose sur notre rendement et sur notre capacité de communiquer et d'informer les gens de notre rendement — bon ou mauvais. Nous aimons croire qu'il est bon, dans l'ensemble.

Pour ce qui est de la possibilité d'obtenir le permis social, notre industrie a ses propres responsabilités et obligations de mettre en œuvre des programmes, de sensibiliser la population, de mobiliser la communauté — toutes ces activités — pour que nous puissions faire notre part afin d'obtenir un permis social pour exploiter ces ressources.

Nous nous tournons vers un organisme de réglementation solide et efficace pour rassurer la population et les habitants de ces régions que nos activités seront surveillées adéquatement, par exemple.

Le projet de loi proprement dit offre des possibilités de contrôle, que nous jugeons utiles, de la part du gouvernement et des organismes de réglementation. Nous constatons que ce genre de contrôle est aussi sévère dans d'autres pays. Lorsque nous passerons, espérons-le, de l'exploration à la production, nos capacités et les mesures de contrôle continueront d'augmenter au gré de l'évolution de l'industrie.

M. Miller : De plus, si l'on considère les aspects qui font que nos activités sont acceptables sur le plan social, il y a tout d'abord un processus de réglementation solide et rigoureux. Deuxièmement, bien avant que ces amendements ne soient proposés, nos membres avaient déjà tenu d'intenses consultations dans la collectivité et avec les intervenants concernés. Mis ensemble, ces éléments sont essentiels pour que nos activités soient socialement acceptables.

Le sénateur Wallace : Vous avez clairement indiqué dans votre exposé, messieurs, que vous appuyez le projet de loi C-15 et son objectif. Vous croyez, je pense, qu'il améliorera l'efficacité de la réglementation et qu'il aboutira à des investissements dans le Nord, à la création d'emplois et à toutes les autres retombées que cela suppose.

Mais comme vous l'avez également souligné, il faut aussi que le processus tienne compte des enjeux environnementaux. Vous affirmez ainsi que l'environnement du Nord sera protégé et que le projet de loi permettra une protection efficace de l'environnement.

Où cela se trouve-t-il dans le projet de loi? Sur quelles dispositions fondez-vous votre affirmation?

M. Miller : Avant tout, il y avait déjà, avant ces amendements, des processus extrêmement rigoureux d'évaluation et d'examen des effets environnementaux.

Le projet de loi rationalisera certains aspects qui permettront aux organismes de réglementation de se concentrer sur des examens franchement plus rigoureux, selon un modèle centralisé et cohérent.

À propos d'« environnement » vous entendez, je suppose, « protection environnementale ». Justement, nous pourrions dire quelques mots sur le macro-environnement du Nord par rapport aux infrastructures. Et je suppose que vous faisiez aussi allusion à cette composante lorsque vous parliez d'« environnement ».

Le sénateur Wallace : Oui.

M. Miller : Qu'il y ait ou non des amendements à la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie, ces éléments cruciaux des infrastructures au nord du 60e parallèle ne disparaîtront pas. Voilà pourquoi il est essentiel d'améliorer cette loi. Qu'il s'agisse d'infrastructures matérielles ou communautaires, il y a des obstacles systémiques à surmonter au nord du 60e parallèle. Même si ces changements législatifs facilitent les choses, on est loin du compte.

Le sénateur Wallace : Comme l'ont dit tous les témoins qui appuient le projet de loi et le développement du Nord, les besoins d'investissement sont incessants, tout comme la nécessité de créer des emplois.

Certains témoins nous ont parlé des questions réglementaires qui, quelquefois, font fuir l'investissement. On a dit que les grandes entreprises se retrouvent plus facilement dans ce labyrinthe. Elles doivent certes y consacrer du temps et de l'argent, elles peuvent avoir à vivre des frustrations, mais elles ont tout de même la capacité de s'en sortir plus facilement que les petites entreprises.

Or, l'objectif est de multiplier les investissements et les emplois à tous les niveaux, de sorte que les petites et moyennes entreprises puissent, elles aussi, trouver des débouchés dans le Nord.

D'après votre expérience, pensez-vous que le dédale actuel de la réglementation ait des effets négatifs sur l'investissement des petites entreprises, qu'il les freine ou les empêche d'en faire, et que l'adoption du projet de loi C-15 pourrait les encourager?

M. Ferguson : Ces difficultés ne sont pas propres au Nord. Nous voyons le même genre de défis, non seulement pour notre secteur, mais également pour bien d'autres.

Ce qui est particulier au secteur du pétrole et du gaz, c'est qu'il offre un très large éventail de possibilités d'affaires, ce qui n'est probablement pas le cas dans bien d'autres secteurs. Comme vous l'avez dit, toutes ces industries des services dépendent largement des capitaux qu'apportent initialement ces grands acteurs de l'industrie.

Cela viendra avec le temps. Pour l'instant, nous sommes extrêmement occupés par le modèle d'exploration et le moment n'est pas encore venu où les petites et moyennes entreprises peuvent venir s'implanter et prospérer.

Mais cela viendra. Si certaines de ces ressources s'avèrent commercialisables, ce sera, vous verrez, une immense occasion d'affaires pour ces petites et moyennes entreprises.

De par sa nature, l'exploration est très risquée. Les petites entreprises de pétrole et de gaz ne sont donc pas à même de trouver le capital associé à ce type de risques.

L'immense avantage qu'ont les Territoires du Nord-Ouest, c'est de pouvoir compter sur de très grandes compagnies capables de passer par toutes les étapes nécessaires avant de pouvoir établir s'il y a ou non des possibilités commerciales.

M. Miller : La question que vous avez soulevée est excellente parce que les entrepreneurs de taille modeste, mais dynamiques, que ce soit dans le secteur du pétrole ou du gaz, ou dans n'importe quel secteur industriel, ont un rôle essentiel à jouer dans l'économie. Je le répète, ils ont souvent plus de marge de manœuvre de sorte qu'ils peuvent quelquefois prendre un petit peu plus de risques. La question que vous avez soulevée est d'autant plus perspicace qu'il est essentiel de les associer aux activités en cours, que ce soit dans le secteur du pétrole et du gaz, ou dans tout autre secteur.

La sénatrice Ringuette : Vous nous avez dit que l'investissement de l'industrie dans le Nord est de l'ordre de 600 millions de dollars et on s'attend à ce qu'il s'élève à 650 millions de dollars de plus en fonction des acquisitions foncières en cours.

Ces investissements proviennent-ils des grandes entreprises ou d'entreprises plus petites? Et je suppose qu'ils concernent exclusivement l'exploration. Corrigez-moi si je me trompe.

M. Ferguson : Pour préciser, les engagements de 650 millions de dollars concernent les acquisitions foncières. Franchement, c'est beaucoup d'argent. Même des entreprises plus modestes qui dirigent ces explorations et acquièrent des terres se sont discrètement associées à d'autres entreprises pour rassembler les capitaux nécessaires. Ce phénomène distingue l'industrie du pétrole et du gaz dans le monde entier. De nombreux partenariats et coentreprises se créent pour pouvoir assumer les risques élevés associés à l'exploration.

Vous pouvez bien imaginer que si les choses se passent comme prévu, ces dépenses de 650 millions de dollars pourraient porter fruit, non seulement dans le secteur de l'exploration proprement dit, mais aussi dans les activités qui s'ensuivraient, je pense à la construction d'hôtels et de restaurants, mais aussi à d'autres possibilités commerciales qui en découleraient et qui se présentent normalement lorsque de gros investissements sont faits dans une région. Des fournitures et des entrepreneurs viendront d'ailleurs, c'est certain, mais les entreprises sont fermement résolues à engager des gens sur place dans la mesure du possible et je crois que c'est ce qui se fait, où que nos membres soient appelés à travailler dans le pays.

Pour résumer, on a surtout à faire à un mélange de petites et grandes entreprises qui feront des dépenses et profiteront de leur investissement.

La sénatrice Ringuette : Comme je m'intéresse tout particulièrement à la main-d'œuvre, j'aimerais savoir le pourcentage des travailleurs recrutés sur place pour travailler sur les sites d'exploration, par rapport à celui des travailleurs étrangers temporaires?

M. Ferguson : Je peux vous le dire en ce qui concerne le Nord. Les gens que les opérateurs engagent pour les activités d'exploration sont assez spécialisés. Vous pouvez imaginer en effet les risques élevés qu'ils prennent par rapport aux possibilités commerciales et pour prouver qu'il y a quelque chose à exploiter. Les employés locaux que l'on peut voir travaillent probablement dans les services de soutien et l'administration; ce sont probablement des gens qui ont des intérêts en jeu. Certains de nos membres envoient des gens dans divers sites dans le Nord, mais à cette étape préliminaire, alors qu'on a besoin de spécialistes comme des géologues par exemple, ces gens-là viendront probablement d'ailleurs si on n'en trouve pas sur place. Mais le recrutement sur place s'accentuera avec le temps.

À ce que je sache, aucun de nos membres dans les chantiers du Nord n'engage des ouvriers relevant du programme fédéral des travailleurs étrangers temporaires. Ils ne le font pas en raison de la nature des activités. Je vous le dis, c'est déjà assez difficile comme ça de trouver des ouvriers spécialisés, quel que soit le type d'opérations menées. En l'occurrence, étant donné qu'il faut prouver les possibilités commerciales que présentent ces sites, les entreprises y consacrent énormément d'efforts.

La sénatrice Ringuette : Je suppose que les compagnies parlent aussi de formation aux parties prenantes et aux collectivités locales, en vue de futurs investissements de vos membres dans le Nord.

M. Ferguson : Il ne fait aucun doute que les compagnies font tout pour associer à leurs activités le plus de gens possible dans le Nord. C'est en tout cas ce que nous constatons lorsque nous arrivons dans des régions qui sont moins familières avec notre secteur et encore moins avec le type de développement que nous recherchons. Si vous parlez à l'un ou l'autre des opérateurs qui sont dans le Nord, vous verrez qu'ils ne demandent pas mieux que de prendre contact avec les collectivités, le public, les Premières Nations, bref, avec tout le monde. Ils le font tout simplement en raison de la nature de l'exploration.

Le président : Merci beaucoup, messieurs Ferguson et Miller. Notre temps de parole est écoulé. J'apprécie vos commentaires et je vous souhaite une bonne journée.

Bienvenue dans cette deuxième moitié de la réunion du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles. Nous poursuivons notre examen du projet de loi C-15, sur le transfert des responsabilités aux Territoires du Nord-Ouest.

C'est avec grand plaisir que j'accueille notre deuxième groupe de témoins, dont certains sont ici présents. Nous espérons que ceux qui se joignent à nous par vidéoconférence pourront le faire. S'ils ne le peuvent pas, nous poursuivrons quand même la deuxième moitié de l'exposé. Mme Ramin a accepté de faire l'exposé au complet.

Monsieur Stanzell, nous allons commencer par vous. Je sais que les techniciens s'occupent de la liaison par vidéoconférence. S'ils ne règlent pas le problème, je vous remercie beaucoup d'avance, madame Ramin, d'avoir accepté de présenter la partie de l'exposé des prospecteurs. Je vous en suis très reconnaissante. Nous sommes désolés de cet incident, que nous essayons de régler.

Voulez-vous commencer, monsieur Stanzell?

Allen Stanzell, 1er vice-président, Chambre de commerce des Territoires du Nord-Ouest : Merci, monsieur le président. Je m'appelle Allen Stanzell et j'habite Yellowknife. Je suis le 1er vice-président de la Chambre de commerce des Territoires du Nord-Ouest.

Monsieur le Président, mesdames et messieurs, je vous remercie de nous donner l'occasion de discuter avec vous aujourd'hui. La Chambre de commerce des Territoires du Nord-Ouest est la plus grande organisation commerciale située au nord du 60e parallèle et un champion de longue date du transfert de pouvoirs. Nous croyons fermement que plus le pouvoir se rapproche des gens qu'il touche, meilleure est la prise de décisions, de façon générale.

Pour nous préparer à cette intervention, nous avons mené un sondage auprès de nos membres afin d'obtenir une opinion collective au sujet de notre position.

À quelques exceptions près, les membres du réseau de la chambre, de Hay River jusqu'à lnuvik, appuient les points que nous désirons vous soumettre aujourd'hui.

Je dirai en tout premier lieu que la collectivité des gens d'affaires des Territoires du Nord-Ouest appuie le projet de loi dans son ensemble et tient à féliciter le gouvernement fédéral et nos administrations autochtones et territoriales pour leur excellent travail et pour la clairvoyance dont ils ont fait preuve en faisant avancer ce projet de loi et les ententes afférentes.

Le projet de loi C-15 est-il parfait? Non. Rien qui soit visionnaire n'est jamais parfait. À notre avis cependant, le projet de loi C-15 témoigne de la vision commune des résidents des Territoires du Nord-Ouest. Pour renforcer cette prise de position, j'aimerais vous parler d'un sondage mené au début de mars 2013. L'étude a été commandée par une tierce partie indépendante et menée par un cabinet d'études, également indépendant. La méthode utilisée comportait des entrevues auprès de 400 adultes des Territoires du Nord-Ouest, entrevues réparties de façon égale entre les grands centres et les petites collectivités, et entre les Autochtones et les non-Autochtones.

La principale conclusion de l'étude était que près de 7 répondants sur 10 étaient en faveur de l'entente de transfert ou n'étaient pas contre, par rapport à moins de 2 sur 10 qui s'y opposaient. Il ressort clairement que le transfert des pouvoirs de gestion des ressources, des terres et des eaux est une vision que partagent non seulement la collectivité des gens d'affaires, mais aussi la grande majorité des résidents, dans les Territoires du Nord-Ouest.

Nous savons que certains groupes voudraient qu'on remonte dans le temps et qu'on laisse les choses telles qu'elles étaient. Nous respectons leur voix et les remercions pour leur contribution, mais nous ne sommes pas d'accord. Nous croyons qu'il est temps pour les résidents des Territoires du Nord-Ouest d'avancer à grands pas vers la maturité et de contribuer davantage à la nation canadienne.

Nous appuyons également la teneur fondamentale des modifications proposées à la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie et nous croyons qu'il s'agit d'une étape positive vers le développement et la gestion des ressources dans les Territoires du Nord-Ouest. Il y a encore du travail à faire et des défis à relever pour que les Territoires du Nord-Ouest réalisent leur plein potentiel.

Nous avons un immense potentiel d'exploitation des ressources. Or, les investissements dans l'exploitation minière, pétrolière et gazière sont très faibles en raison de problèmes liés à la réglementation, aux infrastructures et à d'autres enjeux.

Bref, monsieur le président, nous misons beaucoup sur le succès du transfert des pouvoirs et sur l'efficacité de la réforme réglementaire.

Je crois que nous serons tous d'accord sur un point : il est difficile d'optimiser le transfert des pouvoirs en l'absence de lois et de règlements efficaces. Par conséquent, compte tenu du peu de temps dont nous disposons, nous nous concentrerons sur les cinq principaux points des modifications à la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie qui, nous l'espérons, seront abordés par le gouvernement fédéral.

La Chambre de commerce des Territoires du Nord-Ouest préconise l'établissement de critères clairs pour définir les projets susceptibles d'être la cause de préoccupations du public et recommande que cette définition soit confiée au régulateur des Territoires du Nord-Ouest plutôt qu'à Ottawa.

Plus précisément, il faut établir des critères réglementaires pour l'interprétation élargie de ce qui peut être « une cause de préoccupations pour le public » à l'article 125 de la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie. Il n'existe pas de critères clairs pour déterminer en quoi consistent les « préoccupations pour le public », ce qui laisse au régulateur une obligation illimitée d'accepter de telles interventions, sans examiner leur bien-fondé.

On a le sentiment que le ministère des Affaires autochtones et du Nord Canada n'est pas habilité à modifier l'article 125, car cela risquerait de porter atteinte aux accords sur les revendications territoriales. Nous croyons qu'il est possible de le modifier sans contrevenir à ces accords, et de le faire d'une façon qui permettrait de mieux harmoniser la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie avec ces derniers.

Le point crucial ici est l'établissement de critères pour définir les projets susceptibles d'être la cause de préoccupations pour le public, ou de seuils qui limiteraient les interventions à celles qui sont bien fondées.

Nous croyons — et c'est là un élément tout aussi important — que la décision concernant la définition d'un projet susceptible d'être une cause de préoccupations pour le public devrait continuer à relever du régulateur territorial, qui filtrerait les interventions au regard des nouveaux critères. La Chambre de commerce des Territoires du Nord-Ouest préconise une plus grande spécificité en ce qui a trait au renvoi de projets à un examen préalable aux termes de l'article 124 de la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie. Aucune des modifications à cette loi ne traite des questions liées à l'examen préalable des demandes. Trop souvent, il est ordonné aux promoteurs d'entreprendre des évaluations environnementales, quelle que soit la portée des projets.

Nous savons que de simples demandes relatives au forage exploratoire sont renvoyées à des fins d'évaluation environnementale. Lorsque ce processus est plus coûteux que le projet lui-même, les promoteurs n'ont pas d'autre choix que de retirer leur demande. De telles mesures ont pour seul effet de faire fuir les investisseurs. Pour diverses raisons, nous avons déjà l'une des administrations les plus coûteuses du pays au sein de laquelle entreprendre des activités d'exploration et le développement de projets. Il ne fait aucun sens d'imposer des coûts de processus injustifiés aux investisseurs dans les ressources.

Évidemment, nous ne préconisons pas l'élimination du processus d'évaluation environnementale. Nous prônons une définition plus raisonnable aux fins du renvoi de projets à un examen préalable, définition qui pourrait être fondée sur la portée des projets.

La Chambre de commerce des T.N.-O. préconise, pour l'évaluation environnementale, pour la prise de décisions en matière d'examen des répercussions environnementales, l'établissement de délais plafonnés d'un maximum d'un an pour les demandes simples, y compris les projets de revitalisation de friches industrielles, et d'un maximum de deux ans pour les nouveaux projets.

Nous savons que l'approbation de certains projets prend trop de temps. Il a fallu sept ans pour que le projet Gahcho Kué de De Beers soit approuvé. En toute justice, le promoteur a retardé le processus de demande durant la récession mondiale de 2008.

Cependant, l'incertitude entourant les décisions réglementaires dans les T.N.-O. est l'une des principales préoccupations des cadres des entreprises minières, pétrolières et gazières partout dans le monde. Les capitaux sont investis là où ils peuvent croître; par conséquent, les investisseurs vont ailleurs, là où on leur offre une plus grande certitude. Heureusement, la société De Beers s'est engagée à réaliser des projets dans le Nord et elle dispose d'un bon capital. D'autres investisseurs ne tenteraient pas leur chance avec un processus réglementaire qui n'a pas de délais de prise de décisions plafonnés définis.

La durée et le coût des processus décisionnels touchent tous les demandeurs, y compris la Couronne. Il a fallu plus de deux ans avant que la Société d'énergie des Territoires du Nord-Ouest obtienne un renouvellement de permis d'utilisation des eaux pour la centrale électrique de Taltson. L'usine est en exploitation depuis 1965. La société a déposé une demande de renouvellement de permis de 15 ans, ce qui est la norme. Les installations n'étaient pas modifiées. Les débits d'eau ne changeaient pas. Pourtant, la société a été assujettie à un processus coûteux qui a duré deux ans, et les contribuables ont dû en absorber le coût.

La loi et les règlements actuels doivent être resserrés pour que le bon sens l'emporte. À notre avis, cela commence par des délais plafonnés pour la prise de décisions. Au Yukon, les demandeurs et les investisseurs peuvent compter sur des délais de prise de décisions fermes grâce à l'Office d'évaluation environnementale et socioéconomique du Yukon. Les T.N.-O. doivent absolument offrir le même degré de certitude.

La Chambre de commerce des T.N.-O. appuie la création d'un office de réglementation unique pour l'ensemble des T.N.-O. C'est un sujet de discorde, et nous en sommes conscients. Toutefois, à notre avis, la loi fédérale permet au gouvernement de créer un office unique jouissant d'une autorité suprême. Même si les offices locaux ont une certaine utilité, nous ne croyons pas que le volume de demandes présentées dans les T.N.-O. justifie l'existence de multiples offices. Les petits offices n'ont pas la capacité d'examiner des demandes complexes. Un office unique disposerait des ressources appropriées.

Au moment du transfert des responsabilités au Yukon, on a créé l'Office d'évaluation environnementale et socioéconomique du Yukon à titre d'organisme décisionnel central pour le territoire. L'office est présent à l'échelle locale grâce à six bureaux régionaux désignés qui servent de points d'entrée pour les demandeurs. On pourrait faire de même dans les T.N.-O., là où se trouvent en ce moment des offices régionaux. Les examens auraient lieu au sein d'un organisme central possédant la capacité technique de les gérer efficacement, mais la présence locale et les liens avec les collectivités demeureraient.

La Chambre de commerce des T.N.-O. prône l'établissement d'un guichet unique pour le traitement des demandes visant des projets d'exploration et de mise en valeur des ressources des T.N.-O., qu'il s'agisse de permis d'utilisation des terres ou des eaux, ou encore de licences.

Au moment du transfert des responsabilités au Yukon, le gouvernement fédéral a conservé le droit d'accorder des permis d'exploitation minière. Il semble qu'on ait oublié d'aborder cette question lors des discussions tenues avec l'industrie au Yukon. Nous avons l'occasion de nous assurer que le pouvoir de délivrer des permis relève de l'administration des T.N.-O. Nous préconisons l'établissement d'un guichet unique pour le traitement des demandes. En termes simples, lorsqu'une demande est présentée en vue de l'exploration de ressources ou d'un projet de mise en valeur, elle enclenche le système de traitement de tous les aspects de la demande simultanément, y compris tous les pouvoirs fédéraux et territoriaux connexes.

Ce modèle est utilisé ailleurs au Canada. Il crée des gains d'efficacité considérables par comparaison au système actuel, dans le cadre duquel les autorités fédérales et territoriales travaillent d'une façon fragmentée, ce qui cause des incohérences et des chevauchements sur le plan de la réglementation.

Au cours des 30 dernières années, on a transféré au gouvernement des T.N.-O. la responsabilité de plusieurs programmes et services, notamment la prestation des soins de santé et des services sociaux, l'éducation, l'administration des aéroports et la gestion des forêts.

À notre avis, le projet de loi C-15 s'impose logiquement comme la prochaine grande étape de l'histoire à franchir sur le plan du transfert des responsabilités à notre gouvernement territorial.

Notre économie est axée sur les ressources. La gestion efficace de nos ressources et la création d'un climat d'investissement sain renforceront les économies locale et nationale et offriront des avantages importants à toutes les collectivités et à tous les résidents. Le projet de loi C-15 est un nouveau départ pour les T.N.-O.

Cela conclut notre exposé. Encore une fois, je vous remercie de nous avoir donné l'occasion de faire valoir notre position.

Le président : Merci beaucoup, monsieur Stanzell. Nous avons établi la connexion pour la vidéoconférence.

La directrice de l'Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs du Canada, Mme Vida Ramin, est avec nous et fera le prochain exposé. Nous avons, par vidéoconférence, deux représentants de la Chambre des mines du Nunavut et des Territoires du Nord-Ouest : le directeur exécutif, M. Tom Hoefer, à Yellowknife, et le conseiller juridique, M. Mike Hardin, à Vancouver.

Madame Ramin, monsieur Hoefer, je vous cède la parole; je ne sais pas qui ira en premier. Monsieur Hoefer, vous avez la parole. Nous sommes très heureux de vous entendre.

Tom Hoefer, directeur exécutif, Chambre des mines du Nunavut et des Territoires du Nord-Ouest : Je suis heureux d'être ici. Merci beaucoup, monsieur le président, madame et messieurs les sénateurs. Je suis heureux de participer à la séance par téléconférence. Mon collègue et moi vous remercions de votre indulgence. Nous sommes heureux de revoir les deux sénateurs représentant les régions du Nord, et je suis certain que nous aurons l'occasion de discuter avec eux.

Je suis directeur exécutif de la Chambre des mines du Nunavut et des Territoires du Nord-Ouest. Ma collègue, Vida Ramin, de l'Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs du Canada, notre organisation sœur nationale, se joint à moi. Nos deux associations industrielles sont les principaux défenseurs de l'exploration et de l'exploitation minière dans les territoires et au Canada. Nous avons aussi examiné le projet de loi C-15 en collaboration avec l'Association minière du Canada, qui a déjà témoigné devant le comité, je crois. Je vous remercie de nous permettre de regrouper nos exposés, ce qui nous évitera de nous répéter.

Notre conseiller juridique, Michael Hardin, se joint également à nous à partir de Vancouver. Il nous a aidés à préparer nos exposés et connaît très bien la réglementation dans le Nord, puisqu'il travaille avec nous depuis plus de 20 ans.

Nous vous avons fait parvenir un document détaillé, de même que des diapositives. Mme Ramin et moi parcourrons rapidement les diapositives une à une. C'est avec plaisir que nous répondrons ensuite tous les trois à vos questions.

Avant de présenter les diapositives, j'aimerais faire quelques commentaires généraux. Le projet de loi C-15 représente un jalon décisif pour nous dans le Nord. Dans le Nord, nous sommes nombreux à croire que nous sommes prêts à prendre les rênes. Nous sommes bien outillés et de nombreuses possibilités s'offrent à nous. Notre industrie appuie aussi le transfert des responsabilités; nous n'aborderons donc pas ces éléments du projet de loi C-15. Notre industrie s'intéresse particulièrement aux améliorations réglementaires proposées à la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie; nos commentaires se concentreront donc sur cette loi.

D'un point de vue général, les modifications proposées à la LGRVM auront une incidence positive sur les T.N.-O. Comme il s'agit de l'élément principal de la loi qui régit notre industrie minière, les changements positifs sont les bienvenus.

Nous tenons à remercier le ministre d'AADNC et son personnel de nous avoir consultés et d'avoir répondu de manière très détaillée à nos préoccupations et à nos suggestions. Bien que le projet de loi C-15 ne contienne pas tous les éléments que nous aurions souhaité y voir, nous sommes reconnaissants des améliorations proposées. Nous voulons également remercier le ministre de nous avoir assurés que nous continuerons à participer au processus d'amélioration de la LGRVM, y compris à l'élaboration de nouveaux règlements.

Je passe maintenant aux diapositives. Les premières démontrent la valeur considérable que crée notre industrie. En 80 ans d'exploitation minière, nous avons généré quelque 60 milliards de dollars dans les T.N.-O. La valeur de l'exploitation minière dans les T.N.-O. est toujours importante aujourd'hui. La diapositive 5 montre que nos quatre mines génèrent plus de 1 milliard de dollars par année et ont à plusieurs reprises généré plus de 2 milliards de dollars en valeur de production annuelle. Vous remarquerez également que la valeur de la production minière est beaucoup plus importante dans les T.N.-O. qu'au Nunavut et au Yukon.

En fait, les T.N.-O. sont aujourd'hui un important producteur minier dans le monde, et les données de la diapositive 6 montrent que nous sommes le troisième producteur de diamants dans le monde quant à la valeur de production.

Comme le montre la diapositive 7, nos mines traduisent cette grande valeur de production en avantages importants pour les habitants et les entreprises autochtones et non autochtones du Nord, ce qui a vraiment changé la donne dans les T.N.-O. : aujourd'hui, les taux d'emploi et d'activité commerciale des Autochtones ont atteint des sommets; ils figurent en fait parmi les plus hauts taux au pays. En raison de tous ces avantages, l'industrie minière représente le secteur qui contribue le plus au produit intérieur brut des T.N.-O., comme le montre la diapositive 8.

Malheureusement, même les mines les plus productives ont une durée de vie limitée; c'est la triste réalité de notre industrie.

Comme vous le verrez à la diapositive 9, nous avons eu de la veine : nos trois mines de diamants — Ekati, Diavik et Snap Lake — ont toutes une durée de vie saine de 20 ans. Bien que la mine de tungstène ait une durée de vie prévue inférieure aux autres, nous espérons y trouver plus de minerai.

Nous prévoyons cesser l'exploitation de notre première mine de diamants, la mine Ekati, en 2019, à moins d'obtenir les permis et les licences nécessaires pour exploiter de nouveaux gisements. Cette proposition fait l'objet d'une évaluation environnementale récemment entamée.

La fermeture de cette mine en 2019 entraînerait la perte de 1 500 emplois et nuirait grandement à l'économie des T.N.-O.

En résumé, comme les mines entraînent d'importants avantages dans les T.N.-O., nous devons à tout prix trouver des façons de les préserver; c'est très important pour l'avenir du territoire. Pour maintenir le cycle minier présenté à la diapositive 10, nous devons attirer des investissements importants et continus dans le domaine de l'exploration minière. C'est là où notre situation devient préoccupante.

À la diapositive 11, vous verrez que les investissements en matière d'exploration sont beaucoup moins importants dans les T.N.-O. que chez nos voisins, le Nunavut et le Yukon, en particulier depuis 10 ans. J'aimerais attirer votre attention sur les dépenses d'exploration des T.N.-O., désignées en bleu dans la diapositive. Vous remarquerez qu'elles sont faibles et qu'elles n'ont pas bougé depuis des années. Au cours de la même période, le Nunavut et le Yukon ont très bien réussi à attirer des investissements.

Étant donné que le potentiel minier des T.N.-O. est au moins égal à celui de nos voisins, les données démontrent que la structure des T.N.-O. présente des lacunes. Les explorateurs nous disent que le manque d'investissements est en grande partie attribuable au cadre réglementaire et à la LGRVM.

Vous verrez, dans la prochaine diapositive, ce qui nous inquiète. Le diagramme à la diapositive 12 montre clairement un déclin constant de la position concurrentielle des T.N.-O. et la perte de notre part du marché canadien. Il faut agir pour renverser la vapeur.

Je laisse maintenant la parole à ma collègue, qui commentera les autres diapositives.

Vida Ramin, directrice, Biens-fonds et réglementation, Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs : La recherche de nouveaux gisements miniers rentables est une activité risquée. Les études montrent que seulement un projet d'exploration primaire sur 1 000 débouche sur un gisement rentable. Le nombre de projets qui donnent lieu à la création d'une mine est encore plus faible. Toutes choses étant égales par ailleurs, les chances sont minces pour les explorateurs miniers, sans égard au lieu d'investissement.

La diapositive suivante résume les nombreux défis propres aux sites dans les Territoires du Nord-Ouest qui minent le pouvoir d'attraction du climat d'investissement. S'ils sont confrontés à ces obstacles supplémentaires, les explorateurs miniers choisiront d'investir leurs rares fonds à l'extérieur des Territoires du Nord-Ouest.

Le reste de notre exposé se centrera sur la capacité du projet de loi C-15 de répondre aux préoccupations de l'industrie relatives au régime réglementaire en place, qui freine grandement les investissements dans les Territoires du Nord-Ouest.

L'industrie minière appuie le transfert des responsabilités, qui permettra le contrôle local des terres et la gestion des ressources et renforcera la capacité du gouvernement territorial de mieux répondre aux préoccupations de l'industrie. Les ressources minérales des Territoires du Nord-Ouest pourront donc être mieux exploitées.

En plus de donner effet au transfert des responsabilités, le projet de loi C-15 propose un certain nombre de modifications encourageantes à la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie. Les modifications devraient rendre l'environnement plus favorable à l'exploration minière et à la mise en valeur de mines grâce à l'établissement d'un régime de réglementation simplifié, rationalisé, prévisible et efficace. Parmi ces modifications encourageantes, nous avons l'établissement de délais prescrits par la loi pour la réalisation des évaluations environnementales et des examens des répercussions environnementales; des pouvoirs ministériels accrus en matière de directives; la mise en œuvre d'un régime de certificats et la capacité de les modifier; de même que la fusion des offices régionaux des terres et des eaux.

L'industrie minière appuie le concept général de la fusion des offices régionaux. Toutefois, nous tenons à rappeler à AADNC et au comité qu'une simple réorientation structurelle n'entraîne pas nécessairement un gain d'efficacité.

L'industrie est donc prête à appuyer le concept de la fusion à certaines conditions : l'office fusionné devra assurer une forte présence régionale; le nouvel office devra avoir la capacité financière, technique et administrative nécessaire pour remplir avec succès son mandat élargi; il faudra mettre en place des mécanismes qui garantiront des relations de travail positives entre les promoteurs et les régions; et le président de l'office devra avoir le pouvoir de nommer un représentant de la région qui accueille le projet à l'étude.

Le ministre a fait valoir qu'AADNC tiendrait compte de ces facteurs et qu'une période d'un an était prévue pour la mise en œuvre de ces changements importants, ce qui nous encourage.

L'industrie minière appuie pleinement le projet de loi C-15, mais est d'avis que d'autres réformes seront nécessaires pour atteindre un équilibre entre les intérêts économiques et les intérêts environnementaux et exploiter pleinement le potentiel...

Le président : Excusez-moi. Pourriez-vous parler un peu moins vite? Je vous rappelle que votre exposé est traduit simultanément et qu'il est également transcrit. Vous parlez très vite. Nous vous serions reconnaissants de ralentir le rythme.

Mme Ramin : Bien sûr. Reprenons à la diapositive 17. L'industrie minière appuie pleinement le projet de loi C-15, mais est d'avis que d'autres réformes seront nécessaires pour atteindre un équilibre entre les intérêts économiques et les intérêts environnementaux et exploiter pleinement le potentiel minier des Territoires du Nord-Ouest.

J'examinerai maintenant chacun des problèmes énoncés dans la diapositive.

La pratique visant le renvoi des projets d'exploration primaire à une évaluation environnementale complète après un contrôle préliminaire est propre aux Territoires du Nord-Ouest, qui sont grandement désavantagés lorsqu'ils entrent en concurrence avec d'autres provinces, territoires ou pays pour attirer les investissements dans les activités d'exploration.

Jusqu'à maintenant, l'Office d'examen des répercussions environnementales a réalisé 61 évaluations environnementales. Près de 90 p. 100 des 61 renvois à une évaluation environnementale étaient des projets dans des régions visées par des revendications territoriales non réglées, et près de la moitié visaient uniquement des préoccupations pour le public. Parmi les 26 renvois associés aux préoccupations du public, 24 avaient trait à des programmes d'exploration minière primaire ou avancée, de même qu'à des initiatives de production.

L'industrie minière est d'avis que de nombreuses mesures peuvent garantir que seuls les projets qui nécessitent vraiment une évaluation environnementale sont soumis au processus. Ces mesures permettront d'améliorer les processus de délivrance des permis et de veiller à ce que les dépenses relatives aux ressources humaines et financières soient proportionnelles à l'ampleur des répercussions possibles et au degré de préoccupations du public.

Par conséquent, nous suggérons de modifier l'article 125 de la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie en remplaçant l'expression « préoccupations pour le public » par « préoccupations importantes ».

Nous recommandons également qu'on envisage d'établir des règlements qui définissent clairement les activités devant faire l'objet d'un examen ou d'une évaluation. Des règlements de ce genre existent déjà en vertu d'un certain nombre de régimes canadiens d'évaluation environnementale, dont la Loi sur les évaluations environnementales de la Colombie-Britannique, la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale de 2012 et la Loi sur l'évaluation environnementale et socioéconomique au Yukon.

En dernier lieu, nous recommandons de régler rapidement les revendications territoriales dans les régions du Dehcho et de l'Akaitcho. Le régime d'évaluation environnementale ne peut pas et ne devrait pas être utilisé pour régler tous les problèmes en suspens et toutes les préoccupations qui opposent les Premières Nations de ces régions aux gouvernements fédéral et territoriaux, comme c'est malheureusement souvent le cas en ce moment.

L'industrie est également préoccupée par l'absence de proportionnalité et d'équilibre observée au cours du processus d'examen. Les projets semblent être évalués avec la même rigueur, quelles que soient leur nature, leur durée et l'intensité de leurs répercussions. Ici, nous croyons qu'il y a deux façons possibles de résoudre ce problème.

La première façon consiste à intégrer dans la LGRVM un énoncé encourageant clairement les responsables de réglementation à faire en sorte que les exigences et les délais relatifs aux évaluations soient proportionnels à la nature et à l'intensité des répercussions potentielles d'un projet. De plus, nous recommandons qu'en vertu de ses pouvoirs élargis, le ministre donne des directives qui décrivent les questions à prendre en considération au cours du processus d'évaluation environnementale et qui exigent que la rigueur des évaluations environnementales soit proportionnelle aux répercussions possibles des projets proposés.

Le troisième sujet d'inquiétude que nous aimerions souligner est lié au fait qu'on pourrait mettre quatre ans à approuver ou à rejeter un projet de développement, lorsqu'un examen des répercussions environnementales est nécessaire. Cette longue période d'examen pourrait grandement contribuer à dissuader les entreprises d'entreprendre des activités d'exploration dans les Territoires du Nord-Ouest.

Nous avons examiné les dispositions pertinentes des accords sur les revendications territoriales et l'affaire qui porte directement sur cette question, ce qui nous a permis de conclure que la LGRVM peut être modifiée et devrait l'être pour garantir l'adoption d'une approche plus sensée et efficace, compte tenu en particulier des grandes similitudes qui existent entre les deux processus séquentiels.

Pour accélérer le processus global d'examen dans les situations où il peut être nécessaire de procéder à un examen des répercussions environnementales, nous recommandons de modifier la LGRVM afin d'autoriser l'Office d'examen des répercussions environnementales de la vallée du Mackenzie à ordonner un examen des répercussions environnementales en tout temps durant le processus d'évaluation environnementale.

La nécessité de clarifier l'obligation de consulter les Autochtones et la répartition de cette tâche entre les promoteurs, la Couronne et les offices de la vallée du Mackenzie est au cœur de nos anciens mémoires destinés au gouvernement fédéral. À cet égard, le pouvoir de réglementation proposé est un pas dans la bonne direction.

Toutefois, selon les discussions que nous avons eues avec AADNC en octobre 2013, ces règlements n'entreront probablement pas en vigueur avant qu'au moins deux années se soient écoulées après l'adoption du projet de loi C-15. Par conséquent, tant que les règlements proposés n'entreront pas en vigueur, l'ambiguïté et l'incertitude entourant l'obligation de consulter les Autochtones continueront de décourager les investissements dans l'industrie minérale des Territoires du Nord-Ouest. Nous recommandons que, dans l'intervalle, le ministre publie des directives visant à préciser la division des tâches entre les promoteurs de projets, la Couronne et les offices de la vallée du Mackenzie.

En ce qui concerne les règlements proposés relativement au recouvrement des coûts, le secteur de l'exploration et de l'exploitation minière comprend la nécessité d'appliquer le principe de l'utilisateur-payeur à l'égard des services gouvernementaux. Toutefois, pour éviter que le recouvrement des coûts devienne une barrière de plus aux investissements dans les Territoires du Nord-Ouest, nous recommandons que le gouvernement adopte, dans cette région déjà très coûteuse, une approche de recouvrement des coûts mesurée.

Donc, avant de prendre une décision définitive concernant la mise en œuvre d'un régime de recouvrement des coûts, nous recommandons qu'une analyse minutieuse des coûts et des avantages soit entreprise. Si cette analyse démontre que les effets négatifs l'emportent sur les avantages potentiels, AADNC devrait envisager de ne pas exercer ce pouvoir de réglementation ou, encore, se contenter de recouvrer les coûts des examens des répercussions environnementales. L'Agence canadienne d'évaluation environnementale se livre déjà à cette pratique, en vertu de la LCEE de 2012.

Si une analyse minutieuse démontre que les avantages l'emportent sur les effets négatifs potentiels, nous prions aussi le gouvernement de ne pas tarder à faire participer l'industrie à la conception du régime. À cet égard, le ministre des Affaires autochtones et du Développement du Nord s'est engagé à mener des consultations auprès de l'industrie, consultations dont nous vous sommes reconnaissants et auxquelles nous sommes impatients de participer.

En résumé, le secteur minier est l'industrie du secteur privé qui contribue le plus à l'économie des Territoires du Nord-Ouest. Les investissements dans l'industrie minérale des Territoires du Nord-Ouest reculent progressivement depuis 2001. Pour assurer la durabilité à long terme de cette industrie, il faut rétablir la confiance des investisseurs dans les processus d'évaluation environnementale et d'octroi de permis et de licences. En conséquence, il est essentiel de poursuive la réforme de la réglementation pour stimuler les investissements dans l'exploration minérale qui sont grandement nécessaires.

L'industrie minière appuie la dévolution et est encouragée par les amendements qu'on propose d'apporter à la LGRVM. Toutefois, les amendements proposés ne vont pas assez loin et n'apaisent pas quelques-unes des principales inquiétudes de l'industrie. Nous sollicitons l'appui du comité afin que soient apportés d'autres changements requis pour veiller à ce que l'industrie minière continue de favoriser le développement durable de l'important potentiel minéral des Territoires du Nord-Ouest, et ce, au profit des Canadiens, en général, et des gens du Nord, en particulier.

Merci.

Le président : Eh bien, je vous remercie, madame Ramin et monsieur Hoefer, de vos exposés.

Nous allons maintenant passer aux questions, et je commencerai par le vice-président.

Le sénateur Mitchell : Ces témoignages étaient très intéressants. J'adresse ma première question à M. Stanzell. Vous avez mentionné le rôle crucial que joue l'expression « préoccupations pour le public » et les inquiétudes que vous avez à propos de sa définition — nous avons entendu cette observation à quelques reprises. Je ne suis pas avocat, et j'ignore si vous l'êtes, mais pourriez-vous nous donner une idée de ce que pense votre organisation à propos de la façon dont vous définiriez l'expression « préoccupations pour le public » — des critères qui s'appliquent? Des progrès ont-ils été réalisés à cet égard, où que ce soit?

M. Stanzell : Sénateur, nous pourrions vous trouver des exemples de travail préliminaire, exécuté dans le cadre d'un projet, qui a été ralenti ou entravé par des formalités inutiles. Si une entreprise d'exploitation des ressources, qui cherche à investir dans notre territoire, a l'impression que le processus est plus long que les travaux préliminaires qu'elle doit mener dans le cadre du projet, elle ira chercher ailleurs.

L'investissement dans des projets de mise en valeur des ressources est compétitif. S'il est plus facile de travailler ailleurs ou si le processus est plus clair et certain à un autre endroit, l'argent ira à cet autre endroit; c'est là que l'argent sera investi.

Le sénateur Mitchell : Ma prochaine question s'adresse à la représentante de l'Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs. Mes propos vont vous sembler plus combatifs que je ne le souhaite, mais on pourrait faire valoir que votre position à propos du processus et des changements à y apporter est en quelque sorte contradictoire. D'une part, il est clair que vos membres dirigent avec succès quatre exploitations là-bas et ont franchi les diverses étapes du processus. Par conséquent, on pourrait soutenir que le processus n'a pas entravé leurs activités. Quelle expérience acquise au cours du déroulement de ces projets miniers vous a amené à conclure que nous devons apporter les changements qui sont envisagés relativement à l'octroi de pouvoirs supplémentaires au ministre ou au recours à un superoffice plutôt qu'à des offices régionaux?

J'aimerais dire que j'étais au courant de votre argument à propos de la nécessité d'avoir peut-être, au minimum, des offices sous-régionaux.

Mme Ramin : Mon expérience dans les Territoires du Nord-Ouest est un peu limitée, mais, en dépit des projets déjà en cours, nous ignorons combien d'autres ne se sont pas concrétisés. Nous ne pouvons que constater la situation actuelle et la présence des quatre mines.

Ce que nous savons et ce que nous ont dit nos membres industriels ainsi que les membres de la Chambre des mines, c'est qu'en ce moment, bon nombre d'entreprises abandonnent l'idée de s'établir dans les Territoires du Nord-Ouest en raison de la complexité et de l'inefficacité du régime de réglementation, ainsi que des coûts élevés que son respect occasionne.

Par conséquent, même si nous comprenons et constatons que quatre mines existent là-bas et que, dans le passé, les étapes du processus de réglementation ont été franchies, nous ne savons pas vraiment combien d'entreprises supplémentaires auraient pu les franchir et combien de mines supplémentaires auraient pu être établies.

M. Hoefer et peut-être aussi M. Hardin ont beaucoup plus d'expérience que moi dans cette région, et ils sont en mesure de parler des mines déjà établies. Cependant, je crois également que le régime de réglementation a évolué; il était très différent à l'origine, soit dans les années 1970 et 1980. Je pense que M. Hardin peut en parler.

M. Hoefer : Je parlerai brièvement en premier. Sachez que, pour établir la mine Ekati Mine, les lignes directrices de l'ancien Processus d'évaluation et d'examen en matière d'environnement ont été suivies, ou peut-être les lignes directrices du BFEEE. Ces lignes directrices sont antérieures à la LGRVM et à tous les autres processus. Les étapes du processus de l'ACEE ont été franchies.

Le projet Gahcho Kué est le seul à avoir franchi les étapes du processus de la LGRVM. Comme Mme Ramin l'a mentionné, ce projet est l'un de ceux qui ont débuté en 2006, et il a abouti à un procès qui tentait de préciser les processus d'EE et d'ERE. Le projet a donc commencé à exposer quelques-unes des difficultés liées à la LGRVM.

Il se peut que M. Hardin souhaite ajouter quelque chose à cela.

Mike Hardin, conseiller juridique, Chambre des mines du Nunavut et des Territoires du Nord-Ouest : Je n'ai pas grand- chose à ajouter à ce que M. Hoefer et Mme Ramin ont dit, si ce n'est que j'aimerais signaler que, comme M. Hoefer l'a fait ressortir, au moins deux projets en cours, qui ont apporté aux Territoires du Nord-Ouest des avantages économiques considérables, ont en fait été réglementés et approuvés en vertu de régimes antérieurs : le Décret sur les lignes directrices visant le processus d'évaluation et d'examen en matière d'environnement dans le cas de la mine Ekati et une étude détaillée prévue par la LCEE dans le cas de la mine Diavik.

En essayant de faire la distinction entre les projets qui sont peut-être en cours en ce moment et ceux qui ont été exécutés dans le passé, on compare des pommes et des oranges.

La sénatrice Frum : Vous avez indiqué clairement que la chambre de commerce appuyait la notion d'office unique, et vous avez reconnu qu'un point de désaccord existait. Pour éclairer les gens qui pensent que l'élimination des offices régionaux est problématique, j'aimerais savoir si, dans sa forme actuelle, le projet de loi C-15 contient des dispositions qui, selon vous, pourraient apaiser leurs préoccupations, telles que vous les concevez.

M. Stanzell : Il est toujours difficile d'enlever quelque chose à quelqu'un. Cela peut susciter beaucoup d'émotions chez les gens. Alors, il est essentiel de retirer un peu cette charge émotive et d'examiner la question objectivement.

Les régions peuvent être représentées au sein de l'office. Nous pensons que cette nouvelle est positive — tout à fait positive. L'aspect régional devrait être maintenu, et il peut l'être.

Nous recommandons également que l'office soit présent dans les régions — grâce à l'établissement de bureaux où les demandeurs peuvent soumettre leurs demandes et appliquer le processus que l'office doit faire respecter.

Si d'autres suggestions sont faites pour maintenir un certain aspect régional sans compromettre ou améliorer le processus, nous les prendrons certainement en considération, sénateur.

La sénatrice Frum : Vous faites valoir qu'un office unique sera plus efficace et disposera d'une plus grande capacité. Par conséquent, pouvez-vous citer des exemples de situations réelles — ou penser à n'importe quels scénarios — dans lesquels les offices locaux ont été incapables de traiter les demandes présentées?

M. Stanzell : Selon moi, la question n'est pas liée à leur incapacité de gérer les situations? Je pense qu'elle est liée au fait d'avoir un processus clairement défini que l'industrie et les résidents du Nord peuvent comprendre. Ainsi, ils pourront s'attendre à connaître la durée d'une étape quelconque et à comprendre en quoi consiste le processus.

À mon avis, notre gouvernement a effectivement peu d'options pour accroître ses revenus. Les pressions exercées sur le gouvernement sont innombrables. Par conséquent, le gouvernement territorial s'attend probablement à ce qu'un plus grand nombre de projets de développement soient entrepris dans le Nord.

Le système de réglementation dont nous disposons doit être actualisé et capable de suivre l'évolution politique qui découle du transfert des responsabilités, parce que la situation suscitera davantage d'intérêt. Il nous semble logique qu'un organisme unique soit plus efficace et dispose d'une plus grande capacité.

La sénatrice Seidman : Madame Ramin, au cours de votre exposé, vous avez mentionné les règlements concernant l'obligation de consulter les Autochtones et, bien entendu, le projet de loi C-15 prévoit maintenant une obligation législative de consulter les Autochtones. Toutefois, comme vous l'avez indiqué, cette obligation n'entrera pas en vigueur avant deux ans ou plus et, par conséquent, les responsabilités de la Couronne, de l'office et des promoteurs de projets à cet égard semblent jeter un peu la confusion ou manquer de clarté.

Ce problème a également été soulevé par le président-directeur général de l'Association minière du Canada dans un mémoire écrit.

Pourriez-vous nous expliquer exactement ce qui cause la confusion et le manque de clarté, et comment nous pourrions contribuer à préciser les responsabilités de chaque groupe concerné?

Mme Ramin : Bien sûr. Selon mon expérience — et M. Hoefer ajoutera peut-être quelques renseignements — le manque de clarté est lié aux attentes des promoteurs, au rôle qu'ils jouent et aux aspects de l'obligation de consulter les Autochtones que la Couronne délègue aux promoteurs, le cas échéant. Donc, ils veulent simplement comprendre ce qu'ils doivent faire dans le cadre du processus d'examen réglementaire et la façon dont cela est lié à l'ensemble du processus de consultation de la Couronne. En fin de compte, si les choses ne sont pas claires, si les gens ne comprennent pas bien leurs rôles et leurs responsabilités et si les Premières Nations ou les Autochtones des Territoires du Nord- Ouest ont l'impression que la Couronne ne s'est pas acquittée de son obligation de les consulter, le projet se retrouvera au milieu du champ de bataille.

Il est important que les rôles et les responsabilités soient clairement définis. Je dirais que c'est probablement l'aspect le plus important.

Il existe des exemples de directives que des provinces ou des territoires ont rédigées à l'intention des promoteurs et qui présentent ces renseignements. La Saskatchewan a récemment publié des lignes directrices à l'intention des promoteurs qui expliquent les aspects de l'ensemble du processus de consultation de la Couronne dont les promoteurs sont responsables. Donc, je pense qu'on retrouve des exemples partout au Canada que les Territoires du Nord-Ouest et le gouvernement pourraient consulter pour rendre plus clairs ces rôles et ces responsabilités.

M. Hoefer : Puis-je ajouter quelque chose?

La sénatrice Seidman : Je vous en serais reconnaissante.

M. Hoefer : Je pense que l'un des aspects dont nous pourrions parler est la variabilité dimensionnelle. Si vous mettez en œuvre un petit projet, combien d'activités de consultation des Autochtones devrez-vous organiser, comparativement à un projet beaucoup plus important?

Cet aspect a en fait été contesté par les Premières Nations de l'Akaitcho dans l'affaire North Arrow. Donc, un très petit projet composé de cinq trous de forage — ce qui est très petit selon les normes de notre industrie — a été contesté pour un motif de consultation insuffisante des Autochtones. Dans cette affaire, le groupe autochtone a eu gain de cause, et le promoteur est parti.

Après avoir déterminé ce qui, selon eux, constituait une consultation suffisante, les membres du même groupe ont demandé aux entreprises de signer des ententes d'exploration et, dans le cadre de ces ententes, ils ont déclaré que les entreprises devaient rencontrer les membres de leurs collectivités, et que chacune de ces réunions coûterait 25 000 $. Donc, un promoteur, qui désirait exécuter un petit projet de l'ordre d'un peu plus de 100 000 $ peut-être, leur a dit que leur attente était un peu irréaliste, compte tenu du fait qu'ils exigeaient une part importante de son budget pour organiser une seule réunion.

Donc, où peut-on obtenir ces directives, et quelles mesures suffisent? En l'absence de telles directives, certaines entreprises déclarent qu'il est simplement trop difficile, compliqué et incertain d'exercer leurs activités dans les Territoires du Nord-Ouest, et elles établissent leurs opérations ailleurs.

La sénatrice Seidman : Pourriez-vous me donner un exemple concret de la façon dont on pourrait préciser les responsabilités de la Couronne, de l'office et des promoteurs de projets, ce qui est à peu près ce que vous suggérez en ce moment? Comment pourrait-on clarifier cela concrètement?

M. Hoefer : Selon certains, l'État pourrait assumer la responsabilité de la consultation de l'État et organiser les réunions. Pour le moment, c'est l'industrie qui doit s'en charger. D'ailleurs, il revient à l'industrie de décider quels groupes consulter. Malgré le fait qu'il y ait eu des recommandations à cet égard, ce n'est toujours pas clair. C'est une approche très dispersée.

Mme Hardin : Une des choses qui sèment la confusion, c'est la différence qui existe entre ce que l'on appelle « l'engagement communautaire », soit un processus quasi volontaire que doivent respecter les promoteurs de projets, et « la consultation de l'État », qui est, comme nous le savons tous, une exigence constitutionnelle que doit respecter l'État, sous réserve de certains pouvoirs de délégation limités.

Malheureusement, depuis la décision rendue par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Haida il y a 10 ans, en toute déférence, aucune précision n'a été apportée quant au pouvoir dont dispose l'État pour déléguer les éléments soi- disant procéduraux, quels qu'ils soient. Donc, les promoteurs de projets amorcent le processus en ayant l'impression erronée que les activités d'engagement communautaire qu'ils entreprennent, comme l'exige, notamment, l'Office des terres et des eaux de la vallée du Mackenzie, correspondent à de la consultation. Il n'est donc pas surprenant que les organisations et gouvernements autochtones s'empressent de souligner que, dans de nombreux cas, l'engagement communautaire ne respecte pas l'obligation de l'État de consulter.

De façon générale, les aspects réglementaires relatifs à la consultation manquent de clarté, de certitude et de détail. C'est un problème que l'industrie prend très au sérieux, car l'absence de consultation a déjà causé de la dissension et du mécontentement et entraîné des litiges. Selon moi, il est absolument nécessaire de regarder l'ensemble de la situation, d'assurer une plus grande certitude et de préciser les diverses étapes que doivent respecter les parties concernées.

Peut-être que, parfois, l'État ne laisse pas les promoteurs de projets assumer autant de leadership qu'ils ne le voudraient.

Le sénateur Patterson : Je tiens à souhaiter la bienvenue aux témoins et à les remercier pour leur participation à ce long processus de consultation sur ce projet de loi qui ne plaît pas à tout le monde.

Certains ont critiqué le projet de loi, notamment les gouvernements autochtones, exprimant le sentiment que si tout fonctionne bien, pourquoi changer les choses. Vous avez clairement indiqué dans vos exposés qu'en analysant les dépenses liées à l'exploitation dans les Territoires du Nord-Ouest par rapport à la production impressionnante actuelle, comme vous l'avez souligné, certains craignent que ces gros projets ne soient pas remplacés.

Comme vous l'avez dit, et je cite ici la Chambre des mines et l'Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs, l'ACPE, les risques dans les Territoires du Nord-Ouest découlent d'un environnement réglementaire complexe, incertain et inefficace.

La Chambre des mines a souligné que les questions réglementaires contribuent au faible potentiel de la mise en valeur des ressources.

Vous avez donné des exemples précis de délais, notamment, le projet Gahcho Kué et le renouvellement des permis d'utilisation des eaux de la N.W.T. Power Corporation. Les représentants de Terre-Neuve ont expliqué clairement les réelles préoccupations que soulève ce projet de loi. Selon vous, s'il était adopté, le projet de loi C-15 donnerait-il confiance aux investisseurs d'investir dans l'exploitation et le développement des ressources, notamment dans les Territoires du Nord-Ouest? J'aimerais entendre les représentants de la Chambre des mines et de l'ACPE à ce sujet.

M. Hoefer : Je crois que le projet de loi C-15 aura un impact positif à ce chapitre. Par exemple, il y a longtemps qu'un calendrier aurait dû être adopté. Cela aura un impact positif. Il nous permettra d'être sur un même pied d'égalité que le Nunavut et d'autres territoires, et de suivre la LEESY.

Comme nous l'avons souligné dans notre exposé, le fait que le ministre ait le pouvoir d'orienter la politique fera une différence. Est-ce que cela permettra de résoudre tous les problèmes? Non. Nous l'avons déjà dit, il reste encore du travail à faire. Il existe des solutions simples que vous pouvez faire adopter à la Chambre, dans la mesure du possible. M. Hardin pourra vous en dire davantage à ce sujet. Selon nous, il faudra poursuivre les efforts avec les gouvernements autochtones et le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest afin d'améliorer la loi.

Mme Ramin : Je suis d'accord avec M. Hoefer. Toutefois, à notre avis, un des problèmes les plus importants à régler, c'est celui des soumissions injustifiées d'EE et le manque de proportionnalité du processus d'EE. Comme je l'ai souligné, il existe plusieurs régimes d'évaluation environnementale au pays, y compris la LEESY, qui contiennent des dispositions pour la création de règlements décrivant quelles activités doivent faire l'objet d'un examen et d'une évaluation. Elles fournissent des paramètres et la portée du processus d'EE que nous pouvons incorporer au régime des Territoires du Nord-Ouest en étant pleinement conscients que le Nord et le Sud sont très différents. Je ne parlerai pas de la LCEE et de la BCAA, mais plutôt de l'OEESY, puisqu'il a déjà subi le transfert des responsabilités et qu'il a été créé à la suite d'ententes sur des revendications territoriales. Je crois que l'on peut s'en servir comme modèle pour éliminer les éléments dissuasifs les plus importants à l'investissement.

Le sénateur Patterson : Nous savons que les règlements relatifs à ce projet de loi devront être rédigés. Je sais que vous avez collaboré étroitement avec le ministère à ce chapitre et que vous avez même correspondu avec le ministre.

Selon vous, serez-vous consultés pour la rédaction de ces règlements? Aurez-vous l'occasion de faire valoir votre point de vue sur l'orientation politique proposée par le ministre? Êtes-vous persuadés que vous allez participer aux discussions en vue de l'examen quinquennal?

M. Hoefer : Nous avons eu une réponse très détaillée du ministre, et lui en sommes reconnaissants. Dans sa réponse, il nous assure que nous pourrons participer à l'établissement des règlements, tant en ce qui a trait au recouvrement de coûts qu'à la consultation autochtone, mais, si je ne m'abuse, il n'y a eu aucune discussion sur l'orientation politique. J'ignore comment ce processus se déroulera.

Le sénateur MacDonald : Monsieur Hoefer, dans votre exposé, vous avez dit être satisfait des améliorations proposées dans ce projet de loi. Toutefois, vous n'avez pas obtenu tout ce que vous vouliez. J'aimerais que vous nous parliez un peu plus de vos attentes et des choses qui ont été omises du projet de loi et qui, selon vous, auraient un impact positif considérable.

M. Hoefer : Nous tentons depuis de nombreuses années d'améliorer la LGRVM. Vous avez peut-être pris connaissance, plus récemment, de nos efforts à ce chapitre, en commençant par l'étude McCrank réalisée en 2007. À chaque occasion, nous avons demandé à ce que des précisions soient apportées au sujet de la consultation autochtone.

Par exemple, nous espérions obtenir ces précisions dans le projet de loi, mais nous apprenons maintenant qu'il faudra attendre le règlement. Nous participerons à ce processus, mais ce n'est pas ce que nous voulions.

Le sénateur MacDonald : En ce qui concerne les choses qui ont été omises, quel sera l'impact du manque de précision concernant la consultation autochtone sur vos négociations et vos calendriers?

M. Hoefer : Je crois que la consultation autochtone est un des éléments les plus essentiels à l'approbation d'un projet dans les Territoires du Nord-Ouest.

Monsieur Hardin, auriez-vous quelque chose à ajouter?

M. Hardin : Je suis d'accord avec vous. Selon moi, le problème global demeure les soumissions injustifiées d'évaluations environnementales. Le secteur de l'exploitation minière a l'impression, comme nous l'avons souligné plusieurs fois aujourd'hui, que les petits projets de base font régulièrement l'objet d'évaluation environnementale sous prétexte qu'ils soulèvent des préoccupations. Même s'il n'en est pas question dans le mémoire que nous avons remis au comité et au comité permanent de la Chambre, nous avons beaucoup réfléchi à la façon de modifier l'article 125 de la LGRVM afin de disposer d'une approche plus rigoureuse, disciplinée et uniforme pour définir ce qui constitue une préoccupation pour le public.

Nous comprenons à quel point ce facteur est important au moment de déterminer si une EE doit être effectuée, mais selon le libellé actuel de la loi, toute préoccupation du public est suffisante pour justifier une soumission d'évaluation environnementale, peu importe la validité de la préoccupation, le nombre de personnes concernées, qui a émis la préoccupation ou le sujet de celle-ci.

Le fait d'ajouter au moins le mot « significative » à l'expression « préoccupation du public » ferait toute une différence, en plus de rendre le libellé analogue à ce que l'on retrouve à l'article 125 au sujet de l'impact environnemental.

Nous avons également proposé d'autres amendements à l'article 125 dans nos différents mémoires, dans le rapport McCrank publié le 28 février 2008, dans une lettre adressée au ministre en mai 2012 et dans les mémoires présentés par les trois associations au ministère des Affaires autochtones et du Développement du Nord Canada en octobre 2013.

Le ministère n'est pas d'accord avec nos propositions d'amendements, mais, jusqu'à présent, il n'a offert aucune alternative. À mon avis, il s'agit probablement de l'élément le plus important pour corriger la situation dans les Territoires du Nord-Ouest, soit l'adoption d'une approche plus logique et normale au genre de projets qui font l'objet d'une évaluation environnementale.

Le sénateur MacDonald : J'aurais une autre question à poser, monsieur le président. Je n'ai pu m'empêcher de remarquer dans les mémoires qui nous ont été remis que les quatre organisations représentées aujourd'hui appuient, de façon générale, le transfert des responsabilités et l'amélioration de la réglementation, sauf l'Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs qui elle demeure neutre sur la question du transfert des responsabilités, tout comme l'Association canadienne des producteurs pétroliers.

Je me demande simplement s'il y a une raison pour cela. Est-ce parce que vous n'avez pas de position éclairée sur le sujet ou parce que vous préférez ne pas en parler?

Mme Ramin : Je crois qu'il y a une erreur dans le mémoire. Nous avons déjà témoigné notre soutien au transfert des responsabilités. Je l'ai dit, d'ailleurs, dans la deuxième partie de mon exposé. Nous appuyons totalement le transfert des responsabilités et le contrôle que cela procure au territoire sur les décisions relatives à la gestion des terres et des ressources et la façon de réagir aux préoccupations de l'industrie. Donc, oui, l'Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs ainsi que les membres qu'elle représente appuient totalement le processus de transfert des responsabilités.

Le sénateur MacDonald : Merci de ces précisions.

Le sénateur Sibbeston : Selon le témoin, 90 p. 100 des examens effectués ou demandés découlent de deux revendications non réglées dans les régions de Dehcho et d'Akaitcho et dans une région métisse dans le sud des Territoires du Nord-Ouest.

Cela démontre, dans une certaine mesure, les bienfaits des ententes sur les revendications territoriales conclues dans les Territoires du Nord-Ouest. Depuis 1984, nous avons réglé des revendications avec les Inuvialuit, les Gwich'in, les Sahtu et, plus récemment, il y a quelques années, avec les Tlichos. Toutefois, en vertu de ces ententes, les Autochtones des régions concernées ont maintenant un contrôle sur leurs terres et leurs ressources, elles ont reçu des fonds et disposent d'offices pour contrôler le développement.

Donc, dans ces régions où des revendications ont été réglées au cours des 10 dernières années, environ, les Autochtones ont le contrôle sur leur vie et le développement de leur région, notamment. Ce fut très positif pour le Nord. J'imagine que dans ces régions, les offices font du très bon travail et l'industrie entretient de bonnes relations avec les Autochtones. J'aimerais vous entendre sur le sujet, car il y a deux semaines, lorsque le comité de la Chambre s'est rendu à Yellowknife, des groupes autochtones lui ont témoigné toute leur indignation. Ils ont dit : « Nous avons donné notre appui à l'entente sur le transfert des responsabilités, mais nous sommes surpris d'apprendre que le gouvernement y a lié une disposition réglementaire. » Ils sont plutôt mécontents.

Est-ce que ce sera difficile de travailler avec les Autochtones qui s'opposent vraiment à ces examens et à ces changements, de créer des superoffices et de faire disparaître les bureaux auxquels ils sont habitués?

M. Hoefer : Je crois que notre position illustre un peu les propos du sénateur Sibbeston, en ce sens que... Nous comprenons l'attrait d'avoir un seul office pour tout le Nord, plutôt que plusieurs offices et plusieurs processus.

Comme le souligne le sénateur, il y a eu une bonne collaboration entre nos membres et les offices, notamment l'Office des terres et des eaux des Wekeezhii. C'est là qu'il y a le plus d'activité minière. Ils nous ont dit craindre les conséquences imprévues de cette fusion des offices. Par exemple, si les collectivités perdent le lien de confiance qu'elles ont établi avec leur office actuel, cette capacité, l'industrie se retrouvera coincée entre l'arbre et l'écorce.

Nous appuyons l'idée d'un seul office, mais il faut maintenir ce lien de confiance qu'ont les collectivités et leur permettre de conserver leur capacité.

M. Stanzell : Comme vous le savez, sénateur, dans ce genre de situation, il est essentiel d'avoir un lien de confiance. Il incombe à tous les intervenants de rétablir un lien de confiance.

Certains groupes contesteront ces changements devant les tribunaux. Nous le savons. J'ignore comment y arriver, mais il faut absolument établir un lien de confiance. Encore une fois, la chambre de commerce est composée de membres. Nous n'essayons pas de mettre au point des tactiques ou quelque chose du genre. De façon générale, nous croyons que le projet de loi C-15 constitue un important pas en avant pour les Territoires du Nord-Ouest. Selon le sondage effectué par l'Institut Fraser auprès des sociétés minières et des sociétés pétrolière et gazière, ces sociétés appréhendent d'investir dans les territoires. Elles se sentent davantage en sécurité d'investir au Yukon et au Nunavut ou même dans des pays non démocratiques. Il est important d'en tenir compte.

Le sénateur Sibbeston : C'est un processus évolutif. En 1921, Esso s'est installé dans la région de Norman Wells, dans les Territoires du Nord-Ouest, pour y faire de l'exploitation pétrolière et gazière. Cette société n'a jamais rien redonné aux Autochtones, n'a jamais embauché d'Autochtones, ni même encouragé les entreprises autochtones. Avant la création des offices et la conclusion d'ententes sur des revendications territoriales, c'était désastreux pour les Autochtones.

Par exemple, dans notre région, le Dehcho, il a fallu attendre sept ou huit ans après qu'une société minière, Canadian Zinc, se soit installée chez nous... Il a fallu attendre tout ce temps.

Monsieur le président, je suis un sénateur des Territoires du Nord-Ouest et il est important pour moi de dire ceci, si vous me le permettez.

Il a fallu attendre toutes ces années avant que les gens de la région acceptent qu'une société minière se soit installée dans la région. Au début, toutes les collectivités s'opposaient au projet de Canadian Zinc. Mais, la société a offert des emplois aux gens de la région et créé des possibilités commerciales et, avec le temps, les gens ont changé d'opinion à un point tel que la plupart des collectivités de Dehcho appuient cette mine, mais il a fallu du temps pour cela. C'est un processus évolutif.

Lorsque les Autochtones ont le sentiment d'avoir les ressources nécessaires pour participer et que leurs préoccupations sont prises en compte, ils ont alors confiance au projet et veulent y contribuer.

C'est le processus. Êtes-vous d'accord? Est-ce que vous comprenez ce processus? Selon vous, l'avenir semble-t-il prometteur pour le secteur minier dans le Nord?

M. Stanzell : Je crois qu'en général, le milieu des affaires des Territoires du Nord-Ouest est optimiste. Nous avons parlé, et un autre groupe d'experts a discuté des obligations constitutionnelles de consultation. Il y a aussi l'autre côté, celui du permis social. Les deux facettes sont essentielles à la santé générale des relations et au progrès global des économies.

Nous devons être optimistes. Nous ne pouvons nous empêcher de l'être, sénateurs.

Mme Ramin : Brièvement, il y a un point que le sénateur a soulevé. Même s'il ne concerne pas directement le projet de loi C-15, il influera sur sa mise en œuvre.

Il a notamment fait remarquer le manque de règlements de revendications territoriales dans le sud des Territoires du Nord-Ouest. C'est une distinction importante à faire, car je crois que cet état de fait permet aux communautés autochtones des régions du Sud d'avoir le sentiment de pouvoir s'exprimer et participer au processus de prise de décisions. Je crois que c'est en partie parce que les Autochtones n'ont pas l'impression de disposer d'un autre moyen de participer au processus global de mise en valeur qu'il y a tant de projets qui font l'objet d'une évaluation environnementale.

En comparaison, par exemple, 11 des 14 Premières Nations ont réglé leurs revendications territoriales du Yukon, alors qu'au Nunavut, une seule revendication territoriale a été réglée dans tout le territoire. Ces règlements simplifient considérablement le régime de réglementation et permettent de résoudre un grand nombre de problèmes que le projet de loi C-15 ne règle pas, selon moi, en ce qui concerne la LGRVM. Une fois que ces revendications territoriales seront réglées, l'application de la LGRVM sera grandement améliorée, et permettra d'aller de l'avant et d'établir et de conserver la confiance, puisque les communautés des Premières Nations et des Métis dans le sud du territoire sentiront qu'elles ont le pouvoir de participer au processus.

Le président : Merci beaucoup. Le dernier à intervenir sera le sénateur Wallace.

Le sénateur Wallace : Madame Ramin, je me sens vraiment concerné par certains des renseignements que vous nous avez donnés, ainsi que par d'autres points dont on a discuté et des questions qui ont été posées.

En page 12 de votre diaporama figure le pourcentage des dépenses totales en exploration minière dans les Territoires du Nord-Ouest depuis 15 ans. Si je lis bien les renseignements fournis, ces chiffres semblent plutôt alarmants.

Il y a 15 ans, environ 24 p. 100 de l'exploration minière au Canada s'effectuaient dans les Territoires du Nord-Ouest, alors qu'en 2013, ce sont 5 p. 100. Depuis 1998, on assiste principalement à un déclin. C'est, à l'évidence, un sujet de préoccupation pour l'industrie minière. D'un point de vue plus personnel, cette situation inquiète certainement les employés de cette industrie.

Vous avez également indiqué dans votre exposé que l'industrie minière est le principal employeur d'Autochtones dans les territoires et que 50 p. 100 du total des heures-personnes étaient accomplies par des Autochtones.

Ce qui me frappe quand je regarde ces deux énoncés ensemble, c'est que quelque chose va dans la mauvaise direction ici. Je suis convaincu, comme on l'a fait remarquer aujourd'hui, qu'il y a plus d'une raison pour expliquer cette situation, mais dans la mesure où le processus réglementaire actuel décourage l'investissement dans le Nord et dans la mesure où on peut l'améliorer — et nous admettons tous qu'il peut l'être —, craint-on qu'avec la tendance qui se dessine actuellement, à moins qu'il ne se passe quelque chose de nouveau ou qu'un changement ne survienne et apporte ce qu'il faut pour stimuler l'investissement maintenant et dans l'avenir, quand les projets seront en cours, cette situation aura des effets négatifs disproportionnés sur les Autochtones, c'est-à-dire ceux qui sont le moins capables de trouver d'autres occasions?

Je me demande si vous pouvez répondre à cette question. Quelle est la situation des Autochtones et pourquoi cela est-il si important pour eux?

Mme Ramin : Volontiers. En ce qui concerne les investissements totaux effectués en prospection et le déclin constant, je dirais que c'est en fait un problème de compétitivité générale. Toutes les activités dont le Yukon et le Nunavut ont été le théâtre, par exemple, ont eu pour effet de ponctionner de l'argent des Territoires du Nord-Ouest. J'ai évoqué précédemment le règlement des revendications territoriales, qui joue évidemment un rôle important pour assurer la certitude et la prévisibilité, et pour améliorer le régime de réglementation afin de le simplifier et de permettre aux Premières Nations de participer au processus de développement. Bien d'autres choses se sont produites au Yukon et au Nunavut. Le Yukon s'est vu transférer des pouvoirs, une initiative que nous appuyons et que nous considérons comme une bonne idée. Elle permettra d'accroître les occasions d'accroître et de développer le potentiel minéral des Territoires du Nord-Ouest.

Je réitérerais simplement notre message collectif : du point de vue de l'industrie minière, la prospection minière constitue une composante très importante du cycle de développement minier. Ainsi, toute mesure pouvant accroître la certitude, la prévisibilité et l'efficacité de l'industrie sera la bienvenue.

De façon générale, nous appuyons le projet de loi C-15 et le transfert des pouvoirs. Nous considérons qu'un certain nombre de points doivent être peaufinés, et nous sommes heureux de collaborer avec AADNC et n'importe qui d'autre pour y parvenir. Mais je crois plus que tout que nous devons nous assurer de régler les questions comme les renvois injustifiés vers une évaluation environnementale et le manque de proportionnalité, et permettre aux Territoires du Nord-Ouest de jouir d'une situation et d'un régime semblables à ceux du Yukon et du Nunavut. Les trois territoires recèlent un potentiel géologique très semblable; il n'y a donc aucune raison pour que les Territoires du Nord-Ouest ne reçoivent pas plus d'investissements. C'est en réglant certaines des questions dont nous avons discuté aujourd'hui que nous y parviendrons.

Cela permettra évidemment le développement d'un plus grand nombre de mines. Ainsi, plus il y a de projets de prospection, malgré leurs chances de réussite, plus nous aurons de possibilités de développer des mines et d'offrir des occasions aux habitants du Nord et aux communautés autochtones.

Le sénateur Wallace : Tout cela ne signifie-t-il pas que quelque chose doit changer? Avec la tendance actuelle au chapitre de la prospection qui s'effectue ou non dans le Nord, quelque chose doit changer. Si rien de change, outre l'industrie minière qui sera directement touchée, ce sont les Autochtones qui dépendent de ces emplois qui pourraient subir les plus graves effets négatifs, n'est-ce pas?

Mme Ramin : Oui, c'est tout à fait exact. Quelque chose doit changer, et je crois que ce projet de loi constitue un premier pas dans cette direction. Le transfert des responsabilités contribuera, selon moi, à faire avancer les choses. Certaines des modifications qu'on propose d'apporter à la LGRVM aideront à améliorer la situation. Espérons qu'en réglant un plus grand nombre de préoccupations de l'industrie et les revendications territoriales dans le sud des Territoires du Nord-Ouest, on facilitera les choses.

Il y a des lacunes, et je crois que les gouvernements du Canada et des Territoires du Nord-Ouest ont un rôle à jouer. Par exemple, le gouvernement territorial collabore avec la Chambre des mines et a publié récemment la stratégie de développement des mines des Territoires du Nord-Ouest. Les choses évoluent dans la bonne direction; nous devons simplement nous montrer vigilants pour veiller à ce qu'elles continuent d'aller dans ce sens et travailler tous ensemble pour le bien des habitants du Nord.

Le sénateur Wallace : Merci.

Le président : Merci, madame Ramin, monsieur Stanzell, monsieur Hoefer et monsieur Hardin, de vos exposés. Les réponses que vous avez données à nos questions nous sont d'un grand secours. Je vous souhaite une bonne soirée.

(La séance est levée.)


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