Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles
Fascicule 15 - Témoignages du 23 septembre 2014
OTTAWA, le mardi 23 septembre 2014
Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd'hui, à 16 h 58, pour étudier le projet de loi S-6, Loi modifiant la Loi sur l'évaluation environnementale et socioéconomique au Yukon et la Loi sur les eaux du Nunavut et le Tribunal des droits de surface du Nunavut.
Le sénateur Richard Neufeld (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles. Je m'appelle Richard Neufeld et je suis sénateur de la Colombie-Britannique. Je suis également président du comité.
J'aimerais souhaiter la bienvenue aux honorables sénateurs, aux membres du public qui sont présents aujourd'hui et à ceux qui nous regardent partout au pays.
J'aimerais rappeler à ceux qui nous regardent que les réunions du comité sont ouvertes au public et diffusées sur le Web à l'adresse sen.parl.gc.ca. Vous pourrez également trouver des renseignements sur l'horaire de comparution des témoins sur le site web sous la rubrique « Comités du Sénat ».
Je vais maintenant demander aux sénateurs de se présenter. Tout d'abord, nous avons un nouveau vice-président, le sénateur Paul Massicotte. La semaine dernière, nous avons dit au revoir au sénateur Mitchell, notre dernier vice- président.
En fait, vous n'étiez pas ici. Nous vous avons élu en votre absence; tous les membres ont voté et ont jugé que vous feriez un bon vice-président. Vous êtes donc maintenant le vice-président et nous vous prions, monsieur, d'accepter ces quelques responsabilités.
Sans plus tarder, voici le vice-président, le sénateur Paul Massicotte, du Québec.
Le sénateur Wallace : John Wallace, du Nouveau-Brunswick.
Le sénateur Black : Doug Black, de l'Alberta.
Le sénateur Boisvenu : Sénateur Pierre-Hugues Boisvenu, également du Québec.
La sénatrice Seidman : Judith Seidman, de Montréal, au Québec.
Le sénateur Patterson : Dennis Patterson, du Nunavut.
Le sénateur Lang : Dan Lang, du Yukon.
Le sénateur Mitchell : Grant Mitchell, de l'Alberta.
Le président : Je vais également présenter notre personnel. Tout d'abord, à gauche, notre greffière, Lynn Gordon, et notre analyste de la Bibliothèque du Parlement, Sam Banks.
Le 17 juin 2014, le Sénat a autorisé notre comité à étudier le projet de loi S-6, Loi modifiant la Loi sur l'évaluation environnementale et socioéconomique au Yukon et la Loi sur les eaux du Nunavut et le Tribunal des droits de surface du Nunavut.
Honorables sénateurs, le projet de loi, dont le titre abrégé est « Loi sur l'amélioration de la réglementation au Yukon et au Nunavut », a été présenté au Sénat et lu pour la première fois le 3 juin 2014.
La greffière a fait parvenir à votre bureau un exemplaire du projet de loi ainsi que du cartable d'analyse article par article produit par Affaires autochtones et Développement du Nord Canada. Si vous n'avez pas ces documents en main ou si vous avez besoin de quelque chose, veuillez le signaler à la greffière.
Jeudi dernier, nous avons entendu l'honorable Bernard Valcourt, ministre d'Affaires autochtones et Développement du Nord Canada, et ses fonctionnaires.
Je suis heureux d'accueillir aujourd'hui, pour la première partie de la réunion, le premier ministre du Yukon, Darrell Pasloski, et Julie Stinson, gestionnaire des processus d'évaluation du développement.
Monsieur le premier ministre, nous savons que vous êtes très occupé, et nous vous remercions donc de prendre le temps d'être avec nous aujourd'hui. Nous avons hâte d'entendre votre exposé, et nous vous poserons ensuite quelques questions. Vous avez la parole, monsieur.
L'honorable Darrell Pasloski, premier ministre du Yukon : Bonjour. J'aimerais vous remercier, monsieur le président, de me donner l'occasion d'être ici aujourd'hui devant les membres du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles. Je vous en suis très reconnaissant.
Aujourd'hui, nous sommes ici pour appuyer le projet de loi S-6, notamment en ce qui a trait aux modifications apportées à la Loi sur l'évaluation environnementale et socioéconomique au Yukon, ou la LEESY.
J'aimerais également vous présenter Julie Stinson. Madame Stinson a fait partie de l'équipe du gouvernement du Yukon qui a participé à l'examen de la LEESY. Elle a donc de l'expérience en ce qui concerne cette loi et elle connaît bien toutes les façons dont elle est mise en œuvre chaque jour au Yukon.
Aujourd'hui, j'espère mieux vous faire comprendre le point de vue du Yukon sur les avantages liés aux modifications apportées à cette loi. L'an dernier, c'était le 10e anniversaire du transfert des responsabilités des terres et des ressources du gouvernement du Canada au gouvernement du Yukon. Le transfert a représenté un tournant dans l'histoire récente du Yukon, et j'aimerais ajouter que même si le gouvernement fédéral appelle ce processus un transfert, je préfère l'appeler une évolution.
À partir de ce moment décisif, nous nous sommes engagés sur la voie de l'autodétermination et de la gestion de nos propres ressources. Les avantages du transfert des responsabilités au Yukon sont énormes, car ce qui profite au Yukon profite à l'ensemble du Canada.
Lorsque la Loi sur le Yukon est entrée en vigueur le 1er avril 2003, le territoire a obtenu le pouvoir d'édicter des lois sur la grande majorité de ses ressources naturelles. Cela nous a permis de mettre sur pied des régimes de gestion durable et de collaborer avec les Premières Nations et l'industrie.
Depuis 2003, nous avons connu une prospérité durable, et les contributions du secteur privé dans notre économie ont monté en flèche. De plus, au cours des 10 dernières années, notre population a connu une croissance soutenue. En outre, 2013 marquait le 20e anniversaire de l'Accord-cadre définitif.
L'Accord-cadre définitif, qui est entré en vigueur en 1993, est un cadre dans lequel les Premières Nations du Yukon peuvent négocier des accords sur des revendications territoriales. À ce jour, 11 des 14 Premières Nations du Yukon ont signé des traités modernes et des ententes sur l'autonomie gouvernementale. Cela représente presque la moitié des traités et des ententes sur l'autonomie gouvernementale des Premières Nations qui existent actuellement au Canada.
Ces 10 dernières années, le Yukon avait la réputation d'avoir les systèmes réglementaires les plus avancés au Canada. L'économie fondée sur les ressources du Yukon est en croissance depuis le transfert des responsabilités, et le secteur de l'exploitation minière et minérale continue de s'étendre et de se développer.
Cela dit, on constate de plus en plus qu'il est essentiel d'apporter des changements à la loi devant vous aujourd'hui pour permettre au Yukon de rester concurrentiel.
Comme l'exige le chapitre 12 de l'Accord-cadre définitif, la LEESY est entrée en vigueur le 13 mai 2003. Les partenaires du gouvernement fédéral, des Premières Nations et du territoire jouent tous un rôle important pour assurer que les projets entrepris au Yukon respectent les principes qui favorisent les avantages économiques. Il est tout aussi important qu'en tant que partenaires, nous veillions à la protection des systèmes écologiques et sociaux dont dépendent les collectivités et leurs habitants, ainsi que la société en général. Je suis sûr que les modifications proposées respectent ces valeurs.
Cette loi applique, partout au Yukon, une évaluation unique, un processus neutre mené indépendamment des gouvernements. Au cours de la dernière décennie, ce processus a affiché un niveau élevé de transparence, car les décisions et les mesures prises ont été divulguées à la population par l'entremise du registre en ligne du Yukon.
Toutefois, comme avec la plupart des nouvelles lois, la LEESY nécessite quelques modifications. Il s'agit surtout de modifications mineures qui permettront à la LEESY de continuer à servir notre territoire pendant longtemps. Lorsque le Canada a envisagé d'apporter des modifications à la loi, le gouvernement a consulté le gouvernement du Yukon, le Conseil des Premières Nations du Yukon, les Premières Nations du Yukon et le conseil responsable de la LEESY. Les modifications proposées résultent d'une collaboration étroite entre ces parties, comme l'exige le processus d'examen quinquennal de la LEESY. Ces modifications ont également été éclairées par le Plan d'action visant à améliorer les régimes de réglementation dans le Nord.
Au cours de cet examen, le Canada a demandé l'avis du gouvernement du Yukon sur plusieurs modifications qui visent à rendre le régime d'évaluation plus efficace.
Avant de vous parler des contributions du gouvernement du Yukon, j'aimerais prendre quelques minutes pour reconnaître les problèmes soulevés par certaines Premières Nations du Yukon. Notre gouvernement accorde une grande importance à ces problèmes, car nous considérons que les Premières Nations sont des partenaires clés dans la mise en valeur responsable des ressources. Nous avons appris que lorsque nous collaborons, comme nous l'avons fait pour les mines situées sur des territoires visés par un règlement sur les revendications territoriales et l'exploitation pétrolière et gazière dans le Nord, tous les habitants du Yukon en profitent.
Je ne parlerai pas au nom des Premières Nations, car leurs représentants vous parleront au cours des prochains jours, mais d'après ce que je comprends, elles ont quelques préoccupations concernant le contenu et le processus de ces modifications.
Même si la question du caractère adéquat des consultations concerne les Premières Nations et le Canada, le Yukon a collaboré avec tous les gouvernements pour appuyer ces modifications législatives dans le but de renforcer le système réglementaire progressif et global du territoire.
En ce qui le concerne, le gouvernement du Yukon juge qu'on l'a consulté de façon adéquate pendant cette étape, et qu'on a tenu compte de sa rétroaction et de ses commentaires. Dans l'ensemble, ces modifications profiteront au Yukon, car elles se concentrent sur les domaines suivants : la clarification des rôles et des responsabilités, la mise en place de processus rentables et efficaces, et la valeur et la rapidité du processus d'évaluation.
Examinons plus attentivement la disposition de renouvellement, par exemple. Les évaluations environnementales ne sont pas conçues pour être effectuées chaque fois qu'un changement mineur est apporté à un projet ou qu'une autorisation est renouvelée. Monsieur le président, obliger des projets à subir une autre évaluation lorsqu'aucun changement important n'a été signalé gruge beaucoup de temps et représente une utilisation inefficace de l'argent des contribuables. Cette modification précise que l'organisme décisionnel déterminera si un projet nécessite une réévaluation. Dans le cas d'une terre visée par un règlement, cela signifie que la Première Nation sera l'organisme décisionnel.
Cela signifie qu'à moins que des changements importants soient apportés à un projet, on n'exigera pas d'autres évaluations environnementales.
Les modifications visent également la question des délais en ce qui a trait aux étapes de détermination du caractère adéquat et d'évaluation, des étapes essentielles pour permettre au Yukon d'être concurrentiel aux autres territoires et pour assurer sa croissance économique. En effet, les délais fixés dans ces deux étapes créent une certitude pour le promoteur, les évaluateurs, les investisseurs et les décideurs. Cette démarche est cohérente avec d'autres lois fédérales et provinciales sur l'environnement.
Nous appuyons également la modification proposée par le Canada et qui consiste à octroyer au ministre fédéral la capacité de donner des instructions exécutoires à l'office responsable de la LEESY dans les rares cas où ce pouvoir est jugé nécessaire. Manifestement, toutes les instructions exécutoires données devraient respecter l'ACD et tous les accords sur les revendications territoriales. Ces instructions exécutoires ne pourraient jamais être utilisées pour modifier le processus d'évaluation environnementale. En effet, ces instructions peuvent seulement viser l'exercice des pouvoirs, des devoirs ou des fonctions du conseil en vertu de la loi. Cette modification est cohérente avec d'autres lois similaires au Canada.
Nous appuyons également la recommandation selon laquelle le ministère fédéral pourrait déléguer n'importe lequel de ses pouvoirs, devoirs ou fonctions liés à la LEESY au ministre territorial. L'évaluation des projets proposés est essentielle à l'identification et à la compréhension des effets négatifs sur les plans environnemental ou socioéconomique. On a demandé l'ajout de cette disposition de délégation pour rendre les processus administratifs plus efficaces. Par exemple, on pourrait avoir recours à la délégation de la responsabilité administrative lors de la création de districts d'évaluation, de la nomination d'une collectivité où des bureaux désignés seront situés, de la demande d'une commission d'examen pour un projet et de la détermination du nombre de membres dans le conseil.
La délégation est appuyée par la Stratégie pour le Nord et la vision nordique visant tous les territoires qui a été mise à jour par les premiers ministres du Nord du Canada plus tôt ce mois-ci.
Honorables sénateurs, prises ensemble, ces modifications constituent un jalon important, car elles représentent l'aboutissement de plusieurs années de travail acharné et de consultations entre les trois ordres de gouvernements qui ont participé au processus depuis le début de l'examen quinquennal.
Monsieur le président, il est important que les membres du comité comprennent qu'en tant que partenaires, nous nous sommes mis d'accord sur la très grande majorité des recommandations.
En tant qu'organisme qui prend les décisions concernant la grande majorité des projets visés par la LEESY, le gouvernement du Yukon appuie un processus qui demeure efficace, qui favorise la mise en valeur responsable des ressources et qui fixe des seuils réglementaires appropriés. C'est nécessaire pour que le Yukon demeure concurrentiel tout en conservant sa caractéristique unique dont nous sommes tous fiers, c'est-à-dire le processus d'évaluation à guichet unique.
En peu de temps, des changements extraordinaires se sont produits et continuent de se produire au Yukon. Il est important d'examiner et de modifier la loi régulièrement, afin de veiller à ce qu'elle continue de répondre aux besoins de la population qu'elle sert. Il est également essentiel que le Yukon continue de faire concurrence aux autres provinces et territoires tout en protégeant et en favorisant le bien-être du territoire et de sa population sur les plans environnemental et socioéconomique.
En conclusion, monsieur le président, je crois que les modifications à cette loi proposées par le gouvernement du Canada veilleront à ce que le Yukon demeure un endroit progressif et responsable où investir et mener des activités, et même un meilleur endroit où vivre, élever une famille et gagner sa vie.
J'aimerais brièvement remercier nos fonctionnaires pour tout le travail qu'ils ont accompli dans le cadre de ces processus. J'aimerais également reconnaître le leadership et l'appui de l'honorable Dan Lang, sénateur du Yukon, et de Ryan Leef, député du Yukon — je crois qu'il est également présent. J'aimerais également reconnaître la présence de certains chefs des Premières Nations. Enfin, j'aimerais remercier les membres du comité de leur temps.
Le président : Merci beaucoup, monsieur le premier ministre. Nous allons maintenant passer aux questions. La parole est au vice-président, le sénateur Massicotte.
Le sénateur Massicotte : Merci, monsieur le premier ministre, d'être ici aujourd'hui. Merci également, Madame Stinson, d'être ici et de nous faire connaître votre avis sur le projet de loi.
Monsieur le premier ministre, j'aimerais entendre vos commentaires. Récemment, les médias, et surtout le Whitehorse Daily Star, ont commenté le fait que le chef régional de l'Assemblée des Premières Nations s'est vivement opposé au projet de loi. En effet, ce dernier a déclaré :
Essentiellement, nous appuyons la position présentée par le CPNY selon laquelle les changements ne sont pas dans le meilleur intérêt des Premières Nations du Yukon. La tenue d'audiences à l'échelle locale pourrait représenter un premier pas.
Il poursuit en disant que sa plus grande inquiétude est liée au fait que le gouvernement fédéral peut donner des instructions exécutoires aux membres du conseil responsable de la loi et que ces derniers perdent ainsi leur indépendance en matière de gouvernance, ce qui va manifestement à l'encontre de l'intention du processus de transfert des responsabilités.
Pourriez-vous nous faire part de vos commentaires à cet égard et nous dire si les commentaires du chef sont appropriés ou s'il y a un malentendu en ce qui concerne le contenu du projet de loi? Que pense la population du Yukon du projet de loi?
M. Pasloski : Merci, sénateur. En 2008, nous avons commencé à mener l'examen quinquennal prescrit par la loi. Cet examen a été terminé en 2012. Pendant environ deux ans, on a mené d'autres consultations pour veiller à ce que nos lois demeurent conformes à celles d'autres provinces et territoires. Cette uniformité est cruciale pour notre économie et notre capacité d'attirer des investissements, ce qui produira au bout du compte des emplois pour les habitants du Yukon et la capacité de former des gens pour ces emplois spécialisés.
Au cours de ces processus, le Yukon a partagé tous ses renseignements avec les autres parties, y compris le CPNY.
J'aimerais citer un extrait de l'exposé livré par le ministre Valcourt la semaine dernière, car il a parlé de l'article 4 de la LEESY qui existe toujours. Toutefois, on n'y a apporté aucune modification, et cet article n'existe donc pas dans le projet de loi S-6. Lorsque le projet de loi sera adopté, cela fera partie de la Loi sur l'évaluation environnementale et socioéconomique au Yukon. Le ministre a cité l'extrait suivant : « Les dispositions de tout accord définitif l'emportent sur les dispositions incompatibles de la présente loi. » Cela signifie que cette loi ne peut pas avoir préséance sur les accords définitifs qui ont été conclus avec les Premières Nations signataires.
Le conseil responsable de la LEESY compte sept membres, c'est-à-dire trois membres dans le comité de direction — un représentant des Premières Nations, un représentant du gouvernement du Canada et un représentant du gouvernement du Yukon — et quatre membres du conseil. Deux de ces membres sont nommés par les Premières Nations, un par le Canada et un par le Yukon.
Grâce à ce processus, les Premières Nations occupent trois des sept postes dans le conseil, ce qui garantit leur participation à la LEESY.
En 2003, lorsque cette loi a été adoptée, elle était à l'avant-garde. Elle faisait l'envie du reste du pays, car elle proposait une seule évaluation par projet. Essentiellement, nous étions des chefs de file. Toutefois, au cours des dernières années, en raison des modifications et des changements qui ont été apportés aux lois environnementales partout au pays, nous nous sommes rendu compte qu'actuellement, nous ne sommes pas aussi concurrentiels que les autres provinces et territoires. Honnêtement, nous aimerions être à nouveau sur un pied d'égalité avec les autres provinces et les autres territoires du pays.
Dans le cadre de ces processus lancés en 2008, on a mené des milliers d'heures de consultation et je ne peux pas imaginer les sommes qui ont été dépensées. Je dois préciser que les modifications dont nous parlons aujourd'hui sont très importantes pour la population du Yukon, car ce processus ne concerne pas seulement l'évaluation de l'industrie des ressources. En effet, la LEESY constitue notre processus d'évaluation environnementale par lequel on examine tous les projets de développement, qu'il s'agisse de l'industrie des ressources, de la construction d'une nouvelle route ou d'un pont ou d'un nouveau projet hydroélectrique. Cette loi a des répercussions sur tous les volets de notre vie. Que les habitants du Yukon le sachent ou non, ils en subissent tous les répercussions d'une façon ou d'une autre.
Le sénateur Massicotte : J'aimerais préciser que nous avons reçu une liste de toutes les réunions et des dates de toutes les consultations que vous avez menées, et les Premières Nations du Yukon ont souvent participé à des téléconférences ou elles ont reçu des documents. Nous sommes tous un peu surpris des commentaires qui ont été formulés. Elles ont peut-être participé aux téléconférences et elles ont reçu les documents pertinents, mais elles ne sont pas d'accord avec les conclusions.
Ces commentaires vous ont-ils surpris? Ont-elles précisé plus tôt que cette entente fait partie d'une disposition d'une nouvelle loi, ou est-ce également nouveau pour vous?
M. Pasloski : Il reviendra aux Premières Nations de commenter leurs préoccupations liées au processus. En ce qui concerne le caractère adéquat des consultations, comme je l'ai mentionné, il serait peut-être préférable de vous adresser à vos fonctionnaires qui ont participé au processus de consultation.
Je sais que nous avons fourni tous nos renseignements aux Premières Nations du Yukon ainsi qu'au gouvernement du Yukon. Nous jugeons que le processus s'est déroulé de façon adéquate, et nous avons consulté le gouvernement du Yukon. Nous jugeons que le niveau de consultation a été adéquat, ainsi que les mesures d'accommodation.
Je sais que plusieurs modifications ont été présentées par l'entremise de l'avant-projet de loi et des consultations après la consultation. Nous sommes donc satisfaits du caractère adéquat des consultations.
Le sénateur Lang : Merci, monsieur le président, et j'aimerais souhaiter la bienvenue au premier ministre du Yukon. Comme l'a indiqué le président, je vous suis reconnaissant de prendre le temps de comparaître, même si vous êtes très occupé. J'aimerais également remercier Mme Stinson. J'aimerais aussi reconnaître le député Ryan Leef et les membres des Premières Nations du Yukon et la présence du grand chef Ruth Massie.
Je crois que la présence d'un nombre élevé de vos représentants aux discussions d'aujourd'hui sur le projet de loi reflète l'intérêt du Yukon et l'importance du projet de loi. Cela ne se produit pas souvent. Il est important de se rendre compte que cela forme le fondement environnemental et économique du Yukon, et nous sommes chanceux d'avoir la participation des Premières Nations et de la population dans un processus auquel, comme je le disais, tout le monde participe — personne n'est mis à l'écart dans la composition et le fonctionnement du conseil.
En tant que sénateur du Yukon, je peux également vous parler de l'importance du projet de loi en ce qui concerne les modifications. En effet, nous avons pris du retard ces dernières années. J'ai entendu de nombreuses plaintes de ceux qui ont dû se soumettre au processus et qui ont parlé de l'importance de le moderniser. Le projet de loi reflète une notion très vaste de ce à quoi il devrait ressembler à l'avenir.
J'aimerais seulement corriger une chose pour le compte rendu. Chez nous, on a critiqué le fait que le projet de loi avait d'abord été présenté au Sénat. J'aimerais souligner, pour le compte rendu, qu'au cours des cinq ou six dernières années, plus de 60 projets de loi émanant du gouvernement ont été présentés au Sénat avant la Chambre des communes, et ce n'est donc pas rare. Je tenais à le préciser pour le compte rendu.
L'été dernier, le député Ryan Leef et moi-même avons participé à quelques réunions sur le projet de loi avec des parties intéressées, notamment le Conseil des Premières nations du Yukon. On a soulevé le fait que le ministre peut déléguer certains pouvoirs et certaines fonctions au gouvernement du Yukon après avoir avisé le Conseil des Premières nations du Yukon. On a fait certaines déclarations selon lesquelles il s'agit d'une violation de l'Accord-cadre définitif.
Pouvez-vous nous expliquer pourquoi cet article est important pour le fondement du projet de loi? Selon vous, comment le projet de loi sera-t-il utilisé? Comment, à votre avis, une demande de délégation de pouvoirs au ministre sera-t-elle présentée au gouvernement du Canada?
M. Pasloski : Merci, sénateur Lang. J'aimerais tout d'abord préciser que la délégation de pouvoirs est une modification habilitante. Comme le ministre Valcourt l'a mentionné la semaine dernière, aucune délégation de pouvoirs n'est envisagée en ce moment, que ce soit par le gouvernement fédéral ou par le gouvernement territorial.
Comme je l'ai mentionné dans mon exposé, cela permettrait d'être plus efficace sur le plan administratif. Pour parler simplement, les pouvoirs qui pourraient être délégués sont très limités. Par exemple, les règlements de la LEESY — et je pourrais utiliser l'exemple d'un seuil d'activité — ne peuvent pas être délégués au gouvernement territorial; ils relèvent du gouverneur en conseil.
Ce qu'on constate actuellement, et cela vaut également pour l'avenir, c'est que la LEESY est et restera un processus cogéré. Comme je l'ai également mentionné, la participation des Premières Nations est garantie, car ces dernières ont un représentant parmi les trois membres du comité de direction et trois représentants parmi les sept membres du conseil responsable de la LEESY.
En ce qui concerne la délégation des pouvoirs, j'ai parlé plus tôt du transfert des responsabilités ou peut-être d'une évolution. C'est appuyé par la Stratégie du Canada pour le Nord et l'initiative Une vision nordique des territoires du nord. Chaque fois que nous transférons une responsabilité et que nous l'amenons plus près de nous — plus près de la population — les résultats sont très positifs.
J'aimerais parler de ce qui s'est produit depuis cette évolution ou ce transfert des responsabilités liées à la gestion des terres, des ressources et de l'eau au Yukon. Notre économie a connu une croissance fulgurante. Au cours de la dernière décennie, nous avons constaté que la population augmentait chaque année; en fait, elle a augmenté d'environ 22 p. 100. Notre PIB réel a augmenté chaque année. Nous avons été au-dessus de la moyenne nationale pendant la plus grande partie de la dernière décennie.
Cette délégation des pouvoirs, ce transfert des responsabilités ou cette évolution a certainement fonctionné pour le Yukon, et je suis heureux que les Territoires du Nord-Ouest se soient engagés dans le même processus, et que le territoire signe son entente sur le transfert des responsabilités en avril.
En ce qui concerne l'avenir, comme je l'ai mentionné, sénateur, en ce moment, notre gouvernement ou le gouvernement fédéral n'envisage aucunement la délégation des pouvoirs. Mais je prévois que si la loi est adoptée, avant de procéder à une délégation, on aura une discussion ouverte et complète avec toutes les parties touchées au sujet de cette décision. Ce seront peut-être même les membres du conseil responsable de la LEESY qui s'adresseront au gouvernement territorial pour lui parler de cette initiative.
Je tiens à préciser, sénateur, que si cela se produit, toutes les personnes engagées dans le processus auront l'occasion d'y participer pleinement et activement avant que la décision soit prise.
Le président : Il y a six personnes sur la liste d'intervenants et il ne reste que 30 minutes. Cela fait cinq minutes par intervenant. Veuillez poser des questions concises, et répondre brièvement, afin que tous les sénateurs aient la chance de poser une question.
Sénateur Lang, je vais vous permettre de poser une dernière brève question, et j'espère que vous obtiendrez également une courte réponse. Ensuite, nous devrons emprunter un peu de temps à quelqu'un d'autre. Allez-y, monsieur.
Le sénateur Lang : Merci beaucoup, monsieur le président. Je crois que le premier ministre du Yukon a souligné l'importance du projet de loi. J'aimerais lui poser une question très directe.
Monsieur le premier ministre, pourriez-vous parler de la nécessité d'adopter le projet de loi en ce qui concerne le calendrier parlementaire?
M. Pasloski : Nous sommes très conscients des réalités des gouvernements élus démocratiquement et nous savons qu'il y aura des élections nationales l'an prochain. Je suis donc préoccupé, et je vous prie certainement d'agir rapidement lorsqu'il s'agit d'étudier les amendements au projet de loi S-6, afin que nous puissions aller de l'avant.
De plus, j'aimerais encourager le gouvernement à examiner les règlements de la loi, et de le faire rapidement.
Le sénateur Black : Monsieur le premier ministre, je vous remercie beaucoup d'être ici, et j'aimerais également remercier Mme Stinson. J'aimerais aussi vous féliciter et féliciter vos collègues pour la réussite du Yukon. Il s'agit vraiment d'une réussite, et les Canadiens qui vivent à l'extérieur du Yukon le comprennent et ils en sont fiers.
Pourriez-vous nous donner votre avis sur les effets économiques qui pourraient se faire sentir au Yukon si ces modifications ne sont pas adoptées?
M. Pasloski : En termes simples, nous ne serions pas en mesure d'être concurrentiels, car d'autres provinces et territoires auraient des processus et des exemples. Par exemple, si je veux utiliser les délais prévus par la loi, il devient plus difficile de trouver des investissements pour faire progresser les projets, car dans un territoire aussi étendu que le nôtre, avec une population aussi restreinte, nous sommes toujours à la recherche d'investissements étrangers ou d'autres régions du Canada. Il est donc très important d'être en mesure de conserver une certaine uniformité, car c'est ce que j'entends lorsque je parle aux investisseurs.
Je peux vous dire qu'un PDG du Yukon m'a dit que trois mois d'activités minières sont suivis d'un mois d'évaluation. Honnêtement, c'est tout simplement inacceptable. Il est très difficile de convaincre les investisseurs et les entreprises d'envisager d'investir au Yukon lorsqu'il existe ce type d'incertitude.
Étant donné que nous vivons dans le Nord, nous sommes déjà confrontés à un nombre suffisant de défis lorsqu'il s'agit de lancer de grands projets. Ces difficultés, c'est-à-dire la distance des marchés, le coût de l'énergie, et cetera, nous tiennent déjà suffisamment occupés.
En tant que gouvernement, nous nous concentrons sur les choses que nous pouvons faire afin de veiller à offrir les meilleures occasions d'investissement.
Le sénateur Patterson : Étant donné que je suis également un sénateur du Nord, j'aimerais dire que nous avons toujours considéré que le Yukon était un chef de file en ce qui concerne le rapatriement des décisions par l'entremise du transfert des responsabilités. Je crois que vous avez servi d'inspiration à l'étape historique franchie par les Territoires du Nord-Ouest le 1er avril. Si cela fonctionne au Yukon, pourquoi ne pourrions-nous pas le faire aux Territoires du Nord-Ouest? Et j'espère que le Nunavut sera le prochain territoire à s'engager dans cette voie.
J'ai toujours été un législateur territorial, et j'ai toujours été insulté lorsque des fonctionnaires éloignés vivant à Ottawa nous disent comment gérer nos terres et nos ressources. À votre avis, ce projet de loi vise-t-il essentiellement à inclure la délégation des pouvoirs ministériels, c'est-à-dire à rapatrier la prise de décisions dans les territoires?
M. Pasloski : Merci, sénateur. Comme nous en avons discuté, et le Yukon est certainement un exemple, car lorsqu'on crée l'occasion nécessaire, et qu'on permet que les décisions soient prises plus près de nous, les résultats peuvent être très profonds. Je dis cela non seulement dans le but d'encourager le développement économique, mais également d'assurer la mise en valeur responsable, afin que nous veillions à ne pas entraîner de répercussions négatives sur l'environnement, car nous vivons au Yukon et je crois que l'un des grands avantages des employeurs, c'est la qualité de vie qui existe au Yukon. On peut profiter de très bonnes occasions dans une économie qui continue de se diversifier en raison de la croissance de la population qui se concentre ou se concentrait surtout sur l'industrie de l'extraction des ressources, mais qui offre également de vastes étendues naturelles à notre porte et nous permet de profiter de tous les avantages que cela entraîne.
En tant que gouvernement, nous veillons surtout à ce qu'on crée des occasions qui montrent que nous sommes encore une fois sur un pied d'égalité, tout en sachant très bien qu'il faut protéger notre patrimoine. Certaines modifications au projet de loi nous aideront à y parvenir et à avoir la capacité d'examiner les effets cumulatifs, c'est-à- dire d'ajouter aux mesures de protection environnementale en vigueur, et c'est l'une des modifications proposées dans le projet de loi S-6.
Le sénateur Patterson : C'est un long examen qui nous a menés où nous sommes aujourd'hui. Pourriez-vous nous dire depuis combien de temps cela dure? Je crois que tout a commencé avant que vous soyez premier ministre.
J'aimerais obtenir quelques éclaircissements sur un point, et je crois que ce n'est pas toujours la façon dont on fonctionne ailleurs en ce qui concerne d'autres lois fédérales : d'après ce que je comprends, des avant-projets de loi ont été divulgués aux parties dans des conditions privilégiées et confidentielles. Pourriez-vous nous parler un peu de ce processus?
M. Pasloski : Étant donné que la LEESY était une nouvelle loi fédérale et qu'elle a été adoptée en 2003, l'examen quinquennal a débuté en 2008. Le ministre d'Affaires autochtones et Développement du Nord Canada — j'essaie de me rappeler si c'était son titre à l'époque — a écrit une lettre à toutes les parties touchées en octobre 2012 pour les informer que l'examen quinquennal était terminé. Comme je l'ai mentionné, je crois qu'on s'est mis d'accord, par consensus, sur 73 des 76 recommandations.
À l'époque, le gouvernement fédéral a informé toutes les parties concernées qu'en plus de l'examen quinquennal, nous souhaitions examiner d'autres modifications potentielles qui veilleraient à ce que le Yukon suive les changements et les modifications législatives en cours dans d'autres provinces et territoires.
Pendant ce temps, les parties ont eu l'occasion de formuler des commentaires et ensuite, par l'entremise du processus de consultation, des idées et des modifications potentielles ont été proposées. En fait, vous aviez raison lorsque vous avez dit, sénateur, que le gouvernement fédéral avait communiqué l'avant-projet de loi en février dernier, et a permis aux Premières Nations et au gouvernement du Yukon de l'examiner pendant huit semaines et de formuler d'autres commentaires, et c'est ce que nous avons fait. Je suis heureux d'annoncer que c'est par l'entremise de ce processus de consultation que nous avons produit le document et les modifications devant vous aujourd'hui.
Le sénateur Patterson : Merci.
La sénatrice Seidman : Merci, monsieur le premier ministre. Vous avez parlé de milliers d'heures de consultation qui ont accompagné la création de ces modifications sur une période de temps assez longue. J'aimerais que vous en disiez plus au sujet des résultats du projet de loi, surtout en ce qui concerne les mesures d'adaptation qui ont été prises relativement aux préoccupations soulevées par les Premières Nations et d'autres parties intéressées.
M. Pasloski : Merci, madame la sénatrice. Il serait probablement préférable de demander aux Premières Nations de commenter les mesures d'adaptation, les propositions qu'elles ont présentées et où elles en sont. Je suis conscient que plusieurs suggestions présentées par les Premières Nations ont été intégrées au projet de loi dont vous êtes saisis.
Nous avons certainement tous abordé la question des réévaluations. Je crois que la première ébauche suggérait que le conseil responsable de la LEESY soit responsable de déterminer la nécessité d'une réévaluation, mais c'est par l'entremise de consultations auprès des Premières Nations et du gouvernement du Yukon qu'on a modifié cette disposition pour que l'organisme décisionnel prenne cette décision, c'est-à-dire l'organisme de réglementation, au lieu du conseil responsable de la LEESY.
C'était donc un exemple législatif. Je crois que l'élimination officielle de la LCEE au Yukon était une autre suggestion présentée par les Premières Nations.
L'Accord-cadre définitif et le chapitre 12 ont entraîné la création de la LEESY, ce qui a fait en sorte que la LCEE n'était plus applicable au Yukon.
La sénatrice Seidman : D'autres parties intéressées ont-elles participé aux consultations sur ces modifications?
M. Pasloski : Manifestement, les principales parties intéressées étaient le conseil responsable de la LEESY, le Conseil des Premières Nations du Yukon, les Premières Nations du Yukon et le gouvernement du Yukon.
La sénatrice Seidman : Le gouvernement du Yukon juge-t-il qu'on a tenu compte de ses préoccupations dans ces modifications?
M. Pasloski : Oui. Évidemment, d'autres suggestions ont été faites. Nous n'avons pas obtenu tout ce que nous avions demandé, mais j'ai l'impression qu'on a mené suffisamment de consultations et qu'on a tenu compte de tout ce que nous avions proposé.
La sénatrice Seidman : Merci beaucoup.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Je vous remercie, monsieur le président. C'est un plaisir de vous revoir. J'ai encore de très beaux souvenirs de notre tournée du mois de mai dans votre magnifique région. Je vous remercie de votre accueil. Cette visite a été très éducative pour moi et je tenais à vous en remercier.
J'ai passé une grande partie de ma vie dans le Nord du Québec. On sait que, dans le cas des régions éloignées, l'autonomie du développement économique des régions fait partie de leur valeur et, souvent, quand on est loin des pouvoirs politiques, on a l'impression d'être dépendant de ces pouvoirs pour le développement.
Je tiens à vous féliciter de tout le travail que vous avez fait pour faire avancer la cause des régions éloignées, en termes d'économie et de prise de pouvoir sur leur destinée.
Ma question va recouper celles des sénateurs Black et Patterson. En quoi les modifications proposées vont-elles vous faire progresser sur le plan de l'autonomie, du développement, d'une plus grande prise sur le pouvoir que vous avez sur votre développement économique ou celui de la région et, surtout, sur votre pouvoir d'influence?
À partir de demain, en quoi cette entente va-t-elle changer la vie d'un politicien comme vous? Sans doute dormirez- vous mieux la nuit, mais qu'est-ce que cela changera dans votre quotidien?
[Traduction]
M. Pasloski : Merci, sénateur. Je crois que cela a certainement entraîné beaucoup de choses. J'ai brièvement mentionné les délais. Les délais sont l'une de ces choses qui fourniront une certitude. Je dois préciser dès maintenant que les évaluations qui sont actuellement menées, ou qui ont été menées par l'entremise de la LEESY, ont toutes respecté les délais dont nous parlons maintenant, mais ils existent dans les règlements du conseil responsable de la LEESY. L'intégration de ces délais dans la loi permet vraiment aux investisseurs et aux entreprises d'obtenir une certitude.
Chaque fois que nous parvenons à créer une plus grande certitude, cela nous donne une meilleure occasion de faire avancer les projets. Le résultat sera peut-être l'ouverture d'une autre mine. Les représentants de l'industrie minière, dans les nombreuses discussions que nous avons eues, affirment que chaque emploi direct créé dans une mine entraîne la création de six à huit autres emplois dans le territoire.
Cela signifie que la croissance de notre population peut poursuivre sur sa lancée. Nous pouvons continuer de nous concentrer sur des domaines tel le Centre de recherche du Yukon, si nous avons un câble de fibre optique pour améliorer notre secteur des TI. Permettez-nous d'abord de créer plus de revenus, ce qui permet aux gouvernements de fournir des services et des programmes aux citoyens, mais également de continuer à diversifier notre économie. Cela permet de compenser les ralentissements que vous pouvez voir dans le cycle de vie d'une économie minière.
Je suis déjà enthousiaste, car nous pouvons dire aux gens que nous avons accompli une autre chose sur la liste du Yukon.
Pourrais-je avoir une minute supplémentaire pour rappeler à tous que ce projet de loi ne concerne pas seulement les ressources? Lorsque le gouvernement mène ses activités et collabore avec les municipalités pour bâtir des systèmes d'eaux usées et des systèmes de déchets solides ou pour construire de nouveaux ponts, cela crée une économie et des emplois et cela nous rend plus concurrentiels lorsqu'il s'agit de soumissionner les contrats. Tous ces éléments sont très importants pour veiller à ce que les habitants du Yukon continuent de profiter de l'incroyable mode de vie dont ils jouissent maintenant en vivant dans l'une des régions les plus spectaculaires du monde.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : L'un des éléments importants dans les régions éloignées est la mobilisation des populations et des élus. Sentez-vous que ce projet de loi a un effet mobilisateur sur les gens qui vous entourent, sur les politiciens locaux ou régionaux?
[Traduction]
M. Pasloski : Je peux affirmer sans me tromper que les citoyens du Yukon sont très mobilisés. Dans les petites circonscriptions, la politique se fait, en quelque sorte, en tête à tête. Le sénateur du Yukon, qui, si je ne m'abuse, a siégé à l'assemblée législative pendant 18 ans, peut en témoigner.
Les gens sont très mobilisés. Je crois que ce projet de loi, jumelé à la possibilité d'examiner le processus de réglementation connexe, viendra consolider la belle histoire des 10 dernières années.
Le sénateur Mitchell : Merci, monsieur le président. Je réalise maintenant que, puisque je ne suis plus le vice- président et que je ne suis plus le premier intervenant, mes collègues posent toutes les questions que j'ai. Mais je ne me décourage pas.
Je tiens à vous remercier, monsieur le premier ministre et madame Stinson, d'avoir accepté notre invitation. Je sais que vous venez de loin et que vous avez un horaire chargé, mais votre témoignage nous sera très utile.
Monsieur le premier ministre, vous dites que ce projet de loi tient compte de la grande majorité des recommandations formulées lors du processus d'examen, mais certaines n'ont pas été retenues. Pourriez-vous nous donner une idée de l'importance de ces recommandations, à quel point vous y tenez et pourquoi elles n'ont pas été considérées? Sont-elles controversées?
M. Pasloski : Merci, sénateur. Selon le gouvernement fédéral, certaines des questions que nous avons soulevées sont davantage de nature administrative ou politique.
En collaboration avec l'office, nous poursuivrons les travaux de communication en fonction des dispositions de la LEESY. Je continuerais également à encourager les promoteurs de projets à en faire de même, mais un examen législatif obligatoire n'est pas la seule façon de régler certaines questions. Par exemple, on peut avoir recours aux règles ou aux politiques de l'office.
De plus, une des recommandations formulées dans le cadre de l'examen quinquennal portait sur la création d'un forum sur la LEESY. Ce forum, auquel participent tous les intervenants, s'est déjà réuni à plusieurs reprises — cinq fois, si je ne m'abuse. Son mandat consiste à examiner ce qui existe et à trouver des façons d'améliorer les choses.
En fin de compte, selon moi et comme l'a souligné la semaine dernière le ministre Valcourt, il est important pour un gouvernement responsable d'apporter des changements législatifs, au besoin. Donc, si à un certain moment il faut réexaminer la loi, le ministre nous a assuré que c'est ce que l'on fera.
Le sénateur Mitchell : Ma prochaine question est très spécifique. Vous avez fait allusion aux améliorations apportées au processus d'examen environnemental en ce qui a trait aux effets cumulatifs. Selon vous, jusqu'à maintenant, tous les projets en cours ont eu des effets cumulatifs. En raison des changements proposés en vertu de ce projet de loi, à l'avenir, on tiendra compte des effets cumulatifs pour tous les projets probables.
Ma question est très précise : quel processus a-t-on adopté pour définir le terme « probable »? A-t-on adopté un tel processus ou réagira-t-on au fur et à mesure?
M. Pasloski : Au Yukon, le ministère de l'Environnement mène diverses études, y compris, depuis quelques années, des études sur les effets cumulatifs. J'ignore comment ces questions seront réglées en vertu de la LEESY, mais je sais que nous avons déjà accumulé une certaine expérience en matière d'effets cumulatifs dans certains secteurs du Yukon en collaboration avec les Premières Nations.
Comme je l'ai dit, et comme vous l'avez souligné, il s'agit, en quelque sorte, d'une amélioration, et c'est très important. Le Yukon a une superficie d'un peu moins de 500 000 km2 et compte un peu moins de 38 000 habitants. Nous avons l'occasion de poursuivre nos efforts afin de favoriser l'économie du secteur privé tout en nous assurant que les projets se déroulent de façon respectueuse et responsable sur le plan environnemental.
Le sénateur Wallace : Merci, monsieur le ministre.
Comme vous l'avez souligné, il est important pour votre gouvernement d'être compétitif et de pouvoir attirer les investissements du secteur privé. À ce chapitre, vous avez très bien réussi. Vous avez été très clairs que, selon vous, ce projet de loi, s'il est adopté, permettra au Yukon d'être encore plus compétitif.
À cet égard, quels sont, selon vous, les principaux éléments du projet de loi qui permettront d'accroître cette compétitivité pour attirer des investissements du secteur privé? Vous avez parlé des échéanciers; il s'agit certainement d'un élément important pour le secteur privé. Mais, quels sont les autres éléments clés du projet de loi qui, selon vous, permettront au Yukon d'être plus compétitif?
M. Pasloski : Les précisions apportées à l'article sur les renouvellements nous aideront également beaucoup. Comme je l'ai souligné dans mon exposé, le renouvellement ou la modification d'un permis ne devrait pas en soi entraîner la tenue d'un nouvel examen. Jusqu'à maintenant, c'est ce qui se produit dans une telle situation. La semaine dernière, le ministre Valcourt a dit que, selon lui, à moins que des changements importants ne soient apportés à un projet, un nouvel examen ne devrait pas être nécessaire.
J'insiste sur le fait que ceci est conforme à ce qui se fait dans d'autres provinces et territoires. La situation actuelle — comme je l'ai souligné plus tôt, un PDG m'a dit que sur trois mois d'exploitation minière, un mois avait été consacré à l'examen — entraîne des incertitudes qui ont un impact sur les employés et leur famille. Les projets eux-mêmes deviennent incertains, ce qui crée une certaine incertitude pour les fournisseurs et, indirectement, tous les autres travailleurs, qu'il s'agisse d'un employé dans un atelier de réparation de pneus ou un supermarché ou d'un vendeur de voitures ou de télévisions. Cela entraîne également une certaine incertitude au sujet de l'investissement.
De plus, lorsque l'on procède à de nouveaux examens, même s'il n'y a aucune raison environnementale de le faire — ce n'est que pour des raisons purement administratives —, on dépense beaucoup de temps et l'argent des contribuables pour un processus qui n'est pas vraiment nécessaire. Je tiens à réaffirmer que c'est ce qui se fait dans d'autres provinces et territoires.
Si vous me le permettez, monsieur le président, j'aimerais parler d'une autre possibilité économique, celle qui découle de l'assurance que nous avons eue de 11 Premières Nations ayant conclu des accords définitifs d'autonomie gouvernementale. La Cour suprême a rendu un jugement récemment dans une affaire concernant une Première Nation de la Colombie-Britannique. À bien des égards, ce jugement a accentué l'incertitude entourant l'avenir. Il y a 20 ans, on se demandait à quoi ressembleraient ces accords définitifs et la vision qui a pris naissance au Yukon. Aujourd'hui, en vertu des accords conclus concernant des terres visées par un règlement, c'est clair. Ce jugement de la Cour suprême a fait ressortir cette incertitude, mais pas pour les 11 Premières Nations et le Yukon.
Lorsque je m'entretiens avec les citoyens... C'est en partie parce qu'il a fait preuve de prévoyance que le Yukon jouit aujourd'hui de cette assurance. Il y a 40 ans, il a envoyé au premier ministre fédéral le document intitulé Together Today for Our Children Tomorrow. Ce document a déclenché un processus qui a mené, en 1993, à la signature de l'accord-cadre et des quatre premiers accords définitifs d'autonomie gouvernementale au Yukon.
Le président : Tous les intervenants ont bien coopéré. Nous allons maintenant amorcer la deuxième série de questions.
Le sénateur Massicotte : Vous dites que 76 recommandations ont été proposées à la suite du réexamen de la loi précédente, ou 73, comme le veut le consensus. Ces 17 pages tiennent-elles compte de toutes vos recommandations? Êtes-vous satisfaits?
M. Pasloski : Oui, nous sommes satisfaits. Comme je l'ai souligné, certaines des propositions que nous avons faites au gouvernement fédéral n'ont pas été retenues — vous ne les avez pas devant vous. Toutefois, je crois qu'il est possible de poursuivre le travail sur ces questions et je suis convaincu que nous continuerons à bâtir cette relation avec l'office et que nous utiliserons tous les moyens à notre disposition.
Le sénateur Massicotte : Parmi les 76 recommandations, y en a-t-il une qui parle de la nécessité de donner à un ministre le pouvoir de fournir des orientations stratégiques?
M. Pasloski : Non. Cet amendement a été apporté après l'examen quinquennal. Au cours des deux dernières années, le gouvernement fédéral a proposé d'harmoniser notre loi avec celles des autres provinces et territoires.
Le sénateur Lang : En tant que sénateur de la région, je tiens à souligner que ce projet de loi offre de belles possibilités et de beaux défis aux citoyens du Yukon et que, si l'on considère notre histoire, tous les segments de la population devraient en profiter. Toutefois, il ne faut pas sous-estimer l'importance de ces accords. L'adoption de ce projet de loi sera très importante au cours des prochains mois pour mettre en place la réglementation nécessaire et assurer la gouvernance.
Un peu plus tôt aujourd'hui, j'ai reçu une lettre d'un des chefs du Yukon dans laquelle il fait une déclaration. J'aimerais que le premier ministre commente cette déclaration. Malheureusement, je crois que ce projet de loi a été très mal compris, tout comme son impact sur certaines Premières Nations. Peut-être pourriez-vous nous apporter des précisions?
Dans sa lettre, le chef en question dit que le projet de loi S-6 change fondamentalement l'intention de la LEESY et l'effet pratique de son application au Yukon, et qu'il s'écarte considérablement des accords définitifs des Premières Nations du Yukon.
J'aimerais que vous commentiez cette déclaration, monsieur le premier ministre.
M. Pasloski : Je vous renverrai à l'article 4 de la Loi sur l'évaluation environnementale et socioéconomique au Yukon qui dit ceci : « Les dispositions de tout accord définitif l'emportent sur les dispositions incompatibles de la présente loi ».
Cela assure que l'intention de l'accord-cadre reste inchangée. Comme je l'ai souligné, les Premières Nations sont bien représentées à l'Environmental Assessment Board, puisque trois des sept membres proviennent des Premières Nations.
Comme je l'ai exprimé avec mes exemples sur les échéances et les renouvellements, ce projet de loi est très important pour tous les Yukonnais. En vertu de notre structure de gouvernance unique, nous sommes tous partenaires et, avec une économie si petite, nous sommes tous mobilisés. Nous appuyons les Premières Nations et les aidons à bâtir une capacité qui améliorera leur gouvernance à bien des égards. Selon nous, c'est grâce à la collaboration que nous avons connu du succès jusqu'à maintenant et c'est la collaboration qui nous permettra de continuer à connaître du succès.
Le président : Merci aux témoins. Nous avons eu des questions très réfléchies. Merci, monsieur le premier ministre, pour vos réponses. Encore une fois, au nom des membres du comité, je vous remercie d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer, malgré votre horaire chargé.
Nous allons maintenant amorcer la deuxième partie de la séance du comité sénatorial de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles. Nous poursuivons notre examen du projet de loi S-6, Loi sur l'amélioration de la réglementation au Yukon et au Nunavut.
Je suis très heureux d'accueillir le second groupe de témoins : l'honorable Johnny Mike, ministre de l'Environnement, gouvernement du Nunavut; et William MacKay, directeur, Relations intergouvernementales.
Monsieur le ministre, monsieur MacKay, merci d'avoir accepté notre invitation. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir pris le temps de nous rencontrer, malgré votre horaire chargé.
Si j'ai bien compris, monsieur le ministre, vous avez préparé un exposé. Nous passerons ensuite aux questions des membres. Monsieur, vous avez la parole.
L'honorable Johnny Mike, député, ministre de l'Environnement, gouvernement du Nunavut : Merci beaucoup, monsieur le président. Bonjour à tous. Mon nom est Johnny Mike, je suis le ministre de l'Environnement du gouvernement du Nunavut.
Au nom du premier ministre Taptuna, je tiens à remercier le comité de nous avoir invités. Le premier ministre Taptuna regrette de ne pouvoir être présent et m'a demandé de le remplacer à cette table.
Je suis ici pour manifester notre soutien à la partie 2 du projet de loi S-6, Loi modifiant la Loi sur les eaux du Nunavut et le Tribunal des droits de surface du Nunavut. Ce projet de loi constitue une étape importante dans la création d'un régime de réglementation efficace et moderne pour le Nunavut. L'Office des eaux du Nunavut joue un rôle essentiel dans la gestion des terres et des ressources au Nunavut. Il est composé de membres nommés par les Inuits ainsi que les gouvernements territorial et fédéral — lorsque je dis Inuit, je fais référence à la NTI et son organisation- cadre. L'office exerce ses activités avec efficacité au Nunavut depuis 1996.
Ce projet de loi donnera à l'office et aux organismes de réglementation de nouveaux pouvoirs importants qui assureront une utilisation durable et écologique de l'eau au Nunavut.
Monsieur le président, le gouvernement du Nunavut est d'avis que ce projet de loi améliora à bien des égards le régime de réglementation au Nunavut. Il donnera plus de souplesse à l'office et plus de pouvoirs d'application de la loi aux organismes de réglementation. Il assurera le recours à un processus de réglementation offrant des échéanciers prévisibles ainsi qu'une intégration claire aux travaux d'autres organismes de réglementation et offices au Nunavut.
Le gouvernement du Nunavut appuie les amendements proposés et a été consulté lors de leur élaboration. Plus particulièrement, l'augmentation des amendes associées au permis d'utilisation des eaux élèvera celles-ci à un niveau comparable à ce que l'on retrouve dans la Loi sur les terres territoriales et d'autres lois environnementales fédérales et agira comme moyen dissuasif efficace contre l'utilisation non autorisée des eaux.
En outre, l'ajout de régime administratif de sanctions pécuniaires donnera plus d'outils aux agents d'application de la loi pour faire respecter celle-ci et permettra une application plus efficace et efficiente des conditions associées aux permis d'utilisation des eaux. La délivrance d'un permis d'utilisation des eaux pour toute la durée d'un projet donnera à l'office des eaux la flexibilité nécessaire pour délivrer aux promoteurs des permis plus adaptés à l'utilisation des eaux dans le cadre du projet concerné et confirmera les droits de ces derniers en matière d'utilisation des eaux.
L'exigence dans ce projet de loi selon laquelle l'office des eaux doit tenir compte des accords conclus entre le Canada, les associations inuites régionales et les promoteurs sur les dépôts de garantie réglera le problème du surcautionnement qui constitue un obstacle à l'investissement au Nunavut.
Finalement, le gouvernement du Nunavut est particulièrement favorable aux échéanciers spécifiques fixés dans le projet de loi en ce qui a trait aux décisions ministérielles et aux organismes de réglementation. Cela donnera une certaine assurance et prévisibilité pour les Nunavummiuqs, l'industrie et les autres intervenants.
Comme vous pouvez le constater, il s'agit d'une mesure législative importante pour le Nord qui contribuera à la protection de l'environnement et au développement économique du Nunavut.
Comme vous le savez peut-être, le gouvernement du Nunavut participe à des discussions avec le gouvernement fédéral sur le transfert des responsabilités relativement aux terres et aux ressources. Les amendements proposés à la Loi sur les eaux du Nunavut et le Tribunal des droits de surface du Nunavut favoriseront la création d'un régime de réglementation transparent et efficace pour le Nunavut. Un régime de réglementation efficace constitue un élément clé du transfert des responsabilités et facilitera le transfert des responsabilités de gestion des terres et des eaux du gouvernement fédéral au gouvernement du Nunavut.
Monsieur le président, ceci met fin à mon exposé. Je remercie le comité de son attention. Je suis prêt maintenant à répondre à vos questions.
Le président : Merci beaucoup, monsieur le ministre. Ce fut intéressant.
Le sénateur Massicotte : Merci beaucoup, monsieur Mike et monsieur MacKay d'avoir accepté notre invitation. Nous vous sommes très reconnaissants de votre participation et de votre contribution à ce débat.
Les amendes pour la mauvaise utilisation des eaux ont augmenté considérablement, soit environ de 250 p. 100. Ces amendements n'ont pas été apportés au reste du projet de loi. S'est-il produit quelque chose de particulier au Nunavut pour rendre cette question si sensible? Quelqu'un a-t-il abusé de son permis d'utilisation des eaux et, par conséquent, vous voulez augmenter les amendes maximales?
M. Mike : Monsieur le président, de façon générale, nous appuyons toute modification au régime des permis qui permettraient d'exclure de la réglementation l'utilisation inoffensive de l'eau. Mais, pour répondre à votre question, si j'ai bien compris, le gouvernement du Nunavut désire simplement avoir quelque chose de comparable, dans une certaine mesure, à ce que l'on retrouve dans les autres provinces et territoires.
Le sénateur Massicotte : J'aurais une autre question à vous poser. Plutôt que de renouveler les permis sur une base régulière, vous pouvez maintenant délivrer des permis de 25 ans pour une utilisation de type A ou B. C'est une longue période. L'environnement change très rapidement. On le voit notamment dans le Nord avec les changements climatiques. Pouvez-vous, après disons 10 ou 15 ans, dire à un détenteur de permis que, nonobstant l'accord, vous devez modifier celui-ci?
M. Mike : Vous parlez de la durée de vie d'un projet?
Le sénateur Massicotte : Oui.
M. Mike : L'office des eaux et les autres organismes de gestion s'assureront de gérer la question à savoir si un permis pour la durée d'un projet pourrait entraîner des répercussions pour le promoteur ou l'investisseur.
Le sénateur Patterson : J'aimerais souhaiter la bienvenue au ministre Mike. Je suis heureux que l'on aborde aujourd'hui la partie du projet de loi portant sur le Nunavut.
À mon avis, la disposition la plus importante de ce projet de loi en ce qui concerne le Nunavut, c'est l'article 76 sur le problème du surcautionnement — que j'ai toujours appelé le double cautionnement. J'aimerais que le ministre nous explique comment on n'en arrive à un double cautionnement en ce qui a trait aux terres de la couronne et aux terres appartenant aux Inuits et comment cela constitue un problème, un obstacle au développement, ou ce que vous appelez un obstacle à l'investissement au Nunavut?
M. Mike : Merci, sénateur. Nous savons probablement tous les deux que le vrai problème, c'est qu'un accord sur les revendications territoriales du Nunavut a été adopté et que nous devons le respecter. Comme vous le savez, cet accord est un des principaux accords évolutifs de revendications territoriales et un des plus complexes. Dix-huit pour cent des terres sur le territoire fédéral du Nunavut appartiennent aux Inuits du Nunavut. Par conséquent, le problème du double cautionnement constitue un obstacle au développement économique et à l'investissement simplement en raison de la façon dont le processus est défini dans l'accord.
Je suis heureux de voir que le projet de loi propose de corriger le problème du double cautionnement, mais selon nous, il doit être plus précis sur le fonctionnement de tels accords et sur leur contenu.
Le sénateur Patterson : Si vous me le permettez, monsieur le président, et le ministre pourra m'aider, si j'ai bien compris, en termes simples, 18 p. 100 des terres au Nunavut appartiennent aux Inuits, ce qui fait d'eux les plus importants propriétaires fonciers privés au monde, et le reste du territoire appartient au gouvernement fédéral. Les Inuits ont été très intelligents en choisissant des terres situées autour des projets de développement. Presque tous les projets miniers proposés au Nunavut sont soit situés sur des terres appartenant aux Inuits ou ils nécessitent un passage par ces terres.
Vous me corrigerez si j'ai tort, mais avant que cet amendement ne soit proposé, les Inuits, qui sont à la fois propriétaires et gestionnaires, pouvaient demander une caution pour l'utilisation des eaux sur leur territoire, et la Couronne pouvait en faire de même pour ses terres. Donc, les sociétés minières devaient fournir deux cautions et relever deux fois plus de défis pour réaliser leurs projets. Cette section du projet de loi règle le problème en permettant aux ministres de concevoir un accord pour le versement d'une seule caution et à l'office de considérer une telle proposition. Ai-je bien compris?
M. Mike : Tout à fait. Le double cautionnement est problématique pour tous les intervenants concernés, en raison de la propriété foncière. Ce projet de loi aidera à déterminer le fonctionnement du processus et de l'accord de façon à ce que l'accord sur les revendications territoriales dont il est question, celui qui concerne des terres appartenant aux Inuits et à la Couronne, soit assujetti à un mécanisme permettant d'éviter le double cautionnement. Je crois que ce projet de loi réglera ce problème.
Le sénateur Mitchell : Merci beaucoup à vous deux d'avoir accepté notre invitation. Vous êtes loin de chez vous et nous vous sommes reconnaissants d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer.
Ma première question porte sur la capacité. Votre gouvernement fait déjà beaucoup de choses, mais cette nouvelle responsabilité s'ajouterait à votre charge de travail. Vous avez une petite population. Comment ferez-vous pour disposer de l'expertise et du personnel nécessaire pour entreprendre ce genre d'examens implicites dans les changements proposés?
M. Mike : Merci, sénateur. En vertu de ce projet de loi, les permis d'utilisation des eaux et la réglementation connexe demeureront la responsabilité du gouvernement fédéral jusqu'à ce que le gouvernement du Canada et celui du Nunavut aient conclu une entente sur le transfert des responsabilités.
Le sénateur Mitchell : Merci. Nous avons abordé la question des sanctions administratives pécuniaires. Un régime sera mis en œuvre à cet égard. Avez-vous réfléchi à l'ampleur de ces sanctions?
M. Mike : Le Nunavut doit composer avec une variété d'enjeux environnementaux. Comme vous l'avez souligné, notre territoire est vaste et compte peu d'habitants. L'écosystème y est fragile et vulnérable aux perturbations anthropiques. La taille et l'isolement du territoire constituent des obstacles à l'application de la loi. C'est une des vraies raisons. C'est également pour cette raison qu'il est essentiel de mettre en place un régime clair et efficace de réglementation. Ce régime doit être clair, non seulement pour les promoteurs et les organismes de réglementation, mais aussi pour les Nunavummiuqs, le public, les propriétaires fonciers et les intervenants.
Les amendements proposés dans le projet de loi S-6 auront un impact positif sur le système actuel. Par exemple, l'ajout de sanctions administratives pécuniaires et les amendes plus élevées aideront les agents d'application de la loi. Les échéanciers précis établis par la loi apporteront une certitude à toutes les parties concernées. Les amendements proposés aideront les organismes de réglementation et les Nunavummiuts à composer avec les enjeux environnementaux auxquels le Nunavut est confronté.
Le sénateur Black : Monsieur le ministre, merci beaucoup d'avoir accepté notre invitation.
Pour ma gouverne, mais aussi pour celle de ceux qui nous regardent, peu importe où et comment, pourriez-vous m'aider à comprendre dans quelles circonstances des permis d'utilisation des eaux seraient nécessaires et pourquoi ils le seraient?
M. Mike : Comme je l'ai dit, le Nunavut est un nouveau territoire, cela constitue un grand défi en soi. Sur le plan économique, le Nunavut doit se développer. Nous cherchons une façon de contribuer à ce développement de façon à ce que les promoteurs et les intervenants puissent profiter des systèmes de gestion liés au permis d'utilisation des eaux, comme c'est le cas dans d'autres provinces et territoires.
Le sénateur Black : Puis-je poser une question de suivi?
Le président : Allez-y.
Le sénateur Black : Votre réponse est très utile. Existe-t-il un manque de ressources hydriques au Nunavut? Est-ce pour cela que le recours aux permis est nécessaire?
Le sénateur Patterson : Il y a beaucoup d'eau au Nunavut.
Le sénateur Black : C'est ce que je me disais. C'est la raison pour laquelle je me demande pourquoi il est nécessaire de délivrer des permis.
M. Mike : Merci, sénateur. Il y a beaucoup d'eau au Nunavut et nous sommes soucieux de la protéger.
Le sénateur Black : Bien entendu.
M. Mike : Il nous faut un mécanisme pour protéger l'environnement.
Le sénateur Black : Très bien.
M. Mike : Ce projet de loi nous aidera en ce sens. Les habitants du territoire sont si soucieux de protéger l'eau, que ce genre de projet de loi est nécessaire pour protéger les ressources hydriques et favoriser leur mise en valeur.
Le sénateur Black : C'est très utile. Merci, monsieur le ministre.
Le sénateur Lang : Je souhaite la bienvenue à nos invités. Dans la foulée des observations du sénateur Black au sujet de votre territoire, il est incroyable de constater l'étendue géographique du Nunavut. J'ai eu l'occasion de m'y rendre il y a plusieurs années. C'est très beau. J'ai visité Pangnirtung et Coral Harbour — des endroits dont peu de gens ont entendu parler. Ce fut un voyage agréable.
Une des sections du projet de loi concerne le recouvrement de coûts. Il s'agit d'une nouvelle section. Aux fins du compte rendu, pourriez-vous nous expliquer en quoi consiste cette section et quelles sont vos intentions pour l'avenir?
M. Mike : Certainement, sénateur. Le recouvrement des coûts repose sur le modèle adopté par de nombreux organismes de réglementation au pays, mais selon nous, il ne convient pas au Nunavut. Les coûts associés à la mise en valeur des ressources au Nunavut sont déjà considérablement plus élevés que dans le sud du pays. Le recouvrement de coûts constituerait un obstacle à l'investissement. Si l'on donne à un ministre le pouvoir de demander le remboursement des coûts du gouvernement, il devra utiliser cette discrétion avec parcimonie et informer les promoteurs de projets avant la tenue d'un examen de réglementation qu'il a l'intention de faire une telle demande.
Le sénateur Lang : À titre de précision, du point de vue du gouvernement du Nunavut, dans le cadre du processus de réglementation, il ne reviendrait pas à votre gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour recouvrer les coûts auprès des promoteurs de projets. Est-ce exact?
Le sénateur Patterson : Le transfert des responsabilités n'a pas encore eu lieu. Vous devriez poser cette question au ministre fédéral.
M. Mike : Merci pour ce commentaire. Nous travaillons au dossier du transfert des responsabilités. Nous voulons prendre les devants. Ce projet de loi favorisera la conclusion d'un accord sérieux de transfert des responsabilités entre le gouvernement du Nunavut et le gouvernement fédéral.
Le président : Nous allons maintenant amorcer la deuxième série de questions.
Le sénateur Mitchell : Concernant les étapes relatives au transfert des responsabilités, quelle sera, selon vous, la prochaine étape? Qu'espérez-vous? Porterait-elle sur l'examen des projets d'exploitation des terres, comme ce fut le cas ailleurs?
M. Mike : Comme je l'ai dit, le Nunavut est un nouveau territoire. Ce projet de loi traite de la vision du gouvernement du Nunavut en ce qui a trait au transfert des responsabilités et en présente les grandes lignes. À mon avis, le projet de loi S-6 est une des mesures législatives les plus importantes pour la suite des discussions sur le transfert des responsabilités entre le gouvernement fédéral et celui du Nunavut.
Le sénateur Wallace : Monsieur le ministre, dans votre exposé, vous avez dit appuyer le processus de consultation entre le gouvernement du Nunavut et le gouvernement fédéral. Pourriez-vous nous décrire le déroulement de ce processus et l'importance pour votre gouvernement d'avoir pu s'exprimer dans l'intérêt des habitants du Nunavut?
M. Mike : Certainement. Le gouvernement du Nunavut a reçu la proposition plusieurs mois avant la réalisation de l'ébauche du projet de loi. L'ébauche a été remise au premier ministre Taptuna aux fins de commentaires et, compte tenu de la portée limitée des données factuelles et du fait que les amendements proposés sont conformes aux autres lois environnementales fédérales, le gouvernement du Nunavut n'avait aucune raison de s'inquiéter outre mesure des amendements proposés. Merci.
Le sénateur Patterson : Monsieur le ministre, vous dites que le Nunavut est un nouveau territoire. Votre gouvernement est également nouveau, puisqu'il a été élu en octobre dernier. Si j'ai bien compris, le Cabinet s'est réuni dès le début du processus pour discuter des priorités de ce nouveau gouvernement. Vous avez parlé brièvement des obstacles au développement qu'entraînerait l'adoption d'un mécanisme de recouvrement des coûts et la réglementation connexe à ce projet de loi.
Pourriez-vous nous dire quelle est la vision de votre gouvernement, quelles sont ses priorités et, plus particulièrement, quelle importance il accordera au développement économique au cours de son mandat de quatre ans?
M. Mike : On parle du Nunavut comme étant un jeune territoire, et avec raison. Mais, ce territoire possède un potentiel minéral important, et le secteur des ressources naturelles poursuivra sa croissance en vertu du développement des infrastructures et des possibilités de formation et d'éducation qui fourniront une main-d'œuvre forte.
Pour l'heure, il y a un manque flagrant d'infrastructures au Nunavut. Dans certains cas, ce manque constitue un obstacle insurmontable à la réalisation des projets. Toutefois, plus les sociétés entreprendront des activités d'exploitation sur le territoire, plus il y aura d'infrastructures et de possibilités.
En raison de l'investissement continu dans le secteur des ressources naturelles et des progrès réalisés dans d'autres secteurs économiques, l'avenir économique du Nunavut semble prometteur.
Le président : Cela met fin à nos questions. Monsieur le ministre, merci beaucoup d'avoir accepté notre invitation, de nous avoir fait part de votre position et d'avoir répondu à nos questions. Nous vous en sommes très reconnaissants.
(La séance est levée.)