Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles
Fascicule 16 - Témoignages du 2 octobre 2014
OTTAWA, le jeudi 2 octobre 2014
Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles, auquel a été déféré le projet de loi S-6, Loi modifiant la Loi sur l'évaluation environnementale et socio-économique au Yukon et la Loi sur les eaux du Nunavut et le Tribunal des droits de surface au Nunavut, se réunit aujourd'hui, à 8 heures, pour procéder à l'examen du projet de loi.
Le sénateur Richard Neufeld (le président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Bienvenue à cette séance du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles. Mon nom est Richard Neufeld. Je représente la province de la Colombie-Britannique au Sénat et suis également le président du comité. Je tiens à souhaiter la bienvenue aux honorables sénateurs, aux membres du public ici présents et aux téléspectateurs qui nous regardent d'un peu partout au pays. Je tiens à rappeler aux téléspectateurs que les séances du comité sont ouvertes au public et diffusées sur le Web à l'adresse sen.parl.gc.ca. Vous trouverez également sur ce site d'autres renseignements sur la comparution des témoins sous la rubrique « Comités du Sénat ».
Je vous présente le vice-président du comité, le sénateur Paul Massicotte, du Québec. Je vais maintenant laisser la parole au sénateur Mitchell.
Le sénateur Mitchell : Grant Mitchell, de l'Alberta.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Pierre-Hugues Boisvenu, du Québec.
[Traduction]
Le sénateur Patterson : Dennis Patterson, du Nunavut.
Le sénateur Black : Doug Black, de l'Alberta.
Le sénateur Wallace : John Wallace, du Nouveau-Brunswick.
La sénatrice Seidman : Judith Seidman, de Montréal, Québec.
Le président : J'aimerais également vous présenter les membres de notre personnel, en commençant par notre greffière, Lynn Gordon, et les analystes de la Bibliothèque du Parlement, Sam Banks et Marc LeBlanc.
Nous poursuivons aujourd'hui notre examen du projet de loi S-6, Loi modifiant la Loi sur l'évaluation environnementale et socioéconomique au Yukon et la Loi sur les eaux du Nunavut et le Tribunal des droits de surface du Nunavut, présenté au Sénat et lu pour la première fois le 3 juin 2014.
Je suis très heureux d'accueillir les témoins pour cette première partie de la séance : Elizabeth Kingston, directrice générale, Chambre des mines du Nunavut et des Territoires du Nord-Ouest, et Adam Chamberlain, directeur.
Nous disposons d'une heure pour cette première partie. Nous écouterons d'abord votre exposé et passerons ensuite aux questions des sénateurs. Je suis impatient d'écouter votre exposé. Si j'ai bien compris, c'est Mme Kingston qui prendra la parole.
Elizabeth Kingston, directrice générale, Chambre des mines du Nunavut et des Territoires du Nord-Ouest : Merci beaucoup, monsieur le président. Au nom de la Chambre des mines, nous vous remercions de nous avoir invités à venir nous exprimer sur le projet de loi S-6.
La Chambre des mines du Nunavut et des Territoires du Nord-Ouest représente l'industrie et est la principale défenseure du développement minier responsable et durable dans les Territoires du Nord-Ouest et au Nunavut. Mon nom est Elizabeth Kingston, je suis la directrice générale pour le Nunavut et mes bureaux sont situés à Iqualuit. Je vais maintenant laisser mon collègue se présenter.
Adam Chamberlain, directeur, Chambre des mines du Nunavut et des Territoires du Nord-Ouest : Mon nom est Adam Chamberlain. Je suis un avocat associé au cabinet Borden Ladner Gervais, à Toronto. J'ai également été reçu au barreau du Nunavut et je travaille partout dans le Nord. Parmi mes activités, j'occupe les fonctions de directeur de la Chambre des mines, à titre de bénévole.
Mme Kingston : En plus de notre exposé écrit, nous vous avons préparé une présentation afin de vous donner un aperçu de l'industrie minière au Nunavut. Nous vous présenterons ensuite nos commentaires qui porteront plus précisément sur la Partie 2 du projet de loi.
L'exploration minière joue un rôle important dans la croissance du PIB du Nunavut. Outre le gouvernement, il s'agit du plus important contributeur à l'économie du Nord, et ce, sans compter tous les coûts de transport et de construction associés à l'industrie minière. Il s'agit du plus important contributeur du secteur privé à l'économie du Nord.
Vous trouverez dans notre présentation d'une carte qui indique les projets en cours. Au cours des dernières années, l'industrie a été très occupée à l'avancement de plusieurs projets qui, nous l'espérons, deviendront des mines d'ici quelques années.
L'exploration est la pierre angulaire de notre industrie. Afin d'assurer le maintien d'une exploitation minière saine et fructueuse, et ce, pour le bien de notre économie, l'exploration doit nous permettre d'accroître nos chances de trouver des mines.
La valeur de la production est un indicateur important de la santé de notre industrie.
En 2013, au Nunavut, la mine Meadowbank a connu une production d'or record avec une augmentation de 10 p. 100 par rapport à l'année précédente.
L'exploitation minière au Nunavut a déjà eu un impact considérable sur l'emploi. Le territoire vit les conséquences du bébé-boom et, pourtant, il y a peu de possibilités d'emploi dans les collectivités. Il s'agit d'un problème avec lequel le Nunavut doit composer, mais notre industrie a bon espoir qu'elle peut corriger la situation.
L'industrie minière au Canada est le plus important employeur d'Autochtones. Mieux encore, au Nunavut, nous remarquons une hausse du nombre de sociétés appartenant à des Inuits qui embauchent des gens de leurs collectivités afin d'offrir des services et du matériel à l'industrie.
Les sociétés minières s'efforcent d'aménager des mines dans des régions éloignées où bon nombre des composantes fondamentales en matière d'infrastructure publique sont absentes.
Les promoteurs de projets doivent construire et entretenir des ponts et des routes. Puisque les mines éloignées sont situées loin des villes, nous devons transporter nos travailleurs par avion pour des quarts de travail en rotation. Pour ce faire, il faut construire des pistes d'atterrissage et des bâtiments capables d'accueillir les avions, ainsi que des établissements pour accueillir et nourrir le personnel.
Ces initiatives sont très dispendieuses. De plus, les sociétés concernées doivent mener leurs activités et gérer leurs atouts à des températures qui atteignent souvent les -45C.
D'autres régions, comme celles situées dans le sud du pays, n'ont pas à composer avec ce genre de pressions liées aux coûts. C'est la raison pour laquelle vos efforts visant à créer de nouvelles lois sont si importants dans la création d'une certitude en matière de processus et d'investissement au Nunavut. Cela nous amène à la séance d'aujourd'hui. Nous appuyons plusieurs des changements législatifs proposés au projet de loi S-6. Toutefois, nous avons plusieurs commentaires à formuler. Ceux-ci porteront sur les amendements proposés à la partie 2 concernant les eaux au Nunavut.
La première chose qui nous inquiète, c'est la nouvelle interprétation de « l'utilisation » des eaux, plus particulièrement la décision qu'a prise récemment Affaires autochtones et Développement du Nord Canada d'inclure dans cette interprétation l'eau recyclée utilisée uniquement pour empêcher les tuyaux de geler. Ce changement de politique a été fait sans consultation avec l'industrie et aucune période de transition n'a été prévue pour la mise en application de ce changement pour les projets avancés.
Les normes actuelles qui définissent les permis de type A et B doivent être revues. Plus particulièrement, le seuil de 300 mètres cubes par jour pour un projet dont les besoins passent d'un permis de type B à un permis de type A doit coïncider davantage avec la transition d'un projet qui passe de l'exploration à l'aménagement. La loi et les règlements qui l'accompagnent doivent établir une démarcation entre l'exploration et les activités minières en précisant qu'un permis de type A est nécessaire pour les activités minières et un permis de type B pour les projets d'exploration.
En tant qu'industrie, nous sommes encouragés par la proposition visant à permettre une utilisation faible des eaux au Nunavut sans avoir à obtenir un permis, mais la limite permise de 50 mètres cubes par jour pour l'utilisation des eaux sans permis nous préoccupe toujours, car elle demeure, selon nous, trop restrictive et devrait être conforme aux limites fixées au Yukon et dans les Territoires du Nord-Ouest, soit 100 mètres cubes par jour.
Le projet de loi propose le recouvrement de coûts liés à l'analyse, au renouvellement, à la modification ou à l'annulation d'un permis au Nunavut afin d'être conforme à la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.
L'industrie s'oppose fortement à toute nouvelle mesure de recouvrement de coûts, car de telles mesures nuiraient à l'investissement dans le Nord. Le recouvrement de coûts constitue un handicap supplémentaire pour une exploitation déjà coûteuse. L'ajout de ces mesures ne ferait que diminuer davantage l'intérêt des investisseurs pour notre territoire. Nous recommandons que le recouvrement de coûts soit retiré du projet de loi ou que l'entrée en vigueur de ces mesures soit retardée.
Le concept des sanctions administratives pécuniaires est nouveau dans le Nord et crée un certain malaise au sein de notre industrie, car plusieurs éléments de cet article doivent être précisés.
Les sanctions pécuniaires elles-mêmes ne sont pas problématiques pour les exploitants. Toutefois, le fait de prolonger la période d'incertitude de deux à cinq ans après une violation pourrait nuire à l'investissement au Nunavut sans offrir en contrepartie une protection environnementale supplémentaire.
De plus, les amendements proposés aux infractions et aux peines en vertu de ce projet de loi diffèrent de la version actuelle de la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie. Nous recommandons que cet article soit modifié afin de l'harmoniser davantage à la LGRVM.
Les obligations doubles liées à un permis doivent offrir une sécurité financière à plus d'un bénéficiaire pour satisfaire aux exigences relatives à la remise en état. Selon l'industrie, l'ajout de l'article 76,1 constitue un pas dans la bonne direction pour régler le problème des obligations doubles. Toutefois, nous remarquons que les accords de gestion de sécurité seront élaborés au cas par cas en fonction des promoteurs.
Le fait de régler le problème des obligations doubles dans son ensemble aidera à affermir la réputation grandissante du Nunavut comme étant un territoire de choix pour l'investissement dans de nombreux projets de développement minier, tant sur des terres appartenant à la Couronne que sur des terres appartenant aux Inuits. Nous recommandons d'approfondir l'article 76 proposé afin de clarifier les éléments que devraient contenir les ententes sur la gestion de la sécurité.
L'imposition de délais pour l'évaluation et l'approbation des demandes de permis d'utilisation des eaux permettra des analyses plus prévisibles et rapides. L'inclusion d'un pouvoir exclusif conféré à l'office des eaux du Nunavut d'accorder des prolongations de 60 jours en ce qui concerne les permis d'utilisation des eaux en vigueur est conforme à ce que l'on retrouve dans l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut.
Toutefois, selon l'option à l'étude, il semble que des prolongations ne seraient autorisées que sur la recommandation du ministre. À notre avis, cette décision devrait revenir à l'office des eaux du Nunavut qui dispose de personnel technique ayant les compétences nécessaires pour déterminer si une prolongation doit être accordée.
Il est important que les permis d'utilisation des eaux tiennent compte des risques environnementaux associés à l'exploitation minière, ainsi que des enjeux communautaires et socio-économiques.
Nous convenons que les permis d'utilisation des eaux devraient être accordés pour la durée de vie d'une mine, mais ils devraient être assujettis à un examen périodique pour s'assurer que les exigences liées à l'eau sont respectées, par opposition au processus coûteux actuel qui exige qu'une nouvelle demande soit présentée aux fins d'examen après quelques années.
En terminant, l'industrie minière est la force économique du Nord et procure déjà des avantages considérables à la collectivité. Le potentiel minéral du Nunavut est très élevé et les possibilités qu'offre le territoire sont de calibre mondial.
Nous appuyons le projet de loi S-6, mais proposons ces recommandations afin qu'il constitue un incitatif à l'investissement au Nunavut. Nous sommes impatients de poursuivre le dialogue avec le gouvernement fédéral en vue de l'élaboration des règlements.
Cela met fin à mon exposé. Merci.
Le président : Merci beaucoup. Ce n'est pas dans mon habitude, mais j'aimerais poser quelques questions. Vous avez parlé des mètres cubes — 50 m3 par rapport à 100 m3 — et souligné que cette limite devrait être la même qu'au Yukon et dans les Territoires du Nord-Ouest, si je ne m'abuse. Avez-vous eu l'occasion de vous exprimer sur ce projet de loi? Si oui, avez-vous soulevé ce point? Pourriez-vous m'expliquer pourquoi il y a une différence sur le plan des limites? Vous ignorez peut-être pourquoi il y a une différence, mais ça me paraît étrange.
Mme Kingston : Nous avons soulevé la question auprès d'Affaires autochtones dans le cadre de l'examen initial des règlements, en 2011. À notre avis, la décision d'établir la limite à 50 m3 semblait arbitraire et cette limite était trop basse. L'industrie se demandait pourquoi cette limite n'était pas conforme à celle du Yukon et des Territoires du Nord- Ouest, laquelle est fixée à 100 m3 par jour.
L'historique du dossier est plutôt flou. Nous savons que des discussions ont eu lieu entre la NTI, les organisations inuites et le gouvernement fédéral pour en arriver à ce chiffre. Mais, l'industrie a toujours soutenu que cette limite devait être plus élevée. Cependant, lorsque l'ébauche des règlements a été publiée, la limite avait été fixée à 50 m3 par jour. Depuis, nous soulignons le problème.
Le président : Quel sera l'impact sur l'exploitation minière de cet écart de 50 mètres cubes?
Mme Kingston : Il serait possible de faire fonctionner deux ou trois perceuses à la fois. Tout ce que l'on peut faire pour accroître les activités à la surface avant d'être tenu d'obtenir un permis favorisera l'exploration.
L'impact peut donc être considérable.
Le président : Vous voulez dire deux ou trois perceuses si la limite était fixée à 100 mètres cubes et non à 50 mètres cubes comme le propose ce projet de loi. Comme il est impossible de faire fonctionner une perceuse et demie, une seule perceuse pourrait être utilisée, est-ce exact?
Mme Kingston : Avec une limite de 50 m3, l'activité serait minimale.
Le président : Ma deuxième question concerne le recouvrement de coûts. Je ne suis pas convaincu que vous avez eu beaucoup à dire sur le sujet. J'ignore si vous serez en mesure de me répondre, mais sinon, ça va. Quels seraient les coûts à recouvrir pour une seule mine comparativement au capital investi dans une mine à ciel ouvert? Prenons, par exemple, la mine de Mary River. Auriez-vous une idée? Parle-t-on de 1 000 $ ou 200 millions de dollars?
M Chamberlain : Tout dépend de la mine, de l'endroit où elle est située et du processus à suivre, mais on parlerait de millions de dollars.
Il est important de comprendre qu'au Canada, de nombreuses régions procèdent au recouvrement de coûts. Certains diront que c'est logique. Dans le Nord, les Territoires du Nord-Ouest, au Yukon et, plus particulièrement, au Nunavut, en raison de l'absence de routes et d'infrastructures, les coûts liés à l'attribution des permis et les coûts accessoires liés à l'aménagement d'une mine sont beaucoup plus élevés qu'ailleurs au pays. En raison de l'isolement de ces collectivités ou de ces installations, il y a déjà une surcharge au coût d'aménagement. L'industrie craint que l'ajout de mesures pour le recouvrement de coûts ne place les projets au Nunavut dans une position désavantageuse par rapport à d'autres projets ailleurs au pays.
Le président : Il y a des régions très éloignées dans ma province. L'exportation minière se fait dans les montagnes. Il fait froid et il n'y a aucun accès. On y fait la même chose que vous, au Nunavut. Je comprends que le Nunavut est plus éloigné d'un grand centre, mais on y produit de l'électricité, notamment, et l'on y pratique le recouvrement de coûts.
M Chamberlain : Il est vrai qu'il existe des régions tout aussi éloignées ailleurs au pays. Selon nous, la ligne de base au Nunavut est plus basse. J'imagine que tout dépend de la perspective que l'on adopte, mais toutes les collectivités au Nunavut sont éloignées et aucune ne dispose d'infrastructures. Dans le Nord de l'Ontario ou de la Colombie- Britannique, pour participer à des audiences ou rencontrer des organismes de réglementation, il faut prendre un avion. Mais, dans les circonstances, on pourrait considérer que ce n'est pas très loin. Au Nunavut, il faut parcourir cette distance simplement pour se rendre ailleurs sur le territoire. Pour rencontrer les représentants de collectivités intéressées sur le territoire du Nunavut — il existe 25 collectivités et elles sont toutes accessibles par avion. Je suis convaincu que vous avez tous visité la région. Vous savez donc que les déplacements y sont difficiles. Un simple changement dans la météo et tous les plans sont bouleversés.
Nous considérons que le coût est plus élevé au Nunavut qu'ailleurs, ce qui ne signifie pas que l'éloignement ne présente pas de problèmes ou de défis dans d'autres régions du pays également.
Le président : J'en suis conscient. Je peux comprendre la réalité avec laquelle vous devez composer. Merci beaucoup. J'accorde la parole au vice-président, le sénateur Massicotte.
Le sénateur Patterson : J'aurais quelque chose à ajouter à votre première question, monsieur le président.
Le président : D'accord. Soyez bref.
Le sénateur Patterson : Oui. J'aimerais que le témoin apporte un éclaircissement. Même si je comprends que la question du seuil d'utilisation d'eau soit importante, qu'il s'agisse de seuils de 50 ou de 100 mètres cubiques par jour pour le forage, conviendriez-vous que cela ne concerne en rien le présent projet de loi et que pour corriger la situation, vous souhaitez que le ministère prenne une disposition réglementaire? Ce projet de loi ne comprend rien qui vous préoccupe à cet égard, n'est-ce pas?
Mme Kingston : Merci, sénateur. Effectivement, le changement de la manière dont on mesure l'eau de résulte pas de la modification prévue dans le projet de loi, mais d'une décision stratégique qui a été prise. Comme cette dernière a un lien direct avec l'utilisation de l'eau, nous avons jugé approprié de soulever la question dans ce dossier pour faire connaître nos préoccupations.
Le président : Merci, sénateur, de cet éclaircissement. Heureusement que vous êtes ici pour présenter le point de vue du Nunavut.
Le sénateur Massicotte : Merci beaucoup de témoigner ce matin. Mes questions portent essentiellement sur le même sujet. Quand j'ai lu l'exposé que vous avez fait précédemment, j'ai remarqué que vous mettez en lumière de nombreuses difficultés que comprendrait le projet de loi S-6, et j'en suis arrivé aux mêmes questions.
Dans quelle mesure avez-vous été consultés et avez-vous pu exprimer vos préoccupations? Selon ce que j'ai entendu jusqu'à présent, de la part des Premières Nations notamment, c'est que les gens ont été énormément consultés et sont fort satisfaits du processus de consultation. Rien n'est jamais parfait, mais les gens étaient très satisfaits des conclusions.
Mais en lisant ce document, d'aucun aurait l'impression que vous avez beaucoup de préoccupations. J'ai la même interprétation. Je pense qu'une bonne partie du problème concerne la réglementation et peut faire l'objet de décisions prises à l'échelle locale. Je comprends que cela cause de l'incertitude, car il y a assurément des définitions et des termes nouveaux, puisqu'un utilise l'eau recyclée dans votre définition de volume, mais pourriez-vous simplement nous indiquer si vous appuyez le projet de loi S-6? Vous a-t-on vraiment entendu ou avez-vous de sérieuses objections? Dans quelle mesure le problème est-il essentiellement lié à une incertitude qu'on pourrait arriver à éliminer, ce qui est probablement une bonne chose, puisque les décisions se prendraient à l'échelle locale?
Mme Kingston : Merci de cette question. Je pense qu'en général, nous appuyons le projet de loi; nous sommes satisfaits que des amendements soient proposés et qu'on apporte une certaine cohérence et des éclaircissements, mais nous avons pensé que l'occasion était belle de soulever autant de problèmes que possible. Je suppose que la bonne nouvelle, c'est qu'il y a beaucoup d'activité en cours et que quantité d'entreprises et d'investisseurs s'intéressent au Nunavut. Nous avons donc beaucoup de commentaires et d'intérêt quand des modifications législatives sont proposées. Nous avons eu l'occasion de faire une bonne analyse du projet de loi.
Certainement, pour être juste envers le personnel, nous avons bénéficié de quelques exposés, notamment lors du Symposium minier du Nunavut, et d'une rencontre officielle que nous avons eue avec un certain nombre de nos membres et des employés pour passer en revue les détails et, essentiellement, les problèmes que nous avons mis en lumière ici, un par un, ainsi que pour parler des modifications qu'on proposait d'apporter. Alors oui, nous dirions que nous avons été consultés, mais que nous considérions prudent de présenter nos préoccupations afin d'en discuter ici.
Ici encore, l'autre message est que nous voudrions des consultations continues sur les règlements qui sont proposés. Nous aimerions avoir cette occasion.
En ce qui concerne le premier problème, celui de l'eau, qui résulte en fait d'une modification de la politique, ce n'était rien que cela. Cela n'avait rien à voir avec le fait que ces modifications réglementaires arrivaient. Cette mesure a un effet important et immédiat sur notre industrie actuellement; nous considérions donc important de souligner la situation et de contribuer à faire connaître les conséquences potentiellement graves que cette décision pourrait avoir sur notre industrie au Nunavut.
M. Chamberlain : Si vous me le permettez, j'ajouterais que ce sont des observations, que je qualifierais de constructives, qui viennent d'un groupe de gens possédant de l'expertise et de l'expérience sur le terrain en temps réel. Ainsi, en ce qui concerne l'eau et le recyclage, par exemple, les gens avec lesquels Liz et moi-même traitons et travaillons au sein du conseil d'administration de la chambre œuvrent sur le terrain dans des installations exploitées au Nunavut qui utilisent de l'eau, et ces gens peuvent vraiment affirmer qu'ils doivent en restreindre l'utilisation ou qu'ils savent qu'ils vont devoir en restreindre l'utilisation en raison de cette limite, et qu'ils savent que cela aura des conséquences sur leur capacité d'effectuer l'exploration nécessaire au cours d'une saison d'exploration très brève.
Ce que vous entendez, c'est généralement un appui à l'égard du projet de loi S-6, mais aussi des commentaires qu'on espère constructifs qui peuvent être utilisés dans ce processus ou dans un processus réglementaire. L'ennui, c'est que parfois, certaines des réponses que nous obtenons ne nous rassurent pas concernant un point comme celui des 50 ou des 100 mètres cubiques d'eau; nous considérons donc important de soulever ce point maintenant. C'est une question importante, qui aura des répercussions directes sur la quantité d'exploration effectuée.
Dans l'environnement économique actuel en ce qui concerne l'exploitation minière et les produits relatifs aux mines, en particulier dans le Nord, croyez-moi, chaque directeur de mine surveille le coût de ces activités et les compare à celui d'activités similaires dans d'autres régions du Canada et du monde. C'est un marché très mondialisé.
Vous entendez donc les commentaires très précis de gens qui, sur le terrain, observent les répercussions de ces modifications ou s'inquiètent de ce qui pourrait arriver si certains changements ne sont pas apportés dans le cadre du processus réglementaire ou par un autre moyen.
Le sénateur Patterson : Je sais que le recouvrement des coûts préoccupe grandement la chambre, et comme les infrastructures, les routes et les ports font défaut au Nunavut, c'est une perspective peu réjouissante pour les développeurs. Vous avez recommandé que ces dispositions soient éliminées ou non imposées, et je suppose qu'on vous a dit que cela cadrait avec les modifications apportées à la LCEE et les mesures législatives des Territoires du Nord- Ouest et du Yukon.
Je me demande si vous conviendriez qu'un jour — il y a deux mines au Nunavut, et les investisseurs s'intéressent fortement aux riches gisements minéraux du Nunavut —, quand les prix des produits de base changeront dramatiquement, on pourrait construire des infrastructures et le recouvrement des coûts pourrait devenir abordable. Je me demande si vous pourriez me donner votre avis à ce sujet.
M. Chamberlain : C'est fort possible, je crois. Avec le temps, à mesure que s'érigent les infrastructures, l'environnement réglementaire sera ou peut être très différent. Je crois cependant que, comme vous l'avez fait remarquer, que nous sommes confrontés à une réalité où il n'y a pas d'infrastructure sur place.
Pour faire suite à la remarque du président, le Nunavut, comme d'autres régions du Canada, est composé de communautés éloignées où le manque d'infrastructures ne ressemble pas à ce qu'on voit dans le reste du pays, certainement pas dans les territoires.
Observera-t-on un changement alors? Nous espérons que oui, mais il faudra beaucoup de temps. Il y a deux mines en exploitation, et d'autres sont en développement, mais les choses avancent lentement. Si le fardeau s'alourdit sur les plans des coûts et de la réglementation, on craint que certaines des entreprises qui ont ces projets à l'œil puissent penser qu'il serait plus avisé de dépenser leur argent ailleurs. Il y a une différence substantielle au chapitre du coût maintenant; voilà ce qui nous préoccupe.
Le sénateur Patterson : Merci de cette réponse. Vous avez fait une observation sur la question du double cautionnement, à laquelle je sais que la chambre travaille probablement depuis trois ans, et le paragraphe 76(1) est une démarche positive. Je suis enchanté de l'entendre, car ce point constitue un problème important pour les développeurs qui doivent déposer deux cautionnements, un pour les terres de la Couronne et un pour celles des Inuits.
Vous avez recommandé d'apporter un éclaircissement quant aux éléments que les ententes de sûreté devraient comprendre afin d'apporter un peu plus de certitude.
Je me demande si vous avez cherché à voir s'il était plus avisé d'apporter ces précisions dans le projet de loi ou d'adopter une approche plus souple, en définissant ces éléments dans la réglementation?
Mme Kingston : Il me semble sensé de les indiquer dans la réglementation. Nous voulions soulever cette question techniquement assez complexe qui semble propre au Nunavut parce qu'il y a essentiellement deux propriétaires fonciers avec lesquels nous traitons souvent. On considère donc qu'il convient de déposer un cautionnement en vue d'une réclamation, mais on se demande quels en seront le détenteur et le montant, et la manière dont ces cautions seront gérées fait l'objet de longues discussions. Nous sommes très satisfaits de voir qu'on a tenu compte du fait que cette question va se poser dans l'avenir dans le projet de loi en conférant des pouvoirs au ministre pour qu'il signe des ententes une fois qu'on est parvenu à un accord, et que l'office des eaux du Nunavut doive prendre ces ententes en compte quand il fixe le montant de la sûreté.
Il faudra discuter encore longuement pour en arriver à un accord à cet égard. Pour vous donner des paramètres sur ce que ces ententes devraient comprendre, elles devraient indiquer le genre de mesures qui seront prises et préciser si on utilise un modèle de réclamation afin de déterminer les coûts ou les pourcentages. On peut utiliser divers outils, et si on apportait des éclaircissements ou des détails dans les règlements, cela aiderait les gens à s'établir et à mettre ces ententes en place en temps opportun.
Le sénateur Patterson : J'ai terminé mes questions, mais le sénateur Massicotte a fait référence aux Premières Nations dans le projet de loi. À titre de membres du comité directeur, lui, vous et moi savons que Nunavut Tunngavik a communiqué avec nous, mais j'aimerais, avec votre permission, en parler au comité.
Le président : Oui.
Le sénateur Patterson : Il s'agit d'un bref courriel que nous a envoyé Malaya Mikijuk, adjointe administrative de la présidente de Nunavut Tunngavik Incorporated, le 16 septembre 2014. Elle répondait à une invitation à comparaître que le comité a fait parvenir à Nunavut Tunngavik. Ce courriel, adressé à Jody Turner, au nom du comité, indiquait ce qui suit :
Nous ne voyons pas quel avantage NTI aurait à comparaître devant le comité au sujet de ce projet de loi. Dans la récente ébauche de lettre de la présidente Cathy Towtongie au ministre Bernard Valcourt, nous avons indiqué que NTI ne s'oppose pas aux modestes modifications proposées à la Loi sur les eaux du Nunavut et le Tribunal des droits de surfaces du Nunavut (le pouvoir accordé au ministre de conclure des ententes relatives à la gestion des sûretés, et la solution proposée par AADNC quant aux doubles sûretés).
J'aimerais que ce message figure au compte rendu.
Le président : C'est excellent. Je suis heureux que vous l'ayez lu, sénateur Patterson.
Le sénateur Black : Merci beaucoup de cet excellent exposé, qui nous a été fort utile. J'ai une question pour éclaircir un point. Ai-je bien compris, d'après les réponses faites aux questions de mes collègues ici présents, que vous considérez que la plupart des modifications devraient être mises en œuvre par voie de règlements plutôt qu'en modifiant la loi?
Mme Kingston : C'est effectivement le cas, oui.
Le sénateur Black : Merci beaucoup.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Bienvenue et merci beaucoup pour vos témoignages. Un peu comme le disait le sénateur Black, vos témoignages sont très instructifs. J'aimerais poursuivre dans la même veine que celle du sénateur Patterson.
L'eau est une ressource, un intrant, dans la production minière importante. Premièrement, quel pourcentage l'eau représente-t-elle en matière du coût de l'intrant, avant et après? Deuxièmement, à quel pourcentage le projet de loi fera- t-il monter ce coût s'il y a augmentation, à moins qu'il y ait stabilisation?
[Traduction]
M. Chamberlain : Je répondrai brièvement, et Mme Kingston peut ajouter quelque chose si elle le souhaite. La réponse brève, c'est que j'ignore le seuil de coût. Mais ce que nous essayons de faire comprendre ici, c'est que c'est plutôt une question de seuil critique que de coût. L'exploration et les activités minières, de par leur nature même, utilisent une importante quantité d'eau comme outil dans la transformation. Les limites proposées réduiront considérablement le forage ou le traitement pouvant être entrepris, ce qui ralentira les activités des sociétés et réduira leur capacité d'accomplir le travail, tout en augmentant les coûts. On pourra donc faire moins de travail d'exploration des ressources, et ces dernières seront exploitées plus lentement en raison de ce problème supplémentaire de seuil à respecter d'entrée de jeu.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Cela perturberait donc plus l'exploration que l'exploitation des minerais?
[Traduction]
M. Chamberlain : Oui. En clair, dans l'industrie minière du Nunavut en particulier, laquelle ne compte que deux mines en exploitation, une part substantielle de l'activité économique est liée à l'exploration. Cette dernière est une étape essentielle qu'il faut entreprendre pour établir une mine productive fournissant beaucoup d'activités et d'emplois. Si on ne peut entreprendre l'exploration de façon efficace, rentable et assez rapide dans un environnement très difficile, il y aura beaucoup moins d'activités minières dans l'avenir. Cela aura des répercussions très réelles.
Même si certains diront que ce n'est que de l'exploration et que ce n'est pas bien grave, la chambre voudrait signifier très clairement que tout ce qui limite la capacité d'exploration minière dans le Nord au cours de la difficile et très brève saison aura de sérieuses conséquences, à part le coût.
Mme Kingston : Cela dépend aussi de qui fait le travail. S'il s'agit d'une grande société minière, comme Agnico Eagle ou Baffinland, elle trouve ses revenus à l'interne grâce aux recettes tirées de ses mines en exploitation; elle dispose donc de ressources internes qu'elle peut appliquer à ce genre de coûts. D'une certaine manière, ce n'est guère intéressant d'ajouter des coûts aux activités, mais elle a des ressources ou est plus susceptible d'en avoir que les petites entreprises d'exploration qui doivent compter sur le soutien d'investisseurs externes pour faire avancer leurs projets.
En ajoutant des coûts supplémentaires et en faisant en sorte qu'il soit plus difficile pour ces entreprises de fonctionner et de faire progresser leurs projets, on les soumet à une pression supplémentaire et les oblige à atténuer les inquiétudes de leurs investisseurs et à les convaincre que leur investissement portera fruit dans une mine en exploitation un jour, en espérant que ce soit dans un proche avenir. Cette situation exerce une pression considérable sur l'industrie de l'exploration et sur les petites sociétés qui ne disposent pas de leurs propres sources de revenus internes. Elles doivent se tourner vers l'extérieur et intéresser des investisseurs à ces projets.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Si les coûts ne sont pas absorbés par les compagnies minières, qui le fera?
[Traduction]
M. Chamberlain : Il n'y aura tout simplement pas d'exploration. Comme Mme Kingston l'a indiqué, les petites compagnies minières font beaucoup d'exploration parce que l'industrie minière est différente de bien des secteurs, qui ont divers niveaux d'activités. L'exploration est souvent effectuée par de petites sociétés minières, et plus tard, si ces activités permettent de trouver une ressource qui semble précieuse et exploitable, cette dernière sera alors extraite par une plus grande société dotée de plus de ressources. Si une entreprise éprouve de la difficulté à trouver des fonds pour faire de l'exploration tout en étant confrontée à une situation difficile, un coût élevé ou d'un problème de seuil, comme je l'ai expliqué, elle ne fera simplement pas d'exploration, certainement pas dans la même mesure.
Et c'est ce que nous voyons. Dans le graphique de l'exposé de Mme Kingston qui montre les niveaux d'exploration, on constate une baisse marquée au cours des deux dernières années, laquelle est en partie attribuable à l'état des marchés mondiaux de produits de base, mais nous pouvons vous dire de façon empirique qu'elle est aussi en partie attribuable aux incertitudes suscitées par les modifications apportées à la réglementation au Nunavut. C'est un problème complexe, bien sûr, mais aussi important.
Le sénateur Mitchell : Je vous remercie tous les deux pour vos exposés. Je m'intéresse à la différence. Pourquoi le choix d'un seuil de 50 au lieu de 100? D'où cela est-il venu? Est-ce dépassé par la technologie qui exige maintenant plus d'eau? Ou bien a-t-on estimé qu'il n'y a pas assez d'eau?
Mme Kingston : Il y a beaucoup d'eau, alors le problème n'est pas vraiment là. L'utilisation d'eau sans permis représente en réalité un pas dans la bonne direction aussi. Avant, toute activité en milieu terrestre exigeait un permis; il n'y avait absolument aucun seuil pour une activité minimale en milieu terrestre. C'est donc un pas dans la bonne direction.
Quand un seuil a été établi par règlement, on aurait dit que la décision de l'office des eaux du Nunavut était arbitraire. Malgré nos efforts pour faire augmenter le seuil, on a estimé que cela devait demeurer.
Sur le plan de la cohérence, qui semble faire partie des objectifs de ce projet de loi, nous nous sommes demandé pourquoi cela ne pourrait pas correspondre à ce qui se passe dans les Territoires du Nord-Ouest et au Yukon. Il était logique que le seuil soit haussé à 100 mètres cubes par jour.
Le sénateur Mitchell : En ce qui concerne la sécurité et l'assainissement, est-il arrivé qu'on n'assainisse pas convenablement des sites? Pourriez-vous nous parler de cela et nous dire comment cela aidera?
Mme Kingston : Oui, malheureusement, cela arrive de temps en temps. Encore une fois, pour les bons exploitants, ce n'est pas un problème. La restauration des lieux fait partie des étapes de l'exploitation minière. Vous faites donc votre travail d'exploration, vous exploitez la mine, puis, à la fin, vous devez fermer la mine et laisser les lieux tels qu'ils étaient au début. Si vous ne versez pas de caution ou ne mettez pas assez d'argent de côté pour le faire, malheureusement, le propriétaire des terres — ou en général, Affaires autochtones — devra s'occuper de la remédiation des terres.
C'est ce qui tend à se produire en raison de certaines expériences vécues dans le passé, et ce, partout dans le monde. On exerce bien plus de pression maintenant, avant même que le projet soit lancé, pour qu'il y ait assez d'argent de côté, sous forme de caution, pour permettre le nettoyage du site à la fin. L'exploitation d'une mine est limitée — la mine finit par fermer —, et l'entreprise a l'obligation de veiller à ce que le site soit nettoyé. Cette mesure garantira cela.
La façon de fixer la caution est très importante, mais c'est une partie naturelle du cycle. C'est requis, et c'est un élément acceptable du processus d'exploitation minière.
Le sénateur Wallace : Madame Kingston, j'aimerais revenir sur la question du recouvrement des coûts et sur votre suggestion de retirer du projet de loi les dispositions relatives au recouvrement des coûts. Pourriez-vous nous expliquer comment vous comprenez les types de coûts qu'on cherche à recouvrer au moyen de ces dispositions?
Mme Kingston : Il y a une chose qui n'a pas encore été mentionnée dans nos discussions de ce matin et qui est un peu différente au Nunavut, et c'est le principe des institutions de gouvernement populaire. Il s'agit d'un groupe de conseils relevant de l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut. Ils sont là pour garantir un processus réglementaire rigoureux.
En ce moment, le projet de loi ne mentionne pas de recouvrement des coûts pour le conseil, et selon notre compréhension préliminaire, les fonctionnaires du gouvernement fédéral recouvreraient les coûts relatifs à la tenue d'audiences pour les renouvellements de permis, les processus de demande et tout cela.
En quelque sorte, nous craignons de subir deux coups. Il faut recouvrer les coûts relatifs aux employés du gouvernement fédéral qui doivent consacrer du temps à examiner les permis ou voyager pour assister à des audiences, entre autres, mais puisque nous avons ce groupe supplémentaire d'agences, ou un volet réglementaire additionnel au Nunavut, ce qui nous préoccupe maintenant, c'est de savoir si nous devrons recouvrer les coûts, ou rembourser les coûts, pour les deux groupes. C'est une question que nous nous posons, et nous aimerions des éclaircissements à ce sujet.
C'est essentiellement pour toute demande, tout renouvellement ou tout processus visant un permis d'utilisation des eaux — ou pour la gestion d'un tel permis. Pour tous les intervenants, il faut recouvrer les coûts de leur participation.
Le sénateur Wallace : C'est ce que je comprends.
Monsieur Chamberlain, vous avez fait une observation au sujet des coûts et de l'infrastructure insuffisante, et je ne voulais pas qu'on pense que nous parlions peut-être du recouvrement des coûts de récupération du capital, car ce n'est manifestement pas l'objectif. Mais l'infrastructure insuffisante fait grimper les coûts relatifs à la présence aux audiences et ce genre de choses.
Les entreprises veulent minimiser leurs coûts. Cela se comprend. Mais si ces coûts ne sont pas assumés par l'industrie, qui profite de l'entreprise — la communauté aussi, mais c'est l'industrie qui en profite directement —, il faut que quelqu'un les assume, et ce ne sera pas le contribuable ou, dans le cas du Nunavut, le citoyen du Nunavut.
N'est-il pas raisonnable que l'industrie assume la responsabilité des coûts réels? Ce sont ses applications et ses développements qui causent les coûts. N'est-il pas raisonnable que l'industrie les assume en entier ou qu'elle en assume au moins une grande partie?
Mme Kingston : Ce serait raisonnable. Mais nous voulons d'abord savoir ce qui suit : quels sont les paramètres de ces coûts, et comment les coûts seront-ils gérés? Les coûts seront-ils raisonnables?
Nous nous interrogeons aussi sur le moment. La première recommandation voulait que cela soit retiré, mais par la suite, on a recommandé que ce soit remis à plus tard.
En ce moment, l'industrie est en difficulté. Les marchés sont en baisse et les coûts des produits de base sont faibles, ce qui exerce beaucoup de pression sur l'industrie de l'exploration.
Nous essayons de mettre en place cette jeune industrie au Nunavut. Nous parlons des citoyens du Nunavut, mais le taux de chômage est très élevé au Nunavut. C'est une économie jeune, et nous croyons que notre industrie peut remédier à cela. Pourquoi donc mettre en place maintenant des mesures qui vont faire obstacle là cela?
Nous essayons de résoudre cela et nous travaillons à lancer cette industrie de sorte que l'économie profite des revenus et des taxes. Nous serions alors mieux en mesure de recouvrer ce genre de coûts.
C'est une pression supplémentaire qui est exercée à un bien mauvais moment sur notre industrie. Nous demandons que vous teniez compte de cela.
Le sénateur Wallace : Je dirais que pour les législateurs, il devient difficile de faire face à un problème de ce genre et d'essayer d'ajuster les choses de manière cyclique, selon les changements dans la nature de l'industrie. Il y a des hauts et des bas. Il serait difficile de dire que, « dans les périodes creuses, les coûts ne seront pas transmis, alors que quand les choses vont bien, ils le seront ». C'est très difficile à faire.
Je pense que l'idée serait d'avoir quelque chose de raisonnable et de compréhensible, de sorte que si vous décidez de faire des affaires dans le Nord, vous compreniez cela dès le début et sachiez à quoi vous en tenir en prenant vos décisions. Le gouvernement ne va pas décider si vous allez investir ou pas.
M. Chamberlain : J'ai quelques observations à faire. Premièrement, votre argument au sujet des changements cycliques aux règlements relatifs au recouvrement des coûts est valable. Il en vaut la peine de souligner ce que Mme Kingston a dit au sujet de la jeunesse de cette industrie. Le Nunavut a 15 ans, à peu près, et l'industrie minière est vraiment jeune. L'industrie minière est de loin le seul moteur économique privé du Nunavut. Je pense que la question du sénateur Patterson à propos des possibilités d'avenir rejoint ce que vous dites.
Je pense que nous ne parlons pas tant de la nature cyclique de l'industrie que de la nouveauté de l'industrie; l'exploitation minière au Nunavut a besoin de soutien jusqu'à ce qu'elle atteigne une masse critique. On ne sait pas quand cela arrivera, mais avec la croissance et le développement de l'infrastructure, de la réglementation et de l'investissement, on pourrait s'attendre à ce que l'industrie n'ait pas besoin d'autant de soutien.
J'aimerais aussi dire que je crains que votre question donne l'impression que les entreprises minières privées profitent de la situation, au détriment du particulier. Les entreprises minières dépensent énormément d'argent, de l'argent en plus, pour travailler là, et elles prennent cette décision parce que ce sont des entreprises, qu'elles voient une ressource et qu'elles savent que cette ressource peut être exploitée. Bien sûr que c'est pour le profit, mais ce sont les citoyens du Nunavut qui vont profiter des emplois supplémentaires et de l'activité économique accrue que cela amènera. Je pense qu'il est important de peser toutes ces choses. Je ne dis pas que vous ne le faites pas, mais je tenais à le souligner.
Le sénateur Wallace : Ce qu'il en coûte pour faire des affaires varie effectivement d'un territoire à l'autre. Nous savons cela dans toutes les industries. C'est ce que je dis. Merci beaucoup.
La sénatrice Ringuette : J'ai une question supplémentaire. Si je comprends bien, en ce qui concerne les coûts, le fédéral et le territoire interviennent. Cela ne devrait donc pas différer d'un projet interprovincial qui exigerait que la province et le fédéral évaluent les coûts pour le promoteur du projet.
Pour faire suite à la question du sénateur Wallace, j'aimerais savoir si vous avez pensé à comparer le texte législatif actuel à ce qui se passe ailleurs au Canada.
M. Chamberlain : Les coûts des permis et ce genre de choses?
La sénatrice Ringuette : Oui.
M. Chamberlain : Je peux en parler un peu et laisser Mme Kingston en parler si elle a quelque chose à ajouter.
Je suis un juriste spécialiste des questions environnementales. Je pratique le droit de l'évaluation environnementale à l'échelle du pays. Mes clients sont pour la plupart en Ontario et au Nunavut, mais je suis actif dans les Territoires du Nord-Ouest et j'ai participé à des projets au Québec, en Saskatchewan, en Alberta et ailleurs. Ce sont les principaux endroits où je pratique.
Si vous me demandez quels sont les coûts accessoires de la conception de projets et comment ils se comparent, je ne peux vous donner de chiffres, mais je peux vous dire que les coûts accessoires des projets situés dans n'importe quelles collectivités éloignées seront toujours plus élevés, et que les coûts accessoires relatifs aux projets situés au Nunavut seront parmi les plus hauts du pays. J'hésite à affirmer qu'ils sont de loin les plus élevés parce qu'il y a des collectivités éloignées ailleurs, comme je l'ai déjà mentionné, mais les coûts de base au Nunavut sont nettement plus élevés que partout ailleurs en raison de la géographie.
En plus, l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut a donné lieu à la création des IGP, comme Mme Kingston l'a mentionné, ainsi qu'aux processus connexes. Je ne dis pas que les autres provinces et territoires n'ont pas leurs propres processus — ils en ont —, mais je dirais qu'au Nunavut, compte tenu de la complexité de l'intervention fédérale, des institutions de gouvernement populaire relevant de l'accord sur les revendications territoriales, et de la participation requise des communautés autochtones — les Inuits, en fait —, le régime est plus complexe et plus coûteux sur les plans de la réglementation et de la géographie que partout ailleurs au pays.
Je dois cependant vous faire remarquer qu'il s'agit d'un système très efficace. En tant que praticien de l'évaluation environnementale, je prononce souvent des discours partout au pays et j'écris sur l'évaluation environnementale. J'ai vu le déroulement du processus, et je pense qu'il s'agit d'un des processus d'évaluation environnementale les plus efficaces du pays. Cependant, il est plus coûteux.
Le président : Merci. C'est la fin des questions pour le présent segment.
Madame Kingston, monsieur Chamberlain, je vous remercie beaucoup de votre exposé et de vos réponses à nos questions. Nous vous en savons gré.
Pour la deuxième partie de notre séance, je suis très heureux d'accueillir, par vidéoconférence de Calgary, deux membres de l'Association canadienne des producteurs pétroliers : Alex Ferguson, vice-président, Politique et Environnement, et Aaron Miller, gestionnaire, Nord Canada.
Je vous remercie d'être avec nous aujourd'hui. Nous avons hâte de vous entendre. Nous avons une heure et nous devrons être partis à la fin de l'heure. Après vos exposés, il y aura les questions des sénateurs, et nous sommes impatients d'entendre vos réponses. La parole est à vous, monsieur.
Alex Ferguson, vice-président, Politique et environnement, Association canadienne des producteurs pétroliers : Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité. Je suis Alex Ferguson et je suis à l'ACPP. Je suis accompagné d'Aaron Miller, gestionnaire, Nord du Canada, qui va s'occuper de vous faire part des détails.
Je vous rappelle que l'ACPP représente une partie très importante de l'industrie pétrolière et gazière canadienne en amont. Nos membres trouvent et exploitent environ 90 p. 100 des ressources dans ce secteur, ce qui correspond à un bassin d'investisseurs assez considérable à l'échelle du Canada, et nous espérons accroître cet investissement dans certains des territoires nordiques où les occasions sont bonnes, d'après nous.
Nous appuyons l'esprit du projet de loi S-6 et les dispositions qu'il comporte. Nous voyons tout projet de loi qui comporte le mot « amélioration » comme une étape très positive pour nous, en tant que Canadiens, et pour l'industrie pétrolière en particulier. Pour les détails, je vais laisser la parole à M. Miller, qui va vous présenter des observations, puis nous allons répondre à toutes vos questions sur notre secteur.
Aaron Miller, gestionnaire, Nord du Canada, Association canadienne des producteurs pétroliers : Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, je vous remercie de nous donner l'occasion de nous exprimer devant vous aujourd'hui, et de vous faire part de notre point de vue au sujet du projet de loi S-6. Nous allons nous concentrer sur la partie 1 du projet de loi, c'est-à-dire sur les amendements proposés à la Loi sur l'évaluation environnementale et socioéconomique au Yukon, aussi appelée la LEESY, et surtout sur ce que cela signifie pour le secteur pétrolier du Yukon, lequel se trouve dans une phase critique de démarrage qui, bien franchement, pourrait se poursuivre ou s'arrêter net.
J'aimerais commencer par vous parler, pendant quelques minutes, du caractère nordique et vierge des paysages du Yukon. Les jeunes entreprises d'exploration qui ouvrent actuellement la voie au Yukon sont essentielles pour l'avenir du pétrole qui s'y trouve, mais elles sont aussi des catalyseurs indispensables à l'industrie pétrolière et gazière partout au Canada.
De telles entreprises ont été des agents catalyseurs au début de l'exploration, dans des provinces qui en sont maintenant à un stade de développement avancé, comme l'Alberta lorsqu'elle a entrepris sa propre phase d'exploration initiale, il y a bien des décennies.
La souplesse et le caractère entrepreneurial de ces compagnies ont été déterminants non seulement pour permettre l'exploitation des ressources, mais aussi pour aider l'industrie tout entière à se développer.
Ces compagnies sont essentielles pour les territoires éloignés comme le Yukon, car, en plus d'annoncer le développement commercial futur, leurs premières explorations traceront la voie aux compagnies, petites et grandes, qui les suivront en fournissant des informations de base sur le potentiel de ressources, ce qui permettra de déployer des efforts ciblés et de réduire l'incertitude des résultats.
Cette base indispensable de connaissances sur la géologie et les bassins est vitale, car plus une compagnie d'exploration pourra recueillir de données et d'informations, mieux ce sera pour les différentes parties concernées, tant les organismes de réglementation, les organismes directeurs, les Premières Nations et divers autres intervenants.
Un programme d'exploration très solide et très rigoureux qui pourra être mis en œuvre sans obstacles ni délais inutiles sera le meilleur moyen d'évaluer le potentiel de ressources et de d'atténuer les risques opérationnels.
C'est à ce moment-là, c'est-à-dire après une phase d'exploration approfondie et opportune, et seulement à ce moment-là, que les prospecteurs auront une idée plus exacte de la taille et de l'étendue des ressources potentielles, de la viabilité commerciale des projets, et, en fin de compte, de l'envergure des impacts environnementaux et socioéconomiques éventuels, si la viabilité de ces projets se confirme.
De par sa nature, l'exploration présente des risques élevés, et, par-là, j'entends des risques qui influent sur la probabilité de réussite commerciale, car elle ne débouche pas souvent sur l'exploitation d'hydrocarbures à un niveau économique. Telle est sa nature.
Parlons maintenant un peu plus des particularités du Yukon. L'intéressante plaine Eagle est largement sous- explorée et inexplorée, puisque la prospection y a commencé dans les années 1950 et s'y est poursuivie jusqu'au début des années 1970, puis a considérablement diminué.
Depuis 1972, on y a foré seulement quatre puits, avant que l'activité ne recommence à augmenter, il y a quelques années. En tout, on a creusé 38 puits dans le bassin, la majorité, bien sûr, durant la phase initiale d'exploration, il y a 50 ans.
Depuis, les choses ont bien changé. La technologie et l'innovation dont dispose aujourd'hui l'industrie pétrolière et gazière, par rapport aux outils relativement rudimentaires de cette première phase d'activité, qui remonte à plusieurs décennies, ouvrent la voie à un tout nouveau paradigme en matière de potentiel d'exploration.
Pour ne nommer que quelques-unes de ces nombreuses innovations, il y a le forage horizontal. Et, au stade initial de l'exploration, il faut mentionner la capacité de traiter les données sismiques. Dans les décennies antérieures, la sismique 2D, plus rudimentaire, constituait la norme. Maintenant, l'exploration utilise souvent la sismique 3D.
Bref, on peut extraire plus de données, plus rapidement et plus efficacement. Au cours des deux dernières années, on a creusé quatre puits dans la plaine Eagle, et on a fait une grande étude sismique 3D, la première jamais faite au Yukon. Cela dit, il faut continuer à forer pour poursuivre l'exploration et évaluer la viabilité de différents types de zones de production avant d'envisager quelque plan que ce soit.
Les prospecteurs ont besoin de données claires, cohérentes et d'un certain niveau de prévisibilité dans ce processus. Ils ont aussi besoin de travailler dans un environnement où les éléments déclencheurs d'une réglementation et d'une évaluation sont à la mesure du profil de risque et du caractère des activités d'exploration. C'est la raison pour laquelle l'ACPP appuie les objectifs du gouvernement consistant à améliorer l'efficience et l'efficacité des régimes du Nord, tout en maintenant de solides normes environnementales. Étendre ces réformes au Yukon permettra d'attirer et de favoriser les investissements qui contribueront à la création d'emplois, à la croissance économique et à la prospérité du Yukon et du Canada tout entier.
Bien sûr, la LEESY est une loi fondamentale, et les changements qui y sont proposés sont très importants pour la jeune industrie qui se développe sur ce territoire. Les décisions opérationnelles et en matière d'investissements sont prises en tenant compte du degré de prévisibilité dans le processus d'examen, particulièrement en ce qui a trait à la portée et au calendrier. Cette prévisibilité est nécessaire pour que les travaux puissent se faire pendant la courte période d'activité saisonnière.
Notre industrie est mondialisée, comme vous le savez, et les projets d'exploration et d'exploitation du pétrole et du gaz dans le Nord doivent livrer une concurrence féroce aux autres projets, ailleurs au Canada et dans le monde, pour accéder aux investissements limités.
La réduction des risques et des incertitudes dans le calendrier d'examen des projets, comme le propose cette mesure législative, contribuera à améliorer la compétitivité du Yukon.
C'est la raison pour laquelle l'ACPP applaudit la modification proposée à la LEESY en ce qui concerne la phase d'examen de la pertinence, qui entre maintenant dans le calendrier proposé pour les évaluations, les études préalables et les examens. Par ailleurs, les modifications proposées à l'article 49 permettront aussi d'avoir un échéancier simplifié et plus efficace, puisqu'une nouvelle évaluation ne sera pas requise quand l'autorisation sera renouvelée ou modifiée, à moins que, de l'avis de l'office, un changement majeur ait été apporté au projet d'origine.
Maintenant, même s'il existe un potentiel de ressources au Yukon, on attend, pour la plupart de ces ressources, de savoir s'il serait économiquement viable de les exploiter, et leur évaluation opportune et rigoureuse pendant la phase d'exploration sera essentielle à leur mise en valeur.
Je tiens à préciser que le Yukon et le Nord dans son ensemble n'affrontent pas seuls ces défis, puisque l'industrie pétrolière et gazière canadienne en affronte aussi beaucoup.
Que ce soit dans des provinces avancées productrices de ressources ou dans de possibles nouvelles zones de développement, les obstacles communs au développement de l'industrie pétrolière et gazière au Canada sont notamment : l'accès aux marchés nationaux et nord-américains ainsi qu'aux autres marchés étrangers; la compétitivité en matière fiscale et réglementaire; la disponibilité de la main-d'œuvre; l'accès au capital-investissement; l'obtention du permis social d'exercer, c'est-à-dire la confiance du public.
L'ACPP félicite le gouvernement fédéral pour les réformes de la réglementation dans le Nord qu'il a menées ces dernières années, et pour la priorité qu'il accorde au développement du Nord. Toutefois, de nombreux obstacles subsistent, de sorte qu'il est encore difficile de chercher du pétrole dans le Nord à cause du régime en place.
La transition permanente et durable d'un régime d'exploration stable des ressources potentielles vers un cadre axé sur le développement commercial demeure encore incertaine dans le Nord.
Nous continuerons de consulter tous les intervenants concernés et de travailler avec eux pour que cette vision se concrétise.
Merci encore de nous avoir donné l'occasion de nous exprimer devant vous aujourd'hui. Je suis maintenant prêt à répondre à vos questions.
Le président : Merci messieurs, pour cet exposé. Très belle prestation. Nous passons maintenant aux questions.
Le sénateur Massicotte : Je vous remercie tous les deux d'être avec nous.
Visiblement, vous êtes en faveur du projet de loi S-6 et vous en recommandez l'adoption. C'est excellent. Au début de votre exposé, vous avez dit que c'était une phase critique pour vous et, à la fin, vous avez dit que la transition demeure encore incertaine, à vos yeux. Pourquoi la phase est-elle critique et pourquoi est-ce si important à ce moment? Que se passe-t-il?
M. Miller : Le Yukon est, bien sûr, limitrophe. Dans la plaine Eagle, par exemple, l'exploration est à ses premières étapes, celles où on essaie d'évaluer la viabilité de la ressource et, en fin de compte évidemment, la viabilité de son exploitation économique.
Ce qui veut dire que plus on sera clair, cohérent et efficace dans l'échéancier et le processus d'examen de ces premières étapes, plus le processus pourra s'améliorer, ce qui permettra simplement d'augmenter la probabilité de réussite de ces entreprises d'exploration. Encore une fois, nous nous trouvons dans cette phase critique initiale.
Le sénateur Massicotte : Mais cette phase initiale que vous décrivez, elle me semble assez normale. N'est-ce pas le cas de la plupart de vos travaux d'exploration?
M. Miller : Oui, mais je suis heureux que vous souleviez cet aspect. Dans le Nord, c'est un peu difficile.
Vous avez raison; à ses débuts, la mise en valeur possède des caractéristiques et des pouvoirs parallèles, mais il faut se rappeler, comme nous le savons tous, que, au nord du 60e parallèle, on pénètre en territoire limitrophe. Il y a une coupure avec le sud, où les provinces ont atteint la maturité. Visiblement, les échéanciers sont beaucoup plus longs; il faudra attendre beaucoup plus longtemps pour obtenir un retour sur l'investissement. En un mot, il faut dépenser des dizaines de millions de dollars pendant plusieurs années avant d'espérer ou d'obtenir un retour sur l'investissement.
Dans ce genre de territoire, encore une fois, plus on peut faire démarrer le processus, le mieux c'est.
Le sénateur Massicotte : Malheureusement, ça ne changera pas; le climat ne se réchauffera pas plus vite, mais je vous comprends.
Le sénateur Mitchell : Merci beaucoup, messieurs. Je suis désireux de m'arrêter à vos inquiétudes concernant la clarté, la cohérence et la certitude, que vous avez exprimées dans votre exposé.
L'une des caractéristiques du projet de loi est de modifier la définition d'effets cumulatifs. Dans le processus d'examen environnemental, ces effets ne s'appliquent qu'aux activités en cours de réalisation. Désormais, ils engloberont les activités dont la réalisation est probable. On s'inquiète de la définition qu'on en donnera.
Y avez-vous réfléchi? Avez-vous accumulé de l'expérience ailleurs? Qu'en pensez-vous, généralement?
M. Miller : Au Yukon, nous sommes aux premières étapes de la mise en valeur, et cela a présenté des difficultés dans le processus d'examen jusqu'ici, pour la détermination de la portée des projets, la vision à long terme.
Malheureusement, les explorations initiales permettent difficilement de discerner l'allure du projet tant qu'on n'a pas effectivement pu évaluer la viabilité de la ressource.
Effectivement, c'est un problème dont nous connaissions l'existence longtemps avant qu'on en parle au sujet de ce projet de loi.
M. Ferguson : Je peux ajouter que beaucoup d'expérience nous vient d'ailleurs qu'au Yukon, et pas seulement du Canada, mais de l'étranger aussi, sur la notion d'effets cumulatifs. Notre industrie a pris de l'envergure, elle a de la surface et de la durée. Elle ne se résume pas à un projet unique, à un point sur la carte.
L'une des difficultés que nous éprouvons dans la prévision d'autres activités qui pourraient être connexes aux nôtres est que, d'abord, nous ne sommes pas certains de l'éventuelle vitesse de croissance ni des éventuelles limites du développement de notre secteur dans une région donnée. En même temps, certains autres scénarios ou certains des secteurs susceptibles de toucher cette même région multiplient le nombre de possibilités à l'infini.
Cependant, nous savons très bien, par expérience, que, en raison de l'incertitude entourant la mise en valeur du pétrole et du gaz au moment de l'exploration, la divulgation trop rapide des possibilités, de la richesse et des valeurs qui seront produites et créées dans une région risquent d'amener les gens à y prendre, individuellement et collectivement, des décisions moins judicieuses pour leur avenir, ce qui, plus tard, peut nous valoir de nous faire accuser de les avoir induits à prendre un parti auquel ils n'étaient pas préparés.
Inutile de chercher longtemps : voyez comment les choses se passent dans le secteur du gaz naturel liquéfié au Canada; les attentes sont nombreuses, et on réalisera beaucoup de projets. Finalement, pour notre pays uniquement, nous pouvons prévoir jusqu'à 14 usines ou plus. Nous ne savons vraiment pas combien on en construira.
Nous craignons assez d'organiser un processus qui pourrait être déroutant, mais, en même temps, il est entouré de beaucoup d'incertitude. Sans compter le fait qu'on ne peut pas commencer à exprimer ces opinions et à prendre des décisions sur les effets cumulatifs, mais, en même temps, on tient à faire preuve de prudence à cause de la grande incertitude dans laquelle on se trouve.
Le sénateur Mitchell : Merci. Il est visible que, à la base de vos actions pour le bien de la collectivité, le bien de la région, on trouve le développement économique et la création d'emplois, et, évidemment, il se trouve une population autochtone qui en a besoin.
Est-ce que votre industrie, dans son approche de ces projets, déploie un effort concerté, coordonné, pour créer des emplois dans les communautés autochtones?
M. Ferguson : Je peux certainement répondre. Au Yukon comme dans les Territoires du Nord-Ouest, nous sommes presque au commencement de tout. Nos promesses seront donc raisonnables. Mais par chaque entreprise de notre secteur et, aussi, par notre association qui représente beaucoup de membres, nous disposons de programmes précis, très adaptés, pour offrir, en priorité, des emplois, de la formation et des possibilités élargies d'embauche aux Autochtones, sans compter des avantages qui rejaillissent aussi sur la population non autochtone.
Comme pour toute entreprise, il est judicieux, pour nous, de compter sur une main-d'œuvre locale compétente, bien formée et disponible, pour nous aider à favoriser la croissance de la communauté dans laquelle nous avons besoin de séjourner pendant un certain temps.
M. Miller : Si vous me permettez d'ajouter très rapidement cette précision, sur un de nos membres qui fait du travail d'exploration au Yukon : il a versé, depuis deux ou trois ans, environ 22 millions de dollars en salaires directs, en avantages sociaux et en services à des travailleurs locaux. C'est uniquement une retombée de travaux d'exploration initiale.
Dans les Territoires du Nord-Ouest, à côté, on fait un travail très semblable. L'un de nos membres, pour à peu près chaque puits foré là-bas, verse environ 3 millions de dollars en salaires, dont la moitié aux populations locales. Encore une fois, ces répercussions économiques sont tout à fait importantes dans le Nord.
La sénatrice Ringuette : Merci, messieurs, pour votre exposé.
Depuis que vos membres sont présents dans d'autres territoires et provinces et à l'étranger, comment cette modification de la loi se compare-t-elle aux lois qu'ils doivent respecter ailleurs?
M. Ferguson : Ma réponse sera générale, puis Aaron pourra entrer dans les détails.
Il est sûr que nous avons examiné toutes les possibilités pour non seulement rationaliser le modèle réglementaire, mais aussi pour le rendre plus efficace. C'est une contribution à notre secteur, parce que nous avons l'intention de croître dans ces régions, avec ces communautés. Nous cherchons donc, dans le modèle réglementaire, à atteindre la certitude et la prévisibilité.
Je dirais que vous avez devant vous l'occasion de commencer ce parcours peut-être un peu en avance sur d'autres pays qui ont entrepris le leur.
Pour nous, la certitude réglementaire et la prévisibilité d'un processus ne garantissent pas la connaissance des réponses, mais elles donnent, avec un certain degré de certitude, une idée de l'allure du processus. Nous pouvons avoir cette idée grâce au parcours suivi. Cela nous permet vraiment d'investir avec confiance dans un secteur.
Dans certaines régions de la province, la certitude entourant le processus réglementaire n'est probablement pas aussi grande. Nous y voyons l'occasion de créer cette certitude, la rationalisation n'étant pas seulement à notre avantage mais à l'avantage de l'organisme de réglementation ou de contrôle, et elle sert aussi à appliquer les ressources là où elles sont le plus nécessaires à cette fonction de contrôle.
Cette mesure très positive est très en avance sur celles que nous connaissons dans beaucoup de régions du pays.
M. Miller : Je fais miennes les observations d'Alex. Encore une fois, ces améliorations à la LEESY feront du Yukon un territoire plus concurrentiel avec les autres territoires et provinces du Canada, les contigus, comme l'Alberta, la Colombie-Britannique, la Saskatchewan, et les autres. Comme j'y ai fait allusion plus tôt, c'est particulièrement important au nord du 60e parallèle, qui est la ligne de démarcation où commencent les difficultés systémiques que sont l'absence d'infrastructures, la cherté, et les périodes limitées d'exploitation, qui augmentent d'autant les difficultés par rapport à celles que doivent surmonter les provinces voisines au sud. De telles réformes sont d'autant plus importantes à ce stade-ci.
La sénatrice Ringuette : Messieurs, vos réponses m'étonnent, parce que, il y a quelques semaines, quand le ministre a comparu devant le comité, je lui ai demandé comment le processus actuel se comparait à celui des autres provinces et territoires, particulièrement le processus fédéral d'évaluation. Il m'a répondu que les processus étaient comparables et qu'ils étaient à peu près identiques. Pourtant, vous dites qu'il accorde moins de temps à l'évaluation et ainsi de suite. Votre réponse m'étonne vraiment. D'où ma question : Compte tenu de l'environnement très facile dans lequel vous travaillerez dans ces régions, est-ce le moment de s'acheminer vers un processus plus rationnel, plus rapide d'évaluation?
M. Ferguson : Si vous me permettez cette précision. Nous sommes reconnaissants des occasions qu'on nous accorde d'améliorer le processus et les systèmes ainsi que de le rationaliser et d'augmenter la transparence, ce qui permet de voir en quoi le processus consistera. Si cela ne change que très peu l'échéancier, cela reste une amélioration assez importante pour nous afin de nous permettre d'envisager avec confiance le processus que nous devrons suivre.
Nous croyons qu'avec le temps, les organismes de réglementation seront plus efficaces dans le cadre du modèle dont il est question ici. Nous ne nous attendons certainement pas à ce que les gens s'adaptent à un nouveau modèle réglementaire du jour au lendemain, mais nous voyons les possibilités pour l'organisme de réglementation de commencer à adopter et à changer des processus compte tenu de la nouvelle orientation, d'améliorer l'efficacité.
Encore une fois, peu importe l'organisme, le processus ne se fera pas du jour au lendemain, qu'il s'agisse de l'industrie ou du gouvernement, mais nous voyons la possibilité — une voie — que cela se réalise.
Il y a encore fort à faire du côté des organismes de réglementation et des gens qui participent à ce volet du processus pour faire en sorte qu'ils se servent des améliorations apportées au modèle réglementaire dans le cadre de leurs processus actuels. Il y aura des ajustements à faire sur le plan de ce que les gens font, ce que nous remarquons dans bien d'autres pays. Il y a une occasion ici d'améliorer les choses, de sorte que les organismes de réglementation puissent appliquer les ressources de la façon la plus appropriée, compte tenu des préoccupations, des risques et des objectifs qu'ils essaient de conserver et de protéger.
Il ne s'agit donc pas d'une solution magique, mais tout le monde commence à comprendre les possibilités qui se présentent.
La sénatrice Seidman : Monsieur Ferguson, vous avez dit que « la transition permanente et durable d'un régime d'exploration stable des ressources potentielles vers un cadre axé sur le développement commercial demeure encore incertaine dans le Nord ». Je sais que la situation est particulière dans cette région. Toutefois, je dirais que dans toutes les industries de tous les domaines, la transition de la phase d'exploration à celle du développement commercial est difficile.
Avez-vous établi des partenariats avec d'autres intervenants ou le milieu de la recherche dans cette transition?
M. Ferguson : Bien sûr. Compte tenu de la grande importance du secteur pétrolier et gazier au Canada, vous comprenez sûrement que bien des partenariats et des alliances ont été établis entre des entreprises, par exemple, mais aussi dans le cadre de regroupement d'entreprises. Je vais vous donner des exemples frappants : les exploitants de sables bitumineux de l'Alberta se sont regroupés. Il s'agit d'une collaboration unique, de la Canada's Oil Sands Innovation Alliance, qui leur permet de surmonter des obstacles à la concurrence en ce qui concerne la propriété intellectuelle, dans le but de favoriser le développement important de la technologie et d'un véhicule de déploiement qui est unique dans le monde et de cibler l'assainissement de l'environnement, les effets d'atténuation et des technologies en particulier. C'est quelque chose d'important.
Rattaché à cela, bien que les deux soient séparés, il y a un partenariat qui est le fruit de la collaboration entre le gouvernement albertain et le gouvernement fédéral sur le plan conjoint pour la surveillance visant les sables bitumineux. Il constitue un engagement de l'industrie d'environ 50 millions de dollars par année dans la surveillance environnementale pour la région des sables bitumineux de l'Alberta. Il a une très vaste portée.
Il y a également des partenariats à petite échelle — et à très petite échelle — d'entreprises par l'intermédiaire de Technologies du développement durable Canada. Il s'agit d'un organisme fédéral gouvernemental qui se concentre sur la technologie, l'innovation et le déploiement. Il y a de petits et grands investissements collectifs dans des partenariats avec des entrepreneurs ainsi que le gouvernement fédéral sur ce type de choses. Et il y a également tout ce qui se trouve entre les deux.
Je pourrais certainement vous fournir bien des pages sur le type de partenariats et d'alliances que nous appuyons et que nous avons.
La sénatrice Seidman : Ce n'est pas tellement ce que je cherche. Vous venez de parler de la question, et elle est importante. Nul ne doute qu'on ne commencerait pas à réduire l'importance des difficultés dans le Nord et de ces questions, mais nous pouvons dire également que cela offre des occasions uniques d'essayer des moyens novateurs pour régler ces questions. C'est important.
M. Ferguson : Oui, je suis tout à fait d'accord avec vous. Même si notre secteur est très petit dans le Nord à l'heure actuelle, c'est un aspect très important du territoire canadien à étudier pour ce qui est de notre secteur, de l'environnement et ce que nous pouvons examiner : les aspects uniques pour ce qui est des populations, des attentes et des valeurs. C'est fait collectivement pour le gouvernement ainsi que pour notre secteur. Cela fait partie des riches possibilités d'apprendre que nous avons.
La sénatrice Seidman : Je vous remercie.
Le sénateur Black : Bonjour messieurs Ferguson et Miller. Il est très tôt à Calgary, et je vous remercie de votre présence.
Je vous remercie de votre intervention. Comme toujours, le témoignage de l'ACPP est fort pertinent et pris en considération, et je vous en remercie beaucoup.
Compte tenu de ce que vous nous avez dit, comment le projet de loi S-6 pourrait-il être amélioré, à votre avis?
M. Miller : Je commencerais par dire qu'à mon avis, certaines des améliorations apportées au processus lié à la LEESY n'exigent pas nécessairement de modifications. Bien entendu, rien n'est parfait, mais les modifications que nous examinons aujourd'hui constituent un pas dans la bonne direction. Je crois que certains changements peuvent être mis en œuvre dans le cadre des règles actuelles.
L'une des choses que disent nos membres qui sont sur le terrain — et des règles existent déjà à cet égard —, c'est qu'il y a des divergences entre les bureaux de district.
Par exemple, il arrive qu'une demande soit traitée d'une certaine manière dans un bureau de district, alors qu'une demande de projet parallèle similaire qui est présentée dans un autre bureau est traitée de façon complètement différente. C'est ce que j'entends sur le terrain.
À ce que je sache, les règles peuvent être appliquées en vertu des règlements administratifs de l'office. C'est l'un des aspects qui pourrait être amélioré, mais encore une fois, cela ne nécessite pas vraiment de modifications.
Le sénateur Black : Merci, monsieur Miller. D'autres personnes ont souligné la même chose.
Le président : Je n'ai personne d'autre sur notre liste. Sénateur Wallace, me faites-vous signe?
Le sénateur Wallace : Je ne peux pas laisser passer cette occasion.
Messieurs, nous croyons comprendre qu'un long processus de consultation a mené à la préparation de la version finale du projet de loi, et qu'un certain nombre de groupes et de parties intéressés ont participé au processus. Il y avait différentes versions du projet de loi et elles ont été diffusées à différentes parties et administrations au Nunavut et au Yukon. Je me demande seulement si votre organisme a participé au processus et s'il a eu l'occasion de donner son avis.
M. Miller : Oui, nous avons participé au processus et nous avons présenté à Affaires autochtones un mémoire portant sur le projet de loi S-6.
Le sénateur Wallace : Avez-vous trouvé que le ministère tenait compte de vos recommandations?
M. Miller : Oui, les recommandations que nous avons faites présentaient des similitudes avec les sentiments d'autres secteurs qui mènent des activités dans le Nord. Celle qui tenait beaucoup à cœur à nos membres dans les étapes d'exploration concerne l'étude de conformité. Encore une fois, nous n'étions pas le seul secteur à avoir soulevé la question au cours du processus.
Le président : J'ai quelques questions à poser ou des observations à faire. Dans votre exposé, vous avez parlé du forage dirigé. Concernant les effets cumulatifs, je pense que c'est un élément sur lequel nous devons concentrer plus d'efforts. J'aimerais connaître votre opinion.
Je sais ce qu'est le forage dirigé; j'ignore combien de puits on peut forer sur une plateforme en utilisant cette technique. Si c'est quelque chose que l'on fait à Eagle Plains, cela a beaucoup moins — extrêmement moins — de répercussions à première vue et j'aimerais que vous me donniez quelques explications. J'aurai une autre question à vous poser par la suite.
M. Ferguson : Certainement, sénateur. Cela fait partie de la possibilité d'améliorer le modèle réglementaire de sorte qu'on peut prévoir et commencer à planifier en fonction d'une géométrie plus optimale sur le territoire. Dans certaines régions de l'Alberta et de la Colombie-Britannique en particulier, certaines plateformes d'exploitation comprennent 18 à 24 puits, ou même plus. Il s'agit d'une plateforme d'exploitation plus grande, mais si l'on compare cela à 18 plateformes d'exploitation individuelles avec des routes pour se rendre à chacune d'entre elles et aux canalisations qui y sont liées, concernant ce type de développement des ressources, on a certainement une énorme occasion de profiter des avantages du développement des ressources avec un impact bien plus grand ou limité sur le territoire.
En même temps, de cette façon, on est capable de mieux se conformer à tout modèle de planification pour ce qui est de la planification terrestre dans un secteur ou de l'aménagement du territoire. Encore une fois, je pense que l'important, c'est qu'on doit permettre à l'industrie d'y arriver et comprendre que nous sommes maintenant dans un mode de production, et on peut commencer à déployer ce type de géométrie du développement. L'industrie veut certainement vérifier la présence de la ressource et que nous soyons capables d'avoir une géométrie très optimale sur un territoire et de minimiser les perturbations.
Le président : Je vous remercie de votre réponse; c'était très clair. Je crois que l'industrie doit en parler davantage pour que les gens comprennent. Comme vous l'avez clairement dit, il peut y avoir jusqu'à 24 puits sur une plateforme d'exploitation, et évidemment, elle sera plus grande, mais cela réduit l'empreinte. À un moment donné, selon ce que l'on trouve à Eagle Plains, ce sera peut-être une option.
Pour ma deuxième question, je me réfère à l'époque où j'étais ministre. Nous avons perdu un bon commissaire du pétrole et du gaz en Colombie-Britannique, un homme qui s'appelle Alex Ferguson, mais nous étions en même temps très heureux de le voir partir en Alberta pour former les gens là-bas.
Vous comprendrez qu'il y a des Albertains à cette table et que de temps à autre, je dois leur rappeler que la Colombie-Britannique joue un rôle crucial dans l'industrie pétrolière et gazière.
Le cadre axé sur les zones est un autre processus et je vois beaucoup d'annonces en Alberta à cet égard. Je suis ici depuis six ans, et il y a environ huit ans, nous avons commencé le processus dans le bassin de Horn River. Je suis ravi que l'Alberta commence à se pencher là-dessus. Je le dis sérieusement, car c'est quelque chose qui a également beaucoup moins de répercussions sur le territoire lorsqu'on parle d'effets cumulatifs — pour faire un lien avec les questions du sénateur Mitchell —, et les effets cumulatifs joueront un rôle important, si l'on mène assez d'activités, à Eagle Plains, par exemple, ou à n'importe quel autre endroit au Yukon où il est possible de mener des activités de forage. Vous pourriez expliquer un peu le processus au comité et la façon dont cela est utile quant aux effets cumulatifs.
M. Ferguson : Bien sûr, je peux certainement vous en parler un peu. Tout d'abord, ce n'est pas vraiment un bon commissaire que la province a perdu; c'est probablement un meilleur ministre qu'on a perdu à ce moment-là.
Vous avez raison. En Alberta, le cadre réglementaire axé sur les zones a certainement été conçu dans l'esprit de ce qui avait été fait auparavant à la Commission du pétrole et du gaz de la Colombie-Britannique. L'occasion que donnent les nouvelles mesures législatives en Alberta, où l'on a maintenant la possibilité de définir le processus de façon plus précise, correspond à ce que nous examinons ici, à une amélioration d'un modèle réglementaire qui permet à l'organisme de réglementation de commencer à faire ce genre de réflexion et à se préparer pour ce type de possibilité de réduire les effets cumulatifs, l'empreinte environnementale.
Cela correspond vraiment à ce que nous voyons dans le cas de la LEESY, où l'on améliore la réglementation, en permettant à l'organisme de réglementation de non seulement réagir, mais aussi d'agir, ce qui correspond au cadre axé sur les zones. Il s'agit de tenir compte de la nature du développement des ressources non classiques maintenant; il ne s'agit pas d'y aller une plateforme d'exploitation à la fois. Une fois que nous avons déterminé que la ressource est présente et dans quelle mesure elle l'est, nous pouvons commencer à faire de la planification à long terme pour optimiser la configuration du terrain afin d'agir de façon préventive concernant d'autres valeurs, qu'il s'agisse du caribou, des animaux sauvages, de l'utilisation des eaux, de tout autre type d'émissions ou d'effets ou même des valeurs des résidents, des Premières Nations. On permet maintenant à l'industrie, avec ce type de géométrie du développement des ressources, de faire une planification sur les lieux qui correspond mieux à certaines de ces autres valeurs.
C'est une excellente occasion. Il s'agit certainement d'un aspect des ressources non classiques que nous avons, que nous examinons et que nous cherchons au Yukon, mais en même temps, cela nous permet, avec un bon modèle de réglementation et un bon organisme de réglementation qui suit ce modèle, de guetter des occasions.
Je conviens que pour ce qui est du Yukon, c'est une grande possibilité qui ne devrait pas être ignorée.
Le président : Messieurs, je vous remercie beaucoup de vos exposés et des réponses que vous avez données.
Je vais trahir un peu mon âge; lorsque j'étais jeune, il y a 45 à 50 ans, j'ai transporté de la terre à Eagle Plains. Ainsi, lorsqu'ils en ont parlé il y a longtemps, c'est ce que je faisais sur le territoire.
La sénatrice Ringuette : Je suis curieuse de savoir, concernant le forage horizontal, quelle est la distance maximale à partir de laquelle vous pouvez forer?
M. Ferguson : À l'heure actuelle, à partir de deux à deux kilomètres et demi. La technologie évolue constamment, et nous cherchons des occasions de prolonger cela. C'est toujours un équilibre entre le type de ressources et le type de possibilités qu'on a, mais en même temps, cela dépend de la technologie que nous pouvons utiliser. C'est un mélange de tout cela.
À l'heure actuelle, on parle de deux kilomètres en général, ce qui est probablement la norme dans le forage horizontal, à partir du point initial de la section verticale du puits. La distance pourrait être plus courte, ou plus longue, tout dépend de la zone de ressource et de la technologie utilisée.
Le président : Merci beaucoup, messieurs. Nous vous souhaitons une belle journée à Calgary. La séance est levée.
(La séance est levée.)