Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles
Fascicule 17 - Témoignages du 21 octobre 2014
OTTAWA, le mardi 21 octobre 2014
Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles, auquel a été renvoyé le projet de loi C-501, Loi instituant la Journée du patrimoine national en matière de chasse, de piégeage et de pêche, se réunit aujourd'hui, à 17 h 23, pour examiner le projet de loi et pour étudier le développement des énergies renouvelables et non renouvelables dans les trois territoires du Nord, y compris le stockage, la distribution, la transmission et la consommation d'énergie, de même que les technologies émergentes.
Le sénateur Richard Neufeld (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles. Je m'appelle Richard Neufeld, je représente la province de la Colombie-Britannique au Sénat et je préside le Comité de l'énergie.
J'accueille également mesdames et messieurs les sénateurs, le public présent dans cette salle, ainsi que tous les téléspectateurs. Je rappelle à toutes les personnes présentes que ces audiences du comité sont publiques et qu'on peut les consulter sur le site web à l'adresse www.sen.parl.gc.ca. On peut également obtenir un complément d'information sur le calendrier des témoins entendus sur le site web, sous la rubrique « Comités du Sénat ».
J'aimerais maintenant présenter le vice-président, le sénateur du Québec, Paul Massicotte. Je demanderais maintenant aux sénateurs de se présenter.
Le sénateur Wallace : John Wallace, du Nouveau-Brunswick.
Le sénateur Black : Douglas Black, de l'Alberta.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Pierre-Hugues Boisvenu, du Québec.
[Traduction]
Le sénateur Patterson : Dennis Patterson, du Nunavut.
Le sénateur Mitchell : Grant Mitchell, de l'Alberta.
[Français]
La sénatrice Ringuette : Pierrette Ringuette, du Nouveau-Brunswick.
[Traduction]
Le sénateur Sibbeston : Nick Sibbeston, des Territoires-du-Nord-Ouest.
Le président : J'aimerais également présenter notre personnel, en commençant par notre greffière Lynn Gordon, à ma gauche, et nos deux analystes de la Bibliothèque du Parlement, Sam Banks et Marc LeBlanc.
Nous commençons aujourd'hui notre étude du projet de loi C-501, qui propose l'institution d'une journée du patrimoine national en matière de chasse, de piégeage et de pêche. Ce projet de loi a été présenté au Sénat le 7 avril 2014 et a été renvoyé à notre comité le 19 juin. C'est avec plaisir que j'accueille le parrain du projet de loi, M. Rick Norlock, député de Northumberland—Quinte West.
Bienvenue, monsieur le député. Je crois savoir que vous avez une petite allocution à faire, après quoi nous passerons aux questions et réponses. Vous avez la parole, monsieur.
Rick Norlock, député de Northumberland—Quinte West, parrain du projet de loi, à titre personnel : Mesdames et messieurs les sénateurs, le projet de loi C-501, Loi instituant la Journée du patrimoine national en matière de chasse, de piégeage et de pêche, désignerait le troisième samedi de septembre de chaque année comme journée du patrimoine. Le projet de loi est semblable à celui de plusieurs provinces et à celui des États-Unis d'Amérique, ce dernier pays ayant désigné le 26 septembre comme journée du patrimoine par décret du président Obama en 2009.
Nous savons tous que les premiers habitants de l'Amérique du Nord, nos frères et sours autochtones, s'adonnaient à ces activités pour assurer leur subsistance, que ce soit pour se nourrir, se loger ou faire du troc. Ensuite, les premiers Européens ont été attirés par notre terre en raison de l'abondance des poissons et des animaux à fourrure qui s'y trouvaient. Les premiers colons s'en sont servis pour survivre et pour commercer avec les groupes autochtones jusqu'aux temps modernes. Aujourd'hui, nos frères et sours autochtones s'adonnent encore à la chasse, au piégeage et à la pêche, comme source de nourriture et de revenus.
Sur une note personnelle et comme je l'ai déclaré à la Chambre des communes, il y a un lien familial à ce projet de loi. La chasse, le piégeage et la pêche ont toujours fait partie, et font encore partie, de la vie de ma famille. En compagnie de mes deux fils, je viens tout juste de chasser le wapiti à cheval dans le nord de la Colombie-Britannique, près de Fort Nelson. Il y avait 13 chevaux et 5 cavaliers. Je conseille à tous les Canadiens d'admirer à cheval les contreforts des Rocheuses et les Rocheuses. Cela donne une perspective totalement différente de notre magnifique pays. Franchement, la chasse et la pêche constituent l'ADN de Norlock. Bien des familles canadiennes vous diraient la même chose, et notamment certains ici présents.
J'aimerais porter quelques faits intéressants à l'attention des sénateurs. Ils proviennent de l'enquête sur la pêche récréative au Canada de 2010 effectuée par Pêches et Océans Canada. On peut y lire ce qui suit :
En 2010, les pêcheurs ont contribué à diverses économies locales des provinces et des territoires du Canada par des dépenses totales de 8,3 milliards de dollars. De ce montant, 5,8 milliards de dollars ont été dépensés sous forme d'investissements et d'importants achats de biens durables liés aux activités de pêche récréative. Les 2,5 milliards de dollars restants représentaient les dépenses directes attribuables à la pêche récréative [...]
En comparaison, la pêche commerciale effectuée au Canada dans les trois océans et certains de nos grands lacs, ainsi que dans les voies navigables intérieures représente environ 2 milliards de dollars. La pêche récréative est quatre fois plus élevée. Avec la chasse et le piégeage, on pourrait facilement ajouter 2 milliards de dollars à ces statistiques. Je dirais à ceux qui jouent au golf ou au hockey, qu'il y a plus de Canadiens adultes qui s'adonnent à la pêche qu'à ces deux sports combinés.
Qu'est-ce que cela signifie pour l'emploi? À elle seule, la pêche récréative fournit environ 100 000 emplois au niveau national. Je pourrais vous fournir bien d'autres statistiques, mais j'attendrai que les sénateurs me posent, s'ils le souhaitent, des questions à ce sujet.
Toutes les organisations provinciales et nationales qui s'intéressent à la chasse et à la pêche ont appuyé le projet de loi. On estime que près de 400 000 personnes se sont rendues dans les collectivités nordiques du pays pour participer à la chasse ou à la pêche. Comme je l'ai mentionné, ces activités représentent environ 2 milliards de dollars. Les chasseurs et les pêcheurs sont les plus grands protecteurs de l'environnement de la nation. Des organisations comme Canards Illimités, l'Ontario Federation of Anglers and Hunters, la Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs, le Comité de rétablissement de la population de wapitis de Quinte et d'innombrables autres organisations sont les plus grands protecteurs de l'environnement. À mon avis, vous auriez bien du mal à trouver une organisation de protection de l'environnement qui ne soit pas composée de chasseurs, de pêcheurs ou de trappeurs.
Voilà, mesdames et messieurs, un aperçu de la situation. Pour vous donner une autre idée de l'importance de ce projet de loi et des changements qui se produisent, beaucoup d'entre vous imaginent peut-être que la pêche et la chasse se meurent. Or, c'est dans la région du Grand Toronto que les demandes de permis de chasse et de pêche augmentent le plus.
Comme l'a mentionné ma collègue députée, Christine Moore, qui représente le NPD dans l'une des circonscriptions du Québec, en faveur du projet de loi — et je peux vous le certifier — la plupart des magasins d'articles de chasse et de pêche tels que Sail, Le Baron ou Cabela ont un département de vêtements et d'équipements de chasse et de pêche spécialement conçu pour les femmes. Dans son discours, elle parle d'une femme de 95 ans de Yarmouth, en Nouvelle-Écosse, qui a fait emballer son orignal l'an dernier. Voilà une occupation totalement canadienne, qui fait partie de l'ADN du pays.
En fait et comme je l'ai mentionné, si notre pays existe, c'est en partie grâce aux castors et aux chapeaux en peau de castor qui étaient très en demande en Europe. C'est l'une des raisons pour lesquelles nous sommes un pays. Je n'entrerai pas dans tous les détails d'autres statistiques, mais j'attends avec impatience que vous me posiez des questions à ce sujet, monsieur le président.
Le président : Merci beaucoup, monsieur Norlock. Puisque vous mentionnez Fort Nelson, je ne peux pas m'empêcher de vous dire quelque chose à ce sujet. En fait, j'ai vécu 19 ans à Fort Nelson et j'ai travaillé pour son compte pendant 30 ans, représentant la région de 1991 à 2009 à l'Assemblée législative de la Colombie-Britannique, et maintenant au Sénat.
Pour ceux d'entre vous qui venez de la côte est, nous avons créé une zone protégée appelée Muskwa-Kechika, qui a la superficie de la Nouvelle-Écosse. Cela représentait moins d'un tiers de ma circonscription. J'ai toujours dit qu'il y a beaucoup de place pour les ours et je me demandais si vous aviez votre wapiti.
M. Norlock : Non, nous avons un orignal. Comme je l'ai dit à mes fils le jour après avoir chassé l'orignal, nous avons eu le frisson de la chasse, le frisson que procure l'exécution de l'animal et les ours dont vous avez parlé nous ont regardés au moment où nous approchions des entrailles. Laissez-moi vous dire que vous n'avez pas vécu tant que vous n'avez pas regardé dans les yeux un grizzli qui semble vous dire : « Dégagez, parce que cela m'appartient. »
Le sénateur Massicotte : Je vous félicite d'avoir porté ce projet de loi à l'attention du public. Cela fait cinq ans que j'y travaille. Vous méritez une médaille.
M. Norlock : Je l'ai déjà présenté. Le Sénat en a déjà été saisi, mais nous avons eu ce que nous appelons une élection, qui a fait qu'il n'a pas été adopté.
Le sénateur Massicotte : Permettez-moi de vous poser cette question, simplement pour m'assurer que les Canadiens comprennent : quelle est son importance? La chasse et la pêche sont des activités historiques, très populaires, et après? Pourquoi y consacrer une journée? Vous avez mentionné une journée du hockey, nous avons une journée du base-ball. Pourquoi est-ce important?
M. Norlock : Merci beaucoup de votre question, elle est excellente. Nous avons des journées du patrimoine comme le Sénat le sait, en fait pas mal de journées pour rendre hommage à des particuliers ou reconnaître quelque chose d'important, qu'il s'agisse d'un organisme de bienfaisance ou d'une action qui a été faite. Je suis d'habitude quelqu'un d'humble, mais je vous dis cela tout à fait franchement, dites-moi de quel autre passe-temps, de quelle autre occupation ou de quelle autre entreprise pourrait-il s'agir? C'est la raison pour laquelle notre pays a été fondé. C'est la façon dont ont vécu nos collectivités autochtones. Cela représente tout le bien, ou une grande partie du bien, qui caractérise le Canada. Nous sommes des Canadiens. On dit que nous sommes une petite population et que nous avons le deuxième plus grand territoire mondial où vivent presque toutes les espèces d'animaux, espèces que nous avons très bien gérées. Il y a aujourd'hui en Amérique du Nord et au Canada plus de cerfs de Virginie qu'il y en avait au moment de l'arrivée des blancs. Et pourquoi, parce que cet animal a pu s'adapter à notre mode de vie.
Dans les endroits où je chasse dans la vallée d'Ottawa, on place du maïs ou du soja et les cerfs n'y touchent pas. Or, là où je vis, ils en sont très friands, ce qui ne plaît pas aux agriculteurs, qui pourtant s'adaptent. Nous sommes des grands protecteurs de l'environnement. Nous savons que notre pays a été fondé en partie grâce au castor, grâce à l'abondance du poisson sur la côte est. Souvenez-vous, comme je l'ai dit dans mon discours à la Chambre des communes, à son retour en Europe, Cabot a parlé de la pêche à la morue. Il suffisait de mettre un seau dans la mer pour attraper de la morue. Je ne parlerai pas de ce que l'on a fait à cette pêche, mais si vous vous rendez dans le nord du pays, vous verrez à quel point la chasse, le piégeage et la pêche sont importants pour nos frères et sours autochtones du Nord et de certaines régions du Sud. Pourquoi, parce qu'ils sont le fondement de notre pays.
Je vous dirais que la plupart des sénateurs ici présents, ou du moins beaucoup d'entre eux, ont probablement chassé ou pêché, et c'est important pour notre économie. Je viens de vous dire à quel point c'est important pour notre produit intérieur brut. Je pense qu'en un sens, j'ai répondu à votre question.
Le sénateur Massicotte : Je conviens de tout cela, ce sont des faits. Mais pourquoi est-ce important de désigner une journée sur ce thème? Qu'est-ce que cela apporte aux Canadiens? En quoi est-ce pertinent pour eux?
M. Norlock : Parce que c'est une marque de reconnaissance. Parce que c'est un jour où l'on reconnaît l'importance de ces occupations, non seulement pour les Canadiens d'aujourd'hui, mais aussi pour ceux d'autrefois et, j'oserai le dire, pour ceux qui nous succéderont.
En outre, dans sa déclaration — que j'ai ici et dont vous pouvez avoir un exemplaire, si vous le désirez — le président américain Obama affirme l'importance que cela revêt pour la protection de l'environnement. Il mentionne Roosevelt, le début des parcs, et cetera. Tout cela a été créé par les chasseurs, les pêcheurs et les trappeurs pour que les animaux que nous chassons, que nous pêchons et que nous piégeons continuent d'être abondants.
Cette journée reconnaît l'importance que revêtent ces activités pour la nature même de notre pays, pour la raison même de notre fondation et elle représente, à mon avis, un message éloquent envoyé à d'autres pays en leur disant qu'ils devraient venir ici et en profiter. Pour moi c'est une journée, comme celle qui a été désignée en Ontario, où les familles vont pêcher ensemble.
Si vous connaissez quelqu'un, et c'est ce que je dis toujours, sénateur, qui vit un grand stress, donnez-lui une canne à pêche et envoyez-le s'asseoir au bout d'un quai ou dans un bateau et il n'aura pas besoin de médicaments pour se décontracter. L'effet sera immédiat. Je connais beaucoup de gens qui le font. C'est la raison pour laquelle c'est important. Cela fait partie de l'ADN du pays appelé Canada et cela s'appelle la chasse, le piégeage et la pêche. Je pense qu'il devrait y avoir au moins une journée où nous pouvons célébrer ces activités et reconnaître qu'elles font partie de notre pays. C'est la raison pour laquelle j'ai présenté ce projet de loi. Et pour des raisons personnelles, cela fait également partie de l'ADN de ma famille.
Le sénateur Mitchell : Félicitations, monsieur Norlock, ce n'est pas facile de faire adopter un de ces projets de loi. Mais il semble que nous y arrivons. Espérons qu'il n'y aura pas d'élections d'automne pour l'empêcher de passer cette dernière étape.
Vous dites des choses intéressantes sur la portée d'une telle journée et nous avons eu déjà des témoignages sur l'importance de l'industrie du tourisme, du tourisme de plein air et des activités de ce genre.
Je voulais juste vous poser une question d'ordre général, étant donné que l'habitat est tellement important et vous avez mentionné que des groupes s'en inquiètent. Le ministère des Ressources naturelles vient juste de publier un rapport selon lequel les changements climatiques sont un problème pour nos forêts, car ils peuvent entraîner la prolifération de certains parasites. Est-ce que le type de reconnaissance associée à ce projet de loi rend plus nécessaire de se pencher sur cette question et de s'assurer que l'on ne met pas en danger l'habitat pour cette importante industrie?
M. Norlock : Je dirais que oui. Si vous me permettez d'en donner un petit exemple, aujourd'hui, la pêche au saumon est bonne dans les Grands Lacs, et surtout dans le lac Ontario. Beaucoup de gens en dépendent que ce soit ou non à des fins récréatives et il y a des pourvoyeurs qui organisent des journées de pêche et qui vivent de cette activité.
Dans ma région de la Baie de Quinte, par exemple, on pratique la meilleure pêche au doré jaune du monde. C'est une pêche de calibre mondial, surtout la pêche sous la glace.
Mais le saumon que l'on pêche n'est pas indigène, il provient du Pacifique. Il y a un groupe qui a été mis sur pied par une compagnie vinicole australienne dont font aujourd'hui partie l'Ontario Federation of Anglers and Hunters, la LCBO, et tout un groupe de gens de chez nous qui réintroduisons la pêche au saumon de l'Atlantique.
Dans la ville de Cobourg, qui est située dans ma circonscription, il y a un ruisseau appelé Cobourg Creek. Dans l'une des lettres qu'il envoyait à sa famille en Europe, l'un des premiers colons disait qu'à certaines périodes de l'année, on pouvait traverser ce ruisseau sur le dos des saumons. Ces saumons ont aujourd'hui disparu, mais nous les réintroduisons. Et qui fait cela? Encore une fois, l'Ontario Federation of Anglers and Hunters. Ce sont les pêcheurs et les chasseurs de ce pays qui essaient de se débarrasser de la salicaire pourpre en collaboration avec le ministère des Ressources naturelles de l'Ontario et nous y réussissons dans une certaine mesure grâce à l'introduction d'un coléoptère.
Bien entendu, ces espèces étrangères envahissent certaines régions du pays. Les pêcheurs et les chasseurs sont généralement ceux qui sont aux premières lignes. Comme je l'ai dit, je vous mets au défi de me nommer un groupe de conservation au pays qui n'est pas constitué de chasseurs et de pêcheurs, parmi les principaux groupes tels que Canards Illimités. La liste est longue. Ce sont tous des groupes composés de chasseurs qui veulent assurer la santé, la survie et l'abondance des espèces qu'ils chassent, puisque c'est dans leur intérêt de le faire.
Le sénateur Sibbeston : Le projet de loi sera certainement bien accueilli dans les Territoires du Nord-Ouest. Bien que la vie et l'économie là-bas aient changé au cours des dernières décennies, presque tous les résidants du Nord, particulièrement les membres des Premières Nations et les Métis, ont conservé des gènes de leurs parents et de leurs grands-parents qui pratiquaient la chasse, le piégeage et la pêche comme moyen de subsistance. Bien entendu, un grand nombre de non-Autochtones qui viennent s'installer dans le Nord ont été des trappeurs. Ce projet de loi est donc très important pour les gens du Nord et sera bien accueilli.
Dans les Territoires du Nord-Ouest, la chasse, le piégeage et la pêche occupent encore une place importante dans la vie des gens. L'an dernier, par exemple, le prix de fourrures comme celles de la martre, du lynx et du castor a atteint des records. Une peau de martre s'élevait à environ 150 $, ce qui est vraiment bon. Les trappeurs peuvent obtenir un bon prix pour leurs fourrures et en tirer un assez bon revenu.
L'adoption de ce projet de loi aurait une incidence considérable à l'échelle nationale. Y a-t-il des provinces ou des territoires dans notre pays qui ont également adopté des mesures législatives semblables qui reconnaissent la chasse et le piégeage comme moyen de subsistance ou comme simple pratique?
M. Norlock : Oui. Si je faisais quelques recherches, je pourrais vous en fournir une de l'Alberta, et le ministre responsable est mentionné ici. Si je ne m'abuse, il y a cinq ou six provinces qui ont ce qu'on appelle en Alberta une journée du patrimoine ou une journée de reconnaissance de la chasse. Les autres provinces ainsi que l'Ontario ont une journée semblable.
Vous avez mentionné le Nord. J'ai quelques petites anecdotes à ce sujet. J'ai parlé des 400 000 personnes qui se rendent dans les régions septentrionales de notre pays pour pratiquer la chasse et la pêche. Je sais que vous étiez probablement déjà au courant d'un grand nombre de faits que j'ai évoqués. J'aime m'entretenir avec les gens de ma région, ceux qui posent la même question que le sénateur Massicotte : « Pourquoi est-ce si important? » Je pense avoir expliqué à quel point c'est important pour le PIB.
Un ancien député du Yukon a déjà été guide dans une pourvoirie. Un grand nombre de ses clients venaient d'Europe, ou le pourvoyeur pour lequel il travaillait venait d'Europe. Certains clients demandaient de chasser certains animaux prisés d'une taille précise. Ils étaient presque assurés d'abattre un orignal de 60 pouces. Je connais certaines personnes qui ont cette garantie en Alaska, et si elles n'arrivent pas à en abattre un, elles peuvent y retourner gratuitement l'année suivante. Ces gens ont payé un pourvoyeur 35 000 $ pour abattre un orignal. Qu'est-ce que cela signifie pour le Yukon, les Territoires du Nord-Ouest ou d'autres régions?
Ces pourvoiries créent non seulement des emplois, mais une bonne partie de l'argent qu'elles génèrent permet au territoire ou à la province d'améliorer leurs programmes de conservation. Cet argent fait beaucoup plus que de simplement créer des emplois; il permet de financer exactement ce que nous voulons financer. Si l'on prend la Colombie-Britannique, par exemple, j'ai entendu dire que des gens pouvaient verser jusqu'à plus de 100 000 $ pour chasser certaines espèces de mouton. Le gouvernement de la Colombie-Britannique utilise cet argent pour assurer la conservation de ces espèces. C'est excellent pour le PIB. Cela attire des gens d'autres pays. J'ai sous les yeux d'autres statistiques sur les milliers de personnes par année qui viennent au Canada.
Voici ce qui se passe. Étant donné que nous avons été en mesure d'assurer la conservation des espèces sauvages et que nous jouissons d'une faune abondante, un grand nombre de personnes apportent leur appareil-photo pour capter des images au lieu de chasser. À mon avis, l'écotourisme est un atout pour le pays, et cet écotourisme est possible grâce aux chasseurs et aux pêcheurs.
Lorsque vous avez mentionné le piégeage, sénateur, je tiens à signaler le caucus multipartite des amants du plein air, qui est le plus important caucus organisé sur la Colline. Les industries liées à la chasse et à la pêche y participent. Je me suis entretenu l'an dernier avec des trappeurs de diverses régions du Canada. Il s'agissait d'un groupe coopératif. Autrement dit, ils n'appartenaient pas à la Baie d'Hudson. Ils ont créé une coopérative. Ils ont signalé qu'au cours des quatre ou cinq dernières années, les ventes de leurs fourrures ont augmenté de 400 p. 100.
J'ai une autre petite anecdote pour vous. J'ai discuté avec un représentant du Conseil canadien de la fourrure, dont M. Fast, notre ministre du Commerce, faisait partie, je crois. Je pense que d'après la statistique, dans la province de l'Ontario seulement — c'était avant que l'on signe l'accord de libre-échange avec la Corée du Sud —, c'est le vison d'élevage qui affichait la valeur la plus élevée en dollars parmi les échanges avec la Corée du Sud, ou c'était l'un des produits le plus cher.
La croissance de la fourrure en Chine est exponentielle. Les Chinois préfèrent les manteaux de fourrure fabriqués à Montréal à ceux fabriqués en Chine. Comme vous le savez, nous apprêtons parfois les peaux ici au Canada et les expédions ensuite là-bas. Les Chinois fabriquent les manteaux et nous les renvoient, comme ils le font avec les robes ou d'autres vêtements. C'est mon épouse qui me parle de ces choses-là. Les peaux sont acheminées à Hong Kong et retournées ici. Cependant, les Chinois préfèrent les manteaux de fourrures apprêtées et fabriquées à Montréal. Ces ventes représentent d'énormes retombées pour notre économie. Comme je l'ai dit, c'est un secteur important pour nos concitoyens autochtones et des Premières Nations, dont bon nombre d'entre eux dépendent du piégeage, sans parler de la chasse et de la pêche, pour assurer leur subsistance.
Le sénateur Sibbeston : J'ai une autre observation à faire sur l'importance de l'orignal et du caribou dans l'alimentation et l'approvisionnement alimentaire dans le Nord. Il y a quelques semaines, j'ai eu la chance d'aller à la chasse et nous avons abattu un orignal. La semaine dernière, je suis allé dans les bois avec d'autres chasseurs et nous avons abattu deux caribous. Notre famille utilise cette viande à bon escient. Je sais qu'à l'automne, parce que c'est dans leur génétique, les gens prendront congé pendant quelques semaines pour aller à la chasse, et il n'y a absolument rien que personne ne puisse y changer. C'est comme vouloir empêcher les oies de partir pour le sud ou de revenir dans le Nord. C'est profondément ancré dans leurs gènes.
Je sais que la plupart des familles dans le Nord ont abattu au moins un orignal ou quelques caribous dans les régions où ces espèces sont présentes et où la chasse y est permise. C'est assez important.
Pensez-vous que le fait d'avoir une journée de la chasse ou du piégeage soit un atout dans une province ou un territoire? Pensez-vous que l'adoption de ce projet de loi suffira? Je me demande si les Territoires du Nord-Ouest, le Yukon ou le Nunavut essaieront d'adopter des projets de loi semblables.
M. Norlock : Je pense que oui. Comme je l'ai dit, j'ai une lettre ici du ministre de l'Alberta de l'époque, je crois, portant sur la première version de mon projet de loi. Le numéro était différent. C'est Ted Morton, le ministre du Développement durable des ressources de l'Alberta en novembre 2009, qui l'a présentée. J'ai oublié la date exacte, mais je n'ai pas le temps de vérifier. L'Alberta et l'Ontario ont un projet de loi de ce genre.
Comme je l'ai dit, je suis presque certain, d'après mes recherches, qu'environ six provinces ont des journées de la chasse ou de la pêche, et certaines d'entre elles font quelque chose de spécial. Par exemple, en Ontario, je pense qu'on lève l'obligation de détenir un permis pour une journée si une famille part à la chasse. Je recommande fortement que nous fassions de même. Comme je l'ai dit, les États-Unis le font.
Il y a toujours une raison pour laquelle j'essaie de me rapprocher des Américains. Dans le passé, et c'est ce que je vais faire lorsque je n'occuperai plus ce poste, nous faisions appel à un pourvoyeur pour pratiquer la chasse en avion. Nous nous rendons dans le Nord-Ouest de l'Ontario pour aller à la chasse à l'orignal et à la pêche au doré, mais en raison du ralentissement économique, le nombre d'Américains qui viennent au pays pour chasser a considérablement diminué.
Je vais vous raconter une autre anecdote. Lorsque mon fils cadet s'est marié dans le nord-ouest de l'Ontario, en raison du manque d'hébergement là-bas, nous sommes allés dans un camp où ma belle-fille travaillait lorsqu'elle était à l'école secondaire et à l'université. Nous y avons passé cinq jours, car on nous fournissait des bateaux et des véhicules, et plusieurs d'entre nous sont restés pour profiter de quelques jours de vacances.
Au moment de payer pour notre semaine, mon épouse m'a suggéré d'acheter des chandails en denim avec l'inscription du camp de pêche McEwan. Elle a dit : « Mon mari contribuera à faire la promotion de votre camp. » Le propriétaire a dit que le camp existait depuis 25 ans et que nous étions les premiers Canadiens à y aller. Il n'accueillait que des Américains. C'est très important pour notre économie.
Les Territoires du Nord-Ouest ou n'importe quel autre territoire, s'ils le souhaitent, auraient intérêt à adopter un projet de loi semblable, car cela montre l'importance de ces activités pour la collectivité.
Le président : Je sais que la Colombie-Britannique a une journée de la chasse, du piégeage et de la pêche.
La sénatrice Ringuette : Je me demande s'il y a une raison particulière pour laquelle vous avez choisi le troisième samedi de septembre.
M. Norlock : Tout à fait, car c'est en même temps que celle aux États-Unis. J'espère pouvoir encourager les intervenants de l'industrie à se servir de cette journée pour attirer les Américains, car nous avons perdu un grand nombre de chasseurs et de pêcheurs américains, et ce, pour diverses raisons. Je pourrais entrer dans les détails, mais je pense que nous savons tous quelles sont certaines de ces raisons, à commencer par le registre des armes à feu, puisque les Américains perçoivent les armes à feu différemment.
J'espère que nous pourrons nous servir de cette journée à des fins commerciales. Je veux être honnête avec vous et vous expliquer pourquoi j'ai choisi cette journée-là : c'est ce qui concorde le plus à la journée aux États-Unis. Je veux que ce soit un samedi, car c'est une journée où les familles peuvent y aller. J'espère que de plus en plus de personnes diront cette journée-là : « Oublions tout ce que nous avons à faire et allons pêcher. » Nous avons beaucoup de perdrix dans la région; je suppose que « gélinottes » est le nom approprié. J'espère qu'ils diront : « Allons chasser la gélinotte. »
Si vous êtes un pourvoyeur, vous dites : « Nous vous offrons une journée gratuite si vous venez en septembre. » C'est une façon de souligner cette journée. C'est attrayant; voyons voir ce que vous pouvez faire avec cette journée-là.
Le sénateur Sibbeston : C'est en plein milieu de la saison du rut des orignaux et des caribous mâles. C'est à ce moment-là où la faune se déchaîne. Les taureaux courent après les vaches. C'est un moment propice pour la chasse.
M. Norlock : Tout cela s'inscrit dans la même foulée de nos démarches. J'ai longuement réfléchi à ce projet de loi et au moment approprié. Étant moi-même chasseur et pêcheur, je pense que c'est un bon moment.
Le président : Monsieur Norlock, nous vous sommes reconnaissants de l'information que vous nous avez fournie. Il est toujours agréable d'entendre toutes ces choses et de nous rappeler à quel point c'est important. Je vous remercie de votre temps et de vos efforts.
M. Norlock : Merci, sénateurs.
Le président : Le 4 mars 2014, le Sénat a autorisé notre comité à entreprendre une étude sur le développement des énergies renouvelables et non renouvelables dans les trois territoires du Nord, y compris le stockage, la distribution, la transmission et la consommation d'énergie, de même que les technologies émergentes.
Le comité a tenu sept réunions avec témoins sur ce sujet à Ottawa. En mai dernier, nous nous sommes rendus dans les trois territoires du Nord canadien, où nous avons organisé des réunions privées et des visites. Nous en sommes aujourd'hui à notre huitième réunion sur cette étude, et je suis ravi de souhaiter la bienvenue à M. Peter Lang, président, Dunedin Energy Systems.
Bienvenue, monsieur Lang. Vous avez préparé des remarques liminaires.
Peter Lang, président, Dunedin Energy Systems Ltd. : Bonsoir, sénateurs et mesdames et messieurs. Je vous remercie de m'avoir invité à m'entretenir avec vous ce soir.
Pour commencer, je tiens à vous dire que j'ai 40 ans d'expérience en aviation commerciale et militaire et que je travaille chez Dunedin Energy Systems depuis six ans. Au début de ma carrière, j'ai été affecté à Resolute Bay et à Iqaluit, où j'ai pu voir par moi-même, en me rendant dans toutes les collectivités du Nunavut, les efforts logistiques et financiers incroyables que l'on déploie pour approvisionner les collectivités du Nord. En tant que pilote militaire survolant l'Arctique dans le cadre de missions pour assurer notre souveraineté, j'ai été surpris de l'énormité de la tâche. Ce que j'ai rapidement réalisé, c'est que pour y arriver, il faut un approvisionnement en énergie sûr et durable.
Tout d'abord, j'aimerais souligner que vous connaissez déjà bien la situation énergétique dans le Nord. J'espère que nous pouvons nous entendre pour dire que l'énergie est probablement la principale ressource dont nous avons besoin pour pouvoir exploiter toutes les autres ressources possibles. C'est fondamentalement une ressource habilitante. À la diapo 2, on peut voir que c'est une source de préoccupation constante pour les gens du Nord. J'aimerais ajouter quelques remarques concernant la situation actuelle entourant la production d'énergie dans le Nord.
Il y a cinq jours, dans le discours liminaire qu'il a fait devant l'Assemblée législative des Territoires du Nord-Ouest, le premier ministre Bob McLeod a annoncé que son gouvernement dépenserait 20 millions de dollars pour couvrir les coûts de production d'électricité additionnels causés par les faibles niveaux d'eau à l'installation hydroùlectrique dans la rivière Snare. Ce type de production est généralement perçu comme étant fiable et durable, mais les niveaux d'eau réduisent néanmoins les quantités d'énergie. À titre d'information, le libellé complet de ce qu'il a dit se trouve aux diapos 3 et 4.
Il a également informé l'Assemblée législative que le secteur de l'énergie devrait non seulement miser sur des solutions à court terme, mais aussi sur un plan énergétique durable qui ne dépend pas de projets de transmission d'envergure. Il a dit, « Nous devons trouver des moyens de répondre à nos besoins énergétiques plus près de chez nous ».
Pour ce qui est de reconnaître l'importance capitale de l'énergie pour l'économie et le bien-être des gens, il a dit ceci : « [...] nous devons apporter des changements fondamentaux à notre approche à l'égard de l'énergie, plus précisément, et à notre façon de penser, de façon plus générale. »
Ce qui accroît l'urgence de ce changement fondamental, c'est la réduction des coûts et de la sécurité de l'approvisionnement en diesel dans l'Arctique, qui est un produit spécialisé, comme vous le savez. Don Dean, de PROLOG Canada, est le coauteur du rapport « Évaluation des systèmes de transport dans le Nord », dont il est question à la diapo 5, qui est une étude exhaustive de tous les besoins logistiques du Nord jusqu'en 2030, je crois, dont plus de 50 p. 100 est du carburant, soit dit en passant. Il a récemment déclaré que ce qui aggrave le problème du carburant diesel dans le Nord, c'est qu'Imperial Oil a fermé la raffinerie en Nouvelle-Écosse, qui était un producteur de diesel dans l'Arctique. Il a signalé que le diesel importé d'autres pays ne répond parfois pas aux exigences et que les paraffines peuvent se déposer et bloquer les injecteurs de carburant, causant ainsi des pannes de production de diesel coûteuses et imprévues. Suncor a laissé tomber ses plans de construire le Voyageur II, une installation de valorisation de 12 milliards de dollars pour générer du diesel à faible teneur en soufre. Imperial Oil ne vendra pas de diesel aux clients occidentaux directement. Les transactions doivent être effectuées par l'entremise d'une tierce partie à partir d'une raffinerie à Edmonton, qui doit examiner au bout du compte tous les coûts et les efforts logistiques du transport du produit aux clients. Au final, Transports Canada exige maintenant que des navires et des barges à double coque soient utilisés pour le transport de carburant diesel vers le Nord. Une grande partie des navires sont à coque simple à l'heure actuelle. Tous ces facteurs contribuent à réduire le coût du carburant diesel et à la sécurité de l'approvisionnement.
Je suis ici aujourd'hui pour vous parler d'une possible solution ou ce que je considère comme une part importante de la solution. Les microcentrales nucléaires peuvent produire une part considérable de l'énergie et de la chaleur. Je tiens à mettre l'accent sur la chaleur, parce qu'au moins la moitié du carburant diesel qui est brûlé dans le Nord canadien sert au chauffage. Dans bien des cas, les habitants ont besoin de chauffage toute l'année. Il existe un certain nombre de concepts de petits réacteurs, mais je me concentrerai sur le modèle dont Dunedin Energy dirige la conception, soit la pile nucléaire SMART — elle se trouve à la diapositive 6 —, tout simplement parce que c'est ce modèle que je connais le plus et que je crois que c'est le plus approprié pour cette application.
Généralement, cela se résume à quatre questions. Qu'est-ce que c'est et qu'est-ce que cette pile peut faire? Est-ce sécuritaire? Comment cela coûtera-t-il? Les peuples autochtones et les autres parties concernées accepteront-ils cette solution? Je vais prendre quelques instants pour répondre à chacune de ces questions et faire un résumé, puis nous pourrons passer à vos questions.
Qu'est-ce que c'est et qu'est-ce que cette pile peut faire? Il s'agit d'un réacteur à eau pressurisée. Cela signifie que c'est le type de réacteurs le plus fiable et le plus éprouvé. Les trois quarts des réacteurs nucléaires dans le monde sont des réacteurs à eau pressurisée. Ce sont les réacteurs auxquels font confiance les équipages de navires et de sous-marins depuis 50 ans. C'est le Maytag des réacteurs nucléaires. Ce réacteur peut produire 6 mégawatts d'électricité ou 30 mégawatts d'énergie thermique ou une combinaison des deux avec un système de cogénération. Encore une fois, cette chaleur est importante non seulement pour le chauffage des bâtiments, mais aussi pour les exploitations minières dans le Nord canadien. Ces réacteurs nucléaires permettent un fonctionnement en suivi de charge. Contrairement aux grands réacteurs que nous avons dans le Sud du pays qui fonctionnent nuit et jour, nos réacteurs peuvent s'adapter en fonction de la charge à partir du début. Qui plus est, avec une utilisation moyenne, le réacteur SMART fonctionnera environ 20 ans avant d'avoir épuisé son carburant. Cela se traduit par une stabilité du coût de l'énergie qui n'a pas son pareil dans le milieu. Seule la production d'hydroùlectricité peut s'y approcher. L'installation du réacteur se fait sous forme de modules, et vous pouvez ajouter des modules à mesure que la demande augmente. Vous verrez que le prochain point est répété à plusieurs reprises dans le document. Une seule pile nucléaire SMART remplace la consommation de 210 millions de litres de carburant diesel et élimine la production de 600 000 tonnes de dioxyde de carbone dans sa vie.
Qu'est-ce que ces réacteurs ne font pas? Ces réacteurs ne produisent aucune émission d'oxydes de soufre, d'oxydes d'azote, de composés organiques volatils, de suie, de particules et de gaz à effet de serre. Ils n'ont pas besoin d'une source d'eau externe, à l'instar des gros réacteurs, étant donné que ces condenseurs sont refroidis à l'air. C'est un plus pour l'environnement. De plus, l'exploitant n'a pas besoin d'obtenir un permis d'utilisation des eaux. Les déchets ou le carburant ne sont pas entreposés sur le site.
Lorsque le carburant est épuisé dans le réacteur après 20 ans, on retire l'ensemble du module qui est scellé et renvoyé au fabricant pour le recycler, parce qu'il contient encore du carburant. Les déchets ne sont pas entreposés sur le site ou même au Canada. Le tout est transporté à l'étranger pour son recyclage et son élimination finale.
Est-ce sécuritaire? Oui, ce l'est. Toutes les installations nucléaires au Canada sont titulaires d'un permis émis par la Commission canadienne de sûreté nucléaire, dont le seul mandat est de protéger la sécurité et la santé des Canadiens et de s'assurer du respect de nos engagements internationaux à l'égard de la non-prolifération des armes nucléaires. Notre réacteur comporte également des systèmes de sécurité inhérents et passifs qu'il est possible d'avoir dans de petits réacteurs, mais qu'on ne peut pas nécessairement avoir dans de grands réacteurs. Le principal élément est son système de refroidissement gravitaire. Par exemple, la catastrophe de Fukushima a causé une panne électrique qui a ensuite entraîné l'arrêt des pompes, et l'eau ne pouvait plus refroidir les réacteurs nucléaires. C'est la circulation naturelle qui refroidit le réacteur. Bref, à moins que la gravité disparaisse, le réacteur continuera d'être refroidi, peu importe les circonstances. Même si la centrale est plongée dans le noir à la suite d'une panne électrique, le réacteur continuera d'être refroidi indéfiniment.
Ce n'est pas le cas de notre réacteur précisément, mais nous arrivons à plus de 12 000 ans, si l'on additionne toutes les années durant lesquelles des réacteurs à eau pressurisée ont été en service. La diapositive 7 nous en dit long au sujet de la sécurité. Ce sont des centrales nucléaires qui produisent plus de la moitié de l'électricité de l'Ontario. J'ai tiré ces données le dimanche après-midi pendant que je me préparais à la réunion. Vous pouvez voir que les deux tiers de notre production proviennent de l'énergie nucléaire, et c'est ainsi en Ontario depuis un demi-siècle, et ce, sans aucun décès lié à cette technologie. Cette statistique sur la sécurité est éloquente.
Comment cela coûte-t-il? C'est une excellente question qu'on me pose très souvent. Il y a deux options. Le client peut acheter le réacteur, mais il faudra tout de même qu'un exploitant s'occupe des tâches quotidiennes, de la maintenance et du déclassement du réacteur en fin de vie. Passons maintenant à l'option 2, soit le modèle construction-propriétaire-exploitant-déclassement. Dans cette option, le vendeur assume tous les coûts de construction, de possession, d'exploitation et de déclassement. C'est également l'option préférée de l'organisme de réglementation qui ne souhaite pas devoir réglementer un grand nombre d'exploitants indépendants, parce qu'un permis d'exploitation d'une centrale nucléaire n'est pas une mince affaire. L'organisme de réglementation préfère grandement traiter avec un exploitant d'expérience. Dunedin est en pourparlers avec certains exploitants d'expérience du milieu, principalement en Ontario, et c'est le travail typique que les exploitants feront si le tout se concrétise. Je répète que c'est ce que préfère l'organisme de réglementation. On vendrait ensuite l'électricité et la chaleur aux clients, soit une société minière, une collectivité ou un territoire, par l'entremise d'un contrat d'achat ferme. Cela évite aux clients de devoir assumer les dépenses en immobilisations initiales, les coûts de fonctionnement et d'entretien et le déclassement.
Il en coûte 7,5 ¢ pour produire un kilowattheure, mais cela dépend de l'installation. Le Nord canadien est un immense territoire, et certaines installations seraient plus dispendieuses et plus complexes que d'autres. Les coûts globaux pour la durée de vie du réacteur seraient un peu plus élevés que cela.
C'est instructif d'examiner la diapositive 9 qui explique comment se compare notre réacteur à une centrale à moteur diesel de puissance développée comparable. Il s'agit d'une centrale de 12 mégawatts que nous retrouverions dans une petite mine dans le Nord canadien. Les deux centrales produisent environ 105 000 mégawattheures par année. La centrale à moteur diesel aura besoin d'environ 26 millions de litres de carburant pour y arriver. À la diapositive 9, on constate que cela représenterait plus de 500 trains routiers de camions-citernes. Cette image représente en fait la moitié des camions-citernes nécessaires pour acheminer tout ce carburant vers une petite mine.
Le réacteur ne nécessite pas l'acheminement de carburant et n'émet aucune émission de gaz à effet de serre ou aucune autre émission. Vient ensuite la question de la taxe ou du crédit sur le carbone. C'est encore une question en suspens en fonction de l'endroit où vous vous trouvez, mais je crois que nous savons la direction dans laquelle le pays et le monde s'en vont à ce sujet. Il serait possible d'avoir un crédit à ce sujet en raison des émissions nulles.
Le dernier point que j'aimerais aborder est de déterminer si les peuples autochtones et les autres parties concernées acceptent cette solution. L'approbation sociale est absolument essentielle avant la mise en place de toute technologie du secteur énergétique dans le Nord canadien. Étant donné qu'il s'agit d'une technologie du secteur énergétique peu connu dans ce marché, l'approbation du public n'est pas encore chose faite. Cependant, je crois que nous avons de bonnes raisons de penser que les microcentrales nucléaires seront bien accueillies dans le Nord canadien. Cette acceptation dépendra grandement de la tenue de consultations exhaustives, d'une écoute attentive et de communications continues. Ces éléments sont primordiaux à l'obtention de l'aval des habitants. Par contre, j'aimerais que vous considériez les quatre points suivants.
Les parties concernées dans le Nord canadien sont en fait bien au courant de l'étroite relation qui existe entre l'énergie abordable, l'aménagement du territoire, les emplois et le bien-être des collectivités. Tout est intrinsèquement lié. L'un suit l'autre, comme la nuit suit le jour. L'environnement arctique, comme nous le savons tous, se réchauffe plus rapidement que l'ensemble de la planète. Les effets du réchauffement climatique sont beaucoup plus visibles dans cette région, et cela donnerait aux gens une véritable occasion de faire une contribution considérable en vue de réduire ou d'éliminer les gaz à effet de serre dans une partie du monde qui est grandement touchée par ces émissions.
Les habitants du Nord canadien sont fiers, à juste titre, de leur autonomie et de leur indépendance, mais ils sont également bien au courant de la nécessité d'importer des biens du Sud du Canada. Les microcentrales nucléaires peuvent être alimentées par de l'uranium extrait des mines situées dans les territoires, ce qui permettrait aux habitants du Nord d'avoir une certaine indépendance sur le plan de l'énergie, indépendance dont ils ne jouissent pas depuis des décennies. Je ne crois pas que cet aspect soit anodin.
Enfin, les habitants du Nord ont un profond respect pour leur territoire, et les déchets et l'équipement abandonné lors des premiers chantiers — nous n'avons qu'à penser à la mine Giant à Yellowknife — sont constamment une source d'inquiétude lorsque vient le temps d'examiner de nouveaux projets d'aménagement du territoire. Dans le cas de la centrale nucléaire, avant même la première pelletée de terre, il faut un plan de déclassement approuvé dont le financement est assuré. Cela se veut une énorme garantie qu'à la fin de la vie utile de la centrale le territoire redeviendra une zone verte. Le financement est placé en dépôt fiduciaire, et le montant est révisé. On s'assure qu'il y a suffisamment d'argent tous les cinq ans lorsque le permis d'exploitation de la centrale nucléaire est renouvelé.
Si les conditions évoluent et que les autorités décident qu'il n'y a pas suffisamment d'argent, il faut que le montant en dépôt fiduciaire soit augmenté avant d'autoriser le renouvellement du permis. Il y aura toujours de l'argent en dépôt fiduciaire, peu importe le sort éventuel des entreprises concernées. Il y aura toujours de l'argent pour le déclassement de la centrale et le retour à une zone verte. C'est très important.
J'aimerais faire valoir un dernier point. Un tel projet a-t-il déjà été réalisé auparavant? Oui. À la diapositive 10, je vous présente Bilibino qui se trouve dans le nord de la Sibérie au 68e parallèle Nord, ce qui est environ à la même hauteur que Hall Beach, au Nunavut, soit au nord du cercle arctique. Cette ville a atteint environ 14 000 habitants au cours de l'ère soviétique, mais sa population est maintenant d'environ 5 500 personnes. Depuis 40 ans, des réacteurs nucléaires produisent l'électricité et la chaleur pour la ville, la mine et même les serres. C'est un énorme succès pour les gens de cette ville.
La dernière diapositive est le résumé. Je ne pense pas devoir passer en revue les points. Nous les connaissons. Par contre, la conclusion est importante. Je suis convaincu que la pile nucléaire est une technologie stratégique nationale que doit posséder le Canada si nous voulons atteindre nos objectifs stratégiques concernant les collectivités et la souveraineté dans l'Arctique. Je serai ravi de répondre à vos questions.
Le président : Merci beaucoup. J'ai deux ou trois questions.
Dans votre document, vous présentez deux options. Dans la première option, la centrale appartiendrait entièrement à votre entreprise ou l'entreprise s'occuperait de toutes ces choses. Cela coûterait environ 29 cents le kilowattheure.
M. Lang : C'est exact.
Le président : Où cela se ferait-il? Est-ce à Inuvik, ou est-ce quelque part dans les environs?
M. Lang : Non. C'est dans le Nord canadien.
Le président : N'importe où dans le Nord?
M. Lang : Non. Cela dépend si l'endroit est accessible par bateau, à savoir que vous avez des installations côtières, ou si l'endroit se trouve à 200 kilomètres à l'intérieur des terres et que le transport doit se faire par train, parce que cela rend le tout plus difficile. Les coûts seront moindres si l'endroit dispose d'installations côtières qui peuvent accueillir une barge. Tout projet profondément à l'intérieur des terres ou encore plus au nord serait plus dispendieux. C'est difficile à chiffrer pour l'instant, sénateur, mais c'est évident que plus cela nécessite d'efforts... Lorsque la centrale est en place, les coûts d'exploitation devraient être sensiblement les mêmes. C'est seulement les coûts de construction qui varient.
Le président : Dans le cas du Nunavut, la majorité des collectivités se trouvent près de l'eau.
M. Lang : C'est le cas.
Le président : Ce sont des navires qui acheminent actuellement le carburant diesel à ces collectivités. Le 29 cents est alléchant, mais cela variera, n'est-ce pas?
M. Lang : Oui.
Le président : Quel est le pourcentage de cette variation? Donnez-m'en une estimation grossière.
M. Lang : Je dirais que cela se situe entre 30 et 40 p. 100. Une installation profondément à l'intérieur des terres, comme celle d'Izok Lake en plein cour du Nunavut, comporterait d'énormes défis, et ce serait la même histoire si les autorités voulaient avoir une installation à Alert. Ce serait une installation militaire, mais tout y est acheminé par la voie des airs. Il faudrait attendre des conditions météorologiques optimales pour acheminer l'équipement. Les mines de fer de Baffinland à Mary River sont de bons exemples, parce qu'elles utilisent beaucoup d'électricité et qu'elles se trouvent à 140 kilomètres à l'intérieur des terres. Un tel projet serait dans le milieu de la fourchette. D'un autre côté, la société minière aurait besoin de plusieurs unités compte tenu de la taille de l'exploitation — je ne suis pas en train de dire que c'est ce qu'elle fait —, ce qui réduirait les coûts.
Le président : Quelle est la réponse de cette société minière? Évidemment, je présume que vous avez communiqué avec cette société minière et d'autres au Nunavut, où l'électricité est leur plus grande dépense.
M. Lang : Oui.
Le président : C'est leur plus grande dépense. Avez-vous communiqué avec ces sociétés minières? Avez-vous abordé la question avec elles?
M. Lang : Oui.
Le président : Je ne veux pas me mêler de ce qui ne me regarde pas.
M. Lang : Je le comprends. J'ai pris la parole aux colloques annuels du secteur minier à Yellowknife et au Nunavut pour présenter le sujet. Je l'ai fait durant un certain nombre d'années consécutives. Ce secteur vit actuellement des heures sombres. Le prix des marchandises diminue; les capitaux se font rares, et les sociétés minières se fient à ce qu'elles connaissent pour l'instant, mais elles continuent de me dire qu'elles sont intéressées et qu'elles veulent voir un réacteur en action. Je crois qu'elles ont vraiment besoin d'en voir un en service. Même s'il s'agit d'une technologie bien établie, ce n'est pas quelque chose que le secteur minier connaît. Ses acteurs sont au courant que cette possibilité existe. On m'a demandé de leur en parler, mais ils veulent en voir un qui fonctionne quelque part. Ils veulent en être convaincus; ils veulent l'examiner sous tous ses angles.
Le président : Nous avons visité une mine près de Rankin Inlet, dont j'ai oublié le nom, mais le sénateur Patterson s'en souvient probablement.
Le sénateur Patterson : La mine Meliadine d'Agnico Eagle.
Le président : Si ma mémoire est bonne, les coûts seront de loin supérieurs à 29 ¢.
M. Lang : Oui.
Le président : Pourtant, la mine n'est pas très loin de l'eau. La société minière est-elle réceptive à votre solution? Les responsables parlaient de construire une ligne électrique. Ils disent que...
M. Lang : En effet. Dans un cas comme celui des mines Meliadine ou Meadowbank, qui se trouvent respectivement à proximité de Rankin et de Baker Lake, la durée de vie des mines n'est que de 10 à 15 ans, mais les collectivités continueront d'avoir besoin d'électricité. Si l'on installe un réacteur entre les deux ou à proximité de l'une ou l'autre, on peut continuer de vendre de l'électricité aux gens longtemps après la fermeture de la mine. L'avantage est donc double.
Oui, les sociétés minières sont intéressées à notre solution. Malheureusement, comme je l'ai déjà dit, les cordons de la bourse sont serrés. Le sénateur Patterson pourrait nous en dire davantage à ce sujet, mais je ne crois pas qu'une décision ait encore été prise au sujet de la mine Meliadine. Le projet a été approuvé. Tout dépend de la situation économique.
Le président : D'accord. Voici ma dernière question. Si je me fie à votre document, il s'agit d'une technologie russe.
M. Lang : Vous avez raison.
Le président : Comment la technologie russe ou la construction de ces réacteurs se comparent-elles à ce qui se fait au Canada? Pouvons-nous prendre un réacteur construit en Russie et l'utiliser au Canada? Ce réacteur répondrait-il à toutes nos exigences sans y apporter de modifications?
M. Lang : Je suis très heureux que vous ayez posé la question. En fait, le réacteur n'est pas encore au point, mais j'ai déjà parlé avec la Commission canadienne de sûreté nucléaire. Il faut d'abord se soumettre à ce qu'on appelle l'examen de la conception des fournisseurs, qui est une étape préalable à l'autorisation. C'est là qu'on peut examiner la conception et y apporter des changements avant de passer à la construction proprement dite. Ainsi, la Commission canadienne de sûreté nucléaire pourrait imposer tel ou tel changement à la technologie russe avant de donner le feu vert. C'est, à peu de choses près, ce qui se passe dans l'industrie des aéronefs commerciaux; par exemple, Boeing construit un aéronef selon les normes de la FAA, et Transports Canada accepte d'emblée la plupart des spécifications, mais précise qu'il faut ceci ou cela avant que le modèle soit autorisé au Canada. Il y a donc des protocoles. N'oublions pas que le Canada a conclu un accord sur le nucléaire avec la Russie.
En ce qui concerne la technologie nucléaire russe, permettez-moi de vous raconter une petite anecdote. J'ai parcouru le Canada à la recherche de la bonne conception de réacteur, pour ensuite arrêter mon choix sur la technologie russe. En réalité, c'est un scientifique chevronné d'Énergie atomique du Canada, maintenant à la retraite, qui m'a dit : « Peter, va voir du côté des Russes. Ils font vraiment du très beau travail. »
Je lui ai répondu : « Oui, ils veulent être partie prenante dans la conception de ce réacteur sur barge d'environ 70 mégawatts. » Il a alors dit : « Fouille un peu plus. Tu finiras par trouver ce que tu cherches. » Et il avait tout à fait raison. Après tout, il n'y a que deux pays nucléaires avancés au monde qui ont un arrière-pays arctique sous-développé : le Canada et la Russie. Le réacteur en question est tout spécialement conçu pour ce marché.
J'assiste à beaucoup de réunions, comme vous pouvez le comprendre, aussi bien dans le cadre du processus d'autorisation que dans le cadre des pourparlers avec l'industrie. J'entends beaucoup parler de l'excellent travail des Russes dans le domaine nucléaire, en dépit de leur tristement célèbre accident.
Le sénateur Massicotte : Merci, monsieur Lang, d'être des nôtres. De toute évidence, il s'agit d'un sujet très intéressant, voire même très pertinent, puisque l'énergie est un enjeu de taille. Je ne suis pas un expert, et je crois que bon nombre de mes collègues ne le sont pas, eux non plus. N'empêche que certains Canadiens le sont. Je songe, par exemple, à Lavalin, qui a acheté ACL, et je sais que vous cherchez un bailleur de fonds, un commanditaire. Cette société serait très crédible. Elle a d'ailleurs une vaste clientèle. Je suppose que vous avez parlé avec ses représentants pour voir s'ils voudraient contribuer à la mise au point de cette technologie. Avez-vous abordé la question avec eux? Quelle a été leur réponse?
M. Lang : Je ne me suis pas adressé expressément à SNC, qui serait certes un bon partenaire. J'ai communiqué avec d'autres sociétés d'ingénierie qui font des travaux dans le domaine nucléaire pour OPG et Bruce Power. L'une d'entre elles en particulier s'occupe surtout de la partie classique d'une centrale. Le réacteur serait entièrement fabriqué en Russie. Cependant, tous les systèmes auxiliaires, les contrôles, les turbines et les génératrices seraient conçus au Canada. J'ai donc parlé avec ces entreprises.
Pour ce qui est du financement, il y a en fait beaucoup de tiers investisseurs qui n'ont pas vraiment besoin d'un bailleur de fonds. Il faut d'abord trouver un client. Cela dit, les sables bitumineux constituent un autre domaine de recherche sur lequel nous nous penchons à l'heure actuelle, et cette technologie se prête bien au secteur pétrolier. Toutefois, il ne s'agit pas de la même situation que celle qui prévaut dans le secteur minier. Le réacteur aurait besoin de quelques modifications pour fournir de la vapeur selon les paramètres nécessaires. On l'utilise pour le DGMV, ou drainage par gravité au moyen de vapeur; comme vous le savez sans doute, cette méthode consiste à injecter de la vapeur dans le sol afin de liquéfier le bitume. En fait, je travaille actuellement avec ces intervenants par l'entremise d'un tiers.
Le sénateur Massicotte : Je suis sûr que beaucoup de sociétés d'ingénierie sont intéressées parce qu'elles voient là une occasion de conclure des contrats. Selon moi, il faut qu'un expert en matière de technologie nucléaire, autre que Peter Lang, vienne confirmer que ce réacteur est sans danger, que ces chiffres sont indéniables, que ces faits sont réels. Je suppose qu'il y a là un problème. Très peu d'experts, me semble-t-il, peuvent ajouter de la crédibilité. Il faut régler la question de la sûreté, car l'acceptation du public en dépend. Comme vous le savez, de nombreux pays, comme l'Allemagne et le Japon, ont décidé en quelque sorte de se retirer de la partie.
M. Lang : En effet.
Le sénateur Massicotte : Par ailleurs, non seulement cette technologie est fabriquée en Russie, mais elle est en plus détenue par le gouvernement russe. Devant les problèmes actuels, des pays comme la France et l'Allemagne ont dit qu'ils ne voulaient pas dépendre de la Russie. Voilà donc d'autres questions dont il faut tenir compte. Bref, je crois que vous avez beaucoup de chemin à faire pour ajouter de la crédibilité au projet que vous essayez de nous vendre.
M. Lang : Pour ce qui est de la crédibilité, si je peux me le permettre, j'ai réalisé un projet conjointement avec l'Institut universitaire de technologie de l'Ontario. C'est la seule université au Canada qui décerne des diplômes de premier, deuxième et troisième cycles en ingénierie nucléaire. En outre, j'ai parlé à deux reprises avec les représentants de Canadian Nuclear Partners, une filiale de l'Ontario Power Generation, qui figure parmi les exploitants d'installations nucléaires les plus expérimentés du monde, et ils sont disposés à fournir des services d'autorisation, ainsi qu'un soutien technique et opérationnel. Canadian Nuclear Partners vise à optimiser l'expertise qu'elle a acquise au fil des ans. Cette société est une source très crédible, d'autant plus qu'elle a beaucoup de poids dans le domaine de l'ingénierie. N'empêche que vous avez raison : je dois quand même aller cogner à la porte de SNC.
Le sénateur Massicotte : Je suis sûr que les intervenants manifestent tous de l'intérêt quand vous les appelez, car ils voient là une occasion de faire des bénéfices. Mais ont-ils exprimé une opinion par écrit pour attester que cette technologie est sans danger, que les chiffres sont exacts et que leur appui est sans réserve?
M. Lang : Pour répondre brièvement à votre question, non, je n'ai pas obtenu une telle réponse de la part de SNC.
Le sénateur Massicotte : Ou des autres associations auxquelles vous avez fait allusion.
M. Lang : Canadian Nuclear Partners est d'accord pour dire que cette technologie sera sans danger. D'ailleurs, cette société n'exploiterait pas un réacteur qu'elle considère comme étant dangereux, mais je reviens à la Commission canadienne de sûreté nucléaire. En effet, la commission n'accorderait tout simplement pas de permis d'exploitation si tel était le cas. Elle a des normes très rigoureuses et, en fait, plusieurs fabricants étrangers viennent au Canada pour soumettre leurs projets de réacteur à un examen préalable à l'autorisation parce que cela leur donne plus de crédibilité dans le cadre du processus d'autorisation de leurs pays respectifs.
Le sénateur Massicotte : Mais vous avez dit que le réacteur était toujours en cours de développement; si j'ai bien compris, il n'est pas encore prêt, n'est-ce pas?
M. Lang : C'est exact. Avant de passer à la toute dernière étape, celle de l'avant-projet détaillé, les fabricants aiment bien laisser en suspens une certaine partie de la conception technique pour être en mesure d'apporter tout changement imposé par un organisme de réglementation. Donc, la conception n'est pas tout à fait terminée pour qu'on puisse apporter ces changements dans le cadre du processus d'autorisation.
Le sénateur Mitchell : Je trouve cela très intéressant. Je suis sûr que je ne suis pas le seul, mais ce qui me préoccupe tout particulièrement, c'est la question des changements climatiques et des émissions. En tout cas, c'est très révélateur, ne serait-ce que pour cette raison. Fait intéressant, on a beau imaginer des moyens de réduire les émissions, presque chaque solution a ses détracteurs, au nombre desquels on trouve même des environnementalistes. C'est vraiment très ironique, et c'est bien dommage. J'aimerais beaucoup que ce genre de projet se concrétise.
Combien aurait-on à débourser, au total, pour construire un de ces réacteurs dans une région raisonnablement accessible, selon le kilowattheure, c'est-à-dire quel en serait l'investissement total en capital?
M. Lang : J'ai posé cette question aux gens du bureau de conception chargés du travail. Selon leurs estimations, il faudrait entre 130 et 160 millions de dollars US, pour une installation située dans le centre de la Russie. Ce montant comprend les coûts liés à la centrale et à l'équipement auxiliaire.
Il leur a fallu de nombreuses semaines pour faire ces calculs. Je n'ai pas arrêté de les harceler, parce que quelqu'un voulait obtenir des réponses rapidement. Ils tenaient, m'ont-ils dit, à bien faire leur travail. Ils en sont donc arrivés à la somme de 130 à 160 millions de dollars, et j'ai obtenu cette réponse il y a environ 18 mois. Je ne pense pas que ce chiffre ait beaucoup changé depuis.
Le sénateur Mitchell : En Russie.
M. Lang : Oui. Il s'agit d'une estimation pour le centre de la Russie. Je survole la Russie trois fois par mois, et sachez que le centre du pays est un grand vide. Je crois que ce serait comparable à une installation à Yellowknife.
Le sénateur Mitchell : Combien en coûterait-il, grosso modo, pour construire une installation de taille proportionnelle, alimentée au carburant diesel? Je sais que la plupart des coûts apparaissent après coup, mais à combien s'élèverait l'investissement en capital pour une centrale ayant une taille et une capacité de ce genre?
M. Lang : Il en coûterait environ 25 millions de dollars, compte tenu des prix actuels du carburant. Je ne sais pas si je l'ai précisé dans ma réponse à votre question sur le coût, mais il s'agit d'une centrale à deux unités. On parle de 130 à 160 millions de dollars dans le cas d'une centrale à deux réacteurs, c'est-à-dire pour une puissance de 12 mégawatts.
Le sénateur Mitchell : Le coût de 25 millions de dollars pour le diesel, c'est...
M. Lang : Une centrale diesel comparable, d'environ 12 mégawatts, coûterait environ 25 millions de dollars.
Le sénateur Patterson : On parle là de coûts en capital?
M. Lang : Oui.
Le sénateur Mitchell : Compte tenu de la différence entre les coûts de carburant, à partir de quel moment les prix convergent-ils pour faire de l'énergie nucléaire une solution moins coûteuse?
M. Lang : Je n'ai pas le document avec moi, mais vous l'avez sous les yeux. Si vous tournez les pages, vous verrez un graphique qui montre le point de croisement. Cela aura lieu dans environ quatre ans. C'est parce que le ravitaillement initial du réacteur couvre une période de 20 ans. Il s'agit d'un coût fixe qui fait partie des dépenses en capital. Comme nous l'avons vu, il faut environ 26 millions de litres par année pour le diesel.
Le sénateur Mitchell : La raison pour laquelle vous parlez d'installer un tel réacteur dans le Nord, c'est parce qu'il s'agit de l'objet de notre étude. Au fond, on pourrait le construire n'importe où au Canada.
M. Lang : C'est possible. Toutefois, plus on se dirige vers le sud, plus les paramètres économiques ne s'y prêtent pas. Le marché principal, c'est vraiment celui du diesel, c'est-à-dire exclusivement le Nunavut et de nombreuses régions des Territoires du Nord-Ouest, ainsi que les provinces du Nord. Le Cercle de feu en Ontario jouera également un grand rôle à cet égard. On y trouve beaucoup de routes de glace inaccessibles, sans compter les problèmes liés au manque d'infrastructure comme au Nunavut; cette technologie pourrait donc s'avérer utile là-bas aussi. Mais quand on descend vers les régions desservies par le réseau, cette technologie ne peut pas vraiment soutenir la concurrence. Étant donné le très faible coût de production de l'électricité au Canada, cela ne fonctionnerait pas vraiment dans ces régions.
Par conséquent, je ne me suis concentré que sur le Nord. Je n'oublierai jamais mon expérience là-bas, qui remonte à l'époque où j'avais l'habitude de parcourir la région en avion. Comme je l'ai dit, je survole maintenant l'archipel Arctique presque chaque semaine. J'y pense tout le temps, et le sénateur Patterson en sait quelque chose, puisque j'ai cogné à sa porte plusieurs fois. Il s'agit d'un bien public qui s'impose. Je peux prendre ma retraite à tout moment, mais je vais poursuivre ce travail parce qu'il faut le faire.
Le sénateur Patterson : Je tiens à dire combien je suis heureux d'entendre M. Lang transmettre sa passion à notre comité, comme il l'a fait à de nombreuses reprises dans le Nord. Vous avez mis en évidence les facteurs qui contribuent à la hausse des coûts et à la baisse de la sécurité du diesel arctique, ce qui est très important. Comme le savent mes collègues, y compris le président du comité, le diesel arctique est un produit spécial qui ne gèle pas à des températures sous zéro. C'est bien différent du diesel qu'on utilise ailleurs dans le monde.
Permettez-moi de faire un petit préambule. Nous étudions l'énergie dans le Nord, et le gouvernement fédéral offre un appui non négligeable quant aux coûts énergétiques dans les trois territoires du Nord, grâce à ses généreux paiements de transfert.
À l'heure actuelle, la politique officielle du Canada est de réduire la dépendance aux combustibles fossiles. Je me demande si vous avez réfléchi à cette question et si vous pouvez faire une recommandation à notre comité sur le rôle que le Canada devrait jouer, s'il y a lieu, pour faire avancer cette solution de rechange aux combustibles fossiles.
M. Lang : Parlez-vous du Canada en tant que pays ou du gouvernement du Canada?
Le sénateur Patterson : Du gouvernement du Canada.
M. Lang : Cela nous ramène à SNC-Lavalin ou aux sociétés d'extraction minière. Ce qui compte le plus pour ces entreprises, c'est la confiance. Elles ont des obligations envers leurs actionnaires, qu'il s'agisse de réduire les risques le plus possible, de maximiser les rendements commerciaux ou d'assurer la sécurité de leurs collectivités.
L'examen de la conception des fournisseurs est la première étape du processus d'autorisation. L'organisme de réglementation de la sûreté met 14 000 heures à effectuer cet examen, au terme duquel on obtient un document d'évaluation préalable à l'autorisation. Une fois le document achevé, et advenant un examen réussi, l'organisme de réglementation dit quelque chose comme : « Si vous construisez le réacteur de telle ou telle manière, vous recevrez le permis d'exploitation. Ceci n'est pas un permis, mais nous avons bien examiné votre technologie, et nous prévoyons qu'elle sera autorisée. » Pour se prévaloir du permis d'exploitation, le fournisseur devra faire en sorte que la technologie réponde à toutes les exigences en matière de sûreté.
Il faut débourser environ 6 millions de dollars pour obtenir ce document; c'est le prix à payer pour le nombre total d'heures consacrées à l'examen. Certaines des grandes sociétés d'extraction minière ou d'exploitation des sables bitumineux seraient disposées à y contribuer, comme elles le font souvent en tant que partenaires de projets. Si le gouvernement fédéral faisait preuve d'initiative en offrant une partie du financement — pas la totalité, ni même la majorité, mais seulement une partie du financement —, les principaux intervenants verraient là un signe de leadership, de quoi les encourager à unir leurs efforts pour que le document d'examen de la conception des fournisseurs soit mené à bien. Comme je l'ai dit, il s'agit d'un document qui vise à donner confiance. En effet, grâce à un examen qui débouche sur des résultats concluants, on pourrait s'adresser à d'éventuels clients, n'importe où dans le monde, et leur attester que la technologie est sans danger et conforme aux exigences d'autorisation.
Le sénateur Patterson : Avez-vous eu l'occasion de communiquer avec Ressources naturelles Canada ou d'autres organismes fédéraux au sujet de cette proposition?
M. Lang : J'ai parlé à deux reprises avec des représentants du ministère de la Défense nationale, et ce, à leur demande. Je suis allé leur offrir une séance d'information, un peu comme ce qu'on fait ici, mais en misant davantage sur l'aspect technique. J'ai aussi communiqué avec les représentants du ministère des Affaires autochtones et du Développement du Nord canadien. C'était il y a quelques années. Ils m'ont dit d'aller voir Ressources naturelles.
À l'échelon fédéral, je me suis fait dire que l'énergie est une responsabilité provinciale et que je devrais m'adresser à la province ou au territoire. À l'échelon territorial, on m'a recommandé de consulter le gouvernement fédéral, puisque le financement provient du fédéral. Vous comprenez le problème.
Voilà pourquoi c'est bien de vous retrouver ici, dans la même pièce, et de savoir que vous vous occupez de ce problème précis. En tout cas, voilà le bilan de mes entretiens avec le gouvernement fédéral.
Le sénateur Patterson : J'ai été surpris que vous n'ayez pas posé cette question, monsieur le président, mais dans le contexte d'une collectivité du Nord où il serait possible d'utiliser ces six mégawatts, et on parle là de certaines des grandes collectivités du Nord, la principale préoccupation que pourrait susciter un tel réacteur, c'est qu'on se retrouve avec un système très technique et très complexe. Beaucoup de personnes peuvent entretenir des moteurs diesel, et même des groupes électrogènes diesel, dans le Nord. Vous avez dit que l'exploitant de la flotte s'occuperait de l'entretien, mais quel est le degré de complexité de ce travail? Pourriez-vous nous dire s'il serait difficile d'assurer l'entretien de l'installation en toute sécurité, dans une région éloignée?
M. Lang : C'est tout à fait faisable. Des difficultés, il y en aura sûrement. Dans le cadre du processus d'autorisation, on doit entre autres expliquer comment on s'y prendra pour amener les gens sur le terrain. Parfois, le mauvais temps nous empêche d'accéder à ces régions pendant deux semaines.
Ce qui fait partie intégrante de la conception, c'est la redondance de certains systèmes de sorte que le réacteur continue de fonctionner en cas de défaillance ou en mode d'exploitation à sûreté intégrée. Voici un exemple bien simple. La chaleur provenant du réacteur doit être transformée en vapeur, au moyen d'un générateur de vapeur. Les réacteurs comportent généralement quatre générateurs de vapeur, alors que celui-ci en compte douze. Si l'un de ces générateurs cesse de fonctionner, c'est un autre qui prendra le relais automatiquement, et le système continuera de fonctionner jusqu'à ce qu'une personne arrive sur place. Ce réacteur a été conçu spécialement pour les régions éloignées, sans qu'il soit nécessaire de faire appel à une grande équipe d'entretien. Pour vous dire franchement, sa conception permet un fonctionnement sans surveillance, mais il n'y a aucune chance que cela se fasse au Canada. À la limite, comme il s'agit d'un circuit de vapeur, il faudra un ingénieur d'appareils à vapeur de premier ordre sur les lieux.
Pour faire court, nous avons étudié la question de l'entretien avec soin. Elle a été prise en compte à l'étape de la conception, et nous estimons que c'est tout à fait faisable.
Si vous me le permettez, j'aimerais ajouter quelque chose. Étant donné qu'il s'agit d'une technologie habilitante, le vrai avantage économique qu'elle offre ne réside pas dans le réacteur même, mais plutôt dans les possibilités qu'il offre au plan du développement industriel et communautaire. Comme vous l'avez dit, il y a beaucoup de personnes dans le Nord capables d'opérer de gros moteurs diesel comme celui-là.
Le président : Si je n'ai pas posé la question c'est que lorsque j'ai lu vos notes, j'ai vu que vous proposiez que votre représentant se trouve sur place pour assurer le bon fonctionnement de l'installation.
M. Lang : Oui, tout à fait.
Le président : C'est compris dans l'estimation de 26 cents le kilowattheure, c'est bien cela?
M. Lang : Oui. J'ai même prévu un montant annuel pour les relations communautaires et les imprévus. Tout cela est pris en compte.
La sénatrice Seidman : Il est clair que ce que vous offrez suscite énormément d'intérêt pour les régions septentrionales isolées; comme vous le dites, cela est très prometteur. Ce que je trouve curieux c'est que, à la question de savoir si cela a déjà été fait, vous répondez que ce l'a été, en Sibérie, à Bilibino, ville de 5 500 âmes, et le système est en opération depuis 1974.
M. Lang : C'est exact.
La sénatrice Seidman : Je trouve curieux que ce soit le seul endroit où cela ait été fait. Surtout quand je pense à tous les autres pays où cela serait possible, comme le nord de la Russie, même les pays nordiques comme la Finlande, par exemple, où l'on trouve des communautés très isolées et non connectées aux réseaux électriques, qui répondraient à tous les critères que vous proposez.
Ma question est pourquoi cela n'a pas déjà été fait ailleurs?
M. Lang : C'est une très bonne question. En fait, Énergie atomique Canada a travaillé à la conception de deux réacteurs différents pour ce type d'application et ils ont abandonné le projet à la fin des années 1980 après y avoir travaillé pendant un certain nombre d'années. Au bout du compte, c'est que le pétrole était à 18 $ le baril. Ce n'était pas viable au plan économique.
On ne se préoccupait pas non plus de la sécurité de l'offre à l'époque. Avec ce diesel arctique, qui est un produit hautement spécialisé, l'offre ne posait pas problème. Le pétrole était si abordable, comme le gaz en ce moment. Il est difficile de faire concurrence au gaz s'il est disponible. Voilà la principale raison pour laquelle le projet a été mis de côté.
Maintenant que le pétrole est un peu plus coûteux, les Russes, par exemple, ont construit leur propre barge à deux réacteurs. Ils ont pris le réacteur qu'ils ont conçu pour faire fonctionner les brise-glaces — qui ont fonctionné pendant longtemps — et ils en ont placé deux dans une barge et les ont construits. Ils procèdent actuellement à l'intégration des systèmes et s'en serviront pour fournir de l'électricité à un certain nombre de clients le long de la mer du Nord en Russie au lieu d'utiliser ce qu'ils qualifient de « pétrole noir » et de faire appel à l'énorme chaîne logistique dont ils ont besoin pour le transporter là-haut. La Russie a aussi signé un accord récent avec la Chine pour mettre au point un réacteur sur barge aux mêmes fins. Ces innovations sont toutes motivées par les prix du pétrole et de l'énergie en ce moment. C'est une question d'économie. Personne ne se préoccupait du réchauffement planétaire dans les années 1970.
La sénatrice Seidman : Vous dites que l'on recommence à s'intéresser à cette technologie à cause de la situation économique, du prix du pétrole?
M. Lang : Oui, le prix et la disponibilité. Et le fait que l'on s'intéresse davantage à l'Arctique et à en développer les ressources.
Comme vous qui êtes tournés vers l'avenir, ils peuvent voir que la demande d'énergie sera énorme. Du point de vue communautaire, c'est aussi la région canadienne où la croissance démographique est la plus marquée en ce moment.
La sénatrice Seidman : J'aimerais vous poser une question concernant l'opérationnalisation de cette technologie. Vous dites que l'on installe la batterie dans le sous-sol rocheux.
M. Lang : C'est une option d'installation, oui, et c'est aussi celle que l'on privilégie.
La sénatrice Seidman : L'option de prédilection, en effet. Le pergélisol pose-t-il un problème au plan de l'installation ou au plan opérationnel?
M. Lang : Oui, il est problématique. On m'a déjà posé la question dans une ligne ouverte à la radio à Yellowknife. Idéalement, on installerait toujours la batterie dans le sous-sol rocheux. Ce serait une possibilité. Dans le Grand Nord, le sous-sol rocheux est généralement assez proche de la surface, à moins de se trouver à proximité de l'Arctique de l'Ouest. Près de Tuktoyaktuk et dans le delta du Mackenzie, c'est une autre histoire. Même à Inuvik, qui est très au nord. J'y étais il y a un certain temps pour trouver le type de sous-sol rocheux propice à ce genre d'installation. Ce serait faisable la plupart du temps. Il est aussi possible de construire à la surface en se servant de thermosiphons — vous connaissez peut-être le concept. Il s'agit de systèmes passifs conçus précisément pour prévenir le transfert de chaleur de la construction, du réacteur, c'est selon, au pergélisol et empêcher qu'elle ne fasse fondre ce qui se trouve en dessous. Oui, le pergélisol influerait sur leur installation s'il était impossible de creuser dans le sous-sol rocheux.
La sénatrice Seidman : Est-ce que la fonte du pergélisol pose problème au plan de la sécurité?
M. Lang : Si une installation de réacteur était construite sur le pergélisol au moyen d'une technologie qui l'empêchait de le faire fondre, que cette technologie faisait défaut pour une raison ou une autre et que le réacteur commençait à se déplacer, je m'attendrais à ce qu'il y ait des conséquences qu'il faudrait examiner, c'est clair. Lorsque l'on construit un réacteur, on ne fait pas que délivrer un permis pour le concept, on le fait aussi pour le site. Il faut procéder à une évaluation environnementale et à une évaluation technique sur le site. On étudierait la question à l'avance et, selon moi, on rejetterait un site comme celui-là pour cette raison même à moins de pouvoir convaincre la commission de sûreté que le projet est suffisamment sécuritaire pour qu'elle délivre un permis.
Je présume que l'on éviterait ces types de sites le plus possible.
Le sénateur Sibbeston : J'aimerais dire à M. Lang que vous faites la présentation dans le contexte de l'étude que nous avons menée sur l'énergie dans le Grand Nord. Vous faites une présentation pour promouvoir un réacteur nucléaire comme solution de rechange aux machines diesel énergivores que nous avons un peu partout là-haut. Dans quelle mesure êtes-vous réaliste? Dans quelle mesure votre technologie est-elle facile d'accès? À la page 1, vous parlez du fait que certains carburants diesel importés n'ont pas répondu aux exigences et qu'ils ont encrassé les moteurs, et cetera. J'aimerais savoir d'où vous tenez vos renseignements à ce sujet. Dans l'Ouest, je n'en ai pas entendu parler.
Vous présentez la technologie comme si elle était facilement accessible, mais on nous dit qu'elle ne l'est pas au Canada. Vous parlez d'un système russe. Un énorme système que l'on voit à la page 6, à côté duquel un homme paraît minuscule. Le coût aussi est énorme — vous avez parlé d'environ 130 millions de dollars. Tous ces facteurs en font un système vraiment peu pratique, ou ils font en sorte qu'il faille attendre plusieurs décennies ou même siècles avant de pouvoir s'en servir dans le Nord.
M. Lang : Vous avez posé un certain nombre de questions, alors vous allez peut-être devoir me rafraîchir la mémoire.
Pour en revenir au carburant diesel dont vous avez parlé, je tiens de deux sources mes renseignements concernant le diesel importé. D'abord de Don Dean, coauteur de l'étude sur la logistique dans le Nord menée pour le compte du ministère des Transports et qu'il est possible de se procurer. Il connaît très bien le système d'offre de carburant diesel dans le Nord. C'est lui qui a fait remarquer que le diesel représente plus de 50 p. 100 de tout le matériel qui passe au nord. En fait, au Nunavut, il est plutôt question d'environ 65 p. 100.
J'ai aussi demandé à un représentant d'Agnico Eagle comment on faisait pour s'approvisionner en diesel à la mine Meadowbank. C'était il y a deux ou trois ans. Il m'a dit qu'on l'achetait d'une raffinerie au New Jersey. Quand je lui ai demandé comment cela se passait, il a simplement hoché la tête et répondu : « Nous n'avons eu que des problèmes. » Pendant l'hiver, on faisait venir des barils d'additifs qu'on versait dans les réservoirs pour essayer de faire en sorte que le diesel fonctionne convenablement et empêcher la formation de cristaux de paraffine.
Pour ce qui est de la taille du réacteur, on m'a déjà fait ce commentaire. S'il est si grand, c'est pour deux ou trois raisons. Je vous demanderais de comparer sa taille à celle d'un réservoir pouvant contenir 200 millions de litres de diesel. Un grand réacteur commercial, comme ceux que l'on voit à Pickering ou Darlington, a une densité d'énergie d'environ 120 kilowatts par litre. C'est beaucoup d'énergie dans un litre. Lorsque le réacteur a été conçu, on a voulu qu'il ait de grandes marges de sûreté; on a donc fait en sorte qu'il ait une densité d'énergie de seulement 27 kilowatts par litre, environ le quart ou le cinquième de celle d'un réacteur de capacité industrielle. Si on a beaucoup élargi les marges de sûreté du réacteur, c'est qu'il nous est impossible d'avoir une équipe spécialisée dans les technologies de grande taille en permanence sur le site.
Vous vous rappellerez peut-être que j'ai mentionné qu'il avait un système de refroidissement par convection plutôt qu'un dispositif de refroidissement forcé avec pompes. Pour faire fonctionner le système de refroidissement par convection, il faut une sorte d'effet de cheminée. Il faut aussi qu'il soit suffisamment grand pour que le refroidissement se fasse à la grandeur du réacteur, alors la taille peut être un peu trompeuse pour la puissance de sortie.
Y avait-il autre chose sur ce point, sénateur Sibbeston?
Le sénateur Sibbeston : Je voulais simplement savoir dans quelle mesure cette technologie est facile d'accès. À vous entendre, on croirait pouvoir en faire l'acquisition quelque part l'an prochain, mais je ne crois pas que ce soit conforme à la réalité.
M. Lang : Il est peu probable que le réacteur soit construit avant qu'on ait trouvé un client. J'ai demandé aux concepteurs et aux fabricants combien de temps il faudrait pour obtenir ce réacteur si je leur arrivais demain avec un client prêt à financer l'intégralité du projet. Ils m'ont répondu qu'il faudrait cinq ans.
Dans le monde du nucléaire, je dois vous dire que c'est aussi vite que l'éclair. Cinq ans qu'ils ont dit. Il faut aussi compter au moins cinq ans pour obtenir un permis. C'est en partie ce qui fait qu'il est difficile d'aborder cette question dans le Nord, ou n'importe où en fait, car on a tendance à réagir aux circonstances. Si le prix du baril de pétrole grimpe à 140 $, comme en 2007 ou 2008, on voudra une solution de rechange immédiate. Désolé, les gars, mais il faut au moins cinq ans.
C'est pour de la technologie des réacteurs que l'on comprend bien. Étant donné que l'organisme de réglementation n'a jamais délivré de permis pour les nombreux autres designs de pointe et très prometteurs, on sait qu'il va prendre son temps. Comme il connaît mal ce domaine technologique, il devra consulter des experts de l'extérieur. Le processus de délivrance de permis sera donc bien plus long qu'il le serait normalement. C'est en partie la raison pour laquelle nous avons opté pour un type d'architecture de réacteur éprouvée.
Cependant, une fois que le premier a été construit, on les produit en série, encore une fois comme des aéronefs commerciaux. Au départ, on consacre tout son financement aux questions de génie et, ensuite, on produit rapidement de multiples unités identiques à coût réduit et à grande échelle. Il n'est pas nécessaire d'obtenir à chaque fois un permis pour le design de la machine — seulement un permis d'exploitation et un permis pour le site.
Le sénateur Wallace : Monsieur Lang, je veux juste être certain de bien comprendre. Pendant votre présentation, vous avez fait allusion à l'énergie nucléaire que l'on utilise sans problème à Bilibino, en Russie, depuis 40 ans. Je présume cependant que la technologie que l'on utilise là-bas, l'unité en tant que telle et la technologie avec laquelle elle fonctionne, n'est pas la même que la technologie SMART, c'est-à-dire celle des petits réacteurs modulaires adaptables qui, selon vous, pourrait être utilisée dans le Grand Nord. C'est bien cela?
M. Lang : C'est cela, oui.
Le sénateur Wallace : Il n'y a donc pas d'antécédents ailleurs dans le monde, y compris en Russie, auquel nous, ou un client potentiel, pourrions nous référer pour cette unité en particulier?
M. Lang : C'est exact. Il existe un certain nombre de réacteurs très semblables, mais pas ce design en particulier, non.
Le sénateur Wallace : Y a-t-il d'autres sociétés spécialisées dans le nucléaire, d'autres entreprises de technologie ailleurs dans le monde, qui mettraient aussi en marché des unités, des unités nucléaires, des micro-unités semblables à celle-là, que l'on pourrait utiliser dans un climat nordique? Dans les pays scandinaves, peut-être?
M. Lang : Oui, tout à fait. La plupart des designs proviennent des États-Unis. Ils n'en ont pas eux-mêmes besoin, mais ils l'envisagent d'un point de vue purement commercial. Comme je viens de le mentionner, la plupart de ces réacteurs ont des designs très avancés — des réacteurs refroidis au métal liquide, des réacteurs à spectre rapide. Je ne fais pas exprès de vous parler en jargon, mais il s'agit de designs très avancés qui n'ont jamais été construits et utilisés à des fins commerciales. Il y a environ 450 réacteurs en fonctionnement dans le monde. Deux d'entre eux sont refroidis au métal et tous les autres le sont à l'eau. Malgré cela, nombre de ces designs sont refroidis au métal.
Le sénateur Wallace : J'accepte ce que vous dites. Il y a beaucoup de réacteurs nucléaires dans le monde, mais nous parlons de micro-unités susceptibles d'être utiles aux petites collectivités. Peut-on trouver de ces micro-unités quelque part et y a-t-il d'autres fournisseurs que cette entreprise russe?
M. Lang : Elles n'existent nulle part ailleurs. D'autres entreprises offrent des produits semblables, mais avec d'autres technologies, bien qu'il s'agisse toujours de technologies des réacteurs nucléaires.
Le sénateur Wallace : Lorsque vous dites que l'on travaille toujours au design du réacteur, je suppose que c'est pareil dans le monde entier. On innove.
M. Lang : C'est exact.
Le sénateur Wallace : Vous dites que cette technologie pourrait offrir de très bonnes possibilités ici.
Comme vous l'avez dit, un acheteur a deux options : soit il achète l'unité directement, soit il le fait par le truchement d'un permis et c'est votre société qui paierait pour la lui fournir.
Si l'on optait pour l'unité russe, est-ce qu'il faudrait continuer de faire affaire avec la société russe une fois que le réacteur aurait enfin été conçu et construit? À titre d'exemple, fournirait-elle des pièces de rechange au besoin? En assurerait-elle l'entretien? Ou n'aurions-nous aucun contact direct ou indirect avec elle parce que vous serviriez d'intermédiaire vu que vous êtes une entreprise autorisée au Canada?
M. Lang : Une grande partie des points que vous venez de soulever sont encore à discuter avec les Russes. Ils vendent des réacteurs dans le monde entier et ils prennent divers arrangements commerciaux avec leurs clients. Certains pays n'ont simplement pas les compétences techniques nécessaires pour gérer un réacteur.
Ce n'est manifestement pas le cas du Canada. Nous sommes un chef de file mondial dans le domaine de la technologie des réacteurs. J'insisterais pour un transfert graduel de la technologie et de la responsabilité d'entretenir le réacteur après coup, comme nous avons des compensations industrielles pour toute technologie complexe ou à grande échelle. Le Canada cherche constamment à élargir sa base technologique, et je pense que nous serions en bonne posture. Le Canada possède un vaste marché potentiel pour cette technologie, en particulier si les sables bitumineux entrent en ligne de compte. Je pense que nous serions très bien placés pour obtenir le transfert de la technologie et être plus qu'un simple détenteur de permis, en fait.
Je crois fermement que nous avons aussi beaucoup à offrir en retour à la Russie. Ils ne savent pas tout. Nous aussi nous sommes assez ferrés dans le domaine.
Le sénateur Wallace : Je pense que tout pays, pas seulement le Canada, qui doit dépendre d'un autre pour son approvisionnement en énergie, quelle qu'elle soit, veut comprendre la relation présente et future.
J'essayais simplement de comprendre si avec votre proposition, il y aurait un besoin d'entretenir une relation permanente avec le fournisseur russe ou si vous vous en chargeriez à titre de détenteur de permis. Encore une fois, cela dépend du fournisseur. Il reste toujours la question de la fiabilité du fournisseur aujourd'hui et plus tard. Je pense que certains y songeraient. J'essaie de comprendre s'il serait nécessaire d'entretenir ce type de relation durable.
M. Lang : C'est un très bon point. Je suppose qu'on dépendrait d'eux au départ pour nous fournir des pièces et de l'équipement et que ce lien de dépendance disparaîtrait graduellement au fil du temps. Comme je l'ai mentionné, la Russie est un important exportateur nucléaire dans le monde, et personne ne veut compromettre leur réputation comme constructeur de grands réacteurs en faisant un gâchis avec les petits.
Le président : Dois-je comprendre que si le Canada disait : « Nous allons étudier cette option par votre intermédiaire », il vous faudrait cinq ans pour avoir une unité de démonstration et encore cinq autres au moins pour obtenir un permis? On parle de 10 ans. Puis-je vous demander quel montant le promoteur aurait à débourser pour enclencher ce processus?
M. Lang : J'aimerais simplement clarifier une chose : la délivrance du permis et la construction de l'unité de démonstration peuvent se faire simultanément. Elles peuvent se chevaucher sur une période de cinq à sept ans.
Le président : Comment pouvez-vous obtenir un permis si vous en êtes simplement au stade de la construction?
M. Lang : La plupart des réacteurs sont dûment autorisés avant que l'on construise les premières pièces. Tout est une question de design et de mise à l'essai.
Le président : Est-ce que sept ans, c'est court?
M. Lang : Pour un réacteur de capacité industrielle, il faut prévoir 12 ans. J'ai eu de nombreuses réunions avec les représentants de l'organe de réglementation à ce sujet et ils entrevoient la possibilité. En fait, le Conseil national de recherches du Canada a accordé une petite subvention à Dunedin Energy pour étudier le processus de délivrance des permis pour ces petits réacteurs afin de l'accélérer. L'organisme de délivrance des permis du Canada connaît les risques, et un réacteur de petite taille est beaucoup moins risqué qu'un réacteur de capacité industrielle. C'est un facteur qui entrerait en ligne de compte pour déterminer le temps qu'il faudrait pour délivrer un permis. On pourrait construire l'unité de démonstration parallèlement.
Pour ce qui est de l'unité de démonstration, un autre de nos grands avantages est que nous avons déjà de multiples sites nucléaires autorisés, comme celui de Chalk River, alors il est aussi possible d'accélérer l'étape de la construction.
Comme je l'ai dit, si un gros paquet d'argent nous tombait du ciel ce soir, nous pourrions parcourir ou exploiter pareille installation dans cinq ou six ans.
Le président : Donnez-moi le montant du gros paquet d'argent qui devrait vous tomber du ciel, ou est-ce que Dunedin Energy est prêt à tout prendre si le gouvernement lui dit simplement : « Nous allons en prendre un dans sept ans; vous pouvez nous le produire et accepter d'assumer tous les coûts »?
M. Lang : Avec une commande ferme, nous pourrions facilement trouver des investisseurs, c'est clair. Comme je l'ai mentionné, une usine à deux unités — même si je crois que pour la démonstration, on opterait plutôt pour une usine à une seule unité — construite à un endroit comme Chalk River, coûterait environ 150 millions de dollars américains.
Est-ce que cela répond à votre question, sénateur Neufeld?
Le président : Je pense bien.
Le sénateur Massicotte : Après cela, combien de temps et d'argent faudrait-il pour construire un réacteur dans le Grand Nord?
M. Lang : Cela dépend vraiment du site.
Le sénateur Massicotte : Disons dans la capitale des Territoires du Nord-Ouest.
M. Lang : Yellowknife est strictement accessible par la route, et le pont est maintenant opérationnel. Je dirais 20 p. 100 de plus. C'est une supposition.
Le sénateur Massicotte : Et il faudrait une autre année et demie ou deux ans?
M. Lang : Je ne sais pas s'il faudrait plus de temps. Je songe aux efforts qu'il faudrait déployer au plan logistique pour le monter là-haut.
Le sénateur Massicotte : Alors on passe de 150 à 200 millions de dollars, c'est bien cela?
M. Lang : Je sais que le secteur nucléaire est connu pour dépasser les coûts, alors j'hésite à vous donner des chiffres concrets à ce stade, car ce ne sont que des estimations. Comme je n'ai pas d'ingénieur à mes côtés pour me dire : « ma société a construit des projets là-bas et il est facile de dépasser les coûts de 30 p. 100 », je n'ai pas l'expertise nécessaire pour répondre à cette question en ce moment. Je peux me renseigner et vous revenir là-dessus.
Le président : Oui, s'il vous plaît.
Le sénateur Patterson : Vous avez vu les options hydroùlectriques que l'on envisage au Nunavut. Dans un cas, il était question d'une centrale de 12 mégawatts. Pourriez-vous nous donner une idée de ce que cela coûterait et du temps qu'il faudrait pour qu'un permis soit délivré?
M. Lang : Je ne sais pas si vous savez tous à quelle centrale le sénateur Patterson fait allusion. Il s'agit de la centrale hydroùlectrique de Jaynes Inlet. Son coût a fait l'objet de discussions. J'ai vu un montant aussi élevé que 450 millions de dollars. Il s'agit d'un projet qui se ferait par étape et qui commencerait par, je crois, 8 mégawatts pour finir à 15 mégawatts.
Ce qui me préoccupe le plus au sujet de ce projet, sénateur Patterson, c'est que l'on compte transmettre l'électricité sur 90 km par l'intermédiaire d'une ligne de transport fixée à des poteaux de bois et ce, sans avoir accès à une route. L'entretien se ferait par hélicoptère. Vous vous souviendrez des vents de 130 à 140 kilomètres à l'heure qu'on a eus à Iqaluit l'hiver dernier. J'ignore comment cette ligne de transport de l'électricité y résisterait, et il est clair qu'aucun pilote d'hélicoptère n'irait la réparer dans ces conditions. Il est question d'une seule source pour toute l'électricité d'Iqaluit, et je sais que les génératrices au diesel seraient toujours là, mais cette ligne de transport d'électricité serait très vulnérable.
L'énergie hydroùlectrique est très semblable à l'énergie nucléaire. Les dépenses initiales en capital sont très élevées, mais les coûts de production sont faibles par la suite. Elles sont très similaires sur ce plan.
Le projet de centrale hydroùlectrique est une possibilité pour Iqaluit, c'est clair. Je m'inquiète de la distance à laquelle elle se trouverait, compte tenu du terrain et du climat là-bas pour entretenir la ligne de transport hydroùlectrique.
Le sénateur Massicotte : Cela pourrait être très important. Nous l'ignorons. Vous en savez plus que nous. Cela pourrait être très important pour le Canada et le Grand Nord canadien. Cela dit, si je dois être bien franc avec vous, la crédibilité du nucléaire est remise en question de même que celle des technologies qui n'ont pas encore été mises au point.
Je vous recommanderais fortement de vous associer avec une société comme SNC-Lavalin, une grande entreprise qui a de l'argent, énormément de crédibilité et qui pourrait construire quelque chose de très bien. Je crois qu'il vous sera très difficile de faire cavalier seul. Vous ne voulez peut-être pas partager la cagnotte, mais je vous recommande fortement de vous associer avec des gens très crédibles.
M. Lang : Merci pour votre conseil, sénateur Massicotte. J'ai bien l'intention de le faire.
Le président : Merci beaucoup. Nous vous savons gré de votre présentation, de vos commentaires et de vos réponses à nos questions.
(La séance est levée.)