Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles
Fascicule 18 - Témoignages du 6 novembre 2014
OTTAWA, le jeudi 6 novembre 2014
Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd'hui, à 8 h 2, pour examiner la teneur des éléments des sections 3, 28 et 29 de la partie 4 du projet de loi C-43, Loi no 2 portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 11 février 2014 et mettant en œuvre d'autres mesures.
Le sénateur Richard Neufeld (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Je vous souhaite la bienvenue à la réunion du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles. Je m'appelle Richard Neufeld. Je représente la Colombie-Britannique au Sénat et je suis le président du comité.
J'aimerais souhaiter la bienvenue à mes collègues sénateurs, ainsi qu'à tous les gens du public qui sont présents dans la salle ou qui nous regardent à la télévision. Je rappelle à tous que les réunions du comité sont ouvertes au public en plus d'être accessibles en webdiffusion sur le site sen.parl.gc.ca. Vous trouverez également plus de détails sur la liste de nos témoins sur le site web « Comités du Sénat ». Je vais demander aux sénateurs de se présenter.
Le sénateur Patterson : Dennis Patterson, du Nunavut.
Le sénateur Mitchell : Grant Mitchell, de l'Alberta.
Le sénateur Wallace : John Wallace, du Nouveau-Brunswick.
Le sénateur Black : Douglas Black, de l'Alberta.
La sénatrice Seidman : Judith Seidman, du Québec.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Pierre-Hugues Boisvenu, de La Salle, Québec.
[Traduction]
Le président : Je vous présente maintenant notre personnel en commençant par notre greffière, Lynn Gordon, et nos deux analystes de la Bibliothèque du Parlement, Sam Banks et Marc LeBlanc.
Nous en sommes à notre deuxième réunion sur le projet de loi C-43, Loi no 2 d'exécution du budget, qui a été déposé à la Chambre des communes le 23 octobre 2014.
Comme vous le savez sans doute, nous sommes l'un des cinq comités du Sénat, en plus du Comité sénatorial des finances, qui, le 30 octobre, ont été individuellement autorisés à examiner la teneur de divers éléments du projet de loi C-43. Nous devons soumettre notre rapport au Sénat au plus tard le 27 novembre 2014. Les éléments que nous devons examiner sont les sections 3, 28 et 29 de la partie 4 du projet de loi.
Pendant la première partie de notre réunion, nous accueillons des témoins pour discuter de la section 3 du projet de loi, qui porte sur la loi sur la station de recherche du Canada dans l'Extrême-Arctique. J'aimerais donc souhaiter la bienvenue à M. David J. Scott, directeur exécutif, qui comparaît par vidéoconférence depuis Yellowknife, et M. David Hik, membre du conseil, qui comparaît également par vidéoconférence depuis Edmonton, tous deux de la Commission canadienne des affaires polaires. Messieurs, je tiens à vous remercier d'être avec nous par vidéoconférence depuis vos villes respectives. Je crois savoir que vous ferez un exposé conjoint. J'aimerais préciser que vous étiez dans la salle de vidéoconférence à 5 h 45 ce matin. Ceux qui trouvent que nous nous sommes levés tôt ici à Ottawa, pensez à l'heure à laquelle ces messieurs ont dû se lever pour être avec nous. Messieurs, je vous cède la parole. Allez-y.
David J. Scott, directeur exécutif, Commission canadienne des affaires polaires : Merci beaucoup, mesdames et messieurs les sénateurs. C'est un honneur et un plaisir d'être avec vous ce matin, même à distance. Grâce au miracle de la technologie, nous pouvons être à deux endroits en même temps.
M. Hik et moi ferons un exposé relativement bref pour vous donner suffisamment de temps pour nous poser des questions. Nous avons deux objectifs ce matin. Premièrement, nous voulons vous donner un aperçu de la Commission canadienne des affaires polaires, ainsi que de nos rôles. Cela deviendra avec le temps un élément de base de la nouvelle organisation. Deuxièmement, nous voulons souligner que ce projet de loi et la nouvelle organisation à laquelle il donnera naissance sont pour nous une occasion en or de créer une organisation du savoir qui sera plus grande que la somme de ses parties.
Nous tentons d'optimiser tout ce que nous faisons afin d'incarner peu à peu l'objectif et l'esprit du projet de loi. Nous voulons servir les habitants du Nord, les Canadiens et la planète entière en créant les connaissances nécessaires sur les régions polaires.
Allons à la diapositive 2. Je veux d'abord mentionner que la commission est l'organisation nationale dont s'est doté le Canada pour accroître les connaissances et la sensibilisation à l'égard des régions polaires. La commission a été créée en 1991 par une loi du Parlement. Notre objectif stratégique au quotidien est de voir les nouvelles connaissances, tant scientifiques que traditionnelles, se transformer en mesures concrètes. Il faut donc que les connaissances aient un but pratique et servent les intérêts d'abord des habitants du Nord, puis de tous les Canadiens.
Je veux aussi souligner que la fusion de la commission avec le programme de recherche dans l'Extrême-Arctique et la station dont la construction bat son plein à Cambridge Bay constitue une belle occasion pour le Canada de renforcer sa position de chef de file et de stimuler le développement des connaissances dans le Nord.
Passons maintenant à la diapositive 3. La commission joue un rôle de transmission du savoir. Nous faisons le lien entre les producteurs de savoir et les consommateurs de ce savoir. Nous travaillons dans les deux régions polaires, celles du Nord et du Sud. Aujourd'hui, nous nous concentrerons sur l'écosystème de création du savoir dans la région du Nord. Nous avons là un réseau de gens aux niveaux local, national et international qui créent du savoir sur la région pour le mettre à la disposition des décideurs.
J'aimerais soulever quatre points au sujet de notre rôle dans la transmission du savoir. Nous nous acquittons de ce rôle en servant d'agent de liaison entre les créateurs de savoir et les utilisateurs. Les créateurs peuvent être des ministères fédéraux qui gèrent divers programmes scientifiques, des gouvernements territoriaux, qui jouent de plus en plus un rôle actif dans la création de savoir, des peuples ou des organisations autochtones qui se trouvent dans le Nord et qui possèdent et créent du savoir, ou encore des chercheurs venant du Canada ou de partout dans le monde. Ce sont tous des créateurs de savoir.
Notre rôle consiste donc à créer des partenariats solides entre eux et à miser sur les réseaux et l'infrastructure en place pour en accroître l'efficacité. Toutes ces organisations sont financées de façon indépendante. Nous nous employons à les réunir. Nous voulons accroître le rayonnement du Canada en tant que nation circumpolaire et confirmer son rôle de chef de file sur la scène internationale. Le Canada recueille des connaissances sur les régions nordiques dont le reste de la planète a besoin.
Nous diffusions l'information que nous avons sur les régions polaires aux Canadiens de différentes façons, notamment sur les réseaux sociaux Facebook et Twitter. Nous tenons un blogue avec la revue Canadian Geographic. Toutes les deux semaines, nous publions un article d'intérêt important sur leur site web et dans ce magazine qui est lu par 3,5 millions de Canadiens. Nous avons aussi l'application Savoir polaire qui contient des répertoires et sert de premier point de contact pour repérer des experts, des projets ou des programmes dans le milieu circumpolaire. Nous tenons beaucoup à ce que le savoir soit diffusé aux Canadiens.
Finalement, nous effectuons des analyses et nous prônons la prise en compte du point de vue des habitants du Nord dans les nouveaux investissements, comme la SCREA, et la création d'un savoir axé sur les grandes priorités des habitants du Nord.
Au Canada, l'écosystème de création du savoir sur les régions polaires est en pleine effervescence. Il y a beaucoup d'activités, mais il n'y a pas de coordination ni d'optimisation des ressources. On peut créer d'autres partenariats, et il faut accroître la capacité de recherche aux échelons local, national et international.
Il y a beaucoup d'activités, mais nous pouvons faire beaucoup plus, et c'est là où réside l'importance pour nous de créer cette nouvelle organisation.
Allons maintenant à la diapositive 4. M. Raillard vous a parlé de la création du nouveau programme de sciences et technologie et vous avez vu des images de la station qui est en cours de construction à Cambridge Bay. Il faut donc que les investissements dans ce programme profitent à l'écosystème de création du savoir existant. Il s'agit d'un très gros investissement qui donnera un solide coup de pouce à la création de savoir, mais il faut qu'il trouve sa place au sein de l'écosystème existant et serve à créer ce tout qui sera plus grand que la somme de ses parties. La nouvelle organisation qui naîtra de la fusion avec la commission doit favoriser la création de savoir en misant sur les initiatives à succès comme l'Évaluation environnementale régionale de Beaufort, un exercice de création de savoir multiniveau et multipartite dans la mer et le delta de Beaufort; ArcticNet, un réseau de chercheurs de classe mondiale financé par le programme national de réseaux de centres d'excellence; le programme de géocartographie de l'énergie et des minéraux de Ressources naturelles Canada; et les ressources locales, comme le Cold Climate Innovation Centre au Collège du Yukon. Toutes ces pièces du casse-tête font partie de la solution.
Un autre de nos grands rôles consiste à mieux faire connaître les grandes lacunes dans le savoir existant, à les repérer, afin que nous puissions nous concentrer sur les plus importantes, en trouvant des solutions ensemble et en établissant des partenariats entre les divers acteurs au Canada et à l'étranger, entre nos organisations nationales qui se penchent déjà sur ce savoir et entre les Canadiens et les acteurs internationaux. Les chercheurs étrangers sont très enthousiastes à l'idée de venir travailler au Canada pour trouver des solutions aux grands problèmes mondiaux et collaborer avec les chercheurs canadiens.
Enfin, pour ce qui est de bonifier les investissements, les fonds alloués à la Station de recherche dans l'Extrême- Arctique et à son programme, et ceux alloués à la commission seront regroupés, mais ce n'est qu'un point de départ. Il faut déployer plus d'efforts pour créer de nouveaux partenariats intellectuels qui viennent bien souvent avec du financement. Nous devons collaborer avec les bailleurs de fonds canadiens, la Fondation canadienne de l'innovation, les conseils subventionnaires et le programme Horizon 2020 de la Commission européenne, qui favorisera une grande participation internationale au Canada.
Passons à la diapositive 5, et je vais céder la parole à notre membre du conseil, David Hik, qui ajoutera quelques idées, puis nous pourrons répondre à vos questions.
David Hik, membre du conseil, Commission canadienne des affaires polaires : Merci beaucoup, et bonjour. Je suis très heureux d'être ici ce matin pour discuter avec vous du fruit de nos conversations au cours des dernières semaines.
Comme vous le savez, le conseil a travaillé d'arrache-pied au cours des quatre dernières années pour mettre en place tout ce dont vient de vous parler M. Scott, et nous sommes très heureux du nouveau projet de loi et à l'idée de jouer un rôle dans les prochaines étapes de la création de la Station canadienne de recherche dans l'Extrême-Arctique.
J'aimerais vous parler de trois points qui ont été soulevés dans nos discussions au cours des trois dernières semaines et qui pourraient intéresser le comité et pourraient assurément servir à renforcer le projet de loi.
Le premier point est que nous savons qu'il existe bien des façons de faire rapport au Parlement, différentes de celle prévue dans la Loi sur la Commission canadienne des affaires polaires, et nous pensons que la SCREA pourrait jouer un rôle actif pour simplifier la production de rapports interministériels sur les activités qui se déroulent dans l'Arctique, notamment sur l'allocation des fonds. Le but ici est d'optimiser l'utilisation des ressources en place, et pas seulement de voir les besoins en nouvelles ressources.
Nous avons déjà eu par le passé, certaines années, un rapport qui dressait la liste de tous les investissements dans les activités de recherche sur l'Arctique qui étaient menées à l'échelle pangouvernementale, et des retombées de ces investissements.
Au cours des dernières années, nous avons travaillé en étroite collaboration avec nos partenaires au sein de la Commission américaine de recherche sur l'Arctique. Aux États-Unis, une disposition de l'Arctic Research and Policy Act indique clairement qu'un rapport interorganismes doit être présenté une fois par année. Nous avons pu constater, assurément, que c'est une façon très efficace pour les États-Unis de bien coordonner les activités de recherche sur l'Arctique qui sont menées dans l'ensemble du gouvernement.
C'est ce qui m'amène à vous parler de notre deuxième point, soit la possibilité de renforcer le mandat des organisations pour doter le Canada d'une stratégie pangouvernementale intégrée en matière de programmes de sciences et technologie dans l'Arctique.
Il semble que le projet de loi, dans sa forme actuelle, ne permette pas tout à fait d'atteindre cet objectif — une stratégie pangouvernementale —, de reconnaître que de nombreux ministères et organismes jouent un rôle très concret dans une vaste gamme d'activités de sciences et technologie dans l'Arctique, et que nous avons l'occasion à la fois d'intégrer les activités scientifiques dans toutes les disciplines — en particulier les différentes façons de recueillir, de synthétiser et de diffuser le savoir — et au niveau national, en prenant acte que les gouvernements territoriaux, les organisations des Premières Nations et des Inuits, le monde des affaires et, bien sûr, nos partenaires internationaux jouent un rôle très actif dans la collecte de données dans l'Arctique canadien qui sont très utiles à un large éventail d'utilisateurs. Il n'est pas nécessaire de créer une nouvelle organisation pour ce faire, ou de démanteler des organisations existantes, mais simplement de trouver une façon d'établir des liens plus étroits entre toutes les activités.
Comme M. Scott l'a déjà indiqué, le Canada est un chef de file dans ce genre de coordination, grâce à des organisations comme ArcticNet, le Réseau de centres d'excellence du Canada.
Le dernier point que j'aimerais soulever est le suivant. Alors que la loi entre en vigueur, que la nouvelle organisation commence à prendre forme, et qu'on fusionne les rôles de la Station canadienne de recherche dans l'Extrême-Arctique (SCREA) et de la Commission canadienne des affaires polaires, c'est l'occasion de définir très clairement la portée de ces programmes.
Nous aurons la meilleure station de recherche au monde. En fait, nous aurons le meilleur réseau de stations de recherche dans l'Arctique, de tous les pays de l'Arctique. Nous voulons nous assurer d'avoir le meilleur cadre de gouvernance et la meilleure législation qui soient pour guider ces activités au cours des décennies à venir.
Nous nous sommes demandé si la meilleure dénomination pour la nouvelle organisation ne serait pas la SCREA, reconnaissant la vaste portée de son mandat et son rôle dans la recherche sur l'Antarctique. C'est une des questions que nous nous sommes posées. Je ne crois pas qu'il y ait une seule solution, mais nous voulons bien sûr nous assurer que la SCREA aura tous les outils qu'il lui faut à son entrée en vigueur pour réaliser son mandat.
C'est une entreprise très stimulante, et le conseil d'administration a très hâte d'assumer ses nouvelles responsabilités à l'égard de la gouvernance de la SCREA. Les possibilités sont très encourageantes.
Le président : Si vous avez terminé votre exposé, nous allons passer aux questions. Je vais commencer par le sénateur Black.
Le sénateur Black : Bonjour, messieurs. Merci beaucoup pour ce que vous faites tous les deux. Le travail dont vous nous avez parlé est de toute évidence très important pour le Canada.
J'ai deux questions à vous poser. Premièrement, vous pourriez peut-être parler au comité et aux gens qui vont regarder la séance, ou qui la regardent maintenant, de quelques-uns des projets sur lesquels vous travaillez en ce moment. Donnez-nous une idée de ce que vous faites.
M. Scott : Merci beaucoup, sénateur. Je vais commencer par ceci. En complément de son récent rapport intitulé L'état du savoir nordique au Canada, une analyse approfondie des points de vue des gens du Nord à l'égard du progrès du savoir dans la foulée de l'Année polaire internationale, la Commission des affaires polaires met la dernière main à une étude sur l'état de l'infrastructure et des programmes de surveillance dans le Nord. Beaucoup de choses se passent et la plupart sont menées de façon indépendante. Les projets ne sont pas particulièrement bien coordonnés.
Nous achevons un rapport en collaboration avec le programme de science et technologie de la SCREA, afin d'établir les fondements pour les prises de décisions futures. C'est un élément clé.
Nous envisageons également d'organiser une autre rencontre ou une conférence sur les connaissances traditionnelles. À Yellowknife, en septembre, nous avons tenu un atelier sur les connaissances traditionnelles en collaboration avec des organisations des Territoires du Nord-Ouest. Nous espérons pouvoir organiser quelque chose pour l'Inuit Qaujimajatuqangit, ou le savoir traditionnel à Iqaluit, comme moyen pour rapprocher les différents modes de connaissances. Ce sont là deux petits exemples du travail que fait la commission actuellement.
Le sénateur Black : J'ai entendu dire que vous faisiez l'inventaire du savoir et des divers intervenants sur le terrain. Vous menez un sondage à ce sujet en ce moment, n'est-ce pas?
M. Scott : Oui, c'est exact. Nous tâchons de publier les données sous-jacentes de façon à ce que de nouveaux utilisateurs puissent voir où sont menées des activités de surveillance; ils pourraient vouloir accéder à ces données ou établir des partenariats pour recueillir de nouvelles données au même endroit. Nous tentons de favoriser la synergie et d'optimiser le rendement des investissements actuels.
Le sénateur Black : Est-ce que vous allez entreprendre des recherches à un moment donné? Allez-vous élaborer un projet énergétique, par exemple, et décider d'étudier la question à l'aide de vos propres ressources? Est-ce ainsi que vous fonctionnez?
M. Scott : Pour l'instant, nous n'avons pas les ressources voulues pour entreprendre de la recherche fondamentale et créer de nouvelles connaissances, si je puis dire. Nous faisons plutôt de la méta-recherche. Nous analysons les recherches en cours. Nous pouvons cerner les lacunes et formuler des recommandations.
Le sénateur Black : Ma deuxième question porte sur la souveraineté. Pour mettre les choses en contexte, je précise que le Nord est évidemment extrêmement important pour le Canada. Je fais particulièrement référence aux ressources énergétiques potentielles de cette région et au désir tout naturel du Canada de revendiquer ces ressources.
Supposons un moment que je serai un jour juge d'une commission d'arbitrage internationale et que j'aurai à déterminer à qui appartiennent les ressources de l'Extrême-Arctique. Au Canada, à la Russie, au Danemark, au Groenland, à qui? Que pourrait faire votre organisation pour faire pencher la balance en faveur du Canada? Me suis-je exprimé clairement?
M. Scott : Oui, monsieur, tout à fait. On peut aborder la question sous différents angles. Premièrement, il est clair que toutes les activités menées sur le territoire canadien et dans les eaux qui séparent les masses terrestres dans l'Extrême-Arctique doivent se conformer à la réglementation canadienne, qu'on parle des règlements sur l'utilisation des terres, sur l'octroi de permis de recherche, et cetera. Je crois qu'on reconnaît, au pays et à l'échelle internationale, que le Canada ne fait qu'exercer sa souveraineté dans cette partie du monde et que c'est une responsabilité qui lui revient.
En tant que géologue, je peux vous assurer que la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer met de l'avant une approche tout à fait ordonnée et factuelle pour définir la région qui s'étend au-delà de la limite des 200 milles marins, là où le Canada exercera des droits de souveraineté supplémentaires à l'égard des ressources. Il s'agit d'un processus très méthodique. Les règles appliquées renvoient entre autres à la compréhension de la composition géologique de la croûte continentale au-delà de 200 milles marins au large du littoral du continent. Les rudiments de la symétrie nous permettent de comprendre la forme, et il y a des règles bien précises à interpréter pour démontrer que la masse terrestre continentale du Canada a des prolongements naturels qui vont au-delà des 200 milles marins.
Tous les pays du monde, pas seulement ceux de l'Arctique, s'affairent à définir le prolongement de leur masse terrestre continentale, et parce qu'il s'agit d'un processus entièrement fondé sur les faits et les éléments probants, le Canada a multiplié les efforts pour réunir les données requises afin de soumettre ses demandes à la commission.
Nous l'avons fait pour la côte Est et nous avons soumis une demande partielle pour l'Arctique. Je crois que la collecte de données se poursuit. L'interprétation des données suivra, puis un argumentaire factuel sera déposé devant la commission en temps et lieu.
Le sénateur Black : Je pencherais en sa faveur.
M. Hik : J'ajouterais, concernant le rôle de la commission, que nous sommes très proactifs auprès de nos partenaires de recherche internationaux. En informant les chercheurs d'autres pays des activités qui ont cours au Canada pour protéger sa souveraineté dans l'Arctique, les renseignements se rendent des organisations polaires nationales aux gouvernements du pays, et cela permet d'une certaine façon de dissiper tout malentendu potentiel et d'empêcher le dépôt de demandes qui n'ont aucun fondement. La communauté scientifique informe autant les gouvernements que l'industrie des possibilités qui sont offertes.
La sénatrice Seidman : Merci beaucoup, monsieur Scott et monsieur Hik. Vous nous avez tous deux communiqué votre enthousiasme face aux possibilités qu'offre la création de la SCREA. Vous avancez que cette fusion permettra d'accroître la coordination et d'optimiser le rendement, en plus de favoriser les partenariats, une capacité de recherche accrue, et cetera.
En réponse à la question du sénateur Black, vous avez parlé de la méta-recherche que vous allez effectuer, et j'aimerais que vous nous en disiez un peu plus à ce sujet. Suivant cette méta-recherche, qui implique de colliger toutes les études menées, d'analyser les résultats et peut-être de formuler des recommandations, qu'allez-vous faire pour assurer le transfert des connaissances? Est-ce que votre organisation aurait un rôle à jouer dans le transfert des connaissances issues de la méta-recherche que vous allez entreprendre?
M. Scott : Merci de poser la question et de me permettre de vous donner plus de détails. Pour reprendre l'exemple de notre rapport intitulé L'état du savoir nordique au Canada, que nous avons publié en avril de cette année, nous sommes maintenant en phase de sensibilisation, c'est-à-dire qu'au lieu de nous contenter d'afficher le rapport sur notre site web en espérant que les gens vont le trouver, nous multiplions les efforts pour le faire connaître au public. En plus d'être affiché sur notre site web, le rapport est disponible sur notre application Savoir polaire. Nous poussons les choses plus loin et tâchons de créer des occasions pour informer les décideurs. Nous l'avons présenté à quelques comités à Ottawa, à des sous-ministres adjoints fédéraux responsables de questions sur l'Arctique, et au comité stratégique des SMA sur la science et la technologie dans l'Arctique, afin que ces décideurs soient au courant de son existence. Nous tâchons également de leur expliquer le contenu du rapport et de leur faire voir pourquoi il est pertinent pour leurs mandats ministériels respectifs.
Nous faisons la même chose à l'échelle internationale. Différents engagements nous ont permis de remettre ce rapport aux dirigeants d'autres pays de la région polaire qui ont des capacités de recherche dans ce domaine, dans le but de leur expliquer le point de vue du Canada et de la population du Nord du Canada en ce qui concerne les lacunes en matière de connaissances. Bien souvent, ces lacunes existent aussi dans d'autres pays qui pavent la voie au développement des ressources pour en faire profiter la population locale, afin d'assurer la viabilité des collectivités des régions arctiques malgré les changements climatiques. Le monde que nous connaissions a commencé à changer.
Les mêmes difficultés liées au bien-être et à la résilience des collectivités se retrouvent partout dans le Nord du Canada, mais aussi dans d'autres pays nordiques, à quelques différences près. D'autres nations sont toujours prêtes à collaborer pour trouver des solutions à ces problèmes, que nous voyons comme des problèmes canadiens. Nous avons des collègues ailleurs dans le monde qui ont l'expertise voulue. Des solutions voient le jour ailleurs, alors en collaborant avec d'autres chercheurs et en faisant connaître ces méta-analyses, nous sommes en mesure de rallier de nouveaux partenaires. D'autres pays sont maintenant intéressés à venir au Canada pour aider à remédier à ces problèmes et à trouver des solutions applicables à la région polaire.
La sénatrice Seidman : Vous avez fait mention du rapport intitulé L'état du savoir nordique au Canada, qui a été rendu public en mars 2014. À la deuxième page du rapport, on indique que la troisième Conférence internationale sur la planification de la recherche arctique (CIPRA III) offrira une feuille de route pour guider la planification et l'exécution de la recherche arctique pour la prochaine décennie.
Vu les réponses que vous nous avez données et votre explication sur le rôle que vous allez jouer dans le transfert des connaissances, j'aimerais savoir si vous allez prendre part à l'établissement des priorités de recherche en fonction de votre travail et de votre analyse de l'état du savoir dans le Nord.
M. Scott : Je vais renvoyer la question à M. Hik, qui dirige le processus de la CIPRA III au nom de la communauté internationale de la science polaire.
M. Hik : Oui, merci. L'état du savoir nordique au Canada était l'une des toutes premières contributions internationales au processus de la CIPRA. Le rapport a, de bien des manières, capté l'attention d'autres pays, qui ont reconnu les possibilités offertes par cette initiative qui s'échelonne sur une année. Elle permet de cerner le type de difficultés rencontrées, les approches possibles et les solutions à appliquer à l'avenir.
Nous avons pris l'initiative de dresser le programme de la CIPRA. Je pense que bien des difficultés soulevées dans le rapport vont faire surface. Ce ne sera pas une longue liste de 100 points à couvrir. Il devra y avoir un consensus très stratégique au sein de la communauté internationale et des organisations de recherche, y compris les populations du Nord, par l'entremise du Conseil de l'Arctique et d'autres organisations. Nous allons indiquer quels sont les enjeux à aborder le plus rapidement. Je pense qu'une bonne partie de la discussion a déjà été façonnée par la contribution de la commission et le rapport sur l'état du savoir nordique. La conférence de Toyama, au Japon, en avril prochain, sera le point culminant de cette discussion. Les résultats seront intégrés au processus ministériel du Conseil de l'Arctique que le Canada tiendra au même moment.
La sénatrice Seidman : Vous avez mentionné que les habitants du Nord avaient participé et qu'ils participeront à l'élaboration des priorités. Y a-t-il une façon d'intégrer cela au processus? Comment veillez-vous à ce que les habitants du Nord puissent exercer une certaine influence sur les priorités?
M. Hik : C'est une bonne question. C'est toujours un défi. Dans le Nord, la distance, la capacité et tous les autres problèmes urgents nous empêchent parfois de réfléchir aux priorités en matière de recherche ou aux étapes suivantes.
Nous collaborons très étroitement avec les six organismes participants permanents du Conseil de l'Arctique. Trois de ces organismes se trouvent au Canada. Dès le début, ses membres ont participé activement à l'ICARP, c'est-à-dire la Conférence internationale sur la planification de la recherche arctique. Nous travaillons étroitement et directement, au pays, avec les organismes des Premières Nations et les organismes inuits, par l'entremise des membres de leur conseil d'administration, par l'entremise du conseil d'administration et de l'ensemble de la commission, et par l'entremise des collèges et des instituts de recherche dans le Nord. Dans chaque cas, nous avons des mécanismes pour obtenir leur contribution, leur avis et leurs directives sur les défis à venir et sur les priorités qui devraient être fixées en ce qui concerne la recherche.
Une grande partie des efforts d'un grand nombre de membres du conseil d'administration se concentrent sur le renforcement de la capacité dans le Nord par l'entremise d'activités éducatives — que ce soit grâce aux collèges ou à d'autres initiatives axées sur les terres. Nous tenons particulièrement à produire une nouvelle génération de chercheurs composée surtout de résidants du Nord qui contribueront non seulement à l'élaboration de ces priorités, mais qui dirigeront également ces projets.
La sénatrice Seidman : Merci beaucoup.
Le sénateur Mitchell : Merci, messieurs.
Monsieur Scott, vous avez fait valoir, entre autres, que l'organisme cernera des lacunes importantes dans les connaissances. Pourriez-vous nous donner une idée de certaines de ces lacunes?
M. Scott : Merci, sénateur. Oui, je peux vous donner des exemples. L'un des grands défis liés à la région arctique canadienne consiste à savoir comment diminuer les impacts et maximiser les avantages engendrés par les vastes projets d'exploitation des ressources. Il y a des catalyseurs naturels du marché. Des entreprises mènent des activités d'exploration. Nous voulons veiller à ce que les politiques contribuent à minimiser les conséquences négatives de ces activités même si ces dernières créeront manifestement des perturbations dans le paysage. Nous devons également maximiser les avantages. Comment pouvons-nous préparer les habitants du Nord à saisir les occasions offertes par l'arrivée d'une nouvelle mine dans leur région? Comment pouvons-nous aider les gens qui n'ont pas vécu dans une économie fondée sur les salaires à faire la transition vers un emploi qui n'offre pas vraiment un horaire régulier de neuf à cinq, mais une rotation de deux semaines de travail et de deux semaines de congé? C'est un changement majeur. Comment pouvons-nous aider les gens à profiter de ces nouvelles occasions?
Un autre facteur important concerne la façon d'aborder la question générale du bien-être de façon très holistique. Quel rôle les facteurs déjà en place dans les collectivités jouent-ils dans le bien-être mental et les attitudes qui se traduisent parfois par des suicides? Ce sont des problèmes très difficiles et complexes. Nous espérons repérer les problèmes connus, passer à l'étape suivante et nous concentrer sur les domaines où il nous faut de nouvelles connaissances pour mieux comprendre les solutions qui peuvent être imaginées et mises en œuvre afin de profiter directement aux habitants du Nord.
Dans un grand nombre de cas, il nous manque des renseignements ou des connaissances essentiels. Combler ces lacunes contribue à faire progresser les choses et aide les employés du gouvernement fédéral ou des gouvernements territoriaux qui élaborent et mettent en œuvre des programmes et qui souhaitent utiliser une approche fondée sur les données probantes avant de mettre en œuvre une stratégie. En évaluant les éléments existants, en repérant les lacunes et en concertant les efforts pour les combler, on crée de nouvelles connaissances qui peuvent servir de fondement aux politiques qui visent à relever ces défis.
Le sénateur Mitchell : Merci. Plus tôt cette semaine, un témoin a fait allusion à la question suivante dans son témoignage : à votre avis, le changement climatique et l'énergie renouvelable sont-ils des lacunes sur lesquelles se penchera votre organisme?
M. Scott : Brièvement, oui et oui. Il est indéniable que notre climat est en train de changer partout au pays et à l'échelle mondiale. C'est d'ailleurs un gros problème dans le Nord. En effet, la plus grande partie de l'infrastructure bâtie dans le Nord a été construite sur un sol qu'on présumait gelé en permanence. Cette hypothèse est en train de s'effriter dans de nombreux endroits. Toutes sortes de connaissances sont nécessaires pour évaluer quelles parties du paysage sont les plus vulnérables en ce qui concerne l'infrastructure — il peut s'agir des fondations d'un édifice ou de la piste d'atterrissage d'un aéroport qui représente notre seul lien avec le monde extérieur neuf mois par année. Nous devons en savoir plus sur les vulnérabilités. Il faut créer des connaissances qui généreront des solutions innovatrices, abordables et durables.
À mesure que le climat évolue, il faudra gérer de nombreuses répercussions directes.
Le sénateur Mitchell : Merci. Monsieur Hik, dans votre exposé, vous avez mentionné que le projet de loi pourrait exiger que la SRCEA facilite la production de rapports interministériels sur toutes les activités de recherche menées dans l'Arctique. Est-ce que ce « pourrait » signifie « devrait »? Devons-nous modifier le projet de loi pour que ce soit une possibilité? Ou ce « pourrait » signifie-t-il « il le peut et il le fera »?
M. Hik : L'organisme a l'occasion de jouer un tel rôle. Ce sujet m'intéresse depuis quelque temps. Nous avons été forcés de mieux suivre et de mieux comprendre les types d'investissements effectués. Étant donné qu'elles sont éparpillées entre de nombreux organismes, ces données sont parfois difficiles à trouver, mais elles sont importantes dans un contexte opérationnel dans lequel nous devons envoyer des gens sur le terrain — loin des grands centres — et organiser la logistique, les déplacements et l'infrastructure pour appuyer ces activités.
J'aimerais simplement souligner que dans les pays où ce type de coordination entre les organismes est obligatoire, la cueillette de ces données semble être plus efficace. Si on imposait la même exigence, cela pourrait donner un peu plus de poids à une approche pangouvernementale, sans vraiment rien changer, mais en facilitant la diffusion de ces données à grande échelle et en permettant aux organismes qui participent activement à un large éventail d'activités de sciences et technologie dans l'Arctique de mieux coopérer, de mieux coordonner leurs activités et de rendre leurs investissements plus efficaces.
Ce n'est pas un gros changement, mais comme vous pouvez le comprendre, il peut être avantageux d'en faire une exigence au lieu d'une simple décision administrative. Une telle exigence est un peu plus convaincante, et c'est ce que nous aimerions faire valoir après avoir étudié la façon de procéder d'autres pays, par exemple les États-Unis, cet égard.
Le sénateur Patterson : Bonjour, messieurs. Il s'agit vraiment d'une fusion entre la Commission canadienne des affaires polaires et cette nouvelle créature, la SRCEA, et j'aimerais que vous nous parliez des changements opérationnels auxquels pourrait faire face le nouvel organisme fusionné.
Plus particulièrement, aurez-vous des besoins en ressources humaines et des problèmes de capacité si le président et les employés du nouvel organisme fusionné sont situés à Cambridge Bay, ou devrait-on maintenir une présence à Ottawa?
Je vais m'arrêter ici. M. Scott pourrait peut-être répondre à ces questions.
M. Scott : Merci beaucoup, sénateur Patterson. Oui, je vais tenter de répondre. En ce qui concerne la première question, la Commission canadienne des affaires polaires, avec ses ressources, délaisse de plus en plus la prise de décisions, afin de rendre les choses plus pratiques en fonction de sa capacité. Nous avons retiré la priorité à quelques éléments pour libérer des employés, afin qu'ils puissent se concentrer sur la transition. À partir du 1er avril, je crois que nous disposerons de la plus grande partie de la capacité dont nous avons besoin, mais nous n'aurons pas nécessairement tous les employés qu'il nous faut.
À court terme, nous pourrions devoir embaucher des employés supplémentaires pour nous aider à mener certaines des analyses exigées, tout en tenant compte de la création de connaissances et de notre méta-analyse. Nous avons les compétences nécessaires, mais nous devrons embaucher d'autres employés pour y arriver.
Nous avons ce qu'il faut pour commencer, et l'équipe de sciences et technologie dirigée par M. Raillard commence à s'agrandir; il y aura donc une progression graduelle, mais il sera un peu difficile d'être prêts pour le 1er avril. Je crois que nous pouvons y arriver, mais au prix d'efforts supplémentaires.
Le projet de loi énonce clairement que le siège social sera à Cambridge Bay, et je crois que c'est fantastique. Lorsque nous embaucherons de nouveaux employés, nous devrons veiller à ce que Cambridge Bay soit le siège social de cet organisme. Une fois que la station de recherche sera en activité, et lorsque les logements seront prêts à accueillir les nouveaux employés — le marché immobilier est toujours restreint dans les collectivités du Nord — et que des espaces à bureaux seront créés dans la station, nous commencerons certainement à remplir des postes à Cambridge Bay. Cela nous permet de rester en contact avec nos électeurs du Nord et de créer toutes les occasions dont vous avez abondamment entendu parler, c'est-à-dire la station et les avantages qu'elle procurera aux membres de la collectivité.
Le président ou la présidente de l'organisme devra être à plusieurs endroits à la fois pour diriger les membres de l'organisme, et la plupart d'entre eux seront à Cambridge Bay. Cette personne devra passer du temps là-bas pour agir à titre de dirigeante et de figure génératrice d'énergie pour faire progresser l'organisme. Toutefois, en tant qu'administratrice générale d'un organisme fédéral, cette personne devra maintenir une présence à Ottawa, parfois par vidéoconférence, parfois en personne. Et pour protéger le statut du Canada à titre de chef de file dans le domaine polaire, elle devra également maintenir une présence internationale en assistant assez souvent à des réunions et à des rassemblements importants, par exemple aux réunions du Comité international des sciences arctiques et à celles de son organisme correspondant pour l'Antarctique, un groupe appelé le Comité scientifique pour les recherches antarctiques, pour veiller à ce que les besoins, les idées et les compétences du Canada soient représentés à l'échelle internationale et que le Canada puisse profiter des capacités générées à l'échelle internationale.
Cette personne sera très occupée et la plupart du temps, elle devra être à plusieurs endroits à la fois, mais je crois que le projet de loi énonce très clairement que le siège social sera situé à Cambridge Bay. C'est une décision raisonnable, et avec le temps et à mesure que la capacité nécessaire sera bâtie à l'échelle locale, de plus en plus de postes seront occupés à Cambridge Bay et ils deviendront moins nécessaires ailleurs.
La commission a présentement un bureau dans le Nord, ici à Yellowknife, dans l'édifice Greenstone, et David Miller y occupe le poste de coordinateur du Nord. Il est très possible qu'entre-temps, on utilise le bureau de Yellowknife pour renforcer la capacité dans le Nord avant que l'infrastructure de Cambridge Bay soit prête à accueillir les employés de la SRCEA dans la collectivité. Au moins, là-bas, on est plus près des électeurs du Nord.
Le sénateur Patterson : Merci, monsieur Scott. Vous avez mentionné le Comité scientifique international de l'Arctique. Je présume que la Commission canadienne des affaires polaires continuera d'assumer son rôle actuel qui consiste à représenter le Canada auprès de ce comité. Vous avez mentionné l'Antarctique, et votre mandat vise également cette région. Manifestement, la SRCEA se concentre sur l'Arctique, et à votre avis, le nouvel organisme poursuivra-t-il votre mandat dans l'Antarctique? J'aimerais également savoir si le nouvel organisme continuera d'exécuter le Programme de formation scientifique dans le Nord, comme le fait présentement la Commission canadienne des affaires polaires.
M. Scott : Merci, sénateur Patterson. Je vais d'abord répondre très brièvement à la deuxième question. Oui, la commission continuera d'exécuter le Programme de formation scientifique dans le Nord qui fournit, chaque année, du financement aux étudiants qui mènent des recherches dans le Nord, et nous versons plus d'un million de dollars à quelque 400 étudiants chaque année pour les aider à mener leurs recherches dans le Nord.
En réponse à la première partie de votre question, oui, le nouvel organisme continuera de représenter le Canada auprès des deux organismes polaires. En ce qui concerne l'Antarctique, il est important de garder à l'esprit les questions d'ordre planétaire sur lesquelles se penche la communauté scientifique au nom de la population mondiale et en particulier des habitants du Nord.
En ce qui concerne les changements climatiques qui se produisent à l'échelle mondiale et qui sont attribuables aux changements observés dans les courants océaniques, les bilans thermiques fluctuent. Il faut donc coordonner toutes ces recherches scientifiques menées à l'échelle mondiale. Le Canada joue un rôle important à cet égard. C'est par l'entremise de ces deux organismes de coordination des recherches scientifiques qu'on regroupe les travaux pour en faire une synthèse. Cela nous permet d'importer une expertise supplémentaire dans le nouvel organisme en demeurant en communication avec les dirigeants d'autres organismes qui accumulent des connaissances sur les milieux polaires.
En fait, pour assurer la réussite de la SRCEA, nous envisageons d'optimiser le recours aux experts polaires internationaux et à leurs ressources. Un grand nombre de ces chercheurs sont des experts sur l'Antarctique qui cherchent à étudier l'autre variable de l'équation, c'est-à-dire le Nord. Nous croyons que cela permettra aux chercheurs canadiens de poursuivre leurs travaux en collaboration avec ces partenaires de l'hémisphère Sud de la planète et de transformer les capacités canadiennes en un programme de recherche sur l'Antarctique officiel, afin de répondre à l'une des exigences du traité de l'Antarctique dont le Canada est signataire, même si nous n'avons toujours pas de programme de recherche sur l'Antarctique.
Nous croyons fermement que la mise en valeur de la Station de recherche canadienne de l'Extrême-Arctique et de son programme attirera des experts polaires internationaux, et que cela permettra aux Canadiens d'enfin créer un programme sur l'Antarctique en partenariat avec les chercheurs qui viendraient à la SRCEA. Nous pensons que sans nouveaux investissements dans un programme sur l'Antarctique, nous pouvons profiter des programmes d'autres pays là-bas pendant que nous les faisons profiter de notre programme dans le Nord.
Le sénateur Patterson : Je crois que le mandat de six membres du conseil d'administration de la Commission canadienne des affaires polaires expirera l'an prochain. Étant donné la fusion des organismes, recherchez-vous des qualifications particulières chez les nouveaux membres qui devront être nommés?
M. Scott : Oui, le 1er avril, six membres du conseil d'administration de la CCAP seront toujours en règle, mais le mandat de trois de ces personnes expirera, tel que prévu, au cours du prochain exercice financier. Il y aura donc certainement plusieurs nouvelles nominations au conseil.
Tout d'abord, les membres du conseil — et le projet de loi est très clair à cet égard — devront posséder des connaissances sur le Nord et sur les problèmes liés à l'approfondissement des connaissances sur ce milieu. Ces membres devront toujours représenter divers groupes — par exemple les habitants du Nord, évidemment, les gens d'origine autochtone, c'est-à-dire les Premières Nations ou les Inuits, les chercheurs possédant une expertise ou les dirigeants d'industries présentes dans le Nord. Nous recherchons donc plusieurs qualifications qui sont clairement énoncées dans le projet de loi. Je crois qu'un grand bassin de personnes répond à ces critères, et nous ne devrions donc avoir aucune difficulté à trouver des personnes accomplies qui possèdent ces différentes caractéristiques — et souvent, une seule personne présente plusieurs d'entre elles — pour former un solide conseil de gouvernance. Au cours de mes deux années et demie avec la Commission canadienne des affaires polaires, c'est ce qui a représenté le facteur déterminant pour le renforcement de ses capacités. La direction et la capacité décisionnelle exercées par le conseil d'administration ont été essentielles, et j'ai bon espoir que le nouvel organisme procédera de la même façon. Je vais laisser la parole à mon collègue, David Hik, membre du conseil d'administration.
M. Hik : Je crois que l'avènement de nouveaux membres représente réellement une bonne occasion pour le nouveau conseil d'administration. Les membres actuels du conseil travaillent très bien ensemble, et le fait que nous ayons nos propres réseaux et que nous sommes en mesure de les mettre à profit et de trouver des synergies pour produire différents niveaux de coopération nous a beaucoup aidés dans nos travaux au cours des dernières années.
Je crois que M. Scott a raison : il existe un grand bassin de membres potentiels pour le conseil, et je crois que nous devons tenir compte de la représentation géographique, de l'expertise et des autres intérêts que ces personnes pourraient apporter au nouveau conseil d'administration. Mais il s'agira d'un mandat plus étendu, et je crois donc que nous devrons tenir compte de ces éléments au moment de procéder aux nouvelles nominations.
Le sénateur Wallace : Monsieur Scott, d'après ce que je comprends, l'objectif général du gouvernement est de faire du Canada l'un des chefs de file, sinon le chef de file, en ce qui a trait à la capacité de recherche internationale et le rendement dans l'Arctique. Si le projet de loi est adopté, et en tenant compte de la création de l'organisme fusionné et de la SRCEA à Cambridge Bay, comment le Canada se comparera-t-il à d'autres nations polaires en ce qui concerne cette capacité? Deviendrons-nous réellement un chef de file international?
M. Scott : Merci, sénateur. Je crois que la réponse courte, c'est oui, absolument. Le Canada est considéré comme étant un chef de file. Nous ne jouons pas le rôle le plus important, mais sur le plan conceptuel, nous sommes à l'avant- garde dans de nombreux domaines techniques — le changement climatique, l'exploitation des ressources, la santé et le bien-être de la population. Mais nous ne jouerons jamais un aussi grand rôle que d'autres pays, par exemple nos collègues du sud et de l'ouest aux États-Unis, c'est-à-dire en Alaska et sur le continent.
Relativement à un grand nombre d'autres nations polaires, nous sommes très productifs en ce qui concerne la recherche scientifique et les articles scientifiques; ces derniers sont achetés et abondamment lus. Nous sommes des chefs de file sur le plan conceptuel. La façon dont nous interagissons avec nos populations autochtones dans le Nord par l'entremise de revendications territoriales est unique dans le monde. Cela oriente la façon dont nous menons des recherches et recueillons des renseignements. Nous sommes des chefs de file mondiaux en ce qui concerne la bonne gestion de nos populations autochtones et nordiques. D'autres pays étudient nos façons de faire à cet égard, et on considère que nos conseils de cogestion issus des revendications territoriales sont innovateurs. Par exemple, nous avons des façons différentes — et peut-être plus performantes — d'acquérir des connaissances applicables à la tradition scientifique occidentale, mais également aux enjeux locaux, par exemple la gestion des caribous.
Le Canada est donc un pays innovateur. On considère un peu partout qu'il est un chef de file. La création du nouvel organisme et du nouveau programme de sciences et technologie nous offre une autre occasion de démontrer notre leadership. Les chercheurs internationaux se bousculent littéralement aux portes pour établir des partenariats avec des Canadiens. Dans environ un mois, nous organiserons un atelier dans le cadre de la conférence Arctic Change à Ottawa, où nous passerons une journée à présenter les perspectives canadiennes et à entendre ensuite les représentants de plus d'une douzaine de pays qui souhaitent établir de réels partenariats ici au Canada pour créer de nouvelles connaissances applicables à l'échelle mondiale.
Il s'ensuit qu'en mettant à profit nos pratiques exemplaires actuelles, nous augmenterons le volume de travail effectué et, à mon avis, nous accroîtrons notre influence en conséquence. Nous ne serons jamais les meilleurs, mais on nous considère comme étant parmi les meilleurs. Les nouvelles connaissances que nous créons nous permettront de démontrer que nous sommes les meilleurs, les plus innovateurs, les plus créateurs et les plus efficaces.
Il s'agit d'une occasion en or, et la création de la SRCEA nous donne l'élan nécessaire et les ressources supplémentaires pour offrir notre contribution au reste du monde et démontrer que nous savons ce que nous faisons.
Le sénateur Wallace : Vous venez de répondre à ce qui aurait été ma dernière question, et je vous en remercie.
Le président : D'accord. Merci. C'est ce qui termine les questions. Messieurs, j'ai seulement une question, et elle se trouve à la page 10 de votre exposé. C'est un peu difficile à lire, mais je vois énormément de petits points rouges sur une carte intitulée Réseau canadien d'opérateurs de recherche nordique.
Je ne sais pas exactement ce que cela signifie. Je ne crois pas que vous ayez le temps de tout nous expliquer, mais pourriez-vous nous donner une idée de ce que cela signifie et fournir à la greffière une description de la signification de tous ces petits points rouges?
M. Hik : Je crois que ces points rouges représentent la capacité que nous avons déjà dans le Nord du Canada, sans compter les bateaux qui sont en mer, bien qu'ils sont peut-être représentés. Même en l'absence de la SRCEA, comme l'a mentionné M. Scott, nous avons la capacité de mener des recherches de pointe et de classe mondiale dans l'Arctique. Mais la SRCEA fournira un nouvel objectif coordonné à toutes ces activités.
Vous pouvez donc mettre un nom sur chacun de ces points rouges, car ce sont des organismes qui ont mené des recherches à ces endroits, dans certains cas pendant des décennies. C'est une mine de connaissances. C'est notre fondement. Le Nord canadien est un vaste territoire. Une seule installation à Cambridge Bay ne peut pas couvrir toutes nos activités, tous nos intérêts et tous nos besoins. Nous pouvons donc fournir ces renseignements. Il s'agit simplement d'une représentation du territoire couvert par notre capacité de recherche dans le Nord et de la dispersion des activités de recherche.
Le président : Merci beaucoup. C'est une bonne réponse et cela démontre que nous maintenons une bonne présence dans le Nord du Canada, ce qui nous permet de recueillir les renseignements nécessaires à nos réalisations.
Merci, monsieur Scott, et merci, monsieur Hik, de vos exposés, de vous être levés si tôt ce matin et d'avoir comparu devant le comité. Je crois que nous avons entendu de très bons exposés et que nous avons eu droit à de bonnes questions et à de très bonnes réponses. Nous vous en remercions.
Nous poursuivons nos audiences sur notre étude préalable sur la teneur des éléments des sections 3, 28 et 29 de la partie 4 du projet de loi-C-43, Loi no 2 portant exécution de certaines dispositions du budget.
Pour nous parler de la section 3 du projet de loi, qui concerne la Station de recherche canadienne de l'Extrême- Arctique, je suis heureux d'accueillir, en personne, Elizabeth Kingston, directrice générale, Chambre des mines du Nunavut et des Territoires du Nord-Ouest. Nous accueillons également Son Honneur Jeannie Ehaloak, mairesse de Cambridge Bay, par vidéoconférence.
Nous aurons peut-être quelques difficultés avec la vidéoconférence de Cambridge Bay, car c'est très loin, mais nous sommes heureux de vous avoir avec nous, madame la mairesse. Je crois que vous livrerez un exposé.
Jeannie Ehaloak, mairesse, municipalité de Cambridge Bay : Bonjour, mesdames et messieurs. Au nom des membres du conseil du village de Cambridge Bay et de ses habitants, j'aimerais remercier les membres du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles de me donner l'occasion de vous rencontrer aujourd'hui.
J'aimerais commencer par fournir un peu de contexte sur les contributions et la participation de la collectivité dans le projet de la Station de recherche canadienne de l'Extrême-Arctique.
L'engagement communautaire dans ce projet a commencé pendant l'étude de faisabilité de la SRCEA, lorsqu'on a décidé que la SRCEA serait potentiellement construite à Cambridge Bay. À cette époque, un comité de direction a été créé au sein de la collectivité et formé d'employés de la collectivité, de membres du conseil et de membres de l'Association inuite de Kitikmeot. L'objectif principal de ce comité était de veiller à ce que Cambridge Bay soit le siège social de la SRCEA.
En 2010, lorsque le premier ministre a annoncé que la SRCEA serait située à Cambridge Bay, le comité de direction s'est agrandi pour inclure des représentants de différents ministères du gouvernement du Nunavut, des représentants du Collège de l'Arctique du Nunavut, des organismes à but non lucratif, des entreprises locales et des membres d'AADNC pour travailler sur ce projet. L'objectif du comité a été réorienté vers la maximisation de l'intégration de la SRCEA au sein de la collectivité, le partage des connaissances et la génération de discussions sur tous les sujets, de la conception des installations à la participation locale en passant par l'exécution du programme de science et de technologie.
Le comité a joué un rôle essentiel dans l'identification des occasions de partenariats et l'établissement de ces partenariats pour des projets pilotes déjà en cours à Cambridge Bay. Cela comprend notamment des projets tels le projet d'énergie de remplacement ACS-150, la vérification énergétique de la collectivité, une étude sur les systèmes de ventilation à récupération de chaleur, et un projet d'observation sous-marine.
Comme vous pouvez le voir, la contribution et la participation communautaires ont été très importantes jusqu'ici, et nous sommes heureux de poursuivre ces relations avec la SRCEA.
Même si je n'ai pas encore eu l'occasion d'examiner la transcription complète des témoignages fournis pendant la discussion du 4 novembre, j'aimerais profiter de cette occasion pour répondre à quelques questions soulevées par les sénateurs au cours de cette discussion.
La sénatrice Seidman a demandé comment le Nord et les habitants du Nord profiteront de la SRCEA. Je crois que l'étude sur les systèmes de ventilation à récupération de chaleur est un exemple précoce de la façon dont les habitants du Nord profiteront de la SRCEA. L'objectif de ce projet est de concevoir un meilleur système de ventilation à récupération de chaleur, qui deviendra au bout du compte un système conçu dans le Nord pour le Nord. De plus, dans le cadre de ce projet, on a fait venir des instructeurs à Cambridge Bay pour former le personnel de la Société de logement du Nunavut sur l'installation et l'entretien des systèmes de ventilation à récupération de chaleur. Cette formation a certifié 19 employés de la Société de logement du Nunavut de partout dans la région de Kitikmeot en système de ventilation à récupération de chaleur, ce qui a renforcé la capacité dans la région.
J'aimerais ajouter une perspective communautaire à la question du sénateur Wallace sur l'aspect de la Station de recherche canadienne de l'Extrême-Arctique. De nombreux résidants de Cambridge Bay ont posé la même question lorsque le village a été choisi pour y construire la SRCEA. De nombreuses consultations communautaires ont été organisées avec le personnel de la SRCEA et les architectes pour discuter de l'emplacement et de l'aspect de la station. Après tout, elle fera partie de notre collectivité pendant longtemps. Il ne fait aucun doute que la SRCEA est un bel édifice. Cela dit, j'aimerais féliciter le personnel d'AADNC qui a travaillé sur ce projet d'avoir adopté une approche inclusive en ce qui concerne la conception de la SRCEA. Les habitants de la collectivité de Cambridge Bay ont vraiment l'impression qu'on a tenu compte de leurs suggestions.
Pour conclure, l'énoncé de vision adopté récemment par la municipalité indique que Cambridge Bay est une ville en santé, culturellement dynamique, soucieuse de l'environnement et économiquement prospère, qui sert de centre régional pour la région de Kitikmeot et de centre de transport. Nous croyons que notre collaboration avec la SCREA nous permettra de donner vie à cet énoncé.
Le président : Merci beaucoup. Nous allons maintenant donner la parole à Mme Kingston pour son exposé, après quoi nous tiendrons une période de questions.
Elizabeth Kingston, directrice générale, Chambre des mines du Nunavut et des Territoires du Nord-Ouest : Au nom de la Chambre des mines du Nunavut et des T.N.-O., je vous remercie de m'avoir invitée à venir m'entretenir avec vous du projet de loi C-43. Nous sommes ravis de vous soumettre notre mémoire sur les dispositions de la loi sur le plan d'action économique.
Comme vous l'avez demandé, mes observations portent sur la section 3, partie 4, qui vise la Station canadienne de recherche dans l'Extrême-Arctique, ou SCREA. Nous apprécions beaucoup cette possibilité puisque la SCREA pourrait avoir une incidence importante sur divers projets d'exploration et d'exploitation minières dans les territoires.
La chambre des mines est l'association professionnelle et le principal défenseur de l'exploration et de l'exploitation minières responsables et durables au Nunavut et dans les T.N.-O. Comme je l'ai déjà dit, je m'appelle Elizabeth Kingston, je suis directrice générale pour le Nunavut et mon bureau se trouve à Iqaluit.
Dans une lettre en date du 30 septembre, le ministre Valcourt nous a avisés que le gouvernement du Canada proposait d'établir une nouvelle organisation fédérale, la SCREA, et d'y intégrer la Commission canadienne des affaires polaires existante, comme le prévoient les disposions de transition qu'on trouve dans le projet de loi.
Nous comprenons que cette nouvelle organisation aurait pour but de promouvoir le développement et la diffusion de connaissances relatives aux régions polaires; d'approfondir les connaissances sur l'Arctique canadien en vue d'améliorer les perspectives économiques, la gérance environnementale et la qualité de vie des habitants du Nord et de tous les Canadiens; de renforcer le leadership du Canada relativement aux enjeux touchant l'Arctique et d'établir un centre névralgique de recherche scientifique dans l'Arctique canadien.
La chambre appuie le regroupement de ces deux organisations et considère que ce sera une mesure efficace pour nous aider à atteindre les objectifs de la Stratégie pour le Nord. Nous sommes prêts à faire notre part pour appuyer cette institution et contribuer à dessiner l'avenir du Canada grâce à l'approfondissement des connaissances sur l'Arctique.
La chambre pourrait être un allié utile pour déterminer lesquels de ses membres pourraient être intéressés à établir des partenariats avec le programme de science et de technologie de la SCREA pour favoriser la création de savoir dans les domaines de priorité mutuelle.
Nous faisons partie du comité consultatif sur la SCREA depuis 2011 et nous sommes heureux de participer à l'élaboration du plan directeur en matière de sciences et de technologie.
Pour l'élaboration de ce plan, nous avons recommandé que la SCREA mette la priorité sur trois grandes disciplines de recherche essentielles pour notre industrie.
La première est le transport maritime. Pratiquement toutes les nouvelles mines des régions arctiques du Nunavut et des T.N.-O. dépendront du transport maritime. Nous nous attendons à ce que les futures recherches en la matière montrent que le transport maritime responsable n'est pas néfaste pour l'environnement.
Nous espérons que le travail de la SCREA contribuera à aplanir les obstacles à l'exploitation minière, dans l'objectif que d'ici quelques années, nous aurons établi que le transport maritime associé à l'exploitation minière n'a pas de répercussions graves sur l'environnement. En fait, nous nous plaisons à croire que notre industrie a aidé le Canada à devenir un chef de file du transport dans l'Arctique dans les années 1970, période où le Canada a joint ses efforts à ceux de l'industrie pour appuyer le développement du transport maritime et de l'exploitation minière dans l'Arctique. À l'époque, le gouvernement fédéral détenait 18 p. 100 des actions de la mine Nanisivik et assumait la responsabilité de l'infrastructure de transport et communautaire de l'exploitation minière la plus au nord de l'histoire canadienne.
C'est ce gouvernement qui a investi dans la création technologique du navire de charge brise-glace le plus avancé au monde, le NM Arctic, pour assurer le transport des mines Nanisivik et Polaris. La technologie du NM Arctic a jeté les assises des dernières avancées technologiques en matière de transport maritime dans l'Arctique, qui ont permis de construire le NM Nunavik, beaucoup plus gros et mieux outillé, qui a récemment réussi à transporter un chargement de concentré de ressources minérales du Québec arctique par le passage du Nord-Ouest jusqu'en Chine.
Nous avons une occasion en or d'accroître notre expertise en transport maritime, et la SCREA pourrait jouer un rôle à cet égard.
Notre deuxième grande discipline d'intérêt serait l'amélioration de la santé communautaire. L'exploitation minière contribue à la santé communautaire. Nous aimerions qu'il y ait des recherches fondées sur des indicateurs reconnus pour faire la preuve scientifique que l'exploitation minière contribue à l'amélioration de la santé communautaire.
Les entreprises peuvent saisir ces occasions de recherche pour veiller à ce que leurs activités avantagent les collectivités. Par exemple, plusieurs sociétés minières de la région de Kitikmeot participent à des discussions sur un projet de sondage destiné à évaluer comment les travailleurs saisonniers voient la sécurité alimentaire et le logement. Si la SCREA planifiait des recherches similaires, ce serait une bonne occasion de travailler ensemble à des recherches appliquées et d'éviter les dédoublements.
La formation et le développement des compétences qui découlent du projet de la SCREA favorisent déjà l'exploitation des ressources. Un autre exemple en est le Nunavut Arctic College, qui s'est doté d'un programme d'introduction aux technologies environnementales, essentiellement dans le but de former les techniciens qui travailleront à la SCREA. Cependant, certains des futurs diplômés potentiels pourraient décider d'opter plutôt pour un poste de directeur environnemental au sein d'une société minière.
L'intégration de la Commission des affaires polaires à la SCREA et le fait que ses bureaux principaux demeurent à Cambridge Bay et que des réunions du conseil s'y tiennent chaque année, comme le prévoit le paragraphe 26(2), sont susceptibles d'attirer plus d'emplois dans le Nord, et nous convenons que c'est une bonne chose.
La littératie scientifique du public est un autre de nos objectifs mutuels. Grâce aux programmes de recherche active en cours dans le Nord, menés en partenariat avec les collectivités et avec leur participation, on peut espérer que le grand public connaisse de mieux en mieux les méthodes scientifiques, ce qui lui permettra de mieux comprendre les résultats des évaluations et du suivi des projets miniers.
Les membres de notre industrie offrent déjà aux collectivités de formidables outils de développement, et nous avons hâte que cette nouvelle SCREA améliorée ouvre ses portes. Ce sera un catalyseur important pour nous aider à mieux utiliser ces outils.
Notre troisième grande priorité de recherche consisterait à améliorer les données de base sur la faune et la flore utilisées dans les évaluations environnementales. La prospection minérale dans le Nord du Canada contribue au développement de mines potentielles, mais il reste de grands trous dans nos données environnementales de base. Le fait de combler les lacunes dans nos connaissances sur la vie sauvage marine et terrestre, particulièrement sur le caribou et les baleines, aidera les sociétés d'exploitation des ressources à réaliser leurs études environnementales.
La SCREA a un rôle important à jouer afin de nous aider à comprendre notre base de connaissances actuelle dans une perspective de développement. Elle veillera à combler proactivement nos lacunes en matière de connaissances avant que des investissements soient faits pour que nous n'ayons pas à ralentir ou à arrêter inutilement des projets que notre industrie a mis tant d'efforts à attirer.
La chambre espère que cette nouvelle organisation fusionnée que sera la SCREA mettra encore plus l'accent sur les priorités du Nord et permettra d'insister sur la nécessité de vastes recherches pour acquérir les connaissances qui nous manquent pour appuyer nos projets miniers dans le Nord.
Pour conclure, nous sommes satisfaits des modifications législatives proposées à la section 3, partie 4, du projet de loi C-43 et nous nous attendons à ce qu'elles favorisent une hausse des investissements miniers dans le Nord. La chambre se réjouit à l'idée du dialogue qui s'établira avec le gouvernement fédéral dans la foulée de la création de la SCREA.
Nous vous remercions de nous permettre de réagir aux modifications proposées. L'adoption de cette loi sur la SCREA aidera le gouvernement du Canada à approfondir ses connaissances sur l'Arctique et à renforcer le leadership du Canada relativement aux enjeux polaires. C'est à notre avis une initiative ambitieuse pour compléter la Stratégie pour le Nord. Ceci vient clore mon exposé. Je vous remercie.
Le président : Merci infiniment, madame Kingston. Nous allons maintenant passer aux questions.
Le sénateur Patterson : [Note de la rédaction : le sénateur Patterson s'exprime en inuktitut.]
Madame la mairesse Ehaloak, je suis heureux que vous soyez venue de si loin. J'aimerais brièvement rendre hommage au hameau de Cambridge Bay pour tous les efforts de lobbying qu'il a déployés pour défendre le choix de Cambridge Bay pour établir la SCREA. Bien des collectivités se sont battues pour cet honneur au Nunavut, et votre hameau a superbement réussi à expliquer pourquoi il souhaite accueillir la station et contribuer à cette nouvelle initiative. Je vois que le hameau continue de participer activement au comité directeur et de veiller à ce que la SCREA ait des liens avec la collectivité et sa population, et de ce fait, avec la population du Nunavut.
Je vous en félicite.
Nous avons entendu dire que la SCREA attirerait des gens qui viendraient étudier l'Arctique et y vivre, ce qui est excellent. La question que je veux vous poser est très concrète, madame la mairesse : nous savons qu'il y a pénurie de logements dans tous les villages du Nord. Avez-vous à l'œil les dispositions sur le logement des employés? Avez-vous des observations à faire concernant ce besoin? Est-ce que le comité directeur a son mot à dire à ce sujet?
Si les gens ne peuvent pas se loger, il ne sera pas possible pour le personnel de la Commission des affaires polaires, par exemple, d'y demeurer. C'est un défi qui vient d'être mentionné. Sans logement, les meilleures intentions du monde pour que des gens s'établissent à Cambridge Bay ne donneront rien.
Pouvez-vous nous en parler, madame la mairesse?
Mme Ehaloak : Je vous remercie, sénateur Patterson. Pour répondre à votre question sur le logement, dès le début du projet de la SCREA, la question du logement a été ciblée, et il y aura de nouveaux logements pour le personnel. AADNC s'est engagé à construire des logements pour son personnel, afin que les employés de la SCREA n'occupent pas les logements publics ou gouvernementaux déjà existants.
Le sénateur Patterson : Si je peux me permettre, où en est la construction en ce moment? J'ai vu la photo d'une structure d'acier cet automne. Ce bâtiment est-il déjà fermé? Je suis certain que l'hiver est déjà arrivé à Cambridge Bay. Pouvez-vous nous dire de quoi ces bâtiments ont l'air?
Mme Ehaloak : Il y a trois bâtiments en construction pour la station. Il y a d'abord l'installation d'entreposage, et je suis désolée de devoir vous dire que non, ce bâtiment n'est pas encore fermé, mais les ouvriers y travaillent toujours.
Ma maison se trouve juste à côté de la future SCREA, et je peux vous assurer qu'ils y travaillent 12 heures par jour. Les deux autres unités en construction sont des résidences, et elles sont presque fermées pour qu'on puisse les construire de l'intérieur.
La sénatrice Seidman : Madame la mairesse, je vous remercie d'être ici avec nous ce matin et d'avoir répondu à ma question en peu plus tôt dans le cadre de notre étude sur ce projet de loi pour ce qui est de savoir comment la SCREA va profiter au Nord et à ses habitants. J'aimerais moi aussi vous féliciter de vos efforts pour défendre la candidature de Cambridge Bay pour la SCREA ainsi que la pertinence du projet en général pour les habitants du Nord.
J'aimerais vous demander de m'en dire un peu plus sur ce que vous allez faire pour continuer de défendre la pertinence de la SCREA pour les habitants du Nord et de réclamer leur participation constante, pour que son travail les aide non seulement dans leurs projets futurs, mais qu'il soit durable et que leurs collectivités puissent intégrer ce qui ressortira de la SCREA.
Vous nous avez parlé de votre comité directeur et du rôle très important qu'il a joué pour faire avancer ce projet et optimiser l'intégration de tout le travail qui se fait. Vous nous avez également dit, dans votre exposé, que vous vous réjouissiez à l'idée de continuer de faire fructifier cette relation avec la SCREA. J'aimerais savoir de quelle manière le comité directeur continuera de participer au projet de la SCREA.
Mme Ehaloak : Le comité directeur se réunit périodiquement pour discuter des questions relatives à l'emplacement de la station elle-même et aux projets futurs qui auront lieu à la SCREA.
La sénatrice Seidman : Le comité directeur va continuer son travail parce que de toute évidence, il a été très utile, comme vous l'avez dit, pour cibler des occasions de partenariat et les établir, dans le cadre de projets pilotes déjà en cours à Cambridge Bay.
Ce comité directeur a joué un rôle central pour nous mener à ce stade-ci. Vous nous dites qu'il va continuer son travail. Est-ce exact?
Mme Ehaloak : Tout à fait. C'est un comité très fort. Les entreprises et organisations qui y sont représentées s'assurent que le comité participe à tous les projets ou à toutes les activités qui ont lieu à la SCREA.
Il y a différentes entreprises qui travaillent sur les lieux de la SCREA, pour que tout le monde profite du projet, et cela fonctionne très bien.
La sénatrice Seidman : Quand on pense à la SCREA et à son importance de façon plus globale, de quelle façon la SCREA va-t-elle profiter au Nord et à ses habitants principalement?
Mme Ehaloak : Je dirais qu'il y a d'abord l'emploi. J'ai visité un jour les élèves de 11e et 12e année d'une école secondaire, à qui je présentais un exposé sur le fait d'être un leader dans la collectivité. L'une des questions que les étudiants m'ont posées était : « Et la SCREA? Qu'est-ce que je peux faire pour m'assurer d'avoir un emploi en sciences et en technologie à la station quand j'aurai fini l'université? » Beaucoup d'étudiants m'ont posé la question. À Cambridge Bay, la majorité des emplois sont au gouvernement ou dans l'industrie minière.
Un étudiant m'a dit : « Je peux donc devenir biologiste de la faune si je le veux pour obtenir un emploi à la station? » Bien sûr que oui, lui ai-je répondu. Ils étaient tous ravis d'entendre qu'il n'y avait pas que pour des emplois dans l'industrie minière, en gestion ou au gouvernement qu'ils pouvaient se préparer, qu'ils pouvaient aussi s'intéresser à d'autres programmes en sciences et en technologie. Ils étaient très contents.
Certains d'entre eux sont déjà partis. Je leur ai dit que la station ouvrirait ses portes en 2017, et certains étudiants m'ont tout de suite répondu qu'il leur restait quatre ans pour aller à l'école et revenir pour obtenir un emploi qui leur plaît en sciences et en technologie, l'emploi de leur rêve, chez eux. Ils pourront rester chez eux et travailler dans le cadre de ces programmes en sciences et en technologie.
La SCREA va profiter aux habitants du Nunavut et de tout le Nord canadien.
La sénatrice Seidman : Je vois le même enthousiasme, l'espoir et la joie dans votre visage que ceux qui se lisaient dans les yeux du directeur exécutif et du membre du conseil de la Commission canadienne des affaires polaires. Merci beaucoup. Nous avons bien hâte de savoir ce qu'il adviendra de ce grand projet.
Le sénateur Mitchell : Je vous remercie toutes les deux. Ma première question s'adresse à la mairesse Ehaloak. Pourriez-vous nous donner une idée d'une ou deux priorités de recherche que votre collectivité aimerait voir la SCREA s'approprier?
Mme Ehaloak : Nous aimerions qu'elle étudie la santé communautaire et l'environnement durable. Ce sont les deux éléments les plus importants pour nous.
Le sénateur Mitchell : Lorsque vous parlez d'environnement durable, parlez-vous du changement climatique?
Mme Ehaloak : Oui, du changement climatique. En ce moment, le hameau de Cambridge Bay travaille à lancer son programme de recyclage. C'est ma troisième année en tant que mairesse, et nous avons travaillé très fort à essayer de lancer un programme de recyclage à Cambridge Bay. Nous avons déjà assaini notre dépotoir. Notre dépotoir de métal a été décontaminé. Nous commençons à peine à présenter notre stratégie de communication à la communauté. Nous avons déjà tous nos bacs de recyclage, il ne nous reste donc qu'à communiquer le contenu de notre programme de recyclage aux résidants, et c'est ce à quoi nous travaillons pour être une collectivité respectueuse de l'environnement.
Le sénateur Mitchell : Fantastique.
Madame Kingston, vous représentez les mines. Vous nous avez énuméré vos priorités, qui sont évidemment importantes et puissantes. Croyez-vous que l'industrie minière, que des sociétés en particulier vont investir et travailler en partenariat avec la SCREA dans des projets de recherche? Ou vous attendez-vous plutôt à ce que ce soit vous qui lui conseilliez des priorités de recherche?
Mme Kingston : C'est là une excellente occasion pour notre industrie et les entreprises de travailler en partenariat avec la SCREA.
Je ne saurais vous dire plus précisément quelle forme ces partenariats vont prendre. Cependant, l'un de nos principaux projets les plus avancés est celui de la mine d'or de Doris North, qui se trouve à à peine 100 kilomètres au sud de Cambridge Bay. L'un des partenariats potentiels, si je peux me permettre de parler au nom de l'entreprise, c'est que s'il y a des recherches à mener et que la SCREA a besoin d'un environnement de test, elle pourrait avoir accès à cette mine tout près. Doris North est une mine active, où diverses activités ont cours. Si un groupe de scientifiques ou de chercheurs voulaient se rendre à la mine Doris North, ils pourraient probablement avoir accès à ses installations.
Pour le reste, il y a diverses entreprises en processus d'évaluation environnementale. En ce moment, elles mènent elles-mêmes des projets de recherche, qu'il s'agisse de la gestion du caribou, des plans de gestion de l'aire de répartition des caribous, ou des impacts sur d'autres espèces sauvages. Si nous pouvions travailler en partenariat et partager nos recherches, il ne serait plus nécessaire de toujours recommencer. Chaque promoteur n'aurait pas à refaire au complet un plan de gestion de l'aire de répartition du caribou, par exemple, pour le même troupeau qui traverse la région. Si un seul et même plan pouvait être accepté pour tous les projets, par les collectivités et par les scientifiques, on réaliserait des économies d'échelle, et cela contribuerait à simplifier le processus d'évaluation environnementale.
Il y a diverses possibilités de partenariat, ils pourraient prendre diverses formes.
Le sénateur Mitchell : Merci.
Le président : Je n'ai pas d'autres questions à vous poser. Je tiens à vous remercier toutes les deux infiniment. Madame Kingston, merci d'avoir comparu de nouveau devant nous. Je l'apprécie. Merci, madame la mairesse, de cette excellente présentation pour la collectivité de Cambridge Bay.
Je n'ai qu'une question à vous poser. Fait-il très froid là-bas aujourd'hui? Quelle est la température à Cambridge Bay?
Mme Ehaloak : C'est en fait très doux ce matin. Il y a de la neige qui tombe. Il n'y a absolument pas de vent, mais nous avons un avertissement de blizzard pour demain.
Le président : Très bien. Alors je vous remercie beaucoup de vous être jointe à nous. Nous l'apprécions. Nous allons sur ce lever la séance.
(La séance est levée.)