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ENEV - Comité permanent

Énergie, environnement et ressources naturelles

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles

Fascicule 21 - Témoignages du 2 décembre 2014


OTTAWA, le mardi 2 décembre 2014

Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd'hui, à 17 h 30, pour étudier de nouvelles questions liées à son mandat.

Le sénateur Richard Neufeld (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Honorables sénateurs, bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles. Mon nom est Richard Neufeld, et je représente la province de la Colombie-Britannique au Sénat. Je suis le président du comité.

J'aimerais souhaiter la bienvenue aux honorables sénateurs, aux membres du public qui sont présents dans la salle et à ceux qui nous regardent à la télévision partout au pays. J'aimerais rappeler à ceux qui nous regardent que les réunions du comité sont ouvertes au public et diffusées sur le Web à l'adresse sen.parl.gc.ca. Vous pourrez également trouver sur le site web des renseignements sur l'horaire de comparution des témoins sous la rubrique « Comités du Sénat ».

Je vais maintenant demander aux sénateurs de se présenter. Je vais d'abord présenter le vice-président, le sénateur Massicotte, du Québec.

Le sénateur Mitchell : Grant Mitchell, de l'Alberta.

Le sénateur Patterson : Dennis Patterson, du Nunavut.

Le sénateur Black : Doug Black, de l'Alberta.

Le sénateur Wallace : John Wallace, du Nouveau-Brunswick.

La sénatrice Seidman : Judith Seidman, de Montréal, au Québec.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Pierre-Hugues Boisvenu, sénateur du Québec.

[Traduction]

Le président : Je vais présenter notre personnel. Tout d'abord, notre greffière, Lynn Gordon, et nos deux analystes de la Bibliothèque du Parlement, Sam Banks et Marc LeBlanc.

Notre comité a pour mandat d'examiner les lois et les questions liées à l'énergie, à l'environnement et aux ressources naturelles en général.

Je suis très heureux d'accueillir pour la première fois devant notre comité Julie Gelfand, qui est commissaire à l'environnement et au développement durable. Elle a été nommée en mars 2014. Avant de se joindre au Bureau du vérificateur général du Canada, Mme Gelfand était conseillère principale chez Rio Tinto Canada et vice-présidente, Environnement et responsabilité sociale, chez Rio Tinto Iron Ore Company of Canada. Elle a également occupé les postes de vice-présidente, Développement durable, de l'Association minière du Canada, et de coprésidente du Centre d'excellence en responsabilité sociale des entreprises dans le cadre de la Stratégie de responsabilité sociale des entreprises du gouvernement du Canada pour les sociétés extractives canadiennes à l'étranger.

Bienvenue, commissaire Gelfand. Nous sommes heureux que vous ayez pu vous joindre à nous. Nous sommes désolés du temps qu'il nous a fallu pour organiser cette réunion, mais les questions législatives retardent parfois les autres dossiers dont nous sommes saisis. Je vais vous laisser présenter les membres du personnel qui vous accompagnent aujourd'hui.

Je sais que votre rapport aborde un certain nombre de domaines. Vous pouvez nous donner un bon aperçu de son contenu, et nous passerons ensuite aux questions. Vous avez la parole.

Julie Gelfand, commissaire à l'environnement et au développement durable, Bureau du vérificateur général du Canada : Merci beaucoup. Je suis très heureuse d'être ici pour vous présenter le rapport que j'ai déposé au Parlement le 7 octobre.

[Français]

Je suis très honorée d'être parmi vous.

[Traduction]

Je suis accompagnée de certains membres de notre personnel qui sont assis à l'arrière ainsi que de certains employés du service des relations avec le Parlement du bureau.

À la table, je suis accompagnée de Kimberley Leach, de Jim McKenzie et de Bruce Sloan. J'aimerais seulement mentionner que vendredi, Bruce prendra sa retraite après 31 ans de service au Bureau du vérificateur général du Canada. Il aurait célébré vendredi ses 31 ans de service. Il prend sa retraite jeudi, c'est-à-dire dans deux jours. À mon avis, une carrière de quelque 30 ans au Bureau du vérificateur général du Canada est tout un exploit et représente un grand service à la fonction publique.

Merci, Bruce.

Kim, Bruce et Jim étaient responsables des audits, tandis que James et Francine étaient les directeurs responsables de notre chapitre. Ils peuvent répondre mieux que moi à certaines des questions.

J'aimerais d'abord fournir quelques renseignements sur mon parcours et sur la façon dont je compte remplir mon mandat. Comme certains d'entre vous le savent déjà, j'ai travaillé au sein de la fonction publique fédérale. J'ai passé quelques années au service de Parcs Canada, il y a de cela bien longtemps. J'ai également œuvré dans des organismes de conservation à l'échelle nationale et internationale, ainsi que dans le secteur minier. Bref, j'ai exercé des fonctions dans le secteur public, le milieu des organismes de conservation, la société civile et le secteur minier, tant dans une association sectorielle que dans une entreprise privée. Selon moi, ces expériences m'ont permis de comprendre l'importance et les avantages de mettre en commun différents points de vue sur les questions liées à l'environnement et au développement. Il me paraît évident qu'une économie prospère, une société dynamique et un environnement sain vont ensemble. Pendant mon mandat, je compte me concentrer sur le rôle du gouvernement fédéral dans la promotion d'un développement durable qui, à long terme, répond aux besoins des générations actuelles, sans compromettre la capacité de répondre à ceux des générations futures.

Il y a 20 ans, lorsqu'on a créé ce poste pour la première fois, on n'avait pas beaucoup de renseignements sur la façon d'effectuer un audit environnemental. Aujourd'hui, c'est devenu une discipline à part entière. J'espère qu'à l'avenir, il y aura un champ de recherche dédié à l'audit environnemental du développement durable, mais il faudra d'abord en définir le mode d'exécution, et c'est ce que nous envisageons de faire.

Les audits que j'ai présentés dans mon rapport d'octobre 2014 font ressortir que le gouvernement n'a pas les réponses à de nombreuses questions qui ont un impact sur l'avenir du développement durable au Canada. J'y reviendrai tout à l'heure.

Notre premier chapitre portait sur les changements climatiques. En 2012, nous avions examiné les engagements relatifs aux changements climatiques. Nous avions alors conclu qu'il était peu probable que l'approche du gouvernement, qui consiste à instaurer des règlements dans un secteur à la fois, contribue à réduire suffisamment les émissions pour permettre l'atteinte de la cible de Copenhague. En vertu de l'Accord de Copenhague, comme beaucoup d'entre vous le savent, le Canada s'est engagé à réduire de 17 p. 100, par rapport aux niveaux de 2005, ses émissions de gaz à effet de serre d'ici 2020.

Notre plus récent audit sur les changements climatiques a révélé que la situation a peu changé au cours des deux dernières années. Nous avons constaté que les mesures mises en place par le gouvernement fédéral auront peu d'effet sur les émissions d'ici 2020.

Le gouvernement a adopté des règlements dans les secteurs du transport et de la production d'électricité. Donc, les règlements sont déjà en place dans ces deux secteurs.

Toutefois, les règlements dans le secteur pétrolier et gazier, où les émissions augmentent le plus vite, ne sont toujours pas en vigueur plusieurs années après que le gouvernement a déclaré son intention de réglementer ce secteur. Tout indique que le Canada n'atteindra pas sa cible internationale de réduction des émissions de gaz à effet de serre en 2020.

Le gouvernement fédéral ne semble pas avoir de plan global qui montre comment le Canada en tant que pays — et non pas uniquement le gouvernement fédéral — atteindra cette cible. Les Canadiens ignorent quels règlements seront élaborés, ou quelles réductions seront prévues dans chaque cas. Enfin, le gouvernement fédéral n'a pas assuré la coordination nécessaire pour que tous les ordres de gouvernement, particulièrement les provinces et le gouvernement fédéral, puissent travailler ensemble pour atteindre la cible nationale d'ici 2020.

[Français]

Le deuxième chapitre a porté sur la surveillance des sables bitumineux. Le gouvernement fédéral travaille avec la province de l'Alberta pour mettre sur pied un programme plus complet de surveillance des impacts environnementaux liés à l'exploitation des sables bitumineux.

Notre audit a examiné le travail accompli par Environnement Canada en vertu du plan de mise en œuvre conjoint Canada-Alberta pour la surveillance des sables bitumineux. Nous avons constaté que, dans l'ensemble, Environnement Canada a respecté les budgets et les échéanciers fixés pour les projets de surveillance que nous avons examinés.

Il reste toutefois du travail à faire. L'information qui provient des projets liés à la surveillance de l'air, de l'eau et de la biodiversité doit être mieux intégrée pour que nous puissions comprendre les effets environnementaux à long terme de l'exploitation des sables bitumineux, y compris les effets cumulatifs. Environnement Canada doit mieux intégrer le savoir écologique traditionnel et mieux engager les Premières Nations, les Métis et d'autres groupes. Enfin, les parties prenantes veulent savoir quel rôle jouera Environnement Canada dans le cadre de la surveillance des sables bitumineux après mars 2015.

Le troisième chapitre a porté sur les services fournis par Environnement Canada, Transports Canada et Pêches et Océans Canada pour soutenir la navigation maritime dans l'Arctique. Nous avons constaté une amélioration de l'information sur les conditions météorologiques et l'état des glaces. Cependant, nous avons aussi relevé des lacunes et des risques émergents qui, si rien n'est fait, vont s'aggraver avec l'augmentation du trafic maritime dans l'Arctique.

Par exemple, nous avons noté des faiblesses dans les levés et les cartes de nombreux endroits de l'Arctique canadien où les risques sont élevés. Certains levés et certaines cartes ont plus de 40 ans, et moins du quart sont qualifiés de « bon » par Pêches et Océans Canada.

[Traduction]

Nous avons également constaté que la Garde côtière canadienne a du mal à répondre aux demandes de l'industrie du transport maritime qui réclame des changements ou des ajouts aux aides à la navigation, comme les phares et les feux côtiers. De plus, la Garde côtière n'a pas évalué les risques associés à la diminution de la présence de brise-glace dans l'Arctique.

Nous sommes préoccupés, car il ne semble pas y avoir de vision d'ensemble de ce que le gouvernement fédéral compte fournir dans cette vaste région. Je parle ici de cartes modernes, d'aides à la navigation et de services de brise- glace, étant donné l'augmentation prévue du trafic maritime.

Dans un autre chapitre de l'audit, nous avons examiné si l'Agence canadienne d'évaluation environnementale, l'Office national de l'énergie et la Commission canadienne de sûreté nucléaire prennent des mesures pour mettre en œuvre la nouvelle Loi canadienne sur l'évaluation environnementale de 2012. Nous avons constaté deux aspects qui risquent de compromettre l'atteinte des objectifs de la loi. Premièrement, les motifs justifiant la désignation des projets devant faire l'objet d'une évaluation environnementale manquent de clarté. Nous craignons donc que certains projets importants échappent à l'évaluation et que les décideurs, en particulier les parlementaires, n'aient pas l'information dont ils ont besoin pour tenir compte des impacts environnementaux.

Notre deuxième préoccupation a trait à la participation du public. Un des objectifs de la nouvelle loi était d'accroître la participation des Autochtones. Or, de nombreux groupes, y compris les peuples autochtones, s'inquiètent de ne pas avoir la capacité de participer de manière significative. Par exemple, si vous êtes membre d'une Première Nation dans une petite collectivité qui est traversée par un pipeline et où l'on propose d'exploiter une mine d'uranium et peut-être une mine de métaux, vous pourriez avoir affaire à trois processus environnementaux différents, d'où la difficulté de déterminer comment y participer. Nous ne sommes donc pas convaincus qu'il existe une participation significative. Cette difficulté peut limiter la contribution de ces groupes et diminuer la confiance du public dans les évaluations environnementales en général.

[Français]

Le dernier audit présenté dans mon rapport s'inscrit dans le contexte du suivi annuel que nous faisons de la façon dont les ministères exécutent leurs engagements en matière de développement durable. Cette année, nous avons examiné comment les ministères audités utilisent les évaluations environnementales stratégiques pour intégrer des considérations environnementales dans leurs propositions au Cabinet et au Conseil du Trésor.

Malgré des améliorations aux processus, il demeure un risque que les ministres ne reçoivent pas toute l'information sur les impacts environnementaux des programmes, plans et politiques proposés par les ministères. Cela a des impacts positifs et négatifs sur l'environnement.

Certains membres du comité savent peut-être que mon bureau assure la gestion du processus de pétition en matière d'environnement au nom du vérificateur général. En plus de faire le suivi des pétitions et des réponses et de présenter des rapports à cet égard, nous publions les pétitions et les réponses sur le site web du Bureau du vérificateur général et nous nous efforçons de faire connaître le processus de pétition en matière d'environnement.

Le dernier chapitre est notre rapport annuel sur les pétitions environnementales. Cette année, nous avons reçu 16 pétitions qui demandent à des ministres de l'information sur plusieurs enjeux environnementaux, y compris la gestion des pêches et les menaces pour la santé humaine et l'environnement posées par les substances toxiques.

En conclusion, comme le montrent les audits que nous avons réalisés cette année, malgré de bonnes initiatives et certains progrès, de nombreuses questions restent sans réponse. Dans bien des domaines importants que nous avons examinés, la manière dont le gouvernement entend relever les défis importants que la croissance et le développement futur entraîneront n'est pas très claire.

[Traduction]

Entre autres, le gouvernement ne sait pas quel rôle Environnement Canada jouera dans la surveillance des sables bitumineux au-delà de mars 2015. Toutefois, nous avons remarqué qu'un des objectifs de l'AEMERA, un groupe établi en Alberta, est d'élaborer une nouvelle entente avec Environnement Canada, ce qui est une bonne nouvelle. Le gouvernement n'a pas expliqué clairement comment seront choisis les projets qui seront soumis à des évaluations environnementales, et je crains que certains projets importants échappent à l'évaluation. Le gouvernement n'a pas non plus défini les services qu'il mettra en œuvre dans l'Arctique pour soutenir la navigation accrue et réduire les risques pour la sécurité et l'environnement. Enfin, il n'a pas encore établi un plan national avec les provinces et les territoires pour atteindre la cible de réduction des émissions de gaz à effet de serre du Canada.

Je m'attends à ce que le gouvernement ait les réponses à ces questions. Dans mon rapport, j'ai fait de nombreuses recommandations, que les ministères ont acceptées. J'ai hâte de voir les initiatives qui seront mises en place pour y donner suite.

Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, je m'intéresse toujours à en savoir davantage sur les intérêts et les préoccupations des parlementaires, et je serais heureuse de rencontrer les sénateurs qui souhaiteraient m'en faire part. J'ai déjà rencontré quelques-uns d'entre vous. D'ailleurs, notre bureau considère les comités parlementaires comme un allié très précieux pour encourager le gouvernement à rendre compte de la gestion de l'environnement, et j'attends avec impatience de pouvoir servir les parlementaires en contribuant à ce rôle important.

Cela conclut ma déclaration préliminaire. Nous serons heureux de répondre à vos questions. Je pense que nous avons amplement le temps de le faire.

Le président : Merci beaucoup. Vous avez dressé là un bilan détaillé, et je vous en suis reconnaissant. Nous allons commencer par le vice-président, le sénateur Massicotte.

[Français]

Le sénateur Massicotte : Dois-je comprendre que le rôle du vérificateur est de confirmer les faits, confirmer la réalité comparativement aux attentes? Avant de produire le rapport, vous vous assurez auprès de votre client — le gouvernement, dans ce cas-ci — que votre compréhension est exacte et, par la suite, vous faites des recommandations.

En ce qui concerne les gaz à effet de serre, vous nous avez dit que l'objectif est loin d'être atteint, et même qu'il ne sera probablement pas atteint. Quelle est la réaction ou l'explication du gouvernement face à votre constat? S'engage-t- il de quelque manière que ce soit à corriger la situation ou se résigne-t-il tout simplement?

Mme Gelfand : C'est une très bonne question. Tous les faits inclus dans nos rapports ont été justifiés. Chaque partie de chaque phrase a une justification. Toutes les données qui se trouvent dans le rapport ont été vérifiées par le ministère. Il doit nous confirmer la véracité des données.

Dans le cas des gaz à effet de serre, l'approche des règlements secteur par secteur ne nous permettra pas d'atteindre l'objectif. Le ministère indique que, effectivement, les données qui se trouvent dans le rapport sont véridiques. Après cela, le gouvernement continue d'indiquer qu'il va atteindre l'objectif.

Ce serait une très bonne question à poser au ministère.

Le sénateur Massicotte : Parce que ce n'est pas votre rôle de formuler une opinion pour déterminer si leur projection est raisonnable. Il s'agit d'une projection pour l'avenir, mais, comme vérificateur, vous vous concentrez plutôt sur le passé, est-ce que je me trompe?

Mme Gelfand : Le rapport contient leurs données et leurs graphiques. Ce sont leurs estimations. Lorsqu'on examine leurs données, il est clair qu'ils ne vont pas atteindre les objectifs fixés.

Le sénateur Massicotte : Mais ils ne sont pas d'accord; ils pensent toujours qu'ils vont les atteindre.

Mme Gelfand : C'est l'information du ministère qui est insérée à notre rapport.

Le sénateur Massicotte : Mais eux, pour leur part, maintiennent l'opinion selon laquelle ils vont atteindre l'objectif visé.

Mme Gelfand : Je crois que c'est ce qu'ils disent publiquement.

Le sénateur Massicotte : Cependant, d'après votre vérification des faits, des données, du passé et d'après les projections, vous pensez que c'est loin d'être le cas?

Mme Gelfand : Je vais demander à Mme Leach si elle veut ajouter quelque chose à ce sujet. C'est elle qui communique avec le ministère.

Kimberley Leach, directrice principale, Bureau du vérificateur général du Canada : Je vous remercie pour la question. Malheureusement, je vais devoir vous répondre en anglais.

[Traduction]

Je dirais deux choses. D'abord, la conclusion selon laquelle nous n'atteindrons pas les cibles repose sur les données d'Environnement Canada tirées du document Tendances en matière d'émissions au Canada, publié en octobre 2013. Les données que nous avons utilisées pour arriver à cette conclusion proviennent donc d'Environnement Canada.

Ensuite, la deuxième partie de votre question était de savoir si les données et les prévisions d'Environnement Canada sont valables. Justement, le deuxième objectif de notre audit était de déterminer si ces prévisions étaient fiables. En effet, nous avons conclu qu'elles l'étaient.

Nous avons examiné des normes, des méthodologies et des lignes directrices utilisées à l'échelle internationale, ainsi que des avis d'experts d'autres pays, puis nous avons comparé le tout à la façon dont Environnement Canada établit ses prévisions. Nous avons constaté que le ministère avait effectué un très bon travail. L'information d'Environnement Canada confirme que le gouvernement n'atteindra pas les cibles. Bref, les prévisions et les estimations du ministère sont très fiables.

Le sénateur Massicotte : Le ministère appuie donc son opinion sur ses propres données; est-ce bien ce que vous dites?

Mme Leach : C'est ça.

Le sénateur Massicotte : S'agit-il de données scientifiques historiques, ou le ministère affirme-t-il également que nous n'atteindrons pas les cibles?

Mme Leach : Les données du ministère confirment qu'il faut réduire les émissions de 122 mégatonnes d'ici 2020 pour atteindre la cible. Or, il n'y a aucune mesure en place pour obtenir une réduction de cet ordre.

Le sénateur Massicotte : Le ministère dit donc publiquement : « Désolé, mais on n'atteindra pas cette cible »?

Mme Leach : Le document Tendances en matière d'émissions au Canada et les données viennent confirmer ce fait.

Le sénateur Black : Merci à vous tous d'être ici, et mes meilleurs vœux pour votre retraite.

Mes collègues et moi collaborons étroitement avec le Bureau du vérificateur général. Je n'en dirai pas plus.

Mme Gelfand : Nous sommes toujours un peu nerveux quand nous venons ici.

Le sénateur Black : Tout d'abord, j'aimerais vous remercier de votre franchise. Je vous en suis reconnaissant.

Vous êtes une ardente défenseure du développement énergétique responsable au Canada et, à ce titre, vos observations sont évidemment très importantes, car nous voulons relever les défis auxquels fait face l'industrie énergétique au Canada. J'ai trois questions à vous poser, et j'espère que vous pourrez m'éclairer là-dessus.

Vous avez souligné que les émissions de gaz à effet de serre ne sont toujours pas réglementées dans le secteur pétrolier et gazier. Elles le sont dans le secteur de la production d'électricité, ainsi que dans un autre secteur; je ne me rappelle plus lequel.

Mme Gelfand : Le secteur du transport.

Le sénateur Black : Êtes-vous en mesure d'expliquer pourquoi il en est ainsi?

Mme Gelfand : Vous voulez que je vous donne une réponse tout de suite?

Le sénateur Black : Certainement. Vous pouvez dire non.

Mme Gelfand : Je peux dire non? Alors, ma réponse est non. Par contre, ce que nous pouvons vous dire, c'est que nous avons appris qu'il y a quelques propositions préliminaires de règlements qui circulent déjà. Le hic, c'est que nous avons découvert que la consultation était très restreinte et très privée. À notre connaissance, certaines propositions ont été avancées pour le secteur pétrolier et gazier. Il y a eu une consultation avec un gouvernement et quelques représentants du secteur, ce qu'on ne pourrait pas qualifier de bonne approche réglementaire, car on est censé tenir de vastes consultations, assorties d'une foule de renseignements. Voilà ce que nous avons pu constater.

Le sénateur Black : Pouvez-vous en expliquer la raison?

Mme Gelfand : Je peux seulement vous donner des faits. Je peux examiner ce que le gouvernement s'est engagé à faire, puis je peux déterminer si, oui ou non, il remplit sa promesse.

Le sénateur Black : Parlant de faits, pouvez-vous nous dire si n'importe quel autre grand pays industrialisé sera en mesure ou non d'atteindre les engagements pris à Copenhague?

Mme Gelfand : Nous n'avons pas vérifié cet aspect. Ce serait une information du domaine public. Quant à savoir si d'autres pays y arriveront ou non, je crois comprendre que certains pays atteindront leurs objectifs de Copenhague, alors que d'autres ne les atteindront pas.

Le sénateur Black : Hier, le premier ministre Prentice a affirmé ce qui suit dans son discours devant la chambre de commerce de Vancouver, et j'aimerais savoir ce que vous en pensez. Il a dit que si nous tenons à devenir des chefs de file dans le domaine de l'énergie — et par « nous », il entend l'Alberta et le Canada —, nous devons également être des chefs de file en matière de protection environnementale. Autrement dit, selon le premier ministre de l'Alberta, le statut de chef de file dans le domaine de l'énergie passe par le leadership en matière de protection environnementale.

Je crois que vous êtes du même avis. Si c'est le cas, pouvez-vous me dire ce que nous pouvons faire de plus en ce qui concerne la collaboration entre le Canada et l'Alberta pour la surveillance environnementale des sables bitumineux? D'après vous, que faut-il faire de plus? Quels sont les obstacles à la réalisation de cet objectif? Dites-nous quoi faire pour obtenir les résultats escomptés.

Mme Gelfand : Nous avons dressé quelques constats au moment d'examiner le programme conjoint de surveillance des sables bitumineux. Premièrement, Environnement Canada était responsable, si je me souviens bien, de 38 projets. Nous avons examiné neuf d'entre eux, surtout ceux de grande envergure, et nous avons constaté que, dans l'ensemble, la gestion de ces projets allait bon train, sur le plan du respect des délais et du budget. Je me suis personnellement rendue à un site d'exploitation des sables bitumineux et j'ai regardé comment les gens prélevaient des échantillons du sol dans le cadre du programme de surveillance. En descendant le fleuve, on pouvait voir un groupe d'étudiants qui étaient là pour réaliser des projets de protection de la faune. Donc, les choses bougent sur le terrain en ce qui concerne les projets de surveillance : ils sont bien gérés, dans les délais prévus et, en général, dans les limites du budget; ils font l'objet d'une double vérification efficace. Cependant, il reste encore certaines choses à faire.

Le sénateur Black : C'est justement ce que je veux savoir.

Mme Gelfand : Premièrement, il faut dire qu'à l'heure actuelle, l'information est compilée, selon moi, presque en vase clos — biodiversité, eau, air. Le projet conjoint de surveillance des sables bitumineux faisait appel à une intégration des données. Cette stratégie d'intégration en est encore à ses débuts, et il faut l'étoffer davantage. C'est un aspect qu'on doit changer.

Deuxièmement, il faut se pencher davantage sur les questions liées aux terres humides et aux eaux souterraines. Ces deux éléments sont d'ailleurs prévus dans le plan. Accroître la surveillance des terres humides et des eaux souterraines — voilà la deuxième mesure à prendre.

Par ailleurs, nous avons constaté que l'intégration des connaissances écologiques traditionnelles s'impose pour mobiliser à nouveau les Premières Nations et les Métis. Je crois que le ministère y travaille déjà, mais c'est une troisième chose qu'il faudra faire.

L'ensemble du projet de surveillance sera soumis à un examen par les pairs, du point de vue scientifique, parce qu'on nous pose beaucoup de questions sur la fiabilité des données scientifiques. Ce n'est pas notre domaine de spécialité. Nous sommes des vérificateurs, chargés d'examiner les mesures que le gouvernement s'est engagé à prendre et de déterminer s'il les a effectivement prises. Quant aux résultats de l'examen par les pairs auquel sera soumis le projet de surveillance, ce sera à vous et à tous les autres d'en tenir compte.

Enfin, il est nécessaire de bien préciser le rôle futur d'Environnement Canada. Comme nous l'avons dit dans nos observations préliminaires, nous venons d'apprendre que le gouvernement de l'Alberta, ou plutôt l'AEMERA — le groupe chargé de réaliser le projet de surveillance des sables bitumineux — vise notamment à négocier une nouvelle entente avec Environnement Canada. Pourquoi est-ce important? Parce que les intervenants estiment qu'Environnement Canada a la capacité scientifique, ayant déjà dirigé de nombreux projets; alors si le ministère n'effectue pas le projet de surveillance, qui le fera à sa place? C'est important. Voilà donc les mesures que nous devons prendre.

Le sénateur Black : C'est très utile. Merci.

Le sénateur Mitchell : Merci, monsieur Sloan, de votre service pour le pays, et mes meilleurs vœux pour votre retraite.

Merci, madame Gelfand, de ce témoignage. Vous avez fait un exposé l'autre jour à notre groupe, et c'était excellent, tout comme celui-ci.

Ma première question est, en réalité, une demande de confirmation. Il me semble que la prémisse sur laquelle repose toute cette analyse, c'est que vous croyez fermement dans la science des changements climatiques et que ce sont les activités humaines qui causent les émissions à l'origine des changements climatiques.

Mme Gelfand : Vous me posez la question?

Le sénateur Mitchell : Oui.

Mme Gelfand : Je crois que, d'après les données scientifiques et le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, cela correspond clairement au consensus scientifique.

Le sénateur Mitchell : Dans le cadre de votre audit, avez-vous eu l'occasion d'examiner l'évaluation réalisée par RNCan en ce qui concerne les effets cumulatifs actuels des changements climatiques sur le Canada?

Mme Gelfand : RNCan a publié un rapport que nous avons examiné dans le cadre de notre audit. Je crois que cela en faisait partie. En effet, RNCan a publié tout récemment un rapport sur les effets sur le Canada et, oui, nous avons inclus une partie de cette information au début de notre chapitre.

Le sénateur Mitchell : Alors, vous souscrivez également aux conclusions de ce rapport.

Vous avez dit une chose qui m'a frappé relativement aux préoccupations concernant la participation du public et ses répercussions générales. Voici ma théorie : une des raisons pour lesquelles 5 000 personnes font la queue pour participer à l'examen d'un projet, ce qui alourdit le processus, c'est que les gens qui veulent parler en public de politiques et de questions en matière d'environnement n'ont pas de tribune pour s'exprimer. C'est à peine si on peut en parler dans les assemblées législatives. Par conséquent, ces gens se tournent vers le seul processus public où ils ont l'impression de pouvoir se faire entendre, à savoir le processus d'examen d'un projet, qui n'est d'ailleurs pas du tout conçu à cette fin. C'est là que les choses s'enlisent, et ces gens n'ont pas l'occasion de parler de politiques publiques sur l'environnement de façon satisfaisante, au même titre d'autres Canadiens.

Vous avez observé ce problème surtout chez les Autochtones, mais avez-vous tenu compte d'une éventuelle participation du public dans le cadre, par exemple, d'une commission royale ou d'un processus de table ronde partout au pays?

Mme Gelfand : Je comprends les arguments que vous faites valoir quant à la raison pour laquelle il y a tant de personnes qui participent au processus, et c'est un raisonnement fort probable.

Nous n'avons pas examiné la question de la participation du public, et nous ne prévoyons pas le faire à l'avenir. Toutefois, nous avons un plan. Je crois que nous pouvons déclarer publiquement qu'en prévision de la prochaine série des audits, nous envisageons d'examiner le rôle de l'Office national de l'énergie pour la surveillance générale du secteur des pipelines. C'est un aspect que nous comptons examiner et qui est manifestement lié à tout le secteur pétrolier et gazier, au marché de l'énergie et à la question de la participation du public.

En tout cas, je trouve que c'est une très bonne idée à prendre en considération. Nous élaborons actuellement notre plan quinquennal, dans lequel nous répondons à vos observations et à vos suggestions. J'en prends donc bonne note, parce que c'est quelque chose que nous pourrions examiner.

Le sénateur Mitchell : Monsieur le président, en gros, Mme Gelfand semble dire : « Sénateur Mitchell, c'est une excellente théorie. » Alors, nous sommes d'accord là-dessus. Merci.

J'ai une autre question à vous poser en ce qui concerne le processus de l'AEMERA et le travail en vase clos — et c'est une bonne idée, car cela permettra d'abattre les cloisons — pour ce qui est d'évaluer la qualité de l'air. Évaluera-t- on également les émissions de gaz à effet de serre?

Mme Gelfand : D'après ce que je crois comprendre, le programme conjoint de surveillance des sables bitumineux n'évaluera pas les émissions de gaz à effet de serre.

Le sénateur Mitchell : Cette omission ne vous paraît-elle pas un peu étrange?

Mme Gelfand : C'est l'avis de nombreux intervenants. En fait, les installations utilisent d'autres mécanismes pour déclarer les émissions de gaz à effet de serre, mais certains intervenants ont dit précisément la même chose que vous.

Le sénateur Patterson : J'aimerais souhaiter la bienvenue à Mme Gelfand et à ses collègues. Je tiens d'abord à dire que le ton de ce rapport me plaît. Quand on critique les gouvernements et les organismes, il est toujours bon d'indiquer clairement ce qu'ils ont accompli. Je crois que c'est ce que vous avez fait, et nous vous en sommes sûrement reconnaissants.

J'aimerais parler du chapitre sur la navigation maritime dans l'Arctique. Vous mentionnez que 350 voyages maritimes ont eu lieu en 2013 dans la région, ce qui a augmenté au cours des quelque 20 dernières années. Vous indiquez également que, dans son rapport d'évaluation du transport maritime, le Conseil de l'Arctique a fait valoir que, contrairement au mythe populaire, il est peu probable que le passage du Nord-Ouest soit régulièrement emprunté pour traverser l'Arctique en raison de la complexité de l'archipel, de la faible profondeur des eaux et, comme vous le dites ailleurs, de l'absence de cartes maritimes adéquates, des coûts d'assurance, et cetera.

Quand vous dites qu'il y a eu 350 voyages maritimes, pouvez-vous les catégoriser et nous dire combien il y avait de bateaux de pêche, de bateaux de recherche, de bateaux de plaisance et de chalands de charge?

Mme Gelfand : C'est une question vraiment détaillée. Je vais demander à mon personnel s'il peut faire une ventilation par catégories.

Avons-nous classé ces 350 bateaux en catégories?

Mme Leach : Nous avons l'information, mais pas dans ce chapitre. Nous pourrions vous l'obtenir. C'est quelque chose comme...

Mme Gelfand : Nous n'avons pas l'information ici, mais nous l'avons au bureau.

Mme Leach : Je cherche la partie où nous en dressons la liste.

Mme Gelfand : Il vient d'en lire un extrait.

Le sénateur Patterson : Il y a un tableau au chapitre 3.

Le président : Vous devriez peut-être chercher l'information et continuer vos questions. Vous êtes en train d'utiliser du temps précieux.

Mme Leach : Je m'excuse, c'est au paragraphe 3.3. L'augmentation est due aux bateaux de pêche, ainsi qu'aux remorqueurs, aux embarcations de plaisance; c'est de cet ordre. Mais pour vous donner une ventilation exacte, nous devrons vous répondre ultérieurement.

Mme Gelfand : Nous pourrons vous envoyer l'information plus tard.

Le sénateur Patterson : Il est également écrit dans le rapport que les secteurs à risque élevé de l'Arctique ne font pas l'objet de levés hydrographiques et cartographiques adéquats, et que la capacité à cet égard est limitée. Comment avez- vous défini ce qu'est un secteur à risque élevé? Le ministère des Pêches et des Océans vous a-t-il donné des raisons au manque de levés et de cartes dans les secteurs à risque élevé?

Mme Gelfand : Un secteur à risque élevé serait le plus probablement situé près d'une communauté. Il y a donc quelques communautés, des grandes comme des plus petites, pour lesquelles les cartes ne sont pas complètes depuis un certain temps ou ne sont pas bonnes.

L'insuffisance des levés s'explique par le fait que le Service hydrographique du Canada n'a pas de navires désignés à cette fin. Il utilise essentiellement les navires de la Garde côtière. Lorsqu'un navire de la Garde côtière doit se rendre dans un secteur, il l'utilise pour faire des levés. Comme ce service ne peut pas avoir sa propre flotte, il est difficile pour lui d'effectuer des levés hydrographiques de façon plus structurée. Il doit être opportuniste, si je puis m'exprimer ainsi.

Le sénateur Patterson : Pour en revenir au trafic maritime, vous présentez des prévisions selon lesquelles il pourrait y avoir 300 nouveaux voyages par année d'ici 2020 en raison des projets miniers dans l'Est de l'Arctique. Connaissez- vous le nom de ces projets?

Mme Gelfand : Je pense que c'est pour l'une des mines. Ces voyages seraient attribuables à une nouvelle mine.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : C'est un plaisir de vous recevoir aujourd'hui. J'ai quelques questions à vous poser. Vous dites que le ministère de l'Environnement se questionne sur le rôle qu'il jouera après mars 2015. J'ai travaillé 15 ans au ministère de l'Environnement du Québec, et nous ne nous sommes jamais questionnés sur notre rôle. On a une loi et on l'applique.

Est-ce que, parce que la gestion des sables bitumineux sur le plan environnemental a un régime particulier — un peu comme les papetières, les mines et la gestion des eaux usées des municipalités —, c'est un régime qui fonctionne un peu en silo? Pourquoi le ministère s'inquiète-t-il de son rôle après mars 2015?

Mme Gelfand : Les parties prenantes nous ont fait part du fait que la collaboration d'Environnement Canada avec le gouvernement de l'Alberta allait prendre fin au mois de mars 2015, et que c'était pour elles une inquiétude. Elles nous ont demandé si Environnement Canada allait continuer. Lorsqu'on a posé la question à Environnement Canada, la réponse n'était pas claire.

L'une des raisons était que, dans un sens, il doit travailler avec le gouvernement de l'Alberta. C'est vraiment le rôle du gouvernement de l'Alberta de faire ce travail. Dans un sens, l'Alberta doit inviter Environnement Canada à continuer ce travail. Les deux doivent s'entendre sur le fait qu'Environnement Canada continue à gérer des projets et à faire partie du programme de surveillance.

Le sénateur Boisvenu : Est-ce que c'est un peu le même modèle que les papetières? Parce que, pour les papetières, on a deux régimes : un régime fédéral en raison des eaux de navigation, et un régime provincial en raison de la pollution de l'air et des sols, de la gestion des sols usés, des boues, et cetera. Est-ce qu'on est à peu près dans le même modèle et qu'il y a une double responsabilité fédérale-provinciale dans ce domaine?

Mme Gelfand : Il est vrai que les deux ordres de gouvernement ont élaboré des règlements sur la gestion des sables bitumineux; c'est clair. Cependant, en termes de programme de surveillance, le programme de surveillance des sables bitumineux est un programme, en un sens, extraordinaire. Cinquante millions de dollars vont être dépensés par année pour en examiner les effets cumulatifs. Ce genre de programme, à ce niveau-là, n'a été mis en œuvre dans le reste du Canada pour aucun autre gros projet.

En ce qui concerne le rôle d'Environnement Canada, les parties prenantes décident si elles veulent qu'Environnement Canada continue à collaborer au projet. Or, lorsque nous avons posé la question au ministère, il n'était pas clair s'il allait continuer ou non. Donc, nous avons fait une recommandation pour qu'Environnement Canada clarifie son rôle. Maintenant, nous constatons que l'Alberta a indiqué que, effectivement, elle voulait encore travailler avec Environnement Canada.

Le sénateur Boisvenu : Vous parlez de la surveillance de l'exploitation des sables bitumineux. On parle d'un rôle assez complexe entre les gouvernements provincial et fédéral. Est-ce que vous avez évalué, dans le cadre de votre vérification, le rôle ou la performance de la province?

Mme Gelfand : Nous ne l'avons pas fait, parce que ce n'est pas notre rôle d'auditer un autre ordre de gouvernement. Par contre, le vérificateur général de l'Alberta a produit un rapport sur le rôle de l'Alberta, à peu près en même temps que le nôtre. Il y a donc un autre rapport sur la façon dont le gouvernement de l'Alberta a géré la portion dont il était responsable, et qui a été présenté par le vérificateur général de l'Alberta.

Le sénateur Boisvenu : Lorsque vous examinez, globalement, l'intervention du gouvernement fédéral et celle du gouvernement provincial, et que vous observez la complexité du dossier des sables bitumineux, c'est tout de même récent. Cela ne s'apparente pas à l'industrie des papetières, qui date d'une centaine d'années. Comme vérificateur général, et ayant un point de vue externe, avez-vous l'impression que la gestion de toute cette complexité, en ce qui a trait à l'environnement, commence à être prise en main, et qu'on commence à exercer un contrôle de la situation?

Mme Gelfand : Je ne pense pas être en mesure de vous donner un avis à ce sujet, car notre examen s'est limité au programme de surveillance des effets environnementaux.

Le sénateur Boisvenu : Et non aux impacts.

Mme Gelfand : C'est ça; nous n'avons pas examiné la gestion ni la réglementation. Nous avons examiné la surveillance des effets environnementaux, le programme spécifique consacré à la surveillance.

[Traduction]

La sénatrice Seidman : Je vous remercie de votre exposé et je vous souhaite bonne chance dans votre retraite, monsieur Sloan.

Madame Gelfand, vous mentionnez assez souvent dans votre rapport que la clé pour atténuer les délais qui empêche les parties touchées d'effectuer une planification efficace, c'est d'assurer des relations bilatérales et tripartites plus étroites entre le gouvernement fédéral, les provinces et les territoires et l'industrie. Pouvez-vous nous expliquer quels sont les mécanismes fédéraux, provinciaux, territoriaux en place et peut-être nous dire ce que vous proposeriez pour les améliorer? Valent-elles la peine d'être améliorées ou devrait-on tout bonnement les remplacer?

Mme Gelfand : Puis-je vous demander à quel chapitre vous faites référence?

La sénatrice Seidman : Au chapitre 1 : L'atténuation des changements climatiques.

Mme Gelfand : Lors de notre vérification de 2012, nous nous sommes rendu compte qu'il y avait ce que j'appellerais des « comités de coordination » entre le gouvernement fédéral et les provinces et territoires. Deux ans plus tard, lorsque nous y sommes retournés en 2014, nous avons constaté que ces comités de coordination ne se réunissaient pas ou n'existaient plus, de sorte qu'il n'y avait plus de coordination générale. Nous avons observé qu'il y avait en fait des relations bilatérales : les fonctionnaires fédéraux travaillent avec chacune des provinces. Il arrive que les provinces collaborent entre elles, mais pas avec le gouvernement fédéral. Bref, il n'y a pas de coordination globale, puisque les rapports se limitent à des discussions bilatérales entre le gouvernement fédéral et les provinces.

Est-ce que cela répond à votre question?

La sénatrice Seidman : Il n'y a donc pas de mécanisme en place, d'après ce que vous dites.

Mme Gelfand : Il y en avait, mais ils n'existent plus.

La sénatrice Seidman : Par quoi devrait-on les remplacer? Avez-vous fait des propositions? Quelles seraient-elles?

Mme Gelfand : Je ne m'en rappelle pas de façon aussi détaillée. J'ai entendu dire, sans qu'il y ait eu de vérification — je ne peux donc pas vous le confirmer avec certitude — que les provinces se réunissaient chaque semaine pour se parler. C'est ce que j'ai compris, mais ce n'est pas vérifiable. Je ne l'ai pas vérifié.

Avons-nous fait une recommandation? J'ai oublié. Je m'excuse.

Mme Leach : J'aimerais dire que nous parlons un peu des accords d'équivalence. C'est l'une des raisons pour lesquelles Environnement Canada nous dit qu'il a adopté une approche bilatérale plutôt que multilatérale, puisqu'il essaie de négocier des accords d'équivalence, par exemple, avec la Saskatchewan et la Nouvelle-Écosse, sous le régime de la réglementation sur la production d'électricité au charbon.

Pour ce qui est de nos autres recommandations, je souligne que lors de nos travaux d'audit, nous avons communiqué avec les provinces pour les sonder. Elles étaient elles aussi d'avis qu'une plus grande coordination serait bénéfique pour atteindre les objectifs nationaux comme pour permettre aux provinces de progresser.

Comme Julie l'a indiqué, il y a des rencontres entre les provinces. Le CCME a également fait des déclarations peu après notre audit. Il semble y avoir des discussions à l'échelle provinciale.

Le sénateur Wallace : Madame Gelfand, dans vos observations sur les émissions de gaz à effet de serre et l'objectif du gouvernement d'atteindre la cible de Copenhague d'ici 2020, vous exprimez des réserves sur la capacité du gouvernement d'atteindre sa cible. Vous dites conclure que la décision du gouvernement d'adopter des règlements secteur par secteur était peu susceptible de faire réduire suffisamment les émissions pour nous permettre d'atteindre cette cible.

Comment pouvez-vous arriver à cette conclusion avant même d'avoir vu les règlements mis en place et l'ordre dans lequel les industries et les secteurs vont être visés? Comment pouvez-vous, dès 2014, tirer cette conclusion?

Mme Gelfand : Nous pouvons tirer cette conclusion notamment en raison du temps qu'il faudra, une fois un règlement en place, pour qu'il s'applique à l'industrie et qu'il commence à faire réduire véritablement les émissions de gaz à effet de serre. Par exemple, si nous réglementions une industrie quelconque aujourd'hui, il se passerait quelques années avant que les sociétés soient vraiment tenues de s'y conformer. On leur laisse une période d'adaptation pour se préparer à sa mise en œuvre. Même si l'on adoptait un règlement aujourd'hui, il pourrait tout de même falloir trois ou quatre ans avant qu'on ne puisse vraiment forcer les sociétés à réduire leurs émissions. C'est ce qui arrive généralement pour ce type de règlement. Nous en sommes à la fin de 2014; supposons donc que ce ne sera pas avant 2017-2018. Il ne restera alors que quelques années pour faire diminuer les émissions.

Nous nous fondons sur ce que nous savons sur le temps qu'il faut pour qu'un règlement entre en vigueur, pour qu'il franchisse toutes les étapes du système réglementaire, que vous connaissez très bien, puis sur les périodes habituellement concédées aux entreprises pour se préparer et faire les investissements nécessaires. Comme elles vont devoir effectuer des investissements substantiels, on ne dit habituellement pas : « Nous allons commencer à vous réglementer demain et vous faites mieux d'être prêts dès demain. » Ce n'est normalement pas ainsi que les choses se passent.

C'est essentiellement ce qui nous permet de tirer cette conclusion, même aujourd'hui, et de déterminer qu'il est peu probable que nous atteignions nos cibles.

Le sénateur Wallace : Quand vous en avez avisé le gouvernement, que vous a-t-il répondu? Le gouvernement est toujours déterminé à atteindre cette cible d'ici 2020; n'a-t-il donc pas de réponse à cela? Convient-il que cette cible ne peut pas être atteinte?

Mme Gelfand : Il est d'accord avec nos recommandations et avec tout ce que nous avons écrit dans notre rapport. Publiquement, le gouvernement continue de dire qu'il va atteindre son objectif, et je n'ai pas dit qu'il ne l'atteindra pas. J'ai dit qu'il était très improbable qu'il l'atteigne, d'après les renseignements que le ministère nous a fournis.

Nous gardons toujours espoir.

Le sénateur Wallace : Tout dépendra du délai accordé à chaque secteur pour se conformer, n'est-ce pas? Si les délais sont assez serrés, ils pourraient devoir se conformer.

Mme Gelfand : C'est possible. Je ne dis pas que c'est impossible. C'est très improbable.

Le sénateur Wallace : Dans vos observations sur la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale et l'atteinte des objectifs qu'elle prévoit, vous exprimez des inquiétudes concernant les motifs justifiant la désignation des projets devant faire l'objet d'une évaluation environnementale parce qu'ils manqueraient de clarté, et vous laissez entendre que des projets importants pourraient en fait ne pas être évalués.

Je suis vraiment étonné de le lire. D'après ce que je comprends, la LCEE prévoit des critères et des conditions pour que cette norme soit respectée et indique quand il faut réaliser des évaluations. Je ne peux pas concevoir qu'un projet important puisse y échapper. C'est toujours l'impression que j'ai eue dans mes rapports avec le ministère. N'est-ce pas la vérité?

Mme Gelfand : Il y a l'ancienne LCEE et la nouvelle LCEE. Selon l'ancienne LCEE, dès qu'il y avait un critère déclencheur au fédéral, par exemple dès qu'il fallait un permis ou du financement ou qu'un projet avait lieu sur des terres fédérales, il fallait suivre le processus d'évaluation environnementale. Habituellement, cela s'appliquait à beaucoup d'initiatives et à la plupart des grands projets.

La nouvelle LCEE contient ce qu'on appelle une « liste de projets », qui est une liste détaillée. Il faut qu'une mine métallifère augmente sa capacité de plus de 50 p. 100; pas de 40, pas de 30, mais de 50 p. 100. On peut se demander pourquoi 50 p. 100. Quelle est la logique derrière ce chiffre? Selon quelle logique les projets pétroliers et gaziers in situ, par exemple, ne devront pas faire l'objet d'une évaluation à l'avenir?

Les grands parcs éoliens ou les projets de dragage ne feront pas l'objet d'une évaluation à l'avenir parce qu'ils ne figurent pas à la liste des projets. Nous essayons de montrer que les motifs expliquant pourquoi des projets figurant sur la liste manquent de clarté et de transparence. Ce n'est pas clair, et nous recommandons qu'à l'avenir, lorsqu'une nouvelle liste de projets sera élaborée, on demande à l'agence d'expliquer clairement et en toute transparence pourquoi certains projets y figurent et d'autres pas.

Ensuite, même si un projet figure sur la liste, l'agence a toujours le pouvoir de décider si oui ou non, on fera l'objet d'une évaluation environnementale. Encore une fois, la manière dont les décisions se prennent à cet égard n'est pas claire.

Nous recommandons une plus grande clarté à l'avenir pour que nous puissions tous comprendre pourquoi certains projets figurent sur la liste et d'autres pas.

Le sénateur Wallace : Laissez-vous entendre qu'il n'y aurait aucune condition environnementale à respecter pour les projets qui ne figurent pas sur la liste?

Mme Gelfand : Je laisse entendre que ces projets ne feront pas l'objet d'une évaluation environnementale fédérale.

Le sénateur Wallace : Cela ne signifie pas qu'il n'y aura pas de critères environnementaux s'appliquant à leurs activités.

Mme Gelfand : Il pourrait y avoir des évaluations environnementales provinciales ou d'autres règlements.

L'évaluation environnementale s'effectue avant le projet. Quand on regarde les permis d'activités de la plupart des entreprises, 80 p. 100 des dispositions qui s'y trouvent comprennent des critères environnementaux auxquels ces entreprises doivent se conformer; on y trouve aussi de nombreuses dispositions sur la santé et la sécurité.

Le président : Au sujet des réductions d'émissions de gaz à effet de serre, je présume, d'après vos propos, que vous n'avez utilisé que les données fédérales. Avez-vous communiqué avec chaque province pour savoir ce qu'elles font et intégré cela dans le processus, pour que je comprenne bien?

Mme Gelfand : Oui, nous l'avons fait. Nous avons un graphique qui montre assez clairement que si aucune mesure n'est prise — et ce n'est qu'une estimation —, nous produirions environ 862 mégatonnes. En tenant compte de toutes les mesures fédérales et provinciales, on arrive à environ 734. La cible est de 612. En fait, nous recommandons à Environnement Canada, lorsqu'il présente des données, de montrer clairement quelle part des réductions vient de l'effort fédéral et quelle part découle de l'effort provincial.

Dans l'ensemble, quand on passe de 862 à environ 730, environ du tiers des réductions viennent de l'ensemble des mesures fédérales, comme les mesures réglementaires et toutes les autres démarches que le gouvernement fédéral prend pour favoriser l'efficacité énergétique et de tout ce qu'il fait pour contribuer à réduire les émissions de gaz à effet de serre. Les deux autres tiers viennent des provinces, des territoires et des autres.

Le président : Quand vous avez fait votre audit à Environnement Canada pour déterminer comment le ministère évalue les réductions et comment les choses devraient se passer au fil du temps, avez-vous vérifié comment chaque province arrive à ces chiffres ou avez-vous simplement demandé aux provinces si vous pouviez voir leurs diagrammes pour pouvoir les ajouter aux renseignements que vous avez vérifiés à l'échelon fédéral?

Mme Gelfand : Il n'est pas de notre mandat de vérifier ce que font les provinces.

Kim, voulez-vous ajouter quelque chose? C'est vous qui étiez responsable des détails.

Mme Leach : Oui. C'est Environnement Canada qui a compilé les données dans les Tendances en matière d'émissions 2013. C'est le ministère qui a réuni les données des provinces.

Le président : Je m'interroge aussi sur la consultation réelle des Autochtones. Je ne sais plus quels mots vous avez utilisés, mais vous aviez tendance à dire que ces consultations n'étaient pas suffisantes ou qu'elles ne satisfaisaient pas certaines personnes. Pouvez-vous me dire ce qui pourrait satisfaire tout le monde? Je pose la question à la personne qui a été ministre de l'Énergie en Colombie-Britannique pendant huit ans et qui a beaucoup d'expérience dans le domaine des consultations autochtones. C'est facile à dire quand on entend certains affirmer que le gouvernement ne leur a pas parlé. Je l'entends aussi de groupes non autochtones. Sur quelle analyse vous fondez-vous pour affirmer que le ministère n'a pas effectué assez de consultations?

Mme Gelfand : À la lumière de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, nous avons examiné les méthodes de participation publique qu'utilise l'Office national de l'énergie, la Commission canadienne de sûreté nucléaire et l'Agence canadienne d'évaluation environnementale pour favoriser la participation du public.

Comme vous le savez sans doute, la nouvelle LCEE prescrit des délais beaucoup plus courts. Bruce peut nous en dire davantage, mais nous avons sondé quantité de personnes, et il pourra vous dire exactement combien. Dans l'ensemble, il n'y a pas que les Autochtones qui ont exprimé de l'insatisfaction, mais beaucoup d'autres. Nous recommandons aux organismes de revoir leur façon de faire pour que le public ait vraiment l'occasion d'être consulté. Nous leur avons pour ainsi dire laissé le soin d'y veiller.

Je vais céder la parole à Bruce, car c'est lui qui était responsable de cet audit.

Bruce Sloan, directeur principal, Bureau du vérificateur général du Canada : Nous avons travaillé de diverses façons. Nous avons parlé avec les parties prenantes : les groupes autochtones, les groupes sans but lucratif, les promoteurs de projets et les associations professionnelles. Les commentaires sur la capacité de réagir sont revenus assez fréquemment, particulièrement à l'intérieur du court délai. Les groupes autochtones ont soulevé des points au sujet des compétences techniques, des ressources financières, de délais très courts et du nombre d'évaluations environnementales, au sujet desquelles on peut leur demander de prendre position n'importe quand.

Nous avons également interrogé toute personne ou organisation ayant participé à une évaluation environnementale de l'Office national de l'énergie sous le régime de la LCEE. Cela représente probablement environ 6 000 ou 7 000 participants, et nous avons essayé d'analyser ces données pour comprendre quelles préoccupations en ressortaient. C'est une question de capacité, laquelle est encore plus compromise par les courts délais.

Le président : Lorsque vous parlez de « capacité », vous pensez à un échantillonnage vraiment représentatif de la population. Est-ce bien ce que vous voulez dire?

M. Sloan : Par capacité, j'entends les ressources financières nécessaires pour embaucher...

Le président : Je sais ce qu'est la capacité. Vous parlez ici d'un échantillon représentant l'ensemble de la population, tant autochtone que non autochtone.

M. Sloan : Les Autochtones, les non-Autochtones ainsi que tous les groupes et particuliers qui ont participé à l'un des processus d'évaluation environnementale de l'office de l'énergie ou de l'agence.

Le président : Qu'est-ce qui serait suffisant à vos yeux?

Mme Gelfand : Comme je ne peux pas mener de vérification à ce sujet, il m'est impossible de vous répondre.

Le président : Lorsque nous disons que ce n'est pas suffisant, c'est à la lumière des discussions que nous avons pu avoir avec de nombreux intéressés, et pas seulement des Autochtones. Pas plus tard que la semaine dernière, une grande organisation, l'Association canadienne des producteurs pétroliers, nous disait ne pas avoir été suffisamment consultée. Nous pourrions en débattre indéfiniment, mais il faut surtout chercher à savoir ce qui a été effectivement réalisé. C'est une simple suggestion de ma part, car je sais que dans bien des cas où l'effort de consultation a été tout à fait louable, il y a de ces gens qui soutiennent ne pas avoir été suffisamment consultés. Quoi qu'il en soit, j'en resterai là pour l'instant.

[Français]

Le sénateur Massicotte : Je reviens aux commentaires soulevés plus tôt. Selon moi, le dossier des changements climatiques est probablement le plus important de notre génération. Nos petits-enfants vont sans doute nous demander ce qu'on a fait avec ce problème. La situation est grave. De toute évidence, on n'atteint pas nos objectifs.

Lorsque vous abordez cette question avec les fonctionnaires responsables de ce dossier, sentez-vous qu'ils sont empressés de corriger la situation? Sont-ils conscients de la sévérité des circonstances entourant les changements climatiques? Certaines personnes pourraient dire que le Canada est petit, que c'est 5 p. 100 de la population, que l'on génère seulement 2 p. 100 des émissions de gaz à effet de serre. Quelle est la réaction des gens? Est-ce qu'il y a une appréciation de la gravité des circonstances?

Mme Gelfand : J'ai de la difficulté à répondre à votre question.

Mme Leach, avez-vous une réponse à cette question? C'est vous, surtout, qui avez discuté avec le ministère.

[Traduction]

Mme Leach : C'est la troisième vérification que j'effectue au sujet des changements climatiques, la première remontant à 2011. Les gens qui s'occupent de ces dossiers au sein du ministère et qui ont pris part à des initiatives comme « Prendre le virage » et même à des plans d'action encore plus récents sont des professionnels extrêmement dévoués qui comprennent très bien les enjeux en cause. Dans bien des cas, ce sont des experts internationaux dans leur domaine. C'est ce que j'ai sans cesse pu constater lors des trois ou quatre vérifications que j'ai effectuées à ce sujet, mais ces gens-là doivent travailler en respectant les plans qui ont été établis.

Le sénateur Massicotte : Merci.

Le sénateur Mitchell : Si rien n'était fait, nous en serions à 862 mégatonnes. Avec les mesures prévues, compte tenu de ce que nous savons actuellement, nous devrions passer à 734 mégatonnes. L'objectif est de 612. Nous avions donc parlé d'une réduction de 250 mégatonnes, et il semblerait qu'elle sera de 122. Nous sommes sur la bonne voie et vous avez bon espoir que nous parviendrons à réaliser à peine 50 p. 100 de ce que nous nous étions engagés à faire?

Mme Gelfand : C'est exact.

Le sénateur Mitchell : Parlons de la qualité des données provinciales aux fins de cette évaluation. Il ne serait pas déraisonnable de penser que les provinces ne vont pas sous-estimer leurs réductions d'émissions en établissant leurs projections à cet égard. Elles auraient plutôt tendance à les surestimer. Ne devrait-on pas s'attendre à ce qu'elles cherchent à mieux paraître?

Mme Gelfand : Je ne peux pas me permettre de commentaires à ce sujet. Comme Kim l'indiquait, nos renseignements nous proviennent des données nationales que le Canada fournit à la communauté internationale.

Le sénateur Mitchell : Dans votre rapport, il est question du programme de financement accéléré, un engagement pris dans l'Accord de Copenhague auquel le Canada a adhéré. Il semblerait que les sommes prévues aient été déboursées, mais qu'elles n'aient pas encore été reçues par les bénéficiaires eux-mêmes. Qu'est-ce que cela signifie et pourquoi en est-il ainsi?

Mme Gelfand : Nous avons versé 1,2 milliard de dollars dans le cadre de ce programme. La plus grande partie de ces fonds a été dirigée vers des banques multilatérales comme la Société financière internationale et la Banque interaméricaine de développement. L'argent est toujours dans ces comptes bancaires et n'a pas encore été versé aux destinataires. Ces fonds visent à aider les pays en développement à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. Comme ces sommes ne sont pas encore accessibles à ceux qui réalisent les projets, il faut en conclure que les pays en question n'ont pas encore utilisé ces fonds pour réduire leurs émissions.

Le président : Voilà qui termine les questions que nous avions pour nos témoins. On a déjà répondu à celles des autres sénateurs encore sur ma liste.

Merci beaucoup, madame Gelfand, pour votre comparution et votre exposé. Tout cela était fort intéressant.

Comme mon vice-président souhaite faire un dernier commentaire, je vais lui laisser la parole.

Le sénateur Massicotte : Le sénateur Black ne se rend pas compte que nous le considérons comme « M. Sable bitumineux ». J'espère qu'il a pris bonne note des déficiences qui ont été relevées et qu'il nous reviendra très bientôt avec des solutions à appliquer.

Le sénateur Black : Merci beaucoup. J'en ai pris bonne note.

Le président : Merci encore à la commissaire et à ses collaborateurs. Nous vous sommes reconnaissants pour le temps que vous nous avez consacré.

(La séance est levée.)


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