Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles
Fascicule 26 - Témoignages du 31 mars 2015
OTTAWA, le mardi 31 mars 2015
Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd'hui, à 17 h 4, pour étudier le développement des énergies renouvelables et non renouvelables dans les trois territoires du Nord, y compris le stockage, la distribution, la transmission et la consommation d'énergie, de même que les technologies émergentes.
Le sénateur Richard Neufeld (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Je vous souhaite la bienvenue à cette séance du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles. Je m'appelle Richard Neufeld. Je représente la province de la Colombie- Britannique au Sénat et je préside ce comité.
J'aimerais souhaiter la bienvenue aux honorables sénateurs, à tous les membres du public présents dans la pièce, ainsi qu'aux téléspectateurs de tout le pays qui nous regardent à la télévision. Je rappelle à tous ceux qui suivent les délibérations de notre comité que nos séances sont ouvertes au public et qu'elles sont également accessibles par webdiffusion sur le site web sen.parl.gc.ca. Vous pouvez également trouver plus d'information sur l'horaire des témoins sur le site web, à la section « Comités du Sénat ».
Je vais maintenant demander aux sénateurs de se présenter, et je vais commencer en présentant le sénateur Paul Massicotte, du Québec.
Le sénateur Sibbeston : Nick Sibbeston, des Territoires du Nord-Ouest.
[Français]
La sénatrice Ringuette : Bonjour, je m'appelle Pierrette Ringuette, sénatrice du Nouveau-Brunswick.
[Traduction]
Le sénateur Patterson : Dennis Patterson, du Nunavut.
Le sénateur Black : Doug Black, de l'Alberta.
La sénatrice Seidman : Judith Seidman, de Montréal, au Québec.
Le président : J'aimerais également vous présenter notre personnel, à commencer par la greffière, qui se trouve à ma gauche, Mme Lynn Gordon, de même que nos deux analystes de la Bibliothèque du Parlement, Sam Banks et Mark LeBlanc, qui se trouvent à ma droite.
Le 4 mars 2014, le Sénat a autorisé notre comité à entreprendre une étude sur le développement des énergies renouvelables et non renouvelables dans les trois territoires du Nord, y compris le stockage, la distribution, la transmission et la consommation d'énergie, de même que les technologies émergentes.
Aujourd'hui, j'ai le plaisir d'accueillir, pour la première partie de la séance, un témoin qui comparaîtra par vidéoconférence à partir de Hay River, dans les Territoires du Nord-Ouest. Il s'agit de M. Emanuel DaRosa, président et chef de la direction de la Société d'énergie des Territoires du Nord-Ouest.
Monsieur DaRosa, je vous remercie de votre présence. Nous avons hâte d'entendre votre déclaration préliminaire. Nous passerons aux questions par la suite. La parole est à vous, monsieur.
Emanuel DaRosa, président et chef de la direction, Société d'énergie des Territoires du Nord-Ouest : Bonjour à tous. Je suis ingénieur électricien de profession. J'ai obtenu mon diplôme à l'Université Lakehead. J'ai par la suite fait une maîtrise en gestion des affaires à l'Université Tulane, en Louisiane. Je travaille dans le secteur énergétique depuis 24 ans. J'ai travaillé pour des organismes comme Hydro-Ontario — qui est devenu Hydro One —, Brookfield Renewable Power et Thunder Bay Hydro. Je suis à la Société d'énergie des Territoires du Nord-Ouest depuis maintenant quatre ans.
Je vais vous parler des certaines difficultés auxquelles fait face la Société d'énergie des Territoires du Nord-Ouest et des possibilités qui s'offrent à elle. Je vais commencer par vous parler de ses réseaux hydroélectriques.
Dans les Territoires du Nord-Ouest, 75 p. 100 de l'énergie est produite par hydroélectricité. La majorité de la population compte sur l'hydroélectricité. Nous avons deux réseaux hydroélectriques : un à Yellowknife et un autre dans la région de South Slave. Ces deux réseaux ne sont pas reliés ni entre eux, ni au réseau continental. Certains des points faibles de nos réseaux hydroélectriques sont liés aux coûts et au manque de fiabilité.
Bien qu'il s'agisse d'hydroélectricité, les coûts de l'énergie sont élevés en raison de l'absence d'économie d'échelle et de lien au réseau. Sans lien avec le reste du continent, les choses fonctionnent de façon organique. Ainsi, plutôt que d'avoir de grandes centrales reliées qui sont construites et qui fonctionnent de la façon dont le reste du continent prévoit les choses pour les réseaux d'électricité, dans le cas des nôtres, nous ajoutons quelques mégawatts selon les besoins.
Parce qu'elles ne sont pas connectées au reste du continent, les centrales hydroélectriques doivent déverser de 30 à 50 p. 100 de leur eau. En hiver, lorsque notre charge est à son niveau le plus élevé, notre capacité de production est plus faible. Durant l'été, lorsque notre charge est à son niveau le plus bas, nous avons un excédent d'eau et nous sommes forcés d'en déverser de grandes quantités.
Le manque de fiabilité est un autre point faible de nos réseaux étant donné qu'ils ne sont pas reliés au réseau national. S'il y a des pertes ou un problème dans l'une de nos centrales électriques, cela entraîne habituellement des pannes d'électricité.
En ce qui concerne les possibilités pour les systèmes hydroélectriques dans les Territoires du Nord-Ouest, de toute évidence, il y aurait notamment celle consistant à relier les deux réseaux hydroélectriques ainsi que les mines au continent, probablement à la Saskatchewan. Parmi les avantages qui en découleraient, il y aurait la prolongation de la vie de certaines de nos mines de diamant, de même que la réduction d'environ 100 millions de litres de diesel que consomment les mines annuellement. De plus, ce lien aurait pour effet de stabiliser le système électrique et d'en améliorer la fiabilité. Nous nous sommes penchés là-dessus, mais le coût total est de 1,2 milliard de dollars et nous aurions besoin d'une subvention publique de 400 millions de dollars pour que les taux restent au niveau actuel. En fin de compte, le projet a été mis de côté en raison des limites d'emprunt du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest.
Je devrais probablement parler un peu de certaines de ces limites, car elles nous compliquent la tâche pour la connexion de nouvelles charges, de nouvelles mines ou des projets qui sont autofinancés, simplement en raison du plafond de la dette du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest. Ce plafond limite en partie notre capacité d'emprunter, même pour des projets qui sont autofinancés.
Nous explorons la possibilité d'utiliser des batteries pour améliorer la fiabilité du réseau de Yellowknife. À l'heure actuelle, le nombre de pannes est environ quatre fois plus élevé à Yellowknife que dans le reste du pays en moyenne. Nous examinons les possibilités du côté des batteries. Les coûts sont d'environ 10 millions de dollars, ce qui constitue un problème concernant le plafond de la dette. Nous nous attendons à réduire de moitié, environ, le nombre de pannes dans la région de Yellowknife grâce aux batteries.
Je vais maintenant parler des systèmes thermiques des Territoires du Nord-Ouest. Tout d'abord, 25 p. 100 de l'énergie est produite à partir du diesel ou du gaz naturel liquéfié et dessert 21 petites collectivités réparties dans l'ensemble des Territoires du Nord-Ouest. Ces systèmes sont isolés et les centrales sont petites. Elles répondent aux besoins en électricité de chacune de ces collectivités, qui font face à certains problèmes. Le coût élevé de l'énergie en est évidemment un et il découle de l'isolement des collectivités et des coûts de construction, de fonctionnement et d'entretien élevés, de même que des coûts de carburant élevés. Il n'y a pas d'économie d'échelle.
Toutefois, je dois dire qu'en général, la fiabilité est bonne dans les petites collectivités et, en fait, meilleure par rapport à la moyenne nationale, étant donné qu'il y a redondance entre les centrales.
L'une des plus grandes possibilités pour les Territoires du Nord-Ouest, c'est vraiment l'énergie solaire, et c'est l'une des sources les plus faciles à exploiter. Les conditions solaires dans les Territoires du Nord-Ouest sont équivalentes à celles du reste du pays, en grande partie. Cela surprend beaucoup de gens, mais c'est le cas. Les défis que pose la production d'énergie solaire dans notre cas sont liés aux coûts élevés. En général, les coûts de construction sont de 30 à 60 p. 100 plus élevés chez nous que dans le Sud. De plus, nous sommes limités pour ce qui est de l'installation de la capacité pour l'énergie solaire : environ 20 p. 100 de la capacité de la collectivité, étant donné la nature intermittente de cette source d'énergie, qui peut entraîner des problèmes de stabilité. Si nous installons 20 p. 100 de la capacité, étant donné que le soleil ne brille pas tout le temps, cela veut dire qu'annuellement, environ 2,5 p. 100 de l'électricité produite serait de source solaire.
Un exemple de réussite, c'est Fort Simpson, que le sénateur Sibbeston doit très bien connaître. Nous y avons installé 10 p. 100 de la capacité pour ce qui est de l'énergie solaire. Elle produit environ 1,5 p. 100 de l'énergie électrique annuelle de la collectivité. Le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest a financé ce projet pour s'assurer que les taux subséquents équivaudraient à ceux qui s'appliquent pour le diesel, et une subvention était nécessaire à cette fin. Nous examinons les possibilités de stockage pour augmenter la capacité, qui passerait de 20 p. 100 de capacité installée à environ 300 p. 100; 30 p. 100 des besoins en électricité des collectivités seraient comblés par l'énergie solaire.
Je peux vous donner l'exemple de notre projet de Colville Lake, qui a été livré sur le site. Tout l'équipement se trouve sur le site et sera installé et mis en service plus tard ce printemps et pendant l'été. Dans ce cas particulier, 300 p. 100 de la charge moyenne des collectivités sera de source solaire. Le stockage de l'énergie est une partie importante de cette solution et nous prévoyons produire environ 30 p. 100 de l'électricité nécessaire pour répondre aux besoins annuels des collectivités au moyen de sources solaires. Cela nous permettra au moins de fermer la centrale diesel pendant la plus grande partie de l'été.
Le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest a dû financer une grande partie des coûts liés aux batteries et en moins grande partie les coûts liés à l'équipement solaire pour veiller à ce que ce projet n'entraîne pas des coûts plus élevés que la production d'énergie au diesel.
Les Territoires du Nord-Ouest offrent également la possibilité d'exploiter la biomasse, car c'est un combustible local. Cette solution semble prometteuse. Elle doit toutefois être appuyée par le gouvernement pour veiller à ce qu'elle offre des tarifs comparables à ceux déjà en place.
Nous cherchons des endroits venteux pour intégrer l'énergie éolienne dans nos systèmes. Encore une fois, certains endroits sont prometteurs, mais les Territoires du Nord-Ouest sont situés en grande partie à l'abri des Rocheuses; elles bloquent le vent dans de nombreux endroits.
Le gaz naturel liquide, ou le GNL, est une solution de rechange au diesel lorsqu'on a accès à une route ouverte à l'année. Il s'agit d'une option qui entraîne des coûts moins élevés, ainsi que certains avantages sur le plan environnemental.
Nous avons envisagé l'installation de très petites installations hydroélectriques dans les petites collectivités alimentées au diesel, mais leur petite taille représente un défi sur le plan économique et encore une fois, il faudra obtenir d'autres subventions du gouvernement, afin d'être en mesure d'offrir des taux comparables aux taux actuels.
Nous envisageons également le stockage, non seulement pour accroître l'utilisation des ressources renouvelables, mais également l'efficacité de nos moteurs alimentés au diesel et au gaz.
Comme je l'ai mentionné plus tôt, le financement des immobilisations est probablement l'un de nos plus grands défis. Tous ces projets nécessitent des dépenses d'immobilisations, et nous faisons face à des difficultés, car le gouvernement territorial doit respecter une limite d'emprunt qui nous touche également. Ainsi, en tant que société, nous devons non seulement fournir de nouvelles charges qui peuvent améliorer nos économies d'échelle, mais également tenter de trouver des façons d'être plus efficaces.
C'est ce qui conclut mon exposé. Je vous redonne la parole, monsieur le président, pour les questions.
Le président : Merci beaucoup, monsieur DaRosa. Nous allons maintenant passer aux questions. La parole est d'abord au vice-président, le sénateur Massicotte.
Le sénateur Massicotte : Je vous remercie beaucoup d'être ici. Je vous remercie également de votre exposé.
Aux fins d'éclaircissement, j'ai deux ou trois questions sur votre exposé. Comme vous l'avez dit à la toute fin, il faut financer les immobilisations. Avez-vous besoin d'augmenter vos limites d'endettement ou avez-vous besoin d'une subvention? Qu'entendez-vous lorsque vous parlez d'immobilisations?
M. DaRosa : Il faut vraiment augmenter notre limite d'endettement provincial, car le gouvernement territorial est prêt à investir dans des projets énergétiques qui profiteraient aux gens des Territoires du Nord-Ouest, mais en ce moment, il doit respecter sa limite d'endettement.
Le sénateur Massicotte : Si on augmentait cette limite, vous pourriez emprunter de l'argent pour certaines des solutions que vous avez proposées et leur efficacité est telle que vous pourriez rembourser cette dette avec intérêts, aux prix du marché, si le gouvernement augmentait la limite d'endettement?
M. DaRosa : Dans certains cas, nous avons des projets comme ceux-là en suspens. D'autres nécessitent des subventions du gouvernement, mais le gouvernement les a examinés et a conclu qu'il était prêt à entreprendre les travaux, car ils profiteraient aux habitants des territoires et de l'environnement. Toutefois, le gouvernement n'a pas la capacité d'endettement nécessaire pour investir dans la création d'avantages sociaux pour les habitants des Territoires du Nord-Ouest. Donc la réponse est oui et non. Dans certains cas, oui, nous pourrions rembourser la dette complètement. Dans les cas où une nouvelle mine est fondée et que ses dirigeants nous demandent de leur fournir des services — et nous avons deux de ces cas — nous pourrions rembourser la dette avec intérêts. Dans d'autres cas, le gouvernement aimerait cesser d'utiliser le diesel et se tourner vers d'autres technologies.
Le sénateur Massicotte : Je présume que votre point de référence est votre énergie produite au diesel. D'après ce que je comprends, c'est un point de référence. Dans une très large mesure, c'est ce que vous payez actuellement. Est-ce exact?
M. DaRosa : Oui, c'est le cas d'environ 25 p. 100 de la population, et si nous devions faire face à une augmentation de la charge dans la région de Yellowknife, nous devrions passer de l'hydroélectricité au diesel.
Le sénateur Massicotte : Malgré tous vos choix énergétiques, à l'exception du GNL, vous avez dit que dans chaque cas, il vous faudrait des subventions pour que les coûts soient comparables à ceux de l'énergie produite au diesel. Cela signifie que sans subvention, ces autres solutions vous coûteront plus cher que le diesel, à l'exception du GNL. Est-ce exact?
M. DaRosa : C'est exact. Le secteur hydroélectrique offre également un certain potentiel. Si la charge augmente, nous pouvons investir dans de nouvelles centrales hydroélectriques pour répondre à ces nouveaux besoins, mais en ce moment, notre capacité de développer l'hydroélectricité est limitée, car c'est un secteur qui demande des dépenses en immobilisations élevées au départ.
Le sénateur Massicotte : Même si le gouvernement vous offrait un prêt pour augmenter la capacité et son appui et qu'il vous disait d'aller sur le marché, d'obtenir un cautionnement et de recueillir les fonds nécessaires, ce ne serait pas suffisamment réalisable pour justifier cela et rembourser une dette par la production d'hydroélectricité?
M. DaRosa : Cette dette est soumise au plafond de la dette du gouvernement, et c'est un facteur limitatif en ce moment.
Le sénateur Massicotte : Mais si on augmentait le plafond de la dette, votre gouvernement pourrait-il considérer qu'il épargnera suffisamment d'argent grâce à ce projet pour être en mesure de la rembourser avec intérêt et d'éliminer les problèmes liés à la solvabilité ou à la rentabilité?
M. DaRosa : C'est vrai.
La sénatrice Ringuette : Je suis perplexe, car vous avez indiqué que dans votre système hydroélectrique, une centrale doit déverser de 30 à 50 p. 100 de sa capacité en eau au lieu d'envoyer les surplus d'énergie dans un réseau. Beaucoup d'eau sera gaspillée dans cette production d'énergie.
Cette année, j'ai lu qu'Hydro-Québec avait mis au point une capacité spéciale de stockage de l'hydroélectricité. Êtes- vous au courant?
M. DaRosa : Oui. La plupart de nos centrales sont au fil de l'eau. Notre capacité de retenir l'eau est limitée, et à un certain niveau, nous devons commencer à la déverser. Nous ne sommes pas reliés au réseau nord-américain. Dans les endroits où nous avons un système qui produit uniquement de l'hydroélectricité, par exemple à Yellowknife ou dans la région de South Slave, la charge demandée au système est à son niveau le plus bas pendant l'été et à son niveau le plus élevé pendant l'hiver; nous devons donc bâtir la capacité nécessaire pour fournir l'hydroélectricité pendant l'hiver, car c'est la période de pointe.
Les ressources en eau atteignent leur niveau le plus élevé pendant l'été. Si nous étions reliés au reste du continent, nous pourrions intégrer toute cette énergie en surplus au réseau continental, comme le font d'autres exploitants de centrales hydroélectriques, notamment Hydro-Québec. Nous n'avons pas cette option. Malheureusement, nos centrales sont forcées de déverser de 30 à 50 p. 100 des ressources en eau.
La sénatrice Ringuette : Pour revenir à ma question, comment fonctionne la capacité de stockage d'Hydro-Québec, et pourriez-vous utiliser cette technologie?
M. DaRosa : Parlez-vous de batteries, par exemple, pour le stockage ou parlez-vous de réservoirs d'eau pour stocker l'énergie potentielle?
La sénatrice Ringuette : Je crois qu'il s'agit d'un système de batteries assez unique au monde. La société a mis au point cette technologie. C'est ce que j'ai lu dans un article.
M. DaRosa : Je voulais seulement savoir si vous parliez de stockage à long terme ou à court terme. Les batteries peuvent être utilisées pour le stockage à court terme. Si vous tentez de stocker de l'énergie produite le jour jusqu'à la nuit, les batteries conviendront parfaitement. Si vous tentez de stocker une grande quantité d'eau pendant l'été jusqu'à l'hiver, les batteries ne fourniront pas la capacité de stockage dont vous aurez besoin. Il vous faudra une très grande capacité, et les coûts seront très élevés.
La sénatrice Ringuette : D'accord. Cela ressemblerait au système de production d'énergie solaire dont les surplus sont stockés dans des batteries.
M. DaRosa : Exactement. L'énergie solaire est l'exemple parfait. Lorsque la nuit tombe, on peut stocker assez d'énergie dans les batteries tous les jours et intégrer cette énergie au système pendant la nuit. Le défi, dans ce cas-là, c'est de stocker toute cette énergie pendant l'été afin qu'elle puisse être utilisée pendant l'hiver.
La sénatrice Ringuette : Quel est le réseau le plus près auquel vous pourriez vous relier?
M. DaRosa : Ce serait celui de la Saskatchewan. Uranium City est le réseau le plus près des Territoires du Nord- Ouest. Il y a environ 100 kilomètres entre Uranium City et la frontière des Territoire du Nord-Ouest, et ensuite 100 autres kilomètres jusqu'à la centrale de Taltson. Pour que le réseau soit efficace, il faudrait installer une ligne de transport d'énergie de plus grande capacité qui serait ensuite reliée au système de Yellowknife. Nous parlons donc de 1 000 kilomètres de lignes de transport d'énergie non seulement pour relier nos deux systèmes, mais également pour les relier à celui du Sud.
La sénatrice Ringuette : Avez-vous calculé les coûts de cette solution?
M. DaRosa : Oui. Nous avons envisagé cette solution pour les plus grosses charges des Territoire du Nord-Ouest, c'est-à-dire les quatre mines de diamants en exploitation situées dans les territoires. Le coût s'élevait à 1,2 milliard de dollars.
La sénatrice Ringuette : Il s'agirait toutefois d'une solution à long terme.
M. DaRosa : Oui.
La sénatrice Ringuette : Si vous étiez relié à ce réseau, vous pourriez vendre votre surplus durant l'été, et vous auriez accès à de l'énergie pendant l'hiver. Cela répond à votre besoin principal.
M. DaRosa : Oui, absolument. Tous nos barrages pourraient ainsi fonctionner de façon beaucoup plus efficace, ce qui ferait diminuer leurs coûts de fonctionnement. Cela faciliterait également l'exploitation d'une autre partie de notre potentiel hydroélectrique. En effet, l'ensemble des Territoire du Nord-Ouest dispose d'un potentiel électrique d'environ 10 000 mégawatts. C'est suffisamment d'énergie pour alimenter l'Alberta, mais malheureusement, nous n'avons pas de lignes de transport d'énergie de capacité assez élevée dans les Territoires du Nord-Ouest pour transporter cette quantité d'énergie.
La sénatrice Ringuette : Merci beaucoup.
Le sénateur Patterson : Je vous remercie de votre exposé. Vous avez mentionné deux mines en particulier qui aideraient à rembourser, avec intérêts, un prêt pour des installations hydroélectriques. Pourriez-vous nous parler des deux mines en question?
M. DaRosa : Eh bien, deux sociétés minières envisagent d'ouvrir des mines aux Territoires du Nord-Ouest. Il s'agit de la mine NICO, par la société Fortune Minerals. Nous avons également le projet de Tyhee. J'essaie de me souvenir de l'exploitant dans ce cas-là. Je suis désolé. Je ne m'en souviens plus.
Le sénateur Patterson : En ce qui concerne la question du plafond de la dette — et je sais que vous étudiez plusieurs projets, y compris le raccordement des réseaux de Taltson et de Snare —, au lieu de tenter d'augmenter le plafond de la dette, avez-vous pensé à demander au gouvernement d'approuver une garantie de prêt similaire à celle des projets du cours inférieur du fleuve Churchill à Terre-Neuve-et-Labrador? Cela contribuerait-il à rendre un tel projet possible sur le plan financier?
M. DaRosa : Il ne fait aucun doute qu'une garantie de prêt du gouvernement fédéral aiderait également à rembourser la dette. Une société canadienne se penche sur le projet de Tyhee.
Le sénateur Massicotte : J'aimerais ajouter quelque chose à cet égard. Vous avez dit que si la garantie du gouvernement fédéral était accordée, il fallait que ce soit acceptable. Vous avez ensuite ajouté quelque chose au sujet du remboursement de la dette. Afin de préciser la question, si le gouvernement fédéral accordait seulement une garantie sans parler du service de la dette et sans présumer le remboursement de la dette, les projets dont vous parlez sont-ils suffisamment réalisables pour permettre cela? Autrement dit, il ne s'agirait pas d'une subvention, mais seulement d'une garantie de prêt.
M. DaRosa : Dans certains cas, oui. Le projet de la ligne de transport d'énergie de plus grande capacité qui relierait les deux réseaux, qui intégrerait les mines et le Sud et qui les relierait au Sud, c'est-à-dire à la Saskatchewan, nécessiterait une contribution de l'ordre de 400 millions de dollars au projet de 1,2 milliard de dollars si on souhaitait conserver les taux actuels. En effet, le projet fournit essentiellement 800 millions de dollars de ses coûts d'immobilisation, mais il ne peut pas fournir les 400 millions de dollars restants. C'est le problème. Le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest a étudié certains des avantages sociaux engendrés par la prolongation de l'exploitation de ces mines et a sérieusement envisagé de financer ce projet simplement pour que sa population puisse profiter des avantages intangibles qu'il générerait, notamment en redevances, en revenus et en impôts.
Le sénateur Massicotte : Et quelle a été la conclusion?
M. DaRosa : Eh bien, en raison de son incapacité à financer cette dette, nous devons abandonner le projet pour l'instant et jusqu'à ce que le gouvernement ait la capacité d'emprunt nécessaire, et qu'il décide de fournir les 400 millions de dollars.
Le sénateur Black : Monsieur DaRosa, je vous remercie de votre exposé très informatif. Nous essayons de comprendre ce que nous pourrions faire pour vous aider, mais j'aimerais que vous répondiez à la question suivante.
Selon vous, le statu quo en vigueur aux Territoires du Nord-Ouest en ce qui concerne l'approvisionnement en énergie est-il satisfaisant?
M. DaRosa : Tout d'abord, le statu quo n'est pas satisfaisant en ce qui concerne les taux. En effet, des gens quittent les Territoires du Nord-Ouest en raison du coût de la vie élevé.
Le gouvernement s'est penché sur les coûts liés à l'énergie, et la production d'électricité est un élément très important, car elle entraîne des coûts de distribution élevés. Le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest étudie donc très attentivement la façon dont il pourrait diminuer les coûts liés à électricité et aux autres besoins énergétiques assumés par les habitants du territoire.
Le sénateur Black : Votre réponse, c'est que le statu quo actuel n'est pas acceptable?
M. DaRosa : Actuellement, les résidants du territoire paient leur électricité jusqu'à 10 fois plus cher que les résidants d'autres provinces dans le sud du Canada. Je dirais donc qu'il ne s'agit pas d'une situation durable. C'est pourquoi le gouvernement subventionne certains de ces coûts pour les faire diminuer, afin que les gens puissent les payer.
Le sénateur Black : Si c'est le cas — et j'accepte si vous dites que c'est le cas — quelles mesures précises suggéreriez- vous pour corriger le problème?
M. DaRosa : Tout d'abord, je commencerais par alléger la dette du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, afin que nous puissions entreprendre les projets initiaux qui sont autofinancés. Ensuite, nous pouvons aussi nous pencher sur certains des projets qui pourraient profiter d'un soutien minimal du gouvernement. C'est un point de départ.
La vision ou la solution ultime, selon moi, c'est un réseau de transport d'énergie, mais il faudra que le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, le gouvernement fédéral et les habitants des Territoires du Nord-Ouest et, vraiment, la population du Canada concertent leurs efforts pour appuyer un projet de cette envergure.
Je crois que les avantages ne se limiteraient pas à la région du Nord, mais qu'ils s'étendraient également à tout le Canada sur le plan environnemental, ainsi qu'en ce qui concerne le développement du Nord. En effet, un grand nombre d'habitants du sud du pays se rendent dans le Nord pour travailler. À mon avis, c'est une solution qui profite à tous les Canadiens.
Le sénateur Black : En ce qui concerne ces installations de transport d'énergie, la contribution à laquelle vous pensez serait plus élevée que celle que vous suggérez pour le Nord de la Saskatchewan sur 200 kilomètres jusqu'aux territoires. Est-ce exact? Votre solution s'appliquerait à plus grande échelle.
M. DaRosa : Oui, les 200 kilomètres relient seulement un système au Sud, c'est-à-dire le plus petit système de South Slave. Ce serait certainement un point de départ. Cela pourrait être la première étape, mais vraiment, Yellowknife et la région de North Slave ont une charge beaucoup plus grande. Elle est environ 10 fois plus élevée que celle de South Slave. Il est important de non seulement relier ce système, mais ensuite de le relier au système du Nord pour inclure Yellowknife.
Le sénateur Black : Veuillez nous donner une estimation des coûts engendrés par cette solution.
M. DaRosa : Il coûtera probablement 200 millions de dollars seulement pour intégrer le système de South Slave. Mais il faut aussi dépenser de 750 à 800 millions de dollars pour relier le système de North Slave à celui de South Slave avec une capacité suffisante pour que ce soit utile. Ensuite, il faudra 200 millions de dollars pour intégrer les mines. Les mines sont prêtes à financer l'interconnexion jusqu'à Yellowknife, mais elles ne cherchent pas les coûts d'immobilisations pour se connecter elles-mêmes. Elles ont indiqué qu'elles étaient prêtes à construire jusqu'à Yellowknife, mais certainement pas jusqu'en Saskatchewan.
Le sénateur Black : Si on ajoute à cela les 1,2 milliard de dollars pour raccorder les réseaux à celui de la Saskatchewan, cela nous amène à environ 2,5 milliards de dollars; est-ce exact?
M. DaRosa : Non. C'est 1,2 milliard de dollars en tout; c'est le coût total du projet.
Le sénateur Black : Cela permettrait-il de connecter les Territoires du Nord-Ouest au réseau?
M. DaRosa : Tout à fait.
Le sénateur Black : C'est très intéressant. Un peu au sud de vous se trouvent les sables bitumineux, qui exigent énormément d'énergie, sans parler des nombreux problèmes qui s'y rattachent. Compte tenu de vos ressources hydroélectriques, pourriez-vous établir un partenariat avec les exploitants de sables bitumineux qui vous aiderait à acheminer l'énergie du Nord jusqu'aux gisements de sables bitumineux?
M. DaRosa : Certainement. Comme je l'ai déjà dit, nous avons la capacité d'approvisionner l'ensemble des chantiers de sables bitumineux. Cela nécessiterait non seulement les 1,2 milliard de dollars pour l'acheminement de l'électricité, mais aussi davantage de capitaux pour créer les installations hydroélectriques nécessaires à la production de l'électricité.
Le problème, c'est que l'Alberta est un marché déréglementé; on retrouve des sociétés privées dans le domaine de l'énergie. Le régime réglementaire est très différent de celui des Territoires du Nord-Ouest. Nous avons discuté avec l'Alberta, et je dirais qu'il sera un peu plus difficile d'en arriver à une entente par opposition à la Saskatchewan. La Saskatchewan a un système qui s'apparente au nôtre, puisque c'est le gouvernement qui est responsable de la production d'électricité. Tout comme nous, ils ont une société d'État et un ministre responsable de cette société d'État.
Les discussions avec la Saskatchewan ont progressé beaucoup plus rapidement qu'avec l'Alberta. Il faut également tenir compte de la distance. Il n'y a que 200 kilomètres qui nous séparent du réseau de la Saskatchewan. En Alberta, le point d'interconnexion le plus proche est à 350 kilomètres.
Le sénateur Black : C'est très intéressant.
Le sénateur Sibbeston : Je vais probablement avoir l'air d'un vieillard, mais lorsque j'étais un jeune garçon, dans les années 1950, la CENC, c'est-à-dire la Commission d'énergie du Nord canadien, s'est établie à Fort Simpson, et dans le Nord en général, pour construire des centrales hydroélectriques et fournir de l'électricité à la collectivité. Depuis ce moment-là jusqu'à aujourd'hui, il y a toujours eu de la fumée et de l'air chaud qui s'échappaient de la cheminée.
Je sais que ma tante et mon oncle demeuraient à deux maisons de là, et on entendait un grondement; leur vaisselle vibrait. Ils ont vécu ainsi pendant des années. Je me suis toujours demandé pourquoi la chaleur n'était pas utilisée pour chauffer la collectivité. Je sais que ce n'est pas impossible parce que nous allons entendre plus tard des témoins de Fort Providence qui ont procédé ainsi. Ils ont utilisé la chaleur produite par des petites génératrices pour chauffer leurs immeubles et fournir de l'eau chaude. C'est donc possible.
À l'heure actuelle, je sais que vous vous intéressez à l'énergie solaire et éolienne. N'empêche que la Société d'énergie des Territoires du Nord-Ouest pourrait exploiter ce potentiel et utiliser la chaleur excédentaire qui s'échappe dans l'air pour chauffer la collectivité, n'est-ce pas? Je sais que vous êtes relativement nouveau dans le Nord, mais avez-vous songé à cette possibilité? Est-ce quelque chose que vous pourriez faire au lieu de chercher à exploiter l'énergie éolienne et solaire qui, pour l'instant, ne me semblent pas très pratiques ni efficaces. La récupération de la chaleur semble être une bien meilleure idée. Y avez-vous réfléchi?
M. DaRosa : Je vous remercie, sénateur. Nous y avons déjà songé; en fait, la récupération de la chaleur évacuée par les cheminées est un élément important de notre programme. Dans chaque collectivité, nous examinons toutes les possibilités de récupérer la chaleur excédentaire. De façon générale, 40 p. 100 de l'énergie intrinsèque du diesel utilisé dans les génératrices est convertie en électricité. L'autre 60 p. 100, comme vous l'avez indiqué, est perdu.
Le tiers environ est évacué par la cheminée; un autre tiers passe par la chemise d'eau, les radiateurs; et le dernier tiers est tout simplement perdu à l'intérieur des salles mêmes, qui doivent être ventilées afin d'être refroidies. N'empêche que la récupération de cette chaleur a un prix. En fait, à certains endroits, c'est ce que nous avons fait, mais nous avons reçu des subventions du gouvernement.
À Inuvik, par exemple, c'est ce que nous faisons. Une bonne partie de la chaleur est recueillie par les centrales et permet de chauffer la station de traitement d'eau; l'eau doit être chauffée avant d'être distribuée au sein de la collectivité parce qu'elle est très froide durant l'hiver. Nous préchauffons l'usine de traitement d'eau. À Fort McPherson, nous chauffons une des écoles et quelques immeubles à bureaux également.
Le problème, c'est que sans subventions, le coût du chauffage est relativement bas si l'on considère l'infrastructure nécessaire. À Fort Simpson, la collectivité que vous connaissez bien, la centrale électrique est située à proximité des immeubles que nous chauffons. Nous en avons discuté avec la collectivité. Le problème avec l'infrastructure, c'est qu'on se retrouve avec un phénomène d'érosion des rives; par conséquent, la durée de vie de l'usine actuelle ne peut pas justifier beaucoup d'investissements dans les infrastructures. Nous sommes à la recherche d'un nouvel emplacement un peu plus loin le long de la route.
Ce sont donc les difficultés sur lesquelles nous nous penchons. S'il y a une possibilité, nous nous adresserons au gouvernement en lui disant : « Si vous nous accordez le financement requis, nous pourrions chauffer la collectivité à 60, 70 ou 80 p. 100 de ce que lui coûterait le chauffage au mazout. » Toutefois, il faudrait un soutien financier pour y parvenir.
Le sénateur Sibbeston : Monsieur DaRosa, qu'est-ce qui se profile à l'horizon? Je sais que le gouvernement territorial a élaboré un plan pour le réseau d'électricité, et je suis sûr que votre société a également fait des plans. L'un des projets les plus importants consistait à raccorder les réseaux hydroélectriques du sud et du nord, mais apparemment, il ne verra pas le jour en raison des coûts trop élevés. Des discussions sont en cours dans des petites collectivités comme Whatì. Le comité s'est rendu à Whatì pour discuter de la possibilité d'aménager une centrale au fil de l'eau. Ce sont des projets pour l'avenir.
Quels sont vos plans à court terme? Prévoyez-vous des mesures concrètes qui pourraient améliorer la situation? Est- ce vous qui êtes principalement responsable ou si c'est plutôt le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest? Comment percevez-vous les choses?
M. DaRosa : Je vais tout d'abord répondre à cette question. Je dirais qu'il s'agit d'une entreprise conjointe. Nous faisons énormément de démarches. Nous trouvons les idées, puis nous les transmettons au gouvernement, qui entreprend des études et mène des projets pilotes, tout simplement pour s'assurer que la totalité des coûts n'est pas refilée aux contribuables, étant donné les structures du réseau. Par conséquent, nous présentons beaucoup d'idées au gouvernement et nous travaillons en collaboration avec lui. Le gouvernement finance les projets et, dans bien des cas, il mène certains des projets pilotes pour vérifier la viabilité de ces idées.
Pour ce qui est de nos plans, sachez que dans l'ensemble des Territoires du Nord-Ouest, il est possible d'améliorer les choses. La région de Beaufort-Delta est dotée d'un énorme potentiel éolien pour Inuvik. Il y a un endroit, Storm Hills, qui a des ressources éoliennes de classe mondiale. Nous surveillons la situation depuis près d'un an et nous continuerons de le faire pendant une autre année pour nous assurer de bien connaître les vents réels et déterminer tous les aspects économiques pour Inuvik. En ce qui concerne votre collectivité de Fort Simpson, à l'heure actuelle, nous envisageons deux options pour remplacer la centrale diesel, principalement en raison de l'érosion des rives du fleuve Mackenzie. Nous nous intéressons à la biomasse et au GNL. Nous collaborons avec la municipalité pour trouver le nouvel emplacement de la centrale. Nous essayons de travailler avec la collectivité et les groupes autochtones dans le dossier de la biomasse. De toute évidence, il faudra consacrer beaucoup de temps et d'efforts à la négociation des droits fonciers ou de la coupe de bois, mais nous avons amorcé les discussions. Sur le plan économique, si on détermine qu'il est préférable d'aller de l'avant avec la biomasse plutôt qu'avec le diesel, même si le projet nécessite une subvention du gouvernement, cela pourrait être la prochaine étape pour cette collectivité.
À Yellowknife, nous envisageons d'agrandir notre centrale Bluefish, tout simplement parce que c'est la façon la plus rentable de produire de l'électricité à Yellowknife. Outre Bluefish, il y aurait What, plus précisément les chutes La Martre dont vous avez parlé plus tôt. Ce n'est pas qu'un projet local; il existe un potentiel de 13 mégawatts. Le réseau pourrait non seulement alimenter cette communauté en électricité à peu de coûts, mais aussi être raccordé au réseau de Yellowknife.
Sur l'ensemble du territoire, nous essayons de trouver des façons d'accroître la fiabilité. Au bout du compte, nous cherchons toujours des moyens de diminuer les coûts. Comme je l'ai dit, nous savons très bien que nous ne pouvons pas soutenir ces coûts à long terme, et nous explorons toutes les avenues possibles pour réduire les coûts pour nos consommateurs.
La sénatrice Seidman : Vous avez répondu à la plupart de mes questions, mais j'aimerais peut-être donner suite à une question du sénateur Sibbeston, concernant les priorités et les projets de la Société d'énergie des Territoires du Nord- Ouest. À la fin de 2013, vous avez publié une vision, et en fait, j'aimerais savoir si les plans et les priorités que nous venez d'énoncer sont au cœur de cette vision.
M. DaRosa : Tout à fait. Nous avons un plan pour le réseau d'électricité, comme le sénateur l'a indiqué plus tôt, concernant les chutes Churchill. Le plan que nous avons élaboré en 2013 renfermait de nombreuses initiatives, y compris quelques-unes dont j'ai parlé, comme le projet d'énergie éolienne à Inuvik et le développement du réseau hydroélectrique. En outre, le grand projet de ce plan était le réseau de transmission. Nous avons des projets en tête, et ces projets sont décrits dans le plan que nous avons élaboré pour le réseau d'électricité. Mis à part le réseau de transmission, qui a été mis de côté pour l'instant, ces plans continuent d'évoluer et nous avons peaufiné et élaboré certains des projets contenus dans le document de 2013. La liste des projets continue de s'allonger à mesure que nous trouvons d'autres possibilités dans les Territoires du Nord-Ouest, et nous allons réellement miser sur les meilleures possibilités en premier.
La sénatrice Seidman : À propos du développement de l'énergie dans le Nord, de son utilisation et de l'approvisionnement, les témoins ont notamment insisté sur l'importance d'avoir une énergie durable, efficace et locale. Je pense que si nous devions choisir trois mots, ce sont probablement les trois mots que nous avons entendus le plus souvent : durable, efficace et locale. Dans quelle mesure tenez-vous compte de ces éléments lorsque vous réfléchissez aux grands défis à relever dans le Nord?
M. DaRosa : Je crois que cela qualifie très bien la nécessité d'avoir des centrales et une distribution d'électricité à l'avenir. Au bout du compte, la durabilité, du point de l'environnement et des coûts, est absolument nécessaire. Pour ce qui est de la caractéristique locale, à mesure que j'en apprends au sujet des Territoires du Nord-Ouest, cela devient de plus en plus important pour moi, d'autant plus que la population le demande. La population exige une énergie locale, que ce soit à partir de la biomasse ou non, mais nous utilisons du carburant local et non pas du diesel que nous achetons ailleurs au pays ou dans d'autres pays. La participation locale représente un avantage réel, et c'est très important.
Lorsque les coûts sont élevés, on doit forcément être efficace. Nous ne ménageons aucun effort pour être le plus efficace possible. Je pense que c'est ce que nous visons dans tous nos projets.
La sénatrice Seidman : Je pense entre autres à la biomasse. Vous en avez parlé dans une certaine mesure. Je sais que le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest a publié une stratégie relative à la biomasse et je crois qu'on en est à la fin de la mise en œuvre progressive de cette stratégie. Pourriez-vous nous dire où nous en sommes exactement?
M. DaRosa : Nous entreprenons des études de faisabilité en ce moment, et nous établissons des comparaisons entre le GNL et la biomasse pour la collectivité de Fort Simpson. C'est probablement le plus loin où nous sommes allés. Nous examinons les deux propositions et, au bout du compte, nous irons de l'avant avec la solution qui sera la plus rentable pour la collectivité.
À l'heure actuelle, tout semble indiquer que la biomasse revient plus cher que le gaz naturel liquéfié. Pour l'instant, le GNL s'avère une option moins dispendieuse, mais il y a tout de même des avantages sociaux dont il faut tenir compte. Si le gouvernement finançait une partie des capitaux nécessaires, si le gouvernement des Territoires du Nord- Ouest décidait d'aller de l'avant avec ce projet parce qu'il est dans l'intérêt de ses ministères de mettre sur pied une industrie locale misant sur le bois, la situation pourrait changer. Au bout du compte, la décision reviendra au gouvernement des Territoires du Nord-Ouest. En date d'aujourd'hui, selon nos données, le gaz naturel liquéfié est une option à moindre coût, mais on parle seulement d'aujourd'hui. Nous avons également envisagé la biomasse pour Yellowknife. Nous avons une vieille centrale de secours qui doit être remplacée. Nous avons organisé une séance à laquelle ont participé divers intervenants du domaine de l'énergie, y compris des représentants de Yellowknife, des Premières Nations dénées et de l'Alliance énergétique de l'Arctique. Nous avons invité divers groupes d'intervenants et nous avons examiné 13 options différentes. La biomasse s'est retrouvée parmi les quatre premières. Ce n'était pas nécessairement la première option. La première était un projet hydroélectrique, mais la biomasse sera tout de même évaluée pour Yellowknife. S'agit-il d'une bonne option pour Yellowknife à l'avenir?
Si je devais résumer ce qu'est la biomasse, à mon avis, tout comme l'énergie géothermique, la biomasse sert principalement au chauffage, mais il est possible d'utiliser la charge calorifique de la biomasse pour produire de l'électricité sous forme de sous-produit. Toutefois, sur le plan économique, il est improbable que la biomasse puisse tenir lieu d'option à grande échelle pour la production d'électricité. Si on construit une centrale de chauffage à la biomasse, on peut convertir la chaleur en électricité. Selon moi, c'est là le plus grand potentiel de la biomasse. J'ai parlé tout à l'heure de la chaleur qui émane des génératrices diesel, dont 40 p. 100 est convertie en électricité. Dans une centrale alimentée à la biomasse, on parle plutôt de 15 à 20 p. 100. Pour chaque unité d'énergie provenant du réseau d'électricité, on perd cinq unités de chaleur. C'est pourquoi je dis que la biomasse et la géothermie sont de meilleures options si le chauffage est nécessaire et que la production d'électricité est secondaire.
La sénatrice Seidman : C'est très intéressant. Merci beaucoup.
Le président : C'est ce qui met fin à la période de questions.
Le sénateur Patterson : La Société d'énergie des Territoires du Nord-Ouest a-t-elle établi un protocole en vertu duquel elle achète l'électricité produite par les consommateurs?
M. DaRosa : Oui. En fait, nous avons récemment mis au point le programme de facturation nette, qui permet aux consommateurs de produire de l'électricité à partir de panneaux solaires, d'éoliennes ou d'autres ressources renouvelables. Nous rachetons ensuite l'excédent jusqu'à une certaine limite. Nous établissons une limite, tout simplement parce que les organismes de réglementation, ailleurs au pays, veulent voir ce que cela rapporte aux consommateurs. Il y a une possibilité pour les gens des Territoires du Nord-Ouest de produire leur propre électricité, et nous créditons les consommateurs pour cette électricité excédentaire.
Le président : J'aimerais revenir à cette dernière question. Au fond, pour le producteur, ce ne sont que des entrées et des sorties. Autrement dit, si le consommateur produit une quantité d'électricité, cela en fait davantage pour le réseau. Il n'obtient pas vraiment d'argent. Cela ne fait que réduire ses coûts d'électricité. Comment cela fonctionne exactement?
M. DaRosa : C'est exact. Si un consommateur installe un système d'énergie solaire qui, par exemple, produit 200 kilowatts durant l'été, cette quantité sera emmagasinée. Ensuite, durant l'hiver, lorsque le soleil ne permet pas de produire de l'électricité, le consommateur peut utiliser ses crédits. Au 31 mars, nous remettons le compteur à zéro s'ils n'ont pas utilisé leurs crédits.
Le président : Vous avez parlé des panneaux solaires installés à Fort Simpson. Si j'ai bien compris, il a fallu une subvention de l'État pour que les coûts de production de l'électricité égalent ceux de l'électricité produite au moyen de génératrices diesel. Le coût de cette dernière électricité tient-il compte des subventions du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest? Quel pourcentage des coûts d'immobilisation a-t-il fallu subventionner pour rendre cela possible?
M. DaRosa : Oui, c'est le coût complet. Une centrale diesel, par exemple celle de Fort Simpson, produit de l'électricité à environ 60 cents le kilowattheure, dont 35 cents en grande partie pour le coût du carburant diesel. Pour abaisser nos coûts, nous avons besoin d'une électricité coûtant moins de 35 cents le kilowattheure, parce que la centrale ne peut pas disparaître. Elle reste là, et il faut en recouvrer les coûts par les tarifs d'électricité. Les comparaisons se font par rapport au coût marginal, plutôt qu'au coût complet de 60 cents. Je ne tiens absolument pas compte de la subvention de l'État, simplement parce que nous essayions de comparer des notions comparables, sans subvention de l'État.
En ce qui concerne le pourcentage des coûts, le projet a été entrepris il y a environ trois ans, et, depuis, le coût de l'énergie solaire a considérablement diminué. À l'époque, nous avions besoin d'une contribution de 50 p. 100 de l'État pour que l'électricité revienne à 35 cents le kilowattheure. Aujourd'hui, le taux serait inférieur, probablement de l'ordre de 20 p. 100, sous forme de subvention, pour une production au même coût que celle des génératrices diesel, en raison de la chute des coûts du solaire.
Le président : Vous dites qu'en deux ans le coût du solaire a diminué de 30 p. 100?
M. DaRosa : Effectivement. À Fort Simpson, nous avons installé le solaire au coût de 10 000 $ le kilowatt. À Colville Lake, l'installation, cet été, se fera au coût d'environ 7 000 $. Au cours des trois dernières années, le coût du solaire, pour nous, dans les Territoires du Nord-Ouest, a diminué d'environ 30 p. 100.
Le président : Nous vous sommes reconnaissants du temps que vous nous avez accordé pour votre témoignage. Je pense que vous nous avez bien informés. Merci encore.
Pour la deuxième partie de la séance, j'ai le plaisir d'accueillir M. Jeff Philipp, président et chef de la direction de SSi Micro Ltd.
Monsieur Philipp, je vous remercie d'être ici. Nous vous savons gré du temps que vous nous accordez et nous avons hâte de vous entendre. Ensuite nous vous poserons des questions. Vous avez la parole.
Jeff Philipp, président et chef de la direction, SSi Micro Ltd. : Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs les sénateurs. Je vous remercie de prendre le temps de m'entendre. Comme le sujet est passionnant, je suis heureux d'être ici.
Je suis le fondateur et chef de la direction du groupe de sociétés SSi.
Je remercie le président du comité et les sénateurs de m'avoir invité à participer aux discussions importantes sur les solutions énergétiques pour le Nord canadien.
Avant de poursuivre, je dois rapidement vous avertir que mes propos seront notablement différents de ceux que vous avez entendus du chef de la direction de la Northwest Territories Power Corporation, la NTPC, qui, je m'empresse de le préciser n'est pas le fournisseur d'électricité de la collectivité où je vis et dont je vais parler.
Nous possédons donc deux sociétés distributrices d'électricité : Northland Utilities et la NTPC. Dans ma collectivité, c'est Northland Utilities, à qui a été attribué, depuis un certain temps, le contrat de distribution. Est-ce que cela change vraiment quelque chose? L'électricité c'est de l'électricité, et son prix est le même, mais je tenais à faire cette distinction, parce je ne vise aucunement ce que cette société peut faire ou ne pas faire à Fort Providence.
Enfin, je ne suis pas ici pour faire seulement l'historique de l'entreprise familiale et de l'électricité du réseau autonome, mais pour présenter aussi une vision de ma collectivité, qui, je l'espère, est un modèle pour toutes les autres du Nord. Comme M. Sibbeston l'a dit, le captage de la chaleur est d'une importance essentielle. Vous trouverez peut- être mon point de vue intéressant à ce sujet.
La principale activité commerciale du groupe SSi est la transmission par satellite à large bande dans les régions éloignées et mal desservies. Le groupe a établi son siège social à Yellowknife, mais son centre de surveillance du réseau et son téléport se trouvent à Kanata, dans la banlieue immédiate d'Ottawa.
Nous avons créé un réseau de communication avec des infrastructures dans 56 collectivités de l'Arctique et dans plusieurs pays. Nous travaillons donc ou nous avons travaillé en Afrique, en Indonésie et dans le sud du Pacifique.
Mais nos racines sont tout à fait différentes. SSi signifie Snowshoe Inn, l'auberge de la Raquette. C'est l'entreprise familiale exploitée depuis 50 ans à Fort Providence. La diapo 2 montre l'emplacement de Fort Providence, ma collectivité natale, à proximité immédiate de l'émissaire du Grand lac de l'Esclave vers le fleuve Mackenzie, où on vient de construire le pont Deh Cho.
La diapo 3 est une carte à plus grande échelle qui montre l'emplacement de Fort Providence à 320 kilomètres à l'ouest de Yellowknife.
L'entreprise familiale a commencé dans les Territoires du Nord-Ouest il y a 50 ans. Mes parents l'ont fait démarrer en 1965. C'était alors un café et une boutique d'artisanat. Au fil des années, elle s'est agrandie pour inclure un motel de 35 chambres, un restaurant, un bar, une boutique de cadeaux, un dépanneur, un centre de location commerciale, un immeuble résidentiel, un dépôt de carburant en vrac, un garage industriel, un service d'équipement lourd et de camionnage, une entreprise maritime et une centrale d'électricité.
La diapo 4 montre une photographie aérienne de la communauté. C'est un hameau d'environ 800 habitants. La diapo 5 donne une vue aérienne de notre complexe. Le gros de l'emplacement occupe 15 acres, que mes parents ont achetées dans les années 1950 par un acte notarié; comme vous pouvez voir, c'est l'une de nos propriétés à Fort Providence, et c'est celle dont je parlerai jusqu'à la fin de mon exposé.
La diapo 5 montre le complexe, les bâtiments et les infrastructures. Mon épouse Stefanie et moi avons pris la relève de l'entreprise il y a 25 ans et nous l'avons fait croître jusqu'à sa taille d'aujourd'hui.
Fort Providence est un hameau d'environ 800 habitants, sur les rives du Mackenzie, à environ 320 kilomètres au sud-ouest de Yellowknife. Sa population est majoritairement composée de Dénés et de Métis.
Aujourd'hui, la réalité de Fort Providence ressemble beaucoup à celle de nombreuses petites collectivités du Nord. Elle souffre d'une absence de développement économique et d'emplois locaux. Il y a une grave pénurie de logements abordables. Moins de jeunes terminent leurs études, et ceux qui y parviennent doivent s'exiler, faute de débouchés.
Des entreprises ont fermé leurs portes en raison de leurs coûts de fonctionnement exorbitants, les plus importants étant ceux de l'électricité, puis du chauffage, qui sont facilement quatre fois plus élevés que dans le Sud. J'ai été heureux d'entendre le chef de la direction dire qu'ils étaient 10 fois plus élevés et, effectivement, dans de nombreux cas, c'est vrai.
Pourtant, en dépit de ces difficultés, nous continuons à exploiter le Snowshoe Inn et nous poursuivons son expansion durable. Comment est-ce possible? La réponse n'est pas si compliquée. Depuis 42 ans, nous sommes détachés du réseau et nous produisons notre propre énergie. Nous fournissons de la chaleur et de l'électricité à 100 000 pieds carrés de locaux commerciaux et résidentiels, à une fraction du coût que les autres entreprises paient au distributeur local qui, je vous le rappelle, est Northland et non la NTPC. Je ne tiens pas à me faire d'ennemis aujourd'hui.
Le système de cogénération d'origine (électricité-chaleur) a été construit par mon père, Sieg Philipp, en 1973. Mécanicien diesel doublé d'un entrepreneur infatigable, mon père a immigré au Canada après la Seconde Guerre mondiale. Il comprenait la valeur de l'autosuffisance et de l'innovation. Son système était d'une conception simple et très efficace. Je vous ai fourni quelques renseignements sur ce système, y compris des photographies et des schémas, sous la forme d'un article de huit pages publié en 2001 par la Société canadienne d'hypothèques et de logement et intitulé « Modèle de cogénération du Snowshoe Inn ».
Le système d'origine utilisait deux groupes électrogènes redondants au diesel et récupérait la chaleur résiduelle de l'eau de refroidissement et des gaz d'échappement pour la stocker dans un grand réservoir d'eau isolé, d'où elle était distribuée vers tous les bâtiments. Ces bâtiments sont reliés entre eux par un tunnel de quatre pieds de largeur, qui est en fait une sorte de buse en béton coulée dans le sol. Par ce tunnel circulent l'eau chaude, l'eau froide, l'électricité et les câbles de communication. Dans chaque bâtiment, la dalle de béton, l'air recirculé et l'eau chaude domestique sont chauffés par la chaleur que nous récupérons de notre système de cogénération. Pendant les mois les plus froids de l'année, il faut un apport de chaleur, et nous avons un brûleur qui, en détruisant toutes les huiles usées de notre équipement, de nos génératrices ou de l'équipement lourd, produit un surplus de 900 000 BTU de chaleur, ce qui améliore d'autant notre autosuffisance.
Non seulement ce système fournit-il chaleur et électricité aux bâtiments du complexe Snowshoe, mais, en plus, il nous a permis de construire et d'exploiter la seule serre qu'on trouve dans le nord du Canada. Pendant un certain nombre d'années, nous avons produit des légumes frais, tomates, laitues, carottes, concombres, radis. Une salle de culture hydroponique abritait un bananier. La production alimentait nos propres restaurants et était écoulée dans la communauté.
Il y a 18 mois, nous avons entrepris une mise à niveau majeure du système de cogénération d'origine. Je précise que mon père est mort il y a environ huit ans. Voilà pourquoi j'ai entrepris cette opération. Nous avons remplacé les vieux groupes électrogènes diesel par des systèmes plus gros et beaucoup plus efficaces, de 150 kilowatts et de 600 volts; nous avons donc augmenté la puissance et la tension. Nous avons installé un troisième groupe électrogène comme unité de secours. Les deux principaux groupes électrogènes ont été modifiés par l'ajout d'échangeurs de chaleur de gaz d'échappement et de refroidisseurs d'air de suralimentation, qui permettent d'extraire la chaleur de cet air, et par l'enlèvement des radiateurs et l'extraction de la chaleur de la chemise d'eau et des refroidisseurs d'huile. Nous récupérons probablement 50 p. 100 de cette énergie sur les 60 p. 100 auxquels M. DaRosa a fait allusion.
Toutes ces améliorations ont été directement intégrées dans le moteur. Ces unités mises à niveau sont maintenant vraiment à la fine pointe de la technologie et extrêmement performantes, permettant au moins un gain de 60 p. 100 de la récupération de chaleur grâce à l'importante amélioration de leur efficacité. Nous avons donc moins besoin de la chaleur fournie par le brûleur d'huiles résiduaires. En fait, grâce à la récupération améliorée de la chaleur, nous avons pu remplacer le brûleur de 900 000 BTU par une unité moderne et plus efficace de 400 000 BTU, sans répercussions sur l'efficacité générale du chauffage au milieu de l'hiver. Nous avons réduit de jusqu'à 25 000 litres par année notre consommation d'huiles résiduaires qui servaient au chauffage d'appoint.
Avec l'ancien système, notre coût de production d'électricité, après amortissement, était d'environ 24 cents le kilowattheure. Cela comprenait les coûts d'immobilisation plus tous les coûts d'exploitation de l'installation. Bien qu'il soit trop tôt pour en être certains, nous pensons que le nouveau système fonctionnera aussi bien, sinon mieux, que l'ancien tout en offrant une capacité électrique améliorée de 25 p. 100, une redondance triple, une facilité d'utilisation par l'exploitant, un enregistrement détaillé des données et la possibilité de surveiller à distance l'ensemble du système de n'importe quel endroit sur la planète.
Pour les gens du Sud, un tarif de 24 cents le kilowattheure peut sembler beaucoup. Mais, dans le Nord, à Fort Providence en particulier, où le tarif en réseau commercial à Providence est aujourd'hui de 57 cents, notre système change totalement la donne.
Avec une charge électrique annuelle moyenne de 100 kilowatts, nous économisons environ 290 000 $ par année, seulement pour l'électricité, et nous bénéficions de 800 000 BTU de chaleur gratuite. Concrètement, cela signifie que nous pouvons employer 25 personnes à temps plein dans la communauté, tout en continuant de planifier l'expansion future de nos installations.
Notre nouveau système est assez impressionnant, tant et si bien qu'il a attiré l'attention à l'étranger. J'ai inclus dans la documentation que je vous ai remise un article sur l'histoire du complexe Snowshoe qui a paru dans le magazine Worldwide Independent Power.
L'idée est de montrer qu'un modèle de cogénération et de chauffage efficace est clairement réalisable et viable. Notre entreprise est reconnue comme un chef de file de l'innovation dans le Nord, et nous continuons de croître malgré les obstacles économiques et sociaux. Nous sommes également le premier employeur privé de Fort Providence et nous avons apporté aux résidants des services locaux dont ils avaient besoin pendant de nombreuses années. Nous l'avons fait pendant 50 ans.
Mais nous devons faire plus. Nous devons intensifier nos efforts si nous voulons que toute la communauté en profite. J'y ai réfléchi sérieusement ces 10 dernières années. Ma passion, c'est d'aider la communauté à trouver des façons de générer une source de revenus récurrents et durables, qui peuvent servir à la création d'entreprises locales et de nouveaux emplois, à la construction de meilleurs logements et à un accès amélioré aux études postsecondaires. Actuellement, 72 p. 100 des écoliers de Fort Providence qui font des études secondaires décrochent avant de terminer leurs études. Ceux qui réussissent à aller jusqu'au bout partent ensuite, faute de logement pour eux, si ce n'est des habitations à loyer modique dans lesquelles ils seraient coincés à jamais.
Mon but, aujourd'hui, est de prendre appui sur la réussite du complexe Snowshoe en mobilisant la communauté et ses dirigeants à différents niveaux. Aujourd'hui, je voudrais vous faire part de certains des plans que je crois pouvoir inspirer dans d'autres communautés et que j'applique activement dans la mienne.
La communauté doit disposer d'une source de revenus récurrents et durables afin de soutenir son développement économique et social à long terme. À cette fin, et pour répondre aux besoins de la croissance future, nous accroîtrons notre capacité de production, y compris de chaleur, en installant un nouveau système de conversion de la biomasse qui utilise des copeaux de bois d'origine locale comme principale source de combustible. Pendant un bon moment, nous avons fait diligence. Je devrais le préciser, c'est écrit nulle part là-dedans, mais, il y a 35 ans, nous avons construit notre premier système de gazéification à Fort Providence. Il utilisait le bois récolté localement. Une expérience inestimable, mais franchement pas assez fiable à l'époque.
Alors, actuellement, nous faisons diligence pour construire des systèmes de gazéification capables de produire 500 kilowatts d'électricité et 1 000 kilowatts de chaleur, ce équivaut en gros à 4 millions de BTU.
Snowshoe a l'intention de mobiliser des partenaires autochtones locaux pour s'assurer que l'infrastructure appartient en majorité, voire totalement aux Autochtones, idéalement par l'entremise d'une fondation sans but lucratif. La fondation tirera profit de la vente d'énergie au réseau local, et Snowshoe profitera d'un accès à bon marché à de la chaleur et à de l'électricité pendant encore 50 ans.
Snowshoe veillera au fonctionnement et à l'entretien du système, et le bois qui servira de matière première proviendra de sources locales, ce qui créera des emplois dans une nouvelle entreprise de récolte du bois appartenant entièrement à la communauté. Il est prévu que le partenaire autochtone facilitera l'afflux de dollars pour la formation ou l'obtention d'autres ressources vers cette nouvelle entreprise grâce à l'accès à certains des programmes existants de l'État. En retour, sa participation dans les capitaux propres reflétera cette contribution.
Je conçois clairement cela comme une entreprise autochtone dans une petite communauté pour laquelle elle est vouée à la production de revenus.
En parallèle, nous avons l'intention de construire un nouvel immeuble de bureaux commerciaux de 10 000 pieds carrés de superficie dans la communauté. Il offrira l'espace supplémentaire dont nous aurons besoin pour accueillir les nouveaux employés qui emménageront dans la communauté à la suite du transfert de pouvoirs au gouvernement des Territoires qui a eu lieu l'an dernier. La chaleur et l'électricité dont aura besoin la nouvelle installation proviendront de la nouvelle centrale de conversion de la biomasse, ce qui contribuera à la viabilité à long terme du projet.
À la lumière du succès attendu de cette première entreprise, la prochaine étape logique serait d'accroître la production de chaleur et d'électricité dans le cadre d'un partenariat à long terme avec la communauté. Snowshoe envisage la création d'un centre de production d'énergie de pointe comprenant une deuxième usine de conversion de la biomasse et des panneaux solaires photovoltaïques ou des panneaux solaires ainsi que des capteurs à tubes sous vide, qui libéreraient la chaleur solaire sur les toits de ce centre, accompagnés d'un accumulateur thermique souterrain. Si vous avez vu des systèmes comme ceux d'Okotoks ou de la communauté solaire Drake Landing à Okotoks, vous avez vu qu'ils possèdent un système phénoménal de stockage de l'énergie thermique, qui permet d'emmagasiner la chaleur qu'on ne peut pas capter et de la conserver tout l'été pour l'utiliser l'hiver. C'est un système comme celui-là que nous mettrions en œuvre.
De plus, un générateur à pile à combustible hydrogène pourrait être utilisé pour les surplus d'électricité produits pendant les périodes hors pointe, ce qui permettrait de faire des économies, de même qu'avoir une source de chaleur supplémentaire. Nous avons mené beaucoup de recherches là-dessus également.
Les systèmes de production d'énergie de remplacement, comme les systèmes d'énergie solaire, sont encore au seuil de rentabilité. Il y a de l'amélioration, mais tout n'est pas encore au point. Je suis d'accord avec le sénateur Sibbeston là- dessus. Je pense qu'il existe de meilleures façons pour nos collectivités de gagner en efficience et de faire des économies.
Ajoutons à cette vision une plus vaste infrastructure de réseau de distribution souterrain sous coffre pour chauffer les édifices communautaires — école, patinoire couverte, piscine, centre de santé, résidence pour personnes âgées, et cetera —, et il devient alors facile d'imaginer Fort Providence sur la voie du rétablissement et de la prospérité. À noter que nous fournissons le carburant en vrac à la collectivité. Équiper ces immeubles d'un système de chauffage de remplacement se traduirait par une perte de revenus pour mon entreprise, mais honnêtement, je suis prêt à l'accepter, car cela permettrait à ces collectivités d'améliorer leur situation. Je ne suis pas ici en tant que fournisseur qui a quelque chose à perdre, mais bien en tant que membre de la collectivité qui a quelque chose à gagner, tout comme le reste de mes concitoyens.
Nos centrales actuelles au diesel offriront un système de secours fiable dans l'éventualité où le système de conversion de la biomasse aurait besoin de réparations. À terme, la dépendance énergétique de la communauté à l'égard du diesel serait considérablement réduite, et les bénéfices produits par le centre de production d'énergie contribueraient de façon notable à la production de revenus récurrents annuels pour nos partenaires de la communauté autochtone.
L'accès à une énergie abordable ouvre la porte au développement économique lucratif. Fort Providence occupe un emplacement stratégique, au centre de la région de Deh Cho-South Slave. Cette collectivité pourrait et devrait devenir la plaque tournante idéale pour la tenue de réunions et de conférences puisqu'elle ne se trouve qu'à quelques heures de route de Yellowknife, de Hay River, de Fort Simpson, d'Entreprise, de Fort Resolution et de Nahanni Butte. Le Snowshoe Inn serait bien placé pour aider à concrétiser cette vision s'il agrandissait l'hôtel et construisait un centre de conférence polyvalent sur les rives du fleuve Mackenzie. Nous pourrions ainsi doubler le nombre de chambres de 35 à 70 et faire de Fort Providence une destination tout aussi viable que Yellowknife. Et si nous avions un surplus de chaleur, nous pourrions aussi installer une piscine intérieure, ouverte à l'année; une attraction unique qui, sans chaleur gratuite, serait impossible. Cela semble aussi farfelu que la construction d'une serre, mais nous l'avons pourtant déjà fait. Le coût de l'énergie est déterminant dans de tels projets. Quand on dispose d'importants surplus énergétiques, le coût de la piscine devient un simple investissement au même titre que les coûts de construction. C'est par contre tout un attrait, parce qu'on n'en trouve nulle part dans les environs aujourd'hui.
Une énergie abordable nous permettrait également d'avoir une nouvelle serre — une version plus grande et améliorée de celle que Snowshoe a déjà eue — construite et exploitée par la population locale. Cela signifierait une abondance de denrées saines et abordables dans une collectivité où les fruits et légumes sont rares et coûteux. N'oublions pas que nous devons transporter nos fruits et légumes sur un millier de kilomètres — heureusement, nous avons accès à un système routier — et qu'il faut tout chauffer en hiver et tout réfrigérer en été pour préserver les aliments.
Enfin, un rêve de longue date des éducateurs de la collectivité est de construire un petit centre de regroupement où les jeunes et d'autres personnes de la région pourraient acquérir des compétences pratiques dans les métiers où il y a des débouchés dans les collectivités nordiques. Une énergie abordable peut également nous aider à faire de cette vision une réalité.
En conclusion, je crois que Fort Providence peut devenir la collectivité nordique que les autres considéreront comme un modèle moderne en matière de revitalisation. La collectivité peut devenir un exemple réputé de partenariat communautaire progressiste qui donne de véritables résultats. Avec les bons partenaires et un soutien des gouvernements local, fédéral et territorial, je crois que nous pouvons réaliser tout cela sans attendre qu'une force extérieure vienne régler ces questions pour nous. Merci. C'est ce qui conclut mon exposé.
Le président : Merci beaucoup, monsieur Philipp. Nous passons maintenant aux questions. Sénatrice Massicotte?
La sénatrice Massicotte : Merci, monsieur Philipp, d'être avec nous. C'est très apprécié. Votre point de vue est précieux. Quelque chose me chicote, par contre, et j'aimerais avoir une explication. Vos coûts, avec votre ancien centre de production, étaient d'environ 24 cents. Avec les nouvelles générations d'appareil, vous prévoyez que les coûts de remplacement totaux seraient de 18 cents, à peu près. Je croyais que vous aviez parlé d'une économie de 25 p. 100...
M. Philipp : Non, il s'agit d'une hausse de production énergétique de 25 p. 100. La production est passée de 110 kilowatts à 150 kilowatts, et notre capacité thermique a augmenté de façon considérable. Je ne sais pas quelle sera la réduction. Je ne m'attends pas à une baisse notable du coût de 24 cents le kilowattheure. C'est assez serré.
La sénatrice Massicotte : D'accord, disons 24 cents. Mais vous avez aussi dit que la moyenne est de 57 cents dans la région.
M. Philipp : C'est exact.
La sénatrice Massicotte : On nous a déjà dit que le prix pouvait grimper à 70 cents en incluant les subventions. Comment expliquez-vous un tel écart? Pourquoi les autres ne font pas comme vous pour faire baisser leur prix de 70 à 24 cents?
M. Philipp : Il y a quelques raisons à cela. C'est intéressant; M. DaRosa a mentionné que le prix compensatoire du diesel — le terme employé dans la loi — est de 35 cents. On détermine que le coût de production est de 35 cents pour le diesel. Au total, notre coût de production est de 24 cents, et c'est entre autres parce que les collectivités typiques sont assez petites, quelque 800 personnes. Et c'est le cas de ma collectivité, Fort Providence. Nous, nous avons accès au système routier. Mais nous avons aussi une multitude de centrales au diesel. La charge moyenne est de 350 kilowatts dans notre collectivité. La société d'énergie — dans bon nombre de ces petites collectivités — exploite une centrale de 500 kilowatts, parce que ce léger surplus est nécessaire. Et quand la pointe grimpe à 700 kilowatts, ce sont deux centrales de 500 kilowatts qu'on exploite, ce qui signifie qu'il y a un surplus. Dès le départ, c'est une perte de 30 p. 100. Sur un litre de carburant, 40 p. 100 est transformé en électricité — mais je crois que c'est plutôt 35 p. 100 —, et si déjà on a des pertes de 20 p. 100 pour un générateur, ou de 25 p. 100 pour deux, et qu'on est seulement à 700 kilowatts, on parle de 25 p. 100 sur les 40 p. 100. Puis, avec la distribution à l'échelle du réseau, on perd encore un certain pourcentage. C'est beaucoup, 30 p. 100. Leurs coûts de production sont donc très élevés. Nos coûts le sont beaucoup moins, parce que nous utilisons des centrales moins puissantes, qui sont aussi moins énergivores. Elles consomment moins de carburant, alors nous pouvons y aller par phases. Plutôt que d'exploiter une centrale de 500 kilowatts, nous pouvons y aller avec une de 250, une autre de 150 et une de 100. Cela consomme moins de carburant.
La sénatrice Massicotte : Ces 35 cents, si j'ai bien compris, ce sont leurs coûts marginaux.
M. Philipp : Oui, les coûts en carburant.
La sénatrice Massicotte : Tenez-vous compte de l'amortissement ou du remboursement des coûts en capitaux? Votre prix de 24 cents comprend tous les coûts associés aux nouveaux générateurs, est-ce bien cela?
M. Philipp : C'est bien cela. Permettez-moi de mettre les choses en contexte. Une centrale au diesel de 150 kilowatts et de 600 volts coûte 35 000 $. Ce n'est rien. Nous économisons 290 000 $ par an sur nos coûts d'électricité. Je pourrais remplacer cette centrale aux deux mois.
Ce n'est pas tant la centrale elle-même que l'immeuble et le personnel, ou encore les camions qui font tous les transports. C'est ce qui coûte cher. Leurs coûts d'exploitation directs, si le carburant est 35 cents comme ils l'indiquent, s'expliquent selon moi par le fait qu'ils exploitent de grosses centrales qui sont très énergivores, et ils ne récupèrent pas... les pertes restent des pertes.
Le sénateur Massicotte : Cela dit, vous êtes vraiment notre faiseur de miracles. Que feriez-vous si nous vous nommions directeur général de l'ensemble du Nord?
M. Philipp : La question n'a rien de simple. Je ne reproche rien aux autres. Je ne suis pas ici à dire...
Le sénateur Massicotte : Que feriez-vous si nous augmentions votre limite d'emprunt sans subvention?
M. Philipp : Je peux vous répondre, en fait. Je pense que le défi est de taille. J'accepterais votre offre.
Je crois qu'il existe plus d'une solution. Je pense que les décideurs du milieu hydroélectrique ont raison. Je ne connais ni leurs chiffres ni leur analyse de rentabilisation, mais je sais qu'il serait inutile de brancher la région de Fort Smith et de Taltson au réseau de la Saskatchewan sans brancher Snare, puisque la majeure partie de l'utilisation provient de Yellowknife. C'est là que la redondance est nécessaire, mais la puissance électrique provient principalement de Snare.
Pour ce qui est de l'hydroélectricité, il faudrait examiner l'analyse de rentabilisation et prendre une décision. Il est probablement logique de se brancher au réseau de la Saskatchewan. J'aimerais préciser une chose : ce que M. DaRosa a dit à propos de Fort McMurray, c'est d'après moi qu'il est inutile d'y installer des fils électriques puisqu'il n'y a pas suffisamment de puissance pour approvisionner la ville. Je pense que la question s'est posée. Il faudrait dans ce cas accroître la puissance.
M. DaRosa n'a pas dit que ce serait viable, mais plutôt qu'avec une subvention de 400 millions de dollars, nous pourrions faire en sorte que le prix soit le même que celui que nous payons aujourd'hui.
Je pense que ce serait probablement une bonne idée à long terme, si nous nous projetons dans 50 ans, mais je n'ai pas examiné les chiffres. Je dirais que c'est ce qu'il y a à faire du côté de l'hydroélectricité. Il est vrai que cela représente 75 p. 100 de la population, mais la solution néglige 30 des 33 collectivités des Territoires du Nord-Ouest, ou 23. Je ne connais pas bien les chiffres, mais il y a des centrales électriques diesel dans la majeure partie de ces collectivités. Nous pourrions approvisionner 75 p. 100 de la population en branchant les trois plus grandes localités à l'hydroélectricité, mais nous ne réglerions pas le problème des entreprises qui ferment leurs portes dans les collectivités modestes et laissent derrière eux des problèmes sociaux.
La difficulté n'est pas la même dans ces milieux. J'étais ravi d'entendre un sénateur dire que le mot « local » est proposé, car j'ai passé pas mal toute ma vie à vivre localement à Fort Providence, et je crois que les infrastructures essentielles du Nord devraient davantage être de propriété locale. Les infrastructures essentielles, comme les télécommunications et l'électricité, devraient davantage être le fruit d'investissements locaux et appartenir à des intérêts locaux, et même nordiques, autochtones et inuits.
Si cela arrivait et que les collectivités avaient le pouvoir de participer et de posséder plus d'infrastructures... Et comprenez bien qu'il s'agit là d'un défi incroyable. J'ai vécu à Fort Providence jusqu'à il y a 12 ans, et j'ai habité dans le milieu toute ma vie. Il est difficile d'amener les Métis, les Dénés et les autorités locales à collaborer. La question n'a rien de simple.
Dans le cas des collectivités qui ont une biomasse à leur disposition, il va sans dire que cette biomasse constitue une meilleure solution, et je doute qu'elle nécessite une subvention gouvernementale importante. En fait, nous allons cette année mettre en place une centrale alimentée à la biomasse de 500 kilowatts, si nous arrivons à faire les bons calculs, et jusqu'à maintenant, les vendeurs semblent me dire que les chiffres sont bons.
Je suis septique, mais je crois que la biomasse des secteurs de l'industrie forestière... Au cours des 12 derniers mois, des accords d'aménagement forestier ont été signés avec les bandes et la population du Dehcho. Ainsi, ma communauté d'origine a signé des accords d'aménagement forestier avec le gouvernement fédéral concernant deux ou trois autres secteurs. Elle a désormais le droit de couper et de vendre le bois, ce qui est une grosse affaire.
Le sénateur Massicotte : Pourquoi ne le fait-elle pas?
M. Philipp : C'est arrivé il y a trois mois seulement. Aucune entente juridique n'a été conclue avec le gouvernement fédéral.
Nous n'avons pas 1 million de dollars d'équipement pour la coupe du bois. Nous n'avons pas non plus de centrale alimentée à la biomasse. Nous n'avons encore aucune infrastructure pour le faire; il faut donc un leadership et une orientation à cette fin.
Du côté des collectivités ayant accès à la biomasse, la Power Corporation devrait examiner ces possibilités puisqu'elles génèrent beaucoup de travail à l'échelle locale et pourraient immédiatement permettre de couper le bois. Un projet pilote sera toutefois nécessaire pour confirmer le tout.
Voilà ce que je propose de faire à Fort Providence, avec ou sans la participation du gouvernement. Bien franchement, s'il s'agit d'une meilleure solution énergétique et que les calculs sont bons, je crois que je vais me lancer. Cela me semble logique, et je dirais que le modèle est intéressant pour d'autres collectivités aussi. Voilà les deux aspects.
En réponse à votre question, je pense que la question de l'hydroélectricité s'applique bien différemment aux grands marchés qu'aux marchés restreints. Dans les petits marchés, nous devons concevoir un meilleur mécanisme, et il ne s'agit pas simplement d'installer plus de centrales électriques diesel de 500 kilowatts.
Nous avons participé à des projets conjoints avec la Power Corporation. Je connaissais très bien son ancien président-directeur général, et je connais bien les gens du secteur énergétique. La limite d'emprunt du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest fait partie du défi, puisqu'il s'agit d'une société d'État, mais la difficulté est aussi attribuable au fait que les choses ne vont pas changer du jour au lendemain. Il faut donc commencer bientôt.
Comment peut-on faire comprendre aujourd'hui aux spécialistes des moteurs diesel qui s'occupent des centrales électriques des collectivités qu'il faudra changer les choses pour améliorer l'efficacité? Sensibiliser la main-d'œuvre locale fait vraiment partie du défi, à commencer par la Power Corporation. Compte tenu de ce besoin, il faut sensibiliser et appuyer les collectivités et les faire participer à la conservation sur le plan énergétique.
Il y a une chose que nous ne faisons pas dans le Nord actuellement : nous ne conseillons pas les consommateurs sur leur utilisation énergétique.
Permettez-moi de vous présenter une analogie. J'évolue dans le secteur des télécommunications, et si je disais à mes clients Internet que je ne vais pas leur communiquer leur utilisation avant le dernier jour du mois, après quoi je leur enverrai la facture, ils seraient furieux puisque l'utilisation coûte 10 fois plus cher dans le Nord que dans le Sud. Les gens limitent leur consommation énergétique parce qu'ils n'ont pas les moyens de payer la facture.
Si nous sensibilisons les gens au moyen d'un programme social tel que... Permettez-moi de reformuler ma pensée. Le relevé automatisé des compteurs permet à un consommateur de se brancher à son compteur pour obtenir des données en temps réel sur son utilisation, sur laquelle la facture du mois sera fondée. C'est ce que je fais chez moi depuis maintenant quatre ans. Mes enfants ont 13 et 17 ans. Je leur ai dit d'éteindre toutes les lumières et de revenir voir une page web. Lorsque vous voyez le prix descendre, vous savez quelle est l'incidence d'éteindre seulement les lumières de la chambre sur les coûts énergétiques de la semaine, du mois et de l'année. Or, nous ne pouvons pas le faire.
Cela éclairerait beaucoup la Power Corporation aussi, qui se demande où va toute cette énergie. Sert-elle au centre de santé et à tous ces vieux bâtiments mal isolés qui pourraient bénéficier d'une amélioration immobilière afin de réduire notre facture d'électricité?
Je pense que la réponse passe notamment par l'éveil d'une conscience sociale incitant les consommateurs à moins consommer. Voilà qui contribuerait grandement à réduire la demande. Il faut également améliorer l'efficacité des moteurs, et récupérer 60 p. 100 de l'énergie qui part en fumée.
Il y a 35 ans, nous avions offert à la collectivité de Fort Providence de chauffer la piscine locale, qui était juste à côté de notre motel, sur le terrain adjacent. Il suffisait de faire sortir deux tuyaux par l'arrivée jusqu'à la piscine pour la chauffer à l'année. À l'époque, nous nous sommes demandé ce qui se produirait en cas de panne de courant. La piscine serait alors froide. Il s'agissait là d'un défi local des instances municipales, et non pas fédérales ou territoriales. Nous avons dit que s'il y avait une panne, nous aurions un problème bien plus important que la piscine. Si cela arrivait, 100 000 pieds carrés d'eau gèleraient, de même que tous les tuyaux du ponceau. Voilà le véritable problème.
Nous ne l'avons jamais fait. La collectivité vient de dépenser 4 millions de dollars, je crois, pour une nouvelle piscine. C'était il y a quatre ans. Elle n'a été ouverte que pour un total de six mois en raison d'un problème de moisissures. Elle n'a pas bien été conçue. Le pire, c'est qu'elle n'est ouverte qu'un mois et demi pendant l'été. La municipalité me verse donc 40 000 $ en échange du carburant nécessaire pour la réchauffer pendant un mois et demi l'été, après quoi elle ferme la piscine 10 mois et demi parce qu'elle n'a pas les moyens de la chauffer bien que le bassin n'ait que quatre pieds de profondeur. C'est une barboteuse qui a coûté 4 millions de dollars, je crois, un investissement ridicule pour la collectivité. C'est le genre de chose qui me laisse vraiment perplexe.
Comment pouvons-nous améliorer les choses? Si j'étais président de la Power Corporation, j'étudierais des solutions de rechange même si ce n'est pas facile.
M. DaRosa a parlé de batteries, et je suis ravi d'apprendre que la société va dans cette voie. Je suis également heureux qu'il lui manque 10 millions de dollars, car j'aimerais investir. En chargeant les batteries toute la journée hors du réseau électrique et sans eau, la société laisse passer l'eau par-dessus le barrage et offre cette solution de rechange lorsqu'il y a une panne de courant à Yellowknife. Il s'agit d'une batterie de secours branchée au réseau. Voilà une solution que nous pourrions facilement implanter, et une somme de 10 millions de dollars n'est pas astronomique.
Bien des choses peuvent être faites, et je me réjouis d'avoir l'occasion de travailler avec le nouveau président de la Power Corporation pour voir si nous pourrions améliorer la situation à Fort Providence, puis agrandir le réseau.
Comme vous l'avez dit, sénateur Sibbeston, la récupération de la chaleur va de soi. Je peux vous montrer l'équipement nécessaire et le fabricant. Il s'agit d'un investissement inférieur à 60 000 $ qui permettrait de récupérer tellement de chaleur que la piscine de Fort Simpson n'aurait plus jamais besoin de carburant.
Le concept est fort simple. Je pense que les chiffres qui ont été examinés datent d'il y a un certain temps déjà, un peu comme l'énergie solaire. Je doute que la société ait évalué la question récemment, et je l'ai fait.
Le sénateur Sibbeston : À l'époque où j'étais un jeune député provincial dans les années 1970, j'étais allé à Fort Providence pour voir votre père construire son système et commencer à distribuer sa propre électricité. Il y avait à l'époque une gazéification qui nécessitait du bois local et ce genre de choses. J'ai toujours admiré votre père, et je vous admire aujourd'hui pour ce que vous avez fait.
Voilà donc la raison pour laquelle je pose la question : pourquoi ne fait-on pas cela dans le Nord? C'est notamment pour des raisons commerciales. Les entreprises privées familiales et les gens peuvent le faire bien plus efficacement que le gouvernement. Je pense que c'est la première réponse. Vous arrivez à mieux faire les choses parce que vous n'êtes pas indifférents. Votre père avait évidemment les connaissances, l'expérience et le bon sens nécessaires pour créer un tel système.
Comme je l'ai dit, l'énergie a rimé toute ma vie avec une épaisse fumée noire sortant d'un générateur au diesel à Simpson. Pensons au gaspillage de chaleur et au coût. Je me dis toujours que le gouvernement est astucieux, et les Blancs aussi, puisqu'ils ont des ingénieurs. Le gouvernement n'est pas né de la dernière pluie. Pourquoi ne peut-il rien faire à ce sujet? C'est la question que je me suis toujours posé. Je pense que d'autres membres de la population locale se le demandent aussi.
Le sénateur Massicotte : Ils ne sont peut-être pas aussi astucieux que vous ne le croyez.
Le sénateur Sibbeston : Non, je pense qu'ils le sont. Il y a d'autres gens comme M. Philipp dans le monde. Mais j'ai l'impression qu'ils s'en moquent puisqu'il s'agit du gouvernement. Le gouvernement est ce qu'il est, et la Power Corporation s'intéresse à produire de l'électricité. D'autres secteurs du gouvernement font autre chose, mais il n'y a aucune intégration.
Puisque nous sommes bien nantis et que notre gouvernement est très riche, nous ne faisons aucun effort pour changer les choses.
Aussi, les Autochtones qui vivent dans ces collectivités viennent de s'y installer. Dans notre région, et celle de Dennis, il n'y a pas si longtemps, les Inuits habitaient encore dans des igloos et vivaient encore des ressources de la terre. Ils ne peuvent donc pas se fier au gouvernement pour les aider. À mon avis, c'est la raison.
Ne serait-il pas agréable si les gens commençaient à se soucier d'eux, à vouloir agir? Vous avez parlé de la technologie. Elle existe et elle semble accessible, et ce, à peu de frais.
Pourriez-vous nous parler de la technologie qui existe pour la production d'électricité et de chauffage dans les collectivités et du fait que le gouvernement et la société d'énergie ne l'utilisent pas, parce qu'ils s'en moquent?
M. Philipp : Je crois, sénateur, que c'est une combinaison de facteurs. J'ai grandi à Fort Providence. J'y ai fréquenté l'école secondaire jusqu'à la 7e année, dernière année offerte, et j'ai poursuivi mes études secondaires sur l'île de Vancouver. Je suis chanceux; mes parents ont compris l'avantage de m'envoyer à l'école sur l'île, car, pour revenir à ce que vous disiez, ça ne fait que quelques générations que les gens vivent dans les collectivités. Auparavant, c'était des chasseurs, trappeurs, pêcheurs ou cueilleurs. Je suis né en 1967 dans cette collectivité et depuis, j'ai vu la situation s'améliorer graduellement, puis s'aggraver. On ne parle pas uniquement d'une ou deux générations qui vivent maintenant dans les collectivités; on parle de familles entières ou de quelques générations de familles. C'est pour cela. Les gens envoient leurs enfants ailleurs, parce qu'il n'y a pas suffisamment d'emplois à long terme ou de logement pour suffire à la demande.
Prenons les gens de mon groupe d'âge ou même plus jeunes, les 30 à 50 ans, qui ont des enfants. Demandez à l'agent administratif principal ou au maire où ces enfants vont à l'école; ils vous diront que la plupart, comme moi, vont à l'école ailleurs. La différence dans mon cas, c'est qu'après mes études secondaires, je ne voulais pas aller à l'université et poursuivre mes études. Je suis rentré chez moi et j'ai travaillé pour l'entreprise familiale. Je suis mécanicien de moteurs diesel et pilote. Ce sont mes métiers.
La raison pour laquelle je vous raconte cela, c'est qu'à mon avis, les gens de ma collectivité sont ingénieux. Je suis comme les autres enfants de la collectivité. La seule différence, c'est que j'ai passé quatre ou cinq ans, de la 8e à la 12e année, à étudier ailleurs. Ça m'a ouvert les yeux aux possibilités qui existent. J'ai compris qu'il n'y avait pas de limites. Je suis revenu à Providence et c'est en raison de ma passion et de mon intérêt pour la technologie que j'ai pu réaliser tout cela. Que ce soit l'entreprise de télécommunication que nous exploitons ou la production d'énergie, ce sont des choses qui me passionnent. Mais, je ne suis pas le seul à trouver des façons d'innover et de réaliser des choses. D'autres dans les collectivités ont cette capacité et en font preuve.
Ce qu'il faut faire, sénateur Sibbeston, c'est leur donner les outils et un des obstacles à cela, c'est la formation et l'éducation. Notre entreprise a investi beaucoup de temps dans la formation, notamment dans le domaine des télécommunications — nous comptons 55 régions éloignées et avons des agents dans chacune d'elles; nous avons des tours, des cellulaires, des satellites, Internet et la vidéoconférence; nous exploitons le réseau étendu du gouvernement du Nunavut. La formation est essentielle. Nous ne pourrions pas faire tout cela dans 25 collectivités au Nunavut sans former des gens dans ces collectivités sur la façon d'entretenir l'infrastructure. C'est encore plus nécessaire dans le secteur de l'énergie, mais ce n'est pas si simple. Il faudra du temps.
Le président : Merci. C'est très intéressant. Sénateur Sibbeston, vous devriez peut-être retourner dans votre collectivité, vous faire élire comme maire et faire tout cela. C'est une blague.
Le sénateur Patterson : J'aimerais remercier M. Philipp et le féliciter pour tout ce qu'il a réalisé. C'est éloquent. Selon vous, les Territoires du Nord-Ouest devraient-ils aider les particuliers qui voudraient se raccorder au réseau public et vendre leur surplus d'énergie? Avez-vous déjà songé à faire cela, à vous raccorder au réseau public?
M. Philipp : Nous ne sommes pas raccordés au réseau public. J'ai étudié cette possibilité il y a quelques années avant d'apporter la dernière mise à jour importante à notre infrastructure électrique. J'ai communiqué avec la société d'énergie pour conclure un accord rentable qui m'éviterait d'investir un quart de millions de dollars dans du nouvel équipement. Ce n'était pas possible. Le taux commercial est de 58 cents le kilowattheure. Cela représente une économie annuelle de 290 000 $. Donc, nous ne sommes pas sur le réseau public.
Cela dit, est-ce que, selon moi, des particuliers devraient se raccorder au réseau et vendre leur surplus d'énergie? Sincèrement, la société d'énergie perdrait son temps, même si 50 personnes estimaient avoir les ressources ainsi que la capacité financière et technique nécessaires pour installer des panneaux solaires afin de vendre quelques kilowatts au réseau public. Les retombées ne seraient pas suffisantes pour compenser le personnel nécessaire à la gestion de ce processus.
Selon moi, la solution repose sur les projets à grande échelle, comme celui que je propose à Fort Providence. Cette centrale nous permettra de produire 500 kilowatts à l'aide de la biomasse et d'en vendre 350 au réseau public, car la société d'énergie a déjà confirmé qu'elle paierait 35 cents le kilowattheure. Selon nous, le taux pour l'énergie produite à la biomasse sera considérablement moins élevé que les 24 cents actuels. Pourvu que l'on puisse obtenir la matière première à un prix raisonnable dans la collectivité, en collaboration avec la collectivité autochtone locale, nous allons investir dans la biomasse. La société d'énergie a offert de nous payer un montant compensatoire de 35 cents pour le prix du diesel et je vais lui rappeler, car je crois qu'il est possible de réaliser un profit de 11 à 15 cents le kilowattheure, ce qui n'est pas rien.
Le sénateur Patterson : Votre père a commencé à utiliser la biomasse il y a plusieurs années. Je me souviens de cette expérience novatrice, car j'habitais dans le Nord à l'époque. Vous avez maximisé l'utilisation du diesel et vous vous tournez maintenant vers la biomasse.
M. Philipp : Le problème avec la centrale à la biomasse que nous avons construite il y a 35 ans, c'est qu'elle n'était pas assez fiable. Nous n'avions aucun moyen de stocker le gaz produit. S'il y avait un problème mécanique, nous n'avions plus de gaz, ce qui signifie que les moteurs cessaient de fonctionner. Donc, aucune production d'électricité. Nous n'avions pas de réservoir pour le gaz. Nous avons tenté de le stocker, mais le volume est si élevé, que ce n'était pas efficace.
À l'époque, la biomasse demandait trop de supervision. Il était impossible de partir pour deux semaines en espérant que tout continue de fonctionner. Nous avons apporté plusieurs modifications novatrices pour accroître la fiabilité de la centrale, mais ce n'était pas comparable à ce que nous étions en mesure de réaliser avec le diesel il y a 35 ans.
Aujourd'hui, on utilise abondamment les centrales à la biomasse en Europe. On en trouve beaucoup. D'ailleurs, dans un mois, environ, je me rendrai en Californie pour visiter une centrale comme celle-ci. Il s'agit d'une centrale de biomasse, sur une plateforme flottante, qui produit 500 kilowatts. Si les économies qu'ils avancent sont exactes, nous en achèterons une, car ce serait judicieux. Nous n'aurons besoin d'aucune subvention. C'est le genre de projet qui devrait appartenir à la collectivité, à mon avis, et je crois que Snowshoe se porterait acquéreur d'une telle centrale, car nous pourrions utiliser la biomasse et garder le diesel en réserve. Selon mes calculs, la récolte de bois nécessaire pour faire fonctionner une centrale à la biomasse générerait des recettes annuelles de 350 000 $ pour la collectivité locale. C'est l'équivalent de deux camions et demi par jour, tous les jours. Pour une collectivité de 800 personnes qui compte 100 personnes au chômage, ce n'est pas rien.
La sénatrice Seidman : Merci pour cette leçon remarquable à bien des égards. Je dois admettre qu'après toutes les études réalisées par le comité et toutes les discussions sur le prix onéreux des fruits et légumes, notamment, dans le Nord, il est remarquable de voir que vous avez trouvé une façon de faire pousser fruits et légumes de façon efficace. Nous sommes tous conscients de l'importance que cela peut avoir dans le Nord.
Vous êtes-vous appuyé sur ce que d'autres pays nordiques ont fait? Évidemment, votre père était un véritable innovateur. Selon ce que nous avons entendu au comité, il existe des modèles dans ces pays. Leurs régions nordiques doivent composer avec les mêmes réalités que nous. Je pense, notamment, à la Finlande. Si je ne m'abuse, il s'agit d'un des pays chefs de file dans l'utilisation de la biomasse pour la production d'énergie. Avez-vous utilisé d'autres pays comme modèles pour être si créatif et novateur?
M. Philipp : C'est encore plus simple que cela. Nous avons utilisé Google. Il y a beaucoup de recherches en ligne. Je n'ai pas consulté beaucoup d'études réalisées par d'autres pays. La Finlande a beaucoup travaillé avec la biomasse. On trouve de nombreuses centrales importantes en Europe. La plupart des grandes centrales — qu'elles produisent de l'énergie par l'entremise de turbines à vapeur ou qu'elles produisent du gaz synthétique, un produit combustible — produisent un gaz utilisable pour faire fonctionner les moteurs diesel ou produire de la vapeur pour faire tourner les turbines. Plusieurs très grandes centrales, des centrales d'un mégawatt et plus, utilisent la biomasse uniquement pour accroître leur production. C'est beaucoup plus complexe pour les centrales de 500 kilowatts et autres. Nous ne voudrions pas d'une centrale d'un mégawatt à Fort Providence, car notre demande, la nuit, n'est que de 350 kilowatts. Ce serait du gaspillage de bois. Nous avons besoin de centrales plus petites qui fonctionnent en parallèle en période de pointe.
Notre collectivité consomme environ 350 kilowatts en période hors pointe et 700 kilowatts en période de pointe, ce qui est la moyenne pour les collectivités dans le Nord. Ce n'est pas si mal pour une centrale à la biomasse de 500 kilowatts et quelques moteurs diesel. Pour agrandir, on ajoute une deuxième centrale à la biomasse et on garde les moteurs diesel en cas de problème. C'est mon objectif. Nous avons trois moteurs diesel, mais seulement un fonctionne à la fois. Nous utiliserions la centrale à la biomasse et garderions les moteurs diesel en cas de problème. Si nous pouvons vendre notre énergie au réseau public... et nous garderions toute la chaleur produite, ce qui serait avantageux. Il existe plusieurs modèles. Ce que je propose s'appuie uniquement sur notre expérience à Fort Providence et les nouvelles technologies qui fonctionnent pour nous.
Le président : Merci beaucoup, monsieur Philipp. Ce fut très intéressant. Nous vous remercions de votre temps.
(La séance est levée.)