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NFFN - Comité permanent

Finances nationales

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Finances nationales

Fascicule 2 - Témoignages du 28 novembre 2013


OTTAWA, le jeudi 28 novembre 2013

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui, à 14 h 3, pour étudier la teneur du projet de loi C-4, Loi no 2 portant exécution de certaines dispositions du budget, déposé au Parlement le 21 mars 2013 et mettant en œuvre d'autres mesures.

Le sénateur Joseph A. Day (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Honorables sénatrices et sénateurs, cet après-midi nous allons continuer notre étude de la teneur du projet de loi C-4, Loi no 2 portant exécution de certaines dispositions du budget, déposé au Parlement le 21 mars 2013 et mettant en œuvre d'autres mesures.

[Traduction]

Le président : Nous discuterons aujourd'hui de deux articles de la partie 3 du projet de loi C-4. L'article 17 contient des mesures liées à la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique ainsi qu'à la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, et il se trouve à la page 229 du projet de loi. L'article 18 contient des mesures qui concernent la Commission des relations de travail et de l'emploi dans la fonction publique proposée, et il se trouve à la page 260.

Nous avons reçu des mémoires qui ne vous seront pas distribués, mais qui vous ont tous été envoyés. Il y a celui de l'Association des juristes de justice, qui est daté de novembre 2013. Les documents de l'Union canadienne des employés des transports sont datés du 20 novembre et du 28 novembre 2013 et incluent une explication sur le mémoire — nous vous remercions pour les deux documents. Le mémoire de l'Association du Barreau canadien est daté du 18 novembre 2013, mais on n'a pas été en mesure de trouver quelqu'un pour venir témoigner et on a dû se contenter de présenter un mémoire. Nous avons aussi le mémoire de l'Alliance de la Fonction publique du Canada, qui est daté du 26 novembre 2013, en plus d'une version écrite de l'exposé qui nous sera présenté aujourd'hui. Enfin, nous avons reçu le mémoire de Fair Pensions for All, qui vous a été fourni, et je crois qu'il correspond également à l'exposé qui nous sera présenté.

Chers collègues, au cours de notre réunion de deux heures aujourd'hui, nous entendrons le témoignage de Mme Christine Collins, présidente nationale de l'Union canadienne des employés des transports. Nous accueillons également des représentants de l'Alliance de la Fonction publique du Canada : la présidente nationale, Mme Robyn Benson; et la conseillère juridique, Mme Edith Bramwell. Je vous remercie de votre présence.

M. Bill Tufts, fondateur et directeur exécutif de Fair Pensions for All, comparaît par vidéoconférence.

Nous pourrions suivre cet ordre pour la présentation des exposés. Nous passerons aux questions par la suite. Allez- y, madame Collins.

Christine Collins, présidente nationale, Union canadienne des employés des transports : Je vous remercie de me donner l'occasion de comparaître devant vous aujourd'hui.

L'Union canadienne des employés des Transports est le syndicat national de la majorité des travailleurs et des travailleuses de Transports Canada, de la Garde côtière, des aéroports du Canada sous réglementation fédérale et d'autres organismes tels que l'Office des transports du Canada et NAV CANADA. L'UCET est l'un des éléments de l'Alliance de la Fonction publique du Canada.

Nos expériences sont différentes de celles d'autres groupes qui font partie de l'AFPC du fait que nos membres sont responsables de la sécurité et de la sûreté du public voyageur. Bon nombre de nos membres de l'UCET sont désignés comme étant essentiels, et ce, depuis bien des années. Si l'on en croit l'expérience unique de nos membres, je reconnais et appuie la nécessité des services essentiels.

J'ai été dirigeante syndicale pendant la majeure partie de ma vie professionnelle. Je suis véritablement consternée aujourd'hui par les déclarations publiques et politiques trompeuses touchant les dirigeants syndicaux, les syndicats et ce que nous faisons. Il est triste de constater que des positions sont arrêtées et que des décisions sont prises sur une base idéologique et sur des émotions, plutôt que sur des faits ou ce qui est dans l'intérêt de la population. C'est en effet un moment bien triste pour nos membres comme pour le public qui voyage et les travailleurs et travailleuses au Canada.

Les préceptes sur lesquels repose le projet de loi C-4 ont une base idéologique selon laquelle les milieux de travail sont dysfonctionnels et les syndicats sont en quelque sorte responsables des maux de la société, même si l'hypothèse en soi est fausse. Le fait est que selon mon expérience, les relations syndicales-patronales ne sont aucunement rompues et que des relations harmonieuses entre l'employeur et les agents de négociation peuvent, en fait, déboucher sur un milieu de travail plus efficace et efficient. À vrai dire, dans le cas de Transports Canada et de la Garde côtière canadienne, nos relations sont bonnes et les résultats s'avèrent bénéfiques pour ces organisations ainsi que pour le public qui compte sur ces programmes et ces services.

Mes observations positives viennent du fait que nous travaillons quotidiennement avec la direction sur des enjeux liés au milieu de travail, mais aussi sur les politiques, les procédures, les règlements et les textes de loi et la façon dont ces principes fondamentaux sont mis en pratique par la main-d'oeuvre, nos membres, comme nos inspecteurs de Transports Canada, nos agents de la recherche et du sauvetage de la Garde côtière canadienne ou encore nos pompiers aux aéroports. Les relations harmonieuses et consultatives ont pour point de départ les comités de consultation syndicale-patronale et les principes énoncés dans la Loi sur la modernisation de la fonction publique de 2003.

Il manque un élément important dans le projet de loi C-4, à savoir que l'administrateur général d'une organisation est au sommet d'une institution très large et complexe. Ce poste supérieur est, au bout du compte, chargé de s'assurer que son organisation atteint bien les objectifs qui lui ont été fixés dans les statuts y afférents. Cet administrateur général est la personne qui est en mesure de comprendre quels postes sont vraiment essentiels et lesquels ne le sont pas. Les agences centrales ou organisations horizontales chargées de l'élaboration de la politique horizontale ne sont pas véritablement en mesure de le savoir, et ne devraient pas l'être, d'ailleurs. C'est l'administrateur général qui devrait être responsable, et lorsque cette responsabilité existe, une organisation ministérielle peut être efficace, efficiente et imputable.

Il y a plus d'une décennie environ, des décisions sur les désignations essentielles ont été prises depuis la base. En d'autres mots, chaque gestionnaire responsable et délégué de l'agent de négociation dans l'unité opérationnelle a travaillé à la préparation d'un plan sur les désignations. Unité par unité, division par division, ces ententes et ces plans constitueront le fondement d'un plan ministériel. Lorsque des ententes sur les services essentiels ont été négociées, le processus décisionnel a été rapide, efficace et consensuel.

Lorsque les agences centrales sont responsables, il arrive parfois que nous soyons constamment en train de rattraper le temps perdu, d'essayer de régler des problèmes qui existaient il y a plusieurs années. Les négociations sont difficiles et les enjeux clés restent parfois sans solution. Des conventions collectives sont conclues lors de l'arrivée à échéance de l'entente elle-même. C'est donc pour cette raison que nous sommes convaincus que l'administrateur général, en consultation avec les agents de négociation et le Conseil du Trésor, devrait être responsable de la désignation des travailleurs essentiels. Il existe des procédures et autres mécanismes de consultation sur les lieux de travail au niveau ministériel dont on peut se servir pour en arriver à un consensus et à des ententes avant que des décisions ne soient prises.

Lorsque vous me poserez des questions, je serais ravie de vous donner un exemple de la façon dont le processus fonctionne et aussi de vous expliquer comment nous avons pu réussir par le passé.

À ce moment-ci, nous discutons du projet de loi C-4 au Sénat. Les chances d'une consultation axée davantage sur la collaboration n'existent pas, mais il est toutefois de votre pouvoir d'apporter des modifications modestes lorsque celles-ci sont dans l'intérêt public. Voilà pourquoi nous recommandons deux petites modifications au libellé du projet de loi. Nous proposons de modifier les paragraphes 119(1) et 120(1) afin d'y remplacer « employeur » par « administrateur général ». Grâce à ces changements, nous sommes persuadés d'en arriver à un milieu de travail plus efficace, efficient, imputable et responsable.

En conclusion, je vous remercie de nous avoir donné la possibilité de présenter nos modestes modifications et de prendre part à d'autres discussions.

Le président : Merci beaucoup. Je veux dire aux sénateurs que les articles 119 et 120 figurent à l'article 305 du projet de loi, à la page 232.

Nous passons à notre prochain témoin. Madame Benson, avez-vous un exposé à présenter? Madame Bramwell?

Robyn Benson, présidente nationale, Alliance de la Fonction publique du Canada : Oui, et je vous remercie beaucoup de nous avoir invitées à comparaître devant le comité.

Les modifications apportées dans les sections 17 et 18 du projet de loi C-4 ont été présentées sans qu'il y ait de consultation auprès des syndicats et, en toute honnêteté, je dois dire que c'est du jamais vu. D'habitude, de vastes consultations ont lieu lorsqu'on envisage d'apporter des changements aux dispositions législatives sur le travail. Par exemple, la Loi sur la modernisation de la fonction publique de 2003 n'a été présentée qu'après presque trois ans de discussions et d'études auxquelles avaient participé des intervenants, la Commission des relations de travail et des universitaires.

Cette fois, le gouvernement a élaboré son plan en catimini, derrière des portes closes, et il a inséré délibérément les modifications dans une loi budgétaire, dans l'objectif d'accélérer leur adoption sans que les discussions ou le débat ouvert qu'elles méritent aient lieu. En présentant ces modifications, on indique clairement aux employés de la fonction publique que leur employeur n'a pas de respect pour leur travail et les services qu'ils fournissent au pays.

Le projet de loi C-4 fait fi des principes fondamentaux de liberté d'association et de droit de grève. Il récrit les règles régissant la négociation, le choix des modes de règlement des différends, la désignation des services essentiels et l'arbitrage.

Notre mémoire présente nos nombreuses préoccupations en détail, mais je ne parlerai que de trois d'entre elles aujourd'hui.

Premièrement, il y a la désignation des services essentiels. Notre syndicat est d'avis que pendant une grève, les services devraient être maintenus à un niveau suffisant pour éviter de compromettre la sécurité de la population canadienne. En fait, le matin du 11 septembre 2001, les membres de l'AFPC étaient en grève. Nous avons cessé nos activités immédiatement et nos membres sont vite retournés au travail sans poser de question.

Nous avons approuvé que des milliers de postes soient jugés essentiels. Nous prenons très au sérieux l'établissement d'un équilibre entre les intérêts de la population, de nos membres et de l'employeur.

Le projet de loi C-4 donne au gouvernement le pouvoir de déterminer quels employés exercent des fonctions essentielles et quels services sont essentiels. On peut demander aux employés dont les fonctions sont jugées essentielles d'exercer toutes leurs tâches, et pas seulement celles qui sont essentielles.

Le droit de contester devant une commission des relations de travail l'opinion du gouvernement sur ce qui est jugé essentiel a été retiré. Il a été retiré même si selon les dispositions actuelles et la jurisprudence, la commission doit tenir compte avant tout de la sécurité du public.

Les principes d'équilibre et d'équité ont disparu. Le gouvernement ne peut pas être tenu responsable, car il n'y a aucune possibilité d'appel.

Deuxièmement, il y a le règlement des différends. Des spécialistes du droit ont déclaré que le droit d'un syndicat de demander l'arbitrage permet de fixer des règles du jeu équitables, car il fait contrepoids au pouvoir du Parlement de légiférer et d'ordonner un renvoi à l'arbitrage en vue de mettre un terme à une grève. Le projet de loi C-4 retire le droit de choisir l'arbitrage. L'arbitrage ne sera envisageable que si l'employeur accepte ou s'il a déterminé que 80 p. 100 des effectifs de l'unité de négociation exercent des fonctions essentielles. Il est facile d'imaginer que le gouvernement utilisera ses nouveaux pouvoirs pour déterminer que des fonctions essentielles sont exercées par juste un peu moins de 80 p. 100 des effectifs. Les autres employés seront limités dans leur capacité de faire une grève, et ils ne pourront donc pas choisir l'arbitrage.

De plus, le projet de loi C-4 limite les éléments dont peuvent tenir compte les commissions de l'intérêt public et les conseils d'arbitrage au moment de rendre une décision.

Troisièmement, l'une des pires modifications concerne la procédure de règlement des griefs. Le mécanisme des griefs de principe est utilisé comme un moyen de simplifier la procédure de règlement des griefs. Il l'a rendue plus efficace et économique pour l'employeur, de même que pour les syndicats, car un grief de principe peut remplacer des douzaines, voire des centaines, de griefs individuels. La modification proposée dans le projet de loi C-4 limiterait la possibilité de présenter un grief de principe aux situations dans lesquelles il n'est pas possible de déposer un grief individuel, c'est-à- dire, jamais.

Le projet de loi C-4 renferme une pléthore de modifications fondamentales aux lois sur les relations de travail qui couvrent l'ensemble des fonctionnaires. Je recommande que les sections 17 et 18 du projet de loi en soient retirées.

Je recommande également que le gouvernement entame une vraie consultation avec les agents négociateurs, les regroupements d'employés et les spécialistes de relations de travail.

Le président : Merci beaucoup, madame Benson.

Aviez-vous quelque chose à ajouter, madame Bramwell?

Edith Bramwell, conseillère juridique, Alliance de la Fonction publique du Canada : Les notes de l'AFPC ont été présentées par Mme Benson, notre présidente nationale.

Le président : Nous avons également reçu votre mémoire, qui est daté du 20 novembre, et vous défendez son contenu?

Mme Bramwell : Absolument.

Le président : Il n'y a rien à modifier ou à ajouter? Nous les avons tous les deux. Madame Benson, merci de l'information.

Nous en discuterons en temps et lieu, mais nous allons tout d'abord souhaiter la bienvenue à M. Bill Tufts, fondateur et directeur exécutif de Fair Pensions for All, qui comparaît par vidéoconférence.

Bill Tufts, fondateur et directeur exécutif, Fair Pensions for All : Je crois que ce que nous aimerions faire aujourd'hui, c'est examiner le projet de loi C-4 dans son ensemble. Lorsque nous étudions le projet de loi C-4 et que nous évaluons pourquoi il est important pour les Canadiens, nous constatons que l'une de ses principales caractéristiques est sa capacité d'instaurer l'équité et l'abordabilité dans l'emploi de la fonction publique fédérale.

Nos observations portent sur les aspects suivants du projet de loi : l'égalité des revenus, l'équité des régimes de pension et la pauvreté chez les personnes âgées. Sur ces questions, trouver des solutions qui soient justes pour tous les Canadiens et viables pour les générations à venir est d'une importance capitale. À notre avis, l'objectif du projet de loi est de permettre au gouvernement d'écouter ce que les gens ont à dire, et de toute évidence, ce qu'on indique au gouvernement, c'est qu'il faut apporter des changements dans le secteur public afin de rétablir l'équité pour les contribuables.

Lorsqu'il est question de rémunération du secteur public, il est de bon ton de faire une comparaison avec le 1 p. 100 des mieux nantis de la société. Cette comparaison est trompeuse. Si l'on élargit la définition, on se rend compte qu'une bonne part du secteur public se retrouve dans les 10 p. 100 des mieux nantis. Nos travaux nous ont amenés à constater que le revenu moyen des fonctionnaires, tout ordre confondu, classe ces employés dans ce groupe. Toutefois, par rapport aux retraités et aux Canadiens âgés de plus de 65 ans, les employés du secteur public bénéficiant d'un régime de retraite à prestations définies forment une proportion encore plus grande de la tranche de revenus supérieure.

À notre avis, le comité doit tenir compte des travailleurs canadiens de la classe moyenne dans son analyse de la rémunération du secteur public. Après tout, c'est sur le Canadien moyen que les changements fiscaux, si minimes soient-ils, ont le plus grand impact. En 2001, le salaire moyen au Canada était de 40 500 $. Depuis 2003, le régime de rémunération globale moyen du secteur public est passé à 114 100 $, selon un récent rapport du DPB, ce qui inclut le coût total des pensions, des avantages sociaux et des salaires. Ce chiffre concorde avec des études que nous avons réalisées au pays. Par exemple, un employé municipal à Guelph gagne en moyenne 113 000 $, pour un salaire moyen de 87 313 $.

Ce niveau de rémunération est alarmant et injuste parce que dans le secteur public, le salaire moyen n'est que de 40 500 $. À une époque où l'inflation pose des difficultés financières aux familles de la classe moyenne, le gouvernement doit absolument diminuer les salaires du secteur public et alléger le fardeau fiscal de ces familles.

L'effet de la hausse des salaires dans le secteur public se répercute négativement sur les régimes de pension du secteur public également. Pour chaque dollar de salaire remis à un travailleur du secteur public, le fonds de pension doit trouver 16 $ de plus, et ce, pour le reste de la vie du travailleur. Nous pensons qu'il est important de régler la question des pensions dans le régime du secteur public.

À l'époque où notre régime de pensions a été créé, l'hypothèse était que l'employé travaillerait pendant 30 ans et serait à la retraite pendant 12 à 15 ans. Les résultats préliminaires d'une étude récente réalisée par l'Institut canadien des actuaires montrent que l'espérance de vie moyenne chez les travailleuses de la fonction publique est de 89,4 ans; pour les hommes, elle est de 87,3 ans. À l'heure actuelle, l'employé fédéral moyen prend sa retraite à l'âge de 60 ans et souvent, le nombre d'années à la retraite dépasse le nombre d'années à l'emploi. Les régimes de retraite n'ont jamais été conçus pour verser un revenu pendant une période plus longue que celle pendant laquelle l'employé a cotisé.

Dans la tendance générale, il y a une tendance marquée dont il faut tenir compte. Selon nous, c'est ce que fait ce projet de loi. Il s'agit de limiter les coûts d'indemnisation, soit le coût de fonctionnement le plus important de tout gouvernement et de toute administration municipale. Les coûts d'indemnisation représentent entre 50 et 80 p. 100 des coûts de fonctionnement des gouvernements. Dans le cadre de nos études, nous examinons la situation du gouvernement fédéral et des gouvernements provinciaux ainsi que des administrations municipales. Selon nous, il est important que le gouvernement fédéral fasse preuve de leadership pour relever ces défis et limiter ces coûts.

Les baby-boomers ont commencé à atteindre l'âge de la retraite il y a deux ans, alors que les premiers de ce groupe ont eu 65 ans. Bon nombre des régimes de retraite au pays sont déjà en difficulté. Lors de notre dernier témoignage au Sénat, nous avons présenté les résultats d'une étude que nous avons menée sur les sociétés d'État et les coûts de leurs pensions. Notre rapport intitulé Bigger Bailouts and Deeper Holes souligne certains des problèmes avec les régimes de retraite de la fonction publique.

La Société canadienne des postes a annoncé récemment qu'il lui faudrait 1 milliard de dollars l'an prochain simplement pour financer les coûts et obligations liés aux pensions de ses membres. Je sais que tout cela dépasse un peu le contexte du groupe des travailleurs dont il est question aujourd'hui, mais cela fait partie des mêmes tendances et problèmes sur lesquels il faut se pencher.

Nous proposons tous des solutions réalistes relativement au projet de loi C-4. Aujourd'hui, vous entendrez parler en détail des formalités juridiques liées aux menaces. Les syndicats vous parleront de la Charte des droits et libertés, des contestations devant les tribunaux concernant ce projet de loi et des mesures syndicales qu'ils prévoient étudier.

Mardi dernier, nous avons témoigné au Comité des finances de la Chambre des communes. Selon les représentants syndicaux présents à cette séance, 2014 sera l'année du mécontentement en raison de la grogne qui s'installe au sein des fonctionnaires fédéraux.

Ce que nous attendons de ce projet de loi — et nous espérons qu'il rendra cela possible —, c'est qu'il permette le rajustement des salaires des fonctionnaires en fonction des moyennes que l'on retrouve dans le secteur privé. Un des dossiers auxquels les syndicats tiennent beaucoup, c'est la modification du Régime de pensions du Canada. Selon nous, il serait imprudent de modifier le régime pour le moment. Il faudrait convertir les régimes de pension de la fonction publique en régimes à cotisations déterminées et voir comment on pourrait offrir aux Canadiens un soutien durable pour leur retraite.

Nous n'aurons pas beaucoup de temps pour parler des aspects techniques des sujets qui seront abordés aujourd'hui. Je me souviens que ce projet de loi a été rejeté il y a cinq ou six ans. À l'époque, j'étais un des représentants de la Chambre de commerce du Canada en raison de mon expertise et de mon expérience à titre de consultant sur les avantages sociaux des employés. Il semble que nous soyons revenus à la case départ. Il y a beaucoup de questions concernant les conventions collectives et quels employés seront jugés essentiels.

Merci de m'avoir invité à venir témoigner aujourd'hui. J'espère que nous pourrons vous donner des conseils et des idées sur les éléments du projet de loi C-4 que nous jugeons importants.

Le président : Merci beaucoup, monsieur Tufts.

Avant de laisser la parole aux sénateurs, j'aimerais préciser un point. Vous avez dit que le salaire moyen au Canada en 2011 était de 40 500 $. Or, à la page 2 de votre mémoire, vous soulignez qu'il s'agit de données de 2001. J'imagine que la bonne année, c'est 2011 et non 2001?

M. Tufts : C'est une coquille. C'est censé être 2011.

Le président : Aussi, lorsque vous parlez du salaire moyen, vous faites référence au secteur privé seulement ou aux salaires du secteur privé et du secteur public combinés?

M. Tufts : Ces données nous viennent de Statistique Canada et représentent le salaire des employés du secteur privé et public combinés. Elles ne sont pas ventilées...

Le président : C'est une combinaison des deux. Merci beaucoup.

La sénatrice Buth : J'aimerais remercier les témoins d'avoir accepté notre invitation.

Madame Collins, je regarde les changements que vous proposez au projet de loi. Dans le cas de l'article 305, vous proposez de remplacer le mot « employeur » par « administrateur général ». Selon ce que je peux voir, le mot « employeur » est déjà utilisé dans l'article de la loi et n'est pas modifié par ce projet de loi. Est-ce que vous proposez un changement supplémentaire?

Mme Collins : C'est exact.

La sénatrice Buth : D'accord. Dans votre exposé — et je crois comprendre pourquoi vous proposez ce changement —, vous avez offert de nous donner un exemple du processus auquel participe l'administrateur général. Pourriez-vous nous donner cet exemple? J'aurai une autre question à vous poser par la suite.

Mme Collins : D'accord. Je vais utiliser Transports Canada comme exemple, puisqu'un grand nombre de nos membres au sein de ce ministère sont jugés essentiels, comme les inspecteurs de l'aviation civile, ferroviaire, maritime, et ainsi de suite. Lorsque le processus de consultations se déroule à l'extérieur du ministère, il arrive souvent que les parties ne s'entendent pas sur les employés qui doivent être jugés essentiels.

C'est le processus que nous respections. Je vais utiliser les services des aéronefs comme exemple. Il y a plusieurs postes dans ce service. Il a suffi que le directeur général des Services des aéronefs, M. Gaudreau, et moi nous rencontrions pour conclure un accord sur les services essentiels. Nous avons ensuite fait parvenir cet accord au Conseil du Trésor et au représentant de l'Alliance de la Fonction publique du Canada aux fins de signature. Donc, plutôt que d'avoir à composer avec 30 conflits, nous nous sommes rencontrés, nous avons discuté de la situation et avons résolu le problème.

En ce qui a trait aux agents des relations de travail à Transports Canada, lorsque les parties avaient de la difficulté à convenir des services essentiels, il a été possible de rencontrer les agents des relations de travail et de convenir très rapidement de la façon de procéder. Si on élimine cette possibilité — ça ne fonctionne pas très bien depuis que cette approche ascendante a été éliminée et que les conflits ne sont plus acheminés au Conseil du Trésor —, donc, si on met fin à ce processus, ça devient beaucoup plus difficile.

La raison pour laquelle je veux changer le mot « employeur » par « administrateur général », c'est qu'il est possible de trouver des solutions aux désaccords et aux conflits lorsqu'il y a collaboration et consultation.

La sénatrice Buth : Lorsque vous parlez de problèmes dans le cadre de la négociation en dehors du ministère, faites- vous référence au gouvernement ou au Conseil du Trésor?

Mme Collins : Je fais référence au Conseil du Trésor et à l'AFPC, notre agent négociateur.

Je ne propose pas d'éliminer ce rôle. Ce que je propose, c'est de revenir au processus initial, cette approche ascendante, au cours duquel Transports Canada et nous — nous avons créé un cadre qui fonctionne très bien pour définir les services essentiels à tous les niveaux de gestion jusqu'à l'administrateur général et moi-même. Il y a eu très peu de désaccords dans le cadre de ce processus ayant nécessité l'intervention du Conseil du Trésor et de l'Alliance de la Fonction publique du Canada.

La sénatrice Buth : Vous proposez de remplacer le mot « employeur » par « administrateur général » — ce processus était-il enchâssé dans une autre loi avant d'être proposé dans ce projet de loi?

Mme Bramwell : Pourriez-vous répéter la question?

La sénatrice Buth : Vous proposez de modifier un article d'une loi qui ne fait pas l'objet d'un changement dans le cadre de ce projet de loi. L'article du projet de loi en question précise que l'employeur a le droit exclusif de décider. Donc, le mot « employeur » n'a pas été changé.

Ce que vous nous demandez, c'est de remplacer le mot « employeur » par « administrateur général ». Le mot « administrateur général » est-il utilisé dans une autre loi ou est-ce un nouveau changement que vous demandez?

Le président : Aux fins de précision, l'article 305 introduit un nouvel article, le 119. L'article 119 proposé dans ce projet de loi est nouveau et fait référence à l'employeur. Toutefois, il n'a pas encore été adopté.

La sénatrice Buth : Mais on propose un remplacement, monsieur le président.

Le président : C'est exact.

La sénatrice Buth : On propose de remplacer l'article 119. Habituellement, les changements apportés sont soulignés. Ce que je me demande, c'est si le mot « employeur » était déjà utilisé...

Le président : Votre première question est la suivante : Dans la loi actuelle, utilise-t-on le mot « employeur »?

La sénatrice Buth : J'essaie simplement de savoir s'il s'agit de quelque chose de nouveau.

Mme Bramwell : Ce qui inquiète l'UCET, ce sont les changements proposés. Nous sommes deux organisations distinctes. Ce que je peux faire, c'est vous donner une réponse technique selon mon interprétation de la loi. J'ai devant moi l'article 119 actuel. Il dit ceci : « La présente section s'applique à l'employeur et à l'agent négociateur... ».

Je crois que ce qui inquiète l'UCET, c'est que le projet de loi C-4 fait occasionnellement référence au rôle de l'administrateur général, notamment en ce qui a trait à la répartition des dépenses dans le processus d'arbitrage. À certains endroits, on parle expressément de l'administrateur général. Je ne veux pas remettre en question ce que dit Mme Collins, mais ses inquiétudes reposent peut-être sur le fait que ces changements, jumelés aux précisions concernant le rôle de l'administrateur général dans certains cas, aura un impact sur la définition du mot « employeur » utilisé à l'article 119 tel que pourrait l'interpréter une tierce partie neutre.

La sénatrice Buth : Mais, même si on utilise le mot « employeur », rien n'empêche qu'il soit question de l'administrateur général, comme le propose Mme Collins.

Je sais que vous tentez d'être la plus précise possible, mais le mot « employeur » pourrait également faire référence à l'administrateur général en tant que personne désignée pour représenter l'employeur.

Mme Collins : Oui, mais je ne le vois pas ainsi. L'employeur, c'est le Conseil du Trésor. Le processus permettant de définir les services essentiels d'un ministère a été modifié. Il n'est plus question de désignation. Auparavant, avant d'amorcer une ronde de négociation, les parties se consultaient et convenaient du nombre d'employés à désigner comme étant essentiels en cas de grève.

On parle maintenant de services essentiels. Les employés sont maintenant désignés comme faisant partie d'un service essentiel. Le processus est donc modifié. Principalement, la consultation se fait entre l'agent négociateur et le Conseil du Trésor.

On intervient seulement en cas de désaccord sur certains points. Ce que je dis, c'est que l'approche ascendante où les points en litige sont acheminés à l'échelon supérieur fonctionne pour nous, étant donné le nombre d'employés essentiels que nous représentons.

Donc, je propose que l'on conserve le processus actuel.

Mme Benson : Pour faire suite à ce qu'a dit Mme Collins, ce que propose le projet de loi C-4, c'est d'éliminer la consultation. Ce qu'a dit Mme Collins, c'est qu'on voudrait que la consultation avec l'administrateur général demeure une option. Ce projet de loi élimine la consultation.

M. Clement a donné une entrevue récemment. En réponse à une question, il a dit qu'on nous expliquerait comment le processus allait fonctionner une fois que le projet de loi serait adopté.

Nous voulons nous assurer que le processus de consultation demeure. D'ailleurs, dans le cadre du processus actuel, en cas de désaccord, le dossier est analysé par une tierce partie indépendante. On propose également d'éliminer cette option. Il faut donc tenir compte de tout cela.

Le président : Madame Collins, selon le gouvernement, la raison pour laquelle ce changement est proposé, c'est que peu d'accords ont été conclus entre l'agent négociateur et l'employeur en ce qui concerne les employés essentiels. Si je me souviens bien, c'est arrivé seulement huit fois dans toute la fonction publique depuis que ce processus a été adopté. Donc, selon le gouvernement, cette approche est inefficace. Pourtant, vous nous dites qu'elle est idéale. Pourriez-vous nous aider à comprendre votre position?

Mme Collins : Je vais essayer, et je demanderai aussi à Mme Benson de vous répondre.

Les employeurs avec lesquels je travaille — Transports Canada, l'Agence canadienne des transports, la Garde côtière canadienne et le Bureau de la sécurité dans les transports — ont toujours bien collaboré avec nous. Nous avons conclu des accords avec le ministère. Il y a eu peu de conflits à ce chapitre, mais certains ont été acheminés à l'échelon supérieur.

Dans le cas de la Garde côtière, nous avons convenu que toute la flotte était nécessaire. Nous nous sommes donc penchés sur la taille de l'équipage. Très rapidement, nous avons conclu un accord, si bien que lorsque le dossier a été acheminé à l'Alliance de la Fonction publique du Canada et au Conseil du Trésor, il y avait peu de désaccords entre l'employeur et nous et ceux-ci ont été réglés dans le cadre du processus d'appel. Je ne peux parler que des employeurs avec lesquels nous travaillons : le Bureau de la sécurité dans les transports, l'Agence canadienne des transports, la Garde côtière du Canada et le ministère des Transports du Canada.

La sénatrice Buth : C'était justement ma question, madame Benson. J'ai entendu dire que seulement sept ou huit accords sur les services essentiels avaient été conclus. C'est une partie du problème. L'employeur a de la difficulté à conclure ces accords avant que les employés n'obtiennent le droit de grève. Peut-être pourriez-vous nous parler des accords sur les services essentiels et des raisons pour lesquelles ils n'ont pas été conclus.

Mme Benson : Ça dépend de la façon dont on regarde les choses. Oui, plusieurs ont été conclus, mais plusieurs sont encore non réglés. Aussi, il y a les conventions collectives. On commence par s'attaquer aux accords sur les services essentiels et ensuite on se penche sur les conventions collectives. On négocie ces accords, mais ceux-ci ne sont plus une priorité ni pour le Conseil du Trésor, ni pour nous.

Ce n'est pas que nous n'avons pas toujours été en mesure de conclure un accord; un accord sur les services essentiels n'était pas toujours nécessaire. Avant de pouvoir faire la grève, il faut conclure un accord sur les services essentiels. Par exemple, lorsque nous avons fait la grève en 2001 et 2004, des accords sur les services essentiels avaient été conclus. Depuis, nous avons tenu des rondes de négociation et la grève n'était même pas envisagée. Donc, nous n'avons pas conclu d'accord sur les services essentiels.

Avant de parler de difficultés à cet égard, le Conseil du Trésor devrait peut-être venir à la table pour que nous puissions discuter de la conclusion des ententes.

Le président : Merci de cette précision. Nous aimons valider les informations antérieures, et c'est ce que nous essayons de faire.

La sénatrice Callbeck : Vous avez toutes les deux mentionné l'absence de consultations de la part du gouvernement. Dans ce cas, quand avez-vous appris qu'il y aurait des changements? Au dépôt du projet de loi?

Mme Benson : Le discours du Trône laissait entendre que des changements seraient apportés à ce chapitre. J'ai téléphoné au cabinet de M. Clement dès le lendemain, étant donné qu'il est le président du Conseil du Trésor et que je suis la présidente de l'Alliance de la Fonction publique du Canada. Je l'avais vu la semaine précédente à propos d'un autre dossier, mais il n'avait rien mentionné là-dessus. Il n'a pas répondu à mon appel, mais son chef de cabinet m'a dit que son équipe et lui ignoraient la teneur des modifications, qu'ils devaient examiner le dossier, que ce genre de changement ne se fait pas en criant ciseau, et qu'il tenterait de m'organiser une rencontre avec M. Clement. J'ai certainement été très étonnée d'apprendre l'existence des modifications dans le discours du Trône, puis le projet de loi d'exécution du budget a été déposé la semaine suivante.

Il y a eu de nombreux autres échanges téléphoniques, et nous avons eu droit à une séance d'information du sous- ministre au sujet des modifications. Il n'y a eu ni consultations ni préavis. J'avais même rencontré M. Clement la semaine précédant le discours du Trône, mais il n'a pas pu me voir après celui-ci. Nous avons eu une rencontre depuis le dépôt du projet de loi C-4, et je lui ai exprimé mon désarroi.

La sénatrice Callbeck : Ce n'était jamais arrivé auparavant?

Mme Benson : Jamais. Que ce soit dans les années 1970, les années 1990 ou en 2003, nous avons toujours été consultés. D'ailleurs, les rapports Fryer et Finkelman, avant mon époque, témoignent des consultations qui ont toujours été menées.

La sénatrice Callbeck : Et vous, madame Collins?

Mme Collins : J'ai appris l'existence des modifications après la présentation du projet de loi.

La sénatrice Callbeck : Madame Collins, vous dites que les postes de bien des membres de l'Union canadienne des employés des transports ont été désignés comme étant essentiels pendant des années. De quel pourcentage parle-t-on approximativement?

Mme Collins : Au sein de l'équipage des navires de la garde côtière, je dirais que probablement 60 p. 100 des postes sont essentiels. Du côté des inspecteurs techniques de Transports Canada, la proportion est d'environ 50 p. 100. Au Bureau de la sécurité des transports, une large part des postes d'enquêteurs sur les accidents sont essentiels. Compte tenu de la nature de leur travail, nous reconnaissons le besoin d'assurer la sécurité et la sûreté des voyageurs. Ils ont toujours été plus nombreux que leurs homologues d'autres ministères à recevoir cette désignation.

La sénatrice Callbeck : Atteindre 80 p. 100 ne sera pas difficile. Allez-vous avoir recours à l'arbitrage?

Mme Collins : À vrai dire, nous ne le ferons pas puisque nous sommes une composante de l'Alliance de la Fonction publique du Canada et que je représente ces groupes au sein de l'ensemble des membres. Nos équipages de navires font partie de la table des Services de l'exploitation, ou SV, et c'est l'ensemble de la table qui est considérée comme essentielle ou non.

J'ignore si je m'exprime clairement.

La sénatrice Callbeck : C'est correct.

J'ai remarqué que vous ne recommandez qu'une seule modification. Vous contentez-vous de celle-ci parce que vous ne croyez pas pouvoir en faire adopter d'autres? Avez-vous des réserves au sujet de la fusion des deux entités ou des facteurs dont l'arbitre doit tenir compte, comme la situation gouvernementale et le reste?

Mme Collins : J'en suis très inquiète, mais je crois qu'il incombe à la présidente nationale de l'Alliance de la Fonction publique du Canada d'aborder ces questions au nom de l'ensemble des membres. Selon moi, l'amendement que je demande est mineur et réalisable dans le cadre du processus. Je crois fermement qu'un processus d'appel est nécessaire concernant les services essentiels. J'ai toutefois limité mes commentaires sur le projet de loi à la question des services essentiels.

La sénatrice Callbeck : Avec le projet de loi, madame Benson, les arbitres devront se fonder sur deux éléments, le premier étant la situation fiscale du Canada. J'aimerais connaître votre interprétation de cette disposition. Il est possible qu'un arbitre décide que personne n'aura droit à une hausse salariale s'il constate un déficit, et qu'un autre accepte d'accorder une augmentation s'il juge que le déficit n'est pas énorme, n'est-ce pas? J'aimerais savoir ce que vous en pensez.

Mme Benson : Je vais demander à Mme Bramwell de répondre.

Mme Bramwell : J'aimerais souligner quelques points au sujet des nouveaux facteurs dont les arbitres doivent tenir compte. La loi actuelle en prévoit cinq, dont un porte sur l'état de l'économie canadienne. Par conséquent, le besoin de responsabilité financière était déjà présent de façon générale.

Or, il est important de s'attarder au libellé exact des nouvelles dispositions législatives. On parle de la situation fiscale du Canada, mais pas seulement de l'état de l'économie canadienne. Il s'agit de « la situation fiscale du Canada par rapport à ses politiques budgétaires énoncées », vraisemblablement par le gouvernement de l'heure. Cette précision introduit des aspects largement politiques aux considérations de l'arbitre, et nous trouvons cette modification très malheureuse. Voilà un des deux facteurs dont l'arbitre doit désormais tenir compte.

L'autre facteur se trouvait aussi dans la loi actuelle, à savoir la capacité de recruter et de maintenir en poste des travailleurs qualifiés au sein de la fonction publique. Bien des facteurs dont l'arbitre devait auparavant tenir compte ne sont désormais plus que des considérations possibles, laissées à la discrétion de l'arbitre. On parle notamment d'établir des échelons et des professions comparables de façon juste et raisonnable, y compris comparables à des postes analogues dans le secteur privé.

Nous trouvons ces modifications extrêmement déconcertantes à la lumière de certains objectifs du projet de loi C-4.

La sénatrice Callbeck : Mon autre question porte sur la fusion des deux entités. Il s'agit de la Commission des relations de travail dans la fonction publique qui, si j'ai bien compris, résout les différends lors de négociations collectives, et du Tribunal de la dotation de la fonction publique, qui traite les plaintes en matière de dotation et d'échelons. Les deux seront combinés en une seule entité. Avez-vous des réserves à ce sujet?

Mme Benson : Je vais commencer, puis Mme Bramwell pourra compléter.

Cette fusion nous préoccupe vivement, car je crois savoir qu'il n'est plus nécessaire d'avoir travaillé dans le domaine des relations de travail pour siéger à la commission. Je suppose qu'il s'agira de nominations. Comment peut-on assurer l'équité sans expérience?

Mme Bramwell : C'est ce qui nous inquiète le plus quant aux modifications proposées dans le projet de loi. Les deux entités étaient reconnues pour leurs compétences très pointues et pour être, chacune à sa façon, chef de file de son domaine respectif. Il est fort regrettable de perdre ce savoir-faire et de combiner les entités, ce qui diminuera le nombre total de personnes qui y siégeront alors que le mandat de la commission sera plus large qu'auparavant.

La sénatrice Callbeck : Je vois.

Monsieur Tufts, j'ai une question pour vous. J'examine vos solutions, et vous proposez notamment de regrouper les programmes de soutien au revenu de tous les Canadiens pour former un plan juste et global qui empêche les aînés de basculer dans la pauvreté. Vous proposez donc un revenu annuel garanti pour tous les aînés, n'est-ce pas?

M. Tufts : Nous aimerions remplacer les programmes que paient actuellement les gouvernements d'un bout à l'autre du Canada. Il existe toutes sortes de programmes, y compris le Régime de pensions du Canada, la Sécurité de la vieillesse et le Régime de retraite de la fonction publique, dans lequel 34 milliards de dollars sont versés annuellement. Bien des prestataires du régime de retraite sont aussi admissibles au Régime de pensions du Canada et à la Sécurité de la vieillesse. Soulignons qu'un fonctionnaire qui reçoit des prestations moyennes de 38 000 $, ce qui représente un régime de retraite complet selon le rapport annuel de l'an dernier, est aussi admissible au Régime de pensions du Canada et à la Sécurité de la vieillesse. Ainsi, le fonctionnaire prend sa retraite bien plus tôt que le reste des Canadiens et touche des prestations bien plus élevées que le revenu médian de 24 000 $ des Canadiens de plus de 65 ans. Ces prestations sont aussi supérieures au salaire moyen des travailleurs. Notre proposition rétablit la parité.

Il faudrait notamment considérer l'égalité des syndicats d'un bout à l'autre du pays. Il n'y a pas une grosse marge entre les employés syndiqués des municipalités, des provinces et du Canada. Ce qui se passe selon moi, c'est que les travailleurs fédéraux tentent de prendre les devants en disant qu'ils ne forment qu'un ordre gouvernemental, et que les régimes de retraite de partout au pays ont de sérieux problèmes financiers qui minent les provinces et les villes aussi.

Pour revenir au programme, nous pensons que les régimes de retraite se sont éloignés de ce pour quoi ils ont été conçus, à savoir empêcher les aînés de tomber dans la pauvreté. Nous savons que le gouvernement fédéral a annoncé des modifications au régime de retraite des fonctionnaires, mais ce n'est pas assez. Tout ce qui change, c'est que les nouveaux employés devront prendre leur retraite à l'âge de 65 ans. Puisque ce n'est pas suffisant pour renverser les difficultés financières des régimes de retraite, nous vous proposons de revenir à leur but initial, qui est d'empêcher les aînés de tomber dans la pauvreté, et d'envisager un remaniement complet, et complémentaire à ce dont nous discutons aujourd'hui.

Nous recommandons effectivement de prévoir un revenu minimum garanti et de permettre aux Canadiens de créer des programmes concernant leur propre sécurité de retraite pour remplacer le système actuel à deux vitesses, dans lequel les fonctionnaires reçoivent 34 milliards de dollars. Ces travailleurs ne représentent que 20 % du marché du travail. Or, les autres 65 p. 100 de la population active dépendent de REER et ne bénéficient pas de ces 34 milliards de dollars, et nous trouvons qu'il s'agit là d'un énorme déséquilibre fiscal. Nous ne sommes qu'à la veille d'un tsunami démographique et, en 2030, les coûts du Régime de pensions du Canada, de la Sécurité de la vieillesse et des régimes de retraite de la fonction publique vont enlever à l'économie tout ce qui nous tient à cœur. À notre avis, il faut complètement repenser le système. Le projet de loi C-4 n'est qu'un premier pas dans cette direction puisque nous commençons à examiner les réalités financières de l'emploi des fonctionnaires. Nous souhaitons que ce soit l'objectif du projet de loi et qu'une tendance s'en dessine.

[Français]

La sénatrice Bellemare : J'ai deux questions; l'une s'adresse à M. Tufts et l'autre à Mme Collins. J'aurais beaucoup de choses à vous demander parce que c'est quand même très substantiel, monsieur Tufts, les modifications que vous nous proposez pour le système de sécurité du revenu à la retraite.

Ma question concernera toutefois plutôt le projet de loi dont nous sommes saisis, c'est-à-dire le projet de loi C-4. Je vais vous demander de réagir à la partie de la section 17, et de la section 18 du projet de loi. Qu'avez-vous à dire à ce sujet? Trouvez-vous que ce sont des changements qui iront dans le sens de vos propositions? Comment réagissez-vous aux articles 17 et 18, puisque le projet de loi contient peu de choses sur les régimes de pensions à l'exception de changements concernant l'administration du Régime de pensions du Canada?

[Traduction]

M. Tufts : Un des points intéressants que les représentantes des syndicats ont présentés est qu'une profusion de détails ne se trouvent pas dans le projet de loi. Étant donné que celui-ci compte 322 pages, je pense qu'il porte un grand coup à toutes sortes de questions. Les dispositions dont nous discutons aujourd'hui font à peine deux pages, et je suis persuadé qu'on en parlera encore longtemps pour avoir une idée de leur orientation globale. Je pense que le gouvernement fédéral est mécontent de ne pas avoir pu apporter de modifications fiscales.

Nous recevons des commentaires de Canadiens d'un bout à l'autre du pays. Il y a un écart considérable entre les secteurs privé et public, et des mesures doivent être prises à cet égard. Le système des 50 dernières années ne fonctionne pas, et le gouvernement cherche sérieusement d'autres solutions pour mieux tirer parti de la situation actuelle. Je pense qu'il se préoccupe surtout de sa responsabilité financière et des façons de l'harmoniser à la situation économique et aux réalités d'aujourd'hui.

[Français]

La sénatrice Bellemare : Ma question à Mme Benson concerne un autre sujet.

Mme Collins nous propose des amendements bien spécifiques au projet de loi. Par contre, madame Benson, votre intervention se résume à enlever les sections 17 et 18 dans le projet de loi C-4. En d'autres mots, vous ne nous proposez pas d'amendements, si ce n'est que de retirer ces deux sections du projet de loi C-4.

Entre les deux, il y a beaucoup de nuances à apporter. Je vais vous reposer une question qui a peut-être été implicite dans d'autres questions : si les sections 17 et 18 n'étaient pas exclues du projet de loi, y a-t-il des suggestions que vous auriez apportées pour améliorer la situation telle que vous la voyez dans le projet de loi?

[Traduction]

Mme Benson : Non, car je trouve que l'ensemble du système laisse à désirer.

Nous ne sommes pas le seul agent négociateur. J'ignore si d'autres syndicats comparaîtront, mais je crois savoir que vous avez reçu un mémoire de l'Association des juristes de justice.

Il n'y a eu aucune consultation. Si le gouvernement veut moderniser le système, comme M. Clement l'a dit, il doit selon nous en discuter et nous intégrer au Code canadien du travail, mais ce n'est pas ce qu'il propose.

Nous croyons que les propositions de sections 17 et 18 que vous avez sous les yeux comportent des lacunes fondamentales et devraient être supprimées. Nous n'avons envisagé aucun amendement.

La sénatrice Eaton : Ma question va plutôt dans le même sens que celles des autres sénateurs. J'ai remarqué que le projet de loi accorde encore à l'employeur le droit ultime de déclarer quels postes constituent un service essentiel, n'est- ce pas?

Mme Bramwell : Dites-vous que ce changement proposé dans le projet de loi C-4 est tiré de la Loi actuelle sur les relations de travail dans la fonction publique?

La sénatrice Eaton : Le projet de loi supprime les consultations, comme vous le dites, mais l'employeur a-t-il encore le droit de déterminer quels postes sont essentiels ou non?

Mme Benson : Si j'ai bien compris, le droit absolu de décider quels postes sont essentiels ou non lui revient désormais. Comme Mme Collins l'a dit, nous pouvions auparavant discuter avec le sous-ministre, et parfois avec le ministre ou le sous-ministre adjoint, selon les circonstances. Nous faisions aussi appel à une tierce partie indépendante en cas de différend.

Nous avons examiné les descriptions de fonctions. Dans l'exemple que M. Clement a donné à la radio, tous les agents des douanes sont jugés essentiels. En fait, ce n'est pas nécessairement vrai puisque nous ne croyons pas que la fonction de perception de ces agents est essentielle, comme il s'est avéré dans des mesures législatives passées. La fonction de perception n'a rien à voir avec la sécurité et la sûreté du pays.

Quand nous nous sommes livrés à cet exercice avec nos agents des douanes, qui se prononçaient alors sur un accord de principe que nous avions conclu avec le Conseil du Trésor, les agents n'accomplissaient pas tous des tâches qui auraient été jugées essentielles dans l'éventualité d'un conflit de travail.

La sénatrice Eaton : Merci de votre explication.

Les agents des douanes n'ouvrent-ils pas les bagages afin de percevoir les droits de douane et de veiller à ce que les gens ne transportent pas de bombes ou d'articles indésirables?

Mme Benson : Comprenez-moi bien. Les agents des douanes assurent la sécurité à nos frontières. Il y a quelques semaines, je me suis entretenue avec M. Clement au sujet de l'importance des agents des douanes et du fait qu'une étude menée par le Conseil du Trésor qui les avait comparés aux agents de contrôle des aéroports manquait complètement de respect à leur endroit. Par conséquent, loin de moi la pensée de dire que le travail effectué par les agents des douanes n'est pas d'une importance vitale. Toutefois, la perception des droits de douane ne constitue pas leur responsabilité essentielle, si vous voulez aborder la question du point de vue de ce qui est jugé essentiel à la sûreté et à la sécurité du pays dans l'éventualité d'un conflit de travail.

La sénatrice Eaton : Je vais vous poser une autre question parce que je comprends la rage que vous éprouvez. Essentiellement, le ministre vous a retirés de l'équation et prend la décision. Or, j'oserais penser que les gens qui travaillent pour lui sont assez intelligents pour prendre le temps de s'entretenir avec vous. Je suppose que je suis optimiste. Je n'ose pas croire que quelqu'un ferait tout en son pouvoir pour se mettre à dos l'autre côté, tout à fait essentiel, de l'équation.

Cela dit, à mon avis, M. Clement tient probablement compte du fait que c'est lui qui est redevable aux électeurs, pas vous. Il assume donc cette responsabilité et, si jamais il y a des files d'attente à la frontière et que des gens entrent au pays parce que le travail des agents n'a pas été jugé comme étant un service essentiel, c'est lui s'attirera les foudres des Canadiens. N'est-ce pas vrai?

Mme Benson : Je comprends ce que vous dites. Vous avez mentionné que vous oseriez penser qu'ils prendraient le temps de s'entretenir avec nous. Eh bien, nous parlons ici aujourd'hui de changements radicaux qu'on propose d'apporter à la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique sans que le gouvernement ne nous ait jamais consultés et sans même avoir jamais fait allusion au fait qu'il allait dans ce sens. Je ne lui fais donc pas autant confiance que vous.

Mardi, M. Stroud, d'Unifor, a prononcé un exposé sur la Garde côtière, disant qu'il considère que beaucoup des membres de la GC — en fait presque tous — offrent des services essentiels. Pourtant, certains de ces postes ont été supprimés. Par conséquent, si ces postes ont été jugés essentiels, pourquoi le gouvernement — le Conseil du Trésor — les a-t-il supprimés? Dans quelle mesure ces postes sont-ils essentiels?

À notre avis, le gouvernement risque fort bien de conclure d'importantes ententes sur les services essentiels sans consultation préalable — tout comme ils l'ont fait dans le cas des présents changements — et de les insérer dans un projet de loi d'exécution du budget de manière à pouvoir les faire adopter à toute vapeur.

La sénatrice Eaton : Pour notre bien commun, j'espère que vous avez tort.

Mme Benson : Je l'espère également.

[Français]

La sénatrice Hervieux-Payette : Bienvenue mesdames, monsieur. Merci de votre présence aujourd'hui.

Dans l'Alliance de la Fonction publique du Canada, il y a un paragraphe sur la question des frais. On y lit qu'il y a des frais si on est un employé syndiqué alors que pour un employé non syndiqué, il n'y en a pas.

J'ai posé des questions à la partie patronale, et je n'ai pas eu de réponse qui me permettait d'évaluer la nature de ces frais. Vous connaissez probablement mieux que moi les frais encourus par l'employé qui doit recourir à l'arbitrage. Est- ce qu'on parle de centaines de dollars ou de milliers de dollars?

On dit que c'est le président qui va trancher et va envoyer la facture, mais dans votre cas, avez-vous fait une étude d'impact? Avez-vous une idée de ce que cela va coûter?

[Traduction]

Mme Bramwell : Nous commençons à évaluer quels seraient les coûts associés au nouveau projet de loi. Peut-être qu'il serait bon de placer les choses dans leur contexte en expliquant comment le système fonctionne.

À l'heure actuelle, que vous soyez représenté ou non par un agent négociateur, vous pouvez présenter un grief à l'égard de vos conditions d'emploi. Si ce grief peut être renvoyé à l'arbitrage, conformément aux critères énoncés dans la loi qui sont plutôt restrictifs, vous pouvez le soumettre à la Commission des relations de travail dans la fonction publique.

Si vous êtes représenté par un agent négociateur, c'est lui qui assume les frais encourus pour vous représenter ou pour demander à une autre personne de parler en votre nom. Si vous n'êtes pas représenté par un agent négociateur, vous pouvez soit parler en votre nom et comparaître sans être représenté, soit retenir les services d'un avocat pour vous représenter. Dans ce cas, tous les frais associés au médiateur ou à l'arbitre devant lequel vous comparaissez de même qu'à la présentation de la paperasse relative au grief à la Commission des relations de travail dans la fonction publique sont absorbés par ladite commission.

Nous aimerions bien vous dire plus précisément quels seront les nouveaux frais d'arbitrage que nous devrons assumer. Le projet de loi donne quelques indications. Premièrement, quand une personne est syndiquée, le syndicat et l'employeur assumeraient conjointement les frais d'arbitrage.

Malheureusement, le projet de loi ne précise pas ce qu'on entend par « arbitrage ». S'agit-il du moment où vous comparaissez devant l'arbitre — ce qui se produit seulement dans une fraction des cas? S'agit-il du moment où vous vous rendez chez un médiateur — ce qui se produit beaucoup plus souvent? S'agit-il du moment où vous déposez vos documents à la Commission des relations de travail dans la fonction publique — ce qui, évidemment, se produit dans tous les cas? Nous n'en savons rien parce que le projet de loi ne nous le dit pas.

De surcroît, quand votre grief concerne les droits de la personne, du fait que la mesure législative vous prive du droit de présenter votre grief à la Commission canadienne des droits de la personne si vous êtes un fonctionnaire fédéral, les frais que vous encourrez seront dorénavant absorbés par la commission, de la même manière qu'ils l'auraient autrefois été par la commission et le tribunal. Cependant, vous devez quand même retenir les services d'un avocat.

Donc, aucun employé, qu'il soit syndiqué ou non, n'a à assumer les frais d'arbitrage quand il dépose un grief concernant les droits de la personne.

À notre avis, il est difficile d'effectuer une analyse des coûts parce que beaucoup de griefs concernent à la fois les conventions collectives et les droits de la personne. Les griefs se présentent rarement de façon parfaitement distincte; souvent, des questions relatives aux droits de la personne sont soulevées dans le cadre d'un grief portant sur l'application d'un article quelconque de la convention collective. Par conséquent, nous nous demandons comment, au juste, les modalités de partage des frais prévues par le projet de loi seront appliquées.

Le projet de loi semble laisser entendre qu'il existe une distinction bien nette entre un grief relatif aux droits de la personne et tous les autres griefs, alors que, en fait, nous voyons des griefs portant sur un licenciement ou l'interprétation des conditions d'emploi qui touchent les droits de la personne.

[Français]

La sénatrice Hervieux-Payette : Cela me donne plus d'information, mais cela ne me dit pas si ce sera au syndiqué ou si ce sera au syndicat de payer les coûts.

[Traduction]

Mme Bramwell : Dans les cas où un employé syndiqué dépose un grief qui n'est pas lié aux droits de la personne, le syndicat ou plutôt ses membres — puisque la seule façon qu'un syndicat peut augmenter ses revenus, c'est de hausser les cotisations de ses membres — paieront les frais d'arbitrage. Les fonctionnaires syndiqués devront donc maintenant assumer ces frais, tandis que dans le cas des fonctionnaires non syndiqués, en termes très simples, c'est le gouvernement qui paiera la note.

La sénatrice Hervieux-Payette : Je pense que c'est une question de droits de la personne parce qu'un employé est un employé.

[Français]

Pensez-vous que cette mesure discriminatoire, qui n'encourage pas nécessairement à se syndiquer, aura un effet sur le taux de syndicalisation?

[Traduction]

Mme Bramwell : Voilà justement un des aspects du projet de loi qui nous préoccupent. Il n'y a aucun doute qu'il est discriminatoire envers les fonctionnaires syndiqués.

[Français]

La sénatrice Hervieux-Payette : À l'heure actuelle, lorsqu'un employé syndiqué et un employé non syndiqué occupent un poste au même rang de la classification, ont-ils la même rémunération, les mêmes vacances, les mêmes congés, le même salaire, les mêmes avantages sociaux?

[Traduction]

Mme Bramwell : J'aimerais simplement préciser qu'ils ne pourraient pas appartenir à la même classification, parce que les unités de négociation varient en fonction des groupes professionnels dans la fonction publique fédérale. Un employé pourrait être exclu de l'unité de négociation pour des raisons de confidentialité ou pour assumer des fonctions de gestion, mais au moment de la classification, on ne pourrait avoir des employés d'une classification donnée qui seraient syndiqués tandis que des employés d'une autre classification ne le seraient pas.

Il se pourrait fort bien que, pour des employés qui se trouvent dans des situations similaires et qui effectuent à peu près les mêmes tâches, certains aient le droit d'exercer certains recours tandis que d'autres n'en aient pas le droit.

Les inégalités engendrées par le projet de loi finiront par poser problème.

[Français]

La sénatrice Hervieux-Payette : La modification qui fait que l'employé lui-même ne peut pas se représenter dorénavant et qu'il est obligé de passer par un agent, est-ce positif pour l'ensemble des travailleurs de cette unité? Quel est l'avantage de n'avoir aucune possibilité, sauf pour les droits de la personne, de ne pas pouvoir se représenter soi- même?

[Traduction]

Mme Bramwell : En vertu du régime existant, si votre grief porte sur les conditions d'emploi qui ont été négociées par votre unité de négociation, vous devez obtenir l'approbation de cette dernière.

Ce que les employés syndiqués ont perdu, c'est le droit de déposer un grief portant sur leur licenciement ou une mesure disciplinaire sans l'approbation de l'agent négociateur.

Évidemment, les fonctionnaires dont les droits sont très différents de ceux des employés du secteur privé de compétence fédérale n'ont pas le droit de négocier leur classification ou leur dotation. Voilà une autre chose qu'ils ont perdue.

L'Alliance de la Fonction publique du Canada soutient depuis longtemps que — et cela a été abordé cet automne, tant au moment de l'étude de la Loi sur la modernisation de la fonction publique que pendant les vastes consultations ayant mené à l'élaboration de celle-ci, de même que dans les commentaires que nous avons fournis dans un rapport précédent — elle soutient donc que les fonctionnaires devraient être adéquatement couverts aux termes du Code canadien du travail.

[Français]

La sénatrice Hervieux-Payette : Je trouve cela très difficile, parce qu'on écrit toujours, en parlant d'un organisme, la LRTIRT puis la LCDP. Je ne comprends pas plus en anglais qu'en français, mais lorsqu'on parle de la Commission des relations de travail, on nous dit que le président est indépendant et est nommé par le gouvernement. Après cela, les vice-présidents et les membres le sont, d'une part, par le syndicat et, d'autre part, le gouvernement. Cette exigence de la loi vous convient-elle comme structure?

[Traduction]

Mme Bramwell : Je suis désolée. Je ne suis pas certaine d'avoir bien compris la question.

[Français]

La sénatrice Hervieux-Payette : En ce qui a trait aux commissaires qui siégeront à la nouvelle commission des relations de travail, on nous dit que le président sera nommé par le gouvernement, mais les vice-présidents et les autres commissaires seront nommés, d'une part, par la partie patronale et, d'autre part, par la partie syndicale et en alternance jusqu'à ce qu'on ait nommé les membres et les commissaires.

Est-ce que cette formule est acceptable pour vous?

[Traduction]

Mme Bramwell : L'exigence selon laquelle la composition de la commission doit refléter les nominations de l'employeur, d'une part, et de l'agent négociateur, d'autre part, est prévue par l'actuelle Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, et la commission a trouvé cette exigence bien utile au fil des ans. Le président actuel a été nommé par le Conseil privé. La commission fonctionne de cette façon depuis bien longtemps.

Cela ne constitue donc pas un grand changement. Toutefois, ce qui a changé, comme Mme Benson l'a déjà souligné, c'est que, désormais, la loi n'exigera pas que les personnes qui y sont nommées aient une expertise dans le domaine des relations de travail, et cela nous préoccupe beaucoup.

[Français]

La sénatrice Hervieux-Payette : Dans le choix de vos représentants commissaires, vous exigerez qu'ils aient une connaissance des relations de travail?

[Traduction]

Mme Bramwell : Nous avons toujours recommandé la nomination de personnes ayant une telle expertise. Cela a d'ailleurs aussi été le cas du côté patronal, parce qu'il s'agissait d'une exigence de la loi.

[Français]

La sénatrice Hervieux-Payette : Comment explique-t-on ce changement alors qu'on dit que les gens qui n'ont pas de compétence dans ce domaine pourront siéger, puisqu'il ne s'agit pas d'un très grand nombre de personnes?

[Traduction]

Mme Bramwell : Eh bien, une personne très simple pourrait dire que cela ne change rien aux nominations du côté syndical — car je pense que nous allons continuer de nommer les gens comme nous l'avons toujours fait —, mais que cela donnerait certainement à l'employeur la possibilité de nommer des personnes en fonction de préoccupations autres que la nécessité de nommer des personnes compétentes à la Commission des relations de travail dans la fonction publique.

[Français]

La sénatrice Hervieux-Payette : Ma dernière question porte sur l'abandon d'un organisme qui fournit des statistiques et des données qui permettent aux commissaires et aux arbitres de se fier à des données objectives. D'après vous, est-ce qu'on peut retrouver ces données ailleurs?

[Traduction]

Mme Bramwell : La situation des fonctionnaires est plutôt unique. Aujourd'hui, on a comparé — et cela se produira encore — le salaire moyen des fonctionnaires à celui des Canadiens en général. Les fonctionnaires n'occupent pas des emplois qui correspondent à la moyenne canadienne. Bien des facteurs les distinguent des autres travailleurs. Presque tous les fonctionnaires doivent se soumettre à des niveaux d'autorisation de sécurité, lesquels sont assez stricts aux échelons les plus bas et peuvent être nettement plus rigoureux. L'analyse approfondie du travail qu'ils font est nécessaire, car elle sert à rendre compte de la nature de leur paiement et de leur salaire au public canadien; elle était pertinente et relevait des services d'analyse et de recherche en matière de rémunération que la loi confiait antérieurement à la commission.

La sénatrice Seth : Je vous remercie de cette information, mais le problème demeure.

J'ai une question pour Mme Benson. Comme vous l'avez dit, il y a eu très peu de consultation au moment de la rédaction des dispositions de ce projet de loi. Si on vous avait demandé ce que vous souhaitiez ajouter à ce projet de loi, qu'est-ce que vous auriez suggéré? Qu'est-ce que vous souhaiteriez?

Mme Benson : Premièrement, nous n'apporterions pas de modifications à la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique au moyen d'une loi budgétaire, car, de toute évidence, cela rend les amendements difficiles. Nous aurions aimé une consultation relative à la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, comme dans le passé.

M. Clement a déclaré publiquement vouloir moderniser la fonction publique, et nous étions d'accord. Nous avons dit que nous nous soumettrions au Code canadien du travail ou à une loi de cette nature. Nous croyons qu'en cas de retrait des sections 17 et 18, il sera possible de tenir une consultation avec tous les syndicats, les parties prenantes et les intellectuels pour aller de l'avant.

La sénatrice Seth : Avez-vous essayé cela?

Mme Benson : J'ai parlé de consultation à M. Clement. Il a très clairement dit ne pas vouloir consulter les syndicats. Il a bien dit qu'il voulait que les changements soient réalisés avant 2014, quand nous entreprendrons nos négociations collectives.

Pendant l'été 2014, l'AFPC mènera des négociations collectives pour plus de 100 000 de ses membres. M. Clement a été très clair, au point où il a écrit sur Twitter que j'avais demandé la cogouvernance. Ce n'est certainement pas ce que j'ai demandé. J'ai demandé de véritables consultations et je l'ai invité à manifester plus de respect pour ses employés, les membres de mon syndicat.

La sénatrice Seth : Quels seront les dommages, d'après vous?

Mme Benson : Nos membres sont très déçus de l'actuel président du Conseil du Trésor. Ils se rendent au travail tous les matins pour offrir des services aux Canadiens parce qu'ils sont fiers du travail qu'ils font. Ils travaillent très fort pour les Canadiens. Ce n'est pas la perception qu'ils voient ce président du Conseil du Trésor transmettre au public canadien quand dehors, en point de presse, il parle des congés de maladie et des employés qui naviguent sur Internet.

Nous allons connaître une période de grandes turbulences, parce que nos membres veulent être traités avec dignité et respect. Ils veulent qu'on reconnaisse le travail qu'ils accomplissent pour les Canadiens. Fermer des bureaux de district d'Anciens Combattants Canada, ce n'est pas reconnaître le travail qu'ils accomplissent pour les Canadiens.

Le président : Dans le sillage de la question de la sénatrice Seth, avez-vous des observations à faire au sujet d'autres aspects du projet de loi?

Mme Bramwell : J'aurais des choses à dire à propos de plusieurs aspects du projet de loi, et une bonne partie de cela se trouve dans notre mémoire. Nous avons veillé à bien souligner cela pour les sénateurs.

Je vais parler d'un autre aspect du projet de loi qui aura un effet énorme sur nous : les fonctionnaires n'auront plus la possibilité de choisir parmi des mécanismes de résolution des conflits. Cela faisait partie du délicat équilibre de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique. À la façon dont vont les choses, plusieurs éléments normalement soumis à la négociation collective ne peuvent tout simplement pas être négociés par nos membres.

Avant, toute unité de négociation pouvait choisir la conciliation ou la grève, comme mécanisme de résolution des conflits ou d'arbitrage. Ce choix n'existe plus et nous trouvons que c'est vraiment dommage.

Je tiens à souligner que, dans la réalité, il a rarement été nécessaire de recourir à l'arbitrage uniquement pour en arriver à une convention collective, et il a été encore plus rarement nécessaire de recourir à la grève. L'agent négociateur pouvait choisir la méthode de résolution des conflits qui convenait, ce qui a, en réalité, contribué dans une grande mesure aux bonnes relations de travail et à la paix sociale au sein de la fonction publique fédérale.

Nous trouvons tout à fait déconcertant que cette possibilité soit retirée, surtout sans consultation avec les agents négociateurs, et ce, même si l'examen quinquennal de la LMFP, qui a eu lieu il y a moins de trois ans, n'a donné lieu à aucune recommandation en ce sens.

Le président : Madame Collins, avez-vous des commentaires à faire?

Mme Collins : J'aimerais parler des modifications apportées à la partie II du Code canadien du travail concernant le refus de travailler et la définition de « danger », laquelle se fonde maintenant sur la « menace imminente ». Cela fait tout simplement disparaître les agents du personnel qui seraient responsables de cela. La responsabilité et le pouvoir sont maintenant entre les mains du ministre ou de la personne qu'il désigne. Encore là, il n'y a pas de définition révélant une compréhension des problèmes de santé et de sécurité au travail, des situations dangereuses ou des menaces imminentes. Par exemple, est-ce que la lumière doit être suspendue au-dessus de ma tête pour représenter une menace imminente, ou est-ce qu'elle ne représente pas une menace imminente parce qu'elle se trouve un peu à côté, de sorte qu'elle pourrait ne pas tomber sur moi? C'est une des questions à se poser. Quand quelqu'un travaille dans un endroit où il y a de l'amiante, ce n'est pas une menace imminente, mais c'est certainement une menace chronique.

Nous sommes tous très inquiets de la gravité de ce changement.

Mme Benson : J'aimerais ajouter à ce que Mme Collins disait à propos de la partie II du Code canadien du travail et des changements — je dois le souligner — que dans le passé, tous changements visant les questions de santé et de sécurité faisaient l'objet de consultations. Encore là, il n'y en a pas eu.

Le président : Monsieur Tufts, aimeriez-vous dire quelque chose? Êtes-vous toujours là?

M. Tufts : Je pense que nous parlons aujourd'hui d'un problème très grave. Il est intéressant de constater ce que le projet de loi C-4 entraînera. On dirait que l'année 2014 sera agitée, car les syndicats se sentent menacés par toute avancée que nous jugerions juste et équitable, par rapport au secteur privé.

On a entendu dire que le projet de loi aurait pour effet d'embourber les tribunaux pendant un bon moment. Des litiges concernant les droits de la personne seront portés devant les tribunaux et les syndicats vont aussi réagir fortement. Mardi, au Comité des finances de la Chambre des communes, on nous a mis en garde que d'importantes mesures de grève seraient prises en 2014.

Si on jette un coup d'oeil à ce qui s'est passé au cours des 50 dernières années avec le mouvement syndical au Canada, on constate qu'on lui doit beaucoup. Ma mère était une employée fédérale et est aujourd'hui retraitée. Elle a fait carrière dans le secteur public fédéral.

Le président : Je suis désolé de vous interrompre, mais la question était : Y a-t-il d'autres articles ou sections de la loi, outre celles dont on a déjà parlé, que vous aimeriez porter à notre attention? Il a notamment été question du Code canadien du travail.

M. Tufts : Non. Je crois qu'il y a très peu d'information là-dedans. Il est évident que le processus d'arbitrage doit être réformé. Il ne rend pas service aux Canadiens en ce moment.

Le président : Merci beaucoup.

[Français]

La sénatrice Bellemare : Est-ce que les modifications proposées dans le projet de loi C-4 rapprocheront les processus dans la fonction publique fédérale des processus provinciaux ou au contraire vont-elles les en éloigner? Est-ce que les changements qui sont apportés vont nous éloigner des procédures avec les fonctions publiques provinciales ou si on s'en rapprochera?

[Traduction]

Mme Bramwell : Ces changements reposent sur ce qu'on pourrait qualifier de régime régressif de relations de travail, qui concède aux employés moins de droits que ce que garantissent la plupart des autorités canadiennes en matière de relations de travail, et font reculer les choses davantage. On conviendra que la loi la plus régressive en matière de relations de travail, en ce qui a trait aux services essentiels, est en Saskatchewan, et elle fera sous peu l'objet d'une audience devant la Cour suprême du Canada. Cette loi est plus régressive encore.

La sénatrice Bellemare : Que celle de la Saskatchewan?

Mme Bramwell : Oui. Elle ne ramène pas les conditions des fonctionnaires fédéraux au niveau d'une norme nationale. Elle enlève des droits à des travailleurs qui n'en avaient déjà pas beaucoup en fait de relations de travail.

[Français]

La sénatrice Bellemare : Je comprends donc que les négociations dans les fonctions publiques provinciales se font avec des règles différentes, qui donnent plus de droits aux employés que le projet de loi C-4?

[Traduction]

Mme Bramwell : Ce sont des généralités. Souvent, les travailleurs des services essentiels sont exclus des régimes provinciaux de relations de travail, car ils sont assujettis à des régimes spéciaux. Je parle par exemple des travailleurs des services de police et services hospitaliers.

Généralement parlant, c'est l'un des régimes les plus restrictifs au Canada, et il le sera encore plus si ces changements sont adoptés.

La sénatrice Hervieux-Payette : Je vais poursuivre dans le même ordre d'idées. Il y a de nombreuses années, je travaillais au ministère du Travail du Québec, et nous avons réformé la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Quand il est question de sécurité, une vie est une vie. Peu importe si c'est celle d'un employé fédéral, provincial ou municipal. Lorsqu'il y a des risques, cela devrait être la même chose pour tout le monde, à mon avis. Par exemple, lorsqu'il y a des risques pour la grossesse, la travailleuse peut profiter d'un retrait préventif. Mais je me demandais si ce nouveau régime offrirait plus de protections aux travailleurs ou au moins des protections équivalentes à ce qu'offrent les régimes provinciaux ou municipaux.

Mme Benson : Je suis désolée, notre expert de la section 5 n'est pas ici aujourd'hui, mais pour en avoir discuté avec nos membres, je crois comprendre qu'ils auront moins de droits. Nos membres seront davantage exposés aux risques, car ils ne pourront pas refuser de travailler selon la nouvelle définition.

Je crois que Mme Collins l'a très bien exprimé lorsqu'elle a parlé de danger imminent. Va-t-on devoir attendre que des projectiles sifflent au-dessus de la tête de nos gardiens de parc ou de nos agents des services frontaliers avant de pouvoir parler de danger imminent? Est-ce qu'on peut aussi penser à l'amiante? J'ai perdu récemment un très bon ami à moi de la Saskatchewan, un fonctionnaire fédéral qui a été exposé à de l'amiante il y a 20 ans. Il était inspecteur de viandes et il y avait de l'amiante dans les usines où il travaillait. Il a succombé à la maladie l'an dernier, et le gouvernement de la Saskatchewan vient tout juste d'adopter la loi d'Howard (Howard's Law), qui prévoit la création d'un registre sur les immeubles contenant de l'amiante, de façon à ce que les travailleurs soient au courant de ce qui les attend et qu'ils puissent exercer leur droit de refus. Ce droit ne serait plus le même si le projet de loi devait être adopté tel quel.

Une telle exposition peut mettre en danger le système reproducteur des hommes et des femmes, surtout s'ils perdent leur droit de refus avec la nouvelle définition de danger imminent.

J'ai résumé les choses, mais nous avons des experts qui se sont penchés sur la question. Si vous avez besoin de plus d'information, nous pouvons certainement vous en fournir. Je crois que nous avons déjà soumis un mémoire sur la section 5.

La sénatrice Hervieux-Payette : Je pense qu'il est important que nous en sachions plus à ce sujet, parce que nous avons aussi la responsabilité de protéger nos employés. Je prends la question très au sérieux. Nous devons veiller à égaliser le processus visant à sauver une vie, parce que c'est à cela que revient l'évaluation du danger. Bien sûr, les médecins et autres spécialistes peuvent déterminer de quel type de danger il s'agit, s'il est imminent ou non.

J'étais tentée de vous dire que tous les fonctionnaires fédéraux qui doivent traverser le pont Champlain sont probablement exposés à un danger imminent. Je blague, mais c'est simplement pour dire que la réponse est parfois très claire. Cependant, il y a aussi des zones grises, et c'est à ce moment-là qu'il est important de pouvoir compter sur des mécanismes adéquats. J'aimerais qu'on me rassure et qu'on me dise que les changements proposés ne mettront pas nos employés en danger.

Mme Benson : D'après ce que j'ai compris, les changements proposés à la section 5 vont certainement mettre les employés en danger. Cela ne fait aucun doute; nous allons vous envoyer le mémoire que nous avons présenté à ce sujet.

La sénatrice Hervieux-Payette : Merci. C'est important.

Le président : Nous allons avoir le son de cloche du comité qui a étudié la section 5, c'est-à-dire le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie. Il a préparé un rapport d'après les témoignages qu'il a recueillis. Ce rapport a été déposé, et mardi après-midi prochain, nous allons nous entretenir avec le président et le vice- président du comité. Je tenais à vous rassurer là-dessus. Nous n'avons pas examiné tous les articles et toutes les sections du projet de loi, mais nous allons consulter les autres comités sénatoriaux qui l'ont fait.

Mme Benson : Merci pour cette précision, mais je crois que j'aurais davantage l'esprit tranquille si je pouvais moi- même vous transmettre notre mémoire.

Le président : Absolument.

Mme Benson : D'après ce que j'ai entendu de M. Bob Kingston, qui est coprésident du comité pangouvernemental de santé et sécurité et d'une section locale de l'Alliance de la Fonction publique du Canada, certains des renseignements et des chiffres présentés étaient inexacts, alors il a fait parvenir des lettres pour rectifier les faits.

Le président : Si vous pouviez nous transmettre cette information avant mardi après-midi, cela nous serait très utile.

Madame Collins, voulez-vous ajouter quelque chose? Nous aimerions entendre ce que vous avez à dire.

Mme Collins : J'aurais quelques observations à faire concernant le refus de travailler, les changements proposés et l'incidence que cela pourrait avoir. Les membres de l'UCET sont nombreux à travailler dans des secteurs à risque, notamment les membres des équipes de recherche et de sauvetage, qui sont envoyés en mission de recherche, de sauvetage et de récupération. Ils sont également nombreux à monter à bord de différents véhicules pour effectuer des inspections; ils sont exposés à de l'amiante, entre autres choses. C'est mettre nos membres en danger d'éliminer le droit de refus et le processus d'enquête assuré par les agents de sécurité.

Un autre facteur auquel personne ne s'est intéressé, je crois, c'est que ce changement à la partie II du Code canadien du travail ne s'applique pas qu'aux fonctionnaires fédéraux. Il touche tous les secteurs sous législation fédérale, par exemple, dans le secteur privé, les employés des aéroports.

Je peux vous dire que des employés ont perdu la vie au travail. Nous avons aussi vu des blessures graves. En fait, il y a deux semaines, un de nos membres a été blessé et brûlé gravement dans une explosion. Les travailleurs auraient-ils rapporté la situation et refusé de travailler s'ils avaient dû au préalable prouver qu'il y avait un danger imminent? C'est très inquiétant et je pense que cela met les travailleurs dans une situation à risque, qui pourrait mener à des blessures et même à des décès.

Je vous demande donc d'examiner de près quelles répercussions aurait le fait d'éliminer l'intervention des experts, des agents de sécurité, et de modifier la définition, à la lumière de ce que cela signifie vraiment.

Le président : Et vous voulez parler de la définition de « danger ». Le droit de refuser de travailler en cas de danger existe encore, mais la définition de « danger » a été modifiée. Est-ce bien cela?

Mme Benson : C'est exact.

Le président : Monsieur Tufts, nous vous remercions d'avoir été des nôtres aujourd'hui. Je vois que c'est assez tranquille de votre côté, mais nous vous sommes reconnaissants d'avoir témoigné au nom de Fair Pensions for All.

Madame Collins, de l'Union canadienne des employés des transports, et mesdames Benson et Bramwell, de l'Alliance de la Fonction publique du Canada, merci de nous avoir aidés à voir plus clair dans tout cela.

(La séance est levée.)


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