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NFFN - Comité permanent

Finances nationales

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Finances nationales

Fascicule 19 - Témoignages du 21 octobre 2014


OTTAWA, le mardi 21 octobre 2014

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui, à 9 h 34, pour étudier les dépenses prévues dans le Budget principal des dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 2015.

Le sénateur Joseph A. Day (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Honorables sénatrices et sénateurs, nous allons poursuivre ce matin notre étude du Budget principal des dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 2015.

[Traduction]

Nous sommes heureux d'accueillir ce matin des représentantes officielles des Instituts de recherche en santé du Canada. Thérèse Roy est dirigeante principale des finances et vice-présidente du Portefeuille de la gestion et de la Planification des ressources; et Kelly VanKoughnet est vice-présidente associée de la Recherche et de l'Application des connaissances.

Nous remercions chacune de vous d'être venue. Cela fait un certain temps que des membres de votre organisme ont comparu devant nous, et nous nous réjouissons à la perspective d'entendre parler de l'excellent travail que vous accomplissez.

Thérèse Roy, dirigeante principale des finances et vice-présidente, Portefeuille de la gestion et planification des ressources, Instituts de recherche en santé du Canada : Merci, monsieur le président. J'aimerais remercier votre comité de nous avoir invitées à nous entretenir avec vous du Budget principal des dépenses des Instituts de recherche en santé du Canada, ou des IRSC, pour l'année 2014-2015. J'ai le plaisir d'être accompagnée aujourd'hui par Mme Kelly VanKoughnet.

Je profite de cette occasion pour d'abord expliquer le rôle des IRSC au sein du gouvernement fédéral et décrire les mécanismes utilisés par notre organisation pour garantir le soutien de la recherche répondant aux plus hautes normes d'excellence scientifique nationales et internationales.

Comme vous le savez, les IRSC ont été établis en 2000 par le Parlement afin de faire du Canada un chef de file mondial dans la création et l'application de connaissances, grâce à la recherche en santé, pour améliorer la santé de tous les Canadiens et de la communauté mondiale. Plus précisément, les objectifs des IRSC sont d'abord d'exceller, selon les normes internationales reconnues de l'excellence scientifique, dans la création de nouvelles connaissances, puis d'appliquer ces nouvelles connaissances en vue d'améliorer la santé de la population canadienne et d'offrir de meilleurs produits et services de santé.

Organisme autonome au sein du portefeuille de la santé, les IRSC sont aussi tenus par la loi de conseiller la ministre de la Santé sur toutes les questions relatives à la recherche en santé ou à la politique de santé.

Les IRSC, avec le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada et le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada, représentent les trois agences subventionnaires de recherche fédérales. Ensemble, ces trois agences appuient et favorisent la recherche de haute qualité dans une grande variété de domaines et de disciplines. Elles appuient également de prestigieux programmes de recherche fédéraux, tels que les Chaires de recherche du Canada et les Réseaux de centres d'excellence, qui ont pour but d'attirer au Canada et de maintenir en poste les meilleurs chercheurs et stagiaires.

[Français]

Les IRSC sont dirigés par un président, le Dr Alain Beaudet. L'orientation stratégique globale des IRSC est établie par le conseil d'administration qui a également pour mission de gérer les biens, les activités et les affaires de l'organisation. Le Dr Beaudet et l'honorable Michael Wilson, ancien ministre fédéral des Finances, coprésident actuellement le conseil d'administration des IRSC.

Les IRSC intègrent la recherche selon une structure interdisciplinaire unique constituée de 13 instituts virtuels. Conjointement, les instituts s'emploient à réaliser les objectifs fondamentaux des IRSC qui travaillent de concert avec des intervenants du pays et de l'étranger afin d'établir un programme cohérent de recherche en santé dans l'ensemble des disciplines, des secteurs et des régions. Ce programme permet de saisir les occasions de recherche scientifique et reflète les nouveaux besoins en matière de santé des Canadiens et de la collectivité mondiale.

Le conseil scientifique des IRSC, composé des directeurs scientifiques de nos 13 instituts virtuels et de la haute direction, a pour rôle d'élaborer la stratégie de recherche et d'application des connaissances des IRSC, de la mettre en œuvre et d'en faire rapport en conformité avec la Loi sur les IRSC et les orientations stratégiques établies par le conseil d'administration.

La gestion quotidienne des IRSC est assurée par le comité de la haute gestion, lequel est dirigé par le président des IRSC et est composé de trois vice-présidents et d'une vice-présidente associée.

Par l'entremise des IRSC, le gouvernement du Canada appuie la recherche dans le domaine de la santé, qui porte sur les problèmes de santé les plus pressants de la société et favorise l'essor économique et la prospérité du pays.

Chaque année, le gouvernement du Canada investit environ un milliard de dollars afin d'appuyer les efforts de plus de 13 700 chercheurs et stagiaires de tout le pays.

Les IRSC investissent environ 94 p. 100 de leur budget d'un milliard de dollars dans divers programmes et activités conçus pour soutenir la recherche exceptionnelle et stimuler l'application des connaissances, en conformité avec le mandat et les orientations stratégiques des IRSC. Organismes au fonctionnement efficace, les IRSC consacrent seulement 6 p. 100 de leur budget à l'administration et à la gestion de leurs activités.

[Traduction]

Les programmes d'appui à la recherche des IRSC se divisent en deux grandes catégories. La première, les programmes d'appui à la recherche libre, représente environ 70 p. 100 des investissements des IRSC en recherche. Ces programmes sont conçus pour assurer l'enrichissement constant des données probantes et des connaissances scientifiques qui fournissent la matière première dans la création de produits et de services de santé innovateurs.

La deuxième catégorie, les programmes d'appui à la recherche priorisée, appuie la recherche émergente et ciblée qui suit l'évolution des besoins et des priorités des Canadiens en matière de santé. Pour soutenir les initiatives de recherche priorisée, les IRSC mobilisent activement le milieu de la recherche en santé, incluant les partenaires fédéraux, provinciaux et territoriaux, ainsi que les secteurs privés et sans but lucratif.

Les « initiatives phares » des IRSC constituent un élément clé du soutien à la recherche priorisée. Ces initiatives sont généralement de grande envergure et visent à créer un impact transformateur et mesurable sur la santé et le système de santé à court terme. Les IRSC ont actuellement neuf initiatives phares consacrées à un large éventail de questions de santé, comme les maladies chroniques, la médecine personnalisée, la maladie d'Alzheimer et la santé des Autochtones.

Pour assurer la qualité et l'excellence de la recherche soutenue par tous les programmes de financement des IRSC, les demandes présentées par les chercheurs et les stagiaires sont soumises à un processus d'évaluation par les pairs reconnu à l'échelle internationale. Chaque année, plus de 3 000 chercheurs donnent de leur temps pour faire partie du comité d'évaluation.

Ces comités étudient les demandes de financement soumises aux IRSC, évaluent leur mérite d'après une série de critères prédéfinis, et font des recommandations financières au conseil scientifique des IRSC avant que son président approuve les demandes.

[Français]

Il faut aussi mentionner que, en plus de soutenir l'excellence en recherche au Canada, les IRSC sont des participants et des leaders actifs dans le cadre d'importantes initiatives internationales dans le domaine de la santé mondiale. Par exemple, les IRSC sont membres de l'Alliance mondiale contre les maladies chroniques, qui a pour but d'élaborer et de faciliter les collaborations de recherche innovatrice entre les pays à revenu faible et intermédiaire et les pays à revenu élevé dans la lutte contre les maladies chroniques dont le fardeau ne cesse de croître, comme vous le savez.

Les IRSC sont aussi membres fondateurs du Consortium international de recherche sur les maladies rares. Le but de ce consortium est d'accélérer les découvertes médicales qui visent les personnes touchées par une maladie rare et de mettre au point 200 nouveaux traitements d'ici 2020.

La Conférence mondiale contre la démence constitue un autre exemple de l'engagement international des IRSC. Cet événement, organisé conjointement par le Canada et la France le mois dernier, à Ottawa, visait à débattre de nouveaux modèles de collaboration entre l'industrie et le milieu universitaire en ce qui a trait à la prestation de soins et de traitements aux personnes souffrant de démence et à l'aide aux soignants.

[Traduction]

Comme en témoigne le Budget principal des dépenses pour 2014-2015, les IRSC présentent un budget approuvé de 985 millions de dollars. Ceci représente une augmentation de 17,3 millions de dollars comparativement au Budget principal des dépenses de 2013-2014. Cette augmentation est principalement attribuable à un nouvel investissement permanent de 15 millions de dollars dans la Stratégie de recherche axée sur le patient, ou SRAP, annoncée dans le Plan d'action économique de 2013.

La SRAP, qui a été annoncée en 2011, regroupe une coalition de partenaires fédéraux, provinciaux et territoriaux dont le but est de stimuler l'innovation dans le système de santé canadien. Elle fait en sorte que le patient reçoive les bons soins au bon moment, pour finalement mener à de meilleurs résultats cliniques.

Dans le Plan d'action économique de 2014, le gouvernement du Canada a fait l'annonce d'un nouvel investissement permanent de 15 millions de dollars par année dans les IRSC pour l'expansion de la SRAP, pour la création du Consortium canadien sur la dégénérescence et le vieillissement et pour d'autres priorités de recherche en santé. Cependant, comme le savent bien les membres du comité, le Budget principal des dépenses de 2014-2015 des IRSC ne tient pas compte de cette annonce budgétaire.

[Français]

C'est ainsi que prend fin mon allocution d'ouverture. Je vous remercie de votre attention, et j'espère que nous vous avons transmis une bonne vue d'ensemble des IRSC et que cette information sera utile aux délibérations de votre comité.

Mme VanKoughnet et moi sommes maintenant à votre disposition pour répondre à toutes vos questions.

Je vous remercie.

Le président : Merci beaucoup, madame Roy. Je vais commencer par la sénatrice Eaton, de Toronto.

[Traduction]

La sénatrice Eaton : Il y a tellement de questions dont nous pourrions discuter. J'aime toujours aborder les questions liées aux Autochtones parce qu'elles semblent tellement fascinantes.

Premièrement, pouvez-vous me dire si seuls les salaires attirent les meilleurs scientifiques au Canada et permettent de les maintenir en poste? Comment attirez-vous de nouveaux scientifiques et conservez-vous ceux que vous employez déjà?

Kelly VanKoughnet, vice-présidente associée, Recherche et application des connaissances, Instituts de recherche en santé du Canada : Je mentirais si je disais que l'argent importe peu à la communauté scientifique. Toutefois, outre l'argent, je pense que le principal attrait du Canada par rapport à sa concurrence, c'est la nature coopérative des travaux de recherches qui y sont menés. Bon nombre de nos partenaires les plus concurrentiels dans le domaine de la recherche à l'échelle mondiale, comme les institutions américaines, sont extrêmement concurrentiels les uns envers les autres.

La sénatrice Eaton : Les institutions sont cloisonnées.

Mme VanKoughnet : Très cloisonnées. Comme nos experts travaillent dans diverses régions du Canada, il est nécessaire et traditionnel qu'ils établissent des réseaux à l'échelle nationale et qu'ils collaborent avec ces réseaux, au lieu d'entrer en concurrence avec eux. C'est l'un des attraits de notre centre d'excellence en matière de recherche qui sont mentionnés le plus souvent. Nous avons aussi de bons contacts à l'échelle internationale.

La sénatrice Eaton : Voilà qui est très intéressant.

En juin 2012, les IRSC ont créé le volet Voies de l'équité en santé pour les Autochtones. Lorsque vous parlez des priorités les plus élevées en matière de santé, les Premières Nations en ont-elles qui n'existent pas dans les autres collectivités? Dans l'affirmative, quelles sont-elles, et avez-vous un budget particulier pour vous occuper de ces priorités?

Mme VanKoughnet : Je vais commencer par dire que les IRSC sont les seuls du monde entier à posséder un institut voué à la santé des Autochtones. Le fait d'avoir un élément de notre organisation axé précisément sur ce domaine d'études, un Institut de la santé des Autochtones, est un concept unique dans le monde de la recherche.

En ce qui a trait au rôle que le volet Voies de l'équité en santé pour les Autochtones joue dans notre plan stratégique, la réduction des inégalités en santé dont les peuples autochtones sont victimes est l'une des cinq principales priorités de notre organisation. Le volet a été lancé avec un budget de l'ordre de 25 millions de dollars, qui est censé durer jusqu'en 2022, je crois. Le volet examine en particulier la recherche interventionnelle. Nous avons essayé de mettre en œuvre de nombreux programmes publics distincts et de nombreuses nouvelles politiques publiques, sans prendre toujours la peine de les harmoniser avec un élément de recherche, afin de déterminer si ces programmes ou ces politiques fonctionnent, s'ils ont une incidence.

La sénatrice Eaton : Visitez-vous les collectivités mêmes? Recueillez-vous les commentaires des Premières Nations?

Mme VanKoughnet : L'une des premières étapes de l'initiative Voies de l'équité en santé pour les Autochtones consistait à utiliser la possibilité de financement PEEC — aux IRSC, il y des acronymes pour tout, mais il s'agit de partenariats pour la recherche en santé — pour financer directement quelques organisations communautaires autochtones, afin qu'elles puissent participer à la conception de l'initiative, à la sélection de ses priorités et à la mobilisation de leurs propres collectivités en vue de les faire participer à la recherche. Il ne s'agit pas d'un groupe de chercheurs qui vient étudier une collectivité autochtone, mais plutôt une collectivité autochtone qui invite des chercheurs à la visiter afin qu'ils répondent à ses besoins prioritaires.

La sénatrice Eaton : Pouvez-vous me donner un exemple de ces initiatives?

Mme VanKoughnet : Dans le cadre du programme des PEEC, nous avons déjà accordé près de 3 millions de dollars à des organisations autochtones. Nous prenons aussi des mesures en vue de mettre en œuvre un programme de recherche dans quatre domaines prioritaires : la tuberculose, l'obésité et le diabète, la santé bucco-dentaire et un dernier domaine dont je n'arrive pas à me souvenir. Il y a essentiellement quatre domaines, quatre exemples de recherches menées au sein des collectivités autochtones. L'incidence ou les répercussions de ces quatre problèmes de santé sont beaucoup plus graves dans ces collectivités. Par exemple, en partenariat avec l'ensemble des chercheurs canadiens dans le domaine de la santé dentaire, nous avons organisé des interventions liées à la santé bucco-dentaire, c'est-à-dire un important programme public visant à réduire les caries chez les jeunes enfants, parce que, plus tard, elles peuvent gravement nuire à leur santé, même lorsqu'ils auront atteint l'âge adulte.

[Français]

La sénatrice Bellemare : Votre groupe de centres de recherche virtuelle est fascinant. Avez-vous la liste des 13 centres de recherche? Je les ai cherchés, mais je ne les ai pas trouvés. Il doit bien y avoir une liste.

[Traduction]

Le président : Pourquoi ne nous fournissez-vous pas la liste?

Mme VanKoughnet : Nous pouvons vous la fournir. Je peux probablement les énumérer, mais...

[Français]

La sénatrice Bellemare : Votre budget total s'approche du milliard de dollars, et vous avez des effets levier avec d'autres groupes, les provinces, le secteur privé, d'autres centres de recherche comme le CRSH et le CRSNG, et cetera. Avez-vous une idée de l'effet de levier global de votre budget qui provient du gouvernement?

Mme Roy : C'est une très bonne question. Effectivement, nous essayons toujours de récolter tous ces renseignements, et le conseil d'administration nous le demande régulièrement. Il y a maintenant certaines initiatives qui font en sorte que, si nous investissons un dollar en recherche, les partenaires doivent contribuer un dollar pour lancer l'initiative. On s'améliore de plus en plus dans la cueillette de ces renseignements.

L'année dernière, en ce qui concerne les initiatives ciblées, nous avons réussi à recueillir environ 80 millions de dollars. J'émets un chiffre, mais je peux vous fournir l'information, car notre rapport de 2013-2014 indique l'effet de levier lié à nos initiatives, et qui est assez important. L'objectif de notre organisation, effectivement, est de créer des partenariats avec l'industrie ou avec des partenaires non traditionnels pour augmenter la capacité de recherche dans le domaine de la santé, qui est de plus en plus coûteuse, comme vous le savez.

La sénatrice Bellemare : À combien se chiffre la contribution des centres de recherche comme le CRSH et le CRSNG? Est-ce inclus dans votre milliard de dollars?

Mme Roy : Oui. Il y a toujours des compétitions annuelles des programmes Trois-Conseils, mais, généralement, les sommes transférées varient de 25 à 30 millions de dollars par an, dépendamment des résultats des compétitions que nous établissons avec ces agences.

La sénatrice Bellemare : Le fait que tous les instituts puissent réagir promptement lors d'une situation urgente comme l'Ebola — parce qu'on voit bien que vous vous vous attaquez à de grandes problématiques, mais, parfois, il y a des problématiques d'urgence, comme l'Ebola. Les instituts virtuels ont-ils la chance de travailler dans ce domaine? Pouvez-vous nous parler un peu plus de cette problématique?

[Traduction]

Mme VanKoughnet : Bien sûr. Et il m'est plus facile de formuler des observations concernant le passé que de commenter ce qui se passe en ce moment. Par exemple, les Instituts de recherche en santé du Canada ont participé activement aux interventions liées au SRAS. Nous avons eu l'occasion d'accorder un financement d'urgence qui a permis de financer le travail sur le terrain d'un certain nombre de chercheurs. Ces derniers examinaient certaines des conséquences de cette maladie pour la santé publique ou se souciaient de séquencer le génome du virus du SRAS, afin de comprendre comment nous pouvons le combattre. Nous avons tiré des enseignements de cet exercice qui nous aident dans le contexte actuel et, pour vous donner un autre exemple, nous avons établi un partenariat avec l'Agence de la santé publique du Canada visant à financer le Réseau canadien des registres d'immunisation. Il s'agit là d'un réseau établi, composé de plus de 140 experts des quatre coins du pays, qui est réellement en mesure d'effectuer rapidement des recherches dans le domaine de la vaccination. Ces experts ont un objectif à long terme. Ils étudient toutes les facettes de la vaccination, des taux de vaccination à l'hésitation à se faire vacciner, en passant par l'efficacité des vaccins et les nouvelles façons de les administrer, et ce, dans le but de déterminer si les vaccins sont plus ou moins efficaces avec le temps. Toutefois, ces experts sont également prêts à intervenir en cas de besoin au Canada. Je le répète, cela fait partie des liens qui existent au sein du milieu canadien de la recherche.

Nous, les membres des IRSC, croyons que la structure des 13 instituts a grandement contribué à aider les chercheurs à être mieux renseignés sur les recherches en santé et les problèmes de santé des Canadiens, et à être mieux préparés à servir dès que c'est nécessaire.

[Français]

La sénatrice Bellemare : On sait qu'un centre de recherche travaille sur le dossier de l'Ebola au Manitoba. L'ensemble des instituts ou cet institut en particulier reçoit-il de l'argent du groupe? Y a-t-il des liens, des efforts particuliers qui sont déployés afin de créer un vaccin plus rapidement?

Mme Roy : Il y a une question de structure financière. Le conseil scientifique des IRSC a accordé la priorité à cette crise d'Ebola. Il demeure qu'il faut tester le vaccin et tous les mécanismes de mise en œuvre de ces tests. À ce moment- ci, il ne s'agit pas d'une question monétaire, car on peut s'organiser à l'interne afin de rassembler les fonds nécessaires pour appuyer le gouvernement canadien, trouver le meilleur vaccin et le mettre en œuvre. Mais, pour l'instant, on n'a pas plus de détails à cet égard.

La sénatrice Bellemare : J'aimerais poser une dernière question.

Le président : Veuillez le faire au deuxième tour, s'il vous plaît.

[Traduction]

Le sénateur L. Smith : Je vous remercie d'être venues aujourd'hui. En lisant les premières pages qui décrivent la façon dont vous êtes organisés et le caractère autonome des IRSC, je me suis demandé quel genre de relation vous aviez avec Santé Canada et l'Agence de la santé publique. Comment cela fonctionne-t-il?

Mme VanKoughnet : Les IRSC jouent un rôle en s'asseyant à la table du portefeuille de la santé. Notre président rencontre donc régulièrement le sous-ministre. Notre président s'assied à cette table à titre de sous-ministre, en compagnie du sous-ministre de Santé Canada et, au cours des dernières semaines, de l'administrateur en chef de la santé publique du Canada, Gregory Taylor. Les IRSC font réellement partie du portefeuille de la santé. Nous avons établi des partenariats à la fois avec l'ASPC et Santé Canada pour faire progresser leurs priorités. Par exemple, nous prenons tous part à l'initiative relative au VIH et au Sida. La mission des IRSC à cet égard consiste à soutenir le volet de la recherche, mais ce volet comporte aussi des éléments liés à la santé publique et à la réglementation des médicaments. Nous travaillons au sein du portefeuille, aux côtés de nos compatriotes.

Le sénateur L. Smith : Qui détermine les priorités lorsqu'un groupe autonome travaille avec deux autres organismes importants? Il y a de nombreuses priorités, mais y a-t-il une liste de priorités établie à l'échelle nationale? Dans votre mémoire, vous dites que votre organisation a quatre ou cinq priorités.

Madame Roy, vous avez très bien décrit la façon dont vous êtes organisés, mais cela soulève des questions. Si 70 p. 100 de vos recherches découlent de vos principaux investissements dans la recherche, dont vous parlez à la page 8, et que le reste de vos recherches sont consacrées à d'autres priorités, vos programmes segmentés et vos initiatives phares finissent donc dans une pile, pendant que vous avez toutes ces autres piles à gérer. Et qui détermine les priorités à l'échelle nationale? Si vous êtes une agence autonome, acceptez-vous ces priorités? Pourriez-vous me dire quelles sont les trois principales priorités en santé du point de vue de la recherche et du développement?

Mme VanKoughnet : Il y a à peu près quatre ans, les IRSC ont publié leur plan stratégique après avoir amplement consulté non seulement les membres de sa famille fédérale, mais aussi les provinces et les instituts de recherche de l'ensemble du pays. Au bout du compte, les instituts de recherche embauchent des gens qui effectueront les travaux de recherche. Par conséquent, nos plans doivent cadrer avec les leurs dans une certaine mesure. Ces instituts sont parvenus à établir cinq priorités que nous partageons et, depuis, nous continuons d'éprouver ces priorités auprès du public et des médias sociaux à l'aide d'analyses de ce genre.

Nous avons mis l'accent sur les améliorations à apporter au système de soins de santé afin qu'il soit durable et plus axé sur les patients. Manifestement, c'est un objectif qui touche à tous les domaines.

Notre priorité suivante consiste à réduire les inégalités en santé dont les peuples autochtones sont victimes.

Le sénateur L. Smith : Est-ce votre deuxième priorité?

Mme VanKoughnet : Oui.

Notre troisième priorité consiste à nous préparer à intervenir en cas de menaces pour la santé.

Notre quatrième priorité couvre beaucoup de terrain, mais elle consiste à réduire le fardeau lié aux maladies chroniques et aux troubles mentaux.

Ces priorités sont très vastes. La priorité liée au système de santé est divisée en deux. Nous l'avons un peu façonnée avec le temps.

Comme je l'ai indiqué, les deux centres d'intérêt sont des soins de santé axés sur les patients et des recherches cliniques améliorées. La deuxième priorité est liée davantage aux systèmes de santé. Une fois qu'on a déterminé la nature des traitements à donner et des interventions cliniques, comment peut-on assurer leur prestation d'une façon plus efficace et plus viable du point de vue des coûts?

Le sénateur L. Smith : Quels sont vos résultats? Les soins prodigués aux patients sont un sujet dont les Canadiens discutent. Comment mesurez-vous vos résultats, et où en êtes-vous par rapport à vos cinq priorités?

Je le répète, lorsqu'on entend dire que la démence et la maladie d'Alzheimer sont apparemment des priorités nationales, comment mesurez-vous votre réussite? Vous pourriez peut-être nous donner quelques exemples de réussite et de processus que vous devez améliorer.

Mme VanKoughnet : Sans trop entrer dans les détails, les IRSC utilisent un cadre d'évaluation des impacts élaboré par l'Académie canadienne des sciences de la santé. Bien que la recherche soit un travail à longue haleine, nous souhaitons être en mesure d'évaluer ses progrès. Par conséquent, l'organisation examine cinq catégories d'impacts.

L'un d'eux est le développement des connaissances, la bibliométrie traditionnelle, qui est liée aux chercheurs contribuant à la documentation à l'échelle mondiale.

Le renforcement des capacités : Qui, sur le terrain, peut comprendre les nouvelles recherches publiées ailleurs et qui peut apporter sa propre contribution?

La prise de décisions éclairées : Par exemple, la mise en place de lignes directrices cliniques et l'intégration de données probantes à un cadre stratégique afin qu'un clinicien puisse les utiliser.

Il y a l'amélioration de la santé et des systèmes de santé — j'y reviendrai dans un moment — et les contributions à l'économie; le lancement de nouvelles entreprises, l'incidence économique de la recherche elle-même, le niveau d'emploi des chercheurs et de leurs équipes partout au pays.

Sur le plan des effets sur la santé, nous travaillons en étroite collaboration avec les provinces à la stratégie de recherche axée sur le patient, dans le but précis d'intégrer plus étroitement la recherche au système de soins afin de favoriser davantage un effet d'attraction. C'est un processus très intéressant, car nous demandons aussi aux patients, aux fournisseurs de soins et aux cliniciens de déterminer quel impact est important pour eux, au bout du compte. Au lieu d'énoncer le point de vue d'un grand chercheur pour déterminer ce qu'est un excellent résultat clinique, nous nous tournons vers les patients pour qu'ils nous aident à ce chapitre.

Chacune des provinces a mis sur pied des programmes prometteurs en fonction du financement de ce que nous appelons les unités de soutien dans chaque province, afin de voir ce que nous pouvons accomplir en cinq ans. Certains de ces programmes sont très ciblés; ils concernent notamment la diminution du taux d'incidence d'une maladie donnée ou des temps d'attente pour une intervention donnée. Cela permet plus de précision dans le monde de la recherche quant aux effets que nous voulons obtenir.

Mme Roy : La mesure de l'impact en recherche dans le domaine de la santé n'est pas une tâche facile, comme vous pouvez l'imaginer. Nous sommes tous confrontés aux mêmes défis, partout dans le monde. Nous établissons des liens à l'échelle internationale et nous tentons de trouver les meilleures mesures pour déterminer les effets sur le système de santé et sur la santé en général.

Pour revenir à votre première question concernant la manière dont nous établissons les priorités au sein du portefeuille de la Santé, c'est évidemment notre ministre qui établit les priorités pour son portefeuille, et l'une de ses priorités, c'est l'innovation. Aux IRSC, nous établissons nos priorités en fonction de l'innovation. Nous voulons mettre en place des initiatives d'innovation et de transformation; nous établissons donc des initiatives et des priorités pour l'ensemble du portefeuille.

Le sénateur L. Smith : Quand j'ai vu le mot « autonome », je me suis demandé s'il existait des problèmes liés à la compétence entre votre groupe et les autres groupes.

Mme Roy : Nous sommes effectivement un organisme autonome et, en général, nous établissons le programme de recherche en santé de façon indépendante.

Le président : J'essaie de comprendre comment vous êtes organisés. Jusqu'ici, vous nous avez dit avoir 13 initiatives virtuelles, deux grandes catégories de programmes, un groupe de priorités et un certain nombre d'initiatives phares. Ai- je bien compris? Pourquoi tenez-vous à ce que ce soit si compliqué?

Mme VanKoughnet : C'est une question de mobilisation. Les instituts ont été mis sur pied sur une longue période et ils ont permis de regrouper tous les chercheurs et tous les intervenants du milieu de la recherche dans le domaine de l'infectiologie et de l'immunologie, par exemple, ou dans les domaines de la santé cardiovasculaire et respiratoire, de la nutrition, du métabolisme et du diabète.

Ces communautés se voient maintenant comme des communautés. Elles peuvent se mobiliser. Nous les motivons, par des initiatives phares, à transcender les cloisonnements X et Y.

Prenons par exemple notre initiative phare sur l'inflammation associée aux maladies chroniques. Qu'il s'agisse de l'inflammation des artères causée par une maladie cardiovasculaire ou de l'inflammation des muscles causée par l'arthrite, il y a des éléments communs sur le plan des réponses immunitaires. Nous tentons de déterminer si ce que nous apprenons dans une communauté pourrait s'appliquer dans une autre; d'où l'ajout d'un niveau. Il y a donc un ensemble de réseaux, un ensemble d'instituts et de communautés qui s'ajoutent à cette capacité, et nous les incitons à examiner des idées plus complexes s'étendant à plusieurs domaines. Selon nous, ce n'est pas si compliqué, mais il nous faut effectivement nous expliquer.

Le président : Je vais donner la parole à d'autres sénateurs, mais j'aurai peut-être l'occasion d'y revenir plus tard.

Le sénateur Wells : Je voudrais revenir sur le sujet abordé par la sénatrice Eaton puis le sénateur Smith, soit les mesures du succès, en particulier en ce qui concerne les problèmes de santé bucco-dentaire, de diabète et d'obésité des Autochtones. Ce sont des choses très précises pour lesquelles on peut mesurer les résultats. Les cinq autres éléments que vous avez mentionnés au sénateur Smith, comme l'avancement des connaissances et la prise de décisions éclairées, sont très généraux même s'ils peuvent être mesurés. Pouvez-vous me parler de quelques réussites, en particulier concernant la santé bucco-dentaire des Autochtones, qui est un élément mesurable, ainsi que le diabète et l'obésité? Y a-t-il des réussites? Y a-t-il des progrès?

Mme VanKoughnet : Cette initiative en est seulement à ses débuts; nous n'en sommes pas encore aux résultats mesurables de la recherche. Je peux dire que l'initiative a été conçue de façon à avoir des éléments mesurables précis, et le milieu déclarera ce qu'il considère comme une réussite. Le critère déterminant, dans l'étude même, c'est la réduction des caries dentaires chez les enfants de tel âge à tel âge.

Dans les autres domaines, le quatrième que je n'avais pas trouvé, c'était la prévention du suicide. Dans ce domaine, nous collaborons avec diverses nations circumpolaires par l'entremise du Conseil de l'Arctique. Étant donné que diverses nations ont mis en œuvre des politiques publiques et des programmes, en s'efforçant toutes de réduire le taux de suicide plus élevé dans la région circumpolaire en raison de nombreux facteurs et des différentes cultures également, les besoins en matière d'intervention et les taux de suicide sont moins élevés.

Le sénateur Wells : Dans cinq ou six ans ou après le programme, si je siège encore au Comité des finances et si vous revenez témoigner, j'espère pouvoir vous poser la même question.

Mme Roy : L'initiative vient d'être lancée, mais aux IRSC, nous ajoutons un peu plus de discipline quand nous mettons en place une initiative importante comme celle-là. Nous déterminons dès le début le genre de mesure que nous prendrons en considération pour déterminer la réussite ou les progrès réalisés. Nous n'en sommes qu'au début, alors nous recueillons davantage de renseignements. Dans cinq ans, vous obtiendrez certainement plus de précisions à ce chapitre.

Le sénateur Wells : J'ai une question au sujet du Consortium international de recherche sur les maladies rares. L'objectif d'établir 200 nouveaux traitements contre des maladies rares d'ici 2020 est ambitieux. Quand cette initiative a-t-elle commencé? Pouvez-vous faire le point sur les progrès réalisés?

Mme VanKoughnet : Elle a commencé en 2012, environ, par un co-investissement avec Génome Canada, mais elle fait partie d'une initiative globale visant à coordonner l'effort mondial pour comprendre le profil génétique et les causes de certaines maladies génétiques rares. Il peut y avoir seulement quelques cas dans chaque pays, d'où la difficulté de mobiliser les efforts. Il y en a un grand nombre.

La plupart des organisations caritatives et des coalitions qui s'occupent des maladies rares se sont regroupées dans un effort, à l'échelle internationale, pour répartir le travail de façon à ce qu'il n'y ait pas sept équipes de recherche différentes qui se penchent sur la même maladie rare. On répartit le travail.

L'initiative avec Génome Canada a donné lieu à deux réussites. Je n'ai pas tous les détails devant moi pour vous dire précisément de quoi il s'agit, mais nous savons que les équipes de recherche ont identifié les gènes et les mutations responsables de deux maladies rares, ce qui a permis de définir clairement une cible pour un traitement médicamenteux possible dans ces deux cas.

Pour la grande initiative internationale, les partenaires voulaient qu'on leur démontre que cela pouvait se faire grâce à un effort concerté et ciblé de séquençage, ainsi qu'à l'utilisation de la nouvelle technologie de séquençage. Et dans la première vague, il y a eu deux réussites.

Le sénateur Wells : Au sein du consortium, Génome Canada est-il le seul autre partenaire global, ou les traitements ne sont-ils pas nécessairement axés sur la génétique?

Mme VanKoughnet : L'effort scientifique en soi est bien ciblé dans le Consortium international de recherche sur les maladies rares. Il est axé sur l'utilisation d'une méthode de séquençage. Mais lorsqu'on découvre une petite partie de ce qui pourrait être la cause, alors toute une série de recherches sur la physiologie et la fonction des protéines est nécessaire. C'est axé sur la méthode du séquençage du génome.

[Français]

La sénatrice Hervieux-Payette : Qui détient les brevets? Les chercheurs? L'institut? Les universités? Et combien en obtient-on chaque année?

[Traduction]

Mme VanKoughnet : Dans le système canadien, les IRSC ne détiennent pas les droits de propriété intellectuelle émanant de la recherche financée. C'est la politique institutionnelle qui détermine à qui appartient le droit de propriété; l'Université de la Colombie-Britannique ou l'Université du Manitoba ont donc des politiques en place. Les politiques varient d'un établissement à l'autre quant au rôle de l'établissement par rapport au chercheur. Cela fait notamment partie des contrats des facultés.

Pour ce qui est du nombre de brevets, je n'ai pas cette information en main, mais c'est l'une des mesures du cadre d'évaluation des impacts. Je peux certainement obtenir cette information pour vous.

Le président : D'accord; veuillez la faire parvenir à notre greffière.

Mme VanKoughnet : Certainement.

[Français]

La sénatrice Hervieux-Payette : Selon l'OCDE, il semble que le Canada soit très en retard dans ce domaine; je crois donc qu'il est important d'y voir. Le financement à coup de milliards de dollars, c'est bien intéressant, mais si cela ne s'est pas répercuté sur le marché par la suite, où est l'intérêt?

Maintenant, sur quels critères vous appuyez-vous pour décider dans quels secteurs les sommes seront accordées?

[Traduction]

Mme VanKoughnet : Sur le plan des résultats de la recherche, de leurs effets et de leur utilité dans le système, je dirais que nous devons envisager diverses options. Un médicament peut faire son entrée sur le marché, mais il doit tout de même être adopté par le système. Un appareil doit passer par certains tests, et pour un médicament, c'est un ensemble différent d'exigences réglementaires. C'est une question d'approche systémique, en fonction du large éventail de résultats requis.

Je vais prendre l'exemple de la démence. Il y a un effort mondial incroyable sur plusieurs fronts. Cela se reflète dans le Consortium canadien en neurodégénérescence associée au vieillissement, qui réunit divers chercheurs. Un groupe met l'accent sur la biologie et les cibles thérapeutiques. D'autres groupes se penchent sur la prévention, sur ce que nous pouvons faire en matière de médicaments, mais aussi de style de vie. Un autre groupe examine notre gestion des soins aux personnes atteintes de démence.

Chacun de ces éléments produira des résultats dans l'ensemble du spectre, qu'il s'agisse d'un dispositif d'assistance ou d'une application qui rappelle aux gens de prendre leurs médicaments et qui est spécialement adaptée aux personnes atteintes de démence. C'est un résultat très précis sur un front. Un médicament en serait un autre. On mesure son impact, sa brevetabilité, son incidence économique sur le plan des ventes, puis sur le plan des économies de coûts dans le système, du temps des dispensateurs de soins ou des coûts liés aux erreurs médicales.

[Français]

La sénatrice Hervieux-Payette : Est-ce que les instituts collaborent? Par exemple, j'ai lu récemment dans le journal que le groupe MaRS à Toronto éprouvait de grandes difficultés financières. Cette entreprise semblait être le modèle idéal pour conjuguer les secteurs public et privé et la recherche fondamentale pour se diriger vers le secteur appliqué. Il semble y avoir des failles qui nous empêchent de réaliser la mise en marché, c'est-à-dire le retour sur l'investissement des sommes que le gouvernement a consenties en faveur de la recherche.

[Traduction]

Mme VanKoughnet : Les IRSC le font, avec le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada et le Conseil de recherches en sciences humaines, pour quelques programmes qui portent sur ce domaine. Il y a aussi les Centres d'excellence en commercialisation et en recherche, où on met au premier plan le sens aigu des affaires, pas seulement à l'étape finale de la recherche, mais aussi lors de l'orientation de la recherche, afin de pencher un peu plus du côté commercial.

Il y a également les Réseaux de centres d'excellence dirigés par l'entreprise, encore une fois, qui tentent d'éliminer les obstacles perçus et parfois réels entre le milieu de la recherche universitaire et le milieu des affaires. Le Canada réussit très bien dans la production de propriété intellectuelle et réussit en général à rivaliser dans la phase initiale de la commercialisation et des structures d'entreprise. Les investissements et les efforts visent la conversion en entités plus importantes. Il y a une longue suite de rapports. Je suis sûr que vous connaissez très bien ces rapports sur l'innovation au Canada.

Le sénateur Gerstein : Avant de poser ma question, j'aimerais faire savoir au comité et à nos témoins que j'ai déjà été président du conseil d'administration de l'Hôpital Mount Sinai et que durant cette période, nous avons fondé le Lunenfeld-Tanenbaum Research Institute, qui recevait et reçoit encore des fonds des IRSC.

Le président : Je vous remercie de nous l'avoir dit. Je ne vous empêcherai pas de poser votre question.

Le sénateur Gerstein : J'ajouterai que durant de nombreuses années, le Dr Alan Bernstein a été président de notre grand institut et est devenu par la suite président des IRSC; je crois que c'était juste avant le président actuel, le Dr Beaudet.

Sur ce, je voudrais d'abord féliciter les IRSC pour leur travail et le rôle qu'ils jouent dans les travaux de recherche remarquables qui sont réalisés au Canada et reconnus à l'échelle mondiale.

Même si je ne suis plus aussi près du milieu qu'auparavant, j'ai une question qui me vient à l'esprit et qui concerne le processus que vous suivez relativement à l'attribution des subventions. D'après ce que je comprends, il y a une transition entre ce qui a été fait dans le passé et ce qui se fait maintenant. Comme c'est habituellement le cas lorsqu'il y a une transition, certaines questions surgissent. Cela dit, je sais que la transition est très bien accueillie dans le milieu de la recherche.

Je crois que durant la transition de l'ancien système vers le nouveau, on pourrait craindre qu'il y ait des lacunes en matière de financement, en particulier en ce qui concerne nos scientifiques en début de carrière. Pourrions-nous savoir ce que vous en pensez?

Mme VanKoughnet : Les IRSC transforment actuellement leur programme de recherche entreprise à l'initiative du chercheur. Les objectifs que nous visons restent les mêmes, mais les processus relatifs aux critères, à la présentation d'une demande et à l'examen par les pairs font l'objet d'un changement du point de vue opérationnel. Par conséquent, il est possible qu'au cours de la transition, certains de nos chercheurs de longue date soient aux prises avec un écart de financement entre le moment où prend fin leur subvention actuelle et celui où commence leur nouvelle subvention.

Nous entretenons des conversations très cordiales et positives avec les institutions, nous avons comblé une partie de l'écart et nous collaborons avec les institutions afin que le processus ne nuise pas à ces chercheurs reconnus.

Dans le cadre de nos consultations, on a souligné à maintes reprises qu'il faut veiller à ce que les nouveaux chercheurs ne soient nullement désavantagés durant cette transition. Pour le premier programme, le volet fondation qui est mis en œuvre, nous avons établi un objectif minimal quant au nombre de nouveaux chercheurs qui recevront des fonds. Je suis fière de dire que le nombre de demandes que nous avons reçues de la part des nouveaux chercheurs a dépassé nos prévisions. L'excellence suscite donc beaucoup d'enthousiasme.

Nous sommes persuadés qu'il y aura autant de nouveaux chercheurs qui obtiendront des fonds dans le régime actuel durant cette transition qu'il y en aurait eu autrement. Évidemment, tout le monde veut qu'il y en ait davantage. Pour cela, il faudrait accroître le budget pour que nous puissions financer davantage au niveau international.

Nous avons donc pris des mesures concrètes pour nous assurer que les nouveaux chercheurs ne seront pas désavantagés, et nous suivrons la situation de près lorsque les résultats des concours seront annoncés.

Le sénateur Gerstein : Je vous remercie de votre réponse. Nous ne voulons certainement pas désavantager nos jeunes et nos nouveaux chercheurs, et je vous suis très reconnaissant de l'attention que vous portez à cette question, car je sais que c'est un problème.

Mme VanKoughnet : Oui.

[Français]

La sénatrice Chaput : Dans votre présentation, vous avez parlé de deux grandes catégories : le soutien à la recherche libre et le soutien à la recherche de priorité. Vous avez dit que 70 p. 100 du budget était consacré à la recherche libre. En ce qui concerne la recherche de priorité, est-ce qu'il s'agit des 30 p. 100 qu'il reste dans le budget ou est-ce moins de 30 p. 100?

Mme Roy : Merci de votre question. En fait, le solde de 30 p. 100 est consacré uniquement à la recherche de priorité. Cela concerne, par exemple, les Initiatives horizontales de recherche, entre autres l'Initiative de recherche sur le VIH, la Stratégie nationale antidrogue et l'Initiative de recherche stratégique sur la capacité d'intervention en cas de pandémie, IRSCIP.

[Traduction]

Quant à l'initiative relative à la capacité d'intervention en cas de pandémie, je pense que nous y avons mis fin. En plus, nous avons le financement interorganismes.

[Français]

La sénatrice Chaput : Est-ce que ces initiatives font toutes partie de la recherche de priorité?

Mme Roy : Oui, en quelque sorte. Mais les Initiatives horizontales de recherche dotées d'un budget de 250 millions de dollars en 2014-2015 représentent, également, une priorité. Ce sont des programmes spécifiques qui sont menés en collaboration avec les trois agences.

La sénatrice Chaput : La recherche de priorité recevrait environ quel pourcentage?

Mme Roy : Environ 20 p. 100, soit à peu près 200 millions de dollars par année de ce montant est déterminé avec les institutions.

La sénatrice Chaput : Dans le cadre de votre réponse à l'une des questions posées par la sénatrice Bellemare, vous avez mentionné la recherche ou le soutien ciblé. Qu'est-ce que vous entendiez par « ciblé »? Est-ce qu'il s'agit d'un soutien ciblé en fonction des cinq priorités mentionnées par le sénateur Smith?

Mme Roy : Oui. Nous avons un conseil scientifique composé des 13 directeurs scientifiques des instituts, qui détient une enveloppe de 200 millions de dollars destinée à la recherche ciblée. Une partie de ces fonds est axée sur les priorités des différents instituts ou sur les priorités nationales, c'est-à-dire les initiatives stratégiques. Ces priorités sont définies en fonction du plan stratégique que nous avons élaboré il y a quelques années.

La sénatrice Chaput : En ce qui concerne l'élément de compétition, soit les demandes de financement, est-ce que la compétition existe dans les deux grandes catégories? Est-ce qu'il y a une compétition pour le soutien à la recherche libre et à la recherche de priorité?

Mme Roy : C'est le même processus. Je vais laisser Mme VanKoughnet répondre.

[Traduction]

Mme VanKoughnet : Pour ce qui est du soutien à la recherche libre, nous organisons régulièrement des concours selon un cycle donné, et les membres de notre communauté de chercheurs peuvent savoir quand ils ont lieu. C'est un peu plus difficile maintenant parce que nous sommes au milieu d'une transition, mais, de façon générale, ils savent à quoi s'en tenir.

Dans le cas de la recherche ciblée, nous faisons régulièrement des appels de propositions, ce qui veut dire que nous tenons une base de données sur les divers concours de financement et que nous connaissons les échéanciers pour la présentation des demandes et des résultats des évaluations effectuées par les pairs.

[Français]

La sénatrice Chaput : En ce qui concerne les compétitions, est-ce que les demandes de financement que vous recevez proviennent des institutions et du secteur privé?

[Traduction]

Mme VanKoughnet : Pour recevoir du financement des IRSC, le candidat principal doit répondre à un certain nombre de critères et avoir pris rendez-vous avec un établissement admissible. Il s'agit traditionnellement d'universités et d'établissements de recherche, par exemple Lunenfield, mais il y a également un nombre croissant d'organismes communautaires et, par l'entremise du programme Passeport pour ma réussite, d'organismes autochtones, car les participants viennent de milieux de plus en plus variés. Ces établissements admissibles doivent tous satisfaire à un ensemble d'exigences très strictes pour être en droit de gérer les fonds obtenus dans le cadre du processus d'attribution de subventions.

[Français]

La sénatrice Chaput : Donc, je présume que tous ceux qui recevraient du financement par l'entremise de ces compétitions devraient aussi rendre compte du travail qui est fait, d'après les critères que vous avez établis. Est-ce que vous avez un mot à dire lorsque vous avez les résultats de la recherche et que le résultat est atteint?

[Traduction]

Mme VanKoughnet : Je vais dire deux choses à ce sujet. Tout d'abord, nos établissements font de plus en plus souvent le suivi des travaux réalisés par les équipes que nous finançons. Par exemple, si nous en finançons cinq dans un domaine donné, nous allons couramment les rassembler pour voir si elles peuvent apprendre les unes des autres dans le cadre de leurs recherches. Ce sont des subventions. Nous n'encadrons pas les chercheurs et nous ne leur disons pas quoi faire, d'aucune façon, mais nous essayons de faire en sorte que leurs travaux donnent des résultats beaucoup plus concrets.

À la fin du processus, les chercheurs et les bénéficiaires de subventions sont tenus de déclarer les résultats obtenus dans un certain nombre de catégories, notamment en ce qui a trait au renforcement des capacités ainsi qu'au nombre d'étudiants formés et d'articles publiés. Ils doivent également nous dire quelles ont été les répercussions sur les plans décisionnel, sanitaire et économique. Depuis environ deux ans seulement, nous procédons de manière systématique pour recueillir ces renseignements, ce qui nous donnera avec le temps une source très abondante d'information pour définir les répercussions et pour être en mesure de tirer parti des résultats obtenus.

La sénatrice Chaput : Je sais que vous ne dictez pas la façon de procéder, mais existe-t-il un lien entre le travail qui a été fait et les priorités que vous avez énumérées lorsque vous parliez avec le sénateur Smith? Existe-t-il un lien entre ces cinq priorités et les résultats des travaux de recherche en cours, quels qu'ils soient?

Mme VanKoughnet : En un mot, oui.

[Français]

La sénatrice Bellemare : Votre institut est à la fine pointe de la technologie. C'est peut-être, justement, parce qu'il est virtuel qu'on a un peu de difficulté à comprendre comment il fonctionne.

J'ai regardé rapidement sur le site Internet, et je comprends que chaque institut de recherche aborde une grande problématique. Si je prends l'exemple du cancer, on a un institut de recherche sur le cancer et on a une université, à Calgary, où la demande d'analyse de subventions est centralisée. Pour continuer avec l'exemple du cancer, les Instituts de recherche en santé du Canada investissent environ 166 millions de dollars dans des projets de recherche. Ces projets de recherche vont jusqu'à repenser la cancérologie, et abordent la solution cyclotron, la macro et à la microtechnologie. Si on se penche sur les chercheurs, cela concerne les universités et les hôpitaux. Mais, pour situer le contexte de l'expérience actuelle, et c'est ce que je trouve intéressant, les instituts de recherche ne couvrent pas la totalité de la recherche qui se fait au Canada sur le cancer. Vous attribuez des fonds de 166 millions de dollars par l'intermédiaire d'organismes virtuels.

Ainsi, selon vous, est-ce que ce modèle virtuel, décentralisé, doté de grands objectifs, est plus efficace qu'auparavant? Dans la somme d'un milliard de dollars de votre budget qui est consacrée à la gestion de tous ces projets de recherche, est-ce que le pourcentage administratif est à la baisse, stable ou à la hausse, compte tenu de cette vision virtuelle et du réseau de recherche?

Mme Roy : C'est une très bonne question. Je vais essayer d'y répondre de façon concise. Nous sommes très efficaces en consacrant 6 p. 100 à la gestion du montant d'un milliard de dollars, ce qui inclut, évidemment, la gestion du budget des 13 instituts également.

Il ne faut pas oublier que, dans les 13 instituts, une somme d'un million de dollars est attribuée chaque année aux dépenses opérationnelles de l'institut. Cette somme paie les salaires des chercheurs, les laboratoires, la recherche, le salaire du directeur scientifique. On ajoute à ce 6 p. 100 de dépenses opérationnelles une somme de 13 millions de dollars pour les 13 instituts.

C'est tout de même très efficace. Nous venons de terminer une étude qui était exigée par la loi, afin de revoir le modèle au moyen de 13 instituts. Nous venons de passer une série de rapports. Il y a eu un comité externe qui a exprimé son point de vue sur leur efficacité dans le cadre de sa revue du modèle des instituts, et nous avons préparé un rapport à l'interne. En outre, nous avons tenu une retraite sur ce sujet, spécifiquement, au sein du conseil d'administration, et nous avons fait quelques modifications à la façon dont fonctionnent les instituts.

Je dirais que c'est toujours efficace. Nous obtenons énormément de valeur ajoutée, parce que, comme Mme VanKoughnet l'a mentionné plus tôt, la recherche est maintenant multidisciplinaire. Nous rencontrons mensuellement tous les directeurs scientifiques, selon les spécificités de chaque institut, pour discuter de la recherche en santé liée aux initiatives. C'est une beauté, c'est une richesse pour le Canada, et c'est un modèle, pour répondre à votre question, qui est tout de même très valide aujourd'hui, mais nous avons apporté de petites modifications à l'interne pour le rendre plus efficace et plus efficient.

Le président : Merci, madame Roy.

[Traduction]

Au total, combien d'employés à temps plein avez-vous pour faire tout ce bon travail?

Mme Roy : Environ 420.

Le président : Et vous avez parlé d'environ 13 000 chercheurs.

Mme Roy : Ils font un travail de soutien.

Le président : Vous avez également certains employés à temps partiel, vraisemblablement ceux qui font partie de votre conseil scientifique, et les membres du comité de gestion et du conseil d'administration. Il s'agit là de différents éléments constitutifs de vos établissements. Pouvez-vous nous dire quel est leur nombre? Il y a par exemple Michael Wilson, qui siège à votre conseil d'administration avec le Dr Beaudet. Ce n'est pas un poste à temps plein, mais à temps partiel.

Mme Roy : Le conseil d'administration des IRSC compte environ 15 membres choisis dans le cadre d'un processus de nomination. M. Wilson en est le vice-président.

Le président : Et qu'en est-il pour le conseil scientifique?

Mme Roy : Le conseil scientifique est composé de directeurs scientifiques ainsi que de tous les vice-présidents et les directeurs des IRSC.

Le président : Vous avez un président, le Dr Beaudet, et trois vice-présidents.

Mme Roy : Oui, trois postes de vice-président, y compris celui que j'occupe. Nous avons une vice-présidente de la recherche, de l'application des connaissances et de l'éthique. Kelly VanKoughnet occupe le poste de vice-présidente associée, et nous avons un vice-président aux affaires extérieures et au développement d'entreprise.

Le président : Il s'agit des 6 p. 100 dont vous avez parlé.

Mme Roy : Oui, c'est tout le financement que nous avons.

Le président : C'est uniquement pour le volet administration, tandis que le reste est utilisé pour les subventions et les contributions.

Qui s'occupe de la surveillance financière de votre organisme?

Mme Roy : C'était le Bureau du vérificateur général du Canada, mais, depuis l'année dernière, on a cessé de faire la vérification des petits organismes à la suite de compressions découlant du plan d'action économique. Notre conseil d'administration a toutefois déterminé qu'il serait préférable de maintenir cette pratique, et nous recourons depuis aux services d'un vérificateur externe, soit Ernst & Young.

Le président : Beaucoup de sénateurs veulent poser des questions. Nous avons maintenant dépassé le temps qui nous était alloué, mais je vais recueillir leurs questions pour qu'elles figurent au compte rendu. À défaut de pouvoir répondre rapidement, vous pourrez le faire par écrit.

Le sénateur L. Smith : Quels sont vos trois principaux défis?

Le président : Vous pouvez nous en faire part par écrit. Vous aurez ainsi l'occasion d'y réfléchir pour n'en donner que trois.

Le sénateur L. Smith : J'aimerais qu'on peaufine la réponse de manière à en réduire le nombre.

La sénatrice Eaton : À propos de l'application des connaissances, par exemple, dans le cadre de la mise en œuvre du programme de soins dentaires visant les Autochtones, comment vous y prenez-vous lorsque vous recueillez les données? Les refilez-vous au secteur privé?

Le président : Je vous prie de nous faire parvenir une explication par écrit.

[Français]

La sénatrice Chaput : Je voudrais simplement remercier nos témoins. Vos réponses m'ont aidée à mieux comprendre ce système plutôt complexe, et je vous en remercie.

[Traduction]

Le président : Cela m'amène à ma conclusion. Merci à tous d'être ici. Nous allons sans aucun doute vous entendre de nouveau au sujet des 15 millions de dollars que vous attendrez avec impatience dans un des crédits supplémentaires dont vous nous avez parlé. Nous ignorons si, le moment venu, nous allons vous inviter à parler un peu plus de cette mesure, mais nous surveillerons cela de près pour vous. Merci.

[Français]

Honorables sénateurs, honorables sénatrices, nous poursuivons notre étude du Budget principal des dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 2015.

[Traduction]

Mesdames et messieurs les sénateurs, pour la deuxième et dernière partie de cette audience, nous accueillons des représentants du Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés, M. Douglas Clark et Mme Pauline Lahey, qui sont respectivement directeur exécutif et chef, Planification et reddition de comptes stratégiques.

Merci à chacun de vous d'être ici. Monsieur Clark, je crois que vous avez une déclaration liminaire à nous présenter. Nous poserons ensuite des questions.

Douglas Clark, directeur exécutif, Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés : J'ai effectivement une déclaration à vous faire. Je sais que nous avons pris du retard. Je pensais mettre le conseil en contexte, mais je ne sais pas si cela serait utile.

Le président : Je crois que cela serait utile. Prenez le temps qu'il vous faut, quitte à dépasser légèrement celui qui nous est alloué. Il est important pour nous de comprendre ce que fait votre organisation. Je vais vous faire signe si jamais cela devient trop long.

M. Clark : Merci de votre invitation à témoigner ce matin au sujet du Budget principal des dépenses de 2014-2015. Comme l'a dit le sénateur Day, je suis accompagné de Pauline Lahey, qui occupe le poste de chef, Planification et reddition de comptes stratégiques.

[Français]

Avant d'aborder le Budget principal des dépenses, j'aimerais vous transmettre brièvement quelques renseignements de base sur le CEPMB et sur le rôle qu'il joue au sein du système de santé canadien.

[Traduction]

Comme beaucoup d'entre vous le savent peut-être déjà, le conseil est un organisme indépendant qui détient des pouvoirs quasi judiciaires. Il a été créé par le Parlement en 1987 au moyen de modifications à la Loi sur les brevets. La ministre de la Santé est responsable des dispositions de la loi portant sur le conseil, mais même s'il fait partie du portefeuille de la santé, le conseil exerce son mandat en toute indépendance, ce qui est essentiel compte tenu de sa fonction quasi judiciaire.

À l'heure actuelle, le conseil compte environ 60 employés à temps plein et 5 membres nommés par le gouverneur en conseil. En vertu de la Loi sur les brevets, le président assume également les fonctions de chef de la direction du CEPMB et, à ce titre, il est responsable de la supervision et de la direction des activités de l'organisme. Le travail est effectué quotidiennement par le personnel sous ma gouverne. Mary Catherine Lindberg assume actuellement les fonctions de présidente.

[Français]

Le CEPMB est un organisme de protection des consommateurs qui a un double mandat. Tout d'abord, il s'assure que les prix auxquels les compagnies pharmaceutiques vendent leurs médicaments brevetés au Canada ne sont pas excessifs. Deuxièmement, il fait rapport sur les tendances pharmaceutiques en général et sur les dépenses liées à la recherche et au développement des titulaires de brevets pharmaceutiques au Canada.

[Traduction]

Le conseil a un double mandat qui se traduit par deux programmes dans le Budget principal des dépenses, à savoir le Programme de réglementation du prix des médicaments brevetés et le Programme sur les tendances relatives aux produits pharmaceutiques.

[Français]

En vertu du premier programme, le CEPMB établit le prix plafond de la centaine de nouveaux médicaments brevetés qui entrent sur le marché canadien chaque année. Il examine également les prix de plus de 1 300 médicaments brevetés qui sont déjà sur le marché pour s'assurer qu'ils continuent de respecter leur prix plafond aussi longtemps qu'ils sont brevetés.

[Traduction]

Le conseil encourage les brevetés à se conformer volontairement à ses prix plafond — plus de 94 p. 100 d'entre eux le font — et il enquête sur les plaintes qu'il reçoit au sujet de prix considérés comme excessifs. Lorsqu'une enquête conclut que le prix d'un médicament breveté est trop élevé, le breveté peut le réduire ou rembourser le trop-perçu par l'entremise de ce qu'on appelle un engagement de conformité volontaire, un ECV. Si le breveté conteste les résultats d'une enquête et choisit de ne pas se soumettre à un ECV, le président du conseil peut émettre un avis d'audience. Lors de l'audience, les membres du conseil exercent leur fonction judiciaire en formant un comité devant lequel le personnel du conseil et le breveté comparaissent en tant que parties. Si le comité détermine que le prix d'un médicament est véritablement excessif, il peut ordonner au breveté de le réduire ou de rembourser le trop-perçu.

[Français]

Depuis 2008, le CEPMB a accepté 52 engagements de conformité volontaire de la part des brevetés, pour un total de plus de 93 millions de dollars en recettes excédentaires versées au gouvernement du Canada.

À l'heure actuelle, il y a environ 50 enquêtes qui sont en cours, mais aucune audience ne se tient. Trois décisions de la commission sont actuellement en appel devant la Cour d'appel fédérale. Ces décisions portent sur la compétence de la commission concernant certains types de médicaments génériques.

[Traduction]

Dans le cadre de son programme de déclaration, le conseil présente au Parlement, par le truchement de la ministre de la Santé, un rapport annuel sur ses activités d'examen des prix, sur le prix des médicaments brevetés, sur les tendances concernant les prix de tous les médicaments d'ordonnance ainsi que sur les dépenses en recherche et développement déclarées par les titulaires de brevets pharmaceutiques au Canada. Notre rapport annuel de 2013 a été déposé au Parlement le mois dernier.

En plus de son rapport annuel, le conseil publie chaque année une multitude d'études dans le cadre de ce qui est appelé le Système national d'information sur l'utilisation des médicaments prescrits. Le SNIUMP est issu de la collaboration entre le conseil et l'ISIS, l'Institut canadien d'information sur la santé, qui a été créé par les ministres fédéral, provinciaux et territoriaux de la Santé en 2001 pour soutenir sur le plan analytique les processus décisionnels des gestionnaires de régimes d'assurance-médicaments publics. Au cours des 10 dernières années, le conseil a réalisé et publié 22 analyses dans le cadre de ce système.

Pendant cette période, le conseil a notamment travaillé en étroite collaboration avec les gouvernements provinciaux dans le cadre du SNIUMP en plus de collaborer directement avec les administrations responsables par l'intermédiaire du Conseil de la fédération afin d'offrir des analyses de prix et des études de marché pertinentes visant à réduire le coût des médicaments génériques au Canada. Le travail du conseil a récemment aidé le Conseil de la fédération à réduire le prix des 10 médicaments génériques les plus vendus, et on continue d'utiliser ses analyses dans le cadre des discussions menées par les premiers ministres provinciaux au sujet d'un éventuel cadre national pour les médicaments génériques.

Cela dit, vous verrez que notre budget total prévu pour 2014-2015 est de 10,9 millions de dollars. De ce montant, 9,9 millions de dollars doivent être approuvés par le Parlement, ce qui comprend une affectation à but spécial de 2,5 millions de dollars qui peut uniquement servir à couvrir les coûts associés aux audiences publiques, tels que le salaire d'un conseiller juridique externe, de témoins experts et ainsi de suite. Étant donné que ces dépenses dépendent du nombre d'audiences tenues au cours d'une année donnée, de leur longueur et de leur complexité, il est difficile de prévoir quelle proportion de l'affectation à but spécial le conseil dépensera chaque année.

[Français]

Le Budget principal des dépenses du CEPMB comprend environ 6,8 millions de dollars qui sont consacrés au programme de réglementation et 1,26 million de dollars pour le programme des politiques et de l'analyse économique. Un montant de 2,8 millions de dollars est consacré aux services internes.

[Traduction]

Les dépenses prévues par le conseil ont diminué d'environ 17 000 $ par rapport à l'année dernière, ce qui est attribuable à nos efforts visant à donner suite au plan d'action pangouvernemental pour la réduction du déficit. Vous remarquerez dans le Budget principal des dépenses que nos priorités pour 2014-2015 comprennent l'évaluation de l'incidence sur le travail du conseil des changements apportés au cadre réglementaire de l'industrie pharmaceutique, tant à l'échelle nationale et internationale.

[Français]

Actuellement, l'industrie et les responsables du remboursement traversent une période mouvementée. L'engagement récent du Canada, en vertu de l'accord économique et commercial global, l'AECG, qui vise à modifier la Loi sur les brevets en vue de prolonger jusqu'à deux ans la durée des brevets pharmaceutiques, pourra raviver le débat sur le juste équilibre entre la propriété intellectuelle et la protection des consommateurs. Alors que les ventes de médicaments brevetés au Canada se sont stabilisées au cours des dernières années, les Canadiens et les Canadiennes dépensent toujours davantage par habitant et en pourcentage du PIB que plusieurs de nos pays partenaires de l'OCDE au chapitre des produits pharmaceutiques brevetés et non brevetés. Par conséquent, les payeurs publics et privés au Canada portent une attention accrue aux nouvelles mesures de limitation des coûts, tout comme le font leurs homologues dans de nombreux autres pays.

Au CEPMB, il nous est important de surveiller de près ces évolutions, ainsi que leurs répercussions, au pays et à l'étranger, afin de nous assurer que nos règlements, nos lignes directrices et nos procédures opérationnelles demeurent pertinents et efficaces.

[Traduction]

Là-dessus, c'est avec plaisir que je répondrai à vos questions.

Le président : Merci beaucoup, monsieur Clark.

[Français]

La sénatrice Hervieux-Payette : Je n'ai pas fait les études, mais vous devez les avoir faites. Apparemment, les Canadiens paient davantage que la plupart des autres pays développés pour les médicaments génériques.

Quelle en est l'explication profonde? Pourquoi paierions-nous plus cher que quelqu'un qui habite en France, en Belgique, en Italie ou en Allemagne?

M. Clark : C'est une excellente question. Tout d'abord, le CEPMB n'a pas d'autorité sur le prix des médicaments génériques, à moins qu'un brevet se rapporte au médicament générique. Cependant, depuis plusieurs années, nous publions des rapports sur les prix, sur la façon dont les prix génériques au Canada se comparent aux prix internationaux suivant une directive du ministère de la Santé, qui nous a demandé de faire ce genre de travail.

Maintenant, les études parues dans les journaux dernièrement parlent d'un écart important entre les prix au Canada et les prix à l'international. Nos études sont un peu plus modestes quant aux écarts, puisque nous choisissons un éventail de médicaments plus élargi et nous nous comparons à de nombreux pays. Nous nous comparons aux prix moyens plutôt qu'aux prix les plus bas. Je sais que les provinces ont fait beaucoup de travail dans ce domaine dernièrement, et elles viennent d'annoncer huit autres médicaments génériques ramenés à 18 p. 100 du prix du médicament de marque comparable; mais, on traîne derrière nos partenaires de l'OCDE. Je n'ai pas de bonne réponse à cette question, car il ne s'agit pas de notre travail. Ce sont les provinces qui gèrent les prix quant aux médicaments génériques. Cela ne relève pas de nos compétences.

La sénatrice Hervieux-Payette : Avez-vous participé à l'élaboration de l'accord de libre-échange avec l'Europe, lequel demande une protection plus longue des brevets? Il y a toujours une façon de comptabiliser la période de temps.

Pourriez-vous, pour les gens qui suivent nos délibérations, expliquer ce que cela changera à la politique actuelle, à savoir quand un médicament peut devenir générique et comment allonger la protection en vertu des brevets?

M. Clark : Tout d'abord, cela ne fait pas partie de nos responsabilités réglementaires. Nous n'étions donc pas impliqués dans les négociations de l'accord. Je peux simplement vous dire que, selon mes connaissances, en parlant avec nos homologues d'Industrie Canada, si l'accord est mis en œuvre et que la Loi sur les brevets est modifiée, les brevets pharmaceutiques bénéficieront d'une extension de la prolongation de la durée de deux ans. Tous les brevets ne seront pas admissibles à cette prolongation; des critères s'appliqueront, mais cela pourrait prolonger la période d'exclusivité sur le marché pour le produit pharmaceutique breveté.

La sénatrice Hervieux-Payette : Qui a fait les calculs pour déterminer ce qu'il en coûterait de plus au gouvernement canadien et aux gouvernements provinciaux?

M. Clark : Les calculs émanent de toute part; l'industrie générique soumet des calculs, l'industrie des compagnies de recherche et développement soumet également des calculs. Je n'ai pas vu les plus récents calculs du ministère de l'Industrie, mais il reviendrait au ministère de l'Industrie, qui sera responsable de la mise en œuvre de l'accord quant aux modifications à la Loi sur les brevets, de faire ce calcul. Je ne suis pas au courant de l'impact.

La sénatrice Hervieux-Payette : On parle ici de milliards de dollars et non pas de millions de dollars; deux ans de protection additionnelle pour tous les médicaments brevetés, quand on sait que, dans l'ensemble de l'enveloppe budgétaire du domaine de la santé, les médicaments représentent un pourcentage assez élevé — je ne me souviens pas si c'est 35 p. 100...

M. Clark : Autour de 16 p. 100.

La sénatrice Hervieux-Payette : C'est tout de même un montant...

M. Clark : C'est 30 milliards de dollars.

La sénatrice Hervieux-Payette : Alors, de ce point de vue, j'aurais aimé qu'on vous consulte là-dessus, car vos collègues d'Industrie Canada n'ont peut-être pas tenu compte de qui payera les 30 milliards.

M. Clark : Qu'on le veuille ou non, je pense que le CEPMB se retrouvera au centre du débat une fois que la Loi sur les brevets sera ouverte aux modifications, car il y a eu, dernièrement, des changements dans l'environnement interne, au niveau de la recherche et du développement, et les prix sont revenus au niveau où ils étaient avant les changements de 1987, avec le fameux projet de loi C-22. Je pense donc que les gens vont se poser la question sur la raison pour laquelle on prolonge les brevets à un moment où nos prix continuent de monter et où la recherche et développement au Canada continue de diminuer.

La sénatrice Bellemare : Ma première question a trait au rôle des provinces. Est-ce que les prix des médicaments sont les mêmes d'une province à l'autre, automatiquement? Sinon, comment cela fonctionne-t-il?

M. Clark : Comme tout ce qui est lié à ce domaine, c'est compliqué. Jusqu'à très récemment, les provinces négociaient indépendamment avec les compagnies pharmaceutiques le prix de chaque médicament qui doit être remboursé par la province.

Maintenant, tout dernièrement, les provinces se sont rassemblées sous l'égide du Conseil de la fédération et elles ont formé une initiative qu'on appelle le PCPA — Pan-Canadian Pharmaceutical Alliance; en français, Alliance pancanadienne pharmaceutique (APP). De plus en plus, elles négocient collectivement — depuis trois ans maintenant. Sur le site web du Conseil de la fédération, elles énumèrent tous les produits assujettis à des négociations collectives. Jusqu'à présent, si je ne m'abuse, il s'agit de 46 médicaments au total. Cela se fait de plus en plus, et les prix baissent en fonction de cela.

Du côté public, les gouvernements au Canada sont maintenant minoritaires sur le marché des produits pharmaceutiques. Ce sont le secteur privé et les gens qui paient de leur propre poche qui paient la majorité des dépenses liées aux médicaments sur ordonnance au Canada. Pour les gouvernements au Canada, la portion publique se situe à environ 42 p. 100. Il faut garder cela en tête.

La sénatrice Bellemare : Ma deuxième question a trait à un tableau produit dans votre rapport annuel de 2013, où on voit que le ratio des dépenses consacrées à la recherche et au développement par rapport aux recettes des ventes chez les brevetés est en baisse depuis à peu près 1997, où il aurait atteint un maximum d'environ 12 ou 13 p. 100. Pouvez-vous m'expliquer pourquoi? Parce que c'est une tendance lourde. On remarque que c'est en baisse, maintenant; c'est à peine au-dessus de 4 p. 100.

M. Clark : C'est pour tous les brevetés, les membres de Rx&D qui ont pris cet engagement dans les années 1980 d'augmenter le niveau de recherche et développement à 10 p. 100. Il se situe plutôt aux alentours de 5,4 p. 100. C'est un peu plus élevé maintenant.

Le président : Pouvez-vous nous expliquer qui sont les membres?

M. Clark : Les membres sont les compagnies que l'on connaît, les compagnies de marques, Pfizer, Astra, et cetera. Il y a environ 80 ou 90 membres de Rx&D. Il y a d'autres petites compagnies, surtout dans l'industrie du secteur biotechnologique, qui ne sont peut-être pas membres, mais le plus gros de l'industrie pharmaceutique se retrouve parmi les membres de Rx&D.

Notre travail consiste à rapporter des renseignements sur le niveau de recherche et développement au Canada, mais ce n'est pas vraiment notre travail de nous inquiéter de la politique et du pourquoi. Je sais que le marché est très concurrentiel en ce qui a trait à l'investissement dans la recherche et développement pharmaceutique. Il y a beaucoup d'instruments politiques qui peuvent attirer l'investissement. Je pense que les experts commencent à remettre en question, de plus en plus, à quel point la propriété intellectuelle ou les prix sont des éléments qui attirent la recherche et le développement. Ce qu'on constate, dernièrement, c'est plutôt un accès à une infrastructure scientifique, à de bons chercheurs, à un réseau d'études cliniques très moderne. Ce sont des choses comme celles-là. De plus, le Canada n'a pas vraiment — le mot ne me vient pas à l'esprit en français — de home grown industry, tandis que les compagnies ont tendance à concentrer la recherche et le développement dans leurs centres de multinationales et dans leurs quartiers généraux.

La sénatrice Bellemare : Est-ce que la baisse du ratio s'explique aussi en partie par la hausse des recettes?

M. Clark : Non.

La sénatrice Bellemare : Il s'agit donc vraiment d'une diminution en valeur nominale?

M. Clark : Oui.

La sénatrice Verner : Je ne suis pas membre en titre de ce comité, mais il n'en demeure pas moins que la question de votre organisation m'intéresse beaucoup.

Une partie de mes questions a déjà été posée par ma collègue, la sénatrice Hervieux-Payette, concernant la préoccupation toujours très grande des consommateurs canadiens face à la flambée des prix des médicaments. Des articles sont encore parus, je pense que c'était la semaine dernière, dans différents quotidiens du Québec à ce sujet. Vous avez répondu, notamment, que dans le cas des médicaments génériques, si je comprends bien, votre organisation se penche particulièrement sur les produits brevetés, les médicaments d'origine, en fin de compte, et non les produits génériques.

M. Clark : Notre champ de compétence concerne uniquement la réglementation et la fixation des prix plafond pour les médicaments. Il se rapporte uniquement aux produits de marques brevetées. Cependant, nous publions beaucoup d'études et nous faisons beaucoup d'analyses sur les prix des médicaments génériques et sur la façon dont ils se comparent aux prix à l'international.

La sénatrice Verner : Ça m'amène à vous poser la question suivante, parce que, à quelques reprises, vous avez bien expliqué aux membres ici présents que, selon votre mandat, il ne vous était pas possible d'intervenir dans tel ou tel débat. Votre mandat vous a été donné en 1987. Il y a déjà un bon moment de cela.

Ne pensez-vous pas que, dans un contexte où les choses changent beaucoup, où des inquiétudes sont soulevées concernant l'accord de libre-échange avec l'Union européenne et l'augmentation des brevets, bref, où toute une série de facteurs fait que nous nous trouvons dans un environnement qui change, votre organisation serait peut-être mûre pour un renouvellement de mandat qui correspondrait davantage à la situation actuelle et à venir?

M. Clark : J'avoue qu'il y a certainement plusieurs intervenants qui revendiquent ce genre de changement, de réforme. Cependant, je vais vous donner une réponse judicieuse de fonctionnaire : nous contrôlons uniquement nos lignes directrices et la mise en œuvre de notre autorité réglementaire actuelle. Nous nous attendons à ce que, comme je l'ai dit tantôt, qu'on le veuille ou non, ces questions se posent dans le cadre des modifications à la Loi sur les brevets pour mettre en œuvre l'accord avec l'Union européenne. Nous faisons notre part pour être en mesure de répondre aux questions des décideurs sur les analyses des recommandations, le moment venu.

La sénatrice Verner : J'aurais dû être plus précise, effectivement, et vous demander s'il ne serait pas judicieux que le gouvernement revoit votre mandat. Je vous remercie de votre réponse.

La sénatrice Chaput : Lorsque vous dites que 16 p. 100 du budget est lié aux médicaments, s'agit-il des médicaments brevetés uniquement ou cela inclut-il aussi les médicaments non brevetés?

M. Clark : Cela inclut tous les médicaments.

La sénatrice Chaput : Pouvez-vous nous dire dans quelle proportion?

M. Clark : Je n'ai pas les chiffres devant moi, mais je pourrais vous transmettre la réponse. Je crois que c'est environ 60 — non, je me souviens maintenant, c'est 60 p. 100. Dans les années 1990 et début 2000, c'était plutôt environ 70 ou 75 p. 100, mais depuis plusieurs années, on frôle les 58, 59 ou 60 p. 100.

La sénatrice Chaput : Pour les médicaments brevetés?

M. Clark : Oui.

La sénatrice Chaput : Une autre petite question de clarification. Vous avez mentionné que les provinces et territoires négociaient maintenant collectivement. Est-ce que toutes les provinces et tous les territoires au Canada sont impliqués dans cette négociation collective?

M. Clark : Cela dépend du médicament. Il y a trois provinces qui mènent cette initiative, soit l'Ontario, la Nouvelle- Écosse et la Saskatchewan, je crois. Pour chaque médicament, une province est choisie qui mènera la négociation face à face avec la compagnie. Il revient aux provinces de décider si elles vont se soumettre à cette négociation et si elles vont se rallier aux résultats. Donc, tous participent, en principe, sauf le Québec.

La sénatrice Chaput : Quarante-six médicaments au total ont été identifiés.

M. Clark : Exactement.

La sénatrice Chaput : Et les provinces et territoires peuvent décider sur lesquels de ces médicaments ils veulent négocier collectivement.

M. Clark : Oui.

[Traduction]

La sénatrice Eaton : Je vais attirer l'attention sur un autre enjeu. J'ai siégé à un autre comité qui a réalisé une étude sur les pénuries d'antibiotiques auxquelles nous serons confrontés partout dans le monde de même que sur l'hésitation des sociétés pharmaceutiques à dépenser de l'argent pour des médicaments qui ne sont pas consommés tous les jours. Êtes-vous tenus d'une certaine façon d'encourager les sociétés pharmaceutiques et de leur dire quoi faire avec leurs fonds de recherche?

M. Clark : Non, pas vraiment. Cela n'entre pas dans le cadre de nos responsabilités en matière de réglementation et de déclaration. Je sais que beaucoup de personnes se disent préoccupées du fait que les paradigmes actuels ne favorisent pas suffisamment ce genre de recherche, mais je crois que c'est davantage une question de politique, que ce soit pour Industrie Canada ou un organisme relevant de Santé Canada. Cela dit, nous ne jouons aucun rôle dans ce dossier, non.

Le président : Pouvez-vous nous expliquer quelle est la marche à suivre pour qu'un médicament soit breveté afin que nous sachions à quoi nous en tenir?

M. Clark : C'est compliqué. En général, une fois qu'une société détient une validation de principe — lorsqu'un nombre suffisant de données lui permet de croire qu'une molécule identifiée parmi des milliers, voire des dizaines de milliers de molécules, est prometteuse pour un traitement, pour son étude clinique, pour passer d'in vitro à in vivo chez l'animal et éventuellement chez les humains —, elle dépose une demande de brevet, habituellement auprès du pays où le plus gros de la recherche se fait. Conformément à divers traités internationaux, la société peut déposer une demande de brevet internationale et profiter des dates de dépôt. Tous les États participants, de même que l'Office de la propriété intellectuelle, le bureau des brevets canadien, sont assujettis à ces traités. La recherche clinique se poursuit pendant le traitement de la demande.

Si, au bout du compte, on prouve que le médicament est sécuritaire et efficace et qu'il est approuvé par Santé Canada, la société pharmaceutique recevra un avis de conformité de Santé Canada et pourra ensuite commercialiser son produit. C'est à ce moment-là qu'elle fait l'objet de divers processus d'examen de l'ACMTS pour déterminer la rentabilité, les aspects pharmacoéconomiques du médicament. L'ACMTS formule ensuite une recommandation à l'intention des provinces pour leur dire si elles doivent ou non couvrir le médicament, le rembourser.

Entre-temps, la durée du brevet diminue, car elle est de 20 ans à partir du moment où la demande est déposée. Par conséquent, l'ensemble de la recherche et l'approbation réglementaire qui suit se font généralement pendant la durée du brevet. Selon des études réalisées dans le monde entier sur le temps qu'il reste en moyenne avant l'expiration d'un brevet lorsqu'un médicament est finalement mis en vente sur le marché, le droit d'exclusivité des sociétés pharmaceutiques varie entre 8 et 12 ans. C'est la raison pour laquelle de nombreux pays ont opté pour le rétablissement de la durée du brevet, qui est un des éléments de l'accord économique et commercial global que le Canada a décidé de mettre en œuvre en prolongeant jusqu'à deux ans la durée des brevets, selon une méthodologie qui tient compte de la durée des essais cliniques du médicament et du temps dont l'organisme de réglementation a eu besoin pour en prouver l'innocuité et l'efficacité.

Le président : Nous croyons savoir qu'il y a deux options et qu'elles sont distinctes. L'une est de passer par l'Office de la propriété intellectuelle du Canada — le commissaire aux brevets détermine s'il y a lieu de délivrer un brevet.

M. Clark : C'est exact.

Le président : La seconde option est de passer par le ministre de la Santé, qui détermine, au bout du compte, s'il peut être vendu.

M. Clark : C'est exact. Ensuite, il y a d'autres étapes à suivre. Nous allons examiner le médicament et fixer un prix plafond; l'ACMTS l'examinera aussi avant de recommander aux provinces s'il convient ou non de le rembourser. S'il est remboursé, c'est le point où l'on peut parler d'une percée importante sur le marché.

Le président : Vous décrivez le conseil comme un organe quasi judiciaire indépendant. Pouvez-vous nous l'expliquer pour que nous comprenions ce que vous entendez par quasi judiciaire?

M. Clark : Nous examinons chaque nouveau médicament breveté qui est mis en marché. Il est soumis à un comité scientifique qui détermine dans quelle mesure il est meilleur au plan thérapeutique que ceux qui existent déjà. Nous fixons ensuite un prix plafond en fonction des prix internationaux et de ceux des médicaments comparables sur le marché canadien.

Le prix plafond d'un médicament révolutionnaire sera plus élevé, du moins en théorie, que celui d'un médicament équivalent ou légèrement plus efficace que ceux qui se trouvent déjà sur le marché. Nous fixons ce plafond en nous fondant sur un examen scientifique. Nous continuons de surveiller le prix après la mise en marché pour veiller à ce qu'il ne contrevienne pas à notre règle voulant qu'il ne puisse jamais être le médicament le plus cher au pays.

En cas de différend entre le personnel du conseil qui fixe le prix plafond et le fabricant qui refuse de baisser le prix de son médicament sur le marché depuis un certain temps parce qu'il estime qu'il n'est pas excessif, le président du conseil, qui a été nommé par le gouverneur-en-conseil, peut rédiger un avis d'audience s'il estime qu'il est dans l'intérêt du public de le faire. Dans ce cas, le CEPMB choisit une autre voie; le personnel joue le rôle du procureur et les membres du Conseil forment un comité et siègent à un tribunal administratif quasi judiciaire. Le détenteur de brevet comparaît plus ou moins comme défendeur. Un processus accusatoire est lancé, et le comité détermine si le prix est excessif. Le cas échéant, il peut ordonner au fabricant de rembourser les recettes excessives, de baisser son prix ou de faire les deux.

Le président : Et vous n'avez pas pour mandat de déterminer si pareil médicament devrait être breveté au départ?

M. Clark : Non.

Le président : Cela ne fait pas partie de votre mandat. Vous vous attachez simplement au prix?

M. Clark : C'est exact.

Le président : La délivrance de permis ne fait pas partie de votre mandat?

M. Clark : C'est une question intéressante. La Cour d'appel fédérale est actuellement saisie de la question de savoir si le Conseil est responsable des médicaments génériques pour lesquels le détenteur d'un brevet a reçu un permis, ce que nous appelons parfois des médicaments génériques autorisés ou des médicaments pseudo génériques. C'est une question qui reste à trancher.

Le président : Nous nous réjouissons à la perspective d'en apprendre davantage à ce sujet.

Le sénateur Mockler : Pour ce qui est de votre mandat et des questions auxquelles vous venez de répondre, obtenez- vous les résultats voulus?

M. Clark : C'est une très bonne question. Pour en revenir à la question de la sénatrice Verner, notre régime est en place depuis maintenant près de 30 ans. Les lignes directrices ont été modifiées au fil des ans. Ce que nous remarquons dernièrement, et je vais vous donner un exemple, c'est que d'autres pays adoptent des mesures de limitation des coûts très strictes. Nos prix commencent à se comparer moins bien aux leurs.

Nous nous comparons normalement à sept autres pays, ce que nous appelons le CEPMB-7, à savoir l'Italie, la Suède, la Suisse, le Royaume-Uni, la France, les États-Unis et l'Allemagne. En 2005, le ratio moyen des prix de nos médicaments était à peu près le deuxième moins élevé de ces sept pays. Cela a changé au cours de la dernière année. Si vous prenez notre rapport annuel de 2013, vous verrez que nous nous situons près du deuxième plus élevé. Les prix ont monté de façon régulière, bien que nous soyons toujours légèrement en dessous du prix médian de ces sept pays. C'est en grande partie attribuable au fait que les États-Unis figurent dans cette liste et que ce pays fait bande à part côté prix. Ses prix sont considérablement plus élevés que ceux des autres. Les nôtres augmentent graduellement, et je pense que c'est principalement en raison des modèles de limitation des coûts que les autres pays ont mis au banc d'essai dernièrement. Je vais vous donner un exemple.

L'Allemagne a récemment adopté une loi appelée AMNOG — je vous ferai grâce de la traduction. Une de ses particularités est que lorsqu'un nouveau médicament est mis en marché, son prix est fixé en fonction du traitement type dans la catégorie de médicaments, quel que soit l'usage pour lequel il est approuvé : l'étalon de référence, si vous voulez. Si des essais cliniques prouvent que le médicament en question est supérieur à l'étalon de référence, alors une prime sera accordée à ce médicament et des négociations suivront. Cependant, si rien ne prouve qu'il offre des avantages thérapeutiques supérieurs au traitement type, on lui attribuera le prix le moins élevé de la catégorie thérapeutique, qui comprend les versions génériques des médicaments brevetés, dont le prix peut être très bas.

Si vous prenez la façon dont les médicaments sont catégorisés, bien des organismes étrangers chargés de l'établissement des prix font le même type de catégorisations que le CEPMB. Le médicament est-il révolutionnaire? Non. Est-il sensiblement meilleur que les autres? Non. Est-il modéré? Non. Est-il léger ou pas? D'une administration à l'autre, la majorité des médicaments entre dans la catégorie « léger ou pas », soit plus de 80 p. 100 d'entre eux.

Au Canada, conformément à nos règles en vigueur, un médicament qui entre dans cette catégorie sera placé dans la catégorie thérapeutique la plus coûteuse et non le contraire. Selon moi, ce type d'inégalité est responsable de l'écart croissant entre nos prix et ceux des pays du CEPMB-7 auxquels nous nous comparons, surtout l'Allemagne dans ce cas. Je pense qu'il est raisonnable de présumer que, si la tendance se poursuit, dans les années qui viennent, bien que nos prix soient toujours légèrement inférieurs aux prix allemands, nous finirons par nous trouver en deuxième place derrière les États-Unis.

Le sénateur Mockler : Je ne remets pas en question la qualité de votre travail, mais je veux en revenir à une autre question. Comme vous avez dit que nos prix montent graduellement, disposez-vous des ressources appropriées pour exécuter efficacement votre mandat?

M. Clark : Oui. Les ressources dont nous disposons ne me posent pas problème. Je pense que si nous étions plus vigoureux, plus militants, la question des ressources pourrait être problématique. Je crois qu'à l'heure actuelle, la question est plutôt celle d'un régime de presque 30 ans qui devient de plus en plus décalé, en quelque sorte, par rapport à certaines des pratiques que nous observons dans ces autres pays.

[Français]

La sénatrice Bellemare : Vous avez dit tantôt que le Québec ne participait pas. Avez-vous une idée des raisons?

M. Clark : Non, en fait, je n'ai pas les détails.

La sénatrice Bellemare : Est-ce que votre organisation participe aux activités du Conseil de la fédération?

M. Clark : Oui, beaucoup. Nous sommes de plus en plus impliqués et nous visons une participation dans ce genre d'initiative.

La sénatrice Bellemare : Vous avez combien d'employés?

M. Clark : Présentement, nous avons environ 60 employés, et 5 membres du conseil sont nommés par le cabinet.

[Traduction]

Le président : Nous vous savons gré d'être venus, monsieur Clark et madame Lahey.

Madame Lahey, nous n'avons pas autant fait appel à vous que nous le faisons parfois.

Pauline Lahey, chef, Planification et reddition de comptes stratégiques, Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés : Ce n'est pas grave.

Le président : Elle sert aussi les personnes présentes, n'est-ce pas? Nous vous savons gré du travail que vous faites au sein du Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés. Je ne m'attends pas à ce que nous comparaissions devant votre conseil, mais il est possible que nous vous invitions à nouveau en temps et lieu pour vous demander comment les choses se passent.

(La séance est levée.)


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