Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Banques et du commerce
Fascicule n° 6 - Témoignages du 19 mai 2016
OTTAWA, le jeudi 19 mai 2016
Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce se réunit aujourd'hui à 10 h 30 pour étudier la teneur des éléments des sections 3, 4, 5, 6 et 10 de la partie 4 du projet de loi C-15, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 22 mars 2016 et mettant en œuvre d'autres mesures.
Le sénateur David Tkachuk (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Bienvenue au Comité sénatorial permanent des banques et du commerce. Je m'appelle David Tkachuk et je suis le président du comité. Aujourd'hui, nous commençons l'examen de la teneur du projet de loi C-15, la Loi d'exécution du budget de 2016, ou la LEB, en particulier les articles 3, 4, 5, 6 et 10 de la partie 4 du projet de loi.
Je tiens à signaler aux honorables sénateurs et sénatrices que notre comité doit faire rapport de ses conclusions au Sénat avant le jeudi 9 juin 2016.
Notre réunion d'aujourd'hui est divisée en deux parties. Dans un premier temps, nous accueillerons des responsables du ministère des Finances Canada, de la Banque du Canada, de la Société d'assurance-dépôts du Canada et du Bureau du surintendant des institutions financières. Dans la seconde partie, qui sera plus brève, nous entendrons l'Association des banquiers canadiens.
Les sénateurs remarqueront que parmi les nombreux témoins qui figurent sur l'avis de convocation, seule une poignée d'entre eux prendra la parole pour prononcer un exposé sur les sections qui les intéressent et répondre aux questions. Si l'intervention de témoins supplémentaires parmi ceux qui occupent les sièges derrière nous devient nécessaire, ils occuperont le siège vacant ou remplaceront temporairement un témoin à la table, le temps de répondre aux questions.
Dans ces circonstances, je demanderais aux témoins qui viendront à la table de placer leur porte-nom dans le bloc en bois et, avant de répondre à une question, de donner leur nom et leur titre pour le compte rendu.
Nous aurons, je crois, une séance d'information, que nous essaierons de faire le plus harmonieusement possible. Le sujet est complexe. Pour cette raison, la période de questions et réponses se fera le plus simplement possible. Vous pourrez poser la question de votre choix, peu importe la section concernée. Si nous avons besoin d'un expert pour répondre à la question, nous l'inviterons à s'avancer. L'important est de nous assurer d'avoir toute l'information, ici et pour le compte rendu.
J'aimerais souhaiter la bienvenue aux fonctionnaires et responsables de notre premier groupe de témoins. Du ministère des Finances Canada, Glenn Campbell, directeur, Institutions financières, Direction générale de la politique du secteur financier, et Jeremy Weil, économiste principal, Direction générale de la politique du secteur financier. De la Société d'assurance-dépôts du Canada, Chantal Richer, vice-présidente, Affaires générales, et conseillère générale. Du Bureau du surintendant des institutions financières, Judy Cameron, directrice générale, Approbations et précédents, et de la Banque du Canada, Steve Thomas, avocat général adjoint, Services à la Haute Direction et Services juridiques.
Monsieur Campbell, vous pouvez commencer votre déclaration liminaire, après quoi nous passerons aux autres témoins.
Glenn Campbell, directeur, Institutions financières, Direction générale de la politique du secteur financier, ministère des Finances Canada : Bonjour, monsieur le président, honorables sénateurs et sénatrices, et merci de m'avoir invité à comparaître devant votre comité. Je m'appelle Glenn Campbell, et je suis le directeur de la Division des institutions financières de la Direction de la politique du secteur financier. Je suis heureux de présenter un aperçu, au nom du ministère des Finances du Canada, des cinq sections de la partie 4, soit les sections 3, 4, 5, 6 et 10 qui sont abordées aujourd'hui dans le cadre de votre examen du projet de loi C-15. Les fonctionnaires concernés passeront à la table au besoin pendant la période des questions et réponses afin de répondre aux questions que votre comité pourrait avoir. Mes collègues des autres organismes concernés sont présents pour répondre aux questions relevant de leurs mandats respectifs.
Je commencerai par la section 3 de la partie 4, qui propose de prolonger la date de temporisation qui oblige le renouvellement de la législation du secteur financier par le Parlement tous les cinq ans.
La modification prolongerait la date de temporisation actuelle du 29 mars 2017 de chacune de ces lois au 29 mars 2019. La modification proposée s'applique à quatre lois différentes : la Loi sur les banques, la Loi sur les sociétés d'assurances, la Loi sur les sociétés de fiducie et de prêt, et la Loi sur les associations coopératives de crédit.
Les dispositions de temporisation sont conçues pour s'assurer que le cadre du secteur financier est renouvelé et tenu à jour régulièrement.
Un certain nombre de modifications au cadre ont été apportées au cours des dernières années, et certaines sont toujours en cours. La prolongation de deux ans qui est proposée permettra de compléter les initiatives hors cycle qui sont en cours, et donnera le temps de consulter les Canadiens et l'industrie. Le but est de mener un examen qui positionne le cadre du secteur financier pour l'avenir.
La section 4 de la partie 4 modifie certaines dispositions de la Loi sur les banques liées aux coopératives de crédit fédérales afin de traiter des risques transitoires uniques qui confrontent les coopératives de crédit qui choisissent de passer au régime fédéral, en vertu de différences entre les régimes fédéral et provinciaux.
En plus de deux modifications techniques, on compte trois principales modifications. La première confère au ministre des Finances le pouvoir d'exempter un demandeur de l'exigence d'entrée procédurale technique dans la mesure où il répond de manière substantielle à cette exigence.
La deuxième confère au ministre des Finances le pouvoir d'exempter des coopératives de crédit fédérales de certaines exigences procédurales techniques relatives au processus de vote pour jusqu'à trois ans après son entrée dans la mesure où il répond de manière substantielle à cette exigence.
La troisième confère au ministre des Finances le pouvoir de garantir le remboursement d'un prêt transitoire à une coopérative de crédit fédérale aux fins de l'appuyer pendant ses trois premières années.
La section 5 de la partie 4 propose des modifications qui assurent un cadre législatif pour le régime de recapitalisation interne des banques. La recapitalisation interne est le pouvoir de convertir certaines dettes d'une banque en faillite en actions ordinaires afin d'absorber des pertes, de recapitaliser la banque et lui permettre de maintenir ses opérations.
La mise en œuvre du régime de recapitalisation interne proposé donnerait aux autorités un outil supplémentaire pour gérer la faillite improbable d'une grande banque de manière à protéger la stabilité financière ainsi que les contribuables. Elle viendrait renforcer le fait que les actionnaires et les créanciers de cette banque sont responsables des pertes de la banque.
Les modifications proposées à la Loi sur la Société d'assurance-dépôts du Canada conféreraient à la SADC le pouvoir d'entreprendre une conversion de recapitalisation interne. Les modifications comprennent aussi des mises à jour et des améliorations aux dispositions existantes de la Loi sur la SADC relativement à la gestion des faillites de banques, afin de s'assurer qu'elles fonctionnent de manière efficace avec le pouvoir de recapitalisation interne.
Les modifications proposées à la Loi sur les banques consacreraient en droit la capacité pour le surintendant des institutions financières de désigner les banques d'importance systémique, ce qui les assujettirait au régime de recapitalisation interne. Ces banques devront maintenir un montant de fonds propres réglementaires et de dette assujetti à la recapitalisation interne afin d'absorber les pertes en cas de faillite. Cette exigence serait fixée par le surintendant en consultation avec d'autres autorités fédérales.
Le régime de recapitalisation interne proposé a aussi fait l'objet de nombreuses consultations auprès des intervenants, dont les banques, les agents de notation et les investisseurs.
Ces réformes viendraient renforcer notre trousse d'outils pour la gestion des faillites de banque afin qu'elle demeure cohérente aux pratiques exemplaires et aux normes internationales adoptées par le G20 après la crise financière.
La section 6 de la partie 4 propose de modifier la composition du Comité de surveillance des institutions financières (CSIF) en remplaçant le président de la SADC par le premier dirigeant de la SADC. Le CSIF est un comité qui offre des conseils sur la surveillance prudentielle des institutions financières fédérales. Les membres du CSIF bénéficieraient de la participation du premier dirigeant de la SADC au comité, puisque ce dernier est responsable de la direction des affaires quotidiennes de la SADC et de la supervision du fonctionnement efficace des activités et des affaires de la société.
La section 10 de la partie 4 de la Loi d'exécution du budget édictera deux modifications à la Loi sur les mesures spéciales d'importation (LMSI), la principale loi du Canada portant sur les recours commerciaux. Les recours commerciaux redressent les dommages causés à des producteurs nationaux par des importations sous-évaluées et subventionnées. La première modification fera en sorte qu'une enquête complète sera menée même si, au stade de la décision provisoire, on conclut que les niveaux de dumping ou de subvention sont minimaux. Deuxièmement, une fois qu'une mesure de recours commercial sera en place, elle y restera plus longtemps avant que l'on se demande si la mesure devrait être prorogée ou annulée. Ces modifications renforceront la réaction du Canada aux échanges inéquitables, et sont appuyées par les principaux utilisateurs du mécanisme de recours commerciaux du Canada.
Le gouvernement a aussi lancé des consultations publiques sur un plus large ensemble de modifications possibles du mécanisme de recours commerciaux.
Chantal Richer, vice-présidente, Affaires générales, et conseillère générale, Société d'assurance-dépôts du Canada : Je m'appelle Chantal Richer, je suis vice-présidente, Affaires générales, et conseillère générale, Société d'assurance-dépôts du Canada, ou SADC. Tara Newman, ma collègue ici présente, m'aidera à répondre aux questions.
La SADC est une société de la Couronne fédérale créée pour protéger les dépôts des épargnants en cas de faillite de l'une de ses quelque 80 institutions membres et contribuer à la stabilité du système financier du Canada.
[Français]
Nos membres sont des banques, des coopératives de crédit fédérales, des sociétés de fiducie et de prêts, et des associations régies par la Loi sur les associations coopératives de crédit qui acceptent des dépôts. Depuis sa création, en 1967, la SADC s'est occupée de 43 faillites d'institutions membres, qui ont touché quelque 2 millions de Canadiens.
[Traduction]
En presque 50 années d'exercice, personne n'a perdu un seul dollar des dépôts protégés par la SADC. Nous assurons actuellement près de 700 milliards de dollars en dépôts.
La SADC est l'autorité de règlement de faillite du Canada. Cela signifie que nous assumons un rôle de leader dans la gestion de faillite de toutes nos institutions membres, de la plus petite à la plus grande.
La SADC s'est dotée d'une vaste trousse d'outils pour assurer la gestion de ses membres défaillants. Ces outils de règlement comprennent notamment l'apport d'aide financière, par exemple des prêts et des garanties pour soutenir une transaction dans le secteur privé, la brève prise de contrôle des activités des banques défaillantes jusqu'à la conclusion d'une vente, l'établissement d'une banque-relais servant de passerelle entre le moment où la banque fait faillite et celui où des acheteurs, ou une solution du secteur privé, se présentent et, enfin, l'organisation d'activités de liquidation aux fins de remboursement rapide des dépôts assurés.
[Français]
Le choix des outils de règlement serait fonction de notre mandat, qui est de protéger les déposants, d'encourager la stabilité du système financier et de minimiser les risques de pertes.
[Traduction]
S'il est vrai que les 43 faillites d'institutions financières membres ont été réglées par liquidation et remboursement des dépôts assurés, un certain nombre a été résolu par la vente assistée de la banque en faillite à une institution membre en bonne santé. Cette approche, en plus de permettre une minimisation des pertes, a donné lieu à une transition sans interruption de service pour les clients.
Dans la foulée des crises financières mondiales, et à l'instar des autres pays du G20 à travers le monde, la SADC et ses partenaires en matière de filet de sécurité financière représentés ici aujourd'hui ont cherché à savoir si nous avions les outils nécessaires pour gérer, le cas échéant, la faillite des plus grosses banques.
La SADC a également pris des mesures pour améliorer sa capacité à gérer la faillite des plus grandes banques canadiennes, qui ont été désignées par le surintendant des institutions financières comme des banques d'une importance systémique nationale pour l'économie, soit les BISN.
[Français]
Notre travail a d'abord porté sur la mise au point d'un outil, la banque-relais, et sur l'élaboration d'un plan de règlement pour chacune des grandes banques. Chaque plan trace les grandes lignes de la stratégie et du plan opérationnel qui seraient déployés si la banque faisait faillite.
[Traduction]
Dans son budget 2015, le gouvernement a confié aux BISN la responsabilité de préparer leurs propres plans de règlement, reconnaissant ainsi l'importance de leur rôle et de leur processus de reddition de comptes dans la démonstration de sa solvabilité.
Une des priorités actuelles de la SADC est d'orienter et de diriger le développement des plans de règlement des banques afin de s'assurer que ces plans sont réalistes et faisables et qu'au besoin, ils peuvent être utilisés.
Cela m'amène à notre sujet d'aujourd'hui. La SADC se réjouit de l'introduction du régime de capitalisation interne. La capitalisation interne viendrait renforcer notre trousse d'outils, tout en nous permettant de demeurer cohérents avec les normes internationales.
Ce régime, grâce auquel une banque en faillite pourrait continuer à servir ses clients, notamment ses déposants, permettrait à la SADC de convertir certains titres de créances en actions ordinaires afin de recapitaliser la banque et lui permettre de poursuivre ses activités.
Ce régime permettrait aussi de s'assurer que les pertes sont absorbées par les actionnaires et les investisseurs de la banque en faillite, et que la facture n'est pas refilée aux consommateurs. Il est important que les Canadiens comprennent que leurs économies durement accumulées demeurent protégées par la SADC, comme elles l'ont été depuis près d'un demi-siècle.
Judy Cameron, directrice générale, Approbations et précédents, Bureau du surintendant des institutions financières Canada : Monsieur le président, honorables sénateurs et sénatrices, je vous suis reconnaissante de m'avoir invitée à discuter de sections particulières de la partie 4 du projet de loi C-15, la Loi portant exécution du budget. Je m'appelle Judy Cameron et je suis la directrice générale de la sous-section Approbations et précédents du Bureau du surintendant des institutions financières, le BSIF.
[Français]
Je suis accompagnée de mon collègue, Jean-Pierre Girouard, directeur de l'équipe qui s'occupe des précédents, qui fait partie de la sous-section.
[Traduction]
En qualité d'instance de réglementation prudentielle du Canada, le BSIF contribue à la stabilité financière en surveillant de près la solvabilité, la liquidité, la sûreté et la solidité des institutions financières fédérales. Dans la poursuite de ces objectifs, il a pour mandat de protéger, d'une part, les intérêts des déposants, des souscripteurs et créanciers des institutions financières en tenant compte de la nécessité pour celles-ci de faire face à la concurrence et de prendre des risques raisonnables et, d'autre part, ceux des participants des régimes de pension ayant droit à une prestation de pension.
Je veux d'abord préciser que le BSIF souscrit aux propositions énoncées dans les sections 3, 4, 5 et 6 de la partie 4 du projet de loi C-15.
[Français]
Les dispositions prévues renforceront le cadre de réglementation financière et aideront le BSIF à continuer d'accomplir son mandat.
[Traduction]
Le mandat du BSIF lui prescrit d'administrer la législation des institutions financières fédérales et de jouer un rôle décisif en examinant les lois qui s'appliquent à ces entités. Les examens qu'il effectue font en sorte que la législation évolue de façon à permettre au secteur des services financiers de demeurer sûr, efficient et concurrentiel.
Dans ces circonstances, nous appuyons la prorogation de la période d'examen proposée à la section 3 de la partie 4, et nous sommes d'avis qu'il en résultera des délais suffisants pour permettre un examen rigoureux du cadre législatif et réglementaire.
La section 4 de la partie 4 traite d'exemptions techniques visant les exigences que doivent satisfaire les coopératives de crédit en transition et les coopératives de crédit fédérales. Comme vous le savez, le principal rôle du BSIF à l'égard des coopératives de crédit en transition consiste à effectuer un examen prudentiel du dossier de la coopérative de crédit provinciale qui demande au ministre d'être prorogée sous le régime fédéral.
De plus, à titre d'administrateur de la Loi sur les banques, le BSIF doit établir si le demandeur peut satisfaire toutes les modalités d'application de la loi ou s'il a besoin d'exemptions. En outre, l'examen et l'évaluation prudentiels d'une coopérative de crédit provinciale n'ont aucun lien de dépendance avec la capacité du ministre des Finances d'accorder, selon les circonstances, une garantie de prêt.
La section 5 de la partie 4 permettrait au surintendant de désigner officiellement des banques d'importance systémique nationale aux termes de la Loi sur les banques.
Vous savez probablement qu'en mars 2013, conformément à la pratique internationale, le BSIF a désigné six banques canadiennes d'importance systémique nationale : la RBC, la TD, la Banque Scotia, la CIBC, la BMO et la Banque Nationale. Ces banques ont ensuite été assujetties à des normes de fonds propres plus rigoureuses, à une surveillance accrue et à des exigences plus sévères de divulgation de renseignements.
En vertu du projet de loi, les institutions financières canadiennes d'importance systémique seraient tenues de maintenir une capacité minimale d'absorber des pertes. Cette exigence repose sur le concept des fonds propres réglementaires et vise à garantir que les banques d'importance systémique possèdent non seulement une capacité d'absorption suffisante pour soutenir des pertes graves, mais vraisemblables, mais aussi des moyens supplémentaires qui leur permettraient de renouveler leur capital en cas de faillite, un événement fort improbable.
Ainsi, la capacité minimale d'absorption de pertes facilite la résolution des banques d'importance systémique en les obligeant à émettre des titres financiers susceptibles d'être convertis en actions.
En application du régime proposé de recapitalisation, le BSIF aurait pour fonction, en consultation avec d'autres organismes fédéraux et le ministre des Finances, de fixer et de contrôler la capacité minimale d'absorption des pertes que doivent posséder les banques d'importance systémique nationale, et, le cas échéant, de les contraindre à conserver une telle capacité. Au terme de consultations poussées, le BSIF réviserait ses consignes pour les adapter aux nouvelles exigences.
Enfin, le BSIF souscrit à la modification de la Loi sur le Bureau du surintendant des institutions financières décrite à la section 6 de la partie 4.
Cette modification changerait la composition du Comité de surveillance des institutions financières (CSIF) en remplaçant le président de la Société d'assurance-dépôts du Canada (SADC) par le premier dirigeant de cet organisme. Notre expérience nous a appris que le premier dirigeant possède les qualités nécessaires pour jouer un rôle dynamique au CSIF, car il est responsable des décisions courantes sur les activités fondamentales de la SADC.
[Français]
M. Girouard et moi serons heureux de répondre à vos questions. Merci.
Steve Thomas, avocat général adjoint, Services à la haute direction et Services juridiques, Banque du Canada : Monsieur le président, distingués membres du comité, bonjour.
[Traduction]
Je suis accompagné de ma collègue, Carol Brigham, directrice au Département de la Stabilité financière. Nous sommes ici aujourd'hui au nom de la banque pour vous faire part de notre point de vue concernant les modifications proposées à la Loi sur la compensation et le règlement des paiements à la section 5 du projet de loi C-15.
La Banque du Canada a la responsabilité de désigner et de surveiller des systèmes de compensation et de règlement qui posent un risque systémique ou un risque pour le système de paiement. Notre rôle de surveillance de ces systèmes consiste à nous assurer qu'ils fonctionnent de manière à contrôler adéquatement les risques.
Les changements proposés à la LCRP visent la mise en place d'un régime de recapitalisation interne de la SADC et nous sommes favorables aux mesures proposées. Ces changements vont dans le sens des actions que pourrait prendre la SADC pour gérer l'éventualité improbable d'une faillite bancaire et des actions que pourraient prendre les infrastructures de marché financier dans les mêmes circonstances.
Nous pensons que ces modifications renforceront notre système financier en contribuant à la mise en place du régime de règlement de la SADC d'une manière qui continuera à assurer la sécurité et la solidité des infrastructures de marché financier désignées.
Merci. Je serai heureux de répondre à vos questions.
Le président : Merci. Nous allons maintenant passer aux questions.
Le sénateur Greene : J'ai trois questions que je poserai ensemble. Elles concernent la nature des dispositions de temporisation qui sont de votre ressort.
Quelle est la prolongation maximale que vous êtes autorisés à demander? À quelle fréquence le ministère des Finances demande-t-il ces prolongations? Êtes-vous autorisés à demander une deuxième prolongation au cours d'un délai de temporisation?
M. Campbell : Je vous remercie pour vos questions. En ce qui concerne la disposition de temporisation de la loi, il n'y a pas de délai maximal prescrit pour le report. Il revient au Parlement de décider pendant combien de temps il souhaite prolonger le délai. En l'instance, le gouvernement recommande une période supplémentaire de deux ans pour mener son examen à terme.
Dans le passé, la date a été proposée pour une modification. M. Weil peut peut-être répondre à cette question.
Jeremy Weil, économiste principal, Direction générale de la politique du secteur, ministère des Finances Canada : De mémoire récente, il y a eu trois prolongations, en 1990, en 2006 et en 2011. Elles ont varié entre un an et six mois.
M. Campbell : Nous avons eu quelques cas où le délai a été prolongé, en fonction des circonstances et de la durée. Dans le cas présent, étant donné le caractère pratique de nombreuses modifications à la Loi sur les banques et aux lois connexes apportées au cours des récentes années pour mener à terme les réformes entreprises dans la foulée de la crise financière et également en raison de la date fixe de l'élection — tous ces facteurs font que c'est l'actuel gouvernement qui doit traiter cet enjeu.
Le délai ne laisse pas suffisamment de temps pour effectuer un examen, l'idée de départ est de le prolonger de deux années supplémentaires afin de finaliser les modifications actuelles — y compris ce que nous proposons aujourd'hui, comme les régimes de recapitalisation interne et certains des autres régimes — et de réfléchir à la forme que nous voulons donner à nos lois sur les institutions financières pour l'avenir —, autrement dit, de définir une vision pour l'avenir une fois que toutes ces réformes seront terminées et de déterminer comment nous continuerons à maintenir les normes les plus rigoureuses au sein du secteur financier du Canada.
Le sénateur Massicotte : J'ai beaucoup de questions, mais je vais laisser la parole aux autres, si vous n'avez pas d'objection.
Le président : Vous pouvez les poser plus tard.
Le sénateur Massicotte : C'est ce que je vais faire. Merci.
La sénatrice Ringuette : Je crois toujours que s'il y a une loi, c'est parce qu'il y a eu un prix à payer pour cela.
Dans mon souvenir de la loi sur les coopératives de crédit fédérales, ces institutions étaient suffisamment fortes pour faire concurrence aux actuelles banques à charte fédérales. Aujourd'hui, je constate que les modifications proposées pourraient autoriser le ministre des Finances à donner une garantie de prêt. Cette mesure s'écarte passablement de la loi adoptée au Sénat.
Pourquoi est-il soudainement question d'accorder une garantie de prêt aux coopératives de crédit pour qu'elles passent sous le régime d'une loi fédérale?
M. Campbell : Lorsque le ministère a comparu devant ce comité les années passées, pendant que nous élaborions le cadre législatif des coopératives de crédit fédérales, nous avons toujours indiqué que les coopératives de crédit qui passaient à un régime fédéral risquaient d'être confrontées à des problèmes de transition. Dans le passé, nous avons bricolé des dispositions législatives pour faciliter la continuation de certaines coopératives de crédit provinciales dans l'espace fédéral. Par exemple, nous avons apporté des modifications techniques visant à assurer la continuation des caisses populaires acadiennes du Nouveau-Brunswick qui s'apprêtent à présenter une demande officielle. En attendant l'approbation de leur demande, qui devrait avoir lieu d'ici quelques mois, elles deviendront probablement les premières caisses populaires fédérales.
Je vous confirme qu'elles n'ont jamais demandé de garantie de prêt. En fait, d'autres coopératives de crédit ou caisses populaires de partout au Canada ont fait savoir qu'elles risquaient d'être confrontées à des incertitudes procédurales quant au processus de prorogation — combien de temps cela prend-il et quelle est la différence entre les règles fédérales et provinciales — que nous nous efforçons de régler au moyen de quelques modifications visant à faciliter tout le travail que cette transition impose à toutes les parties — la coopérative de crédit, la province et tous les organismes de réglementation — pour éviter de nous retrouver avec un pépin technique de dernière minute avant l'approbation.
Les deux modifications proposées confèrent au ministre un certain pouvoir d'exempter une institution de certaines exigences pour faciliter sa sortie du régime provincial et son entrée dans le régime fédéral. Ces mesures se sont avérées utiles pour certaines coopératives de crédit qui ont dit ne pas envisager ou penser faire la transition au régime fédéral, à moins d'avoir plus de certitude quant au déroulement de la transition processus. Ces deux modifications répondent à cette préoccupation.
La sénatrice Ringuette : Ce sont des mesures incitatives, en fait?
M. Campbell : Pas exactement; elles visent plutôt à supprimer les obstacles. De la même manière, la garantie de prêt — pour prendre l'exemple de votre question, madame la sénatrice — procure à certaines coopératives de crédit une assurance temporaire de courte durée à un prix approprié. C'est simplement un autre outil pour se procurer des liquidités mis à la disposition d'une coopérative de crédit qui traverse cette période délicate de transition d'un régime provincial au régime fédéral. Certaines provinces, celles de l'Ouest, par exemple, ont un régime différent d'assurance- dépôts.
Avant qu'une coopérative de crédit puisse passer sous régime fédéral, la transition doit être approuvée par les membres et par la province; ensuite, les organismes de réglementation et le ministre doivent à leur tour accepter de la recevoir. Durant cette période, un membre peut décider de se départir de ses actions dans cette institution et de transférer ses dépôts ailleurs. Les membres sont libres de décider. Dans l'Ouest, certaines provinces ont des régimes différents d'assurance-dépôts, ce qui pourrait avoir une incidence sur le financement de l'institution.
Il s'agit d'un véhicule d'assurance tenant lieu de filet de sécurité qui n'a rien à voir avec la solidité des coopératives de crédit parce que nous tenons pour acquis qu'elles le sont. Pour satisfaire à toutes les exigences fédérales avant de poursuivre leurs activités, elles devront avoir démontré qu'elles sont fortes, solides et capables de se conformer aux règles fédérales.
Ces mesures permettent simplement au conseil d'administration et aux membres de savoir que, durant cette période d'incertitude, il y a cette disposition qui constitue un filet de sécurité moyennant un prix et que l'outil est disponible. Une perturbation du marché général est également possible. Cet outil constitue donc un filet de sécurité qui leur permet d'aller de l'avant.
La sénatrice Ringuette : Puis-je poser une autre question ou dois-je attendre la prochaine ronde?
Le président : Attendez la deuxième ronde. Je pense que tout le monde souhaite participer à celle-ci.
Quelle est la différence entre recapitalisation interne et renflouement?
M. Campbell : C'est une question souvent posée. Personne autour de cette table n'a été parmi les architectes de cette terminologie. En fait, ces termes ont été proposés par le G20 et le Conseil de la stabilité financière, après des années de travail dans la foulée de la crise financière.
Le concept en question, c'est que la grande partie des mesures, voire la totalité, mises en place dans le monde après la crise financière ont été conçues dans le but premier de prévenir une crise financière et ses répercussions et de protéger les contribuables. Certains pays ont été obligés de puiser dans les fonds publics pour soutenir leurs institutions financières. Techniquement, c'est ce qu'on appelle le renflouement.
Dans le cas de la recapitalisation interne, qui consiste à utiliser l'argent dont dispose déjà l'institution, la valeur des éléments de passif des créanciers et des investisseurs à long terme serait utilisée pour soutenir le capital. C'est là l'élément de conversion. L'hypothèse de départ est qu'en cas de défaillance d'une institution financière, nous plaçons désormais les actionnaires, les créanciers et les investisseurs à long terme avant les contribuables.
Le sénateur Tannas : J'ai deux brèves questions à poser. Premièrement, ce n'est pas le secteur qui a demandé cette prolongation. Comme vous l'avez expliqué, c'est simplement à cause de l'arrivée au pouvoir d'un nouveau gouvernement et ainsi de suite. Est-ce exact?
M. Campbell : Monsieur le sénateur, le ministère n'a pas officiellement consulté l'ensemble du secteur. Cependant, dans le cadre de nos discussions constantes avec tous les secteurs visés par la loi, nous avons senti que tout le monde s'entendait pour dire qu'un report du délai s'imposait — notamment pour permettre la poursuite des réformes — et pour laisser un répit, ou un moment de réflexion quant aux changements à apporter dans le futur.
Le sénateur Tannas : Comme je le disais, cela n'apporte aucun avantage au secteur. Je veux simplement que cela figure au compte rendu.
M. Campbell : Non. C'est un processus tout à fait neutre.
Le sénateur Tannas : Merci. J'ai deux autres questions. Concernant la garantie dont a parlé la sénatrice Ringuette, je crois comprendre que cela est le résultat du fait que de nombreuses provinces offrent une garantie totale sur les dépôts dans les coopératives de crédit; je sais que c'est le cas en Alberta et en Colombie-Britannique.
Il n'en sera pas ainsi dans le monde sous réglementation fédérale de la SADC; il doit donc y avoir une sorte de passerelle, parce que vous aurez des détenteurs de CPG d'une durée de cinq ans qui sont garantis sous un régime et qui devront désormais l'être sous un autre régime. Est-ce exact?
M. Campbell : Pour préciser les choses, disons que quatre provinces ont une assurance-dépôts illimitée. Bien entendu, dans le cas d'une coopérative de crédit, il y a une disposition qui prévoit que les CPG à terme continueront de courir sous le régime actuel. Nous ne savons pas si les membres décideront de transférer leurs dépôts de la coopérative de crédit vers une autre institution. C'est l'élément d'incertitude dans cette équation, étant donné que les membres sont libres de choisir et d'agir à leur guise.
Le sénateur Tannas : Cette mesure fournit l'outil qui permettra de faciliter la transition et de séparer cette question de la garantie afin de ne pas aggraver les choses davantage; exact?
M. Campbell : Oui.
Le sénateur Tannas : Le Nouveau-Brunswick est-il l'un des garants à 100 p. 100?
M. Campbell : Non, il ne l'est pas.
Le sénateur Tannas : Bien. Nous ne concevons pas ce régime expressément pour le premier entrant; c'est très bien.
M. Campbell : Non.
Le sénateur Tannas : Y a-t-il une disposition dans ce projet de loi qui vous confère le pouvoir de fournir des liquidités ou des garanties aux centrales de caisses de crédit? Selon moi, nous découvrirons probablement que ce sont les caisses de crédit les plus solides qui envisageront de passer sous régime fédéral et cela mettra de la pression sur les centrales de chaque province. Y a-t-il une disposition dans ce projet de loi pour nous aider à face à cette éventualité?
M. Campbell : Je le dis clairement, non. La seule chose qu'il pourrait y avoir, c'est la continuité des modifications législatives précédentes visant à préciser les responsabilités entre les régimes provinciaux et fédéral. Les provinces sont responsables de leurs centrales en les soutenant et en soutenant également les caisses de crédit qui relèvent d'elles. Cette disposition s'applique vraiment à une caisse de crédit qui souhaite passer sous régime fédéral, quelle que soit la raison. Elle s'applique uniquement à cette caisse de crédit et non aux centrales, en aucun cas.
Le sénateur Tannas : Merci. Monsieur le président, j'ai une dernière petite question. Nous parlons de certaines exemptions procédurales fédérales pour ces coopératives de crédit. Il n'est question nulle part de supprimer l'interdiction faite aux succursales de vendre de l'assurance. Est-ce une dispense que vous seriez prêts à donner, ou à demander l'autorisation de donner?
M. Campbell : Ce pouvoir d'autoriser la transition vers ce que nous appelons les réseaux d'assurance n'est pas mentionné dans aucune des deux modifications. Le ministre des Finances a cependant le pouvoir, aux fins d'une transition, de donner cette autorisation. Lorsque nous discutions avec les coopératives de crédit, celles-ci nous font savoir qu'elles se conformeraient sans problème à l'exigence fédérale. Dans les réseaux d'assurance, des pourparlers sont en cours en vue de leur accorder plusieurs années pour se conformer aux normes fédérales.
Le sénateur Tannas : Mais ce pouvoir existe déjà?
M. Campbell : Ce pouvoir existe déjà. Il n'en est pas question dans aucune de ces deux exemptions.
Le président : Sénateur Massicotte, souhaitez-vous toujours reporter votre tour?
Le sénateur Massicotte : Comme j'ai fait preuve d'une grande patience, monsieur le président, je suis certain que vous ferez de même à mon égard. Je suis convaincu que si les gens peuvent répondre brièvement, j'aurai la chance de poser quelques questions.
Pour commencer, je souhaite aborder la question de la recapitalisation interne ou de la conversion des dettes. Veuillez m'expliquer comment cela va se passer, exactement, étape par étape. Cela commence par le BSIF, si je comprends bien, qui dit qu'il y a un problème. Dites-moi exactement quelles sont les étapes, sans oublier le droit des créanciers d'engager des poursuites s'ils estiment avoir subi un tort. Vous pourriez me raconter cette histoire?
M. Campbell : Je vous donnerai un bref aperçu général si vous le voulez bien, parce que la séquence des événements est compliquée. Permettez que je vous montre la voie.
Dans un scénario hautement improbable où le surintendant des institutions financières estime qu'il y a risque de défaillance de l'une de nos banques d'importance systémique — il y a tout un processus qui précède cette décision — en termes généraux, le surintendant fait savoir au premier dirigeant de la SADC que « cette institution n'est pas viable. » Ils se consultent pour déterminer quels outils il convient de mettre en œuvre dans ces circonstances; comme cela a été mentionné, l'un de ces outils est la recapitalisation interne.
Ils déterminent ensuite d'un commun accord la recommandation à faire au ministre des Finances concernant les mesures de précaution à prendre. Le ministre des Finances s'adresse alors au gouverneur en conseil pour demander l'autorisation de la SADC d'utiliser l'un des instruments prévus à cet effet, dans ce cas, l'autorisation de procéder à une conversion des dettes ou une recapitalisation interne. La SADC se voit alors confier tous les pouvoirs qui ont été mentionnés et qui existent déjà dans la loi et qui font actuellement l'objet d'amendements, y compris la disposition relative à la recapitalisation interne.
Dans la multitude de circonstances qui peuvent justifier une conversion des dettes, la loi de la SADC comporte des dispositions de redressement. En ce qui concerne les créanciers titulaires de titres de créances à long terme, qui sont mis à contribution, la loi comporte une disposition, dont mes collègues pourront vous parler si vous souhaitez plus de détails, qui permet à la SADC et à un évaluateur tiers de déterminer, une fois que la situation se décante, si une procédure de mise en faillite leur aurait été plus avantageuse. Il y a un mécanisme de redressement pour ces investisseurs à long terme qui sera clairement défini.
Permettez-moi de vous rappeler que les dispositions de recapitalisation interne ne s'appliquent pas aux actifs toxiques. Elles ne s'appliqueront qu'aux actifs nouvellement émis une fois que cette législation entrera en vigueur. Tout sera entièrement transparent, de sorte que ces investisseurs à long terme sauront exactement quelles sont les conditions législatives et contractuelles régissant l'achat des créances de ces banques. Cela, en termes généraux.
Le sénateur Massicotte : Je dois reconnaître que je suis surpris que cela ne soit pas déjà en place. Le gouverneur Carney a soulevé cette question il y a cinq ou six ans, en disant que c'était la solution pour recapitaliser les banques.
Je sais que les banques ont émis quantité de titres de créance. Elles ont levé des milliards de dollars moyennant ce type de créances hybrides. Tout le monde fait ce genre de trucs et il n'y a pas de législation en place pour convertir ces dettes en actions?
M. Campbell : Permettez-moi de commencer, puis je céderai la parole à Judy Cameron, si elle souhaite parler des fonds propres d'urgence en cas de non-viabilité.
En fait, c'est le résultat de tout le travail qui s'est fait au cours des premières phases de discussion au sein du Conseil de stabilité financière et du G20. Il a fallu des années de travail pour concevoir de nouvelles normes et de nouveaux régimes visant à prévenir une crise. Cela est vraiment l'aboutissement et cela concerne ce qui se passe lorsqu'une institution fait effectivement faillite.
Le sénateur Massicotte : Il n'y a pas encore de législation? Alors que cela fait cinq ans que l'on en parle, il n'y a toujours pas de législation?
M. Campbell : C'est cela. Et maintenant que beaucoup de pays mettent cela en place, étape par étape, les fonds propres d'urgence, dont je laisserai à Judy ou quelqu'un d'autre le soin de parler, fonctionnent à l'heure actuelle sous couvert d'une disposition de conversion qui figure dans le droit contractuel. Quiconque a acheté ce fonds propre d'urgence en cas de non-viabilité, qui existe maintenant un peu partout dans le monde, est soumis à ces conditions contractuelles.
Ce nouveau type de créances à long terme susceptibles d'être converties en actions s'inscrit dans un cadre législatif déjà en place pour l'essentiel visant à assurer davantage de transparence et à préciser les modalités d'application des règles.
Le sénateur Massicotte : Procédons par étape. La législation ne s'applique pas seulement en cas de problème même si l'on reste en deçà des ratios; encore faut-il que le BSIF sonne l'alarme sur le plan interne.
Supposons que cela soit le cas et que le ministre des Finances décide de recourir à ce nouvel instrument de conversion des créances en actions ou appelez-le comme vous voudrez. Cela concerne toutes les créances ou seulement celles que les investisseurs ont acquises en sachant qu'il y avait un risque de conversion? Le bilan de la banque, tel qu'il existe aujourd'hui, est-ce que cela peut être converti, ou seulement celles qui ont été spécialement désignées et levées sur le marché public?
M. Campbell : L'intention, c'est de faire en sorte que les créances visées par le règlement, dont la maturité est supérieure à 400 jours, en règle générale, les titres seront prescrits par la législation, et tous les titres qui font l'objet de consultations avec l'industrie pourront être convertis. Toutefois, dans le cadre du scénario, cela ne s'applique pas automatiquement à tous les titres. On pourrait décider que seulement une partie des titres considérés soit convertie. Il n'est pas automatiquement décidé que, en cas de non-viabilité, toutes les créances susceptibles d'être converties en actions le seront. Quand les autorités décident de capitaliser, elles déterminent le montant qu'elles jugent suffisant.
Le sénateur Massicotte : Vous dites que toutes les créances ayant une maturité supérieure à 400 jours pourraient être converties, même si la personne qui investissait dans ses créances aujourd'hui n'était pas informée de ce risque; par conséquent, ce n'est pas seulement ce type de créances dont on envisage l'émission, mais toute créance inscrite au bilan d'une maturité supérieure à 400 jours qui pourrait être convertie.
M. Campbell : Premièrement, permettez-moi de souligner qu'aucun investisseur qui dispose actuellement de titres auprès de cette banque ne serait mis à contribution. C'est uniquement dans le cas de titres de créance d'une certaine classe nouvellement émis après l'entrée en vigueur de la législation.
Le sénateur Massicotte : Vous venez de dire certaines classes. En d'autres termes, uniquement cette classe de créances pour laquelle ce droit de conversion est prévu. Qu'en est-il du gars qui achète, dans six mois, une obligation avec une maturité à deux ou trois ans, même s'il n'y a pas de disposition; est-ce qu'elle peut être soumise à la conversion en actions?
M. Campbell : Non. Après la date d'entrée en vigueur de cette législation, et seulement après cette date, toute créance qui est émise — et nous avons consulté les banques et elles savent que cela arrive; la plupart de la classe des investisseurs dans le monde savent que cela va se produire à un moment ou l'autre... En vertu de cette législation, ces nouvelles formes de titres, grosso modo les créances à long terme non garanties dont l'échéance dépasse celle prescrite, pourront faire l'objet d'une conversion. Mais, avant cette date, il ne sera pas possible de convertir les titres ni fondamentalement les crédits, quels qu'ils soient, accordés par la banque.
Le sénateur Massicotte : Permettez-moi de poursuivre. Vous dites que tous les dépôts seront exclus. Y compris les dépôts dont le montant dépasse la limite réglementaire? Donc même si vous avez 2 ou 3 milliards de dollars de dépôts qui ne sont pas assurés, il reste exclu qu'ils puissent être convertis?
M. Campbell : C'est exact. C'est tout à fait correct.
Le sénateur Massicotte : Suivons les étapes.
C'est une histoire pour nous tous, monsieur le président.
Le président : Je sais, mais n'en faites pas un roman. D'autres sénateurs souhaitent poser des questions peut-être dans un autre domaine.
Le sénateur Massicotte : J'en suis conscient. C'est une histoire brève et rapide.
Donc vous êtes dans cette histoire de conversion et c'est la SADC qui est aux commandes. La législation dit que vous avez le droit de renvoyer les directeurs et les administrateurs, et les agences gouvernementales disent qu'il n'y a pas de risque, mais vous vous donnez une disposition pour donner instruction aux directeurs de faire certaines choses, mais leur responsabilité personnelle demeure engagée comme des directeurs et administrateurs ordinaires en vertu du droit des sociétés?
M. Campbell : Permettez-moi de répondre d'abord, ensuite je serai ravi de passer le micro à Mme Richer.
Généralement parlant, la SADC, dans ces circonstances, dispose de tous les instruments nécessaires pour assurer la gestion de l'institution pendant la période de transition, si longue ou brève soit-elle. Elle a effectivement le pouvoir de renvoyer les directeurs et les administrateurs de l'institution, et elle a également le pouvoir de leur dire ce qu'ils doivent faire pour gérer la banque. Cela ne dégage pas les directeurs et les administrateurs en place de leurs responsabilités et obligations dans ce qui a contribué à créer les circonstances dans lesquelles ils se trouvent; c'est seulement au moment où ils sont démis de leurs fonctions. Mais toutes les dispositions légales les obligeant à rendre des comptes restent en place.
Le sénateur Massicotte : Cela ne me pose aucun problème. Mais s'ils exécutent des actions en suivant vos instructions, peuvent-ils être juridiquement tenus responsables pour ces actions, alors qu'ils suivent vos instructions?
M. Campbell : Il s'agit là d'une question juridique.
Mme Richer : La législation proposée vise, je crois, à les protéger s'ils suivent nos instructions pendant que nous contrôlons les opérations.
Le président : Quelqu'un souhaite-t-il ajouter à ce qui a été dit? Monsieur Thomas, madame Cameron?
Le sénateur Massicotte : Peut-on faire les deux, convertir les créances et liquider la banque, pour maximiser ses intérêts?
M. Campbell : Oui. Dans un scénario où la SADC ou les autorités contrôlent l'établissement, tous ces instruments sont potentiellement disponibles pour résoudre cette institution, parmi lesquels la restructuration et la liquidation; tous ces instruments sont maintenant disponibles dans ce cadre législatif. De nouveau, j'insiste sur ce point, il s'agit d'établissements jugés d'importance systémique. Cela veut dire qu'on cherche à leur permettre de poursuivre leurs activités pour protéger les clients et les déposants. Tous ces instruments sont là.
La sénatrice Wallin : Je souhaite poser deux questions. Lehman Brothers, cela remonte à bientôt 15 ans; donc il s'agit du choix du moment et des déclencheurs. Il nous a fallu tout ce temps pour réfléchir à la vulnérabilité de la structure des institutions financières canadiennes? Est-ce là réellement le résultat, le premier résultat?
M. Campbell : Merci, sénatrice. Je dirais que c'est pratiquement l'un des derniers résultats. Si vous songez à ce qui s'est fait depuis 2008, et nous sommes en mesure de vous citer toutes les réformes faites au niveau international développées par des pays comme le Canada et toutes les instances de supervision, toutes les nouvelles règles et règlements concernant les exigences de fonds propres, tout cela s'est fait après la crise financière et visait avant tout à prévenir une nouvelle crise, à faciliter la collaboration entre les différentes juridictions, en particulier pour les institutions opérant dans différents pays.
Le G20 a été très transparent, le Conseil de stabilité financière. Bien franchement, toutes ces agences ici, y compris la Banque du Canada, font et ont fait beaucoup, au fil des ans, par le biais de la législation et en précisant les orientations à suivre, pour que le Canada s'insère de manière cohérente dans ce mouvement.
Nous marchons au même pas que les autres en ce qui concerne la recapitalisation interne, en réalité, on traîne un peu le pas sur ce dossier, qui est le plus compliqué parce qu'il s'agit du scénario qui risque de se dérouler si l'on ne prend pas les mesures préventives suffisantes. Nous reconnaissons qu'il s'agit d'institutions financières privées qui reposent sur la confiance. Il s'agit du scénario dans lequel, malgré tous les efforts, une défaillance se produit. Il s'agit de voir comment, lorsque tout a été fait, on peut au moins atténuer les conséquences si on ne peut pas protéger entièrement le contribuable.
La sénatrice Wallin : Et cela ne peut pas se faire au niveau intérieur?
M. Campbell : C'est au niveau intérieur que nous le faisons. On ne pourrait pas le faire sans un régime législatif pour mettre ces mesures en place.
La sénatrice Wallin : Je comprends cela, mais vous dites que c'est le résultat du travail du G20 qui a dû faire ceci et le G7 cela. Nous le faisons aujourd'hui. Pourquoi cela ne pouvait-il pas être fait; je pense que c'est la façon la plus simple de le dire.
M. Campbell : Je reviens en arrière pour dire que cela est dans la logique des principaux attributs du Conseil de stabilité financière. Il a fallu plusieurs années pour décider quels seraient ces attributs et que les différents pays auraient une certaine souplesse pour introduire ces normes dans leurs régimes respectifs. Par rapport au Canada, certains pays ont eu beaucoup plus de réformes à faire que nous, mais en fait nous avons recherché d'abord le consensus. C'est ainsi que fonctionnent maintenant les régimes internationaux pour veiller à ce que tous les pays mettent en œuvre ces régimes de manière cohérente et que toutes nos banques soient traitées de la même manière. La moitié des investisseurs internationaux touchés, ceux-là mêmes qui financent ces institutions, sont d'envergure internationale, ce qui met les banques canadiennes dans une situation comparable à celle des autres banques.
La sénatrice Wallin : Un éclaircissement, parce qu'il me semble qu'on a passé assez vite, et je ne suis pas sûre de ma question. Vous semblez accorder plus d'importance, dans une situation de crise, à la défense et au soutien des bailleurs institutionnels et détenteurs de créances plutôt qu'aux déposants. Vous avez fait quelques commentaires et je souhaite un éclaircissement.
M. Campbell : Je vous le donne avec plaisir. Cela revient à l'idée de base et à la prémisse qu'aujourd'hui vous avez des actionnaires qui sont responsables de l'institution; autrement dit, lorsque l'institution fait faillite ou simplement chancelle, les actionnaires absorbent les pertes et la valeur. En l'état actuel des choses, si une banque est jugée non viable, il n'existe pas de moyens juridiques d'amener les créanciers et les investisseurs à long terme à absorber les pertes; la facture va directement aux contribuables, pour dire les choses simplement.
De sorte que ce régime vise à s'assurer que l'actionnaire est le premier à absorber les pertes, puis les créanciers et les investisseurs à long terme qui devraient logiquement être incités à aider à gérer la banque et à savoir dans quoi ils investissent, avant d'envisager de demander l'aide du contribuable. C'est dans cet ordre que l'on procède à l'absorption des dettes.
La sénatrice Wallin : J'avais compris le contraire. Merci pour cet éclaircissement.
Le sénateur Enverga : Il y a tant de questions et si peu de temps. On a déjà posé quantité de questions, mais la mienne concerne la Loi sur les mesures spéciales d'importation. Les articles 192 à 200 du projet de loi C-15 amendent les alinéas 38, 35 et d'autres encore.
Ma question touche de plus près notre comité : pourquoi est-ce que les amendements proposés s'appliquent uniquement à l'Accord de libre-échange nord-américain? Pourquoi pas aux autres pays ou au commerce intérieur?
Michèle Govier, chef, Recours commerciaux et relations commerciales générales, Finances et échanges internationaux, ministère des Finances Canada : Ils s'appliquent à tous les pays. L'ALENA nous oblige à préciser qu'ils s'appliquent également aux pays membres de l'ALENA.
Le sénateur Enverga : Très bien. Comment cela s'appliquerait-il à notre commerce intérieur?
Mme Govier : Cela ne s'applique pas au commerce intérieur. Seulement aux importations en provenance d'autres pays.
Le sénateur Enverga : Dans quelle proportion des cas est-ce que l'ASFC a déterminé qu'il y avait une marge de dumping ou un montant de subventions jugé insignifiant? Comment quantifie-t-on cela?
Mme Govier : Ce n'est pas commun. Nous avons examiné le problème. Depuis 2004, il n'y a eu que trois cas où il a été déterminé, lors de la phase préliminaire, qu'il existait une marge de dumping ou un montant de subvention insignifiant.
Le sénateur Enverga : Pour ce qui est de la SADC, vous dites que l'on autorisera la SADC à convertir certaines créances d'une banque en actions ordinaires. Pouvez-vous citer des exemples? Pouvez-vous expliquer en termes simples comment vous envisagez de procéder?
M. Campbell : Pour ce qui est de la marche à suivre?
Le sénateur Enverga : C'est cela, la marche à suivre, et la façon dont vous entendez procéder — ou avez procédé par le passé?
M. Campbell : Disons, pour le profane, qu'une banque émettra des titres de créance, pour lever des fonds sur le marché. Ces titres de créance ont une valeur et une échéance. Il y a un montant variable, ce sont en général les investisseurs institutionnels qui les achètent, c'est-à-dire de gros investisseurs. Rares sont les individus qui achètent directement ce type de titres, à la différence d'une action ordinaire, ce qui est plus fréquent.
En cas de défaillance d'un établissement, s'il y a 10 milliards de dollars de ces titres de créance, et que c'est le montant nécessaire pour recapitaliser l'établissement pour qu'il poursuive ses activités, alors, en gros, ces 10 milliards de dollars sous forme de titres de créance seront convertis en actions ordinaires. Les détenteurs de ces titres seront remboursés en recevant une action ordinaire à un certain multiple de capitalisation qui sera établi par le règlement. Ça, c'est la marche à suivre.
En réalité, c'est une conversion pure et simple où l'on utilise la valeur pour recapitaliser la banque, parce que, effectivement, ce passif pour les détenteurs du titre de créances n'existe plus, puisque ces titres sont échangés contre des actions ordinaires. À l'avenir, si le cours de cette action ordinaire monte, ces investisseurs obtiendront la valeur de cette action ordinaire. C'est ainsi que fonctionne le processus.
Le sénateur Massicotte : C'est simple.
Le sénateur Enverga : Cela suivra la même valeur nominale, pas la valeur de marché?
M. Campbell : En réalité, à ce stade, il n'est plus question de valeur nominale ou de valeur de marché; il s'agit d'une conversion directe en un certain nombre d'actions ordinaires. Pour que cela marche, le montant réel de l'encours de la dette — le passif de la banque vis-à-vis de l'investisseur en question — diminue du même montant à hauteur duquel l'investisseur est mis à contribution. Dans ce cas, ce serait la valeur nominale, parce qu'il s'agit d'un titre de créances composé du principal et d'un coupon. Sans trop compliquer l'explication, mais, en gros, il s'agirait de la valeur nominale pour l'investisseur concerné.
Le président : L'action serait convertie au taux courant; en d'autres termes, celui du marché?
M. Campbell : Le processus de conversion sera déterminé par un règlement. Il y aura davantage de consultations avec l'industrie sur les modalités du processus. L'industrie, qui, nous semble-t-il, appuie cette législation, souhaite également bénéficier de cette période de consultation avant que la réglementation ne soit arrêtée — pour voir comment fonctionnerait le processus de conversion ainsi que le coefficient de conversion retenu, de même que les aspects techniques qui entourent toute la question, et que le règlement devra définir. Les détails doivent encore être arrêtés et les consultations se poursuivent.
Le président : Donc, il n'y a pas d'accord sur le prix encore?
M. Campbell : Le prix de conversion ou le coefficient d'action ordinaire que le titulaire d'un titre de créances doit recevoir — cela sera établi dans le règlement suite aux consultations avec l'industrie affectée.
Le sénateur Enverga : Les coûts d'opportunité sont-ils pris en considération dans le cadre de cet accord?
M. Campbell : Il s'agira d'un processus simple — le bilan de l'institution au moment considéré. En fin de compte, cela dépendra des circonstances. Tout cela réellement est hypothétique, mais il faut que cela marche pour des motifs de planification. Cela dépend réellement de la valeur de l'institution au moment considéré et de la valeur des actions ordinaires à ce moment-là.
Le président : Nous terminerons le premier tour de question avec le sénateur Day. C'est approprié. Il a été président du Comité des finances pendant 10 ans.
Le sénateur Day : Je vois beaucoup de visages familiers ici, des fois précédentes, grâce à ces auditions. Cela pourrait avoir une incidence sur certaines de mes questions en ce qui concerne l'évolution de ce que l'on voit se passer ici.
Juste pour conclure la discussion avec M. Campbell sur la recapitalisation et la conversion, dois-je comprendre que c'est le règlement qui déterminera quels titres de créance seront convertis en actions?
M. Campbell : C'est exact. Étant donné la nature technique de ce qui constitue un titre de créance à long terme et la possibilité que la définition change avec le temps, de même que, ajouterai-je, la possibilité pour une industrie aussi innovante de continuer à changer la nature de ces titres, il vaut mieux que cela soit établi dans la réglementation, afin qu'elle puisse être adaptée au fil du temps.
Mais, oui, ce qui est « de nature à être converti » sera clairement prescrit par la réglementation.
Le sénateur Day : Merci. Quelques brèves questions. Il me semblait bizarre que, aux termes de la section 6, il fallait préciser dans la législation fédérale quel représentant de la société d'assurance-dépôts du Canada siégerait au Comité de surveillance des institutions financières. Pourquoi faut-il préciser dans la législation ce changement de président à premier dirigeant?
Mme Cameron : C'est parce que le comité de surveillance des institutions financières est en réalité un comité dont le mandat est défini par la loi. La Loi sur le BSIF stipule que ce comité doit exister, que le président du comité est le surintendant et que ses membres sont — suit l'énumération.
Le sénateur Day : La loi dresse la liste de tous les membres qui occupent des postes dans les différentes institutions?
Mme Cameron : Par exemple, le gouverneur de la Banque du Canada, et cetera.
Le sénateur Day : Merci. Un autre « pourquoi » concerne la prolongation de deux ans que vous avez demandée — de la disposition de temporarisation de l'institution financière. C'était M. Weil, je crois, qui s'est rendu invisible maintenant. C'est bon, monsieur Robinson. Restez où vous êtes. La question n'est pas compliquée.
M. Weil, je crois, a signalé à plusieurs reprises que cette période de cinq ans avait été prolongée. Doit-on envisager une prolongation permanente? Est-ce que cinq ans ne sont plus suffisants, vu ce qui se passe maintenant et la rapidité des changements? Doit-on envisager de recommander une prolongation permanente de cette période de cinq ans?
M. Campbell : Il appartient au gouvernement de se prononcer sur cette orientation, naturellement.
Le sénateur Day : Je comprends.
M. Campbell : Le Parlement peut exprimer ses souhaits sur cette question.
L'idée de passer à un examen quinquennal de la situation repose sur la prémisse que, de cette manière, durant les périodes où il n'y a pas de modification ou d'adaptation de la législation, si l'on veut, le Parlement a la possibilité de la réexaminer et de donner un avis, compte tenu de l'importance de l'ensemble de la législation du secteur financier.
Il se trouve que dans ces circonstances, au cours des dernières années, il y a eu énormément de changements dans la législation elle-même ou dans les directives concernant les activités des institutions financières. Il est difficile de dire si ce sera le cas ces prochaines années.
Lorsque le gouvernement a envisagé la possibilité d'une prorogation, et même après une série de consultations informelles avec l'industrie, il a semblé raisonnable, en cas de prorogation, d'en fixer la durée à deux ans pour laisser le temps d'adopter cette réforme et de procéder à des consultations. Compte tenu du temps nécessaire pour analyser tous ces changements potentiels, étant donné qu'il y a des questions plus ou moins prioritaires dans les différents secteurs de l'industrie entre les banques, les assurances, les fonds de fiducie et les établissements de crédit, et qu'il faut du temps pour déterminer les changements législatifs à apporter éventuellement. Il semblait raisonnable, si l'on devait prolonger la période, de la prolonger de deux ans.
Par la suite, on devra décider s'il faut ou non que ce soit cinq ans dorénavant. C'est vraiment au Parlement qu'il appartient de trancher cette question.
Le président : Dans deux ans, on sera en mesure d'examiner cela et voir quels résultats cela a donnés, c'est ce que vous êtes en train de dire?
M. Campbell : C'est exact.
Le sénateur Day : Notre discussion a porté également sur les coopératives de crédit provinciales qui souhaitent se développer au niveau national, nous avons examiné cette législation par le passé. Nous l'avons vu dans le cadre des lois sur l'exécution du budget par le passé. S'agit-il de nouvelles initiatives résultant d'un bilan négatif tiré de l'expérience montrant qu'il fallait de nouvelles mesures incitatives ou des mesures visant à réduire les obstacles? Pourquoi observe- t-on davantage de changements?
M. Campbell : Voilà une bonne question. Ce serait la troisième fois que l'on apporte des changements mineurs au cadre législatif. Les deux premières, que j'ai déjà mentionnées, qui prévoyaient des exemptions, résultent du fait qu'il y a un premier entrant qui se présente comme demandeur officiel, en même temps que d'autres coopératives de crédit provinciales qui sont seulement en train d'explorer la possibilité d'étendre leurs activités au niveau fédéral.
De nouveau, la prémisse n'est pas que nous adoptons des mesures incitatives ou désincitatives; il appartient réellement aux coopératives de crédit elles-mêmes de décider si elles veulent franchir les frontières provinciales dans le cadre de leur plan d'affaires. Nous sommes en train de supprimer les obstacles auxquels se heurtent diverses coopératives de crédit qui souhaitent développer leur activité au-delà des frontières provinciales.
En ce qui concerne les garanties de prêts, pour en revenir à ce qu'a mentionné un sénateur plus tôt, cela reste envisagé dans le cadre de nos discussions sur les scénarios particuliers des différentes coopératives de crédit venant de différentes provinces et se trouvant dans des circonstances différentes.
Les coopératives de crédit sont de plus ou moins grande taille et, par conséquent, leurs circonstances sont différentes. Le gouvernement s'était engagé à reprendre les consultations avec l'industrie et à réfléchir aux mesures de transition, et c'est le moment, maintenant que le cadre est en place et que le BSIF est lui aussi prêt à recevoir les demandeurs. Quel est le chemin à suivre? Quelle certitude a-t-on durant cette période de transition? Que devons-nous faire pour donner aux conseils d'administration et aux membres l'assurance qu'ils peuvent poursuivre leur stratégie d'affaires pour étendre leurs activités au niveau fédéral?
La garantie de prêt n'est qu'une garantie. Elle peut ne jamais être utilisée. Elle a valeur d'assurance, et elle est assortie d'un prix à payer, comme tout autre instrument. Aucune subvention n'entre en jeu. Elle vise à assurer la stabilité financière des bénéficiaires durant la brève période de transition.
Le sénateur Day : Nous ne voudrions pas donner l'impression à ceux qui nous regardent et ceux qui sont ici, que tout ce mécanisme n'est qu'une tentative du gouvernement fédéral de faire main basse sur les coopératives de crédit provinciales. Qu'est-ce qui a déclenché cette transition au départ?
M. Campbell : Voilà une excellente question, sénateur. Tout cet exercice au niveau fédéral pour mettre en place un cadre fédéral pour les coopératives de crédit, je suis à l'aise pour le dire, répond aux demandes de l'industrie et du secteur des coopératives de crédit, qui depuis des années demandent un cadre fédéral qui leur offre la possibilité d'envisager d'étendre leurs activités au niveau régional ou national.
Différentes circonstances sont susceptibles d'amener une coopérative de crédit donnée à chercher à se développer dans un cadre fédéral, ce qui veut dire franchir les frontières provinciales. Nous dirions donc que cela répond à ces demandes.
C'est également dans la logique des objectifs fédéraux actuels qui visent à promouvoir la concurrence au Canada, ou en tout cas à ne pas l'entraver. De cette manière, si des coopératives de crédit souhaitent rivaliser avec des banques ou d'autres coopératives de crédit ailleurs au Canada, elles ne devraient pas être empêchées de le faire.
De nouveau, qui souhaite s'engager dans cette voie trouve un chemin bien balisé. C'est aux membres eux-mêmes de décider. Ils continueront d'être guidés par leurs propres membres et leurs conseils d'administration. Les provinces doivent convenir d'une sortie, et nos superviseurs doivent être d'accord pour les recevoir. Il faut passer par bien des cerceaux. Chacun doit être d'accord sur le fait que le passage au niveau fédéral est dans l'intérêt bien compris de la coopérative de crédit et de ses membres.
Le président : J'en conviens. Cela fait 15 ans, au moins, que notre comité entend des coopératives de crédit demander la possibilité de mener des activités bancaires, si elles le souhaitent. C'est un processus long et lent, semble-t-il.
La sénatrice Ringuette : Je voudrais vous demander un éclaircissement, concernant le processus de conversion des titres de créance, vous avez dit que cela s'applique aux grandes banques canadiennes qui seront identifiées par le BSIF et qui ont déjà été identifiées. Nous savons tous que depuis 2008, les grandes banques canadiennes ont acheté des succursales et des filiales hors des frontières du Canada. Ce processus de conversion s'appliquerait-il également à ces succursales et filiales hors Canada?
M. Campbell : Dans sa totalité, il s'applique au groupe consolidé. Je laisserai au BSIF le soin d'en parler de manière plus détaillée.
Lorsqu'on examine l'internationalisation du secteur bancaire canadien qui est actif à l'étranger, par le biais de ses succursales ou de ses filiales, qui prête également à l'étranger, dans le sillage, bien souvent, de sociétés canadiennes pour faciliter les échanges commerciaux et les investissements internationaux avantageux pour le Canada, naturellement, lorsqu'on dit qu'une banque risque la défaillance, c'est qu'on examine la situation du point de vue de la banque et de l'entité dans sa totalité, où que puissent être ses actifs, pour déterminer si elle est non viable.
Judy, y a-t-il quelque chose à ajouter?
Mme Cameron : Je suis d'accord avec ce que dit Glenn. C'est au niveau de l'entité consolidée que cela doit se passer, et c'est généralement à ce niveau que sont émis les titres de créance.
La sénatrice Ringuette : Cela couvrirait toutes les activités dans le domaine des actions et obligations qui sont menées en dehors du Canada?
M. Campbell : Une banque mène tous les jours ses activités dans de nombreux endroits et a le capital nécessaire pour soutenir ses activités, que ce soit au pays ou à l'étranger. Un diagnostic de non-viabilité établirait si la banque, où qu'elle se trouve, dispose du capital suffisant à l'appui de ses opérations.
En ce qui concerne la conversion des titres de créance des banques canadiennes, cela porte sur les titres de créances émis par la société mère au Canada, dans l'ensemble; ce sont les titres qui seraient convertis dans le cadre de ce scénario. Il s'agit donc de créances négociables au moyen de différents titres couverts par ce régime.
La sénatrice Ringuette : Mais si cette notion de conversion des titres de créance est une initiative internationale, par exemple, si la BRC a des activités au Venezuela, je soupçonne que ce processus de mise à contribution des investisseurs n'est pas en place au Venezuela. Par conséquent, la législation canadienne devrait s'appliquer également à ces activités au Venezuela.
M. Campbell : J'essayerai de simplifier.
La sénatrice Ringuette : Oui, je vous en prie.
M. Campbell : Toute filiale de la banque mère, peu importe qu'elle soit au Canada ou à l'étranger, relève de la responsabilité de la banque mère. Qu'il s'agisse d'une filiale ou d'une succursale et quelle que soit la façon dont elle est traitée, elle est gouvernée par la réglementation du pays où elle se trouve. Toutefois si cet établissement fait faillite, généralement parlant, il doit être absorbé par la société mère. C'est seulement si celle-ci, pour quelque raison, dans un scénario très improbable, était jugée non viable, qu'entre en jeu un instrument comme celui prévoyant la conversion des titres de créance en actions ordinaires.
En cas de problème avec une filiale à l'étranger, il incombe à l'entité, la banque ou ces régimes locaux d'absorber ces pertes, fermer la filiale et faire ce qu'elle peut.
La sénatrice Ringuette : Tout cela sera supervisé, et l'est actuellement, de la banque mère aux enfants, pour ainsi dire, par le BSIF?
M. Campbell : En général, oui.
La sénatrice Ringuette : Le BSIF a-t-il le pouvoir de faire enquête sur les affiliées des banques canadiennes à l'étranger pour s'assurer qu'elles respectent les exigences canadiennes?
Mme Cameron : Le BSIF applique la Loi sur les banques, mais il supervise de manière collective. La Loi sur les banques s'applique aux entités constituées au Canada, mais la plus grosse partie de notre travail de supervision porte sur les risques que prennent les institutions et sur les pratiques de gestion du risque, ce qui n'est pas prévu dans la Loi. Nous nous attendons à ce que nos institutions respectent nos normes et transmettent ces attentes à leurs affiliées. C'est l'approche que nous avons adoptée.
Le président : Madame la sénatrice Ringuette, pourriez-vous y revenir plus tard?
La sénatrice Ringuette : Je n'ai qu'une autre petite question. Vous venez de dire que vous n'avez pas de pouvoir sur les affiliées à l'étranger. Vous pouvez seulement faire des recommandations aux banques à charte canadiennes concernant leurs succursales à l'étranger.
Mme Cameron : Nous pouvons imposer des attentes à la banque consolidée. C'est comme une mère et ses enfants. Jusqu'à ce qu'il ait 18 ans, vous dites à la mère de veiller à ce que son enfant fasse ceci ou cela et rentre à la maison à 10 heures et il le fait.
Pour notre surveillance prudentielle, oui, nous pouvons imposer nos attentes à l'entité consolidée car nous avons de nombreux outils officiels qui s'appliquent à la banque principale, qui relève de la Loi sur les impôts.
Le président : Comme il nous reste 16 minutes, veuillez utiliser votre temps en conséquence.
Le sénateur Tannas : En ce qui concerne les titres futurs que les banques émettront et qui feraient l'objet d'une conversion, peuvent-elles s'exclure? Peuvent-elles créer leur propre structure et dire : « Nous avons garanti que ces titres ne seront pas convertis à moins que ceux-là aient été complètement convertis et ceux-ci avant ceux-là? ». Avez- vous prévu qu'en superposant et en structurant, elles pourraient s'exclure ou bien cela n'a-t-il pas d'importance puisque personne ne peut le faire car vous allez tout convertir uniformément?
M. Campbell : C'est une question intéressante. Laissez-moi revenir aux principes voulant que l'institution émettrice n'aurait pas cette flexibilité.
Le sénateur Tannas : Vous déciderez de toutes les dettes?
M. Campbell : Ce sera la dette prescrite dans la loi. La flexibilité de la réglementation pour modifier cela au fil du temps est nécessaire en partie pour tenir compte du fait que le secteur lui-même peut adopter de nouveaux instruments que nous ne soutiendrons peut-être pas. Cela nous donne l'outil nécessaire pour continuer de modifier cette définition.
Il est évident que la prémisse ici est le montant et le type de la dette. Le surintendant fixera le montant maximum de la dette qui est « recapitalisable » et que l'institution devra avoir à tout moment.
Pensez-y. Nous nous assurons de fixer l'exigence et de faire en sorte que les investisseurs connaissent les éventualités, et le surintendant veillera à ce que les banques émettent un montant important de cette dette qui correspond au niveau qui soutient la banque selon ce scénario très improbable.
Le sénateur Tannas : Vous pouvez donc tolérer ce que je viens de décrire tant que vous êtes satisfait que vous avez un montant suffisant dans la réserve qui peut être converti?
M. Campbell : Je dirais que oui.
Le président : La banque n'est plus responsable à ce moment-là, n'est-ce pas?
M. Campbell : Le processus de conversion serait réglementé. Je pense que le sénateur demandait comment elles peuvent émettre différents types d'instruments qui modifieraient la hiérarchie des réclamations.
Le sénateur Tannas : J'aimerais également dire merci. Nous n'avons pas assez d'occasions, les législateurs, au nom des Canadiens, de vous remercier pour le travail que vous faites. Vous nous avez évité le pire lors de la dernière crise financière et vous devez en être loués. Merci.
Le sénateur Massicotte : Les dépôts sur trois ou cinq ans sont-ils exclus ou sont-ils considérés comme des dettes dans votre esprit?
M. Campbell : Tous les dépôts, y compris les dépôts à terme, assurés ou non, ne feront pas l'objet d'une recapitalisation.
Le sénateur Massicotte : Ils sont traités comme des déposants?
M. Campbell : Oui.
Le sénateur Massicotte : Vous avez dit que vous convertissez la dette à la valeur comptable et vous dites que tout est dans les règlements, mais je me demande comment vous traitez la question dans le règlement. Disons que vous avez un déficit de 3 millions de dollars à la banque, l'action étant à un certain prix, et vous décidez confidentiellement de subventionner la banque en difficulté. Vous demandez l'approbation du ministre des Finances et faites une annonce. Mais soyons francs : le prix de l'action chuterait lorsque la nouvelle sortirait. Le prix de conversion est un concept moralement difficile à appréhender.
Permettez-moi de supposer la venue de Goldman Sachs ou de Lehman Brothers au Canada, ce que vous estimeriez suffisamment important pour définir votre concurrence. Vous avez le droit, je suppose, d'en faire l'une des six institutions que vous jugez sensibles pour notre économie. Est-ce exact?
M. Campbell : Oui. Toute institution financière exerçant ses activités au Canada serait soumise à la décision du surintendant quant à savoir si oui ou non elle est d'importance systémique.
Le sénateur Massicotte : Par conséquent, votre définition de systémique se fonde sur l'impact sur notre système économique.
Je comprends que la surveillance prudentielle est toujours effectuée sur une base consolidée. Disons que vous avez une banque en difficulté et que la SADC dit qu'avec l'autorisation du ministre des Finances, elle va prendre le contrôle de l'entité. Je sais que la surveillance est sur une base consolidée, mais lorsque vous gérez la dette ou une entité qui a des filiales, vous pouvez décider dans l'intérêt de notre pays d'abandonner les filiales.
Je sais que vous dites que vous la considérez automatiquement comme d'importance systémique, mais vous allez gérer en fonction des intérêts des personnes morales et non sur l'approche de la comptabilité de consolidation. Ce n'est pas aussi simple car ce sera toujours là. Vous pouvez décider d'oublier la filiale des Bahamas et la laisser mourir. Ai-je raison?
M. Campbell : C'est l'autre côté de la conversation que nous avons eue tout à l'heure sur les affiliées d'une entité étrangère exerçant leurs activités au Canada. Cela dépend si elles sont autorisées ici comme bureau de représentation, comme succursale ou filiale, dans quelle mesure elles acceptent des dépôts ou non et quels sont leur type d'activités et leur taille. De toute évidence, ces entités seraient réglementées au Canada, et si elles sont en difficulté, il existe des outils pour gérer la situation.
Le sénateur Massicotte : Ce que je veux dire, c'est que contrairement à l'impression que vous donnez, il n'y a pas d'accord international selon lequel le pays où se trouve le siège social est responsable d'assurer la nature prudentielle de toutes ses filiales dans n'importe quel pays. Ai-je raison de dire que cet accord international n'existe pas?
M. Campbell : Je dirais que la prémisse du Conseil de stabilité financière est que tous les participants au G20 gèrent prudentiellement leur institution dans le sens où ils sont responsables de toute leur entité, qu'il y ait ou non des questions qui entrent en jeu quand des problèmes surgissent. On estime qu'ils seraient responsables.
Mme Cameron : C'est l'un des principes fondamentaux du Comité de Bâle qu'un régime soumis aux règles de Bâle effectue une surveillance sur une base consolidée. Tous les pays qui ont signé l'Accord de Bâle sont censés le faire.
Le sénateur Massicotte : Au cours des deux dernières semaines, certaines banques américaines ont bien précisé, en rapport avec une filiale en Asie, qu'elles s'attendent à ce que cette entité soit autonome parce qu'elles ne seraient pas responsables si elle faisait faillite. C'était une grande banque d'investissement aux États-Unis. Je comprends le point de vue prudentiel, parce que c'est la bonne approche.
D'abord, concernant la prorogation de la date de temporisation, je peux comprendre pourquoi vous le voulez tous. C'est beaucoup de travail compliqué. C'est de nature stratégique, mais je ne comprends pas pourquoi en modifiant cette loi, vous devriez proroger. Je peux comprendre pourquoi vous voulez le faire — tout le monde veut proroger, mais ce n'est pas important. C'est un événement de faible probabilité et il n'est pas important par rapport à l'ensemble de votre système.
Permettez-moi de parler des importations. Vous présentez maintenant un texte de loi qui dit que même si l'analyse préliminaire montre que l'impact est insignifiant, vous allez poursuivre votre étude. Pourquoi? Si vous concluez que c'est insignifiant, pourquoi voudriez-vous dépenser de l'argent des contribuables pour terminer votre étude?
Mme Govier : La principale raison est qu'à la phase préliminaire, les données disponibles sont sommaires. Elles pourraient indiquer une marge insignifiante de dumping, mais une analyse plus approfondie pourrait apporter des informations qui contribuent à vérifier que c'est le cas ou que les marges de dumping sont plus élevées.
Le sénateur Enverga : Ma question sera simple et concerne la section 5 de la partie 4, les institutions financières officiellement désignées comme des banques canadiennes d'importance systémique. Vous avez parlé notamment de la BMO et de la CIBC.
Il y a une autre banque qui n'a pas été mentionnée je crois. Je ne sais pas si c'est une banque, mais elle a des actifs de 251 milliards de dollars et selon Bloomberg, c'est la deuxième banque au Canada et son ratio de fonds propres est le plus élevé. Je parle de la banque Desjardins. Peut-on changer cela ou est-ce que cela fait partie d'une banque?
Mme Cameron : Desjardins n'est pas une institution réglementée au niveau fédéral. Ce sont des organisations regroupées en coopérative réglementée par la province du Québec.
M. Campbell : La province de Québec et ses organismes de réglementation ont déjà désigné Desjardins comme étant d'importance systémique pour la province et l'Autorité des marchés financiers envisage donc de réglementer Desjardins dans cette optique. Elle a déjà donné une désignation semblable à Desjardins dans son propre système réglementaire.
Le sénateur Enverga : Est-ce que vous exigeriez qu'elles maintiennent une capacité minimum? Est-ce que cela fera partie de la politique à l'échelle du système?
M. Campbell : Nous travaillons avec d'autres organismes de réglementation provinciaux, dont la province de Québec. Je ne peux pas parler en leur nom, mais je sais qu'il est prévu que Desjardins soit réglementée selon les mêmes normes que les autres. Il incombe aux parties provinciales de s'assurer qu'elles sont réglementées comme il convient.
Le sénateur Enverga : Vous ne pensez pas qu'elles sont importantes pour le système fédéral dans son ensemble?
M. Campbell : Les opérations bancaires ou les opérations des caisses de crédit de Desjardins ne sont pas réglementées au niveau fédéral.
Le sénateur Day : J'ai deux questions. Les deux sont probablement assez évidentes, mais je ne connais pas suffisamment la Loi sur les banques.
Premièrement, pourquoi estimez-vous nécessaire dans la loi d'ajouter le paragraphe 39.01(1) qui exempte une société de crédit locale prorogée comme coopérative de crédit fédérale de toute exigence de la partie VI de la Loi sur les banques relative au vote? Il me semble pourtant que le vote est fondamental et je me demande pourquoi elles pourraient être exemptées pendant trois ans.
Ma deuxième question porte sur la question des banques d'importance systémique. Cette terminologie et les obligations qui découlent de cette désignation existent depuis un certain nombre d'années, depuis la crise économique de 2013. Je crois comprendre que pour ces banques désignées, les exigences relatives aux fonds propres étaient plus élevées et la surveillance plus rigoureuse. Or, l'année dernière, de nouvelles exigences ont été imposées aux banques désignées d'importance systémique au Canada de sorte qu'elles doivent préparer beaucoup plus de documentation pour les aider à éviter les ennuis en cas de difficulté
Et maintenant, nous avons ce projet de loi selon lequel le BSIF peut officiellement les désigner. Est-ce simplement un terme et la loi est-elle en train de rattraper ce qui existe déjà?
M. Campbell : Je vais répondre à ces deux questions, et d'autres pourront compléter.
Pour répondre à votre seconde question, oui, en effet, il s'agit de légiférer le pouvoir du surintendant de désigner ces institutions comme étant d'importance systémique et, ensuite, de faire tout le nécessaire pour les réglementer à ce titre, étant donné leur importance pour l'économie canadienne de ce point de vue.
Quant à votre première question, par ces deux exemptions, en particulier celle concernant le vote, une fois qu'une coopérative de crédit est dans la sphère fédérale, nous reconnaissons l'existence de divers régimes provinciaux partout au Canada qui ont des règles en matière de scrutin. Certains régimes provinciaux sont sans doute plus avancés que le nôtre et autorisent le vote électronique et les communications électroniques avec leurs membres. On admet ainsi, après avoir parlé à des coopératives de crédit, qu'elles demanderont une certaine exonération afin de continuer de fonctionner comme avant pour le vote de leurs membres, pendant quelques années encore. Le ministre peut ainsi affirmer qu'il pense que la loi provinciale respecte en grande partie l'intention de la loi fédérale, mais il admet qu'il peut y avoir des contradictions, et, par conséquent, il permet aux coopératives de crédit de continuer de fonctionner selon leur mode de scrutin habituel pendant trois ans.
Le sénateur Day : Je vous remercie.
Le président : Nous remercions les témoins. Nous avons passé une heure et demie très intéressante. Je l'apprécie beaucoup.
Pour la seconde partie de notre réunion au cours de laquelle nous effectuerons l'étude préalable de la partie 4 du projet de loi C-15, j'ai le plaisir de recevoir Darren Hannah, vice-président, Finances, risques et politique prudentielle, de l'Association des banquiers canadiens. Nous vous remercions d'avoir accepté notre invitation. Après votre déclaration préliminaire, nous passerons aux questions. Nous vous écoutons.
Darren Hannah, vice-président, Finances, risques et politique prudentielle, Association des banquiers canadiens : L'Association des banquiers canadiens remercie le Comité de l'avoir conviée aux discussions sur la partie 4 du projet de loi C-15, Loi d'exécution du budget de 2016, plus précisément des sections 3 et 5.
L'ABC représente 59 banques membres, soit des banques canadiennes ainsi que des filiales et des succursales de banques étrangères exerçant des activités au Canada, et leurs 280 000 employés un peu partout au Canada.
Des banques saines et solides aident les familles à acheter une maison, les particuliers à épargner pour leur retraite, les petites entreprises à croître et l'économie à tourner. Au Canada, plus de la moitié du crédit consenti aux entreprises est fourni par les banques. En effet, les chiffres de décembre 2014 montrent que le crédit accordé par les banques dépassait les 990 milliards de dollars, une hausse de 5,5 p. 100 sur l'année précédente et de 40 p. 100 sur les chiffres de 2009.
Les banques au Canada sont des prêteurs prudents, qui s'efforcent de rendre le crédit accessible aux personnes morales et aux personnes physiques qui sont solvables. Cette approche est une des raisons clés expliquant comment les banques au Canada ont pu éviter les difficultés financières vécues par les banques dans d'autres pays. Maintenir ce principe fondamental de prudence dans l'octroi du crédit est important pour le système bancaire canadien et il s'inscrit dans l'intérêt supérieur de tous.
Pendant la crise financière, de grandes perturbations ont secoué le système financier mondial. Ailleurs, de nombreuses banques se sont retrouvées en situation de détresse financière, ce qui a conduit soit à leur perte, soit à un recours aux deniers publics pour les sauver. Il en a été autrement au Canada où aucune banque n'a flirté avec la faillite et où aucun repêchage de la part du gouvernement n'a été nécessaire. En effet, à la veille de la crise financière mondiale, les banques du Canada étaient bien capitalisées, bien gérées et bien réglementées, et elles le demeurent à ce jour.
Dans la foulée de la crise, d'importants changements ont été apportés à la réglementation bancaire internationale afin de réduire les risques au sein du secteur bancaire mondial et d'éviter ainsi une autre crise financière.
Les nouvelles règles sont établies au niveau international, mais il revient à chaque autorité territoriale de les mettre en œuvre et de veiller à leur application. Par exemple, et comme vous le savez très bien, Bâle III a établi de nouvelles règles bancaires pour resserrer les exigences en matière de fonds propres et de liquidité. Ces changements ont conduit, d'un côté, à l'augmentation du niveau de fonds propres et de liquidité que les banques doivent détenir et, de l'autre, à la baisse de la probabilité qu'une banque au Canada se retrouve en difficulté.
Un élément clé du programme de réforme des finances mondiales est la recapitalisation interne des banques. L'idée initiale émane du Conseil de stabilité financière, organe établi en 2009 afin de surveiller le système financier mondial et de soumettre des recommandations. En 2011, le CSF a publié un rapport intitulé Key Attributes of Effective Resolution Regimes for Financial lnstitutions, où il présente les grandes lignes d'un cadre de résolution pour les banques qui protège les contribuables. Ce cadre a été officiellement approuvé par le G20 en novembre 2011, lors d'une réforme plus large du secteur financier.
Bien que le secteur bancaire canadien soit demeuré solide tout au long de la crise financière, le gouvernement fédéral a commencé à explorer les possibilités de mettre en place un programme de recapitalisation interne pour les banques d'importance systémique au Canada. L'ABC et ses banques membres ont participé à ces consultations dès le début et appuient les efforts pour raffermir le système financier par l'introduction d'un régime de recapitalisation interne des banques.
Bref, un régime de recapitalisation interne offre le cadre permettant la conversion de certaines dettes de créance à long terme en fonds propres, advenant la situation improbable où une banque au Canada épuiserait ses capitaux et serait en danger de faire faillite. Ce régime offre une stratégie qui permet de rendre les actionnaires d'une telle banque et ses créanciers financièrement responsables des pertes, tout en protégeant les contribuables.
Ce qui est essentiel au sujet du régime de recapitalisation interne, c'est que le cadre de résolution n'englobera pas les dépôts des clients. Le régime de recapitalisation permettra à une banque en faillite de convertir plutôt ses titres de créance à long terme en actions ordinaires et de poursuivre ainsi ses activités.
Le régime de recapitalisation interne représente donc un niveau additionnel de protection pour les déposants en établissant la feuille de route pour qu'une banque soit de nouveau solvable. En outre, les dépôts dans les banques canadiennes sont déjà assurés par la Société d'assurance-dépôts du Canada à hauteur de 100 000 $ au cas où une banque déclarerait faillite. Les clients des banques ont donc l'assurance que leurs dépôts sont en sécurité.
Le régime de recapitalisation interne proposé dans le projet de loi C-15 veille à ce que le Canada demeure conforme aux normes internationales approuvées par le G20. Par ailleurs, malgré la force et la stabilité prouvées du secteur bancaire canadien, ce projet de loi représente un autre outil de résolution bancaire dont dispose le gouvernement. Nous appuyons ce cadre et serons heureux de collaborer avec le gouvernement à la préparation de réglementations additionnelles en vue de mettre au point le régime de recapitalisation interne.
La section 3 de la partie 4 modifie les dispositions de temporisation des lois régissant les institutions financières fédérales en prorogeant le délai de temporisation de deux ans au-delà du cycle habituel de cinq ans, soit jusqu'en mars 2019. Ainsi, le gouvernement aura plus de temps pour entreprendre un réexamen du cadre législatif des institutions financières fédérales au Canada.
Les membres du Comité connaissent bien l'importance de la Loi sur les banques et de la législation connexe. Nous comprenons que le gouvernement n'a pas encore déterminé la nature et la visée de ce prochain examen. Nous serons heureux de collaborer avec le gouvernement et les parlementaires une fois le processus déclenché.
L'ABC et ses institutions membres tiennent à poursuivre leur contribution efficace à la mise en place de politiques publiques en appui à un système bancaire sain et performant, à l'avantage des Canadiens et de l'économie canadienne.
Merci encore pour cette occasion de présenter notre point de vue. Je prendrai à présent vos questions.
Le président : Honorables sénateurs, comme vous le savez, il ne reste que 22 minutes à la séance; veuillez donc gérer votre temps en conséquence.
Le sénateur Massicotte : Questions brèves, réponses brèves. Disons qu'un de vos membres — la TD, RBC, qui sont présentes aux États-Unis — voire d'autres qui sont aux États-Unis — donc vos membres émettent beaucoup de titres d'emprunt aux États-Unis et sur d'autres marchés à l'étranger. Je crois comprendre que, même si c'est un citoyen américain qui détient un titre d'emprunt, les conditions de recapitalisation s'appliquent, parce que c'est la loi canadienne qui a préséance. Est-ce exact?
M. Hannah : Généralement, quand un titre d'emprunt est émis, c'est par un consortium de banques, donc, il est émis par la banque mère.
Le sénateur Massicotte : Nous avons mentionné plusieurs banques. Disons que la TD, RBC ou une autre banque a un problème de solvabilité dans une entité américaine. Les banques canadiennes consacrent beaucoup de temps et se donnent beaucoup de mal à s'assurer de séparer les banques. Mais disons qu'il y a un problème dans une filiale américaine, et c'est bien une filiale, et non la société mère, qui est aux États-Unis le plus souvent.
Donc, disons que le BSIF et la CSE disent qu'il y a un problème; étant donné l'approche consolidée, étant donné que l'inclusion de la filiale américaine pose un problème à cet égard, ils pourraient décider de convertir une partie de la créance en actions. Pourtant, l'autre option consiste à se demander s'il n'y a pas lieu de la considérer comme une entité distincte, ce qu'elle est légalement, et de permettre aux autorités américaines de s'en occuper. Comment traitez-vous ces situations? Que pensent vos membres de cette « largesse » en vertu de laquelle vous pensez à une conversion de l'emprunt bien que ce dernier soit attribué à un pays tiers?
M. Hannah : Sénateur, en ce moment, ce à quoi vous commencez à penser, ce n'est pas tellement au cadre de recapitalisation interne, mais plutôt à quelque chose à laquelle on a fait allusion plus tôt, soit la planification des conditions résolutoires et le processus de redressement. Chacune des banques d'importance systémique pour l'économie canadienne doit travailler avec l'autorité de réglementation, soit essentiellement la SADC, afin de fixer un plan de résolution et de redressement : Que feriez-vous dans les circonstances suivantes? Comment passeriez-vous d'une situation de faiblesse sur le plan financier et quelles mesures prendriez-vous pour aboutir à une situation de force sur le plan financier? L'exercice comprend l'examen des différentes situations pouvant exister chez certaines banques affiliées et de la manière dont vous vous en occupez.
Le président : Vous pouvez les vendre.
M. Hannah : En effet.
Le sénateur Massicotte : Disons qu'elles convertissent la créance en actions au Canada et que je fais partie des créanciers. J'obtiens des actions converties. Je crois cependant que la loi dit également que si la liquidation aurait été préférable, je peux intenter une action en dommages-intérêts, n'est-ce pas? Je crois que c'est ce qui est proposé.
M. Hannah : C'est habituellement pas plus mal.
Le sénateur Massicotte : En effet. Cependant, si cette banque avait déposé son bilan, le problème aux États-Unis n'était pas mon problème; j'aurais été intact. Donc, ensuite, je suppose que vous disposez du mécanisme de redressement. Cependant, le mécanisme de redressement, vous le savez bien, est très partial. Le gouvernement peut instituer un tribunal. Vous n'avez pas le droit d'intenter une action. Ce sont eux qui décident. Vous encaissez ce que cela vaut. Certains créanciers ne seront pas très heureux. Est-ce que c'est satisfaisant à vos yeux, ce processus?
M. Hannah : Je reviens à la communication qui accompagne cela. Elle s'applique aux nouvelles créances. Les détenteurs d'une nouvelle créance comprendront au départ les modalités applicables et seront informés en termes clairs. On les informera du fait que le régime de recapitalisation est en place et qu'il représente un risque. Les risques sont divulgués dès le départ. Seront-ils heureux de la situation? Non, mais ils auront su que ça s'en venait.
Le sénateur Massicotte : Vos membres n'éprouvent pas de gêne à l'égard du mécanisme de redressement lui-même?
M. Hannah : Pas en soi, non.
Le sénateur Massicotte : Vous avez bien sûr étudié les modifications visant les coopératives de crédit fédérales, si vous voulez. Est-ce que vos membres contestent ces modifications? Êtes-vous tous en accord avec cela? Est-ce de la concurrence déloyale? Vous pouvez commenter?
M. Hannah : Nous sommes généralement favorables à la possibilité de coopératives de crédit fédérales. Nous prenons acte de la nécessité de mesures transitoires, bien sûr. Nous admettons cependant que les mesures transitoires doivent comporter une échéance et nous sommes très favorables à cette condition. Le passage d'un régime à un autre n'est pas chose simple, c'est entendu, donc il faut accorder un peu de temps pour ce faire, mais, à un moment donné, tout le monde doit être soumis aux mêmes règles.
Le sénateur Massicotte : Pourquoi le peu de succès? Notre comité discute de cette question depuis cinq ans et les coopératives de crédit ont exprimé le souhait d'être fédérales, et pourtant rien ne se passe. Nous aurons peut-être bientôt un petit éveil.
M. Hannah : Vous ne posez pas la question à la bonne personne, monsieur le sénateur. Il faudrait poser la question à quelqu'un du côté des coopératives de crédit.
Le sénateur Enverga : Merci pour votre exposé. Je sais que notre système bancaire est bâti sur de solides assises et je sais qu'il évolue à certains égards. Vous avez indiqué aussi que vous étiez favorable à l'encadrement que nous a présenté le gouvernement.
Y a-t-il des pièces manquantes à la structure bancaire pour assurer sa consolidation? Est-ce que vous pensez à d'autres mesures législatives que le gouvernement devrait peut-être mettre en place à ce sujet?
M. Hannah : Je vais reprendre les propos d'un des témoins précédents. Nous sommes plus près de la fin que du début du processus de réforme. Nous avons déjà franchi les étapes importantes de resserrement des exigences liées aux fonds propres et aux liquidités et de définition d'un processus de planification des conditions résolutoires. Nous sommes près de ce que j'appellerais l'étape ultime et de l'étape finale, plus près de l'étape finale de montage de ce solide cadre. Je pense qu'on a accompli beaucoup jusqu'à maintenant.
Le sénateur Enverga : Je sais qu'il y a des restrictions sur la propriété étrangère des banques canadiennes. Est-ce l'une des choses que vous aimeriez voir changées?
M. Hannah : Les règles en matière de propriété constituent un tout autre sujet. Elles ne s'appliquent vraiment pas dans le cas d'une recapitalisation. C'est une autre question. Ce n'est pas quelque chose que nous envisageons vraiment.
Le président : D'autres questions?
Monsieur Hannah, il semble que nous soyons une bande de sénateurs heureux aujourd'hui et nous sommes satisfaits de tous les autres témoins entendus aujourd'hui. Je crois tout de même que votre témoignage nous a rassurés quant à l'appui des banquiers à l'égard de la législation et du fait que vous ne voyez aucun obstacle ni problème à l'horizon. Nous vous en sommes très reconnaissants. C'est un problème de moins à régler, pour nous.
Notre prochaine réunion aura lieu le mercredi 1er juin. La séance est levée.
(La séance est levée.)