Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Banques et du commerce
Fascicule n° 9 - Témoignages du 26 octobre 2016
OTTAWA, le mercredi 26 octobre 2016
Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce se réunit aujourd'hui, à 16 h 19, pour étudier, en vue d'en faire rapport, la création d'un corridor national au Canada afin d'améliorer et de faciliter le commerce et les échanges intérieurs.
Le sénateur David Tkachuk (président) occupe le fauteuil.
Le président : Je vous souhaite la bienvenue à cette séance du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce. Je m'appelle David Tkachuk et je suis le président du comité.
Il s'agit aujourd'hui de notre quatrième séance dans le cadre de notre étude sur la création d'un corridor national au Canada afin d'améliorer et de faciliter le commerce et les échanges intérieurs.
Nous sommes heureux d'accueillir aujourd'hui le chef Joseph Bevan, membre de la Première Nation Kitselas et président de la Coalition de grands projets des Premières Nations; la chef Corrina Leween, membre de la coalition et aussi membre de la Première Nation Cheslatta Carrier; Mme Angel Ransom, conseillère et membre; ainsi que M. Del Nattrass, conseiller économique et financier. C'est avec plaisir que nous accueillons également M. Harold Calla, président exécutif du Conseil de gestion financière des premières nations et membre de la Première Nation Squamish.
Je vous souhaite la bienvenue à tous à Ottawa. J'espère que vous avez fait un beau voyage jusqu'ici et que vous appréciez le temps frais. Qui veut se lancer? Chef Bevan, à vous la parole.
Chef Joseph Bevan, président, Coalition de grands projets des Premières Nations : Merci, monsieur le président, et bonjour à vous, honorables sénateurs.
Je suis le chef Joseph Bevan, de la Première Nation Kitselas. C'est pour moi un privilège de présider la Coalition de grands projets des Premières Nations.
Avant d'aller plus loin, notre groupe aimerait tout d'abord souligner que nous sommes réunis aujourd'hui sur le territoire traditionnel du peuple algonquin.
Je tiens à remercier le comité de nous avoir invités à venir parler du travail à l'appui des collectivités des Premières Nations qui jouent un rôle au sein de la coalition.
Je suis accompagné de deux membres de la coalition : la chef Corrina Leween, de la Première Nation Cheslatta Carrier, et la conseillère Angel Ransom, de la Première Nation Nak'azdli Whut'en.
Tout comme ma collectivité de Kitselas, qui fait partie de la Première Nation Tsimshian, établie sur la côte nord de la Colombie-Britannique, chacun de nos territoires respectifs est touché par des projets d'envergure de quelque sorte. La chef Leween et Mme Ransom vous donneront leurs points de vue sur les répercussions de ces projets dans leurs collectivités.
Nous sommes également accompagnés de M. Del Nattrass. Ancien directeur au sein de l'industrie pétrolière et gazière, M. Nattrass joue un rôle dans l'élaboration des options économiques et des perspectives financières pour aider la coalition à évaluer la possibilité que les Premières Nations puissent prendre part à des projets majeurs. M. Nattrass a rédigé certains de nos rapports techniques et est en mesure de répondre aux questions d'ordre technique.
L'économie nationale et le bien-être financier des Canadiens sont directement liés à l'exploitation de nos ressources naturelles et à leur capacité d'atteindre les marchés d'exportation. Près de 1,8 million d'emplois sont directement et indirectement liés aux ressources naturelles du Canada, parmi lesquels on compte 30 000 Autochtones.
Si on prenait une carte du Canada et qu'on identifiait chacun des projets d'envergure proposés d'un bout à l'autre du pays, on constaterait que chacun des projets a une incidence sur les intérêts des peuples des Premières Nations. Si on traçait une ligne qui traverse le Canada de l'ouest vers l'est, on verrait que le corridor en question touche les intérêts de nombreuses Premières Nations.
En même temps, beaucoup de ces collectivités sont aux prises avec des problèmes de pauvreté, des problèmes sociaux et un faible niveau de scolarité, et bon nombre d'entre elles n'ont pas la possibilité d'être formées en vue d'obtenir un bon emploi.
Pouvons-nous travailler ensemble afin de créer de la prospérité là où il existe de la pauvreté? Comment peut-on vraiment tenir compte des intérêts commerciaux des Premières Nations touchées par les projets d'envergure? Qu'en est- il exactement? Peut-on inclure les Premières Nations de façon à ce qu'elles possèdent une part des capitaux propres dans les projets et prennent part aux décisions de gestion? Comment peut-on assurer une saine gérance de l'environnement et atténuer les effets cumulatifs causés par le développement des projets d'envergure tout en tenant compte des intérêts uniques des Premières Nations?
Ce sont les domaines de travail qui font actuellement l'objet d'une étude par la coalition. La coalition n'est pas une plateforme de négociation de projets. Nous communiquons l'information technique fournie par les experts aux diverses Premières Nations qui, en temps normal, n'auraient pas accès à cette information.
Les objectifs politiques et le travail technique de la coalition visent à guider les négociations de projet à l'échelle de la collectivité. Nous voulons donc renforcer les capacités dans les domaines où les besoins sont criants. Le principe du consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause exige des investissements dans le renforcement des capacités des Premières Nations. Nous devons savoir ce qu'on nous demande de faire et disposer des ressources nécessaires pour mieux cerner les possibilités et les risques pour nos gens afin d'être en mesure de prendre des décisions éclairées.
La nécessité pour nos collectivités d'avoir accès cette capacité technique a été illustrée au cours des 10 dernières années, lorsque nos collectivités du Nord de la Colombie-Britannique ont été inondées de demandes de la part de promoteurs de projets dans le secteur du gaz naturel liquéfié. Les promoteurs voulaient obtenir des réponses et notre consentement, alors que les membres de ma collectivité essayaient de ralentir le processus pour pouvoir évaluer les avantages économiques et les impacts environnementaux de chaque projet.
Même si les conditions du marché ont permis de réduire quelques pressions immédiates sur nos collectivités, les lacunes en matière de capacité demeurent, et on doit les combler.
La Première Nation Kitselas est directement touchée par 10 projets de GNL, y compris de pipeline. Je songe notamment au projet de GNL Pacific Northwest et au projet de pipeline Pacific Trail. En fait, c'est ce dernier projet qui est devenu le catalyseur d'une grande partie du travail que la coalition entreprend aujourd'hui.
L'entente initiale avait été négociée avec les 16 Premières Nations touchées par le projet de pipeline Pacific Trail et leur garantissait la possibilité de faire l'acquisition de 30 p. 100 des parts du projet. On leur a réservé une place à la table des négociations. On les a consultées dès le départ, puis traitées avec respect. Les Premières Nations ont fini par vendre leur option, en raison de la vente du projet à un autre promoteur, et le pipeline n'a pas été construit.
Cela dit, nous éprouvions néanmoins de graves problèmes avant la vente. Même si nous voulions acquérir une part, nous n'avions pas accès à du financement. On nous a dit que c'était impossible ou que les intérêts sur le prêt seraient équivalents au taux de rendement du capital investi.
Reconnaissant la nécessité d'éliminer les obstacles à l'accès aux capitaux, un groupe de Premières Nations a communiqué avec le Conseil de gestion financière des premières nations pour lui demander son aide. M. Harold Calla, le président du conseil, qui est avec nous aujourd'hui et qui vous parlera plus tard, nous a beaucoup conseillés sur les options qui permettraient aux Premières Nations de surmonter les obstacles qui nous ont toujours empêchés de participer à la vie économique du Canada.
L'aide offerte par les institutions dirigées par les Premières Nations, telle que le Conseil de gestion financière des premières nations, est de la plus haute importance.
La Loi sur la gestion financière des premières nations, qui fournit les outils et les objectifs aux trois institutions gérées par les Premières Nations, y compris l'Administration financière des premières nations, dont je suis le président, doit être examinée sérieusement par le gouvernement quant au rôle qu'elle peut jouer dans l'avancement des intérêts économiques et sociaux des Premières Nations.
La coalition est en mesure de renforcer les capacités de 23 Premières Nations dans le Nord de la Colombie- Britannique, parce qu'elle a réussi à tirer parti du soutien offert, aux fins de l'application de la Loi sur la gestion financière des premières nations, pour y parvenir.
Je tiens également à mentionner que le travail de la coalition a bénéficié du soutien de la ministre Bennett et de ses fonctionnaires de la Direction générale des terres et du développement économique d'Affaires autochtones et du Nord Canada.
Le premier ministre s'est engagé, au nom de son gouvernement, à établir une relation de nation à nation avec les Premières Nations. À quoi ressemblera cette relation? Est-ce que les améliorations aux relations financières entre les Premières Nations et la Couronne en feront partie? Selon moi, c'est une nécessité. Nous devons en arriver à un point où les Premières Nations peuvent participer pleinement à la vie économique en tirant avantage des possibilités économiques qui sont offertes à même leurs territoires.
Nous devons engager une conversation sérieuse sur les garanties de prêt offertes par le gouvernement, l'accès des Premières Nations aux capitaux et leur participation à des projets d'envergure. Le Canada a offert plusieurs formes de garanties de prêt pour mettre en œuvre des initiatives dans différents secteurs importants pour le bien-être de l'économie nationale.
La réflexion sur la création d'une banque d'infrastructure nationale devrait inclure des paramètres qui tiennent compte des besoins en matière d'accès aux capitaux des Premières Nations qui souhaitent prendre part aux projets d'infrastructure à grande échelle.
La coalition a récemment présenté aux cinq grandes banques un projet d'infrastructure fictif dans le but de solliciter de l'information auprès des prêteurs pour déterminer quelles modalités de financement, le cas échéant, pourraient être obtenues. Nous attendons leur réponse. Cette demande permettrait à un groupe de Premières Nations d'acquérir des actifs de 1 milliard de dollars dans le cadre d'un projet d'infrastructure de 10 milliards de dollars. Si la réponse des prêteurs à la demande fictive est semblable à celle qu'ils ont donnée aux Premières Nations dans le cadre du projet de pipeline Pacific Trail, il faudra que le gouvernement envisage des garanties de prêt.
Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de m'exprimer aujourd'hui. Je vais maintenant céder la parole à la chef Corrina Leween.
Chef Corrina Leween, membre, Coalition de grands projets des Premières Nations : Bonjour, honorables sénateurs. Je suis la chef Corrina Leween de la Première Nation Cheslatta Carrier.
Je tiens à remercier les membres du comité de nous avoir invités ici aujourd'hui pour parler du travail de la Coalition de grands projets des Premières Nations. Je siège au comité directeur de la coalition, et je reçois l'appui des membres de la Première Nation Cheslatta Carrier pour le faire.
Ma collectivité est semi-éloignée et n'est pas située près d'une autoroute. Cela représente donc un autre obstacle pour nous qui souhaitons participer au type de développement économique que connaissent les Premières Nations qui vivent en milieu plus urbain.
À l'instar de beaucoup d'autres Premières Nations, nous sommes aux prises avec un taux de chômage élevé et les problèmes sociaux qui en découlent. Cependant, nous avons la possibilité d'améliorer nos vies et celles de nos membres grâce au développement économique. En revanche, nous ne pouvons y arriver seuls. Nous utilisons l'information et les outils créés par la coalition pour nous doter des capacités nécessaires pour prendre des décisions d'affaires éclairées. Nous n'avons pas les ressources financières ni l'expertise à l'échelle de la collectivité pour analyser les perspectives économiques potentielles aussi bien que le fait la coalition.
La Première Nation Cheslatta et les autres collectivités des Premières Nations qui prennent part à cette initiative profitent d'une tribune qui n'est pas politique, où les questions d'affaires liées aux projets d'envergure peuvent faire l'objet de discussions entre les collectivités de partout dans le Nord de la Colombie-Britannique.
En ce qui concerne ma collectivité, le grand projet qui nous touche, nous et les Premières Nations voisines, n'est pas un projet lié à l'utilisation des combustibles fossiles, mais plutôt à l'hydroélectricité.
Il s'agit d'un ouvrage de rejet d'eau froide que l'on propose de construire au barrage Kenney. Ce projet est évalué à environ 600 millions de dollars. En plus de fournir des revenus substantiels à la Première Nation de Cheslatta et aux Premières Nations voisines, il présente des avantages importants au chapitre de l'environnement en rétablissant un débit d'eau plus naturel dans la rivière Nechako.
Le projet revêt une importance sociale et historique pour les membres de la Première Nation Cheslatta. Le 21 avril 1952, nous avons été forcés d'évacuer notre territoire traditionnel en raison du débordement de la rivière Nechako. Tout cela avait été causé par le gouvernement provincial, qui avait privilégié les intérêts corporatifs d'Aluminium Company of Canada, aujourd'hui connue sous le nom de Rio Tinto.
Les membres de la Première Nation Cheslatta ne se sont pas encore remis de ce traumatisme. Par conséquent, notre population est dispersée sur une vaste zone et souffre d'une crise d'identité à la suite de notre éviction de notre territoire d'origine. Notre culture en a souffert et notre langue est presque disparue, mais c'est la résilience de nos gens et leur volonté de se rétablir grâce à une autonomie économique et sociale qui font en sorte qu'ils sont aussi déterminés.
Honorables sénateurs, notre collectivité veut se guérir et remédier à ses problèmes sociaux grâce au développement économique. À notre avis, l'information sur le renforcement des capacités et les outils créés par la Coalition de grands projets des Premières Nations nous aident beaucoup dans ce sens.
Cheslatta illustre bien ce qu'est une collectivité qui a besoin d'évaluer ses capacités. Mais elle n'est pas la seule.
Pour que les Premières Nations soient en mesure d'évaluer leur participation à des projets d'envergure, il faut que le niveau de capacité soit à leur portée. Nous devons pouvoir discuter, négocier et faire des affaires avec nos partenaires d'égal à égal. Ce besoin n'est pas propre à un projet ou à une industrie en particulier; ce besoin est systémique.
Qu'il s'agisse de la création d'un corridor national, d'une mine, d'une centrale hydroélectrique ou d'un pipeline, les Premières Nations doivent avoir accès à toute l'information nécessaire pour être en mesure de prendre des décisions d'affaires éclairées.
Les Premières Nations doivent également pouvoir prendre part, à titre de partenaires, à des projets qui se déroulent sur leurs territoires traditionnels. La capacité de trouver des options pour remédier à ces problèmes démontre toute l'importance du travail de la coalition dans les conversations qui ont lieu à l'échelle locale, régionale et nationale.
La Première Nation de Cheslatta Carrier est ravie de pouvoir participer à cette conversation. Je vous remercie de m'avoir écouté et je cède maintenant la parole à la conseillère Angel Ransom.
Angel Ransom, conseillère et membre, Coalition de grands projets des Premières Nations : Bonjour, honorables sénateurs. Je suis la conseillère Ransom, de la Première Nation Nak'azdli Whut'en. Ma collectivité de 2 000 membres est située au nord-ouest de Prince George, en Colombie-Britannique, et fait partie du conseil tribal Carrier Sekani.
En plus de mes fonctions de conseillère, je siège au comité directeur de la Coalition de grands projets des Premières Nations, où je dirige l'équipe technique sur la gérance de l'environnement.
J'ai étudié en planification environnementale, et je me spécialise dans la planification des Premières Nations. Je suis une urbaniste professionnelle agréée et membre de l'Institut canadien des urbanistes. Mes collègues vous ont parlé des études économiques examinées par la coalition. Je vais surtout m'attarder aux aspects environnementaux de son travail technique.
Lorsqu'on parle de la participation des Premières Nations à des projets d'envergure, sachez que les impacts environnementaux de tels projets constituent la première préoccupation de la plupart d'entre elles. Il est difficile et complexe de concilier les intérêts économiques et environnementaux. Les questions de gérance environnementale et l'atténuation des impacts des projets comportent de multiples facettes.
Ces intérêts peuvent varier largement selon l'emplacement géographique et les intérêts socioculturels d'un grand nombre de Premières Nations d'un bout à l'autre du corridor, tout comme le niveau de capacité des collectivités le long du corridor, qui a une incidence directe sur leur capacité d'évaluer les impacts d'un projet en vertu du processus d'évaluation de la Couronne.
Je parle par expérience en la matière. Avant d'être élue au conseil, je gérais le bureau responsable des projets de GNL de Nak'azdli Whut'en. Nak'azdli est une collectivité touchée par cinq grands projets de GNL. Pendant que j'assumais ce rôle, j'ai dû traiter avec les promoteurs de projets et le gouvernement pour défendre les intérêts de ma collectivité.
Les questions d'intendance environnementale concernant ces projets ont été réglées en collaboration avec nos Premières Nations voisines, dans la mesure du possible. Ces expériences m'ont appris concrètement l'importance d'avoir une approche commune à l'égard de la gérance environnementale.
Définir des approches communes en matière d'intendance environnementale et élaborer un cadre pour atténuer les impacts environnementaux cumulatifs sont des éléments prioritaires de la Coalition de grands projets des Premières Nations. Grâce au travail de la coalition, nous avons maintenant des Premières Nations du Nord, de l'Ouest, du centre et du nord-est de la Colombie-Britannique qui s'échangent des renseignements et partagent leur expérience au chapitre de la gérance environnementale. Avant la création de la coalition, ces conversations n'avaient pas lieu au même niveau qu'aujourd'hui. Notre travail à cet égard a permis de définir plusieurs problèmes communs pour lesquels nous proposons des options en vue d'une solution potentielle.
Pour donner un consentement libre, préalable et éclairé, il faut avant tout obtenir des renseignements pertinents essentiels qui permettent de décider en connaissance de cause.
Les processus utilisés par la Couronne ne permettaient pas l'évaluation des effets cumulatifs. Le processus actuel d'évaluation environnementale s'arrête aux répercussions propres à un projet, sans tenir suffisamment compte des répercussions générales de projets multiples réalisés dans une région.
Il faut accorder la priorité à la gouvernance exercée par la nation. Actuellement, un fossé profond sépare les systèmes provinciaux et fédéral de gouvernance et le point de vue des Autochtones sur cette gouvernance. Ce fossé peut être comblé par une véritable démarche de nation à nation concernant les processus de réglementation et d'évaluation environnementales, y compris la collaboration, la réconciliation, la cogestion, une capacité et un financement suffisants et la prise de décisions en commun.
En matière d'évaluation environnementale de grands projets, une démarche contraignante dirigée par la nation n'est pas hors de question. Il existe un précédent, le projet de Woodfibre LNG, à Squamish, en Colombie-Britannique.
Ayant effectué sa propre évaluation environnementale du projet, la Première Nation des Squamish a imposé au promoteur des conditions contraignantes. Le promoteur a aussi consenti à prendre en charge les coûts de cette évaluation. Un certificat environnemental de la Première Nation Squamish, le premier du genre, a été délivré au promoteur à la fin de l'examen. Cette évaluation établit aussi un précédent, celui de lier les intérêts de la nation pour l'environnement à ses intérêts économiques en stipulant que la satisfaction de ces intérêts fait partie des conditions attachées au certificat environnemental.
La coalition, en étant capable d'agir comme un forum des Premières Nations qui se font mutuellement connaître leurs intérêts communs, aide ses membres à renforcer leurs capacités. Le gouvernement devrait faire très attention à ces efforts. Si un corridor national doit être mis en place, les Premières Nations exigeront des ressources pour la planification environnementale et l'aménagement du territoire ainsi que la possibilité d'être une partie prenante lorsque le corridor prendra forme.
Il faudra chercher des solutions aux motifs de préoccupation des Premières Nations pour l'environnement, si nous voulons éviter des retards causés par un litige et un procès. La coalition veut que certains résultats de notre travail procurent des options qui contribueront à l'application d'une solution trouvée par les Premières Nations aux lacunes non seulement des processus actuels d'évaluation des projets, mais, aussi, de tout l'enjeu de l'intendance environnementale.
C'est sur cette note que je remercie votre comité de son temps et de son écoute. Je cède la parole à Harold Calla. Merci.
Harold Calla, président exécutif, Conseil de gestion financière des premières nations : Merci. Comme on vous l'a dit, je m'appelle Harold Calla. Je suis de la Première Nation des Squamish, en Colombie-Britannique et le président exécutif du Conseil de gestion financière des premières nations.
Je tiens à remercier le comité d'avoir consenti à nous entendre, les membres de la Coalition de grands projets des Premières Nations et moi-même.
Le Sénat, qui est une Chambre de notre Parlement et une institution au cœur de la gouvernance au Canada, a énormément contribué à la promotion des objectifs du Conseil de gestion financière des premières nations en appuyant l'adoption de la Loi sur la gestion financière des premières nations à la fin de 2005.
C'est grâce à l'existence, aujourd'hui, d'outils législatifs et des fins de la loi que les trois membres de la coalition sont en mesure d'informer le Sénat des bienfaits de ces outils et de ces fins pour ces communautés.
Je suis à Ottawa pour la première fois depuis la mort tragique de Jim Prentice, et je tiens à saluer l'appui non partisan qu'il nous a accordé comme critique de l'opposition, avec Sue Barnes qui agissait à titre de secrétaire parlementaire. Ce projet de loi a été adopté en 2005 grâce à leurs efforts, et je me suis simplement senti obligé de le reconnaître. Trop souvent, on néglige de le faire.
C'est aussi grâce aux efforts de l'ex-sénateur Gerry St. Germain, des sénateurs Jack Austin et Nick Sibbeston et d'autres que le projet de loi est maintenant en vigueur.
Sachez aussi que vous continuez d'être un lieu indispensable de maintien du dialogue pour la recherche de solutions aux déséquilibres socioéconomiques chez les Premières Nations. Je vous en remercie.
Grâce aux efforts visant à établir des initiatives comme la Coalition de grands projets, nous commençons à profiter plus généralement des bienfaits de la réalisation du plein potentiel des fins de la Loi sur la gestion financière des premières nations. Cependant, il reviendra au gouvernement d'accepter complètement les approches nouvelles et innovantes proposées par des institutions dirigées par les Premières Nations comme le Conseil de gestion financière des premières nations, avant que nous ne constations un impact significatif.
Si ces répercussions sont comprises, elles pourront favoriser les intérêts des Canadiens des Premières Nations et des autres Canadiens et mettre en place les conditions favorables à la prospérité des Premières Nations.
Nous sommes ici, je crois, pour proposer des pistes pour l'avenir, pour, nécessairement, la revivification et le développement du secteur canadien des ressources naturelles, ce ressort important de l'économie canadienne. Nous sommes venus affirmer que cette revivification, pour réussir, doit faire une place à la participation entière des Premières Nations.
Si le Canada est sérieux dans son intention d'établir un rapport de nation à nation, de mettre en œuvre les recommandations de la Commission de vérité et de réconciliation du Canada et d'être guidé par la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, nous devons commencer par reconnaître que les modalités de nos rapports ont échoué et qu'elles ont déçu tous les Canadiens.
Nous devons investir dans le développement des économies des Premières Nations. Je suis ici un raisonnement qui n'est pas différent de celui de la décision d'investir dans les infrastructures.
En ce qui concerne les grands projets et le désir des Premières Nations d'y participer, le Canada sera-t-il prêt à faire les investissements nécessaires pour que les Premières Nations deviennent des partenaires à part entière dans le courant dominant de l'économie canadienne?
Quand nous considérons l'ensemble du dossier touchant les peuples autochtones, l'un des facteurs que nous devons prendre en considération est l'écart entre le troisième rang du Canada et le soixante-troisième rang des Autochtones.
Les investissements nécessaires ne pourront jamais provenir des paiements de transferts. Il faut, en plus, des initiatives qui créent des occasions de développement économique.
Comme je le répète sans cesse, nous ne pouvons pas résoudre le problème de logement par des prestations d'aide sociale et des allocations de logement. Nous devons pouvoir créer des économies viables pour nos communautés, et les secteurs du pétrole, du gaz et des ressources naturelles offrent les occasions les plus favorables et les plus significatives pour les communautés des Premières Nations. C'est une chance qui ne se présente qu'une fois dans une génération et qu'il ne faut pas rater.
La Coalition de grands projets vous a informés des difficultés qui empêchent les communautés de ses membres de participer pleinement au tissu socioéconomique du Canada. Ces difficultés ne sont pas réservées au Nord de la Colombie-Britannique. Elles sont semblables, par leur nature, à celles qu'éprouvent les communautés des Premières Nations de partout au pays où on envisage la mise en valeur des ressources.
Des décisions judiciaires ont renforcé l'obligation de consultation et d'adaptation pour satisfaire les intérêts des Premières Nations. L'obligation de consultation devient plus grande dans des régions comme la Colombie-Britannique et d'autres parties du Canada où des traités ne sont pas en vigueur.
Qu'est-ce que ça signifie pour la mise en œuvre de grands projets d'envergure ou la mise en place d'un corridor national pour faciliter le commerce ou l'investissement? Ça signifie que si le Canada veut éviter de retarder la croissance de nos objectifs économiques nationaux, nous devons nous doter d'un cadre politique qui, en les guidant, aide les organismes centraux du gouvernement à répondre aux intérêts des Premières Nations, comme le propose la Cour suprême du Canada.
Les mandats actuels des organismes centraux ne sont pas conçus à cette fin. Nous devons réévaluer le rapport financier entre les Premières Nations et la Couronne. Au besoin, nous devons être prêts à accorder aux Premières Nations la capacité d'accéder au capital nécessaire pour devenir des partenaires sociaux dans les projets proposés pour leurs territoires traditionnels.
Il faudra du temps pour atteindre ces objectifs stratégiques, mais on peut prendre immédiatement des mesures pour accélérer le changement nécessaire pour appuyer la croissance de l'économie canadienne. Des investissements stratégiques et le développement d'une capacité sont absolument nécessaires avant que les Premières Nations elles- mêmes ne puissent vraiment envisager des possibilités d'activités économiques.
Je pense qu'il y a un rôle à jouer, et la Loi sur la gestion financière des premières nations l'a prouvé en continuant de chercher des endroits où on peut créer des institutions dirigées par les Premières Nations. Façonnons notre propre avenir.
Le Conseil de gestion financière a profité de l'occasion pour dialoguer avec la ministre Bennett et son personnel sur certains de ces enjeux, et nous avons bénéficié de son appui pour les objectifs de notre travail. Mais il reste toujours beaucoup plus à faire.
Le Canada devrait aussi considérer les institutions qui naissent et qui évoluent comme capables de formuler des recommandations innovantes sur des stratégies émanant directement des Premières Nations et sans être filtrées par les organismes centraux.
L'occasion à saisir pour ce genre d'apport se trouve dans la priorité du gouvernement de créer une banque d'investissement dans les infrastructures. Le gouvernement s'est engagé à faire croître l'économie par des investissements à long terme dans les infrastructures. Le budget de 2016 a révélé un engagement ferme à l'égard des Premières Nations, avec des investissements dans le logement et le traitement des eaux usées. Cependant, l'écart, sur le plan des infrastructures, entre les Premières Nations et le reste du Canada est disproportionné. On l'estime à 30 milliards de dollars. Voilà pourquoi il est essentiel de s'attaquer aux problèmes en passant par le développement économique.
En grande partie à cause des carences de la Loi sur les Indiens, les Premières Nations n'ont pas pu accéder à des sources traditionnelles de capitaux, soit par des investissements du type partenariat public-privé, soit par des emprunts traditionnels, pour financer les coûts des infrastructures. C'est en quémandeuses qu'elles ont dû se présenter devant le ministère des Affaires autochtones et du Nord Canada.
Cette situation commence à peine à changer, grâce à la capacité d'un certain nombre de Premières Nations qui participent aux services du Conseil de gestion financière des premières nations et du fonds commun d'emprunt géré par l'Administration financière des premières nations, l'AFPN. Le rôle central du Conseil est de certifier la conformité au marché des pratiques de gestion financière des Premières Nations participantes, pour que ces communautés puissent participer à un fonds commun d'emprunt et bénéficier des émissions d'obligations de l'AFPN. Jusqu'à maintenant, on a pu obtenir 250 millions de dollars de capitaux à des taux d'intérêt très faibles, de moins de 3 p. 100.
Comme on l'a dit plus tôt, le gouvernement a promis 120 milliards de dollars de dépenses dans les infrastructures au cours de la prochaine décennie et il envisage la création d'une grande banque d'investissement dans les infrastructures. Ces investissements dans la création de la banque sont importants, puisque la banque augmentera l'investissement global dans les infrastructures, ce qui conduira à la création d'emplois et à la croissance, attirera les capitaux privés et permettra le transfert de certains risques.
Vu que l'écart dans les infrastructures entre les communautés autochtones et le reste du Canada est si grand, le gouvernement devrait prévoir la création d'un secrétariat autochtone à l'intérieur de la banque pour les infrastructures et réserver une partie du financement destiné à la banque pour une participation sociale des Premières Nations dans les grands projets.
De nombreuses questions exigent notre attention, mais il faut bien commencer quelque part. La priorité devrait aller à donner les pleins pouvoirs financiers aux Premières Nations. Nous exposons notre économie nationale à des risques en ne prenant pas de mesures et en ne faisant pas les investissements nécessaires qui mettraient les Premières Nations en posture de nouer des partenariats et de profiter de l'activité économique qui a lieu dans leurs territoires traditionnels.
Nous ne pouvons pas nous payer le luxe de revenir ici dans 10 ans et de nous demander si nous aurions dû agir. Les discussions comportent souvent un examen des coûts de l'aide, mais je vous invite à examiner les coûts de l'inaction. Si ces projets ne sont pas mis en valeur, qu'est-ce que ça signifie pour les revenus fiscaux du Canada et des provinces? Qu'est-ce que ça signifie pour le coût du filet social de ne pas pouvoir compter sur ces emplois? Nous ne devons pas nous arrêter au seul bilan. Je pense que si nous n'agissons pas maintenant, les coûts seront excessifs.
En conclusion, permettez-moi de redire que nous devons proposer des solutions aux obstacles systémiques que doivent affronter les Premières Nations dans leurs rapports avec le Canada. Voilà une belle occasion, pour les institutions dirigées par les Premières Nations, sous le régime de la Loi sur la gestion financière des premières nations et grâce au travail technique de la Coalition de grands projets, de collaborer avec le gouvernement à la recherche de solutions stratégiques concrètes qui favorisent les intérêts socioéconomiques des Premières Nations et de tous les Canadiens.
Je pense qu'il faut aussi reconnaître un autre fait et c'est que, parce que nous sommes tellement hypnotisés par le système des bandes prévu dans la Loi sur les Indiens que, souvent, nous ne nous apercevons pas de l'existence, chez les Premières Nations, de gouvernements traditionnels respectés, qui sont fonctionnels. Il faut les mobiliser dans la recherche d'un consentement libre, préalable et éclairé, parce qu'ils sont souvent l'instance qui, dans leur communauté, a le pouvoir de le donner, ce n'est pas la bande prévue par la Loi sur les Indiens.
Dans l'époque visiblement critique où nous vivons, nous avons l'avantage de profiter d'une baisse du marché des valeurs — je suppose que ça peut s'appeler comme ça, n'est-ce pas? — parce que nous avons maintenant le temps de nous préparer au prochain boom économique. Mais nous ne serons pas organisés si nous ne répondons à certaines de ces questions fondamentales, importantes.
Les Premières Nations du Nord ont parlé d'un corridor. Et, en fait, une partie de ce qu'examine la coalition, c'est les répercussions éventuelles de ces projets. Mais ce qui préoccupe le plus les Premières Nations c'est ceci : quelles sont les répercussions cumulatives de ces projets sur leurs modes de vie traditionnels, leurs ressources et leurs terres? Qu'est-ce que les peuples autochtones en retireront? Je me rappelle toujours ce que le regretté George Watts, un chef de l'île de Vancouver, avait l'habitude de me dire : « Harold, je veux seulement une petite part des traités qui passent devant ma porte. »
Et il y a par exemple le partage des redevances sur les ressources. Quelle sorte de cadre financier allons-nous créer dans notre rapport de nation à nation et comment les grands projets de mise en valeur des ressources s'intégreront-ils dans ce plan? Ce sont visiblement des questions très complexes auxquelles il n'existe pas véritablement de solution simple, mais, parfois, nous devons nous préparer à prendre des risques et à comprendre ceux que nous prenons, mais en étant prêts à les prendre et à commencer à agir. Nous ne pouvons pas attendre la perfection ni l'appui unanime de nos contemporains.
Merci.
Le président : Merci beaucoup. Je voudrais dire, chers témoins, que lorsque nous avons entrepris l'examen de l'idée d'un corridor dans le Nord, qui traverserait le pays, nous avons pensé qu'un élément important de notre étude serait la façon de nous organiser, sachant que nous devrions rencontrer les Premières Nations à un certain moment. Votre participation arrive donc à point nommé, et nous sommes extrêmement heureux que vous ayez pu trouver le temps de venir témoigner. Je pense exprimer ici l'opinion de tous les membres du comité.
La sénatrice Wallin posera les premières questions.
La sénatrice Wallin : Merci. Je vous remercie aussi pour vos exposés.
Nous sommes ici, comme le sénateur Tkachuk l'a dit, pour vraiment examiner l'idée d'un corridor national, qu'il traverse le nord ou le milieu du pays. Je vais donc commencer, je pense, par cette question. J'ai apprécié votre optimisme, et vous dites, M. Calla, vouloir profiter de la baisse du marché pour vous préparer à un éventuel boom. J'espère vraiment que vous avez raison. Mais, d'abord, sur une notion très simple, êtes-vous d'accord avec cette idée de corridor national? Vous plaît-elle?
M. Calla : Je pense qu'un corridor est nécessaire et qu'un corridor national a du sens.
Je crois que nous n'avons pas encore abordé certains enjeux liés au corridor national, et ils concernent directement l'accord de financement budgétaire entre les Premières Nations et le gouvernement du Canada.
Si je suis dans une région où un projet est en cours, mais où le corridor ne se rendra pas, et que je perds cette occasion, qu'est-ce que cela signifie? Je crois qu'il y a certains problèmes. Je pense que nous ne voulons pas nous retrouver avec un labyrinthe de corridors qui passent par tous nos territoires traditionnels. Je crois que la plupart des gens reconnaissent cela. Le défi auquel nous faisons face sur la côte Ouest relativement à un grand nombre de ces enjeux est lié aux effets cumulatifs sur l'environnement. Par exemple, si vous êtes allé pêcher sur la côte Ouest cette année, il n'y avait pas grand-chose. La plupart du temps, il n'y avait qu'une grosse masse d'eau chaude dans l'océan Pacifique.
Comment traitons-nous ces enjeux? Oui, je crois que les gens veulent voir quelque chose, car ils savent que l'industrie pétrolière et gazière se déplacera ailleurs.
La sénatrice Wallin : Si c'est possible, j'aimerais entendre l'avis d'autres témoins sur ce sujet. L'un de nos premiers groupes de témoins dans le cadre de cette étude était composé de deux universitaires qui cherchaient des fonds — du gouvernement ou de toute autre source — pour financer un projet dans lequel on examinerait la viabilité de ce qui sera sans aucun doute un projet de plusieurs milliards de dollars à certains égards. Les points que vous avez soulevés aujourd'hui — l'accès garanti par le gouvernement aux dépenses d'immobilisations liées à l'infrastructure, l'obligation de consulter, la réduction des effets cumulatifs, les évaluations — représentent beaucoup d'argent. Actuellement, nous n'avons même pas l'argent nécessaire pour financer l'étude proposée par deux universitaires de Calgary pour vérifier si nous pouvons lancer ces projets.
Je comprends les enjeux, mais érigeons-nous de si nombreux obstacles — des obstacles financiers — que nous ne pouvons même pas entamer une discussion sur le sujet? La question s'adresse à tous les témoins.
M. Calla : Je pense que nous essayons de vous décrire les éléments nécessaires pour y arriver. Il y a des éléments techniques, politiques et environnementaux, et je crois qu'il faut se pencher sur la façon de procéder pour chaque élément et sur les étapes à suivre. Toutefois, les Premières Nations n'accepteront aucun type de corridor tant que les enjeux que nous vous avons présentés aujourd'hui ne seront pas réglés.
M. Bevan : Environ 10 promoteurs traversaient notre territoire dans deux directions différentes. Nous nous sommes demandé pourquoi ils ne s'en tenaient pas à un seul corridor qui contiendrait les pipelines. Je crois que s'ils avaient suivi cette méthode, les effets n'auraient pas touché l'ensemble du territoire. Deux ou trois promoteurs auraient traversé une région dans un seul corridor, ce qui aurait été beaucoup plus acceptable que ce qu'ils ont fait.
J'ai vu certains documents qu'on avait remis à mon équipe aux fins d'examen, et Dieu merci...
La sénatrice Wallin : Je m'excuse, mais par « on », parlez-vous de certaines sociétés particulières?
M. Bevan : Je parle des promoteurs, c'est-à-dire de certains des 10 promoteurs de projets de GNL qui passaient par mon territoire ou qui ont proposé de passer par mon territoire.
Il y avait de nombreux renseignements, et Dieu merci, nous avions la capacité de les examiner. Nous avons remarqué que de nombreuses autres Premières Nations n'avaient pas cette capacité; elles n'ont donc pas compris ce qui se passait. Nous avons dû commencer au tout début et expliquer à nos gens ce qu'était le GNL. Au départ, nous avions l'appui d'un tiers de la population. À la fin de notre effort de sensibilisation, les deux tiers nous appuyaient, ce qui nous a donné le mandat de négocier avec les promoteurs de projets de GNL.
Il a suffi d'enseigner les principes de base en détail. Nous avons approfondi le sujet. Nous leur avons expliqué ce que chaque élément signifiait. Comme je l'ai dit, à la suite de nos efforts, l'appui des habitants à l'égard de ces projets a nettement augmenté, car ils ne leur semblaient plus aussi intrusifs.
La sénatrice Wallin : C'est intéressant.
Mme Leween : À l'échelle locale, du point de vue d'une collectivité qui ne se trouve pas exactement dans la région du pipeline, afin que nous puissions appuyer ou fournir des études d'impact environnemental sur les territoires sur lesquels nous vivons, nous devons réunir nos Premières Nations et fournir des renseignements sur tous leurs territoires. Notre coalition tente de réunir ces renseignements, afin que nous puissions nous entraider ou que nous puissions fournir ces renseignements dans le cadre d'une discussion comme celle-ci, afin de faire avancer les choses.
À mon avis, à l'échelon communautaire, il s'agit de recueillir ces renseignements, afin d'être en mesure de nous entraider.
Le sénateur Campbell : Je suis désolé d'être arrivé en retard aujourd'hui. J'aimerais embaucher vos deux organismes pour tenter de déterminer la meilleure façon de construire un corridor pour voyager entre la Colline du Parlement et cette salle pendant l'heure de pointe. Et je trouverai les fonds nécessaires pour ce projet.
J'aimerais dire à tous mes collègues présents que ces témoins illustrent la raison pour laquelle la Colombie- Britannique est un chef de file en matière de gouvernance des Premières Nations, de la vision des Premières Nations et des occasions qui leur sont offertes. En ce qui me concerne, ces deux groupes sont la référence pour le Canada et pour l'établissement de la nouvelle relation dont j'ai entendu parler pratiquement toute ma vie — certainement lorsque j'étais à Vancouver.
L'autre soir, je réfléchissais au corridor, et je me suis dit que nous parlons toujours de consentement et de partage de renseignements, mais que si la Première Nation des Squamish était une entreprise et que je souhaitais passer sur son territoire pour une raison quelconque, il faudrait sans aucun doute mener des négociations et diffuser des renseignements. Pourquoi avons-nous tant de difficulté à faire cela entre gouvernements, c'est-à-dire entre le gouvernement des Premières Nations et le gouvernement du Canada, et surtout à l'égard d'un projet qui est, à mon avis, le projet d'infrastructure le plus important depuis le chemin de fer transcanadien? Pourquoi est-ce si difficile?
M. Calla : Sénateur, je vous remercie de votre question. Je crois que jusqu'à récemment, c'est parce que le Canada n'a jamais accepté sa responsabilité d'établir la communication, et l'a plutôt confiée aux promoteurs.
Il y a environ quatre ans, je tentais d'amener le Forum des politiques publiques d'un bout à l'autre du pays pour amorcer des conversations sur la participation des Premières Nations et sur le développement de projets d'envergure; vous avez sûrement vu le rapport qui a été publié à cet égard. Dans le cadre de cette démarche, les intervenants de l'industrie ont dit au gouvernement qu'il leur imposait cette responsabilité, mais qu'ils étaient d'avis que c'était en réalité la responsabilité du gouvernement.
Une partie de notre proposition dans le cadre de cette initiative permettrait au Canada d'appuyer une participation des Premières Nations au capital, de remplir cette obligation et de faire progresser ces projets de façon à tenir compte des intérêts des Premières Nations.
Il n'y a aucun point de départ pour cette conversation et à mon avis, elle doit commencer par l'adoption, par le Canada, d'un rôle de leadership.
Le sénateur Campbell : J'en conviens. Mais des intervenants de l'industrie comparaissent également devant nous et parfois, ils semblent chercher à se dérober. Par exemple, ils nous disent « vous ne faites pas cela », et je fais référence à d'autres ententes commerciales où deux entreprises ont conclu une affaire.
Je conviens que c'est la responsabilité du Canada, mais c'est également la responsabilité des intervenants de l'industrie de se rendre compte qu'au bout du compte, il s'agit de ce que souhaitent les Premières Nations. Si on ne règle pas les enjeux liés aux Premières Nations, le corridor n'existera pas. Je crois que c'est la position que nous devons adopter.
Comment pouvons-nous donc aider le groupe des finances et la coalition d'un bout à l'autre du Canada?
Chef, vous aviez raison. Si cinq entreprises souhaitaient lancer leur projet dans un endroit différent sur mon territoire, je leur dirais que ce n'est pas possible.
Convenez-vous que c'est l'une de nos difficultés? Nous parlons du pipeline en Colombie-Britannique et il y a énormément d'opposition, mais on se rend compte qu'il sera construit de toute façon. Toutefois, ce n'est pas comme cela que les choses doivent se passer, et nous devons préciser que le processus a une portée beaucoup plus grande et qu'il doit englober l'industrie et les gouvernements.
Comment changeons-nous cela pour qu'on puisse commencer? Sans soutien, sans partenariat, cela n'ira nulle part, et nous perdons notre temps ici. Comment pouvons-nous procéder?
M. Bevan : J'aimerais qu'on affecte davantage de ressources au développement de la capacité de certaines des Premières Nations dont les membres ne comprennent pas le processus. Manifestement, vous parlez à ceux qui sont déjà convaincus, et je n'ai aucun problème avec cela, car j'ai mené des recherches. J'ai demandé à mes gens d'étudier la question et ils ont prouvé, de façon scientifique, que c'est une bonne décision pour nous. Nous avons convaincu notre peuple que ce n'était pas une décision émotionnelle, mais une décision scientifique, en leur présentant l'information appropriée, et cela a tout changé.
J'ai tenté de dire aux autres Premières Nations qu'on ne peut pas tout simplement abandonner le sujet et qu'il faut participer. Il faut parler aux gens et écouter ce qu'ils ont à dire, mais un grand nombre des membres des Premières Nations ne comprennent pas. Ils ne comprennent pas de la même façon que nous et parfois, ils n'ont pas de bons négociateurs de leur côté, et ils sont laissés à eux-mêmes.
Je crois que si nous financions davantage la capacité d'aider ces Premières Nations, elles accepteraient peut-être un peu plus ces projets. Je ne dis pas que tous les membres des Premières Nations seraient convaincus, mais que ces derniers 10 p. 100 accepteraient ces projets plus facilement si nous financions davantage cette capacité au lieu de leur envoyer des promoteurs qui leur donnent quatre gros cartables de renseignements qu'ils doivent examiner sans aide. Comme je l'ai déjà dit, cela ne fait que les embrouiller encore plus. Quant à nous, nous avions la capacité d'analyser tout cela.
M. Calla : Je crois qu'en ce moment, le plus grand défi auquel nous faisons face, c'est que les Premières Nations ont dû réagir aux propositions. Nous n'étions pas suffisamment organisés pour être proactifs, et dans ce cas-ci, nous jouons dans la cour des grands. En effet, il y a six, huit ou dix véritables sociétés pétrolières sur la planète, et nous jouons donc dans la cour des grands.
Je crois que pour jouer à ce niveau, il nous faut l'expertise de gens comme Delbert Nattrass. Dans les conversations sur le pétrole et le gaz qui se sont déroulées en Colombie-Britannique, personne n'a parlé de la chaîne de valeur de ces projets, de leur importance et de ce qu'il faut rechercher. Comment de petites collectivités — dont certaines éprouvent peut-être des difficultés financières et n'ont même pas de comptable — peuvent-elles se permettre d'embaucher un expert comme Delbert Nattrass?
Il faut donc fournir les moyens nécessaires, et c'est ce que la coalition a fait, c'est-à-dire qu'elle a fourni les moyens nécessaires pour recueillir ce type de renseignements, afin de définir les éléments sur lesquels nous devons prendre une décision. Nous avons également pu déterminer les avantages que nous pouvions en retirer, les risques, les effets, et cetera.
Jusqu'ici, on a souvent demandé aux Premières Nations de choisir un gagnant et un perdant avant même que la décision finale sur les investissements n'ait été prise. Un grand nombre des ententes qui ont été signées prévoient des mesures d'exclusivité. J'ai toujours eu l'impression que si nous faisons preuve de diligence raisonnable et que nous avons la capacité de faire preuve de diligence raisonnable, nous présentons une liste de conditions.
Mme Ranson : J'aimerais ajouter que lorsque nous sommes dans une situation comme celle de ma collectivité, Nak'azdli Whut'en, et qu'il y a un projet, et ensuite deux, trois, quatre et cinq qui se produisent en même temps et que nous leur demandons de ralentir les choses, car nous avons l'impression de prendre des décisions sous la contrainte, étant donné que nous n'avons pas la capacité d'examiner 28 000 pages de documents en 30 jours et de prendre une décision éclairée à cet égard, souvent, on crée une situation où les collectivités n'ont pas la capacité de comprendre ce qui leur est présenté, et c'est la raison pour laquelle elles se retirent du processus. Nous avons toujours dit que nous devions collaborer à la planification d'un projet et ne pas les faire tous en même temps.
Je crois qu'il serait très utile de faire participer les Premières Nations aux étapes préliminaires des projets, par exemple le choix de l'emplacement, et de travailler avec d'autres Premières Nations qui aimeraient adopter cette approche relativement au corridor. C'est tout ce que j'ai à dire pour l'instant. Merci.
Le président : Avant de passer à la prochaine question, combien de Premières Nations font partie de la coalition?
Mme Ransom : Vingt-trois Premières Nations.
Le président : Sont-elles toutes dans le Nord de la Colombie-Britannique?
Mme Ransom : Oui.
Le sénateur Campbell : Je vous remercie d'être ici aujourd'hui. Grâce à vous, je suis honoré de venir de la Colombie- Britannique. Vous faites un travail admirable.
Le sénateur Day : Je suis parfaitement d'accord avec mon collègue, le sénateur Campbell. Je suis très enthousiaste à l'égard de vos activités et je suis heureux d'entendre votre témoignage aujourd'hui. Je viens du Nouveau-Brunswick, et je n'ai pas vu ou entendu parler de ce type de coopération auparavant.
Tout d'abord, vous parlez de la coalition. Chef Leween, l'échange de renseignements est essentiel à la collaboration, mais la détermination d'une position de négociation et la force de la négociation collective est un autre aspect très important de cette coalition que je trouve très stimulant. Je vous remercie donc beaucoup d'être ici aujourd'hui et de nous aider à cet égard.
Je relis les commentaires du chef Bevan. Vous avez dit : « Comment peut-on vraiment tenir compte des intérêts commerciaux des Premières Nations touchées par les projets d'envergure? » C'est un merveilleux commentaire, et je crois que vous devriez continuer à parler de cette façon. Vous voulez devenir des détenteurs de capitaux propres dans ce projet. À mon avis, c'est certainement la voie de l'avenir.
Vous parlez de financement et de vos besoins à cet égard et vous affirmez que les transferts de paiements ne sont pas suffisants pour vous permettre de faire ce que vous voulez. Je crois que M. Calla a parlé du Conseil de gestion financière des premières nations et de la Loi sur la gestion financière des premières nations. Est-ce financé, et si oui, qui assure le financement? Comment avez-vous accès à ces fonds?
M. Bevan : En ce qui concerne nos intérêts commerciaux, lorsque le projet de pipeline Pacific Trail a été accepté et que nous avons obtenu une attribution directe des promoteurs pour nettoyer l'emprise, ma société de développement a fait près de 50 millions de dollars en deux ans et demi grâce à ce nettoyage de l'emprise, tout en employant toutes les personnes en mesure de travailler dans la réserve et en modifiant l'attitude de 10 ou 20 personnes qui se sont rendu compte qu'elles pouvaient obtenir du travail. Cela leur a permis d'avoir une meilleure estime de soi. Elles ont décidé de retourner à l'école par la suite, car elles voulaient travailler encore plus fort et plus longtemps dans cette industrie.
Ensuite, certains aînés ont dit que la négociation d'un traité produisait une offre foncière et financière de 24 millions de dollars, mais que nous venions de faire 50 millions de dollars en deux ans et demi et que la signature d'un traité n'était peut-être pas la meilleure solution, car le travail était plus profitable. C'est la raison pour laquelle nous avons pensé dès le début que nous pourrions changer les règles du jeu si nous pouvions obtenir un plus grand nombre de ces projets.
J'ai manifestement une expérience dans le domaine des finances, et c'est la raison pour laquelle je peux faire ces calculs facilement. Nous avons utilisé un modèle de gouvernance avec les 10 entreprises qui nous ont approchés. Nous avons élaboré une politique d'intendance, qui était essentiellement une décision au sujet de l'aménagement favorable du territoire. En nous fondant là-dessus, nous avons entamé des négociations parallèles. Vous les appelez des ERA, nous les appelons des ententes sur la gestion des répercussions et des avantages, car nous gérons le projet par l'entremise de ces ententes, en commençant évidemment par l'environnement, la formation de nos gens, ensuite l'approvisionnement des entreprises et enfin, les avantages pour l'ensemble de la collectivité.
Je connais la valeur de ces projets. Je l'ai vue de mes yeux. Nous voulons certainement obtenir l'un de ces projets. Nous voulons une décision finale d'investissement. De plus en plus de Premières Nations modifient la façon dont elles font des affaires, car elles se rendent compte que les transferts de paiements ne changeront rien. Nous devons travailler pour générer des retombées. Lorsque nous travaillons pour obtenir quelque chose, nous l'apprécions davantage et nous voulons en profiter le plus possible. Nous pouvons ainsi changer la société de notre Première Nation. Nous changeons la façon dont les gens pensent. Au lieu d'attendre un chèque, nous nous levons et nous allons le chercher; nous travaillons pour l'obtenir. Nous avons constaté qu'un simple petit projet avait réussi à provoquer un tel changement d'attitude; en effet, ce projet concernait seulement le nettoyage de l'emprise sur 110 kilomètres.
Puis, nous nous sommes mis à travailler à des projets avec nos voisins, la nation Haisla, ce qui était presque incroyable, car nous avions beaucoup tendance à nous quereller. C'est comme le syndrome de la pointe de tarte. Nous voulons tous la même pointe, mais c'est limité. J'ai dit : « Si nous travaillions ensemble, nous pourrions prendre toute la tarte, alors cessons de nous quereller. »
Le président : Très sage.
M. Calla : J'aimerais répondre à la deuxième question. Vous avez ici les présidents du Conseil de gestion financière des premières nations et de l'Administration financière des premières nations, et les mesures législatives ont créé un contexte propice à une réserve d'emprunt — j'imagine que l'on pourrait dire que c'est comparable à une coopérative de crédit — qui réunit les Premières Nations et leur permet de se soutenir mutuellement. Grâce aux mesures législatives, nous avons établi le cadre d'une réserve d'emprunt dont le degré de contrôle de l'environnement a valu à l'Administration financière des premières nations une cote de crédit de niveau A à la suite d'une évaluation de la première émission réalisée par les agences de notation et les banques d'investissement.
C'est le Canada qui soutient cela, car les institutions sont financées par le Canada, et nous veillons au développement de la capacité organisationnelle nécessaire. Pour participer, même en ce qui concerne le développement économique et le financement, il faut surtout établir la capacité de gestion, ce que bien des petites collectivités ne font pas. Nous faisons de l'excellent travail en ce moment avec le ministère, par l'intermédiaire de la ministre, afin de décomposer cela, dans une grande mesure comme nous le faisons avec la coalition, afin de créer cette capacité au sein des collectivités des Premières Nations.
Cependant, nous avons créé la structure, et nous pensons que le Canada devrait utiliser cette structure. Vous avez investi dans la création de ces institutions, nous avons prouvé qu'elles fonctionnent, et nous pensons que les grands projets représentent une autre occasion de soutenir ces institutions qui aideraient les Premières Nations à développer leur capacité organisationnelle.
Nous entretenons d'excellentes relations avec les agents financiers autochtones du Canada qui conçoivent des activités individuelles de développement de la capacité, ce qui fait que des personnes ayant la formation travaillent dans ces collectivités.
Alors nous travaillons à cela. C'est en évolution; cela va s'améliorer. Il nous a fallu 200 ans pour nous rendre au point où nous en sommes aujourd'hui. Il va nous falloir quelques années pour atteindre un autre point, mais nous commençons, et c'est grâce au travail non partisan que nous avons pu accomplir à Ottawa. Vous nous avez tous beaucoup aidés.
Le sénateur Day : La question est très précise. Un corridor servant à installer des lignes de transmission ou une route va exiger des droits de passage, et ces droits de passage vont se trouver sur vos territoires traditionnels. Est-ce qu'il y a dans la Loi sur les Indiens ou dans d'autres dispositions législatives quelque chose qui vous empêche d'accorder un droit de passage pour le corridor? Parce qu'il va falloir obtenir un droit de passage. Si vous pouvez accorder ce droit de passage, est-ce que cela ne vaut pas beaucoup d'argent que vous pourriez investir dans le projet de manière à devenir des partenaires?
M. Bevan : Il y a l'article 35, concernant les droits des peuples autochtones. Si vous créez un corridor qui a des effets sur quelqu'un, je ne crois pas que la Loi sur les Indiens s'appliquerait. Je pense que sur ce point, ce sont les droits prévus à l'article 35 que les gens font valoir. C'est là le problème. Ce n'est pas la Loi sur les Indiens comme telle.
M. Calla : Je ne pense pas que vous deviez exiger des Premières Nations qu'elles renoncent aux terres de sorte qu'elles aient le statut de propriété en fief simple. Ce que vous voulez, c'est de pouvoir les utiliser, et je pense qu'il est possible de conclure des ententes qui donnent à l'industrie et au gouvernement la certitude d'avoir le droit de passage. La Première Nation Squamish a une station de traitement des eaux usées sur ses terres depuis environ 60 ans, pour la région métropolitaine de Vancouver. Elle est là en fonction de droits de passage sur des terres de réserve, et ces ententes donnent de bons résultats.
Il n'est donc pas nécessaire d'y renoncer. Est-ce que tout le monde veut des terres en fief simple? Bien sûr. Mais il arrive que vous n'obteniez pas ce que vous voulez.
Le sénateur Tannas : Merci à tous pour votre présence. J'ai le privilège d'être membre du comité des peuples autochtones, alors je vous ai tous ou presque tous déjà croisés. Je suis ravi que d'autres collègues aient la chance de pouvoir constater votre expertise. Se trouver en présence de leaders d'opinion et d'action de l'ensemble du Canada est un véritable honneur.
Ce que nous avons appris jusqu'à maintenant, au cours des quelques séances que nous avons eues, c'est que nous participons réellement au développement de cela. Il y a eu quelques livres, un professeur et un général à la retraite qui ont songé à cela, il y a 50 ans, mais c'est tout. Rien n'a été fait.
Nous nous trouvons donc dans une position inhabituelle, en ce sens que la réaction chimique ne fait que s'amorcer. En soi, c'est très excitant pour nous, et j'espère que tout le monde aura l'esprit ouvert.
Pour moi, le corridor permettant le passage de l'hydroélectricité produite par de fantastiques barrages, des pipelines, des fibres optiques, des autoroutes et des voies ferrées évoque les occasions de développement économique qui l'accompagneront.
Pensez au chemin de fer Canadien Pacifique et à toutes les villes et industries qui sont apparues en bordure de ce chemin de fer; nous parlons de nouvelles possibilités que cela pourrait créer pour les 200 prochaines années. Et c'est en territoire autochtone.
C'est formidable. Je pense que ce sont de magnifiques possibilités. Nous avons donc entendu deux professeurs qui ont une excellente suggestion, ou proposition, concernant la voie à suivre. Il reste du travail d'analyse universitaire à réaliser avant que cela soit possible. Je serais très surpris que nous ne recommandions pas le financement de la prochaine étude de viabilité.
J'aimerais savoir ce que vous pensez. Trouvez-vous que nous devrions recommander que la portée de l'étude soit étendue et proposer un cadre de discussion et de pensée sur la façon dont les Premières Nations obtiendront ou pourront obtenir un avantage économique ou même, franchement, le contrôle économique de ce corridor, ou une participation économique — peu importe la façon dont vous voulez présenter cela? Ce que je dis, c'est qu'il faut poursuivre cette réflexion.
Je m'inquiète de l'histoire derrière cela. Deux fois, cela a été soulevé, puis cela s'est effondré simplement parce qu'on a imaginé à quel point il serait difficile d'y arriver. Imaginez cela, dans le contexte actuel, compte tenu de l'attention accrue qui est portée aux questions environnementales et des tentatives possibles de négociations avec chacune des Premières Nations, à l'échelle du pays. Cela va encore une fois s'effondrer très rapidement. Pensez-vous que nous devrions essayer de nous attaquer à cela aussi, dans l'étude, aux premières étapes de la viabilité? Dans l'affirmative, pourriez-vous nous faire des suggestions sur la façon de le faire ou sur les personnes qui devraient participer à cela?
M. Bevan : Il faut inclure certaines des Premières Nations qui ont embarqué au début de ces projets, qui ont négocié et ont dit : « Nous avons parcouru l'information à ce sujet et voici ce que nous voyons. Nous avons les outils pour prendre la décision. Cependant, notre voisin n'a pas la capacité que nous avons. » Donc, encore une fois, s'ils avaient une boîte à outils contenant l'information selon laquelle c'est un projet minier qui touche six Premières Nations, toutes dans le secteur, et que vous les réunissez, certains vont dire oui, et d'autres vont dire non, mais vous devez chercher à savoir ce qui est important pour eux.
Certains diront : « Nous vivons toujours de la terre. » Certains diront : « Oui, et non. » Je crois que nous devons trouver ce qui importe. Est-ce que ce sont les emplois qui importent? Parce que nous ne le savions pas au début, jusqu'à ce qu'on mette tout le monde au travail, puis nous avons vu le changement. Comme je l'ai dit, le type reçoit un chèque de paie régulier, maintenant. C'est le cas depuis deux ans et demi, et son estime de soi s'est tout simplement améliorée. Il a tout ce qu'il veut. Maintenant qu'il a tout ce qu'il veut dans sa maison, il doit se demander : « Comment continuer avec cela? Eh bien, je pense que je dois poursuivre mes études et travailler à cela à temps plein, parce que j'aime le travail et j'aime le chèque de paie régulier. »
Il faut changer les attitudes. Parfois, il faut un peu de travail, et parfois, cela se fait naturellement. Cela appartient à la personne en particulier. Nous disons à nos gens : « Nous allons faire en sorte que la possibilité soit offerte, mais c'est à vous de la saisir. »
C'est du moins ce qui a fonctionné avec la Première Nation Kitselas. Pour d'autres nations, il peut être difficile de les amener à travailler ensemble, parce que nous avons des idées différentes sur la façon de faire avancer les choses pour nos nations. Je pense que si nous avions accès à une boîte d'outils contenant de l'information semblable à celle que nous essayons de créer pour la coalition, ce serait nettement plus facile quand ils viennent nous dire : « Joe, on veut établir une grosse mine sur mon territoire. Qu'est-ce que je devrais surveiller? Quelles sont les préoccupations environnementales qui pourraient avoir un effet négatif sur ma décision? Qu'est-ce qui devrait me préoccuper? »
Je pense que si cette information était facile à obtenir, ils ne seraient pas si inquiets. En ce moment, vous leur demandez de prendre une décision qu'ils n'ont jamais eu à prendre avant. Des générations seront touchées, et nous n'avons jamais eu à prendre de telles décisions. Habituellement, elles nous sont imposées et c'est tout. On passe à autre chose. Merci beaucoup. Maintenant, nous devons changer cela, et je pense que les attitudes changent en conséquence.
C'est très drôle, mais je pense à certaines des personnes que nous avons vues au début, et une chose ressort en particulier. Je vais vous dire ce que c'est, car je l'ai entendu de Jim Prentice. Il a dit : « Il n'est pas question de ce qui est bon ni de ce que vous méritez; c'est ce que vous négociez qui compte. Au bout du compte, c'est ce que vous obtenez. »
J'adore cela. J'y pense tous les jours, et je me dis : « Oui, il a bien raison. C'est ce que nous négocions qui importe, au bout du compte. »
M. Calla : Vous avez demandé si nous traitions de cela dès le début. Je pense que la réponse est oui. Si vous comptez recommander que quelqu'un entreprenne du travail, je pense que les paramètres du travail doivent comprendre un engagement avec les Premières Nations dès le début. Si vous arrivez avec un rapport sur les volumes, cela ne passera pas dans les collectivités des Premières Nations.
Comme le chef Bevan l'a dit, certaines personnes n'appuieront rien de tout cela, alors que d'autres vont être d'accord. La Loi sur la gestion financière des premières nations n'a pas fait l'unanimité, et au moment de l'élaboration de ce texte législatif, on en est venu à la conclusion qu'il y aurait des inscriptions à l'annexe de la loi. On s'est beaucoup inquiété du nombre de Premières Nations qui s'inscriraient pour se soumettre à la Loi sur la gestion financière des premières nations. Sachez que maintenant plus de 205 Premières Nations à l'échelle du Canada ont demandé d'être inscrites, et nous nous attendons à une augmentation du nombre au cours des cinq prochaines années. Espérons qu'un jour, toutes les Premières Nations seront inscrites.
Dans la plupart des cas, comme Joe l'a dit, c'est grâce à des possibilités économiques que les gens n'avaient jamais eues avant. Nous n'avons pas besoin de devenir de meilleurs gestionnaires de la pauvreté. Nous sommes déjà très bons dans cela. Donnez-nous une chance de nous enrichir.
Le sénateur Tannas : Si nous envoyons quelques chercheurs étudier cela, qui devraient-ils consulter pour que nous puissions passer au niveau suivant? Est-ce qu'il y a une personne-ressource? Qui, d'après vous? Vous n'avez pas à nous le dire dès aujourd'hui, mais si vous pouvez transmettre des suggestions à la greffière après réflexion, pouvons-nous vous les envoyer?
M. Calla : Vous pouvez les aiguiller vers la direction de la coalition, car je pense que la coalition doit croître de manière à devenir quelque chose qui peut étendre géographiquement les racines.
Le sénateur Tannas : Cela correspond à vos ambitions et à votre mandat?
M. Calla : Oui.
Le sénateur Tannas : Excellent.
La sénatrice Ringuette : C'est vraiment impressionnant. Je comprends que vous voulez miser sur ce fonds de développement des capacités. Vous avez réussi à inspirer la confiance dans votre analyse des divers projets. Vous avez inspiré la confiance parmi les Premières Nations, vous avez aussi doté la coalition d'experts reconnus et allez en chercher d'autres, alors c'est vraiment formidable.
Vous proposez un cadre qui faciliterait l'octroi de garanties de prêts du gouvernement aux Premières Nations afin de leur permettre d'investir dans les projets de grande envergure qui sont proposés. Avez-vous regardé d'autres outils financiers possibles, par exemple, une fiducie de fonds commun de placement, un genre de programme de capital de risque ou même un programme de financement de contrepartie pour créer cette réserve, en plus des obligations? Il y a probablement des limites à l'argent que vous pouvez tirer des obligations. Avez-vous envisagé d'autres scénarios financiers avant d'en venir à dire que c'est ce que vous voulez?
M. Calla : Je vous remercie de votre question. En fait, c'est un point que j'ai manqué.
Oui, nous avons envisagé ces options. Il faut comprendre, entre autres, que l'échelle de ces projets actuels dépasse tout bilan cumulatif d'un groupe de Premières Nations et de la plupart des sociétés de ce pays. L'un des projets, je pense, le projet Shell, avait une valeur se situant entre 37 et 40 milliards de dollars. Les minimums d'avoirs propres établis pour le projet de pipeline Pacific Trail et pour le corridor de la vallée du Mackenzie Valley étaient de 30 p. 100 et de 33,3 p. 100.
Je pense que l'échelle même de ce qui est requis est problématique. Le capital de risque pourrait fonctionner, mais comme Joe l'a dit, quand ils sont allés sur le marché à la recherche de 300 millions pour le Pacific Trail, les marchés de capitaux voulaient le tarif réglementé de 11,25 p. 100, ce qui fait qu'il ne leur restait plus rien.
Nous pourrions avoir une discussion approfondie avec Del Nattrass sur le risque et tout le reste, mais nous estimons avoir établi, conformément à la Loi sur la gestion financière des premières nations, une démarche qui réduit les risques au minimum, compte tenu du mécanisme intermédiaire et des comptes en fiducie. Nous ne disons pas que le Canada se retrouvera avec uniquement des projets admissibles à une garantie de prêt fédérale. Je ne crois pas que cela puisse se produire un jour. Il faudrait que le gouvernement fédéral travaille à ses politiques pour établir les critères d'une garantie de prêt fédérale.
Nous avons décrit certains modèles au comité des peuples autochtones, je pense. Par exemple, au Royaume-Uni, en 2008, quand ils ont eu besoin de stimuler l'économie, ils ont établi en vertu de la loi un fonds en fiducie de 50 milliards de livres pour les garanties de prêts relatives au développement de l'infrastructure. Il y a bien des façons et des moyens d'accomplir cela.
C'est aussi réalisable si le gouvernement du Canada fait quelque chose sur son bilan. Certains d'entre vous savent que j'ai siégé au conseil d'administration de la SCHL pendant six ans. J'y étais pendant la crise de 2008, et j'ai vu le soutien que la SCHL a accordé aux banques en rachetant les prêts hypothécaires assurés dans le cadre d'une vente aux enchères inversée.
Le Canada a la capacité de le faire. Je ne dis pas que c'est sans risque, mais le plus grand bienfait de l'approche que nous envisageons est le coût de l'emprunt. Dans le cas de Pacific Trail, l'Administration financière des premières nations aurait pu leur prêter l'argent à un taux d'environ 3 p. 100, plutôt que 11,25 p. 100. Ce que le Canada apporte, c'est la capacité d'obtenir cet argent à peu de frais et de le faire profiter.
Donc, je réponds à votre question par une question. Comment le Canada s'acquitte-t-il de sa responsabilité? Est-ce que le Canada veut prendre des risques calculés et soutenir l'acquisition de capital? Préférons-nous plutôt ne pas faire cela et obtenir les résultats dont le chef Joe a parlé à l'échelle des collectivités et constater une augmentation du coût du filet social et des tragédies qui se produisent au quotidien dans nos collectivités?
Parfois — et comme je suis comptable, c'est difficile pour moi de le dire —, il ne s'agit pas seulement d'un processus de calcul.
La sénatrice Ringuette : En fait, vous semblez préconiser deux différents outils financiers : un pour des projets de grande envergure — qui correspondrait à une situation de négociation avec le gouvernement fédéral — et un autre pour des investissements de moindre envergure.
M. Calla : L'Administration financière des premières nations offre maintenant certains outils. Cela existe, mais je crois qu'on peut faire valoir des choses concernant ce qui constitue un projet majeur, et ce qui a des répercussions importantes. Nous devrions nous éloigner du concept de projet et nous concentrer sur ce qui aura un effet important.
Si l'on prend l'exemple du projet de la chef Leween concernant l'alimentation électrique d'une mine d'or non loin de là, tout à coup, ce projet représente entre 1 et 1,5 milliard de dollars. Cela peut être reproduit partout au pays dans bon nombre de collectivités de Premières Nations. Je pense que le débat est plus vaste.
La sénatrice Ringuette : Par exemple, le projet hydroélectrique dont vous venez de parler dépendrait du flux de financement disponible?
M. Calla : Non, cela ne serait pas possible.
La sénatrice Ringuette : Cela ne serait pas possible?
M. Calla : Les projets doivent être regroupés.
Le président : Les provinces appuient toujours les municipalités.
M. Calla : Ce n'est pas le cas en Colombie-Britannique.
Le président : C'est le cas dans notre province. Elle soutient les municipalités pour que leurs taux d'intérêt soient moins élevés.
M. Calla : Oui, mais ce n'est pas le cas en Colombie-Britannique. Dans cette province, la Municipal Finance Authority a une cote de AAA et n'a jamais connu d'échec en 40 ou 50 ans d'existence. C'est ce sur quoi est basé le régime de la Loi sur la gestion financière des premières nations.
Le sénateur Smith : Je veux revenir sur ce qu'a dit le sénateur Tannas.
Deux universitaires ont comparu et ont présenté un exposé. Auparavant, nous avions fait des recherches et avions découvert qu'en 1967, un livre portant sur un projet avait été présenté à Pierre Elliott Trudeau, et l'idée avait été rejetée. Il s'agissait d'un corridor central passant entre les 50e et 60e parallèles au pays. Il partait du Labrador, passait par le Cercle de feu dans le Nord de l'Ontario et par le Manitoba, la Saskatchewan et l'Alberta pour se rendre jusqu'à la vallée du Mackenzie et se scinder près de Prince Rupert.
Des gens disent : « Nous avons une idée », et nous faisons appel à d'autres personnes qui ont des idées similaires et tout le monde s'est penché là-dessus.
Saviez-vous qu'on avait élaboré cette idée?
M. Bevan : J'en ai entendu parler.
J'allais dire que nous devrions peut-être demander aux bandes qui n'approuvent pas l'idée ce qu'il faudrait faire pour les faire changer d'idée.
Le sénateur Smith : Ce que je veux dire, simplement pour revenir à ce que disait le sénateur Tannas, c'est que nous avons une idée. Elle coûte de l'argent parce qu'il faut faire la cartographie et vérifier les terres pour déterminer quel type de travaux techniques il faudrait effectuer. Il s'agit d'un corridor de 7 000 milles qui passe d'un bout à l'autre du pays.
En théorie, la prochaine étape, c'est qu'il serait utile, avant qu'une étude ait lieu, que toutes les nations sachent de quoi il est question.
Je crois comprendre que le pays compte 640 nations. Ce que nous devons nous demander d'abord, c'est comment nous pouvons faire pour que les gens comprennent l'idée de sorte qu'ils souhaitent au moins participer pour voir quel serait le résultat du plan. Le plan fournirait une estimation générale des coûts de l'installation d'une ligne de chemin de fer, d'un pipeline, de lignes de transport et du temps, et tiendrait compte des changements climatiques, des terres et de la construction.
Si l'on voulait bien comprendre l'idée et s'assurer que l'information est communiquée de sorte que vous compreniez exactement de quoi il est question, s'agirait-il d'un moyen utile qui pourrait mener à un processus par étapes et préétabli incluant des points de repère tout au long qui feraient intervenir les Premières Nations, et il ne s'agirait pas seulement d'information ou de la création de liens, mais d'une véritable compréhension des avantages et des inconvénients vous permettant d'avoir une approche équilibrée dans l'examen du projet et de participer activement? Voyez-vous ce que je veux dire?
Ces gens nous ont dit : « Voici notre idée; nous avons besoin de 800 000 $ à 1 million de dollars pour la réaliser. » Pour eux, il s'agit de savoir comment obtenir l'argent.
Je suppose que l'un des grands problèmes, c'est de vous faire participer au départ, car nous ne parlons pas que de projets isolés ou multiples sur les terres que vous gérez. Nous parlons d'un corridor national, qui est un droit de passage, qui permet la mise en place, et après les gens participent.
Comment vois-je ce réseau partout au pays? Si des gens informés pouvaient manifester un certain intérêt, comment pouvons-nous vous inciter à participer à la réalisation du projet?
Mme Ransom : Je vais dire quelque chose. J'y ai pensé tout ce temps-là.
Tout d'abord, nous ne voulons pas participer activement; nous voulons plutôt participer à la prise de décisions — je veux le souligner —, nous voulons participer de cette façon.
Concernant la façon d'entamer une conversation, à mon avis, il faut peut-être proposer l'idée. C'est du moins ce que j'ai entendu chez nous.
La concentration du développement dans un seul corridor est logique, car non seulement cette démarche contribue à réduire au minimum les effets environnementaux et cumulatifs, mais, en retour, elle comporte des avantages pour les Premières Nations partout au pays parce que cela leur permet de continuer à mener leurs pratiques autochtones et cela améliore la protection de la gestion et la gouvernance de leurs territoires pour l'ensemble de leurs territoires et elles n'ont pas à réagir à 100 projets différents. Si nous pouvons regrouper les choses, nous pouvons avoir recours aux mêmes pratiques partout sur notre territoire.
Je le dis simplement pour alimenter la réflexion.
Le président : Ce n'est pas mal.
Le sénateur Smith : Pourriez-vous l'écrire dans un document d'une page et nous l'envoyer? Cela nous aiderait si vous le faisiez et que vous l'envoyiez à notre greffière.
Le président : C'est consigné. Tout cela est transcrit.
Mme Leween : Je veux ajouter quelque chose à ce qu'a dit Angel et qui concerne une question qui a été posée plus tôt au sujet du nombre de bandes qui font partie de la coalition. Il y en a actuellement 23, mais je veux seulement préciser que les bandes de l'Alberta et de la Saskatchewan nous ont demandé de leur présenter notre point de vue. On en parle donc de plus en plus.
Lorsque nous parlons d'intégrer cela dans le corridor, en fait, la principale coalition a déjà commencé le processus. Je voulais seulement le mentionner.
M. Calla : Je crois que l'un des points que vous avez soulevés est excellent, sénateur Smith. Ne serait-ce pas fantastique si les Premières Nations avaient un cadre institutionnel à partir duquel elles pourraient agir qui ne correspond pas à une structure de gouvernance de bande au sens de la Loi sur les Indiens? Où sont nos organismes centraux?
La concrétisation de ce que vous voulez faire nécessite un secrétariat et un organisme nationaux. Un certain nombre d'organismes autochtones pourraient y participer. Le Conseil des ressources indiennes qui est établi à Calgary y participe.
Concernant le point qu'a soulevé Angel, nous ne sommes plus prêts à participer à un processus dans lequel nous ne sommes pas un partenaire à part égal. Voilà pourquoi j'ai dit au début que si vous voulez faire exécuter des travaux, il faut que ce soit fait de façon conjointe, car sinon, il sera impossible d'avoir une influence.
Je ne vous ai pas dit que si nous le faisons dans le cadre de la Loi sur la gestion financière des premières nations, c'est entre autres parce qu'il est probable que ces projets se traduisent par un transfert de richesse important dans ces collectivités. L'une des raisons pour lesquelles cela nous intéresse vivement, c'est la capacité de gestion financière et les compétences en gestion qui sont associées à notre processus de certification ainsi que la capacité de tirer profit de ces avantages d'aval par l'Administration financière des premières nations pour régler certains des problèmes auxquels sont confrontées les collectivités des Premières Nations.
Sans argent, on ne peut rien faire.
Le sénateur Smith : Je comprends ce que vous dites. Je comprends qu'il est probable qu'au fil du temps, il y ait eu beaucoup de soubresauts et que certaines choses n'ont jamais eu lieu et que vous n'avez pas obtenu les résultats que vous vouliez.
Il faut déterminer à quel point les gens sont prêts à prendre des risques pour participer à quelque chose qui évoluera. En réalité, aucun d'entre nous ne sait clairement ce qu'il adviendra, mais si les deux parties agissent de bonne foi et font preuve de leadership, de sorte que s'il y a des malentendus en cours de route, elles puissent trouver des solutions, alors, à mon avis, il y a une occasion d'agir pour transformer les choses.
Nous parlons d'un projet qui changera le visage de la nation au cours des 100 ou 200 prochaines années. Ce ne sera pas facile, mais nous avons besoin de gens comme vous, qui jouent un rôle de premier plan et qui parlent à leurs gens. De notre côté, nous devons trouver du soutien. Peu importe qui mènera l'étude, il nous faut trouver une personne qui interviendra et qui dira : « D'accord, je vais participer », et une fois qu'on amène une personne à participer, une autre personne se joindra à elle, et c'est de cette façon qu'on mobilise différentes personnes.
Je respecte ce que vous dites, soit que vous ne le ferez pas à moins d'en tirer quelque chose. Je comprends cela, mais le fait est que si l'on mène une étude, nous avons besoin que vous participiez et que vous informiez les autres nations. Vous avez raison de dire que certaines accepteront et que d'autres refuseront, mais il est à espérer qu'une majorité verra les possibilités qui peuvent découler du projet et accepteront.
M. Calla : Dans l'élaboration de quatre mesures législatives retirant les Premières Nations de la Loi sur les Indiens à laquelle j'ai participé depuis les années 1990, nous nous sommes toujours retrouvés dans une situation où nous devions avoir une coalition de volontaires. Nous avons constaté que lorsque les gens peuvent savoir en quoi l'initiative que nous prenons peut les aider, ils participent.
Ce sont les gens des deux côtes qui ont appuyé l'élaboration des mesures. Entre les deux, très peu de gens l'ont fait. Si je devais vous montrer une carte aujourd'hui, nous sommes éparpillés dans tout le pays parce qu'il y a maintenant des possibilités. À mon humble avis, c'est la façon de commencer les choses. Il vous faudra commencer par les gens qui sont prêts à vous demander ce qui se passera. J'ignore ce qui se passera à partir de là, mais c'est aux collectivités de prendre la décision.
Le sénateur Tannas : Concernant ce que disait le sénateur Smith et pour ce qui est de déterminer comment nous procéderons, est-ce que ce serait accepté ou rejeté d'emblée si nous recommandions que le financement soit offert à l'École de politique publique de l'Université de Calgary? Ce sont des chercheurs de cette université qui ont fait les travaux initiaux, et soit dit en passant, si vous pouvez l'obtenir, ce rapport est extrêmement intéressant. Nous pouvons vous le fournir, en fait. C'est ce que nous ferons. Ils ont besoin de 800 000 $ pour passer à la prochaine étape.
Et si nous recommandions cela et également que la Coalition de grands projets des Premières Nations soit financée à parts égales afin d'examiner parallèlement la viabilité d'une structure économique qui s'appliquerait du Labrador à la Colombie-Britannique? C'est ce dont nous parlons. Je ne peux voir comment nous pouvons conclure des ententes à la carte dans toutes les régions du pays. Il faut pouvoir y adhérer ou non. Je ne sais pas.
Si nous faisions cette recommandation et que nous désignons votre coalition comme une organisation que nous aimerions voir à titre de partenaire à cet égard, accueilleriez-vous cela favorablement?
M. Bevan : En toute honnêteté, il me faudrait en faire part aux membres de la coalition et leur demander s'ils sont prêts à participer à une étude comme celle-là et voir ce que ces gens pensent d'une telle recommandation.
Le sénateur Tannas : Je sais que nous sommes loin d'être rendus là, mais voudriez-vous y réfléchir et nous dire si vous accepteriez ou non, et si la réponse est non, nous dire à qui nous devrions nous adresser?
Est-ce que cela va, monsieur le président?
Le président : C'est une bonne question. C'est eux qui doivent y répondre.
Le sénateur Day : Soit dit en passant, je crois qu'il est important de souligner le travail dont Mme Ransom a parlé concernant l'équilibre entre l'économie et l'environnement et la mesure dans laquelle c'est important dans la situation dont nous parlons. Je vous félicite pour votre travail.
Mme Ransom : Merci.
Le président : J'aimerais remercier le chef Bevan; la chef Leween; la conseillère Ransom; le conseiller économique et financier Nattrass; et Harold Calla, président exécutif du Conseil de gestion financière des premières nations de leurs excellents témoignages. L'ancien sénateur St. Germain m'avait prévenu qu'il s'agirait de bons exposés et, comme d'habitude, il ne m'a pas déçu.
Chers collègues, j'ai quelques remarques à faire avant que nous disions au revoir à nos témoins. L'auteur original, le général Rohmer, comparaîtra le 17 novembre. Ce sera passionnant. Nous étions censés recevoir des représentants du ministère des Affaires autochtones et du Nord demain, mais malheureusement, ils ont annulé à la dernière minute. Nous allons reporter leur comparution à une date ultérieure.
Nous avons un témoin qui comparaîtra à partir de Perth, en Australie, et qui parlera de certaines de leurs discussions sur un corridor national. Il comparaîtra par vidéoconférence à 10 h 30 demain matin.
(La séance est levée.)