Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Banques et du commerce
Fascicule n° 10 - Témoignages du 1er décembre 2016
OTTAWA, le jeudi 1er décembre 2016.
Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce se réunit ce jour à 10 h 36 pour étudier la teneur des éléments des sections 3, 4, 5, 6 et 7 de la partie 4 du projet de loi C-29, Loi no 2 portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 22 mars 2016 et mettant en œuvre d'autres mesures.
Le sénateur Joseph A. Day (vice-président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le vice-président : Je vous prie de nous excuser, chers collègues. Nous rendions public le rapport sur la Commission du droit d'auteur Canada. La conférence de presse se tenait dans un immeuble regroupant plusieurs disciplines artistiques sur le campus de l'Université d'Ottawa, donc à une certaine distance pour nous. Par contre, beaucoup d'artistes et de collectifs y ont assisté, ce qui est une excellente chose.
Je m'appelle Joseph Day. Je suis le vice-président de ce comité. Je remplace notre président, le sénateur David Tkachuk, qui ne peut malheureusement être parmi nous aujourd'hui.
Nous allons poursuivre aujourd'hui notre étude du projet de loi C-29, Loi no 2 d'exécution du budget de 2016. Nous allons nous pencher, en particulier, sur les sections 4, 5, 6 et 7 de la partie 4, dont la chambre du Sénat nous a saisis pour procéder à une étude préalable.
Vous savez fort bien, chers collègues, que nous sommes tenus de faire rapport au Sénat mardi prochain. Cela fait partie de l'avis de renvoi que nous avons reçu de la chambre du Sénat. À ce sujet, à la fin de cette réunion, je vais vous demander votre accord pour la poursuivre à huis clos afin de discuter de nos conclusions et d'avoir une brève discussion sur le contenu de notre rapport.
Nous allons aujourd'hui entamer nos travaux en écoutant les témoins assis à la table nous parler des sections 3 et 5. Nous allons commencer en nous attaquant à la section 5, qui se trouve aux pages 181 et suivantes du projet de loi.
Je dois vous préciser que nous entendrons plus tard d'autres témoins sur cette section 5. C'est la première sur laquelle nous nous sommes penchés hier soir, et c'est également la plus longue de toutes les sections, ce qui explique que c'est à son sujet que nous entendrons le plus de témoins. S'il y a une autre personne qui n'est pas assise à cette table, mais qui serait la bonne personne pour commenter un aspect particulier du projet de loi, nous l'appellerons à s'avancer le moment voulu.
Monsieur Schwatz, nous sommes prêts à entendre votre déclaration préliminaire sur la section 5 qui, je crois savoir, va déborder un peu sur la section 3, et c'est très bien ainsi parce que cette dernière relève également de notre mandat. La parole est à vous, monsieur.
Saul Schwartz, professeur et coordonnateur du programme de doctorat, École d'administration et de politique publique, Université Carleton, à titre personnel : Permettez-moi tout d'abord de remercier les membres du comité pour me permettre de témoigner ainsi devant vous.
Je veux aborder brièvement trois points concernant la section 5 du projet de loi C-29 et, comme vous l'avez dit, déborder un peu sur la section 3.
Le premier de ces points est tout simplement de vous dire que je suis en faveur de l'inclusion d'un code fédéral de protection du consommateur dans la Loi sur les banques, code qui apparaît à la section 5 du projet de loi C-29. Un système bancaire de dimension nationale comme le nôtre fonctionnera mieux avec un tel code, pourvu que celui-ci soit au moins aussi efficace que les codes provinciaux qu'il va remplacer.
Mon second point porte sur le fait que les grandes banques canadiennes traitent les consommateurs à faible revenu avec une indifférence manifeste, et même parfois avec un mépris absolu. Plusieurs auteurs ont décrit ces types de comportements. Je peux vous citer, entre autres, le rapport de John Stapleton intitulé Welcome to the financial mainstream? Ou l'ouvrage de Jerry Buckland dont le titre est Hard Choices : Financial Exclusion, Fringe Banks and Poverty in Urban Canada. De telles façons de traiter les gens vont manifestement à l'encontre des principes énoncés dans la version modifiée de la Loi sur les banques, puisque l'article 627.02 du projet de loi se lit comme suit : « b) les clients des institutions [...] devraient être traités de façon juste; ».
Comme la section 3 du projet de loi C-29 propose des modifications, en apparence, mineures, à la Loi canadienne sur l'épargne-études, je me permets de rappeler aux membres du comité que l'une des raisons les plus couramment citées pour la faible utilisation des Bons d'études canadiens, puisqu'il n'y a actuellement qu'environ un tiers des Canadiens admissibles à en profiter, est la difficulté qu'éprouvent les parents à faible revenu à alimenter un Régime enregistré d'épargne-études. On pourrait être enclin à penser qu'une personne veuille ouvrir un tel compte ou un REEE dans une succursale bancaire de son voisinage, mais les grandes banques généralistes se sont montrées moins qu'enthousiastes à aider des parents à faible revenu dans cette démarche. Elles ne sont sans aucun doute pas attirées par ce type de clients qui n'ont que peu de chances de générer des affaires rentables à l'avenir.
J'espère que, à l'avenir, la réglementation qui fera suite à l'adoption de la version modifiée de la Loi sur les banques imposera à ces dernières d'enquêter de façon empirique, et j'insiste sur « empirique », sur la façon dont elles traitent les clients à faible revenu. Se contenter d'une rhétorique creuse sur un traitement équitable est loin de suffire.
De telles enquêtes empiriques pourraient relever du comité du Conseil d'administration dont il est question à l'article 195.1. De plus, si les administrateurs des banques devaient ne pas respecter cette exigence, ils devraient en être tenus responsables.
Si on devait décider de conserver la substance de la Loi canadienne sur l'épargne-études, au lieu d'adopter les modifications mineures de la section 3, il faudrait alors rompre le lien entre les Bons d'études canadiens et les Régimes enregistrés d'épargne-études, comme ma collègue Jennifer Robson vous l'a suggéré.
Mon troisième point est qu'un code de protection des consommateurs inscrit à la section 5 ne concerne qu'une cinquantaine de banques et n'a tout simplement pas une portée assez large pour protéger les consommateurs canadiens des services financiers, en particulier dans le cas des consommateurs à faible revenu.
Ce dont nous avons besoin est d'un organisme ressemblant au Consumer Financial Protection Bureau des États- Unis. Nous savons fort bien que, dans le contexte canadien, un tel bureau ne pourrait disposer d'autant de pouvoirs que son homologue américain, mais il pourrait être néanmoins beaucoup plus efficace que l'Agence de la consommation en matière financière du Canada, qui est entravé par la faiblesse de ses moyens pour promulguer des règlements et veiller à leur application.
Il faut en particulier accorder une plus grande attention au secteur des services financiers parallèles, aux sociétés de prêts sur salaire, aux bureaux de prêteur sur gages et aux encaisseurs de chèques. Il faut que nous en apprenions davantage sur ce secteur dont le comportement a besoin d'être réglementé plus rigoureusement.
Il serait de plus utile de disposer de modalités de faillite à faible coût, comme c'est actuellement le cas au Royaume- Uni et en Australie, alors qu'il en coûte ici actuellement environ 1 800 $ pour déclarer faillite, et que cela pourrait être fait pour 500 $.
Un Bureau canadien de protection financière des consommateurs pourrait, pour le moins, permettre d'accumuler les connaissances dont les provinces ont besoin pour agir. Dans le meilleur des cas, il pourrait élaborer une réglementation fédérale protégeant mieux les consommateurs canadiens contre les entreprises de services financiers.
Merci de l'attention que vous m'avez accordée.
Le vice-président : Merci beaucoup, monsieur Schwartz.
Sarah Bradley, ombudsman et chef de la direction, Ombudsman des services bancaires et d'investissement : Madame la sénatrice, messieurs les sénateurs, bonjour. Je vous remercie de m'avoir invitée à prendre la parole devant vous aujourd'hui.
Pour ceux d'entre vous qui n'auraient pas une bonne connaissance de l'Ombudsman des services bancaires et d'investissement, l'OSBI, permettez-moi de vous le présenter rapidement. Il a pour mandat de résoudre les différends entre les entreprises de services bancaires et d'investissements et leurs clients lorsque ceux-ci n'y parviennent pas par eux-mêmes dans un délai raisonnable. Nous sommes indépendants des entreprises. Nous sommes impartiaux et nos services sont gratuits pour les clients. Nous offrons une solution de remplacement au système juridique depuis plus de 20 ans, soit depuis 1996. Les premières entreprises à profiter de nos services ont été les plus importantes banques du pays. Déjà à l'époque, nous étions une société sans but lucratif mise sur pied pour répondre aux besoins du public. C'est un rôle que nous avons toujours assumé très sérieusement.
En 2002, notre mandat a été élargi pour englober les firmes réglementées par l'Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières, l'OCRCVM, et par l'Association canadienne des courtiers de fonds mutuels, la MFDA.
En 2012, les Autorités canadiennes en valeurs mobilières, les ACVM, nous ont désignés comme le seul prestataire de services obligatoires de règlement des différends dans le secteur canadien des valeurs mobilières.
Notre mandat a, à nouveau, été élargi en 2014 pour assurer nos services à d'autres entreprises de services financiers enregistrées auprès des ACVM, dont les gestionnaires de portefeuilles, les courtiers sur le marché dispensé et les courtiers de caisses d'éducation universitaire.
En 2015, nous sommes devenus un organisme externe de traitement des plaintes en vertu du nouveau Règlement sur les réclamations (banques, banques étrangères autorisées et organismes externes de traitement des plaintes).
Nos activités dans le secteur bancaire sont surveillées par l'Agence de la consommation en matière financière du Canada, et celles dans le secteur des investissements le sont par les Autorités canadiennes en valeurs mobilières.
À ce jour, près de 1 400 firmes participent à nos activités. Plus de 1 200 sont tenues de le faire, dont 80 banques sous régime fédéral, 270 entreprises membres de l'OCRCVM et de la MDFA et 935 gestionnaires de portefeuilles, courtiers sur le marché dispensé et courtiers de caisses d'éducation universitaire. Nous comptons également au-delà de 100 sociétés participant volontairement à nos activités, dont environ 25 sociétés de fiducie et de prêts et une soixantaine de caisses d'épargne et de crédit.
La réglementation actuelle sur les banques les laisse libres de choisir auquel des deux organismes externes de traitement des plaintes elles veulent s'adresser. Je vous signale que la Banque Royale et la Banque TD utilisent les services de Chambres ADR Bureau Bancaire Ombuds. Cet organisme va d'ailleurs témoigner un peu plus tard aujourd'hui sur sa façon de traiter les plaintes concernant le secteur bancaire. Ces deux banques sont toutefois tenues de recourir aux services de l'OSBI pour résoudre les plaintes à leur endroit concernant les investissements.
J'en viens maintenant aux quantités des dossiers que nous traitons. En 2015, nous avons reçu plus de 18 000 demandes d'information, par téléphone ou par voie électronique, de toutes les régions du pays et plus de 5 000 demandes officielles. Nous avons ouvert 571 enquêtes, dont 273 concernaient le secteur bancaire.
Dans 22 p. 100 de ces cas impliquant des activités du secteur bancaire, nous avons rendu des décisions favorables aux consommateurs. Cependant, il arrive fréquemment que, même lorsque nous ne concluons pas que la banque a erré, les consommateurs nous fassent part de leur satisfaction qu'un expert indépendant ait pris le temps d'étudier leur plainte et de leur expliquer pourquoi celle-ci ne justifiait pas de dédommagement. Cela montre bien que l'ombudsman des services financiers offre des services publics essentiels.
L'objectif sous-jacent de nos activités est de favoriser la confiance du public envers le secteur des services financiers. Les produits offerts par ce secteur d'activité sont complexes. Les écarts entre les niveaux d'informations dont disposent les consommateurs et les entreprises de notre secteur sont immenses. Les consommateurs le savent fort bien. Ils savent également que, en pratique, ils ne peuvent recourir au système juridique pour se défendre.
L'an dernier, le montant moyen des recommandations de dédommagement que nous avons recommandé dans les cas de différends avec les banques était de 5 669 $. La recommandation de dédommagement la plus élevée que nous avons formulée l'an dernier à la suite du dépôt d'une plainte contre une banque a été de 86 000 $.
S'ils n'avaient pas accès aux services d'un ombudsman des services financiers, les consommateurs ne disposeraient d'aucun moyen pratique de recours. Ces services sont essentiels pour leur donner confiance dans ce secteur d'activité, qui joue un rôle déterminant pour notre prospérité économique. Toute défiance pénaliserait notre secteur. C'est la raison pour laquelle notre travail bénéficie de l'appui des responsables de la réglementation, ainsi que de celui de l'industrie et des défenseurs des consommateurs. Vous savez maintenant pourquoi pratiquement tous les pays industrialisés à travers le monde se sont dotés d'un ombudsman des services financiers.
Notre travail nous permet également de recueillir des renseignements précieux sur les principaux points de friction dans le secteur des services financiers, que ce soit par types d'entreprise, par administrations, par gammes de produits ou par sous-secteurs d'activité. Nous sommes dans une excellente posture pour transmettre ces informations au responsable de la réglementation et aux participants de l'industrie. Il s'agit pour nous d'améliorer l'expérience d'ensemble des consommateurs dans notre secteur et de nous assurer que les pratiques équitables l'emportent sur les autres.
Quant à ce que nous pensons du projet de loi C-29, il y a lieu avant tout de vous rappeler que notre rôle en est un de prestataire impartial de services de règlement des différends. Nous ne sommes pas des défenseurs des consommateurs ni du secteur financier. Notre rôle est plutôt de consolider la confiance de l'ensemble des participants envers le secteur. En gardant cela l'esprit, je vais limiter mes commentaires à la section cinq du projet de loi C-29.
Je suis d'avis que cette section du projet de loi consolide utilement les dispositions qui s'appliquent aux banques en matière de protection des consommateurs de services bancaires et du public. Elle structure clairement les principes et les objectifs de ces dispositions, ce qui est important parce que tous deux serviront à éclairer les interprétations ultérieures de ces dispositions. En particulier, les principes de traitement juste des consommateurs, d'impartialité et d'adaptation des processus de réclamation qui y figurent, et la responsabilité générale des institutions financières à prendre en compte les intérêts des consommateurs, et du public, sont adaptés à la situation et justifiés. Le texte de ce projet de loi clarifie aussi les exigences en matière de gouvernance des entreprises, d'accès aux services bancaires, de divulgation d'informations, de pratiques d'affaires et de modalités de rapport au public, et tout cela est important.
À l'avenir, nous continuerons à collaborer avec l'ACFC au respect de notre mandat en continuant à assumer le rôle important qui est le nôtre dans l'appui au cadre de protection des consommateurs défini par le gouvernement dans ce projet de loi. Nous sommes d'avis que les principes énoncés sur la façon de faire affaire avec les consommateurs et le public sont parfaitement compatibles avec les pratiques et les procédures de l'OBSI. Nous appuierons tous les efforts destinés à garantir l'accès des consommateurs à des services justes, indépendants et impartiaux de résolution des différends. Alors que le gouvernement s'efforce d'améliorer la protection des consommateurs de services financiers, nous rappelons l'importance de la clarté de la législation et de la réglementation pour promouvoir et garantir l'obtention de résultats équitables des plaintes dans le domaine des services financiers.
Merci de m'avoir donné l'occasion de vous parler aujourd'hui. Je vous invite maintenant à poser vos questions.
Le vice-président : Je vous remercie, madame Bradley. Je crois savoir que vous êtes accompagnée de M. Marc Wright, qui se tient à votre disposition si vous avez besoin de renseignements additionnels.
Mme Bradley : C'est exact.
John Lawford, directeur exécutif et avocat général, Centre pour la défense de l'intérêt public : Monsieur le président, madame la sénatrice, messieurs les sénateurs, nous allons nous intéresser aujourd'hui à la section 5 de la partie 4 du projet de loi. Le cœur de notre message, c'est que le « régime de protection des consommateurs en matière financière » proposé n'améliorera pas la protection des consommateurs faisant affaire avec des banques, et pourrait même l'affaiblir.
Dans son budget de 2013, le ministre des Finances faisait part de l'intention du gouvernement « d'élaborer un code au contenu exhaustif pour les consommateurs de produits et services financiers afin de mieux protéger ces consommateurs ». Ont suivi des annonces à ce sujet dans tous les budgets depuis lors, y compris le budget 2016, qui nous a promis de « créer un cadre consolidé exhaustif et inclure des règles ciblées et plus souples pour la protection des consommateurs afin de mieux répondre aux besoins en évolution des Canadiens ».
Nous étions donc prudemment optimistes à l'égard de l'arrivée prochaine de changements qui s'imposent. Le cadre réglementaire actuel est profondément insatisfaisant. Le site web de l'Agence de la consommation en matière financière du Canada, l'ACFC, recense au moins une cinquantaine de dispositions de la Loi sur les banques, 28 règlements adoptés en vertu de la loi, 6 codes de conduite volontaires et plus d'une demi-douzaine d'engagements publics qui auraient vocation à protéger les consommateurs. Très peu de consommateurs connaissent ces règles ou en comprennent la portée. Beaucoup de ces règles ne sont pas suffisamment vigoureuses, ou ne peuvent pas être invoquées par les consommateurs devant les tribunaux. Dans bien des cas, il n'existe pas de règle susceptible de protéger les consommateurs, sinon les principes généraux du droit.
Le projet de loi C-29 déplace les règles entre la loi et les règlements, rendant incidemment ainsi le cadre réglementaire plus rigide alors que l'évolution rapide des marchés requerrait plutôt qu'on le rende plus flexible. Certes, le projet ajoute aussi cinq nouveaux principes — dont l'effet juridique est nébuleux — et comporte quelques autres petites améliorations, mais il inclut également de nouvelles mesures qui sont clairement nuisibles pour les consommateurs.
Par contre, le projet de loi C-29 ne dit rien de problèmes réels, comme la faculté des banques de modifier unilatéralement leurs contrats ou la présence dans ces contrats de clauses d'exclusion de responsabilité, même en cas de négligence de leur part. À titre d'exemple, nous joignons, en annexe à cet exposé, un extrait du contrat actuel de la CIBC. Rien, dans la loi actuelle ou dans le projet de loi C-29, n'interdit de telles clauses. On examinera par exemple et par contraste le Code de protection des consommateurs mis en place par la Banque centrale d'Irlande, qui requiert des banques d'agir avec compétence, prudence et diligence, et qui prohibe en principe les clauses d'exclusion de responsabilité.
Les questions liées au traitement des plaintes ne sont pas abordées dans le projet de loi, même si le régime actuel permet à une banque de choisir l'ombudsman externe qui lui convient, ce qui constitue un conflit d'intérêts manifeste. En vertu du projet de loi C-29, l'ACFC demeure chargée de l'application de la loi. Mais on lui avait donné bien peu de pouvoirs en 2001, qui n'ont guère été augmentés depuis. Il suffit de la comparer au Consumer Financial Protection Bureau des États-Unis pour mesurer le chemin à parcourir.
Il s'agit donc ici d'un cadre réglementaire fragile et miné par une foule de lacunes. Nous nous inquiétons par conséquent de l'apparente tentative du projet de loi C-29 de confiner la protection des consommateurs clients des banques à ce régime, dans la mesure où nous croyons comprendre que l'intention inspirant l'article 627.03 proposé serait de prohiber l'application du droit provincial de la consommation aux opérations bancaires. Ce n'est pas une bonne idée.
D'abord, les consommateurs faisant affaire avec des banques se trouveraient dans certaines provinces moins bien protégés que s'ils faisaient affaire avec, par exemple, une coopérative de services financiers locale. Le Parlement inciterait donc en quelque sorte les consommateurs à ne pas faire affaire avec les banques.
Ensuite, les consommateurs de toutes les provinces pourraient ne pas être traités de la même manière. C'est un point juridique plus sophistiqué, mais c'est un principe juridique établi que la législation fédérale ne l'emporte pas sur la common law. En l'absence de toute disposition concernant les transactions injustes dans la Loi sur les banques, cela pourrait n'avoir aucune répercussion sur, disons, l'application d'une règle de common law sur l'iniquité dans neuf provinces. Toutefois, au Québec, où des règles similaires sont inscrites dans le Code civil et dans la Loi sur la protection du consommateur de la province, ces textes pourraient être jugés sans effet en application de la théorie constitutionnelle mise de l'avant par ce projet de loi. Tout simplement, le projet de loi C-29 constitue une invitation à d'interminables débats constitutionnels et alimentera l'incertitude juridique, au détriment tant des consommateurs que des banques.
Ce que le ministre propose nous pose un problème encore plus fondamental. Il invite en effet le Parlement à déclarer que, au Canada, ce qui est plus commode pour les banquiers importe davantage que la protection des consommateurs. Nous croyons qu'il s'agit là d'une erreur, et d'un choix qui ne sera pas populaire.
Les consommateurs de services financiers ont tout à gagner de la mise en œuvre d'un ensemble de règles vigoureuses, cohérentes, complètes et légalement efficaces, qui serait conforme à notre régime constitutionnel et qui serait établi dans la foulée d'un processus de consultation ouvert. Ce régime pourrait faire office de « plancher » normatif et, s'il était suffisamment élevé, les provinces ne ressentiraient sans doute pas le besoin d'y ajouter, ce qui en favoriserait la cohérence au plan national. Mais ce n'est pas ce que le projet de loi C-29 nous propose actuellement.
En conclusion, nous suggérons à votre comité qu'il recommande au ministre des Finances de bien pondérer toutes ces questions, de retirer cette section 5 du projet de loi et de procéder à de nouvelles consultations afin de mettre en place, dans le cadre de la réforme plus globale de la Loi sur les banques qui s'annonce, un régime de protection des consommateurs de services financiers qui serait véritablement efficace.
Le vice-président : Je vous remercie de vos recommandations directes. Nous les apprécions à leur juste mesure. Nous allons certainement les prendre en considération.
Marshall Schnapp, ombudsman, Chambres ADR Bureau Bancaire Ombuds : Je tiens à remercier les membres du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce d'avoir invité les représentants des Chambres ADR Bureau Bancaire Ombuds à participer à l'examen de ce projet de loi.
Nous sommes actuellement l'organisme externe de traitement des plaintes pour la Banque Royale du Canada, le Groupe Financier Banque TD et la DirectCash Bank. Nous offrons les services d'un ombudsman des services bancaires depuis 2008.
Notre bureau examine les plaintes déposées par des clients de banques membres de notre organisation lorsque les clients ont épuisé le système interne des recours de leur banque sans parvenir à un résultat qu'ils jugent satisfaisant. Lorsque nous déterminons qu'une plainte relève de notre mandat, nous réalisons une enquête complète, si elle nous paraît justifiée, ou nous prenons le rôle d'un médiateur entre les parties pour tenter de résoudre le différend.
Nos enquêtes sont réalisées par des enquêteurs expérimentés et indépendants. Lorsque son enquête est terminée, un enquêteur peut formuler des recommandations non contraignantes à la banque et aux plaignants, qui peuvent comporter un élément de dédommagement financier.
Notre processus est confidentiel. Toutefois, chacune des parties peut communiquer le rapport à ses conseillers, y compris ses avocats, si elle n'est pas satisfaite de nos conclusions.
Si une banque membre de notre organisation n'accepte pas notre recommandation, nous afficherons celle-ci et son refus sur notre site web. Nous y décrirons également les grandes lignes de la plainte, sans révéler aucun renseignement confidentiel d'une partie ou de l'autre. Tout refus d'une banque membre d'accepter une de nos recommandations fera l'objet d'une mention dans notre rapport annuel, avec les caractéristiques de nature générale de la plainte.
En ce qui concerne la gouvernance, nous sommes régis par un conseil d'administration qui surveille nos activités et notre administration et qui définit nos normes de rendement et veille à leur respect.
Pour donner aux membres du comité une idée de l'ampleur de notre travail, l'an dernier, nous avons reçu environ 1 173 appels, ouvert 226 dossiers et mené 86 enquêtes. Nous avons d'ailleurs observé l'an dernier une hausse sensible du volume des appels initiaux, puisqu'elle a été de 13 p. 100, et de celui des plaintes, en hausse de 36 p. 100. En 2015, nous avions réalisé 53 enquêtes alors que leur nombre a atteint 81 en 2016.
À compter de la date à laquelle nous avons reçu la totalité de l'information nécessaire, il nous faut en moyenne 54 jours pour mener une enquête à son terme.
Quand cela s'avère possible, nous nous efforçons d'aider les parties à parvenir conjointement à la résolution de leur différend par la médiation. L'an dernier, nous avons pu procéder ainsi dans 11 p. 100 des cas qui ont donné lieu à des enquêtes.
Sachez également que 212 des plaintes reçues l'an dernier étaient formulées en anglais et 13 en français.
Il est possible de ventiler les plaintes que nous avons reçues l'an dernier en six grandes catégories qui sont, par ordre d'importance, un piètre service à la clientèle, des plaintes concernant les hypothèques motivées essentiellement par les pénalités pour remboursement anticipé et par des conseils déficients, des plaintes à la suite de fraudes sur des cartes de débit et de crédit, l'interruption de la relation bancaire, des conseils inadaptés ou inexacts et, enfin, des fraudes dans le domaine des nouveaux emplois ou d'Internet.
Nous veillons à notre indépendance en suivant les principes généraux d'un ombudsman. C'est-à-dire que nous sommes indépendants, neutres et impartiaux, que nous agissons en toute confidentialité et que nous essayons, de façon informelle, de résoudre les plaintes. Nous sommes aussi surveillés par l'Agence de la consommation en matière financière du Canada qui procède chaque année à un examen de nos activités.
Nous nous dotons également de politiques et de procédures précises pour garantir notre indépendance et nous assurer que nos processus sont équilibrés et transparents. Nous sommes aussi tenus de remettre à l'Agence, tous les cinq ans, une évaluation de la façon dont nous assumons nos fonctions et du rendement de nos activités. Cette évaluation est réalisée par une tierce partie.
Si nous ne sommes pas là pour défendre qui que ce soit, nous devons néanmoins convenir que les modifications proposées à la section 5 instaurent de bonnes politiques. C'est ainsi que l'article 627.88 propose que :
L'institution qui est avisée par l'organisme externe de traitement des plaintes dont elle est membre qu'il a reçu une réclamation la concernant lui fournit sans délai tout renseignement relatif à cette réclamation étant en sa possession ou relevant d'elle.
Nous serions ainsi assurés de disposer de toute l'information et de toute la documentation nécessaires pour assumer nos fonctions et mener notre enquête de façon détaillée et approfondie.
Nous avons également relevé à l'article 627.89 du projet de loi que :
L'institution ou l'organisation tenue sous le régime de la présente section de fournir des renseignements le fait dans un langage et d'une manière simple, claire et n'induisant pas en erreur.
C'est là aussi une mesure à laquelle nous sommes favorables qui contribuerait à garantir que l'information reçue est claire, simple et transparente, et cela aiderait le consommateur.
Pour terminer, nous sommes d'avis que certaines des modifications apportées par le projet de loi C-29 permettront de consolider les outils dont disposent les organismes externes de traitement des plaintes pour faire leur travail pour les consommateurs. Elles nous permettront de mener à bien notre mandat, de faire des enquêtes complètes et d'aider à résoudre les différends des consommateurs.
Je vous remercie de m'avoir invité. J'attends avec intérêt vos questions.
Le vice-président : Je vous remercie, M. Schnapp.
Anthony Polci, vice-président, Relations gouvernementales, Association des banquiers canadiens : Bonjour mesdames et messieurs. Permettez-moi de commencer par remercier les membres du comité d'avoir invité l'Association des banquiers canadiens, l'ABC, à participer à l'examen du projet de loi C-29.
L'ABC représente 59 banques membres, soit des banques canadiennes ainsi que des filiales et des succursales de banques étrangères exerçant des activités au Canada, et leurs 280 000 employés.
Mes commentaires préliminaires porteront sur les dispositions prévues à la section 5 de la partie 4 du projet de loi C- 29. Ces modifications à la Loi sur les banques permettent le regroupement et la rationalisation des dispositions de protection des consommateurs applicables aux banques dans un régime fédéral de protection des consommateurs en matière financière. Mes commentaires seront axés sur les aspects généraux de ces modifications qui affecteront le secteur bancaire.
Nouer et maintenir des relations solides avec les clients sont d'une grande importance pour les banques au Canada. Les banques restent actives et essentielles dans le quotidien de la plupart des Canadiens. En effet, 99 p. 100 de la population étant titulaire d'un compte bancaire, chaque jour, des millions de personnes se tournent vers les banques pour obtenir des produits, des services et des conseils financiers susceptibles de les aider à sauvegarder leur argent, à acheter une maison, à gérer leur épargne, à planifier leurs investissements et à préparer leur retraite.
Les banques du Canada prennent très au sérieux le rôle qu'elles jouent dans la vie des Canadiens. Ces derniers font confiance à leurs banques et apprécient les produits et les services qu'elles offrent.
En fait, les banques du Canada sont reconnues pour leur engagement envers une bonne expérience-client, prenant la tête des 32 pays évalués dans le Capgemini/Efma World Retail Banking Reports en ce qui a trait à l'indice de l'expérience client, et ce, chaque année depuis 2012.
Le projet de loi C-29 réunit, en un seul Régime de protection des consommateurs en matière financière inclus dans une partie de la Loi sur les banques, les dispositions relatives à la protection des consommateurs prévues dans les lois fédérales, étant donné qu'elles ont évolué au fil des ans, en plus de nouvelles mesures.
En établissant un régime fédéral clair, le projet de loi C-29 veille à ce que les consommateurs au Canada continuent à profiter de produits et de services bancaires qui sont compatibles, sécuritaires et de haute qualité. Réunir les dispositions de protection des consommateurs et établir un ensemble de normes cohérentes au sein d'un même régime donneront les résultats suivants : augmenter l'efficacité des réglementations en matière de services financiers, assurer l'application de politiques cohérentes à l'échelle du pays, éviter la confusion des consommateurs, accroître la capacité de l'Agence de la consommation en matière financière du Canada à remplir son mandat, soit informer et protéger les consommateurs.
Nous appuyons la démarche de placer le régime de protection des consommateurs sous la supervision d'un seul organisme de réglementation. L'ACFC a été établie en 2001 dans l'objectif de renforcer l'encadrement des lois liées aux consommateurs et d'élargir les connaissances des consommateurs en matière de finances. Le secteur bancaire entretient une longue et solide relation avec l'ACFC. En effet, l'ABC et ses banques membres s'associent souvent à l'ACFC dans des initiatives visant les consommateurs, notamment dans le domaine de la littératie financière.
Également, nous appuyons l'établissement de principes de protection des consommateurs qui ne soient pas trop contraignants, mais suffisamment souples pour faciliter l'adaptation aux changements. Il est essentiel de permettre et d'encourager une innovation soutenue dans le secteur des services financiers afin que les banques continuent à répondre aux besoins des consommateurs à travers la conception et le perfectionnement de produits et de services financiers, ainsi que de leur prestation aux consommateurs.
En tant que chefs de file dans le domaine des technologies financières, les banques au Canada poursuivent l'innovation, développant de nouveaux produits et services qui répondent à la demande des clients pour une commodité accrue. De nos jours, les Canadiens peuvent effectuer les opérations bancaires en tout temps et de pratiquement n'importe où, grâce aux services bancaires en ligne et mobiles. D'une année à l'autre, le nombre de consommateurs au Canada qui adoptent les services bancaires en ligne ou mobiles comme leur moyen de prédilection ne cesse d'augmenter. Néanmoins, malgré cette tendance, les banques maintiennent leur large réseau de succursales à travers le pays.
L'élaboration de nouveaux règlements clarifiera le processus de mise en œuvre du régime fédéral de protection des consommateurs. Nous sommes prêts à prendre part à ce processus avec le gouvernement afin de concevoir une approche viable, efficace et souple, favorable aux consommateurs au Canada.
Le début de la crise financière mondiale datant maintenant de près de 10 ans, il ne faut pas oublier que la raison essentielle derrière la vigueur et la résilience du secteur bancaire canadien est une combinaison de banques bien gérées et d'un régime de réglementation et de supervision des services financiers efficace. La crise financière mondiale nous a prouvé l'importance d'un système de réglementation rationalisé, cohérent et uni, comme celui que nous avons au Canada, doté d'un seul organisme de réglementation responsable de sa sécurité et de sa vigueur — le Bureau du surintendant des institutions financières — et d'un seul organisme de protection des consommateurs — l'Agence de la consommation en matière financière du Canada.
L'ABC et ses membres appuient depuis toujours l'existence d'un régime de réglementation fédéral pour la protection des consommateurs. Au Canada, les consommateurs bénéficient déjà d'un cadre solide de protection en matière de services financiers. Toutefois, le régime proposé dans le projet de loi C-29 représente une mesure importante pour renforcer cette protection grâce à des règlements clairs, simples et cohérents, qui s'appliqueront dans l'ensemble du pays.
Encore une fois, nous vous remercions de votre invitation et serons heureux de répondre à vos questions.
Le vice-président : Merci beaucoup, monsieur Polci.
Richard Bilodeau, directeur, Direction de la supervision et de la promotion, Agence de la consommation en matière financière du Canada : Bonjour à tous. Je vous remercie de l'occasion que vous nous donnez de participer aujourd'hui à vos travaux.
[Français]
Un organisme du gouvernement fédéral, l'ACFC est chargée de protéger les consommateurs de produits et de services financiers. L'Agence de la consommation en matière financière du Canada supervise les pratiques des banques, des caisses de crédit fédérales ainsi que des sociétés de prêt et de fiducie. De plus, elle développe des ressources et organise des activités visant à accroître les connaissances financières des consommateurs canadiens. Finalement, l'Agence de la consommation en matière financière du Canada a le mandat de se tenir à l'affût des tendances et des enjeux qui se dessinent à l'horizon et qui peuvent avoir des répercussions sur les consommateurs de produits et de services financiers.
Nous supervisons également les organismes externes de traitement des plaintes, soit les ombudsmans. Chaque banque et chaque caisse de crédit fédérale doit être membre de l'un des deux organismes externes de traitement des plaintes approuvés. Si un consommateur croit que son institution financière n'a pas traité de façon adéquate une plainte relative à des activités bancaires, il peut alors s'adresser à l'un de ces organismes.
Nous veillons également au respect, par les réseaux de cartes de crédit et de débit, de certaines obligations en ce qui concerne les pratiques commerciales qui visent à protéger les commerçants. Parmi ces réseaux, il a notamment Visa, MasterCard, American Express et Interac.
[Traduction]
L'ACFC voit d'un bon œil le Régime de protection des consommateurs en matière financière inscrit dans le projet de loi C-29. S'il est adopté, il améliorera la protection des consommateurs de services financiers. Nous sommes particulièrement satisfaits de l'apparition de principes directeurs qui définissent les attentes concernant le comportement des banques, et cela facilitera l'interprétation et l'application de la législation par l'ACFC.
Les autres mesures qui doivent améliorer la protection des consommateurs sont, entre autres, l'amélioration de l'accès aux services bancaires de base en permettant une identification plus souple au moment d'ouvrir un compte ou d'encaisser un chèque du gouvernement du Canada, une surveillance accrue des pratiques d'affaires en ajoutant de nouvelles interdictions d'exercer des pressions indues à l'égard d'une personne et en ajoutant des périodes d'annulation à un éventail plus large de produits et services, en améliorant la divulgation d'informations importantes grâce à l'utilisation élargie de cases de renseignements récapitulatifs aux fins des produits et services bancaires, en améliorant la transparence en exigeant des banques et des organismes externes chargés des plaintes qu'ils rapportent le nombre et la nature des plaintes reçues et, enfin, en améliorant la responsabilisation en exigeant des banques qu'elles rendent compte des mesures prises pour respecter les principes du régime de protection des consommateurs et pour relever les défis auxquels sont confrontés les Canadiens vulnérables.
Dans l'attente de l'entrée en vigueur de ce nouveau régime de protection des consommateurs de services financiers, l'ACFC a révisé l'an dernier son propre régime de supervision. Je suis d'ailleurs ravi de vous annoncer que celui-ci sera lancé au printemps de 2017. Notre approche en la matière repose sur trois piliers.
Le premier met l'accent sur la promotion, car l'ACFC est convaincue que le respect de la conformité est facilité lorsque les obligations sont clairement définies et que les organismes réglementés peuvent les consulter facilement.
Le second pilier de cette approche est la surveillance proactive exercée par l'ACFC auprès des organismes réglementés pour s'assurer qu'ils se conforment à leurs obligations. L'Agence recueille également des renseignements sur les problèmes actuels et émergents qui ont des répercussions sur les consommateurs de services financiers.
Enfin, elle veille au respect des obligations des institutions financières en ce qui concerne leur comportement sur le marché. Lorsque nous détectons une contravention aux obligations de conformité, nous déclenchons une enquête et prenons ensuite les mesures qui s'imposent pour dissuader à l'avenir de reproduire un tel comportement délictueux.
Ce nouveau régime de supervision va nous permettre de cerner de façon proactive les problèmes sur le marché et d'adopter, pour nos activités de surveillance et d'application de la réglementation, une approche davantage axée sur la détection des risques. Nous sommes d'avis que, avec cette approche, nous serons mieux à même de mettre en œuvre les modifications à la législation proposées par le projet de loi C-29.
[Français]
Pour assurer l'adoption du nouveau cadre pour les consommateurs, l'ACFC travaillera en étroite collaboration avec divers intervenants, y compris les consommateurs, les institutions financières sous réglementation fédérale et les organismes de réglementation dans les provinces et les territoires. Cette approche axée sur la collaboration est au cœur de toutes les activités de l'ACFC.
Je vous remercie encore une fois de m'avoir invité à vous rencontrer. Je serai heureux de répondre à vos questions.
Le vice-président : Je vais commencer avec les sénateurs qui ont des commentaires ou des questions.
[Traduction]
Mesdames et messieurs, nous avons d'autres sections à examiner et nous avons tout un groupe de témoins. Je vous saurais donc gré de poser des questions brèves et de donner des réponses succinctes.
Le sénateur Massicotte : Madame Bradley, vous avez convenu que, tout comme votre collègue, vous jouez un rôle très important pour l'ensemble du secteur bancaire, en particulier en ce qui concerne l'équité et la transparence. Toutefois, nombreux sont ceux qui doutent encore de votre efficacité à tenir de façon permanente un rôle d'arbitre indépendant. Des personnes laissent souvent entendre que, non pas vous personnellement, mais votre organisme, ainsi que d'autres, êtes plus proches des intérêts des banques avec qui vous traitez régulièrement et que les clients de celles-ci ne vous intéressent guère tant qu'ils n'ont pas déposé une plainte. Que répondez-vous à cette critique? De quel secteur viennent la plupart de vos employés? Tentez de me convaincre que vous êtes vraiment un organisme indépendant et que vous cherchez le meilleur intérêt des consommateurs, sans essayer de faire plaisir à l'un de vos clients importants. Celui-ci a le choix entre votre organisme et un autre concurrent, et il est évident que vous voulez conserver ce client parce qu'il contribue à assurer votre survie. Comment faites-vous face à ce dilemme?
Mme Bradley : Je crois que la réponse tient tout simplement à la structure de notre organisation. C'est une société à but non lucratif. Nous n'avons pas besoin qu'une institution financière donnée reste membre de l'OSBI pour assurer notre survie.
Il est exact de dire que nous entretenons des relations soutenues avec nombre des institutions financières les plus importantes du Canada. Il est très important à nos yeux de conserver des relations de respect mutuel avec ces institutions. Lorsque j'assiste à des réunions de groupe avec des représentants de ces institutions, il arrive fréquemment que je sois confronté à l'hypothèse contraire à celle que vous venez de faire. Eux ont le sentiment que nous sommes parfois trop axés sur les intérêts des consommateurs. En un sens, il est peut-être très important pour notre organisme que les deux parties soient aussi insatisfaites l'une que l'autre.
Je crois que c'est une situation dans laquelle les ombudsmen des services financiers se retrouvent très souvent. Même si les parties sont traitées de façon juste et sur un pied d'égalité, le traitement accordé à chacune d'elles n'est pas le même. Comme j'ai déjà eu l'occasion de vous le dire, nous sommes confrontés à une asymétrie importante dans le domaine de l'information. Il est très important pour nous de traiter tout le monde sur un pied d'égalité, mais cela reste un traitement sur un pied d'égalité entre le consommateur et l'entreprise.
Les entreprises désapprouvent souvent notre approche. À chaque fois que nous formulons une recommandation à l'avantage du consommateur, cela implique que celle-ci va à l'encontre de la décision originelle de l'entreprise, et c'est un cas qui se présente souvent chez nous. Pourvu que nous justifiions clairement notre décision, l'entreprise l'acceptera. Au bout du compte, les institutions du secteur bancaire ont toujours accepté nos recommandations.
[Français]
Le sénateur Massicotte : J'ai une question à poser à M. Bilodeau, directeur à l'ACFC. Il y a beaucoup de débats depuis quelques années sur le rôle des banques et des courtiers et sur leurs obligations envers les consommateurs. Plusieurs pays ont adopté des lois qui dictent que les banques et les courtiers doivent agir d'une manière fiduciaire envers les clients, dans l'intérêt principal du client. Aujourd'hui, au Canada, il s'agit principalement d'une question de transparence et d'information. Pourquoi ne pas aller à l'étape finale, comme l'ont fait d'autres pays, en inscrivant dans la loi l'obligation fiduciaire envers les clients, de sorte que ceux-ci soient satisfaits et bien servis et qu'ils disposent de toute l'information possible, parce que les courtiers ont beaucoup d'expertise et d'information à leur transmettre?
M. Bilodeau : Je ne peux pas répondre pour le gouvernement quant aux décisions qu'il prend.
Le sénateur Massicotte : Qu'est-ce que vous nous recommanderiez?
M. Bilodeau : Je peux vous faire part de ce que nous faisons pour tenter de mettre davantage d'information à la disposition du consommateur, mais aussi pour nous assurer que les banques divulguent l'information nécessaire. Qu'il s'agisse de la loi qui est en vigueur à l'heure actuelle ou du cadre qui sera élaboré grâce au projet de loi C-29, nous devons divulguer davantage d'information aux consommateurs. En ce moment, cela s'applique à certains produits, mais si le projet de loi est adopté, cela s'appliquera à tous les produits, ce qui aura pour effet de mettre plus d'information à la disposition des consommateurs.
Deuxièmement, à l'agence, nous avons également un rôle à jouer quant à l'éducation du consommateur. Nous nous efforçons beaucoup de développer des ressources pour aider les consommateurs à en savoir plus sur les produits qu'ils consomment auprès des banques. Nous menons des campagnes au sujet des droits et des responsabilités, où nous tentons d'éduquer les consommateurs, par exemple, sur ce qu'il faut savoir lorsqu'il s'agit de prépayer une hypothèque, s'il faut calculer trois mois d'intérêt ou plus dépendamment du terme qui reste. Nous essayons d'améliorer les connaissances des consommateurs pour qu'ils soient mieux positionnés lorsqu'ils s'adressent à la banque.
[Traduction]
La sénatrice Ringuette : Je tiens tout particulièrement à remercier MM. Lawford et Schwartz de leurs exposés de ce matin. Et nous tournons en rond en ce sens que nous avons un code de déontologie qui n'a pas été appliqué, que l'Agence de la consommation en matière financière du Canada assure la surveillance des institutions financières, accorde des permis à des organismes tiers, les ombudsmen, fait rapport sur les plaintes, exerce des contrôles, fait de la formation et donne de l'information. C'est un cercle vicieux. Certains verraient là une relation presque incestueuse. Pour moi, je dirais qu'il s'agit d'un trio malsain d'accommodements.
Au bout du compte, ce sont les consommateurs canadiens qui ne sont pas vraiment bien protégés. Au cours des 10 années pendant lesquelles j'ai siégé à ce comité, je n'ai jamais vu un cas dans lequel l'Agence de la consommation en matière financière a eu des effets importants pour les consommateurs de services financiers.
Lors de la réunion d'hier de notre comité, j'ai fait remarquer que le BSIF semble jouer le rôle qui est le nôtre, mais je n'ai entendu aucun autre intervenant, à l'exception de MM. Lawford et Schwartz ce matin, défendre réellement les consommateurs contre les abus des banques.
Ce sont là, monsieur le président, mes commentaires et j'espère très sincèrement que, dans un avenir pas trop lointain, nous allons commencer à réviser la Loi sur les banques et assurer une protection réelle aux consommateurs par l'intermédiaire des divers organismes que nous avons entendus jusqu'à maintenant. Vous savez tous fort bien, et ce depuis passablement de temps, ce que je pense du sujet de notre discussion.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Le sénateur Tannas : Merci à tous d'être ici. J'ai quelques brèves questions incisives à vous poser. Je crois avoir bien compris comment chacun de vos organismes est financé, à l'exception de celui de M. Lawford. Seriez-vous assez aimable de nous expliquer d'où vient votre financement?
M. Lawford : Certainement. Aucun gouvernement ne contribue à notre financement de base. Nous travaillons pour des organismes de réglementation, comme la Commission de l'énergie de l'Ontario et le CRTC, qui ont pour politique de couvrir nos coups si nous représentons des groupes d'intérêts publics. Les montants que nous encaissons ainsi, qui représentent une partie importante de notre budget, nous permettent de faire d'autres travaux. C'est ainsi que nous avons les moyens de faire du travail dans le domaine des services financiers. Nous sommes aussi, à l'occasion, et trop rarement à notre goût, les bénéficiaires d'indemnités Cy-Près accordées à des groupes pour faire des travaux d'intérêt public à la suite de recours collectifs.
Le sénateur Tannas : J'ai posé la question à des fonctionnaires hier et j'aimerais avoir une confirmation officielle de l'industrie. Je vais donc la poser aussi à l'Association des banquiers canadiens.
Est-ce que vous voyez, dans ce projet de loi, dans les principes ou dans les règlements actuels, un conflit qui se poserait à vos membres du point de vue de l'accès pour ce qui est d'ouvrir un compte à quelqu'un, des règles d'accès, d'identification, et cetera, ainsi que des règles de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme?
M. Polci : En un mot, non. J'ajouterai, cependant, qu'à mon sens, l'industrie et le gouvernement prennent cette dynamique très au sérieux afin de trouver un juste équilibre. Mais la réponse à la question est non, je n'ai pas connaissance d'un conflit.
Le sénateur Black : Merci de votre présence, qui nous est très utile. J'aimerais comprendre la dichotomie que j'entends principalement, monsieur Lawford, entre ce que vous dites au sujet de la section 5, à savoir qu'elle ne suffit pas, ne faisons pas semblant, et d'autres témoignages, principalement de M. Polci et aussi de M. Bilodeau, qui disent qu'elle fait l'affaire, que c'est une grande amélioration. Est-ce que j'ai bien résumé la situation?
M. Polci : Tout à fait.
Le sénateur Black : Il y a donc cette dichotomie. Ce que j'aimerais comprendre, monsieur Lawford, c'est si vous- même ou votre organisation avez été consultés pendant la préparation de la section 5?
M. Lawford : Oui, nous avons été consultés.
Le sénateur Black : Avez-vous fait clairement connaître votre point de vue?
M. Lawford : Oui. Ce que nous avons, au fond, ici, sénateur Black, c'est un leurre pour les consommateurs. Quand il a commencé à en être question, on nous a promis un code de protection des consommateurs de produits et services financiers. Chemin faisant, le ministère des Finances a abandonné l'idée, et je ne sais pas si c'était au changement de gouvernement ou plus tôt ou plus tard. Mais la promesse était que nous aurions des droits importants en matière de consommation et qu'en échange, les banquiers auraient cette prépondérance fédérale. Ce que nous avons avec ce projet de loi, c'est uniquement la prépondérance fédérale, ce qui entraîne d'autres problèmes dont je vous ai parlé, mais pas d'amélioration sensible. Tout ce que nous faisons, c'est rassembler dans cette section les anciennes dispositions qui étaient éparpillées, mais rien de plus pour les consommateurs.
Le sénateur Black : Vous avez, à n'en pas douter, défendu énergiquement votre point de vue quand on vous a consulté. Pourquoi n'a-t-on pas retenu vos recommandations, selon vous?
M. Lawford : Selon moi, il est essentiel pour les banques de contrôler ceux qui leur disent comment mener leurs affaires. Elles n'ont pas envie que des problèmes de consommateurs viennent les empêcher de créer de nouveaux produits. Elles voient des codes de protection des consommateurs de produits et services financiers entrer en vigueur en Australie, en Irlande et, je crois, à Singapour, et ces codes constituent une ingérence indésirable, alors que nous croyons qu'ils améliorent globalement le marché et les banques.
Le sénateur Black : Donc, si le comité estimait qu'il serait bon d'avoir une charte des droits des consommateurs — je suis désolé, je n'ai pas votre vocabulaire, mais c'est l'idée —, pensez-vous qu'il serait bon que nous fassions observer dans notre rapport que ce serait un ajout utile, que la section 5 soit adoptée, mais que ce serait un progrès d'accepter votre suggestion?
M. Lawford : Absolument, parce que nous avons ce cadre qui est établi auquel il est possible d'ajouter quelque chose d'important, mais qui manque. Alors, oui.
Le sénateur Black : Tout en sachant qu'elle n'aurait pas force de loi?
M. Lawford : À vrai dire, le reconnaître à ce stade est probablement le mieux que nous puissions demander.
Le sénateur Black : Merci beaucoup.
Le sénateur Enverga : Je vous remercie de votre présence aujourd'hui. Je crois comprendre à certaines de vos observations qu'il s'agit plus de quelque chose de pure forme. On l'inscrit dans une loi pour que ce soit plus facile et c'est plus favorable aux consommateurs. À l'heure actuelle, nous avons l'ACFC, l'Association des banquiers canadiens, le Centre pour la défense de l'intérêt public et l'ombudsman des services bancaires. Ma question est la suivante : y a-t-il quelque chose dans la loi à l'heure actuelle qui vous donne les moyens de vous battre pour les consommateurs? Ou y a-t-il quelque chose que vous souhaitez nous voir y ajouter? La question s'adresse à tous.
M. Lawford : Je serai bref. Nous voulions plus, comme le sénateur Black le mentionnait, un code, par exemple, des articles plus substantiels pour s'attaquer à des problèmes particuliers comme le font les codes ailleurs dans le monde. À propos des principes qu'ont mentionnés plusieurs personnes, il est encourageant d'entendre l'ombudsman et l'ACFC déclarer qu'ils en tiendront compte dans leurs décisions. Ma crainte, finalement, est la suivante : si une banque décide que le code n'a pas vraiment force de loi et qu'elle n'en démord pas, est-ce que les principes suffiront sans changements sur le fond aux droits des consommateurs?
M. Schwartz : J'aimerais parler de quelque chose qui vient du rapport annuel de l'ACFC — corrigez-moi si je me trompe —, 4 236 cas ont fait l'objet d'une enquête et il a été conclu que seuls 345 relevaient du mandat de l'Agence, ce qui est révélateur à son sujet. Au cours de cette année, on a perçu zéro dollar — zéro dollar — en amendes. Par conséquent, regrouper ces dispositions dans un même article n'est qu'un changement superficiel. Je ne pense pas que la capacité d'agir au nom des consommateurs canadiens changera réellement, malgré sa volonté.
M. Bilodeau : Je ne connais pas ces chiffres par cœur et je m'en excuse. Nous prenons beaucoup d'appels de consommateurs, mais ce ne sont pas toujours des plaintes. Ils appellent aussi pour se renseigner sur notre mandat en ce qui concerne l'éducation financière. Ils sont disséminés. Nous supervisons les banques et réglons les problèmes qui se posent avec elles quand ils sont identifiés, quand nous trouvons des problèmes systémiques. Nous disposons de différents mécanismes pour corriger la non-conformité et nous les utilisons en fonction du problème qui nous est soumis lorsque nous faisons enquête.
La sénatrice Wallin : J'ai une question pour vous, monsieur Lawford, au sujet de votre référence au Code de protection des consommateurs et de la Banque centrale d'Irlande. Y est-il dit textuellement que les banques doivent agir avec la compétence, le soin et la diligence qui s'imposent?
M. Lawford : Mot pour mot.
La sénatrice Wallin : C'est la traduction.
Je m'adresse à l'Association des banquiers canadiens, est-ce si difficile? Ce libellé existe-t-il ailleurs?
M. Polci : Les principes inscrits dans ce nouveau régime de protection des consommateurs en matière financière sont peut-être formulés en d'autres termes, mais ils sont nouveaux et ils constituent le fondement du code à interpréter par la suite. Il faudra qu'ils ressortent à mesure que les choses avanceront.
Je dirai à propos de la référence à l'Irlande que nous pouvons examiner les régimes du monde entier, que vous, législateurs, y trouverez sans doute des éléments qui vous plaisent et que vous êtes libres dans vos discussions d'envisager de les adapter au contexte canadien, mais au bout du compte, je préférerai toujours la réglementation canadienne des services financiers à toute autre dans le monde. Il a été prouvé qu'elle est la meilleure du monde après la crise financière, y compris en ce qui concerne le régime de réglementation de la consommation.
Je dois dire en réponse à certains commentaires que je ne voudrais pas qu'on reste sur l'impression que notre régime n'est pas déjà un régime très solide qui protège les consommateurs. À entendre certains, on pourrait croire qu'il ne l'est peut-être pas. Je n'ai pas encore entendu d'exemples précis qui le démontreraient. Je pense que les consommateurs sont protégés, et les banques prennent très au sérieux cette responsabilité de traiter leurs consommateurs de manière équitable et appropriée. Toute leur réputation repose en fait dessus. Elles n'ont aucun intérêt à offrir à un consommateur le mauvais produit ou le mauvais service. Ce ne serait pas une bonne idée.
La sénatrice Wallin : C'est ce que je me disais. Si des gens se présentent, si vous intervenez comme médiateurs dans ces plaintes ou que vous les traitez, la plupart d'entre elles, d'après les statistiques, sont en faveur du consommateur. Les banques réagissent d'une manière ou d'une autre. Est-ce que ce n'est pas le but et le système ne fonctionne-t-il pas au fond?
M. Lawford : Pas à entendre les consommateurs. Ils s'adressent à l'ombudsman de la banque, puis aux chambres de l'OSBI ou au Bureau de l'Ombudsman des services bancaires, et ils finissent par se plaindre à nous parce qu'ils n'obtiennent pas gain de cause. Il y a toujours des gens dans cette situation, et je le comprends, mais un certain nombre de personnes ne connaissent même pas l'existence ou le travail des deux systèmes d'ombudsman. Beaucoup de gens ne connaissent pas leurs droits ou ne savent même pas qu'ils peuvent s'adresser au directeur de leur propre succursale et encore plus haut dans la hiérarchie. C'est en partie une question d'information, mais aussi en partie parce qu'ils n'ont pas de droit fondamental auquel se raccrocher et qu'il n'y a aucun code qu'ils puissent lire eux-mêmes. C'est très frustrant.
M. Schwartz : Je crois personnellement que le système bancaire canadien est excellent. Je suis d'accord avec vous. Comparé à d'autres systèmes, c'est probablement un des meilleurs. Ce qui ne veut pas dire qu'il est parfait à tous égards.
À mon avis, il est loin d'être satisfaisant, en particulier en ce qui concerne les consommateurs à faible revenu. Il suffit de lire les rapports que je mentionnais dans mes observations. John Stapleton a suivi des personnes à faible revenu dans des succursales bancaires. Il s'est tenu derrière elles pendant leur interaction avec le personnel de la banque et ce n'était pas beau. Je veux dire qu'on les traitait mal. Ils n'étaient pas traités avec respect. Ils n'obtenaient pas ce qu'ils voulaient.
Je pense que vous avez la possibilité dans la réglementation de demander au conseil d'administration de ces banques d'étudier empiriquement comment les clients à faible revenu sont traités. On peut les suivre avec des caméras corporelles pour voir comment se déroule l'interaction entre les employés et les consommateurs. S'il s'avère qu'ils sont bien traités, très bien. Alors, je retire mes plaintes. Mais voyons ces résultats obtenus de manière empirique.
La sénatrice Wallin : Dans cette évaluation, quelqu'un se tenait littéralement debout derrière eux à la banque?
M. Schwartz : Oui. Vous pouvez lire le rapport en ligne.
La sénatrice Wallin : Combien de personnes ont été suivies?
M. Schwartz : Un petit nombre. Une vingtaine, je pense. Ce n'est pas une grande étude, mais j'encouragerais les banques à en faire une.
La sénatrice Wallin : Je vous remercie.
Le sénateur Wetston : En préambule à mes observations, je tiens à préciser que je connais Mme Bradley. Je présidais la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario avant de venir au Sénat. J'ai passé beaucoup de temps avec l'OSBI, l'ABC et le Centre pour la défense de l'intérêt public. À un moment dans ma carrière, j'étais chef du contentieux à l'Association des consommateurs du Canada. Cela remonte à si loin que je m'en souviens à peine.
Le vice-président : Nous sommes heureux de vous avoir parmi nous.
Le sénateur Wetston : J'ai passé beaucoup de temps à faire ce que vous faites aujourd'hui, monsieur Lawford.
Je poserais volontiers une simple question, mais la réponse est plus compliquée. Je ne vais pas entrer dans des questions constitutionnelles. Nous menons cette bataille depuis un moment dans l'industrie des valeurs mobilières, comme vous le savez, avec la décision de la Cour suprême du Canada il y a plusieurs années. Nous nous efforçons de trouver un moyen de réduire la fragmentation de la protection des consommateurs ou des investisseurs.
J'ai deux questions et peut-être pourrions-nous parler plus longuement en dehors de la réunion du comité.
Faites-vous une distinction entre protection des consommateurs et protection des investisseurs? C'est ma première question. Je souhaiterais, si possible, avoir une réponse de tous les témoins.
Deuxièmement, j'aimerais vous demander votre point de vue sur la fragmentation. Au Canada, plus de 30 organismes s'occupent de différents aspects des marchés financiers. Certes, certains sont provinciaux, d'autres fédéraux. Il suffit de penser aux grands organismes, comme l'OSBI, ou à de plus petits organismes, comme, peut-être, l'ACFC, ou encore à toutes les commissions des valeurs mobilières et à tous les organismes qui s'occupent des produits d'assurance et d'autres domaines. Il y a beaucoup de fragmentation dans ce pays.
La difficulté en matière de protection des consommateurs est donc plus grande que dans un pays comme l'Irlande. Quant à l'Australie, voilà plusieurs années qu'elle a surmonté ses problèmes constitutionnels et qu'elle peut agir plus facilement au niveau fédéral.
Pour ce qui est des consommateurs, ce n'est pas une mince affaire. On a beaucoup fait pour protéger les consommateurs ou les investisseurs. Si vous allez sur le site web de la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario, la CVMO, vous verrez une section fantastique intitulée « Gérez mieux votre argent ». Si aucun de vous ne l'a vue, vous devriez la consulter. C'est formidable. On y trouve d'excellents renseignements à l'intention des investisseurs, je crois.
Est-ce que ce code, en particulier en ce qui concerne la section 5, aide à réduire la fragmentation et permet aux consommateurs d'être mieux informés et d'être plus en mesure de faire entendre leurs griefs, que ce soit par un service d'ombudsman ou directement auprès d'une banque ou d'un courtier en valeurs mobilières? Je vous pose la question. Les banques offrent des services bancaires et de placement. Il est très difficile de regarder une banque et de dire : que faites-vous? Où fournissez-vous ce service? Comment protégez-vous vos consommateurs et vos investisseurs dans le contexte de cette recommandation de code?
La question est donc d'ordre général : est-ce que la fragmentation aide les consommateurs et les investisseurs au Canada ou empêche de les aider?
M. Lawford : J'aimerais répondre en premier. La fragmentation n'aide pas les consommateurs. La première étape qui consiste à réunir tous les règlements au même endroit n'est pas mauvaise en soi, mais ce n'est qu'une première étape.
Ce qui aiderait pour réduire la fragmentation, ce serait en plus de cela des droits des consommateurs plus importants. Parce qu'à l'heure actuelle, les provinces se sentent poussées, surtout le Québec en raison de son système juridique, à adopter de plus en plus de lois d'application générale fondées sur la protection des consommateurs en vertu du droit de propriété et des droits civils, ce qu'elles peuvent continuer de faire et qu'elles persisteront à faire jusqu'à la nuit des temps si les consommateurs ne sont pas protégés. Parce que les consommateurs continueront de frapper aux portes des provinces pour se plaindre que leurs droits sont insuffisants et pour réclamer qu'elles les aident parce que le fédéral ne le fait pas. Tel est le problème quand on n'améliore pas la situation en ajoutant à ce projet de loi des droits importants pour les consommateurs et en se contentant d'y réunir toutes les dispositions actuelles qui, comme vous l'avez entendu, ne sont pas suffisantes à mon sens.
C'est ainsi que je réglerais la question de la fragmentation. Améliorez la protection et les provinces n'auront pas le sentiment de devoir intervenir.
Mme Bradley : Je ferai une observation à ce sujet aussi. Je pense que la fragmentation est un énorme problème pour les consommateurs au Canada. J'ai mentionné nos statistiques plus tôt. Nous traitons des milliers et des milliers de demandes qui ne deviennent jamais des cas de l'OSBI parce qu'il s'agit généralement de questions qui ne relèvent pas de notre mandat. Nous faisons de notre mieux pour réorienter les consommateurs vers un organisme approprié qui pourra sans doute s'occuper de leur plainte, mais les consommateurs sont très peu informés, selon moi, au sujet de tout l'éventail d'organismes de réglementation, des services d'ombudsman, du règlement des différends, et cetera, qui peuvent être mis à contribution pour régler leurs problèmes.
Je pense qu'il y a une fragmentation entre les services bancaires et les investissements. Vous avez posé la question au sujet des consommateurs et des investisseurs. Vous savez, j'utilise ces termes de manière interchangeable en ce qui concerne les valeurs mobilières parce que l'investisseur investit dans une entreprise, mais ce qu'il fait normalement, c'est acheter un produit ou quelque chose dont il espère que la valeur augmentera. Beaucoup de produits de placement sont vendus comme des produits.
Dans le cas du consommateur, il s'adresse à une entreprise. Il se peut que le panneau dehors dise « planification de la retraite » et « planification financière », et que les personnes dans cet édifice soient des agents d'assurance agréés. Il se peut qu'elles ne soient autorisées qu'à vendre des fonds communs de placement ou toute sorte d'autres types de produits ou de placements financiers. Il se peut qu'elles n'aient aucune de ces autorisations et qu'elles n'offrent que des conseils d'ordre général. Mais pour le consommateur, cette information est complètement invisible et inaccessible.
Cela pose un problème très important que ce projet de loi ne résout pas à mon sens. Comme le mentionnait M. Lawford, il regroupe certaines choses, ce qui n'est pas mauvais en soi, mais je ne pense pas qu'il règle certains des problèmes importants qui existent.
M. Polci : Félicitations pour votre nomination.
Du point de vue des services bancaires, il est évident que la fragmentation du régime de réglementation est préoccupante. La principale raison de notre soutien au projet de loi C-29 et au cadre de protection des consommateurs de produits financiers, c'est qu'il est clair. Il dit que telles sont les règles qui s'appliquent aux produits et aux services bancaires. Selon nous, il est bon de dire les choses aussi simplement.
Je suis d'accord avec les observations en ce qui concerne le consommateur par opposition à l'investisseur. Les banques examinent leurs clients. C'est là qu'on se demande qui réglemente la question juridique en coulisse. Je suis donc tout à fait d'accord. En franchissant le seuil de la banque, le client est à la fois consommateur et investisseur.
M. Bilodeau : Je ne répondrai pas directement au sujet de la fragmentation, mais je dirai que nous travaillons avec les organismes de réglementation provinciaux et territoriaux dans cet espace et que nous continuerons de le faire si le projet de loi C-29 est adopté.
Le vice-président : Je vous remercie. Nous en sommes aux premières étapes de ce projet de loi. Comme vous le savez, nous faisons une étude préliminaire afin d'être prêts quand il nous sera soumis. Il n'a pas encore été communiqué au Sénat.
On a demandé au comité d'examiner cinq sections. Nous n'avons examiné que la section 5, et je vous remercie de vos commentaires, de votre aide et de vos conseils à cet égard en ce qui concerne la protection des consommateurs de produits financiers.
Les sections 3 et 4 sont elles aussi assez courtes en nombre de mots et en espace qu'elles occupent dans le projet de loi. La section 3 concerne la Loi canadienne sur l'épargne-études. Monsieur Schwartz, pourquoi est-ce que je ne m'adresse pas à vous? Avez-vous des observations sur cette section?
M. Schwartz : Je n'en ai pas. Je ne suis pas un spécialiste, mais je ne vois pas la raison d'être de la section 3, si ce n'est qu'elle semble tout simplement refléter un changement dans la structure des programmes. Elle renomme différentes parties du projet de loi. Je n'y vois personnellement aucun changement important. Or, des changements importants s'imposent, ce à quoi la section 3 ne répond pas.
Le vice-président : Vous n'en voyez pas. Très bien.
Ce que nous cherchons à déterminer à cette étape, c'est s'il y a une raison, selon vous, d'applaudir ou d'être inquiet au sujet de ces sections. Vous nous avez donné votre avis sur la section 5. La section 3, que M. Schwartz vient de commenter, porte sur la Loi canadienne sur l'épargne-études. La section 4 modifie la Loi canadienne sur l'épargne- invalidité. Vous-mêmes ou vos collègues ici présents, connaissez-vous ce domaine particulier?
M. Schwartz : Là encore, pour moi, c'est le même genre de chose. Il n'y a aucun changement important. Il s'agit simplement d'un changement de libellé nécessaire.
Le vice-président : Puisqu'il ne semble y avoir aucun autre commentaire, il me revient, au nom du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, de vous remercier de votre présence et de nous avoir aidés à comprendre l'incidence sur l'industrie de ces dispositions particulières.
Mesdames et messieurs les sénateurs, j'aimerais souligner que nous avons reçu une lettre de la Monnaie royale canadienne. Au sujet d'une des sections, la section 6. Nous avons donc cette lettre. Des questions ont été posées hier sur la monnaie, et nous croyons comprendre qu'elle prépare un suivi à ce propos. Elle ne pouvait être représentée ici, mais elle nous a communiqué sa position.
Nous avons, toutefois, trois représentants de la Banque du Canada, ce qui est très bien parce que l'autre section que nous examinons, à savoir la section 7, concerne la banque. Je suis heureux que vous puissiez être présents sans grand préavis. Cela nous aide beaucoup. Merci.
[Français]
Madame Couture, voulez-vous prendre la parole pour le groupe?
Thérèse Couture, directrice, Département de la gestion financière et des opérations bancaires, Banque du Canada : Certainement.
Monsieur le vice-président, distingués membres du comité, bonjour. Je m'appelle Thérèse Couture et je suis directrice au Département de la gestion financière et des opérations bancaires de la Banque du Canada.
Je suis accompagnée ce matin de Toni Gravelle, chef de notre Département des marchés financiers, et d'Andrew Kidd, avocat-conseil au Département des services à la haute direction et des services juridiques.
[Traduction]
Nous vous remercions de nous donner l'occasion de parler des dispositions de la section 7 de la partie 4 du projet de loi C-29 qui concernent la Banque du Canada. Il s'agit plus particulièrement des articles 140, 142, 143 et 144 du projet de loi C-29.
La Banque du Canada est favorable à ces dispositions, qui concernent son mandat en tant qu'agent financier du gouvernement du Canada et son rôle, qui est de promouvoir la stabilité du système financier canadien. Elles ont un coût minime, car elles renvoient à des types d'activités que la Banque du Canada effectue à l'heure actuelle.
La première disposition, l'article 143, habilite la Banque du Canada à gérer les prêts que le gouvernement consent aux sociétés d'État. Il s'agit d'activités de prêt en cours destinées à répondre aux besoins financiers de ces sociétés, et le ministère des Finances gère officiellement les éléments opérationnels de cette activité depuis la création du programme en 2008.
La modification proposée facilitera le transfert des éléments opérationnels de cette activité à la Banque du Canada. Il faudra modifier l'article 24 de la Loi sur la Banque du Canada afin d'y ajouter le libellé voulu après le paragraphe (2).
Une deuxième disposition du projet de loi C-29, l'article 140, qui n'oblige pas à modifier la Loi sur la Banque du Canada, concerne les opérations quotidiennes que la banque effectue au nom du gouvernement du Canada, c'est-à-dire les prêts sur les soldes de trésorerie excédentaires du receveur général. Ces opérations visent à aider le gouvernement à gérer le coût de l'encaisse pour couvrir les dépenses. La modification en question clarifie les pouvoirs en ce qui concerne les opérations existantes en habilitant explicitement le ministre des Finances à les effectuer.
La dernière disposition est celle de l'article 142. Elle va de pair avec l'article 144, qui révise la Loi sur la Société canadienne d'hypothèques et de logement et autorise la Banque du Canada à offrir des services de garde de titres à la SCHL. Cela correspond au rôle de la Banque du Canada pour ce qui est de promouvoir la stabilité du système financier canadien et aux services qu'elle offre déjà à un certain nombre de clients.
Les services de garde de titres offerts par la banque aideront la SCHL dans sa gestion prudente des risques en proposant une option fiable qui facilitera un accès rapide et discret à des liquidités dans certaines circonstances exceptionnelles, avec un minimum de risques pour le système financier. Afin de faciliter cet accès, la SCHL transférera à la banque une partie des titres des portefeuilles de placement qu'elle détient actuellement dans le secteur privé.
Une disposition similaire a été ajoutée à la Loi sur la Banque du Canada en 2014 pour permettre d'offrir ces services à la Société d'assurance-dépôts du Canada. Nous modifions en fait la même disposition, à savoir le paragraphe 18(m.1) de la Loi sur la Banque du Canada.
À l'heure actuelle, la banque peut, en vertu de la loi, être le dépositaire de titres de banques centrales étrangères, de certaines institutions financières internationales et de la SADC, mais pas de la SCHL. La modification proposée permet à la banque d'être dépositaire de titres de la SCHL. Comme la banque offre actuellement ces types de services à d'autres clients, les coûts seront minimes pour offrir ces mêmes services à la SCHL.
La banque peut aussi, aux termes de la loi actuelle, accepter des dépôts du gouvernement et de ses agents. Elle peut verser des intérêts sur ces dépôts, mais elle n'est pas habilitée pour l'instant à en faire autant sur ceux de la SCHL ou d'autres agents du gouvernement, à l'exception de la SADC.
Il ne serait pas logique d'un point de vue économique pour la SCHL de déposer des fonds auprès d'une banque qui ne verse pas d'intérêts. Les modifications à la Loi sur la Société canadienne d'hypothèques et de logement prévues à l'article 144 du projet de loi C-29 permettront à la banque, avec le paragraphe 18o) de la Loi sur la Banque du Canada, de verser des intérêts sur les dépôts de la SCHL. Là encore, cela ressemble à la révision de la Loi sur la Banque du Canada faite en 2014 pour la Société d'assurance-dépôts du Canada.
Je serai heureuse de parler plus en détail de ces modifications et de répondre à vos questions. Merci.
Le vice-président : Merci beaucoup, madame Couture, d'avoir passé ces articles en revue et de nous avoir expliqué ce que vous essayez à faire par rapport à chacun d'eux.
Nous avions une question hier et je la répéterai aujourd'hui. Y a-t-il quelque chose dans le regroupement à la section 7 de la gestion des fonds, des modifications à la Loi sur la gestion des finances publiques et je suppose aussi des modifications à d'autres lois, y compris celle sur la SCHL, qui retire du pouvoir au Parlement ou lui enlève de sa responsabilité pour ce qui est de faire certaines choses?
Mme Couture : En ce qui concerne la SCHL, le projet de loi ne retire aucun pouvoir au Parlement, puisqu'il s'agit d'autoriser la Banque du Canada à être dépositaire d'une partie des titres détenus par la SCHL. À l'heure actuelle, la SCHL a un dépositaire dans le secteur privé. Nous serions simplement une autre option, un outil, pour accéder à des liquidités, ce qui fait partie des activités de gestion prudente des risques de la SCHL. Il s'agit d'une option supplémentaire qu'offre la banque.
Toni Gravelle, chef, Département des marchés financiers, Banque du Canada : De même, nous clarifions à certains égards des activités et le pouvoir d'exercer des activités qui se font déjà. Il s'agit de modifications très techniques. Rien ne change en pratique pour ce qui est de qui détient l'autorité, par exemple, sur le programme des sociétés d'État. Le ministre détient tous les pouvoirs. Aux termes de la Loi sur la gestion des finances publiques, il a tous les pouvoirs de fixer les paramètres, les limites et diverses autres choses. Rien ne change à cet égard. On précise seulement qu'il délègue une partie de l'activité à la Banque du Canada.
Le vice-président : Comme vous le savez, ce sont les aspects relatifs aux emprunts qui ont suscité cette question il y a quelques années. Le Parlement s'est toujours prononcé sur l'octroi du pouvoir d'emprunter, puis on lui a enlevé cette prérogative qui est devenue ministérielle, au mécontentement de certains parlementaires parce que la décision n'avait pas été vraiment réfléchie. Nous voulons seulement nous assurer qu'il n'y ait pas quelque chose qui nous échappe ici.
M. Gravelle : Pas que je sache.
Le vice-président : Vous ne dites pas que vous sachiez, et c'est rassurant.
La sénatrice Wallin : J'ai juste une question rapide. Nous avons eu une brève conversation avec le gouverneur de la banque. Ce changement semble entraîner des relations plus étroites, de sorte qu'en plus d'accéder à des liquidités et ainsi de suite, il y aura une fusion de la recherche et des évaluations de ce qui se passe plus généralement sur le plan économique. Est-ce qu'il faut y voir plus que cela? Je sais que nous nous penchons juste sur cet aspect, mais cela semblait être la suggestion.
Mme Couture : Non. La disposition concerne vraiment un service de garde de titres, que nous offrons déjà à différents clients.
La sénatrice Wallin : Ce n'est donc rien de nouveau de ce point de vue?
Mme Couture : C'est exact.
M. Gravelle : Il s'agit, en fait, d'une question technique sur les services bancaires. Nous avons des discussions stratégiques.
La sénatrice Wallin : D'accord. Je vous remercie.
Le sénateur Wetston : Bienvenue, monsieur Gravelle. Nous avons travaillé ensemble à la Banque du Canada quand j'étais à la CVMO. C'est donc un plaisir tout court de vous voir.
J'ai une question rapide au sujet de la SCHL. Est-ce que cela veut dire que vous excluriez des services de garde de titres privés ou que ces services ne seraient plus disponibles pour les fonds de la SCHL? Est-ce purement une question de coût? Faites-vous des économies? Quel est le but de l'opération? Il faut des services de garde de titres privés; ils sont très importants pour les marchés, de toute évidence. Je me demande donc si c'est là la justification.
Ensuite, qu'allez-vous faire de l'argent? Vous allez le placer, j'espère. Nous sommes dans une conjoncture de faibles taux d'intérêt pour un moment, à moins que la Banque du Canada soit au courant de quelque chose dont je ne sais pas. Continueriez-vous à effectuer des transactions similaires à celles que vous effectuez avec les fonds dont vous êtes dépositaire en ce moment?
Mme Couture : Tout d'abord, la SCHL maintiendra ses ententes actuelles avec son dépositaire du secteur privé, ainsi que ses facilités de liquidités auprès du secteur privé. Ce que nous offrons, c'est une autre option à ajouter à sa panoplie pour une gestion prudente des risques et pour renforcer cette activité de gestion des risques. Le secteur privé continuera de faire ce qu'il offre aujourd'hui à la SCHL. Nous proposerons des services de garde pour une partie des titres, qui seront transférés du secteur privé à la Banque du Canada. Nous donnerons également accès à des liquidités dans des circonstances exceptionnelles où la SCHL doit pouvoir accéder rapidement à des liquidités, en toute discrétion, pour remplir ses obligations.
Pour ce qui est du coût, il n'intervient pas dans ce choix. La Banque du Canada offre des services bancaires et de garde de titres en appui à la stabilité du système financier, et là est la justification. Le coût, comme je le mentionnais, est tout à fait minime parce que les processus, le personnel, la capacité et les services sont déjà en place pour de nombreux autres clients. Nous facturons cependant des frais juste pour recouvrer nos coûts, ce qui ne nous rapporte donc rien de plus. J'espère avoir répondu à votre question.
Le sénateur Wetston : Vous n'avez pas dit ce que vous allez faire des fonds.
Mme Couture : Vous voulez dire le dépôt ou les titres?
Le sénateur Wetston : Je suis désolé, je voulais dire les titres.
Mme Couture : Les titres sont conservés en dépôt. Nous n'en retirerons donc pas d'argent. Ils ne nous appartiennent pas; ils restent la propriété de la SCHL. Tout versement, comme le paiement d'intérêts, ira sur le compte de la SCHL.
Le sénateur Enverga : Je pense que ma première question est simple. Pourquoi le gouverneur en conseil cherche-t-il à pouvoir autoriser le ministre des Finances, sous réserve de certaines conditions à préciser, à conclure un contrat ou une entente de nature financière aux conditions qu'il estime nécessaires? Ne l'avez-vous pas déjà fait? Pourquoi le demandez-vous maintenant?
Mme Couture : Pouvez-vous préciser votre question?
Le sénateur Enverga : Le gouverneur en conseil demande à pouvoir autoriser le ministre des Finances, sous réserve de certaines conditions à préciser, à conclure un contrat ou une entente de nature financière aux conditions qu'il estime nécessaires pour la gestion des risques liés à la situation financière du gouvernement du Canada. Cela fait-il partie de votre mandat?
M. Gravelle : Pouvez-vous préciser à quelle partie de la section vous faites référence?
Le sénateur Enverga : Je parle du paragraphe 42.3(5). Qui l'emporte, le 42.5 ou le 42.3?
Le vice-président : On parle de la Loi sur la gestion des finances publiques.
M. Gravelle : C'est en rapport avec le receveur général.
Il s'agit, en fait, d'une réponse du ministère des Finances. Je crois comprendre que cela concerne la Loi sur la gestion des finances publiques, et nous en savons plus sur les changements à la Loi sur la Banque du Canada et sur les raisons qui les motivent. Il s'agit d'une clarification de pouvoirs qui sont déjà ceux du ministre. Ainsi, on précise que le ministre a des pouvoirs parallèles en plus ceux qu'il a déjà en ce qui a trait aux emprunts et au prêt de certains actifs. À certains égards, on est plus précis sur ce qu'il peut ou ne peut pas faire en définitive. À vrai dire, je m'en remettrais à nos collègues du ministère des Finances pour en savoir plus sur ce qui motive cette demande.
Le sénateur Enverga : Je penserais que c'est parce que vous le faites déjà.
M. Gravelle : En effet. En vertu de notre loi, nous agissons en qualité d'agent financier du gouvernement du Canada. Dans différentes parties des activités d'agent financier, nous faisons ce type de travail pour lui. Étant donné que nous sommes le banquier du gouvernement du Canada, cela entre déjà naturellement dans nos activités.
Je crois savoir que le ministère des Finances essayait de clarifier les pouvoirs bien circonscrits du ministre pour ce qui est des prêts. C'est sans incidence sur notre loi parce que nous faisons déjà des opérations bancaires pour le gouvernement et que cela entre dans les opérations bancaires naturelles. Nous gérons la trésorerie pour le gouvernement du Canada.
Le sénateur Tannas : Je voulais seulement clarifier quelque chose. Je suis certain que c'est juste que je ne comprends pas, mais vous avez répondu au sénateur Wetston que vous allez conserver des actifs. Par ailleurs, vous pourriez aussi fournir des liquidités dans des circonstances exceptionnelles. Pour ce qui est de garder des actifs, y a-t-il un arrangement collatéral entre les deux? Est-ce en partie pour cette raison que vous acceptez de conserver des actifs? Est- ce que c'est pour vous protéger si vous devez avancer des fonds?
Mme Couture : C'est exact. En détenant ces titres en garde à la Banque du Canada, nous pouvons immédiatement en prendre propriété en vertu d'une convention d'achat et de revente. En achetant ces actifs, nous transférons les fonds et ces actifs sous-jacents constituent le nantissement de la transaction.
M. Gravelle : D'un point de vue économique, il s'agit d'un prêt garanti.
Le sénateur Tannas : Compris. Ce serait donc une partie de la justification pour ce qui est de devenir gardien. Vous voulez que quelqu'un les donne en garantie et vous les conservez.
Ms. Couture : C'est exact.
Le sénateur Tannas : Nous avons également entendu hier que vous alliez fournir un service où vous récupéreriez l'excédent de trésorerie qui serait intégré dans vos activités au jour le jour, dans la mesure où vous en avez. Qu'en est-il? Je pense qu'on nous a dit cela hier, monsieur le président. Ça ne me revient pas. Est-ce que la bonne gestion des excès de trésorerie de certains de vos clients ferait aussi partie du service?
Mme Couture : Les services de garde de titres s'accompagnent toujours d'un compte de dépôt à vue et le client peut choisir le niveau de liquidité qu'il veut y maintenir. Par exemple, comme je l'ai mentionné plus tôt, quand des paiements d'intérêts arrivent, nous les déposons sur le compte du client, mais il lui appartient de déterminer le montant en espèces qu'il veut laisser à la Banque du Canada.
Le sénateur Tannas : Et il est payé pour cela, n'est-ce pas?
Mme Couture : Nous rémunérons le solde en intérêt.
Le vice-président : Je remercie beaucoup les représentants de la Banque du Canada. Nous vous sommes reconnaissants de nous avoir aidés à comprendre la section 7. Merci de l'excellent travail que vous faites au service du Canada.
Nous sommes prêts à passer à huis clos pour parler du rapport.
(La séance se poursuit à huis clos.)