Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Banques et du commerce
Fascicule no 47 - Témoignages du 1er novembre 2018
OTTAWA, le jeudi 1er novembre 2018
Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce se réunit aujourd’hui, à 10 h 32, pour étudier, afin d’en faire rapport, les questions relatives à la gestion du risque systémique dans le système financier, au pays et dans le monde, et à huis clos, pour examiner un projet d’ordre du jour (travaux futurs).
Le sénateur Douglas Black (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Bonjour et bienvenue, chers collègues et membres du grand public qui suivent aujourd’hui les délibérations du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce ici dans la salle ou sur le Web. Je m’appelle Doug Black, je suis un sénateur de l’Alberta et j’ai le privilège de présider ce comité. Je demanderais à mes collègues de se présenter.
La sénatrice Wallin : Pamela Wallin, de la Saskatchewan.
Le sénateur C. Deacon : Colin Deacon, de la Nouvelle-Écosse.
Le sénateur Day : Joseph Day, du Nouveau-Brunswick.
[Français]
La sénatrice Verner : Josée Verner, du Québec.
[Traduction]
Le sénateur Tannas : Scott Tannas, de l’Alberta.
Le sénateur Wetston : Howard Wetston, de l’Ontario.
Le sénateur Tkachuk : David Tkachuk, de la Saskatchewan.
Le président : Nous sommes secondés de façon très compétente par notre greffière et nos analystes.
Le 17 octobre 2017, le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce a été autorisé à mener une étude sur les questions relatives à la gestion du risque systémique dans le système financier, au pays et dans le monde. Étant donné que la crise financière mondiale remonte à 10 ans, le comité est intéressé à se renseigner sur les mesures qui ont été prises depuis pour gérer le risque systémique dans le secteur financier. Il est aussi intéressé, bien sûr, à connaître le point de vue des témoins sur les principaux risques systémiques dans le système aujourd’hui.
Nous tenons aujourd’hui notre troisième réunion à ce sujet. Je suis ravi d’accueillir Kevan Cowan, chef de la direction, Organisme de mise en place de l’Autorité des marchés des capitaux. Monsieur Cowan, merci beaucoup pour le temps que vous nous accordez aujourd’hui. Nous nous réjouissons à la perspective d’entendre votre exposé et de vous poser ensuite des questions.
Kevan Cowan, chef de la direction, Organisme de mise en place de l’Autorité des marchés des capitaux : Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, bonjour. C’est un réel plaisir pour moi d’être ici. Je me réjouis à la perspective de vous parler du régime proposé que je représente.
Vous vous demandez peut-être qui je suis et ce que je représente. Il m’arrive d’aimer plaisanter à propos de ce projet. Je me plais à l’appeler « la série C », car à peu près tous les organismes qui y participent et toutes les mesures législatives commencent par « C ». Je vais essayer de ne pas m’empêtrer dans des choses comme le nom des lois, la Loi sur les marchés des capitaux, la loi qui régit l’autorité de réglementation des marchés des capitaux, la Loi sur la stabilité des marchés des capitaux et le Régime coopératif en matière de réglementation des marchés des capitaux, et vraiment me concentrer sur l’essentiel.
Je suis le chef de la direction de l’Organisme de mise en place de l’Autorité des marchés des capitaux, qui est l’autorité intérimaire et le précurseur de l’organisme canadien de réglementation des valeurs mobilières proposé, l’Autorité de réglementation des marchés des capitaux.
Contrairement aux autres personnes qui ont témoigné et dont le travail cadre parfaitement dans votre mandat d’examiner les mesures qui ont été prises pour contrer le risque systémique au cours des 10 dernières années, je représente un régime proposé. En ce sens, je suis un peu différent.
Par l’intermédiaire des différentes lois que j’ai mentionnées, l’ARMC, l’Autorité de réglementation des marchés des capitaux, s’attache principalement à trois secteurs. Le premier est l’organisme coopératif en matière de réglementation des valeurs mobilières parmi les provinces participantes; le deuxième est un plan rehaussé et exhaustif concernant l’application; et le troisième, qui est le plus à propos dans le contexte de la réunion d’aujourd’hui, est le risque systémique.
En général, c’est un projet excitant qui comble une lacune actuelle du régime de réglementation financière canadien, en particulier au chapitre du risque systémique.
Je vais d’abord vous donner un aperçu du Régime coopératif en matière de réglementation des marchés des capitaux. Il s’agit d’une initiative de plusieurs gouvernements — dans ce cas, ceux de la Colombie-Britannique, du Nouveau-Brunswick, de l’Ontario, de l’Île-du-Prince-Édouard, de la Saskatchewan et du Yukon, de concert avec celui du Canada — qui sont résolus à instaurer un régime coopératif pour assurer une meilleure réglementation au profit des entreprises et des investisseurs canadiens.
Je vais aussi mentionner que dans son budget le plus récent, le gouvernement de la Nouvelle-Écosse a manifesté son intention de souscrire à l’initiative.
Le document constitutif de cette initiative est un protocole d’entente public en vertu duquel toutes les provinces participantes ont énoncé les conditions et les objectifs. Je m’empresse d’ajouter que le protocole d’entente invite les provinces et les territoires non participants à y souscrire volontairement.
Il s’agit d’une approche législative coopérative. Les deux éléments les plus importants de la mesure législative sont la Loi sur les marchés des capitaux, qui est une proposition de loi sur les valeurs mobilières uniforme qui serait adoptée par chaque province et territoire participant.
Le deuxième instrument législatif principal, et celui qui se rapporte le plus à la discussion d’aujourd’hui, est la Loi sur la stabilité des marchés des capitaux, qui s’attache au risque systémique, et à sa loi fédérale complémentaire pour gérer le risque systémique et l’application en matière de droit pénal au Canada et, surtout, à l’échelle nationale.
La mesure législative sera administrée conjointement par l’Autorité de réglementation des marchés des capitaux, l’ARMC, dont la structure est très semblable à celle de bien des commissions des valeurs mobilières d’aujourd’hui. À titre d’exemple, c’est un organe fédéral-provincial-territorial indépendant, autofinancé et gouverné par un conseil d’administration. Il doit rendre des comptes à un conseil des ministres des provinces participantes. J’en parlerai plus en détail dans un instant.
Il aura un bureau dans chacune des administrations participantes et suivra un seul règlement, si bien que son application dans chaque province sera uniforme et assortie d’une interface réglementaire pour assurer un fonctionnement sans heurt avec les provinces non participantes.
L’interface, notamment, définira les façons par lesquelles les provinces coopéreront avec celles qui ne font pas partie du système au chapitre de la réglementation des valeurs mobilières. Ensuite, il y a la Loi sur la stabilité des marchés des capitaux qui, encore une fois, est un instrument d’évaluation du risque systémique national qui s’intéresse aux diverses façons dont les provinces collaboreront et travailleront ensemble. Le calendrier de lancement de l’ARMC fait actuellement l’objet d’un examen. La Cour suprême du Canada a été saisie de l’affaire. Nous nous attendons à ce qu’elle rende une décision dans les prochaines semaines. Si l’un de vous a des conseils sur la manière de faire avancer les choses de l’autre côté de la rue, prière de m’en faire part.
Leah Anderson, du ministère des Finances, a témoigné devant vous la semaine dernière. Elle a relevé trois points essentiels qui figurent parmi les objectifs du régime coopératif : premièrement, l’efficacité; deuxièmement, un accord de coopération plus exhaustif; et troisièmement, le risque systémique.
Je vais fournir de plus amples détails. Le régime coopératif rehaussera la capacité de cerner et de gérer le risque systémique dans les marchés des capitaux à l’échelle nationale. Encore une fois, je vais y revenir, mais c’est là où nous accusons des lacunes aujourd’hui. Il favorisera une meilleure efficacité et compétitivité à l’échelle internationale des marchés des capitaux, et il facilitera la mobilisation de capitaux auprès d’investisseurs tout en leur offrant une protection accrue.
Le protocole d’entente, qui énonce les objectifs originaux, fait allusion tant à l’efficacité des marchés des capitaux et à la mobilisation des capitaux des entreprises qu’à la protection des investisseurs. Je sais que vos témoins de la semaine dernière ont dit que le concept de la mise en balance du risque, de l’innovation et de la réglementation par rapport à la compétitivité est toujours prioritaire et essentiel dans le cadre de ce plan. Il permettra une application plus efficace de mesures pour contrer les cas d’inconduite et améliorera la coordination avec les organismes d’application de la loi et les autorités responsables des poursuites.
Enfin, en unissant les voix des administrations participantes, on permettra au Canada de jouer un rôle plus influent dans les initiatives de réglementation des marchés des capitaux internationaux.
Le Canada est le seul pays occidental membre de l’OCDE sans organisme national de réglementation des valeurs mobilières.
La structure de gouvernance de l’ARMC est dominée par un conseil des ministres auquel siège un ministre de chaque administration participante. Un conseil d’administration indépendant formé d’experts généralement représentatifs des régions participantes lui rend des comptes. Sous cet échelon se trouvent deux divisions : une division de la réglementation qui se charge des opérations quotidiennes de la réglementation des valeurs mobilières auxquelles vous vous attendriez, ainsi qu’une division ou un tribunal d’arbitrage qui tient des audiences concernant l’application de la réglementation en matière de valeurs mobilières.
Deux aspects de la structure de gouvernance représentent une évolution importante de la gouvernance des marchés des capitaux. La première est la séparation entre le directeur du conseil d’administration et le PDG de la division de la réglementation. C’est une chose que nous ne voyons pas aujourd’hui dans les grandes commissions de valeurs mobilières. La seconde est un mur chinois, ou une séparation, entre la division de la réglementation qui, par exemple, mène les enquêtes, et le tribunal, qui tient les audiences relatives aux mesures d’application de la réglementation des valeurs mobilières.
J’aimerais parler en particulier de la question à l’étude, celle du risque systémique. L’objectif de la Loi sur la stabilité des marchés des capitaux proposée au fédéral est de rehausser la gestion du risque systémique, la détection, et cetera, au Canada. La collecte des données y est essentielle. Dans le régime de réglementation financière canadien en vigueur, il existe des lacunes sur le plan de la collecte des données, car aucun organe n’est chargé de recueillir les données se rapportant aux menaces de risque systémique à l’échelle nationale.
Le « risque systémique » est défini prioritairement dans la loi. Il s’agit d’une définition importante. Je vais m’y attarder un instant. Il renvoie à « ... une menace à la stabilité ou à l’intégrité du système financier canadien qui émane des marchés des capitaux, est propagée par leur entremise ou les entrave et qui est susceptible d’avoir des conséquences négatives sur l’économie canadienne ».
Ce qui est très important dans cette définition, c’est qu’elle est de portée nationale. Elle cible précisément les menaces et les risques systémiques qui, de par leur nature même, ne peuvent être gérés par une province seule ou un groupe de provinces.
Comme vous l’avez entendu dans des témoignages précédents, et comme vous le savez, les menaces et les risques systémiques ne respectent pas les frontières. Les marchés des capitaux non plus. Il est de la plus haute importance d’être doté de mécanismes et d’autorités pour que l’incidence financière d’une chose qui prend sa source dans une province, mais qui se déplace vers une autre — chose que nous voyons régulièrement — puisse être évaluée et traitée; et que nous soyons dotés d’un mécanisme pour évaluer et gérer les risques systémiques à la même échelle qu’ils se produisent. Autrement dit, il faut qu’ils soient d’envergure nationale et qu’ils ne respectent pas les limites provinciales.
La Loi sur la stabilité des marchés des capitaux prévoit notamment que l’Autorité de réglementation des marchés des capitaux, l’ARMC, soit tenue d’assurer la surveillance des activités dans les marchés des capitaux. Cette responsabilité est précisément axée sur les marchés des capitaux. Lorsque vous pensez aux témoignages précédents des représentants du Bureau du surintendant des institutions financières, BSIF, et de la Banque du Canada, vous constatez qu’on ne recueille pas de données nationales exhaustives sur les marchés des capitaux en particulier, chose que cet organisme sera habilité à faire.
Ensuite, il lui faut atténuer le risque systémique dans les marchés des capitaux, avec un pouvoir et une autorité précis axés sur les étalons, les produits et les pratiques systémiques risquées qui sont détectés au cours de la collecte des données.
L’autorité a donc le pouvoir de donner des ordres urgents pour prendre des mesures contre la propagation du risque systémique par l’intermédiaire des marchés des capitaux.
Il y a aussi un élément supplémentaire qui relève de l’autorité fédérale, soit celui d’assurer le leadership et de coordonner l’application du droit pénal pour ainsi contribuer à un cadre d’exécution plus exhaustif au Canada. Cela donnera une meilleure structure pour collaborer avec les partenaires de l’application de la loi ainsi qu’un meilleur cadre juridique prévoyant des infractions criminelles supplémentaires et des instruments pour recueillir des preuves afin de rehausser l’efficacité de l’application de la loi. La loi contient une obligation de coordonner les activités de réglementation pertinentes avec d’autres autorités fédérales, provinciales et étrangères, dans le but précis de ne pas créer de fardeau indu ou de dédoublement des efforts.
Comme vous l’avez entendu, les marchés d’aujourd’hui sont grands, complexes et interreliés. Comme en ont témoigné Jeremy Rudin et Ron Morrow, nous ne savons pas d’où proviendra la prochaine menace. Jeremy Rudin a affirmé que le laisser-aller peut représenter un des plus grands dangers. Nous avons instauré des règles pour nous protéger contre les menaces passées. Nous ne sommes pas dotés d’un mécanisme pour nous protéger contre les menaces qui émergent de la collecte des données nationales.
L’ARMC est bien placée pour gérer la Loi sur la stabilité des marchés des capitaux ainsi que pour ajouter et contribuer au régime entourant le risque systémique. Des ressources et des compétences seront consacrées au risque systémique dans les marchés des capitaux.
Étant donné que cet organisme est chargé tant de la réglementation des valeurs mobilières au quotidien que des activités liées au risque systémique national, il sera possible d’avoir des synergies entre les activités comme celles que nous n’avons pas actuellement dans un quelconque organisme au Canada. L’autorité juridique fédérale prévue dans la Loi sur la stabilité des marchés des capitaux en ce qui concerne le risque systémique vient compléter les outils dont disposent les organismes de réglementation déjà en place, comme la Banque du Canada et le BSIF, ce qui contribue donc au cadre et comble l’écart, notamment en ce qui concerne la collecte de données nationale. Elle sera appuyée par le leadership et du personnel très qualifié.
En conclusion, le risque systémique est complexe. Nous l’avons entendu dire au cours des dernières séances. Les menaces ne tiennent pas compte des frontières. Il est très important de contrer ces menaces au même échelon où elles trouvent leur source, c’est-à-dire, à tout le moins, à l’échelon national. L’Autorité de réglementation des marchés des capitaux et la Loi sur la stabilité des marchés des capitaux que l’on propose comblent cette lacune en venant compléter le régime de réglementation financière fédéral et provincial actuel. Merci.
Le président : Merci. Nous allons maintenant passer aux questions.
Le sénateur Wetston : Merci pour votre exposé d’aujourd’hui, monsieur Cowan.
Je voulais vous parler brièvement, mais pas pour connaître vos vues concernant une crise financière ou le risque systémique auquel nous pourrions être confrontés à l’avenir. Il est très probable que nous ferons face à des enjeux financiers dans nos marchés. Nous l’avons fait par le passé et nous le ferons encore. Certains marchés ont l’air d’être en récession et d’autres ont l’air d’être en situation plus grave encore, mais c’est toujours sérieux.
Les crises financières sont souvent motivées par des paniques, des ruées et des bulles, et nous devons être en mesure de gérer ces types de crises financières qui s’intensifient. Croyez-vous que l’ARMC, surtout par l’intermédiaire de la Loi sur la stabilité des marchés financiers, permettrait en quelque sorte au Canada de gérer une crise de la sorte si elle devait se reproduire, comme elle l’a fait il y a 10 ans, dans le contexte de ce que je décris comme étant un système réglementaire hautement fragmenté au chapitre des marchés des capitaux?
M. Cowan : Oui, je le crois. Cela va au cœur même de ce que l’ARMC et la Loi sur la stabilité des marchés financiers visent à faire, principalement par l’intermédiaire de la collecte de données et de la détection précoce des menaces émergentes pour qu’elles puissent être gérées grâce aux pouvoirs prévus dans la mesure législative. Cela se fera aussi en conjonction et en collaboration avec les autres organismes de réglementation.
Un excellent exemple pourrait être celui de la crise du papier commercial adossé à des actifs. La déclaration assermentée de la Banque du Canada à la Cour suprême du Canada pour l’audience actuelle contient pas mal de renseignements à ce sujet, et c’en est un bon exemple.
Dans le contexte de la crise du papier commercial adossé à des actifs, nous avons eu une situation dans laquelle, au titre des lois sur les valeurs mobilières provinciales, chaque organisme de réglementation provincial examinait ces produits pour déterminer s’ils étaient conformes aux lois sur les valeurs mobilières provinciales, s’ils étaient bien appliqués et s’ils représentaient surtout la perspective des investisseurs avertis, à qui on accorde nombre d’exceptions. Alors que nous compilions les différentes émissions d’obligations, personne n’était chargé d’opter pour la vision globale de la menace que cela représentait pour le Canada à l’échelle nationale. C’est exactement ce que l’ARMC vise à faire. Il vise à donner à l’organisme les pouvoirs de recueillir les données pour cerner ces risques dès le départ.
Le sénateur Wetston : J’ai une question de suivi. Je pense qu’il est vraiment important de comprendre l’ampleur de tout cela. Nous avons tendance à penser que ces types de crises n’ont pas d’incidence marquée sur notre pays. Si nous voyons les choses sous cet angle c’est que, bien que nous ayons été touchés par la crise financière sur le plan économique, nous n’avons pas eu à faire face aux mêmes types de questions bancaires que l’Europe et les États-Unis, soit les prêts d’urgence et autres.
Je vais poser une autre question parce que, de mon point de vue, le contexte est important. Je pense que la crise s’est élevée à environ 30 milliards de dollars, ce qui, dans une économie de la taille de la nôtre, pourrait avoir toute une incidence. Elle a été réglée, mais ce ne sont pas seulement les institutions financières ou l’échelon d’investissement commercial supérieur qui ont été touchés — une bonne partie des consommateurs aussi.
Je crois comprendre que la première question que les fonctionnaires posent est « Qu’allons-nous faire? Comment allons-nous coordonner la situation? Comment faire pour collaborer et aller au fond des choses? » Si cette crise se reproduisait aujourd’hui, aurions-nous, grâce à ce processus, un mécanisme pour pouvoir y répondre de façon plus efficace, pour comprendre ce que nous avons besoin de faire? Dans le contexte de la crise du papier commercial adossé à des actifs, des sanctions ont été imposées à un certain nombre d’institutions en raison de la façon dont les choses se sont passées. Pouvez-vous en parler plus en détail dans l’optique de la manière dont cela réglerait ces questions?
M. Cowan : Le régime repose sur la collecte de données et la détection précoce. La loi prévoit des pouvoirs, par exemple celui de rendre des ordonnances d’urgence, qui permettent de passer à l’action quand les menaces s’intensifient. Cependant, c’est important de replacer l’ARMC et la LSMC dans le contexte du régime de réglementation financière global, qui comprend non seulement le BSIF et la Banque du Canada, mais aussi les organismes provinciaux de réglementation des valeurs mobilières. En plus de la détection précoce et de la possibilité de recourir aux pouvoirs, un autre fondement du régime est la collaboration et la coopération : avoir accès aux données et faire en sorte que les organismes pertinents prennent les mesures qui s’imposent, en fonction des dossiers et des autorités dont ils relèvent.
Le sénateur Tannas : Merci pour votre exposé. Je viens de l’Alberta. Vous ne serez pas surpris que je vous pose une question du point de vue d’un sceptique. Vous avez mentionné que tous les autres pays de l’OCDE ont un organisme de réglementation national. Je n’en doute pas. J’ai vérifié rapidement, et tous ces organismes sont situés dans la capitale de leur pays.
Pour une raison ou une autre, c’est à Toronto qu’on a décidé d’établir l’organisme de réglementation canadien, ce qui semble louche à ceux d’entre nous qui se trouvent à d’autres endroits où des capitaux sont levés et investis, car tant qu’il sera situé au centre d’un grand groupe d’intervenants importants, l’organisme de réglementation ne sera pas national. Je crois que c’est pour cette raison que les autres pays de l’OCDE ont pris la décision judicieuse de ne pas établir leur organisme de réglementation dans le centre financier du pays.
Quel a été le raisonnement? Pourquoi un Albertain qui pose une question cynique comme celle-ci appuierait-il l’idée que tout, y compris les décisions, doit venir de Toronto?
M. Cowan : Merci beaucoup pour votre question, monsieur le sénateur. Je vais fournir plus de détails, mais ma réponse initiale est que l’organisme de réglementation n’est pas situé à Toronto.
Comme c’est écrit dans le protocole d’accord, la structure de l’organisme coopératif de réglementation des valeurs mobilières est répartie dans toutes les provinces participantes. Les provinces qui participent à l’accord ont convenu que le directeur général et le bureau général de direction seraient établis à Toronto, mais ce n’est là qu’une petite partie du tout. En effet, le protocole d’accord stipule aussi qu’il y aura un régulateur en chef adjoint dans chaque région et un administrateur local dans chaque bureau de l’organisme. L’accord précise également que toute décision prise par n’importe quel bureau a force obligatoire dans l’ensemble du régime coopératif.
Une décision prise par le bureau de Calgary aurait force obligatoire en Ontario, à l’Île-du-Prince-Édouard et dans toutes les provinces participantes. Ce serait aussi le cas des décisions prises en Alberta, par exemple, si cette province participait au régime.
Le sénateur Tannas : Encore une fois, pourquoi n’a-t-on pas suivi le modèle des autres pays de l’OCDE en situant l’organisme national de réglementation proposé des valeurs mobilières dans la région d’Ottawa-Gatineau, où il pourrait réellement servir d’organisme national?
M. Cowan : Je peux seulement répondre à votre question du point de vue d’un observateur du processus politique. Le protocole d’accord est le fruit de négociations exhaustives menées par les ministres et leur personnel. Pour diverses raisons dont on ne m’a pas fait part, c’est la décision qui a été prise. Pour moi, l’important, c’est qu’il s’agit d’un modèle de leadership partagé. L’aspect crucial du modèle, c’est que toutes les régions se partagent le leadership. La structure entière est rendue publique.
D’après moi, ce qui compte, c’est de mettre en place l’organisme, de prouver qu’il fonctionne et de démontrer les gains d’efficacité réalisés. C’est la meilleure façon de recruter d’autres parties. Si l’Alberta décide d’y participer, par exemple, les décisions prises à Calgary auront force obligatoire dans l’ensemble du régime.
Le sénateur C. Deacon : Monsieur Cowan, je suis impressionné par les progrès que vous avez accomplis relativement à une question dont on parle au pays depuis plus de 30 ans, je crois. C’est formidable de voir le dossier avancer parce qu’il est tellement important, d’après moi, en raison de la façon dont les risques évoluent et de l’accélération du rythme. Les menaces surgissent plus rapidement que par le passé.
Je suis très enthousiaste par rapport à ce que j’ai entendu. Je trouve les mesures prises judicieuses et prometteuses.
J’aimerais me concentrer sur un secteur de notre économie qui représente un risque, selon moi, à cause du milieu d’où je viens : celui des jeunes entreprises. C’est encourageant de constater que nous veillons à ce que nous ayons les régimes nécessaires pour élargir autant que possible l’accès aux capitaux de démarrage partout au pays. Les entrepreneurs canadiens viennent de toutes les régions du pays. Nous devons veiller à ce que le processus soit efficace et rapide, mais aussi à ce qu’il soit bien réglementé afin d’écarter les mauvais joueurs. Chaque fois qu’un mauvais joueur réussit, selon moi, il gâche tout pour les meilleures entreprises.
J’aimerais savoir comment vous gérez ou vous comptez gérer cette partie de l’équation. Quels seront les effets, selon vous, sur la formation de capitaux de démarrage pour les jeunes entreprises canadiennes, et quelles mesures seront prises pour veiller à ce que ce secteur de l’économie canadienne soit aussi solide qu’il puisse l’être? Il s’agit d’un aspect important de la gestion des risques financiers à long terme.
M. Cowan : J’aime plaisanter par rapport à cette proposition ou à ce projet en disant que la première fois que j’ai entendu parler de la volonté de mettre en place une commission canadienne sur les valeurs mobilières, j’étais étudiant à l’université. En réalité, cette volonté remonte à 1935, année où elle a été mentionnée au Parlement pour la première fois par la Commission royale d’enquête sur les écarts de prix, sans doute en réaction aux événements qui se déroulaient aux États-Unis après l’adoption des lois de 1933 et de 1934.
Néanmoins, la question que vous soulevez est au cœur de l’ARMC proposée. C’est aussi une de mes préoccupations principales, car j’ai travaillé à tous les échelons des marchés des capitaux et je m’intéresse aux défis liés au financement des petites et moyennes entreprises. En particulier, la nature exhaustive du régime canadien du marché des capitaux, qui, par l’intermédiaire d’un réseau de courtiers indépendants et de maisons de courtage détenues par des banques, ainsi que d’autres participants au marché, a toujours réussi à se surpasser et à fournir aux petites et moyennes entreprises un milieu leur permettant de passer de la Bourse de croissance, par exemple, à la Bourse de Toronto.
Plusieurs aspects de l’organisme proposé répondent à cette préoccupation. D’abord, le protocole d’accord stipule, parmi les objectifs de l’organisme, que la formation de capitaux et l’accès aux capitaux pour les entreprises doivent absolument être pris en considération dans l’élaboration de la réglementation.
Ensuite, l’organisme est conçu de façon à veiller à ce que les perspectives régionales, que ce soit celles de la Nouvelle-Écosse ou de la Colombie-Britannique, dont l’expérience et l’expertise dans le domaine des petites et moyennes entreprises sont peut-être différentes, soient mises à contribution et fassent partie du processus décisionnel, de façon à ce que tous les participants pensent avant tout à l’objectif de trouver un juste équilibre entre le risque et l’innovation, ainsi qu’entre la réglementation et la formation de capitaux.
Nous sommes aussi en train de concevoir la structure organisationnelle de l’organisme. Nous veillons à ce que le processus d’élaboration des politiques permette à toutes les parties de s’exprimer et de faire part de leurs idées.
Le sénateur C. Deacon : Qu’est-ce qu’il faudra, selon vous, pour que d’autres provinces comme l’Alberta, le Québec et le Manitoba se joignent au régime? Faudra-t-il un miracle? Il s’agit d’une initiative nationale tellement importante. La concurrence se trouve à l’extérieur du Canada, et non entre les provinces. Nous devons absolument porter notre attention vers l’extérieur pour maximiser la compétitivité de notre économie. Évidemment, je n’ai pas à vous convaincre.
Que faudra-t-il, à votre avis? Cette initiative nationale est importante. Je trouve toujours malheureux qu’une province refuse de se joindre aux autres.
M. Cowan : Jamais nous n’avons été aussi près de réaliser ce projet. Les dispositions législatives sont presque terminées. Les provinces participantes travaillent à régler quelques questions non résolues. Maintenant, la volonté politique et l’engagement sont tout ce qu’il faut pour atteindre la ligne d’arrivée.
À mon avis, avec cinq provinces et l’intention déclarée de la Nouvelle-Écosse de se joindre au régime, nous avons une masse critique plus que suffisante pour mettre le régime en branle et pour en prouver l’efficacité sur les plans de la protection des investisseurs et de la formation de capitaux, les deux aspects qui caractériseront l’organisme.
J’accepterais volontiers un miracle, mais je suis convaincu que nous en créerons un simplement en prouvant que le régime fonctionne. J’ai fait des paris d’un dollar dans tout le pays. Je suis convaincu qu’avec le temps, nous prouverons que le régime fonctionne, et d’autres voudront s’y joindre.
Pour le reste, bien sûr, nous nous en remettons aux politiciens.
Le sénateur C. Deacon : Quelques autres Canadiens seraient prêts à vous parier un dîner et seraient ravis de payer. Le régime changera vraiment la donne au Canada si vous réussissez.
La sénatrice Wallin : Certains d’entre nous travaillent sur ce projet depuis longtemps. Peut-être l’avez-vous déjà mentionné, mais pouvez-vous nous dire ce que le ministre des Finances du Canada vous a dit à ce sujet?
M. Cowan : Le ministre des Finances et son personnel nous ont fait part de leur appui du projet. Ils continuent à le soutenir à mesure que nous bâtissons l’organisation.
La sénatrice Wallin : Vous attendez-vous à ce qu’ils prennent d’autres mesures? C’est vous qui faites le travail. Vous attendez-vous à ce qu’ils incluent quelque chose, par exemple, dans les prochains budgets? On trouve souvent dans les projets de loi omnibus une petite phrase à la page 432 qui dit : « Nous allons de l’avant... »
M. Cowan : Pour revenir à ce que vous avez dit tout à l’heure, nous acceptons volontiers les miracles, petits et grands, peu importe d’où ils viennent.
Nous attendons une décision de la Cour suprême. Elle devrait être rendue d’une semaine à l’autre. L’audience a eu lieu le 22 mars, et le délai habituel est d’environ six mois. Nous avons hâte d’en prendre connaissance. Si elle est positive, j’espère qu’elle ralliera les gens au projet.
La sénatrice Wallin : Merci.
[Français]
La sénatrice Verner : Pour être en mesure de vous permettre de, comme on dit en anglais —
[Traduction]
... « put on record », ou consigner au compte rendu ce que nous avons dit plus tôt...
[Français]
—, nous avons parlé de la cause devant les tribunaux dans laquelle sont impliqués le Québec et l’Alberta. Comme vous le savez, il n’y a pas du tout d’appétit au Québec pour faire partie de cette organisation. Cela fait très longtemps, d’ailleurs, que cet enjeu est discuté. J’étais collègue avec le regretté ministre Jim Flaherty lorsque l’idée première est née.
Vous nous avez dit qu’il y a tout de même un bon esprit de collaboration avec l’organisme du Québec et votre organisation à l’heure actuelle. Pouvez-vous nous donner des précisions?
[Traduction]
M. Cowan : Merci. Comme c’est écrit dans le protocole d’accord, au cœur du mandat de l’organisme proposé, l’ARMC, se trouve la volonté de coopérer pleinement avec les provinces non participantes. En vue d’atteindre cet objectif, j’ai noué le dialogue avec les autres provinces pour commencer à établir les relations qui rendront possible la coopération. L’objectif principal est de veiller au bon fonctionnement pour les participants au marché, peu importe où ils sont situés.
Le travail se fait à de multiples échelons. À l’heure actuelle, ce sont principalement les gouvernements qui discutent entre eux. L’intention et l’objectif sont de coopérer.
[Français]
La sénatrice Verner : Pouvons-nous conclure, advenant le cas où la Cour suprême donne raison aux provinces qui ne souhaitent pas faire partie de cette organisation, que vous continuerez à collaborer autant avec le Québec ou l’Alberta? Je ne veux pas parler au nom des Albertains, mais la structure de votre organisation vous permettra-t-elle de continuer à fonctionner avec un Québec qui n’en ferait pas partie?
[Traduction]
M. Cowan : Oui, absolument. L’ensemble du régime — du concept organisationnel aux principes et objectifs contenus dans le protocole d’accord — est conçu de façon à permettre la pleine coopération avec les provinces non participantes.
Le président : Merci beaucoup, monsieur Cowan. Votre exposé était très intéressant.
Le sénateur Wetston : J’aimerais mettre l’accent sur un élément de la discussion. Concernant ce que le sénateur Tannas a dit au sujet de l’OCDE, c’est important de comprendre quelle place nous occupons dans le marché mondial. La dernière récession n’a pas eu lieu au Canada, mais nous en avons certainement ressenti les effets. Si cela ne montre pas, monsieur Cowan, que les marchés financiers ont des répercussions mondiales, j’aimerais vous entendre là-dessus.
J’aimerais aussi que vous nous parliez de l’Organisation internationale des commissions de valeurs et que vous nous fournissiez un peu plus de détails sur la place que nous occupons à l’échelle mondiale. Je pense que l’Organisation compte 104 membres. Pouvez-vous confirmer que nous sommes le seul pays n’ayant pas de commission nationale de valeurs?
M. Cowan : Sur 104, je ne suis pas sûr que nous sommes le seul. À ma connaissance, on dit que nous sommes le seul pays de l’OCDE ou le seul pays occidental. Sur 104, il doit y en avoir un ou deux autres.
Le sénateur Wetston : Je peux vous fournir des précisions.
Je tiens à mentionner à mes collègues que j’ai travaillé sur ce dossier pendant cinq ans avec Jim Flaherty et d’autres. Je connais assez bien le protocole d’accord.
Vous avez parlé, en réponse à la dernière question, de l’entente de coopération, qui sera importante. J’aimerais que vous nous parliez un peu des Autorités canadiennes en valeurs mobilières afin que le processus actuel soit parfaitement compris. Selon vous, qu’arrivera-t-il si la Cour suprême soutient le protocole d’accord et la poursuite du travail sur l’ARMC?
Nous venons de différentes régions du pays. Pouvez-vous nous donner plus de détails sur ce qui arriverait si le Québec, l’Alberta et le Manitoba décidaient de ne pas se joindre à l’ARMC dans le cas où la Cour suprême confirmerait le bien-fondé du protocole d’accord et des questions sur lesquelles elle doit trancher?
M. Cowan : Bien sûr, j’espère avant tout que ces provinces décideront de se joindre au régime. Comme je l’ai déjà dit, selon la structure prévue dans le protocole d’accord, elles ne font pas partie du régime seulement si elles choisissent de s’y joindre; elles sont enchâssées dans le mécanisme décisionnel. Il s’agit d’un régime global.
À l’heure actuelle, les Autorités canadiennes en valeurs mobilières regroupent les 13 organismes provinciaux et territoriaux de réglementation des valeurs mobilières du Canada. Les ACVM ont réussi à de nombreuses reprises à favoriser l’uniformisation et la coopération entre les provinces et les territoires. Or, par sa nature même, par sa structure et par la façon dont elle est conçue, l’organisation est limitée dans ce qu’elle peut faire. Les marchés des capitaux font de plus en plus fi des frontières; ils se compliquent, ils accélèrent et ils sont de plus en plus perturbés par la technologie. Pour toutes ces raisons, d’après moi et certainement d’après les auteurs du projet, une voix uniforme et un organisme unique s’avéreront beaucoup plus efficaces. Ce mécanisme nous permettra de dépasser les limites de la structure actuelle des ACVM.
Par exemple, malgré le travail des ACVM, au bout du compte, chaque province ou territoire prend ses propres décisions, et on ne cherche pas à atteindre un seul et même résultat. Une des caractéristiques qui nuit à l’efficacité des marchés des capitaux canadiens, c’est que même si nombre de nos règles sont uniformisées, elles demeurent différentes. Cela cause de la friction et de l’inefficacité au sein des marchés des capitaux, qui, je le répète, font de plus en plus fi des frontières et changent de plus en plus rapidement.
Par rapport au fonctionnement futur, un des objectifs principaux du protocole d’accord est de négocier un mécanisme d’interaction avec les provinces et les territoires non participants, encore une fois dans le but de favoriser le bon fonctionnement pour tous les participants au marché.
Le sénateur Tkachuk : Les pays membres de l’Union européenne ont-ils tous leur propre organisme national de réglementation des valeurs mobilières?
M. Cowan : La structure de l’Union européenne est compliquée : les pays ont leur propre organisme de réglementation, et il y a aussi une autorité combinée à Bruxelles et à Paris.
Le sénateur Tkachuk : C’est compliqué.
M. Cowan : Oui. L’organisme compte 28 membres.
Le sénateur Tkachuk : J’ai toujours appuyé l’idée d’avoir un organisme national de réglementation des valeurs mobilières, car je pense que c’est important pour mobiliser des capitaux. Voyons ce que les autres pays... La Grèce a son propre organisme de réglementation. Les États-Unis ont aussi un organisme de réglementation nationale. Où ces problèmes se sont-ils produits? Dans les pays où il y en a un. De toute évidence, ce n’est pas la solution. Il doit être possible de faire autre chose. Le fait d’en avoir un pourrait même accroître les risques. Il est possible que le temps pris à s’organiser fasse en sorte que le problème soit chose du passé. Cela pourrait nous servir, car il est parfois préférable de ne rien faire que d’agir. Qu’avons-nous retenu de ce qui s’est produit en 2008, à savoir ce que les Américains n’ont pas fait et qu’ils auraient dû faire, de même que les Européens et le reste du monde, pour prévenir le problème? En d’autres mots, y a-t-il une façon d’éviter ce genre de problème?
M. Cowan : J’aimerais soulever quelques points. Premièrement, des arguments semblables ont été soulevés contre la commission nationale, à savoir que le Canada s’est bien tiré d’affaire pendant la crise financière et que nous n’avons pas besoin d’un organisme de réglementation coopératif — et j’insiste sur le fait qu’il s’agit d’un organisme coopératif et non pas national, car nous avons un nombre limité de participants. Je pense qu’il s’agit là d’un postulat erroné, car il y a tellement de variables et tellement d’éléments différents qui exercent une influence dans un tel cas. À Davos, notre ancien premier ministre a mentionné que l’élément central était sans doute d’avoir un système bancaire concentré et que c’est ce qui nous a placés dans une position différente des autres pays. Je pense que c’est un postulat erroné de dire que nous n’avons pas besoin d’un organisme de réglementation parce que nous nous en sommes relativement bien tirés pendant la crise. En fait, j’irais même plus loin en disant que l’idée est de nous donner de nouveaux outils, les meilleurs outils qui soient, pour réagir en cas de menaces.
Aux États-Unis, prenons par exemple le rôle central joué par AIG. AIG était réglementé par 50 organismes étatiques, mais aucun d’eux n’avait une perspective nationale de ce qui se passait en souscrivant des swaps sur défaillance. La loi sur la stabilité des marchés des capitaux est expressément conçue pour nous donner justement cette perspective nationale, grâce à la collecte de données à l’échelle du pays, pour détecter les risques de façon précoce et les atténuer.
Le sénateur C. Deacon : Pouvez-vous me dire, même si je suis assez certain de connaître la réponse, quel est le point de vue de l’Association canadienne du commerce des valeurs mobilières sur la question?
M. Cowan : Elle appuie beaucoup l’idée.
Le sénateur C. Deacon : Je m’y attendais, mais je voulais simplement le confirmer.
M. Cowan : Elle a appuyé l’initiative publiquement et elle a préparé des documents sur le sujet.
Le sénateur C. Deacon : Excellent. Merci.
Le président : Monsieur Cowan, merci beaucoup de votre présence, et merci également d’être un solide défenseur de votre position, de même qu’un défenseur rationnel. Les membres du comité ne sont pas tous convaincus, mais cela ne veut pas dire que vous devez arrêter votre travail de missionnaire. Merci beaucoup.
(La séance se poursuit à huis clos.)