Délibérations du Sous-comité des
Anciens combattants
Fascicule no 5 - Témoignages du 18 mai 2016 (séance de 14 h 33)
OTTAWA, le mercredi 18 mai 2016
Le Sous-comité des anciens combattants du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense se réunit aujourd'hui, à 14 h 33, pour examiner la teneur des éléments de la section 2 de la partie 4 du projet de loi C-15, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 22 mars 2016 et mettant en œuvre d'autres mesures.
Le sénateur Joseph A. Day (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Le comité tient une réunion exceptionnelle afin de procéder à l'étude préalable du projet de loi C-15, ce qui signifie que nous l'étudions avant d'en avoir été saisis après son examen par la Chambre des communes. D'après ce que j'ai compris, la Chambre des communes ne l'a pas encore examiné, mais la section 2 de la partie 4 a été renvoyée au comité aux fins d'examen.
Ce matin, nous avons entendu les représentants d'Anciens Combattants Canada. Nous entendrons maintenant des témoins qui pourront nous aider à comprendre les répercussions possibles des changements proposés pour que nous puissions juger de la pertinence de ces changements.
Nous accueillons, par vidéoconférence, M. Brian McKenna, qui est représentant du Conseil des anciens combattants à l'Equitas Society.
Monsieur McKenna, nous nous excusons de vous avoir fait attendre, mais nous sommes maintenant prêts à vous écouter. Lorsque vous aurez terminé votre exposé, je donnerai la parole aux deux autres témoins qui sont avec nous dans la salle. Je vous demanderais de maintenir la communication, car nous passerons aux questions et aux discussions lorsque nous aurons entendu tous les exposés.
Brian McKenna, représentant du Conseil des anciens combattants, Equitas Society : Je comprends. Merci.
Le président : Merci. La parole est à vous, monsieur.
M. McKenna : Bon après-midi, sénateurs. Je m'appelle Brian McKenna. J'habite à North Delta, et je vous parle à partir de Vancouver. Je suis un ancien combattant qui a participé à des missions en Bosnie et en Afghanistan. J'ai été libéré pour raisons médicales; les questions et les dispositions que vous examinez aujourd'hui me touchent donc directement.
La communauté d'anciens combattants dans son ensemble réclame certains de ces changements depuis des années. Ce projet de loi représente sans contredit un progrès dans plusieurs dossiers. Je m'en voudrais d'omettre de parler de l'évidence : peu de mesures sont prises pour régler le problème le plus grave auquel les anciens combattants sont confrontés aujourd'hui, soit l'écart considérable du traitement réservé aux anciens combattants, sur le plan financier, selon qu'ils ont présenté leur demande avant ou après 2006.
Cela dit, les changements proposés entraîneraient des progrès importants, et j'aimerais porter une attention particulière aux changements liés à l'indemnisation de décès — pour la tenue de funérailles en toute dignité —, auxquels je ne m'attendais pas. Je serai certainement heureux de voir qu'un plus grand nombre d'anciens combattants auront droit à ces services si les changements proposés sont adoptés.
Je tiens à prendre du temps pour examiner avec vous les points pour lesquels vous avez demandé des commentaires, et pour présenter mes préoccupations. J'aimerais d'abord parler du remplacement de l'expression « allocation pour déficience permanente » par « allocation pour incidence sur la carrière ». Que représente un nom? Beaucoup de choses, souvent. Les anciens combattants ont remarqué ce changement. En fait, le ministère a souvent fait référence à ces prestations lorsqu'on soulignait l'écart du soutien financier offert aux deux groupes créés par la charte. Que devons- nous comprendre lorsqu'on utilise d'autres termes pour quelque chose que l'on qualifiait auparavant de « permanent »? Dans la communauté, certains s'inquiètent qu'on assiste là au début d'un processus visant à passer d'un financement garanti, sous forme de pension, à un financement temporaire révocable faisant l'objet d'une réévaluation constante et pouvant être annulé à tout moment. Si tel est le cas, je ne peux que mettre en doute l'affirmation du gouvernement selon laquelle l'ADP, devenue l'Allocation pour incidence sur la carrière, fait partie des mesures visant à aider les anciens combattants à aller de l'avant. À mon avis, une Allocation pour incidence sur la carrière qui nécessite une réévaluation récurrente, c'est une allocation qui requiert la présentation de demandes répétées et une évaluation continuelle de l'admissibilité. Essentiellement, les anciens combattants doivent demeurer malades pour avoir droit à cette allocation; c'est un facteur de dissuasion au progrès et à la guérison.
Nous avons également entendu que les critères d'acceptation seront modifiés. Le ministère examinera-t-il alors le dossier des personnes dont la demande a été rejetée précédemment en fonction de ces nouveaux critères? À la réunion des intervenants tenue la semaine dernière, j'ai posé la question, et les SMA principaux n'avaient pas la réponse. Lorsqu'on le saura, les anciens combattants seront-ils tenus de présenter leur demande de nouveau, ou seront-ils informés par le ministère que leur dossier est réexaminé? J'ai aussi posé cette question, et on n'avait pas de réponse non plus. Il convient d'obtenir ces réponses et de les communiquer à la communauté des anciens combattants et non seulement à la fonction publique.
Permettez-moi maintenant de parler brièvement de la diminution de la capacité de gain. Là encore, l'élimination du mot « permanente » saute aux yeux. De plus, il faut admettre que ceux qui ont été gravement blessés, qui ont subi une double ou une triple amputation, qui sont rongés par la culpabilité et la dépression, qui souffrent d'un TSPT si grave qu'ils sont incapables de sortir de leur maison et encore moins de trouver un emploi rémunéré, ont vu leurs aspirations professionnelles détruites et réduites à néant, plutôt que modifiées ou diminuées, comme le laisse entendre la nouvelle terminologie. Nous avons observé un progrès, par rapport à l'Allocation pour perte de revenus, qui est passée de 75 à 90 p. 100. Je m'interroge sur la pertinence de réduire le salaire d'une personne au moment où elle est libérée pour raisons médicales, mais une diminution salariale de seulement 10 p. 100 au lieu de 25 p. 100 représente déjà une amélioration par rapport à ce qu'on offrait auparavant aux anciens combattants.
Tout progrès a son importance; en ce sens, une différence de 15 p. 100 est un changement important, sauf que pour certains, cela se traduit seulement par une augmentation de 3 p. 100. Cela met en lumière l'un des principaux problèmes que vous et vos collègues de la Chambre des communes devez comprendre. Souvent, la portée des politiques annoncées par le gouvernement se trouve réduite en raison des critères et des paramètres établis par le ministère pour y avoir droit; c'est ce qui s'est produit dans ce cas. Je suis certain que toutes les sénatrices et tous les sénateurs ont vu les statistiques sur les décès et les blessés en Afghanistan. Il y a d'importantes similitudes à cet égard : à quelques exceptions près, les blessés et les morts sont issus des rangs inférieurs. Bien que le gouvernement actuel ait annoncé une augmentation de 15 p. 100 de l'Allocation pour perte de revenus, lorsqu'on lit les petits caractères, on constate que le seuil est passé du niveau de rémunération Caporal 0 à Caporal 3. Donc, pour les militaires des rangs inférieurs, cela signifie une augmentation de 3 p. 100 et non de 15 p. 100.
En outre, les membres actifs ont habituellement droit à une augmentation liée au coût de la vie, mais aussi à une augmentation fondée sur leur rang. Habituellement, au cours de sa carrière, un militaire est promu à tous les trois à cinq ans. Où se trouve la reconnaissance de ce fait dans la mesure législative proposée? Pourquoi un caporal qui perd ses jambes après six ans de service devrait-il être rémunéré au même taux indéfiniment? On s'attend habituellement à ce qu'un militaire qui est caporal après six ans de service ait le grade d'adjudant après 20 ans de service. Il aurait fallu inclure dans le projet de loi un facteur d'indexation liée au rang de façon à reconnaître la progression de carrière normale qu'aurait eu le militaire s'il n'avait pas été blessé.
En terminant, j'aimerais dire qu'il y a eu d'importants progrès dans plusieurs dossiers. Je pense que les dispositions dont vous êtes saisis sont de bonnes mesures, en général. Il semble cependant que parfois, le gouvernement ne peut s'empêcher d'imposer des restrictions, des critères des lignes directrices qui vont à l'encontre de l'intention originale des annonces et qui tendent manifestement vers le minimum qui a été promis aux anciens combattants.
Les ajustements temporaires des prestations sont utiles, mais ils n'offrent aucune stabilité, ou très peu; il n'y a rien de garanti. Aucune banque au pays n'approuvera un prêt hypothécaire pour une personne qui reçoit temporairement l'Allocation pour incidence sur la carrière du ministère des Anciens Combattants.
Je vous prie donc d'étudier ces changements. À votre place, je chercherais à les inscrire dans la loi afin de favoriser des progrès réels dans ce dossier. Je crois que ces mesures améliorent la vie des anciens combattants. Il ne faut toutefois pas s'y méprendre; cela ne règle pas le problème qui empêche nos anciens combattants de l'ère moderne d'avoir une vie plus saine. La garantie d'une stabilité financière à long terme fait toujours défaut.
C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions. Je vous remercie, sénatrices et sénateurs, de m'avoir donné l'occasion de témoigner et de m'avoir écouté.
Le président : Merci beaucoup, monsieur McKenna.
Nous passons maintenant à Mme Sharon Squire, l'ombudsman adjointe du Bureau de l'ombudsman des vétérans. Bienvenue au comité, encore une fois.
[Français]
Sharon Squire, ombudsman adjointe des vétérans et directrice exécutive des opérations, Bureau de l'ombudsman des vétérans : Chers membres du comité, je vous remercie de l'invitation que vous nous avez offerte de discuter avec vous aujourd'hui du projet de loi C-15, la Loi d'exécution du budget, et de ses incidences sur les vétérans canadiens.
Je suis ici pour représenter l'ombudsman des vétérans, M. Guy Parent. Hier, il a fait part de son opinion sur le projet de loi C-15 au Comité permanent des finances de la Chambre des communes. Aujourd'hui, cependant, il devait assister à la réunion annuelle des directeurs généraux des Centres de ressources pour les familles des militaires, à Québec, alors c'est moi qui viens vous parler en son nom.
Le président : À Québec?
Mme Squire : Oui.
[Traduction]
L'ombudsman des vétérans et son équipe rencontrent fréquemment les anciens combattants et leurs proches, dans tout le Canada, afin de connaître leurs préoccupations. Que ce soit lors de réunions individuelles, d'assemblées publiques, d'activités ou par l'intermédiaire de séances de clavardage sur Twitter, nous entendons de vive voix ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas pour les anciens combattants et leur famille.
À notre avis, le projet de loi C-15 aborde plusieurs de nos principales recommandations formulées dans notre rapport de 2013 sur la Nouvelle Charte des anciens combattants ainsi que dans notre rapport de 2014 sur l'allocation pour déficience permanente et le supplément à l'allocation pour déficience permanente. Même s'il est trop tôt pour vous fournir une analyse factuelle sur l'efficacité ou l'équité des modifications législatives proposées dans le projet de loi C-15, étant donné que nous n'en connaissons pas encore les détails, nous pensons que c'est un pas dans la bonne direction, avec une certaine réserve tout de même.
La section 2 du projet de loi d'exécution du budget adopte des mesures pour aider les anciens combattants et leur famille. Il s'agit, premièrement, de la majoration de l'Allocation pour perte de revenus jusqu'à 90 p. 100 de la solde militaire d'un ancien combattant admissible. Selon les chiffres d'Anciens Combattants Canada, cela permettra d'offrir un soutien financier plus élevé à court terme à environ 3 000 anciens combattants, tandis qu'ils prennent part à des programmes de réadaptation du ministère. Cela fournira aussi un soutien financier plus élevé à long terme à environ 2 000 anciens combattants les plus gravement malades et blessés ou ayant une incapacité permanente.
Cependant, ce qui n'est pas encore clair pour nous c'est l'impact de cette nouvelle mesure sur les anciens combattants qui reçoivent en ce moment les prestations d'invalidité de longue durée du Régime d'assurance-revenu militaire. À l'heure actuelle, ces prestations atteignent 75 p. 100 et non 90 p. 100 de la solde que l'ancien combattant touchait à sa libération; il nous reste à voir si ce pourcentage sera augmenté pour garantir l'équité.
Le deuxième point est la détermination modifiée de la catégorie de l'allocation pour déficience permanente. Même si nous n'avons pas de détails sur ce que seront les répercussions de ce changement, nous espérons qu'il appuiera les anciens combattants qui ont des blessures liées au service qui imposent des restrictions sur le plan de la carrière. De plus, nous sommes heureux de constater que le programme a été renommé « allocation pour incidence sur la carrière » pour mieux tenir compte de l'objectif initial du programme.
Le troisième aspect est le remplacement de l'expression « incapacité totale et permanente » par « capacité diminuée d'obtenir une rémunération ». Il n'existe aucune définition de « capacité diminuée d'obtenir une rémunération ». Il est donc difficile d'évaluer l'incidence de ce changement sans avoir de détails. Cependant, nous devons comprendre clairement comment ce changement sera interprété et appliqué pour veiller à ce qu'il réponde bien aux besoins des anciens combattants.
Quatrièmement, nous avons la hausse de l'indemnité d'invalidité pour qu'elle atteigne 360 000 $. Ce changement à l'indemnité d'invalidité correspondra à la somme que les Canadiens peuvent recevoir lorsqu'ils se tournent vers les tribunaux. Il offrira aussi rétroactivement à environ 55 000 anciens combattants une hausse ponctuelle de l'indemnité d'invalidité qu'ils ont déjà reçue.
Le cinquième point porte sur la hausse de l'indemnité de décès pour qu'elle atteigne 360 000 $. Une fois ce changement adopté, il offrira un meilleur soutien aux membres de la famille de ceux qui ont fait le sacrifice ultime.
Ces changements, surtout ceux apportés à l'indemnité d'invalidité, auront une incidence positive sur tous les anciens combattants qui reçoivent des prestations en vertu de la Nouvelle Charte des anciens combattants. D'autres changements, comme ceux apportés à l'allocation pour perte de revenus et à l'allocation pour déficience permanente, assureront une sécurité financière accrue pour toute la vie aux anciens combattants les plus vulnérables et qui ont le plus besoin de soutien.
Cependant, bien que beaucoup de ces initiatives annoncées dans le budget puissent soutenir indirectement les familles des anciens combattants, aucune mesure n'a été prise pour fournir une indemnisation financière aux membres de la famille qui quittent leur emploi pour devenir le dispensateur de soins principal auprès d'anciens combattants gravement malades et blessés.
Il est essentiel de définir et de réaliser les résultats escomptés pour les anciens combattants afin de garantir une sécurité financière à vie.
Ce sont les priorités du Bureau de l'ombudsman des vétérans et elles sont essentielles si nous voulons soutenir les anciens combattants les plus vulnérables ainsi que leur famille.
Enfin, nous pensons que le budget de 2016 est un pas dans la bonne direction. Nous devons maintenant décider d'un plan d'action et d'une approche d'évaluation basée sur des données probantes pour déterminer quelle sera l'incidence de ces changements sur les anciens combattants et leur famille. Nos anciens combattants n'en méritent pas moins, étant donné les services qu'ils ont rendus et les sacrifices qu'ils ont consentis pour le Canada et les Canadiens.
Merci.
Le président : Merci beaucoup.
Nous passons maintenant à M. Ray McInnis, de la Légion royale canadienne.
Ray McInnis, directeur, Bureau d'entraide, Légion royale canadienne : Bonjour, sénateur Day. C'est pour moi un grand plaisir de comparaître devant votre comité encore une fois. Je suis très heureux de témoigner au nom du président national de la Légion royale canadienne, M. Tom Eagles, et de nos 300 000 membres. La Légion a été invitée à présenter ses observations sur la section 2 de la partie 4 du projet de loi C-15.
La Légion royale canadienne est la seule organisation d'anciens combattants qui vient en aide aux anciens combattants et à leur famille, en leur offrant des services de représentation auprès d'Anciens Combattants Canada et du Tribunal des anciens combattants (révision et appel). Le programme de revendication de la Légion est au cœur même de notre mission. Depuis 1926, la Légion est au service des anciens combattants et de leur famille, et ce, grâce à un mandat établi par voie législative dans la Loi sur les pensions et la Nouvelle Charte des anciens combattants. Nous avons un collectif de 23 officiers d'entraide de la Direction — des professionnels —; ils sont répartis partout au Canada et offrent gratuitement leur aide aux anciens combattants et à leur famille dans l'obtention d'indemnités et de services d'Anciens Combattants Canada. J'ai bien dit gratuitement. Veuillez noter que les anciens combattants n'ont pas besoin d'être un membre de la Légion pour profiter de nos services.
Notre réseau national du Bureau d'entraide offre un service de représentation dès les premières demandes faites auprès d'Anciens Combattants Canada, et à chacun des trois niveaux de recours du Tribunal des anciens combattants (révision et appel). En vertu de la loi, la Légion a accès aux dossiers médicaux et autres documents ministériels qui permettent une représentation qui soit à la fois complète et indépendante, et ce, sans aucuns frais. L'an dernier, nos officiers d'entraide sont intervenus et ont agi comme représentants auprès d'Anciens Combattants Canada et du Tribunal des anciens combattants dans des cas de prestations d'invalidité au nom de plus de 3 000 anciens combattants. Il n'existe aucun autre groupe d'anciens combattants avec cette capacité d'offrir aux anciens combattants, ainsi qu'à leur famille et à leurs fournisseurs de soins, un contact direct, des échanges fructueux, un soutien et une rétroaction.
La Légion reconnaît dans ce budget le progrès réalisé au nom des anciens combattants et de leur famille, et recommande que le projet de loi C-15 soit adopté le plus tôt possible. Est-ce d'autre part tout ce que la Légion revendique? Cela répond-il aux 15 priorités que nous avons fait connaître? La réponse est non; mais c'est un pas en avant. Le projet de loi prévoit d'importantes améliorations aux soins et avantages offerts aux anciens combattants et à leur famille, particulièrement pour nos anciens combattants plus sérieusement malades ou blessés.
Deux recommandations ont été prises en compte, soit d'une part le montant maximum de l'indemnité d'invalidité qui est revu à la hausse pour mieux correspondre à ce que les travailleurs blessés dans la vie civile se voient accorder en dommages-intérêts par les tribunaux et, d'autre part, l'augmentation du pourcentage utilisé dans le calcul de l'allocation pour perte de revenus. Bien sûr, nous aurions préféré voir une APR de 100 p. 100. En effet, lorsqu'on est incapable d'être adéquatement employé et rémunéré après avoir complété un programme de réadaptation, on devrait être payé à 100 p. 100.
Toutefois, nous avons quelques autres questions. L'APR a été bonifiée à 90 p. 100. Si un militaire a droit aux prestations de l'ILD, il est payé à 75 p. 100 et le RARM est le premier payeur. Ce pourcentage sera-t-il aussi augmenté à 90 p. 100? Il faut harmoniser les programmes d'invalidité de longue durée et de réadaptation professionnelle.
Le budget de 2016 propose une expansion de l'allocation pour déficience permanente. En élargissant l'accès à l'ADP, le soutien aux anciens combattants qui ont vu leurs options de carrière limitées en raison d'une blessure ou d'une maladie liée au service n'en sera que meilleur. La proposition de changement de nom, si approuvée, à « allocation pour incidence sur la carrière » verra à mieux rendre compte de l'intention du programme, soit de compenser la perte de perspectives d'emploi et de possibilités d'avancement professionnel. L'AIC n'est pas bien définie; n'est-ce là qu'un simple changement de l'ADP pour l'amour du changement? Y aura-t-il de nouvelles catégories? Quels seront les critères pour accéder aux différentes catégories de l'AIC?
L'expression « invalidité totale et permanente » est remplacée par « diminution de la capacité de gain ». Qu'est-ce que cela signifie vraiment? D'autres programmes seront-ils touchés?
Il est absolument essentiel que l'examen des avantages financiers se fasse correctement, et que l'examen porte sur la sécurité financière des anciens combattants et de leur famille à toutes les étapes de leur vie. Cela ne veut pas dire de revenir à la Loi sur les pensions ou de rétablir des pensions comme option pour nos anciens combattants blessés. Cela veut dire qu'il faut faire preuve d'une diligence raisonnable, effectuer l'analyse et consulter les comités consultatifs ministériels et les principaux intervenants. Le ministère a une excellente occasion d'apporter les changements nécessaires pour améliorer la sécurité financière des anciens combattants blessés et malades et de leur famille, et ce, durant toute leur vie.
Enfin, je voudrais aborder avec vous les questions de communication et d'accessibilité. La Nouvelle Charte des anciens combattants a été mise en œuvre afin de répondre aux besoins des anciens combattants modernes. À cette fin, elle fait appel à des principes de gestion moderne de l'invalidité, et met l'emphase sur la réadaptation et une transition harmonieuse vers la vie civile. Nous avons tous une obligation de comprendre les complexités et les interrelations, et ACC doit redoubler d'efforts pour mieux faire connaître et expliquer la Nouvelle Charte des anciens combattants. Nos anciens combattants et leur famille ne méritent rien de moins.
La Nouvelle Charte des anciens combattants et la Loi améliorant la Nouvelle Charte des nouveaux combattants sont des documents détaillés et complexes. Nos anciens combattants et leur famille ont besoin de savoir quels programmes leur sont offerts pour leur venir en aide et comment y avoir accès, que ce soit au chapitre des finances, de la réadaptation, des services de soins de santé et des soins familiaux. Le gouvernement, quant à lui, doit s'assurer que les ressources et les programmes sont en place pour répondre à leurs besoins; il doit aussi examiner l'accessibilité à ces programmes et s'assurer que le personnel de première ligne est en place, et qu'il est qualifié pour aider les anciens combattants et leur famille. Cela ne doit pas être un système libre-service.
La plupart des anciens combattants et leur famille n'ont pas une connaissance approfondie de la Nouvelle Charte des anciens combattants. Cela, à mon avis, démontre clairement l'inefficacité des communications du gouvernement quant aux programmes et services qu'offre la Nouvelle Charte des anciens combattants pour nos anciens combattants blessés et leur famille. Cela démontre aussi clairement qu'il est temps pour le gouvernement de commencer à communiquer de façon proactive et de prendre contact avec tous les anciens combattants au pays, et de s'assurer qu'ils connaissent les compensations financières, les programmes de réadaptation, les services de soins de santé et les programmes d'aide aux familles auxquels ils ont droit, ainsi que les façons d'y accéder.
Enfin, il est également temps que nous apprenions tous à connaître la Nouvelle Charte des anciens combattants. Cela doit être une priorité. En effet, nos anciens combattants doivent connaître non seulement les faiblesses, mais aussi les forces de la législation, des programmes, des services et des prestations. Nous pouvons aussi venir en aide à nos anciens combattants et à leur famille.
Notre travail de revendication et nos programmes continueront de s'adapter pour répondre à une démographie en mouvement, et ce, tout en veillant à soutenir notre communauté traditionnelle d'anciens combattants. Toutefois, et quelle que soit la capacité de la Légion royale canadienne, nous croyons fermement que le ministère de la Défense nationale et Anciens Combattants Canada partagent une responsabilité de veiller à ce que les politiques, les pratiques et les programmes, grâce au soutien d'un programme de recherche durable, soient accessibles et répondent aux besoins uniques des anciens combattants tout en ayant l'objectif de permettre une transition harmonieuse de tous les anciens combattants et de leur famille pendant cette période de changement parfois difficile dans leur parcours de vie.
Depuis l'adoption de la Nouvelle Charte des anciens combattants, en 2006, nous avons été indéfectibles dans nos revendications pour y apporter des changements visant à mieux répondre aux besoins de sécurité financière de nos anciens combattants et de leur famille tout au long de leur vie. Et nous n'abandonnerons pas. L'adoption du projet de loi C-15 est un pas dans la bonne direction.
Merci.
Le président : D'après ce que nous comprenons, d'autres changements seront apportés au mandat du ministre des Anciens Combattants et à la pension à vie. Nous devrions nous attendre à des changements à cet égard. Est-ce aussi ce que vous avez compris?
M. McInnis : C'était dans la lettre de mandat. Encore une fois, j'aimerais insister sur le fait que nous envisageons la sécurité financière pour la durée de la vie sous toutes ses formes. Toutefois, il faut mener un examen. Il faut se fonder sur un modèle d'avancement professionnel, comme en ont parlé mes deux collègues aujourd'hui. Tous nos anciens combattants en profiteront si les choses sont faites correctement et de façon équitable, c'est-à-dire à partir du moment où une personne est blessée et en tenant compte de son âge, on établit le modèle d'avancement professionnel jusqu'au grade atteint.
La plupart d'entre nous ont eu une longue carrière dans l'armée. Nous avons une pension et nous pouvons toujours travailler. Toutefois, ce n'est pas le cas de nombreux militaires blessés et malades.
Le président : Vous avez mentionné le RARM. Je ne vais pas vous demander ce que signifie cet acronyme, mais pourriez-vous expliquer ce que c'est et comment cela vous touche? Vous avez dit que 75 p. 100 représentaient la base pour les personnes qui reçoivent des prestations du RARM.
M. McInnis : Le RARM est le programme d'assurance invalidité à long terme. Lorsqu'une personne se blesse, elle reçoit 75 p. 100 de son salaire à sa libération.
Le président : S'agit-il des gens en uniforme?
M. McInnis : Non, ils ne portent pas l'uniforme.
Le président : Ils peuvent faire une demande dans le cadre du RARM après avoir cessé de porter l'uniforme.
M. McInnis : Corrigez-moi si je me trompe, car je n'ai pas utilisé ce programme. Ils peuvent faire une demande lorsqu'ils quittent l'armée. Je crois que l'acronyme RARM signifie Régime d'assurance revenu militaire.
Le président : Le personnel en uniforme des Forces armées cotise à ce programme, du moins en partie. Est-ce son programme d'assurance-maladie?
M. McInnis : C'est un programme d'assurance ILD.
Le président : Merci.
La parole est d'abord au sénateur White, de l'Ontario.
Le sénateur White : Je vous remercie d'être ici aujourd'hui. Je vous remercie également d'avoir servi notre pays, monsieur McKenna.
Plus tôt aujourd'hui, nous avons entendu un exposé dans lequel on a parlé de la transition de l'allocation pour déficience permanente à l'« allocation pour incidence sur la carrière », ce qui pourrait obliger 2 700 anciens combattants à refaire le processus d'évaluation. Est-ce logique?
Monsieur le président, ces 2 700 anciens combattants devront-ils refaire le processus d'évaluation?
Le président : Je crois que c'est une excellente question.
Le sénateur White : J'essaie seulement de déterminer si c'est nécessaire. À votre avis, est-ce juste? En réalité, cela signifie que nous faisons plus que changer le nom du programme. Il se peut que des gens perdent leurs prestations et qu'on ne puisse plus les ajouter au nouveau programme, étant donné que nous n'examinons pas de nouveaux groupes.
Mme Squire : Dans nos divers rapports sur l'allocation pour déficience permanente, vous pouvez constater que notre problème est lié aux catégories elles-mêmes, car elles ne sont pas bien réparties. Par exemple, 92 p. 100 des gens se retrouvent dans la catégorie la moins élevée et seulement 1 p. 100 des gens reçoivent les prestations de la catégorie la plus élevée. C'est un gros problème pour nous. Nous croyons que cela doit changer.
Nous ne savons pas comment le ministère mettra cette mesure en œuvre et si on réévaluera les gens, car nous n'avons pas consulté les critères utilisés. Lorsque c'est possible, nous préférerions qu'on utilise les données recueillies pour éviter d'obliger les anciens combattants à refaire une demande. Cela dit, nous ne connaissons pas les critères utilisés.
Nous croyons que la nouvelle approche doit refléter la perte d'avancement professionnel. Comme l'a dit Brian, des promotions sont accordées tous les certains nombres d'années. Nous proposons l'adoption d'une formule qui privilégierait les données sur l'avancement professionnel venant de l'armée dans l'examen des années de service pour calculer l'ADP ou l'AIC.
Le sénateur White : Je vous remercie beaucoup de votre réponse. Certaines de ces préoccupations ont également été exprimées ce matin.
La deuxième chose que nous avons apprise aujourd'hui concerne l'avancement. Est-ce qu'on utilise une formule dans un autre pays en ce moment? Si oui, pourriez-vous nous expliquer comment elle est utilisée?
J'ai des antécédents dans la police. Si un policier se blessait en raison d'un accident, cela relevait de la CAT et de l'instance civile. Lorsque j'étais chef, j'ai écrit plusieurs lettres pour confirmer les connaissances, les compétences et les aptitudes d'une personne, ainsi que son éducation, et pour dire que je m'attendais à ce que cette personne atteigne un certain grade. Mes prévisions n'étaient peut-être pas tout à fait exactes, car la personne n'avait peut-être pas l'intérêt nécessaire, mais au moins, cela indiquait au juge ou au jury l'opinion que j'avais de cette personne. Il y avait un système en place. D'autres pays utilisent-ils un tel calcul de l'avancement en ce moment?
Mme Squire : Personnellement, je ne le sais pas, mais je sais que notre approche à l'égard de l'ADP inclut cette approche. En effet, on prévoit une indemnisation pour l'avancement professionnel perdu. Dans certains des travaux que nous effectuons sur la sécurité financière pour la durée de la vie, nous tenons compte du moment de la blessure et du potentiel d'avancement, afin de veiller à ce que la personne reçoive ce qu'elle aurait pu obtenir si elle était restée dans l'armée pendant toute la période prévue.
Le président : Pourriez-vous apporter des éclaircissements? Vous dites que c'est votre approche. Le rôle des ombudsmans des anciens combattants ne consiste pas à appliquer les critères et à vérifier si les gens sont admissibles.
Mme Squire : Non. Comme Guy Parent l'a mentionné lors de notre dernière comparution, nous avons examiné des résultats et des repères. Par exemple, si un résultat est l'allocation pour déficience à long terme raisonnable pour un ancien combattant gravement blessé, notre objectif était que cette personne qui souffre d'une invalidité totale et permanente reçoive la même chose que si elle avait servi pendant 35 ans dans l'armée.
Nous avons élaboré des prévisions et des modèles préliminaires, et nous avons utilisé le modèle d'avancement professionnel de l'armée, car il nous montre où sont les problèmes et les lacunes. Nous élaborons des modèles préliminaires afin qu'une fois notre analyse actuarielle terminée, nous puissions proposer de bonnes idées et des façons de simplifier l'approche actuelle.
Le président : Avez-vous envisagé de nous communiquer cela en temps opportun?
Mme Squire : Oui. Une fois l'analyse actuarielle terminée, probablement au début septembre, nous serons heureux de revenir et de vous présenter nos conclusions, car nous pensons qu'elles seront très intéressantes.
Le président : Vous avez indiqué au sénateur White que vous ne connaissiez pas toutes les approches utilisées par le ministère.
Mme Squire : Non, nous n'avons pas de détails sur l'ADP ou l'AIC, selon l'acronyme que vous souhaitez utiliser. On ne nous a pas informés des changements qui seront apportés. Nous aimerions certainement participer à ce processus et l'influencer dans la mesure du possible, mais jusqu'ici, on ne nous a envoyé aucune information à cet égard.
Le président : On présume que cela sera dans les règlements plutôt que...
Mme Squire : Et probablement aussi la politique.
Le président : Merci.
La sénatrice Wallin : Au fil des ans, nous avons entendu dire que les renseignements liés aux services n'étaient pas communiqués de façon adéquate. Nous faisons de notre mieux pour parler de ces problèmes aussi souvent que possible ici.
J'ai devant moi un document du Bureau de l'ombudsman — l'ombudsman des FC, pas celui des anciens combattants — et c'est très clair. Tous les programmes sont décrits très clairement. On retrouve ces renseignements sur les sites web. Le Bureau de l'ombudsman des anciens combattants a le même document, ainsi que le Bureau de l'ombudsman des FC.
J'aimerais préciser que je suis membre de la Légion et que je suis l'officier d'entraide de ma Légion. Nous parlons de cela tout le temps. Quel est le problème lié aux communications? Tout est ici, tous les renseignements sont ici. Les gens qui ont besoin de ces renseignements dépendent de ces derniers, et c'est pourquoi ils doivent les obtenir. Où est le problème?
M. McInnis : Je l'ai mentionné lors de nos réunions au Sommet des vétérans. Je crois qu'il s'agit d'envoyer des messages uniformes à l'échelle du pays. Une entrevue de transition menée dans une région du pays peut être complètement différente d'une entrevue de transition menée dans une autre région du pays. Par exemple, une entrevue peut durer 35 minutes et une autre peut durer 15 minutes. C'est une question d'uniformité dans la formation du personnel. Je dirais qu'il faut que le message soit « optez pour la simplicité ».
Selon les programmes d'Anciens Combattants Canada, il y a toute une série de politiques et de directives pour simplifier les choses. Je dis toujours qu'il faut écrire la politique. Dans l'armée, nous avions autrefois ce que nous appelions un message général des Forces armées canadiennes : optez pour la simplicité, et tout le monde comprendra. Il faut transmettre des messages uniformes sur les renseignements qu'on souhaite diffuser, et il faut également inclure les familles dans ces messages.
La sénatrice Wallin : Les différences dans les processus d'évaluation sont donc au cœur de ce problème?
M. McInnis : Oui, c'est une question d'uniformité.
La sénatrice Wallin : Pourrais-je obtenir les commentaires de M. McKenna?
M. McKenna : L'une des choses que nous avons demandé, c'est qu'au lieu d'adopter une seule approche pour les anciens combattants au sein d'Anciens Combattants Canada, il faudrait pratiquement que le gestionnaire de cas — c'est la conversation de première ligne avec l'ancien combattant —, soit essentiellement un ambassadeur de l'ensemble du gouvernement fédéral auprès de l'ancien combattant.
Dans mon cas, l'armée m'a traité de façon très respectueuse, mais une fois qu'elle a réglé votre cas, l'armée vous laisse tomber. Ensuite, il faut s'adresser à Anciens Combattants Canada. Certaines des questions qu'on peut vous poser une semaine après votre libération concernent des points dont on a discuté avant votre libération, mais vous ne pouvez pas retourner consulter le médecin, l'infirmière ou le gestionnaire de cas qui s'occupait de votre dossier dans l'armée. Il faut maintenant s'adresser à Anciens Combattants Canada.
Même à partir de ce moment-là, lorsque vous demandez d'autres prestations du gouvernement, il y a l'exemple parfait du crédit d'impôt pour invalidité par l'entremise de l'Agence du revenu du Canada. Encore une fois, vous êtes livré à vous-même pour obtenir des papiers ou des lettres du médecin, de nouvelles radiographies, et cetera. Vous pensez que vous avez terminé, mais ce n'est pas le cas, car lorsque vous faites une demande de prestations d'invalidité du RPC, il faut remplir un nouveau formulaire et obtenir d'autres lettres et papiers du médecin. Il s'ensuit que l'ancien combattant peut devoir s'adresser à quatre ministères différents.
Ce n'est pas de la méchanceté, madame; c'est seulement que des renseignements se perdent, car personne ne traite votre dossier du début à la fin.
La sénatrice Wallin : Notre comité a discuté de la fusion de l'ombudsman des vétérans et de l'ombudsman des FC et des façons de faciliter cette transition. Merci.
Je me trouve habituellement de l'autre côté de l'enjeu suivant, mais j'aimerais que vous me parliez de la façon de monter en grade et de l'avancement professionnel et des modèles que vous examinez. C'est compliqué. Vous prenez un jeune de 19 ou 20 ans, et dans un monde parfait, il aurait peut-être suivi un certain cheminement professionnel. Il aurait peut-être obtenu toutes ces promotions, mais nous ne savons pas comment les choses auraient pu se passer pour cette personne.
Devrions-nous nous montrer trop prudents, car il ne s'agit pas d'un grand nombre de personnes, et affirmer que ce petit nombre de personnes n'aurait peut-être pas suivi ce parcours professionnel en raison d'autres problèmes psychologiques ou de comportement ou qu'ils auraient pu décider de quitter l'armée? Ce nombre représente-t-il un problème important? Y a-t-il une façon de déterminer cela?
Mme Squire : Pour répondre à votre question sur l'équité, nous ne savons pas, et nous devons donc donner à la personne le bénéfice du doute. Nous ne savons pas si elle avait pu monter en grade si elle n'avait pas été blessée ou n'était pas tombée malade. Toutefois, ce choix lui a été enlevé. Donc, pour nous, c'est une question d'équité et nous croyons que nous devrions tenir compte de cela.
La sénatrice Wallin : Il n'y a aucune façon d'évaluer cela, n'est-ce pas?
Mme Squire : Non, mais je pense que l'avancement en grade tient compte de différents métiers qui ont une limite de grade, mais nous avons tenu compte de cela. Je crois donc que c'est une question d'équité; nous avons éliminé la possibilité de ce choix professionnel, et nous devons donc arranger les choses.
La sénatrice Beyak : C'est une excellente question. J'avais les mêmes préoccupations.
Le président : Monsieur McKenna, pourriez-vous nous parler de l'Equitas Society? Qu'est-ce que ce groupe?
M. McKenna : L'Equitas Society contient plusieurs éléments, dont l'un est représenté par les six demandeurs dont vous avez probablement entendu parler et qui intentent des poursuites judiciaires en ce moment. C'est l'un des éléments. Ensuite, il y a leur équipe juridique et la société qui s'occupe du financement.
Je suis également membre d'Equitas. Je ne suis pas l'un des demandeurs, mais j'agis à titre de conseiller. Comme vous pouvez vous l'imaginer, nous avons de nombreuses rencontres qui se tiennent parfois à huis clos, et nous avons besoin de plus de voix que les six demandeurs. Voilà mon rôle, monsieur.
Le président : Merci. Témoignez-vous aujourd'hui comme vétéran à titre personnel ou en tant que représentant d'Equitas?
M. McKenna : Je témoigne comme vétéran à titre personnel. C'est ce qui m'a été demandé, et c'est ce que j'ai présenté.
Le président : Merci. C'est important aux fins du compte rendu.
Passons maintenant au sénateur White pour la deuxième série de questions.
Le sénateur White : Monsieur McInnis, j'essaie de bien saisir le tout. Ce matin, j'ai entendu une représentante d'Anciens Combattants Canada, et je n'ai pas fait d'études en comptabilité pour une bonne raison. J'essaie de saisir la différence sur le plan financier qu'auront ces modifications au final dans les poches des vétérans.
Je vous ai entendu dire que cela aurait été mieux d'avoir 100 p. 100; je suis certain que c'est toujours le cas. À combien l'augmentation se chiffre-t-elle en pourcentage pour le vétéran moyen ou est-ce encore trop flou pour le moment pour nous en donner une idée? J'aimerais savoir si le vétéran moyen verra ses prestations augmenter de 10 ou de 15 p 100, par exemple.
M. McInnis : Passer de 75 à 90 p. 100 est une augmentation. Le montant versé sera plus élevé. Nous aimerions que le montant représente 100 p. 100 de la solde. Voilà ce que nous prônons. Les vétérans ne devraient pas avoir à accepter une diminution de salaire s'ils ne peuvent pas retourner sur le marché du travail.
Le sénateur White : Une partie du montant est non imposable, n'est-ce pas? En tenez-vous compte lorsque vous examinez la question, ou tous les montants sont-ils imposables?
M. McInnis : Non. Certaines indemnités sont imposables, tandis que d'autres ne le sont pas. La représentante de l'ombudsman serait mieux placée que moi pour en parler.
Mme Squire : Par exemple, l'indemnité d'invalidité est non imposable.
Le sénateur White : Je me fonde sur mon expérience, parce que je reçois certaines indemnités. Une indemnité non imposable qui représente 75 p. 100 de la solde correspond à une indemnité imposable qui représente 100 p. 100 de la solde. Madame Squire, monsieur McInnis, avez-vous examiné cet aspect et en arrivez-vous à la même conclusion?
M. McInnis : Je n'arrive pas à la même conclusion, à savoir que nous ne devrions pas amener une personne à atteindre ce que je considère comme le seuil de pauvreté en vue de lui permettre uniquement de subvenir à ses besoins. Si la maladie ou la blessure d'un militaire est attribuable à son service au pays, nous devons nous assurer qu'il ne dépend pas des banques alimentaires. Nous devons nous assurer de nous occuper de lui pour le reste de sa vie. Je n'ai pas les chiffres ou les données exactes que vous avez.
Mme Squire : De notre point de vue, nous sommes encore en train d'examiner la situation. Comme je l'ai mentionné, notre analyse actuarielle tiendra compte de toutes les modifications apportées dans le budget de 2015-2016.
Le sénateur White : Vous en tiendrez également compte.
Mme Squire : Nous ne le savons pas encore. Nous sommes encore en train d'examiner le tout.
M. McKenna : Pour répondre à votre question, monsieur, lorsque vous recevez des prestations du RARM ou l'allocation pour perte de revenus, c'est considéré comme un remplacement du revenu; c'est donc imposable.
Il est également important de comprendre que, lorsqu'un vétéran reçoit l'une ou l'autre de ces deux prestations, cela réduit du même montant sa pension des Forces canadiennes. Les prestations aux termes de la Loi sur la pension de retraite des Forces canadiennes, à laquelle vous cotisez dès le premier jour en tant que membre de la Force régulière ou dont vous effectuez le rachat de service en tant que membre de la Réserve, vous sont retirées. Voilà un point dont il faut tenir compte.
Pensez-y. Comme M. McInnis vient de le soulever, si vous passez toute votre carrière au sein des Forces canadiennes, vous toucherez votre pension et vous pourrez passer à autre chose. Si vous êtes blessé et que vous recevez l'allocation pour perte de revenus ou des prestations du RARM, vous ne toucherez pas votre pension, même si vous y avez cotisé et que vos cotisations ne vous seront pas remboursées. Bref, c'est imposable, et cela ampute votre pension aux termes de la Loi sur la pension de retraite des Forces canadiennes.
Le sénateur White : Merci de cette information, monsieur McKenna.
Est-ce également vrai dans le cas d'une pension d'invalidité? Qu'en est-il dans le cas d'une pension d'invalidité au sens strict en vertu des dispositions législatives relatives aux vétérans? Je sais que, si vous recevez votre pension de la GRC, votre pension d'invalidité ne réduit pas votre pension de la GRC. Est-ce la même chose?
M. McKenna : Il s'agissait de l'une des modifications qui ont été apportées à la suite du dernier litige, soit l'affaire Manuge, qui a permis, si vous vous en souvenez bien, de régler la question de la réduction des prestations du RARM. Non. Les personnes concernées touchent leur pension et leurs prestations du RARM, pour le dire ainsi.
Le sénateur White : Merci beaucoup.
La sénatrice Wallin : Je ne suis pas certaine du témoin auquel adresser ma question, parce que je n'étais pas à la réunion de ce matin, mais il semble y avoir une question d'ordre technique entre le RARM et ce qui s'appellera l'allocation pour incidence sur la carrière. Si le RARM est le premier endroit vers lequel un vétéran se tourne avant d'avoir déterminé s'il est admissible à d'autres prestations, dites-vous que cela demeurera à 75 p. 100 et que c'est seulement l'autre programme qui sera modifié, à savoir que l'allocation pour déficience permanente deviendra l'allocation pour incidence sur la carrière?
M. McInnis : Non. C'est l'allocation pour perte de revenus et non l'allocation pour incidence sur la carrière. Nous voulons que cela passe de 75 à 90 p. 100 pour que tout le monde soit égal. L'allocation pour incidence sur la carrière remplacera l'allocation pour déficience permanente, mais c'est un autre élément.
Le président : M. McKenna a fait des commentaires à ce sujet plus tôt.
M. McKenna : Oui. J'ai moi-même reçu des prestations du RARM.
De manière générale, lorsque le militaire est libéré des Forces canadiennes, même s'il est blessé, s'il a été déclaré comme étant immédiatement apte à retourner aux études — il est libéré le 23 juillet, par exemple, et il peut dès le 24 juillet suivre une formation —, c'est à ce moment qu'il touche des prestations du RARM. Actuellement, le montant représente 75 p. 100 de la solde que vous touchiez précédemment. En vertu du projet de loi dont vous êtes saisis, cela demeurera inchangé.
S'il est jugé au moment de votre libération que vous avez besoin de réadaptation professionnelle, qui peut prendre la forme de consultations ou de réadaptation physique, avant de suivre une autre formation, vous toucherez l'allocation pour perte de revenus d'Anciens Combattants Canada et non des prestations du RARM. En gros, une personne capable de retourner demain aux études touchera 75 p. 100 de sa solde, tandis qu'une personne qui a besoin d'autres soins avant de pouvoir retourner aux études touchera 90 p. 100 de sa solde. C'est ce dont il faut tenir compte lorsque vous examinez les deux situations.
La sénatrice Wallin : La personne qui, comme vous, reçoit des prestations du RARM et qui retourne aux études pour suivre une nouvelle formation touche 75 p. 100 de sa solde, parce qu'elle peut commencer plus rapidement à gagner un revenu d'une autre manière et à un taux plus élevé. Qu'en pensez-vous?
M. McKenna : Pour être bien honnête, je ne peux pas vous dire ce qu'était l'intention derrière la politique. Je peux seulement vous dire les effets qu'elle a sur moi.
La sénatrice Wallin : Voyez-vous cela comme une mesure punitive? Recevez-vous 75 p. 100, parce que vous êtes plus apte?
M. McKenna : Sénatrice, je vais le dire ainsi. Actuellement dans ma vie, je dois composer avec l'état de stress post-traumatique et j'ai également un grave problème aux intestins attribuable à mon service. Je dois accepter que mes aspirations professionnelles sont beaucoup plus restreintes qu'elles l'étaient et que je ne peux plus faire ce que j'aimais. Ce n'est pas le bon moment de réduire le salaire d'une personne.
La sénatrice Wallin : J'essaie de faire valoir que personne ne sait vraiment la raison pour laquelle ce groupe reçoit 75 p. 100 de sa solde, tandis que l'autre groupe qui a besoin au départ d'une réadaptation psychologique ou physique additionnelle toucherait 90 p. 100 de sa solde en vertu du présent projet de loi.
M. McKenna : Nous avons le sentiment que c'est une mesure punitive. Les autorités essaient de donner l'impression que nous essayons davantage de retourner au travail et qu'elles appliquent en gros le modèle de l'industrie de l'assurance à Anciens Combattants Canada. C'est ainsi que nous le voyons, mais je ne peux pas vous en dire davantage quant à la nature de la loi.
Mme Squire : Le problème, c'est que le projet de loi fait passer l'allocation pour perte de revenus à 90 p.100 de la solde pour les autres, mais il n'y a rien de tel jusqu'à présent relativement au RARM. Voilà le problème.
Le sénateur Wallin : Je comprends. Merci.
Le président : Par ailleurs, si des changements étaient apportés, cela proviendrait d'une autre source ou d'une autre direction.
La parole est à la sénatrice Beyak, du Nord de l'Ontario.
La sénatrice Beyak : Merci beaucoup. Je souhaiterais être membre permanente du comité; je remplace seulement des sénateurs de temps en temps, mais j'ai l'impression que vos travaux sont faits de manière très sincère.
Les électeurs que je représente me disent qu'ils trouvent complexes nos délibérations lorsqu'ils nous regardent sur CPAC, mais ce ne l'est pas pour nous au comité. Nous semblons bien comprendre ce qu'il en retourne et savoir où nous nous en allons. Cependant, le vétéran moyen qui nous regarde à la maison et qui essaie de comprendre où il doit aller éprouve de la difficulté. La sénatrice Wallin a soulevé cette question, et la Légion y travaille sans relâche. Avez- vous des solutions pour nous débarrasser du cloisonnement, trouver la personne à laquelle un vétéran peut parler et simplifier les choses?
M. McInnis : Cela se résume aux communications. Nous réalisons d'importantes initiatives de sensibilisation depuis cinq ans à la Légion auprès des unités de la Réserve relativement à nos officiers d'entraide de filiale par l'entremise des filiales locales de la Légion, de nos officiers d'entraide de direction et des médias sociaux. Nous avons également un compte Twitter. Nous utilisons toutes les tribunes disponibles pour diffuser notre message : Ne le faites pas seul. Communiquer avec un officier d'entraide de direction, le Bureau d'entraide de la direction nationale, l'ombudsman ou un agent des prestations d'invalidité d'Anciens Combattants Canada. De l'aide vous est offerte, et ce, sans frais.
Le président : Je me demande si les deux autres témoins aimeraient faire un commentaire à ce sujet, parce que c'est une question fondamentale.
La sénatrice Beyak : Je tiens à remercier le représentant de la Légion, parce que les vétérans mentionnent sans cesse le travail de votre organisme. Ils peuvent aller vous voir, et vous comprenez leur situation.
Mme Squire : Nous avons également un numéro sans frais, un service de première ligne et un formulaire de plainte en ligne que les gens peuvent utiliser si cela les intéresse.
Par ailleurs, je sais qu'Anciens Combattants Canada s'est fait demander de nommer une personne qui assumerait le rôle de navigateur. Ainsi, lorsque vous arrivez à Anciens Combattants Canada, vous avez une personne qui est là pour vous aider tout au long du processus. Ce serait une énorme amélioration.
M. McKenna : J'aimerais conseiller aux gens qu'il serait bon de conserver certaines solutions simples sur le plan technologique, même si nous sommes à une époque fortement axée sur les technologies, parce que ce qui fonctionnera à Vancouver dans un bureau d'ACC ou avec un iPhone dans ma poche ne sera pas ce qui fonctionnera pour un vétéran qui habite dans une collectivité éloignée du Nord sans accès à Internet.
En ce qui a trait aux communications et aux mesures en vue de nous assurer de traiter également les vétérans de partout au Canada, nous devons conserver certains moyens traditionnels pour communiquer avec les vétérans. L'organisme de M. McInnis en est un bon exemple. Nous avons besoin de lieux physiques où les vétérans peuvent se rendre pour obtenir de l'information.
Merci, monsieur.
Le président : Merci.
J'ai une question pour les témoins. Lorsque le présent projet de loi sera adopté, des règlements devront être rédigés. Avez-vous été consulté en ce qui a trait à l'élaboration de ces règlements ou y a-t-il quelque chose qui vous laisse croire que vous le serez peut-être?
M. McKenna : Je crois que des participants aux groupes consultatifs ministériels ou au Sommet des intervenants continueront d'être saisis de certains aspects.
Par contre, en ce qui a trait aux consultations directes avec les vétérans, je ne sais pas ce qui se passe de ce côté.
Mme Squire : Ma réponse est la même. Nous espérons que le groupe consultatif ministériel et que le groupe des politiques y participeront, et nous espérons que le ministère nous invitera à formuler des commentaires. Il est encore tôt dans le processus, et le ministère vient à peine de commencer ses travaux en la matière, mais nous espérons être invités à formuler des commentaires.
M. McInnis : Nous espérons être inclus dans le processus. Nous sommes membres de chaque comité consultatif, et c'est là que la majorité du travail sera fait. Cependant, lorsque les règlements seront rédigés, nous souhaitons pouvoir les passer en revue avant leur publication.
Le président : Notre sous-comité espère également que vous serez consultés. Le problème découle en partie de lacunes sur le plan des communications. Cela suscite une réaction qui n'est pas toujours favorable.
M. McInnis : Néanmoins, les comités consultatifs sont un pas dans la bonne direction.
Le président : Comme les sénateurs n'ont pas d'autres questions, je tiens à remercier chaque témoin de leur présence. Merci du travail que vous faites pour nos vétérans.
(Le comité s'ajourne.)