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SOCI - Comité permanent

Affaires sociales, sciences et technologie

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie

Fascicule 28 - Témoignages du 6 décembre 2012


OTTAWA, le jeudi 6 décembre 2012

Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, auquel a été déféré le projet de loi C-44, Loi modifiant le Code canadien du travail et la Loi sur l'assurance-emploi et modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu et le Règlement de l'impôt sur le revenu en conséquence, se réunit aujourd'hui, à 10 h 29, pour étudier le projet de loi.

Le sénateur Kelvin Kenneth Ogilvie (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Mesdames et messieurs les sénateurs, la séance est ouverte.

[Français]

Je vous souhaite la bienvenue au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.

[Traduction]

Je suis Kelvin Ogilvie, sénateur de la Nouvelle-Écosse. Je demande à mes collègues de bien vouloir se présenter, en débutant par ma droite.

Le sénateur Seidman : Judith Seidman, de Montréal, au Québec.

Le sénateur Enverga : Tobias Enverga, sénateur de l'Ontario.

Le sénateur Eaton : Nicole Eaton, sénateur de l'Ontario.

[Français]

Le sénateur Verner : Josée Verner du Québec.

[Traduction]

Le sénateur Cordy : Je suis Jane Cordy, sénateur de la Nouvelle-Écosse.

Le sénateur Eggleton : Art Eggleton, sénateur de Toronto et vice-président du comité.

Le président : Merci. Nous avons deux parties aujourd'hui. Êtes-vous d'accord, mesdames et messieurs, pour dire que la deuxième partie se termine au plus tard à 11 h 30?

Des voix : D'accord.

Le président : Merci.

Je suis ravi d'accueillir nos témoins. Nous en avons trois aujourd'hui. Je leur souhaiterai la bienvenue en leur cédant la parole. Nous avons décidé de suivre la liste de témoins établie dans l'ordre du jour, ce qui veut dire que Marie-Adèle Davis, la directrice exécutive de la Société canadienne de pédiatrie, prendra la parole en premier. Allez-y, s'il vous plaît.

Marie-Adèle Davis, directrice exécutive, Société canadienne de pédiatrie : Merci d'avoir invité la Société canadienne de pédiatrie à témoigner devant votre comité. Comme le président l'a mentionné, je suis directrice exécutive de la Société canadienne de pédiatrie; je suis ravie de témoigner devant vous au nom de nos membres, soit plus de 3 000 spécialistes et sous-spécialistes en pédiatrie de partout au pays. Les membres de la SCP sont les médecins qui prennent soin des enfants, des jeunes et des familles qui bénéficieront des modifications proposées dans le projet de loi C-44.

Nous félicitons le gouvernement canadien d'avoir compris les défis particuliers vécus par les parents d'enfants gravement malades, d'avoir reconnu qu'ils doivent rester au chevet de l'enfant à l'hôpital, pouvoir rester au foyer et soigner l'enfant qui a récemment reçu son congé de l'hôpital, et être disponibles pour prendre des décisions en matière de soins au nom de l'enfant. En outre, le projet de loi proposée reconnaît le stress émotif vécu lorsqu'un enfant combat un cancer, a une blessure grave qui pourrait être mortelle ou se trouve en phase terminale d'une maladie génétique incurable.

La Société canadienne de pédiatrie salue également la souplesse que donnera une loi qui reconnaît que les parents d'un enfant gravement malade ne peuvent pas toujours prendre tous leurs congés d'un seul coup pendant une période de 52 semaines. Les enfants sont très résistants, et même ceux qui sont atteints d'une maladie mortelle peuvent mener une vie normale pendant certaines périodes, fréquenter l'école et s'adonner à diverses activités. Il est en outre utile que le projet de loi C-44 permette aux parents de présenter une nouvelle demande de prestations si l'enfant fait une grave rechute. Nous appuyons aussi sans réserve la possibilité de partager les prestations entre les parents, pour qu'ils puissent tous les deux participer pleinement aux soins de l'enfant atteint d'une maladie grave.

Étant donné que j'ai eu l'occasion de témoigner devant le comité HUMA de la Chambre des communes au sujet du présent projet de loi, j'ai pu expliquer plus en détail comment la mesure pourrait être améliorée en vue de mieux épauler les familles qu'elle vise à aider. Permettez-moi de vous présenter ces points.

Ce soutien sera bénéfique aux parents d'enfants gravement malades. Par contre, ce seront peut-être les parents aux prises avec des défis socio-économiques des plus importants qui en profiteront le plus. Je pense, par exemple, aux chefs de famille monoparentale, aux gens qui gagnent le salaire minimum ou qui ont un emploi à temps partiel et dont l'employeur n'offre souvent pas de prestations d'assurance-maladie complémentaires. C'est d'une importance capitale de nous assurer que tous les parents qui ont besoin de soutien sont admissibles aux prestations d'assurance-emploi. Par conséquent, la Société canadienne de pédiatrie demande que le projet de loi C-44 fasse correspondre les critères d'admissibilité relativement à l'assurance-emploi pour les parents d'enfants gravement malades aux critères des autres programmes qui exigent un nombre minimal de semaines travaillées.

De plus, la Société canadienne de pédiatrie vous demande d'examiner sérieusement la possibilité d'augmenter le nombre de jours que les parents ont pour demander leurs prestations à la suite du décès d'un enfant. L'objectif serait de s'aligner sur ce qui se fait dans le cas de parents d'un enfant dont le décès tragique est causé par un crime.

La Société canadienne de pédiatrie estime pouvoir collaborer avec le gouvernement canadien en vue d'assurer la mise en œuvre harmonieuse du projet de loi C-44. Puisque nos membres représentent la majorité des médecins qui rempliront les formulaires pour les familles, nous aimerions vraiment participer à l'élaboration et à la conception des formulaires en vue de nous assurer qu'ils seront faciles à utiliser. Il est essentiel que les formulaires soient créés en fonction des enfants, des jeunes et des familles et qu'on ne se limite pas à la simple modification des formulaires conçus pour les besoins en santé des adultes. Si on prend le temps d'élaborer un formulaire axé sur la famille, nous sommes d'avis que le processus de demande de prestations sera beaucoup plus harmonieux et que cela réduira les mesures bureaucratiques. Il est important de se rappeler que les médecins qui soignent les enfants gravement malades sont extrêmement occupés. Nous voulons nous assurer qu'ils consacrent leur temps aux familles plutôt qu'au travail de bureau.

La Société canadienne de pédiatrie accueillerait aussi favorablement l'occasion de collaborer avec le gouvernement en vue de nous assurer que la définition d'enfant gravement malade est aussi pratique que possible pour les familles, les pédiatres et les employés fédéraux qui administrent le programme.

Pour conclure, je dirai que la Société canadienne de pédiatrie appuie sans réserve les modifications envisagées dans le projet de loi C-44. Nous encourageons le gouvernement à collaborer étroitement avec nous pour garantir que le projet de loi est mis en œuvre sans heurts et que la loi appuie au maximum les parents d'enfants et de jeunes gravement malades.

Le président : Merci beaucoup. La parole est maintenant à Denise Page qui est analyste principale des politiques en santé à la Société canadienne du cancer.

[Français]

Denise Page, analyste principale des politiques en matière de santé, Société canadienne du cancer : Bonjour, au nom de toutes les personnes touchées par le cancer et de leurs proches, nous remercions le comité de l'invitation à venir parler des problèmes rencontrés par les parents avec l'accès aux prestations spéciales de l'assurance-emploi et de souligner l'amélioration qu'apporterait le projet de loi C-44, Loi visant à aider les familles dans le besoin. Je suis analyste principal des politiques en matière de santé pour la Société canadienne du cancer.

La Société canadienne du cancer est un organisme bénévole à caractère communautaire dont la mission est l'éradication du cancer et l'amélioration de la qualité de vie des personnes touchées par le cancer. Au cours des deux dernières années, la société a demandé au gouvernement fédéral la mise en place de prestations spéciales pour les parents d'enfants atteints de cancer et de s'assurer que ces prestations répondent à la réalité de ces parents. Présentement les seules prestations auxquelles ont droit les parents sont les six semaines de prestations de soignants, si le médecin certifie le décès de leur enfant au cours des six prochains mois.

Nous accueillons favorablement la nouvelle prestation d'assurance-emploi pour les parents d'enfants gravement malades qui permettraient aux parents de s'absenter du travail pour une période de 37 semaines et de recevoir un soutien du revenu pendant un maximum de 35 semaine, mais nous voulons nous assurer qu'il y aura suffisamment de souplesse et de flexibilité lorsque viendra le temps d'en faire la demande. Voici pourquoi.

On estime qu'en 2012, 1 400 enfants âgés de 0 à 19 ans recevront un diagnostic de cancer et que 160 en mourront. Bien que le taux de survie à cinq ans, pour tous les types de cancer infantile combinés, soit de 82 p. 100, le cancer demeure toujours la deuxième cause de décès chez les enfants de plus d'un mois, après les accidents.

L'évolution et le traitement de la maladie varient selon les différents types de cancer et d'un enfant à l'autre, bien que chaque personne soit différente, la durée totale d'un traitement de chimiothérapie, pour un enfant, est d'environ six mois, mais peut varier de trois à plus de 12 mois.

Lorsque la radiothérapie est sélectionnée comme traitement principal du cancer, elle est généralement administrée une fois par jour, cinq jours par semaine, pendant environ trois à huit semaines. Il peut aussi arriver qu'un traitement soit plus long ou que les hospitalisations soient plus fréquentes ou plus longues, ou les deux et pas toujours de façon continue.

De plus, les traitements spécialisés en oncologie pédiatrique ne sont offerts que dans certaines villes canadiennes, ce qui signifie que beaucoup de parents doivent voyager plus de 100 kilomètres pour que leur enfant puisse avoir accès aux traitements requis. Prendre soin de son enfant, après le diagnostic de cancer est stressant et n'est pas une option. Il est essentiel que les parents participent 24 heures par jour, sept jours par semaine aux soins de leur enfant.

Le cancer chez les enfants et les jeunes a une incidence disproportionnée sur les systèmes de santé et de services sociaux ainsi que sur l'économie. Avoir un enfant atteint de cancer est une expérience difficile qui a d'importantes répercussions allant au-delà du traitement. D'après les estimations, les deux tiers des survivants à un cancer infantile souffrent d'au moins un effet secondaire chronique ou à survenue tardive à la suite de leurs traitements anticancéreux.

Jusqu'à un tiers de ces effets secondaires tardifs sont jugés majeurs, graves ou mettant la vie en danger. Compte tenu du nombre toujours plus élevé d'enfants et de jeunes qui survivent à un diagnostic de cancer, le besoin d'une surveillance à long terme et des soins de suivi continuera de croître.

Par conséquent, l'une des choses importantes pour ce comité de garder à l'esprit, c'est que pour le cancer, plus d'enfants sont traités sur une plus longue période de temps, mais pas toujours de façon continue; le retour à une vie normale, dès que l'enfant va mieux, est fortement préconisé par les pédiatres.

Nous demandons au comité de s'assurer de la flexibilité et de la souplesse dans le programme afin que les parents puissent s'absenter du travail lorsque c'est nécessaire et de retourner à une vie normale en même temps que leur enfant, reconnaissant ainsi la non continuité des traitements et la souplesse pour le renouvellement des prestations dans le cas d'une rechute ou d'effets secondaires.

Un autre enjeu important doit être abordé quand on parle de prendre soin d'un enfant gravement malade, c'est la protection d'emploi. Bien que la composante protection d'emploi de cette loi aidera de nombreuses familles canadiennes, cela n'inclut pas la protection d'emploi de compétence provinciale ou territoriale. La Société canadienne du cancer demande à ce comité un engagement clair au gouvernement fédéral pour que soit discuté lors de la prochaine réunion des ministres fédéral, provinciaux et territoriaux de la nécessité d'adapter les législations provinciales et territoriales afin d'offrir la même protection d'emploi à tous les Canadiens.

En février dernier, le ministre des Finances a déclaré que le nouveau crédit d'impôt pour les proches aidants était une première étape. Nous considérons ce projet de loi comme une autre étape importante et nous allons travailler avec tous les gouvernements afin de faire avancer ce dossier et améliorer la qualité de vie des patients atteints de cancer et de leur proche.

[Traduction]

Le président : Je cède maintenant la parole à Stephen Moreau qui est un associé de Cavalluzzo Shilton McIntyre Cornish LLP.

[Français]

Stephen Moreau, associé, Cavalluzzo, Shilton McYntire Cornish LLP : Merci monsieur le président de l'invitation pour le projet de loi C-44.

[Traduction]

Je vais vous faire part de la teneur de mon exposé. Vous savez très bien que le projet de loi C-44 met en œuvre trois importantes modifications à la Loi sur l'assurance-emploi. Je vais aborder la troisième. Les autres témoins ont discuté des deux premières, à savoir le nouveau congé en cas de maladie grave et le nouveau congé en cas de décès ou de disparition d'un enfant. Je vais me concentrer sur le troisième aspect qui se veut une petite modification de deux ou trois articles. Il s'agit de modifications qui précisent la façon dont la Loi sur l'assurance-emploi traite les demandes de prestations de maladie présentées pendant un congé parental.

Dans l'ensemble, je peux vous dire que je suis favorable aux modifications, mais je tiens à mettre l'accent sur la troisième modification, soit celle qui concerne les prestations de maladie pendant un congé parental. J'aborderai maintenant ce qui m'intéresse.

[Français]

Je suis un avocat associé au cabinet Cavalluzzo Shilton McIntyre Cornish, un cabinet à Toronto qui se spécialise dans le droit à l'emploi, le droit des travailleurs et des travailleuses.

[Traduction]

Dans ma pratique, je me suis spécialisé dans les questions relatives à l'assurance-emploi, ce qui est inhabituel, parce que les prestations d'assurance-emploi ont tendance à être faibles et que les avocats n'aiment pas travailler pour de petites sommes. Nombre de mes clients ont vécu une injustice ou un manquement en raison de lacunes dans le régime d'assurance-emploi. Certains de ces aspects sont abordés dans le document que j'ai remis au comité. En passant, si vous voulez en apprendre plus sur ce que je fais et ce que je dis ce matin, j'ai un document d'information d'environ 10 pages que j'ai remis au comité.

Je vais faire quelques commentaires sur mes opinions concernant le projet de loi C-44 et la troisième modification que j'ai mentionnée. Voici comment j'aborde le projet de loi. En 2010 et 2011, j'ai représenté Mme Natalya Rougas de Toronto. On lui a diagnostiqué un cancer du sein lors de la 33e semaine de ses 35 semaines de congé parental. Elle devait retourner au travail à la fin des 35 semaines. Elle ne le pouvait pas. Elle a dû suivre pendant un an des traitements de chimiothérapie et d'autres traitements divers. Elle s'est dit : « Étant donné que je ne pourrai pas travailler durant cette période, j'ai le droit de présenter une demande de prestations de maladie en vertu de la Loi sur l'assurance-emploi. Je pourrai ensuite poursuivre mes prestations parentales lorsque je me sentirai mieux. » Sa demande a été refusée en vertu de la Loi sur l'assurance-emploi avant le projet de loi C-44 et les modifications proposées.

Je suis intervenu et j'ai interjeté appel de la décision, et le juge-arbitre de l'assurance-emploi nous a donné raison en août 2011. Le juge-arbitre a dit qu'en vertu de la présente Loi sur l'assurance-emploi une femme peut présenter une demande de prestations de maladie pendant un congé de maternité. Le gouvernement du Canada a décidé de ne pas en appeler de la décision et plus précisément de ne pas demander un contrôle judiciaire de la décision à la Cour d'appel fédérale, et je crois que c'était une décision très juste. En fait, la porte-parole de la ministre a fait une déclaration dans le Toronto Star, et j'ai cité l'extrait dans mon document. Elle disait que la situation de Mme Rougas était malheureuse et que le système était injuste.

Le projet de loi C-44 et les modifications dont je parle ce matin sont le résultat de la situation injuste qu'a vécue Mme Rougas. Je donne mon appui au projet de loi C-44, mais ce n'est pas parce qu'il s'agit d'une mesure législative nécessaire, mais bien parce qu'il faut apporter certaines précisions pour éviter que d'autres subissent ce que Natalya Rougas a enduré. Les gens devraient seulement avoir à présenter une demande de prestations de maladie et les obtenir. Ils ne devraient pas avoir à interjeter appel du présent libellé de la Loi sur l'assurance-emploi, à engager un avocat et à se lancer dans un processus d'appel de deux ans comme Mme Rougas a dû le faire.

Pourquoi suis-je favorable à la modification ou à l'idée globale d'accorder des prestations de maladie pendant un congé parental? Mon document répond à cette question, mais il y a en fait des raisons historiques qui viennent soutenir le tout, mais je ne vais pas les aborder. C'est ce que j'appelle une maladie « empreinte de dignité ». Les gens qui demandent des prestations de maladie ont cotisé au régime. Ils ont travaillé et sont retournés au travail. Du moins, c'est l'objectif de la mesure législative.

Je crois que la Chambre des communes et le Sénat ont déjà donné leur appui en 2002 aux prestations de maladie pendant un congé parental par l'entremise des dispositions du projet de loi C-49. Je vous renvoie à la page 7 de mon document, mais vous n'avez pas à la consulter. Par contre, aux fins du compte-rendu, le ministre des Finances à l'époque, John McCallum, et un sénateur qui n'est plus avec nous, le sénateur Anne Cools, ont affirmé très clairement à la Chambre des communes, au Sénat et devant un comité de la Chambre que le projet de loi C-49 permettait déjà de telles prestations en 2002.

Je tiens à remercier le gouvernement du projet de loi C-44, mais je dois préciser que le projet de loi C-44 n'est pas littéralement nécessaire. Il apporte des précisions, mais ses dispositions ne sont pas nécessaires. Vous pouvez consulter mon document pour avoir de plus amples renseignements. Je suis disposé à répondre à vos questions portant sur les raisons pour lesquelles j'appuie la modification.

Le président : Merci beaucoup de vos exposés. Je dois seulement apporter une petite correction. Le sénateur Cools siège toujours au Sénat du Canada; le sénateur n'est tout simplement pas membre de notre comité. Bref, en ce qui concerne notre comité, vous avez raison, mais je peux vous assurer que le sénateur Cools siège encore au Sénat.

Je laisse maintenant mes collègues vous poser des questions.

Le sénateur Eggleton : Madame Davis, vous avez fait une suggestion précise, mais vous ne l'avez pas faite par écrit. Vous sembliez croire qu'une amélioration était nécessaire relativement au projet de loi ou à la mise en œuvre du projet de loi ou des règles entourant le projet de loi. Pourriez-vous nous répéter votre suggestion et nous la transmettre par écrit?

Mme Davis : Je m'excuse de ne pas l'avoir fait. Je suis revenue de Vancouver à 1 heure cette nuit. Je les transmettrai à la greffière.

Je vous demande de vous assurer dans votre grande sagesse que le nombre d'heures qu'une personne doit travailler en vue d'être admissible aux prestations correspond à ce qui a déjà cours pour les autres prestations d'assurance- emploi. Selon ce que j'en comprends, en fonction du libellé actuel du projet de loi, le nombre d'heures est plus élevé, et je m'inquiète que cela désavantage encore plus les familles les plus vulnérables. Si vous travaillez à temps partiel et que vous n'avez pas de prestations de maladie au travail, il vous faudra plus de temps pour accumuler les heures en vue d'y être admissible. Je vous demande seulement de tenir compte des mères chefs de famille monoparentale et des travailleurs à temps partiel, d'autant plus que ces gens, sur le plan financier, ont peut-être davantage besoin des prestations.

Le sénateur Eggleton : La disposition sur les 600 heures se trouve dans le projet de loi. Vous nous dites qu'il faudrait que ce soit réduit.

Mme Davis : Je ne suis pas spécialiste en matière d'assurance-emploi, comme l'est mon collègue à ma droite, mais je crois comprendre que d'autres programmes exigent seulement 420 heures. Je vous demande d'envisager la possibilité d'abaisser le critère à 420 heures en vue de soutenir les gens vulnérables.

M. Moreau : Je ne le sais pas. Je croyais que le critère était de 600 heures dans tous les cas, et je ne pensais pas que c'était modifié. Je ne connais pas la disposition sur les 420 heures. Je crois comprendre qu'il y a un critère qui exige plus de 600 heures dans le cas d'une demande à titre de prestataire de la deuxième catégorie. Je n'avais pas vu que c'était inférieur. Je m'en remets à vos connaissances. Je ne connais pas la réponse.

Le sénateur Eggleton : Une grande partie de l'accent a porté sur les enfants gravement malades ou les parents d'enfants assassinés ou disparus. Dans le cas des enfants gravement malades, le critère de 600 heures s'applique, mais dans le cas de parents d'enfants assassinés ou disparus, ce n'est pas du tout le cas; il n'y a pas d'exigence minimale. Avez-vous des commentaires à cet effet?

Mme Davis : J'aimerais que ce soit égal dans tous les cas.

Le sénateur Eggleton : Madame Davis, vous avez également souligné un problème, soit que les prestations cessent à la fin de la semaine durant laquelle l'enfant décède, alors que dans le cas d'un enfant disparu le congé sans solde prend fin 14 jours après l'évènement. N'y avez-vous justement pas fait allusion? Vous avez dit que les règles et la période de 14 jours devraient s'appliquer dans tous les cas, n'est-ce pas?

Mme Davis : Encore une fois, je crois que ce serait juste. Malheureusement, lorsqu'un enfant meurt en raison d'une maladie ou d'un crime, il faut un certain temps pour être capable de remonter en selle, pour ainsi dire. Cela ne se fait pas en 14 jours, loin de là, mais cette période permet aux gens de se préparer à retourner au travail de façon productive.

Le sénateur Eggleton : Monsieur Moreau, vous avez mis l'accent sur un aspect du projet de loi. Les dispositions actuelles pour ce qui est du congé de maladie accordent 15 jours. Je crois que c'est en vigueur depuis des décennies. Croyez-vous que c'est actuellement suffisant? Je comprends que cela s'aligne sur les autres provisions, mais j'aimerais savoir si, selon vous, la durée du congé de maladie est suffisante.

M. Moreau : Ce sont en fait 15 semaines.

Le sénateur Eggleton : C'est ce que je voulais dire.

M. Moreau : Ce sont bien 15 semaines qui sont accordées depuis 1971 précisément. Est-ce toujours conforme à notre réalité? De manière générale, je dirais que j'aimerais que ce soit plus élevé. Pour ce qui est de savoir si c'est conforme ou non à notre réalité, c'est une question difficile à répondre qui demanderait d'analyser soigneusement l'industrie, parce que bon nombre d'employeurs planifient les niveaux de prestations en fonction des 15 semaines. Le régime d'assurance-emploi offre actuellement 15 semaines. Il y a normalement des congés pour une courte période et des congés pour une longue période qui sont rattachés à l'existence des 15 semaines. À certains égards, cela semble génial. Augmentons la période à 30 semaines. N'est-ce pas plus conforme à la réalité? Selon moi, si nous le faisons, les employeurs décideront peut-être de ne plus offrir d'assurance-salaire en cas d'invalidité de courte durée. C'est une question très complexe. Il ne suffit pas d'augmenter le nombre de semaines.

Cela étant dit, la durée moyenne des prestations de maladie est de 8 à 10 semaines, même avec le régime actuel. Honnêtement, ce n'est donc pas nécessaire en fonction de la moyenne d'en accorder plus. Par contre, de manière générale, je préfère toujours en avoir plus que moins.

Le sénateur Eggleton : Hier, nous avons entendu la ministre Finley. Elle a dit que la technologie moderne permet d'entrer et de sortir du régime. Il y a plus d'établissements qui offrent des soins ambulatoires : vous entrez et vous sortez. À cet égard, les 15 semaines seraient encore appropriées. Par contre, il y a de plus en plus de maladies chroniques. Dans le cas d'un cancer, les gens ont besoin de plus de temps pour recouvrer la santé ou d'une période de réadaptation plus longue. J'aimerais savoir à quel point il faut examiner la disposition sur le congé de maladie en vue de tenir compte des besoins actuels des Canadiens.

M. Moreau : Règle générale, le régime d'assurance-emploi ne répond pas aux attentes, et ce n'est pas seulement en ce qui a trait au congé de maladie, parce qu'il se veut une assurance, mais nous savons tous que les assurances ont normalement des clauses qui stipulent que vous serez dédommagé pour votre perte. La perte peut être faible ou élevée, mais vous versez la même cotisation. Le régime a établi des maximums et des critères uniformisés. C'est peut-être nécessaire pour maintenir les coûts bas. Cependant, dans le cas des régimes d'assurances que nous connaissons, y compris les assurances de maison, les sociétés d'assurance n'établissent pas précisément d'avance ce qui sera versé; votre contrat stipule seulement que vous serez dédommagé. Il y a tout naturellement des maximums, qui sont normalement extrêmement élevés.

[Français]

Mme Page : Dans le cas du cancer, quand l'assurance-emploi a été créée dans les années 1970, 15 semaines probablement confirmaient que tu aies ton diagnostic et que tu en mourrais. Aujourd'hui, avec les traitements et la technologie, beaucoup plus de gens survivent au cancer, mais naturellement, les traitements sont sur une beaucoup plus longue période. Et 15 semaines, ce que les patients nous disent, le temps que tu passes à travers ton traitement, cela fait longtemps que tu n'as plus de prestations, plus de protection d'emploi et de revenu. Le 15 semaines n'est pas suffisant. Quel est le nombre exact de semaines sera à déterminer mais le nombre offert est insuffisant.

[Traduction]

Le sénateur Eggleton : Une période de réadaptation est par la suite nécessaire.

[Français]

Mme Page : Après les traitements, oui.

[Traduction]

Le sénateur Merchant : J'ai une brève question pour vous, madame Page, concernant l'âge d'admissibilité. Vous avez mentionné des statistiques sur les gens atteints de cancer, et ces statistiques incluaient les jeunes patients de 0 à 19 ans. Je crois que le projet de loi précise maintenant qu'un enfant est âgé de moins de 18 ans. Y voyez-vous un problème?

[Français]

Mme Page : Ce n'est pas moi qui choisit comment on calcule les statistiques et d'après la loi, en haut de 19 ans, le jeune adulte va prendre ses décisions. En bas de cela, les parents doivent être présents pour produire le consentement.

[Traduction]

Mme Davis : Est-ce qu'un jeune peut ou non donner son consentement à ses propres soins médicaux? Tout dépend de sa capacité de donner son consentement. Il serait donc tout à fait possible que des jeunes de 14 ou 15 ans donnent leur consentement, mais le soutien et la participation des parents à cet égard sont très importants. Même si un jeune de moins de 18 ans peut techniquement donner légalement son consentement à ses propres soins médicaux, c'est vraiment une question familiale lorsqu'il s'agit de maladies ou de blessures graves.

Le sénateur Merchant : Le congé autorisé pour les parents d'un enfant gravement malade serait de 37 semaines, alors que les parents d'un enfant disparu ou assassiné ont droit à 52 semaines. Croyez-vous que les deux périodes devraient être égales?

Mme Davis : Oui. Je le crois certainement. Selon nous et selon les échanges que nous avons eus avec nos membres, il est important de comprendre un aspect que Mme Page a abordé. Les traitements arrivent davantage à soigner et souvent à guérir les enfants qui sont gravement malades, mais cela ne se fait pas du jour au lendemain et de manière linéaire. Il faut reconnaître la latitude dont j'ai parlé. Cependant, si les parents peuvent présenter une demande, puis, une autre, j'espère que ce sera facile et qu'ils n'auront pas à suivre de nouveau le processus. À mon avis, les prestations peuvent se renouveler, et je crois que vous devriez examiner comment faire en sorte que ce soit disponible, parce qu'il est seulement question d'une période de 52 semaines. La probabilité que l'enfant tombe malade encore une fois au cours de la prochaine période de 52 semaines ou peut-être même de la troisième est bien réelle. Nous avons besoin d'une certaine latitude qui permettrait aux parents de sortir et d'entrer du régime, tout en nous assurant que les parents peuvent recevoir les prestations chaque fois qu'ils en ont besoin sans trop leur compliquer la vie.

Le sénateur Merchant : Vous avez aussi dit espérer une mise en œuvre sans heurts. Est-il déjà arrivé qu'une mise en œuvre ait pris trop de temps?

Mme Davis : Oui. Nos membres m'ont fait part de deux problèmes qui sont survenus par le passé. Les prestations de compassion étaient accordées uniquement dans le cas d'un enfant qui courait un risque imminent de mort. Ce n'est pas quelque chose que les pédiatres vont écrire très souvent sur un formulaire, à moins que cela survienne dans les 24 prochaines heures. Ils savent que les enfants sont résistants, qu'un enfant qui semble très malade aujourd'hui, peut être sur le chemin de la guérison demain. De plus, c'est primordial d'entretenir l'espoir pour la famille. J'insiste sur le fait que l'espoir possède de grandes vertus curatives.

Les pédiatres conviennent qu'il est pratiquement impossible de prédire avec certitude qu'un enfant va mourir dans les six prochains mois.

J'ai perdu le fil de mes idées; c'est embarrassant.

Le sénateur Eggleton : Ça nous arrive tout le temps.

Le sénateur Cordy : Merci de votre présence. Nous sommes toujours ravis de pouvoir aider les Canadiens et les familles canadiennes dans le besoin sur les plans financier et émotif.

Monsieur Moreau, vous avez parlé de votre appel devant un juge-arbitre de l'assurance-emploi. Le projet de loi C-44 n'est-il pas simplement une précision du projet de loi C-49 qui a été adopté en 2002 par le gouvernement libéral? J'ai demandé à la ministre Finley si le projet de loi C-44 était une simple clarification de l'autre projet de loi, et elle a confirmé que oui. Je crois que c'est sur ce point que le juge-arbitre a fondé sa décision, à savoir que le ministère l'avait mal interprété, n'est-ce pas?

M. Moreau : Voici la réponse courte. Avant 2002, il était possible de recevoir des prestations de maladie et des prestations parentales, mais il y avait un plafond ou un ensemble de règles sur le cumul, ce qui voulait dire qu'une personne ne pouvait pas les recevoir en même temps. En fait, les prestations s'arrêtent après 30 semaines. On peut comprendre qu'une femme enceinte de 15 semaines et qui commence son congé de maternité ne demandera jamais de prestations de maladie. Par conséquent, le versement était arrêté.

Le projet de loi C-49 a éliminé le plafond ou l'interdiction de cumul, et c'était le seul élément qui empêchait de présenter une demande de prestations de maladie pendant un congé parental. Si vous êtes malade pendant un congé parental depuis l'adoption du projet de loi C-49, à savoir depuis le 3 mars 2002, on peut demander un congé de maladie. C'est dommage qu'il ait fallu attendre neuf ans et le cas Rougas pour obtenir une telle réponse d'un juge- arbitre.

J'imagine qu'on pourrait dire que le projet de loi C-44 est un peu une façon de dire à la Commission de l'assurance- emploi de ne plus refuser une telle demande. C'est une question d'ordre pratique, et c'est positif. J'aime bien la précision, mais il ne s'agit, rien de plus, rien de moins, que d'une précision; ce n'est pas un projet de loi nécessaire de ce point de vue.

Le sénateur Cordy : Qu'adviendra-t-il des prestataires d'assurance-emploi qui n'ont plus accès à un juge-arbitre depuis l'adoption au printemps dernier du projet de loi omnibus?

M. Moreau : Le projet de loi omnibus leur donnera accès à d'autres processus administratifs. L'espoir réside dans les tribunaux administratifs. Étant donné que le projet de loi C-44 se veut le sceau d'approbation de la ministre concernant ce que le gouvernement libéral avait fait en 2002, nous espérons qu'il y aura un changement de mentalité au sein de la commission et des agents de première ligne qui reçoivent des appels concernant une demande de prestations de maladie. Nous espérons que les agents se diront qu'ils doivent accorder les prestations de maladie. Nous n'aurons plus besoin de nous rendre devant la commission pour plaider notre cause devant un juge-arbitre de l'assurance-emploi. Nous devrons plutôt le faire devant les nouveaux tribunaux administratifs qui ont été mis sur pied.

Je ne réponds pas vraiment à votre question, mais la réponse est que nous n'aurons plus besoin de plaider notre cause devant un juge-arbitre.

Le sénateur Cordy : Dans un tel cas?

M. Moreau : Exactement. Le dossier sera à l'avenir examiné comme une question de nature administrative.

Encore une fois, c'est malheureux que nous ayons dû en arriver là, mais c'est un moindre mal pour les femmes qui devront présenter à l'avenir de telles demandes.

Le sénateur Cordy : Madame Davis, vous avez demandé de simplifier le plus possible la paperasse. Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet? Si les familles traversent une crise, la paperasse est certainement la dernière chose dont elles ont envie de s'occuper. Par conséquent, comment proposez-vous de simplifier la paperasse dans le cas d'un enfant disparu ou assassiné pour que ce soit aussi simple que dans le cas d'un enfant gravement malade? Je ne sais pas comment j'arriverais à fonctionner si cela m'arrivait.

Mme Davis : Merci. C'était ce que j'allais également répondre au sénateur Merchant.

Il y a deux aspects. Il faut rendre le formulaire le plus simple possible. Malheureusement, un certain nombre de formulaires actuellement utilisés sont complexes. Par exemple, le formulaire concernant le crédit d'impôt pour personnes handicapées est le même qu'on soit un adulte ou un enfant.

Je vais vous donner un exemple très clair du problème que cela pose. Il arrive que des pédiatres remplissent des formulaires pour des enfants de 12 mois. Est-ce que le handicap de la personne limite sa capacité de marcher : oui ou non? Si les pédiatres cochent « non », la demande peut être rejetée. Les spécialistes ne peuvent pas dire s'il y a une limitation; ils l'évaluent de leur mieux.

Il y a ensuite le processus d'appel. Selon d'où provient l'appel, il se peut que le pédiatre ait à produire plus de documents, et c'est du temps qu'il ne consacre pas à ses patients. S'il s'agit d'un avantage revendiqué en vertu des services de santé offerts aux Premières nations et aux Inuits, il revient alors à la famille d'interjeter appel en premier. Je crois comprendre que les familles doivent alors surmonter divers obstacles. Il se peut notamment que le formulaire ne soit pas dans leur langue ou adapté à leur culture.

Nous ne voulons pas qu'on se contente d'utiliser pour les enfants les formulaires qui sont utilisés actuellement pour les adultes. C'est pourquoi nous invitons très ouvertement le gouvernement fédéral à s'asseoir avec nous après l'adoption du projet de loi pour élaborer des formulaires qui conviennent aux pédiatres, à la famille et au gouvernement fédéral.

Le sénateur Cordy : Il faut avoir l'information nécessaire et il faut aussi se rappeler que nous avons toujours des comptes à rendre aux contribuables.

Mme Davis : Oui, tout à fait.

Le sénateur Cordy : Cela étant dit, je crois que nous pourrons trouver ensemble un formulaire qui répondra à ces deux impératifs.

Mme Davis : Oui.

Le sénateur Cordy : J'ai posé une question hier à la ministre au sujet des 600 heures d'emploi assurable qui sont requises. J'ai parlé de six mois, je pense; en fait, c'est plus d'une année. Si je me souviens bien, elle a dit qu'il n'y avait pas de minium, mais quand on regarde cela de près, il y avait un minimum de 6 heures. Vous avez également parlé des 420 heures. C'est une question que j'ai posée hier. Pourquoi pas 420 heures pour élargir la portée? Si le but est d'aider les familles dans le besoin, celles dont le chef de famille travaille moins de 620 heures sont probablement parmi les plus nécessiteuses.

Vous avez abordé la question un peu plus tôt. Pourriez-vous nous en dire un peu plus?

Mme Davis : J'ai parlé à deux personnes qui ont épluché le projet de loi et qui m'ont dit que les exigences touchant le nombre d'heures travaillées étaient plus élevées. Comme je l'ai mentionné un peu plus tôt, le Sénat est là pour effectuer un deuxième examen objectif. C'est pourquoi je vous encourage à faire en sorte que personne ne soit laissé pour compte, en particulier les mères monoparentales qui n'ont pas d'assurance-maladie complémentaire parce qu'elles travaillent à temps partiel et qui ont besoin de cela pour prendre soin d'un enfant gravement malade.

M. Moreau : Au sujet de ce commentaire, je ne sais pas s'il faut 420 heures. Je m'en excuse. Je présume que c'est le cas, compte tenu de la question et de la réponse, mais je n'ai pas examiné cette question.

Toutefois, si on exige 420 heures pour certaines personnes et 600 heures pour d'autres, le projet de loi s'expose à un grave problème. Le seuil d'admissibilité a été un vrai cauchemar pour les femmes au pays au cours de la majeure partie des 10 ou 15 dernières années — celles qui travaillent à temps partiel et n'arrivent pas à accumuler un nombre suffisant d'heures. Elles ont intenté des poursuites à trois reprises en vertu de l'article 15 de la Charte au sujet du calcul des heures.

Si vous modifiez les exigences pour faire en sorte que ce soit X nombre d'heures pour certaines personnes et Y nombre d'heures pour d'autres, vous risquez de contrevenir au paragraphe 15(1) de la Charte des droits et libertés. Les trois causes sont Lesiuk, Perigny et Manoli, et ce sont toutes des décisions de la Cour d'appel fédéral.

Si on parle de 420 heures pour certaines maladies ou situations et pas pour d'autres, je me demande si le ministère de la Justice a bien examiné ce projet de loi à la lumière de l'article 15. C'est ma seule réserve, mon seul commentaire ou ma seule préoccupation que la Chambre devrait examiner.

Le président : Il faudrait clarifier le tout. Selon nous, les 420 heures ne s'appliquent pas au projet de loi; elles peuvent s'appliquer à d'autres dossiers ou programmes, mais pas au projet de loi.

Sénateur Eaton, c'est bien le cas n'est-ce pas? Il est important de clarifier ce point à mon avis.

Le sénateur Eaton : Pour les gens qui reçoivent des prestations ordinaires, il s'agit d'un nombre d'heures travaillées variable en fonction du taux de chômage local. Lorsque le taux de chômage est très élevé, le nombre d'heures requis est de 420 heures. Si vous habitez dans une région où le taux de chômage est très élevé, vous avez besoin seulement de 420 heures. Toutefois, si vous habitez dans une région où le taux de chômage est faible, le nombre d'heures requis est de 600.

Dans le cas des prestations spéciales, cependant, le nombre d'heures requis par année est de 600 dans tous les cas.

Le sénateur Cordy : Cela s'applique au projet de loi.

Le président : Il est très important que tout soit clair au sujet du projet de loi. Merci beaucoup.

Le sénateur Cordy : J'aimerais revenir sur un point qui a été soulevé. Hier, j'ai mentionné à la ministre que les parents ont droit à 14 jours de congé lorsque leur enfant est assassiné, mais s'il meurt d'une maladie grave, ils doivent retourner au travail, ou on met fin à leurs prestations, à la fin de la semaine où survient le décès.

C'est difficile à accepter, car aux yeux des parents, le résultat est le même. Ils ont perdu leur enfant. La ministre a alors répondu que les employés du gouvernement fédéral et de la plupart des entreprises ont droit à un congé de deuil. Toutefois, il faut aussi penser que les chefs de famille monoparentale qui travaillent à temps partiel n'ont pas droit à un tel congé.

Que pensez-vous de cette différence dans le nombre de jours accordé dans ce projet de loi à la suite de la mort d'un enfant?

Mme Davis : À mon avis, il serait préférable d'harmoniser le tout dans la mesure du possible. Je pense en particulier aux parents qui n'ont pas de couverture complémentaire au travail. Et même ceux qui en ont n'ont droit qu'à trois ou quatre jours au décès d'un membre de la famille immédiate. La cause du décès n'a pas d'importance. L'enfant n'est plus là, malheureusement.

[Français]

Mme Page : Lorsqu'on a demandé au gouvernement fédéral une prestation spéciale pour les enfants gravement malades, c'était pour être certain que le critère de mourir dans les six prochains mois ne serait pas là. Lorsque l'enfant meurt, l'enjeu sera d'améliorer le congé de compassion qui, lui, ne devrait pas se terminer par le décès mais peut-être se prolonger. Dans le cas précis de cette loi, pour la partie des enfants gravement malades, c'est de lui permettre de guérir ou de vivre plus longtemps, même chose pour les parents.

Nous faisons la distinction entre le projet de loi C-44 et ce qui doit encore être amélioré au congé de compassion. Donc pour répondre à votre question, la réponse ne serait pas dans ce projet de loi.

[Traduction]

Le sénateur Cordy : Merci.

Le sénateur Eaton : Avez-vous été consultés pendant la préparation de ce projet de loi par la Dre Kellie Leitch qui est, je pense, secrétaire parlementaire de la ministre Finley?

Mme Davis : Un certain nombre de pédiatres ont été consultés par les fonctionnaires, et nous en sommes très heureux. Nous sommes aussi très heureux d'avoir pu participer à la réflexion entourant la création du projet de loi. Les responsables ont rencontré des pédiatres partout au pays, car chaque province ou territoire à sa façon de voir les choses.

J'en ai discuté avec la Dre Kellie Leitch. Je suis allée la rencontrer il y a quelques semaines pour discuter d'un autre sujet, et nous avons abordé la question. Si j'ai bien compris, c'est RHDCC qui s'occupera de la mise en œuvre lorsque le projet de loi sera adopté, car il s'agit d'une question touchant l'assurance-emploi. J'ai donné l'assurance à la Dre Leitch que nous collaborerons avec le ministère pour que la mise en œuvre soit la plus harmonieuse possible.

J'ai déjà soulevé la question des formulaires. Il est important que nous travaillions de concert pour renseigner les pédiatres et les obstétriciens sur la façon de remplir le formulaire. Même si le formulaire est très intuitif, cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas un besoin de formation. Nous sommes très ouverts à l'idée de collaborer avec le gouvernement pour mettre en place des programmes en ligne ou en direct. Le hasard veut que le projet de loi entre en vigueur deux semaines après notre conférence annuelle en juin. Le moment serait donc idéal pour mettre en branle le processus de formation.

Le sénateur Eaton : Avez-vous eu votre mot à dire dans la définition d'un enfant gravement malade?

Mme Davis : Oui. Au moment de la mise en œuvre, il sera important d'expliquer cela à nos membres. Nous voulons naturellement aider le plus de familles possible qui sont admissibles à profiter de ces prestations. Nous voulons que les pédiatres y pensent, en particulier ceux qui travaillent dans de petites collectivités où il n'y a pas nécessairement de travailleurs sociaux. Si vous avez un enfant gravement malade et qu'il doit malheureusement être hospitalisé au CHEO ou à l'hôpital pour enfants malades à Toronto, les travailleurs sociaux qui y travaillent seront bien au fait de ces prestations. Toutefois, certains enfants seront soignés dans la collectivité et n'iront jamais dans un centre de pédiatrie tertiaire. C'est pourquoi nous voulons que les pédiatres qui travaillent dans des collectivités où il n'y a pas de travailleurs spécialisés puissent déterminer facilement si les parents peuvent en bénéficier.

Le sénateur Eggleton : Ma première question s'adresse à la marraine du projet de loi, le sénateur Eaton, plutôt qu'aux témoins.

Les familles où les deux parents travaillent sont monnaie courante aujourd'hui. Si un enfant meurt ou souffre d'une maladie grave, les deux parents ont-ils droit aux avantages prévus s'ils sont tous les deux sur le marché du travail?

Le sénateur Eaton : S'ils sont tous les deux sur le marché du travail, ils sont admissibles.

Le sénateur Eggleton : Peuvent-ils combiner les avantages que chacun recevrait en vertu du projet de loi?

Le sénateur Eaton : Oui, et ils peuvent alterner. Ils peuvent en profiter à tour de rôle.

Le sénateur Cordy : Ils peuvent alterner, mais je ne suis pas certaine qu'ils puissent s'absenter en même temps.

Le sénateur Eggleton : Les deux ont un emploi et peuvent se prévaloir de ces dispositions. Ils ont des employeurs différents, mais ils peuvent tous les deux se prévaloir du congé prévu dans le Code canadien du travail et des prestations prévues dans la Loi sur l'assurance-emploi. Il n'y aura pas qu'un seul parent qui y aura droit; les deux y auront droit.

Le sénateur Eaton : Je peux apporter une précision. S'ils ont tous les deux versé des cotisations d'assurance-emploi, ils sont tous les deux admissibles.

Le président : Nous avons des fonctionnaires qui vont se joindre à nous pour l'étude article par article et qui pourront sans doute nous fournir l'information. Notre assistante peut également clarifier le tout.

Le sénateur Cordy : J'aurais répondu que oui, sauf que le projet de loi indique que c'est interchangeable. Selon moi, le mot « interchangeable » veut dire l'un ou l'autre.

Le sénateur Eggleton : Je vais passer à ma question suivante. Nous clarifierons cela plus tard.

Mon inquiétude découle de l'exposé que nous a fait hier Mme O'Sullivan, du Bureau de l'ombudsman fédéral des victimes d'actes criminels. Elle a dit :

C'est pourquoi notre bureau vous suggérera d'envisager de modifier et d'élargir la portée et l'admissibilité du congé non payé et du soutien du revenu de façon à ce qu'ils répondent davantage aux besoins des victimes d'actes criminels.

Un peu plus loin, elle a précisé sa pensée :

... je tiens à souligner que les propositions de modification au Code canadien du travail ne sont pas exhaustives et ne reconnaissent pas les conséquences de la criminalité sur d'autres membres de la famille, par exemple les conjoints et les frères et sœurs.

Il est naturel d'inclure les conjoints, et je crois qu'ils seraient admissibles automatiquement. Elle a toutefois pointé du doigt les conjoints ainsi que les frères et sœurs. Elle a déclaré :

Elles ignorent également l'incidence de la victimisation quand la personne a plus de 18 ans.

Nous avons discuté de l'âge et du fait qu'il faut tirer la ligne quelque part. Selon la ministre, la ligne aurait pu être tirée à 16 ans, mais 18 ans semblent être un âge raisonnable. Nous avons discuté des dispositions touchant l'impôt sur le revenu et du fait que dans ce cas, un enfant à charge qui vit à la maison peut très bien être dans la vingtaine avancée, étant donné qu'il quitte parfois pour mieux revenir. Toutefois, un enfant peut tomber gravement malade, souffrir d'un cancer par exemple, lorsqu'il a moins de 18 ans, et cela peut durer de nombreuses années. Il peut souffrir d'autres handicaps et mourir longtemps après avoir atteint ses 18 ans.

J'aimerais savoir ce que vous pensez de l'idée d'offrir de l'aide à d'autres personnes qui sont touchées par le décès ou la maladie grave d'un enfant, comme les frères et les sœurs, et de toute la question de savoir s'il est juste de tracer la ligne à 18 ans. Devrait-il y avoir des exceptions? Si c'est le cas, lesquelles?

[Français]

Mme Page : Il y a deux points, si vous voulez dire prendre soin de quelqu'un plus âgé de 18 ans, et là, il faut se demander si le parent est nécessaire. Bien sûr que le parent va « vouloir », mais est-ce « médicalement/ légalement requis », je ne suis pas certaine. Si c'est d'apporter du support pour les frères et soeurs, pour bénéficier de cette prestation, l'assurance-emploi, c'est pour les travailleurs et est-ce que la présence du frère ou de la sœur est requise s'il y a déjà un parent qui donne les soins ou le consentement? Bien sûr, je suis pour un monde idéal mais d'une façon réaliste, je vous dirais non.

[Traduction]

Mme Davis : Je vais aborder la question des besoins pour les plus de 18 ans. On pourrait sans doute examiner la question après que le projet de loi sera adopté.

Les jeunes qu'il faudrait inclure sont ceux qui souffrent d'une déficience développementale grave qui demeurent souvent à la maison longtemps, car ils ne sont pas aptes, sur le plan cognitif ou émotionnel, à vivre de manière autonome.

Même s'ils ont plus de 18 ans, ils sont toujours, à toutes fins utiles, un enfant à charge, et pas seulement du point de vue financier de « personne à charge ». Ces jeunes peuvent eux aussi, malheureusement, souffrir d'un cancer ou d'une autre maladie grave. La question n'a pas été examinée dans le cadre du projet de loi, et je ne voudrais pas priver les parents qui en ont besoin de ces avantages, mais on pourrait envisager d'inclure ce groupe plus tard.

M. Moreau : La réponse courte à votre première question, sénateur Eggleton, est qu'on ajoute les paragraphes 23.2(8) et 23.2(9), qui permettent de partager 35 semaines de prestations pour s'occuper d'un enfant gravement malade. Elles ne peuvent l'être de manière successive, mais elles peuvent l'être en même temps. C'est ainsi que je l'interprète, car le libellé est exactement le même que celui du paragraphe 23(1), qui concerne le partage du congé parental. C'est mon interprétation. Je ne reste pas pour la deuxième partie de la réunion, mais je serais heureux de le faire.

Le sénateur Cordy : Hier, j'ai fait référence à la définition d'enfant à charge dans le cadre de la Loi de l'impôt sur le revenu. Si l'enfant va à l'école, l'âge limite est de 25 ans. À mon avis, cela s'appliquerait également au cas dont vous avez parlé, à savoir un enfant ayant une déficience développementale qui ne peut s'occuper de lui-même. Je crois que la Loi de l'impôt sur le revenu tient compte de ce genre de situation.

Le président : Merci beaucoup à tous nos témoins. Vos commentaires sont très utiles. Nous avons clarifié, je crois, les deux points qui avaient besoin de l'être. Monsieur Moreau, nous allons vérifier votre interprétation, mais c'est également la lecture que j'en fais, et je crois que c'était aussi l'opinion de nos témoins hier.

Chers collègues, nous avons des experts pour nous aider à éclaircir toute question technique qui pourrait surgir dans l'étude article par article. Souhaitez-vous qu'ils se joignent à nous?

Des voix : D'accord.

Le président : Merci beaucoup.

Nous allons passer maintenant à la partie de la réunion qui porte sur l'étude article par article. Je souhaite donc la bienvenue en votre nom aux deux représentants de Ressources humaines et Développement des compétences Canada qui vont éclaircir pour nous des points au besoin. Nous accueillons donc Jean-François Roussy, directeur, Politique de l'assurance-emploi, et Laurent Quintal, directeur adjoint, Politique de l'assurance-emploi. Je vous souhaite la bienvenue à tous les deux et je vous remercie d'être ici pour répondre à nos questions.

Plaît-il au comité de procéder à l'étude article par article du projet de loi C-44, Loi modifiant le Code canadien du travail et la Loi sur l'assurance-emploi et modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu et le Règlement de l'impôt sur le revenu en conséquence?

Des voix : D'accord.

Le président : Merci beaucoup. C'est d'accord.

Si le comité y consent, j'aimerais regrouper les articles du projet de loi. Le comité consent-il à ce que je procède ainsi?

Des voix : D'accord.

Le président : Merci beaucoup. Êtes-vous d'accord pour qu'on reporte l'étude du titre?

Des voix : D'accord.

Le président : Êtes-vous d'accord pour qu'on reporte l'étude de l'article 1, à savoir le titre abrégé?

Des voix : D'accord.

Le président : D'accord. Merci beaucoup.

Les articles 2 à 10 sont-ils adoptés?

Des voix : D'accord.

Le président : D'accord, merci. C'est adopté.

Les articles 11 à 20 sont-ils adoptés? Oui?

Des voix : D'accord.

Le président : C'est adopté.

Les articles 21 à 30 sont-ils adoptés?

Des voix : D'accord.

Le président : C'est adopté.

Les articles 31 à 37 sont-ils adoptés?

Des voix : D'accord.

Le président : C'est adopté.

L'article 1 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le président : C'est adopté.

Le titre est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le président : C'est adopté.

Le projet de loi est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le président : C'est adopté.

Le comité souhaite-t-il ajouter des observations à son rapport?

Le sénateur Cordy : Oui, s'il vous plaît.

Le sénateur Eaton : Non.

Le sénateur Cordy : Merci beaucoup, monsieur le président.

Le président : Le comité souhaite-t-il discuter des observations à huis clos ou en public? En public?

Le sénateur Cordy : En public.

Le président : Merci beaucoup, mais je devais vous poser la question.

Le sénateur Cordy : Merci. Comme nous avons eu notre dernière réunion hier soir et que j'avais une réunion ce matin, je n'ai pas de copies à vous distribuer. Toutefois, je crois que nous avons une idée des observations générales à joindre. Il faudrait tout d'abord faire l'éloge de l'initiative prise par le gouvernement pour venir en aide aux familles en situation de crise quand un enfant est gravement malade, qu'il a été porté disparu ou même parfois qu'il a été assassiné. Nous devons en féliciter le gouvernement.

J'ai été très touchée hier par le témoignage de la responsable du Bureau de l'ombudsman fédéral des victimes d'actes criminels et par quelques problèmes qui ont été soulevés. Elle a notamment parlé d'élargir l'admissibilité — c'est-à-dire d'offrir les avantages aux familles qui sont victimes d'un crime, et dans ce cas, nous parlons des enfants assassinés ou portés disparus.

Nous pourrions indiquer dans nos observations notamment qu'il faudrait envisager, si on constate après un certain temps que la mesure répond vraiment à un besoin, la possibilité d'élargir l'admissibilité pour aider aussi les familles qui perdent un conjoint ou un frère ou une sœur à la suite d'un acte criminel. Ce serait la première observation. Je n'ai pas le libellé exact, mais c'est l'idée générale.

Deuxièmement, j'ai été aussi très touchée par le témoignage, qui avait beaucoup de sens à mes yeux, et je proposerais la même chose, à savoir qu'on pourrait envisager dans l'avenir de permettre aux parents qui traversent cette épreuve de partager les congés. Dans sa forme actuelle, le projet de loi prévoit un congé, mais nous avons entendu des témoignages convaincants hier voulant que, dans les faits, tout ne se passe pas dans une brève période temps. En fait, c'est peut-être au moment du procès que les parents auront besoin de soutien ou de prendre des jours de congé. Il y a aussi les cas où les gens retournent au travail et souffrent par la suite de trouble de stress post-traumatique. Ils retournent au travail, mais ils ont ensuite besoin de prendre de nouveau un congé. Il est important, à mon avis, que le projet de loi soit mis en œuvre, mais il faut aussi tenir compte des témoignages et mentionner qu'on pourrait envisager telle et telle modification plus tard.

Le président : J'aimerais avoir une clarification sur ce point. Vous avez mentionné que les conjoints devraient pouvoir se partager les congés. Vous parlez des conjoints qui travaillent, n'est-ce pas?

Le sénateur Cordy : Non, si j'ai dit « partager », ce n'est pas ce que je voulais dire. Je voulais dire « étaler » — je ne voulais pas dire partager le temps entre les parents, mais étaler le congé, c'est-à-dire pouvoir prendre 30 semaines tout de suite, puis, prendre quatre autres semaines au moment du procès qui peut avoir lieu 6 ou 12 mois plus tard. Je ne voulais pas dire « partager » mais bien « étaler » les 52 ou les 104 semaines.

Le président : Il y aurait sans doute lieu d'obtenir des précisions à ce sujet, et je me demande si nos conseillers pourraient nous dire ce qu'il en est, car il très important de savoir ce qui est prévu dans le projet de loi à ce titre.

Jean-François Roussy, directeur, Politique de l'assurance-emploi, Ressources humaines et Développement des compétences Canada : En ce qui a trait au programme lui-même, au programme d'allocation, pour les parents d'un enfant assassiné ou porté disparu...

Le sénateur Cordy : C'est une allocation; ce n'est pas dans la loi.

M. Roussy : Oui, cela ne fait pas partie du projet de loi.

Le président : Vous parlez de l'allocation.

Le sénateur Cordy : Oui. Cela ne fait pas partie de l'assurance-emploi.

M. Roussy : De la façon dont le programme a été conçu, les 35 semaines n'ont pas à être prises de manière consécutive. Il faut toutefois que le congé soit pris dans un délai de un an après l'événement. Disons que mon enfant est porté disparu. Je prends 20 semaines de congé et je me rends compte qu'il vaut mieux que je retourne travailler. Je travaille pendant cinq semaines et je prends le reste du congé, soit à l'intérieur du délai de 52 semaines suivant l'événement. Si le procès a lieu deux ans plus tard, par contre, vous ne pouvez pas prendre les semaines qui restent trois ans plus tard.

Le président : Sénateur Cordy, c'est ce que j'avais cru comprendre hier, et c'est pourquoi j'ai demandé cette précision. Est-ce le délai de un an qui vous préoccupe? Si je vous ai bien compris, votre demande de base est satisfaite dans ce contexte. Voulez-vous apporter des précisions?

Le sénateur Cordy : J'ai le projet de loi quelque part ici. Je pensais que le congé pouvait être de 104 semaines.

Le sénateur Eaton : C'est le cas pour un meurtre. Dans le cas d'un enfant qui a été assassiné, les parents peuvent prendre jusqu'à deux ans.

Le sénateur Cordy : Ils peuvent prendre jusqu'à 104 semaines?

Le sénateur Eaton : Il est possible de prendre jusqu'à deux ans. Vous pouvez prendre quelques semaines, puis, si le procès survient 18 mois plus tard, il vous reste encore des congés.

Le sénateur Cordy : M. Roussy vient toutefois de mentionner que le congé doit être pris dans un délai de 52 semaines.

Le sénateur Eaton : C'est dans le cas d'un enfant disparu...

Le sénateur Cordy : Un moment s'il vous plaît. Est-ce 52 ou 104?

M. Roussy : Je vais demander à M. Quintal de répondre à votre question, car vous parlez des modifications au Code canadien du travail.

[Français]

Laurent Quintal, directeur adjoint, Politique de l'assurance-emploi, Ressources humaines et développement des compétences Canada : Présentement, il y a deux nouveaux congés prévus dans le Code canadien du travail. Il y a le congé pour les parents d'enfants gravement malades, ce congé est défini de telle façon qu'il est possible pour les parents de scinder en plusieurs tranches de congés. L'autre congé, c'est pour les parents d'enfants disparus ou assassinés. Il est aussi possible de scinder le congé. Il est possible pour les parents dont l'enfant a été assassiné de prendre six mois de congé pour se remettre psychologiquement de l'impact, de retourner au travail six mois et d'assister au procès qui est la conséquence de l'assassinat de leur enfant. La loi proposée inclut de telles dispositions actuellement dans le Code canadien du travail.

Le président : Merci beaucoup.

[Traduction]

Le sénateur Cordy : Merci. Ce n'est pas nécessaire. Je suis heureuse de cette précision, car je n'ai pas vu cela dans le projet de loi quand je l'ai lu.

Comme on vient de régler cette question, le deuxième point portera sur la différence entre la période de temps qui est accordée lorsqu'un enfant est assassiné, soit 14 jours, et celle qui est accordée lorsqu'un enfant décède à la suite d'une maladie grave. Dans ce cas, les parents doivent retourner au travail à la fin de la semaine où survient le décès. La ministre a mentionné que la plupart des entreprises font preuve de compassion et accordent un congé de deuil, mais elles ne le font pas toutes. De plus, les plus nécessiteux seront ceux qui n'auront pas accès à un congé de deuil.

Pourquoi la période n'est-elle pas la même dans les deux cas? C'est ce que j'aimerais faire valoir dans une observation.

Le président : Nous allons demander des précisions et vous pourriez peut-être penser à la façon de formuler votre observation.

[Français]

M. Quintal : Je ne suis pas sûr que j'aie compris clairement la question, pourriez-vous la répéter?

[Traduction]

Le sénateur Cordy : La disposition qui s'applique dans le cas d'un enfant assassiné permet à un parent de prendre un congé de 14 jours après la mort de son enfant. En ce qui a trait aux prestations d'assurance-emploi et au congé accordés pour un enfant gravement malade, lorsqu'il décède, le projet de loi prévoit que le congé prend fin à la fin de la semaine suivant la mort de l'enfant. Est-ce exact?

M. Roussy : Oui, c'est exact. Pour ce qui est des nouvelles prestations d'assurance-emploi, les prestations cessent lorsque l'enfant décède, tout comme c'est le cas à l'heure actuelle des prestations pour le congé de soignant.

Le sénateur Cordy : Nous avons un projet de loi, le C-44, mais les congés sont différents. Aux yeux des parents, cela n'a pas d'importance; ils ont perdu leur enfant. Je me demande ce qui justifie cela. Je vais donc faire valoir ce point. Je vais proposer que nous indiquions dans une observation que le ministère — il faudrait sans doute dire les ministères dans ce cas — envisage d'harmoniser le tout.

Le président : Je vais accorder la parole tout d'abord au sénateur Eaton.

Le sénateur Eaton : J'aimerais rappeler quelque chose à M. Quintal et M. Roussy.

[Français]

Le ministre hier, dans son témoignage, nous a expliqué que pour la plupart des employeurs, il y a quelque chose qui s'appelle bereavement leave. L'enfant meurt.

[Traduction]

Le congé arrête et il y a ensuite le congé de deuil.

Le sénateur Cordy : Ce sera le cas pour les employés du gouvernement fédéral.

Le sénateur Eggleton : Il y a beaucoup d'employés à temps partiel ou occasionnels.

Le sénateur Cordy : Oui, et ce n'est pas l'argument.

Le président : Soyons bien clairs ici. Le sénateur Cordy propose que nous indiquions dans une observation qu'il faudrait prévoir un congé pour ceux qui n'ont pas accès à un congé de deuil. Est-ce bien cela?

Le sénateur Cordy : Oui, et que les ministères envisagent d'harmoniser le tout.

Le président : Monsieur Roussy, vouliez-vous ajouter quelque chose?

Sénateur, si j'ai bien compris, vous voulez que les deux ministères envisagent d'harmoniser la période de congé accordée aux parents dont l'enfant a été assassiné et la période de congé accordée aux parents dont l'enfant est décédé des suites d'une maladie grave, et ce, lorsque l'employeur n'offre pas de congé de deuil?

Le sénateur Cordy : Et pour ceux qui reçoivent des prestations d'assurance-emploi.

Le président : Très bien, mais cela ne fera pas partie des avantages fournis par l'employeur, n'est-ce pas?

Le sénateur Cordy : Tout à fait.

Le président : Je crois que nous comprenons votre demande.

Le sénateur Dyck : Si nous avons terminé ce point, j'ai aussi une demande à présenter.

Le sénateur Cordy : J'ai terminé.

Le sénateur Dyck : Sue O'Sullivan, l'ombudsman fédéral des victimes d'actes criminels, et peut-être un autre témoin, a mentionné qu'il faudrait aussi envisager que cela s'applique aux enfants adultes. Comme les femmes autochtones sont six fois plus susceptibles d'être victimes de violence et de disparaître ou d'être assassinées que les autres, je me demandais si on pourrait ajouter une observation voulant qu'on envisage, à un moment donné, d'offrir les mêmes avantages aux familles des femmes autochtones disparues ou assassinées, donc aux parents de ces femmes qui ont été victimes d'un acte criminel.

Je pense en particulier à une famille d'Onion Lake qui a été la première à sonner l'alarme à ce sujet en Saskatchewan. La mère est enseignante. Sa fille est disparue pendant quatre ans. Son corps a été retrouvé, mais elle attend encore le procès six ou sept ans plus tard. Elle ne peut toutefois pas se prévaloir de mesures comme celles prévues dans ce projet de loi qui lui permettraient de prendre congé ou de profiter d'autres avantages.

Si nous pouvions ajouter une observation comme celle-là, cela serait généralement bien accueilli par la population autochtone, qui en serait reconnaissante.

Le président : Sénateur, je me demande s'il serait possible de situer le tout dans un contexte général pour atteindre votre objectif et répondre aux exigences de la loi. Des témoins nous ont dit qu'il faudrait envisager d'inclure les enfants adultes et qu'il faudrait prendre en considération d'autres éléments. Ils ont mentionné, comme nos témoins ce matin, qu'ils sont très heureux de ce projet de loi. Ils veulent qu'il soit mis en œuvre, mais ils aimeraient aussi que l'on revoie l'âge limite afin d'élargir la portée des avantages.

Je sais que vous avez parlé précisément des femmes autochtones, mais en droit canadien, il faut que cela inclue les gens dans des circonstances similaires.

Le sénateur Dyck : L'idéal serait d'inclure tout le monde, mais qu'il y ait aussi une mention spéciale concernant les femmes autochtones. Cela pourrait aussi donner plus de poids à l'idée qu'il faudrait prendre en considération les enfants adultes.

Le président : Pour être certain de bien comprendre, vous appuyez les propos des témoins voulant qu'on envisage de revoir l'âge limite associé aux avantages et vous voulez que nous attirions l'attention en particulier sur la situation des femmes autochtones.

Le sénateur Dyck : Oui, le libellé serait « les femmes autochtones disparues ou assassinées ». On utiliserait exactement les mêmes mots « congé en cas de décès ou de disparition d'un enfant adulte, en particulier ceux provenant des collectivités autochtones du Canada ».

Le président : Ai-je bien compris?

Le sénateur Cordy : On pourrait sans doute inclure cette idée avec la mienne. J'ai parlé des conjoints et des frères et sœurs. Les enfants adultes pourraient en faire partie, mais il faudrait aussi parler, et je crois que c'est important, des femmes autochtones.

Le président : Sénateur Cordy, je vous remercie beaucoup, car je vous regardais et j'allais revenir à vous. Vous êtes également d'avis qu'on pourrait intégrer le tout dans une même observation.

Sénateur Dyck, cela répond-il à vos attentes?

Le sénateur Dyck : Oui.

Le président : Sénateur Eaton, croyez-vous que ce soit une observation acceptable?

Le sénateur Eaton : C'est très bien, à mon avis.

Le sénateur Cordy : Merci, sénateur.

Le président : Y a-t-il d'autres observations?

Compte tenu de la période, le comité me permet-il d'autoriser le comité de direction à approuver le libellé final avant l'envoi au Sénat?

Des voix : D'accord.

Le président : Je crois que le comité comprend très bien notre objectif et je suis convaincu que le comité de direction trouvera un libellé qui respectera l'objectif et l'esprit de nos observations.

Plaît-il au comité que je fasse rapport au Sénat du projet de loi, accompagné des observations qui seront approuvées par le comité de direction du Comité sénatorial permanent des Affaires sociales, des sciences et de la technologie?

Des voix : D'accord.

Le président : Chers collègues, nous avons épuisé l'ordre du jour et je tiens donc à remercier les représentants du ministère qui ont bien voulu comparaître pour clarifier des points, peu nombreux, mais très importants.

Je tiens aussi à remercier les membres du comité de la façon dont se sont déroulées les discussions. Les sénateurs de part et d'autre de la table ont posé des questions très pertinentes. Nous avons là un projet de loi important pour les Canadiens et nos observations permettront sans doute de le bonifier plus tard.

Je félicite et remercie les membres du comité. J'aurai l'honneur de faire rapport du projet de loi au Sénat.

(La séance est levée.)


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