Aller au contenu
AEFA - Comité permanent

Affaires étrangères et commerce international

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires étrangères et du commerce international

Fascicule 15 - Témoignages du 24 septembre 2014


OTTAWA, le mercredi 24 septembre 2014

Le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international se réunit aujourd'hui, à 16 h 15, pour étudier le potentiel d'accroissement du commerce et de l'investissement entre le Canada, les États-Unis et le Mexique, y compris dans les secteurs de croissance clés des ressources, de la fabrication et des services; les mesures fédérales nécessaires à la réalisation des possibilités cernées dans ces secteurs clés; les possibilités d'intensifier la collaboration au niveau trilatéral.

La sénatrice A. Raynell Andreychuk (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente : Bienvenue au Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international. Avant de passer à l'ordre de renvoi, nous avions prévu à l'ordre du jour un point que nous devions examiner plus tard à huis clos. Je voudrais que nous l'examinions maintenant, mais pas à huis clos.

Il s'agit essentiellement de notre réponse à la réaction du gouvernement à notre rapport sur la Turquie. Nous l'avons distribuée à tous les sénateurs en leur demandant de formuler un commentaire; si personne n'a quoi que ce soit à dire, je considérerais que la lettre est approuvée.

Vous avez cette lettre devant vous; je propose donc de recevoir une motion pour l'accepter telle quelle afin de la déposer au Sénat.

Est-ce que quelqu'un souhaite intervenir? Sinon, est-ce que tout le monde est d'accord?

Des voix : Oui.

La présidente : Merci. La lettre sera déposée, et cela mettra fin à notre étude sur la Turquie.

Notre nouvelle étude vise à examiner le potentiel d'accroissement du commerce et de l'investissement entre le Canada, les États-Unis et le Mexique, y compris dans les secteurs de croissance clés des ressources, de la fabrication et des services; les mesures fédérales nécessaires à la réalisation des possibilités cernées dans ces secteurs clés; les possibilités d'intensifier la collaboration au niveau trilatéral.

Nous entamons notre étude aujourd'hui. Nous sommes enchantés d'avoir reçu une réponse rapide d'Affaires étrangères, Commerce et Développement Canada, comme je m'y attendais. Je vous remercie de comparaître. Le ministère est représenté par M. David Morrison, sous-ministre adjoint (Amériques); M. Martin Moen, directeur général, Direction générale de l'Amérique du Nord et de l'investissement, et M. Christopher Wilkie, directeur général par intérim, Direction générale de la stratégie pour l'Amérique du Nord, qui nous présenteront leur point de vue. Bienvenue devant le comité, messieurs. Nous sommes intéressés à faire le suivi quant à certaines initiatives et certains changements intervenus récemment dans les institutions et les lois du Mexique, lesquels ont eu des répercussions pour nous. Nous aimerions également entendre les opinions que vous pouvez nous donner à ce sujet ainsi que sur l'ALENA, qui ne fait pas partie de la présente étude. Nous cherchons à accroître les nouvelles occasions d'approfondir une initiative trilatérale et peut-être bilatérale avec le Mexique et/ou les États-Unis.

Vos points de vue seraient vraiment les bienvenus. La parole est à vous. Vous connaissez le fonctionnement du comité sénatorial; nous aurons certainement de nombreuses questions à la fin.

David Morrison, sous-ministre adjoint (Amériques), Affaires étrangères, Commerce et Développement Canada : Bonjour et merci de nous avoir invités à comparaître afin de traiter de cette question cet après-midi.

[Français]

Notre sujet pour cet après-midi est le potentiel d'accroissement du commerce et de l'investissement entre le Canada, les États-Unis et le Mexique. Il s'agit d'un sujet d'actualité. Après les 20 ans de l'ALENA, il y a une spéculation croissante quant à savoir quelle sera la prochaine étape. L'économie canadienne se porte bien, étant parmi les meilleures du G7. Les États-Unis sortent lentement de la récession et la révolution du gaz de schiste se propage rapidement à travers le continent, alors que les récentes réformes historiques au Mexique, en particulier dans le secteur de l'énergie, ont le potentiel de changer la donne dans ce pays.

[Traduction]

C'est la confluence de ces facteurs au Canada, aux États-Unis et au Mexique qui fait que les commentateurs et les experts se demandent si nous n'approchons pas d'un point tournant en Amérique du Nord en raison du potentiel nouveau et inexploité d'accroissement du commerce et de l'investissement. À l'instar de votre comité, des groupes de réflexion, comme le Council on Foreign Relations des États-Unis et d'autres groupes, ont lancé des études pour se pencher sur cette question afin de trouver des moyens d'accroître la prospérité en Amérique du Nord.

Je propose de nous attaquer à la question qui nous intéresse aujourd'hui de trois manières : premièrement, en traitant de toute la dimension de la politique commerciale qui encadre nos partenariats nord-américains; deuxièmement, en discutant de la manière dont le Canada noue des rapports bilatéraux avec le Mexique et les États-Unis; et troisièmement, en répondant à la question suivante : Que pouvons-nous faire sur le plan trilatéral pour renforcer les relations et favoriser l'accroissement de la prospérité sur le continent?

En ce qui concerne d'abord la dimension de la politique commerciale, l'Accord de libre-échange nord-américain, ou ALENA, est entré en vigueur il y a 20 ans, le 1er janvier 1994, créant la plus vaste région de libre-échange du monde. En renforçant les règles et les procédures régissant le commerce et l'investissement, l'ALENA s'est révélé une fondation solide pour le renforcement de la prospérité du Canada et a donné au reste du monde un exemple des avantages de la libération du commerce. L'ALENA a établi un cadre juste et prévisible pour le commerce et l'investissement.

L'ALENA a indubitablement favorisé une plus grande prospérité. Le Canada est un pays commerçant depuis l'année charnière de 1989, au cours de laquelle s'est conclu le précurseur de l'ALENA, l'accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis. Dans l'ensemble, les échanges ont triplé depuis 1989 et ont doublé depuis 1994, l'année d'entrée en vigueur de l'ALENA.

Même si le Canada, le Mexique et les États-Unis faisaient du commerce les uns avec les autres, il est bien plus courant de dire aujourd'hui qu'ils font des choses ensemble. En fait, on parlesplutôt de l'Amérique du Nord comme d'une plateforme de production nord-américaine assortie de chaînes d'approvisionnement intégrées à l'échelle régionale dans tous les secteurs, qu'il s'agisse de l'automobile, de l'aérospatiale ou de l'électronique. Les exportations du Canada vers les États-Unis contiennent en moyenne 25 p. 100 de contenu américain, ce qui signifie qu'une partie des matériaux ont été importés des États-Unis. Au Mexique, ce pourcentage est encore plus élevé, car ce que les Mexicains exportent aux États-Unis contient 40 p. 100 de contenu américain.

Voilà qui témoigne du degré d'intégration des chaînes d'approvisionnement en Amérique du Nord. La plateforme de production nord-américaine a transformé les trois pays en partenaires, même si nous nous faisons régulièrement concurrence. Dans un monde où la proximité est une fois de plus considérée comme importante, en raison tant du temps que des coûts de transport, l'ALENA confère à notre région un avantage dans un monde concurrentiel.

Permettez-moi de passer à la relation commerciale bilatérale entre le Canada et les États-Unis.

[Français]

Les relations commerciales entre le Canada et les États-Unis demeurent au cœur de l'ALENA. Le Canada et les États-Unis ont depuis longtemps la plus importante relation commerciale bilatérale au monde. Chaque jour, 2 milliards de dollars de biens et de services traversent la frontière. L'économie canadienne continue d'être dépendante d'un accès libre et ouvert aux États-Unis, qui demeurent de loin notre plus important partenaire commercial. Plus de 77 p. 100 des PME exportatrices canadiennes sont actives sur le marché américain.

[Traduction]

Afin de protéger à l'avance les intérêts commerciaux et économiques du Canada, nous devons rester vigilants en réagissant aux restrictions commerciales et en préconisant l'intégration économique de manière proactive.

Cependant, toute riche que soit la relation, certains problèmes persistent. Je vous en nommerai deux. Le premier est ce que vous connaissez sous le nom des dispositions « Buy American » qui s'immiscent dans les lois sur l'approvisionnement des États-Unis, ce qui tend à perturber les relations d'affaires à long terme et à nuire aux échanges transfrontaliers entre nos deux pays. Notre ambassade à Washington et notre réseau de missions aux États-Unis travaillent sans relâche pour s'opposer à l'adoption de telles restrictions.

À cela s'ajoute la loi sur la mention du pays d'origine sur l'étiquette, qui oblige les transformateurs d'aliments américains à préciser l'origine de la viande produite aux États-Unis en indiquant « élevé au Canada ». C'est un processus coûteux et difficile en ce qui concerne le bœuf et le porc en raison de la nature intégrée des chaînes d'approvisionnement. Le Canada continue de réclamer une modification législative et conteste la disposition relative à la mention du pays d'origine sur l'étiquette devant l'Organisation mondiale du commerce à Genève.

Nous avons donc l'intention de rester vigilants et de répondre rapidement aux nouvelles restrictions commerciales potentielles.

Nous sommes tout aussi déterminés à aller de l'avant avec deux initiatives d'accès au marché concernant les États-Unis. L'une est la vision commune du périmètre de sécurité et de la compétitivité économique, mieux connue sous le nom de Par-delà la frontière, et l'autre est le Conseil États-Unis-Canada de coopération en matière de réglementation. L'initiative Par-delà la frontière vise à gérer les risques relatifs à la sécurité tout en facilitant le passage légitime de gens, de biens et de services, alors que le Conseil de coopération en matière de réglementation doit faire en sorte qu'un ensemble de critères satisfasse aux besoins en matière de réglementation des deux pays. Au fil du temps, cela nous aidera à éliminer ce qu'on en est venu à qualifier de « tyrannie des petites différences », laquelle finit malheureusement par poser d'énormes obstacles au commerce. Les différentes exigences relatives à l'homologation des sièges d'auto pour enfant constituent un exemple classique de ce problème. Les deux groupes de sièges d'auto sont sécuritaires, mais requièrent des régimes de réglementation distincts. Voilà qui nuit au libre-échange tel que nous voudrions qu'il soit.

Votre comité a demandé expressément ce que le gouvernement fédéral pourrait faire pour tirer parti des nouvelles occasions. À notre avis, il doit continuer d'aller de l'avant avec force en ce qui concerne les initiatives de Par-delà la frontière et du Conseil de coopération en matière de réglementation. Nous avons réalisé de bons progrès, mais il faut faire davantage. Sachez que conformément aux engagements pris lors du Sommet des leaders nord-américains de 2104 qui s'est tenu plus tôt cette année au Mexique, le Canada et le Mexique sont maintenant invités à agir à titre d'observateurs pour le mécanisme de réglementation et de coopération frontalière que chaque pays a avec les États-Unis. Un mouvement réel est donc en marche pour essayer de « trilatéraliser » certains de ces importants mécanismes bilatéraux.

Enfin, dans le domaine de l'énergie, une grande priorité du Canada consiste à élargir l'infrastructure afin d'acheminer les produits jusqu'aux marchés internationaux. À cet égard, l'approbation du pipeline Keystone XL demeure un objectif important du gouvernement du Canada, puisqu'il se traduira par des avantages économiques et énergétiques pour le Canada et les États-Unis.

Permettez-moi maintenant de passer aux relations commerciales entre le Canada et le Mexique, qui sont désormais le troisième partenaire commercial l'un de l'autre. Les échanges mutuels de marchandises ont totalisé 32 milliards de dollars en 2013. C'est une hausse remarquable de 608 p. 100 des échanges de marchandises par rapport à l'époque antérieure à la conclusion de l'ALENA.

L'investissement direct du Canada au Mexique a maintenant atteint 12 milliards de dollars. Entre 1999 et 2013, le Canada a été la quatrième source d'investissement étranger du Mexique. Les investissements du Mexique au Canada n'ont pas suivi le rythme, mais un investissement mexicain substantiel a été annoncé récemment dans Canada Bread, qui appartient à Maple Leaf Foods. Nous avons bon espoir que cet investissement de près de 2 milliards de dollars soit un indice que d'autres choses s'en viennent.

[Français]

Plus de 2 200 entreprises canadiennes s'identifient comme des entreprises qui exportent vers le Mexique, où il y a plus de 200 sociétés minières canadiennes en exploitation. Le Mexique est actuellement le deuxième plus important marché du Canada pour le transport aérien après les États-Unis. Le Canada et le Mexique produisent à la fois pour le marché nord-américain et le marché mondial.

La croissance du Mexique dans les industries de l'automobile et de l'aéronautique, par exemple, illustre le type de production nord-américaine dans son entier qui met à profit les avantages concurrentiels des pays.

[Traduction]

J'aimerais enfin traiter de la coopération trilatérale. Il est intrinsèquement plus difficile d'assurer une coopération trilatérale entre le Canada, les États-Unis et le Mexique que de se concentrer exclusivement sur des relations bilatérales entre le Canada et les États-Unis ou entre le Canada et le Mexique. Mais il suffit de regarder une carte ou de lire quelque chose sur l'intégration régionale dans d'autres régions pour constater la puissance de ce qu'on appelle « l'idée nord-américaine ».

Le Sommet des leaders nord-américains, qui a eu lieu à Toluca, au Mexique, en février 2014, a mis explicitement l'accent sur un programme ambitieux de compétitivité. En ce moment même, chaque pays assure le suivi à l'échelle nationale et dans le cadre de travaux trilatéraux. Ces nouveaux efforts trilatéraux prévoient notamment un programme des voyageurs fiables pour toute l'Amérique du Nord qui permettra d'élargir les avantages du programme NEXUS du Canada et des États-Unis aux Mexicains, et le programme équivalent du Mexique, appelé Programa Viajero Confiable, s'appliquera aux détenteurs de cartes NEXUS du Canada et des États-Unis.

Les trois pays sont en train de mettre en œuvre un guichet unique par l'entremise duquel les importateurs peuvent fournir tous les renseignements nécessaires pour se conformer aux exigences des douanes et à d'autres formalités. On s'efforce également d'établir de nouveaux protocoles d'approbation et d'inspection préalables afin d'accélérer encore plus le passage des gens et des biens aux frontières.

Des efforts sont également déployés dans le contexte trilatéral sur les plans de l'innovation et de l'entrepreneuriat, lesquels concernent tout particulièrement les femmes entrepreneures et le développement du capital humain en Amérique du Nord au moyen d'échanges éducationnels et universitaires, et d'analyses des futurs besoins nord-américains en main-d'œuvre dans tout le continent.

[Français]

Permettez-moi de dire quelques mots au sujet de la sécurité énergétique. L'Amérique du Nord est rapidement en train de devenir une puissance dans le secteur de l'énergie, munie d'un potentiel reconnu pour atteindre l'indépendance énergétique. Sur le plan économique, l'abondance de l'énergie propulsera directement la croissance économique et la création d'emplois, tout en réduisant également les coûts de production en Amérique du Nord. Les experts prédisent que les trois pays en bénéficieront individuellement. Les ministres de l'Énergie du Canada, du Mexique et des États-Unis envisagent de convoquer une réunion en décembre afin de discuter de la façon de maximiser les avantages de cette ressource.

[Traduction]

Pour terminer, permettez-moi de revenir à la principale question du comité sur le potentiel d'accroissement du commerce et de l'investissement entre le Canada, les États-Unis et le Mexique. Selon notre analyse, ce potentiel est considérable et est effectivement en croissance. Cette tendance est stimulée par certains faits économiques que j'ai tenté de vous exposer, mais aussi par des faits politiques. La tendance du vote hispanique lors des récentes élections aux États-Unis a accru l'attention que Washington porte au Mexique sur le plan des politiques. Sachez que le président Obama a visité le Mexique cinq fois au cours de son mandat et que le vice-président Biden dirige maintenant le dialogue économique de haut niveau entre les États-Unis et le Mexique dans le cadre d'un nouveau mécanisme à l'échelon du cabinet qui vise à faire avancer les priorités économiques et commerciales stratégiques, à créer des emplois et à renforcer la compétitivité.

Même s'il est peut-être trop tôt pour affirmer que nous en sommes arrivés à un nouveau point tournant en Amérique du Nord, comme ce fut le cas il y a 20 ans, il semble certainement qu'il existe un potentiel inexploité en matière de commerce et d'investissement dans le continent. Nous nous attendons à ce que ce potentiel soit le fondement des discussions entre le premier ministre Harper, le président Obama et le président du Mexique Peña Nieto quand ils se rencontreront à l'occasion du Sommet des leaders nord-américains ici, au Canada, l'an prochain.

Je terminerai mon exposé ici. Merci beaucoup. Nous répondrons à vos questions avec plaisir.

La présidente : Merci.

La sénatrice Eaton : Vous avez fait remarquer que le président Obama s'est rendu cinq fois au Mexique. Je pense qu'il est venu une fois au Canada. Nous devons composer avec les dispositions « Buy American » et nous avons vu qu'il s'est produit un incident au Colorado la semaine dernière ou il y a quelques semaines seulement. Je pense qu'il s'agissait d'acier envoyé au Canada pour un traitement quelconque avant d'être renvoyé aux États-Unis, mais à cause des mesures législatives... de toute façon, vous savez tout cela. Il y a aussi le pipeline Keystone XL, bien sûr.

Avons-nous des problèmes avec cette administration? Est-ce que les problèmes que nous éprouvons dans le cadre de nos échanges croissants avec les États-Unis concernent davantage la politique que le commerce et le manque de biens à vendre? Sont-ils de nature plus politique qu'autre chose?

M. Morrison : Les États-Unis restent, et de très loin, le plus important partenaire commercial du Canada. Je reviens à ce que j'ai tenté de dire dans mon exposé : nous avons un plan très exhaustif pour renforcer encore notre intégration avec l'économie américaine et accroître la compétitivité à l'échelle de l'Amérique du Nord. Ce plan repose sur les deux piliers que sont le Conseil de coopération en matière de réglementation et l'initiative Par-delà la frontière.

Nous avons cependant découvert que c'est un travail ardu. Il faut régler une foule de menus détails quand on parle de coopération en matière de réglementation et qu'on tente de rendre les frontières plus fluides tout en assurant la sécurité.

De temps en temps, un irritant surgit, et les dispositions « Buy American » en sont certainement un. Ces situations tendent à découler des décisions prises par les administrations municipales et les gouvernements des États. Les États-Unis sont un pays très vaste et pluraliste. Dès qu'on a une relation comportant autant de facettes, on sera confronté à des défis, mais c'est un fait incontournable que nous sommes et resterons pendant un certain temps le partenaire commercial principal l'un de l'autre.

La sénatrice Eaton : Je ne remets pas cela en question du tout. C'est peut-être un pays pluraliste et les États imposent peut-être beaucoup de règlements, mais il me semble que l'atmosphère n'est guère favorable au Canada à Washington actuellement, à tous les égards en ce qui concerne le Nord. Je me souviens que la sénatrice Wallin m'a dit que le secrétaire de la sécurité intérieure pensait encore que les attentats du 11 septembre étaient le fait de Canadiens qui avaient traversé la frontière. En outre, le projet de pipeline Keystone est constamment repoussé, et il y a cette initiative d'achat au Canada. Je suis certaine que les occasions abondent, mais le climat ne semble pas très favorable tant que l'administration actuelle reste en poste. Elle ne semble pas bien disposée ou très intéressée.

Martin Moen, directeur général, Direction générale de l'Amérique du Nord et de l'investissement, Affaires étrangères, Commerce et Développement Canada : Je ne pourrai traiter de toute la question; vous pourrez donc peut-être y revenir, mais les dispositions « Buy American » sont assurément fort préoccupantes, et nous faisons de notre mieux pour tenter de résoudre le problème.

Dans ce cas en particulier, la loi a été adoptée en 1982; c'est donc un problème de longue date, qui n'est pas propre à l'administration actuelle. En outre, ces dispositions s'appliquent tant au Mexique qu'au Canada.

[Français]

La sénatrice Fortin-Duplessis : Merci beaucoup, madame la présidente. Monsieur Morrison, je souhaite vous féliciter pour la déclaration positive que vous avez faite sur l'ALENA. J'ai eu la chance de siéger comme députée dans l'autre Chambre. Je siégeais au comité qui a parcouru le Canada pour examiner la possibilité de conclure une entente de libre-échange avec les États-Unis. J'ai pu en apprendre sur les obstacles et les problèmes qui peuvent survenir avec notre plus proche voisin.

Dans la foulée du 20e anniversaire de l'ALENA, des organisations de gens d'affaires du Canada, des États-Unis et du Mexique ont fait valoir que nos gouvernements respectifs pourraient en faire davantage pour créer un espace économique nord-américain plus intégré et plus concurrentiel. Ceux-ci plaident en faveur d'un renouvellement du type de coopération trilatérale, qui a initialement mené à l'accord de l'ALENA. Qu'entend faire le Canada à cet égard?

[Traduction]

M. Morrison : Merci beaucoup. C'est tout à fait juste de dire que les milieux d'affaires des trois pays réclament des efforts accrus afin d'établir l'espace économique nord-américain. Sachez toutefois qu'on n'envisage pas de rouvrir l'ALENA. Ce dernier reste impopulaire aux États-Unis et, dans une moindre mesure, au Mexique, malgré ce qu'indiquent les données économiques. Les milieux d'affaires des trois pays, séparément et parfois ensemble, examinent de leur côté des mécanismes qui pourraient contribuer à renforcer l'intégration et, idéalement, la compétitivité en Amérique du Nord.

Les trois secrétaires du commerce, si l'on veut, la secrétaire américaine du commerce Penny Pritzker, le secrétaire mexicain de l'économie Ildefonso Guajardo et notre propre ministre Fast se réunissent régulièrement. Ils se rencontreront le 1er octobre à l'occasion d'un événement organisé à Toronto et ils ont leur propre plan de travail en matière d'innovation nord-américaine, lequel contribue à l'établissement du programme global du Sommet des leaders nord-américains que le premier ministre tiendra l'an prochain.

Il est juste de dire qu'aucune des initiatives individuelles proposées par les milieux d'affaires des trois pays ne constitue la percée que s'est révélé être un accord de libre-échange global en 1994. Une fois qu'un tel accord est conclu et que la plupart des biens traversent déjà les deux frontières très librement, les démarches subséquentes sont assez complémentaires. C'est le fondement de notre plan de travail de Par-delà la frontière et de l'initiative qui a suivi peu après, mais qui est maintenant traitée de la même manière, soit le Conseil de coopération en matière de réglementation.

Le travail des trois milieux d'affaires que vous avez évoqués est pris très au sérieux par les fonctionnaires. Nous participerons à certains événements qu'ils organisent plus tard au cours de l'automne, et cela aura une incidence sur les plans de travail du processus du Sommet des leaders nord-américains.

Outre les groupes de PDG qui préconisent ces mesures, il est important de souligner que les ministres de l'Énergie des trois pays se réuniront plus tard cet automne et que les ministres de la Défense des trois pays se rencontrent maintenant régulièrement parce qu'ils s'intéressent aux occasions de collaboration dans ce que j'appellerais le proche voisinage, soit l'Amérique centrale et les Antilles. Nous constatons que dans une certaine mesure, le Canada, les États-Unis et le Mexique collaborent certainement plus maintenant qu'au cours des dernières années.

[Français]

La sénatrice Fortin-Duplessis : Depuis les attentats terroristes de septembre 2001, une importance accrue est accordée à la sécurité, et je pense que cela nuit à la circulation des personnes et des marchandises à nos frontières. Vous avez énuméré tantôt quelques-uns des obstacles qui nuisent, justement, à notre entente de libre-échange; y en a-t-il d'autres qui empêchent l'accroissement du commerce et de l'investissement dans nos trois pays?

[Traduction]

M. Morrison : Je répondrais brièvement que oui. Ce n'est pas qu'une question de sécurité. Pour prendre un exemple facile, il existe des normes phytosanitaires différentes dans les deux pays. Voilà pourquoi il importe tant de collaborer sur le plan de la réglementation. Nous avons appris que les deux pays traitent les spongieuses différemment quand elles arrivent dans des caisses d'emballage. Ce qu'un pays peut trouver alarmant peut être traité de manières différentes par d'autres pays.

J'ai aussi donné l'exemple des sièges d'auto pour enfant. Personnellement, j'ai vécu de nombreuses années aux États-Unis, et je sais que les gens y aiment leurs bébés autant que nous aimons les nôtres, mais le fait est qu'un résidant du Canada ne peut utiliser de siège d'auto américain. C'est, de toute évidence, un obstacle au commerce. C'est pourquoi j'ai indiqué dans mon exposé que les petites différences peuvent devenir d'énormes obstacles au commerce.

Notre expérience dans le Conseil de coopération en matière de réglementation a jusqu'à présent été positive, mais vous aurez remarqué que très récemment, le premier ministre et le président Obama ont parlé d'une nouvelle approche. Si on y réfléchit, la coopération en matière de réglementation fonctionnera mieux si on agit en amont, c'est-à-dire si les autorités de réglementation d'un secteur donné se parlent dès le départ, avant que les différences ne s'enchâssent. Si elles se parlent au lieu d'essayer de déterminer quel est le meilleur processus d'homologation des sièges d'auto, nous pouvons obtenir de meilleurs résultats à long terme.

Voilà pourquoi je dis que ce n'est pas le genre de grande stratégie révolutionnaire que nous avons eue à l'époque de l'ALENA. Nous avons essentiellement le libre-échange, mais il existe également une panoplie de problèmes au chapitre de la réglementation et, à dire vrai, des infrastructures frontalières. Vous avez posé une question sur la sécurité. Vous connaissez bien les difficultés auxquelles le Canada se heurte alors qu'il souhaite ériger un nouveau pont enjambant la rivière Detroit à l'un des passages frontaliers les plus occupés de la frontière entre le Canada et les États-Unis. Parfois, le problème se résume à l'infrastructure par laquelle les biens et les services doivent passer.

Une fois encore, la réponse brève est non. Ce n'est pas qu'une question de sécurité; bien d'autres choses peuvent entraver la libre circulation des biens et des services et, par le fait même, l'amélioration de la prospérité.

Le sénateur Oh : Les États-Unis ont réduit leurs achats de pétrole canadien à la suite des avancées dans les technologies d'extraction de l'huile de schiste. Est-il temps pour le Canada de collaborer avec d'autres pays dans le secteur de l'énergie? Quels sont les avantages du commerce de l'énergie avec les marchés émergents comme le Mexique et les pays de l'Alliance du Pacifique?

M. Morrison : Le gouvernement a très explicitement pour politique de diversifier les marchés auxquels il vend le pétrole canadien et, en fait, tous les produits énergétiques. Vous avez donné deux excellents exemples : le Mexique et l'Alliance du Pacifique. Cette dernière compte quatre membres et deux pays aspirent à y adhérer. Le Canada a des accords de libre-échange avec ces six pays et est donc en excellente position pour vendre ses produits sur les marchés de l'Alliance du Pacifique.

Permettez-moi de dire quelques mots sur le Mexique. Dans mon exposé, j'ai employé les mots « réformes historiques ». Le Mexique avait, dans sa constitution, un élément fort datant de 1938 qui restreignait toute forme d'investissement dans son secteur de l'énergie. Le président Peña Nieta, qui n'est pas encore au pouvoir depuis deux ans, a fondamentalement ouvert la porte aux investissements dans le secteur de l'énergie du Mexique. C'est compliqué, car ce n'est pas aussi simple que de vendre des choses aux Mexicains, parce que nous entrerons en concurrence avec eux dans certains secteurs.

Mais c'est assurément une bonne nouvelle pour, par exemple, l'industrie des services pétroliers de l'Alberta. De formidables occasions s'offriront aux sociétés d'énergie, aux compagnies de pipeline et à tous ceux qui œuvrent dans le secteur des services pétroliers au Canada, et les occasions sont belles de faire avancer les intérêts canadiens. Je vais vous donner un exemple. Le Mexique et l'Alberta ont signé récemment un protocole d'entente en vertu duquel le Mexique recevra les conseils de l'Alberta sur la manière d'instaurer son régime de réglementation global en matière d'énergie, qui sera établi conformément aux normes de l'Alberta. De toute évidence, ce sera bénéfique pour les entreprises canadiennes, parce que si tout se déroule comme prévu, les entreprises canadiennes se sentiront en terrain connu quand elles feront des affaires au Mexique.

Il est donc certain qu'on déploie un effort d'envergure pour diversifier les marchés d'exportation de l'énergie du Canada.

[Français]

La sénatrice Verner : Lorsqu'on fait face à des enjeux dans le cadre de nos relations commerciales avec les États-Unis de façon générale, je présume que le Mexique s'avère être un allié. Est-ce qu'on travaille avec lui pour faire valoir nos intérêts vis-à-vis des Américains? Je fais référence à ce qui s'est produit dans le passé, car je comprends, au vu des questions qui vous ont été posées ici, qu'il y a maintenant des mesures de rapprochement pour que les trois pays puissent travailler en étroite collaboration.

Par le passé, est-ce qu'on a trouvé une façon de travailler avec le Mexique pour aider à assouplir les mesures américaines qui faisaient obstacle à nos relations commerciales?

[Traduction]

M. Morrison : C'est une excellente question. Selon l'interprétation de la fin de votre question, vous parliez des obstacles à nos relations commerciales. Il n'y a pas grand-chose qui a nui à nos relations commerciales au cours des 20 dernières années. Mais il y a eu des irritants, notamment celui dont j'ai parlé dans mon exposé : les dispositions sur la mention du pays d'origine sur l'étiquette, qui touchent également le Mexique, et nous avons parmi nous un expert en la matière en la personne de M. Moen. Au moins, nous partageons la position du Mexique pour nous opposer à ces dispositions. Ici encore, je ne suis pas un expert de cet irritant en particulier. Je suis certain qu'il existe des différences géographiques dans les chaînes d'approvisionnement, mais en ce qui concerne le porc et le bœuf, le Mexique et le Canada sont confrontés aux mêmes problèmes à cause des dispositions sur la mention du pays d'origine sur l'étiquette.

Nous avons lancé un processus devant l'Organisation mondiale du commerce, mais j'ignore si le Mexique y participe. Voilà un exemple de situation où nos intérêts coïncident avec ceux du Mexique. Dans l'ensemble, les faits ont démontré que l'ALENA s'est accompagné de remarquablement peu d'irritants au sujet desquels nous avons dû unir nos forces afin de nous opposer à un problème commun en raison de ce que les États-Unis tentent de faire.

[Français]

La sénatrice Verner : Une question a piqué ma curiosité, c'est celle de la possible mise en place d'un NEXUS mexicain. On sait que, comme mesure de représailles, le Mexique demande un visa aux parlementaires canadiens lorsqu'ils vont au Mexique. De quelle façon est-ce que cela va s'illustrer avec une carte NEXUS?

[Traduction]

M. Morrison : C'est une question dont je sais malheureusement être l'expert sur place.

Il y a un irritant dans les relations entre le Canada et le Mexique au sujet des visas. Nous sommes en train de dialoguer activement avec les Mexicains à ce sujet. Le premier ministre et le ministre Alexander se sont dits préoccupés par la question. Je crois peu probable que l'imposition d'un visa pour le Mexique soit levée dans un proche avenir.

Nous mettons cependant en place de nombreuses mesures pour faciliter les choses aux voyageurs mexicains dignes de confiance et, à dire vrai, aux voyageurs dans les situations où il est clair que c'est avantageux pour tous. C'est notamment le cas des voyageurs d'affaires, ainsi que des voyageurs mexicains participant au programme agricole et des étudiants mexicains. Il existe un éventail de programmes spéciaux dans le cadre desquels les visas posent un problème de taille. Presque tous les Mexicains sont admissibles à un visa pour entrées multiples d'une durée pouvant aller jusqu'à 10 ans. La presse a beaucoup traité de la question. C'est le seul irritant dans une relation qui est à tout autre égard saine et en expansion.

En ce qui concerne la carte NEXUS, sur laquelle porte votre question, je suppose que la réponse est que tout titulaire d'une carte NEXUS est déjà considéré comme un voyageur digne de confiance. Je présume que les sénateurs possèdent des passeports diplomatiques ou à couverture rouge.

La présidente : Non, nous avons des passeports à couverture verte.

M. Morrison : J'ignore ce qui se passe avec un passeport officiel et une carte NEXUS. C'est un dilemme en matière de politiques, mais nous serons enchantés de travailler avec les Mexicains à ce sujet. Mon portefeuille comprend d'autres pays d'Amérique latine. Ce problème ne disparaîtra pas, et sa résolution passe par la réciprocité. Voilà où nous en sommes.

Le sénateur Housakos : Merci, monsieur Morrison, de témoigner cet après-midi. J'ai trois questions distinctes, qui ont un lien entre elles.

Il ne fait aucun doute que la relation commerciale des États-Unis avec le Canada est la plus importante. Nous avons donc jugé important de l'examiner après le 20e anniversaire de l'Accord de libre-échange nord-américain.

Selon vous, est-il juste de dire que le Canada tient parfois le marché nord-américain pour acquis parce nous connaissons beaucoup de succès avec l'Accord de libre-échange Canada-États-Unis et l'Accord de libre-échange nord-américain? Sommes-nous devenus suffisants, à votre avis? Le gouvernement a intentionnellement ciblé les marchés émergents au cours de la dernière décennie et demie. Nous avons ainsi connu certains succès et quelques échecs dans diverses régions du monde. Inévitablement, l'Amérique du Nord produit encore le tiers des biens et services du monde et est toujours une puissance économique inégalée.

La première question est la suivante : avons-nous été un peu suffisants et tenu cette relation pour acquise parce que tout fonctionne bien?

La deuxième question concerne notre économie fondée sur les ressources par rapport à notre secteur manufacturier. Au cours de la dernière décennie, notre économie fondée sur les ressources a connu une forte croissance en grande partie à cause du besoin d'alimenter les marchés américains avec nos ressources et en raison des marchés d'Extrême-Orient et du Pacifique. Notre secteur manufacturier n'a pas fait aussi bonne figure que l'économie fondée sur les ressources sur le marché américain. D'après vous, est-ce en raison des obstacles que posent les arrangements commerciaux sur le plan de l'infrastructure, comme vous l'avez souligné plus tôt, ou est-ce dû à d'autres entraves ou à l'état de la devise canadienne, qui fluctue de temps en temps et joue un rôle important dans toute entente commerciale? Quelle est la solution? Quelles sont les voies qui pourraient s'offrir pour permettre au secteur manufacturier canadien de renforcer sa position afin de pouvoir tirer parti de cet accord nord-américain.

Ma dernière question est brève. Quel pourcentage des échanges commerciaux entre le Canada, les États-Unis et le Mexique est attribuable aux petites entreprises canadiennes par rapport aux grandes entreprises?

M. Morrison : Je répondrai volontiers. Permettez-moi de traiter votre troisième question en premier, parce que je n'ai pas de réponse. Nous pouvons toutefois vous trouver la réponse concernant le pourcentage du commerce que font les PME. Je pense que c'est un pourcentage substantiel, mais nous vous communiquerons les chiffres exacts si nous pouvons les obtenir.

Je résisterai à votre invitation à vous donner mon opinion sur les deux autres questions. En ce qui concerne la première, je dirai simplement que je ne pense pas du tout que nous soyons suffisants. Une de nos plus grandes ambassades du monde, 13 consulats généraux et 3 trois bureaux commerciaux aux États-Unis s'occupent principalement des questions relatives à l'accès au marché. C'est ce que nous faisons littéralement jour et nuit. Vous n'en entendez pas beaucoup parler parce que le programme en matière de politique commerciale pour l'ouverture de nouveaux marchés s'est réorienté vers l'Asie et d'autres régions. Mais je sais que nous ne sommes pas suffisants, et les statistiques sur l'importance actuelle de nos relations commerciales avec les États-Unis et le Mexique sont selon moi éloquentes.

Nous aurions besoin de statistiques pour étayer cette opinion, mais mon document indique que 77 p. 100 des PME affirment exporter vers les États-Unis. Le Canada est un pays qui compte quelques grandes sociétés et un grand nombre de petites entreprises. Dans le secteur de la haute technologie et d'autres industries, par exemple, on observe un phénomène très intéressant : le fait de vendre aux États-Unis est un moyen de vendre à des marchés internationaux. Des PME canadiennes vendent des produits à la chaîne de valeur de Walmart, qui les vendra en Chine.

Nous tentons donc de couvrir les divers aspects en ce qui concerne notre propre ministère et nos efforts de promotion du commerce, mais la statistique selon laquelle 77 p. 100 des PME ont accès au marché américain peut être en même temps une statistique sur l'accès aux marchés internationaux.

Quant à votre deuxième question sur l'énergie et les taux de change, je crains d'être historien plutôt qu'économiste; je ne répondrai donc pas à la partie sur les taux de change. Je dirais toutefois que le Canada s'en tire exceptionnellement bien depuis 2008 par rapport aux autres économies du G7, et ce, dans tous les secteurs.

Je crois que les statistiques montreraient que le secteur des ressources mène le bal en raison de l'explosion du secteur des produits de base, mais que le secteur manufacturier canadien s'en tire relativement bien également, particulièrement au regard des autres économies développées du monde.

Je sais qu'on a l'impression que tout tourne autour des ressources et que ce secteur agit comme un moteur, mais c'est en fait une question d'offre et de demande pour le Canada, qui est un pays exportateur.

Le sénateur Downe : Merci. J'aimerais faire le suivi quant à une question que le sénateur Housakos a posée.

Vous avez mentionné le nombre de missions commerciales et diplomatiques du Canada aux États-Unis, mais n'est-il pas vrai que nous avons effectué des réductions à cet égard, alors même que les Mexicains augmentent leur présence?

M. Morrison : Je sais que le Mexique a beaucoup plus de consulats que nous. À dire vrai, il vit aux États-Unis beaucoup plus de Mexicains qui ont besoin de services consulaires.

Dans le cadre du Plan d'action pour la réduction du déficit, notre ministère a effectivement apporté des réductions dans les consulats aux États-Unis. Nous avons réduit les ressources partout, et le gouvernement a pris une décision afin de réaffecter ces ressources à d'autres marchés dans la région que je supervise maintenant. Le Mexique n'a pas été touché par ces réductions, mais les consulats aux États-Unis l'ont été.

Je crois que cela découle d'une décision selon laquelle les services que réclament les entreprises canadiennes dans des régions comme le Mexique et les pays d'Asie et de l'Alliance du Pacifique ne sont pas aussi nécessaires aux États-Unis, où les statistiques indiquent que les entreprises canadiennes se sentent plus à l'aise pour voler de leurs propres ailes.

Pour répondre à votre question, il y a eu effectivement réduction nette de nos ressources aux États-Unis.

Le sénateur Downe : Je sais bien que les Mexicains sont beaucoup plus nombreux aux États-Unis, mais j'ai cru comprendre qu'ils y avaient augmenté le nombre de leurs bureaux commerciaux. Comme cela n'est bien sûr pas de votre ressort, je ferai mes propres recherches à ce sujet.

Cela nous ramène au point soulevé par mon collègue. Les États-Unis demeurent nos principaux partenaires commerciaux. C'est de loin notre marché le plus important. Certains pourraient dire que nous tenons ce marché pour acquis. Comme les gens d'affaires canadiens semblent très à l'aise de transiger aux États-Unis, on pourrait faire valoir que plus il y aura de régions américaines et de débouchés qui seront accessibles, plus ce sera synonyme d'échanges commerciaux et de prospérité pour le Canada. Comment alors expliquer ces réductions dans un tel contexte?

M. Morrison : C'est le gouvernement qui a décidé de procéder à ces réductions. Je crois que...

Le sénateur Downe : Je comprends que c'est une décision du gouvernement, mais est-ce qu'on a précisé que les réductions ciblaient les États-Unis, ou était-ce une décision ministérielle?

M. Morrison : Je n'étais pas au ministère à ce moment-là, mais nous pouvons certes nous renseigner. Je pense que cela s'inscrit dans la volonté de diversifier nos exportations, ce qui nous fait revenir à la question de tout à l'heure quant à la pertinence de se tourner vers un seul pays dans le cadre du plan global du gouvernement en matière de diplomatie économique. Le Plan d'action sur les marchés mondiaux mise sur la diversification de nos marchés d'exportation. Dans un contexte où les budgets sont figés ou en diminution, cela ne peut pas se traduire par un transfert des ressources entre les régions.

Le sénateur Downe : Il ne fait aucun doute que c'est l'objectif visé, non seulement par le gouvernement en place, mais aussi par ceux qui l'ont précédé depuis bien des années. Reste quand même que les États-Unis demeurent notre marché principal. Je trouve juste surprenant que, dans un effort pour avoir accès à d'autres débouchés, nous envisagions de réduire les ressources et les services dans un marché aussi prolifique.

Par ailleurs, vous avez parlé de la rencontre des ministres de la Défense des trois pays. J'ai cru comprendre que la constitution mexicaine ne permet pas aux forces armées de quitter le pays. Est-ce bien le cas?

M. Morrison : Je suis désolé, mais je l'ignore.

Le sénateur Downe : Si c'est bien le cas, il va de soi que leurs activités seraient limitées en Amérique du Sud et en Amérique centrale.

M. Morrison : Oui.

Le sénateur Downe : Ma dernière question concerne la carte NEXUS. Ai-je raison de penser que cette carte est totalement contrôlée par les États-Unis, ou est-ce que le Canada a un rôle à jouer? C'est une carte américaine. Y a-t-il un accord conjoint?

M. Morrison : Je crois qu'il y a effectivement un accord. Je viens d'ailleurs d'en faire moi-même l'expérience. Lorsque vous vous rendez à l'aéroport pour obtenir votre carte NEXUS, vous vous retrouvez en face d'un agent de l'ASFC et d'un représentant de l'Agence américaine des douanes et de la protection des frontières, assis côte à côte. À ce que je sache, ce serait donc une carte conjointe.

Le sénateur Downe : Si un entrepreneur mexicain se voit refuser la carte NEXUS, y a-t-il un équivalent canadien vers lequel il pourrait se tourner pour entrer chez nous plus facilement? Devons-nous plutôt nous conformer à la décision prise par les Américains quant à savoir s'il faut accepter ou repousser les gens qui souhaitent faire des affaires au Canada?

M. Morrison : L'octroi de la carte est une décision prise conjointement. Les modalités quant à la façon de procéder pour délivrer une telle carte à quelqu'un d'un autre pays n'ont pas encore été arrêtées. Cela se fait actuellement par consensus entre les deux pays qui conviennent que la personne est digne de confiance et peut donc traverser la frontière en bénéficiant de formalités assouplies. Il reste encore à déterminer comment nous pouvons étendre ce programme aux Mexicains et quelles règles s'appliqueront en l'espèce.

Le sénateur Downe : Ce sera donc une décision conjointe du Canada et des États-Unis, et pas seulement le choix des Américains?

M. Morrison : Encore là, je ne sais pas exactement quelle sera la marche à suivre pour l'accès des Canadiens et des Américains au programme mexicain et la participation des Mexicains au programme canado-américain. Comme les plus hautes instances se sont engagées à le faire en 2014, nous devrions être fixés sous peu.

La présidente : Il est possible que nous fassions un suivi à ce sujet. Je crois que NEXUS est d'abord un programme canado-américain, mais il est prévu que si tout fonctionne bien, si la carte facilite les déplacements d'affaires sans créer de nouveaux problèmes de sécurité, le programme sera élargi. Je sais qu'il y a eu également des pourparlers à ce sujet avec les Européens. Il serait donc peut-être bon que nous convoquions certains fonctionnaires afin d'explorer cette possibilité dans un contexte commercial. Les informations que j'ai obtenues jusqu'à maintenant concernaient l'aspect sécurité. Merci pour ces précisions.

J'ai quelques questions, après quoi le sénateur Demers en aura aussi une à vous poser. Il faut notamment considérer que nous visons à optimiser notre position du point des échanges commerciaux et des investissements pour assurer la prospérité du Canada. C'est dans ce sens que nous avons ciblé les États-Unis. Nous sommes allés de l'avant avec l'ALENA parce que nous estimions que c'était à notre avantage. C'était au départ une initiative des Américains et des Mexicains, et nous avons pesé le pour et le contre et convenu que nous devions y participer. Nous avons ensuite travaillé à régler les différentes modalités.

Nous allons maintenant nous pencher sur les aspects bilatéraux des échanges avec le Mexique dans le but d'optimiser les avantages pour le Canada. Y a-t-il une intensification des efforts bilatéraux qui s'articuleraient différemment avec les États-Unis, ou bien est-ce un processus trilatéral? Il va de soi que les échanges bilatéraux vont forcément devenir trilatéraux.

Alors quels mécanismes seront envisagés? Y a-t-il des questions particulières sur lesquelles votre ministère se penche?

Il faut aussi considérer la perspective régionale. Il y a le Partenariat transpacifique (PTP) et l'Alliance Pacifique, et nous essayons de déterminer laquelle de ces initiatives régionales servira le mieux les intérêts du Canada et comment nous pouvons optimiser notre participation du point de vue stratégique.

Est-ce que cela fait partie selon vous des aspects que nous devons examiner quant à la stratégie à adopter avec le Mexique et les États-Unis?

M. Morrison : Je répondrais par l'affirmative à toutes vos questions. Certains des points à régler exigent la contribution des gouvernements régionaux et locaux au Canada, au Mexique et aux États-Unis.

Je crois pouvoir affirmer sans crainte que nous allons poursuivre notre travail bilatéral dans certains dossiers avec nos deux partenaires, alors que d'autres questions seront examinées dans un contexte trilatéral. J'ai bien l'impression que les deux autres pays voient la chose du même œil.

Certains aspects peuvent d'abord faire l'objet d'échanges bilatéraux avant d'être examinés sur une tribune trilatérale; d'autres questions se prêtent dès le départ à une coopération trilatérale. Les idées vont transiter d'une tribune à l'autre et, on l'espère, être exploitées de la façon la plus efficace possible.

Nous vivons plus que jamais à l'ère de la régionalisation. C'est assurément ce qu'on peut constater avec l'Alliance Pacifique qui nous est arrivée, pour dire les choses comme elles sont, de nulle part pour permettre des progrès incroyables en deux années à peine.

Les quatre pays fondateurs de l'Alliance Pacifique comptent pour 36 p. 100 de l'économie de l'Amérique latine, comparativement à 37 p. 100 pour le Brésil. On assiste donc à l'émergence d'un tout nouveau joueur très important qui mise déjà sur le libre-échange à l'interne, tout au moins dans une proportion de 92 p. 100 d'ici à ce qu'on complète le tableau comme on s'est engagé à le faire. Il est question d'une bourse commune et d'un passeport unique pour les quatre pays. Ceux-ci ont déjà ouvert quelques missions diplomatiques conjointes à l'étranger.

C'est une nouvelle réalité qui a touché rapidement et de plein front le contexte politique de l'hémisphère et assurément celui de l'Amérique latine au sein de cet hémisphère.

L'émergence de l'Alliance Pacifique semble offrir au Canada de nouvelles possibilités de diversifier ses relations commerciales. Comme je l'indiquais, nous avons déjà conclu des accords de libre-échange avec les quatre pays membres et les deux pays aspirants. La portée est considérable compte tenu des changements intervenus au Mexique. Nous avons déjà des liens très étroits avec le Chili. Le Pérou et la Colombie sont des pays en développement ciblés par l'ancienne ACDI qui est maintenant la composante du MAECD se consacrant au développement. Nous avons des relations sur plusieurs tableaux avec ces quatre pays. Notre ministère travaille sans relâche à de nouvelles initiatives qui pourraient nous être utiles dans ce contexte.

Nous jouons un rôle d'observateur au sein de l'Alliance Pacifique, mais nous essayons de bonifier ce statut en établissant un partenariat stratégique avec l'alliance.

Les quatre pays membres respectent les droits de la personne et les règles du marché. Ils défendent des vues similaires sur plusieurs tribunes internationales, et se sont révélés d'excellents partenaires pour le Canada, ce qui est tout à fait notable en comparaison d'autres pays d'Amérique latine.

J'estime que c'est une nouvelle réalité dont on doit tenir compte comme l'a constaté notre gouvernement et bien d'autres avec lui — l'Alliance Pacifique compte maintenant 33 pays observateurs.

La présidente : J'aurais juste un dernier commentaire. Des hommes d'affaires et des représentants gouvernementaux se sont réunis il y a deux semaines à Calgary dans le cadre du Partenariat Canada-Mexique. Il faut beaucoup de temps pour que le rapport de cette conférence soit rendu public. Serait-il possible d'en savoir un peu plus dès maintenant sur les points de vue qui ont été exprimés relativement aux échanges Canada-Mexique?

M. Morrison : Certainement. J'étais présent à cette occasion, et je me réjouis de pouvoir vous en glisser un mot. Comme c'était ma première participation, j'ignorais que les rapports étaient si longs à produire et je vais...

La présidente : Accélérer le processus.

M. Morrison : Je vais voir à ce qu'on accélère les choses dès mon retour au bureau. C'était le 10e anniversaire de ce partenariat qui se distingue au sein de notre politique étrangère. En effet, nous n'avons pas de mécanisme semblable avec aucun autre pays. Il y a des groupes de travail permanents dans huit secteurs distincts qui vont de l'énergie jusqu'au capital humain, en passant par le commerce et l'innovation. C'est donc un mécanisme sans précédent et tout à fait prometteur que j'ai pu voir à l'œuvre pour la toute première fois.

De concert avec les Mexicains, nous avons convenu que le 10e anniversaire était aussi l'occasion de nous demander ce qui fonctionne vraiment et ce qu'il faudrait améliorer un tant soit peu. Nous allons donc nous employer à ranimer certains aspects du partenariat, mais je suis sorti de l'exercice avec la ferme conviction que si l'objectif visé est d'établir des relations plus étroites avec le Mexique, nous disposons là d'un excellent outil.

Il est bien évident que les rapports devraient être produits plus rapidement et nous verrons à faire le nécessaire.

La présidente : Merci. Si nous voulons obtenir cette information sans tarder, c'est que nous souhaitons produire notre propre rapport rapidement.

Le sénateur Demers : J'aurais d'abord une information à vérifier avant de vous poser une question. Disons que mon passeport canadien expire en 2014 et que ma carte NEXUS arrive à échéance en 2016. Supposons qu'au lendemain de l'expiration de mon passeport, je le renouvelle pour une période de 10 ans. Je dois alors refaire les mêmes démarches d'identification pour obtenir mon nouveau passeport, même si ma carte NEXUS est valide jusqu'en 2016. Êtes-vous en mesure de confirmer que c'est bien le cas? Vous ne pouvez pas obtenir directement un nouveau passeport, même si votre carte n'expire qu'en 2016. Il faut se prêter à nouveau au même processus.

M. Morrison : Les cartes NEXUS et les passeports ne sont pas du ressort de notre ministère. Je viens tout juste d'obtenir une carte NEXUS et elle est valide pour une période de 10 ans.

Je crois que vous avez raison. J'ai moi-même un passeport bleu et un passeport rouge, et j'ai dû me déplacer à deux reprises pour les enregistrer. Dans un cas comme celui que vous évoquez, je pense qu'il serait également logique que les responsables de NEXUS soient avisés lorsque vous obtenez un nouveau passeport à l'expiration du vôtre.

La sénatrice Eaton : Lorsque vous obtenez un nouveau passeport et que votre carte NEXUS est toujours valide, vous pouvez les aviser en ligne. Ou bien allez voir les gens de NEXUS qui s'en chargeront pour vous lors de votre prochain passage à l'aéroport.

Le sénateur Demers : Même si la carte est valide jusqu'en 2016, vous devez le faire tout de même?

M. Morrison : Oui.

Le sénateur Demers : D'accord, merci pour la précision. Merci de votre aide, sénatrice Eaton.

Voici maintenant ma question. Quel rôle les provinces et territoires canadiens de même que les États américains et mexicains ont-ils à jouer dans l'accroissement du commerce et de l'investissement entre le Canada, les États-Unis et le Mexique?

M. Morrison : Le rôle des provinces et des territoires?

Le sénateur Demers : Oui, merci.

M. Morrison : J'aurais d'abord un élément intéressant à souligner. Depuis l'entrée en vigueur de l'ALENA, le Canada est le principal marché d'exportation pour 35 des 50 États américains. Nous ne cessons de le faire valoir dans nos consulats aux États-Unis. À titre d'exemple, nous sommes le principal partenaire commercial du Texas. Comme on ne voit généralement pas les choses dans cette perspective au niveau des États, nos efforts de sensibilisation vont notamment dans ce sens.

Pour vous répondre, je vais vous parler de deux groupes avec lesquels nous travaillons. Il y a d'abord la Région économique de la côte Pacifique-Nord-Ouest (PNWER), un club qui se réunit une fois par année pour nommer un directeur général et se donner un plan de travail. Ainsi, les gouverneurs de l'Idaho, du Montana, de l'État de Washington et de l'Alaska et les premiers ministres de la Colombie-Britannique, de l'Alberta et de la Saskatchewan se sont réunis cette année à Whistler. M. Heyman, l'ambassadeur des États-Unis à Ottawa, et Gary Doer, notre propre ambassadeur, étaient présents. C'est donc un modèle possible.

Il y a une nouvelle entité qui essaie de s'en inspirer dans la région des Grands Lacs. Il s'agit d'une organisation assez dynamique qui regroupe les gouverneurs des États des Grands Lacs, lesquels invitent parfois les premiers ministres de l'Ontario et du Québec. Ce nouveau groupe dirigé par un jeune Canadien s'efforce de reproduire le modèle de PNWER dans la région des Grands Lacs.

En considérant leurs territoires respectifs comme un regroupement d'entités économiques situées de part et d'autre d'une frontière internationale, ces deux regroupements examinent les débouchés économiques dans une perspective régionale, ce qui m'apparaît tout à fait logique. Chacune peut ensuite venir à Ottawa pour nous indiquer de quelle manière le gouvernement fédéral peut l'aider à atteindre ses objectifs de prospérité.

La présidente : Je peux vous confirmer que le PNWER est une tribune tout à fait unique qui doit son efficacité à l'apport de législateurs et parlementaires fédéraux des deux pays. Le milieu des affaires y est représenté, et le monde universitaire se joint à l'initiative. C'est un concept efficace qui permet de se pencher sur les différents dossiers à la recherche de solutions. Je sais que d'autres régions veulent s'en inspirer et tiennent des réunions entre gouverneurs et premiers ministres, mais il s'agit davantage d'établissement de réseaux que de résolution de problèmes à proprement parler. On essaie de se donner une orientation. C'est peut-être un exemple à suivre dans le cas du Mexique.

Merci beaucoup de votre participation. Vous avez amorcé notre étude en soulevant tout un éventail de questions. Il y a plusieurs avenues que nous pourrions emprunter mais, compte tenu du temps à notre disposition, nous allons nous efforcer de nous concentrer sur les aspects les plus utiles. Vous avez certes contribué à alimenter nos futurs débats.

Nous allons maintenant passer à notre second groupe de témoins que je vais vous présenter brièvement, car vous avez déjà reçu une copie de leur curriculum vitae. Ils vont tous deux témoigner à titre personnel. Je suis très heureuse d'accueillir Mme Laura Dawson, présidente de Dawson Strategic; et M. Michael Hart, titulaire de la Chaire Simon Reisman en politique commerciale de la Norman Paterson School of International Affairs de l'Université Carleton, qui a déjà comparu à maintes reprises devant ce comité dans ses moutures antérieures. Bienvenue à tous les deux. Notre greffier vous a déjà donné un aperçu de la teneur de notre étude et des aspects au sujet desquels vous pouvez apporter une contribution particulière à nos discussions sur nos relations avec le Mexique et les États-Unis. Je vais m'en tenir à l'ordre qui figure sur ma liste et inviter d'abord Mme Dawson à nous faire sa déclaration préliminaire.

Laura Dawson, présidente, Dawson Strategic, à titre personnel : Je vous remercie de votre accueil et je suis heureuse de comparaître à nouveau devant vous.

Je veux d'abord et avant tout vous dire à quel point je vous suis reconnaissante de vous intéresser à ces questions. J'ai l'impression d'être la dernière défenderesse du trilatéralisme. Lorsqu'on dit aux gens que l'on étudie l'ALENA ou que l'on préconise un marché concurrentiel en Amérique du Nord, c'est un peu comme si on leur avouait que l'on s'intéresse au dronte ou que l'on veut ressusciter les manuscrits de la mer Morte. Malheureusement, même s'il s'agit de notre plus importante relation commerciale et d'une entente primordiale qui régit la majorité de nos échanges, l'ALENA, dans sa forme actuelle, est devenu l'Exxon Valdez des accords commerciaux.

Michael Hart, titulaire de la Chaire Simon Reisman en politique commerciale, professeur en affaires internationales, Norman Paterson School of International Affairs, Université Carleton, à titre personnel : J'aime bien cette analogie.

Mme Dawson : Voudriez-vous être titulaire de la Chaire ALENA de l'Université Carleton ou bien sous-ministre responsable des relations dans le cadre de l'ALENA?

Malheureusement, l'ALENA est devenu le bouc émissaire de tous les problèmes en matière de mondialisation. C'est devenu un raccourci qu'empruntent les médias, les protestataires et les adversaires du commerce pour dénoncer les déplacements illégaux de personnes, la baisse de l'emploi dans le secteur manufacturier et la restructuration de l'économie. Ce sont toujours les accords commerciaux et l'ALENA tout particulièrement qui sont à blâmer. Il est donc difficile de convaincre les gens.

J'ai des observations écrites, mais j'aimerais d'abord vous dire quelques mots à la lumière de l'exposé du représentant du MAECD et de quelques-unes de vos questions.

Il y a une chose que vous devriez peut-être savoir. En marge de mes antécédents d'universitaire canadienne — d'universitaire déchue, devrais-je dire, car j'ai travaillé avec M. Hart qui m'a d'abord enseigné — et de mon travail à la tête d'une société qui aide les entreprises canadiennes à composer avec les problèmes liés aux relations Canada-États-Unis, j'ai aussi travaillé pendant trois ans pour le gouvernement américain. J'ai été la conseillère économique de deux ambassadeurs et on m'envoyait souvent à Washington pour travailler avec le représentant au commerce, le département du Commerce ou le Département d'État. Je connais donc la perception que les États-Unis peuvent avoir du Canada et j'ai été témoin de la manière dont les questions trilatérales y sont gérées au niveau bureaucratique et institutionnel.

Les États-Unis sont donc nos principaux partenaires commerciaux, mais si l'on se projette dans l'avenir pour voir où on en sera rendu dans 10, 20 ou 30 ans, il faut reconnaître que c'est du Mexique que proviendra toute la croissance au chapitre des échanges commerciaux et de la capacité concurrentielle en Amérique du Nord. C'est dans ce pays que l'on trouve une population jeune et en pleine croissance, une classe de consommateurs qui prend de l'ampleur et la main-d'œuvre abordable qui nous permettra de commercialiser les technologies que nous allons concevoir au Canada. C'est vraiment du côté du Mexique que l'avenir apparaît avantageux pour nous.

Si l'on retourne 20 ans en arrière, nombreux sont ceux au sein du gouvernement comme à l'extérieur qui n'auraient pas choisi le Mexique comme partenaire commercial. C'est un choix qui s'est en quelque sorte imposé de lui-même pour éviter le problème du rayonnement lorsque les États-Unis ont décidé de conclure un accord commercial avec le Mexique. Nous avons donc accepté ce mariage de convenance avec un pays avec lequel nous avions peu d'affinités commerciales. Nous en sommes toutefois arrivés à un point où nos modalités de fonctionnement, nos règles, nos hypothèses et nos croyances en matière commerciale sont synchronisées et harmonisées avec celles du Mexique, que nous le voulions ou non. Nous nous retrouvons maintenant avec un système économique tout à fait intégré dont nous ne tirons pas parti. Pourquoi donc? Je suppose que c'est parce que nous préférons la nouveauté. Nous aimons mieux courir des multitudes de lièvres à la fois et faire du commerce avec d'autres pays du monde, ce qui peut être tout à fait bénéfique, pour autant que ce ne soit pas au détriment des échanges avec nos voisins immédiats. J'estime que la prospérité future du Canada doit passer par l'établissement d'un cadre concurrentiel en Amérique du Nord, ce que nous ne parvenons pas très bien à faire pour l'instant.

Ce constat d'échec est en partie attribuable au manque de leadership aux États-Unis et au fait que le gouvernement américain ne veut pas parler de l'ALENA et met tout en œuvre pour éviter le ressac politique et médiatique qu'entraîne toute évocation de cet accord. M. Pritzker, secrétaire au Commerce, a lancé l'an dernier un programme commercial trilatéral que l'on voulait baptiser à l'occasion du 20e anniversaire de l'ALENA. Plutôt que de parler par exemple de « Communauté nord-américaine », ils l'ont appelé « Objectif sud » ou quelque chose du genre, ce qui laisse une bizarre impression à ceux qui vivent au nord des États-Unis. Il faut donc regretter ce manque de leadership de nos voisins du Sud en faveur du commerce nord-américain. De toute évidence, ils s'intéressent d'abord et avant tout au pivot vers l'Asie, au Partenariat transpacifique et, plus récemment, à l'Union européenne. C'est donc au Canada qu'il incombe de faire avancer le programme trilatéral.

Mais le Canada préfère ne pas trop pousser du côté trilatéral. Pour quelle raison? Parce que nous avons toujours pu miser sur une relation particulière avec les États-Unis en ce sens qu'un représentant du MAECD peut, ou pouvait, devrais-je dire, simplement prendre le téléphone et parler à son homologue américain pour que les choses s'arrangent.

Pourtant, le gouvernement des États-Unis dispose des institutions nécessaires pour traiter des questions économiques dans un cadre trilatéral. Il n'y a pas de bureau des affaires canadiennes, mais il y en a toujours un pour les affaires nord-américaines ou celles de l'hémisphère. Lorsque les Américains veulent procéder à une annonce, lancer un nouveau programme ou affecter des ressources, ils ne se demandent pas : « Qu'en est-il du Canada? », mais bien « Qu'en est-il du Canada et du Mexique? » Si l'on veut que la voix du Canada soit entendue à Washington, il faut mettre en place sans tarder un cadre trilatéral. C'est ainsi que nous nous retrouvons dans ces situations où les ressources américaines affluent pour la frontière sud — Otay Mesa et San Diego — alors qu'il n'y a presque rien pour la frontière nord — les problèmes avec le complexe douanier de Detroit, par exemple. Nous, Canadiens, devons donc préconiser le trilatéralisme pour que notre point de vue soit pris en compte aux États-Unis.

Il n'est pas facile de travailler avec le Mexique. Ce pays en développement constitue un véritable défi. La situation y est plutôt chaotique. Il est plus facile de travailler directement avec les États-Unis, mais nous devons mieux faire dans nos échanges avec les Mexicains.

Quelqu'un a demandé tout à l'heure si l'imposition d'un visa au Mexique pouvait être problématique. C'est vraiment un problème. Si, dans les faits, le nombre de personnes qui se voient refuser l'accès à la frontière n'est pas énorme, il faut penser à l'obstacle symbolique ou psychologique que cela crée : le Canada nous déteste. Les Canadiens avaient promis d'éliminer cette exigence et voilà que l'on nous traite comme des citoyens de seconde zone. Ainsi, lorsque cette exigence est entrée en vigueur au Mexique, le formulaire à remplir pour obtenir un visa était deux fois plus long que celui requis pour les Guatémaltèques. Dans le dossier Keystone XL, nous faisons valoir aux États-Unis que ce n'est pas une façon de traiter un voisin. Eh bien, les Mexicains se sentent exactement de la même manière lorsqu'on leur impose un visa.

Pendant que nos hautes instances tergiversent sur la question du Mexique, nos gens d'affaires n'hésitent pas à foncer, comme vous l'avez sans doute constaté dans le cadre de vos études. Le Canada est le principal investisseur étranger dans le secteur de l'extraction au Mexique. Nous sommes effectivement le chef de file de l'industrie minière mexicaine. La Scotiabank est l'une des principales institutions financières et nous avons des entreprises comme les meubles Palliser, les pièces d'auto Linamar et Bombardier qui ont trouvé la formule pour optimiser les chaînes d'approvisionnement mexicaines : notre technologie, leur main-d'œuvre, leur capacité d'innovation et leur accès à nos marchés. Il est beaucoup moins coûteux d'expédier des marchandises depuis Monterrey ou ailleurs au Mexique, qu'à partir de Shanghai ou de Beijing. Nous avons tous ces avantages à portée de la main, et nous choisissons de ne pas nous en prévaloir.

Ces messieurs du MAECD avaient tout à fait raison de dire qu'un grand nombre d'activités complémentaires vont de l'avant. Ce n'est pas chose facile, car il s'agit de questions qui vont au-delà des frontières, comme les barrières non tarifaires et les problèmes réglementaires, d'enjeux frontaliers et de circulation des personnes. Nous devons faire mieux et nous engager de façon plus efficace dans des dossiers clés comme les modalités frontalières et réglementaires, l'infrastructure, les transports, l'énergie et le mouvement des personnes, notamment dans le cadre des échanges d'études, de la mise en commun de connaissances et de toutes les mesures que le Canada peut prendre pour être considéré comme un partenaire à part entière du Mexique, plutôt que comme un ami qui est là seulement quand tout va bien ou comme un allié commercial de passage.

La présidente : Monsieur Hart, à vous la parole.

M. Hart : Merci de m'avoir invité. Ce n'est pas la première fois que je comparais devant votre comité, et je me réjouis d'être de retour. Désolé pour mon léger retard, mais j'ai un peu ralenti avec les années et j'ai eu la bonne idée de me présenter au mauvais édifice. Contrairement à Laura, je n'ai pas de déclaration écrite, car la plus grande partie de ce que je pourrais vous dire se retrouve déjà dans les travaux que j'ai publiés. Les trois plus récents, qui ont été réalisés pour le compte de l'Institut C.D. Howe, traitent justement des questions qui nous intéressent aujourd'hui.

Mon ancienne étudiante devenue une véritable experte en la matière fait valoir que les problèmes sont surtout d'ordre institutionnel et liés à la façon dont les choses sont organisées à Washington. Il est difficile pour les Canadiens de se faire entendre dans une mesure suffisante pour que l'on puisse progresser vers l'objectif visé. Elle n'a pas tout à fait tort, mais ce même problème institutionnel existait déjà lorsque les relations Canada-États-Unis ont pris naissance. Nous pouvons tout au moins nous réjouir d'avoir progressé dans la hiérarchie. Nous faisons maintenant partie du bureau nord-américain, plutôt que de celui de l'Europe occidentale, comme c'était le cas avant la négociation de l'accord de libre-échange.

Voilà maintenant près de 50 ans que j'observe les relations entre le Canada et les États-Unis — ça date de l'époque où j'étais étudiant là-bas — et je n'ai jamais vu une administration aussi peu intéressée par ces relations que celle actuellement en poste. C'est étonnant à bien des égards, car je ne me souviens pas d'une rencontre entre le président américain et notre premier ministre qui se soit déroulée aussi bien que la première visite au Canada de M. Obama en 2009. Le président américain en est ressorti en souscrivant avec enthousiasme au plan d'action alors établi. Ainsi, les journalistes qui ont eu droit au compte rendu présenté par le personnel présidentiel dans l'avion du retour ont abondamment fait état de la détermination du président à donner suite aux enjeux dont on avait débattu, y compris ceux relevés par Mme Dawson et au sujet desquels j'ai écrit, à savoir la nécessité de régler les questions qui vont au-delà de la frontière; de contrer l'effet sclérosant de l'administration frontalière sur le commerce bilatéral; de régler les problèmes réglementaires qui nous divisent, lesquels ne sont pas très importants si on les considère individuellement, mais qui ont un effet cumulatif compromettant sérieusement les relations commerciales entre les deux pays. Je pensais donc que c'était un très bon départ.

Il n'y a malheureusement eu aucune suite, sous quelque forme que ce soit. Il a fallu beaucoup de temps pour que l'on se décide enfin à amorcer le dialogue, et s'il y a eu certains progrès du côté réglementaire lorsque M. Sunstein était à la Maison-Blanche, l'intérêt s'est vite dissipé lorsqu'il est retourné à Harvard. Même si cette première réaction institutionnelle augurait bien, elle n'était alimentée par aucun intérêt politique. Les responsables canadiens en charge de cette initiative ont donc vite perdu leur enthousiasme pour le projet. Je regrette d'avoir à le dire, mais ils ont adopté eux aussi une approche plutôt attentiste.

Pour leur avoir parlé à différentes reprises, j'ai pu constater cette baisse d'enthousiasme. Comme il n'y avait pas de réaction du côté de Washington, l'intérêt politique au Canada a commencé à diminuer, ce qui fait que nous n'allons nulle part dans cette importante relation qui, comme l'indiquait Mme Dawson, est l'épine dorsale de notre commerce extérieur. Par la force des choses, nous avons plutôt investi davantage de ressources dans nos efforts pour établir de bonnes relations outre-Atlantique et de l'autre côté du Pacifique. Je n'y vois absolument rien de mal même si j'ai l'impression que nous investissons trop dans des relations secondaires et pas assez dans nos liens les plus importants. J'estime toutefois que cela est notamment attribuable aux réactions mitigées des instances politiques à Washington.

Dans votre étude, je dirais que nous nous réjouissons à la perspective de développer une relation plus étroite avec la prochaine administration, qu'il est temps de faire une croix sur la présente administration — c'est ce qu'ont fait la plupart des gens —, bien que le degré de popularité du président soit difficile à expliquer.

Cette administration est irrécupérable pour ce qui est d'élaborer des politiques visant à régler des problèmes mondiaux et à maintenir des relations bilatérales. Tout ce que je peux dire — et ce n'est pas politiquement correct —, c'est que Jimmy Carter doit être très heureux, car il n'est plus considéré comme le pire président depuis la Seconde Guerre mondiale.

Le président : Je ne suis pas sûr de vouloir commenter cet exposé. Je suis bouche bée; je vais conclure et passer au premier intervenant.

Le sénateur Housakos : Je vous remercie, madame Dawson et monsieur Hart, de vos observations rafraîchissantes. Je vous suis reconnaissant de vos exposés, qui étaient instructifs.

Je vais énoncer mon point de vue, et j'aimerais savoir ce que vous en pensez. Est-ce possible qu'il soit un peu difficile pour une administration américaine ou pour le Congrès américain d'être très enthousiaste à propos d'un accord commercial qui engendre en ce moment un déficit commercial avec le Canada? Nous exportons beaucoup plus de produits aux États-Unis que les Américains en exportent au Canada. Les États-Unis sont aussi déficitaires au chapitre des investissements étrangers. Au cours des 10 dernières années, les Américains semblent investir beaucoup plus d'argent au Canada que les Canadiens en investissent aux États-Unis.

Les politiciens examinent inévitablement ces chiffres avant de commencer à promouvoir une entente ou un projet, quel qu'il soit. En outre, vous avez mentionné, comme il convient, qu'une certaine clientèle aux États-Unis est convaincue que ces accords soulèvent un certain ressentiment, qu'il s'agisse de l'ALENA ou de libre-échange en général. Le fait est qu'au cours des 10 dernières années, l'économie américaine ne s'est pas porté aussi bien que celle du Canada.

J'aimerais savoir ce que vous pensez de ces points de vue ainsi que de mon sentiment que le Canada n'a pas suffisamment utilisé le Mexique comme tremplin vers tant l'Amérique du Sud que l'Amérique latine. Il existe quelques exemples d'entreprises l'ayant fait, et Mme Dawson y a fait allusion en parlant de Bombardier et d'autres entreprises canadiennes, mais les sociétés et le gouvernement canadiens peuvent-ils se préoccuper davantage d'utiliser le Mexique comme tremplin vers les marchés sud-américains et latino-américains? Pouvez-vous formuler des observations à propos de ces deux vastes questions?

Mme Dawson : Comme M. Hart aura probablement des observations à formuler à propos de l'intérêt que les États-Unis manifestent à l'égard des accords commerciaux, ma réponse à cette question sera minime, sinon pour dire que la nature des accords commerciaux et des relations commerciales entre les États a changé.

À l'époque où nous établissions le GATT, l'OMC et l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis, nous devions surmonter d'importantes barrières tarifaires, et ces accords commerciaux sont devenus le point de mire de nos relations commerciales. Au cours des 20, 30 et 40 dernières années, ces barrières ont été éliminées, et nous sommes maintenant aux prises avec une foule d'irritants et d'obstacles qui surgissent par-delà la frontière. Le problème, c'est que ces irritants et ces obstacles sont incroyablement difficiles à supprimer. Il est incroyablement difficile de réunir suffisamment d'intervenants pour appuyer leur suppression, parce que ces irritants ont tendance à toucher les petites et moyennes entreprises. Ces entreprises ne sont pas de très bons lobbyistes parce qu'elles ne disposent pas des ressources nécessaires pour jouer ce rôle, tandis que les grandes entreprises trouvent des façons de contourner ces problèmes. Il est donc beaucoup plus difficile maintenant de susciter l'enthousiasme des gens pour les accords de grande portée.

Enfin, lorsque le Conseil de coopération en matière de réglementation se réunit, il est question de coupes de viande et de nettoyage de volaille. Vous ne voulez pas dépêcher vos ministres auprès de CNN afin qu'ils fassent une importante annonce et parlent de nettoyage de volaille et de résidus de pesticides; ces questions ne sont tout simplement pas excitantes. Il est donc problématique de tenter de négocier des accords complexes qui comportent des milliers d'aspects à régler dans le cadre de longues rencontres semblables à des sommets. Cette approche ne fonctionne pas particulièrement bien.

En ce qui concerne la question d'utiliser le Mexique comme tremplin vers le reste de l'Amérique latine, je suis tout à fait d'accord. Nous avons entendu le représentant du MEACD parler de l'Alliance du Pacifique, et il s'agit là d'une excellente relation officielle que nous devrons certainement nouer. Mais, oui, le Mexique est le tremplin qui convient pour commercer avec le reste de l'Amérique latine.

Pendant la partie précédente de votre séance, vous avez mentionné l'importance des petites et moyennes entreprises. L'intégration des petites et moyennes entreprises dans la chaîne d'approvisionnement nord-américaine a tendance à commencer localement. Un petit fournisseur travaillera avec une entreprise comme Linamar à Guelph, laquelle collaborera avec une fonderie mexicaine. Les produits seront ensuite exportés de nouveau vers le Chili, le Pérou ou la Colombie, ou vendus dans ces pays par une coentreprise. Oui, nous devrions utiliser le Mexique comme tremplin vers la région. C'est la mesure logique à prendre, mais, en même temps, nous ne devons pas avoir peur de nous porter à la rencontre de ces pays. Nous avons négocié des accords de libre-échange avec la Colombie, le Pérou et le Panama, et nous devons nous en servir.

M. Hart : Je ne suis pas en désaccord avec Mme Dawson, mais je ne voudrais pas que qui que ce soit parte d'ici avec l'impression que le commerce avec le Mexique peut être une bonne façon de traiter avec les États-Unis ou qu'en améliorant nos relations commerciales avec le Mexique nous en serons grandement récompensés. Le Mexique est un marché difficile. C'est encore un marché du tiers-monde qui est affligé de tous les problèmes bureaucratiques que cela suppose.

Au cours des 20 dernières années, le Mexique a fait de grands pas pour mettre en œuvre l'ALENA. De 1995 à 2000, il a entrepris une ambitieuse réforme de la réglementation et a réalisé de grands progrès. Les Mexicains seraient prêts à mettre en œuvre un programme de réglementation trilatéral, mais, s'ils le faisaient, ils rendraient insoluble un problème déjà compliqué. Pour réaliser ces progrès, je pense que nous devons travailler avec les Américains d'abord.

Le problème de la frontière mexicaine ne sera pas résolu de sitôt, pas tant que des millions de personnes la franchissent illégalement. Par conséquent, l'attention que les Américains prêtent à la frontière mexicaine se limite aux questions d'immigration et de sécurité, et non aux questions commerciales.

Les Américains ont pris de nombreuses mesures pour améliorer leur commerce avec le Canada, mais il y a une limite à ce qu'ils sont prêts à faire pour renforcer les relations canado-américaines — une limite que nous devons les convaincre de franchir. Nous leur avons indiqué de plusieurs façons que nous sommes disposés à collaborer avec eux, à un point tel que nous pourrions bien être en train de compromettre les intérêts canadiens en faisant nôtres une grande partie de leurs pratiques.

Je ne suis pas sûr que ces décisions soient bien réfléchies dans certains domaines. Par exemple, afin de collaborer avec les Américains et de protéger les intérêts des banques canadiennes aux États-Unis, nous avons, au cours de la dernière année, mis en œuvre une mesure législative qui force les banques canadiennes à jouer le rôle d'agents du IRS. Comme ma femme est née aux États-Unis, je sais à quel point le personnel de l'IRS est capable de harceler les gens; ils font passer les employés de l'Agence du revenu du Canada pour des enfants de chœur.

Par conséquent, il y a des limites à ce que nous sommes disposés à faire, en particulier pendant que les États-Unis durcissent leur approche à l'égard de ces genres de problèmes.

Cela dit, généralement parlant, cette administration n'a pas manifesté un véritable intérêt à l'égard d'un programme commercial. M. Obama est arrivé au pouvoir sans que le Congrès lui accorde le pouvoir dont il a besoin pour participer à des négociations commerciales. Par conséquent, toutes les négociations que le président a entreprises reposent sur ses pouvoirs en matière de politique étrangère. Dans le monde d'aujourd'hui, ces pouvoirs ne valent pas grand-chose, parce que si l'on veut qu'un accord aboutisse, il faudra qu'il soit approuvé soit par les deux Chambres du Congrès — c'est-à-dire que la mise en œuvre de la mesure législative exige l'approbation des deux Chambres du Congrès —, soit par les deux tiers du Sénat. Cela n'arrivera jamais dans le monde d'aujourd'hui, à moins que l'un ou l'autre des partis obtiennent 75 sièges, ce qui est peu probable.

Deuxièmement, cette administration démocratique est fortement redevable au mouvement syndical et à d'autres mouvements de gauche. Par conséquent, son attitude à l'égard du commerce est généralement hostile. Les négociations qui se déroulent en ce moment dans le cadre du Partenariat transpacifique ou des premières étapes de l'accord transatlantique sont menées sans le genre de forte autorité politique qu'en tant que négociateur, je désirerais pour que nous puissions compter être payés de retour pour les concessions que nous faisons.

Maintenant, les gens de Washington nous disent que M. Froman est un représentant au Commerce beaucoup plus actif que son prédécesseur. Cela pourrait bien être le cas, mais il est impossible que le Congrès actuel lui accorde le pouvoir de négocier. Il se peut que le nouveau Congrès de l'année prochaine soit composé de différentes personnes, parce qu'il comportera probablement un plus grand nombre de républicains qui s'intéressent davantage au commerce, et il se peut que ces républicains soient disposés à accorder ce pouvoir de négociation. Toutefois, il sera intéressant d'observer les négociations entre l'administration et les deux Chambres du Congrès, parce que l'administration voudra inclure des éléments qui ne plairont pas au Congrès, et vice-versa.

Ce secteur sera donc intéressant à observer. Ils ont promis qu'ils obtiendraient ce pouvoir à temps pour que le Congrès prenne en considération le Partenariat transpacifique. Les observateurs de Washington auront donc quelque chose d'intéressant à observer, mais je ne suis pas complètement certain que cela se produira.

Comme je l'ai mentionné plus tôt, je pense que, compte tenu des circonstances, nous devons nous soucier de faire nos devoirs en préparation pour la prochaine administration.

Le président : Il y a deux autres intervenants sur ma liste, mais je vais maintenant clore celle-ci. Si nous pouvions poser des questions plus brèves, nous pourrions tout terminer avant que prenne fin le temps alloué à la séance.

[Français]

Le sénateur Maltais : Merci, monsieur Hart, pour votre courte introduction. Je reconnais en vous l'homme d'expérience qui connaît très bien le dossier.

Madame Dawson, ma question s'adresse à vous. Vous avez fait une entrée très rhétorique et bien structurée. Je vois que vous avez des qualités d'enseignante exceptionnelle.

Permettez-moi d'être en désaccord avec vous sur la vision que le Mexique a du Canada. Dans un autre parlement, j'ai eu l'occasion de travailler énormément avec les gouvernements mexicains, et aussi avec le peuple mexicain. Lorsque vous affirmez que les Mexicains détestent le Canada en disant que celui-ci les traite comme des gens de deuxième classe, je suis en porte-à-faux avec vous. Pour les Mexicains qui viennent au Canada, le Canada est l'un des pays qui traitent le mieux ses travailleurs étrangers en leur offrant des soins tels que l'assurance-emploi et des soins médicaux. C'est l'un des pays dans le monde qui est qualifié pour donner les meilleurs soins aux travailleurs étrangers. Il est certain que, demain matin, si on ouvrait les frontières du Mexique, on pourrait recevoir 85 millions de demandes de visa pour venir travailler au Canada.

Cependant les Mexicains ont beaucoup plus d'appréhension vis-à-vis des États-Unis, pour des raisons historiques et des raisons factices. Des raisons historiques, parce qu'il y a eu la guerre hispano-américaine et qu'une partie du territoire a été amputé, et il y a eu aussi la guerre des frontières. Les Mexicains craignent beaucoup plus le mur qui sépare le Mexique des États-Unis et les visas américains.

Quant aux investisseurs canadiens au Mexique, ils sont très bien vus et traitent très bien leurs employés quoiqu'on en dise ou qu'on en pense. J'ai œuvré longtemps au sein d'un autre parlement, j'ai participé à des missions commerciales à plusieurs reprises, et je n'ai jamais entendu ce que vous nous avez décrit.

Ce que vous avez dit est très rhétorique, mais sur le terrain, ce n'est pas ce qu'on entend. Par contre, il est certain que le Mexique est un pays en voie de développement, qui a été ravagé par de multiples révolutions; un pays qui a été exploité sans vergogne par les Espagnols.

Ma question est la suivante : lorsque vous affirmez que le Canada est perçu comme un pays qui traite les travailleurs mexicains comme des gens de deuxième classe, en avez-vous la certitude?

[Traduction]

Mme Dawson : Non, je ne suis pas du tout sûre de cette affirmation. Je vous demande pardon si je me suis mal exprimée ou si mes propos ont été mal interprétés. Le Canada entretient une excellente relation avec le Mexique qui prend la forme de son Programme des travailleurs étrangers temporaires. Comme vous l'avez mentionné, notre programme de mobilité temporaire est l'un des plus importants du monde, et il aide tant le Canada que le Mexique à satisfaire leurs besoins en matière de marché du travail.

Donc, tout d'abord, permettez-moi de rejeter cette notion. Vous avez absolument raison, et je m'excuse de toute déclaration non intentionnelle en ce sens que je pourrais avoir faite.

Quant à l'impression que le Canada est détesté par le Mexique, je la réfute absolument. Absolutamente no. Toutefois, nos partenaires mexicains ont le sentiment que le Canada les a laissé tomber en raison des affirmations qui ont été faites selon lesquelles le visa canadien prendrait fin après un certain laps de temps, mais cela ne s'est pas produit. Oui, certaines considérations en matière de sécurité existent, mais il y a de nombreuses façons de les contourner. Par exemple, les États-Unis mettent en œuvre des programmes de dispense de visa dans le cadre desquels les ressortissants nationaux peuvent entrer un certain nombre de renseignements et découvrir en quelques minutes s'ils sont admissibles aux États-Unis. Voilà le genre de mécanismes que nous devons mettre au point, et non traiter tous les Mexicains comme s'ils étaient des étrangers ennemis.

Le Canada a eu le malheur d'être immortalisé dans un telenovela de la télévision mexicaine. Les telenovelas sont des feuilletons télévisés qui font partie intégrante de la culture mexicaine. Dans le feuilleton en question, un jeune homme se dispute avec sa petite amie et lui dit « tu poses plus de questions que l'ambassade canadienne ». Lorsqu'on est connu comme étant ce genre de voisin et d'ami, on a du travail à faire pour améliorer sa réputation.

Je devrais aussi mettre en relief le travail important que ces personnes, ces municipalités et ces provinces accomplissent au Mexique. En particulier, la province de Québec entretient avec le Mexique une relation solide et permanente. À certains égards, la province porte le drapeau au nom du reste d'entre nous.

[Français]

La sénatrice Fortin-Duplessis : En tout premier lieu, madame Dawson, avant de vous poser ma question, j'aimerais savoir ce que fait Dawson Strategic. J'ai cherché, mais je n'ai rien trouvé à ce sujet.

[Traduction]

Le sénateur Downe : Madame Dawson, dans votre déclaration préliminaire, vous avez mis l'accent sur le fait que le Mexique est la véritable voie vers la croissance. Certaines institutions du gouvernement américain considèrent que le Mexique pourrait devenir un État en déroute. Elles ne sont pas certaines de la façon dont le pays évoluera, compte tenu de la corruption et des guerres de trafiquants qui règnent là-bas. Vous avez mentionné la présence au Mexique de la Banque Scotia. Les représentants officiels de la banque se déplacent en fourgonnettes blindées et sont suivis d'une fourgonnette de secours pour des raisons de sécurité. Ils disposent de plus de personnel de sécurité que le premier ministre du Canada en a lorsqu'il se déplace à Ottawa.

Si vous êtes propriétaire d'une petite entreprise, ou même d'une moyenne entreprise, cet aspect vous dissuadera très efficacement d'exercer vos activités là-bas. Si vous dirigez une grande entreprise, les enlèvements et les demandes de rançon font partie de la façon de faire des affaires. On peut comprendre les raisons pour lesquelles, outre la barrière de la langue, de nombreuses entreprises canadiennes hésitent à accéder à ce marché. Ces préoccupations sont-elles exagérées, ou constituent-elles, en fait, la réalité quotidienne des entreprises canadiennes?

Mme Dawson : Je vais commencer par répondre à votre question, sénateur Downe, puis je vous décrirai toutes les mesures que mon entreprise prend.

Le Mexique est-il un État en déroute? Non. Le Mexique devra accomplir de nombreuses tâches difficiles pour se sortir de son état d'économie en développement, lequel nécessite la prise de nombreuses mesures de sécurité et s'accompagne de problèmes de transition et de voisins mécontents au sud de sa frontière que le pays doit gérer. Le Mexique doit combattre sur un certain nombre de différents fronts, ce qui représente un défi, même si les États-Unis jouent un rôle dans ces initiatives. Cependant, de nombreux échanges commerciaux transfrontaliers se déroulent en ce moment et sont en pleine croissance.

L'année dernière, le Conseil canadien des chefs d'entreprise m'a engagée pour mener une étude sur les dispositions canado-mexicaines, et j'ai passé près de trois semaines au Mexique à parler aux responsables des entreprises canadiennes et à observer moi-même à quoi les conditions rassemblaient. Oui, il y a des préoccupations au chapitre de la sécurité qui varient en fonction de la région où l'on est établi et le type d'activités qu'on exerce, mais, en général, l'homme d'affaires moyen qui travaille à Mexico n'a pas plus de problèmes de sécurité à régler qu'il en aurait dans n'importe quelle autre grande ville du monde.

Oui, ce n'est pas la même chose qu'exercer ses activités à Paris ou à Francfort, mais, si l'on examine la liste des économies en développement avec lesquelles nous pouvons faire des affaires, ainsi que les avantages et les relations dont on jouit déjà au Mexique, et qu'on les compare aux risques et aux difficultés qu'entraîne un commerce avec Moscou, Pékin ou Bangalore, on constate que le Mexique est plutôt bien.

Exportation et développement Canada, ou l'EDC, met en œuvre un excellent programme dans le cadre duquel il tente de relier les intérêts de petites entreprises à ses activités de prêt et de garantie au Mexique. Pour être actif dans ce pays, il n'est pas toujours nécessaire de s'implanter là-bas. L'ambassade, le Service des délégués commerciaux et le conseil commercial Mexique-Canada offrent un grand nombre d'excellentes ressources. Ils sont tous là pour soutenir les efforts des Canadiens là-bas.

Le sénateur Downe : Il y a une petite question que j'aimerais clarifier. Je ne souhaitais pas donner l'impression que le Mexique est un État en déroute — si j'ai dit cela, c'était par erreur. Les Américains envisagent l'avenir et la possibilité que le pays devienne en déroute. Si nous avons le temps, monsieur le président, j'aimerais adresser la même question à M. Hart, à condition qu'il ait des observations à formuler.

Le président : Je sais que les professeurs aiment disposer de 20 minutes, mais 20 secondes suffiront.

M. Hart : Je ne pense pas que le Mexique soit un État en déroute. Toutefois, je comprends pourquoi certains représentants officiels des États-Unis ont tendance à le penser. J'observe le développement du Mexique depuis l'administration Portillo, qui date de quelques années déjà. Au début de chaque administration, les dirigeants mexicains promettent et essaient, entre autres, d'expliquer aux Américains que leur administration sera celle qui s'attaquera pour la première fois au problème de la corruption.

Il y a deux ans, j'ai écouté un exposé dynamique donné par le chef de cabinet du président actuel, et ses propos m'ont semblé très impressionnants. Bien entendu, ils n'ont abouti à rien parce que la corruption est très profonde, en particulier maintenant que la corruption liée au trafic des stupéfiants a augmenté en dépit du léger recul de la corruption politique. Les entreprises canadiennes ont intérêt à veiller à ce que leurs activités ne soient pas compromises pendant leur implantation là-bas, et cela ajoute des coûts à leurs activités commerciales.

Mme Dawson : Après avoir quitté les universités et le gouvernement américain, il ne me restait plus qu'à travailler pour le secteur privé. Dans le passé, j'avais remarqué que les entreprises, qui font des affaires au Canada en suivant un ensemble de règles et aux États-Unis en suivant un différent ensemble de règles, se demandaient comment démêler tout cela. Ma petite entreprise travaille avec des associations, des coalitions et des groupes commerciaux qui s'efforcent de surmonter les obstacles du commerce transfrontalier. Si des règlements liés aux transports ou aux institutions bancaires les touchent, nous nous efforçons de les aider à trouver un changement qui n'exige pas que les politiques ou le lobbying auprès des gouvernements soient modifiés, mais plutôt que les représentants officiels des gouvernements, comme ceux qui étaient présents aujourd'hui, communiquent entre eux et coordonnent leurs mesures.

[Français]

La sénatrice Fortin-Duplessis : Votre expérience, d'après ce que j'ai pu voir, concerne surtout les échanges que le Canada a avec les États-Unis et le Mexique. Comment voyez-vous les économies asiatiques qui occupent une place accrue dans le monde et qui touchent le commerce et l'investissement en Amérique du Nord — et on pourrait peut-être dire la même chose des pays européens? Selon vous, est-ce que cela nuit à nos relations avec nos voisins les plus proches, c'est-à-dire les États-Unis et le Mexique?

[Traduction]

Mme Dawson : Oui. On encourage depuis longtemps le Canada à diversifier son commerce. Il n'est jamais bon de commercer avec un seul partenaire. Par conséquent, le Canada s'emploie à diversifier ses échanges, mais, au lieu de nager avec une seule baleine, le Canada nage maintenant avec de nombreuses baleines. La Chine est une baleine, tout comme l'Union européenne, alors que le Canada n'est qu'un petit poisson. Il faut donc qu'il soit rapide. Pour fonctionner dans cet univers, nous devons être très vigilants quant aux conditions que les investisseurs étrangers doivent remplir avant d'être autorisés à investir au Canada, et nous devons nous assurer qu'ils respectent toutes les normes canadiennes s'appliquant à la santé et à la sécurité au travail, à l'environnement, et cetera. Nous ne pouvons pas être nonchalants et présumer que, parce que nous respectons les règles, tous les autres le font également. Nous devons nous endurcir un peu pour répondre aux demandes de la diversification.

Le président : Nous avons utilisé tout le temps qui nous était imparti. Avec vos façons directes d'aborder ces questions, vous avez certes entamé un débat intéressant. Je soupçonne fortement qu'à mesure que nous poursuivrons notre étude, nous désirerons vous revoir afin que vous répondiez à des questions liées à d'autres aspects. Si cela ne se produit pas, je pense que certains sénateurs de notre entourage pourraient vouloir s'inscrire à vos cours, monsieur Hart. Vous avez une façon provocante d'aborder les enjeux qui nous pousse à réfléchir. Madame Dawson, vous avez une grande expérience des États-Unis qui est extrêmement utile. Je vous remercie d'avoir comparu devant nous, comme vous l'avez fait dans le passé. Nous nous réjouissons à la perspective de poursuivre ce dialogue.

Sénateurs, nous serons de retour dans cette pièce demain. Je vous rappelle donc simplement de venir ici pour la séance de demain. La semaine prochaine, nous retournerons dans notre salle de réunion habituelle. La séance est levée.

(La séance est levée.)


Haut de page