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APPA - Comité permanent

Peuples autochtones

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Peuples autochtones

Fascicule no 14 - Témoignages du 30 novembre 2016


OTTAWA, le mercredi 30 novembre 2016

Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, auquel a été renvoyé le projet de loiS-3, Loi modifiant la Loi sur les Indiens (élimination des iniquités fondées sur le sexe en matière d'inscription) se réunit aujourd'hui à 18 h 51 pour étudier ce projet de loi et, à huis clos, un projet de rapport.

La sénatrice Lillian Eva Dyck (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente: Bonsoir. Je souhaite la bienvenue à tous les honorables sénateurs et aux membres du public qui suivent cette réunion du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones soit ici même, soit sur Internet.

Dans un esprit de réconciliation, je tiens à reconnaître que nous nous réunissons sur le territoire traditionnel des peuples algonquins.

Je m'appelle Lillian Dyck. Je viens de la Saskatchewan. J'ai l'honneur et le privilège de présider le comité. J'invite maintenant mes collègues sénateurs à se présenter, en commençant à ma gauche.

Le sénateur Moore: Je souhaite la bienvenue aux témoins. Je suis Wilfred Moore, de la Nouvelle-Écosse.

La sénatrice Pate: Kim Pate de l'Ontario.

La sénatrice McPhedran: Marilou McPhedran du Manitoba.

La sénatrice Lovelace Nicholas: Sandra Lovelace Nicholas du Nouveau-Brunswick.

La sénatrice Bovey: Patricia Bovey du Manitoba.

Le sénateur Sinclair: Murray Sinclair du Manitoba.

Le sénateur Meredith: Je suis le sénateur Don Meredith de l'Ontario.

La sénatrice Lankin: Frances Lankin de l'Ontario.

Le sénateur Oh: Victor Oh de l'Ontario.

La sénatrice Martin: Yonah Martin de la Colombie-Britannique.

La sénatrice Beyak: Lynn Beyak de l'Ontario.

[Français]

La sénatrice Dupuis: Renée Dupuis, sénatrice du Québec.

[Traduction]

Le sénateur Enverga: Tobias Enverga de l'Ontario.

Le sénateur Tannas: Scott Tannas de l'Alberta.

La sénatrice Raine: Nancy Greene Raine de la Colombie-Britannique.

Le sénateur Patterson: Dennis Patterson du Nunavut.

La présidente: Merci, sénateurs. Je voudrais souhaiter la bienvenue à tous les sénateurs indépendants non affiliés qui ont décidé d'assister à la réunion de ce soir pour écouter nos témoins parce que nous examinons un important projet de loi du gouvernement. Je vous remercie de votre présence.

Ce soir, nous accueillons la ministre des Affaires autochtones et du Nord et des fonctionnaires du ministère. Les témoins sont venus nous parler du projet de loiS-3 que nous examinons depuis deux semaines.

Nous entendrons donc ce soir l'honorable Carolyn Bennett, C.P., députée, ministre des Affaires autochtones et du Nord, et, du ministère, MmeJoëlle Montminy, sous-ministre adjointe, ainsi que Candice St-Aubin et Nathalie Nepton. De Justice Canada, nous avons également M.Martin Reiher. Je souhaite la bienvenue aux fonctionnaires. Je crois que c'est la troisième fois que vous comparaissez devant le comité.

Cela dit, j'invite la ministre à présenter son exposé. Ensuite, les honorables sénateurs auront des questions à poser.

L'hon. Carolyn Bennett, C.P., députée, ministre des Affaires autochtones et du Nord: Merci beaucoup, madame la présidente. Je suis heureuse de comparaître à nouveau devant votre comité. Compte tenu du travail que nous aurons à faire sur le projet de loiS-3, je crois que nous serons de retour assez souvent, probablement dans la nouvelle année.

Je vous remercie d'avoir noté que nous nous réunissons ici sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin.

Je voudrais dire encore une fois qu'il est vraiment important de comprendre que tout cela est le résultat d'un travail d'équipe. Je voudrais donc remercier la sous-ministre adjointe du Secteur de résolution et des affaires individuelles pour son travail et sa présence, ainsi que Candice et Martin. J'espère que vous comprendrez avant la fin de cet exposé que nous voulons, à un moment donné, libérer Nathalie de ses fonctions de registraire. Nous ne croyons pas qu'il appartienne à notre ministère de déterminer qui est Indien. Nous entreprenons un long périple, et je sais que les sénateurs voudront participer à cet immense succès.

Je suis aussi heureuse d'avoir l'occasion de m'entretenir avec vous pour expliquer l'approche que nous nous proposons d'adopter par suite de la décision Descheneaux. Je crois qu'il conviendrait d'abord de rendre hommage aux nombreuses femmes courageuses des Premières Nations, dont le travail acharné a permis de mettre ces questions en évidence. Je parle de femmes telles que Mary Two-Axe Earley, Jeannette Corbière Lavell, Yvonne Bédard, la sénatrice Lovelace Nicholas et Sharon Donna Mclvor. Nous tenons également à reconnaître et à remercier Stéphane Descheneaux, Susan Yantha et Tammy Yantha, dont le courageux combat permettra de mettre fin au traitement discriminatoire de dizaines de milliers de personnes. Je voudrais aussi remercier la sénatrice Lankin, qui parraine ce projet de loi, ainsi que tous les membres de votre comité, pour le travail extraordinaire que vous avez fait sur cette mesure législative dans des circonstances très difficiles.

Nous sommes conscients du fait que nous vous avons demandé de vous attaquer à des enjeux très complexes et très fondamentaux dans un délai très court. Je dirais, en toute franchise, que ce n'est pas la façon que j'aurais choisie pour faire adopter le premier projet de loi venant de mon ministère. Comme vous le savez, la cour a imposé l'échéance du 3 février, ce qui nous a obligés à faire des choix difficiles pour respecter ce délai tout en procédant aux consultations nécessaires auprès des peuples autochtones et en veillant à ce que les parlementaires aient suffisamment de temps pour s'acquitter de leurs importantes responsabilités.

Comme vous le savez, le premier ministre et le gouvernement se sont engagés à renouveler les relations entre la Couronne et les peuples autochtones, en se fondant sur la reconnaissance des droits, le respect, la collaboration et le partenariat.

[Français]

Cela signifie aussi, dans la mesure du possible, travailler en partenariat pour résoudre les différends en dehors des tribunaux.

[Traduction]

C'est la raison pour laquelle le gouvernement a décidé de retirer l'appel contre la décision Descheneaux, dont nous avons hérité à notre arrivée au pouvoir. Nous avons décidé d'agir immédiatement pour remédier aux iniquités mises en évidence dans cette décision ainsi qu'aux autres facteurs de discrimination fondés sur le sexe qu'on trouve dans le système d'inscription établi en vertu de la Loi sur les Indiens.

Les nouvelles relations impliquent aussi de veiller à ce que les politiques ayant des incidences sur les peuples autochtones soient conjointement élaborées et fassent l'objet d'une sérieuse consultation. Il n'y a pas de doute que la complexité des enjeux, s'ajoutant à l'échéance fixée par la cour, a considérablement limité ce que le gouvernement pouvait faire pour consulter les Premières Nations. Même si le ministère a fait de son mieux, malgré les contraintes de temps, l'engagement n'a pas été aussi étendu que je l'aurais voulu, et des erreurs ont été faites.

Le fait que mon ministère a omis de prendre directement contact avec les demandeurs était non seulement inacceptable, mais embarrassant pour moi, comme ministre responsable. Depuis, j'ai personnellement parlé à tous les demandeurs, expliqué l'approche en deux phases du gouvernement et promis, verbalement et par écrit, qu'ils seraient consultés au cours de la conception du processus de la seconde phase.

Même si le projet de loiS-3 ne fait l'objet que de consultations limitées, je crois que l'adoption des mesures de réforme qui y sont prévues et la mise en place d'un processus de collaboration plus large pour remédier à d'autres problèmes plus complexes constituent le moyen le plus équitable et le plus responsable d'aller de l'avant.

Les modifications prévues dans le projet de loi permettent de remédier aux aspects que les tribunaux ont déjà jugés discriminatoires ainsi qu'à d'autres situations parallèles fondées sur le sexe.

[Français]

Nous devons mettre fin à ces inégalités fondées sur le sexe avant que le tribunal impose une échéance.

[Traduction]

Cela est important non seulement pour les demandeurs, mais aussi pour les 35000 autres personnes qui sont actuellement privées de leurs droits. Je suis très consciente des nombreuses autres iniquités possibles que le projet de loi n'aborde pas, mais que des témoins ont soulignées. Vous avez été mis au courant d'un certain nombre de situations qui constituent d'autres formes de discrimination fondées sur le sexe ou d'autres exemples d'iniquités qu'il faudrait éliminer: l'ascendance inconnue, la date limite de 1951, l'inadmissibilité de la deuxième génération, l'adoption, l'émancipation, et cetera. De nombreux témoins étaient d'avis qu'en dépit des consultations limitées, le projet de loi devrait simplement être modifié pour remédier à ces problèmes.

Le gouvernement croit qu'à part la question soulevée par l'Association du Barreau Autochtone, à l'égard de laquelle nous proposons une modification, les autres enjeux dépassent la portée du projet de loi. Cette position est appuyée par le représentant de l'ABA qui vous a dit:

Si l'on considère uniquement l'aspect de l'égalité des sexes du projet de loi, sous réserve de nos commentaires et des révisions proposées, vous pouvez dire que nous acceptons le point de vue selon lequel nous devrions adopter le projet de loi dans sa forme actuelle afin de respecter les obligations imposées au Parlement par les tribunaux...

Je serai heureuse de donner plus de détails à ce sujet au cours de la période de questions, mais je pense que le point à retenir, c'est que le fait de remédier aux problèmes que nous venons de mentionner ainsi qu'aux nombreux autres que les témoins ont exposés à votre comité aurait probablement de profonds effets sur les collectivités autochtones.

Nous savons tous que les fréquentes décisions unilatérales prises par le gouvernement fédéral à l'égard des peuples autochtones ont souvent eu de désastreuses conséquences imprévues. Le gouvernement doit s'assurer de ne pas involontairement créer d'autres formes de discrimination.

Nous devons aussi trouver un équilibre entre les droits individuels et collectifs des peuples et des collectivités autochtones. Des consultations poussées avec les collectivités seront nécessaires pour traiter d'impacts beaucoup plus complexes que la simple fourniture de ressources suffisantes, ainsi que de questions fondamentales comme l'intégrité culturelle des collectivités.

[Français]

Malgré le travail essentiel fait par les comités parlementaires pour tenir le gouvernement responsable, il ne peut pas remplacer les consultations entre nations.

[Traduction]

Le premier ministre et le gouvernement ont très clairement dit que, pour atteindre nos objectifs communs, le Canada et les peuples autochtones doivent travailler en partenariat pour aboutir à un consensus et trouver des solutions conjointes. C'est la raison centrale pour laquelle nous avons mis en œuvre une approche en deux phases dans notre réponse à la décision Descheneaux.

Selon certains témoins, il aurait simplement suffi, pour avoir plus de temps et tenir des consultations, de demander à la cour de repousser l'échéance. Le chef national de l'Assemblée des Premières Nations Perry Bellegarde a proposé de prendre une année de plus pour bien faire les choses. Je comprends qu'on puisse préférer régler simultanément tous ces importants problèmes, mais nous ne pouvons tout simplement pas le faire dans le délai imposé par la cour, même si nous pouvons obtenir une prolongation.

La durée d'une telle prolongation serait extrêmement limitée, allant ordinairement de trois à six mois. Compte tenu des processus ministériels et législatifs à inclure dans le délai accordé, il ne resterait que très peu de temps pour tenir des consultations.

Comme le représentant de l'ABA l'a clairement dit dans son témoignage, nous nous retrouverions vraisemblablement ici dans quelques mois avec un projet de loi d'une portée très semblable qui entraverait le travail requis pour la seconde phase.

J'aimerais aussi préciser qu'en laissant tout simplement passer l'échéance de la cour, ce qui frapperait de nullité les dispositions en cause de la loi, nous empêcherions la registraire de traiter 90p.100 des nouvelles demandes présentées partout dans le pays. Cela ne toucherait pas seulement le Québec, comme certains témoins l'ont soutenu.

Je comprends le cynisme des peuples autochtones et des parlementaires vis-à-vis de l'engagement que le gouvernement a pris d'amorcer la seconde phase. Même si nous le faisons, certains pourraient douter qu'une véritable réforme découle de cette démarche. Des gouvernements de toutes les allégeances ont manqué pendant des décennies aux promesses faites à ce chapitre.

Je vous donne ma parole que la seconde phase sera lancée en février 2017 et que nous entreprendrons un sérieux processus de consultation et de collaboration avec les Premières Nations et d'autres groupes autochtones afin de régler les grands problèmes d'inscription et d'appartenance de la Loi sur les Indiens.

[Français]

Ce processus sera non seulement conçu conjointement avec les Premières Nations, mais aussi avec les experts et d'autres Canadiens et Canadiennes informés, y compris les membres du présent comité.

[Traduction]

Je crois sincèrement que c'est l'occasion pour le gouvernement de bien faire les choses, en ce qui a trait non seulement à des consultations sérieuses, mais aussi à un vrai partenariat visant une conception commune des réformes nécessaires.

Je vous assure que j'ai l'intention, personnellement et par l'entremise de mon ministère, de demander le concours de personnes aussi dévouées que Sharon McIvor, Jeannette Corbière Lavell, la sénatrice Lovelace Nicholas et d'autres afin de concevoir une seconde phase qui permette à ceux et celles qui ont été exclus des conversations antérieures de se faire entendre.

La seconde phase fera intervenir un vaste groupe de personnes afin de garantir que nos actions futures refléteront le point de vue de tous les gens susceptibles d'être touchés.

Nous ne parviendrons pas toujours à un consensus. Le gouvernement aura peut-être à prendre des décisions politiques difficiles afin de protéger des droits, mais ces décisions ne seront pas prises unilatéralement et sans consulter les parties touchées.

Je serai également enchantée d'avoir l'occasion de m'adresser encore à votre comité le printemps prochain pour faire le point sur les progrès accomplis dans la seconde phase.

Je vous exhorte donc à appuyer le projet de loi, avec la modification proposée par l'ABA, pour rendre immédiatement justice à quelque 35000 personnes.

Je m'engage, envers les peuples autochtones et votre comité, à aller de l'avant en partenariat, immédiatement après cette étape essentielle, afin de réaliser ensemble une réforme élargie.

J'aimerais que vous compreniez que c'est là une étape du processus destiné à enlever au ministère la responsabilité qu'il a dans ce domaine. Je veux éliminer la fonction de registraire. C'est un périple que nous devons entreprendre ensemble, mais l'adoption du projet de loi constitue une première étape extrêmement importante pour rendre immédiatement justice aux gens privés de leurs droits, pour leur dire qu'ils n'ont pas à attendre plus longtemps et pour commencer à redresser les autres torts.

Merci. Meegwetch.

La présidente: Merci, madame la ministre. Nous allons maintenant donner la parole aux sénateurs qui souhaitent poser des questions.

Le sénateur Patterson: Je vous remercie, madame la ministre, ainsi que vos collègues.

Nous avons trouvé difficile d'examiner ce projet de loi complexe. Je vous dirais en toute franchise que j'ai des réserves à son sujet. Il est intitulé Loi modifiant la Loi sur les Indiens (élimination des iniquités fondées sur le sexe en matière d'inscription). J'estime que c'est sur cela que nous devrions axer notre examen du projet de loi.

Je sais que la seconde phase ira au-delà de cet intitulé, comme vous l'avez noté dans votre exposé, afin d'éliminer d'autres iniquités qui ne sont pas strictement fondées sur le sexe. J'estime cependant que, dans le cadre de l'étude du projet de loi, nous devons concentrer notre attention sur les iniquités fondées sur le sexe parce que c'est cela que dit le projet de loi.

Vous avez dit ce soir que le gouvernement proposera un amendement, que nous n'avons pas encore vu, traitant de l'une des iniquités fondées sur le sexe notées par l'Association du Barreau Autochtone. Cela est bon à savoir. Cet amendement témoigne probablement du fait que le projet de loi ne correspondait peut-être pas à l'intention qui avait présidé à son élaboration, sans doute à cause du délai trop court dont le gouvernement disposait.

Je voudrais vous demander des renseignements au sujet de quatre catégories d'iniquités que M.Schulze, procureur des demandeurs, avait présentées en détail au comité au cours de sa première réunion consacrée au projet de loi.

Vous avez admis que c'était une erreur. Vous avez même dit qu'il est inacceptable que le ministère n'ait pas cherché à prendre contact avec les demandeurs. Je suis heureux que vous l'ayez reconnu. Nous avions été choqués de l'apprendre, mais j'ai l'impression que cela continue.

Pour situer un peu mieux le contexte, je signale que votre collaboratrice, MmeMontminy, a dit au comité à deux reprises, je crois, que les scénarios que M.Schulze avait portés à l'attention du comité n'étaient pas fondés sur le sexe. Elle l'a dit cette semaine lorsqu'elle a comparu devant le comité, et je cite:

Les autres changements possibles proposés par le procureur du demandeur ne correspondent pas à des situations de discrimination fondée sur le sexe. Il l'a admis, comme on peut le voir dans le compte rendu.

Madame la ministre, j'ai examiné le témoignage de M.Schulze à notre première réunion consacrée au projet de loi. Voici ce que notre présidente avait dit, en parlant de remonter dans le temps:

... n'y aurait-il pas quand même de la discrimination fondée sur le sexe parce que l'Indien, lui, ne perd jamais son statut, alors que si nous remontons assez loin, l'Indienne perd toujours son statut. Est-ce bien cela?

M.Schulze: Vous avez tout à fait raison, sénatrice Dyck.

Je ne vois donc pas où M.Schulze aurait dit que ses quatre scénarios n'étaient pas fondés sur le sexe. En réalité, il a bien dit qu'ils l'étaient.

J'ai quelques questions précises à vous poser. Tout d'abord, je vous félicite d'avoir pris contact avec l'Association du Barreau Autochtone et d'avoir présenté un amendement. Toutefois, avez-vous pris contact avec le procureur des demandeurs au sujet de ces situations persistantes de discrimination et avez-vous déterminé s'il était ou non nécessaire de proposer des modifications au projet de loi pour qu'il fasse ce qu'il est censé faire, c'est-à-dire éliminer les iniquités fondées sur le sexe en matière d'inscription?

MmeBennett: Je crois que nous avons parlé des cas connus de discrimination fondée sur le sexe qui sont très simples. Il y a d'autres cas de discrimination fondée sur la date de naissance, sur l'adoption ou sur une ascendance inconnue, qui sont plus complexes. À notre avis, ces cas nécessitent des consultations et des contacts avec les collectivités pour déterminer ce qu'il convient de faire en l'absence d'un registre et pour remédier à la situation. Un comité parlementaire n'est pas l'endroit idéal pour apprendre comment les collectivités interprètent et règlent ces cas.

Nous croyons qu'il faut s'occuper tout de suite des cas simples. Nous devrons ensuite régler les cas qui sont plus complexes non seulement sur le plan de l'interprétation, mais aussi sur celui de la mise en œuvre et de l'engagement. Comment serait-il possible de mettre en œuvre des solutions dans ces autres cas sans consulter adéquatement les collectivités?

Nous avons déjà eu des ennuis avec les Premières Nations, les Inuits et les Métis. Ils ne croient pas que des consultations sérieuses peuvent avoir lieu dans le cadre des travaux d'un comité parlementaire. Ils veulent des contacts de nation à nation. Nous ne pouvons donc pas ajouter d'autres dispositions. Nous nous occupons essentiellement de ce que la cour nous a demandé. Le reste doit faire l'objet de consultations avec les collectivités.

Voilà comment nous avons élaboré cette mesure législative que nous devons adopter à cause des 28000 à 35000 personnes qui ont obtenu gain de cause devant les tribunaux au sujet des iniquités fondées sur le sexe. Pour les cas plus complexes, nous allons devoir déterminer comment les inclure dans la loi à l'avenir et comment mettre en œuvre les dispositions que nous aurons inscrites dans la loi. C'est la raison pour laquelle nous croyons avoir besoin d'une seconde phase bien conçue.

J'ai certainement compris que les demandeurs ne veulent pas que cela traîne éternellement. Ils souhaitent qu'il y ait une limite de temps. Ils veulent être sûrs que nous allons donner suite à notre engagement. Bien sûr, je suis disposée à me présenter de nouveau devant le comité ce printemps et aussi souvent que vous voudrez me voir pour vous tenir au courant des mesures prises dans le cadre de la seconde phase. Bref, je pense vraiment que le jugement rendu concerne la situation des demandeurs eux-mêmes. C'est tout ce qu'il serait possible de réaliser si nous avions une prolongation. C'est pourquoi je ne crois pas que nous puissions prendre d'autres engagements avant d'aller écouter ce que veulent les collectivités. Je ne pense pas qu'il soit possible de le faire en obtenant une courte prolongation, qui nous mènerait tout au plus au mois d'août. Vous savez bien, sénateur, combien de temps il faut pour faire adopter ces choses par les deux chambres, pour les présenter au Cabinet, au Conseil du Trésor, et cetera.

Le sénateur Patterson: Je suis sûr que les parlementaires des deux chambres ont sérieusement travaillé sur ce projet de loi. Bien sûr, l'autre endroit a fait une étude préliminaire et a entendu beaucoup des mêmes témoins que nous. Je crois que nous sommes tous déterminés à atteindre l'objectif, qui est de se débarrasser de ces iniquités.

Hier encore, d'éminents juristes ont comparu devant le comité. Je veux parler du FAEJ, ou Fonds d'action et d'éducation juridiques pour les femmes, qui a fait de l'excellent travail sur les questions juridiques intéressant les Autochtones, et de l'Association du Barreau canadien. Ils nous ont dit que si nous voulons éliminer les iniquités fondées sur le sexe afin de donner suite à la décision Descheneaux, il ne sera pas nécessaire d'y consacrer énormément de temps, à condition de mettre de côté les autres grands problèmes que vous avez décrits et qui nécessitent un examen plus long et plus soigneux.

Nous voulons bien sûr rendre justice aux personnes visées par la décision Descheneaux, mais beaucoup d'entre nous hésitent à abandonner d'autres personnes qui continueront d'être exclues à cause de leur sexe si le projet de loi reste incomplet. À ma connaissance, c'est la première fois ce soir que j'entends parler d'iniquités connues fondées sur le sexe. Le projet de loi vise à éliminer les iniquités fondées sur le sexe en matière d'inscription.

Je tiens à vous dire, madame la ministre, que le Parlement ne recommencera pas à zéro si le projet de loi nous revenait plus complet, après élimination des iniquités connues fondées sur le sexe. D'après les témoins, cela ne devrait pas prendre trop de temps et pourrait se faire efficacement dans le délai supplémentaire de trois à six mois que la cour, comme vous l'avez dit, pourrait nous accorder.

Je crois que d'après le jugement, le gouvernement doit démontrer qu'il a fait un effort sérieux pour régler le problème. Il n'y a pas de doute que toutes les démarches faites témoigneront d'un véritable effort de la part du gouvernement, et aussi de la part des parlementaires, mais nous avons le devoir d'examiner d'un œil critique les mesures législatives qui nous sont soumises et d'en découvrir les faiblesses.

J'estime que le gouvernement aurait pu demander plus de temps. En fait, certains d'entre nous ont été surpris qu'il ne l'ait pas sérieusement envisagé après avoir entendu les plaintes relatives à la consultation, que l'Association des femmes autochtones du Canada et d'autres ont mentionnées. L'association a été placée devant le fait accompli et n'a disposé que de très peu de temps. Même les demandeurs ont dit qu'ils n'ont été informés de l'existence du projet de loi que lorsqu'ils ont été invités à comparaître devant notre comité.

Ne pouvons-nous pas améliorer ce projet de loi — pas les grands problèmes, mais seulement le projet de loi — en demandant un peu plus de temps pour l'examiner dans le nouvel exercice? Oui, ces gens ont été exclus pendant des dizaines d'années, mais il y en a d'autres que nous devrions inclure parce qu'ils ont eux aussi été exclus. Comme je l'ai dit, M.Schulze a mentionné quatre scénarios qu'à mon avis, vos fonctionnaires n'ont pas sérieusement examinés.

MmeBennett: Je vous remercie de votre question. Il serait important pour vous de comprendre que nous ne pouvons obtenir une prolongation que pour étudier des questions faisant partie de l'affaire présentée par les demandeurs. Nous ne pouvons pas demander une prolongation afin d'inclure tout le monde. Nous ne pouvons en demander que si nous n'avons pas eu assez de temps pour nous occuper de certains aspects de l'affaire présentée par les demandeurs et pour les inclure dans la loi afin que la registraire puisse continuer à faire son travail. Ce sont les facteurs que la cour prendrait en considération avant d'accorder une prolongation.

Si je me présentais dans les collectivités des Premières Nations pour leur dire que nous disposons d'un délai de trois à six mois pour régler tous les autres cas de discrimination liés de près ou de loin au sexe — qu'il s'agisse de la date de naissance, de l'existence ou de l'absence d'un registre, de l'adoption ou de l'inadmissibilité de la deuxième génération —, je n'aurais certainement pas l'impression d'avoir procédé à des consultations sérieuses, dans une période de trois à six mois, avec les gens qui peuvent être touchés par le projet de loi.

Tout d'abord, je ne suis pas sûre que la cour accorde la prolongation si nous lui disons que nous voulons faire tout le reste en même temps. Deuxièmement, si nous tentons vraiment d'inclure en même temps tout le reste dans le projet de loi, je crois que nous aurons manqué à notre engagement envers les gens touchés par le projet de loi pour des questions telles que l'inadmissibilité de la deuxième génération, l'ascendance inconnue, la date limite de 1951 ou l'adoption. L'émancipation est l'un des concepts que nous pouvons expliquer clairement aux Canadiens: les gens qui ont fait des études postsecondaires et qui ont fini par devenir médecins ou avocats perdaient leur statut. Ce sont des choses simples qui n'ont pas été évoquées dans cette affaire parce qu'elles n'étaient pas fondées sur le sexe, mais elles font partie des questions que je voudrais régler rapidement. Cela implique d'engager une forme ou une autre de consultation sur les autres iniquités et de commencer immédiatement le travail en février pour être en mesure de nous débarrasser de ces autres questions aussi.

La sénatrice Lankin: Madame la ministre, je vous remercie. J'ai deux questions à vous poser. Je voudrais poursuivre dans la même veine que le sénateur Patterson au sujet de la «discrimination connue fondée sur le sexe». J'aimerais vous demander ce que vous entendez par là. Je crois très bien comprendre ce que vous avez dit de la complexité des cas antérieurs à 1951, par exemple, ainsi que de l'équilibre délicat à maintenir dans des relations de nation à nation et de la nécessité d'avancer. Je suppose que la discrimination connue fondée sur le sexe peut comprendre les cas antérieurs à 1951. De toute façon, qu'entendez-vous par là?

MmeBennett: Pour moi, les cas «connus» sont tellement proches de l'affaire qui a fait l'objet du jugement qu'aucune question ne se pose et que nous ne nuirons à personne si nous ne procédons pas à de vastes consultations sur la mise en œuvre, comme ce serait le cas pour les autres questions. Nous ne sommes jamais sûrs des effets que peut avoir une nouvelle interprétation de la loi, mais nous croyons vraiment qu'avec la modification recommandée par l'ABA, ce projet de loi permettra de régler les cas connus, c'est-à-dire les cas si étroitement liés à la décision Descheneaux que nous pouvons agir adéquatement tout de suite. Ensuite, nous aurons besoin d'un temps suffisant pour tenir des consultations sur les questions complexes qui occasionneront des difficultés au stade de la mise en œuvre. En effet, si nous avons des consultations, nous parlerons non seulement de l'admissibilité des gens, mais aussi de la façon de mettre en œuvre les décisions en l'absence des registres. Cela n'est pas tout à fait évident.

Voilà pourquoi je crois que nous avons besoin de consultations adéquates sur les cas antérieurs à 1951, l'adoption et l'ascendance inconnue. Encore une fois, il s'agit de gens qui revendiquent des droits qu'ils n'ont pas. Comment déterminer cela? Cela ferait partie des consultations avec les personnes touchées par le nouveau projet de loi.

La sénatrice Lankin: Je vous remercie. J'ai l'impression que vous ne dormez plus la nuit à cause de cette affaire. Je suis passée par là. J'essaie de réfléchir à certains des compromis et des impératifs d'équilibre que vous devez affronter du point de vue du gouvernement. J'ai réussi à accepter certaines des choses que M.Schulze a dites, par exemple que l'inadmissibilité de la deuxième génération n'est pas une question fondée sur le sexe et que même l'ascendance inconnue ne l'est pas, bien que je sois d'avis que cette disposition touche principalement les femmes sur le plan culturel et pour d'autres raisons, même si elles ne sont pas les seules touchées. Il y a d'ailleurs d'autres exemples.

Les cas antérieurs à 1951 constituent cependant l'expression la plus puissante de cette situation pour Sharon McIvor quand elle a dit: «Je relève du paragraphe6(2) tandis que mon frère relève du paragraphe6(1) à cause de la date de naissance, à cause du patrimoine et à cause du fait qu'il n'y avait pas de processus d'inscription ou un registre avant 1951.» C'est encore plus puissant quand elle ajoute: «On ne peut pas tenir de consultations sur le fait qu'on n'a pas accordé à une personne les droits que la Charte lui garantit.» La solution qu'elle préconise est très simple: tout le monde devrait relever du paragraphe6(1).

Vous avez parlé des cas antérieurs à 1951 et de la nature des éléments complexes qui existent. J'aimerais connaître votre réaction parce que cela me tord les tripes et que mon esprit féministe me dicte de faire quelque chose, mais je veux comprendre ce qui se passe au-delà des relations de nation à nation. J'aimerais saisir ces éléments complexes dont vous parlez et savoir ce qui peut en découler. Comme dirait Sharon McIvor: «Pourquoi ne pouvez-vous pas nous faire tous relever du paragraphe6(1) pour que j'aie les mêmes droits que mon frère?»

MmeBennett: Je devrais peut-être poser la question à ceux qui auraient à mettre en œuvre une telle règle. J'ai la nette impression que, sans aller parler aux gens de la façon dont cela se répercuterait sur eux... Les choses ne sont pas aussi nettes qu'en présence d'un registre. Il faut essayer d'éviter les conséquences fâcheuses qui se produisent lorsque des gens revendiquent des droits qu'ils n'ont pas. Cela arrive parfois.

Joëlle, voulez-vous nous expliquer ce qui s'est passé?

Joëlle Montminy, sous-ministre adjointe, Secteur de résolution et des affaires individuelles, Affaires autochtones et du Nord Canada: Merci beaucoup. C'est une très grande affaire. Nous avons beaucoup entendu parler de la simple solution consistant à élargir la portée du projet de loi pour nous assurer d'étendre les avantages à tous les gens d'avant 1951.

Même si MmeMcIvor a dit que c'était un cas clair de discrimination auquel le projet de loi devrait remédier, je dirai — sans trop m'aventurer dans le domaine juridique — que la Cour d'appel n'a pas accepté la thèse de MmeMcIvor en ce qui concerne les cas antérieurs à 1951. Je peux citer le jugement de la Cour d'appel, mais elle a dit en substance que ce serait aller trop loin que de remonter dans le temps pour corriger les erreurs commises entre 1861 et 1951 et qu'elle n'estimait pas nécessaire de le faire dans ce cas.

Cela n'empêche pas le gouvernement d'examiner la situation du point de vue de la politique, s'il le souhaite, mais cela rejoint ce qu'a dit la ministre: nous ne devrions le faire que s'il est décidé d'aller au-delà de ce qui est considéré comme une claire situation de discrimination. Comme vous le savez, quand on cherche à déterminer ce qui constitue de la discrimination et ce qui est justifiable, il faut examiner différents critères, dont l'équilibre à maintenir entre les droits individuels et collectifs.

MmeMcIvor nous a demandé de remonter dans le temps pour examiner les cas antérieurs à 1951, mais les tribunaux n'ont pas jugé que cela constitue une situation claire et connue de discrimination à laquelle il faut remédier. Encore une fois, d'un point de vue juridique, lorsque nous parlons de discrimination connue, le ministère dit qu'il va prendre des mesures dans les cas où les tribunaux ont rendu un jugement favorable. Dans les autres cas que les gens nous demandent de régler, le ministère considère qu'il appartient au gouvernement de prendre une décision, mais je pense qu'il ne devrait le faire qu'après avoir procédé à des consultations sérieuses.

MmeBennett: C'est à peu près ce que j'ai dit dans mon exposé. Nous devons entreprendre la seconde phase en collaboration avec Sharon McIvor et d'autres. Il faudrait en fait leur demander de nous présenter leurs arguments pour que nous puissions agir sur la base de la politique du gouvernement puisque les tribunaux ne se sont pas prononcés.

Je crois que cela correspond à ce que d'autres ont ressenti, ce qui m'a aidée à dormir un peu mieux la nuit, sénatrice. Les demandeurs se sont battus et ont eu gain de cause devant la cour, de sorte qu'il y a maintenant entre 28000 et 35000 personnes qui peuvent se prévaloir de leurs droits. Je crois qu'ils méritent d'en jouir maintenant. Ensuite, nous nous occuperons des autres cas le plus rapidement possible. Encore une fois, ce serait une décision de principe que nous aurions à prendre plutôt que d'appliquer une décision judiciaire. J'aimerais bien prendre les décisions de principe nécessaires pour éliminer les iniquités, mais nous devons d'abord nous occuper de la seule décision judiciaire qui nous est imposée.

Le sénateur Tannas: Je vous remercie, madame la ministre, de votre présence au comité. Je tiens à dire que c'est la première fois aujourd'hui que j'entends parler d'«iniquités connues». Vos collaborateurs n'ont jamais mentionné l'expression. Nous avons entendu parler d'élimination de la discrimination fondée sur le sexe, mais cela n'était accompagné d'aucun qualificatif. Nous avions donc considéré que c'était, littéralement, l'objectif à atteindre.

Comme le dit le sénateur Patterson, notre comité a réussi, avec des moyens relativement modestes, à découvrir un certain nombre d'autres iniquités fondées sur le sexe. Nous avons certainement été en mesure de constater un profond déplaisir à des endroits où nous nous attendions à trouver des appuis.

Cela nous a troublés. Beaucoup d'entre nous en sont troublés pour vous. Nous nous inquiétons de ce que cela implique pour vous et pour le gouvernement dans cette première tentative que vous avez faite, comme vous l'avez dit, pour régler le problème. Il y a sûrement un certain cynisme qui se manifeste à cet égard. J'en suis désolé pour vous.

Je suis enchanté que vous ayez parlé de votre ministère et que vous ayez reconnu ce qui est arrivé. J'ai déjà dit à des fonctionnaires qu'ils doivent s'excuser quand ils ont fait une erreur. Je suis heureux que vous l'ayez fait. Je crois que cela sera utile plus tard.

Si notre petit comité a réussi à se rendre compte assez rapidement du déplaisir et à découvrir des exemples de problèmes restés sans solution, comme dans le cas de l'Association du Barreau Autochtone, qui a dit n'avoir été consultée qu'à la dernière minute, êtes-vous certaine que des consultations satisfaisantes ont eu lieu? Nous sommes tous au courant des contraintes de temps.

MmeBennett: C'est probablement moi qui ai rajouté le qualificatif «connues». C'est ainsi que je vois les choses. La cour nous a demandé de prendre certaines mesures. Il y en avait d'autres qui étaient complètement «paralysées». Je suis médecin, et je fais des analogies. Si je constate des circonstances similaires, je me dis que je peux utiliser la même ordonnance. Il y a cependant d'autres facteurs qui compliquent la situation: si le patient est un enfant, il faut que j'aille l'examiner pour m'assurer de prescrire le bon médicament.

En parlant d'iniquités «connues», j'essayais de désigner celles qui sont tellement semblables que nous pouvons les éliminer tout de suite. Comme ministre responsable des relations avec les peuples autochtones, je ne crois pas pouvoir agir unilatéralement dans les cas complexes. J'estime devoir aller consulter les personnes intéressées.

Ayant longtemps siégé comme députée d'opposition au comité parallèle de la Chambre, je pestais constamment contre les comités parlementaires qui estimaient pouvoir se charger des consultations sérieuses qu'il incombe au gouvernement de faire.

Le comité ne peut pas s'occuper des questions soulevées par certains des témoins parce qu'il n'a pas reçu le mandat de le faire des personnes touchées que viserait le projet de loi, à titre de victimes d'autres iniquités ou d'autres traitements différents assimilables ou non à de la discrimination. Nous savons tous qu'un traitement différent n'est pas nécessairement discriminatoire. Par conséquent, il faut parfois établir un dialogue. Personnellement, j'aimerais beaucoup m'entretenir de ces questions avec les gens.

Si nous avons décidé de ne pas en appeler du jugement, c'est parce que nous voulions aller de l'avant. Nous étions persuadés qu'il y avait des cas réels de discrimination que la cour avait mis en évidence. Nous avons réussi à ajouter quelques autres cas parce qu'ils étaient semblables. C'est ce qui explique le qualificatif «connues» que j'ai utilisé. J'aurais peut-être dû utiliser un autre mot, mais je n'ai certainement pas parlé de «toutes» les iniquités.

Nous essayons de faire de notre mieux dans le cas des iniquités connues. Il y en a peut-être d'autres qui sont compliquées parce qu'elles mettent en cause la date de naissance, l'adoption et d'autres facteurs tels que l'ascendance inconnue. Ce sont des cas plus complexes que ceux que visait le jugement et que la registraire ne pouvait pas inscrire avant que nous ayons remédié au problème.

Le sénateur Patterson: Je dirai, avec tout le respect que je vous dois, qu'ayant jeté un coup d'œil au jugement de la cour, je ne crois pas que la juge dans l'affaire Descheneaux a simplement demandé au gouvernement de remédier à cette question particulière.

Je vais rapidement lire un passage du jugement:

Une lecture aussi stricte du présent jugement que celle qui a été faite de la décision de la CACB dans McIvor, n'est pas la voie que devrait emprunter le législateur. S'il souhaite jouer pleinement son rôle, plutôt que de laisser le champ libre aux litiges, il fera autrement cette fois-ci, tout en apportant rapidement des correctifs suffisamment larges pour remédier à la discrimination constatée en l'espèce. L'un n'exclut pas l'autre.

Je crois vraiment que nos attentes et le titre du projet de loi — qui n'est peut-être plus exact maintenant: élimination des iniquités fondées sur le sexe en matière d'inscription — nous imposent de nous conformer aux attentes de la cour en allant au-delà de l'étroite portée des questions mises en évidence dans l'affaire Descheneaux.

MmeBennett: Sénateur Patterson, vous en savez plus que moi dans ce domaine, mais il me semble qu'obiter dictum désigne les passages d'un jugement qui ne constituent qu'une incitation ou une recommandation discrète, n'étant pas assimilés au jugement lui-même. Si la cour avait vraiment voulu nous imposer cela, elle nous aurait accordé cinq ans. Nous espérons pouvoir, au cours de la seconde phase, faire un examen beaucoup plus serré parce que nous sommes vraiment déterminés à agir. Il nous faudra peut-être un an ou deux, ou la période jugée suffisante par nos conseillers, c'est-à-dire les personnes touchées, après quoi nous vous soumettrons le travail que nous aurons fait.

Entretemps, nous avons jugé que cette incitation ou cette recommandation nous permettait d'ajouter un certain nombre d'autres cas parfaitement nets, qui ne peuvent pas prêter à controverse.

C'est notre interprétation du jugement. D'autres l'auront interprété différemment, mais c'est la façon la plus nette que nous ayons trouvée pour régler le problème immédiat, quitte à nous occuper des cas complexes grâce à des consultations sérieuses avec les collectivités et les personnes touchées.

Le sénateur Meredith: Je vous remercie, madame la ministre, de votre présence au comité ce soir. Nous apprécions beaucoup que vous ayez pris le temps de venir apaiser nos préoccupations au sujet de cette mesure législative.

J'ai appris hier que l'Association du Barreau Autochtone avait suggéré ou recommandé un amendement. Compte tenu de l'heure tardive et du fait que nous essayons d'aller de l'avant avec le projet de loi, pouvez-vous nous donner plus de renseignements à cet égard? J'aurai aussi une question complémentaire.

MmeBennett: Bien sûr. Compte tenu, comme vous l'avez dit, de l'heure tardive — je sais que vous devez consacrer la seconde heure de votre réunion à des délibérations —, je vais céder la parole à mon collègue du ministère de la Justice pour qu'il explique l'amendement.

Comme vous le savez, l'ABA a considéré que nous avions accidentellement créé un nouveau groupe. L'amendement a pour but de s'assurer qu'il n'y aura pas de conséquences imprévues comme dans le cas du jugement McIvor. C'est la raison pour laquelle nous sommes ici aujourd'hui.

Martin Reiher, avocat général, ministère de la Justice Canada: Je vous remercie. Le nouvel alinéa 6(1)c.4) accorde le statut aux enfants des femmes touchées par le problème des frères et sœurs avant 1985. Nous nous attaquons à ce problème dans le projet de loi.

L'amendement accorde le statut aux enfants des femmes touchées par le problème des frères et sœurs. Ces enfants sont maintenant les grands-parents d'hommes qui ont eu des enfants avec des femmes non indiennes sans être mariés. Nous devons comparer cela aux petits-enfants des femmes qui ont eu des enfants hors mariage avant 1985. Ces personnes ont peut-être droit à l'inscription en vertu du paragraphe6(2) et non du paragraphe6(1).

Le seul parent ayant droit à l'inscription est l'enfant d'une femme qui a enfanté hors mariage. En effet, d'après le régime d'avant 1985, l'enfant né hors mariage d'une mère indienne avait droit à l'inscription, mais pouvait faire l'objet d'une protestation dans les 12 mois suivant son inscription dans le registre. En l'absence d'une protestation, l'enfant demeurait inscrit. Toutefois, si la bande, un de ses membres ou une personne intéressée proteste et que le registraire est convaincu que le père n'est pas un Indien, le nom de l'enfant était retiré de la liste de la bande.

En 1985, cet enfant avait obtenu le statut en vertu de l'alinéa 6(1)c). Ses propres enfants ont alors droit au statut en vertu de l'alinéa 6(1)f) si l'autre parent était indien ou seulement en vertu du paragraphe6(2) si l'autre parent n'avait pas le statut, de sorte que la génération suivante n'avait plus droit à l'inscription.

Comme l'a signalé l'ABA, il y a effectivement dans ce cas une distinction entre les lignées masculine et féminine. L'amendement qui serait proposé pour remédier à cette situation assurerait essentiellement le statut en vertu du paragraphe6(1) à la personne dont un parent a été omis ou retiré du registre des Indiens le 4 septembre 1951 ou plus tard en vertu de l'article12(2) dans la forme qu'il avait avant le 17 avril 1985 ou en vertu de toute autre disposition ayant le même effet. L'autre parent n'aurait pas droit à l'inscription, selon l'autre disposition. Les personnes en cause doivent être nées avant le 17 avril 1985, sauf si leurs parents s'étaient mariés avant 1985.

Ce libellé très complexe reflète la situation parallèle que j'ai décrite. C'est la teneur de l'amendement.

MmeBennett: Nous avons ce graphique pratique que nous avons établi. Malheureusement, nous n'en avons que la version anglaise. Nous pouvons le mettre à votre disposition, sénateur, lorsque nous aurons déposé l'amendement. Il s'agit de l'amendement concernant les enfants nés hors mariage d'une mère indienne.

Le sénateur Meredith: Je vous remercie. Cela est très utile dans le contexte de ce qualificatif. Nous voulons nous assurer de régler ce problème particulier pour éviter d'autres complications dans ce projet de loi très complexe.

Dans la même veine, David Taylor, de l'Association du Barreau canadien, a mentionné une autre disposition à l'article8 concernant l'indemnisation. Madame la ministre, je voudrais vous demander des précisions au sujet du droit des personnes inscrites à une indemnisation rétroactive. Est-ce que votre ministère s'en occupe ou non? Est-ce que cet article écarte toute possibilité d'indemnisation des personnes qui étaient inscrites?

MmeBennett: Je crois qu'il serait préférable de laisser aussi au ministère de la Justice l'explication de cette disposition sur l'absence de responsabilité.

Le sénateur Meredith: Cherchez-vous à renvoyer la balle? J'aurais aimé avoir une réponse directe de vous.

MmeBennett: Je me prévaux ici de mon statut de médecin.

M.Reiher: Pour répondre à la question, je dirais que l'article8 a pour effet d'empêcher les personnes nouvellement inscrites en vertu du projet de loiS-3 de réclamer une indemnité pour les avantages auxquels elles n'avaient pas droit dans le passé. C'est le principe qui a présidé à l'élaboration de l'article8.

Le sénateur Meredith: Très bien, mais on nous a dit hier que les personnes inscrites pourraient intenter des procès. Quel est le plan d'action du gouvernement s'il est poursuivi en justice?

M.Reiher: Le gouvernement est actuellement poursuivi sur la base d'une disposition semblable du projet de loiC- 3. Le gouvernement défend cette disposition.

Elle reflète en fait une règle de la common law et n'a été ajoutée au projet de loi que par souci de clarté. Elle protège en outre les Premières Nations puisque les bandes y sont mentionnées. Les dispositions de ce genre sont assez courantes dans les lois fédérales en cas de modifications législatives. Il est possible de les défendre légalement.

La présidente: Avant de laisser la parole au sénateur Enverga, je voudrais poser deux petites questions. D'abord, vous avez dit que vous avez l'intention de déposer un amendement. Quand le comité en aura-t-il connaissance? À quel moment comptez-vous nous le présenter?

MmeBennett: D'habitude, les amendements de ce genre sont déposés au cours de l'étude article par article. Toutefois, comme l'amendement reflète si clairement la proposition de l'ABA, si vous souhaitez y jeter un coup d'œil avant, je serais très heureuse de vous le communiquer pour que vous puissiez en discuter dans le cadre des délibérations que vous aurez plus tard. Avons-nous le texte français? Oui, nous l'avons.

La présidente: Vous allez donc le distribuer d'avance aux membres du comité? Nous vous en serions très reconnaissants.

MmeBennett: Je crois que c'est une bonne idée.

La présidente: Je vous remercie. Ma seconde question fait suite à l'intervention du sénateur Patterson concernant le jugement Descheneaux, qui invitait le gouvernement à inclure des cas allant au-delà de ce qui est strictement arrivé à Stéphane Descheneaux et Tammy Yantha. Vous avez dit qu'il s'agissait d'un commentaire fait en passant.

De plus, dans cette décision, la juge a dit qu'elle accordait au Parlement 18 mois. Toutefois, à cause des élections et d'autres empêchements, vous n'avez pas disposé d'un an et demi. La jugeestimait que la loi pouvait être modifiée dans cette période de18 mois. La question qui se pose est donc la suivante: pourquoi n'avez-vous pas demandé trois à six mois de plus si vous aviez l'intention d'aller au-delà du strict objet des deux décisions?

MmeBennett: Encore une fois, il s'agit d'un commentaire fait en obiter dictum ne faisant pas vraiment partie du corps du jugement. La cour nous a accordé 18 mois à cause des élections. En temps ordinaire, elle ne nous aurait donné qu'un an.

Nous avons fait honneur à l'avis exprimé par la juge en incluant dans le projet de loi des cas très semblables et en prévoyant de nous occuper des cas plus complexes au cours de la seconde phase. Je crois que nous avons tenu compte de l'avis donné en incluant bien plus que le cas des demandeurs parce que nous étions conscients du fait qu'eux aussi avaient des droits qu'ils devaient exercer. Entre les deux, nous ne pouvions pas tout faire dans la période prévue, mais nous en avons fait plus que ce que le jugement nous demandait strictement de faire.

La présidente: Je vous remercie.

Le sénateur Enverga: Merci, madame la ministre. Je remercie également les fonctionnaires. Je sais que nous partageons le même objectif. Nous voulons rendre justice à ceux qui sont touchés par cette décision. Pendant l'audition d'autres témoins, nous avons entendu parler de consultations, consultations et encore consultations. En même temps, les gens voulaient que vous fassiez tout d'un coup et que vous le fassiez bien. C'est essentiellement ce que nous avons entendu au cours des quelques dernières réunions.

Les gens ont dit qu'ils en avaient assez de l'approche fragmentaire et des mesures prises petit à petit. Ils sont disposés à attendre pourvu que le résultat final en vaille la peine.

Si nous adoptons ce projet de loi, puis passons à l'étape suivante, vous dites que vous promettez ferme de lancer la seconde étape en février 2017. Pouvez-vous nous donner une date ferme pour la fin de la seconde phase?

MmeBennett: Je vous remercie de votre question. Je comprends pourquoi les gens sont cyniques. Ils ont l'impression que c'est le dernier train en partance et que tout le monde devrait monter à bord. Je comprends pourquoi beaucoup de gens croient qu'il n'y aura pas vraiment de seconde phase. Je comprends que les gens en aient assez de l'approche fragmentaire destinée à rapetisser petit à petit ce monstre qu'est la Loi sur les Indiens.

Nous recourons cependant à beaucoup d'autres moyens pour échapper à la Loi sur les Indiens, grâce par exemple à la gestion des terres, mais nous sommes bien obligés de faire cela à la pièce pour nous rapprocher progressivement de notre objectif d'autonomie gouvernementale. Mon rôle consiste à bâtir des institutions dirigées par les Premières Nations, les Inuits et les Métis et à cesser de mettre en œuvre des programmes et à tenir un registre en prenant des décisions au nom des membres des Premières Nations.

Je comprends la frustration, mais s'il faut bien faire les choses et prendre le temps qu'il faut pour cela, nous ne pourrons pas le faire parce que nous n'obtiendrons pas une prolongation d'une durée suffisante. Si nous laissons passer le délai, notre registraire ne pourra plus inscrire d'autres gens parce que les dispositions pertinentes de la Loi sur les Indiens ne seront plus en vigueur.

Il y a urgence et 35000 personnes attendent. À ma connaissance, les gens qui ont maintenant acquis les droits prévus dans ce projet de loi ne comprennent pas vraiment pourquoi nous les faisons attendre après le combat qu'ils ont dû livrer pendant si longtemps et après la victoire qu'ils ont remportée et qui a donné lieu à ce projet de loi.

Le sénateur Enverga: Je vous ai cependant demandé si, une fois le projet de loi adopté, vous avez fixé une date ferme à laquelle la seconde phase prendra fin.

MmeBennett: C'est une très bonne question. Je crois que ce sera négocié. Les gens pensent à un délai d'un an, mais, une fois que nous aurons consulté les personnes touchées, qu'il s'agisse de Sharon McIvor ou des gens qui savent à quoi s'en tenir, si les gens pensent que cela peut se faire en un an, nous essaierons de respecter ce délai. Il s'applique aussi aux Premières Nations elles-mêmes qui doivent s'occuper de la question de l'ascendance inconnue et d'autres questions du même genre.

Beaucoup de gens sont en cause. C'est une tâche énorme. De nombreuses nations sont très inquiètes du nombre de personnes qui s'ajouteraient à leurs listes. Nous avons donc besoin de consulter, et de le faire d'une manière qui nous permette de faire une mise en œuvre sans pépins et d'éviter de nous retrouver devant les tribunaux parce que d'autres personnes auraient été privées de leurs droits. Si nous ne faisons pas bien les choses, il y aura d'autres procès. Je veux essayer de l'éviter.

Le sénateur Enverga: Avez-vous dit un an après la première phase? Tout serait fait en un an?

MmeBennett: Oui.

Le sénateur Enverga: Nous pourrions dire ceci aux peuples autochtones: «Nous vous promettons de remédier aux problèmes d'ici deux ans. Ce sera la dernière fois que nous parlerons de cette affaire.» Cela est-il possible? Pouvez- vous promettre cela à ceux qui suivent nos délibérations?

MmeBennett: Je peux vous donner ma parole que je ferai de mon mieux. Nous allons essayer de le faire, mais on ne sait jamais, une fois qu'on a entrepris des consultations, s'il n'y aura pas des aspects prêtant à controverse ou des reculs.

Il y a par exemple toute la question de l'émancipation. J'aimerais bien pouvoir tout régler d'un seul coup, mais il pourrait s'avérer plus difficile d'en arriver à un consensus sur certaines questions que sur d'autres. L'émancipation me semble être assez simple. Les autres questions pourraient être plus compliquées et plus difficiles à mettre en œuvre, mais nous allons faire tout notre possible.

La sénatrice Lovelace Nicholas: Madame la ministre, je vous souhaite la bienvenue. Je reçois des lettres disant: «Nous avons besoin d'une prolongation.» On me dit toujours que le projet de loiC-31 n'est pas allé assez loin et qu'à l'époque, c'était un ultimatum pour nous et nos enfants. Maintenant, le projet de loi que nous avons ici ne va pas non plus assez loin. Pourquoi ne faisons-nous pas bien les choses une fois pour toutes pour éviter que quelqu'un d'autre ne vienne nous faire un procès dans 20 ans?

MmeBennett: Je comprends parfaitement. Pour les gens qui s'expriment ainsi, cela vient du cœur, mais en pratique, nous n'avons pas cette marge de manœuvre. Je ne crois pas que nous puissions bien faire les choses sans consultations adéquates et sans essayer de former un certain consensus pour éviter d'autres procès. Je ne pense pas qu'il soit possible de faire tout cela en trois à six mois, c'est-à-dire dans le délai supplémentaire maximal que nous pourrions obtenir, si on veut bien nous accorder un autre délai. Il arrive que la cour refuse d'accorder une prolongation si elle pense que nous essayons de faire des choses qui dépassent la portée de la décision prise.

Je comprends parfaitement l'origine de ces plaintes, mais j'espère qu'avec votre aide, sénatrice, nous pourrons concevoir un processus grâce auquel les gens se sentiront inclus et que nous pourrons lancer en février pour nous débarrasser de ces autres iniquités. Nous allons nous mettre au travail pour procéder à des consultations sérieuses sur toutes ces autres iniquités.

La sénatrice Lovelace Nicholas: Vous faites partie du gouvernement. Je sais fort bien que, si vous le voulez vraiment, vous pouvez le faire pour que nous n'ayons plus à revenir là-dessus.

MmeBennett: J'aurais bien voulu que ce soit vrai. Je fais partie du gouvernement, mais, même avec le travail que votre comité et celui de l'autre endroit ont fait, nous aurions à obtenir la sanction royale d'un nouveau projet de loi dans un délai de trois à six mois, en repassant par le comité et par le Cabinet, ce qui malheureusement prend beaucoup de temps parce qu'il faut respecter la procédure établie au gouvernement et au Parlement.

Un délai supplémentaire de trois à six mois nous aurait menés au 3 août, c'est-à-dire en pratique jusqu'à l'intersession d'été en juin. Nous n'aurions eu que très peu de temps pour tenir des consultations. Nous serions maintenant en train de rédiger un nouveau projet de loi, sans avoir consulté suffisamment et sans avoir fait le travail nécessaire auprès des personnes touchées. Il faut malheureusement beaucoup de temps pour franchir les différentes étapes au gouvernement. J'aurais bien voulu pouvoir agir plus rapidement.

Sénatrice, nous ne voulons plus avoir à faire cela de nouveau. Si les Premières Nations avaient eu à le faire elles- mêmes, elles auraient pu agir beaucoup plus vite. Elles auraient pu corriger de petites lacunes dans une loi ou une politique qu'elles auraient elles-mêmes rédigée. C'est le but que nous voulons atteindre. Nous ne croyons pas qu'il soit nécessaire d'avoir des feux rouges et des feux verts et de s'adresser sans cesse au ministère. Dans mon monde, trois à six mois, ce n'est vraiment pas assez long.

La sénatrice Lovelace Nicholas: Je regrette de dire que les peuples autochtones ne sont pas à l'origine de ce problème. C'est la raison pour laquelle je crois qu'il est impératif d'en finir une fois pour toutes. Je vous remercie.

MmeBennett: Merci à vous. Vous avez parfaitement raison. Ils ne sont pas à l'origine du problème, mais pour y remédier une fois pour toutes, nous devons agir avec le plus grand soin. Si nous précipitons les choses, si nous ne prenons pas toutes les précautions nécessaires, nous nous retrouverons encore devant les tribunaux. Sans consensus, il y aura nécessairement des procès. Notre rôle consiste à aller voir les gens pour essayer de former ce consensus. Ainsi, les choses que nous pourrons réaliser au cours de la prochaine étape auront fait l'objet d'une véritable entente, de sorte que nous n'aurions plus jamais à nous en occuper.

La sénatrice Lovelace Nicholas: Je vous remercie.

La présidente: Je dois poser cette question. Vous parlez constamment de consensus. Qui allez-vous consulter pour en arriver à ce consensus? Qu'en est-il des descendants des femmes indiennes qui ont été privées de leur statut? Où se situent-ils dans ces consultations? Pourquoi ne sont-ils pas les premiers à être consultés plutôt que l'Assemblée des Premières Nations, le Congrès des Peuples Autochtones ou d'autres organisations?

MmeBennett: Voilà une excellente question. C'est la raison pour laquelle nous avons besoin de gens comme vous, madame la présidente, comme la sénatrice Lovelace Nicholas et comme Sharon McIvor. Comment ferons-nous pour nous assurer de consulter les gens qu'il faut au cours de la seconde phase? Je ne crois pas qu'un comité parlementaire puisse en décider. Pour bien faire les choses, nous devons vraiment aller directement parler aux gens touchés.

Le sénateur Moore: Je vous remercie, madame la ministre ainsi que les autres témoins, de votre présence au comité. Nous ne sommes pas remontés au-delà de 1951, n'est-ce pas?

MmeBennett: Non. Il n'y avait pas de registre alors.

Le sénateur Moore: Vous avez dit qu'aller au-delà serait maintenant une décision de principe ou une décision judiciaire. Je crains fort, comme la sénatrice Lovelace Nicholas, qu'en fin de compte, les gens des Premières Nations ne soient obligés de s'adresser encore aux tribunaux pour obtenir satisfaction.

MmeBennett: Je vous dis avec respect, sénateur Moore, que c'est exactement ce que nous cherchons à éviter.

Le sénateur Moore: À quand remonte la décision McIvor, s'il vous plaît?

MmeBennett: À 2009.

Le sénateur Moore: Je ne suis pas d'accord qu'il s'agissait d'un commentaire fait en obiter dictum dans le jugement. La juge ne l'aurait pas formulé si elle n'avait pas été persuadée de son importance, compte tenu des antécédents historiques et de l'approche fragmentaire adoptée pour régler les problèmes. J'aimerais savoir ce que le ministère a fait depuis 2009 pour remédier à la situation. Vous saviez qu'il y avait un problème. Vous saviez que des gens avaient été abandonnés après McIvor. Qu'a-t-on fait depuis?

MmeBennett: J'ai cru comprendre que le ministère avait entrepris un processus exploratoire.

Le sénateur Moore: Vous n'étiez pas ministre à l'époque. Je ne m'attends donc pas à ce que vous puissiez répondre à cette question, mais quelqu'un devrait pouvoir nous dire ce qui a été fait ou n'a pas été fait depuis.

MmeBennett: Depuis, il y a eu le jugement Descheneaux.

Le sénateur Moore: Exactement.

MmeBennett: Il y a eu un processus exploratoire, mais je vais laisser parler les gens qui se sont occupés de ce dossier pendant beaucoup plus longtemps que moi.

Candice St-Aubin, directrice exécutive, Secteur de résolution et des affaires individuelles, Affaires autochtones et du Nord Canada: Je vous remercie de votre question, sénateur Moore. Je peux vous parler de ce que nous avons fait.

Vous vous souviendrez sans doute qu'après la décision de 2009, nous avons déposé en 2011 le projet de loiC-3 donnant suite à la décision McIvor. C'était encore une fois un texte à portée étroitement ciblée. Vous avez parfaitement raison à ce sujet.

À l'époque, cependant, le ministère avait décidé d'accorder un soutien direct aux Premières Nations et aux autres groupes autochtones pour qu'ils puissent tenir eux-mêmes leurs propres consultations et discuter aussi de sujets plus vastes parce que nous avions reconnu que le projet de loiC-3 avait une portée limitée.

Dans le cadre du processus exploratoire, nous avons reçu, à l'échelle nationale, plus de 100 documents venant de groupes féminins et de groupes autochtones nationaux et régionaux. Les rapports énuméraient toutes les questions que nous avons examinées aujourd'hui et dont les témoins vous ont parlé.

Je devrais préciser que ce n'étaient pas des consultations. Le gouvernement fédéral n'était pas présent à l'époque. Nous nous sommes limités à financer les groupes pour leur permettre de se réunir et de choisir ceux qui participeraient aux discussions. Celles-ci ont pris une multitude de formes: conférences, forums de politiques, examens législatifs, et cetera. Les participants ont compilé une liste des principales questions qui, à leur avis, avaient eu des incidences non seulement sur l'inscription, mais aussi sur l'appartenance, la citoyenneté et l'identité. Nous pourrons tirer des renseignements de ces rapports et nous en servir comme tremplin pour aborder la seconde phase.

Le sénateur Moore: Le projet de loiC-3 remonte à 2010, n'est-ce pas?

MmeSt-Aubin: Je m'excuse. J'ai dit 2011, mais c'était bien 2010.

Le sénateur Moore: Six ans sont passés, mais rien n'a été fait. Des témoins ont dit, je crois, que si nous remontions au-delà de 1951, il y aurait quelque 300000 nouveaux inscrits. Avez-vous pensé à cela? Avez-vous fait une estimation des coûts? Avez-vous considéré la proposition faite l'autre soir par Todd Russell et bien sûr par Pamela Palmater? S'il est question de faire un grand ménage, il y a beaucoup de bonnes idées qui ont été présentées. Les avez-vous examinées? Si vous ne l'avez pas fait, pourquoi? Est-ce une question d'argent, à cause des prestations de maladie non assurées qui se sont accumulées? Je ne pense pas qu'elles soient très élevées par rapport au budget du ministère. Où en sommes-nous avec toutes ces choses?

MmeBennett: Joëlle voudra peut-être expliquer ce qui s'est passé. Il y a eu des amendements qui ont été rejetés. C'était un autre gouvernement. Encore une fois, je vous dis avec respect, sénateur, que nous voulons aller de l'avant et permettre à ces 35000 personnes de jouir de leurs droits.

Le sénateur Moore: Je pense plutôt aux 300000 personnes.

MmeMontminy: C'est de cela que je parlais tout à l'heure. L'amendement présenté au cours du débat sur le projet de loiC-3 reflétait le désir de MmeMcIvor de remonter au-delà de 1951 pour aller jusqu'en 1869. L'amendement correspondant avait été examiné, puis jugé irrecevable parce qu'il dépassait la portée du projet de loi et que celui-ci avait pour objet de donner suite à la décision McIvor.

Cette décision, comme je l'ai expliqué plus tôt, rejetait l'idée de remonter dans le passé. Elle établissait que MmeMcIvor avait été victime de discrimination, mais avait conclu qu'il n'était pas nécessaire de remonter plus loin que 1951. Je serais heureuse de vous lire un extrait du jugement qui pourrait aider à clarifier ce point. La cour a dit:

«En ce qui concerne la réparation...»

Le sénateur Moore: Citez-vous McIvor?

MmeMontminy: C'est la décision de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique dans l'affaire McIvor. Au sujet de l'opportunité de remonter dans le temps au-delà de 1951, la Cour d'appel a rejeté cette option pour les motifs suivants:

... il n'est pas évident pour moi qu'une personne qui, par exemple, est la descendante de cinquième génération d'une femme qui a perdu son statut dans les années 1870 puisse présenter un recours en vertu de l'article15 de la Charte. Premièrement, la discrimination donnant lieu au recours s'est produite bien avant l'adoption de la Charte. Deuxièmement, une descendante aussi éloignée d'une personne victime de discrimination ne semble pas avoir qualité pour exercer un recours.

Le juge note en outre que, dans la mesure où la descendante soutient qu'elle est victime de discrimination, son recours serait fondé non sur le sexe mais sur la descendance matrilinéaire, qui ne constituerait peut-être pas un motif analogue de discrimination.

J'ai deux observations à faire ici. La cour a dit que si on remonte loin dans le temps, on arrive évidemment à un point où la Charte n'existait pas. Il n'est pas nécessaire dans ce cas d'essayer de réécrire l'histoire pour appliquer rétroactivement la Charte. Si on le faisait, la discrimination pourrait difficilement être strictement fondée sur le sexe. Par conséquent, la date de naissance a son importance. Nous avons expliqué plus tôt qu'avec certaines des réparations envisagées, la date limite de 1951 n'est pas seulement une question fondée sur le sexe. Nous parlons de règles qui étaient fondées sur le sexe, mais pour trouver une réparation pouvant s'appliquer après si longtemps, il faut recourir à d'autres critères tels que la date de naissance, la situation familiale, et cetera.

Le sénateur Moore: Vous fondez-vous sur cette décision pour refuser l'inscription aujourd'hui?

MmeBennett: Je crois que ce que Joëlle essaie de dire c'est qu'il y a, d'une part, une exigence légale et, de l'autre, une question de principe qui nous incite à agir d'une manière juste et équitable. C'est ce que nous avons fait dans l'affaire Anderson. Dans ce cas, nous avons opté en faveur d'un règlement. Même si Terre-Neuve ne faisait pas alors partie du Canada, nous avons choisi la voie du règlement bien que, d'une certaine façon, le Canada ne soit pas objectivement responsable.

Nous voulons bien faire les choses. Nous voulons éviter les affrontements judiciaires. Toutefois, certaines de ces questions qui relèvent de décisions de principe et non d'obligations juridiques, doivent être traitées différemment. Les décisions de principe nécessitent des consultations adéquates par opposition à une simple application d'une décision judiciaire.

Le sénateur Moore: Je comprends cela, madame la ministre, mais il me semble que les décisions de principe sont souvent à l'origine de procès parce que les gens doivent encore s'adresser aux tribunaux. Je suis vraiment embarrassé de voir que cela continue. Je suis d'accord avec la sénatrice Lovelace Nicholas. Je ne sais pas pourquoi nous ne faisons pas un grand ménage tout de suite. Je vous remercie.

MmeBennett: Sénateur, je veux juste dire que ni moi ni un comité parlementaire ne pouvons agir unilatéralement dans ces circonstances. Des questions de ce genre nécessitent des consultations avec toutes les personnes touchées, comme celles que la présidente a mentionnées. Nous devons parler à ces gens pour déterminer ce que l'équité représente pour eux. Comment les décisions seront-elles appliquées? Comment seront-elles mises en vigueur? Comment déterminer si une personne a des droits, n'en a pas ou ne fait que revendiquer des droits? Nous voulons bien faire les choses sur le plan de la politique. Cela implique d'aller consulter les personnes intéressées.

Le sénateur Moore: Je vous remercie.

La sénatrice Raine: D'autres sénateurs ont déjà posé quelques-unes des questions que j'avais notées. Il m'en reste quand même quelques-unes. Je m'interrogeais sur les catégories de statut relevant des paragraphes 6(1) et 6(2). Est-ce que cet amendement y changera quelque chose? Pourquoi avons-nous deux catégories différentes de statut dans le registre si, d'après ce que j'ai vu, elles ont plus ou moins été artificiellement imposées? Je ne crois pas que le projet de loi que nous examinons aujourd'hui traite de changements de ce genre. Nous savons qu'il ne règle pas le problème et qu'il fait partie des solutions fragmentaires. Cela ne me satisfait pas du tout.

MmeBennett: Beaucoup, beaucoup de gens pensent que l'élimination du critère d'inadmissibilité de la deuxième génération serait une bonne chose. Toutefois, ce n'est pas un critère fondé sur le sexe. C'est donc, encore une fois, l'une des choses que nous aimerions beaucoup pouvoir faire, mais que nous ne pouvons pas aborder en nous basant sur le jugement de la cour. Pour le faire, nous devons procéder à des consultations pour mettre de l'ordre dans les règles régissant l'inscription.

La sénatrice Raine: On ne peut pas avoir une deuxième génération sans faire intervenir le sexe.

MmeBennett: En fait, c'est le cas de beaucoup de mes patientes.

La sénatrice Raine: Je suis vraiment frustrée de toujours entendre parler des raisons pour lesquelles nous ne pouvons pas faire telle ou telle chose. J'aimerais mieux qu'on me parle des choses que nous pouvons faire. Nous savons qu'il y a de la discrimination depuis bien des années, en fait depuis le tout début. Cette discrimination touche les femmes autochtones. Nous avons maintenant l'occasion d'y remédier.

MmeBennett: Je ne crois pas que ce soit le cas. Il ne s'agit pas ici de discrimination fondée sur le sexe, mais il est vrai qu'il y a énormément d'iniquités qui subsistent. Nous devrons nous mettre au travail immédiatement en février pour régler tous les autres problèmes. Il ne faut pas oublier l'équilibre à maintenir entre les droits individuels et collectifs. Ce n'est pas une chose que nous pouvons faire unilatéralement. J'aimerais bien pouvoir régler le problème de l'émancipation. J'aimerais bien pouvoir remédier à quelques autres difficultés qui me semblent relativement simples, mais nous avons l'obligation de consulter les personnes touchées ainsi que les collectivités et les particuliers.

La sénatrice Raine: Vous engagez-vous à consulter aussi les personnes privées de leurs droits?

MmeBennett: Absolument. Ce sont les personnes les plus importantes. Comme vous le savez, les gens qui ont des droits n'ont pas tendance à vouloir y renoncer ou à les céder à d'autres. Ce sont justement les gens que nous avons l'intention de consulter.

La sénatrice Raine: Je trouve intéressant d'entendre un avocat, qui travaille depuis longtemps dans ce domaine dire: «Je suis avocat, mais je ne peux même pas dire en vertu de quel article mes enfants ont été inscrits.» Je pense que notre système comporte de très graves défauts, et je suis vraiment triste de constater que le projet de loi ne fera rien pour y remédier.

MmeBennett: Il n'aidera peut-être pas Pam qui a livré un dur combat pour retrouver ses droits. Je vous recommande de lire son livre. En ce qui me concerne, je voudrais en arriver au point où nous n'aurons plus à prendre ce genre de décisions. Pam et toutes les autres comme elle devraient se réunir pour décider des règles à mettre en vigueur. C'est seulement alors que nous saurons que nous avons gagné. C'est lorsque nous n'aurons plus du tout à nous occuper de ces décisions.

La sénatrice Raine: Un dernier point...

La présidente: Pouvons-nous passer au sénateur Sinclair? Il se fait tard.

Le sénateur Sinclair: Je peux continuer toute la nuit. Pendant des années, j'ai eu des nuits blanches pendant que je discutais de la Loi sur les Indiens.

Je voudrais noter, madame la ministre, que des membres du comité ressentent un certain dégoût, peut-être un peu parce qu'ils ont l'impression que vous les invitez à se joindre à vous à bord d'un navire en train de faire naufrage. Il est difficile pour le comité de vous regarder jouer du gouvernail pour essayer de sauver le navire. Si le comité et le Sénat n'adoptent pas le projet de loi, je crains que beaucoup de gens ne soient pris au piège en février prochain à moins que votre ministère ou votre gouvernement ne prenne les mesures nécessaires pour obtenir la prolongation qu'il faut.

Pendant que j'écoutais les échanges, j'ai pensé au fait que j'avais eu de la difficulté à suivre les explications de M.Reiher concernant l'amendement. C'est seulement parce que nous n'avons pas en main le document qui m'aurait permis de déterminer si l'amendement couvre l'aspect qui m'inquiète le plus, à savoir le traitement différent des enfants illégitimes depuis 1951, selon qu'ils sont nés d'un père ou d'une mère non indiens. J'aurais voulu être sûr que cet aspect est adéquatement couvert par l'amendement.

Il y a une autre question que je voudrais aborder. Vous avez solennellement promis au comité, en réponse à la question du sénateur Enverga concernant un délai ferme, d'entreprendre le processus de consultation de la seconde phase d'ici février de l'année prochaine et de le terminer dans une période déterminée.

Je crois que la vraie question qui se pose pour moi est celle de savoir si vous et les fonctionnaires de votre ministère êtes disposés à présenter régulièrement au comité des comptes rendus sur l'avancement de vos consultations, non en échange de notre promesse d'adopter le projet de loi, mais simplement pour nous donner l'assurance qu'une fois le projet de loi adopté, il y aura ce processus de consultation dont se soucient énormément Sharon McIvor et d'autres qui craignent que cela aboutisse à l'abandon de droits ou à l'acceptation d'un traitement discriminatoire par voie de négociation.

Je dois vous dire à cet égard que MmeMcIvor a été très persuasive dans l'exposé qu'elle nous a présenté. Vous ne pouvez pas profiter de consultations pour enlever des droits à des femmes, à leurs enfants ou à leurs petits-enfants. Dans la mesure où le processus de consultation peut permettre une telle chose, il m'inquiète beaucoup comme il inquiète de nombreux membres du comité. Nous avons besoin d'être rassurés à ce sujet, de savoir que cela ne fait pas partie de ce qui est envisagé.

Si j'ai bien compris la teneur de l'amendement proposé, il permettrait de régler le problème des enfants illégitimes, ce qui ferait beaucoup pour apaiser nos préoccupations. Le projet de loi modifie déjà les dispositions législatives existantes pour permettre d'inclure les gens exclus avant 1951, et cela s'appliquerait aussi à leurs enfants, si j'ai bien compris l'intention de la loi, bien que certains des enfants puissent relever du paragraphe6(2) et non du paragraphe6(1).

Le projet de loi vise à remédier à une situation particulièrement embrouillée. Je me demande donc si les membres du comité disposent de renseignements suffisants pour aborder l'étude article par article. Je ne fais qu'exprimer une préoccupation. En fait, nous pourrions avoir besoin de faire encore appel à certains d'entre vous pour avoir d'autres explications sur le processus de consultation.

Je reviens donc à ma question: pouvez-vous, êtes-vous disposés à vous engager à comparaître de nouveau devant le comité?

MmeBennett: Absolument. Je suis à la disposition du comité. Je suis prête à faire tout ce que vous me demanderez. Je serais heureuse de revenir en février vous présenter un plan de travail, peut-être avec quelques options concernant nos perceptions et ce que nous aimerions faire ainsi qu'un calendrier ferme. Il nous faudra commencer tout de suite pour pouvoir revenir vous présenter un plan de travail et les éléments auxquels nous pensons relativement aux contacts avec les personnes et les collectivités touchées et à l'équilibre à trouver entre les droits individuels et collectifs.

Madame la présidente, pouvez-vous me dire s'il nous est possible de distribuer ce document dont nous n'avons que la version anglaise? Pouvons-nous mettre la pile quelque part pour que les membres du comité qui le souhaitent puissent se servir?

La présidente: Nous pouvons le faire si le comité y consent. Le comité est-il d'accord?

Des voix: D'accord.

La présidente: Oui, le document peut être distribué.

Le sénateur Sinclair: Quand la version française sera-t-elle disponible? Comptez-vous la distribuer bientôt?

MmeSt-Aubin: Oui, mais nous ne l'avons pas ici.

La présidente: Sénateur Sinclair, avez-vous d'autres questions?

Le sénateur Sinclair: Non, je suis fatigué.

La présidente: Je vais poser une petite question avant de céder la parole à la sénatrice Dupuis.

Madame la ministre, vous avez dit à plusieurs reprises qu'il faut trouver un juste équilibre entre les droits individuels et collectifs. Qu'entendez-vous par là?

MmeBennett: J'apprends, sénatrice, que nos décisions ont des répercussions aussi bien sur les demandeurs que sur les collectivités. Nous devons donc écouter pour nous rendre compte s'il est vrai qu'il n'y a pas de différence dans les cas où les droits sont parfaitement clairs. J'aurais du mal à comprendre que des questions puissent se poser au sujet de l'émancipation, mais je pense que cela pourrait arriver. Si nous n'avons pas un processus nous permettant de nous assurer que les gens qui revendiquent des droits ont de bonnes raisons pour le faire, nous pouvons faire du tort à une collectivité en ouvrant tout grand la porte à des gens qui n'y ont peut-être pas droit en fonction de nouveaux critères. Nous avons pu voir ce problème dans le cas des droits des Métis et dans beaucoup d'autres cas aussi. Le fait qu'un droit soit revendiqué ne signifie pas qu'il est réel. C'est de cet équilibre que je parlais.

La présidente: Je pose la question parce que je m'inquiète, et que je sais que d'autres sénateurs s'inquiètent — en particulier la sénatrice Lovelace Nicholas — de ce que des femmes indiennes et leurs descendants ont été privés de leur statut à cause d'un mariage. Ces gens avaient des droits. S'ils veulent être membres d'une nation ou participer à ses activités, la nation peut leur dire: «C'est bien dommage, mais nous ne respecterons pas vos droits.» Ces droits avaient été retirés depuis 1869. À mon avis, il n'y a pas d'équilibre. Ces droits doivent être établis. Voilà pourquoi je suis inquiète. Si la consultation porte sur les droits de ces femmes et de leurs descendants, est-ce bien la bonne voie à emprunter? Voilà l'objet de ma préoccupation.

MmeBennett: Je crois que c'est le droit à l'autodétermination et, comme vous le savez, la différence qu'il y a entre le statut et l'appartenance à une nation. Ceux qui ont le statut ont droit aux études postsecondaires. C'est une chose que nous devons respecter, mais il y a eu des problèmes parmi les nations qui bénéficient de l'autonomie gouvernementale. Nous en sommes bien conscients.

[Français]

La sénatrice Dupuis: Merci, madame la ministre. Je crois que votre dernière réponse attire notre attention sur la question qui est vraiment au cœur du projet de loiS-3, c'est-à-dire que les droits des femmes sont vus comme des droits individuels, mais que les droits collectifs sont vus comme appartenant aux Premières Nations ou aux Conseils de bande. Je ne suis pas certaine que ce soit la bonne façon de voir les choses.

Ma question est la suivante: à partir du moment où, en 1982, le législateur s'est donné comme obligation constitutionnelle de respecter les droits, que ce soit les droits des hommes ou des femmes qui sont membres des peuples autochtones, c'est une obligation générale, une obligation constitutionnelle. Cela oblige le gouvernement, en vertu de la Charte, à revoir sa législation et à éliminer la discrimination inscrite dans sa législation.

L'exercice réalisé en 1985, dans le cadre du projet de loiC-31, a révélé qu'on avait transféré à une autre génération la discrimination antérieure à 1982. Donc, on n'a pas réglé l'exercice qu'on devait faire en 1982, soit de procéder à un examen obligatoire des lois pour savoir si elles respectent la Constitution. La Commission royale sur les peuples autochtones avait bien documenté le dossier en 1996. On a transféré la discrimination antérieure à 1985 aux générations suivantes.

Ce qu'on observe, c'est que l'affaire McIvor, en 2010, au titre du projet de loiC-3, est venue répondre à un jugement. Je vous demande donc si 2016 ne serait pas l'occasion recherchée, justement, parce que la Cour d'appel de la Colombie- Britannique a dit, «well, before 1951, we don't deal with that, legally speaking». Cela reprend le jugement de la Cour suprême, en 1964, dans l'affaire Lavell.

Est-ce que cela ne nous renvoie pas à l'obligation du législateur de se pencher sur la question de la discrimination dans la Loi sur les Indiens et de l'éliminer? On sait que, selon l'affaire McIvor, c'est trop restreint et que cela ne couvre pas tout. A-t-on envisagé de ne pas s'attarder au projet de loiS-3, et de passer tout de suite à la deuxième étape de votre consultation?

MmeBennett: C'est exactement le but de la deuxième étape, soit de corriger les discriminations antérieures à la Charte devant la cour, telles que l'affaire McIvor. C'est une question de politique pour notre gouvernement. Ce n'est pas comme un jugement de la cour, tel l'arrêt Descheneaux. Il est donc très important de tenir des consultations avec les personnes concernées, et de donner suite à notre promesse.

[Traduction]

La sénatrice Dupuis: Je me demande si le titre même du projet de loi n'est pas trompeur puisqu'il parle d'élimination des iniquités fondées sur le sexe en matière d'inscription...

[Français]

En français, le texte ne correspond pas, car ce n'est pas ce qu'il dit.

[Traduction]

Même dans la version anglaise, on peut être tenté de croire que le projet de loiS-3 a pour objet d'éliminer toutes les iniquités fondées sur le sexe, ce qui n'est pas le cas, si j'ai bien compris.

MmeBennett: Vous pourrez proposer de changer le titre du projet de loi à l'étape de l'étude article par article.

[Français]

On parle de plusieurs iniquités.

[Traduction]

Vous avez parfaitement raison. J'ai dit que nous n'avons pas parlé de «toutes les iniquités».

[Français]

Les questions trop complexes sont trop difficiles pour cet enjeu et ce projet de loi.

[Traduction]

Je pense cependant que vous avez soulevé un très bon point.

La présidente: Nous disposons probablement de 10 à 15minutes pour un second tour, pourvu que les questions soient assez courtes, s'il vous plaît.

Le sénateur Patterson: L'une des questions importantes dont nous avons discuté ce soir a trait à la portée du projet de loi. Madame la ministre, vous avez dit à plusieurs reprises qu'en ce qui concerne les iniquités connues fondées sur le sexe, vous devez vous conformer aux directives de la cour.

Je viens de regarder encore une fois la décision. J'ai trouvé ce qui suit au paragraphe239 du jugement rendu par MmeMasse dans l'affaire Descheneaux:

Lorsque le législateur choisit d'omettre de considérer les implications plus larges des décisions judiciaires en restreignant la portée de celles-ci à leur strict minimum, une certaine abdication du pouvoir législatif aux mains du pouvoir judiciaire est susceptible de prendre place. Les détenteurs du pouvoir législatif se contenteraient alors d'attendre que les tribunaux se prononcent au cas par cas avant d'agir et que leurs décisions forcent progressivement la modification des lois afin que celles-ci soient, finalement, conformes à la Constitution.

C'était un extrait du jugement de la cour.

Dans le jugement McIvor, la cour a noté en accordant une prolongation en 2010:

Nous avons reçu des documents indiquant que l'adoption du projet de loi à la Chambre des communes a été ralentie parce que quelques députés souhaitaient étendre la portée du projet de loi à des questions allant au-delà de celles qui étaient particulièrement visées par la décision que la Cour a rendue le 6 avril 2009.

J'en viens à ma question. Nous n'en avons pas discuté ce soir, mais les choses ont commencé en juin. Le gouvernement a retiré l'appel en février. Vous n'avez ensuite commencé qu'en juin ce que vos fonctionnaires ont appelé «engagement» et non «consultation». En matière d'engagement, ce n'était qu'un strict minimum.

Je ne parle pas des consultations élargies de la seconde phase, mais je dois dire que si nous voulons faire un meilleur travail pour nous assurer d'avoir cerné toutes les iniquités fondées sur le sexe... L'ABA vous a permis de découvrir une lacune, même si elle avait à peine examiné le projet de loi. Les représentants de l'association nous ont dit qu'ils n'avaient eu que très peu de temps pour le faire. Dans ces conditions, ne croyez-vous pas, compte tenu du strict minimum d'engagement du début, de ce nouvel amendement qui ajoute à la portée du projet de loi et de la possibilité qu'il existe d'autres éléments connexes, qu'il serait préférable de prendre un peu plus de temps pour finir le travail lié à l'affaire Descheneaux avant de passer aux consultations élargies, qui pourraient bien prendre plus de temps que nous ne l'aurons prévu?

MmeBennett: Tout d'abord, sénateur, en ce qui concerne l'extrait du jugement que vous avez lu, je ne crois pas que nous nous soyons limités au strict minimum. Nous aurions pu nous en tenir exactement à ce que la cour nous a dit de faire. Nous avons décidé d'aller au-delà et d'inclure les cas parfaitement nets qui s'inscrivaient, selon nous, dans l'intention du jugement.

Pour inclure des éléments plus complexes, nous croyons devoir consulter les gens touchés par le projet de loi, c'est-à- dire les femmes qui ont perdu leurs droits ainsi que les collectivités. Nous devons faire un meilleur travail en ce qui concerne les éléments qui ne sont pas aussi simples et nets que ceux que nous avons inclus dans le projet de loi.

Comme je l'ai dit, nous ne croyons pas qu'il soit possible, dans un délai de trois à six mois, d'inclure tous les autres cas de discrimination fondés ou non sur le sexe qui sont compliqués parce qu'ils font intervenir des choses telles que la date de naissance et d'autres éléments.

Pour ce qui est des délais que vous avez mentionnés, à partir du moment où nous avons décidé de retirer l'appel, il faut tenir compte du processus à suivre au sein du gouvernement. Il faut faire des recherches, puis rédiger un mémoire au Cabinet. J'ai dû me présenter devant le Cabinet pour obtenir la permission d'adopter cette approche et pour convaincre mes collègues du Cabinet de l'opportunité d'inclure quelques éléments de plus que ce que la cour nous a imposé de faire. Voilà pourquoi il y a aujourd'hui 35000 personnes qui attendent le moment où elles pourront exercer leurs droits.

C'est la raison pour laquelle nous voulons avancer afin d'être en mesure d'entreprendre correctement la seconde phase. Tout autre retard entravera le lancement de cette phase. Si nous pouvons seulement terminer cette première étape, nous aurons la possibilité de faire toutes les autres choses dont le comité s'inquiète à juste titre, tout comme moi.

La présidente: Une question par sénateur, je vous prie.

La sénatrice Lankin: Il est difficile de s'en tenir à une seule question, madame la présidente. C'est vraiment très difficile. Je vais voir si je peux tout mettre dans une seule question.

Je sais qu'il y a une obligation juridique de consultation et d'adaptation. Il ne s'agit pas seulement de votre désir de tenir des consultations. Vous avez l'obligation légale de le faire. J'apprécie vos propositions et les assurances que vous nous donnez.

Je crois que vous devez vous soucier, entre autres, de la conformité à la Charte. La question a été soulevée. Pour moi, nous avons à nous prononcer non sur la conformité de la Loi sur les Indiens à la Charte, mais plutôt sur la conformité du projet de loi dont nous sommes saisis. Je comprends ce que vous avez dit à ce sujet. Toutefois, j'attends de vous l'assurance — étant donné les dispositions de la Charte et l'obligation qu'a le gouvernement de veiller à la conformité de ces mesures législatives — que vous ferez en sorte, au cours de la seconde phase, que vos discussions aboutissent à un nouveau régime ou à un régime dévolu qui soit parfaitement conforme à la Charte et que vos entretiens seront axés sur ce cet objectif.

MmeBennett: Vous avez mon assurance. Encore une fois, je serai heureuse de répondre à cette question et à beaucoup d'autres lorsque nous reviendrons devant le comité avec un plan de travail. Ce plan comprendra différentes choses: quels sont les principes de l'engagement? Quelles questions devons-nous poser? Comment cela guidera-t-il nos entretiens? Nous n'irons pas consulter au hasard. Nous saurons quelles questions poser et quels groupes consulter, comme l'a mentionné la présidente. Nous devrons donc savoir d'avance ce que nous allons faire, avec qui, quand et pendant combien de temps. Nous reviendrons donc au comité avec ces principes.

La sénatrice Lankin: Très bien. Je vous remercie.

Le sénateur Sinclair: L'une des questions que j'ai découle dans une certaine mesure de celle que la sénatrice Lankin vient de poser. J'avais l'intention de demander qu'on en tienne compte désormais. Le conseiller juridique qui vous accompagne aura peut-être une réponse à me donner.

Je comprends bien la règle de la common law voulant qu'un amendement ne puisse pas donner lieu à une demande d'indemnisation fondée sur les dispositions législatives antérieures ou sur un tort occasionné par ces dispositions. Je comprends aussi que cette disposition figure souvent, par souci de clarté, dans un projet de loi modificatif. Toutefois, je fais une distinction entre une perte ou un tort occasionnés par les dispositions législatives antérieures et le droit à une réparation prévu par notre Constitution, comme vient de l'établir une décision judiciaire.

En d'autres termes, je me demande pourquoi le gouvernement croit pouvoir, par voie législative, empêcher une personne d'exercer son droit constitutionnel à une réparation, en vertu de l'article24 ou d'une autre disposition de la Charte. Y avez-vous pensé, maître?

M.Reiher: Oui. En fait, l'objet de cette disposition n'est absolument pas d'empêcher une réparation en vertu de la Charte. Elle vise à prévenir des réclamations pour dommages, comme des avantages liés au statut.

Je peux citer en exemple les distributions par tête que les bandes faisaient dans le passé. Les nouveaux membres d'une bande devraient-ils avoir le droit de réclamer cet argent pour les 10, les 20 ou les 30 dernières années? Il en est de même des avantages accordés par le gouvernement. L'intention est de faire comprendre que le droit obtenu en vertu du projet de loi ne commence qu'aujourd'hui et ne s'applique que pour l'avenir. Nous parlons en particulier du droit à des avantages ou aux prestations d'un programme.

Le sénateur Sinclair: Puis-je poser une question complémentaire?

La présidente: Allez-y, je vous en prie.

Le sénateur Sinclair: Les membres du comité apprendront avec intérêt, je crois, que la décision Descheneaux a très clairement établi que les dispositions de la loi étaient incompatibles avec la Charte à partir du moment où celle-ci a été mise en vigueur au Canada. Par conséquent, tout ce qui s'est produit avant était probablement légitime ou légal en vertu du principe de souveraineté du Parlement.

Je comprends bien ce point, mais, encore une fois, je m'interroge sur le cas d'une personne qui demanderait une indemnisation pour violation d'un droit constitutionnel depuis 1982. Croyez-vous que la disposition de l'article8 du projet de loi protégerait le gouvernement et lui assurerait l'immunité face à ce droit constitutionnel?

M.Reiher: Je répète que cette disposition n'a pas pour objet de protéger contre une réparation constitutionnelle. Toutefois, je crois qu'il est établi en droit qu'une décision prise en vertu d'une loi qui est déclarée inconstitutionnelle plus tard demeure valide. Cela s'applique, par exemple, aux décisions relatives à des prestations. Par conséquent, une personne ne peut pas récupérer de telles prestations. Ce n'est pas un droit constitutionnel.

Le sénateur Sinclair: Voilà pourquoi j'aime tellement la profession d'avocat. Vous et moi pouvons continuer longtemps à discuter. Quoi qu'il en soit, je vous remercie de votre réponse.

MmeBennett: J'ai cru comprendre que cette disposition protège aussi la bande ou la collectivité des Premières Nations car beaucoup de collectivités pourraient autrement avoir des difficultés financières si les avantages étaient rétroactifs. Grâce à cette disposition, elles peuvent simplement dire: «Tout commence maintenant. Vous avez des droits, mais cela s'applique pour l'avenir.»

Le sénateur Sinclair: En réponse à votre commentaire, je vous dirais que, comme il s'agit d'une loi fédérale, la violation du droit relève de la compétence fédérale et non de la bande. Celle-ci n'a fait qu'appliquer la loi fédérale. Il y a donc une distinction à faire entre les deux. Je répète cependant que les avocats discuteront de cette question pendant très longtemps, j'en suis sûr.

La présidente: Je vous remercie. Le temps dont nous disposons est écoulé. Je tiens à remercier tous les honorables sénateurs de leurs questions et commentaires de ce soir. Je veux remercier en particulier madame la ministre qui a accepté de comparaître et de répondre à toutes nos questions, ainsi que les fonctionnaires du ministère.

Je vais vous garder pendant une ou deux minutes de plus. La soirée a été longue, mais très intéressante. Nous avons discuté d'un sujet très sérieux. Dans la culture autochtone, nous avons toujours l'habitude d'introduire une pointe d'humour pour que chacun puisse rentrer chez lui de bonne humeur. Je vais donc vous raconter l'histoire de mes premiers contacts avec le projet de loiC-31.

C'est en août 1985, je crois, que j'ai présenté ma demande en vertu du projet de loiC-31, mais je n'ai obtenu mon inscription qu'en octobre. L'attente a donc été très courte. Toutefois, entre la date où la loi est entrée en vigueur et celle où j'ai été inscrite, j'avais décidé d'acheter une voiture neuve. En Saskatchewan, à l'époque, les Indiens inscrits n'avaient pas à acquitter la taxe de vente provinciale. Ce qui s'est passé est un peu lié à l'article sur la responsabilité. Je m'étais donc dit: je me fiche de ce qu'on dira; j'ai droit à cette exemption même si je ne suis pas encore inscrite.

J'avais donc écrit au ministre compétent pour lui dire: «Il y a ce projet de loi fédéral, mais je n'ai pas été inscrite avant octobre. J'ai acheté une voiture en août, et je voudrais donc, s'il vous plaît, qu'on me rembourse la taxe de vente provinciale de 785$ que j'ai payée.» Le ministre m'a répondu: «Nous examinerons votre demande au Cabinet.» Quelques semaines plus tard, j'ai reçu une lettre accompagnée d'un chèque de 785$. Voilà donc l'incident amusant lié à la responsabilité qui m'est arrivé. Mesdames et messieurs, tout est possible.

Cela met fin à la réunion. Merci à tout le monde.

(La séance est levée.)

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