Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Banques et du commerce
Fascicule no 56 - Témoignages du 8 mai 2019
OTTAWA, le mercredi 8 mai 2019
Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce se réunit aujourd’hui, à 16 h 14, pour étudier la teneur des éléments des sections 1, 5 et 26 de la partie 4, et de la sous-section A de la section 2 de la partie 4, du projet de loi C-97, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 19 mars 2019 et mettant en œuvre d’autres mesures.
Le sénateur Douglas Black (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Bonjour. Je souhaite la bienvenue aux membres du grand public qui suivent aujourd’hui les délibérations du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, que ce soit ici dans la salle ou sur le Web.
Je m’appelle Doug Black. Je suis un sénateur de l’Alberta et je préside ce comité. Je vais demander à mes collègues de se présenter, s’il vous plaît, aux témoins qui sont actuellement en poste et aux autres groupes de témoins qui, je le sais, sont dans la salle.
Le sénateur Wetston : Howard Wetston, de l’Ontario.
Le sénateur C. Deacon : Colin Deacon, de la Nouvelle-Écosse.
La sénatrice Duncan : Pat Duncan, du Yukon.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Jean-Guy Dagenais, du Québec.
La sénatrice Galvez : Rosa Galvez, du Québec.
[Traduction]
La sénatrice Frum : Linda Frum, de l’Ontario.
La sénatrice Stewart Olsen : Carolyn Stewart Olsen, du Nouveau-Brunswick.
La sénatrice Marshall : Elizabeth Marshall, de Terre-Neuve-et-Labrador.
La sénatrice Wallin : Pamela Wallin, de la Saskatchewan.
[Français]
La sénatrice Verner : Josée Verner, du Québec.
[Traduction]
Le président : Nous sommes très bien appuyés par notre greffière et nos analystes.
Aujourd’hui, nous entamons notre examen de la totalité ou de certaines parties des quatre sections de la partie 4 du projet de loi C-97, Loi no 1 d’exécution du budget de 2019.
Les honorables sénateurs savent que notre comité doit faire rapport de ses conclusions au Sénat au plus tard le 6 juin 2019. Nous allons commencer par la sous-section A de la section 1 de la partie 4, qui porte sur les modifications à la Loi sur les banques.
Nous souhaitons la bienvenue à Margaret Tepczynska, directrice, Initiatives stratégiques, Division des institutions financières du ministère des Finances du Canada, et à Mary O’Connor, conseillère principale, Initiatives stratégiques, Division des institutions financières; du Bureau du surintendant des institutions financières, Theresa Hinz, directrice générale, Législation, interprétation et conformité, Division des affaires réglementaires; de l’Association canadienne des coopératives financières, Jessica Brandon-Jepp, conseillère en représentation et relations gouvernementales.
Je crois comprendre que ce groupe de témoins, ainsi que tous les groupes de témoins qui suivront, donneront un aperçu de la documentation qui nous a été fournie et répondront ensuite à vos questions.
Pouvons-nous commencer par Finances Canada?
Margaret Tepczynska, directrice, Initiatives stratégiques, Division des institutions financières, ministère des Finances Canada : Merci, monsieur le président. La partie 4, section 1, sous-section A propose trois modifications techniques importantes à la Loi sur les banques, à l’appui de l’annonce faite dans le budget de 2019 selon laquelle des modifications législatives seraient proposées pour moderniser la gouvernance d’entreprise des institutions financières sous réglementation fédérale.
Le premier amendement concerne les coopératives de crédit fédérales. Le budget de 2019 a annoncé que des modifications législatives seraient proposées pour offrir aux membres des coopératives de crédit fédérales un plus grand choix d’options quant au vote avant et pendant les assemblées générales annuelles.
La loi provinciale offre aux membres des coopératives d’épargne et de crédit provinciales une vaste gamme d’options de vote. Les coopératives d’épargne et de crédit provinciales qui font la transition vers le cadre fédéral ont demandé à ce que la même diversité d’options de vote soit maintenue.
Les nouvelles options de vote amélioreront la participation des membres lors du processus du vote aux assemblées générales annuelles. La modification proposée permettra aux membres des coopératives de crédit fédérales d’exercer plus facilement leur droit de vote par l’ajout de plus amples possibilités — que ce soit le vote par téléphone, par voie électronique ou en personne dans une succursale — avant l’assemblée générale annuelle. Ces options s’ajoutent à la façon actuelle de voter, soit à l’assemblée et par la poste. Les coopératives de crédit fédérales ont conclu que cette modification serait un moyen d’accroître la participation de leurs membres à leur processus décisionnel.
Les modifications suivantes clarifient les pouvoirs de procuration inscrits dans la Loi sur les banques. Il s’agit de modifications techniques qui clarifient les pouvoirs du Règlement sur les formulaires de procuration et qui mettent à jour le libellé actuel relatif à la sollicitation de procurations afin qu’il soit conforme à la Loi canadienne sur les sociétés par actions et aux conventions de rédaction bijuridique.
L’objectif des dispositions de la loi relatives aux procurations est de faire en sorte que les entreprises fournissent aux actionnaires des renseignements adéquats sur leur entreprise, de sorte qu’ils puissent exercer leur droit de vote en toute connaissance de cause. Pour ce faire, les règlements sont fournis dans le formulaire de procuration, la circulaire de sollicitation de procurations, et les pouvoirs conférés par ce formulaire permettent à un actionnaire de nommer un fondé de pouvoir pour agir en son nom et recevoir les renseignements nécessaires. Le Comité mixte permanent d’examen de la réglementation a souligné la nécessité de mettre à jour les renvois désuets existants dans le Règlement sur les formulaires de procuration.
En réponse à cela et en guise de première étape, une modification législative à la Loi sur les banques est proposée, qui élargirait le pouvoir de réglementation qui définit le régime de procuration. Les dispositions qui définissent la sollicitation et les règles entourant la sollicitation de procuration seront également modifiées afin d’en clarifier le libellé et d’y apporter des mises à jour bijuridiques. Ces changements sont conformes à la définition de la sollicitation et aux pratiques modernes de rédaction inscrites dans la Loi canadienne sur les sociétés par actions.
Le ministère a mené de vastes consultations dans le contexte de l’examen législatif du secteur financier de 2019, ainsi que des consultations ciblées auprès de l’industrie au sujet de ces modifications. L’Association canadienne des coopératives financières et les coopératives de crédit fédérales ont demandé que la Loi sur les banques soit modifiée pour permettre aux membres des coopératives de crédit fédérales d’avoir plus d’options de vote.
Le ministère a maintenu un dialogue continu avec le Comité mixte permanent d’examen de la réglementation au sujet de la mise à jour du cadre réglementaire sur les procurations pour les banques et les sociétés de portefeuille bancaires. En février 2019, des représentants du ministère ont comparu devant le comité mixte pour présenter un plan de mise à jour de la Loi sur les banques et du Règlement sur les formulaires de procuration. Le comité mixte appuie le plan proposé et a demandé une mise en œuvre en temps opportun.
Voilà qui conclut mon survol des dispositions. Je vais maintenant céder la parole à ma collègue du Bureau du surintendant des institutions financières du Canada pour qu’elle fasse sa déclaration préliminaire.
Theresa Hinz, directrice générale, Législation, interprétation des politiques et conformité, Division des affaires réglementaires, Bureau du surintendant des institutions financières : Bonjour à tous. Merci d’avoir invité le BSIF à comparaître devant le comité. Je suis accompagnée de ma collègue Isabelle Lepage, gestionnaire aux interprétations et à la conformité législatives du bureau. Je serai brève.
Comme vous le savez, le rôle du BSIF dans le cadre du régime fédéral de surveillance financière est de réglementer et de superviser les banques, les coopératives de crédit, les sociétés de fiducie, de prêt et d’assurance sous réglementation fédérale.
Mes collègues du ministère des Finances du Canada ont bien expliqué les modifications à l’étude aujourd’hui. Le BSIF a été consulté au sujet des modifications proposées, qui ne semblent pas présenter d’incidence de risque sur la sécurité et la stabilité des opérations des institutions financières sous réglementation fédérale.
Isabelle et moi serons heureuses de répondre à vos questions. Merci.
Le président : Merci beaucoup. Madame Brandon-Jepp, vous avez la parole.
Jessica Brandon-Jepp, conseillère en représentation et en relations gouvernementales, Association canadienne des coopératives financières : Je vous remercie, monsieur le président, ainsi que tous les honorables sénateurs qui siègent à ce comité, de me donner l’occasion de m’adresser à vous aujourd’hui.
Je m’appelle Jessica Brandon-Jepp, et je suis conseillère en représentation et en relations gouvernementales à l’Association canadienne des coopératives financières. Nous représentons 248 coopératives de crédit et caisses populaires hors Québec. Collectivement, notre secteur apporte 6,5 milliards de dollars à l’économie canadienne. Nous avons 5,8 millions de membres, employons près de 29 000 Canadiens et gérons plus de 225 milliards de dollars d’actifs.
En 2018, nous avons retourné 62,4 millions de dollars vers des projets d’initiative communautaire partout au pays, soit une part beaucoup plus importante de notre revenu après impôt que les grandes banques. Les coopératives de crédit appartiennent aux gens qui font affaire avec elles, et c’est ce qui les distingue. Elles sont souvent le seul fournisseur de services bancaires ayant pignon sur rue dans 395 collectivités, majoritairement rurales, partout au Canada. Malgré leur petite taille, elles détiennent une part de marché comparable à celle des cinq grandes banques pour ce qui est des prêts agricoles et des prêts aux petites et moyennes entreprises. Elles prêtent aux petites entreprises parce qu’elle est une petite entreprise.
Dans les provinces de l’Ouest, les coopératives de crédit détiennent entre 30 et 50 p. 100 du marché. Par exemple, au Manitoba, un consommateur sur deux fait affaire avec une coopérative de crédit.
L’important travail qu’elles font dans leurs collectivités constitue la raison pour laquelle les coopératives de crédit demandent au gouvernement de moderniser certaines dispositions de la Loi sur les banques, qui sont désuètes et qui constituent un obstacle à l’innovation et à la concurrence au sein des services financiers. Nous avons été heureux de voir deux de nos recommandations prébudgétaires incluses dans le budget de 2019. Il s’agit de changements concernant le processus de vote des membres des coopératives de crédit fédérales dans les AGA et l’élimination de l’obligation désuète faite aux coopératives de crédit fédérales d’envoyer des copies papier des états financiers de fin d’exercice à tous ses membres chaque année.
Nous remercions le gouvernement d’avoir écouté nos préoccupations et d’avoir donné suite à certaines de nos recommandations dans le budget de 2019. Toutefois, nous avons été déçus qu’une seule de ces recommandations, celle concernant le vote électronique, ait été incluse dans le projet de loi C-97. Cela signifie que les coopératives de crédit fédérales devront continuer d’envoyer des relevés papier, ce qui est inefficace, coûteux et peu respectueux de l’environnement. En outre, cela les empêchera de retourner dans leurs collectivités les économies que l’envoi d’avis électroniques aurait permis de réaliser, et ce, jusqu’en 2020 au moins. L’une de nos coopératives de crédit fédérales a estimé que cela lui coûtait près d’un million de dollars par année. Et ce n’est là qu’une seule de nos coopératives de crédit. Cet argent serait beaucoup mieux utilisé s’il était réinvesti dans les coopératives de crédit ou dans des programmes communautaires que nos membres appuient si généreusement.
Bien que la Loi sur les banques ne s’applique qu’aux coopératives de crédit fédérales, il est important de noter que la modernisation des dispositions désuètes éliminerait des obstacles à l’entrée pour les coopératives de crédit qui envisagent de devenir fédérales et cela envoie un message clair aux organismes de réglementation provinciaux en les encourageant à réexaminer les dispositions désuètes de leurs propres lois. Ces dispositions désuètes existent encore dans plusieurs provinces. Ces recommandations auront une incidence non seulement sur la sphère fédérale, mais aussi sur l’ensemble du Canada, en ce qui concerne l’accroissement de la compétitivité et de l’innovation dans le secteur.
Grâce à l’appui du Caucus multipartite des coopératives de crédit et, espérons-le, de votre comité, les coopératives de crédit gardent espoir que le Parlement élu en octobre donnera suite à une mesure budgétaire sur l’envoi d’états financiers sur papier ainsi qu’à nos autres recommandations pour soutenir l’innovation et la concurrence au sein du secteur des services financiers.
En fin de compte, les politiques devraient encourager la concurrence au sein des services financiers au Canada. À l’heure actuelle, le secteur financier canadien n’a pas la réputation d’offrir une très grande variété aux consommateurs et les coopératives de crédit représentent la seule véritable solution de rechange aux grandes banques du Canada. L’actuelle politique de concentration des services financiers ne sert ni l’intérêt du consommateur ni l’économie.
Les coopératives de crédit continueront de préconiser la mise en œuvre des changements prévus dans le budget de cette année, peu importe le résultat des élections. Le secteur apprécie l’appui du Caucus multipartite des coopératives de crédit et demande au comité de l’aider à faire en sorte que ces changements soient mis en œuvre dans les plus brefs délais.
Merci.
Le président : Merci de vos exposés. Nous allons maintenant passer aux questions.
Le sénateur Wetston : Ma première question porte sur les procurations et les circulaires de sollicitation de procurations. Je pense qu’un amendement dans ce domaine est justifié. Les problèmes que nous avons — vous êtes peut-être au courant, le problème s’est posé également dans le domaine des valeurs mobilières — ne viennent pas tant des procurations ou des circulaires de sollicitation de procurations que du mécanisme de substitution. Il y a plusieurs années que cela dure et il semble difficile de régler les problèmes associés à la mécanique des procurations : les votes, le dépouillement des votes, et ainsi de suite, surtout dans un contexte de propriétaires effectifs opposés et de propriétaires effectifs non opposés.
Je reconnais que c’est une question un peu technique, mais je me demande si vous y avez réfléchi en ce qui concerne les amendements à la SRC.
Mary O’Connor, conseillère principale, Initiatives stratégiques, Division des institutions financières, ministère des Finances Canada : Oui, nous avons étudié de près les régimes provinciaux encadrant les valeurs mobilières, ainsi que le régime de procuration en vertu de la Loi canadienne sur les sociétés par actions. Nous avons l’intention de moderniser nos institutions et d’imiter les pratiques exemplaires de ces régimes. Nous avons introduit ces pouvoirs de réglementation afin d’être en mesure de prendre des règlements qui reflètent les pratiques exemplaires et de nous mettre au niveau par rapport aux pratiques exemplaires d’autres pays.
Le sénateur Wetston : Merci.
Je voulais donner suite à l’exposé de Mme Brandon-Jepp sur les coopératives de crédit. Pouvez-vous me rappeler si, lorsque les amendements de la SRC ont été apportés l’an dernier au projet de loi C-25, le vote électronique était permis en vertu de la LCSA pour les sociétés ouvertes? Je pose la question, car j’ai oublié et je devrais connaître la réponse.
Mme Brandon-Jepp : Je m’excuse, sénateur Wetston. Je ne m’en souviens pas non plus, mais je me ferai un plaisir de vous transmettre cette information.
Le sénateur Wetston : Quoi qu’il en soit, ce qui vous préoccupe, c’est qu’on ne vous donne pas cette possibilité. Faites-vous une distinction quelconque entre les actionnaires et les membres des coopératives de crédit, et cela devrait-il amener une différence importante du point de vue du vote ou du consentement? Le cas échéant, quelle serait la différence, selon vous?
Mme Brandon-Jepp : En tant que coopératives, nous n’avons pas d’actionnaires : nous avons des membres. Nos membres sont propriétaires des coopératives de crédit. De notre point de vue, je ne crois pas que la disposition relative aux procurations s’applique nécessairement dans le contexte des coopératives.
Le sénateur Wetston : Mais les actionnaires sont aussi propriétaires.
Mme Brandon-Jepp : Oui, c’est vrai, mais c’est selon un processus légèrement différent.
Le sénateur Wetston : Vous comprenez le sens de ma question, qui visait à voir s’il y avait lieu d’appliquer des approches stratégiques différentes en raison d’un modèle de propriété différent. Vous dites que les deux modèles sont différents, mais vous n’expliquez pas pourquoi cette différence justifierait un traitement différent. C’est là où je veux en venir, car il n’y a peut-être pas de différence, au fond.
Mme Brandon-Jepp : Ce n’est pas ce que je crois.
Le sénateur C. Deacon : Merci à tous d’être ici.
En réfléchissant au fait que les demandes présentées par l’Association canadienne des coopératives financières n’ont pas toutes été acceptées par le ministère des Finances, cela m’a amené à réfléchir à certains travaux que nous avons effectués dernièrement au sujet des services bancaires ouverts et de la préparation aux relations numériques entre les banques et leurs clients. Il s’agit des banques et de leurs membres ou actionnaires effectifs. Les propriétaires. J’aimerais comprendre le processus décisionnel que vous avez suivi pour choisir d’apporter un changement plutôt qu’un autre, et ce que vous avez pris en considération dans ce processus, si possible?
Mme Tepczynska : Je ne suis pas une experte des systèmes bancaires ouverts, mais je serais ravie que mes collègues...
Le sénateur C. Deacon : Seulement en ce qui a trait aux décisions que vous venez de prendre, car cette information nous intéresse.
Mme Tepczynska : Comme je l’ai mentionné, on a annoncé dans le budget de 2019 que des propositions législatives seraient présentées pour que les lois sur les institutions financières fédérales soient conformes aux modifications apportées à la Loi canadienne sur les sociétés par actions. Cette loi est la principale loi régissant la gouvernance des sociétés par actions. Nous avons consulté les intervenants sur quatre thèmes qui ont été ajoutés dans la Loi canadienne sur les sociétés par actions et adoptés par le Parlement en mai 2018. Ces changements pourraient être présentés à une date ultérieure, mais le moment de la présentation du projet de loi dépend de l’approbation du ministre des Finances, des priorités parlementaires, du programme parlementaire et des priorités du gouvernement, bien entendu.
Le sénateur C. Deacon : Vous ne nous avez pas dit, de votre point de vue, quel était le problème pour aller de l’avant, vous avez simplement parlé de calendrier et de processus budgétaire. J’essaie de comprendre votre façon de prendre des décisions, dans le contexte de la numérisation des relations dans le secteur des services financiers. Je pense que cela a une incidence sur certains travaux auxquels nous avons participé activement et il serait utile de savoir comment vous prenez ces décisions et comment vous comptez aider nos institutions bancaires à se prévaloir des possibilités qu’offre la numérisation pour l’avenir.
Mme Tepczynska : Dans le cadre de ses processus de diligence raisonnable, le ministère consulte largement les intervenants de l’industrie afin de comprendre les répercussions des changements possibles sur le marché et la façon dont ces changements pourraient être introduits dans la loi. La Loi canadienne sur les sociétés par actions et le ministre de l’Innovation, des Sciences et du Développement économique établissent la tendance en matière de gouvernance d’entreprise, et nous tenons compte de leur orientation stratégique lorsque nous envisageons des changements à la gouvernance d’entreprise pour les institutions financières sous réglementation fédérale.
Je pense que le mécanisme de notification et d’accès dont nous avons parlé, qui tire parti des technologies modernes — il ne s’agit pas d’un système bancaire ouvert, mais cela s’appuie sur la technologie moderne —, est un point que nous étudions très attentivement. La conversation à ce sujet n’est pas terminée : même si les sociétés aimeraient pouvoir économiser du papier et réduire leurs coûts, leurs propriétaires devraient renoncer à certains droits. Nous voulons avoir une conversation plus approfondie afin de trouver une approche équilibrée.
Il faut aussi souligner que le mécanisme de notification et d’accès est un régime provincial qui s’applique aux institutions cotées en bourse. Par exemple, nos grandes banques suivent ce régime avec succès depuis quelques années. Lorsque nous parlons de différents régimes de propriété, par exemple, pour les coopératives de crédit fédérales, nous devrions établir des règles claires. Pour ce faire, nous devons étudier la question attentivement et mener des consultations.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Ma question s’adresse à Mme Brandon-Jepp. Avez-vous reçu des explications sur le refus de votre demande d’être dispensé de l’obligation d’utiliser des bulletins de vote papier? Nous sommes quand même en 2019, et les communications sur papier ne sont pas nécessairement conformes aux valeurs environnementales qui sont prêchées par le gouvernement actuel.
[Traduction]
Mme Brandon-Jepp : Oui, c’est exact. Comme je l’ai mentionné dans mon exposé, nous estimons que c’est une façon désuète de communiquer avec nos membres. À l’heure actuelle, nous devons envoyer ces relevés papier. J’aimerais préciser que ces états financiers sont les rapports de fin d’exercice de la coopérative de crédit elle-même, pas nécessairement les comptes des membres, mais nous devons les envoyer par écrit. Les sénateurs sont bien placés pour le savoir, les états financiers sont souvent longs et complexes, de sorte que l’envoi de ces avis entraîne des coûts importants, tant sur le plan environnemental que sur le plan financier. Comme coopératives de crédit, nous sommes très préoccupés par notre impact sur l’environnement et nous cherchons des façons de nous améliorer constamment. C’est un excellent exemple de point relativement facile à moderniser qui a, en outre, des répercussions sur l’environnement.
La sénatrice Duncan : Ma question s’adresse également à Mme Brandon-Jepp. D’après votre exposé, vous auriez encore d’autres recommandations à faire à l’appui de l’innovation et de la concurrence dans le secteur des services financiers.
Il serait peut-être préférable que vous nous soumettiez cette information par écrit, si vous n’y voyez pas d’inconvénient. Pourriez-vous fournir au comité ces autres recommandations qui ne sont pas incluses?
Mme Brandon-Jepp : Oui, absolument.
[Français]
La sénatrice Galvez : Je vous remercie de votre témoignage. Ma question est liée à celle du sénateur Dagenais. De nos jours, la réduction de la quantité de papier qu’on utilise est une question importante. Cependant, nous ne pouvons faire abstraction du volet qui a trait à la sécurité informatique.
À titre d’exemple, à un moment donné, les caisses Desjardins au Québec ont été perturbées par des malfaiteurs qui ont carrément copié leur site web et ont réussi à établir des contacts de tout genre avec leurs clients.
Pouvez-vous nous dire où vous en êtes en ce qui a trait à la question de la sécurité informatique?
[Traduction]
Mme Brandon-Jepp : Je vous remercie de votre question.
Je peux vous dire que les coopératives de crédit prennent la vie privée de leurs clients très au sérieux, et nous, nous sommes tout aussi déterminés à protéger celle de nos membres. Je ne saurais vous dire pour l’exemple des caisses Desjardins, car elles ne sont pas au nombre de nos affiliées, mais je peux vous dire que les coopératives qui le sont prennent la sécurité de leurs clients très au sérieux.
La disposition que nous avons proposée au sujet des relevés électroniques n’a rien à voir avec les relevés de compte de chaque client. Ces relevés ne contiendraient pas de renseignements sur nos membres. Les organisations comme nous, nous sommes tenues de fournir à nos membres nos états financiers de fin d’exercice et d’autres documents relatifs à la gestion des coopératives de crédit en format papier. À l’heure actuelle, certaines de nos coopératives les affichent également en ligne, mais la mesure nous permettrait de ne pas avoir à envoyer ces copies papier en plus, ce qui présente un grand avantage sur le plan écologique aussi bien que financier.
La sénatrice Galvez : Parmi vos clients, il y a des gens de tous les âges. Je sais que les jeunes s’y prennent admirablement bien en informatique, en votant et en faisant des transactions en ligne, mais est-il encore possible pour les personnes âgées de recevoir leurs papiers et leurs formulaires de la vieille façon?
Mme Brandon-Jepp : Il va de soi que les coopératives de crédit tiennent à renseigner leurs clients. Cela fait partie des valeurs coopératives et démocratiques qui les caractérisent. Il faudra en discuter avec le ministère des Finances et nos organismes de réglementation, mais l’inclusion de cette disposition dans le projet de loi est tout à fait logique, à mon avis.
Le président : J’ai une petite question pour vous, madame Brandon-Jepp.
Dans votre dernier paragraphe où vous parlez des activités en cours du Caucus multipartite des coopératives de crédit et de votre interaction avec lui, est-ce à titre d’information seulement, ou est-ce pour nous demander de faire quelque chose?
Mme Brandon-Jepp : C’est à titre d’information. Nous tenons à ce que le comité sache que le Caucus multipartite des coopératives de crédit a appuyé nos recommandations pour la modernisation des dispositions de la Loi sur les banques. J’essaie de faire valoir que nous avons bénéficié de l’appui de tous les partis, tout en rappelant que le gouvernement a retenu deux de nos recommandations dans le budget de 2019.
Nous comprenons que le temps est limité, d’autant plus en cette année inhabituelle avec les élections d’automne. Il y a normalement plusieurs analyses des répercussions sur les opérations, mais cette fois-ci, il n’y en aura probablement qu’une seule. Nous comprenons que le gouvernement a dû établir des priorités, mais oui.
Le président : J’en déduis que vous avez fait de votre mieux, que vous avez obtenu certains changements, que vous en êtes satisfaits, que vous allez revenir à la charge après les élections et que vous ne faites que nous tenir au courant de tout cela.
Mme Brandon-Jepp : Oui, et nous aimerions que, du fait de leur présence continue, le comité et le Sénat veillent à ce que l’on donne suite au changement sur les relevés en papier énoncé dans le budget, quel que soit le Parlement élu à l’automne.
La sénatrice Stewart Olsen : Je vous en remercie. Ma question s’adresse aux coopératives. Pour faire suite à la question de la sénatrice Galvez, je comprends que l’élimination complète du papier est une très bonne chose pour les coopératives de crédit, mais lorsque les gens s’inscrivent chez vous, envisagez-vous — comme je crois que vous devriez le faire — de fournir une copie papier si les clients ne veulent pas recevoir leurs relevés par courriel? Est-ce que vous mettriez un crochet ou une case à cocher pour les personnes âgées et les gens qui ne connaissent pas l’informatique et qui n’y ont pas facilement accès? Je me demande si vous songez à ces aspects.
Mme Brandon-Jepp : Nous serions tout à fait prêts à le faire. La grande majorité de nos clients sont des personnes âgées, et nous reconnaissons l’importance de la brique et du mortier. Comme je l’ai mentionné, nous sommes le seul fournisseur de services financiers à avoir 395 bureaux matériels. Nous tenons à rendre service aux personnes qui demeurent intéressées par cette forme de communication.
La sénatrice Stewart Olsen : Merci.
Le président : J’ai le privilège de vous remercier tous d’être ici aujourd’hui. C’était très instructif pour nous. Nous avions besoin de comprendre et nous comprenons déjà beaucoup mieux.
Le prochain groupe de témoins traitera de la sous-section B de la section 1 de la partie 4, qui porte sur les modifications à la Loi canadienne sur les paiements. Nous accueillons Julie Trepanier, directrice, Politique des paiements, du ministère des Finances du Canada; William Gibson, analyste, Politique sur les paiements; et, enfin, Anne Butler, chef des affaires juridiques et chef de la recherche et des politiques, de Paiements Canada.
Nous allons commencer par entendre le bref exposé de Finances Canada, qui sera suivi de Paiements Canada et des questions.
Vous avez la parole.
Julie Trepanier, directrice, Politique des paiements, ministère des Finances Canada : Merci, monsieur le président. La Loi canadienne sur les paiements prescrit la composition du mandat et le cadre de gouvernance de Paiements Canada. La sous-section B de la section 1 de la partie 4, apporte des modifications techniques à la Loi canadienne sur les paiements afin de permettre aux administrateurs d’être élus pour deux mandats supplémentaires de trois ans, de prolonger le mandat du président et du vice-président du conseil de deux à trois ans et d’ajouter une limite globale de six ans.
[Français]
Il assure la rémunération des membres du Comité consultatif des intervenants qui sont sujets aux règlements administratifs. Par exemple, certains membres du Comité consultatif des intervenants, comme les groupes de consommateurs, font face à des contraintes financières qui peuvent faire obstacle à leur participation. Ces modifications techniques ont été annoncées dans le budget de 2019 et font suite à un examen législatif de la Loi canadienne sur les paiements conclu par le gouvernement en février 2019.
[Traduction]
Je vais maintenant laisser la parole à Anne Butler, de Paiements Canada.
Anne Butler, chef des affaires juridiques, des politiques et de la recherche, Paiements Canada : Je vous remercie de m’avoir invitée aujourd’hui à vous faire part de mes observations sur les modifications à la Loi canadienne sur les paiements. Je m’appelle Anne Butler, et je suis chef des affaires juridiques et chef de la recherche et des politiques à Paiements Canada.
J’aimerais prendre un instant pour vous présenter brièvement Paiements Canada et son rôle dans le système financier canadien. Paiements Canada est le nom commercial de l’Association canadienne des paiements, telle que décrite dans la Loi canadienne sur les paiements, qui nous occupe aujourd’hui. Bien que Paiements Canada soit une entité méconnue de la plupart des Canadiens, elle joue un rôle essentiel dans l’économie et dans les activités quotidiennes des institutions financières et des entreprises du pays. En 2018, les systèmes de Paiements Canada ont compensé environ 8 milliards de paiements pour un total de 50 billions de dollars, soit en moyenne 210 milliards par jour.
Comme organisme d’intérêt public, Paiements Canada possède et exploite l’infrastructure de compensation et de règlement des paiements qui sous-tend l’ensemble du système financier et de l’économie du Canada, ce qui comprend les systèmes, les règles, les règlements et les normes connexes.
Nos activités sont encadrées par notre mandat et par les politiques publiques visant la sécurité, la solidité et l’efficacité du système de compensation et de règlement du Canada. Ces objectifs sont enchâssés dans la Loi canadienne sur les paiements. Notre plus grande priorité est d’agir dans l’intérêt des Canadiens en veillant à ce que les opérations financières soient effectuées en toute sécurité, en tout temps.
Le conseil d’administration de Paiements Canada est composé de cinq administrateurs membres qui représentent les principaux groupes d’institutions financières, de sept administrateurs indépendants, dont le président et le chef de la direction de Paiements Canada. Nous avons aussi deux comités consultatifs : le Comité consultatif des intervenants et le Comité consultatif des membres. Ils jouent un rôle important dans la structure de gouvernance de la société et fournissent des avis et des conseils au conseil d’administration à propos des paiements et des questions de compensation et de règlement.
Paiements Canada réalise actuellement un ambitieux chantier de modernisation afin de remplacer ses deux systèmes de compensation et de règlement actuels par trois nouveaux systèmes, qui traiteront les paiements de grande valeur, de détail par lots et de détail en temps réel pour le Canada. Ces systèmes seront appuyés par des cadres stratégiques et juridiques modernes.
Les modifications de la Loi canadienne sur les paiements proposées dans le projet de loi C-97 apportent deux changements importants à notre structure de gouvernance, à savoir une flexibilité accrue à l’égard de la durée du mandat du président et des membres du conseil d’administration, et l’ajustement des exigences relatives au Comité consultatif des intervenants. Il s’agit de changements importants et nécessaires pour améliorer la capacité de Paiements Canada à accomplir son mandat et à mener à bien son chantier de modernisation.
Premièrement, en ce qui concerne la gouvernance des conseils d’administration, Paiements Canada se distingue de plusieurs façons, notamment par la complexité de son secteur, sa loi habilitante, son cadre de surveillance, ses objectifs d’intérêt public et la portée de son mandat, comme organisme élaborant des règlements et exploitant des systèmes de paiements d’une importance critique.
Depuis 2015, toutes ses activités sont orientées par un conseil d’administration majoritairement indépendant, appuyé par le savoir-faire de ses comités consultatifs et du secteur. La complexité de notre écosystème fait en sorte que le recrutement et l’intégration des administrateurs, surtout des administrateurs indépendants, sont des facteurs décisifs pour assurer la gouvernance efficace et uniforme dont Paiements Canada a besoin pour remplir son mandat et mener à bien son chantier de modernisation.
Les limites actuelles du mandat des administrateurs font obstacle à une planification flexible de la relève. Or, cette flexibilité est nécessaire pour permettre une combinaison appropriée d’expertise et de connaissance des initiatives stratégiques pluriannuelles afin d’appuyer une solide gouvernance et une surveillance stratégique. La proposition de permettre à un administrateur de siéger au conseil pour un mandat supplémentaire de trois ans donne au conseil la souplesse nécessaire pour retenir des administrateurs expérimentés, selon le cas, afin d’appuyer la transition des connaissances aux successeurs.
Par exemple, cela permettrait à un administrateur de se joindre au conseil, d’y siéger pendant trois ans et d’être ensuite prêt à occuper le poste de président avec la possibilité de siéger pendant un ou deux mandats de plus, ce que la loi actuelle ne permet pas.
Ces modifications cadrent avec les pratiques exemplaires d’organismes semblables et viendront assouplir la planification de la relève du conseil. En effet, nous pourrons ainsi veiller à ce que le conseil rassemble toute l’expertise nécessaire, et nous aurons plus d’options pour compenser les lacunes sur ce plan lorsqu’un administrateur quitte ses fonctions prématurément ou pour assurer une certaine continuité dans la supervision des projets critiques de longue haleine.
Il y a un autre changement qui serait plutôt de nature administrative d’après moi. Il serait question de prolonger le mandat du président et du vice-président pour rendre nos processus de gouvernance plus efficaces. En faisant passer la durée maximale de leurs mandats de deux fois deux ans à deux fois trois ans, la durée coïncidera avec celle de leurs propres mandats comme administrateurs. L’option deux mandats de trois ans permet d’harmoniser la durée de sorte qu’il ne faudra pas quatre renouvellements pour qu’un président puisse siéger pendant six ans au conseil. Il s’agit essentiellement d’un changement administratif à la durée du mandat du président et du vice-président du conseil d’administration.
J’aimerais maintenant parler des dispositions relatives au Comité consultatif des intervenants. Ce conseil est un outil important pour la gouvernance de notre conseil d’administration. Nous voulons nous assurer que le Comité consultatif des intervenants conserve son fondement juridique solide et son efficacité, et qu’il pourra évoluer au même rythme que l’écosystème changeant des paiements.
Les modifications apportées à la loi réduiront les exigences relatives à ce comité de trois façons : il ne sera plus tenu de nommer un maximum de deux administrateurs; le nombre de personnes siégeant au comité ne sera plus limité à vingt, comme c’est présentement le cas; et l’interdiction de rémunérer les membres du comité sera levée pour ceux qui appartiennent à certaines catégories qui pourraient être prescrites par règlement.
Ces modifications sont les bienvenues, puisqu’elles permettront plus de flexibilité dans la représentation de notre écosystème diversifié au sein du Comité consultatif des intervenants. Plus particulièrement, la levée de l’interdiction de rémunération permettra au conseil d’administration d’attirer des représentants de groupes du secteur dont les moyens financiers moins élevés ne leur auraient autrement pas permis de se joindre au comité.
Plus précisément, le fait d’avoir une plus grande marge de manœuvre pour élaborer et appliquer une politique de rémunération transparente garantira le respect de nos règles de composition et nous permettra d’attirer la bonne expertise sur les consommateurs au sein du comité.
Une loi moins restrictive donnera donc à Paiements Canada plus de flexibilité afin d’apporter les changements nécessaires à la structure et au rôle du Comité consultatif des intervenants au fil du temps, à mesure que notre écosystème évolue. Par ailleurs, le maintien de certaines dispositions clés en lien avec le comité consultatif dans les règlements administratifs de Paiements Canada garantira un encadrement ministériel ainsi qu’un solide fondement juridique.
Enfin, j’aimerais rappeler que nous travaillons en étroite collaboration avec le ministère des Finances dans le cadre de son examen de la Loi canadienne sur les paiements et nous savons que d’autres changements pourraient être proposés. La structure du cadre de surveillance annoncée dans le budget de 2019 sera un élément clé pour offrir un accès plus large et fondé sur le risque à l’écosystème des paiements de détail du Canada.
Nous sommes impatients de travailler avec le ministère des Finances sur les futures répercussions de ce nouveau cadre pour nos membres ainsi que sur les changements législatifs qui seront nécessaires pour soutenir cette importante initiative.
Je tiens à vous remercier de nous avoir invités à témoigner au sujet des modifications apportées à la Loi canadienne sur les paiements. Je répondrai à vos questions avec plaisir.
La sénatrice Stewart Olsen : Merci de vos exposés. Je dois avouer que j'ai, en quelque sorte, parcouru la question au survol au début avant de tout relire à plusieurs reprises. J’ai commencé à me demander ce qui se passait en réalité.
La plupart des plans de modernisation réduisent notamment le nombre d’administrateurs. Je suis à peu près certaine que celui-ci a été conçu de cette façon pour qu’il y ait du roulement et pour éviter que les gens s'enracinent à ces conseils. Ce que je vois ici, c’est la création d’une bureaucratie, à mon avis. Ces personnes ont des mandats de plus en plus longs et de plus en plus de voix. Je sais que ce n’est pas ce que vous avez suggéré.
De plus, les changements permettent au Comité consultatif des intervenants d’augmenter sa taille. Je dois dire que le gouvernement libéral est un merveilleux créateur de conseils consultatifs. C’est une excellente façon d’attirer et de récompenser les gens. Alors, je fronce les sourcils quand je vois que nous allons maintenant les payer.
Qui décide qui siégera au comité consultatif? Qu’est-ce qui a motivé l’augmentation du mandat des administrateurs? D’où cela vient-il vraiment? D’où vient l’argent pour payer les membres du comité consultatif?
Mme Butler : Je vais commencer par la taille des conseils d’administration, qui a en fait diminué en 2015, pour se limiter à 13 membres. Il y en avait beaucoup plus avant. C’est à ce moment-là que le conseil majoritaire indépendant a été mis en place. Auparavant, le conseil était composé principalement de représentants des institutions financières membres, et certaines nominations étaient faites par la Couronne.
La structure du conseil est en place depuis environ quatre ans. Il n’y a pas de proposition visant à augmenter sa taille en ce moment, et elle est conforme aux tendances actuelles qui préconisent des conseils d’administration réduits.
Nous sommes nous aussi une organisation composée de membres, et donc cinq de ces sièges, ce qui est important, représentent le savoir-faire et l’expérience sectorielle de membres appartenant à des institutions financières de tailles et de composition différentes au sein du groupe. Ces trois sièges sont donc associés à des participants directs dans nos systèmes et deux à des participants indirects.
Si vous me le permettez, je voudrais passer maintenant au changement législatif qui porte sur la possibilité d’un mandat supplémentaire. C’est à la demande de Paiements Canada, de son conseil d’administration et de son équipe de gestion que ce changement a été introduit. En fait, nous avions demandé un plafond de 10 ans dans notre première proposition, bien que ce qui a été recommandé dans ce projet de loi nous satisfasse pleinement.
Ce qui a motivé ce changement c’est l’importance de pouvoir compter sur de bons administrateurs qui comprennent une entreprise très complexe, en plus du niveau d’effort qu’il a fallu déployer. L’arrivée de nouveaux administrateurs indépendants en 2015, la courbe d’apprentissage pour comprendre l’ensemble des activités et s’engager dans un programme qui est une initiative de modernisation pluriannuelle censée se terminer au-delà de 2022 est longue. Le conseil d’administration et le comité de gouvernance du conseil sont d’avis qu’il est utile d’avoir le choix si, par exemple, il y a de l’expertise dans la fonction de vérification ou de gestion du risque au niveau du conseil d’administration, quelqu’un qui a une grande expertise et qu’il serait utile de garder cet administrateur pendant trois autres années. C’est quelque chose d’assez souhaitable pour le conseil du point de vue de la gouvernance.
L’autre option que je vous ai donnée concernait la possibilité de nommer les membres du conseil d’administration et de leur accorder suffisamment de temps pour être un président très efficace. C’est ce qui ressort du Comité de gouvernance de Paiements Canada et de son conseil d’administration lui-même. La mesure est largement appuyée par notre Comité consultatif des membres, qui est un conseil de 20 personnes représentant nos membres, et par notre Comité consultatif des intervenants, qui représente les utilisateurs des systèmes de paiement, c’est-à-dire les consommateurs, les entreprises et les fournisseurs de services de paiement.
La sénatrice Stewart Olsen : Qui paie?
Mme Butler : Qui paie? Notre budget est entièrement financé par les institutions membres.
Si l’on décidait, par exemple, de parler du paiement du Comité consultatif des intervenants, un comité visé par la loi depuis des décennies. Il s’agit d’un outil stratégique important pour faire en sorte que la voix des utilisateurs des systèmes de paiement soit entendue pendant que nous examinons les règles, les règlements administratifs et les changements qui auraient une incidence sur les utilisateurs.
Le paiement d’un représentant individuel au sein de ce comité est une recommandation de l’équipe de gestion et du conseil d’administration de Paiements Canada. L’un des plus grands défis que nous avons à relever pour obtenir un groupe représentatif au sein du Comité consultatif des intervenants est la représentation des consommateurs.
La sénatrice Stewart Olsen : Je peux comprendre pourquoi, je veux simplement savoir qui paie. Alors, qui paie?
Mme Butler : Paiements Canada émettrait le chèque ou paierait par voie électronique, mais le financement provient des institutions financières membres au Canada.
La sénatrice Stewart Olsen : Merci.
La sénatrice Wallin : Je le répète, il ne s’agit pas directement de l’argent du contribuable?
Mme Butler : Ce n’est pas l’argent du contribuable.
La sénatrice Wallin : Un conseil d’administration de 13 personnes, c’est gros, mais si l’on en a décidé ainsi... Pour m’assurer d’avoir bien compris, il n’y a pas de limite au nombre de membres qui peuvent participer aux comités consultatifs?
Mme Butler : Actuellement, en vertu de la loi, il y a une limite de 20 membres. Ce qui est proposé, c’est que la limite soit supprimée et fixée par règlement plutôt que dans la loi.
La sénatrice Wallin : Il y aurait une limite à un moment donné?
Mme Butler : Il s’agirait de l’incorporer aux règlements administratifs, oui.
La sénatrice Wallin : Vous avez également dit que, dans le cadre de votre initiative de modernisation, vous entendez redéfinir les exigences relatives au comité consultatif, c’est-à-dire le degré d’autorité qui lui sera accordé. Pouvez-vous me dire ce que cela signifie?
Mme Butler : Par exemple, la loi actuelle exige que deux administrateurs soient nommés au comité consultatif, de sorte que deux des sièges sont occupés par des membres du conseil d’administration. On veut s’assurer qu’à l’avenir, on disposera d’un outil plus souple, comme un règlement administratif, pour régir le type de représentation qui devrait siéger au Comité consultatif des intervenants.
Cela s’explique notamment par le fait que les services, la technologie et les produits de paiement qui sont offerts aux consommateurs évoluent rapidement. Un règlement administratif est un outil plus souple pour réagir à l’évolution de la situation et ajuster la composition du comité au fil du temps afin qu’il y ait une vaste représentation de non-membres de l’écosystème des paiements, c’est-à-dire d’institutions non financières.
La sénatrice Wallin : Il s’agirait d’une décision prise par le conseil d’administration au moyen d’un règlement administratif?
Mme Butler : Les règlements administratifs de l’organisme sont soumis aux conseils d’administration, puis au ministère des Finances pour obtenir l’approbation du ministre. Ils seraient soumis à l’examen des structures réglementaires.
La sénatrice Wallin : Excusez-moi, mais à ce moment-là, le conseil d’administration pourrait se contenter de dire qu’il veut 30 membres, dont 10 personnes du secteur et 5 d’ailleurs. Doit-il justifier ses choix à ce niveau?
Mme Trepanier : Ce n’est qu’un scénario, mais pour les règlements administratifs, nous communiquons systématiquement avec Paiements Canada et Finances Canada pour justifier la proposition et la soumettre à l’approbation du ministre.
La sénatrice Wallin : Mais une fois que le règlement est en place, tout cela devient très subjectif, n’est-ce pas?
Mme Trepanier : Les règlements sont publiés à l’avance dans la Gazette du Canada pour commentaires.
La sénatrice Wallin : Les règlements ne disent pas qu’il faut cinq représentants des coopératives de crédit, six représentants de la collectivité en général et un représentant du conseil ou de la commission scolaire. Il ne s’agirait pas de décrire la composition avec autant de détail, alors le pouvoir discrétionnaire appartiendrait en fait au président du conseil ou au conseil d’administration? J’essaie simplement de comprendre.
William Gibson, analyste, Politique des paiements, ministère des Finances Canada : À l’heure actuelle, il y a un minimum établi pour certains groupes d’intervenants au sein du comité afin d’assurer une représentation adéquate de ces groupes, mais c’est uniquement pour conserver la souplesse nécessaire et pouvoir s’adapter au besoin.
La sénatrice Wallin : D’accord. Je vais simplement faire une petite coche à côté de cette question, mais allez-y.
Le sénateur Wetston : Je crois comprendre pourquoi vous faites ces changements en ce qui a trait à la gouvernance. Je soupçonne que c’est pour essayer de rester au diapason des évolutions à Paiements Canada. Je m’intéresse à ce qui est en train de changer à Paiements Canada et peut-être aussi — et je sais que c’est un peu hors sujet — à la façon dont se déroule le programme de modernisation.
Mme Butler : C’est une excellente question et une occasion de parler du programme de modernisation.
Qu’est-ce qui change à Paiements Canada? Comme je l’ai dit, une initiative de modernisation pluriannuelle est en cours. La première mesure, la plus importante, consiste à remplacer le Système de transfert de paiements de grande valeur. J’ai d’ailleurs le plaisir de vous annoncer que nous avons récemment signé une entente avec des fournisseurs de technologie pour le remplacement de cette plateforme par une nouvelle technologie, ce qui devrait se matérialiser en 2021.
C’est un très grand changement. Toutes les institutions financières du pays, par l’entremise des participants directs, sont reliées à ce système. C’est la façon dont l’argent est transféré chaque jour entre les institutions financières du pays et entre ces institutions et la Banque du Canada. C’est un système extrêmement important et toutes nos institutions membres sont prêtes à travailler ensemble pour apporter ce changement. C’est un grand changement.
Le deuxième grand pilier de notre initiative de modernisation consiste à appuyer et à mettre en œuvre un système de paiement en temps réel au Canada, c’est-à-dire un système plus rapide qui permettra le règlement définitif des paiements en temps réel. C’est un projet qui est toujours en cours. Les plans d’exécution ne sont pas encore déterminés, mais c’est un élément très important. Certains aspects dont j’ai parlé aujourd’hui sont essentiels à l’établissement de ce cadre, y compris ce qui va se passer avec le cadre de surveillance des paiements de détail, qui est également à l’ordre du jour du gouvernement.
À mesure que nous allons de l’avant avec les paiements en temps réel au Canada et la réglementation prévue visant d’autres intervenants dans l’écosystème des paiements, nous nous attendons à des changements au niveau des adhésions à Paiements Canada, car il s’agira d’accueillir d’autres catégories de participants autres que les institutions financières, des fournisseurs de services de paiement, par exemple. Il s’agit d’un pilier important de notre modernisation.
Le troisième élément est le système de paiement par lots au Canada, qui s’occupe des systèmes automatisés de transfert de fonds et d’aspects comme le système de débit et toutes les transactions par échange de données informatisées ou par dépôt électronique. Ils sont tous compensés et réglés par ce système, qui sera modernisé dans le cadre de ce programme. Il a en fait déjà subi d’importants changements de règles qui ont permis d’assurer une plus grande sécurité et une plus grande solidité à cet égard, de sorte que les transactions sont maintenant garanties par la Banque du Canada.
Ce sont les trois grands piliers et le point où ils en sont, sénateur.
Le sénateur Tkachuk : Je tiens à vous féliciter. Je pense que nous avons l’un des meilleurs systèmes de compensation au monde. Il suffit de se rendre au sud de la frontière pour constater à quel point nous sommes bons.
Nous sommes télédiffusés, et il y a peut-être des téléspectateurs qui ne savent pas trop de quoi nous parlons. Lorsque vous parlez d’« intervenants », pourriez-vous nous dire qui sont ces intervenants? J’aurai ensuite quelques questions à poser.
M. Gibson : En ce qui concerne ceux qui font partie du Comité consultatif des intervenants et qui sont désignés en fonction des besoins de représentation, il s’agit de fournisseurs de services de paiement et de groupes de consommateurs.
Le sénateur Tkachuk : Qui sont-ils? Qui sont les fournisseurs de services de paiement?
M. Gibson : Ce sont les entités qui effectuent les paiements compensés, par exemple, les réseaux de cartes de paiement. Visa et MasterCard sont des exemples de fournisseurs de services de paiement.
Le sénateur Tkachuk : À la page 5, vous parlez des changements au comité et au conseil d’administration. C’est probablement une très bonne idée de l’intégrer aux règlements administratifs. Il serait plus facile de manipuler ce que vous avez à faire. Par contre, vous dites ici : « [...] attirer des représentants de groupes du secteur dont les moyens financiers moins élevés ne leur auraient autrement pas permis de s’y joindre ». De qui s’agit-il?
Mme Butler : Je peux vous donner un exemple concret des difficultés que nous avons eues avec le Comité consultatif des intervenants au cours des dernières années. À l’heure actuelle, selon les exigences, deux représentants des consommateurs en font obligatoirement partie. C’est un engagement important que de faire partie du comité consultatif. Il est très difficile de trouver des représentants des consommateurs capables de consacrer le temps nécessaire pour siéger, car ils n’en ont pas les moyens.
C’est la principale raison pour laquelle nous avons présenté notre demande au ministère. C’est cette marge de manœuvre que recherche le projet de loi. Il est certain que les consommateurs représentent un défi pour nous. Nous en aurons sans doute d’autres à l’avenir, mais c’est notre principal souci en ce moment.
Le sénateur Tkachuk : Comment les trouvez-vous? Est-ce que ce sont des groupes de consommateurs que vous allez voir, ou est-ce que vous les choisissez au hasard?
Mme Butler : Il y a des groupes de consommateurs.
Le sénateur Tkachuk : Comme qui?
Mme Butler : Le Conseil des consommateurs du Canada, par exemple.
Le sénateur Tkachuk : Ces gens n’ont peut-être pas l’argent ni le temps, ou est-ce un mélange des deux?
Mme Butler : Probablement un mélange des deux, oui.
Le sénateur Tkachuk : Lorsque vous parlez des nominations de deux et trois ans, pour celles de deux ans, le conseil ne peut-il pas simplement se renouveler? Qui le suggère? Est-ce que vous n’avez droit qu’à deux ans, puis les personnes partent et il faut constituer un nouveau groupe, ou pouvez-vous renouveler les mandats au bout de deux et trois ans? Comment ça se passe-t-il en ce moment?
Mme Butler : Nous parlons des nominations au poste de président et de vice-président.
Le sénateur Tkachuk : Vous avez dit que les administrateurs sont nommés pour deux ans.
Mme Butler : Les administrateurs sont nommés pour trois ans et peuvent être reconduits pour un deuxième mandat. Ce qui est proposé dans le projet de loi, c’est la possibilité d’un troisième mandat, si c’est jugé souhaitable.
Pour les présidents, il s’agit tout simplement d’essayer d’harmoniser leur mandat. Ils pourraient être nommés pour un mandat de président coïncidant avec leur mandat d’administrateur pour éviter de devoir le renouveler à plusieurs reprises.
Le sénateur Tkachuk : En est-il de même pour les membres du conseil que pour ceux du comité consultatif? Est-ce qu’ils sont des fournisseurs de services, de sorte que vous auriez un représentant de Visa, par exemple? Qui ferait partie du conseil d’administration?
Mme Butler : Sept membres de notre conseil d’administration sont indépendants et choisis parmi le bassin des candidats à la direction, c’est-à-dire des gens en mesure d’apporter une expérience précieuse pour l’organisme et qui répondent aux critères d’indépendance rigoureux énoncés dans les règlements administratifs et le règlement pris en vertu de la Loi canadienne sur les paiements.
Le sénateur Tkachuk : Qui les nomme?
Mme Butler : Ils sont élus par les membres.
Le sénateur Tkachuk : Bon. Merci beaucoup.
Le sénateur C. Deacon : Merci beaucoup à nos témoins.
J’aimerais avoir une meilleure idée de la façon dont votre organisme évolue. Je pense que nous ressentons tous les changements qui se produisent autour de nous. Je regardais les données montrant que l’utilisation des chèques et du papier diminue chaque année de manière inversement proportionnelle à l’augmentation des transferts électroniques et numériques. C’est logique. Je suppose que cela doit changer. Cette nouvelle donne est-elle en train de changer votre structure de coûts par transaction?
Mme Butler : Oui, la structure va inévitablement changer au fil du temps. Avec la mise en œuvre du nouveau système de paiement que nous prévoyons, il pourrait y avoir une migration des flux de paiements du système automatisé de compensation et de règlement actuel vers le système de paiement en temps réel. Il y aurait aussi des changements dans la structure des coûts, au fil du temps.
Le sénateur C. Deacon : Nous assisterons probablement à une accélération de ce changement. Vous avez mentionné que vos coûts sont assumés par les organisations membres, qui sont principalement des banques à charte, je suppose?
Mme Butler : Oui, il y a des banques et d’autres institutions financières qui peuvent être membres.
Le sénateur C. Deacon : Passeront-elles à leur tour la facture aux consommateurs?
Mme Butler : Il est certain que les banques chercheraient à recouvrer leurs coûts en structurant autrement les barèmes qu’elles utilisent pour fixer le prix de leurs produits.
Le sénateur C. Deacon : J’aimerais savoir comment votre structure de gouvernance tient compte de la façon dont vous établissez les prix à mesure que vous avancez. Ces organisations, peut-être de nouveaux venus sur le marché, qui arrivent avec des coûts beaucoup moins élevés que ce que leurs membres et leur volume pourraient engager à Paiements Canada.
Comment pouvons-nous avoir l’assurance que les administrateurs et les membres du comité consultatif apprécieront et préconiseront un système de tarification aussi transparent que possible, qui récompense vraiment les organisations financières particulièrement rentables avec des prix différents de ceux des organisations qui tardent à instituer des changements ou à les encourager parmi leur clientèle?
Mme Butler : Il importe de fixer des prix pour pouvoir répondre de notre efficacité, comme nous sommes tenus de le faire en vertu de la loi, et montrer que nous songeons à la rentabilité dans tout ce que nous faisons.
Le coût de la mise au point des nouveaux systèmes est en fait évalué de façon à permettre aux participants au nouveau système de financer les moyens de l’instituer, ce qui devrait être encouragé. C’est le genre d’approche de tarification dont vous parliez. Cela fait partie de la mise en place de systèmes plus modernes et plus efficaces et permet une réduction des prix au fil du temps, par rapport aux coûts pour ces membres.
Le sénateur C. Deacon : Parlez-moi de choses concrètes, je vous en prie, car il me semble que vous ne faites qu’essayer d’encourager les organisations membres à devenir de plus en plus rentables, comme vous. Comment pouvez-vous nous garantir que la composition du conseil d’administration reflétera le leadership des organisations qui font preuve de l’approche la plus axée sur le client pour offrir des services bancaires efficaces et efficients partout au pays et maintenir l’excellente réputation dont le sénateur Tkachuk a parlé, ainsi que les excellents résultats dont nous pouvons être fiers au Canada?
À mesure que nous allons de l’avant, je songe à faire en sorte que les nouveaux venus perturbateurs aient la possibilité de faire partie de votre organisme ou d’accéder à vos services d’une manière qui profite aux Canadiens et, peut-être, à l’échelle mondiale, afin que nous ayons des membres du conseil d’administration qui entrent dans le système sans chercher à protéger le statu quo, mais qui incitent l’organisme et le secteur bancaire à continuer de s’améliorer. Vous êtes au cœur de tout cela. Vous occupez une place unique dans notre système bancaire.
Mme Butler : Oui, c’est une période vraiment passionnante pour notre organisme. Il y a un comité de gouvernance et de nomination du conseil d’administration, qui est l’une des exigences enchâssées en 2015. Si vous regardez la composition actuelle de notre conseil d’administration, par exemple, vous constaterez que l’expérience du secteur de la technologie est présente, même parmi les membres et administrateurs indépendants. Pour ne citer qu’un exemple, vous verrez aussi que l’un de nos administrateurs travaille pour une institution financière sans succursales en brique et mortier.
Il y aura toujours un roulement dans la répartition des cinq sièges d’administrateur, mais vous verrez déjà des preuves que le conseil d’administration et nous-mêmes en tenons compte et que nous examinons les compétences des administrateurs et les connaissances nécessaires. Je m’attendrais à ce que le comité de gouvernance et le conseil continuent d’adopter cette approche.
Pour répondre à votre deuxième question sur l’avenir, j’ai signalé certains des changements prévus qui suivront. Je m’attends à ce que moi ou quelqu’un d’autre se retrouve ici prochainement pour parler des changements futurs à notre législation qui sont étroitement liés au régime de surveillance des paiements de détail que le ministère des Finances prévoit.
C’est aussi lié de près à l’initiative de modernisation que nous appelons le système de paiement en temps réel et qui devrait selon toute attente faciliter l’accès à nos systèmes à l’avenir, lorsque de nouveaux participants seront autorisés à devenir membres. À l’heure actuelle, en vertu de notre loi, nos membres sont limités à des institutions financières assujetties à la réglementation prudentielle. Nous nous attendons à ce que, à l’avenir, le cadre de surveillance de la vente au détail ouvrira l’accès à nos systèmes et notre gouvernance devra probablement être modifiée de nouveau en conséquence.
Toutefois, c’est aussi l’une des raisons pour lesquelles on demande plus de souplesse au sein du Comité consultatif des intervenants, puisque, avec le temps, l’identité de ceux qui pourront devenir membres et intervenants peut changer. Certains fournisseurs de services de paiement pourraient faire la queue pour devenir membres dans une autre version de cette loi, et la composition de notre Comité consultatif des intervenants changerait probablement pour refléter un plus grand nombre d’utilisateurs et de fournisseurs de services au fil du temps.
C’est une occasion très importante pour l’écosystème, une occasion de mettre en place de nouvelles technologies et de nouvelles conditions d’accès pour que tout cela puisse se produire à l’avenir.
Le président : Je rappelle aux sénateurs que nous avons dépassé le temps alloué à ce groupe de témoins et qu’il s’agira donc d’être aussi succinct que possible.
[Français]
La sénatrice Galvez : Merci beaucoup de vos témoignages et de vos réponses. Je vais moi aussi revenir un peu aux questions qui ont été soulevées par mes collègues. J’essaie d’arrimer la question de la modernisation que vous avez décrite à ces trois parties, qui indiquent assurément que la préoccupation est d’accélérer et de rendre les transactions plus rapides et d’utiliser la modernisation dans l’informatique. J’essaie donc d’arrimer cette modernisation qui a lieu actuellement au besoin de rendre la gouvernance encore plus rigide par le fait d’augmenter le temps et le nombre de directeurs.
[Traduction]
Le comité aurait tout avantage à entendre certains des directeurs. Je pense qu’il serait intéressant de les interroger au sujet de la modernisation en cours.
Comment pouvez-vous vouloir prolonger le mandat de ces administrateurs alors que vous dites que les choses changent si rapidement et que cette modernisation porte surtout sur l’informatique, c’est-à-dire les logiciels et en ligne. Comment le justifiez-vous? Je suis curieuse de savoir quel est le salaire d’un de ces administrateurs.
Mme Butler : Tout d’abord, je vais répondre à la question de savoir pourquoi il devrait y avoir des mandats plus longs, étant donné le rythme du changement. Pour notre conseil d’administration, il ne s’agit pas de chercher à ce que l’on retienne systématiquement le poste de président pendant neuf ans, mais les pratiques exemplaires en matière de gouvernance prévoient habituellement une certaine marge de manœuvre, par exemple, pour permettre à un administrateur de rester pendant une période supplémentaire lorsque nous instituons un mode de paiement d’importance systémique pour le Canada. Les administrateurs qui occupent les sièges pendant cette période de transition et leur continuité peuvent être utiles pour superviser la gestion et travailler avec les industries dans le cadre d’un changement aussi important. Il faut que tout le secteur se mette d’accord pour passer d’un seul coup au nouveau système. C’est un exemple de situation où il importe d’avoir la souplesse nécessaire pour assurer la continuité — par exemple, il peut s’agir d’un administrateur particulièrement fort dans le domaine de la gestion du risque ou de la vérification — et garder le président pour une période supplémentaire en attendant la formation ou nomination de son successeur. C’est ce genre de souplesse que l’on cherche à obtenir avec la prolongation du délai.
La sénatrice Marshall : Le conseil relève du ministre des Finances, n’est-ce pas?
Mme Butler : Le conseil est un conseil d’administration majoritairement indépendant. Il a des comptes à rendre au ministre des Finances, et nous devons publier chaque année un plan qui est approuvé par le ministre des Finances.
La sénatrice Marshall : Les membres du conseil sont-ils nommés par le gouverneur en conseil?
Mme Butler : Non, ils ne sont pas nommés par le gouverneur en conseil.
La sénatrice Marshall : Qui les nomme?
Mme Butler : Ils sont élus par les membres. Tous les administrateurs sont élus par les membres de l’organisation. Il s’agit d’une organisation associative, et non d’une société d’État.
La sénatrice Marshall : Le Comité consultatif des intervenants relève du conseil.
Mme Butler : Il joue un rôle consultatif auprès du conseil ou fait rapport au conseil, oui.
La sénatrice Marshall : Mais les membres du comité consultatif sont nommés par le conseil en consultation avec le ministre.
Mme Butler : C’est exact.
La sénatrice Marshall : Si le ministre ne participe pas à la nomination des membres du conseil, pourquoi participerait-il à celle des membres du Conseil consultatif des intervenants? Cela semble étrange.
Mme Butler : Je suis heureuse de vous donner mon opinion à ce sujet, mais je suis consciente que c’est peut-être le domaine de Mme Trepanier. Selon mon interprétation, le Comité consultatif des intervenants a joué un rôle important d’instrument de politique publique pendant de nombreuses années pour le ministre des Finances, ainsi que pour une organisation qui était contrôlée par ses membres depuis longtemps, afin que la voix des intervenants soit entendue dans le processus de décision de l’organisation. Ce rôle s’est maintenu par suite des changements apportés à la structure de gouvernance, pour la même raison.
La sénatrice Marshall : Les membres du Comité consultatif des intervenants sont-ils nommés par le gouverneur en conseil?
Mme Butler : Non, ils ne sont pas nommés par le gouverneur en conseil.
La sénatrice Marshall : C’est une structure hiérarchique très particulière.
Le sénateur Wetston : Quelle est la valeur quotidienne moyenne des transferts du Système de transfert de paiements de grande valeur au Canada à l’heure actuelle?
Mme Butler : Vous me prenez au dépourvu et j’ai bien peur de ne pas pouvoir vous fournir ces chiffres.
Le sénateur Wetston : À peu près?
Mme Butler : Je n’ai que les chiffres combinés du SACR et du STPGV. Au quotidien, cela fait 210 milliards de dollars.
Le sénateur Wetston : Le STPGV représente la part la plus importante?
Mme Butler : C’est exact.
Le sénateur C. Deacon : Par simple curiosité, quelles sont les possibilités pour cette organisation d’exporter son expertise dans d’autres pays et de l’utiliser comme base d’un système de compensation et d’un système financier dans d’autres endroits ou administrations?
Mme Butler : Vous voulez dire la technologie?
Le sénateur C. Deacon : Oui.
Mme Butler : En plus de nous occuper de technologie, nous jouons aussi un rôle au chapitre des politiques, des règles et des normes. C’est un aspect clé de nos activités, mis à part la technologie. Nous le faisons déjà en collaboration avec des organisations internationales partout dans le monde. Cela fait déjà partie de nos activités.
Il ne faut pas laisser de côté le potentiel de la technologie, mais ce n’est pas la priorité pour nous. Pour le Système de transfert de paiements de grande valeur, nous utilisons en fait le premier fournisseur de technologie dans ce domaine. Nous utilisons cette technologie parce qu’elle est la meilleure de sa catégorie pour ce genre de système.
Le sénateur C. Deacon : Il s’agit vraiment d’une entreprise entièrement nationale.
Mme Butler : C’est le cas. Nous sommes une entreprise de service pour le système financier.
Le président : Merci beaucoup aux témoins de s’être déplacés. Je pense que nous en avons appris plus que nous ne le pensions, et je soupçonne que vous avez eu l’impression que votre participation a été un peu plus longue que prévu. Nous sommes heureux d’avoir réussi à éclaircir cette question, que nous comprenons tous beaucoup mieux maintenant, je crois.
Honorables sénateurs, ce groupe de témoins traitera de la sous-section A de la section 2 de la partie 4 de la Loi canadienne sur les sociétés par actions.
Nous souhaitons la bienvenue à Mark Schaan, directeur général, Direction générale des politiques-cadres du marché; Darryl Patterson, directeur, Direction de l’entreprise, de la concurrence et de l’insolvabilité, Direction générale des politiques-cadres du marché; et, enfin, Ian Disend, analyste principal de politiques, Direction générale des politiques-cadres du marché, Innovation, Sciences et Développement économique Canada.
Monsieur Schaan, vous avez la parole.
[Français]
Mark Schaan, directeur général, Direction générale des politiques-cadres du marché, Innovation, Sciences et Développement économique Canada : Merci, monsieur le président. Je vais commencer avec un peu de contexte. En décembre 2017, les ministres des Finances des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont conclu un accord de principe conformément auquel ils apporteraient, comme première étape, des modifications à leurs lois portant sur les sociétés en vue d’imposer à ces dernières l’obligation de détenir des renseignements précis et à jour sur leurs propriétaires effectifs. Le budget de 2018 a rendu officiel le rôle du gouvernement fédéral dans la mise en œuvre de ce plan et des modifications à la Loi canadienne sur les sociétés par actions (LCSA) ont été apportées par l’intermédiaire de la loi d’exécution du budget — le projet de loi C-86 — le 13 décembre 2018 pour imposer aux sociétés privées constituées en vertu de la LCSA l’exigence de tenir des registres de renseignements sur les personnes qui les contrôlent, définies dans la LCSA comme étant des « particuliers ayant un contrôle important », ou PCI, par exemple, les propriétaires effectifs.
[Traduction]
Cette modification à la loi s’appuie sur une modification que nous avons apportée dans le budget de 2018 et vise à préciser qui pourrait avoir accès à cette information, à titre de première mesure en vue de nous conformer à nos obligations de permettre l’accès aux autorités compétentes.
Les modifications précisent essentiellement qu’à la demande d’un organisme d’enquête déterminé, il sera exigé de la société qu’elle tienne un registre et qu’elle fournisse une copie du registre ou des renseignements qui en découlent de la manière demandée, dès que possible après qu’une demande a été faite.
Cet amendement précise en outre les organismes d’enquête en question, c’est-à-dire les forces policières et les autorités fiscales, et nous avons établi un certain nombre de mesures de protection à cet égard.
Tout d’abord, nous nous sommes assurés d’avoir indiqué que l’organisme d’enquête ne peut faire une telle demande que s’il y a des motifs raisonnables de soupçonner que l’information serait pertinente dans le cadre d’une enquête sur l’une des infractions énumérées à l’annexe. Il s’agit de l’annexe relative au blanchiment d’argent, au financement des activités terroristes et à l’évasion fiscale, conformément à la nature de la loi.
Nous avons également indiqué que les organismes d’enquête doivent consigner les circonstances entourant chaque demande dans des registres et qu’ils doivent présenter un rapport annuel au directeur de Corporations Canada sur la manière dont ils ont exercé le pouvoir qui leur est conféré.
Nous croyons que ces mesures de protection permettront aux autorités compétentes d’accéder plus facilement au registre des propriétaires effectifs ayant un contrôle important, tout en veillant à ce que les investisseurs légitimes n’utilisent pas cet outil de façon indue pour obtenir de l’information sur la propriété ou avoir accès à cette information inutilement.
C’est la disposition dont vous êtes saisis aujourd’hui. Nous serons heureux de répondre à vos questions.
La sénatrice Stewart Olsen : Merci d’être venus. Cela émane-t-il du commissaire à la protection de la vie privée, et quel était son avis à ce sujet?
M. Schaan : Il y a eu des discussions sur le caractère confidentiel de ces renseignements. On nous a dit que l’information sur le contrôle par les propriétaires est de l’information administrative qui est considérée comme étant dans l’intérêt du gouvernement, sous réserve du mode d’administration des sociétés, et qu’il est bon qu’elle soit rendue publique.
La sénatrice Stewart Olsen : Est-ce que le commissaire à la protection de la vie privée en a pris connaissance?
M. Schaan : Oui.
La sénatrice Stewart Olsen : Et il est d’accord?
M. Schaan : Oui. Le commissaire à la protection de la vie privée a toujours la capacité de réexaminer les lois, mais, selon notre évaluation initiale, il n’y a pas de problème avec celle-ci en particulier.
La sénatrice Stewart Olsen : Même si l’Agence du revenu du Canada peut avoir accès à cette information?
M. Schaan : De toute évidence, l’ARC dispose déjà de l’information dans les déclarations de revenus des sociétés. Il s’agit simplement d’un pouvoir supplémentaire permettant de connaître le propriétaire effectif des actions.
La sénatrice Stewart Olsen : Merci.
Le président : Ce sont là des questions très intéressantes.
La sénatrice Wallin : Nous devrions revenir à ce point rapidement, car nous savons que l’ARC a accès aux renseignements fiscaux et tout cela. Cela diffère de la question de l’accès à des renseignements recueillis pour des motifs raisonnables.
M. Schaan : Non. Ce qu’il est important de noter ici, c’est que la Loi canadienne sur les sociétés par actions oblige déjà les sociétés à tenir un registre de leurs actionnaires. Cette information a toujours été à la disposition des autres actionnaires, du directeur de Corporations Canada et des forces de l’ordre détenant un mandat.
Ce que nous voulions en vertu des modifications apportées à la Loi canadienne sur les sociétés par actions dans le cadre du budget de 2018, c’est que les sociétés fassent des efforts raisonnables pour trouver le propriétaire effectif des actions et rendre cette information accessible. Lorsqu’il y a un soupçon raisonnable de lien avec une sanction ou une enquête particulière liée à l’application de la loi, les responsables pourront avoir accès à ce registre de propriétaires effectifs ayant un contrôle important, dans lequel il est simplement indiqué que ces personnes sont inscrites comme étant les propriétaires ultimes dans les faits.
La sénatrice Wallin : Qu’est-ce qui les inciterait à le faire?
M. Schaan : Une infraction soupçonnée liée au blanchiment d’argent, au financement d’activités terroristes ou à l’évasion fiscale.
La sénatrice Wallin : Ou une indication figurant dans les données auxquelles ils avaient accès?
M. Schaan : Non, ils ne peuvent pas avoir accès à l’information tant qu’ils n’ont pas de soupçon raisonnable.
La sénatrice Wallin : Une compilation de chiffres, qui permettrait de dire simplement : « Nous avons eu 200 enquêtes cette année », les simples chiffres bruts servant à déterminer s’il y a eu surutilisation ou sous-utilisation du système?
M. Schaan : Les organismes d’enquête doivent tenir des registres lorsqu’ils utilisent leur pouvoir de présenter des demandes, registres dans lesquels figurent le nom de la société, les motifs raisonnables sur lesquels se fonde la demande, l’objet de la demande, la date de la demande et la manière dont elle a été signifiée, tout renseignement fourni en réponse à la demande et tout renseignement réglementaire. Les organismes d’enquête doivent présenter un rapport annuel au directeur de Corporations Canada sur l’utilisation qu’ils ont faite de ce pouvoir globalement, c’est-à-dire le nombre de demandes ventilé par province et territoire, et dans le cas de la GRC ou de l’ARC.
La sénatrice Wallin : Mais pas par sujet?
M. Schaan : Pas par sujet.
La sénatrice Wallin : Merci.
Le sénateur Wetston : Je comprends ce que vous pensez au sujet de ce que nous faisons ici, puisque nous avons travaillé sur le projet de loi C-25 lorsque ces dispositions originales ont été imposées, mais il faut faire une distinction entre cela et les sociétés cotées en bourse.
Dans ce cas, il est vraiment question des entreprises privées. Cela s’applique aux sociétés ouvertes, possiblement pour des raisons différentes, seulement parce qu’au-delà de 10 p. 100, une divulgation doit être faite, et nous le savons. Cela vise vraiment les entreprises privées et s’inscrit dans la lignée de ce qui a été fait dans le projet de loi C-25. Est-ce exact?
M. Schaan : En fait, ces modifications ne figuraient pas dans le projet de loi C-25. Elles figuraient dans la Loi no 2 d’exécution du budget de 2018, le projet de loi C-86.
Le sénateur Wetston : C’était dans le budget.
M. Schaan : C’est exact. Cela ne s’applique qu’aux sociétés privées parce que, comme vous l’avez dit, les sociétés cotées en bourse sont assujetties à d’autres règles. Il vaut la peine de souligner que cela est calqué sur les obligations de toutes ces entreprises envers le CANAFE. C’est une mesure supplémentaire qui s’ajoute. Les sociétés sont déjà tenues de fournir à l’institution financière avec laquelle elles font affaire, si celle-ci est réglementée par le CANAFE, les renseignements concernant leurs propriétaires effectifs.
Nous créons simplement un mécanisme grâce auquel ces sociétés peuvent avoir des exemples de la façon de conserver ces renseignements, parce qu’à l’heure actuelle, il n’y en a pas nécessairement dans le cadre du CANAFE. De plus, pour celles qui ne font pas affaire avec des banques au Canada, ce qui se conçoit bien dans le cadre d’une loi visant à mettre fin au blanchiment d’argent, au financement des activités terroristes et à l’évasion fiscale, il serait justifié de permettre aux autorités compétentes d’avoir accès aux renseignements concernant des organisations qui sont constituées en société et qui ne font pas affaire avec des banques au Canada.
Le sénateur Wetston : Une façon de régler ce problème — je peux évidemment en voir l’utilité de cela, surtout aux fins de l’application de la loi — serait de faire ce qu’ils ont fait au Royaume-Uni. Pourquoi ne pas simplement avoir un registre public, monsieur Schaan?
M. Schaan : Comme nous l’avons fait remarquer lorsque nous avons comparu devant le comité au sujet de la partie 1 — nous considérons qu’il s’agit de la partie 1.5 —, nous procédons de concert avec les provinces et les territoires. Au Canada, la constitution en société est un choix. Ce n’est pas vraiment déterminé par le secteur ou toute autre limite. Tant et aussi longtemps qu’il y aura une incohérence dans les règlements entre nous et d’autres organismes chargés des entreprises constituées en société, nous devrons agir de concert lorsque nous essayons d’établir des normes minimales. Ce que les ministres des Finances des provinces, des territoires et du gouvernement fédéral ont réussi à obtenir découle d’une démarche en deux étapes.
Premièrement, demandons-leur de conserver l’information. Deuxièmement, prévoyons dans la loi un accès pour les autorités compétentes. Nous avons eu des indications très claires que si les sociétés ne sont assujetties qu’à un mandat, celles qui ont des intentions malveillantes ont tout le loisir de prendre connaissance de ce qui s’en vient, du fait même de l’existence de ce mandat. Cela donne aux autorités compétentes un accès, lorsqu’elles ont des motifs d’avoir des soupçons et qu’une enquête est probable.
La deuxième étape consiste à travailler avec les provinces et les territoires et à leur dire : « D’accord, qu’allons-nous faire ensuite? Devrions-nous avoir une sorte de registre central de toute cette information liée au contrôle important? Qui devrait le conserver? Devrait-il être lié aux registres des sociétés ou devrait-il être distinct? Et qui devrait y avoir accès? »
Le sénateur Wetston : Je n’ai qu’un commentaire à ajouter, à savoir que si cela devait se produire, il s’agirait d’une façon beaucoup plus rapide de suivre l’argent.
M. Schaan : C’est vrai, et dans les consultations que nous avons eues, nous nous sommes surtout concentrés sur la partie 1 et la partie 1.5, mais les gens s’inquiètent beaucoup d’un registre accessible au public. Il y a des personnes fortunées qui font des investissements très prudents et qui ne sont pas intéressées à partager leurs stratégies avec le reste du Canada, où certains pourraient décider d’intervenir à l’encontre de leurs intérêts. De plus, il y en a d’autres qui croient que cela poserait un défi relativement important dans un pays comme le Canada, dont l’économie est relativement petite et ouverte.
Cela dit, il est essentiel de collaborer avec les provinces et les territoires dans le contexte de la phase 2.
Le président : Sénateur Wetston, cela s’inscrit bien dans vos préoccupations constantes au sujet de la propriété effective.
Le sénateur Wetston : Ce n’est pas seulement moi que cela préoccupe, mais M. Schaan aussi.
Le président : Je pense que la question préoccupe bien des gens. Merci beaucoup aux témoins.
Le prochain groupe de témoins traitera de la section 5 de la partie 4, qui modifie la Loi sur la faillite et l’insolvabilité, la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies, la Loi canadienne sur les sociétés par actions et la Loi de 1985 sur les normes de prestation de pension.
Nous souhaitons la bienvenue à Kathy Wyre, directrice par intérim, Politique des pensions et Oliver Kanter, économiste, Politique des pensions, du ministère des Finances. Nous accueillons Mark Schaan, directeur général, Direction générale des politiques-cadres du marché; Darryl Patterson, directeur, Direction de l’entreprise, de la concurrence et de l’insolvabilité, Direction générale des politiques-cadres du marché; et, enfin, Paul Morrison, gestionnaire, Élaboration de politiques (l’insolvabilité), Direction générale des politiques-cadres du marché, d’Innovation, Sciences et Développement économique Canada.
Nous allons commencer par entendre les commentaires des représentants de Finances Canada.
Kathy Wyre, directrice par intérim, Politique des pensions, ministère des Finances Canada : Merci, monsieur le président. Je crois que Mark Schaan va intervenir en premier lieu.
Le président : Merci beaucoup. Je vois une constante ici.
[Français]
M. Schaan : Merci, monsieur le président. Pour répondre aux préoccupations ayant trait à la sécurité des régimes de retraite au travail dans le contexte de certaines faillites d’entreprises, le gouvernement s’est engagé, dans le budget de 2018, à adopter une approche pangouvernementale fondée sur des données probantes pour améliorer la sécurité de la retraite des Canadiens. Les consultations menées à la fin de 2018 auprès des travailleurs, des pensionnés, des entreprises et du public ont donné lieu à plus de 4 400 commentaires en ligne, en plus des observations écrites officielles des groupes représentant les parties prenantes sur cette importante question. À la suite de ces travaux, le gouvernement propose des modifications législatives aux lois fédérales relatives à l’insolvabilité, à la gouvernance d’entreprise et aux pensions. Ces modifications renforceront la sécurité de la retraite, tout en continuant d’appuyer les lois-cadres du marché canadien à titre de plateformes solides pour la croissance économique, l’innovation et la création d’emplois pour les Canadiens.
[Traduction]
Cette initiative pangouvernementale vise à démontrer le leadership au niveau fédéral et à offrir des incitatifs appropriés au sein du système de faillite et d’insolvabilité, ainsi que des systèmes de gouvernance d’entreprise et de réglementation des pensions, et ce, de plusieurs façons.
Premièrement, la section 5 de la partie 4 modifie la Loi sur la faillite et l’insolvabilité, afin de préciser que l’obligation d’agir de bonne foi s’applique à toutes les parties à la procédure, ce qui donne aux tribunaux un autre outil pour s’assurer que les parties agissent honnêtement, raisonnablement et franchement. Deuxièmement, elle confère aux tribunaux d’autres pouvoirs pour traiter les paiements effectués par les dirigeants avant une insolvabilité, le cas échéant, dissuadant les dirigeants de prendre des mesures contraires aux intérêts des employés et des retraités. Troisièmement, elle exempte les régimes enregistrés d’épargne-invalidité de la saisie par les créanciers dans les procédures de faillite, ce qui donne l’assurance que les fonds de ces comptes sont en sécurité.
La section 5 de la partie 4 modifie également la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies afin, premièrement, de limiter la portée des ordonnances initiales des tribunaux et du financement provisoire, ce qui réduit les chances que des mesures de redressement extraordinaires, comme la suspension des cotisations de retraite, soient accordées dès le départ et donne aux tribunaux plus de temps pour entendre l’opinion de toutes les parties avant de rendre des ordonnances plus corrélatives. Deuxièmement, elle exige des créanciers qu’ils divulguent leurs intérêts économiques réels dans les procédures, si les tribunaux l’exigent, afin de préserver l’équité dans les négociations d’insolvabilité en corrigeant les déséquilibres informationnels entre les parties. Troisièmement, elle précise que l’obligation d’agir de bonne foi s’applique à toutes les parties, conformément à la Loi sur la faillite et l’insolvabilité.
La section 5 de la partie 4 modifie également la Loi canadienne sur les sociétés par actions, afin notamment d’exiger que les sociétés cotées en bourse fassent rapport sur les politiques relatives aux intérêts des travailleurs et des retraités et au recouvrement de certaines rémunérations incitatives, en assurant une meilleure surveillance du marché et en encourageant la discussion sur les facteurs qui ont une incidence sur la stratégie et les processus décisionnels de la société. Deuxièmement, elle précise que les administrateurs de sociétés peuvent tenir compte des intérêts des employés et des retraités, entre autres, dans leur prise de décision, en encourageant les administrateurs à adopter une approche plus globale pour évaluer les intérêts à long terme de la société. Enfin, elle exige que les sociétés cotées en bourse tiennent des votes consultatifs non contraignants des actionnaires sur la rémunération de la haute direction, facilitant ainsi les discussions sur des régimes de rémunération de la haute direction plus équilibrés dans certains cas.
La section 5 de la partie 4 modifie également la Loi de 1985 sur les normes de prestation de pension, et je vais demander à mes collègues du ministère des Finances d’en parler.
Mme Wyre : Merci. Comme l’a dit M. Schaan, la section 5 de la partie 4 modifie la Loi de 1985 sur les normes de prestation de pension de deux façons. Premièrement, elle précise que le droit d’un participant aux prestations de pension ne peut être subordonné au maintien du régime. Cela veut dire que les participants ont droit aux mêmes prestations de retraite à la cessation du régime que lorsque le régime est en cours.
Deuxièmement, elle modifie la LNPP, afin d’obliger les administrateurs de régimes de retraite à prestations déterminées qui achètent des rentes auprès d’une compagnie d’assurance-vie réglementée à lui transférer leur obligation en vertu du régime de verser une pension aux retraités et aux autres bénéficiaires, sous réserve de certaines conditions. Cette mesure vise à améliorer la viabilité des régimes à prestations déterminées en permettant d’atténuer les risques pour les retraités et d’accroître la sécurité de leurs prestations, puisque les pensions de ces retraités sont maintenant fournies par une compagnie d’assurance-vie et que les retraités ne sont plus exposés au risque d’insolvabilité de l’employeur.
Le président : Avez-vous terminé, mesdames et messieurs les témoins?
M. Schaan : Oui.
[Français]
La sénatrice Verner : Merci beaucoup, madame et messieurs, d’être parmi nous. Je suis une sénatrice du Québec, donc, évidemment, j’ai lu que le Syndicat des Métallos du Québec a déploré que le gouvernement n’ait pas considéré la possibilité de déclarer les régimes de retraite enregistrés comme des créanciers prioritaires lors des procédures de faillite. Je pense que vous êtes bien au fait de leurs revendications. J’ajoute à cela que notre ancien collègue, le sénateur Art Eggleton, un sénateur de l’Ontario, a déposé le projet de loi S-253 au Sénat et à la Chambre des communes. Un député bloquiste a également déposé un projet de loi semblable.
Je comprends que vous êtes ici pour nous expliquer les tenants et aboutissants du projet de loi, mais êtes-vous en mesure de nous dire si cette possibilité a vraiment été étudiée très sérieusement par le gouvernement, et si d’autres intervenants l’avaient évoquée lors des consultations? À la limite, pour quelles raisons majeures le gouvernement n’a-t-il pas retenu cette solution, quand on sait que la dernière faillite en titre, qui a été assez médiatisée, est celle de la compagnie Sears?
M. Schaan : Je vous remercie de cette question. Le gouvernement s’est engagé à évaluer l’efficacité de ces nouvelles mesures et reste disposé à évaluer ce qui pourrait être fait à l’avenir pour améliorer la sécurité des retraites. Au cours de ces consultations, le gouvernement a clairement entendu le souhait de certains de voir un changement fondamental dans la façon dont les créanciers sont payés en cas d’insolvabilité. De sérieuses préoccupations ont également été exprimées au sujet d’un tel changement. Après mûre réflexion, on a déterminé que l’option n’était pas conforme à une solution pangouvernementale fondée sur des données probantes. Lorsque vous tentez de relever les défis liés aux régimes de pension dans des cas d’insolvabilité, vous vous trouvez déjà dans une situation où il n’y a pas assez d’argent pour tout le monde et où d’autres politiques urgentes sont engagées.
L’objectif principal du système est de promouvoir la survie des entreprises viables et de donner de bons emplois. Le gouvernement a certaines des exigences les plus rigoureuses en matière de solvabilité des régimes de retraite et de réglementation au Canada, et les régimes sont financés à 100 p. 100 ou doivent avoir un plan en place en vue d’atteindre ce niveau. Dans ce cas, il est vraiment important d’indiquer si, dans un cas d’insolvabilité, il est peut-être plus facile de modifier les priorités et de donner à tous les pensionnaires tout l’argent disponible. En même temps, il est vraiment important de reconnaître les buts et les ententes de ce système d’insolvabilité et de s’assurer qu’il y a une possibilité de restructuration et de renouvellement des entreprises.
[Traduction]
Dans bien des cas, nous avons réussi à appliquer le processus de la LACC pour en arriver à une entité restructurée. Nous avons pu le faire notamment parce que nous savions que toutes les parties étaient pareillement motivées à faire en sorte que, au bout du compte, il y ait une entreprise viable. Il faut donc veiller à ce que la possibilité soit donnée aux créanciers de voir le côté avantageux de la restructuration.
Cela signifie entre autres choses que, s’il y avait une superpriorité pour les pensions, dans bien des cas, premièrement, il n’y aurait pas assez d’argent pour qu’on puisse honorer les obligations envers les pensionnés. Bon nombre de ces passifs non capitalisés sont en fait trop importants pour l’actif disponible. Deuxièmement, en l’absence de motivation pour saisir l’occasion d’obtenir un certain rendement, une restructuration ne serait pas possible.
Ce n’est pas toujours ce que certains groupes veulent entendre. Nous avons suivi avec un vif intérêt le cas de Stelco. À l’heure actuelle, Stelco a une usine active, une entreprise active et un régime de retraite actif, en partie grâce au fait qu’elle a pu se prévaloir de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies et trouver un acheteur intéressé. Ces emplois et ces retraites sont le meilleur résultat possible lorsqu’une entreprise éprouve des difficultés financières.
Le sénateur Wetston : J’ai une question à poser, monsieur Schaan, au sujet du vote consultatif sur la rémunération. Si je comprends bien, c’est un vote non contraignant, n’est-ce pas?
M. Schaan : C’est exact.
Le sénateur Wetston : C’est semblable à ce qui existe dans d’autres administrations, si j’ai bien compris. Vous conviendrez peut-être que de nombreuses sociétés cotées en bourse, surtout à la Bourse de Toronto, ont maintenant recours à des votes non contraignants sur la rémunération?
M. Schaan : C’est exact.
Le sénateur Wetston : Avez-vous un chiffre approximatif?
Darryl Patterson, directeur, Direction de l’entreprise, de la concurrence et de l’insolvabilité, Direction générale des politiques-cadres du marché, Innovation, Sciences et Développement économique Canada : Oui. Environ 60 p. 100 des entreprises du S & P/TSX et 87 p. 100 des entreprises du TSX 60, je crois.
Le sénateur Wetston : Les chiffres sont donc assez élevés.
La sénatrice Stewart Olsen : Pourriez-vous nous expliquer ce que signifie « vote consultatif sur la rémunération »?
Le sénateur Wetston : Dieu merci, je ne suis pas le témoin. C’est une excellente question.
M. Schaan : Essentiellement, les votes consultatifs non contraignants sur les régimes de rémunération de la haute direction exigent que les sociétés proposent chaque année une approche générale de cette rémunération à leurs actionnaires et que ceux-ci se prononcent. Cela comprend normalement l’approche à l’égard des salaires, des avantages sociaux, des primes, des options d’achat d’actions et d’autres formes de rémunération en général. Les actionnaires ont la possibilité de dire à la société, de façon non contraignante, s’ils sont d’accord ou non sur cette approche.
La sénatrice Stewart Olsen : Merci. Je suis désolée, monsieur le sénateur Wetston, de vous avoir interrompu.
Le sénateur Wetston : Ne vous excusez pas. Je me suis lancé alors que j’aurais dû aborder la question sous l’angle de la rémunération de la haute direction. Il vaut probablement la peine de signaler qu’il s’agit également d’une exigence de la Loi sur les valeurs mobilières, et que les règles de gouvernance d’entreprise exigent la divulgation de la rémunération des dirigeants de ces sociétés publiques. Il y a donc une relation étroite entre le droit des sociétés et celui des valeurs mobilières dans cette situation.
À ce même propos, avez-vous une idée du nombre de votes non contraignants qui ont mené à des changements dans la rémunération de la haute direction? Il y a deux ou trois cas qui me viennent à l’esprit.
M. Schaan : Ce serait une information anecdotique, et je ne voudrais pas donner le nom de sociétés par crainte de me tromper. Les investisseurs, notamment institutionnels, ont certainement envoyé un signal, et ils ont pu voter contre telle approche générale de la rémunération, puis voté pour dans les années ultérieures. Normalement, c’est parce qu’un changement a dû se produire.
Le sénateur Wetston : Ma seule autre question porte sur la récupération. Faisons-nous quelque chose à ce sujet?
M. Schaan : Les modifications proposées disposent qu’une société, dans le cadre de cette communication des politiques relatives aux travailleurs et aux pensionnés, serait tenue de dire à ses actionnaires s’il existe ou non un mécanisme de récupération de la rémunération de la haute direction et, le cas échéant, et en quoi il consiste. Cela servira essentiellement à assurer la transparence.
Le sénateur Wetston : Peut-être pourriez-vous nous expliquer de quoi il s’agit.
M. Schaan : Absolument. Le mécanisme de récupération de la rémunération de la haute direction prévoit ceci, en somme : lorsqu’une partie de cette rémunération est liée à un rendement donné, les administrateurs peuvent rappeler une part de cette rémunération si le rendement n’est pas atteint.
Les investisseurs institutionnels sont de fervents partisans de ces mécanismes de récupération parce qu’ils obligent les conseils d’administration à rendre des comptes. Dans notre cas particulier, sous l’angle de la sécurité des retraites, nous souhaitions vraiment une plus grande transparence pour que les autres parties intéressées puissent voir l’écart qui peut exister entre la progression de la rémunération des cadres supérieurs et celle du passif non capitalisé des régimes de retraite.
Le sénateur Wetston : C’est une mesure très positive.
La sénatrice Marshall : J’essaie de concilier cela avec les propos de Mme Wyre. J’ai dû mal vous comprendre. Par exemple, certains retraités qui ont travaillé chez Sears ont vu leur pension réduite de 30 p. 100. J’ai déduit de vos propos que cela ne pourrait plus se produire, que les retraités auraient droit à leur pleine pension, quoi qu’il arrive. Ensuite, M. Schaan a dit que cela dépendait, que le régime ne serait peut-être pas entièrement capitalisé.
Mme Wyre : Merci beaucoup de votre question. Ce que nous faisons, c’est de rendre plus clair le droit aux prestations. Comme je l’ai dit, c’est un amendement de clarification. L’intention du législateur a toujours été là, mais on vient de nous dire que les choses n’étaient pas claires. Il reste que le retraité a toujours eu droit à ses prestations, que le régime se maintienne ou qu’on y mette fin.
La sénatrice Marshall : Ou qu’il soit entièrement capitalisé ou non?
Mme Wyre : C’est ce que j’allais dire. Le montant disponible pour payer les prestations en cas de cessation du régime est une question distincte. Il s’agit simplement de dire que le retraité a toujours eu droit à ses prestations. On a laissé entendre que les régimes pourraient peut-être offrir des prestations auxquelles vous n’auriez pas les mêmes droits s’ils prenaient fin.
L’exemple utilisé dans notre document de consultation est celui d’un régime qui assurerait une indexation constante, mais, dans le cas d’une cessation prévue du régime, l’indexation serait conditionnelle au maintien des actifs dans le régime. Nous soutenons que le retraité a toujours droit à ses prestations, et nous l’avons précisé dans la loi.
La sénatrice Marshall : Vous faites une distinction entre ce à quoi le retraité a droit et ce qu’il finit par obtenir, n’est-ce pas?
Mme Wyre : Ce qu’il finit par obtenir dépend des actifs disponibles et de l’application des procédures de faillite, mais le droit ne devrait pas être différent parce que le régime prend fin.
La sénatrice Marshall : D’après mon interprétation, ces changements visent à éviter qu’une entreprise, prévoyant la fin de ses activités, ne commence à s’occuper de la haute direction sans se soucier des subalternes, comme ceux qui sont sur le point de toucher une pension. C’est ce que je crois comprendre.
M. Schaan : Il ne fait aucun doute que les modifications apportées à la Loi sur la faillite et l’insolvabilité et à la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies ont entraîné des changements, notamment en ce qui concerne la période pendant laquelle on peut revenir sur la rémunération de la haute direction.
Ainsi, lorsqu’une entreprise est victime de difficultés financières, et particulièrement lorsqu’elle est en liquidation, le contrôleur nommé et surveillé par les tribunaux a la capacité de revoir les transactions antérieures à l’insolvabilité pour s’assurer qu’elle ne se soustrait pas, elle qui est déjà insolvable, au processus prévu par règlement en cas d’insolvabilité, qui prévoit l’ordre de paiement des créanciers. Nous avons étendu cette mesure à la rémunération de la haute direction, aux augmentations importantes et aux avantages. La loi couvrait déjà les rachats des actionnaires et les dividendes, et nous en avons élargi l’application pour essayer d’harmoniser les incitatifs afin qu’on ne puisse pas augmenter considérablement la rémunération de la haute direction en prévision d’une situation d’insolvabilité.
Il convient de signaler que le passif non capitalisé des régimes de retraite est au rang des créanciers non garantis. Il existe donc un droit sans égard à l’argent qui reste. L’argent des régimes est sacro-saint. On ne peut jamais y toucher pendant toute la durée de l’activité de l’entreprise. Dès qu’un dollar est versé dans un compte de pension, il y reste jusqu’à ce que l’entreprise fasse faillite, sauf s’il sert à verser des prestations aux pensionnés. Le problème surgit lorsque l’entreprise n’a pas assez d’argent pour assumer ses obligations en cas de faillite. Au fédéral, les règles sont extrêmement strictes à cet égard. Sans vouloir parler au nom de Mme Wyre, je dirai que les règles financières obligent les entreprises à honorer l’intégralité de leurs obligations en cas de liquidation, ce qui signifie qu’elles doivent se préparer à la possibilité d’une situation d’insolvabilité.
Dans un certain nombre de provinces, c’est différent. Au Québec, par exemple, les pensions ne sont exigibles que pour une entreprise en activité, de sorte que les entreprises ont besoin d’avoir seulement assez d’argent pour honorer leurs obligations courantes. En Ontario, on ne dépasse pas les 80 p. 100.
La sénatrice Marshall : Savez-vous si un pensionné de Sears serait satisfait de ces modifications? Ou bien s’agit-il seulement d’un progrès, alors qu’il reste encore beaucoup à faire?
M. Schaan : À notre avis, le pouvoir fédéral fait preuve d’un important leadership dans la limite des leviers qui sont les siens. Je ne vais pas donner d’exemples précis, mais pour certaines des entreprises dont il a été question, la réglementation fédérale ne s’applique pas. Elles sont régies par différentes provinces. Nous estimons avoir mis en place des structures incitatives avec les leviers fédéraux, qu’il s’agisse des sociétés sous réglementation fédérale, du régime d’insolvabilité ou de notre propre régime de réglementation des pensions.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Ma question s’adresse à M. Schaan. J’aimerais que vous nous donniez davantage d’information sur l’effet des changements visant à mieux protéger les gens qui voient leur pension affectée et menacée. Est-ce que ce seront des changements réels, ou est-ce l’expression d’une volonté de changement? Cela fait toute la différence.
M. Schaan : Oui, je vous remercie de la question. Je pense qu’il faut changer en motivant les entreprises afin qu’ils considèrent davantage les rôles, les impacts et les conséquences de ces décisions sur les pensionnés et les travailleurs.
[Traduction]
Certaines modifications, comme la nécessité de consulter les actionnaires au sujet des besoins des travailleurs et des pensionnés, l’allongement de la période pendant laquelle on peut revenir sur divers éléments comme la rémunération de la haute direction et l’obligation d’agir de bonne foi dans le processus de restructuration, sont autant d’améliorations aux yeux de ceux qui redoutent les conséquences de l’insolvabilité. Nous avons largement accru la transparence et nous leur avons donné davantage voix au chapitre.
En fin de compte, l’aspect le plus difficile de la réglementation du régime d’insolvabilité, c’est que, par définition, il n’y a pas assez d’argent pour tout le monde. Ce que nous devons donc faire pour aider le ministre à gérer ce régime, dans une situation aussi terrible, c’est poser les questions suivantes : les règles sont-elles le plus transparentes possible? le processus est-il le plus clair possible? y a-t-il moyen de faire en sorte que ceux qui sont le plus touchés ou le moins à même d’influer sur le résultat, aient la capacité de faire comprendre et entendre leurs préoccupations?
Nous le faisons de plusieurs façons, à la fois dans le cadre du régime actuel, grâce aux superpriorités que nous avons déjà — qui sont peu nombreuses, mais qui sont là pour assurer exactement cette protection — et grâce au travail accompli dans le projet de loi et auparavant : que peut-on faire, lorsque l’entité n’est pas insolvable, pour établir des règles et garantir que, si elle le devient, la situation soit moins mauvaise?
[Français]
Je pense que ces changements sont importants afin que le gouvernement du Canada puisse utiliser les outils disponibles. Je reconnais qu’il y a d’autres acteurs dans ce système qui sont nécessaires pour apporter d’autres changements. Par contre, pour le gouvernement du Canada, cet ensemble de changements est une étape réelle et importante qui permettra d’améliorer la situation pour les pensionnés et les travailleurs.
Le sénateur Dagenais : C’est une situation très complexe, monsieur Schaan. Vous savez que j’ai été président d’un comité de retraite pendant un assez long moment. Il y a beaucoup d’acteurs : il y a l’employeur, les actionnaires, les gestionnaires, les planificateurs et, enfin, les employés, qui sont toujours au dernier rang. Je pense qu’il est important d’avoir des comités de retraite afin de s’assurer de l’application des bonnes lois. Il y a également des lois provinciales. Je vous remercie de vos explications. En conclusion, je souhaite bonne chance au commun des mortels qui doit appliquer cela. Merci beaucoup.
[Traduction]
La sénatrice Duncan : Merci beaucoup. J’ai une question précise à poser au sujet du libellé du projet de loi et des termes employés. Si vous préférez, pour gagner du temps, vous pouvez communiquer la réponse par écrit.
Il s’agit de la rubrique « Jugement contre les administrateurs — rémunération ». Pour ceux qui ont imprimé et lu le projet de loi, cela se trouve aux pages 94 et 95. Ma question porte sur l’article concernant la rémunération des administrateurs : « [...] n’a pas été fait dans le cours ordinaire des affaires ». L’expression « cours ordinaire des affaires » peut vouloir dire des choses différentes à Vancouver, au Québec et au Nouveau-Brunswick. Je crains que l’utilisation de cette expression deux fois dans cet article particulier... Au bout du compte, ce seront les tribunaux qui décideront, j’en suis certaine. Y a-t-il des raisons qui expliquent le choix de cette expression? Y a-t-il d’autres formulations que nous pourrions envisager au moment d’apporter des amendements?
M. Schaan : C’est un choix délibéré des rédacteurs. Essentiellement, ce que nous voulions faire et ce que la loi fait, c’est garantir que, du point de vue de la rémunération, compte tenu des mécanismes très divers de son versement, les tribunaux et le contrôleur aient la capacité d’agir malgré tout régime novateur, encore inconnu, qui pourrait intervenir. Nous voulions dire que, si l’entreprise prend en matière de rémunération de la haute direction une décision qui la rendra insolvable ou si elle aurait dû savoir à ce moment-là qu’elle était insolvable, elle doit répondre de cette décision parce qu’elle contrevient à ses obligations fiduciaires.
Si je ne m’abuse, cette responsabilité et le choix des mots « n’a pas été fait dans le cours ordinaire des affaires » sont essentiellement un moyen d’éviter d’autres mots beaucoup plus précis et qui visent des choses particulières, comme « sous-estimation » ou « à un moment où la société était insolvable » ou encore « rendait la société insolvable », de sorte que les contrôleurs et les tribunaux aient une certaine latitude pour revoir ces transactions et s’assurer de leur bien-fondé.
Paul Morrison, gestionnaire, Élaboration de politiques (Insolvabilité), Direction générale des politiques-cadres du marché, Innovation, Sciences et Développement économique Canada : M. Schaan a raison. Étant donné la responsabilité imposée aux administrateurs, on ne voulait pas pénaliser ceux-ci pour des versements effectués conformément à des contrats normaux de rémunération comme les salaires ou la rémunération gagnée, par exemple. Cette disposition a été conçue pour viser les rémunérations extraordinaires accordées pendant la période précédant l’insolvabilité.
La sénatrice Duncan : Ce qui m’inquiète, c’est que, si c’est une pratique courante pour un cadre supérieur de se faire accorder une semaine de vacances aux Bahamas avec sa famille, il s’agit du cours ordinaire des affaires si cette pratique s’est établie au fil du temps. Ce cadre supérieur pourrait soutenir que, même si l’entreprise est devenue insolvable, il reçoit cet avantage depuis 10 ans et qu’il s’agit pour lui du cours ordinaire des affaires.
M. Schaan : Il vaut la peine de se rappeler les garanties entourant cette disposition. Il y aurait une responsabilité, peut-être même délictuelle, si les tribunaux et les contrôleurs jugeaient la transaction injustifiée. Les contrôleurs et les tribunaux ont fait preuve d’une extrême prudence à l’égard des transactions existantes, au grand dam de certains autres intéressés. Ils estiment qu’il y a eu des transactions qui auraient dû être annulées parce qu’on a fait preuve d’une grande déférence sur le plan du jugement commercial équitable.
Essentiellement, ce que nous avons fait par ces modifications, c’est donner aux tribunaux et au contrôleur cette capacité, en reconnaissant, bien sûr, que chaque transaction devra être examinée à la lumière de cette norme.
La sénatrice Duncan : Merci.
Le président : Merci beaucoup de votre participation, qui a été éclairante.
Honorables sénateurs, le dernier groupe de témoins traitera de la section 26 de la partie 4, sur l’adoption de la Loi fédérale sur le paiement rapide des travaux de construction.
Je suis heureux d’accueillir Christopher Meszaros, avocat-conseil au ministère de la Justice Canada.
Christopher Meszaros, avocat-conseil principal, ministère de la Justice Canada : La section 26 est la Loi fédérale sur le paiement rapide des travaux de construction. Elle a derrière elle a un certain historique que je voudrais aborder brièvement. Il s’agit d’un problème qui hante l’industrie de la construction depuis de nombreuses années. Lors de la 50e réunion conjointe annuelle de l’Association canadienne de la construction et du gouvernement fédéral qui a eu lieu en avril 2016, la question de la rapidité du paiement des contrats de construction fédéraux a été soulevée de nouveau.
L’ACC a fait savoir que, sur les 285 milliards de dollars que représentent tous les contrats de construction à l’échelle nationale, il y avait 46 milliards de dollars de paiements en souffrance. Cela signifie que 16 p. 100 des paiements ont été retardés pendant une période prolongée, soit parfois jusqu’à deux mois.
Les paiements aux entrepreneurs n’étaient pas versés de façon efficace dans la chaîne de passation des marchés, ce qui nuisait à de nombreux secteurs de l’industrie. On a demandé au gouvernement fédéral de jouer un rôle de chef de file et d’engager un dialogue afin de définir, d’évaluer et de mettre en œuvre des mesures propres à accélérer les paiements.
SPAC a mandaté des experts indépendants qui ont exécuté un travail semblable pour le gouvernement de l’Ontario. Il s’agit du comité Reynolds et Vogel. Les experts ont dirigé un processus de communication visant à recueillir les observations de l’industrie nationale de la construction afin de repérer les éléments nécessaires à l’élaboration d’un régime de paiement rapide et solide. Ce qui a été crucial, c’est qu’ils ont participé à un processus national de consultation et ont invité des intervenants de partout au Canada à y participer. Ils ont tenu 55 séances de consultation et rencontré plus de 500 personnes. Ils ont présenté un rapport assorti de recommandations détaillées à SPAC en juin 2018.
Dans l’annonce budgétaire de 2019, le gouvernement du Canada s’est engagé à présenter un projet de loi pour mettre en œuvre un régime assurant le versement rapide des paiements aux entrepreneurs et sous-traitants pour les projets fédéraux réalisés sur des biens immobiliers fédéraux et l’arbitrage des problèmes de paiement. La nouvelle loi s’inspire des recommandations du rapport, et elle aidera à faire en sorte que les paiements soient versés rapidement dans le secteur de la construction et contribuera à atteindre l’objectif du gouvernement : obtenir la meilleure valeur possible pour ses projets de construction.
En général, les lois portant sur les relations contractuelles relèvent de la compétence provinciale en matière de propriété et de droits civils. Dans ce cas-ci, la législation fédérale s’appliquera exclusivement aux projets fédéraux réalisés sur des terres fédérales.
La construction fédérale ne représente en fait qu’environ 1 p. 100 du travail au Canada, mais cette loi est considérée comme un modèle pour d’autres administrations. L’industrie de la construction devrait appuyer la loi.
L’industrie emploie 1,5 million de Canadiens et représente 7,5 p. 100 de la main-d’œuvre canadienne, mais l’Association canadienne de la construction, la National Trade Contractors Coalition of Canada et l’Alliance des entrepreneurs généraux du Canada ont toutes appuyé le projet de loi jusqu’à présent.
Le projet de loi 142 de la province de l’Ontario comprend des modalités de paiement rapide et des mesures visant le droit d’obtenir une décision très semblable et il a été appuyé à l’unanimité et a reçu la sanction royale en décembre 2017. Le Québec a également mis en place un projet pilote de paiement rapide et d’autres administrations sont en train d’élaborer une loi en ce sens. L’industrie participera davantage à l’avenir à l’élaboration d’autres règlements à l’appui de ce projet de loi.
Aucun financement additionnel n’est demandé pour cette initiative. C’est une bonne nouvelle. Néanmoins, si un financement devenait nécessaire, Services publics et Approvisionnements Canada pourra utiliser ses niveaux de référence.
L’un des éléments clés du projet de loi est que les entrepreneurs doivent présenter à Sa Majesté ou à un fournisseur de services une facture mensuelle ou tel qu’il est précisé dans le contrat. Le paiement doit être effectué dans les 28 jours suivant la réception de la facture, à moins que l’avis de non-paiement n’ait été expédié dans les 21 jours suivant les travaux. Le paiement de l’entrepreneur au sous-traitant doit être effectué dans les 35 jours suivant l’envoi de la facture, encore là, à moins que l’avis de non-paiement n’ait été expédié dans les 28 jours.
Les retenues sont autorisées. S’il y a retard de paiement, des intérêts sont exigibles. Le point majeur du projet de loi, c’est que les parties peuvent soumettre leurs différends à un intervenant expert.
Cette loi n’est pas conçue pour être appliquée dans une province qui a adopté une loi similaire. Elle prévoit un droit de retrait. D’autres règlements seront promulgués afin d’établir les pouvoirs de l’autorité des intervenants experts et des intervenants eux-mêmes. La loi n’entrera pas en vigueur immédiatement. Elle ne s’appliquera pas aux contrats existants avant une période d’un an, mais elle le sera passé ce délai.
Le président : Merci beaucoup. Je pense que notre comité s’est penché sur cette question à un moment donné. C’est très intéressant. Je suis content de voir que les choses avancent.
Vous avez parlé du projet de loi 142 de l’Ontario. Les dispositions de la loi fédérale sont-elles identiques à celles-ci?
M. Meszaros : Non, elles ne le sont pas. Il y a des cas dans le régime fédéral qui sont traités différemment dans le régime provincial; l’intention générale, le dessein qui sous-tendent la loi sont similaires, mais les dispositions diffèrent quelque peu, reflétant certaines circonstances qui ont changé.
Nous suivons actuellement un processus avec l’Ontario pour voir où se situent les différences. Encore une fois, c’est surtout l’approche qui diffère un peu, parce que l’intention est pratiquement la même. Toutefois, en examinant les scénarios de près, nous avons constaté que ce qu’ils avaient proposé ne fonctionnerait pas aussi bien pour nous, et c’est pourquoi nous avons dû modifier un peu notre formulation.
Le président : Qu’arrivera-t-il si les dispositions de la loi ne sont pas respectées? Je suis un entrepreneur. Je ne paie pas mes sous-traitants. Y a-t-il d’autres conséquences possibles, mis à part l’arbitrage?
M. Meszaros : C’est l’arbitrage. Ce qui est bien avec l’arbitrage, c’est que c’est rapide, bien qu’actuellement ce système de recours soit un peu douteux.
Il sera possible d’obtenir une décision d’un arbitre en moins de 50 jours. En fait, l’intervenant expert doit être choisi conjointement avec la partie adverse. Si ce n’est pas possible, il faut s’adresser à une autorité de règlement des différends qui désignera un intervenant aux parties.
À ce moment-là, l’arbitre reçoit tous les renseignements requis et dispose d’un certain laps de temps pour rendre sa décision, et ce délai peut être prolongé s’il a besoin de plus de temps. La décision devrait être prise dans les 30 jours, mais je ne suis pas sûr de la durée exacte du temps alloué.
Le président : Y a-t-il des dispositions exécutoires?
M. Meszaros : Si l’ordonnance rendue n’a pas été respectée, elle peut être enregistrée auprès de la cour, traitée comme une ordonnance judiciaire et appliquée de cette façon.
Le président : Je vous remercie de votre témoignage. Je suis sûr que nous avons entendu dire — je m’en tiendrai à cela — que le gouvernement du Canada ne payait pas vite, et je présume que cette loi s’applique au gouvernement du Canada à titre d’entrepreneur.
M. Meszaros : En effet. Comme pour Sa Majesté, en somme. Quant à nous, nous devons payer dans les 28 jours. Auparavant, nous avions normalement 30 jours pour le faire.
La sénatrice Stewart Olsen : Merci de votre exposé. Je dois avouer que je ne suis pas certaine de la teneur de ce projet de loi parce qu’il est présenté par le gouvernement, et c’est lui qui paie les comptes. Je pense que nous devons faire preuve d’une certaine prudence à cet égard.
Je l’appuie certes, mais y a-t-il vraiment des différences entre cette mesure législative et les lois provinciales? S’applique-t-elle seulement aux contrats du gouvernement provincial ou si sa portée est plus vaste?
M. Meszaros : Il n’y a pas beaucoup de différence. Certaines mesures portent sur les délais de paiement, d’autres apportent des précisions sur le moment où une facture doit être présentée, ce genre de choses. Les échéances énoncées dans le projet de loi 142 en Ontario sont les mêmes que celles de notre projet de loi : ce sont des périodes de 28 jours, puis un suivi de 7 jours.
La sénatrice Stewart Olsen : S’agit-il uniquement de contrats provinciaux?
M. Meszaros : La loi provinciale s’applique à tous les contrats conclus dans la province en ce sens, et notre loi traite de nos contrats qui ne sont pas nécessairement couverts par les lois provinciales.
En vertu de ce projet de loi, nous aurions cette obligation partout au pays. Que ce soit à l’Île-du-Prince-Édouard ou ailleurs au pays, nous devons nous conformer à cette loi, tout comme les entrepreneurs et les sous-traitants qui travaillent sur nos projets dans ces provinces, même si aucune loi en ce sens n’est applicable à l’heure actuelle dans leur province.
La sénatrice Stewart Olsen : Souhaitez-vous que toutes les provinces emboîtent le pas et adoptent ce genre de mesure législative?
M. Meszaros : Oui, tout à fait.
La sénatrice Wallin : Nous avons tenu de longues audiences à ce sujet. Selon certaines notes d’allocution, l’une des raisons pour lesquelles vous voulez adopter ce projet de loi du Sénat, plutôt que d’en déposer un nouveau, c’est qu’il n’y a pas eu suffisamment de consultation pendant son élaboration. Alors, qu’avez-vous fait par la suite?
M. Meszaros : Nous avons mené de nombreuses consultations. Nous avons embauché une entreprise qui a mené des consultations en Ontario, puis elle a rencontré 500 personnes à l’échelle nationale, tenu 55 séances de mobilisation partout au pays et préparé un volumineux rapport sur ce que l’industrie attendait de cette loi.
La sénatrice Wallin : Je pense que nous avons entendu au moins 500 personnes. J’exagère peut-être un peu.
Je sais que vous avez maintenant établi des échéances, mais nous avons entendu toutes sortes de choses à ce sujet justement. Je vois que différents échéanciers ont été établis en fonction des situations, mais 49 jours, puis 7 jours, et ainsi de suite. Ce que nous avons compris des témoignages, c’est que pour les petits sous-traitants, ce n’est pas satisfaisant. Je ne sais pas ce qu’on vous a dit lors de vos consultations, mais si vous arrivez à 2 ou 3 mois ouvrables, c’est long si ces 49 jours sont considérés comme des jours ouvrables.
M. Meszaros : Nous n’avions pas vraiment le choix, parce que nous essayions de nous en tenir aux échéanciers le plus strictement possible, et sept jours pour un entrepreneur à un sous-traitant ou pour un sous-traitant à un autre sous-traitant… nous ne pouvions pas voir comment nous aurions pu accélérer les choses.
Plus haut dans la hiérarchie, du propriétaire — dans notre cas, Sa Majesté — à l’entrepreneur, nous cherchions à nous assurer que le travail était examiné, certifié et accepté. Ça ne semblait pas possible ni probable pour les grands projets que nous faisons normalement d’accélérer encore plus les choses. Même si nous avions pu, cela aurait pu prendre sept jours de plus.
Ce qui se passe, c’est que c’est en aval de la chaîne contractuelle le temps s’accumule, mais si vous êtes un sous-traitant de troisième niveau, vous pouvez vous attendre à un peu plus d’un mois ou un mois et demi, ce qui est mieux que par le passé.
La sénatrice Wallin : C’est une amélioration, bien évidemment.
M. Meszaros : C’est ce que nous visons.
La sénatrice Wallin : Cela se limite actuellement aux constructions par le gouvernement fédéral, sur des propriétés fédérales, comme les édifices de la Colline du Parlement?
M. Meszaros : C’est exact.
La sénatrice Wallin : Si vous avez transféré de l’argent aux provinces ou aux municipalités pour d’autres projets connexes, comme pour une route menant à la Colline du Parlement, ce serait considéré comme un projet municipal, mais cela ne s’applique pas?
M. Meszaros : Non. Nous ne voulions pas aller trop loin.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Merci, monsieur Meszaros. Tout le mécanisme pour les payeurs en défaut, je trouve ça très bien, mais est-ce qu’il existe une liste publique des mauvais payeurs? Une telle liste est pas mal plus efficace qu’un processus d’arbitrage qui va durer des mois.
[Traduction]
M. Meszaros : Malheureusement, sénateur, il n’y a pas de liste des mauvais payeurs, mais les paiements que nous effectuons sont publiés. Les paiements que l’État verse à ses entrepreneurs sont publiés sur un site web. Cela montre au moins que l’argent devrait être versé et les parties qui sont situées plus bas dans la hiérarchie peuvent voir où se situe le problème et elles sauront que c’est un entrepreneur pour lequel elles ne voudront peut-être pas soumissionner ou un sous-traitant avec lequel elles ne voudront plus faire affaire.
Encore une fois, le processus d’arbitrage n’est pas parfait; il prend du temps. Nous espérons que certaines parties pourront être éliminées ou à tout le moins identifiées de sorte que, lorsqu’il y aura des appels d’offres, le processus s’autoréglementera en quelque sorte.
Le président : Monsieur Meszaros, merci beaucoup. C’était un suivi intéressant du travail que nous avons accompli il y a quelques années. Je l’ai trouvé très intéressant. Je vous remercie de votre exposé très éclairé.
Mesdames et messieurs les sénateurs, nous nous réunirons de nouveau demain matin, à 10 h 15, pour discuter de notre rapport sur les services bancaires ouverts.
(La séance est levée.)