Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Finances nationales
Fascicule n° 33 - Témoignages du 16 mai 2017 (séance du matin)
OTTAWA, le mardi 16 mai 2017
Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui, à 9 h 33, pour poursuivre son étude du programme de plusieurs milliards de dollars du gouvernement fédéral pour le financement des infrastructures.
Le sénateur Percy Mockler (président) occupe le fauteuil.
[Français]
Bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial permanent des finances nationales.
[Traduction]
Je suis Percy Mockler, sénateur du Nouveau-Brunswick et président du comité.
J'aimerais souhaiter la bienvenue à tous ceux ici présents dans la salle et à tous les Canadiens qui nous regardent, à la télévision ou en ligne.
[Français]
Je rappelle à nos auditeurs et auditrices que les audiences du comité sont publiques et accessibles en ligne sur le site web officiel du Sénat.
[Traduction]
Tous les travaux du comité se trouvent également en ligne, y compris ses rapports passés, les projets de loi étudiés et la liste des témoins.
J'aimerais maintenant demander à tous les sénateurs de se présenter, en commençant à ma droite, s'il vous plaît.
La sénatrice Eaton : Nicki Eaton, de l'Ontario.
La sénatrice Marshall : Elizabeth Marshall, de Terre-Neuve-et-Labrador.
La sénatrice Andreychuk : Raynell Andreychuk, de la Saskatchewan.
[Français]
La sénatrice Moncion : Lucie Moncion, sénatrice de l'Ontario.
Le sénateur Pratte : André Pratte, sénateur du Québec.
Le sénateur Forest : Éric Forest, sénateur de la région du Golfe, au Québec.
[Traduction]
Le sénateur Woo : Yuen Pau Woo, de la Colombie-Britannique.
Le président : Merci, sénateurs.
[Français]
J'aimerais vous présenter la greffière du comité, Mme Gaëtane Lemay, et nos deux analystes, Sylvain Fleury et Olivier Leblanc-Laurendeau qui, ensemble, appuient les travaux du présent comité.
[Traduction]
Aujourd'hui, honorables sénateurs et chers auditeurs, nous poursuivons notre étude spéciale sur le programme du gouvernement pour l'infrastructure.
Pour la première partie de notre réunion ce matin, nous avons invité des fonctionnaires du Bureau du Conseil privé pour discuter du cadre connexe au programme d'infrastructure à l'échelle du Canada.
[Français]
Nous accueillons ce matin nos deux témoins du Bureau du Conseil privé : Matthew Mendelsohn, sous-secrétaire du Cabinet, Résultats et livraison, ainsi que Francis Bilodeau, sous-secrétaire adjoint du Cabinet, Résultats et livraison. Je vous remercie d'avoir accepté notre invitation et de nous faire part de vos opinions et de votre vision afin que nous puissions examiner ensemble nos trois objectifs —
[Traduction]
[...] prévisibilité, reddition de comptes et transparence.
La greffière du comité m'a informé que M. Mendelsohn fera l'exposé, puis les sénateurs poseront leurs questions.
[Français]
Monsieur Mendelsohn, la parole est à vous.
[Traduction]
Matthew Mendelsohn, sous-secrétaire du Cabinet, Résultats et livraison, Bureau du Conseil privé : Merci à vous tous de m'avoir invité. Mes remarques liminaires seront brèves. Comme vous l'avez mentionné, je suis accompagné de quelques-uns de mes collègues : Francis Bilodeau, que je surnomme le cerveau des opérations au bureau, et Christopher Valiquet et Melissa Tan, qui font le vrai travail à notre bureau. Je suis très heureux qu'ils soient parmi nous.
Je vais vous parler un peu de ce que nous faisons à l'unité des résultats et de la livraison au Bureau du Conseil privé, car c'est un nouveau groupe, qui a été créé en janvier de l'an dernier.
Je voulais commencer par mentionner que le travail de ce comité est très utile pour faire ressortir l'importance de la reddition de comptes, de la transparence et de la capacité de communiquer clairement les résultats aux Canadiens d'une manière qui est logique pour les parlementaires et les Canadiens afin qu'ils puissent voir comment leur argent est dépensé et connaître les retombées tangibles de ces dépenses.
[Français]
Vous n'êtes pas sans avoir qu'au Bureau du Conseil privé, nous avons comme mission de donner des conseils non partisans au premier ministre et au Conseil des ministres. Avec le Secrétariat sur les résultats et la livraison, nous axons nos efforts sur trois questions en particulier. Premièrement, que souhaitons-nous accomplir, c'est-à-dire quels sont les résultats ciblés dans le cadre d'un programme ou de dépenses? Deuxièmement, quel est le plan de travail, soit comment allons-nous procéder pour mettre en œuvre un programme quelconque? Troisièmement, comment allons-nous évaluer nos résultats, soit comment allons-nous déterminer si nos objectifs auront été atteints?
[Traduction]
Comme les gens ici le savent, des sommes d'argent importantes sont consacrées aux infrastructures et à de nombreuses autres priorités du gouvernement. L'une de nos tâches consiste à aider les ministères à mesurer le mieux possible les résultats et les retombées de ces dépenses et à rendre des comptes de manière à ce que ce soit logique pour les Canadiens.
Pour ce travail, il est très important de recueillir des données et des preuves pour appuyer le programme, la politique et la mise en œuvre. La collecte de preuves et de données est essentielle pour être un gouvernement avisé et orienté vers les résultats.
Le gouvernement a relevé qu'il s'agissait de principes importants. Le ministère de l'Infrastructure reconnaît que ce sont des principes importants. Notre rôle consiste en partie à l'aider à cerner, à colliger et à communiquer les meilleures données possible pour déterminer si ses dépenses donnent les résultats qu'il essaie d'atteindre.
En ce qui concerne les données, une partie de notre stratégie comporte trois volets. Premièrement, nous voulons nous assurer d'avoir les bonnes données. Comme les membres du comité le savent, il y a des enjeux qui sont très importants pour le gouvernement, mais pour lesquels nous n'avons pas de données. Au cours de la dernière année, nous avons commencé à investir dans de nouveaux types de données et dans des données qui nous permettront de répondre à des questions concernant les résultats et les retombées des dépenses publiques. Une partie de cette stratégie consiste à investir dans les bonnes données.
Deuxièmement, il est important d'avoir des gens qui peuvent comprendre, analyser et interpréter les données et, troisièmement, d'avoir une culture, des processus et des règles qui permettent au gouvernement d'utiliser de bonnes données dans la prise de décisions.
[Français]
Un autre aspect important sera l'idée de rendre publics d'une manière transparente les résultats des programmes. Vous êtes au courant que le gouvernement est à élaborer plusieurs nouveaux processus et de nouvelles politiques pour rendre publiques les données d'une façon plus transparente, de sorte que les Canadiens et les parlementaires puissent suivre les dépenses plus facilement.
[Traduction]
Nous avons mis en œuvre un certain nombre de processus au cours de la dernière année pour contribuer à instaurer une approche axée sur les résultats et la livraison. Nous avons créé un nouveau comité du Cabinet, présidé par le premier ministre, qui met l'accent sur le programme global du gouvernement. Il s'assure que les principales priorités sont respectées, veille à ce que les programmes et les politiques qui visent l'atteinte d'un résultat précis donnent bel et bien le résultat escompté et, sinon, déterminent pourquoi, et établissent si des modifications ou des ajustements sont nécessaires.
Nous avons également créé plus de tables informelles qui se penchent sur les résultats ministériels pour assurer un suivi des principales priorités du gouvernement et pour veiller à ce que, lorsqu'une collaboration et une coordination horizontales sont nécessaires, comme c'est certainement le cas dans l'infrastructure, les ministres et les fonctionnaires se rencontrent régulièrement pour assurer une harmonisation, une coordination et des progrès horizontaux.
Nous avons également élaboré des documents que nous appelons des chartes des résultats et de l'exécution pour de nombreuses nouvelles initiatives, qui présentent clairement ce qui suit :
Quels sont les objectifs? Quels sont les résultats ciblés? Quelle est la stratégie relative aux données? Quels indicateurs ou mesures seront utilisés et mobilisés? Avons-nous ces données? Quel est le plan de mise en œuvre clair? Comment ferons-nous des vérifications et des évaluations et apporterons-nous des modifications et des ajustements pour veiller à ce que les résultats promis soient atteints ou, en cas d'échec, comment ferons-nous pour expliquer pourquoi ils n'ont pas été atteints et fournir une stratégie quelconque pour apporter les ajustements requis?
Les nouveaux modèles de mémoire au Cabinet et au Conseil du Trésor sont plus axés sur les résultats, les stratégies relatives aux données, les indicateurs et les plans de livraison qu'auparavant. Nous les avons modifiés pour tenir compte de l'engagement du gouvernement en vue de mesurer les résultats et de présenter des rapports sur les résultats de manière rigoureuse.
[Français]
Comme vous le savez, le Conseil du Trésor a aussi élaboré une nouvelle politique sur les résultats. Les ministères sont en train de faire des comptes, en vertu de cette nouvelle politique, axés précisément sur les résultats, les indicateurs et les données. Ces comptes seront évalués et mobilisés de façon à ce que nous puissions atteindre nos objectifs.
[Traduction]
Nous avons également mis en place des structures de gouvernance souples pour contribuer à faire avancer ce programme. Nous avons désormais des tables. L'une d'elles est la table des dirigeants principaux des résultats et de l'exécution, que mon collègue préside. Chaque ministère a maintenant un agent principal des résultats et de l'exécution qui est responsable de s'assurer que le gouvernement exécute son programme et obtient des résultats.
Le travail de Francis consiste en partie à assurer une coordination, une harmonisation et l'adoption de pratiques exemplaires dans les ministères qui mènent leurs activités avec succès et à aider d'autres ministères qui ont peut-être un peu plus de difficulté à mettre en œuvre la nouvelle approche.
Nous avons également une table des responsables des données. Tous les ministères ont nommé un responsable des données. Cette table, comme la table des DPRE, est coprésidée par le Bureau du Conseil privé et le Conseil du Trésor. Cette table des responsables des données est conçue de manière à ce que pour toutes les stratégies relatives aux données différentes, lorsque nous recueillons et communiquons de nouvelles données et que nous mobilisons des données existantes qu'un ministère a et qui pourraient aider un autre ministère, il y a un mécanisme de coordination et d'harmonisation pour veiller à ce que le gouvernement exécute son programme de la manière la plus cohérente possible.
En somme, une partie de notre mandat consiste à transformer, autant que possible, la culture de reddition de comptes pour qu'elle mette l'accent sur les résultats et les répercussions. Dans le passé, la reddition de comptes était parfois axée sur les retombées, parfois sur les résultats, mais souvent sur les activités et les intrants. Nous continuerons d'encourager les ministères à se concentrer sur les activités et les intrants.
Ce sont là d'importants éléments, comme vous l'avez dit, de la transparence, de la prévisibilité et de la reddition de comptes. Il est important que le public et les parlementaires puissent savoir les sommes d'argent qui sont dépensées et comprendre clairement les intrants et les activités pour éviter de dépenser de l'argent uniquement pour dépenser de l'argent. Nous n'entreprenons pas des activités pour le simple plaisir de le faire. Nous avons toujours en tête un résultat, une retombée ou une incidence.
Parfois, nous n'obtenons pas autant de succès que nous le souhaiterions. Dans le cadre de notre travail à la division des résultats et de la livraison, nous créons les structures, les processus et la culture depuis les 14 derniers mois pour aider les ministères à se concentrer davantage sur leur reddition de comptes en ce qui a trait aux retombées et aux résultats et à le faire en adoptant une approche pangouvernementale et horizontale.
Par exemple, dans le dossier de l'infrastructure, comme vous le savez, de nombreux ministères différents jouent un rôle. Par l'entremise des processus du Conseil du Trésor, nous avons présenté des données sur les dépenses ministérielles dans le passé. Nous continuerons de le faire, car cela demeure un aspect important de la reddition de comptes.
Par ailleurs, l'approche horizontale et pangouvernementale et l'harmonisation au sein des divers programmes, les dépenses et les ministères sont tout aussi importants. Nous aidons les ministères à respecter les priorités horizontales et à rendre des comptes d'une manière qui est logique pour les parlementaires et la population canadienne.
Je vais soulever un dernier point qu'il faut aborder, à mon avis, avant d'entreprendre cette conversation et de passer aux questions.
Rien de ce que nous pouvons faire ne peut changer l'obligation de rendre des comptes des ministères. Le ministre de l'Infrastructure, le sous-ministre et les fonctionnaires à tous les niveaux du ministère sont responsables de gérer ces programmes.
Notre rôle consiste à faire des remises en question. Nous essayons de poser des questions difficiles. Nous essayons d'assurer une coordination parmi les ministères pour assurer une harmonisation. Nous aidons les ministères à surmonter les obstacles à la livraison éventuels, car ils se présentent parfois à l'intérieur même du gouvernement.
Si nous voulons tenir les ministres et les ministères responsables et qu'il y a des obstacles dans le système, notre travail consiste en partie à les aider à surmonter ces obstacles. Nous visons tous le même objectif qui consiste à offrir des programmes qui produisent des résultats pour les Canadiens.
Notre tâche consiste à faciliter, à favoriser, à remettre en question et à encourager l'harmonisation, mais rien de ce que nous faisons ne change le système de responsabilité ministérielle que vous connaissez tous.
[Français]
Sur ce, je serai très heureux de répondre à vos questions.
[Traduction]
La sénatrice Marshall : Merci beaucoup d'être ici aujourd'hui. Je dois saluer l'initiative, car je sais qu'elle est très importante.
Pouvez-vous clarifier quelque chose? J'essaie de comprendre comment votre programme cadre au sein du gouvernement. Vous interagissez avec les ministères. Vous dites qu'il y a un responsable dans tous les ministères.
Entretenez-vous des liens avec les sociétés d'État également? Sont-elles incluses dans ce programme?
M. Mendelsohn : C'est une question intéressante. Je vais y répondre de deux façons.
Non, nous n'entretenons pas de liens avec les sociétés d'État. Nos dirigeants principaux des résultats et de la livraison sont les responsables dans les ministères. Ils surveillent les organismes, les conseils, les commissions ou les sociétés d'État. Les sociétés d'État, les organismes, les conseils et d'autres peuvent mettre en œuvre une approche axée sur les résultats et la livraison qui cadre avec ce que nous préconisons de façon générale, mais nous n'interagissons pas directement avec ces entités.
La sénatrice Marshall : La décision reviendrait aux ministères respectifs à qui ils doivent rendre des comptes.
Vous avez mentionné l'infrastructure à plusieurs reprises. Lorsque je regarde le budget de 2016, j'ai l'impression que les indicateurs de rendement et l'ensemble du programme sont pancanadiens. Puis, lorsque j'ai pris connaissance du budget de 2017, j'ai eu l'impression qu'il est plus étroitement axé sur l'infrastructure. C'est à l'échelle du gouvernement, n'est-ce pas?
M. Mendelsohn : Le sous-ministre Tremblay sera l'un des prochains témoins et pourra discuter du sujet plus en détail, mais le cadre ministériel des résultats présenté au Conseil du Trésor par Infrastructure Canada vise davantage l'ensemble du gouvernement. Le ministère de l'Infrastructure rendra des comptes, alors que le ministre responsable de l'Infrastructure fournira des renseignements sur les dépenses au titre des infrastructures et des résultats d'autres ministères également.
La sénatrice Marshall : D'autres programmes dans d'autres ministères auraient également des indicateurs de rendement.
M. Mendelsohn : Oui.
La sénatrice Marshall : Nous parlons souvent des indicateurs de rendement lorsque des témoins comparaissent. Une personne semblait être un gourou des indicateurs de rendement. Je cherchais les indicateurs de rendement pour l'ensemble du gouvernement, et on m'a dit que je recevrais une réponse du président du Conseil du Trésor.
Ces indicateurs se trouvent-ils quelque part? Où pouvons-nous obtenir les indicateurs de rendement qui sont actuellement en vigueur? Où pouvons-nous les trouver?
Par exemple, des représentants du ministère de l'Innovation ont parlé du budget. Il y a deux indicateurs de rendement qui sont mentionnés dans le budget. On nous a dit que ce sont les deux seuls indicateurs de rendement, mais il doit y en avoir d'autres.
Où pouvons-nous trouver les indicateurs de rendement pour les divers programmes au gouvernement?
M. Mendelsohn : Le processus du Conseil du Trésor et les cadres ministériels de résultats ont des descriptions détaillées des indicateurs de rendement ministériels.
Le gouvernement examine actuellement comment nous procéderons à la présentation de rapports pangouvernementaux. Je vous dirais de rester à l'écoute. Le gouvernement est certainement résolu à présenter plus de rapports pangouvernementaux et horizontaux sur les indicateurs de rendement en ce qui concerne les principales priorités du gouvernement.
La sénatrice Marshall : Nous ne pouvons donc pas les obtenir.
M. Mendelsohn : Vous pouvez obtenir des indicateurs de rendement ministériels par l'entremise des processus du Conseil du Trésor, mais, comme je le dis, le gouvernement examine comment et quand il pourra commencer à présenter des rapports horizontaux sur les grandes priorités du gouvernement. Nous en saurons plus à ce sujet sous peu.
La sénatrice Marshall : Seriez-vous en mesure de fournir à la greffière du comité le nom de la personne-ressource? J'avais le nom d'une personne-ressource, mais je n'ai pas eu beaucoup de succès pour obtenir les renseignements. Y a-t- il une personne à qui nous pouvons nous adresser?
M. Mendelsohn : Au Conseil du Trésor?
La sénatrice Marshall : Oui, ou ailleurs, pour obtenir les indicateurs de rendement qui sont disponibles à l'heure actuelle.
M. Mendelsohn : D'accord. Voulez-vous répondre, Francis?
Francis Bilodeau, sous-secrétaire adjoint du Cabinet, Résultats et livraison, Bureau du Conseil privé : D'accord. Les indicateurs de rendement dans les ministères sont déployés dans le cadre du processus budgétaire dans les plans et les résultats ministériels.
Ils se trouvent tous sur le site web du SCT, et les fonctionnaires seraient fort probablement dans le SGD du SCT, soit le système global de gestion des dépenses.
Nous nous ferons un plaisir de vous mettre en contact avec les personnes pertinentes au SCT.
La sénatrice Marshall : Je vous en serais reconnaissante. C'est en quelque sorte un projet d'envergure pour vous. Avez-vous des dates limites pour ce qui est des progrès que vous devez accomplir? Vous devez en être à la première étape. Vous devez mettre en place des systèmes, puis décider quels systèmes et quels renseignements utiliser.
Y a-t-il des dates limites? Avez-vous des indicateurs de rendement pour le projet que vous menez?
M. Mendelsohn : C'est une excellente question. Je ne suis pas certain si nous avons des indicateurs de rendement pour le moment. Dans le cadre du plan sur le rendement global et des rapports du Bureau du Conseil du Trésor que les greffiers soumettent au premier ministre et que le Bureau du Conseil privé soumet au Secrétariat du Conseil du Trésor, il y a des indicateurs de rendement globaux et un plan de rendement pour le Bureau du Conseil privé. C'est du domaine public.
La sénatrice Marshall : Y a-t-il une date d'échéance à votre projet? Y aura-t-il une date où vous dites que le 31 mars 2018, vous aurez terminé votre projet et les ministères seront responsables d'atteindre les résultats escomptés en ce qui concerne les renseignements?
M. Mendelsohn : Non. Nous avons des plans de travail informels que nous utilisons pour essayer de stimuler les progrès. Je ne dirais pas que nous avons respecté toutes nos échéances internes en cours de route. Il n'y a pas de date limite pour le projet.
Le greffier et le premier ministre ont créé un nouveau secrétariat au Bureau du Conseil privé qui travaille en étroite collaboration avec les secrétariats existants.
Nous travaillons à appuyer les ministères, à respecter les engagements et à soutenir le processus du Cabinet. Notre rôle consiste à aider les ministères à mettre clairement l'accent sur les résultats, les plans de livraison et les stratégies de mesure du rendement dans le cadre du processus de délibération et du processus d'appui du Cabinet.
Il n'y a pas de date limite pour notre projet.
La sénatrice Marshall : Merci.
Le sénateur Woo : Bonjour, messieurs Mendelsohn et Bilodeau. Merci de votre témoignage. Vous êtes ici dans le cadre de notre étude sur les infrastructures.
Nous avons entendu des témoignages sur la façon de mesurer le succès des dépenses massives dans l'infrastructure. Certains sont d'avis que nous ne devrions pas seulement considérer comme étant fructueux les investissements dans l'infrastructure qui augmentent la productivité à long terme de l'économie canadienne. Autrement dit, ce sont les investissements qui améliorent le potentiel économique pour accroître la productivité.
D'autres sont d'avis que seulement un petit pourcentage des investissements actuellement annoncés, dont ceux dans les secteurs du commerce et des transports, amélioreront la productivité.
Bien entendu, il y a d'autres façons d'examiner les investissements dans l'infrastructure et les avantages de ces investissements. Il serait peut-être préférable de poser cette question au prochain groupe de témoins, mais j'aimerais savoir comment vous mesureriez les résultats en matière de rendement, les retombées et les résultats au chapitre de l'infrastructure.
Êtes-vous d'accord que cette vision légèrement plus étroite de l'amélioration de la productivité est la bonne façon de voir les choses concernant les dépenses du gouvernement dans l'infrastructure?
M. Mendelsohn : Merci beaucoup de la question, sénateur. Je suis ravi de vous faire part de mes réflexions à ce sujet. Je suis certain que les fonctionnaires du ministère de l'Infrastructure auront sûrement d'autres points de vue.
L'infrastructure qui améliore la productivité est évidemment essentielle à la prospérité de l'économie canadienne. Le gouvernement du Canada effectue depuis longtemps des investissements considérables et transformateurs dans les infrastructures frontalières et les corridors commerciaux. Le gouvernement du Canada met l'accent sur ces infrastructures depuis longtemps.
Comme vous le signalez, ces questions font l'objet de débats. Il y a de nombreux désaccords, même si vous commencez avec une perception étroite en misant sur les infrastructures qui améliorent la productivité pour déterminer les infrastructures qui permettront de le faire.
Les transports en commun améliorent-ils la productivité? Certains diraient : « Non, c'est seulement les logements sociaux », mais si vous offrez à des Canadiens à faible revenu un logement décent près de possibilités économiques et des transports en commun, de nombreuses données probantes et recherches laissent entendre qu'ils seront plus susceptibles de participer à la vie économique et au marché du travail, ce qui améliore la productivité.
Ces questions sont complexes. Nous nous sommes concentrés sur un certain nombre de piliers ou d'indicateurs différents qui seraient importants. Les indicateurs entourant la productivité et la croissance économique sont très importants, mais la viabilité et les considérations environnementales sont toutes aussi importantes. Quelles quantités d'émissions de gaz à effet de serre vos services de transport ou vos parcs immobiliers génèrent-ils? C'est également important.
À long terme, de nombreuses personnes et le gouvernement ont laissé entendre que cela multipliera les possibilités d'avoir une économie plus viable.
Je dirais que le troisième facteur est l'infrastructure sociale. Dans certains de ces secteurs, nous avons d'excellentes données, notamment en ce qui concerne les besoins impérieux en matière de logement. Quelle part de son revenu une personne doit-elle dépenser sur le logement? Dans quel état le parc de logements est-il? Les logements sont-ils abordables?
Ce sont des considérations importantes également. Le logement n'est pas abordable dans certaines régions qui sont souvent situées près des activités économiques. Les gens doivent déménager très loin des activités économiques pour avoir les moyens de se payer un logement et doivent faire un trajet de deux heures pour se rendre au travail. Cela crée des problèmes de congestion routière, et tous ces éléments sont interreliés.
Si les centres urbains sont congestionnés en raison des gens qui vivent à l'extérieur du centre-ville, cela rend le transport des marchandises plus difficile. Vous trouvez d'autres itinéraires, évidemment, mais ce ne sont probablement pas ceux qui sont les plus productifs.
Je dirais, pour résumer, sénateur, que c'est un dossier complexe. Le sous-ministre d'Infrastructure pourra vous en dire plus à ce sujet, mais le gouvernement ne devrait pas se concentrer exclusivement sur les mesures économiques. Il devrait plutôt se concentrer sur un vaste éventail de mesures, dont la croissance économique et la productivité, les considérations liées à la viabilité environnementale et les considérations sociales qui, ensemble, contribuent à une bonne croissance économique et à la création de possibilités pour améliorer la qualité de vie.
La sénatrice Eaton : Vos remarques sont de la musique à mes oreilles. Au comité, nous demandons depuis très longtemps que lorsque les ministères comparaissent devant nous, ils nous fournissent les résultats du programme de l'année précédente ou nous disent quelles étaient les mesures de rendement, mais ils n'ont jamais pu nous fournir ces renseignements.
J'imagine que ce que vous disiez, monsieur Mendelsohn, est que pour définir le nouveau cadre ministériel des résultats, dans les années à venir, si AINC comparaît devant nous, nous pourrons dire que vous avez consacré telle ou telle somme d'argent au logement l'année précédente. « Où les logements ont-ils été construits? Ont-ils été construits adéquatement? »
C'est le type de réponses que nous serons en mesure d'obtenir au sujet de divers programmes. C'est le but ultime.
M. Mendelsohn : C'est certainement l'objectif.
La sénatrice Eaton : Ce serait merveilleux.
Ma deuxième question est la suivante : nous examinons les infrastructures et il semble que la majorité des infrastructures sont construites par les municipalités, suivies par les provinces. Très peu d'infrastructures sont construites par le gouvernement fédéral, mais c'est le gouvernement fédéral qui contrôle l'argent.
Comment allez-vous retracer l'argent qui est versé au compte-gouttes aux diverses provinces et leurs priorités, de même que l'argent qui est versé au compte-gouttes aux municipalités pour vous assurer que l'argent que vous leur donnez est utilisé là où il devrait l'être?
M. Mendelsohn : Je répète que c'est un plaisir d'être ici. Ce sont là d'excellentes questions et discussions. Vous vous concentrez sur des questions difficiles auxquelles nous sommes confrontés au quotidien.
En ce qui concerne les dépenses provinciales et municipales et les fonds qui sont remis au compte-gouttes à des projets particuliers qu'une communauté appuie ou qu'un gouvernement provincial appuie — encore là, le sous-ministre Tremblay voudra peut-être vous en dire plus à ce sujet —, l'un de nos objectifs est de passer à une étape où nous négocierons des ententes bilatérales entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et territoriaux.
Dans le cadre des négociations de ces ententes bilatérales, l'un des objectifs fédéraux consiste à cibler des approches et des indicateurs communs pour la reddition de comptes que les provinces et les municipalités appuieront.
De toute évidence, dans un système de fédéralisme comme le nôtre, le gouvernement fédéral ne peut pas obliger les provinces ou les municipalités à faire certaines choses, mais je pense que le gouvernement fédéral a un intérêt légitime à faire rapport sur certains indicateurs clés et résultats qui sont importants dans l'ensemble du pays. Les provinces et les gouvernements provinciaux en général appuient l'idée.
Une partie de l'objectif des négociations des ententes bilatérales est que plus d'argent commence à être dépensé pour les infrastructures. À mesure que le gouvernement fédéral s'entend avec les provinces sur des approches et des projets, l'un des aspects importants sera la façon dont nous ferons rapport aux Canadiens pour qu'ils puissent connaître les résultats des dépenses.
La sénatrice Eaton : Ce doit être une tâche énorme que vous accomplissez si le ministère de l'Infrastructure n'a pas d'argent. Ai-je raison? Il verse des fonds à d'autres ministères pour qu'ils construisent ces infrastructures.
M. Mendelsohn : Non, le ministère de l'Infrastructure est responsable de la majorité de ces fonds.
La sénatrice Eaton : Ils ne seront pas versés à la Société canadienne d'hypothèques et de logement. Ils ne seront pas versés à Pêches et Océans et ne seront pas consacrés à d'autres portefeuilles?
M. Mendelsohn : Non. L'argent est versé à toutes les entités suivantes : la SCHL, Pêches et Océans, EDSC et aux organismes responsables du logement et des parcs. Il y a un certain nombre de ministères qui ont des éléments d'infrastructure, ce qui fait partie du défi de la reddition de comptes au public et des comités comme celui-ci et d'AINC également, comme vous le dites.
Il y a quelques infrastructures culturelles à Patrimoine Canada. Il y a une variété d'éléments d'infrastructure différents, mais le programme de base est un programme d'infrastructure. La négociation des ententes bilatérales dans la majorité de ces fonds, notamment pour les transports en commun et la majeure partie des infrastructures vertes, se fait au ministère de l'Infrastructure.
La sénatrice Eaton : Vous avez beaucoup de chemin à faire pour retracer l'argent. Vous avez beaucoup de chemin à faire pour retracer les résultats des dépenses, car le processus commence au ministère de l'Infrastructure. L'argent est ensuite remis à un autre ministère. Il peut être versé à une province. Il peut être versé à une municipalité. Vous avez une tâche difficile.
M. Mendelsohn : Parfois, notre travail est difficile. L'une des choses que nous faisons consiste à mettre en place des structures et des processus bureaucratiques et politiques pour nous assurer qu'il y a la meilleure coordination et la meilleure harmonisation possible.
Le ministère de l'Infrastructure ne transfère pas d'argent à d'autres ministères.
La sénatrice Eaton : Que fait-il?
M. Mendelsohn : Il allouait des fonds. Il négocie et transfère ensuite l'argent aux provinces. Je ne sais pas si Francis veut ajouter quelque chose.
La sénatrice Eaton : Les fonds ne sont pas versés à d'autres ministères.
M. Mendelsohn : Une partie des fonds, mais c'est dans des programmes différents.
M. Bilodeau : Je peux peut-être ajouter quelque chose. Pour le plan Investir dans le Canada, une partie du financement du cadre financier sera versée à Infrastructure Canada, notamment tout l'argent négocié dans le cadre des ententes bilatérales.
Une partie des fonds sont également transférés à d'autres ministères, pas à partir d'Infrastructure Canada directement, mais à partir du cadre financier. Ils sont versés à ces ministères directement.
Infrastructure Canada assume une responsabilité globale en faisant rapport sur le plan Investir au Canada. Il travaille avec d'autres ministères et avec nous pour s'assurer que la présentation de rapports au Parlement et aux Canadiens adopte une approche pangouvernementale à l'égard des infrastructures.
Les fonds sont alloués directement à Infrastructure Canada et à d'autres ministères, selon le programme.
La sénatrice Eaton : Oui, mais ce sont les autres ministères qui pourront assurer le suivi des résultats en matière de rendement, de toute évidence, si les fonds sont versés à ces ministères.
M. Bilodeau : Ceux qui ont reçu des fonds pourront le faire. Par exemple, pour les transports en commun et les infrastructures vertes et sociales, les fonds seront alloués directement au ministère de l'Infrastructure. C'est le ministère qui conclurait les ententes avec les provinces et les territoires directement et qui serait le plus à même de surveiller les résultats.
[Français]
Le sénateur Forest : J'aimerais revenir sur la question de la sénatrice Eaton à propos des infrastructures. Vous avez un défi énorme et vital en raison de l'importance des sommes qui sont en jeu à l'échelle fédérale. Il faut savoir que les montants versés par les municipalités et les provinces sont beaucoup moins importants que ceux du gouvernement fédéral.
Si on veut connaître le chemin parcouru, il faut être en mesure de savoir d'où l'on part et de faire un bilan des infrastructures publiques. On sait que 2 p. 100 des infrastructures publiques du Canada sont de propriété fédérale, que 57 p. 100 sont de propriété municipale et que 41 p. 100 sont de propriété provinciale. En 2012, nous avions évalué le déficit des infrastructures publiques municipales à 34 milliards de dollars au Québec et à 60 milliards de dollars en Ontario. Avez-vous été en mesure de faire le bilan du déficit des infrastructures publiques au Canada?
M. Mendelsohn : Nous n'avons pas fait de bilan, car il y a un manque de données et qu'elles ne concordent pas avec les données recueillies à travers le pays. Par contre, dans le budget de 2016, nous avions investi afin d'appuyer les municipalités dans la collecte des données sur leurs infrastructures publiques. Nous préparons aussi un sondage qui sera lancé dans l'ensemble du pays auprès des municipalités et des gouvernements afin de mieux comprendre l'état des infrastructures publiques, leurs lacunes et leurs besoins. Par contre, le genre de bilan que vous suggérez n'est pas possible actuellement, selon moi.
Évidemment, il y a des groupes de recherche qui produisent des rapports et des estimations. Cependant, nous ne connaissons pas l'exactitude et la qualité des données recueillies dans l'ensemble du pays, et ce, même au gouvernement fédéral. Il n'existe pas d'endroit où l'on peut affirmer avec certitude, par exemple, qu'ici, ce sont toutes des infrastructures publiques. En effet, les territoires ont tous des petits morceaux d'infrastructures fédérales ici et là.
Donc, nous avons planifié cet été de nous rendre dans les municipalités et dans les provinces afin de faire un rapport et de mener un sondage détaillé sur la qualité des infrastructures et d'amasser certaines données. Vous pourriez vous renseigner davantage auprès du sous-ministre Tremblay à ce sujet.
Le sénateur Forest : Si je prends, par exemple, les installations portuaires qui sont des infrastructures publiques de responsabilité fédérale, il est incontournable que Transports Canada ou Pêches et Océans Canada, dépendamment du propriétaire de ces infrastructures, fasse le bilan de ses infrastructures. On parle de 2 p. 100 de toutes les infrastructures publiques du Canada. Il s'agit de données importantes qui nous permettront de mesurer l'efficacité de nos investissements. En passant, la Fédération canadienne des municipalités possède des renseignements et elle pourrait être une partenaire intéressante, au même titre que les associations provinciales.
M. Mendelsohn : Oui, le ministère est en train de travailler avec la Fédération canadienne des municipalités. Nous sommes d'accord sur le fait d'établir un bilan de toutes ces infrastructures, et nous sommes en train de collecter ces données.
Le sénateur Forest : Comment envisagez-vous le lien entre le Bureau du Conseil privé, Infrastructure Canada et la future et éventuelle Banque de l'infrastructure du Canada? Comment voyez-vous l'arrimage, le lien, ainsi que la coordination de ces trois institutions à l'avenir?
M. Mendelsohn : Je n'ai pas réfléchi à cela. Je ne vois pas de lien important entre le Bureau du Conseil privé et la Banque de l'infrastructure. Infrastructure Canada et le ministère des Finances, à l'aide du budget, sont en train de créer la Banque de l'infrastructure et d'en annoncer la création. Ils ont fait beaucoup de consultations sur la création et la structure de la banque. Par contre, je ne vois pas beaucoup de liens entre les travaux du Bureau du Conseil privé et ceux de la Banque de l'infrastructure.
Le sénateur Forest : Pourtant, ce sera un outil fort important dans le cadre de la mise en oeuvre du plan.
M. Mendelsohn : La banque recevra un pourcentage des dépenses en faveur de l'infrastructure, mais nous sommes en train de discuter et de travailler avec le ministère de l'Infrastructure et d'autres ministères fédéraux qui consacreront des fonds à l'infrastructure. Encore une fois, je ne vois pas de lien évident entre nous et la banque.
[Traduction]
La sénatrice Andreychuk : Merci. Vous êtes assis à une table qui compte de nombreux experts dans le secteur financier. Je ne suis pas l'un d'eux.
Vous dites que vous voulez faire en sorte que les résultats du programme soient plus faciles à comprendre pour les parlementaires et les Canadiens, et je pense que cela entre dans cette catégorie.
J'ai passé en revue et lu votre exposé. J'ai du mal à comprendre ceci : qu'avons-nous à l'heure actuelle? Je ne le sais pas trop. C'est peut-être parce que je suis nouvelle au comité.
Vous avez énoncé tous les résultats que vous espérez atteindre dans un plan que vous présenterez, mais je pense que nous ne savons pas quand ce sera fait.
Avons-nous un délai d'un an, de deux ans ou de cinq ans où nous ne savons pas ce que vous essayez de faire? Je ne sais pas comment vous vous y prenez concrètement. Vous avez présenté de nombreux bons principes. Je ne dirais pas qu'ils constituent un plan d'action. Je dirais que ce sont des principes. « Nous voulons un jugement avisé et solide; nous voulons des résultats efficaces », et cetera, mais je ne vois pas le plan et l'échéancier.
Je suis tiraillée. Je suis encore préoccupée par les données que nous avons et je me demande ce qu'il faudra faire. Je ne sais vraiment pas si votre plan est en place ou s'il sera en place. Je ne sais même pas quel gouvernement sera au pouvoir dans cinq ans. C'est le même vieux problème. Ai-je raison de dire que nous sommes toujours dans ce contexte d'incertitude?
Le deuxième élément qui me préoccupe est celui dont nous avons discuté, à savoir les infrastructures. Les infrastructures étaient toujours des édifices, et cetera. Oui, vous pourriez poser la question suivante : « Pourquoi bâtissons-nous une patinoire de hockey? »
Vous l'entretiendriez. C'est un besoin social. C'est une bonne infrastructure pour la communauté. C'est avantageux pour une petite ville. Nous nous sommes éloignés considérablement des infrastructures physiques pour nous concentrer davantage sur les besoins sociaux. C'est toujours le problème, pour moi, car on peut prendre n'importe quel programme et dire qu'il est bénéfique. Les avantages indirects sont toujours là.
Si vous construisez des maisons, les gens se porteront mieux et seront probablement plus productifs, mais vous pourriez avoir fait quelque chose sur le plan social pour eux qui les a rendus encore plus productifs.
J'ai un problème avec cette nouvelle définition élargie des infrastructures. J'ai un problème avec un plan qui sera un jour mis en place. Entretemps, nous essayons de rendre des comptes aux citoyens. Que faisons-nous entretemps?
M. Mendelsohn : Encore là, ce sont deux points de discussion qui sont excellents et stimulants.
En ce qui concerne le premier point, notre division a été créée en janvier de l'année dernière. Nous essayons de changer ou de faire évoluer les processus, les structures et la culture de la reddition de comptes pangouvernementale pour faire la transition vers une reddition de comptes plus transparente sur des indicateurs pertinents. En plus des intrants et des activités, nous essayons de mettre l'accent sur les résultats et les répercussions.
Honnêtement, ce n'est pas un projet sur trois mois. Je ne peux pas présumer quand le gouvernement procédera à une reddition de comptes plus horizontale, mais ce que je dirais, c'est que le gouvernement actuel s'est fermement engagé à rendre des comptes de manière transparente sur les résultats à un niveau horizontal et à mettre l'accent sur les résultats, les retombées et les intrants.
Je serais très étonné si vous deviez attendre des années avant de commencer à voir une reddition de comptes horizontale que vous pourriez examiner plus en détail.
Le fait est qu'une variété de données et de rapports sont disponibles à l'heure actuelle dans les ministères et sont soumis par l'entremise des processus du Conseil du Trésor. J'espère qu'on m'invitera à comparaître à une date ultérieure, et j'en serais ravi, pour discuter de la reddition de comptes horizontale, lorsque le gouvernement commencera à rendre des comptes sur les priorités pangouvernementales.
Ce que je dirais sur le deuxième volet de la question, c'est qu'il y a une discussion légitime sur la définition de l'infrastructure. Je remettrais un peu en question la notion que le logement est physique. Ce n'est pas des routes et des ponts, mais le logement est une infrastructure physique. Je tiens à préciser que les infrastructures sociales et vertes ne comprennent pas tout, dont les programmes, par exemple.
Elles mettent l'accent sur les biens physiques, qui peuvent être des maisons ou des garderies, ou sur des infrastructures d'énergie verte ou des usines de traitement des eaux usées. Les gens peuvent avoir différentes définitions, mais il n'est pas déraisonnable de considérer l'infrastructure énergétique ou les usines de traitement des eaux usées comme étant des infrastructures, à l'instar des logements sociaux, par exemple. Les gens peuvent avoir différentes opinions.
Votre question comporte un élément implicite, ou peut-être est-il explicite, qui est très important de signaler, à mon avis, à savoir que l'amélioration des logements sociaux aura des bienfaits sociaux. Cependant, il pourrait y avoir un programme différent, peut-être un supplément de loyer, ce qui augmenterait le nombre d'immeubles appartenant au secteur privé ou instaurerait des mesures stratégiques dont de nombreux fonctionnaires parlent pour augmenter les immeubles locatifs abordables offerts par le secteur privé. Il y a toutes sortes de leviers politiques. Ce sont plutôt des subventions. Il y a une foule de mesures qui peuvent être prises.
Nous n'atteindrons jamais la perfection. Aucun gouvernement n'atteindra la perfection, mais notre approche relative aux résultats et à la livraison consiste en partie à fournir des données et des éléments de preuve pour s'attaquer à ces questions.
La raison pour laquelle nous nous concentrons sur les données relatives aux résultats et à la livraison est en partie attribuable au fait que, dans les gouvernements dans le monde et aux échelons municipal, provincial et fédéral au Canada, de façon tout à fait légitime, il arrive souvent qu'un ministère dirige trois ou quatre programmes différents qui ont des objectifs semblables, mais qui ont des structures très différentes. Si vous demandez aux ministères directement lequel a les répercussions les plus positives, ils peuvent avoir des opinions. Ces opinions peuvent être bien avisées, mais très souvent, ils n'ont pas les données pour confirmer laquelle des deux interventions stratégiques aura les répercussions les plus positives sur ce qui préoccupe les gens.
Votre argument est tout à fait valable et s'inscrit dans la nature de notre travail, qui consiste à pouvoir produire des éléments de preuve rigoureux, fiables et dignes de confiance qui indiqueraient qu'une politique ou un programme a des répercussions plus positives sur telle ou telle chose qu'une autre politique ou un autre programme.
[Français]
La sénatrice Moncion : Merci de votre présentation. C'est très intéressant. Vous avez parlé de projets. En anglais, vous avez utilisé le terme « Productivity Enhancing Infrastructure Project ». Quels critères allez-vous utiliser pour évaluer justement la productivité des projets d'infrastructure? Avez-vous des critères?
La même question se posera lorsque vous choisirez des projets verts, des projets dans le milieu social, des projets liés aux routes. Est-ce que des critères ont été établis pour que cela puisse entrer dans ces catégories? Dans l'affirmative, quels sont-ils?
M. Mendelsohn : Nous utilisons des modèles économiques pour mesurer la productivité ou la contribution aux projets de croissance économique. Je vous suggère de poser ces questions détaillées à mon collègue. Le ministère des Finances utilise des modèles pour essayer d'établir avec précision la contribution à la productivité. Ces modèles sont utilisés et répandus; toutefois, ils sont aussi contestables. Il y a plusieurs critères qu'on peut utiliser, avec beaucoup de rigueur, pour mesurer combien de temps met la marchandise à se rendre d'un point à l'autre du pays ou dans une ville, ou pour mesurer le temps que prend un travailleur pour se rendre à son lieu de travail, ou pour mesurer le temps d'attente pour un autobus ou un métro. Il existe plusieurs outils de mesure. On peut mesurer les émissions de gaz à effet de serre dans nos investissements en infrastructure, les places en garderie disponibles ou les listes d'attente. Il y a plusieurs choses qu'on peut évaluer dans le cas de l'infrastructure sociale, de l'infrastructure verte et de l'infrastructure économique.
La sénatrice Moncion : Deuxièmement, vous avez parlé tout à l'heure du fait que vous avez un plan de travail informel. Normalement, quand on établit un plan de travail formel, il y a des indicateurs de rendement qui sont évalués à la fin. Vous nous indiquez que vous avez un plan stratégique, mais que les plans de travail ne sont pas nécessairement formalisés.
Lorsque vous établissez des indicateurs de performance, c'est vraiment en fonction de ce qui a été fait par les autres et non en fonction de quelque chose qui a été clairement établi par votre département ou par les différents ministères. Vous ne pouvez pas dire, par exemple, que cette année, il y avait 500 projets d'infrastructure dont 493 ont été réalisés. Vous n'avez pas nécessairement établi de nombres. Vous procédez en fonction de ce qui arrive et non pas en fonction de ce que vous avez planifié.
M. Mendelsohn : Les plans et leurs indicateurs de performance, pour un ministère comme celui du Conseil privé, dont le travail est stratégique, car il donne des conseils aux ministres et au premier ministre, sont plus difficiles à formaliser que les plans d'un ministère qui livre des services au jour le jour.Au Bureau du Conseil privé, on veut que le gouvernement fonctionne bien, que les ministres reçoivent de bons conseils et que le premier ministre soit bien appuyé. Le Bureau du Conseil privé fournit un plan stratégique doté d'indicateurs dans son processus normal de rapport au Conseil du Trésor.
[Traduction]
La sénatrice Cools : J'aimerais remercier les témoins qui comparaissent devant nous et faire remarquer que nous recevons souvent des représentants du BCP ici. Je vous souhaite la bienvenue.
Je vous signale également que j'ai eu l'immense plaisir et l'honneur de servir au Sénat avec le sénateur Michael Pitfield, que vous connaissez, qui a été l'un des plus éminents greffiers du Conseil privé, sinon le plus éminent.
J'ai toujours pensé que le BDP est l'élément opérationnel du Cabinet, du gouvernement, pour ainsi dire, mais ma question ne se rapporte à aucune question que vous avez soulevée aujourd'hui ou que vous pourriez soulever la prochaine fois que vous comparaîtrez.
Ma question porte sur un sujet qui me tient beaucoup à cœur. Je parle de la pratique établie depuis un siècle au Sénat, selon laquelle le leader du gouvernement au Sénat doit être membre du Cabinet, c'est-à-dire membre du gouvernement, car pour déclarer des dossiers ou des projets d'initiative ministérielle, on doit faire partie du gouvernement. Cette pratique a soudainement été abandonnée. Le gouvernement précédent y avait déjà renoncé en partie.
Savez-vous qui a avisé le premier ministre qu'il pouvait éviter ou abandonner la pratique consistant à nommer un leader du gouvernement au Sénat? Était-ce votre bureau, puisque vous représentez l'organe opérationnel?
M. Mendelsohn : Je suis heureux d'être ici, sénatrice. Je me réjouis à la perspective de continuer de discuter de ces questions, si jamais on me réinvite un jour.
Comme vous le savez, nous ne pouvons pas vous parler des conseils confidentiels fournis au premier ministre. Vous le savez bien.
La sénatrice Cools : Je suis au courant. Je me demande simplement si cela relève de votre ressort.
Je siège ici depuis longtemps et, jusqu'à tout récemment, l'usage voulait que le premier ministre et le leader du gouvernement au Sénat, ou les deux ministres, travaillent avec un même sous-ministre. Les gens ne le savent pas. Ce sous-ministre travaillait au BCP.
Je me demande bien comment, du jour au lendemain, on en est venu à mettre de côté ces pratiques. Je suis très curieuse. Si ce n'était pas vous, soit. C'est très bien, et je peux comprendre, mais quelqu'un a sûrement dû en faire la proposition.
M. Mendelsohn : Il convient de souligner que le Sénat étudie actuellement — comme vous le savez, sénatrice — la façon dont il peut évoluer et s'adapter à la nouvelle réalité instaurée par le gouvernement. Je suivrai de près vos délibérations à ce sujet, et j'ai hâte de voir comment le Sénat évoluera en tant qu'institution clé du Parlement.
La sénatrice Cools : Je vous rappelle aussi que le leader du gouvernement au Sénat, tout comme son homologue à la Chambre des lords, n'était pas seulement chargé des affaires du gouvernement. Il dirigeait aussi les autres ministres. Il était chef des autres membres du Cabinet, qui siégeaient également aux deux chambres.
Dans les faits, le gouvernement a abandonné la pratique de nommer des ministres au Sénat, mais nous en reparlerons une autre fois.
Le président : Monsieur Mendelsohn, si vous voulez répondre à la question sur l'infrastructure, vous pouvez envoyer une réponse par écrit à la greffière.
Sur ce, nous allons terminer par une question de la part de la sénatrice Marshall.
La sénatrice Marshall : J'ai une question concernant nos échanges durant la première partie de votre témoignage.
Vous avez dit que vous vous occupez des ministères et ces derniers s'occupent, à leur tour, des sociétés d'État. Certains des résultats parviennent aux ministères, n'est-ce pas? Je pensais justement au contexte du ministère des Finances et de la SCHL, car de nouvelles règles ont été instaurées l'automne dernier pour les gens qui cherchent à obtenir des prêts hypothécaires, assurés ou non. Le ministère des Finances doit sûrement avoir établi des indicateurs de rendement qui s'appliquent à la SCHL.
Est-ce que cela relève de votre compétence ou, du moins, auriez-vous des idées ou des commentaires à ce sujet? Je songe au contexte du logement, un domaine qui a le vent dans les voiles en ce moment.
Pourriez-vous clarifier cet aspect? Il existe vraiment une relation directe, dans certains cas, entre les sociétés d'État et les ministères parce que le ministère des Finances doit obtenir de l'information de la part de la SCHL pour être en mesure de prendre des décisions stratégiques. Pourriez-vous clarifier ou expliquer ce point?
M. Mendelsohn : Bien sûr. Il y a toutes sortes de sociétés d'État qui entretiennent différentes relations avec les ministères. Là où je voulais en venir, c'est que, dans le cadre de nos structures et processus officiels relatifs aux unités de livraison au sein du BCP, nous consultons les dirigeants des ministères et leurs équipes. Par contre, s'agissant de la table sur les résultats et la livraison, nous ne travaillons pas directement avec les sociétés d'État ou les organismes.
Comme je l'ai aussi dit, de nombreux organismes et sociétés d'État adoptent la plupart des pratiques et processus en matière de résultats et de livraison. Ils présentent également des rapports publics, et ils rendent compte au Conseil du Trésor.
En ce qui concerne la SCHL, pour reprendre votre exemple, le budget de 2017 prévoit de nouveaux investissements pour la collecte de données sur le logement. La SCHL a produit, elle aussi, des rapports publics sur le logement, comme on peut le constater. Je dirais que la SCHL prône une culture du leadership, axée sur l'établissement de rapports publics de bonne qualité et l'obtention de résultats. Cet aspect continuera d'évoluer.
Le président : Pour la suite des choses, je tiens à dire aux représentants du Conseil privé que nous poursuivrons nos travaux conformément à l'ordre de renvoi du comité des finances du Sénat du Canada. Il s'agit d'assurer la prévisibilité, la reddition de comptes et la transparence.
Il se peut que nous vous demandions de revenir à un moment donné, dans un proche avenir. Cela dit, nous vous remercions infiniment de votre témoignage.
Chers collègues, pour la deuxième partie de notre réunion, nous avons invité des représentants d'Infrastructure Canada pour faire le point sur la mise en œuvre du programme d'infrastructure géré par Infrastructure Canada.
[Français]
Nous avons l'honneur et le plaisir d'accueillir comme témoins M. Jean-François Tremblay, sous-ministre, Mme Darlene Boileau, sous-ministre adjointe des Services ministériels et dirigeante principale des finances, Marc Fortin, sous-ministre adjoint des Opérations des programmes et M. Alain Desruisseaux, directeur général des Politiques stratégiques et initiatives prioritaires.
[Traduction]
Nous recevons également M. Glenn Campbell, sous-ministre adjoint, Financement et investissement en infrastructure, Bureau de transition pour la Banque de l'infrastructure du Canada. La greffière m'a informé que l'exposé sera fait par le sous-ministre, M. Tremblay.
[Français]
Monsieur Tremblay, la parole est à vous.
Jean-François Tremblay, sous-ministre de l'infrastructure et des Collectivités, Infrastructure Canada : Monsieur le président, tout d'abord, merci beaucoup de m'avoir invité. Je tiens à féliciter les membres du comité du Sénat pour leur travail continu dans le cadre de l'étude spéciale sur les infrastructures. J'ai eu le plaisir d'examiner le rapport provisoire du comité, et nous attendons avec impatience la suite de vos délibérations. On m'a demandé de me joindre à vous aujourd'hui justement pour vous donner une mise à jour de nos programmes.
[Traduction]
Je crois que je serai très bref. Vous comprendrez, je l'espère, qu'au lieu d'opter pour un long discours, j'ai décidé de faire une courte déclaration afin de vous laisser plus de temps pour la discussion. En réalité, c'est parce que nous sommes venus ici plusieurs fois. Je crois que vous nous connaissez et que vous avez déjà préparé vos questions.
Je voudrais m'attarder peut-être sur trois grandes questions : le bilan de la première phase de nos programmes, ce que nous faisons maintenant en prévision de la deuxième phase et, enfin, peut-être un retour sur la question de la transparence.
Tout d'abord, comme vous le savez, la première phase comprenait deux programmes qui relevaient de notre responsabilité : le Fonds pour l'eau potable et le traitement des eaux usées, de 2 milliards de dollars, et le Fonds pour les infrastructures du transport en commun, de 3,4 milliards de dollars.
Jusqu'à maintenant, aux termes de ces fonds, nous avons approuvé plus de 1 770 projets. D'ailleurs, plus de 70 p. 100 de ces projets sont en cours.
[Français]
Le deuxième élément concerne ce qu'on appelait nos « Legacy Programs », dont vous vous souviendrez sans doute.
[Traduction]
Plus de 800 millions de dollars étaient prévus pour des programmes qui auraient dû être conclus. En fait, 800 des 830 millions de dollars sont maintenant affectés à des projets. Les fonds restants, soit 30 millions de dollars, ont été inclus dans la taxe sur l'essence sous forme de transfert. Voilà un travail plutôt bien fait.
[Français]
Le troisième élément est la question du Fonds Chantiers Canada.
[Traduction]
Pour ce qui est des projets financés dans le cadre du Nouveau Fonds Chantiers Canada, nous avons essayé, au cours de la dernière année, d'en accélérer la mise en œuvre.
[Français]
Au cours de 2016-2017, ce sont plus de 91 projets qui ont été approuvés, pour un total de 3,4 milliards de dollars.
[Traduction]
C'est en fait une très bonne année pour le fonds.
Parlons maintenant de la deuxième phase. Vous avez lu le budget, tout comme nous, alors vous avez une idée des mesures qui seront visées durant la deuxième étape. J'insisterai sur cinq éléments qui sont vraiment importants pour nous en prévision de cette phase.
Le premier élément concerne les secteurs prioritaires. Le gouvernement a décidé de consacrer des fonds à certains secteurs prioritaires, notamment le transport en commun, les infrastructures vertes, les infrastructures sociales, le commerce et les transports, ainsi que les collectivités rurales et du Nord.
L'autre élément porte sur les accords bilatéraux.
[Français]
L'un des objectifs du gouvernement est de tenter de conclure des ententes bilatérales avec les provinces, sur une période de 10 ans. Il s'agit donc vraiment de planification à long terme dans nos discussions avec les provinces, et nous tentons le plus possible de prévoir des ententes flexibles, mais qui répondent aussi aux priorités.
Le quatrième élément est l'acquisition des résultats.
[Traduction]
Nous passons d'une approche axée davantage sur les critères à une approche qui préconise surtout les résultats. Voilà un changement important par rapport aux programmes que nous avions l'habitude de gérer.
Le quatrième élément concerne la collaboration horizontale, et vous en avez beaucoup discuté avec nous dans le passé. Comment travaillons-nous avec les autres ministères? Certains de ces programmes ne relèvent pas nécessairement d'Infrastructure Canada, et nous essayons de réaliser le plus de progrès possible en collaboration avec nos collègues, surtout dans le domaine des infrastructures vertes, par exemple, où une bonne part de l'expertise se trouve à l'extérieur de notre ministère.
[Français]
Le dernier élément du plan qu'il faut retenir, c'est la question de l'innovation, avec deux initiatives particulières : une sur les villes intelligentes, et l'autre, évidemment, sur la Banque de l'infrastructure. Ce sont des initiatives par lesquelles le gouvernement essaie vraiment de créer des incitatifs pour aborder les questions d'infrastructure de façon différente.
[Traduction]
Voilà donc où nous en sommes relativement à la deuxième phase. À l'heure actuelle, le ministère travaille très fort avec d'autres ministères pour que nous puissions tout mettre en place le plus rapidement possible. Nous serons heureux de revenir vous en parler une fois que nous aurons les détails sur la mise en œuvre de la deuxième phase.
Je tiens à mentionner un dernier point : sachez que nous faisons de notre mieux au chapitre de la transparence et de l'ouverture. Comme vous pourrez le constater sur notre site web, nous avons maintenant une sorte de portail de données ouvertes, où nous mettons à jour nos renseignements chaque semaine.
Nous avons hâte de faire encore davantage à l'avenir. Nous comptons d'ailleurs recourir le plus possible au site web pour permettre aux gens de savoir ce qui se passe à Infrastructure Canada.
En somme, Infrastructure Canada est un petit ministère qui offre un soutien essentiel aux collectivités et qui s'est vu confier un mandat de plus en plus important, comme vous le savez.
C'est tout ce que j'avais à dire, et je suis prêt à prendre part à la discussion.
[Français]
Le président : Merci beaucoup, monsieur Tremblay, pour votre présentation très précise.
[Traduction]
Nous allons commencer par le sénateur Woo, qui est le parrain du projet de loi C-44.
Le sénateur Woo : Voilà un excellent préambule à ma question, même si nous n'étudions pas le projet de loi C-44 en ce moment. Vous savez sans doute qu'il y a eu des discussions sur la question de savoir quel comité devrait entreprendre l'étude préliminaire sur la Banque de l'infrastructure du Canada. Nous voulions nous en occuper, mais c'est le comité des banques qui a fini par avoir le dossier.
Je vais profiter de l'occasion pour discuter, vite fait, de la Banque de l'infrastructure du Canada, qui relève évidemment de votre mandat. Il est donc tout à fait approprié d'en parler.
Vous avez dit que la Banque de l'infrastructure fait partie de la deuxième phase et qu'il s'agit d'une initiative destinée à inciter des investissements supplémentaires au titre des infrastructures dans le cadre du plan général du gouvernement du Canada.
Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur l'idée de créer un nouvel outil qui encouragerait le secteur privé à former des partenariats avec des organismes publics pour construire des infrastructures? Pourriez-vous aussi nous expliquer comment est née l'idée d'établir une telle banque?
Je crois que les citoyens ne comprennent pas ce qui a mené à la création de cette banque, ni pourquoi elle est nécessaire. Étant donné que le gouvernement consacre déjà des milliards de dollars aux infrastructures, pourquoi avons-nous besoin d'un outil supplémentaire comme la Banque de l'infrastructure du Canada, et de quelle manière cette nouvelle entité encourage-t-elle plus d'investissements dans les infrastructures?
M. Tremblay : Les Canadiens s'entendent généralement pour dire qu'il existe un déficit en matière d'infrastructure et que ce déficit est supérieur aux fonds que nous y consacrons en ce moment — et j'entends par là tous les gouvernements confondus — pour combler l'écart.
Par ailleurs, la question de savoir comment s'y prendre autrement pour bâtir des infrastructures fait l'objet de discussions depuis des années, et c'est ce qu'on peut voir dans d'autres pays. Il y aura toujours des infrastructures publiques qui seraient financées par l'entremise de nos programmes. C'est pour cela que nos programmes existent, et nous continuerons de nous en remettre aux accords bilatéraux conclus avec les provinces ou d'en négocier de nouveaux à l'avenir.
La banque, comme nouvel outil, est une option pour les gens qui veulent voir les infrastructures d'un œil différent. Si un projet d'infrastructure promet de servir le bien commun, de favoriser l'intérêt public, de générer des revenus et d'attirer des investissements, les promoteurs pourront s'adresser à la banque. S'ils envisagent d'entreprendre de tels projets, sans nécessairement avoir toutes les compétences, les capacités et les connaissances voulues, ils pourront prendre des démarches auprès de la banque, qui sera là pour les conseiller.
C'est dans ce contexte que la banque a vu le jour, le but étant d'offrir d'autres outils, débouchés et possibilités aux gens qui envisagent de construire des infrastructures aptes à transformer le pays.
Je me demande si Glenn, qui s'y connaît mieux que moi dans ce dossier, et mes autres collègues souhaitent ajouter quelque chose.
Glenn Campbell, sous-ministre adjoint, Financement et investissement en infrastructure, Bureau de transition pour la Banque de l'infrastructure du Canada, Infrastructure Canada : J'ai quelques points à ajouter. Vous avez voulu savoir d'où est venue l'idée. Remontons quelques années en arrière.
Le sous-ministre a évoqué les discussions à l'échelle internationale. Il y a eu un effort concerté, dans le cadre du G20, pour chercher des moyens de stimuler la croissance sur la scène mondiale et d'obtenir de meilleurs résultats dans l'intérêt public. Un des principaux enjeux était le financement des infrastructures, surtout pour ce qui est de savoir comment amener les investisseurs du secteur privé à collaborer avec le gouvernement afin de parvenir à de meilleurs résultats.
Ces efforts ont mené à la création du centre du G20 à Sydney, en Australie. Beaucoup d'autres groupes internationaux se sont concentrés sur la question de l'efficacité et du financement. Le Canada n'était pas seul.
D'ailleurs, la plupart des réserves de capitaux au Canada provenaient d'investisseurs à l'étranger, et c'est toujours le cas. Comme le sous-ministre l'a dit, il existe manifestement un déficit en matière d'infrastructure. Malgré le financement historique du gouvernement, il y aura également beaucoup de pression pour construire plus d'infrastructures. La plupart de ces investisseurs visent à acheter des actifs plus risqués et à investir davantage au Canada, et non pas seulement à l'étranger. Le hic, c'est qu'ils ne disposaient pas d'un outil ou d'un instrument pour les aider à investir en collaboration avec le secteur public, à améliorer l'efficacité au sein du secteur privé et à attirer plus de capitaux pour financer des ensembles d'infrastructure, à mettre en chantier plus de projets — surtout plus de projets transformateurs qui, autrement, ne seraient pas entrepris —, et tout cela, dans l'intérêt public. D'où l'idée de créer la Banque de l'infrastructure du Canada.
D'après ce qui est proposé, il s'agit d'une entité canadienne unique en son genre et, aujourd'hui, le reste du monde prend exemple sur le Canada en raison de la façon dont nous avons relevé ce défi particulier.
Le sénateur Woo : Puis-je enchaîner là-dessus en vous demandant de nous expliquer les aspects uniques de cette banque? On trouve des partenariats public-privé et d'autres structures de banques de développement partout dans le monde. Ce genre d'organismes existent depuis longtemps.
Il s'agit d'une question complémentaire à deux volets. J'ignore si le gouvernement avait tout le savoir-faire nécessaire pour concevoir des partenariats public-privé en vue de projets d'infrastructure.
Où êtes-vous allés chercher les conseils et le savoir-faire nécessaires pour concevoir la Banque de l'infrastructure du Canada qui est proposée?
Pouvez-vous aussi nous expliquer brièvement en quoi la banque de l'infrastructure proposée est différente et unique en son genre, pourquoi elle sort des sentiers battus par rapport aux banques d'infrastructure actuelles?
M. Campbell : Permettez-moi de vous ramener 12 à 18 mois en arrière. La création de cette banque est le fruit d'un effort de collaboration soutenu entre le ministère de l'Infrastructure et des Collectivités et le ministère des Finances. Les deux entités se sont dotées de groupes de travail à l'échelon du sous-ministre adjoint afin de solliciter la collaboration d'autres experts, d'universitaires et d'experts-conseils.
Une partie des rapports de ces experts-conseils ont été rendus publics. Ils ont vraiment tenté de trouver un savoir- faire à l'interne afin de relever ce défi. Nous avions le plan d'action du gouvernement et les demandes formulées par les provinces, les municipalités et les territoires pour une bonification de l'offre de solutions en matière d'infrastructure et pour une consultation plus vaste.
Au cours de cette période, nous avons mené des consultations — et je m'inclus là-dedans — auprès de toutes les strates d'intervenants du secteur public et du secteur privé qui peuplent l'écosystème du financement des infrastructures.
Cet écosystème comptait un grand nombre d'investisseurs étrangers et d'investisseurs du pays, dont certains pouvaient être associés à des caisses de retraite ou à d'autres fonds actifs dans le financement des infrastructures. Il y avait ceux qui étaient particulièrement présents dans les partenariats publics-privés, les PPP. Plus précisément, des sociétés de construction, de génie et de design ont été incluses, ainsi que d'autres, liées aux prêts comme aux capitaux propres. L'écosystème en entier, auquel se sont ajoutés de nombreux universitaires, a observé les choses de près afin de veiller à ce que les gouvernements soient encouragés à mieux intégrer l'urbanisme à leurs activités.
La consultation a été vaste et profonde. En tant que représentant du gouvernement, je peux dire qu'il y a eu un grand jeu médiatique au sujet d'un groupe particulier et d'un événement précis auquel je n'ai pas participé.
Lorsque je jette un coup d'œil à mon agenda des quatre derniers mois — c'est-à-dire depuis que j'ai pris les commandes de ce projet —, je peux voir que nous avons rencontré et consulté ce qui pourrait bien être une centaine d'intervenants privés. Nous sommes dans l'étape de maturation du projet.
Toute cette activité a débouché sur l'annonce de l'automne dernier, sur le budget 2017, et, conséquemment, sur les mesures législatives qui sont ici devant nous. Nous continuerons de consulter tous nos partenaires afin de faire avancer ce projet.
J'espère que cela répond à votre question.
Le sénateur Woo : Qu'en est-il de l'aspect tout à fait particulier de la conception actuelle de la banque?
M. Campbell : Je m'excuse. Beaucoup d'autres pays vivent de l'instabilité politique ou n'ont pas beaucoup de capitaux propres à mettre dans les infrastructures publiques. Bien souvent, c'est la Banque mondiale ou une autre entité qui doit assumer une plus grande part de risque pour eux. Dans de nombreux pays, on demande une plus grande part de subventions, ce qui n'est pas le cas au Canada.
Le Canada a été en mesure de proposer un concept de banque de l'infrastructure qui est très transparent. Le concept ne s'appuie pas sur un recours important à des leviers financiers sophistiqués. Le concept est consolidé, et il est transparent en ce qui concerne les livres. La quantité d'argent et les outils transparents engagés sont très bien définis. On n'a pas eu à échafauder un montage financier complexe.
Le concept est très simple, probablement parce que le Canada avait les moyens de proposer cet outil innovateur. Comme le disait le sous-ministre, c'est facultatif. Ce n'est qu'un des outils de la boîte, et il représente moins de 10 p. 100 de l'ensemble des investissements prévus aux termes du plan d'infrastructure du Canada.
Cette indépendance, c'est-à-dire cet aspect commercial qui fait la part belle aux tierces parties, assurera que les ententes conclues entre les parties sont solides et conventionnelles. Cela permettra de protéger l'argent des contribuables et d'assurer que les infrastructures seront construites.
Nous n'avons pas encore appris tout ce qu'il y a à apprendre à cet égard, mais de nombreux partenaires internationaux m'appellent déjà pour savoir quelles leçons le Canada a retenues de notre projet.
La sénatrice Marshall : Ma question concerne aussi la banque de l'infrastructure. Corrigez-moi si je me trompe, mais j'ai cru comprendre que les 35 milliards de dollars mis de côté pour la banque de l'infrastructure proviennent des 180 milliards de dollars. Est-ce le cas?
M. Tremblay : Non, ce n'est pas le cas.
La sénatrice Marshall : Ce ne l'est pas.
M. Tremblay : Ce n'est pas comme cela que les choses fonctionnent. Il y a 15 milliards qui proviennent des 180 ou 186 milliards de dollars dont vous parlez, mais les 20 milliards qui restent sont essentiellement des montants que la banque peut dégager d'elle-même. M. Campbell pourrait vous expliquer cela mieux que moi. Ce n'est pas nécessairement de l'argent qui provient du trésor public.
La sénatrice Marshall : Ces 20 milliards de dollars ne viennent pas du tout de l'État.
M. Campbell : Je peux peut-être vous aider là-dessus.
La sénatrice Marshall : Oui, je vous saurais gré de nous expliquer cela, car c'est l'impression qui se dégage de ce que l'on entend dans les médias.
M. Campbell : Le gouvernement du Canada s'est engagé à fournir 35 milliards de dollars à la Banque de l'infrastructure du Canada sur une période de 11 ans. Plus tôt, j'ai parlé de transparence. Le gouvernement a présenté un cadre financier qui est transparent. Selon la comptabilité d'exercice, le maximum que ce montant pourrait atteindre sur 11 ans, c'est 15 milliards de dollars.
Le gouvernement a tenu compte de ce montant possible dans ces prévisions financières. Les 15 milliards de dollars sont donc pris à même ces 186 milliards.
Comme le sous-ministre l'a dit, il convient de noter qu'il y a une somme additionnelle de 20 milliards de dollars qui, nous le présumons, sera égalée en actif-passif. Cela signifie que le gouvernement pourrait prêter de l'argent ou acquérir un actif maintenu à parité, et que cela n'aurait aucune incidence financière sur l'administration publique.
La sénatrice Marshall : D'où viennent ces 20 milliards de dollars? Viennent-ils des coffres de l'État?
M. Campbell : Ils proviennent des fonds publics, mais ils n'ont pas à être comptabilisés officiellement comme des dépenses s'ils servent à acquérir un actif d'une valeur égale.
La sénatrice Marshall : La somme est comptabilisée comme un actif et l'on espère qu'elle sera récupérée un jour ou l'autre.
M. Campbell : C'est exact. Si je peux ajouter quelque chose, disons que les 35 milliards de dollars ne seront transférés à cette entité qu'en fonction des besoins. Il ne s'agira pas d'un montant forfaitaire transféré tout d'un coup. Pour éviter des coûts, l'argent sera transféré progressivement et sur une longue période. Cela permettra aussi d'éviter à la société d'État d'avoir à gérer une imposante fonction de trésorerie.
La sénatrice Marshall : C'était le sujet de ma prochaine question. Quel est l'échéancier pour les 15 milliards de dollars qui proviendront des 180 milliards de dollars? Ce débours sera-t-il fait au cours du présent exercice?
M. Campbell : Non, ce débours ne sera pas fait durant le présent exercice. Dans son budget de 2017, le gouvernement dessine un profil théorique étalé sur les 11 prochaines années. Comme nous ne pouvons pas deviner ce que nos partenaires municipaux et provinciaux vont présenter comme projets, le gouvernement s'est donné ce profil théorique auquel il s'adaptera au fil des ans.
Une fois que la banque sera fonctionnelle et que nos partenaires proposeront des projets d'infrastructure plus nombreux, plus gros et de plus longue haleine, le gouvernement adaptera les montants transférés à la banque de l'infrastructure en fonction des ententes à finaliser.
La sénatrice Marshall : Les 15 milliards de dollars sont déjà là, mais seulement à titre de note, n'est-ce pas? Ce montant n'apparaît dans aucune de leurs projections.
M. Campbell : Ce montant fait clairement partie de la projection, conformément au budget de 2017.
La sénatrice Marshall : Il en fait effectivement partie. Et qu'en est-il des 20 milliards de dollars? Sont-ils aussi mentionnés dans le budget?
M. Campbell : Ces 20 milliards de dollars sont mentionnés comme somme nominale. Il s'agit de sorties de caisse qui devront être égalées en passif-actif. En comptabilité d'exercice, c'est une chose que le gouvernement fait sur une base quotidienne. Ce montant n'apparaît pas dans le cadre financier.
La sénatrice Marshall : D'après ce que je comprends, c'est que la banque de l'infrastructure peut avancer de l'argent ou un financement par capitaux propres. La banque peut conclure des ententes partenariales avec différentes sociétés, mais ces sociétés peuvent-elles aussi fournir des garanties? La banque de l'infrastructure peut-elle aussi fournir des garanties?
M. Campbell : La loi est très claire : la banque de l'infrastructure dispose d'outils innovateurs dont elle peut se servir pour mettre au point une entente au sujet d'un élément d'infrastructure donné. Nous nous attendons à ce qu'il y ait toujours une entente. Il y aura toujours une entente partenariale et la combinaison d'outils utilisée sera divulguée.
Aux termes des mesures proposées, il ne fait aucun doute qu'une garantie d'emprunt est possible. Cependant, il y a un mécanisme de responsabilisation additionnel. La banque devra obtenir l'approbation du ministre des Finances pour se servir de cet outil particulier de garantie d'emprunt, étant donné qu'un prix doit être fixé pour cet outil et qu'une garantie d'emprunt doit être assortie d'un passif éventuel.
La sénatrice Marshall : Il n'y a pas de maximum aux garanties d'emprunt que la banque peut donner, mais elle doit obtenir l'approbation du ministre des Finances. C'est donc lui qui circonscrira l'étendue des garanties que la banque peut donner. Est-ce bien ce que vous dites?
M. Campbell : Quel que soit l'outil utilisé, nous présumons que la banque de l'infrastructure restera dans les limites de ses attributions et du filet de sécurité financier que lui fournit l'État. En ce sens, la banque devra respecter certaines limites.
L'utilisation de l'outil cautionne une vérification en aval. S'il y avait une proposition pour aller plus loin, l'approbation du ministre des Finances ne serait plus suffisante. Pour aller au-delà de ce que le Parlement a déjà permis, il faudra un crédit parlementaire.
La sénatrice Marshall : Dans les derniers jours, les médias ont fait allusion à une étude de KPMG, un rapport de 76 pages qui a été rédigé, je crois, en septembre dernier.
Le comité pourrait-il obtenir un exemplaire de ce rapport?
M. Campbell : Oui. Ce rapport a été commandé en mai 2016. Il fait partie des nombreux documents que nous, en tant que gouvernement, avons pris en considération avant d'élaborer les conseils stratégiques au sujet de ce projet. Nous pouvons vous en fournir un exemplaire.
La sénatrice Marshall : Merci beaucoup.
Le président : Monsieur Campbell, nous vous saurions gré de nous acheminer ce rapport par l'intermédiaire de notre greffière.
M. Campbell : Oui, monsieur.
Le président : Aussitôt que possible, je vous prie.
M. Campbell : Oui, monsieur le président.
[Français]
Le sénateur Forest : Merci de votre présence parmi nous. Vous êtes en train de mettre sur pied la Banque de l'infrastructure du Canada. Cet outil n'est pas une fin en soi, mais doit être un moyen pour contribuer à résoudre un problème. Je pose la question souvent, et personne ne m'a donné de réponse jusqu'à maintenant. Avez-vous une idée de l'ampleur du déficit lié aux infrastructures publiques au Canada? Quels sont les secteurs névralgiques?
M. Tremblay : Je ne crois pas pouvoir vous donner de réponse satisfaisante. Les données varient. Vous avez sans doute vu des chiffres qui vont de 100 milliards à 500 milliards de dollars. Il est difficile d'avoir un chiffre exact sur le déficit en matière d'infrastructure. La raison en est bien simple : on manque de données sur les infrastructures. C'est un problème qui est assez important au Canada. Beaucoup de données, pour ce qu'elles valent, proviennent de sondages. Il y a aussi beaucoup de situations où les gens ne connaissent pas l'état exact de leur infrastructure à l'heure actuelle. Souvent, on ne s'entend pas sur la définition de ce qu'est une infrastructure en bon état.
[Traduction]
Tous ces aspects entrent en ligne de compte.
[Français]
Tout le monde est d'accord pour dire qu'il y a un déficit en matière d'infrastructure. Toutefois, l'ampleur de ce déficit est plus difficile à déterminer.
Les villes ont certes des déficits en matière d'infrastructure, et c'est le cas partout dans le monde. Ottawa, Toronto et Montréal sont des villes qui croissent énormément. L'accroissement de la population, évidemment, engendre un déficit en en matière d'infrastructure.
Ce qu'on entend le plus souvent, dans les petites régions et les régions éloignées, c'est la difficulté de garder les infrastructures existantes en bon état. Ce sont souvent les systèmes de traitement des eaux qui sont en cause et les infrastructures énergétiques. Dans nos discussions, nous pouvons constater que l'écart est différent selon les endroits. Il peut varier entre la capacité de maintien d'une infrastructure existante et la capacité de créer de nouvelles infrastructures pour faire face à une population et à des services en croissance.
Le sénateur Forest : Effectivement, il est difficile d'avoir un bilan fidèle du déficit. Par rapport à vos priorités, je pense entre autres aux nouvelles normes, aux nouvelles exigences, particulièrement en matière de protection de l'environnement, qui sont imposées aux petites et grandes collectivités. On demande de rehausser les normes, par exemple, liées au rejet des eaux usées. De par l'action gouvernementale, ceci exerce une pression sur les infrastructures dont, à mon avis, il serait fort pertinent de connaître l'impact potentiel pour éclairer les choix stratégiques quant aux différents secteurs à privilégier dans le cadre des investissements en faveur des infrastructures publiques.
M. Tremblay : L'exemple des eaux usées est pertinent. C'est la raison pour laquelle nous avions mis en oeuvre des programmes dans ce secteur. Nous avons mis beaucoup l'accent sur les eaux usées.
Les municipalités peuvent aussi utiliser la taxe sur l'essence. Nous avons travaillé fort pour veiller à ce que les enveloppes soient disponibles pour les villes qui souhaitaient augmenter leur capacité à traiter leurs eaux usées dans le but de respecter les exigences environnementales.
À long terme, si vous regardez les secteurs traités, le transport en commun en est un. L'offre en matière de transport en commun doit clairement être augmentée. Pour l'infrastructure verte, dans le contexte des changements climatiques, ce n'est pas seulement une question de gaz à effet de serre, mais aussi d'adaptation et de qualité de l'environnement. Ce secteur a aussi été ciblé. Quant aux petites communautés et aux communautés nordiques, nous avons ciblé la dépendance aux énergies fossiles, car, dans le Nord, les demandes en infrastructure peuvent excéder la capacité de la population à en absorber les coûts.
On peut parler aussi des corridors de transport, qui sont un élément important dans le contexte de la globalisation. Les priorités n'ont pas été choisies par hasard; elles semblent répondre à des besoins stratégiques, ce qui inclurait effectivement les eaux usées.
Le sénateur Forest : J'ai une dernière question en ce qui a trait à la Banque de l'infrastructure. Comment allez-vous négocier avec le fait que la banque se veut autonome? On est vraiment à l'étape de l'analyse préliminaire de la loi, mais on comprend que la Banque de l'infrastructure fonctionnera au moyen de prêts, de garanties de prêts et d'investissements de capitaux. Comment allez-vous coordonner les projets retenus par la banque et vos priorités, celles des provinces et des municipalités? Dans le cas d'un projet de transport en commun qui permettrait d'influencer le développement domiciliaire d'une municipalité, par exemple, comment cette coordination se ferait-elle?
Un montant de 35 milliards de dollars, ce n'est pas négligeable comme somme. Pour les programmes des petites et grandes collectivités, c'est tout de même un levier sensiblement important.
M. Tremblay : C'est un levier important. Pour nous, ce n'est pas vraiment une difficulté. La banque sera notre alliée. On reçoit des demandes de projet tous les jours. On reçoit déjà des appels des villes et des provinces qui désirent nous soumettre des projets qui seront intéressants pour la banque. Ils attendent avec impatience de pouvoir discuter avec les gens de la banque.
À l'avenir, nous entretiendrons un dialogue constant avec la banque. Lorsque nous constatons que des projets pourraient être financés par la banque et que les provinces ou les municipalités s'intéressent à l'option de la banque, il est clair que cela devient un avantage. Cela ne contrecarre pas l'admissibilité aux allocations qu'on offre présentement aux provinces et aux territoires. Plusieurs provinces et municipalités s'intéressent à la banque, parce qu'elles la considèrent comme une option différente qui ne limite pas leur droit d'accès à d'autres programmes.
Le sénateur Forest : Donc, la banque aura une autonomie somme toute limitée.
M. Tremblay : La banque aura une très grande autonomie. On s'attend à ce que ses représentants rencontrent les gens directement. Si j'étais à la banque, j'essaierais d'avoir une discussion avec l'ensemble des acteurs dans le domaine de l'infrastructure. Je parlerais avec les ports, avec les grandes villes, avec les petites villes, avec les provinces. J'essaierais de voir quels sont les besoins, quels sont les domaines où la banque pourrait intervenir.
Il est clair qu'au moment où nous rencontrerons ses représentants, nous leur ferons connaître les projets qui sont susceptibles de les intéresser.
Le sénateur Forest : En conclusion, personnellement, il est clair que si cette volonté de collaboration s'inscrit dans la volonté des individus en place et non dans le cadre législatif qui servira à créer la banque, cela m'inquiète. Tout dépendra des personnes en place. Cela pourrait être excessivement inquiétant pour l'avenir.
Le président : C'était un commentaire.
La sénatrice Eaton : Je vais continuer dans la même veine que mon collègue. Est-ce que la banque est ce qu'on appelle en anglais —
[Traduction]
— une « arm's length institution », une institution indépendante, ou sera-t-elle une sorte de sous-comité du Cabinet?
M. Tremblay : C'est une entité indépendante, une société d'État.
La sénatrice Eaton : Qui va nommer son dirigeant principal? Qui va nommer ses directeurs? Qui aura le dernier mot au sujet des projets qui seront financés?
[Français]
M. Tremblay : Pour ce qui est des projets, c'est la banque qui décidera. Comme je l'ai dit, il y aura un dialogue.
La sénatrice Eaton : Le Cabinet n'a rien à dire.
M. Tremblay : Il y aura un dialogue entre la banque et le gouvernement, c'est clair.
La sénatrice Eaton : Alors, c'est le gouvernement qui décidera.
M. Tremblay : Non. Ce n'est pas le gouvernement qui va décider. Le ministre a utilisé le terme « oversight », qui est tout à fait approprié, comme dans le cas des sociétés d'État.
La sénatrice Eaton : Qui nommera le PDG?
M. Tremblay : Pour les nominations, Glenn pourrait vous expliquer cela.
[Traduction]
M. Campbell : La section 18 de la partie 4 du projet de loi C-44 brosse un tableau très précis de la structure de gouvernance de la société d'État. C'est une entité indépendante dotée d'un directeur principal et d'un conseil d'administration indépendant dirigé par un président.
Dans l'avenir, le directeur principal sera nommé par le conseil d'administration et sa nomination devra être approuvée par le gouverneur en conseil. Étant donné la nécessité de presser la mise en œuvre, le projet de loi comprend des dispositions pour permettre...
La sénatrice Eaton : Excusez-moi, monsieur. Les conseils où je siège ont toujours un comité de gouvernance. C'est lui qui nomme les futurs directeurs, et ces directeurs ont habituellement un savoir-faire dont l'entité a besoin. Ce n'est pas le Cabinet qui va nommer les directeurs. C'est le comité de gouvernance qui s'en occupera.
M. Campbell : Permettez-moi de revenir en arrière. Il y a deux façons de voir les choses. Il y a la façon actuelle et l'autre, celle que nous utilisons pour mettre la banque sur pied.
La loi stipule que le gouverneur en conseil peut nommer le président et les directeurs du conseil, ainsi que le PDG de départ. La loi précise toutefois que si un président ou n'importe quel membre du conseil d'administration est déjà en place, ils seront consultés quant au choix du PDG initial.
À l'avenir, c'est le conseil lui-même qui sera chargé de proposer le prochain PDG au gouvernement. Quel que soit le processus qui sera utilisé pour choisir ce PDG, c'est le conseil qui s'en chargera et c'est lui qui présentera la nomination au gouvernement. Ce sont les membres du conseil qui s'acquitteront de ce processus.
Le gouvernement sera en position pour nommer le président et les membres du conseil d'administration, conformément à un processus normal du gouverneur en conseil. Le projet de loi comprend cependant une disposition qui permet au ministre responsable, le ministre de l'Infrastructure et des Collectivités, de consulter le conseil au sujet de ses futurs membres.
Pour le gouvernement, cette façon de faire arrive au bon équilibre entre indépendance et obligations redditionnelles. Le conseil est indépendant et aucun de ses membres ne provient du gouvernement. L'intention est d'avoir un conseil formé de représentants professionnels émérites issus de la population canadienne.
La sénatrice Eaton : S'il y a un changement de gouvernement, le nouveau gouvernement peut se débarrasser du PDG, certains membres du conseil peuvent démissionner et tout est à reprendre du début. Est-ce l'intention, ou est-ce que l'entité sera suffisamment indépendante pour faire en sorte que le prochain gouvernement — qui que ce soit qui formera le gouvernement après 2019 — ne sera pas en mesure de remercier le PDG et de le remplacer par quelqu'un d'autre?
M. Campbell : Je ne vais pas me prononcer sur le contexte qui pourrait donner lieu à des changements. Cependant, le projet de loi comprend des dispositions qui vont dans les deux sens. Un conseil qui souhaiterait se débarrasser du PDG aurait le pouvoir de le faire, mais il lui faudrait d'abord consulter le gouvernement. Dans le cas d'un membre du conseil que l'on souhaiterait voir partir, le président, le conseil pourra en faire la proposition au gouvernement.
De la même façon, si le gouvernement voulait se débarrasser du PDG ou du président du conseil, il devra consulter le conseil et le président avant de pouvoir le faire.
Les deux parties sont mutuellement obligées l'une envers l'autre. C'est pour cette raison qu'elles ne peuvent se débarrasser unilatéralement de l'un des acteurs, quelles que soient les circonstances.
La sénatrice Eaton : On dirait qu'il s'agit d'une porte ouverte aux ennuis. Ce sera très intéressant de voir comment les choses vont évoluer.
Dans votre exposé, vous avez parlé de transport en commun, d'infrastructures vertes, d'infrastructures sociales, de commerce et de transport. Pouvez-vous me donner une idée approximative des pourcentages que chacun de ces postes retirera du fond d'infrastructure?
M. Tremblay : Si vous pensez au transport en commun, aux infrastructures sociales et aux infrastructures vertes, la répartition se fera en trois parts égales. Ce sont les principaux postes.
La sénatrice Eaton : Vous voulez dire 30 p. 100 de l'ensemble du fond au cours des 11 prochaines années, c'est bien cela?
M. Tremblay : Cela dépend de ce que vous calculez. Si vous partez du 180 milliards de dollars, les montants seront beaucoup plus modestes. Je ne veux pas faire fausse route à cet égard, car il faut aussi tenir compte de la taxe sur l'essence.
La sénatrice Eaton : La répartition est 30, 30 et 30.
M. Tremblay : Si l'on regarde ce qui était annoncé dans le budget, il serait question à peu de chose près de 20 milliards de dollars pour chacun de ces trois éléments.
Le président : Pour la gouverne des sénateurs, le comité des banques se penchera demain après-midi sur la section 18 de la Loi sur la Banque de l'infrastructure du Canada. Je vois que M. Campbell sera là. Distingués collègues, vous avez vous aussi le droit d'assister à cette séance.
[Français]
Le sénateur Pratte : Monsieur Tremblay, en ce qui concerne la Banque de l'infrastructure, vous dites qu'elle sera chargée d'investir au moins 35 milliards de dollars sur 11 ans grâce à des prêts, à des garanties de prêts et à des investissements de capitaux.Pour poursuivre dans la même veine que la sénatrice Marshall, je comprends que la banque devra, dans le cas des prêts et des garanties de prêts, demander l'autorisation du ministre des Finances. Mis à part l'autorité du gouvernement, y a-t-il des limites prévues dans la loi pour les prêts et garanties de prêts offerts par la Banque de l'infrastructure?
M. Tremblay : La vraie limite est le montant de 15 milliards de dollars et l'impact fiscal pour la banque. Vous pouvez prendre les 15 milliards plus les 20 milliards dont nous avons parlé tout à l'heure. Les 15 milliards peuvent donner un coup à l'assiette fiscale. Si on peut faire fructifier l'argent davantage, on peut aller plus haut et même à la limite, pourvu qu'on se limite aux 15 milliards de dollars. En ce moment, c'est ce qui limite la banque. Il y a peut-être d'autres éléments dans la loi, mais en ce moment, le plus important, c'est que la banque s'est fait donner une enveloppe de 15 milliards qui n'a pas été transférée dans les coffres, mais qui est à sa disponibilité. La banque y aura accès selon les projets à venir et les besoins. Pour la banque, cette enveloppe de 15 milliards représente sa limite, et c'est sa marge de crédit.
Le sénateur Pratte : Pourquoi dites-vous « au moins 35 milliards »?
M. Tremblay : Parce qu'avec les 15 milliards, la banque peut aller jusqu'à 35 milliards, et peut-être même plus. Si vous regardez les rapports du comité consultatif du ministre des Finances, plusieurs ont l'impression qu'avec une certaine somme dans la banque, les investissements peuvent être plus élevés. Il ne faut pas oublier que l'idée, c'est que les investissements de la banque s'accompagnent d'investissements privés. Si vous additionnez ces investissements privés, vous pourriez vous retrouver avec des sommes d'argent...
Le sénateur Pratte : Ce ne serait pas son argent à elle. Ce serait l'argent des investisseurs privés.
M. Tremblay : C'est de l'argent consacré aux infrastructures.
Le sénateur Pratte : Oui, c'est de l'argent consacré aux infrastructures.
J'ai une question sur un autre sujet que la Banque de l'infrastructure. Lorsque nous avons parlé à M. Mendelsohn ainsi qu'à son équipe des rapports et des résultats des projets en matière d'infrastructure, ils ont dit que le ministère était de plus en plus ouvert et qu'il rendait de plus en plus de données disponibles. Par contre, le but du programme des infrastructures, c'est de faire croître l'économie, d'améliorer la productivité et de créer plus d'emplois. C'est ainsi que le gouvernement a présenté le programme des infrastructures. Allez-vous être en mesure de présenter les résultats des programmes d'infrastructure en ces termes, et comment allez-vous faire ces calculs?
M. Tremblay : Nous avons mis en place des groupes de travail de concert avec les provinces au cours des 10 ou 12 derniers mois. Nous tenons des discussions avec les différents ministères et avec le Bureau du Conseil privé. Notre objectif est de présenter les résultats visés et d'arriver avec des indicateurs mesurables au cours des 10 prochaines années. Les résultats prendront un certain temps à se réaliser, car les travaux d'infrastructure ne se font pas nécessairement rapidement. Il faut que ce soit fait dans le cadre de nos ententes avec les provinces. Il ne s'agit pas seulement de croissance économique, comme le ministre l'a mentionné, mais aussi d'inclusion sociale et de la qualité de l'environnement. Ce peut être aussi l'accès aux infrastructures, l'augmentation des services.
Il y a une pléiade d'indicateurs qui peuvent être utilisés pour savoir si on a obtenu les résultats voulus. Donc, il y a une discussion en ce moment à ce sujet, et on espère pouvoir en présenter les résultats dans les prochains jours.
La sénatrice Moncion : Merci beaucoup de votre présentation. J'aimerais vous parler d'un document qui s'intitule Top 10 Legal Risks for Business in 2017 qui a été produit en 2017 par Borden Ladner Gervais. Dans ce document, il est question d'un investissement nécessaire au Canada de 905 milliards de dollars, notamment afin de maintenir les routes, au coût de 330 milliards de dollars, et pour le traitement des eaux usées, à 234 milliards. C'est intéressant, surtout dans le cadre de la question qu'on se pose sur le déficit en matière d'infrastructures. Le document présente aussi l'information relative aux investissements que les provinces feront au cours des 10 prochaines années.
Ma question a deux volets. Tout à l'heure, vous nous avez dit, quand vous parliez d'eau potable et du traitement des eaux usées, qu'un budget de 2 milliards de dollars était prévu, qu'il y avait eu 1 770 projets qui avaient été faits et que 70 p. 100 des fonds étaient engagés dans des projets en cours. Vous nous avez mentionné la même chose pour le transport en commun à 3,4 milliards. Connaissez-vous les autres sommes qui sont allouées aux différents projets que vous avez examinés? Si, par exemple, vous nous dites que 3,4 milliards de dollars ont été versés en faveur de l'infrastructure et du transport en commun, cela nous donne une façon de déterminer combien de ces sommes ont été avancées et combien de ces projets ont été faits. J'imagine que vous faites un suivi des sommes allouées par projet, ce qui fait que, lorsqu'on regarde le total des investissements en matière d'infrastructure, on peut arriver à faire le suivi par nous-mêmes.
M. Tremblay : Vous pouvez retrouver toute l'information par province et par ville sur notre site web. Vous pouvez y voir les projets en cours ainsi que l'allocation disponible par province, le total, combien ont été approuvés, ce qu'il reste comme somme et les détails sur les projets. Les 1 770 projets sont liés aux deux enveloppes, donc le transport en commun et les eaux usées. Vous allez avoir aussi cette information dans le cadre du Fonds Chantiers Canada, sur nos anciens programmes. En fait, vous avez pratiquement accès, pour les 10 dernières années, à tous les programmes que nous avons menés, et il y aurait probablement de 9 000 à 10 000 projets disponibles.
La sénatrice Moncion : Ma deuxième question touche la Banque de l'infrastructure. À l'heure actuelle, au Canada, il existe la EDC, la BDC et la FCC. Quelles sont les différences dans le mode de fonctionnement de la nouvelle banque par rapport à ces trois dispositifs qui existent déjà pour financer les exportations, le développement des affaires et le financement agricole?
M. Tremblay : Autres que les lettres?
La sénatrice Moncion : Oui.
M. Tremblay : Nous n'avons pas en ce moment d'institution qui met vraiment l'accent sur l'infrastructure comme nous voulons que la banque le fasse. C'est-à-dire que la banque doit participer au processus dès le début pour tenter de cerner les besoins à combler et de trouver des solutions novatrices pour arriver à la fin. Ce n'est pas une banque qui distribue des prêts de façon journalière en offrant le meilleur taux d'intérêt. C'est une banque qui finance des projets qui ont un aspect économique et qui peuvent générer des revenus, mais qui, laissés à eux-mêmes, ne pourraient pas être possibles. Ils ont besoin d'un coup de main. C'est là que le banque intervient avec les outils qu'elle offre, que ce soit des garanties de prêts ou en prenant de l'équité et en acceptant, dans certains cas, de ne pas faire le même profit que d'autres pourraient faire, mais de rendre l'investissement possible. C'est très différent de ce que font les autres banques.
Je ne sais pas si M. Campbell voudrait ajouter des éléments à ce sujet, mais c'est réellement très différent de ce que font la EDC et la BDC.
[Traduction]
M. Campbell : Premièrement, en tant qu'ancien dirigeant de la division des institutions financières, des banques et des opérations bancaires à Finances Canada, je suis bien placé pour dire que la Banque de l'infrastructure du Canada est, de par son concept, une banque en ce sens qu'il s'agit d'une banque d'investissement.
Nombre d'autres institutions comparables du secteur privé offrent une fonction de soutien à la structuration et à l'investissement. Elles consentent des prêts aux promoteurs de projets, attirent des investisseurs et font de la structuration complexe. La seule chose est qu'elles n'acceptent pas les dépôts, car cela n'est pas réglementé.
Dans un sens, il s'agirait d'une banque d'investissement qui jouerait un rôle unique puisque aucun joueur du secteur privé n'a maintenant la capacité d'assurer les risques entre ces parties pour qu'elles entreprennent d'importants projets d'infrastructure. Elle occupe un créneau évident dans le marché; il manque de modes d'investissement comme ceux qu'elle offre.
En comparaison, la BDC est vraiment une institution qui accorde des prêts aux petites entreprises et à d'autres types de programmes très spécialisés à grande échelle, partout au Canada, avec une grande base structurale.
EDC offre un soutien très spécialisé aux exportateurs et assure souvent les divers risques à l'extérieur du pays.
FAC assure principalement les risques du côté agricole.
Comme le secteur privé, le gouvernement dispose d'organes et d'organismes distincts qui doivent rendre des comptes pour s'assurer que leurs mandats sont ciblés et qu'ils donnent des résultats.
Quant à elle, la Banque de l'infrastructure du Canada vise à occuper un créneau précis, il s'agira d'un très petit groupe de peut-être 50 à 100 personnes; sa croissance dépendra de ses compétences et de certaines de ces autres fonctions de consultation sur les données. Il s'agit vraiment d'un créneau, d'un ensemble de compétences unique.
Le gouvernement du Canada aurait besoin d'attirer des capitaux hautement spécialisés et des assureurs de crédit pour formuler des conseils au gouvernement et offrir la même structure qu'une banque. Nous voyons des délimitations claires entre eux.
Le corollaire est que les provinces aient des organismes d'acquisition comme Infrastructure Ontario, SaskBuilds et Partnerships BC. Ils participent tous aux acquisitions.
Cela concerne la construction et les questions en aval dans le cadre desquelles la banque pourrait toujours former des partenariats sans chevauchement avec tous ces organismes, car c'est une décision qui porte sur la façon dont ils sont construits. C'est vraiment une responsabilité délimitée entre ces diverses parties.
Le président : La sénatrice Andreychuk est la prochaine intervenante, suivie de la sénatrice Cools, mais notre temps est limité, alors je vais laisser aux deux sénatrices le soin de décider comment le partager.
La sénatrice Andreychuk : Je vais circonscrire ma question. Je veux vérifier la réponse que vous avez donnée à la sénatrice Eaton, monsieur Campbell.
Vous avez commencé par dire que le gouvernement aurait un rôle à jouer dans la nomination du conseil et des directeurs initiaux, et cetera. Ensuite, vous avez dit — et c'est ce qui m'a laissée un peu confuse — qu'en fait, le gouvernement avait un rôle à jouer. Il pourrait destituer le président ou un membre en consultation avec le conseil existant pendant son mandat.
M. Campbell : Pour être clair, madame la sénatrice et monsieur le président, la loi prévoit que le gouverneur en conseil nomme le président et les directeurs.
La sénatrice Andreychuk : Non. Nous comprenons la première partie, le commencement. Que se passe-t-il par la suite?
M. Campbell : Par la suite, en ce qui concerne le président et les directeurs, le ministre peut former un comité, dont feront partie les directeurs, pour discuter de la nomination de futurs directeurs. C'est ce que prévoit la mesure législative. C'est clair.
Ce dont il est ici question, c'est que le premier dirigeant est le seul que le conseil puisse nommer. À l'avenir, il pourra faire sa propre sélection et faire lui-même ses nominations, avec l'aval du gouverneur en conseil. Il s'agit d'une discussion distincte.
La sénatrice a demandé ce qui se passe en cas de destitution. La mesure législative contient des dispositions claires qui stipulent que divers joueurs peuvent être destitués, mais une en particulier qui prévoit que les deux côtés doivent se consulter.
L'idée est qu'aucun des deux côtés ne peut unilatéralement destituer un de ces agents précis sans consulter l'autre. C'est l'équilibre prévu dans la mesure législative.
La sénatrice Andreychuk : Oui. Je crois comprendre que cela signifie qu'il y a un dialogue, mais qu'on peut prendre des mesures unilatéralement. Je vais changer de sujet.
Monsieur Tremblay, nous venons juste d'avoir des nouvelles du BCP. Ils ont un plan majeur, qui semble vraiment bien, sur la façon dont nous pourrons faire le suivi horizontal et comprendre le rendement, et cetera, de tous ces projets d'infrastructure.
À l'heure actuelle, êtes-vous la personne responsable des 186 milliards de dollars et plus, quel que soit le montant, et des 32 ministères? Vous avez fait une déclaration intéressante selon laquelle le ministre est celui qui veut pouvoir dire que ces infrastructures sont gérées selon le mandat qui a été pris, mais qui pourrait aussi vouloir dire qu'elles sont utiles et qu'elles ont fait ce qu'elles devaient faire tant sur le plan de l'incidence sociale que structurelle.
Est-ce que la responsabilité vous revient avant d'aller au ministre? Êtes-vous la personne responsable ou cela pourrait-il changer?
M. Tremblay : Suis-je l'homme de 186 milliards de dollars? C'est une bonne question.
La sénatrice Andreychuk : Le problème est le suivant : vers qui devons-nous nous tourner pour obtenir la réponse définitive? Si nous n'obtenons pas ce que nous voulons ailleurs, êtes-vous la personne à qui faire appel?
M. Tremblay : Nous avons essayé d'organiser les choses de façon à jouer un rôle de coordonnateur, c'est clair. Comme je l'ai mentionné, nous optons de plus en plus pour une approche nettement plus interministérielle qu'auparavant.
Oui, nous voulons, le plus possible, présenter des rapports horizontaux pour que les gens cessent d'essayer de trouver ce qui se trouve là, là et là. Ce n'est pas nécessairement sur tout, mais dans la plupart des cas, certainement. Ce n'est pas quelque chose que nous essayons de faire.
Nous avons mis en place des structures en collaboration avec d'autres ministères. Honnêtement, le BCP et le Conseil du Trésor sont utiles pour s'assurer que ces choses se font. Alors, oui.
Nous ne sommes pas nécessairement responsables de la prestation de tous ces programmes. Nous avons tenu ces discussions avec les provinces. Certaines d'entre elles ont dit : « Pourquoi ne faites-vous pas tout parce que nous vous aimons ou parce que vous êtes gentils? » Je plaisante. Ces discussions ont lieu.
Nous avons essayé de nous concentrer sur ceux qui, selon nous, ont une valeur ajoutée et la capacité ou la relation nécessaire avec la province pour ce faire.
Si vous prenez une bonne partie de l'infrastructure sociale, par exemple, vous verrez que la SCHL, dont il a été question plus tôt, a déjà signé des accords avec les provinces. Il n'y a aucune raison pour nous de les gérer. Nombre de ces activités font déjà l'objet de discussions. Nous essayons de ne pas faire le travail en double et de coordonner davantage nos efforts.
Lorsque nous travaillons avec le BCP à déterminer les indicateurs et les résultats, nous ne pensons pas nécessairement juste aux résultats au Parlement, mais aussi à l'incidence sur l'infrastructure. Nous optons pour ce type d'approche générale. On y va une étape à fois, mais comme M. Mendelsohn l'a mentionné, c'est le genre d'objectif que nous avons.
Le président : Nous allons terminer notre séance de ce matin avec la sénatrice Cools.
La sénatrice Cools : J'ai deux questions brèves à vous poser qui pourraient vous donner du fil à retordre. Je ne suis pas certaine. Je veux savoir pourquoi les choses avancent aussi rapidement. Qu'est-ce qui presse tant?
Il y a quelques mois, nous avons vaguement entendu les mots « banque de l'infrastructure » et, aujourd'hui, nous examinons un document de 280 pages, le projet de loi C-44, qui contient un projet de loi de 12 pages sur la banque de l'infrastructure. J'aurais pensé que cette question était si novatrice, si originale, si profonde et si vaste que nous ne nous précipiterions pas autant.
La seconde question porte sur la destitution des premiers dirigeants. Le paragraphe 34(1) du projet de loi prévoit que la première personne à exercer les fonctions de premier dirigeant soit nommée à titre amovible par le gouverneur en conseil pour le mandat que celui-ci estime indiqué.
La personne qui a rédigé cet article ne comprend pas que « à titre amovible » ne signifie pas « mandat ». Certaines nominations sont à titre amovible, d'autres sont à titre inamovible, alors que d'autre encore sont de durée déterminée.
Quelqu'un doit examiner ce point avec beaucoup de soin. La durée du mandat sera celle que le gouverneur en conseil jugera appropriée. La question doit être étudiée minutieusement.
M. Tremblay : Pour ce qui concerne le délai, ce projet figurait dans le programme électoral du parti et dans la lettre de mandat que mon ministre a reçue il y a un an et demi. Nous travaillons à ce dossier depuis maintenant plus d'un an.
Comme M. Campbell l'a mentionné, on a tenu de nombreuses consultations et on a beaucoup travaillé avec les gens de l'extérieur. Certaines de ces personnes se sont aussi jointes à nous pour nous aider, comme Jim Leech.
Je n'ai pas nécessairement l'impression que nous allions trop vite. Nous maintenons un rythme constant, certes. Nous avons tenu des discussions pendant un an, c'est certain.
La sénatrice Cools : Dans votre milieu, mais pas au Sénat ou à la Chambre des communes. Lorsque je dis que les choses « avancent si rapidement », je parle de maintenant, du fait que nous nous précipitons pour qu'il passe au Sénat en temps record. Voilà ce que je veux dire.
[Français]
Le président : Avez-vous des commentaires à faire à ce sujet?
M. Tremblay : Non.
Le président : Pouvez-vous nous dire, à l'heure actuelle, dans le cadre du vote que vous demandez au Sénat, quel pourcentage des fonds sera accordé au logement dans les régions rurales et urbaines canadiennes? Quel pourcentage du budget de 186 milliards de dollars sera versé en faveur des coopératives d'habitation, du logement social, du supplément au loyer et à vos ententes bilatérales sur le logement? Je ne veux pas une réponse immédiatement. Pouvez- vous nous la faire parvenir par l'intermédiaire de notre greffière?
M. Tremblay : On en discutera avec la SCHL, car cela relève de ses activités.
Le président : Voilà pourquoi on vous pose la question.
[Traduction]
Honorables sénateurs, je remercie nos témoins. Si nous avons besoin d'un complément d'information, nous pourrions vous rappeler.
Honorables sénateurs, à 14 h 15 cet après-midi, nous poursuivrons notre étude de la Loi d'exécution du budget dans cette même pièce. Nous accueillerons d'abord un représentant de l'Organisation mondiale de la Santé, qui témoignera par vidéoconférence.
(La séance est levée.)