Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Finances nationales
Fascicule no 82 - Témoignages du 28 novembre 2018 (séance de l'après-midi)
OTTAWA, le mercredi 28 novembre 2018
Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd’hui, à 13 h 47, pour son étude sur la teneur complète du projet de loi C-86, Loi no 2 portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 27 février 2018 et mettant en œuvre d’autres mesures (sujet : partie 4 — mesures diverses — sections 1, 2, 9, 14, 17 et 18).
Le sénateur Percy Mockler (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial permanent des finances nationales. J’aimerais également souhaiter la bienvenue aux gens présents dans la salle et aux téléspectateurs d’un bout à l’autre du pays qui nous regardent à la télévision ou en ligne.
Je m’appelle Percy Mockler, je suis un sénateur du Nouveau-Brunswick et je suis président du comité.
J’aimerais rappeler à nos auditeurs que les audiences du comité sont publiques et accessibles en ligne sur sencanada.ca.
[Français]
Je demanderais maintenant aux sénateurs et sénatrices de bien vouloir se présenter, en commençant par ma gauche.
[Traduction]
Le sénateur Boehm : Peter Boehm, de l’Ontario.
[Français]
Le sénateur Pratte : André Pratte, du Québec.
[Traduction]
La sénatrice M. Deacon : Marty Deacon, de l’Ontario.
Le sénateur Neufeld : Richard Neufeld, de la Colombie-Britannique.
La sénatrice Marshall : Elizabeth Marshall, de Terre-Neuve-et-Labrador.
La sénatrice Andreychuk : Raynell Andreychuk, de la Saskatchewan.
[Français]
Le président : J’aimerais maintenant vous présenter Mme Chantal Cardinal, notre greffière aujourd’hui. Elle remplace notre greffière habituelle, Gaëtane Lemay. Nous vous remercions de votre présence parmi nous. Je vous présente également les analystes du comité, Alex Smith et Shaowei Pu, qui, ensemble, apportent leur soutien aux travaux du comité.
[Traduction]
Aujourd’hui, honorables sénateurs et membres du public, nous poursuivons notre étude sur la teneur du projet de loi C-86, entamée hier avec des fonctionnaires du ministère des Finances et d’autres ministères.
Le projet de loi C-86, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 27 février 2018 et mettant en œuvre d’autres mesures, est ce qu’on appelle une loi d’exécution du budget. Ce type de législation s’inscrit au cœur même du mandat confié au Comité des finances nationales par le Sénat du Canada.
Honorables sénateurs, nous reprenons notre étude là où nous l’avons laissée hier.
Nous allions aborder la partie 4. Vous avez vos cartables et les documents nécessaires. Nous commençons la partie 4. Comme vous le savez, seules certaines sections de cette partie nous ont été renvoyées pour étude, les autres ayant été confiées à d’autres comités sénatoriaux.
Nous entamons la section 1, intitulée Simplification du Tarif des douanes. Pour nous parler de ces mesures, nous accueillons Scott Winter, directeur, Politique tarifaire et commerciale, Division de la politique commerciale et internationale du ministère des Finances Canada.
[Français]
Nous accueillons aussi Mme Diane Kelloway, analyste de statistiques, Division de la politique commerciale internationale, Direction des finances et des échanges internationaux.
[Traduction]
Nous abordons donc la section 1, qui porte le titre « Simplification du Tarif des douanes ». Je demanderais à M. Winter de livrer son exposé. Après avoir entendu l’exposé et les précisions sur la section 1 et la Simplification du Tarif des douanes, nous passerons aux questions.
[Français]
Monsieur Winter, la parole est à vous.
[Traduction]
Scott Winter, directeur, Politique tarifaire et commerciale, Division de la politique commerciale internationale, ministère des Finances Canada : Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité, de nous avoir invités à vous parler de la mesure intitulée « Simplification du Tarif des douanes », qui fait l’objet des articles 69 à 126 de la Loi d’exécution du budget.
Cette mesure comprend plusieurs simplifications structurelles et d’autres modifications techniques au régime tarifaire du Canada, afin de réduire le fardeau administratif, les formalités administratives et les coûts relatifs à la conformité pour les entreprises canadiennes et l’Agence des services frontaliers du Canada.
Cette mesure a été annoncée dans le cadre du Budget 2018 et représente la réponse du gouvernement à la recommandation formulée par le vérificateur général dans l’audit du printemps 2017 sur les droits de douane, et qui visait à examiner et à simplifier le régime tarifaire du Canada.
Cette mesure contient trois grandes catégories de modifications. La première et la plus importante propose d’éliminer plusieurs numéros tarifaires superflus, afin de faciliter les tâches liées au classement et les tâches administratives des importateurs et de l’ASFC. Cette mesure réduira donc le nombre global de numéros tarifaires contenus dans le Décret modifiant l’annexe du Tarif des douanes d’un peu plus de 6 p. 100 — c’est-à-dire 490 numéros tarifaires —, ce qui réduira grandement les possibilités d’erreurs dans le classement, la nécessité d’apporter des corrections, et cetera.
Deuxièmement, la mesure comprend plusieurs modifications visant à préciser l’objectif stratégique de certaines dispositions et à approuver la prévisibilité administrative pour les importateurs et l’ASFC.
Enfin, la troisième catégorie de modifications contient des changements de nature purement administrative. Il s’agit de modifications qui visent à corriger des incohérences mineures entre les versions française et anglaise de la législation ou à mettre à jour l’ordre des numéros tarifaires pour qu’il corresponde aux changements apportés.
Étant donné que les modifications n’ont pas d’effet sur les taux de droits imposés sur les biens importés, cette mesure est sans incidence sur les recettes et n’aura aucun effet sur les négociations en cours ou futures pour le gouvernement du Canada. Les modifications entreront en vigueur le 1er janvier 2019. Merci.
Le président : Merci. Honorables sénateurs, nous avons reçu les renseignements nécessaires. Y a-t-il des questions?
La sénatrice Marshall : Je vous remercie de votre exposé. Certaines des modifications proposées généreront-elles des revenus supplémentaires pour le gouvernement?
M. Winter : Non. Il s’agit seulement d’une simplification structurelle du tarif. Il ne sera donc plus nécessaire de choisir entre trois catégories pour un bien. Il y a maintenant une seule catégorie pour ce bien, ce qui permet simplement d’améliorer la prévisibilité et de simplifier les processus pour les importateurs et l’ASFC.
La sénatrice Marshall : Merci.
La sénatrice Andreychuk : Vous dites que cela simplifie trois catégories; pourriez-vous nous donner un exemple?
M. Winter : De manière générale, le classement tarifaire est normalisé à l’échelle internationale par l’entremise du Système général harmonisé de l’Organisation mondiale des douanes en fonction de ce qu’on appelle la sous-position à six chiffres. Ensuite, chaque pays a la possibilité de préciser son système de classement, par exemple à la sous-position à huit chiffres, afin d’atteindre ses propres objectifs en matière d’économie ou de politique commerciale.
Par exemple, au niveau international, un gadget logiciel pourrait faire l’objet d’un classement à six chiffres. Pour une raison quelconque, le Canada pourrait déterminer que les gadgets logiciels bleus devraient être assujettis à un taux de droit de 10 p. 100 et que les gadgets logiciels rouges devraient être en franchise de droits.
Pour une raison quelconque, ces dernières années, le Canada a attribué un niveau plus élevé de précision aux gadgets logiciels bleus, rouges et jaunes. Ces dernières années, le Canada a unilatéralement éliminé les taux tarifaires sur une vaste gamme de produits, surtout en vue de soutenir la compétitivité du secteur canadien de la fabrication. Puisque tous ces gadgets logiciels bleus, jaunes et rouges sont maintenant en franchise de droits, nous n’avons plus besoin de ce niveau de précision dans la loi. Nous avons donc regroupé ces catégories dans celle du gadget logiciel, ce qui rend les choses plus faciles et plus prévisibles pour les importateurs et ce qui réduit la possibilité d’erreurs à la frontière.
La sénatrice Andreychuk : Vous avez dit que c’était sans incidence sur les recettes. C’est aussi sans incidence sur le sujet, car cela ne change pas la position des importateurs ou des exportateurs.
M. Winter : C’est exact.
Le sénateur Pratte : J’ai remarqué les nouveaux tarifs — selon ce que je comprends, le projet de loi propose les nouveaux tarifs qui s’appliqueront à partir de maintenant. C’est un gros projet de loi, mais environ 200 pages concernent seulement les numéros tarifaires.
M. Winter : Oui.
Le sénateur Pratte : Si je comprends bien, ce sont les nouveaux numéros tarifaires?
M. Winter : Oui. La loi abroge les numéros tarifaires superflus. L’annexe énonce les nouveaux articles de remplacement. C’est très long. C’est seulement parce que nous devons préciser le taux de droit préférentiel qui s’appliquera à chaque numéro tarifaire pour chacun de nos partenaires commerciaux respectifs, ce qui produit, comme vous l’avez dit, un projet de loi très long. Cependant, comme nous l’avons dit, la plus grande partie de son contenu est sans incidence.
Le sénateur Pratte : Dans quelle mesure cela simplifie-t-il les dispositions en vigueur?
M. Winter : Actuellement, le tarif contient 7 582 numéros tarifaires à huit chiffres. Les modifications réduiront ce nombre à 7 092 numéros tarifaires le 1er janvier 2019.
Le gros avantage, c’est que cela réduit la possibilité que les importateurs fassent des erreurs — sciemment ou non — dans le classement de leurs biens, en disant par exemple qu’il s’agit d’un gadget logiciel bleu ou d’un gadget logiciel rouge. Cela réduit également les efforts et les ressources que doit déployer l’ASFC pour confirmer le classement des tarifs, car ils n’auront plus ce degré de précision.
Le sénateur Pratte : Est-ce un processus continu? Simplifiez-vous souvent les numéros tarifaires de cette façon?
M. Winter : Ces dernières années, nous avons adopté une politique tarifaire proactive pour appuyer des objectifs stratégiques précis. Nous avons appuyé plusieurs secteurs opérationnels, par exemple en éliminant les tarifs sur la machinerie et l’équipement, en éliminant les taux de droit sur les intrants de production importés pour la transformation agroalimentaire et en éliminant les tarifs pour les consommateurs.
Ce type de simplification n’est qu’un aperçu. En règle général, nous faisons de notre mieux pour déterminer ce nous pouvons rendre plus efficace et ce qui se prête à des modifications législatives, et nous nous fixons cet objectif.
Le sénateur Pratte : Merci.
Le sénateur Boehm : Monsieur Winter, les bureaucraties tentent continuellement de trouver des façons d’épargner de l’argent aux contribuables. Si je comprends bien, et pour faire suite à la question du sénateur Pratte, on prévoit que cela réduira probablement les coûts administratifs de l’ASFC.
Est-ce une hypothèse réaliste, ou devrons-nous attendre longtemps avant que cela se produise?
M. Winter : Comme je l’ai mentionné, ce changement sera mis en œuvre le 1er janvier. À ce moment-là, l’ASFC n’aura plus besoin de déployer ces efforts ciblés pour valider les niveaux de précision qui ne seront plus dans la loi.
Le sénateur Boehm : Prévoyez-vous qu’on réalisera des économies sur le plan des coûts administratifs?
M. Winter : Ce ne seront pas des économies importantes, mais des économies marginales. Comme je l’ai dit, nous éliminons surtout des articles qui étaient déjà en franchise de droits. Maintenant, l’ASFC déploie ses efforts en matière d’application de la loi sur des biens qui sont assujettis à des droits plus élevés ou sur des droits que les gens ont plus tendance à contourner.
Le sénateur Boehm : Merci.
Le président : Honorables sénateurs, c’est ce qui termine l’onglet 1 de la section 1. Nous abordons maintenant l’onglet 2, intitulé « Régime de pensions du Canada ». Je demanderais donc à notre témoin, Mme Marianna Giordano, directrice, Politique et législation du RPC, de s’avancer.
Je vous remercie d’être ici. On m’a dit que vous aviez un exposé à livrer. Nous passerons ensuite aux questions.
Marianna Giordano, directrice, Politique et législation du RPC, Emploi et Développement social Canada : Merci, monsieur le président.
Aujourd’hui, je parlerai des articles 127 à 129, qui apportent une modification de forme mineure au Régime de pensions du Canada. Cette modification modifiera, dans certains cas, le calcul d’attribution de gains relativement à l’éducation des enfants.
En plus de sa bonification, on a apporté cinq améliorations au RPC, y compris la disposition d’attribution de gains pendant la période consacrée à l’éducation des enfants. Cette disposition a été introduite dans la Loi no 1 d’exécution du budget de 2018, afin d’augmenter la bonification du RPC pour les parents qui cessent de travailler ou qui réduisent leur participation au marché du travail pour s’occuper d’un enfant de moins de sept ans.
Cette modification technique permettra le calcul proportionnel du montant d’attribution de gains dans les rares cas où il ne s’applique pas à une année complète. C’est le cas lorsque la période cotisable d’une personne commence ou se termine dans une année pendant laquelle une attribution de gains est appliquée. Ces cas exceptionnels comprennent des situations dans lesquelles une personne atteint l’âge de 18 ans dans l’année pendant laquelle l’attribution de gains s’appliquerait, ou qu’elle décède ou qu’elle atteint l’âge de 70 ans ou qu’elle commence à recevoir une pension du RPC pendant l’année d’attribution de gains. Je serai heureuse de répondre à vos questions.
La sénatrice Marshall : Que signifie « attribution de gains »?
Mme Giordano : Nous avons bonifié le RPC pour accumuler un quarantième pour chaque année pendant laquelle la personne verse une cotisation. Dans le RPC de base, nous ajoutons ce que nous appelons une attribution de gains pour l’éducation d’un enfant. Nous permettons donc aux gens d’exclure les années de gains nets moins élevés. La bonification n’a pas été structurée de la même façon. Lorsque nous sommes revenus après la Loi no 1 d’exécution du budget de 2018, nous avons ajouté l’attribution de gains. Cela signifie que nous attribuerons un crédit pour les années où une personne a réduit sa participation au marché du travail pour s’occuper d’un enfant. Le crédit est égal à la moyenne de cinq années de salaire de cette personne avant qu’elle ait des enfants. Cela reflète son salaire à ce moment-là.
La sénatrice Marshall : Cela s’appliquerait-il aux hommes et aux femmes?
Mme Giordano : Oui.
La sénatrice Marshall : Faut-il faire une demande ou est-ce automatique?
Mme Giordano : Ce sera automatique. Lorsqu’une personne fait une demande de prestations, elle indique qu’elle a des enfants. Nous appliquerons la disposition à cette personne selon son salaire.
La sénatrice Marshall : Lorsque la personne fait une demande pour quelles prestations?
Mme Giordano : Pour toutes les prestations.
La sénatrice Marshall : Toutes les prestations du gouvernement?
Mme Giordano : Dans le cadre du RPC, le Régime de pensions du Canada. En effet, cette disposition est liée au calcul des prestations du Régime de pensions du Canada.
La sénatrice Marshall : Une personne en congé de maternité ferait-elle une demande de prestations? C’est en grande partie la raison de cette disposition, n’est-ce pas?
Mme Giordano : Le Régime de pensions du Canada est un régime de retraite, mais il offre d’autres prestations, par exemple des prestations d’invalidité, des prestations du survivant et des prestations de décès. La plupart des prestations sont fondées sur les cotisations au régime et le salaire.
Les prestations de base du RPC sont fondées sur la moyenne du salaire. La pension est calculée en se fondant sur 25 p. 100 du salaire moyen. Maintenant, dans le cadre du régime bonifié, les gens cotiseront au RPC et chaque année de cotisation comptera pour un quarantième. Nous prendrons les 40 meilleures années de cotisation au régime bonifié et nous ajouterons cela aux prestations de base. Si vous n’avez aucune année de salaire, cela diminuera vos prestations.
La sénatrice Marshall : Dites-vous que le RPC d’une personne en congé de maternité pendant une année — je ne sais pas si j’utilise la terminologie appropriée — sera automatiquement calculé selon la moyenne des cinq années précédentes et que cela sera ajouté à son dossier?
Mme Giordano : Oui. Dans le cadre de la partie bonifiée, lorsqu’une personne est en congé de maternité et qu’elle ne travaille pas, ses prestations d’assurance-emploi ne représentent pas des gains ouvrant droit à pension. Cette personne ne verse donc pas de cotisation. Nous prendrons donc la moyenne des cinq années de salaire précédentes et nous l’utiliserons pour remplacer cette année sans cotisation.
La sénatrice Marshall : Comment savez-vous qu’une personne est en congé de maternité?
Mme Giordano : La personne nous dira qu’elle a eu des enfants. Nous examinerons ses gains et nous déterminerons qu’elle avait un enfant de moins de sept ans et que de 2020 à 2025, ses gains étaient moins élevés que sa moyenne habituelle. Nous utiliserons alors sa moyenne. Si ses gains étaient plus élevés que sa moyenne, nous n’utiliserons pas sa moyenne, car elle sera plus avantagée avec son revenu.
La sénatrice Marshall : A-t-on estimé les coûts de cette mesure?
Mme Giordano : Cette proposition sert seulement à ajuster le calcul proportionnel. L’attribution de gains a déjà été approuvée par la Loi no 1 d’exécution du budget de 2018. Cela vise à ajuster le calcul proportionnel de l’année pendant laquelle la période de cotisation commence et se termine, et c’est calculé au prorata. Nous utilisons le montant qui reflète la période pendant laquelle la personne était admissible à cotiser.
La sénatrice Marshall : Merci.
Le président : Y a-t-il d’autres questions? Sinon, nous aborderons l’onglet 9, qui traite de la section 9, sous le titre « Loi canadienne sur la budgétisation sensible des sexes ». Nous accueillons Mark Hulett, conseiller principal, Division de l’examen et de la politique de gestion des dépenses. Nous vous remercions d’être ici.
Monsieur Hulett, vous livrerez un exposé, et nous passerons ensuite aux questions.
Mark Hulett, conseiller principal, Division de l’examen et de la politique de gestion des dépenses, Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada : Merci, monsieur le président.
Nous nous excusons, mais ma collègue du ministère des Finances, Mme McDermott, n’a pas pu assister à la réunion. Je représente le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada. Toutefois, je serai heureux de parler en son nom, même si le ministère des Finances dirige cette partie du projet de loi d’exécution du budget.
Vous remarquerez que l’article 5 proposé concerne le président du Conseil du Trésor. Cet article met en œuvre la Loi canadienne sur la budgétisation sensible des sexes. Elle a deux objectifs principaux. Le premier est d’établir la politique du gouvernement visant à favoriser l’égalité entre les sexes et l’inclusion en tenant compte de la diversité et des différences entre les sexes dans le processus budgétaire.
Le deuxième objectif principal est d’établir les exigences en matière de rapports liées à la prise en considération de l’égalité entre les sexes et de la diversité dans les nouvelles mesures budgétaires, les dépenses fiscales et les programmes de dépenses du gouvernement du Canada déjà en œuvre.
Je serai heureux de répondre à vos questions.
Le président : Merci. Les sénateurs ont-ils des questions?
Le sénateur Neufeld : Les rapports à faire sont-ils destinés au public ou sont-ils simplement internes?
M. Hulett : Sénateur Neufeld, ils seraient destinés au public. Vous avez peut-être remarqué, dans le budget de 2018 et dans le dernier énoncé économique et financier, l’allusion à une analyse sensible aux sexes d’un certain nombre de mesures, mais pas à toutes.
Ce serait des rapports de plus à faire, non seulement sur les nouvelles mesures budgétaires, mais, aussi, sur les dépenses fiscales et les dépenses publiques actuelles, et ils seraient rendus publics.
Le sénateur Neufeld : Merci.
La sénatrice Marshall : Quand est-ce que cela entrera en vigueur?
M. Hulett : Si j’ai bien compris, à la date de la sanction royale. Comme je viens de le dire, nous avons vu la prise de premières mesures relativement au budget de 2018, au début de l’exercice et, dernièrement, il y a à peine quelques semaines, relativement à l’énoncé économique et financier.
La sénatrice Marshall : Un groupe, une division ou une direction fédérale est-elle chargée de cette tâche?
M. Hulett : Comme le dit le projet de loi, ça relèverait du ministre des Finances, en ce qui concerne les mesures budgétaires et les dépenses fiscales, et du président du Conseil du Trésor, en ce qui concerne les rapports sur les dépenses actuelles.
La sénatrice Marshall : Savez-vous si on embauchera du personnel supplémentaire?
M. Hulett : Ce n’est pas prévu.
La sénatrice Marshall : Merci.
Le sénateur Klyne : Je vous remercie d’être ici.
J’ai deux questions : quel genre de consultations ont eu lieu avec les syndicats, les employeurs et les employés non syndiqués? Dans quelle mesure les inquiétudes ou les idées de ces acteurs ont-elles influé sur les modifications, le cas échéant?
M. Hulett : À ma connaissance, il n’y a pas eu de consultations mais je ne serais pas non plus nécessairement au courant de leur nécessité, actuellement. Il s’agit ici de communiquer des renseignements supplémentaires, dans le contexte budgétaire. Comme on vous l’a sans doute annoncé, on s’efforcera, quand ce sera possible ou convenable, de communiquer des renseignements supplémentaires touchant les analyses sensibles aux sexes ou...
Le sénateur Klyne : Posons alors la question autrement : Qu’a-t-on envisagé, en ce qui concerne les conventions collectives en vigueur?
M. Hulett : À ma connaissance, ça n’a pas eu d’influence ou il n’y aura pas de consultations.
Le président : Merci.
[Français]
Le sénateur Forest : Au sens de l’article 83, qui exige qu’on actualise tous les cinq ans notre plan d’équité salariale, il y a eu un jugement le 10 mai 2018 qui stipulait que l’ajustement devait être rétroactif. Est-ce que je comprends qu’avec ce que vous apportez comme modification ce ne sera pas rétroactif ?
[Traduction]
M. Hulett : Toutes mes excuses, mais je ne suis pas certain que votre question concerne la partie du projet de loi où nous en sommes.
[Français]
Le président : Ce sera une autre division.
Le sénateur Forest : Je suis une section à l’avance, monsieur le président.
Le président : C’est exact.
[Traduction]
La sénatrice Eaton : De quelle manière la promotion « dans le cadre du budget fédéral annuel, [du] principe de l’égalité des sexes et [de] l’idéal d’une société plus inclusive » pourrait-elle soutenir la croissance économique?
M. Hulett : Sur ce point, je ne peux pas parler nécessairement à la place du gouvernement. Il a expliqué que ça faisait partie de sa politique. Il y voit un aspect important de la croissance et de la prospérité économiques à long terme du Canada.
La sénatrice Eaton : Vous ne pouvez pas m’en donner des exemples? Est-ce que c’est seulement un vœu pieux, des promesses en l’air, de la pensée magique?
M. Hulett : Je crains de ne pas pouvoir répondre. Je suis sûr que nous pourrons vous communiquer plus tard les résultats de nos recherches, si vous voulez.
La sénatrice Eaton : Voici une autre question qui n’est peut-être pas très gentille non plus : quel rôle jouera la ministre de la condition féminine et de l’égalité des sexes pour aider les ministères fédéraux?
M. Hulett : L’article 2 de la loi lui destine un rôle. Nous espérons qu’elle et son ministère annoncé pour bientôt nous communiqueront des compétences et nous inspireront des pratiques exemplaires.
La sénatrice Eaton : Oui. Est-ce qu’elle serait chargée d’essayer d’intégrer la prise en considération de l’égalité des sexes et de la diversité dans les politiques budgétaires?
M. Hulett : Dans les processus et pour appuyer les ministères et les aider à se doter d’une capacité dans ce dossier particulier.
La sénatrice Eaton : Merci.
Le président : Par conséquent pas d’autres questions. Cela conclut l’examen de l’onglet 9, section 9, « loi canadienne sur la budgétisation sensible aux sexes ».
Passons maintenant à l’onglet 14, section 14, « Équité salariale ». Nous accueillons les fonctionnaires d’Emploi et Développement social Canada, notamment Mme Lori Straznicky, qui est directrice de l’Équipe spéciale de l’équité salariale au Programme du travail.
[Français]
Du même ministère, nous accueillons aussi Bruce Kennedy, gestionnaire, Équipe spéciale sur l’équité salariale, Programme du travail.
[Traduction]
Nous avons également la directrice principale de l’équité salariale au Secteur de la rémunération et des relations de travail au Conseil du Trésor du Canada, Mme Renée Caron.
[Français]
Toujours du Secrétariat du Conseil du Trésor, nous recevons Jérôme Mercier, directeur, Calculs et recherches en rémunération, Secteur de la gestion des dépenses.
[Traduction]
Pour l’étude de la même section 14, sur l’équité salariale, nous accueillons la représentante de Services publics et Approvisionnement Canada, Mme Marie-Eve Gagné, qui est analyste des politiques au Secteur des affaires du portefeuille, et Charles Bernard, directeur général, Secteur des affaires du portefeuille.
Mme Straznicky, veuillez nous faire entendre vos observations. Nous vous questionnerons ensuite.
Lori Straznicky, directrice exécutive, Équipe spéciale sur l’équité salariale, Programme du travail, Emploi et Développement social Canada : Merci, mesdames et messieurs les sénateurs. Commençons par un bref résumé de l’objet de cette section. Elle introduit une nouvelle loi sur l’équité salariale qui agit en amont. Elle abroge aussi la Loi sur l’équité dans la rémunération du secteur public et elle modifie la Loi canadienne sur les droits de la personne et la Loi sur les relations de travail au Parlement.
La loi et les modifications proposées visent à créer un régime proactif d’équité salariale qui assurera une rémunération égale pour un travail d’égale valeur aux employés qui occupent des emplois à prédominance féminine dans les lieux de travail régis par des règlements fédéraux.
Voici une vue d’ensemble très générale des modalités d’application de la loi. Elle s’appliquera à tous les employeurs régis par des règlements fédéraux qui ont au moins 10 employés, y compris ceux du secteur privé fédéral, de la fonction publique fédérale ainsi que des cabinets du premier ministre et des ministres. De plus, le régime s’appliquera à tous lieux de travail parlementaires, à la faveur de modifications apportées à la Loi sur les relations de travail au Parlement. Les lieux de travail comptant moins de 10 employés assujettis à la Loi canadienne sur les droits de la personne, dont l’application se fonde sur le dépôt de plaintes.
Le processus qu’institue la Loi sur l’équité salariale comporte plusieurs éléments importants. Le premier concerne les obligations des employeurs et des employés. Les obligations des employeurs dépendent du nombre d’employés sous leurs ordres.
La loi distingue les petits employeurs, qui comptent de 10 à 99 employés, et les grands employeurs, qui ont au moins 100 employés.
Peu importe le nombre de leurs employés, tous les employeurs sont tenus d’élaborer un plan unique d’équité salariale dans les trois années suivant l’entrée en vigueur de la loi ou dans les trois années suivant la date où ils lui deviennent assujettis. Ce plan donnera certains renseignements comme : l’identification des catégories d’emploi sur les lieux de travail; la prédominance masculine ou féminine dans ces catégories d’emploi, à partir d’un seuil de prédominance de 60 p. 100; la valeur du travail dans ces catégories d’emploi d’après une évaluation des compétences, des responsabilités, de l’effort et des conditions de travail; la rémunération reliée à chacune des catégories d’emploi à partir d’une méthode fondée sur la compensation totale.
Le plan comprendrait aussi les résultats de la comparaison de la rémunération des catégories d’emploi à prédominance féminine et masculine de valeur semblable au moyen de la méthode de la droite égale ou de la moyenne égale. Il signalerait les catégories d’emploi à prédominance féminine qui auraient besoin d’une augmentation de la rémunération ainsi que le moment où ces augmentations devraient avoir lieu et fournir des renseignements sur les méthodes de règlement des différends offertes aux employés.
Pour l’élaboration de ce plan, les grands employeurs et ceux dont les employés sont syndiqués, quel qu’en soit le nombre, seraient tenus de confier la tâche à un comité mixte constitué, pour un tiers, de représentants de l’employeur et, pour deux tiers, de représentants des employés et d’autant d’hommes que de femmes.
Les petits employeurs sans employés syndiqués devraient élaborer leurs plans au moyen d’un processus dont ils auront l’initiative.
Quelle que soit la méthode d’élaboration du plan, tous les employés auront la possibilité de formuler des observations à son égard avant qu’il ne devienne définitif. Les employeurs disposeront de trois à cinq années, selon le nombre de leurs employés, pour introduire progressivement des augmentations de la rémunération qui se seront révélées nécessaires, pour autant que ces versements équivalent à au moins 1 p. 100 de leur masse salariale annuelle. Les employeurs seront tenus de revoir leurs plans au moins tous les cinq ans, pour découvrir et combler les écarts de rémunération qui pourront s’être créés et de communiquer une courte déclaration annuelle au commissaire à l’équité salariale pour assurer un contrôle suffisant du processus.
Dans l’application de la loi aux cabinets des ministres et du premier ministre, leur personnel exempté sera protégé d’une façon à reconnaître les particularités de leurs conditions de travail.
Pour faire respecter la loi, un commissaire à l’équité salariale exercera une surveillance rigoureuse et indépendante. Nommé par le gouverneur en conseil à la Commission canadienne des droits de la personne, il administrera la loi et l’appliquera par une gamme de moyens, notamment par les sanctions pécuniaires administratives.
Contre certaines décisions ou ordonnances de la commission à l’équité salariale, les acteurs en présence sur le lieu de travail pourront interjeter appel devant le Tribunal canadien des droits de la personne. La loi prévoit la création d’une unité de l’équité salariale constituée d’agents et d’employés de la Commission canadienne des droits de la personne, qui appuieront le commissaire à l’équité salariale dans l’accomplissement de ses tâches prévues par la Loi sur l’équité salariale.
Une disposition de la loi prévoit aussi la création d’une division de l’équité salariale à la Commission canadienne des droits de la personne, qui serait présidée par le commissaire à l’équité salariale pour répondre aux plaintes contre les pratiques discriminatoires en matière d’équité salariale et dans les lieux de travail régis par des règlements fédéraux et comptant moins de 10 employés.
Enfin, la loi prévoit la nomination au Tribunal canadien des droits de la personne de trois membres supplémentaires possédant des connaissances et de l’expérience dans les questions d’équité salariale.
La Loi sur les relations de travail au Parlement sera modifiée par l’ajout d’une nouvelle partie qui prévoira l’application de la Loi sur l’équité salariale à tous les employeurs et employés du secteur parlementaire fédéral, dans le respect du privilège parlementaire. L’application de cette loi sera également surveillée par le commissaire à l’équité salariale, qui pourra auditer la conformité à la loi, enquêter sur les employeurs parlementaires et émettre des ordonnances de conformité et des avis de contravention pour répondre aux plaintes. Cependant, le commissaire devra prévenir les Présidents de la Chambre et du Sénat avant de pénétrer en tout lieu relevant de l’autorité d’un employeur parlementaire. La sanction pour le non-respect des décisions ou des ordonnances du commissaire serait déposée par l’entremise du Président de la Chambre.
On pourra interjeter appel des décisions ou des ordonnances du commissaire auprès de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral plutôt que devant le Tribunal canadien des droits de la personne.
Voilà le résumé de la section 14 du projet de loi. Je serai heureuse de répondre à vos questions.
Le président : Merci. Allons donc aux questions des sénateurs.
La sénatrice Eaton : Comme vous avez fait beaucoup de recherche avant le dépôt de ce projet de loi, combien de plaintes prévoyez-vous dans la première année?
Mme Straznicky : Dans la première année de l’entrée en vigueur du régime, on s’attend à un nombre assez faible de plaintes adressées au commissaire à l’équité salariale, d’après les statistiques provenant de l’Ontario et du Québec. Une différence, en matière de plaintes, est que les acteurs en présence sur le lieu de travail pourront demander de l’aide pour les avis de différend, ce qui permettrait au commissaire de les aider davantage au moyen de la médiation plutôt que du seul règlement des plaintes.
La sénatrice Eaton : Avez-vous fait une analyse économique de cette loi? Avez-vous une idée de ce qu’il en coûtera aux employeurs?
Mme Straznicky : Chez les employeurs du secteur privé, il est difficile de prévoir les répercussions financières, vu que nous n’avons pas accès à leurs systèmes de rémunération. De plus, tant qu’ils n’auront pas entrepris l’analyse de l’équité salariale, la détermination de la prédominance féminine ou masculine dans les catégories d’emploi et celle de l’existence d’un écart de rémunération, il est difficile de prévoir ou de connaître les répercussions.
La sénatrice Eaton : Passons maintenant à un domaine que vous devriez bien connaître : qu’en est-il de la fonction publique?
Mme Straznicky : Je vais demander à mon collègue de répondre.
Jérôme Mercier, directeur, Calculs et recherches en rémunération, Secteur de la gestion des dépenses, Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada : Conformément à ce que disait Lori, le projet de loi expose une marche à suivre claire pour les employeurs. Dans l’administration fédérale, nous sommes un important employeur d’employés non syndiqués, ce qui signifie que nous devrons élaborer des plans d’équité salariale et le faire avec le concours des représentants de l’employeur pour reconnaître les écarts dans la rémunération, les mesurer et prendre les mesures voulues pour les combler. D’ici là, il est trop tôt pour connaître avec certitude la nature de ces écarts.
La sénatrice Eaton : J’aurais cru que vous donneriez l’exemple.
M. Mercier : Cette loi s’écarte sensiblement du régime fondé sur les plaintes que nous avons encore. Elle implique une évaluation systémique de la structure de rémunération de l’employeur dans un souci d’égalité entre les sexes.
La sénatrice Eaton : J’ai une dernière question, puisqu’on se bouscule pour en poser : combien de temps, d’après vous, vous faudra-t-il, à vous et à la fonction publique — posons l’hypothèse d’une adoption du projet de loi budgétaire avant Noël, prévoyez-vous que ça se fera en moins d’un an ou de 18 mois?
Renée Caron, directrice principale, Équité salariale, Secteur de la rémunération et des relations de travail, Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada : La fonction publique sera le principal employeur visé par cette loi. Les agents de négociation sont nombreux. Dans l’administration publique centrale, ça s’appliquera à environ 200 000 employés. Il faudra du temps pour le faire, pour collaborer avec nos homologues des syndicats et pour nous assurer que nous ne faisons pas d’erreurs.
La loi nous accorde trois ans pour élaborer un plan d’équité salariale. Nous avons bon espoir de respecter ce délai. La loi autorise les employeurs et, je crois, leurs représentants, à demander au commissaire à l’équité salariale une prolongation en cas de besoin légitime des parties de prendre plus de temps pour l’élaboration du plan. C’est une éventualité que l’on prévoit.
La sénatrice Eaton : Merci beaucoup.
Le sénateur Pratte : Encore une fois, bonjour.
J’ai quelques questions pour vous faire part des inquiétudes exprimées par différentes personnes et groupes sur le libellé du projet de loi. Par exemple, d’après ce que j’en comprends, certains groupes d’employés ne sont pas inclus et ils ne seraient pas protégés par cette loi, par exemple, à cause de la nature saisonnière ou occasionnelle de leur travail. Pourriez-vous, s’il vous plaît, expliquer pourquoi ces employés parmi les plus vulnérables ne sont pas protégés?
Mme Straznicky : La loi s’applique à tous les employés, à temps plein, à temps partiel, occasionnels, saisonniers, temporaires, à la seule exception des étudiants inscrits dans un programme d’alternance travail-études ou qui ont tout simplement un emploi d’été.
La loi étendrait sa protection à ces employés, dont l’analyse tiendrait compte. La loi prévoit une exemption très limitée pour le calcul de la rémunération des employés à temps partiel, occasionnels ou saisonniers, au cas où ils ne pourraient pas profiter d’un avantage social en raison de la nature de leur poste. Cela découle simplement du calcul de la rémunération.
Le sénateur Pratte : Voudriez-vous me donner un exemple concret?
Mme Straznicky : Je ferai de mon mieux. Comparons, dans une catégorie d’emploi, un employé à temps plein, touchant un salaire horaire et dont l’employeur cotise au régime enregistré d’épargne retraite et un employé saisonnier ou à temps partiel, touchant lui aussi un salaire horaire, mais qui, à cause de la nature de son poste, n’est pas admissible à participer à ce régime équivalent au régime enregistré d’épargne retraite.
La rémunération du premier, augmentée de cet avantage, serait supérieure à celle du deuxième, à temps partiel. Si une correction devient nécessaire, disons que le premier touche 15 $ plus 2 $, soit 17 $ et que le deuxième en touche 13 plus 0, soit 13 $. S’il faut corriger les deux de 2 $, on ne partirait pas de 17 $ plus 2 $ pour l’employé à temps partiel, mais du même salaire de base plus 2 $.
C’est seulement dans cette zone étroite où, en raison de la nature du poste, il n’a pas droit à un certain avantage que joue l’exemption, mais les employés sont visés par la totalité du projet de loi.
Le sénateur Pratte : Merci. Pour les lieux de travail non syndiqués, les lieux de travail de petite taille, je crois savoir que le processus serait axé sur l’employeur. Il n’y aurait pas de comité sur l’équité salariale dans ces cas-là. Je sais que l’employeur aurait à afficher le plan et les employés auraient l’occasion de le commenter, mais il n’y aurait pas de comité.
Pourquoi feriez-vous ce choix? Ne serait-il pas possible d’avoir des comités dans ces lieux de travail non syndiqués de petite taille?
Mme Straznicky : Vous avez raison, pour ces lieux de travail non syndiqués de petite taille, ils ne sont pas tenus de mettre sur pied un comité. Ils peuvent le faire volontairement s’ils choisissent de le faire.
En ce qui a trait à ce que nous avons entendu des employeurs et d’autres intervenants, il faut reconnaître la taille différente des employeurs qui relèvent de la compétence fédérale. Le projet de loi offre une certaine flexibilité à ces employeurs de plus petite taille pour leur permettre d’entreprendre un processus dans leur lieu de travail qui serait un fardeau moins lourd à supporter.
Le sénateur Pratte : Merci. Pour terminer, si vous le permettez, pour ce qui est de la mise sur pied de ces nouveaux comités sur l’équité salariale, le projet de loi prévoit que l’employeur doit faire tous les efforts raisonnables pour établir un tel comité. Certains intervenants croient qu’il n’est pas suffisant de dire « tous les efforts raisonnables », que l’on pourrait remplacer l’expression par l’exigence selon laquelle l’employeur « négocie de bonne foi », par exemple, ou un autre libellé.
Mme Straznicky : Pour ce qui est de l’expression « tous les efforts raisonnables », c’est une norme que l’on retrouve dans d’autres mesures législatives. C’est une norme connue. C’est une norme juridique que nous connaissons. Lorsque l’employeur est responsable de mettre la dernière main au plan d’équité salariale et d’apporter des ajustements, la norme reconnaît qu’il peut y avoir des situations où le processus peut être contrecarré.
Si l’employeur a essayé de bonne foi de créer un comité, mais qu’il y a d’autres problèmes avec les représentants des employés qui nomment des membres au comité et que le comité ne peut pas être mis sur pied malgré les efforts déployés par l’employeur, cela donne une marge de manœuvre.
Il y a des mécanismes de protection prévus dans la mesure législative pour veiller à ce que si un employeur tente de démontrer qu’il a fait tous les efforts raisonnables, il doit fournir ces preuves au commissaire à l’équité salariale, qui autoriserait alors l’employeur à aller de l’avant sans le comité.
La sénatrice Marshall : Pourriez-vous expliquer l’expression à l’article 2 — je pense qu’il y a eu quelques discussions à la Chambre des communes à ce sujet — « tout en tenant compte des divers besoins des employeurs »?
Mme Straznicky : Oui. L’article sur l’objet est une disposition qui énonce les objectifs de la loi. Il ne prévoit aucun droit fondamental et ne crée pas d’échappatoire pour permettre aux employeurs de miner un droit à l’équité salariale que leurs employés ont. L’expression « divers besoins des employeurs » vise à représenter les différents processus qu’un petit employeur par rapport à un grand employeur entreprendrait pour élaborer un plan d’équité salariale; c’est un processus conjoint par rapport à un processus dirigé par l’employeur. C’est ce que l’on entend par les divers besoins des employeurs dans cet article sur l’objet.
La sénatrice Marshall : Cette expression est encore dans la mesure législative, n’est-ce pas?
Mme Straznicky : Oui.
La sénatrice Marshall : Le commissaire à l’équité salariale semble être un mandataire du Parlement. Certains le qualifient de mandataire du Parlement. Est-ce que j’ai bien lu?
Mme Straznicky : Non. Le commissaire est un commissaire adjoint, nommé par le gouverneur en conseil, qui reçoit les pouvoirs, les devoirs et les fonctions en vertu du projet de loi d’administrer et de faire appliquer la loi. Le commissaire a la capacité de faire rapport au Parlement, mais n’est pas un mandataire du Parlement.
La sénatrice Marshall : Mais il fait directement rapport au Parlement?
Mme Straznicky : C’est exact, il fait directement rapport au Parlement.
La sénatrice Marshall : Pourquoi a-t-on décidé qu’un examen législatif doit être effectué aux 10 ans? C’est habituellement aux cinq ans.
Mme Straznicky : Il faudrait que je vous fournisse à une date ultérieure les détails concernant la période de 10 ans par rapport à 5 ans, s’il y en a.
La sénatrice Marshall : Y a-t-il une estimation quant au coût de la mise en œuvre de cette mesure législative? Je sais qu’elle se rapporte au secteur privé mais connaissez-vous les coûts, par exemple, au gouvernement?
Mme Straznicky : Je peux parler rapidement des coûts. Dans l’énoncé économique de l’automne, du financement était alloué pour appuyer le commissaire à l’équité salariale au cours des six prochaines années, de même que du financement pour appuyer le Tribunal canadien des droits de la personne, puis du financement a été versé au programme du travail à EDSC pour assumer les coûts de démarrage pour mettre en fonction la commission et l’unité.
La sénatrice Marshall : Pour mettre en œuvre l’équité salariale, on ne peut pas y parvenir en réduisant les salaires — les salaires doivent être augmentés.
Il n’y aurait pas d’estimation des coûts pour faire augmenter les salaires dans la fonction publique?
Mme Straznicky : Je vais devoir laisser le soin à mes collègues de répondre à cette question.
M. Mercier : Là encore, la loi établira un processus. Le gouvernement devrait collaborer avec les représentants syndicaux. Ce faisant, nous élaborerons des plans d’équité salariale pour relever les écarts, les mesurer et intervenir pour les combler.
Pour l’instant, jusqu’à ce que ce soit terminé, il est encore trop tôt pour relever les écarts ou les coûts avec certitude.
La sénatrice Marshall : Les augmentations peuvent-elles être mises en place graduellement?
M. Mercier : Oui, conformément aux dispositions visant les employeurs qui ont plus de 100 employés.
La sénatrice Marshall : Merci.
[Français]
Le sénateur Forest : Je reviens à ma question; j’étais un peu en avance. L’article 83 édicte une actualisation aux cinq ans. Par contre, le plan d’équité salarial ne contient pas de disposition sur la rétroactivité pour les salaires. C’est la même situation au Québec; toutefois, un jugement de la Cour supérieure en date du 10 mai 2018 — c’est relativement nouveau — édicte la rétroactivité. Pourquoi n’avez-vous pas tenu compte de cette décision de la plus haute cour en la matière?
[Traduction]
Mme Straznicky : Nous avons examiné et considéré la décision. La mesure législative exige que lorsque la mise à jour est faite, des paiements rétroactifs seront versés pour combler les écarts qui ont été relevés.
Les détails concernant le moment où les écarts seront relevés seront énoncés dans le cadre du processus de réglementation. Ce processus sera effectué par l’entremise de l’étape d’élaboration de la réglementation normale, où des consultations exhaustives avec les intervenants seront menées avant l’entrée en vigueur de la réglementation.
[Français]
Le sénateur Forest : Si je comprends bien, l’esprit de la loi va dans le sens d’une rétroactivité en matière d’ajustement salarial, compte tenu de la révision du plan, mais la réglementation de la loi ne permet pas de le faire actuellement; est-ce que je décode bien vos propos?
[Traduction]
Mme Straznicky : Je vais maintenant aborder l’article 83.
[Français]
Bruce Kennedy, gestionnaire, Équipe spéciale sur l’équité salariale, Programme du travail, Emploi et Développement social Canada : Cela se retrouve plutôt à l’article 88, au paragraphe 2. On parle de la rétroactivité. La loi fait en sorte que des sommes forfaitaires seront appliquées s’il y a des écarts lors de la révision du plan. La façon de calculer ces écarts et de déterminer quand ils sont apparus devra être prescrite dans la réglementation.
Le sénateur Forest : Sur quelle base seront fixés les écarts?
M. Kennedy : Les écarts seront fixés sur la même base que le plan initial, c’est-à-dire lorsque le plan sera maintenu. Cinq ans après que le plan initial aura été mis en place, un processus similaire devra être établi pour déterminer si des écarts sont réapparus dans les cinq années précédentes.
Le sénateur Forest : Cela ne se retrouve pas dans l’article 88 en ce moment?
M. Kennedy : Je ne me souviens pas du numéro de l’article, mais on retrouve le fait que le processus devra être appliqué tel qu’il était appliqué au départ. À l’article 88, au paragraphe 2, pour ce qui est des sommes forfaitaires, ce sera prescrit par règlement.
Le sénateur Forest : Au moment de l’échéance de la révision.
M. Kennedy : Exactement. Les sommes forfaitaires qui auront été identifiées seront dues selon la prescription du règlement.
Le sénateur Forest : Les détails sont donc à venir.
M. Kennedy : Exactement.
[Traduction]
Le sénateur Neufeld : Merci à vous tous d’être ici.
Il est prévu que l’équité salariale s’appliquera aux employeurs des secteurs public et privé sous réglementation fédérale. Je comprends le public. Donnez-moi une idée des employeurs du secteur privé qui seraient visés par ce plan d’équité salariale.
Mme Straznicky : Dans le secteur privé, les principaux secteurs où nous voyons une forte concentration d’employées de sexe féminin sont les secteurs des banques, des télécommunications et de la radiodiffusion, des services postaux et des pipelines. Ce sont là des exemples de secteurs où nous savons qu’il y a une forte concentration d’employées de sexe féminin.
De plus, d’autres types de lieux de travail sous compétence fédérale sont les transporteurs aériens, les entreprises de transport interprovincial, les sociétés ferroviaires et les entreprises céréalières. Ce sont les industries générales que nous verrions dans le secteur privé de compétence fédérale.
Le sénateur Neufeld : J’imagine que vous engloberiez pratiquement tout. Les pipelines, les entreprises de production d’électricité et tous ces types d’entreprises seraient comprises dans cela.
Mme Straznicky : La définition d’un employeur dans cette mesure législative pour le secteur privé se rapporte à ce que l’on considère être une entreprise fédérale en vertu du Code canadien du travail. Il y a une énumération des industries qui seraient visées par l’autorité fédérale en vertu de la Loi constitutionnelle.
Il y aura un grand nombre d’industries qui ont une importance à l’échelle nationale, comme celles que j’ai mentionnées, telles que les sociétés ferroviaires et les transporteurs aériens. Lorsque nous examinons des questions de nature provinciale, ces types d’entreprises ne seront pas couvertes par la loi. C’est environ 8 p. 100 de la population active canadienne.
Le sénateur Neufeld : C’était ma prochaine question. Concernant les 10 employés ou moins, pouvez-vous m’expliquer rapidement comment ils seraient couverts?
Mme Straznicky : À l’heure actuelle, tous les employés relevant de la compétence fédérale sont couverts en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne. La loi prévoit un système fondé sur les plaintes. Les employés seraient tenus de présenter des plaintes s’ils estiment qu’ils ne reçoivent pas un salaire égal pour un travail de valeur égale.
Le nouveau régime s’applique à ces employeurs qui ont 10 employés ou plus. Les lieux de travail de petite taille qui ont de un à neuf employés, par exemple, continueraient d’être couverts en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne.
Le sénateur Neufeld : Parce qu’il y a tant de gens qui sont couverts — et je n’y vois aucun inconvénient —, où doit-on commencer? Avec l’équité salariale, de toute évidence, une personne s’attend à ce qu’à un certain moment, elle recevra la même paie qu’une autre personne. On ne peut pas s’occuper de tout le monde en même temps. Vous avez déjà dit que vous espérez que ce soit fait en trois ans.
L’équité salariale commence-t-elle lorsque cette mesure législative entre en vigueur? Ou l’équité salariale commencera-t-elle dans trois ans? Comment vous assurez-vous que les gens reçoivent les montants qu’ils devraient recevoir? Cela me semble assez difficile à faire.
Mme Straznicky : L’un des aspects importants, c’est le droit à la parité salariale pour l’exécution de fonctions équivalentes qui existe depuis 1977. Dans cette approche, la loi recevra la sanction royale, disons à la fin de cette année, soit dans un an, puis l’entrée en vigueur se fait un an plus tard et, un an plus tard, les employeurs commencent à relever ces écarts. Le droit demeure.
Le processus requis pour déterminer les catégories d’emplois qui sont généralement celles des femmes et celles qui doivent être ajustées, de même que les ajustements devant être apportés, commencera trois ans après que la loi entrera en vigueur.
Le sénateur Neufeld : Merci.
[Français]
La sénatrice Moncion : Quelles sont les mesures qui aideront à éduquer les employeurs dans le respect de leurs obligations en vertu de cette nouvelle législation?
[Traduction]
Mme Straznicky : L’un des rôles du commissaire à l’équité salariale est lié à l’éducation et à la sensibilisation. En prévision du régime qui entrera en vigueur, du matériel est élaboré, du matériel d’éducation, d’orientation et de soutien pour les employés, pour que lorsque la loi est en vigueur, les gens auront ces renseignements à leur disposition pour les aider à comprendre leurs droits et leurs obligations.
Puis, à partir de là, une fois que le commissaire à l’équité salariale est nommé et que la loi est en vigueur, le commissaire à l’équité salariale aura un rôle continu à jouer pour aider les parties à comprendre leurs droits, en plus de son rôle pour faire appliquer la loi.
[Français]
Le président : Avez-vous une autre question?
La sénatrice Moncion : Non, c’est tout.
[Traduction]
La sénatrice M. Deacon : Merci d’être ici aujourd’hui. J’ai essayé de passer en revue la Loi sur l’équité dans la rémunération du secteur public pour voir les écarts et les changements. C’était assez futile pour moi. J’essayais de voir quelques-uns des importants changements, quelle est la tendance et les observations recueillies durant le processus de consultations.
La majorité des questions que je voulais soulever ont été posées. J’ai deux points. Lorsque vous avez fait ce que je présume était un processus de consultation vaste et approfondi, y a-t-il eu un sujet ou deux qui sont ressortis, et les avez-vous examinés adéquatement? Je vais attendre de poser la deuxième question lorsque vous aurez répondu à celle-ci.
Mme Straznicky : En ce qui concerne les consultations, oui, nous avons mené de vastes consultations avec nos intervenants, soit les représentants de l’employeur et des employés, les syndicats, des experts et des défenseurs de la qualité à l’échelle nationale. Nous avons reçu, de façon générale, un vaste appui pour le principe d’équité salariale. Nous avons reçu différents besoins divergents de différents employeurs ainsi que ce que l’on s’attend des représentants des employés et des groupes de défense des droits.
Pour ce qui est des dispositions qui ont été incluses dans la mesure législative à la lumière des discussions que nous avons eues, les employeurs nous ont dit qu’ils ont besoin de flexibilité. Nous avons un pays où nous avons de petits employeurs et des entreprises de camionnage de petite taille qui comptent de 15 à 20 employés et de grands employeurs, y compris la fonction publique fédérale, qui ont différentes ressources et capacités pour faire ce travail et qui œuvrent dans différents environnements avec leurs syndicats, qu’ils aient un syndicat, qu’ils n’en aient aucun ou qu’ils en aient plusieurs. Ce que la mesure législative fait, c’est qu’elle traite ces observations d’une manière à créer un régime efficace pour tout le monde et à offrir cette flexibilité à ces employés.
La sénatrice M. Deacon : Vous pensez que, plutôt que d’avoir un modèle universel, c’est l’occasion pour les gens de respecter la structure en fonction de l’organisation et de ce qu’ils doivent faire? Pensez-vous que c’est prévu dans une certaine mesure?
Mme Straznicky : C’est prévu dans le modèle, et les syndicats et les employeurs ont le rôle de collaborer pour créer un processus conjoint dans ces lieux de travail de plus grande taille où la syndicalisation est élevée.
Il permet également aux employeurs dans les organisations de plus petite taille de travailler avec leurs employés et d’adapter le système pour répondre à leurs besoins s’ils estiment que nous ne sommes pas au seuil où nous mettons en œuvre le processus par l’entremise d’un comité mixte, mais cela fonctionne pour nous. La mesure législative prévoit une flexibilité pour ces lieux de travail où ils peuvent, même s’ils ont 60 employés, aller de l’avant avec un processus conjoint.
La sénatrice M. Deacon : Merci. Un exemple que vous avez cité est une question à propos du rôle du commissaire. L’un des exemples était le secteur de l’aviation mentionné dans la réponse du sénateur Neufeld.
Je me demande alors quels sont les rôles et les responsabilités de la personne responsable. Dans les secteurs où des fonctions sont traditionnellement occupées par des hommes, notamment le poste de pilote, et où d’autres fonctions sont traditionnellement occupées par des femmes, notamment des postes de soutien des pilotes, le commissaire aura-t-il un rôle à jouer pour essayer d’encourager une organisation à travailler à régler ce système systémique, ou cette responsabilité et ce rôle seront-ils encore assumés par l’entreprise ou l’organisation?
Mme Straznicky : Je pense que c’est une question importante pour établir la nature systémique et apporter le changement voulu. Cette mesure est l’une des nombreuses mesures prises pour essayer de réduire l’écart salarial entre les sexes.
Je ne veux pas parler de « pouvoir », mais d’une capacité du commissaire à l’équité salariale de mener des recherches sur les enjeux systémiques et de faire rapport au Parlement sur ces enjeux à l’avenir. Il y a un rôle pour le commissaire à jouer à l’avenir.
Le sénateur Klyne : Merci. En ce qui concerne le bureau du commissaire à l’équité salariale ou du bon fonctionnement de ce bureau, quelles ressources, pour ce qui est du budget et du nombre d’employés, sont estimées? Prévoit-on qu’il y aura des directions ou des bureaux satellites au pays?
Mme Straznicky : Je les ai pris en note, car des données ont été soulevées la semaine dernière.
En ce qui concerne le financement qui a été annoncé pour la Commission canadienne des droits de la personne, le commissaire à l’équité salariale sera nommé à un poste à la Commission canadienne des droits de la personne, et 15 millions de dollars sur six ans ont été annoncés pour la commission afin de financer le rôle du commissaire à l’équité salariale mais aussi l’unité de l’équité salariale qu’il faudrait doter en personnel pour appuyer le commissaire.
Si nous ne parlons que de la commission, il y a des fonds additionnels alloués au Tribunal canadien des droits de la personne — une somme additionnelle de 8 millions de dollars pour soutenir la nomination de trois autres membres.
Le sénateur Klyne : C’est 23 millions de dollars?
Mme Straznicky : Oui. J’aurais pu commencer avec le chiffre total. C’est 26,6 millions de dollars qui sont alloués au total. Les 3 millions de dollars seront versés au programme du travail à EDSC pour élaborer le matériel que je viens de mentionner pour l’éducation et la formation et pour relever et soutenir la nomination du commissaire à l’équité salariale.
Le sénateur Klyne : La Commission canadienne des droits de la personne a-t-elle des directions un peu partout au pays?
Mme Straznicky : Il faudrait que je vous fasse parvenir ce renseignement sur la portée nationale de la Commission canadienne des droits de la personne à une date ultérieure.
Le sénateur Klyne : Merci.
Le sénateur Pratte : Je veux revenir à la question de la rétroactivité car, bien franchement, je ne suis pas certain de comprendre le fonctionnement. Une fois qu’un plan est approuvé, de toute évidence, la rémunération de certaines employées de sexe féminin augmenterait une fois que l’écart est relevé, le cas échéant. À ce moment-là, y a-t-il une rétroactivité pour le premier plan d’équité salariale?
Mme Straznicky : Une fois les trois années écoulées, vous établissez le plan, puis...
Le sénateur Pratte : C’est juste.
Mme Straznicky : Une fois que le plan est réalisé et que les écarts ont été cernés, au moment de l’affichage, après trois ans, les paiements deviennent exigibles le lendemain de l’affichage, et ils se poursuivent au fur et à mesure par la suite. Ils sont exigibles le lendemain, puis selon la taille de l’employeur, les petits employeurs pourraient échelonner leur versement sur une période maximale de cinq ans si c’est 1 p. 100 ou plus de leur masse salariale annuelle.
Quant aux gros employeurs, ils pourraient échelonner les redressements sur un maximum de trois ans. Les qualifications seraient les mêmes. Il faudrait que cela corresponde à plus de 1 p. 100 de la masse salariale.
Le sénateur Pratte : Quand vous parlez de versements, vous parlez d’augmentations salariales?
Mme Straznicky : C’est bien cela.
Le sénateur Pratte : Il n’y aurait aucun effet rétroactif au moment du premier plan?
Mme Straznicky : C’est juste.
Le sénateur Pratte : Des intervenants se sont dits préoccupés parce qu’ils croient, comme vous l’avez dit précédemment, que l’équité salariale est perçue comme un droit de la personne au Canada depuis 1977. C’est donc injuste, et il n’y a aucune façon de tenir compte du fait qu’un écart décelé existe depuis bien avant que les processus établis en vertu de cette loi le fassent ressortir.
Mme Straznicky : En passant à ce nouveau régime proactif et en confiant aux employeurs la responsabilité d’examiner leurs pratiques de rémunération, de cerner les catégories d’emplois qu’ils ont, de leur attribuer une valeur et de les comparer, on précise les écarts après trois ans ou quand les employeurs et les comités mixtes, s’il y a lieu, terminent le processus, et c’est à partir de ce moment que le régime les oblige à garantir et à maintenir l’équité salariale.
Le sénateur Pratte : Merci.
La sénatrice Eaton : Mesdames et messieurs, pouvez-vous concevoir un modèle qui aiderait les employeurs à se doter d’un système de points pour l’évaluation des postes, car cela peut être très subjectif, n’est-ce pas?
Mme Straznicky : Je crois que c’est une autre excellente question sur le rôle général du commissaire à l’équité salariale et sur le type de matériel d’éducation et les conseils et le rôle qu’il joue pour ce qui est d’aider les parties. Il ne s’agit pas simplement de mettre en place un nouveau régime et de dire aux gens de s’arranger avec.
La sénatrice Eaton : Il se peut qu’on ne sache pas où commencer.
Mme Straznicky : Exactement. Le rôle d’éducation du commissaire à l’équité salariale est vu comme étant important précisément sur ce plan.
La sénatrice Eaton : Qui va nommer le commissaire? Est-ce une nomination fédérale, une nomination par décret?
Mme Straznicky : Oui.
La sénatrice Eaton : Merci beaucoup.
[Français]
Le sénateur Forest : Merci de ces explications. Je sens une profonde volonté de vouloir mettre en place un cadre législatif qui va nous permettre de cheminer vers l’équité salariale. C’est un objectif que nous poursuivons tous et toutes.
En ce qui a trait à l’article 20, qui exige l’unanimité lorsqu’il y a un vote des représentants des employés sur un élément de la politique ou autre, je trouve que c’est tout de même beaucoup. Si ce n’est pas le cas, c’est l’employeur qui décide. C’est un peu le couteau sur la gorge. Par exemple, au Québec, on exige la majorité. Pourquoi exiger l’unanimité ici? Ce sont des questions de principes et de valeurs. Cela m’apparaît un poids plutôt lourd, où on risque de favoriser l’employeur, auquel il reviendrait de décider de ces questions. Je ne comprends pas pourquoi on met la barre si haute. L’unanimité, c’est 100 p. 100. Cela n’arrive pas souvent.
[Traduction]
Mme Straznicky : Je vous remercie de votre question. Le Québec a en effet une approche différente. Nous avons envisagé les approches des deux provinces qui font de l’équité salariale proactive, le Québec et l’Ontario, et nous avons tenu compte des recommandations liées au projet de loi et de celles du rapport du groupe de travail afin de déterminer la meilleure façon de faire les choses. On a tenu compte des opinions des plus petits groupes représentés dans ces comités mixtes, par exemple les employés non syndiqués et non représentés qui avaient un représentant au sein d’un comité mixte, parmi de plus importants agents négociateurs, ou de plus petits agents négociateurs siégeant à un comité avec de plus importants agents négociateurs. Notre intention était de veiller à ce que tous les représentants d’employés puissent se prononcer également dans le cadre des travaux de ce comité, ainsi que d’encourager la collaboration parmi les partenaires du côté syndical.
[Français]
Le sénateur Forest : Donc, on a libellé l’article 20 en fonction de conditions spécifiques où il y a de petites unités qui pourraient être noyées dans de plus grandes unités. N’y aurait-il pas été sage d’indiquer que, dans ces cas spécifiques, on exige l’unanimité et que, dans des cas où il s’agit de plus grandes organisations où il y a une unité par rapport à la provenance des employés, on exigerait, par exemple, les deux tiers ou une majorité simple?
[Traduction]
Mme Straznicky : Je crois que, par sa façon de faire, le Québec montre qu’il y a une autre façon. Concernant la discussion dans le rapport du groupe de travail visant le projet de loi, on a parlé des enjeux à cet égard. Cette démarche n’empêche pas, en cas de désaccords entre de gros syndicats ou dans des cas différents de ce que je viens de décrire, la recherche de solutions entre eux en vue d’en arriver à un vote unanime.
[Français]
Le sénateur Forest : Dans le cas des unités mixtes où il y a une disparité au sein des représentants, ma simple inquiétude est que ça glisse trop facilement dans la cour de l’employeur. C’est un commentaire. Merci.
[Traduction]
Le sénateur Klyne : Je pensais avoir une question, mais réglons ceci. Est-ce que la CCDP a priorité par exemple sur les droits de la personne en Saskatchewan?
Mme Straznicky : Non.
Le sénateur Klyne : Ce n’est pas fédéral. D’accord.
Je me suis aussi mis à me demander si tous les transporteurs nationaux, par opposition aux transporteurs régionaux, étaient constitués en vertu d’une loi fédérale.
Mme Straznicky : Les compagnies aériennes sont toutes constituées par une loi fédérale. Elles seraient toutes soumises au régime fédéral.
Le sénateur Klyne : Si une telle compagnie essayait de substituer à cela son propre plan d’équité salariale et que cela ne correspond pas exactement aux lignes directrices de la loi, est-ce qu’il y aurait une pénalité?
Mme Straznicky : Si une compagnie aérienne régionale essayait de faire cela?
Le sénateur Klyne : Une compagnie aérienne nationale; pas une compagnie aérienne régionale.
Mme Straznicky : Une fois que la loi est adoptée, peu importe ce qu’un employeur a déjà fait dans le milieu de travail pour instaurer l’équité salariale, il devrait suivre le processus énoncé et se conformer à la loi.
Le sénateur Klyne : Avez-vous consulté les compagnies aériennes?
Mme Straznicky : En ce qui concerne nos...
Le sénateur Klyne : Par exemple.
Mme Straznicky : Par exemple, oui, absolument, avec nos intervenants du secteur privé qui relèvent de la compétence fédérale.
Le sénateur Klyne : D’accord. Merci.
La sénatrice Marshall : Pouvez-vous préciser encore une fois à qui cela s’applique? Est-ce que cela s’applique à la fonction publique fédérale? Je croyais qu’elle n’entrait pas dans la catégorie des sociétés sous réglementation fédérale.
Mme Straznicky : Vous avez raison sur ces deux points. Oui, cela s’applique à la fonction publique fédérale. Normalement, quand nous parlons de la compétence fédérale, concernant les normes de travail, par exemple, la fonction publique fédérale n’est pas soumise à cette partie du Code canadien du travail.
La sénatrice Marshall : Mais elle est soumise à ces mesures législatives?
Mme Straznicky : Elle l’est, oui.
Le président : Vous avez suscité une question. Il ne fait aucun doute que nous avons de nombreux intervenants qui posent des questions et envoient des demandes diverses à votre ministère concernant l’équité salariale.
Pouvez-vous nous donner des précisions et des renseignements supplémentaires sur ce qui suit? Le Tribunal canadien des droits de la personne a diverses préoccupations concernant l’équité salariale, en tant qu’intervenant, et concernant la Loi sur l’équité salariale que le projet de loi C-86 modifierait, car il serait l’instance d’appel pour les décisions rendues par le commissaire à l’équité salariale. Êtes-vous au fait des préoccupations du tribunal? Comment répondez-vous à ces préoccupations?
Mme Straznicky : Je ne suis pas au fait des préoccupations du tribunal concernant la Loi sur l’équité salariale. Cependant, je serais ravie de les obtenir et d’en discuter.
Le président : D’accord. Je vous remercie beaucoup.
Mesdames et messieurs les sénateurs, ceci termine l’onglet 14 sur l’équité salariale.
[Français]
Merci aux fonctionnaires des différents ministères.
[Traduction]
Nous passons maintenant à l’onglet 17, section 17, « Aide financière internationale ».
[Français]
Avec cette division, nous avons deux sous-sections : A et B.
[Traduction]
La sous-section A de l’onglet 17 s’intitule « Modification de certaines lois ».
[Français]
Nous allons demander aux fonctionnaires suivants de se présenter.
[Traduction]
D’Affaires mondiales Canada, nous accueillons Mhairi Peterson, directrice, Gestion de l’enveloppe de l’aide internationale, et Deirdre Kent, directrice générale, Politique d’aide internationale.
Nous avons également, de Finances Canada, Nicole Giles, directrice, Bureau du sous-ministre adjoint, Direction des finances et des échanges internationaux.
[Français]
Du même ministère, nous recevons également Mme Louisa Pang, directrice, Division des finances internationales et du développement.
[Traduction]
Enfin, nous accueillons M. Zachary Edwards, analyste subalterne/économiste, Division des finances internationales et du développement.
On m’a dit qu’il y aurait un exposé. Nous allons donc l’écouter, et les sénateurs vous poseront ensuite des questions.
[Français]
La parole est à vous, madame.
[Traduction]
Nicole Giles, directrice, Bureau du sous-ministre adjoint, Direction des finances et des échanges internationaux, ministère des Finances Canada : Mon nom est Nicole Giles. Je suis directrice générale de la Direction des finances et des échanges internationaux à Finances Canada. Monsieur le président, mesdames et messieurs, je vous remercie beaucoup de nous accueillir aujourd’hui.
Nous allons commencer par l’onglet A, qui porte sur les modifications à la Loi sur les accords de Bretton Woods, à la Loi sur l’Accord portant création de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement et à la Loi sur la responsabilité en matière d’aide au développement officielle, ou LRADO, soit les articles 654 à 658.
On a annoncé dans le budget de 2018 que le Canada améliorerait sa reddition de comptes en matière d’aide internationale. Elle se fonde en ce moment sur diverses exigences législatives historiques et, par conséquent, le Canada fait rapport de son aide internationale de diverses façons, au moyen de multiples rapports présentés à des dates différentes et ayant des portées différentes.
Le premier élément de la section 17 propose des modifications à trois lois existantes, de sorte que les échéances correspondent. Il y a, premièrement, la Loi sur les accords de Bretton Woods et des accords connexes, deuxièmement, la Loi sur l’Accord portant création de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement, ces deux lois relevant de la responsabilité du ministre des Finances, et troisièmement, la Loi sur la responsabilité en matière d’aide au développement officielle, qui relève de la responsabilité du ministre du Développement international.
Le but est de faire correspondre les échéanciers pour qu’un seul rapport consolidé expliquant clairement les activités d’aide internationale soit présenté au Parlement et aux Canadiens.
La modification à la LRADO comporte l’abrogation de la définition dépassée de l’expression « aide au développement officielle » qui se trouve en ce moment dans la loi, soit l’ancienne définition de l’OCDE qui remonte à 2008, et l’adjonction d’une disposition permettant que l’aide au développement officielle soit définie et mise à jour par règlement, de sorte qu’on puisse la tenir à jour en fonction des définitions convenues à l’échelle internationale.
À titre d’information, à l’étape de l’étude par un comité parlementaire, un amendement a été adopté pour préciser que la définition de l’aide au développement officielle doit tenir compte de la définition la plus récente décidée par le Comité d’aide au développement de l’OCDE.
Je vais donner la parole à mes collègues d’Affaires mondiales.
Deirdre Kent, directrice générale, Politique d’aide internationale, Affaires mondiales Canada : Merci. Le deuxième élément de la section 17 est une nouvelle loi intitulée « Loi sur l’aide financière internationale », oui. Monsieur le président, si vous le permettez, nous avons d’autres collègues qui seraient mieux placés pour parler de la Loi sur l’aide financière internationale. Ils viendraient après les questions relatives à l’exposé qui vient d’être fait.
Le président : Ce sera à la suite de votre sous-section A. Nous en sommes maintenant à la sous-section A, et vos observations concernent les fonctionnaires qui vont traiter de la sous-section B. Nous en sommes à la sous-section A, qui porte sur la modification de certaines lois.
[Français]
Nous poserons seulement des questions à propos de la sous-section A. Par la suite, nous passerons à la sous-section B.
[Traduction]
Mme Kent : Merci, monsieur le président.
Le président : Merci. Passons aux questions.
La sénatrice Marshall : Je ne sais pas si je suis dans la bonne section. Je vais poser ma question. Pour le Programme de prêts souverains, on dit que le ministre... Et le ministre n’est pas le ministre des Finances, mais plutôt le ministre des Affaires étrangères ou le ministre du Développement international. On dit que le ministre peut « consentir des prêts à des pays étrangers ou à toute autre personne ou entité ». J’ai trouvé étrange que quelqu’un d’autre que le ministre des Finances consente un prêt. Cela dit « sous réserve des règlements ». Est-ce que ces règlements sont en vigueur en ce moment?
Mme Giles : Monsieur le président, cette question est liée à la sous-section B. Voulez-vous que nous y répondions maintenant ou que nous attendions?
La sénatrice Marshall : Je pense bien que je n’ai pas suivi l’ordre, mais...
Le président : La présidence envisagerait que nous demandions au fonctionnaire de présenter son exposé sur la sous-section B, puis vous auriez les questions sur les deux sous-sections en même temps.
Mme Giles : J’ai un bref exposé sur la sous-section B. Voulez-vous que je le présente maintenant, avant de répondre à la question de la sénatrice?
Le président : Oui. Occupons-nous des deux sous-sections en même temps, et faites des observations qui aideront les sénateurs pour leurs questions sur les sous-sections A et B en même temps.
Mme Giles : Certainement.
Le président : Les autres fonctionnaires qui sont présents sont Chantal Larocque, directrice adjointe, Financement du développement.
[Français]
Nous entendrons Mme Michelle Kaminski, directrice, Bureau de la finance innovatrice, Gestion des subventions et contributions.
[Traduction]
Nous avons également M. Ryan Clark, directeur, Bureau du sous-ministre adjoint des enjeux mondiaux et du développement.
[Français]
De Condition féminine Canada, nous accueillons Danielle Bélanger, directrice, ACS Plus et Politiques stratégiques, Direction des politiques et relations extérieures.
Il s’agit de la section 18. Le dernier à prendre la parole sera M. Ryan Clark.
[Traduction]
Qui prononcera l’exposé sur la sous-section B?
Mme Giles : J’ai un bref exposé à faire, monsieur le président.
Le président : Je vous en prie. Nous passerons ensuite aux questions sur les sous-sections A et B.
Mme Giles : Formidable.
Le président : Merci, madame.
Mme Giles : Le deuxième élément de la section 17 est une nouvelle loi intitulée « Loi sur l’aide financière internationale » et fait l’objet des articles 659 et 660.
Cette loi permet la mise en œuvre d’un engagement inclus dans le budget de 2018 qui est de fournir 1,5 milliard de dollars sur cinq ans à l’appui de l’innovation dans l’aide internationale du Canada par la création de deux nouveaux programmes, soit le Programme d’innovation en aide internationale, ou PIAI, et le Programme de prêts souverains.
Je vais vous donner un peu de contexte. On s’entend à l’échelle internationale pour dire que les besoins en matière de développement mondial dépassent énormément le montant de l’aide au développement officielle qui est offerte. Pour contribuer à combler ce fossé financier, la communauté internationale doit investir dans la mobilisation de nouvelles sources de financement, en particulier les sources du secteur privé. Les pouvoirs d’Affaires mondiales ont été établis à un moment où l’accent était mis à l’échelle internationale sur les subventions et les programmes de contribution. D’autres pays du G7 et partenaires en développement international utilisent maintenant divers outils de développement, notamment les institutions financières de développement international, les prêts et les garanties souverains, ainsi que le financement mixte. On propose, dans le projet de loi, de diversifier aussi les outils du Canada.
Ces outils ont été éprouvés à l’étranger, mais leur déploiement sous la forme de programmes consolidés sera nouveau pour le gouvernement du Canada. On recourt donc à un projet pilote pour permettre une évaluation de l’efficacité des programmes après cinq ans. Le projet de loi prévoit la demande de pouvoirs de haut niveau à la suite de cela, et si le projet de loi est adopté, on prendrait un règlement pour préciser les limites du programme, y compris les critères d’admissibilité et les modalités possibles, entre autres.
En vertu de la Loi sur la gestion des finances publiques, le ministre des Finances est chargé d’exercer une gestion financière prudente au nom du gouvernement du Canada. Comme l’énonce le projet de loi, selon les règlements qui seraient pris par la suite et approuvés par le gouverneur en conseil, il faudra pour certaines transactions ou catégories de transactions consulter le ministre des Finances ou obtenir son approbation.
Je vais maintenant céder la parole à mon collègue d’Affaires mondiales.
Ryan Clark, Directeur, Bureau du sous-ministre adjoint des Enjeux mondiaux et du développement, Affaires mondiales Canada : Comme c’était énoncé dans le budget de 2018, il faut absolument de nouveaux outils et de nouvelles démarches pour soutenir l’innovation relative à l’aide internationale du Canada et pour réaliser la nouvelle Politique d’aide internationale féministe du Canada. Afin de soutenir financièrement la politique, le gouvernement a prévu dans le budget de 2018 un montant de 1,5 milliard de dollars sur cinq ans à compter de l’exercice 2018-2019, et 492,7 millions de dollars par année par la suite pour l’établissement de deux nouveaux programmes, soit le Programme d’innovation en aide internationale et le Programme de prêts souverains.
[Français]
Afin d’appuyer l’exécution des deux nouveaux programmes, la ministre des Affaires étrangères et la ministre du Développement international ont besoin de nouveaux pouvoirs législatifs, notamment pour accorder des prêts aux pays en développement admissibles, à tout ordre du gouvernement ainsi qu’à des entités ou à des personnes, à condition que ces prêts soient garantis par le gouvernement de l’État étranger qui profitera du prêt; fournir des garanties financières pour assurer l’exécution partielle d’un accord au cas où la partie contractante principale ne le ferait pas, permettant ainsi de catalyser les investissements sous-jacents.
[Traduction]
Acquérir et détenir des biens et en disposer; posséder des actions ou n’importe quel autre titre de participation; catalyser les investissements et préserver la valeur de l’intérêt du Canada; exiger des frais pour émettre des garanties et de l’intérêt sur les prêts qu’ils consentent, dans le contexte des deux nouveaux programmes.
La Loi sur l’aide financière internationale donne aussi le pouvoir d’acquérir, de détenir et de vendre des participations dans le contexte des programmes de contributions remboursables d’Affaires mondiales visant à atténuer les conséquences des changements climatiques, afin de préserver la valeur des actifs canadiens. Dans l’ensemble, en soutenant l’innovation et en permettant un plus vaste éventail de partenariats de développement, notamment avec le secteur privé, les nouveaux outils financiers permettront à Affaires mondiales Canada d’utiliser l’aide au développement officielle de façon plus stratégique et de mobiliser des ressources additionnelles à l’appui du développement durable.
Mme Giles : Si vous êtes d’accord, nous pourrions répondre à la partie restante de la question de la sénatrice.
Le président : Absolument. Les sénateurs vont poser des questions sur les deux aspects.
La sénatrice Marshall : Votre exposé a partiellement répondu à ma question. Je trouvais qu’il était assez inhabituel qu’un ministre autre que le ministre des Finances puisse consentir un prêt ou émettre une garantie. Vous avez dit que les mesures réglementaires ne sont pas encore prêtes. Vous avez dit que cela dépendra des discussions avec le ministre des Finances ou de son approbation. Est-ce qu’il est possible que des prêts soient consentis ou que des garanties soient émises avant l’entrée en vigueur des mesures réglementaires?
Mme Giles : Il faudra que des mesures réglementaires aient été prises pour que des prêts soient consentis dans le cadre du nouveau Programme de prêts souverains. D’autres ministres que le ministre des Finances ont en ce moment le pouvoir de détenir des biens et de faire des investissements ou de consentir des prêts. Il y a notamment le ministre de l’Innovation, des Sciences et du Développement économique, et le ministre des Transports. Il y a aussi certaines sociétés d’État qui ont ce pouvoir, en particulier Exportation et développement Canada. Parmi celles qui sont peut-être moins connues, il y a le Conseil national de recherches du Canada et une poignée d’autres sociétés d’État. Il y a des précédents.
La sénatrice Marshall : Oui, mais avec certaines de ces organisations, il est difficile d’obtenir l’information. Je trouve que si tout passe par le ministre des Finances, nous avons de meilleures chances d’obtenir l’information que nous cherchons.
Les dispositions réglementaires doivent avoir été prises avant qu’il soit possible de consentir des prêts ou de donner des garanties?
Mme Giles : En effet, oui. La reddition de comptes dans le cadre du Programme de prêts souverains serait incluse dans la reddition de compte relative à l’aide internationale qui a fait l’objet des discussions relatives à l’onglet A de la section 17.
La sénatrice Marshall : Merci beaucoup.
Le sénateur Pratte : J’ai été surpris d’apprendre que nous n’avions pas déjà recours aux prêts souverains pour l’aide publique. Actuellement, le Canada n’a accordé aucun prêt souverain à des pays en développement?
Mme Giles : Le Canada a accordé des prêts souverains à la pièce par le passé. Le ministère des Finances l’a fait récemment. Un prêt a été accordé à l’Ukraine il y a quelques années. Ce sont des décisions et des mesures ponctuelles.
Ce qu’on propose, par l’intermédiaire de ce programme, c’est l’adoption d’un ensemble de paramètres clairs et d’une approche exhaustive pour augmenter le nombre de mécanismes et de mesures d’aide offerts aux pays en développement qui ne font plus partie de la catégorie des pays les moins développés et qui ont des besoins différents. Un éventail de mesures plus larges permettra au Canada de répondre à ces besoins. M. Clark peut vous donner des précisions, puisqu’il travaillera à l’élaboration du programme.
M. Clark : Je pense que Nicole a bien expliqué la situation. Les prêts qui ont été accordés à des États souverains étaient ponctuels et visaient à satisfaire à des besoins pressants dans des circonstances précises. Nous avons maintenant l’occasion d’établir les critères pour l’évaluation d’éventuels prêts souverains. Plus important encore, nous avons la possibilité de déterminer comment appuyer ces prêts en misant sur l’expertise et la présence canadienne sur le terrain dans certains pays. Je pense en particulier à nos programmes de développement, notre connaissance de ces pays et du secteur, et nos activités diplomatiques. Comparativement à l’octroi d’un prêt souverain en réaction à une situation donnée, c’est une façon plus rigoureuse de procéder.
Le sénateur Pratte : Merci. Concernant la déclaration de l’aide canadienne au développement, je crois comprendre que certains intervenants sont heureux d’avoir les chiffres rapidement. D’après ce que je comprends, la loi exige que les chiffres soient fournis au Parlement et publiés au cours des six premiers mois de l’année. Est-ce exact? On passera maintenant à un an. D’après ce que j’avais compris, certains intervenants aimaient avoir les données rapidement, et pas seulement... Oui?
Mme Kent : Aux termes de la nouvelle mesure législative, un seul rapport sera publié en mars, à la fin de l’exercice suivant, et permettra d’avoir un meilleur portrait de l’ensemble des activités d’aide internationale du Canada.
Actuellement, en vertu de la Loi sur la responsabilité en matière d’aide au développement officielle, un premier rapport est présenté à la fin septembre. Le plus récent rapport pour 2017-2018, qui est fondé sur des données préliminaires, a été déposé au Parlement à la fin septembre.
Tous les pays, y compris le Canada, ont besoin de temps après la fin de l’exercice pour compiler les données.
Le rapport de septembre est uniquement fondé sur des données préliminaires. Aux termes de la mesure législative révisée, le rapport serait fondé sur des données complètes.
Le ministère a tout de même l’intention de publier les données préliminaires à la fin septembre, même si la loi ne l’exige pas. Donc, le ministère pourrait continuer de publier des données préliminaires à la fin septembre chaque année, puis publier le rapport complet sur les résultats et les activités conformément à la loi, avec d’autres rapports, avant la fin mars.
Le sénateur Pratte : Les données préliminaires ne feraient pas nécessairement partie d’un rapport exhaustif en septembre. Les données préliminaires seraient-elles disponibles pour un organisme quelconque qui porterait intérêt à l’aide internationale et qui souhaiterait les consulter?
Mme Kent : Les chiffres seraient publics et ne seraient pas fournis uniquement sur demande.
Le sénateur Pratte : Très bien. Merci.
La sénatrice Eaton : Vous avez bien dit 1,5 milliard de dollars sous la Loi sur l’aide financière pour les programmes et pour les prêts souverains?
M. Clark : Oui, c’est exact. Désolé, sénatrice; je précise que deux programmes distincts ont été annoncés : le Programme d’innovation en aide internationale, à 873,4 millions de dollars, et le Programme de prêts souverains, à 626,6 millions de dollars.
La sénatrice Eaton : L’an dernier, j’ai posé la question lorsque c’était dans le budget d’Affaires mondiales : pouvez-vous nous donner une idée des programmes auxquels ces fonds sont destinés? À titre d’exemple, je me souviens que l’an dernier, tout de suite après la présentation du budget, j’avais demandé à un représentant d’Affaires mondiales qui témoignait devant ce comité s’il pouvait me donner des exemples concernant la Politique d’aide internationale féministe du Canada, et il en avait été incapable.
Pouvez-vous donner au comité, aujourd’hui, des exemples sur la façon dont ces fonds seront utilisés et sur le type de programmes que vous appuierez?
M. Clark : Certainement, sénatrice. Nous examinons attentivement les décisions stratégiques à prendre pour l’affectation de fonds pour ce programme. Bien que nous devons faire une présentation au Conseil du Trésor pour définir les modalités de mise en œuvre des programmes, nous réfléchissons à la façon de déployer les nouveaux mécanismes qui en font partie.
Comme vous l’avez mentionné, le Programme de prêts souverains est très simple. Il s’agit de prêts à des pays en développement. Nous chercherons à appuyer certains programmes inclus dans leur budget afin de favoriser le développement général du pays. À titre d’exemple, cela pourrait lié au secteur de l’éducation, comme un prêt au ministère de l’Éducation. Supposons que le Canada appuie de longue date le secteur de l’éducation d’un pays en développement et qu’il apprend ensuite que ce pays cherche à obtenir de l’aide supplémentaire, outre les subventions et contributions habituelles que nous faisons à d’autres organisations du secteur de l’éducation, que son niveau d’endettement est correct et que le contexte économique est favorable, et cetera, nous pourrions alors...
La sénatrice Eaton : Vous énumérez les critères fort intéressants des banquiers pour l’octroi d’un prêt, mais je ne comprends pas comment vous pouvez avoir des chiffres alors que vous n’avez pas de programmes. Lorsque je vais à l’épicerie, j’ai ma liste et je sais combien je peux dépenser. Vous semblez avoir le montant que vous voulez, mais sans savoir quels programmes vous appuierez.
M. Clark : Sénatrice, nous savons quelle politique nous devons appuyer. C’est la Politique d’aide internationale féministe, qui...
La sénatrice Eaton : Donnez-moi un exemple. L’an dernier, Affaires mondiales a été incapable de donner un seul exemple d’un programme visant à appuyer la politique d’aide internationale féministe du Canada. Ils n’ont pas été en mesure de nommer un programme.
M. Clark : Ces deux programmes ont été conçus pour appuyer la politique.
La sénatrice Eaton : Je ne veux pas vous mettre sur la sellette, mais je suis sidérée de constater que, après un an, vous n’êtes toujours pas capable de me donner un exemple de programme auquel cet argent est destiné.
M. Clark : Il faut d’abord que la mesure législative soit adoptée, puis que la réglementation connexe le soit aussi, pour nous permettre...
La sénatrice Eaton : L’année dernière, la Politique d’aide internationale féministe du Canada figurait dans le budget, et personne n’a pu nous donner des explications à ce sujet.
M. Clark : Je suis ici aujourd’hui pour parler des deux programmes qui figurent au budget de 2018, et non de la Politique d’aide internationale féministe.
La sénatrice Eaton : Vous comparaîtrez probablement au comité en juin, ou à la fin du printemps. Pensez-vous que vous aurez une idée des programmes à ce moment-là? Il est frustrant de voir tant de postes budgétaires avec un gros montant, mais sans que personne puisse nous dire en quoi cela consiste ou à quoi servira l’argent.
M. Clark : Je comprends votre frustration. Deux programmes ont été énoncés dans le cadre de la politique : le Programme de prêts souverains et le Programme d’innovation en aide internationale.
La sénatrice Eaton : Cela ne veut absolument rien dire.
M. Clark : Concernant le Programme de prêts souverains, j’essayais d’expliquer le processus d’octroi d’un prêt souverain à un pays avec lequel nous avons déjà une relation. Quant au Programme d’innovation en aide internationale, nous voulons mettre en œuvre de nouveaux mécanismes nous permettant d’accorder des garanties.
La sénatrice Eaton : C’est ce que vous me dites depuis un an. Je suis désolée. Je vous reposerai la question la prochaine fois que vous comparaîtrez au comité.
Le président : Nous aurons l’occasion de poser d’autres questions. Monsieur Clark, vous connaissez déjà une des questions que nous poserons, au cas où vous seriez ici.
M. Clark : Permettez-moi d’ajouter un commentaire. Outre notre travail lié à la mesure législative, à la réglementation et à notre présentation au Conseil du Trésor, nous cherchons à rassembler des idées. Nous regardons les endroits où nous sommes présents, nos secteurs d’intervention, nos partenaires actuels et nos nouveaux partenaires. C’est un examen général.
La sénatrice Eaton : Je ne vous accuse pas de ne pas travailler. L’an dernier, à la même période, j’ai posé la même question et j’ai reçu la même réponse. Je veux seulement savoir quand vous pourrez me dire à quel programme cet argent est destiné. C’est tout. J’espère que vous le saurez la prochaine fois que vous viendrez ici.
Le président : Y a-t-il d’autres commentaires? Merci.
Le sénateur Boehm : C’est toujours un plaisir d’accueillir d’anciens collègues. J’ai un rôle différent maintenant.
Monsieur le président, par rapport à ce que la sénatrice Eaton vient de dire, je pense qu’il serait très utile, pour une prochaine réunion, de nous donner un survol de la Politique d’aide internationale féministe. On pourrait ainsi savoir quelles mesures sont multilatérales, quelles mesures sont un prêt souverain, quelles mesures sont bilatérales et comment cela fonctionne. Je pense que cela nous aiderait tous à savoir où on va.
J’ai une question précise. Comme le sénateur Pratte l’a indiqué, d’autres pays et d’autres organismes de développement international ont eu recours aux prêts souverains. Selon notre expérience, c’est relativement nouveau et cela ne fait pas l’unanimité chez les intervenants. Ils considèrent cette mesure comme rétrograde par rapport aux tendances actuelles en matière de politiques d’aide internationale au développement. Cela a d’ailleurs fait l’objet de discussions, notamment au Comité d’aide au développement de l’OCDE.
Quelqu’un parmi vous aurait-il des commentaires à ce sujet? J’aurais ensuite quelques questions complémentaires.
Mme Giles : Merci, sénateur. Je peux commencer, et donner le point de vue du ministère des Finances.
Une des choses que nous avons observées, c’est qu’il y a un risque de déficit de financement; on s’assure que les subventions et contributions sont versées aux pays les moins développés et aux pays qui ont besoin d’aide humanitaire internationale, lorsqu’il s’agit du mécanisme adéquat.
Lorsque le ministère des Finances a reçu ces demandes, de nombreux pays étaient dans la catégorie des pays à revenus intermédiaires, ou étaient en voie de l’être. On parle de demandes de financement concessionnel. Ces pays veulent faire la transition et commencer à investir dans leurs propres programmes plutôt que de dépendre de subventions et de contributions.
Le Programme de prêts souverains répond en partie à cela. Nos homologues du G7 ont commencé à aller dans cette direction.
Par exemple, 50 p. 100 de l’aide publique au développement offerte par le Japon en 2016 était sous forme de prêts, contre 28 p. 100 en France, 18 p. 100 en Allemagne et 6 p. 100 au Royaume-Uni.
Dans le cadre du projet pilote proposé, on prévoit que de 2020 à 2023, les prêts représenteront 3 p. 100 de l’aide publique au développement offerte par le Canada. On tente ainsi de répondre aux demandes qui ont été faites au ministère des Finances, notamment par d’autres ministères des Finances dans les discussions internationales. Ryan, voulez-vous donner des détails?
M. Clark : Que certains intervenants du secteur du développement s’interrogent sur la diversification des sources de financement n’est pas surprenant, puisque l’aide publique au développement du Canada a été presque exclusivement offerte sous forme de subventions et contributions pendant plus de 40 ans. Il n’est pas surprenant que les gens posent des questions. Fondamentalement, c’est une bonne chose.
Le sénateur Boehm : Avons-nous des procédures en cas de manquement? Avons-nous un plan si un pays ne rembourse pas son prêt souverain? Est-ce radié, tout simplement?
M. Clark : Nous veillons à la constitution d’une provision pour tout prêt que nous accordons.
Mme Giles : Pour revenir à la question de la sénatrice Eaton, nous ne voulons pas agir avant l’adoption de la réglementation ni avant les décisions du gouverneur en conseil. On s’attend à ce que le Programme de prêts souverains comporte divers paramètres visant à minimiser le risque pour le gouvernement du Canada. À titre d’exemple, on s’assure de la mise en place de ces protections en restreignant l’admissibilité aux pays à revenus intermédiaires ne présentant pas un risque de surendettement et en établissant une valeur limite d’exposition par pays.
Nous avons en outre un mécanisme bien établi, par l’intermédiaire du Club de Paris, pour promouvoir le recouvrement de dettes publiques. Il existe à l’échelle internationale un mécanisme très solide, par l’intermédiaire du FMI et de la Banque mondiale, pour promouvoir la viabilité de la dette et la transparence. Les prêts consentis par l’intermédiaire du programme, comme prévu, devront être accordés en fonction des chiffres réels du FMI et de la Banque mondiale sur le taux d’endettement d’un pays et sa viabilité.
Contrairement à ce que peut croire le public, le système international de gestion de la viabilité de la dette et de la transparence est très rigoureux.
Au gouvernement du Canada, nous avons un comité de gestion des expositions internationales, par l’intermédiaire du Bureau du contrôleur général, qui procède à un exercice de provisionnement annuel. Il examine les prêts existants pour déterminer s’ils doivent être ajustés afin d’être déclarés correctement dans les Comptes publics. De plus, le provisionnement peut être ajusté afin d’éviter les écarts lors de la prise de décision.
Le sénateur Boehm : Merci. J’ai une autre question, si vous me le permettez, monsieur le président. Je sais que nous y reviendrons encore.
Nous avons une nouvelle politique d’aide internationale féministe. Nous envisageons de consentir des prêts souverains. Nous avons une nouvelle institution de financement du développement international. Comment faites-vous pour veiller à l’harmonisation des politiques?
Mme Kent : Vous me demandez comment nous harmonisons ces outils à la Politique d’aide internationale féministe?
Le sénateur Boehm : Exactement.
Mme Kent : Les paramètres de la Politique d’aide internationale féministe s’appliquent à tous les programmes d’aide internationale du Canada, qu’ils émanent d’Affaires mondiales, de FinDev ou des Finances. Tous nos programmes d’aide internationale sont assujettis à cette contrainte. En fait, les rapports consolidés qui seront déposés en vertu de la LRADO permettront au Parlement d’avoir une vue d’ensemble des dépenses pour déterminer si elles sont engagées conformément à la Politique d’aide internationale féministe. En plus d’appliquer des mesures internes pour l’approbation et l’harmonisation des programmes au sein des ministères, les fonctionnaires et les ministres confirmeront la conformité des mesures à la politique. Le Parlement recevra lui aussi ce rapport.
Par souci de transparence, j’inviterais respectueusement les sénateurs à jeter un coup d’œil au dernier rapport sur la LRADO, qui a été déposé en septembre. Il vient répondre de manière très concrète aux questions qui ont été posées sur les types de programmes qui seront financés grâce à l’enveloppe d’aide internationale du Canada dans des buts particuliers, en vertu de la politique féministe, par pays et par ministère dépensant les fonds d’aide internationale.
Le sénateur Boehm : Merci.
Le président : Honorables sénateurs, si je regarde ce qu’on trouve à l’onglet 17, je considère que nous y avons consacré passablement de temps dans les questions et réponses. Cependant, je serais prêt à vous accorder cinq minutes de plus si nous convenons de clore notre étude sur les éléments de l’onglet 17 et de les adopter. Autrement, nous devrons réinviter les fonctionnaires à comparaître la semaine prochaine. Bref, la présidence envisagera d’accorder cinq autres minutes aux sénateurs pour conclure les questions sur l’onglet 17.
Ai-je votre approbation?
Des voix : D’accord.
Le président : Alors, je permettrai à la sénatrice Andreychuk puis au sénateur Forest de poser chacun une question.
La sénatrice Andreychuk : Ma question englobe beaucoup de choses. Nous parlons ici de fonds souverains. Nous avons déjà donné de l’argent à d’autres États. Or, ces prêts n’ont pas été remboursés, et nous avons dû les radier. Je suis là depuis des décennies. Ce n’est rien de nouveau. C’est seulement présenté sous un jour nouveau, si l’on veut.
Ce qui me dérange, c’est que tout sera déterminé par règlement. Cela m’inquiète. Quels critères utilisera-t-on pour évaluer les pays auxquels accorder un prêt? Vous parlez des accords de Bretton Woods. J’aimerais savoir si les critères de Bretton Woods seront pris en compte. Nous y revenons constamment.
Ensuite, il faut dire que la majorité des pays auxquels nous accorderions des prêts recevraient également des prêts extrêmement élevés de la Chine. Le surendettement de ces pays sera phénoménal. En tenons-nous compte? On dirait que toutes mes questions — et j’espère que vous pourrez répondre à certaines d’entre elles — trouveront réponse quelque part dans le règlement. C’est ce qui nous embête. Nous voulons savoir sur quoi le gouvernement fondera ses choix. Nous ne le saurons pas avant d’avoir vu le règlement. J’ose espérer que nous le verrons et que nous pourrons le commenter.
Mme Giles : La façon dont la communauté internationale accordait des prêts auparavant n’était peut-être pas aussi viable qu’elle ne l’est aujourd’hui. Je pense qu’on peut dire que nous avons tiré beaucoup de leçons du passé et que les mesures en place aujourd’hui sont beaucoup plus robustes qu’avant, ce qui comprend la surveillance exercée par les institutions de Bretton Woods, notamment le FMI et la Banque mondiale, pour évaluer continuellement la viabilité de la dette, la gestion des finances publiques et la mobilisation des ressources nationales des pays.
Sans vouloir trop présupposer des décisions que prendra le gouverneur en conseil, nous nous attendons à ce que les paramètres adoptés visent à assurer la viabilité à long terme et à ce que les pays ne puissent pas se placer ou être placés en situation de surendettement.
L’admissibilité sera limitée aux pays à revenu moyen qui ne présentent pas de signe de surendettement. Dans le contexte de la Banque mondiale, peut-être que les pays admissibles à un prêt de la BIRD pourraient y être moins exposés. Il y aurait une analyse en profondeur du risque de surendettement d’un pays donné et de son aptitude générale à rembourser. Bien sûr, cette analyse devrait tenir compte de tout l’éventail des prêts consentis au pays, dont les prêts accordés par d’autres pays souverains, comme la Chine, peut-être.
[Français]
Le sénateur Forest : On a trois nouveaux programmes. Le programme à contribution remboursable qui vise les changements climatiques m’intéresse. J’imagine qu’on vise à soutenir financièrement des projets qui permettraient la réduction des gaz à effet de serre.
[Traduction]
Michelle Kaminski, directrice, Bureau de la finance innovatrice, Gestion des subventions et contributions, Affaires mondiales Canada : Merci. La raison pour laquelle ce programme figure dans cette loi parmi les programmes de lutte contre le changement climatique consiste à protéger la valeur des actifs du gouvernement du Canada. À ce jour, nous avons un portefeuille opérationnel de 1,4 milliard de dollars pour ce qu’on appelle les « contributions à remboursement non conditionnel » accordées pour favoriser des investissements respectueux du climat dans les pays en développement.
Bien que nous accordions ce financement, il ne peut servir à soutenir les titres de créance ou autres produits du genre ne pouvant pas être convertis en capitaux propres, parce que nous savons que ce genre d’investissement peut parfois mener au surendettement. Pour préserver la valeur des actifs, il peut être nécessaire de les convertir en capitaux propres.
Le but de cette disposition législative consiste à protéger les actifs gouvernementaux favorisant déjà des investissements respectueux du climat.
[Français]
Le sénateur Forest : C’est ce qui explique que vous appelez cela une contribution remboursable au lieu d’un prêt.
[Traduction]
Mme Kaminski : Nous avons préparé des tableaux présentant les deux types de produits. Bien honnêtement, ils sont très similaires.
Les prêts découlent d’une autorisation législative, alors que les contributions à remboursement non conditionnel sont des paiements de transfert. Les paramètres qui guident l’un et l’autre diffèrent. Dans les faits, les contributions remboursables sont comme des encours de prêts ou des investissements de portefeuille. Comme nous les accordons pour lutter contre le changement climatique à des conditions libérales, elles sont toutes assorties de conditions de faveur. On fend les cheveux en quatre.
Le président : Merci, honorables sénateurs.
(La séance est levée.)