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OLLO - Comité permanent

Langues officielles

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Langues officielles

Fascicule no 3 - Témoignages du 11 avril 2016


OTTAWA, le lundi 11 avril 2016

Le Comité sénatorial permanent des langues officielles se réunit aujourd'hui, à 17 h 35, pour poursuivre son étude sur l'application de la Loi sur les langues officielles ainsi que des règlements et instructions en découlant, au sein des institutions assujetties à la loi.

La sénatrice Claudette Tardif (présidente) occupe le fauteuil.

[Français]

La présidente : Bonsoir. Je m'appelle Claudette Tardif, et je suis sénatrice de l'Alberta. C'est avec plaisir que je préside la réunion ce soir. Avant de passer la parole aux témoins, j'inviterais les membres du comité à bien vouloir se présenter, en commençant à ma gauche.

La sénatrice Poirier : Rose-May Poirier, du Nouveau-Brunswick.

Le sénateur Mockler : Percy Mockler, du Nouveau-Brunswick.

La sénatrice Fraser : Joan Fraser, du Québec.

La sénatrice Jaffer : Mobina Jaffer, de la Colombie-Britannique.

Le sénateur Rivard : Michel Rivard, du Québec.

Le sénateur McIntyre : Paul McIntyre, du Nouveau-Brunswick.

La présidente : Le comité poursuit son étude sur l'application de la Loi sur les langues officielles ainsi que des règlements et instructions en découlant, au sein des institutions assujetties à la loi.

Ce soir, nous avons le plaisir d'accueillir deux commissaires qui proviennent du Nouveau-Brunswick et de l'Ontario. Il s'agit de Mme Katherine d'Entremont et de M. François Boileau. Le but de la réunion de ce soir est de permettre au comité sénatorial d'examiner les mécanismes de collaboration qui existe entre les commissaires linguistiques du Canada et d'en apprendre davantage sur le rôle des commissaires provinciaux.

Je vous invite à donner votre présentation et, par la suite, les sénateurs vous poseront des questions. Encore une fois, bienvenue. Madame d'Entremont, la parole est à vous.

Katherine d'Entremont, commissaire aux langues officielles du Nouveau-Brunswick, Commissariat aux langues officielles du Nouveau-Brunswick : Merci, madame la présidente et chers membres du comité. Je vous remercie de m'avoir invitée à vous rencontrer aujourd'hui. C'est toujours un plaisir pour moi de m'entretenir avec des gens qui s'intéressent aux langues officielles et à la vitalité des communautés linguistiques minoritaires.

Au cours des prochaines minutes, je vous parlerai du rôle du Commissariat aux langues officielles du Nouveau- Brunswick, de certains des dossiers auxquels nous nous intéressons, ainsi que de nos relations avec le commissariat fédéral et le Commissariat aux services en français de l'Ontario.

En notre qualité d'agents de promotion de l'avancement des deux langues officielles, nous intervenons et réalisons des études dans plusieurs domaines liés à la vitalité de la langue. Ainsi, au cours des dernières années, nous nous sommes penchés sur des questions aussi variées que l'éducation, l'immigration, l'affichage, et le bilinguisme dans le secteur privé.

[Traduction]

L'an dernier, notre bureau a publié une étude sur les avantages et le potentiel économique du bilinguisme. C'était une première pour la province du Nouveau-Brunswick. L'étude a été menée par un économiste et un spécialiste du développement de l'économie. L'étude s'intitulait Deux langues, c'est bon pour les affaires, et elle présentait les avantages économiques d'une main-d'œuvre bilingue.

Par exemple, en raison de ses deux langues officielles, on a installé au Nouveau-Brunswick un centre de contacts- clients et il s'est développé une industrie de services de soutien qui génère 1,4 milliard de dollars de revenus d'exportation annuellement pour la province. On estime que ce secteur embauche plus de 15 000 personnes au Nouveau-Brunswick; qui plus est, cette activité économique profite autant aux personnes unilingues qu'aux personnes bilingues. En fait, l'étude a révélé que les entreprises qui se sont installées au Nouveau-Brunswick en raison de sa main- d'œuvre bilingue ont créé deux emplois unilingues anglais pour chaque poste bilingue.

[Français]

J'aimerais maintenant parler des relations avec les autres commissariats. Depuis sa création au mois d'avril 2003, notre commissariat maintient des liens étroits avec le commissariat fédéral et le Commissariat aux services en français de l'Ontario.

À cet égard, il faut souligner que nous avons officialisé ces liens en 2013 par la signature de protocoles d'entente qui, depuis, ont été renouvelés. Deux dossiers particuliers illustrent bien l'étroite collaboration qui existe entre les trois commissariats. D'abord, en 2013, le Commissariat aux langues officielles du Canada, en partenariat avec le nôtre et celui de l'Ontario, a publié une importante étude sur l'accès à la justice dans les deux langues officielles. Les trois commissaires ont alors examiné le processus de nomination des juges des cours supérieures ainsi que la formation linguistique qui leur est offerte. L'étude révèle que le processus de nomination ne garantit pas la présence d'un nombre suffisant de juges ayant les compétences linguistiques requises pour entendre les citoyens dans la langue officielle de la minorité. L'étude recommande 10 pistes d'actions concrètes et pragmatiques qui permettront d'améliorer la capacité bilingue de la magistrature des cours supérieures. Les commissaires pressent le ministère de la Justice du Canada de faire preuve de célérité et d'esprit de collaboration dans la mise en œuvre de ces recommandations.

Pour ce qui est du dossier de l'immigration, en 2014, les trois commissaires ont pris une position commune dans le dossier de l'immigration francophone et ont demandé aux gouvernements fédéral et provinciaux d'adopter quatre principes directeurs dans ce domaine. Premièrement, nous avons recommandé que l'immigration puisse contribuer au maintien, voire à l'augmentation, du poids démographique des communautés francophones en situation minoritaire au Canada. Aussi, nous avons recommandé que les politiques et programmes fédéraux et provinciaux en matière d'immigration soient conçus et adaptés pour répondre aux besoins de recrutement, d'intégration et de rétention d'immigrants francophones propres aux diverses réalités des communautés francophones en situation minoritaire partout au pays. En outre, de solides partenariats fédéral-provinciaux-communautaires, des stratégies à long terme de sélection, de recrutement, d'accueil, de formation, d'intégration et de rétention d'immigrants, ainsi que des ressources adéquates sont nécessaires pour que l'immigration puisse appuyer le développement et la vitalité des communautés francophones en situation minoritaire.

Finalement, nous avons recommandé que les gouvernements se dotent d'un cadre d'évaluation et de reddition de comptes pour mesurer les progrès réalisés et assurer l'atteinte des objectifs en matière d'immigration dans les communautés francophones en situation minoritaire.

[Traduction]

En outre, le Commissariat aux langues officielles du Nouveau-Brunswick a également des liens avec le commissaire aux langues du Nunavut. Par ailleurs, il faudrait noter que les commissaires aux langues officielles du Canada, de l'Ontario, du Nouveau-Brunswick et du Nunavut sont les membres fondateurs de l'Association internationale des commissaires aux langues, qui a été établie en 2013 et dont le mandat consiste à aider les commissaires aux langues à remplir leur rôle partout dans le monde grâce à l'échange de conseils pratiques et de normes professionnelles élevées et en faisant la promotion de la diversité et de l'égalité des langues.

Cela conclut le bref aperçu du travail de notre commissariat et je serais heureuse de répondre à vos questions si le temps le permet.

[Français]

La présidente : Je vous remercie beaucoup, madame d'Entremont. Monsieur le commissaire Boileau, s'il vous plaît.

François Boileau, commissaire aux services en français, Commissariat aux services en français de l'Ontario : Bonsoir. Madame la présidente, je vous remercie de votre invitation.

[Traduction]

C'est un honneur pour moi d'être ici ce soir. Je veux vous remercier de me permettre de comparaître devant votre comité.

[Français]

Peut-être aurions-nous dû nous parler davantage au début, parce que je constate que ma collègue et moi avons beaucoup de choses en commun dans nos notes. Je vais laisser tomber les passages dont ma collègue vous a déjà fait part.

[Traduction]

Je sais que le sujet de la collaboration entre les commissaires vous intéresse particulièrement, c'est donc cette question que j'aborderai en premier.

[Français]

Cela fera bientôt neuf ans que j'ai été nommé commissaire aux services en français. J'ai établi de bons rapports avec les autres officiers de l'Assemblée législative de l'Ontario. J'ai tissé des liens avec des ombudsmans et des commissaires d'autre pays et territoires, mais l'accomplissement dont je suis le plus fier, c'est d'avoir développé une relation fructueuse avec mes collègues à l'échelle fédérale, soit avec M. Graham Fraser, et au Nouveau-Brunswick, avec Mme Katherine d'Entremont.

Je considère non seulement utile, mais essentiel pour le fonctionnement de mon bureau et pour l'avancement de la défense des droits linguistiques de la minorité francophone ontarienne de connaître les pratiques des autres commissariats linguistiques du pays. J'inclus aussi le Commissariat aux langues officielles du Nunavut et la commissaire Sandra Inutiq, de qui j'ai beaucoup appris.

Je suis convaincu que les services aux citoyens s'en trouvent ainsi améliorés. Nous avons établi, les commissaires Fraser, d'Entremont et moi, des protocoles d'entente qui ont pour objectif l'échange d'information, le transfert de plaintes lorsque nécessaire, et la mise en commun des processus préconisés par nos bureaux respectifs. Surtout, nous avons créé une annexe qui contient les noms et les coordonnées des personnes responsables des dossiers afin que l'un et l'autre puissent communiquer librement sans passer par la chaîne de commandement habituelle.

[Traduction]

En 2013, nous avons également publié une étude conjointe sur l'accès à la justice dans les deux langues officielles ou, plus particulièrement, la capacité bilingue des cours supérieures. Manifestement, nous sommes particulièrement intéressés par le système de justice puisqu'il touche bien souvent des populations vulnérables.

[Français]

En novembre 2014, le commissaire Fraser et moi avons publié un rapport conjoint sur l'immigration, rapport qui consacrait une bonne partie de son contenu à l'immigration francophone en Ontario. De plus, en amont des Jeux panaméricains qui ont eu lieu l'été dernier à Toronto, nous avons signé avec le directeur général du comité organisateur, M. Saad Rafi, une entente visant à faire en sorte que la dualité linguistique du Canada et de l'Ontario soit bien représentée et soit soutenue avant, pendant et après les jeux.

M. Fraser, Mme d'Entremont et moi tentons autant que faire se peut de nous réunir lorsque nous nous trouvons dans une même ville, en plus de participer régulièrement aux mêmes activités. Le mois dernier, nous étions tous les trois conférenciers ou experts invités à la conférence annuelle de l'Association internationale des commissaires linguistiques, qui s'est tenue à Galway, en Irlande, et dont ma collègue a parlé plus tôt. Lors de cette rencontre, les membres de l'Association internationale des commissaires linguistiques ont décidé de créer des comités de travail avec les membres de notre personnel afin de faciliter les échanges. Nous nous sommes entendus pour discuter davantage de thèmes communs, particulièrement dans le cadre de la diffusion de rapports d'enquête ou d'études. J'ai l'intention de poursuivre et même de bonifier cette collaboration avec mes collègues au pays.

[Traduction]

Plus tôt, j'ai mentionné l'accès à la justice et l'immigration. Comme vous le savez, ce sont des secteurs qui concernent les deux ordres de gouvernement, mais il y a un autre secteur dont on parle moins souvent mais qui n'est pas moins important, c'est-à-dire les services aux collectivités.

[Français]

Le Canada est un immense pays, et l'Ontario, un vaste territoire. La qualité des services offerts par les gouvernements aux populations quelles qu'elles soient, métropolitaines, urbaines ou rurales, a un impact direct sur le développement des communautés, à plus forte raison lorsqu'elles sont minoritaires. L'un de mes chevaux de bataille ces derniers temps dans cette ère technologique où de plus en plus de services sont offerts en ligne, c'est que les institutions gouvernementales comprennent à quel point il est important que les services qu'elles offrent soient adaptés aux communautés visées, puisque si les besoins sont parfois similaires, ils sont aussi souvent distincts. Pour beaucoup de gens, notamment les plus vulnérables, cela veut dire obtenir des services en personne et dans sa langue.

Bien sûr, les communautés peuvent prendre en charge leur développement, par exemple avec la création de centres multiservices où un même centre peut regrouper des services offerts par le gouvernement municipal, provincial et fédéral, ainsi que des services communautaires. Cela permet de créer des endroits où les services sont offerts dans les deux langues, mais où la langue de travail est le français, un peu comme les centres de services bilingues du Manitoba. Cependant, pour y arriver, il faut toutefois que les ordres de gouvernement acceptent de travailler de concert pour le bien des communautés.

J'aimerais revenir brièvement sur le thème de l'immigration, car, en octobre 2014, nous, les trois commissaires, avons publié une déclaration commune dans laquelle nous énoncions les quatre principes directeurs en matière d'immigration. Dans notre rapport, Graham Fraser et moi recommandions que les nouveaux arrivants aient accès à une formation linguistique dans les deux langues officielles afin de faciliter leur intégration et que cette formation linguistique soit offerte par des institutions francophones. Il faut nous assurer que les nouveaux arrivants comprennent dès leur arrivée aux aéroports Pearson et Macdonald-Cartier qu'ils peuvent être pris en charge par un organisme qui est réellement francophone et auprès duquel ils pourront recueillir une foule de renseignements pertinents sur les services disponibles en français, sur les écoles, sur la vie communautaire et de quartier. C'est aussi l'un des défis pour nous en Ontario, d'ailleurs, que de nous assurer que l'immigrant, lorsqu'il va chercher sa carte santé ou son permis de conduire, se sente à l'aise de demander et de recevoir des services en français, et surtout de nous assurer que l'État l'aide à mieux s'orienter dans sa nouvelle collectivité, y compris au sein de la communauté francophone.

[Traduction]

Il ne faut pas oublier que l'immigration francophone est un fait réel en Ontario et que ce n'est pas une idée hypothétique. Dans la région du Grand Toronto, près d'un francophone sur deux n'est pas né au Canada. Cela représente beaucoup de personnes.

[Français]

J'aimerais en profiter pour souligner la petite infographie que nous vous avons distribuée, qui représente les statistiques sur les francophones en Ontario, et qui est entièrement bilingues, bien sûr. Si vous désirez en obtenir d'autres exemplaires, nous en avons plusieurs centaines à votre disposition. Profitez-en, puisque les statistiques sont valides pour deux ans seulement et qu'elles changeront au prochain recensement. Cela vous donne une indication du nombre de francophones qui habitent dans chacune des régions, y compris ceux qui sont nés ailleurs qu'au Canada.

Dans cette optique, je suis très fier que le gouvernement de l'Ontario ait adopté une définition inclusive de la personne « francophone » en 2009, à la suite de ma toute première recommandation à titre de commissaire. Cette nouvelle définition contribue certainement à développer un sentiment d'appartenance chez les immigrants francophones. Sont désormais considérées comme francophones les personnes dont la langue maternelle n'est ni le français ni l'anglais, mais qui connaissent le français et le parlent à la maison. C'est très important. Elle a permis de comptabiliser 50 000 francophones de plus. Ce ne sont pas 50 000 francophones qui sont arrivés par hasard. Ils y étaient déjà. Ils ont simplement été comptabilisés comme francophones. Ces gens habitent déjà la province, participent aux activités de la communauté francophone et inscrivent leurs enfants dans les écoles de langue française. Bref, ils vivent en français dès qu'ils sortent de la maison, alors aussi bien les reconnaître comme francophones. Voilà pourquoi je m'intéresse à vos travaux sur le projet de loi S-209, qui vise à élaborer une nouvelle définition des francophones.

[Traduction]

En terminant, je signalerais que mon équipe et moi menons plusieurs enquêtes qui se limitent à l'Ontario, mais qui renvoient à des enjeux qui sont propres aux collectivités francophones de l'ensemble du Canada. En fait, au moins deux rapports d'enquête devraient être publiés ce printemps, en plus de mon rapport annuel qui devrait l'être au cours des prochains mois.

[Français]

Je vous remercie à nouveau de m'avoir invité à comparaître devant votre comité. Je répondrai avec plaisir à vos questions au meilleur de mes connaissances.

La présidente : Je vous remercie, monsieur Boileau. Votre exposé était très intéressant. La sénatrice Poirier, vice- présidente du comité, posera la première question.

La sénatrice Poirier : Je remercie nos deux invités. Nous sommes heureux de vous accueillir de nouveau. Il y a longtemps qu'on s'est vu, madame d'Entremont. J'aimerais poser quelques questions qui s'adressent à nos deux témoins. Par la suite, j'aurai une autre question qui concerne plus particulièrement le Nouveau-Brunswick.

Comme vous le savez, le 150e anniversaire de la Confédération arrive à grands pas. Je me demandais si vous aviez été consultés en ce qui a trait à la planification et aux célébrations. Quelles sont vos attentes quant aux célébrations, notamment en ce qui concerne les Acadiens et les Franco-Ontariens?

Mme d'Entremont : Je n'ai pas été consultée.

La sénatrice Poirier : Avez-vous conclu des ententes? Que se passera-t-il en Acadie?

Mme d'Entremont : Je n'ai aucune idée des projets. Je n'ai pas été consultée. J'ignore quelles personnes sont responsables des consultations. Sont-elles venues au Nouveau-Brunswick? Je ne sais pas si on en parle avec le gouvernement. Je n'ai pas été impliquée dans cette initiative.

M. Boileau : Personne n'a été consulté en Ontario. À mon avis, c'est l'Office des affaires francophones qui devrait être consulté au sujet de ces célébrations. En ce qui me concerne, je m'attends à ce que les célébrations du 150e reflètent les valeurs canadiennes, particulièrement au chapitre de la dualité linguistique. Les festivités doivent se dérouler dans le respect des minorités francophones et des langues officielles. Je souhaite sincèrement qu'il y ait une appropriation locale des festivités, c'est-à-dire que toutes les communautés prennent une part active aux célébrations de leur pays. Les festivités ne doivent pas avoir lieu uniquement à Ottawa. L'ensemble des festivités, qu'elles se déroulent à Ottawa ou ailleurs, dans les grands centres, doivent refléter la dualité linguistique, sans arrière-pensée. Il importe de bien préparer les célébrations dès le début afin d'exprimer comme il se doit le vécu des communautés francophones. Il s'agit d'une occasion inespérée pour les Canadiens de se rappeler qui nous sommes, de reconnaître notre caractère distinct et notre dualité linguistique, et de comprendre ce que signifie vraiment être citoyen canadien.

La sénatrice Poirier : Selon vous, quels sont les dossiers prioritaires en matière de langues officielles à l'heure actuelle?

Mme d'Entremont : Je crois qu'il est important de promouvoir nos recommandations et d'en faire le suivi. Nous avons mené une étude en 2013-2014 sur les postes bilingues et la formation linguistique. Je continue de faire la promotion de ces recommandations. Cette étude a porté sur plusieurs facteurs. Au Nouveau-Brunswick, nous ne faisons pas preuve de la même rigueur qu'à l'échelon fédéral. Il n'y a pas de postes désignés. On doit prendre des mesures plus rigoureuses en ce qui concerne les postes bilingues. Je continue à rappeler l'importance de ces recommandations aux dirigeants politiques et aux fonctionnaires de la fonction publique. Lorsqu'on affiche des postes bilingues, on ne précise pas les niveaux de compétence linguistique requis. Selon moi, c'est une recommandation qui mérite d'être mise en œuvre, parce que ce manque de précision porte à confusion. Certains candidats croient à tort qu'ils ne sont pas qualifiés pour des postes bilingues, parce qu'ils ne connaissent pas les exigences. Bref, ces candidats se disqualifient eux-mêmes en raison du manque de clarté en ce qui a trait aux compétences recherchées. Je profite de toutes les occasions qui se présentent pour montrer l'importance de donner suite à de telles recommandations.

L'année dernière, j'ai fait des recommandations par rapport à la haute fonction publique. Tout commence par le rôle d'impulsion que jouent les cadres supérieurs. Ce n'est pas encore le cas au Nouveau-Brunswick. Selon notre étude, seulement 49 p. 100 des gestionnaires de la fonction publique sont bilingues. Dans une province officiellement bilingue comme le Nouveau-Brunswick, on devrait s'attendre à une plus grande proportion de personnel bilingue aux échelons supérieurs. À mon avis, il importe de continuer à valoriser ces recommandations, à faire la promotion de la dualité linguistique, et à tenter d'influencer les décideurs politiques et ceux de la fonction publique. On a proposé des recommandations de fond. On a examiné le système en entier. Je crois qu'on pourrait apporter des améliorations en donnant suite à ces recommandations.

Cette année, au cours des deux ou trois prochains mois, nous comptons publier notre prochain rapport annuel. Nous ferons d'autres recommandations dont je ne peux pas discuter aujourd'hui. Chaque fois que nous proposons des recommandations majeures, à la suite d'études qui examinent tout le système, il est important de continuer à en débattre pour qu'elles ne soient pas oubliées d'une année à l'autre.

La sénatrice Poirier : Sont-ils favorables à toutes vos recommandations depuis 2014?

Mme d'Entremont : Les recommandations du rapport annuel de 2013-2014 remontent à l'époque de l'ancien gouvernement durant la période de transition. Nous avions publié le rapport annuel au mois de juin. Par la suite, la campagne électorale s'est amorcée et le nouveau gouvernement est arrivé au pouvoir à l'automne. Nous comptons reprendre les discussions et demander un compte rendu des travaux. À ma connaissance, aucune mesure n'a été adoptée. Les recommandations proposées l'année dernière n'ont pas été mises en œuvre, ce qui est décevant. Cependant, nous continuerons d'en débattre.

La présidente : Monsieur Boileau, avez-vous une question qui s'adresse à la sénatrice Poirier?

M. Boileau : Les enjeux prioritaires sont les mêmes en ce qui concerne la santé, l'éducation, l'immigration, l'accès à la justice et les services offerts au public. Ce sont toutes des notions qui sont interconnectées. Au cours des huit dernières années, nous avons rédigé de nombreux rapports annuels ainsi que des rapports d'enquête, qui ont été très bien reçus dans l'ensemble. Nous avons obtenu des résultats remarquables auprès du gouvernement provincial pour certaines de nos recommandations. Le dialogue progresse avec le gouvernement provincial. Mon propre bureau est devenu indépendant du gouvernement depuis le 1er janvier 2014. Je relève maintenant directement de l'Assemblée législative. Je suis devenu un officier du Parlement. Bien sûr, il s'agit là de changements positifs. Nous avons publié un rapport spécial sur la planification des services de santé offerts en français. Il a été bien accueilli et des changements positifs allant dans le sens de nos recommandations ont été apportés.

Nous avons fait des recommandations, par exemple, concernant le manque de programmes au niveau des études postsecondaires en français dans le centre-sud-ouest de l'Ontario. C'est une région pour laquelle il avait été révélé que les francophones n'avaient accès à des programmes que dans une proportion de 0 à 3 p. 100 en matière d'équivalence de programmes par rapport à la majorité. Cela a fait boule de neige. Une discussion importante prend forme maintenant; elle était dormante depuis les 40 dernières années, mais elle refait surface de plus belle quant à la création d'une université de langue française en Ontario. Ce sont de tels débats de société pour lesquels je suis très heureux de constater un dialogue entre la communauté et le gouvernement, et nous y avons un peu participé.

Il y a un manque d'écoles de langue française dans la région du Grand Toronto; nous avions recommandé du financement pour dix nouvelles écoles, et nous en avons reçu pour neuf nouvelles écoles. Cela va dans le bon sens, mais il y a encore des lacunes.

Certains règlements n'ont pas été modifiés comme je le souhaitais à l'époque, et il est donc possible que je revienne sur cette question au cours des prochaines semaines. J'aimerais pouvoir vous répondre, mais je ne veux pas trop en dire; les prochains mois seront marqués d'une grande activité, et plusieurs rapports seront publiés, y compris notre rapport annuel.

Il faut bien comprendre qu'une loi est en vigueur en Ontario sur les services en français. Son libellé est tout de même assez révélateur : Loi sur les services en français. Cela fait 30 ans que cette loi a été adoptée. Si l'on compare notre loi avec la Loi sur les langues officielles fédérale, qui comporte une centaine d'articles, la nôtre n'en comporte que 14. Nous avons étiré l'élastique autant que possible sans qu'il casse, et je pense qu'il s'agissait d'une approche fructueuse pour l'Ontario. Nous n'avons pas la même proportion de francophones qu'au Nouveau-Brunswick, et nous ne disposons pas du même statut, alors nous tentons de faire ce que nous pouvons avec les moyens dont nous disposons. Je pense toutefois que nous avons accompli beaucoup de choses pour une population qui représente 4,8 p. 100 de la population, soit 611 000 personnes, beaucoup plus qu'ailleurs, toutes les provinces confondues.

En ce qui a trait au pourcentage de la population, il ne s'agit pas d'une population proportionnellement aussi grande que celle du Nouveau-Brunswick; le rapport de force n'est donc pas le même. Il faut toutefois considérer les progrès accomplis. Permettez-moi de vous donner petit exemple. Il y a 30 ans, imaginer une plaque minéralogique en français en Ontario aurait été impensable; cela aurait créé un débat très houleux. Aujourd'hui, c'est perçu comme étant banal, et c'est ce que je souhaite, c'est-à-dire qu'il n'y ait pas de débat, que l'on dépolitise le français et qu'il soit normal d'offrir des services en français à notre population. Je pense que nous sommes en train de réussir ce pari, tout doucement.

Le sénateur McIntyre : Merci à tous les deux pour vos présentations, et merci d'être présents parmi nous.

Je note qu'il existe une excellente collaboration entre les commissaires linguistiques, tant à l'échelle nationale qu'internationale. Par exemple, à l'échelle nationale, des protocoles d'entente ont été signés et conclus entre vos deux commissariats et le commissaire Fraser. D'ailleurs, comme vous l'avez mentionné, deux études ont été faites, l'une portant sur l'accès à la justice dans les deux langues officielles et l'autre portant sur l'immigration francophone.

J'aimerais poser une question à chacun d'entre vous. La première question s'adresse à M. Boileau. Lors de son passage devant le comité sénatorial le 21 mars dernier, le commissaire Fraser a fait mention de sa rencontre avec le ministre de l'Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté. Selon lui, le gouvernement fédéral s'est engagé à rétablir le programme Avantage significatif francophone. Monsieur Boileau, je comprends que vous avez réagi de façon positive à cette annonce; pourriez-vous nous en dire davantage à ce sujet?

M. Boileau : Le fait qu'ils se parlent constitue déjà une avancée. J'en suis content. Il y a une ouverture; on l'a noté tout de suite après la rencontre entre le commissaire Fraser et le ministre. Le ministre a réagi de façon positive.

Le programme Avantage significatif francophone a été éliminé sans que l'on en comprenne vraiment les raisons, puisque ce programme donnait des résultats probants pour les communautés francophones. Il facilitait l'accès, par exemple, en ce qui concerne la sélection des nouveaux arrivants, les entreprises avaient l'occasion de choisir quelqu'un de compétent directement et de faire venir cette personne en Ontario. Le fait de retirer le programme Avantage significatif francophone pour le remplacer par le programme Entrée express, qui n'avait pas encore donné de résultats probants, mettait en doute la volonté du gouvernement de vouloir vraiment offrir un avantage aux francophones.

Le fait que le ministre ait annoncé qu'il allait remettre un tel programme en place — sous un autre nom — nous envoie le signal d'une ouverture à la discussion. Chez nous, en Ontario, ce qu'il est important de comprendre, c'est que nous avons aussi fait des progrès avec notre propre gouvernement en parallèle avec ce dossier. L'Ontario s'est doté, en 2012, d'une première stratégie en matière d'immigration. Il n'y en avait jamais eu avant, ce qui est étonnant.

De plus, dans le cadre de cette stratégie, il y avait une disposition qui permettait d'aller chercher au minimum 5 p. 100 de nouveaux arrivants francophones. Nous n'avons pas encore atteint ce chiffre, et c'est pour cette raison que nous avions recommandé, mon collègue et moi, que le gouvernement de l'Ontario se dote d'un groupe de travail qui se pencherait sur le volet de l'accueil, mais aussi sur la façon d'aller chercher les nouveaux arrivants, soit la sélection, l'intégration, l'accueil, la formation et la rétention des nouveaux arrivants. Il est très important aussi de les retenir. Comment? En faisant en sorte qu'ils sentent qu'ils font partie d'une communauté accueillante.

Le Manitoba français a réussi son pari, et je crois que l'Ontario serait en mesure de le réussir également, pourvu qu'elle dispose des moyens et d'une véritable stratégie. Nous y arrivons presque, en Ontario, et j'attends de façon incessante le rapport d'un groupe de travail que nous avions justement recommandé. Le gouvernement a accepté cette recommandation et il doit publier très prochainement un rapport qui sera — je le souhaite, du moins — pragmatique et qui nous permettra non seulement de rêver, mais bien de faire de véritables progrès sur le terrain à l'aide de solutions précises.

Le sénateur McIntyre : Madame d'Entremont, comme vous le savez, depuis 2011, un programme de formation linguistique destiné aux juges est offert au Nouveau-Brunswick. Selon vous, ce programme pourrait-il servir de modèle pour améliorer la situation à l'échelle nationale?

Mme d'Entremont : Vous m'avez fait sourire lorsque vous avez commencé à poser votre question. Je vous inviterais à prendre connaissance de ce programme; c'est un programme fantastique que j'ai vu en action. C'est la juge Yvette Finn qui l'a mis en œuvre, et elle a réussi sans avoir fait trop de publicité. C'est un programme qui a fait des petits; on réussit à attirer des gens de partout au Canada. Ils viennent à Caraquet, au Nouveau-Brunswick, une semaine à la fois, et ce, quatre fois par année, je crois. Il y a différents modules. L'année dernière, on a conçu l'équivalent du programme en anglais. Des juges, surtout du Québec, mais peut-être pas seulement du Québec, viennent à St. Andrews, où le programme est offert en anglais. C'est une perle. J'en ai parlé dans mon rapport annuel, et nous avons décerné un prix à cette initiative. Plusieurs composantes du programme sont excellentes, comme le développement d'un outil d'évaluation qui est vraiment bien. Cet outil permet aux apprenants de s'autoévaluer. On les met en situations réelles de travail. Je vous encourage à en prendre connaissance. Je crois qu'il serait tout à fait approprié de l'appliquer en milieu de travail au sein du gouvernement fédéral. C'est un très bon programme.

[Traduction]

La sénatrice Jaffer : Je vous remercie pour vos exposés. Je les ai trouvés dynamisants. Je ne peux songer à un autre terme pour les décrire. J'ai vraiment apprécié la coopération entre les commissaires.

J'aurais aimé que le commissaire Fraser soit également des nôtres. J'aurais voulu vous poser, à tous les trois, la question suivante : depuis que vous êtes commissaire, avez-vous constaté la croissance de la langue française? Je crains qu'il soit inutile de parler de la langue française comme partie intégrante du bilinguisme si cette langue ne prend pas d'expansion. Est-elle en croissance? Constatez-vous une différence? Je sais que vous avez parlé des plaques d'immatriculation, mais c'est plus que cela.

M. Boileau : Nous avons tendance à oublier que le français est une langue en expansion partout dans le monde. D'ici 2050, près de 700 millions de personnes parleront français, essentiellement en Afrique, d'où sera issue 85 p. 100 de la population francophone. C'est donc une langue en expansion partout dans le monde, c'est une langue en expansion sur Internet et c'est une langue en expansion dans le domaine des affaires. On parle également français sur cinq continents, c'est pourquoi je dis que nous faisons des progrès partout dans le monde.

Ici, en Ontario, manifestement je vais parler pour ma province, nous constatons que l'immersion française est extrêmement populaire. En fait, nous avons d'énormes problèmes relativement à l'immersion. Nous sommes incapables d'offrir les programmes que réclament les parents. La demande pour de nouvelles écoles et de nouveaux programmes d'immersion est tout simplement trop forte.

Le français prend aussi sa place dans le cadre public. Ce n'est pas seulement une langue parlée dans le contexte familial, maintenant on la parle également en public. Il y a donc une reconnaissance. Et comme je l'ai dit plus tôt, c'est normal de parler français. Si vous allez flâner dans un magasin IKEA à Toronto, vous allez littéralement entendre toutes les langues du monde, y compris le français. Je l'ai déjà fait. Notre société est très multiculturelle.

Mais le français est une langue multiculturelle; je veux dire par là qu'il y a énormément de personnes d'origines diverses qui immigrent en Ontario. C'est très rassurant et rafraîchissant de voir autant de diversité dans les écoles. Lorsque je me rends dans les écoles de la région du Grand Toronto, à Hamilton, à London ou même ici, à Ottawa, je remarque toute cette diversité et je demande aux jeunes s'ils parlent deux langues. Mais ils n'en parlent pas que deux; ils me répondent presque invariablement qu'ils en parlent trois et quelquefois quatre.

J'estime qu'il y a de l'espoir pour l'expansion du français, parce que c'est une langue inclusive. C'est pourquoi nous avons une définition inclusive en Ontario, et j'en suis très fier.

Oui, le français prend réellement sa place. Depuis 25 ou 30 ans, et en fait on pourrait remonter bien plus loin encore, nous construisons nos propres établissements. Nous commençons donc à en récolter les fruits. Maintenant, on ne parle plus uniquement d'écoles primaires ou secondaires, qui ont toujours été les bases pour permettre aux francophones de s'assurer qu'ils sont reconnus dans leurs propres collectivités. On va maintenant au-delà de cela; on parle d'écoles postsecondaires. On parle d'établissements de santé ou de commerce.

Nous constatons donc que ces établissements voient le jour dans les collectivités francophones, et maintenant les francophones ont plus de confiance pour construire des partenariats avec le reste de la société. C'est encourageant. On délaisse la politique et on se tourne vers l'avenir.

Mais je ne vais pas mettre de lunettes roses et faire comme s'il n'y avait aucune assimilation. Le problème de l'assimilation existe. Il existe des problèmes en Ontario. Tout n'est pas rose. L'assimilation est présente. Cela ne fait aucun doute, mais nous nous assurons, dans la mesure du possible, que l'État est là pour aider les collectivités francophones à réfléchir à la mise en place de services fondés sur les besoins de la collectivité, et non pas uniquement sur l'assurance que les documents seront rédigés en français et en anglais. Les programmes doivent être pertinents et répondre aux besoins de développement des collectivités.

M. d'Entremont : Je tiens à indiquer que notre bureau a commandé une étude dont nous avons publié un résumé dans notre rapport annuel de l'année dernière, sur l'évolution du bilinguisme au Nouveau-Brunswick. L'un des chiffres intéressants qui est ressorti de cette étude est qu'au cours des 40 dernières années, le pourcentage de gens dont la langue maternelle est l'anglais au Nouveau-Brunswick et qui sont bilingues est passé de 15 p. 100 à 30 p. 100. Par conséquent, de toute la population bilingue au Nouveau-Brunswick, 30 p. 100 ont l'anglais comme langue maternelle, ce qui est probablement principalement attribuable aux programmes d'immersion française qui ont vu le jour au début de cette période de 40 ans.

Je crois qu'il y a toujours beaucoup de pain sur la planche au Nouveau-Brunswick. Il existe toujours une croyance selon laquelle seuls les francophones sont bilingues, ce qui est absolument faux. Nous tentons de démanteler ce mythe quotidiennement. Ce n'est là qu'un exemple de chiffre très révélateur qui témoigne de l'évolution des droits associés au bilinguisme par langue maternelle au Nouveau-Brunswick. C'est quelque chose de très intéressant.

Nous devons aussi garder à l'esprit la menace de l'assimilation. Bien que notre langue minoritaire, la langue française, soit une langue minoritaire en santé parlée par environ un tiers de la population — et cette proportion s'est maintenue au fil des décennies —, nous devons constamment nous assurer que la langue française et les droits que les gens se sont battus si forts pour obtenir soient protégés.

La sénatrice Jaffer : Nous venons tout juste d'entendre que 9 p. 100 des étudiants de la Colombie-Britannique sont en immersion. J'aimerais connaître ce pourcentage en Ontario et au Nouveau-Brunswick.

Comme je l'ai indiqué, j'ai trouvé votre définition du terme « francophone » très enthousiasmante. Ceux d'entre nous qui ont été colonisés sont réticents à l'idée d'être décrits comme anglophones. Nous souhaitons être en mesure de choisir comment nous définir. En réalité, nous ne souhaitons pas être catégorisés. Je pense que tout ce que nous voulons, c'est apprendre la langue, qui est une langue officielle de notre pays.

Je trouve votre définition très encourageante, mais j'espère qu'un jour on n'ait pas à se définir comme francophones ou anglophones, car certains d'entre nous n'aiment pas ces définitions. Nous voulons simplement avoir le droit d'apprendre les deux langues.

Quoi qu'il en soit, votre définition de « francophone » est une bonne première étape. Je me demande si d'autres provinces ont adopté cette définition.

M. Boileau : Un projet de loi a été déposé au Manitoba. Bien entendu, la province est en mode électoral en ce moment, donc le projet de loi n'a pas été adopté. Sa définition de « francophone » y était beaucoup plus large que la nôtre en Ontario, c'est la raison pour laquelle je me suis penché sur cette définition avec beaucoup d'intérêt.

En Nouvelle-Écosse, la définition est également plus large qu'en Ontario et cela est aussi très intéressant. Mais il y a une nouvelle loi qui a été adoptée il y a seulement quelques années de cela.

Pour répondre à votre question sur les écoles d'immersion, je crois qu'environ 5 ou 6 p. 100 des enfants fréquentent des écoles d'immersion totale, mais il existe différents degrés d'immersion en Ontario. Soixante-quinze pour cent du programme se donne en français. Je pourrais vous envoyer toutes les données là-dessus. Je ne les ai pas sous la main maintenant.

En Ontario, bien des gens suivent des programmes de base d'apprentissage du français, mais il y a encore de la marge en ce qui concerne les programmes d'immersion. Néanmoins, le problème se situe au niveau de la capacité à développer ces écoles et ces nouveaux programmes, car on manque d'enseignants.

[Français]

La sénatrice Fraser : Merci à vous deux, et bienvenue au Sénat. C'est vraiment très intéressant de vous écouter.

Je voudrais revenir à l'accès à la justice. J'ai une question générale qui s'adresse à vous deux, et j'aurai ensuite une question plus précise pour vous, madame d'Entremont.

À la suite de l'étude conjointe que vous avez faite, avez-vous reçu des réponses du gouvernement, qu'il s'agisse de l'échelon fédéral ou provincial, à vos recommandations?

M. Boileau : Le gouvernement de l'Ontario a répondu positivement. Il est prêt à collaborer avec le gouvernement fédéral afin de créer un protocole d'entente sur la capacité bilingue des juges ainsi que sur la formation linguistique et la composition des comités sur le bilinguisme.

Il y a cette volonté, cette assurance, en Ontario. À l'époque, après le dépôt de notre rapport conjoint, nous ne sentions pas de réceptivité du côté du fédéral. Avec le nouveau gouvernement, nous espérons que les réponses que nous avons obtenues au cours des dernières années ne soient pas des réponses finales, et que nous pourrons obtenir des réponses plus favorables à nos recommandations. En Ontario, la porte est ouverte, j'en ai eu l'assurance récemment.

Mme d'Entremont : Pour ce qui est du Nouveau-Brunswick, une rencontre est programmée avec notre ministre de la Justice dans environ trois semaines. Ce sera ma première occasion de lui parler de notre étude. J'en avais parlé avec l'ancien ministre, au moment de la publication de l'étude, mais je reviens à la charge. J'aurai plus de nouvelles après cette rencontre. Essentiellement, il faut faire la promotion de nos recommandations et encourager le gouvernement provincial à aller de l'avant. Grâce au beau programme de formation linguistique qui est offert aux juges provinciaux au Nouveau-Brunswick, c'est une occasion en or.

La sénatrice Fraser : C'était ma deuxième question.

Mme d'Entremont : Il faut donc parler de cela et de l'application de ce programme à l'échelle fédérale.

La sénatrice Fraser : Est-ce que des expressions d'intérêt ou des contacts ont été manifestés de la part du système fédéral judiciaire pour ce programme? Cette initiative semble tellement évidente, et on aurait dû la mettre en œuvre il y a un siècle déjà.

Mme d'Entremont : Je ne sais pas s'il y a eu des initiatives avec la ministre fédérale, mais je vais m'assurer d'en faire la promotion auprès du ministre provincial. C'est peut-être un aspect dont on pourrait discuter entre commissaires. Je pourrais certainement y prêter main-forte et essayer de mettre ces gens en contact, si jamais il y a un intérêt. Cependant, je crois que nous allons commencer à en discuter avec le ministre provincial.

La sénatrice Fraser : À votre niveau, parce que le gouvernement fédéral a déjà annoncé son intention de nommer enfin des juges bilingues à la Cour suprême. Cependant, s'il n'y a aucune offre qui émane des niveaux inférieurs, nous ferons face à un problème important.

Si je puis me permettre de vous faire une toute petite suggestion en privé, vous pourriez suggérer à votre ministre de prendre contact avec le gouvernement fédéral pour accélérer le dossier.

M. Boileau : Chez nous, en Ontario, la ministre déléguée aux Affaires francophones — pour laquelle il s'agit d'un travail à temps plein —, est aussi chargée d'un travail à temps partiel : elle est également procureure générale de l'Ontario. Les astres sont donc favorables à cette discussion.

Le sénateur Mockler : J'aimerais tout d'abord saluer le commissaire de notre grand pays, le Canada, qui est ici à titre d'observateur. Monsieur Fraser, je tiens à vous féliciter pour le travail que vous faites.

J'aimerais aborder trois sujets qui concernent certaines responsabilités que j'ai assumées lorsque je siégeais à d'autres parlements. Je parle de la Société Santé en français, de ce qu'on peut faire de plus pour l'immigration francophone et, finalement, de la façon dont on peut tenter de contrôler l'assimilation de nos compétences provinciales par le gouvernement fédéral.

J'aimerais aussi, compte tenu de la présence de Mme d'Entremont, parler de la turbulence que nous avons vécue au Nouveau-Brunswick récemment. Je voudrais vous dire que les commentaires qui ont été dirigés contre vous ne représentent pas la vision de la majorité des Néo-Brunswickois et Néo-Brunswickoises que je connais. Vous ne méritiez certainement pas ce genre de traitement. J'ai d'ailleurs exprimé mon mécontentement et mes opinions envers différents groupes, et je veux vous encourager à continuer votre travail. On devait se servir de votre rapport sur les avantages d'être bilingue pour faire le survol des langues officielles du Canada et du Nouveau-Brunswick. En ce qui concerne l'Ontario, je dois dire que j'ai eu l'occasion, par le passé, de discuter avec la ministre Meilleur de bien des dossiers qui touchaient la francophonie.

On devrait aussi porter à l'attention des Canadiennes et des Canadiens le fait que, selon l'émission Découverte, animée par M. Michel Rochon, les bienfaits du cerveau bilingue ont été confirmés. Sans vous lire tout le rapport, je voudrais vous en citer un extrait, et je cite :

De plus en plus de recherches scientifiques démontrent que le bilinguisme confère des avantages cognitifs chez l'enfant, qu'il peut s'apprendre avec un haut degré de compétence tout au long de la vie et qu'il offre un effet neuroprotecteur jusqu'en fin de vie.

Je pense que ce sont des choses sur lesquelles il faut s'attarder dans ce rapport, compte tenu de la turbulence que nous avons vécue au Nouveau-Brunswick. Plusieurs personnes ont dit qu'elles ignoraient ce fait. Cependant, si on veut faire avancer la Loi sur les langues officielles ou moderniser davantage les services, nous devons communiquer ces renseignements à nos populations.

Il y a donc trois dossiers qui me tiennent à cœur. Le premier est celui de la Société Santé en français. On connaît un peu son historique, c'est un organisme qui est assez récent, mais qui fait un travail exceptionnel. J'aimerais connaître votre opinion sur cette société.

J'aimerais aussi vous entendre parler de l'immigration francophone. Après la mise sur pied du programme fédéral pour les réfugiés, j'ai eu l'occasion de rencontrer des gens de notre Parlement provincial, tant du côté du gouvernement que de l'opposition, ainsi que différents groupes de la province, pour parler de l'immigration francophone. Ce que j'en ai retiré, c'est que nous devrons être très diligents si nous voulons nous assurer de sauvegarder notre francophonie, au sein de nos provinces respectives.

Nous devons nous interroger sur ce que nous pouvons faire pour encourager davantage cette francophonie, quelles recommandations nous pourrions formuler à notre gouvernement, comment nous pourrions mieux faire connaître l'organisme Société Santé en français, qui est un pont important entre nos deux langues officielles.

Enfin, pouvez-vous brièvement nous expliquer comment contrôler ou adopter un processus de travail qui ferait davantage la promotion des deux langues officielles sans tomber dans le fossé de l'assimilation?

La présidente : C'est un beau discours, sénateur Mockler, et c'est toute une question. Je demanderais aux témoins d'être aussi concis que possible pour répondre à ces trois questions et, si nécessaire, de faire parvenir des documents supplémentaires au comité. Ce serait fort apprécié.

M. Boileau : Je propose de parler un peu de la Société Santé en français.

Chez nous, en Ontario, l'affaire de l'Hôpital Montfort, on s'en souviendra, a été un déclencheur, une révélation selon laquelle, finalement, nous étions fragiles en matière d'institutions de santé. C'est à cet égard que l'implication du gouvernement fédéral a été si importante.

Je vous raconte une petite anecdote en passant. À l'époque, c'est moi qui avais rédigé les statuts et règlements de la Société Santé en français. C'est donc une société que je connais bien. Ici, en Ontario, je suis très heureux du fait que le gouvernement provincial finance aussi des réseaux de santé. Cela se fait en parallèle et, parfois, il s'agit du même réseau.

Certains réseaux fédéraux sont financés par le gouvernement fédéral, mais il y a aussi, en Ontario, des entités de planification de services de santé en français. Par exemple, dans la région de la capitale nationale, le réseau financé par le gouvernement fédéral est aussi financé par la province. Donc, il y a cette collaboration. Je pense qu'il pourrait y en avoir davantage, parce que les réseaux ne sont pas tous identiques, bien qu'ils se recoupent.

Nous avons des entités de planification qui suivent un peu le même modèle qui favorise la collaboration avec les fournisseurs de services de santé pour trouver des solutions au manque de professionnels de soins de santé et aux besoins en matière d'accès à des services de santé en français, et la collaboration avec le Consortium national de formation en santé (CNFS). Cette dynamique est très importante. Je pense que la participation du gouvernement fédéral est absolument essentielle. Cependant, je suis heureux de constater que la province de l'Ontario se responsabilise au lieu d'attendre que le gouvernement fédéral lui accorde un financement.

Mme d'Entremont : Je vais maintenant parler d'immigration. Il y a trois jours, j'ai écrit au ministre fédéral de l'Immigration. Tout d'abord, je l'ai félicité pour la mise en œuvre du nouveau programme. D'ailleurs, nous avions écrit des lettres à l'ancienne ministre fédérale, avec laquelle nous avions eu des discussions.

Au Nouveau-Brunswick, la situation est un peu particulière, parce que je suis intervenue publiquement au sujet du dossier de l'immigration. Ce que je demande, c'est que les pratiques dans le domaine de l'immigration respectent la proportion de francophones au Nouveau-Brunswick, c'est-à-dire 33 p. 100. On s'est aperçu que, depuis plusieurs années, on réussit à attirer environ 12 p. 100 de francophones parmi les immigrants. Cela concerne tous les programmes qui relèvent de la responsabilité des gouvernements fédéral et provincial.

Il y a trois semaines, j'ai rencontré la ministre provinciale responsable du dossier de l'immigration. J'encourage les deux ordres de gouvernement à se doter d'une entente-cadre fédérale-provinciale qui leur permettra de travailler ensemble, justement pour en arriver à une immigration francophone qui respecte le poids démographique de notre population, c'est-à-dire 33 p. 100.

En juillet 2014, le gouvernement provincial a adopté un plan d'action pour favoriser l'immigration francophone au Nouveau-Brunswick, et il s'est engagé à respecter le poids démographique de la communauté francophone. C'est une bonne nouvelle. Cependant, pour y arriver, il faut absolument que le gouvernement fédéral reconnaisse l'importance de travailler avec les instances provinciales au Nouveau-Brunswick afin de maintenir le poids démographique de notre communauté.

La population au Nouveau-Brunswick n'est pas croissante et la seule façon de réussir à augmenter la population, c'est par le truchement de l'immigration. Donc, si nous continuons à attirer 12 p. 100 d'immigrants, le poids démographique de la communauté francophone diminuera chaque année. Il ne s'agit pas seulement d'arriver à atteindre 33 p. 100 aujourd'hui, car il faut aussi faire du rattrapage. Quelle belle occasion que la question des réfugiés, car nous en attirons un plus grand nombre que d'habitude.

Je viens tout juste d'écrire au ministre McCallum, et je l'encourage à adopter une entente-cadre entre le gouvernement fédéral et la province.

M. Boileau : À la troisième question qui concerne l'assimilation, je réponds que, notre objectif, c'est bien de contrer l'assimilation.

Le gouvernement fédéral peut travailler jusqu'à un certain point, mais les gouvernements provinciaux et d'autres instances peuvent en faire beaucoup plus, parce qu'il y a aussi des champs de compétence qui sont très proches des citoyens. Donc, nous devons nous interroger non seulement sur la pertinence des services que nous offrons à la population francophone, chez nous, en Ontario, mais aussi sur la façon dont nous offrons ces services. Ce sont deux aspects qui sont incroyablement importants : que les services soient pertinents et que la livraison des services soit faite en fonction des besoins de la population. Voilà sur quoi nous axons notre travail. Par exemple, si l'Ontario a mis en œuvre une politique d'aménagement linguistique qui ne se retrouve pas ailleurs, cette politique d'aménagement linguistique qui a cours en éducation est un programme spécifique du gouvernement de l'Ontario qui vise à financer, à outiller les éducateurs de langue française et à faire valoir le double travail des éducateurs dans les écoles de langue française, c'est-à-dire l'enseignement du français, mais aussi l'enseignement de la culture française.

Donc, ce programme n'a pas son équivalent en anglais, parce qu'on n'en a pas besoin. Depuis quelques années, et c'est tout nouveau, nous avons aussi des politiques d'aménagement linguistique au niveau de l'enseignement postsecondaire. Ces initiatives nous permettent donc d'avancer dans une direction où nous nous dotons d'outils.

Lorsque je parle de services modelés à la population, c'en est un bon exemple. Dans le cas des maisons francophones pour femmes victimes de violence conjugale, ce sont aussi des options que nous offrons à la population, en lui signifiant que si, en temps de crise, on sort de chez soi à 3 heures du matin avec les deux enfants dans les bras pour se rendre dans un centre, on pourra y être accueilli en français. La personne pourra se calmer, prendre son temps puis, un intervenant l'aidera à rebâtir son CV, à trouver un emploi et un nouveau logement, et cetera.

Cette prise en charge est absolument cruciale. Ce sont tous les gestes que le gouvernement provincial peut faire pour aides les francophones à demeurer francophones tous les jours. Lorsqu'on se lève le matin, on a ce choix : est-ce qu'aujourd'hui je demeure francophone, oui ou non? L'État est là pour nous aider à faciliter ce choix dans le cadre de ses actions.

Si, invariablement, la réponse est la suivante : « Sorry, I don't speak French », sur un ton qui pourrait être perçu comme n'étant pas sympathique, cela ne nous envoie pas le message de croire que notre langue est reconnue publiquement, qu'elle est parlée et acceptée par la population. C'est là que se situe notre défi, c'est de nous assurer que, dans le cadre de la livraison des programmes, les gens comprennent bien l'importance de l'offre active et l'importance de veiller à ce que le francophone se sente à l'aise de demander des services en français, d'où l'importance d'avoir des institutions.

On parlait de l'Hôpital Montfort plus tôt, et je m'arrêterai là. Le citoyen francophone qui se rend à l'Hôpital Montfort ne se pose pas la question : est-ce que c'est aujourd'hui, que je demande des services de santé en français? Il n'a pas besoin de se poser la question. Ce sera la même chose s'il se rend à l'hôpital Dr-Georges-L.-Dumont, à Moncton. Le citoyen ne se posera pas la question. Évidemment, on ne peut pas avoir des hôpitaux de cette sorte partout en Ontario, mais on peut créer ces espaces communs, dans lesquels le citoyen francophone se sentira à l'aise et dans lesquels il ne se posera pas la question, car pour lui, il sera normal qu'on lui offre ce service. Voilà sur quoi nous travaillons.

La sénatrice Poirier : Je n'ai qu'une question, et elle concerne aussi la comparution du commissaire Fraser il y a quelques semaines. À la fin février, le gouvernement a présenté le projet de loi C-6, loi visant à modifier la Loi sur la citoyenneté. À l'heure actuelle, les personnes âgées de 18 à 64 ans doivent démontrer une connaissance du Canada et de l'une des deux langues officielles. Or, le projet de loi C-6 vise à diminuer cet âge de 10 ans. En d'autres mots, les personnes de 55 ans et plus n'auraient pas l'obligation de connaître l'une des deux langues officielles. Si le projet de loi n'est pas amendé, cette proposition deviendra loi.

Selon vous, est-ce qu'un tel changement aurait un impact pour les communautés francophones et acadienne du Nouveau-Brunswick et de l'Ontario? La majorité des Canadiens âgés de 55 ans sont encore sur le marché du travail. Avec ce projet de loi, ces personnes n'auraient pas besoin d'avoir une connaissance de l'une des deux langues officielles. J'aimerais entendre votre opinion sur ce sujet.

Mme d'Entremont : J'ai très peu de statistiques pour appuyer une opinion à ce sujet. Au Nouveau-Brunswick, la situation est probablement différente de celle de l'Ontario. Très peu de gens ne parlent ni l'une ni l'autre des langues officielles de la province. Les immigrants, bien sûr, lorsqu'ils arrivent, choisiront de s'intégrer à une communauté ou l'autre. Je ne peux donc pas dire que c'est un enjeu sur lequel notre commissariat s'est penché. Très peu de gens au Nouveau-Brunswick ne parlent pas l'une de nos deux langues officielles. Je vais m'arrêter là.

M. Boileau : J'ai lu avec beaucoup d'intérêt les transcriptions de votre rencontre avec mon collègue, le commissaire Fraser, et j'espérais que vous ne posiez pas cette question. Je vous avoue bien candidement que le travail d'un commissaire est avant tout d'être rigoureux. On ne peut pas simplement dire ce qu'on pense sur n'importe quoi. Il faut que nos propos soient fondés. Or, nous n'avons pas fait d'étude ou d'analyse sur ce projet de loi. Il serait donc difficile de se prononcer sur une telle question, qui semble d'importance, sans l'avoir examinée.

La sénatrice Poirier : J'apprécie votre réponse. Personnellement, je trouve cette mesure inquiétante. Je crois qu'on devrait se pencher sur la question de plus près pour essayer d'en comprendre l'impact. Le fait que des personnes arrivent au Canada, désirent devenir des citoyens canadiens, et n'aient pas besoin de connaître l'une de nos deux langues officielles est une chose qu'il sera intéressant de suivre.

Le sénateur McIntyre : Comme vous le savez, le commissaire aux langues officielles du Canada a le pouvoir de porter une cause devant les tribunaux. Au Nouveau-Brunswick, la commissaire n'a pas ce pouvoir. Détenez-vous ce pouvoir en Ontario, monsieur Boileau?

M. Boileau : Malheureusement, le pouvoir d'ester en justice ne fait pas partie des 14 articles prévus dans la Loi sur les services en français en Ontario.

Le sénateur McIntyre : Je sais que vous devez rendre des comptes à vos assemblées législatives respectives.

M. Boileau : Oui, je me rapporte à l'Assemblée législative.

Le sénateur McIntyre : Madame d'Entremont, vous occupez le poste de commissaire aux langues officielles depuis 2013. C'est exact?

Mme d'Entremont : Oui.

Le sénateur McIntyre : Votre mandat se termine en 2020. C'est donc un mandat de sept ans.

Je note également qu'une révision de la Loi sur les langues officielles au Nouveau-Brunswick devra être faite au plus tard le 31 décembre 2021. Je fais référence ici à l'article 42.1 de la Loi sur les langues officielles. Je sais qu'il est un peu tôt, mais comment envisagez-vous cette nouvelle révision?

Mme d'Entremont : La dernière révision a eu lieu en 2013, en même temps que j'ai été nommée commissaire. L'ancien commissaire avait alors formulé des recommandations.

J'ai un dossier papier dans mon bureau où je prends des notes de temps en temps. Lorsque viendra le temps de faire des recommandations dans le cadre de ce processus de révision, nous serons prêts. Est-ce qu'il s'agit d'élargir la portée de la loi? Je ne sais pas si vous avez pris connaissance du fait que les révisions de 2013, et une autre révision plus récente de l'automne dernier, ont fait en sorte que, à partir du 1er juillet 2016, plus de 40 associations professionnelles au Nouveau-Brunswick seront assujetties à la Loi sur les langues officielles. Ce qui veut dire que j'aurai le mandat d'enquêter des plaintes de la part de citoyens qui ne réussissent pas à obtenir des services d'une association professionnelle. Il s'agit d'une révision importante qui entrera en vigueur à partir du 1er juillet.

J'ai toujours ma petite liste de questions potentielles sur lesquelles nous pourrions nous pencher. À mesure qu'approchera la date limite de la prochaine révision, nous commencerons à faire du travail plus concerté, afin d'être prêts à formuler des recommandations pour la prochaine ronde. Voilà un peu le processus que nous suivons. Tous les dossiers dont nous traitons entre-temps nous préparent à ce processus.

Le sénateur McIntyre : Une autre date importante se pointe à l'horizon en ce qui concerne les langues officielles au Nouveau-Brunswick, et c'est le 1er juillet 2016. Comme vous le savez, à cette date, une nouvelle obligation linguistique sera imposée aux associations professionnelles au Nouveau-Brunswick. Est-ce que vous vous attendez à recevoir un nombre élevé de plaintes à la suite de l'entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions?

Mme d'Entremont : C'est une très bonne question. J'ai hâte de voir comment les choses se dérouleront. Il est difficile de prédire si nous recevrons beaucoup ou très peu de plaintes. Je pourrai vous en dire plus long dans un an.

Lorsque j'ai comparu devant le comité de l'assemblée pour défendre ma proposition de budget, je lui ai demandé une somme un peu plus élevée que celle de l'an dernier, justement pour nous permettre de nous outiller en fonction de ces nouvelles responsabilités, chose que le comité ne m'a pas accordée.

Il est difficile de quantifier les ressources dont nous aurons besoin, car nous n'avons aucune idée du nombre de plaintes que nous recevrons. Je crois que cela dépendra de la promotion qu'en fera le gouvernement ou notre bureau pour informer les citoyens que, à partir du 1er juillet, s'ils ont des plaintes à l'égard de l'une de ces associations, ils pourront nous consulter. Notre service est gratuit. Les gens n'ont pas besoin d'aller devant les tribunaux. Ils peuvent nous présenter des plaintes, et nous pouvons agir en conséquence. Il est difficile de le savoir. Nous n'avons aucune idée du nombre de plaintes que nous recevrons.

Le sénateur McIntyre : En tant que sénateur du Nouveau-Brunswick, madame d'Entremont, je surveille religieusement le beau travail que vous faites. Félicitations! Continuez votre bon travail.

Mme d'Entremont : Merci.

La présidente : Au nom des membres du comité, je tiens à remercier nos deux commissaires aux langues officielles, Mme Katherine d'Entremont et M. François Boileau, d'être avec nous ce soir.

Je remercie aussi le commissaire Graham Fraser, qui est ici ce soir à titre d'observateur et aussi pour appuyer ses collègues. Je crois que cela démontre le bel esprit de coopération qui existe entre les commissaires linguistiques.

Au nom du comité, je vous remercie d'avoir si généreusement donné de votre temps et d'avoir partagé votre expertise avec nous. Je vous remercie également du travail que vous faites pour bien nous représenter et pour faire valoir cette francophonie qui nous est si chère et qui est une valeur importante pour notre pays. Merci de toujours veiller à nos droits et à la promotion de cette belle langue et de cette belle culture.

Au nom du comité, je vous remercie.

(La séance est levée.)

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