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SOCI - Comité permanent

Affaires sociales, sciences et technologie

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie

Fascicule no 34 - Témoignages du 13 décembre 2017


OTTAWA, le mercredi 13 décembre 2017

Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, auquel a été renvoyé le projet de loi S-234, Loi modifiant la Loi sur le Parlement du Canada (artiste officiel du Parlement), et le projet de loi C-311, Loi modifiant la Loi instituant des jours de fête légale (jour du Souvenir), se réunit aujourd’hui, à 16 h 16, afin de poursuivre l’étude de ces projets de loi.

Le sénateur Art Eggleton (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Bienvenue au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.

[Traduction]

Je suis Art Eggleton, un sénateur de Toronto, et je vais demander aux sénatrices ici présentes — d’autres viendront — de se présenter, en commençant à ma gauche.

[Français]

La sénatrice Petitclerc : Chantal Petitclerc, du Québec.

La sénatrice Poirier : Rose-May Poirier, du Nouveau-Brunswick.

[Traduction]

La sénatrice Seidman : Judith Seidman, de Montréal, Québec.

Le président : Nous sommes ici pour parler de deux projets de loi, à raison d’un projet de loi par segment. Nous nous attendons à devoir interrompre nos délibérations afin de prendre part à un vote au Sénat. Nous allons attendre que la sonnerie retentisse et qu’on nous donne des précisions sur le moment où le vote aura lieu. Voyons jusqu’où nous pourrons aller dans notre examen des deux composantes de notre réunion.

La première composante est le projet de loi S-234, Loi modifiant la Loi sur le Parlement du Canada, qui vise à créer le poste d’artiste officiel du Parlement. À l’origine, le projet de loi était parrainé par l’ancien sénateur Willie Moore, qui est ici, aujourd’hui. C’est la sénatrice Patricia Bovey qui a pris la relève. Nous avons donc deux collègues qui sont assis de l’autre côté de la table. Je souhaite aussi la bienvenue à Joanne Larocque-Poirier, directrice de cabinet et secrétaire du conseil du Conseil des arts du Canada. Nous allons commencer par la sénatrice Bovey, la marraine actuelle du projet de loi, puis ce sera au tour de nos deux témoins.

L’honorable Patricia Bovey, marraine du projet de loi, à titre personnel : Merci, monsieur le président, et merci à vous, distingués collègues et sénateurs. Je suis absolument ravie d’être ici aujourd’hui pour parler du projet de loi S-234, qui vise à créer le poste d’artiste visuel officiel du Parlement. Comme vous le savez, ce projet de loi a été présenté par notre ancien collègue, l’honorable Willie Moore, dans le même esprit que pour le poste de poète officiel du Parlement. J’avoue que ce fût un véritable honneur pour moi lorsque le sénateur Moore m’a dit : « Je m’en vais, et je veux que tu prennes la relève. » Vous êtes tous au courant de l’importance que j’accorde au rôle significatif que jouent les artistes dans tous les aspects de la société canadienne, et vous ne serez pas surpris de savoir que j’appuie ce projet de loi de tout mon cœur.

Je crois que la présence d’un artiste visuel officiel sur la Colline permettra de faire connaître au public canadien le point de vue du Parlement, l’importance de cette démocratie qui est la nôtre ainsi que les enjeux et les travaux qui occupent les parlementaires. Pour ce faire, l’artiste qui occupera ce poste utilisera la langue universelle des arts visuels de façon à rejoindre tout le monde, les Canadiens de naissance, les peuples autochtones, les peuples non autochtones, les immigrants et les réfugiés, quelle que soit leur langue maternelle.

Le mandat de l’artiste visuel officiel du Parlement serait d’une durée de deux ans, comme pour le poète officiel, et le choix du titulaire serait une façon d’honorer un artiste visuel de notoriété nationale. L’artiste officiel sera un ambassadeur des arts et il devra créer des œuvres axées sur la Colline du Parlement et sur les enjeux dont les parlementaires débattent.

Le titulaire du poste recevra des honoraires et disposera d’un budget pour son matériel, et j’espère qu’il sera possible d’organiser une exposition solo à la fin de son mandat afin de présenter les œuvres qu’il aura réalisées dans l’intervalle ou qu’il sera possible de faire circuler ces œuvres — au moins, de façon numérique — pour qu’elles soient vues par le plus grand nombre.

Certains États, certaines villes canadiennes, dont Toronto et Victoria, et certains pays ont des artistes visuels officiels. Par exemple, l’actuel lauréat du prix Children’s Laureate, M. Chris Riddell, a intégré la puissance du visuel dans son travail, créant des illustrations en ligne sur une base quotidienne. Il a dit : « Je veux montrer tout le plaisir que l’on peut avoir à dessiner. » J’ai vu de mes propres yeux à quel point les gens s’identifient à son travail.

Au Canada, bien qu’il n’y ait jamais eu d’artiste visuel officiel du Parlement proprement dit, il y a eu des précédents. L’artiste autochtone Christi Belcourt, qui a des œuvres sur la Colline, a reçu, en 2014, le Prix du Conseil des arts de l’Ontario pour les arts autochtones.

L’année dernière, Geoffrey James, un artiste canadien de grande renommée internationale, est devenu le premier photographe officiel de la ville de Toronto. En tant qu’ambassadeur de la ville pour les arts visuels et la photographie, il est tenu de promouvoir et de faire connaître la photographie et les arts visuels, et d’amener les gens à s’y intéresser. Il doit également assister à des activités publiques, participer à des discussions sur des enjeux contemporains et créer un projet commémoratif original.

Ce serait à peu près la même formule pour l’artiste visuel officiel du Parlement. Sa prestation se ferait dans n’importe quelle discipline des arts visuels ou avec n’importe quel médium. On peut ici penser à la peinture, à la gravure, à la sculpture, au dessin, à la vidéo, au film, à des installations, au travail du tissu, à la photographie, et cetera.

Le projet de loi S-234 modifie la loi sur le poète officiel. La nomination se fera par l’intermédiaire d’un processus concurrentiel. À l’instar du directeur parlementaire du budget et de tous les autres hauts fonctionnaires du Parlement, l’artiste officiel sera un haut fonctionnaire de la Bibliothèque du Parlement. Ce sont les Présidents des deux chambres qui choisiront le titulaire à partir d’une liste de trois noms que leur fournira un comité piloté par le bibliothécaire parlementaire. Selon moi, ce comité devrait être constitué du commissaire aux langues officielles du Canada, du directeur et chef de la direction du Conseil des arts du Canada, du directeur du Musée des beaux-arts du Canada et du président de l’Académie royale des arts du Canada.

Étant au service des Présidents, l’artiste visuel officiel créera des œuvres artistiques et fera la promotion des arts au Canada par l’intermédiaire du Parlement. Il produira sur demande des œuvres qui seront utilisées au Parlement et lors de cérémonies d’État. Il pourrait aussi être appelé à parrainer des événements artistiques, à donner des conseils au sujet de la collection d’œuvres d’art du Parlement et s’acquitter de tâches connexes à la demande de l’un des deux Présidents.

Les avantages de ce poste seront bien réels puisqu’il permettra de représenter et de faire connaître auprès des Canadiens le travail du Parlement ainsi que certains enjeux d’importance nationale, et ce, dans un langage vastement reconnu comme étant un vecteur de changements sociaux et culturels. Le travail de l’artiste est un reflet de la société. Les artistes réfléchissent à une multitude de questions, précisément comme nous le faisons au Sénat. Ils mettent en doute, soutiennent, contestent et présentent des enjeux sociaux. Il n’est pas rare de les voir mettre des enjeux à l’avant-plan bien avant que la société ne les ait discernés. Par conséquent, l’artiste visuel officiel aidera le Sénat à mieux comprendre divers aspects de nos sociétés.

Les arts visuels sont un langage que nos enfants et nos jeunes comprennent. Je soutiens que le fait de représenter visuellement ce qui se passe à la Chambre des communes et au Sénat aura un effet stimulant sur l’engagement des jeunes et que cela leur permettra de mieux comprendre en quoi consiste la société civile, la démocratie et notre système à deux chambres. Je suis convaincue que cette fonction aidera à pallier le manque de connaissances actuel.

Je crois également que le travail de l’artiste visuel officiel sera une source d’inspiration pour tous et qu’il donnera des perspectives nouvelles à beaucoup de gens, dont de nouveaux Canadiens et de nouveaux citoyens de toutes les régions du pays.

La création de ce poste montrera le leadership du Parlement pour ce qui est de souligner l’importance des arts et les importantes contributions que les artistes apportent à l’économie du Canada en général. Bien sûr, les parlementaires que nous sommes ont une grande responsabilité envers la société, et c’est la même chose pour les artistes.

J’ai donc bien hâte de voir le Parlement et les artistes se rejoindre de façon concrète et significative par le biais de ce poste d’artiste visuel officiel. Comme le poète George Elliott Clarke me l’a écrit :

Plus nous accordons d’importance à la littératie en matière d’art et de culture, plus nous misons sur le confort et la commodité, sur les occasions favorables et l’avancement, et sur une société qui n’a plus de personnes jetables, mais seulement une population considérée comme sans prix et inestimable, puisque chacun peut y rêver.

Pour terminer, je crois que le fait d’adopter ce projet de loi pour la création d’un poste d’artiste visuel officiel du Parlement serait une façon formidable et tout à fait appropriée de célébrer la fin du 150e anniversaire de notre pays. Permettons aux artistes de prendre une part active aux débats et aux discussions qui se tiennent sur la Colline du Parlement à l’intention et au sujet des Canadiens. Merci.

Le président : Merci beaucoup. Nous allons maintenant entendre un ancien collègue qui a pris sa retraite, mais que je continue d’appeler « sénateur Moore ». Il a l’air bien en forme pour un sénateur à la retraite.

L’honorable Wilfred P. Moore, ancien sénateur, à titre personnel : Merci, monsieur le président. Distingués collègues, c’est un honneur et une joie d’être de nouveau parmi vous et de pouvoir vous parler de ce projet de loi que je soutiens et auquel je collabore avec la sénatrice Bovey. Je crois que mes observations vous ont été distribuées par la greffière du comité.

En avril 2016, le gouvernement a annoncé qu’il allait revoir les politiques culturelles du Canada. À cette époque, on avait calculé que les industries culturelles contribuaient à l’économie à hauteur de 47,7 milliards de dollars — ce qui représente 3 p. 100 de notre PIB — et qu’elles fournissaient plus de 600 000 emplois. Ce secteur regroupe toutes les manifestations de la créativité canadienne, telles que la production filmique et la peinture, pour ne nommer que celles-là parmi celles que la sénatrice Bovey a énumérées.

Que ce soit la peinture, la sculpture, un simple plat ouvragé ou une étoffe, au cœur de la plupart de ces disciplines, il y a l’image, une image conçue et réalisée par des artistes créatifs et des artistes en arts visuels.

Je crois que la plupart des gens ne pensent pas aux ressources et au travail que les artistes consacrent à la création de ces œuvres qui interpellent notre soif du visuel. Ce processus créatif nécessite habituellement un studio loué ou acheté, des matériaux, un logement, des heures de travail — y compris pour la recherche —, la réalisation d’esquisses, l’étude de la peinture, par exemple, et la réalisation d’une œuvre définitive. Ensuite, dans le meilleur des cas, l’œuvre sera présentée — habituellement dans une galerie qui retiendra une commission correspondant à 50 p. 100 du prix de vente — et vendue, ce qui permettra à l’artiste de gagner un certain revenu pour ce qu’il a créé.

Mes amis, nos artistes en arts visuels sont des preneurs de risque par excellence. Ils exercent leur pratique dans la perspective absolument spéculative que quelqu’un trouve leur travail de son goût et leur achète quelque chose. Bien entendu, les œuvres exécutées sur commande sont l’exception.

Ces artistes créent des liens tenaces entre les gens. Ils créent un sens d’appartenance à la collectivité et suscitent un sentiment robuste d’engagement là où ils vivent et travaillent. L’une de mes citations préférées reconnaissant le rôle et la valeur des artistes dans nos collectivités appartient à feu John F. Kennedy, le président des États-Unis, qui disait :

La vie des arts, loin d’être une interruption ou une distraction dans la vie d’une nation, est près du cœur de ce qui constitue cette nation et un test de la qualité de sa civilisation.

Je prie instamment les membres du comité de mettre à l’épreuve la qualité de la société canadienne et d’accorder la reconnaissance proposée à nos artistes en arts visuels. Comme vous le savez, nous avons le poste de poète officiel du Canada, qui donne une reconnaissance méritée à cette forme d’art littéraire qu’est la poésie. Je suis d’avis que le Canada devrait accorder une reconnaissance similaire à nos artistes en arts visuels, et c’est pourquoi je vous demande humblement d’appuyer ce projet de loi.

Je dédie cette présentation à mon ami Joseph Purcell, de Lunenburg, en Nouvelle-Écosse. Joseph était l’un des plus grands peintres de l'environnement marin au Canada. Il nous a quittés le 11 novembre dernier.

Merci du temps et de l’attention que vous m’avez accordés.

[Français]

Joanne Larocque-Poirier, directrice de cabinet et secrétaire du conseil, Conseil des arts du Canada : J’aimerais remercier le comité de m’avoir donné l’occasion d’être ici aujourd’hui pour discuter du projet de loi S-234, Loi modifiant la Loi sur le Parlement du Canada (artiste officiel du Parlement), ainsi que du rôle que pourrait jouer le Conseil des arts du Canada à l’égard de ce poste.

[Traduction]

Le Conseil des arts du Canada a une très longue tradition d’excellence pour ce qui est d’appuyer le travail des artistes et des organismes artistiques dans toutes les formes d’art et dans toutes les régions du pays. Le conseil est une société d’État indépendante qui a été créée en 1957. Son mandat est de « favoriser et de promouvoir l’étude et la diffusion des arts ainsi que la production d’œuvres d’art ».

Le conseil exécute son mandat grâce à diverses activités. Il investit dans l’excellence artistique et en fait la promotion par l’intermédiaire des bourses, des prix, des services et des paiements qu’il met à la disposition des artistes et des organismes artistiques canadiens. Le conseil fait aussi de la recherche en art et il rend compte de l’influence que les arts peuvent avoir dans le monde réel.

Le travail actuel du conseil s’articule autour de quatre grands engagements, nommément les arts autochtones, la technologie numérique, le profil international et l’accroissement du soutien aux artistes et aux organismes. Ces priorités sont énoncées dans son plan stratégique pour 2016-2021 et seront mises en œuvre, en grande partie, dans le cadre du nouveau modèle de financement simplifié qui a été lancé en avril 2017.

[Français]

Le conseil est ravi d’apprendre qu’une proposition vise la création d’un poste d’artiste officiel du Parlement. Le mandat proposé par l’artiste officiel poursuit la mission du Conseil des arts du Canada. Comme l’a déclaré Simon Brault, directeur et chef de la direction du Conseil des arts du Canada, la création artistique fait écho aux valeurs de notre pays, notamment la liberté d’expression, la démocratie culturelle et les différents enjeux qui préoccupent les Canadiennes et les Canadiens ainsi que les citoyens à l’échelle mondiale. Les arts sont, en effet, la voix du peuple.

La création du poste d’artiste officiel du Parlement constitue une merveilleuse occasion de réaffirmer le rôle important que jouent les artistes au Canada en faisant la promotion d’une société fondée sur les principes d’ouverture, d’inclusion, de créativité et de diversité.

Le conseil se réjouit également de la possibilité de jouer un rôle dans le processus de sélection de l’artiste officiel du Parlement. Le conseil est bien placé pour ce faire. Dans le cadre de ses activités habituelles, le conseil remet chaque année un large éventail de prix prestigieux à plus de 200 artistes et chercheurs pour saluer leur quête d’innovation et d’excellence. Cela comprend l’administration des prix du Gouverneur général en arts visuels et en arts médiatiques. Ces prix, à l’instar du poste d’artiste officiel du Parlement proposé dans le projet de loi S-234, soulignent les formidables contributions des artistes en arts visuels et en arts médiatiques reconnus du Canada. Ils augmentent également l’intérêt du public pour le travail d’artistes qui présente de nouvelles perspectives sur le monde et les enjeux qui nous tiennent à cœur.

[Traduction]

Comme vous le savez, le conseil joue un rôle dans le processus de sélection du poète officiel du Parlement. Nous sommes heureux de participer à ce processus et nous sommes fiers du rôle joué par les anciens poètes officiels dans la promotion de l’importance de la littérature, de la culture et des langues dans la société canadienne. Le conseil est d’accord avec les amendements proposés au projet de loi par l’honorable Patricia Bovey en ce qui concerne le processus de sélection de l’artiste officiel du Parlement. Le conseil estime toutefois que le comité devrait miser sur le chef de la direction du conseil plutôt que sur son président. Ces dernières années, le président du conseil d’administration du conseil a délégué la responsabilité de la sélection du poète officiel au chef de la direction. Ceci est une façon de reconnaître les vastes connaissances et l’expertise du chef de la direction dans le domaine des arts.

En conclusion, le conseil salue cette initiative qui renforcera le rôle des arts dans la vie des Canadiens. Le conseil se réjouit de la création du poste d’artiste officiel du Parlement et de la possibilité de jouer un rôle important dans le processus de sélection. Je vous remercie du temps que vous m’avez accordé. Je serai ravie de répondre à vos questions.

Le président : Merci beaucoup. Il se peut que cela soit un peu serré dans le temps, mais nous allons passer à la période de questions. Lorsque la sonnerie d’appel retentit, cela signifie que l’opposition officielle tient un caucus. En principe, je dirais que si la sonnerie retentit pendant une heure, nous pouvons poursuivre nos travaux pendant une demi-heure. Pourvu que nous soyons sortis d’ici au moins 20 minutes d’avance. Cependant, si l’un des groupes part, nous devrions peut-être arrêter lorsque la sonnerie retentira. J’ose espérer que nos trois témoins pourront revenir une autre fois, ou rester aux alentours, car, selon ce qui arrivera, il se peut que nous puissions en finir avec le sujet qui nous occupe. Quoi qu’il en soit, je vais arrêter de parler et nous allons très rapidement passer aux questions. Comme d’habitude, chaque intervenant a droit à deux questions.

[Français]

La sénatrice Petitclerc : Je vous remercie de vos présentations. J’aurais une première question pour vous, sénatrice Bovey. Soyez à l’aise de répondre dans la langue de votre choix.

En fait, j’ai noté, comme plusieurs peut-être, votre utilisation de l’expression « artiste visuel officiel du Parlement », alors que dans les premiers discours, on parlait d’« artiste officiel du Parlement ». Donc, je voulais que vous nous parliez de cette précision d’inclure l’adjectif « visuel » à l’expression. Est-ce qu’on a choisi d’apporter cette précision un peu en parallèle avec le poète officiel du Parlement ou est-ce que cela a toujours été dans votre optique?

[Traduction]

La sénatrice Bovey : J’ai cru qu’il serait utile d’apporter cette précision, puisque les arts englobent tellement d’autres choses, comme le théâtre et le cinéma. C’est un mot valise qui a un sens très large. Nous avons un poète officiel, et la poésie est une discipline des arts littéraires. Or, tout au long de cet exercice, j’ai cru que le poste proposé devait être celui d’artiste visuel officiel et qu’il était par conséquent important de préciser qu’il s’agissait bien d’art visuel. C’est aussi une façon d’éviter la confusion. Or, à l’intérieur de cette désignation, il conviendra de préciser que tous les médiums propres aux arts visuels sont admissibles, une liste qui risque de se transformer avec le temps.

[Français]

La sénatrice Petitclerc : J’aimerais savoir comment vous concevez la mise en pratique de ce poste. Selon vous, ce poste sera-t-il semblable à celui de poète officiel du Parlement en ce qui concerne l’organisation, la rémunération, les engagements publics, et cetera? Est-ce que vous voyez cela comme quelque chose de séparé et d’autonome ou comme une continuité, au moins en harmonie?

[Traduction]

La sénatrice Bovey : Madame la sénatrice, il s’agit selon moi de pratiques similaires. L’artiste visuel officiel ne sera pas sur la Colline en permanence, comme le poète officiel n’est pas sur la Colline en permanence. Ils seront là de façon intermittente. J’ai l’impression que le gros du travail de l’artiste visuel officiel se fera dans son studio; il sera sur place pour faire des croquis, observer, poser des questions, parler de ce qu’il a l’intention de faire comme travail, et cetera. Je ne le sais pas. J’espère que les artistes visuels officiels qui se succéderont seront différents les uns des autres, que leurs points de vue seront vastes et que leur présence sera gratifiante. Oui, je m’attends à ce que cette personne ait un bureau, qu’elle ait une base physique au Parlement, mais je ne m’attends pas à ce qu’elle travaille de la même façon que le poète officiel.

La sénatrice Petitclerc : Merci.

Le président : Pourriez-vous clarifier deux petites choses, rapidement? Dans votre exposé, vous avez parlé d’honoraires. Cela signifie-t-il que vous ne voyez pas ce poste comme un poste à plein temps?

La sénatrice Bovey : Oui. Comme le poste de poète officiel n’est pas un poste à plein temps, monsieur le président.

Le président : Je croyais vous avoir entendu dire que cela excluait la photographie, mais je crois comprendre que la définition de « arts » s’entend du dessin, de la peinture, de la sculpture, de la gravure de reproduction, du design, de l’artisanat, de la photographie et du cinéma.

La sénatrice Bovey : Cela inclut la photographie et le textile. Geoffrey James — je présume que Toronto lui donne le titre de photographe officiel — est un artiste visuel officiel.

La sénatrice Seidman : Merci beaucoup, sénatrice Bovey, et bon retour, sénateur Moore. Madame Larocque-Poirier, je vous remercie également de votre exposé.

Ma question va dans le même sens que celle de la sénatrice Petitclerc, parce que je suis perdue. Dans le projet de loi, il est question d’un artiste officiel du Parlement. Sénatrice Bovey, vous avez clairement fait allusion à un projet de loi ayant trait à un artiste visuel officiel du Parlement dans votre exposé.

La sénatrice Bovey : Lorsque vous serez rendus à l’étude article par article, vous verrez que nous avons un projet d’amendement pour nous assurer qu’il est question d’un « artiste visuel officiel » dans le projet de loi. Je ne sais pas si vous avez reçu les amendements.

La sénatrice Seidman : Oui. Nous les avons, mais nous discutons évidemment pour l’instant du projet de loi et non d’un projet de loi modifié. J’essaie donc de comprendre. Votre plan est en fait de proposer un amendement demain lors de l’étude article par article pour qu’il soit question d’un artiste visuel officiel dans le projet de loi. Est-ce exact?

La sénatrice Bovey : Oui.

La sénatrice Seidman : Ensuite, sénateur Moore, étant donné que c’était au départ votre projet de loi et que vous avez passé le flambeau à la sénatrice Bovey, qu’en pensez-vous?

M. Moore : Je crois que c’est plus précis. Je trouve intéressant d’avoir fait sans cesse allusion dans mon exposé à un artiste visuel, et je tiens à vous dire que je n’étais pas du tout au courant de ce qu’avait prévu la sénatrice Bovey. C’est seulement mon impression et mon engagement dans les arts, et je tiens à dire clairement que nous parlons ici des arts visuels. Je suis tout à fait d’accord avec le projet d’amendement qui sera peut-être proposé demain au comité.

Le président : Chers collègues, comme vous pouvez le voir, les lumières blanches clignotent, ce qui veut dire que le compte à rebours a commencé en prévision de la tenue d’un vote dans une heure. Le vote se tiendra à 17 h 43. Nous avons suffisamment de temps pour nous y rendre. Cependant, étant donné que les membres de l’opposition officielle doivent partir... Vous nous encouragez à continuer de poser des questions. Il y a encore beaucoup de gens qui ont des questions. Pouvez-vous revenir après le vote? Le vote se tiendra à 17 h 43. Nous devrions donc être de retour autour de 18 heures. Le problème, c’est que ces sénateurs doivent partir, parce qu’ils ont un caucus. Normalement, si un certain groupe, comme l’opposition officielle du Sénat dans le cas présent, n’est pas là pour les discussions, nous suspendons nos travaux.

La sénatrice Omidvar : Même si l’un d’entre vous reste?

Le président : Tous les trois doivent partir. Comme tout un groupe sera absent, soit l’opposition officielle, je suspendrai donc nos travaux. C’est ce que je vais faire, puis nous reviendrons ici après le vote autour de 18 heures.

(La séance est suspendue.)

(La séance reprend.)

Le président : Nous reprenons notre étude du projet de loi S-234, Loi modifiant la Loi sur le Parlement du Canada (artiste officiel du parlement). Comme nous pouvons le voir dans les amendements, il est proposé d’ajouter le mot « visuel ».

Avant le vote au Sénat, nous posions des questions à nos témoins, et c’est exactement ce que nous continuerons de faire.

[Français]

La sénatrice Mégie : Quand j’ai vu « artiste visuel », j’ai regardé un peu tout ce qui est compris dans le terme « arts ». La littérature et les arts de la scène sont-ils compris dans le terme « artiste visuel »?

[Traduction]

La sénatrice Bovey : La raison pour laquelle nous parlons d’un « artiste visuel », c’est qu’il est question des arts visuels. Nous avons un poète officiel, et ce nouveau poste est propre aux artistes dans le domaine des arts visuels.

[Français]

La sénatrice Mégie : Est-ce que la littérature est comprise aussi?

La sénatrice Bovey : Ce projet de loi ne comprend pas la littérature et la musique. C’est seulement pour les arts visuels, la peinture, la sculpture, les films, la photographie.

La sénatrice Mégie : Avant de proposer un poste d’artiste au Parlement, qui faisait la promotion des arts?

[Traduction]

M. Moore : Eh bien, que dire? Sénatrice, les arts m’ont toujours intéressé. L’un de mes amis, George Elliott Clarke, était le poète officiel, et nous nous sommes mis à discuter de diverses choses. Ce sont les arts visuels qui m’intéressent. J’agis à titre de président bénévole de l’École d’art de Lunenburg, en Nouvelle-Écosse, soit un établissement que j’ai contribué à fonder. Je suis également bénévole depuis des années au Collège d’art et de design de la Nouvelle-Écosse à Halifax, et j’ai décidé que le temps était venu. C’est une partie très importante de notre économie; c’est une partie importante de l’économie culturelle canadienne. Les artistes visuels sont des éléments centraux de bon nombre de choses que nous avons et dont nous profitons. Je me suis donc dit que nous devrions essayer de créer un poste d’artiste visuel officiel.

La sénatrice Bovey : Si vous me le permettez, j’aimerais faire un bref commentaire. Des artistes sont venus sur la Colline au fil des décennies et ils ont réalisé des œuvres très intéressantes, mais ils ne l’ont pas fait officiellement au nom du Parlement. L’une des peintures les plus intéressantes qu’il m’a été donné de voir se trouvait dans une collection privée, et je l’ai utilisée dans des expositions. Il s’agissait d’un David Milne de 1914, et c’est une représentation de l’intérieur de la vieille Chambre des communes avant l’incendie de 1916. Cette peinture appartient à un collectionneur privé qui est récemment décédé, et j’essaie activement de retrouver cette peinture.

Il y a des portraits sur la Colline du Parlement, et il y a un conservateur qui s’occupe des œuvres appartenant au Sénat et à la Chambre des communes, mais c’est différent de ce que nous proposons. Le concept ici est d’avoir un artiste en rotation qui est choisi à la suite d’un processus très minutieux et qui présente visuellement au public le travail des parlementaires et les enjeux dont traite le Parlement à la Chambre des communes ou au Sénat. Je vois cela comme un langage universel pour encourager les citoyens et les nouveaux arrivants au Canada, indépendamment de leur langue, et essayer d’encourager les jeunes à participer à la société civile et aux processus démocratiques.

Le président : J’aurais peut-être une question complémentaire à celle de la sénatrice Mégie. Pouvez-vous nous dire quels sont les provinces ou les autres pays où nous retrouvons aussi des artistes officiels?

La sénatrice Bovey : Je peux vous dire que la Ville de Toronto en a maintenant un et que l’Ontario a un artiste autochtone officiel. À l’occasion du 150e anniversaire du Canada, la Ville de Victoria a embauché deux artistes visuels officiels, et c’était une première pour eux. Il y a de nombreux États américains qui ont des artistes visuels officiels. En Angleterre, le poste d’artiste officiel pour la jeunesse inclut les arts visuels et la littérature, et cette initiative a contribué à faire lire davantage les jeunes. Je peux vous le confirmer personnellement. J’ai des petits-enfants là-bas, et je peux vous dire que, dès que Riddell s’est mis à publier des choses en ligne, mes petits-enfants se rendaient chaque jour en ligne et qu’ils se sont mis à lire. Je crois qu’une telle mesure a des effets positifs. Il y a un certain nombre d’exemples, mais il n’y en a pas beaucoup.

Le sénateur Munson : Merci aux témoins de leur présence ici; bon retour. J’ai deux questions.

Le poète officiel semble travailler de manière autonome, et nous avons vu au Sénat au cours des deux dernières années, avec une équipe de communications professionnelle qui utilise les médias sociaux, que le travail du Sénat et des sénateurs a été mis en évidence. Les gens visitent notre site web et ils sont au courant de ce que nous faisons. Je sais que le poète officiel reçoit une rétribution, et je présume que ce serait la même chose pour l’artiste officiel. Je ne connais pas le montant de cette rétribution, mais il semble que ces artistes soient laissés à eux-mêmes. C’est vrai qu’ils peuvent avoir un bureau dans lequel travailler. Cependant, dans votre projet de loi, prévoyez-vous qu’une équipe collabore avec eux? Si nous voulons que les Canadiens soient au courant que nous avons un poète officiel qui écrit de magnifiques vers qui unifient le pays et qui en brossent un portrait, il doit y avoir quelque chose de concret dans un tel projet de loi pour que le titulaire du poste sache qu’une équipe est prête à promouvoir ces grandes œuvres.

M. Moore : Sénateur, en ce qui concerne le poète officiel, j’ai mentionné le précédent poète officiel, George Elliott Clarke, et il relevait des deux Présidents. George Elliott Clarke se cherchait du travail et il était disponible. Il pensait que nous ferions appel à ses services pour réaliser des projets. Certains d’entre nous ont écrit des lettres en son nom, puis les choses se sont mises en branle. Il voulait vraiment faire partie de la scène nationale et réaliser des œuvres littéraires pour le bien commun en vue de communiquer avec les Canadiens par l’entremise de son bureau et de projets dans le cadre de cérémonies ou de célébrations. Ses patrons étaient les deux Présidents. Si nous ne le faisons pas, il nous incombe un peu de nous assurer de le faire.

Mme Larocque-Poirier : Les organismes qui participent au comité de sélection, comme le Conseil des arts du Canada, ont également d’autres occasions d’apporter leur contribution. Je pense non seulement aux communications et à l’obtention de candidatures dans le cadre du processus de sélection, mais aussi à la promotion des œuvres d’art et de l’artiste dans les médias et de nombreux autres réseaux. Si les membres du comité étaient des représentants du Musée des beaux-arts du Canada, du Conseil des arts du Canada et de la Société royale du Canada, par exemple, il y aurait déjà des réseaux en place pour donner un élan au titulaire du poste.

M. Moore : Le groupe de travail consultatif sur les œuvres d’art existe-t-il encore au Sénat? J’y ai siégé. C’est un sous-comité du Comité de la régie interne. C’est un autre moyen ou une ressource que le Sénat pourrait avoir directement.

Le sénateur Munson : Sur ce, je crois que le poète officiel ou l’artiste officiel devraient avoir un budget pour se rendre sur place dans une école ou un club philanthropique, par exemple, et présenter un portrait du Canada en utilisant des mots ou l’art. La Chambre des communes appuie-t-elle ce projet de loi? Si le Sénat adopte le projet de loi, ce qu’il devrait faire, soit dit en passant, avons-nous l’appui de l’autre endroit?

La sénatrice Bovey : J’ai l’impression que oui. Comme ceux d’entre nous qui habitent à l’extérieur de la région le savent, nous sommes à l’aéroport quelques fois par semaine, et c’est un endroit propice pour discuter avec d’autres. Je me fais souvent demander quand l’autre endroit sera saisi du projet de loi. Je peux vous dire que plusieurs personnes se sont portées volontaires pour parrainer le projet de loi lorsque l’autre endroit en sera saisi. Étant donné que la société a vécu des années difficiles, pour le dire ainsi, il y a un véritable appétit pour ce langage universel de l’âme qui dépeint les gens que nous sommes et la façon dont nous fonctionnons en tant que société. Je crois donc qu’il y a un vif appétit en la matière.

M. Moore : Sénateur, j’aimerais ajouter que la députée de ma circonscription à la Chambre des communes est Bernadette Jordan. Elle était jusqu’à tout récemment présidente du caucus de l’Atlantique. À l’instar des amis de la sénatrice Bovey à la Chambre, elle attend ce projet de loi. Ces députés sont prêts à en faire la promotion. Ils y sont très favorables, et ils pensent que c’est nécessaire.

La sénatrice Omidvar : Merci, et bon retour, sénateur. Je vais toujours me rappeler de vous comme le sénateur « Sauvez Willie ».

M. Moore : Il faut le faire.

La sénatrice Omidvar : Oui. Il le faudra un jour, mais c’est une autre histoire.

Je n’ai pas de problème avec le projet de loi ou de questions précises à ce sujet. Ma question a trait à la notion que nous avons besoin de divers artistes officiels pour diverses formes d’expression artistique. Nous avons maintenant un poète officiel, puis nous aurons, selon ce projet de loi, un artiste officiel dans le domaine des arts visuels. L’art s’exprime sous d’autres formes, comme la danse. Je sais que votre définition inclut le cinéma et la photographie. Sénatrice Bovey, madame Larocque-Poirier, je me demande si vous pouvez nous dire la mesure dans laquelle nous devrions continuer ce cloisonnement des diverses formes d’expression artistique? Cela me préoccupe un peu.

La sénatrice Bovey : Sénatrice, si vous me le permettez, je ne suis pas certaine que nous devrions nous en inquiéter. Je crois que vous constaterez que la majorité des artistes visuels utilisent des techniques multiples pour créer leurs œuvres, ce qui explique pourquoi j’ai énuméré certaines formes que cela pourrait prendre. Lorsque le sénateur Munson a posé sa question concernant le poète officiel et les médias sociaux, je me suis dit que je ne serais pas surprise de voir le poète officiel et peut-être un artiste visuel officiel collaborer à un projet à un moment donné. Je ne vois pas cela comme un cloisonnement; je le vois plutôt comme une ouverture et une compréhension, une ouverture et une expression et une ouverture et un engagement.

Si vous me le permettez, j’aimerais mentionner un autre projet qui me tenait beaucoup à cœur et qui remonte à des années. Plus précisément, il y a 10 ans, j’ai créé une galerie d’art dans un hôpital de Winnipeg après avoir passé des années à faire des recherches sur les effets de l’art sur la santé, par exemple. À cet endroit, au fil des années, toutes les autres formes d’art ont été utilisées en raison de la façon dont fonctionnent les artistes visuels. Nous n’avons pas abouti avec un tel cloisonnement; c’était plutôt un programme qui faisait la promotion de l’expression artistique.

Mme Larocque-Poirier : Je n’ai pas beaucoup de choses à ajouter à ce que la sénatrice Bovey vient de dire. Je suis d’accord avec ses commentaires. Nous voyons déjà l’ampleur et la profondeur des arts visuels au Canada. Je crois que le nombre de techniques artistiques admissibles qui ont déjà été énumérées le prouve : la photographie, la sculpture, la peinture, le dessin, le cinéma, la vidéographie et les métiers d’art. C’est assez vaste.

La sénatrice Omidvar : Je regarde votre projet d’amendement. L’amendement n’a pas encore été adopté, mais il y a un projet d’amendement. Je me dois de rappeler les discussions que nous avions eues la semaine dernière concernant la nomination du statisticien en chef. Cet amendement me rappelle une proposition qui, si je ne m’abuse, n’a finalement pas été approuvée et qui visait aussi à établir le processus de sélection et de nomination au lieu de laisser, j’imagine, dans le cas présent, le bibliothécaire en chef prendre cette décision. Veuillez me pardonner si cette question a déjà été posée et que vous y avez déjà répondu, mais je ne peux pas m’empêcher de me rappeler nos discussions de la semaine dernière; c’est passablement la même chose. Il semble y avoir une tendance à vouloir établir le processus de manière très définie dans la loi, et c’est fixe lorsque c’est inscrit dans la loi. Pouvez-vous m’expliquer pourquoi vous le faites ainsi au lieu de prendre le processus qui a été utilisé pour choisir le poète officiel? Qu’est-ce qui clochait dans ce processus pour vous inciter à proposer un tel changement?

La sénatrice Bovey : Sénatrice, c’est exactement le même processus que dans le cas du poète officiel. La seule différence est ce que prévoit l’amendement. Au lieu d’avoir le bibliothécaire et archiviste du Canada comme membre du jury, je pensais que la place devrait plutôt revenir au directeur du Musée des beaux-arts du Canada, étant donné que c’est le domaine qui correspond à ce poste. Au lieu d’avoir le président du Conseil des arts du Canada, nous pensions qu’il était important que la place revienne plutôt au chef de la direction, parce que le titulaire est issu du milieu. L’amendement vise à changer quelques personnes pour que cela reflète les arts visuels plutôt que la littérature et la poésie. Le processus de sélection du poète officiel est présidé par le bibliothécaire parlementaire, et le commissaire aux langues officielles siège aussi au comité de sélection. Nous avons donc seulement changé les autres membres du comité.

La sénatrice Omidvar : Je m’excuse, mais je ne suis pas vraiment certaine de bien comprendre. Pouvez-vous nous dire les membres du comité que vous avez ajoutés, retirés ou changés dans l’amendement?

La sénatrice Bovey : J’ai retiré le bibliothécaire et archiviste du Canada, et je l’ai remplacé par le directeur du Musée des beaux-arts du Canada.

La sénatrice Omidvar : Au lieu de l’archiviste, vous avez le directeur du Musée des beaux-arts.

Le président : J’aimerais profiter de l’occasion pour clarifier un autre point. Votre amendement, tel qu’il nous a été présenté, mentionne toujours le président du Conseil des arts du Canada. Une façon de contourner le problème est de le laisser tel quel, mais d’ajouter « ou ses remplaçants désignés », car il pourrait y avoir des cas où la personne ici nommée déléguerait quelqu’un. Si vous vouliez opter pour cette solution, je pense que vous engloberiez encore plus d’éventualités que vous le souhaitiez.

La sénatrice Bovey : Cela ne me pose aucunement problème.

La sénatrice Raine : Merci beaucoup. C’est une excellente proposition. J’ai deux ou trois questions.

Je crois comprendre qu’aucun montant d’argent ne doit être rattaché aux projets de loi d’initiative parlementaire, et je crois que celui qui nous intéresse parle, du moins dans vos mots à vous, d’honoraires et de dépenses. Proposeriez-vous que ces sommes proviennent d’un budget parlementaire ou d’une quelconque fondation? Je m’inquiète du fait que ce projet de loi risque d’être rejeté en cours de route s’il demande du financement au Trésor.

La sénatrice Bovey : Nous avons demandé un avis juridique au Bureau du légiste, et le poste est exactement comme celui du poète officiel. Je vais vous le lire :

Nous avons adopté la même approche que celle qui est prévue dans les dispositions de la Loi sur le Parlement du Canada concernant le poète officiel. En conséquence, nous n’avons pas prévu sa rémunération. Nous n’avons aucunement mentionné la rémunération de l’artiste visuel officiel du Parlement…

J’ai mentionné la rémunération dans mes remarques. Le poète officiel reçoit des honoraires, ou un budget de fonctionnement, je pense, du Parlement.

Le sénateur Greene : Le poste de poète officiel a-t-il été créé par le truchement d’un projet de loi d’initiative parlementaire au Sénat?

M. Moore : Oui. Le sénateur Jerry Grafstein l’a présenté, l’a défendu pendant des années et l’a finalement fait adopter. Il s’agit, grosso modo, d’une modification à cette mesure législative.

Le président : Cette mesure doit finir par se retrouver à la Chambre des communes de toute façon. Si nous étions saisis d’un projet de loi de la Chambre des communes et que nous essayions de hausser le montant d’argent qu’il prévoit ou d’en ajouter un qui n’y figure pas, nous aurions un problème de recommandation royale. Je suppose que, pour une raison ou une autre, cela ne s’applique pas au présent cas, mais il doit tout de même être renvoyé à la Chambre des communes pour être approuvé ou rejeté.

La sénatrice Raine : Autrement dit, on ne sait pas vraiment s’il est possible d’accorder des fonds du Trésor pour…

Le président : Elle a vérifié auprès du légiste, qui lui a dit qu’elle pouvait le faire. Personne n’a contesté ce point à ce motif lors de la deuxième lecture. Quiconque veut vérifier auprès du légiste peut le faire.

La sénatrice Raine : Je me souviens du moment où j’avais un projet de loi d’initiative parlementaire à l’étude…

Le président : Il ne contient aucune allusion à de l’argent.

La sénatrice Bovey : Il ne fait aucunement allusion à de l’argent.

La sénatrice Raine : C’était uniquement dans vos remarques?

La sénatrice Bovey : Oui, uniquement.

Le président : Il n’en est pas question dans le projet de loi.

La sénatrice Raine : Je pense que dans vos remarques, vous avez dit : « Le titulaire du poste recevra des honoraires et disposera d’un budget pour son matériel », mais que vous n’aviez pas précisé qui les lui offrirait. Ils pourraient donc venir aussi bien du Conseil des arts du Canada que d’une fondation privée. C’est plus ambitieux que…

La sénatrice Bovey : Ce point ne fait pas partie des modifications en tant que telles; il est entièrement fondé sur le poète officiel. Je pense qu’on a peut-être parlé de « fonctionnement » plutôt que d’« honoraires ». J’ai employé le terme « honoraires » dans mon allocution parce que je ne voulais pas parler de salaire. Nous ne demandons pas qu’un salaire lui soit versé, mais bien quelque chose au-delà de cela. Dans mon secteur, des « honoraires » sont un petit dédommagement, et non un salaire.

Le président : Sonia a une réponse.

Sonia Norris, analyste, Bibliothèque du Parlement : Je pense qu’on en a discuté pendant l’étude de la Loi sur le poète officiel du Parlement, car ce ne devait pas être un poste salarié. Je crois comprendre que la discussion a été soulevée parce que le paragraphe 76(2) de la Loi sur le Parlement du Canada porte sur le traitement des membres du personnel, et le poète officiel et l’artiste officiel sont décrits comme des membres du personnel de la Bibliothèque. Le poète officiel ne touche pas de salaire. Le traitement de l’artiste officiel ferait probablement l’objet d’une discussion.

La sénatrice Raine : Merci.

La sénatrice Omidvar : Les honoraires peuvent être aussi bas que 100 $ ou aussi élevés qu’on le souhaite. Pouvez-vous nous dire quels sont les honoraires du poète officiel? Que nous coûte-t-il en réalité?

Mme Larocque-Poirier : Je les ai ici. J’ai imprimé l’information que j’ai trouvée sur le site web du poète officiel, où on peut lire ce qui suit : « Quel est le traitement du poète officiel? Le poète reçoit un traitement annuel de 20 000 $, auquel s’ajoutent des frais de déplacement d’un maximum annuel de 13 000 $ et un budget ayant pour objet de couvrir les frais de programmation, d’administration et de traduction ou adaptation d’une partie de son œuvre, dans l’autre langue officielle du Canada. » Il s’agit d’une allocation de 20 000 $ et de frais de déplacement pouvant aller jusqu’à 13 000 $, en plus du soutien administratif.

Le président : Le poste d’adjoint administratif ne serait peut-être pas à temps plein.

Mme Larocque-Poirier : Non, il ne le serait pas.

Le président : Si vous me le permettez, cette allocation n’est pas ruineuse, mais elle devra être avalisée par le gouvernement à la Chambre des communes.

La sénatrice Omidvar : Personne ne peut s’enrichir avec ce montant.

Le président : C’est clair.

La sénatrice Omidvar : Maintenant que je connais le montant, je m’inquiète un peu que nous exploitions davantage nos artistes, comme nous avons tendance à le faire, car ils sont axés sur leur mission et leurs valeurs et dévoués à leur art. C’est peut-être une question dont nous pourrons discuter à une autre occasion.

M. Moore : Raison de plus pour reconnaître leur travail. Nous devons tous participer de temps à autres à des efforts communautaires, des collectes de fonds, dont les montants sont versés aux artistes. Qu’on leur demande de nous donner une œuvre d’art que nous pourrons vendre. Nous leur donnerons un reçu d’impôt. Un reçu d’impôt? Ils ont besoin d’avoir un revenu pour que cela leur soit utile. Il est temps, c’est mérité, et ils en ont besoin.

Le président : Peut-être que ce serait utile au comité si vous pouviez décrire une personne typique qui pourrait… Il me semble qu’il s’agit d’une personne qui a réalisé quelque chose dans sa carrière, qui cherche à aider le reste du pays à être mieux informé au sujet des arts visuels et qui est prête à y consacrer du temps. C’est un poste prestigieux. Peut-être que vous pourriez décrire le type de personne dont il s’agirait.

M. Moore : Puis-je en parler brièvement? En ce qui concerne le poète officiel, George Elliott Clarke enseigne à l’Université de Toronto. Le poste de poète n’est pas son travail. Il y a été nommé. C’est prestigieux que d’être nommé représentant national. Il prend son poste au sérieux, mais ce n’est pas son emploi. Il ne tire pas son revenu de ce poste. Il reçoit des honoraires. Je sais que ce n’est pas facile pour lui, car j’ai fait des exercices avec lui.

Ce n’est pas quelque chose qui va ruiner le Canada ou le gouvernement, mais c’est un poste qui offre de la reconnaissance et un peu de soutien financier — pas beaucoup. Cependant, le poète ne le fait pas pour l’argent, et il en irait de même pour l’artiste visuel officiel.

La sénatrice Bovey : Je pense que vous allez constater que les types de personnes que ce poste intéressera seront plutôt des artistes accomplis dans la seconde moitié de leur carrière, pas des jeunes artistes émergents, mais des personnes qui ont du vécu — une expérience des expositions et, peut-être, des publications. Les artistes sont vraiment intéressés à dépeindre ce qui se passe autour d’eux et les questions sociales. Les candidats auront beaucoup de sujets à aborder sérieusement sur le fonctionnement du Parlement, celui de la Chambre des communes et du Sénat, et les questions qui sont les leurs. Ils les transmettront dans le médium de leur choix. J’espère, comme je l’ai mentionné, que nous aurons une exposition numérique, à tout le moins, par la suite. Je pense que le poste sera celui d’un ambassadeur des arts. Comme je l’ai souligné dans mes remarques, j’espère que quelle que soit l’œuvre qu’ils utilisent, elle puisse servir à offrir de la formation linguistique aux réfugiés et aux immigrants qui arrivent au Canada. C’est une excellente façon de leur donner une idée de l’endroit où ils viennent vivre.

J’ai entendu le sénateur Sinclair dire aux membres de la communauté des musées plus tôt cette année qu’ils doivent prendre les devants en ce qui concerne une bonne partie du travail de réconciliation, car nos musées sont les dépositaires de notre passé sur le plan matériel. Nos artistes ont la capacité d’illustrer visuellement nos préoccupations. Vous verrez que des artistes feront la même chose ici. Il ne s’agit pas que de peindre le paysage autour de la Colline du Parlement, mais bien de s’inspirer de questions. Les types que nous étudions au Sénat depuis ma nomination sauraient inspirer des œuvres d’une grande richesse. Elles seront diffusées aux Canadiens, elles seront pour le Sénat un autre moyen de communiquer avec l’extérieur et elles nous donneront diverses perspectives.

Le président : Cette personne travaillera à temps partiel. On présume qu’elle aura une autre source de revenus, et elle pourra toucher des honoraires pour ce poste, mais vous exigez vraiment beaucoup côté mandat. Elle doit promouvoir les arts au Canada; produire des créations artistiques ou faire en sorte qu’elles soient produites; parrainer des événements artistiques; donner des conseils à la Bibliothèque du Parlement concernant sa collection et ses acquisitions; et, enfin, accomplir toute autre tâche connexe que lui demandera le Président et le bibliothécaire parlementaire. Vous estimez qu’on peut trouver quelqu’un capable d’accomplir toutes ces tâches et qui aura quand même une carrière en parallèle?

La sénatrice Bovey : Absolument. C’est ce qu’ils font — et ils doivent être en mesure de le faire en possédant le cachet d’être l’artiste visuel officiel du Parlement. Les artistes le font constamment. C’est normal pour eux.

Le président : D’accord, merci. Y a-t-il d’autres questions? Comme il n’y en a pas, nous avons terminé. Je vous remercie beaucoup tous les trois de vos présentations.

Membres du comité, nous allons procéder à l’étude article par article demain. Nous devions examiner un second projet de loi aujourd’hui, mais nous avons dû nous rendre au Sénat pour un vote. Nous avons parlé au parrain du projet de loi. Il préfère ne pas le faire demain et attendre après la relâche hivernale, si bien que nous devrons reporter l’étude du projet de loi concernant le jour du Souvenir. Demain, nous procéderons à l’étude article par article en séance publique et nous passerons ensuite au huis clos pour parler d’études futures pour lesquelles vous avez déjà reçu un ordre du jour.

(La séance est levée.)

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