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SOCI - Comité permanent

Affaires sociales, sciences et technologie

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie

Fascicule no 36 - Témoignages du 8 février 2018


OTTAWA, le jeudi 8 février 2018

Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit aujourd’hui, à 10 h 30, en séance publique et à huis clos, afin d’examiner, pour en faire rapport, les questions concernant les affaires sociales, la science et la technologie en général, et afin d’étudier une ébauche de rapport.

Le sénateur Art Eggleton (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Je vous souhaite la bienvenue au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.

[Traduction]

Je suis le sénateur Art Eggleton, de Toronto, et je préside le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, sciences et technologie. Je vais demander à mes collègues de se présenter eux-mêmes.

[Français]

La sénatrice Petitclerc : Bonjour et bienvenue. Chantal Petitclerc, du Québec.

[Traduction]

La sénatrice Omidvar : Ratna Omidvar, Ontario.

Le sénateur Munson : Jim Munson, Ontario.

Le sénateur Neufeld : Richard Neufeld, Colombie-Britannique.

La sénatrice Seidman : Judith Seidman, vice-présidente du comité.

Le président : Nous entamons notre troisième journée de réunions sur le régime enregistré d’épargne-invalidité et le crédit d’impôt pour personnes handicapées.

J’ai le grand plaisir d’accueillir l’honorable Diane Lebouthillier, ministre du Revenu national. Elle est accompagnée de Nancy Chahwan, commissaire déléguée de l’Agence du revenu du Canada.

Tout à l’heure, nous entendrons des représentants d’Emploi et Développement social Canada et du ministère des Finances, ainsi qu’un autre représentant de l’Agence du revenu du Canada.

Cette première partie de notre réunion durera trois quarts d’heure, jusqu’à 11 h 15. Cela dit, j’invite la ministre à faire sa déclaration liminaire.

L’honorable Diane Lebouthillier, C.P., députée, ministre du Revenu national : Monsieur le président, mesdames et messieurs, je vous présente mes salutations et vous remercie de m’avoir invitée à venir vous parler du crédit d’impôt pour personnes handicapées.

[Français]

L’étude que vous menez sur ce programme fiscal destiné aux plus vulnérables de notre société est importante. Je tiens à vous remercier de l’attention que vous y portez. Ce matin, je suis accompagnée de Mme Nancy Chahwan, commissaire déléguée de l’Agence du revenu du Canada. De plus, vous aurez l’occasion d’entendre M. Frank Vermaeten, sous-commissaire de la Direction générale de cotisation, de prestation et de service, qui se joindra à vous dans un deuxième temps.

Mon mandat à titre de ministre du Revenu national consiste notamment à améliorer les services que l’agence offre aux Canadiens. En effet, je crois que les Canadiens doivent être traités comme des clients importants, et pas juste comme de simples contribuables. Comme vous le savez, l’Agence du revenu du Canada est chargée d’appliquer et d’interpréter les lois fiscales pour le gouvernement du Canada — des lois que nous devons respecter non seulement par respect pour l’institution que vous représentez, mais aussi par principe de justesse, d’équité et de transparence pour tous les Canadiens. Cela dit, la complexité de la Loi de l’impôt sur le revenu ne doit pas nous empêcher de faire preuve de compassion et d’ouverture quand vient le temps d’interpréter les articles qui la compose. Cette compassion et cette ouverture sont d’autant plus importantes quand vient le temps d’administrer les programmes fiscaux qui s’adressent aux personnes les plus vulnérables de notre société, plus particulièrement les personnes handicapées et celles qui vivent avec une maladie physique ou mentale. Ces gens, ainsi que leurs aidants naturels, méritent notre aide et les meilleurs services qui soient. Nous avons le devoir de veiller à ce que tous les Canadiens reçoivent les crédits et les prestations auxquels ils ont droit, y compris les personnes handicapées et leur famille.

Je tiens à vous assurer ce matin que, au sein de l’agence, nous avons fait de cet engagement envers les populations les plus vulnérables une priorité. Même si le gouvernement dispose de plusieurs programmes et services qui s’adressent aux personnes handicapées, comme la prestation pour enfants handicapés, certaines déductions, comme les frais de préposé aux soins et les frais médicaux, je me concentrerai aujourd’hui sur les crédits d’impôt pour les personnes handicapées. Il faut souligner que chaque année l’agence reçoit en moyenne 250 000 demandes de crédit d’impôt pour personnes handicapées, dont plus de 80 p. 100 sont approuvées.

Au total, les crédits offerts pour personnes handicapées ont atteint 1,3 milliard de dollars pour l’année 2016-2017, soit 100 millions de dollars de plus en comparaison avec l’année précédente. Toujours pour l’année 2016-2017, 770 000 personnes ont demandé le crédit dans leur déclaration de revenus. Étant donné l’importance de ce crédit pour les personnes qui y ont droit, nous avons mis en œuvre différentes initiatives afin de rendre les mesures fiscales à l’intention des personnes handicapées plus accessibles. À titre d’exemple, en collaboration avec le ministère des Finances, nous avons modifié la Loi de l’impôt sur le revenu afin d’inclure les infirmiers et les infirmières praticiens à la liste des professionnels autorisés à attester l’admissibilité d’une personne au crédit d’impôt pour personnes handicapées. L’agence a aussi déployé des efforts pour simplifier le formulaire. Je vous ai d’ailleurs apporté une copie du formulaire. Si vous prenez la peine de le consulter, vous constaterez que seule la première page doit être remplie par le demandeur, alors que le reste du formulaire doit être rempli par un professionnel de la santé.

Bien que je sois fière des changements que nous avons apportés, je suis pleinement consciente qu’il reste beaucoup de travail à faire. Je sais que vous avez entendu certaines organisations vous faire part des défis importants auxquels leurs membres sont confrontés. Ces mêmes groupes sont aussi en communication avec mon bureau et nous travaillons avec eux pour nous assurer de bien comprendre leurs préoccupations. C’est dans ce même esprit de collaboration que j’ai aussi annoncé le 23 novembre dernier, le rétablissement du Comité consultatif des personnes handicapées. Ce comité a été dissous en 2006, mais, à mes yeux, il est d’une importance capitale car il nous permet de mieux comprendre les préoccupations et les enjeux du milieu. Un des aspects essentiels de ce comité est de rétablir un dialogue constructif entre toutes les parties. Son mandat est de recommander à l’agence des mesures pour mieux informer et administrer les crédits et les prestations destinés aux personnes handicapées. Je m’attends à ce que le comité nous fasse part de moyens pour améliorer la qualité des services que nous offrons aux personnes handicapées, mais aussi à ce qu’il propose des changements législatifs. Soyez assurés que même si je n’ai pas le contrôle sur les changements qui touchent la Loi de l’impôt sur le revenu, je serai heureuse de soumettre les propositions à mon collègue, le ministre des Finances.

La sensibilisation et la consultation sont essentielles pour accomplir notre mission qui se résume fort simplement : offrir aux personnes handicapées admissibles les crédits et les prestations auxquels elles ont droit. Je veux d’ailleurs être claire sur une chose : nous n’avons pas de quota pour ce qui est d’accepter ou de refuser des demandes au titre du crédit d’impôt pour personnes handicapées. En aucun cas, et je le répète, en aucun cas il est question de faire des économies sur le dos des personnes les plus vulnérables. Leur cause me tient à coeur. Tout au long de ma carrière en tant que travailleuse sociale en santé mentale au sein d’organismes communautaires et à titre de ministre du Revenu national, je me suis pleinement engagée à aider les personnes les plus vulnérables de notre société, et c’est ce que je continue à faire à titre de ministre.

Je vous remercie encore de m’avoir invitée aujourd’hui à prendre la parole devant vous et c’est avec plaisir que je répondrai à vos questions.

[Traduction]

Le président : Je vous remercie beaucoup, madame la ministre, de votre déclaration liminaire et de l’invitation que vous avez fait à notre comité de vous soumettre des recommandations qui vous aideront à améliorer la situation des personnes vulnérables qui souffrent d’un handicap.

Je vous remercie également de la lettre que vous nous avez fait parvenir hier en réponse à la mienne. Elle contient des statistiques et des précisions sur les critères d’admissibilité au programme, et mes collègues l’ont avec eux ce matin.

Je vais maintenant donner la parole à la commissaire déléguée.

Nancy Chahwan, commissaire déléguée, Agence du revenu du Canada : Merci beaucoup, monsieur le président, sénateurs et sénatrices.

[Français]

Bonjour. Merci de m’avoir invitée à vous entretenir sur la façon dont l’agence administre le crédit d’impôt pour personnes handicapées (CIPH).

[Traduction]

Tout d’abord, je souhaite réitérer l’engagement de la ministre à aider les Canadiens vulnérables. Elle a le soutien total de l’agence.

Nous savons que le CIPH est un crédit très important pour des centaines de milliers de Canadiens, et nous veillerons, sans relâche, à ce qu’il soit administré de façon juste et transparente, pour que tous ceux qui en dépendent le reçoivent.

L’agence administre le CIPH et examine l’admissibilité des demandes au cas par cas et conformément à des critères précis énoncés dans la Loi de l’impôt sur le revenu.

Au fil des ans, l’agence a apporté un certain nombre de changements à l’administration du CIPH, afin que les Canadiens puissent plus facilement le demander et le recevoir. Les résultats sont évidents : le nombre de personnes qui ont pu se prévaloir du crédit d’impôt au cours des deux dernières années n’a jamais été aussi élevé.

[Français]

La loi dit clairement que ce n’est pas le diagnostic d’une personne qui détermine son admissibilité, mais plutôt les effets de sa déficience physique ou mentale sévères et prolongés sur l’exécution des activités courantes de vie quotidienne. Pour le démontrer dans la demande de CIPH, le médecin du demandeur ou les infirmiers ou infirmières praticiens doivent attester par exemple que les soins thérapeutiques essentiels requis pour gérer sa déficience nécessitent 14 heures ou plus par semaine. Pour s’assurer.

[Traduction]

Afin de s’assurer que chaque demande est examinée de façon équitable, l’agence envoie une lettre d’éclaircissement au médecin pour lui demander de fournir des précisions supplémentaires, afin d’étayer l’admissibilité d’un candidat au crédit d’impôt.

[Français]

L’agence a apporté un ajustement administratif à une de ses lettres de clarification en mai 2017. Je tiens à vous préciser que c’est le seul élément de notre traitement des demandes de CIPH qui a été modifié. Lorsque les organismes qui représentent les personnes handicapées ont sont des préoccupations quant à la manière dont ce changement administratif pouvait modifier le traitement des demandes, la ministre Lebouthillier a immédiatement demandé à l’agence de revoir son approche.

[Traduction]

L’agence collabore depuis longtemps avec les parties prenantes dans le but d’améliorer l’administration du CIPH. Par exemple, l’Association médicale canadienne nous a beaucoup aidés, au fil des ans, à rendre le certificat du crédit d’impôt pour personnes handicapées plus facile à comprendre et à remplir.

Pour autant, nous reconnaissons qu’une plus large consultation des parties prenantes, avant l’entrée en vigueur de la nouvelle lettre d’éclaircissement, aurait permis d’en améliorer la formulation. Sachez toutefois que le Comité consultatif des personnes handicapées est chargé de nous présenter des recommandations sur la façon dont nous administrons ce crédit d’impôt.

Le 8 décembre, la ministre a annoncé qu’à partir de maintenant, les fonctionnaires utiliseront l’ancienne lettre d’éclaircissement, s’ils ont besoin de demander des informations supplémentaires. De plus, elle a promis que chaque demande refusée depuis mai 2017 sur la base de la lettre d’éclaircissement révisée serait réexaminée. Ce réexamen est très important pour l’agence, et nous avons l’intention d’en publier les résultats dès qu’ils seront connus.

La ministre a aussi le soutien total de l’agence pour travailler avec le Comité consultatif des personnes handicapées, qui a été rétabli. Cette tribune nous fournira de précieuses recommandations pour améliorer la façon dont nous administrons les aides que nous offrons aux Canadiens handicapés. Nous attendons avec intérêt ses conseils et ses recommandations.

Monsieur le président, nous savons que les Canadiens s’attendent à plus de transparence quant à l’administration par l’Agence des prestations et des crédits d’impôt.

[Français]

À la suite de la première réunion du Comité consultatif des personnes handicapées, nous avons publié sur le site Canada.ca des statistiques détaillées sur le CIPH et nous comptons le faire chaque année. Comme vous l’avez mentionné, vous avez reçu une réponse relative à votre demande pour obtenir de l’information supplémentaire.

Par ailleurs, l’agence a récemment créé le poste de dirigeant principal des données lequel fournira un leadership et assurera une surveillance au fur et à mesure que nous prendrons des mesures pour renforcer notre approche relative à la gestion des données.

[Traduction]

Soyez assuré, monsieur le président, que l’agence demeure fermement engagée à améliorer ses services d’octroi des crédits et des prestations qui viennent en aide aux personnes handicapées.

Nous vous remercions d’avoir mené cette étude et serons heureux de répondre à vos questions.

Le président : Merci beaucoup.

Nous allons maintenant passer aux questions des sénateurs. Je vais commencer par les deux vice-présidentes.

[Français]

La sénatrice Petitclerc : Merci beaucoup de votre présence, de vos présentations et des informations que vous nous avez fournies. Nous avons mené bon nombre de discussions et entendu plusieurs témoins. Nous avons entendu des choses assez troublantes. Je suis heureuse de vous entendre dire — parce que nous l’avons entendu aussi — que les gens s’inquiétaient au sujet des quotas ou des objectifs. Nous sommes heureux de vous entendre dire que ce n’est pas le cas. J’hésite à poser une question très large. Manifestement, il s’est passé quelque chose. Qu’est-ce qui s’est passé? Où se trouvent les failles pour que tant de demandes aient été refusées dans un laps de temps assez ciblé? Je vais vous poser une autre question, car il faut quand même identifier les enjeux. Quelle sorte de formation ou d’outils disposent les personnes responsables d’accepter ou de rejeter les demandes? Au fond, ont-elles les outils dont elles ont besoin? Ont-elles les qualifications nécessaires pour accepter ou refuser ces demandes?

Mme Lebouthillier : Je vous remercie de votre question. Je veux réitérer le fait que l’Agence du revenu du Canada n’a absolument aucun quota lié à l’acceptation des demandes de crédit pour personnes handicapées. Comme je l’ai mentionné dans mon mot d’ouverture, pour l’exercice 2016-2017, nous avons eu une augmentation du nombre de personnes qui ont reçu le crédit d’impôt pour personnes handicapées ainsi que des sommes qui sont allouées aux personnes handicapées. À l’ARC, nous avons confié de nouveau l’examen des demandes des personnes au titre du crédit d’impôt pour personnes handicapées aux infirmiers et infirmières cliniciens, dont une partie d’entre eux avaient été transférés ailleurs à l’agence. Le personnel médical est le mieux qualifié pour examiner les demandes et aider les fonctionnaires à ce chapitre. En ce qui a trait aux formations, j’inviterais la commissaire à apporter des précisions.

Mme Chahwan : Merci, madame la ministre. Merci, madame la sénatrice de votre question. Je comprends tout à fait vos préoccupations à ce sujet. J’ai des éléments de réponse qui vous apporteront une certaine assurance par rapport à notre processus administratif. Nous avons des équipes spécialisées dans l’examen des demandes pour le crédit. Ces équipes sont concentrées dans trois centres fiscaux à l’échelle nationale. Elles sont accompagnées d’un personnel de niveau supérieur ayant une vaste expérience. Comme la ministre vient de le mentionner, nous avons un accès direct, c’est-à-dire des infirmières. Nous en avons sept à travers le pays et nous en ajouterons d’autres sous peu. La formation que doivent suivre ces agents est l’un des programmes de formation les plus rigoureux à l’Agence du revenu. Lorsque les agents commencent à traiter ce genre de demandes, 100 p. 100 de leurs dossiers sont revus par quelqu’un de plus expérimenté. Au fur et à mesure que leur performance s’améliore, ce pourcentage diminue. Donc, nous pouvons compter sur énormément d’appuis et d’expertise. Par contre, j’aimerais préciser que nous ne substituons pas le jugement du médecin quand il remplit le certificat et qu’il indique les répercussions liées à la déficience sur la vie et les activités de la vie quotidienne du patient.

[Traduction]

Le président : Des témoins nous ont dit que des demandes avaient été rejetées malgré la recommandation des professionnels de la santé. Ils se demandent si l’Agence du revenu du Canada est l’instance appropriée pour porter des jugements sur des conditions médicales.

Dans notre esprit, l’Agence du revenu du Canada est là pour percevoir le plus d’impôt possible. Nous espérons bien sûr qu’elle réussira à attraper tous ceux qui sont mentionnés dans les Paradise Papers et les Panama Papers. Cela dit, les gens se disent que ce n’est pas très logique et qu’il faudrait peut-être que ce soit une autre entité, comme Emploi et Développement social Canada, qui s’occupe de ce dossier. Certes, c’est l’agence qui aurait le dernier mot — puisque c’est elle qui perçoit les impôts —, mais ce n’est peut-être pas elle qui devrait examiner les demandes. Vous avez parlé brièvement de formation, mais j’aimerais en savoir davantage. D’après ce que bon nombre de témoins nous ont dit, l’agence n’est pas l’instance appropriée pour porter ce genre de jugement.

[Français]

Mme Lebouthillier : En ce qui concerne le crédit d’impôt pour personnes handicapées, je suis à la recherche de solutions. Je souhaite regarder le programme dans son ensemble. C’est pourquoi nous avons créé le comité qui en fera à nouveau l’examen. Cela fera peut-être partie de ses recommandations. Par contre, je lui ai laissé carte blanche pour nous soumettre des solutions afin de majorer le programme du crédit d’impôt pour personnes handicapées.

[Traduction]

Mme Chahwan : Monsieur le président, lorsque j’ai été nommée commissaire déléguée de l’agence, mon fils de 17 ans m’a regardée comme si j’étais soudain devenue une personne différente. C’est vrai que je représente maintenant le fisc, mais je suis la même personne que celle que j’étais avant d’entrer à l’agence, et l’agence emploie 40 000 personnes qui examinent leurs dossiers avec compassion, car elles savent que c’est très important.

La ministre a pour priorité, conformément à sa lettre de mandat, de veiller à ce que tous les Canadiens reçoivent les prestations auxquelles ils ont droit. Chacun de nos 40 000 employés a entendu ce message. La formation que nous leur donnons concerne non seulement les aspects techniques de l’application et de l’administration de la loi, mais aussi la façon de bien servir le contribuable.

Notre jugement ne l’emporte pas sur celui des professionnels de la médecine. Notre rôle consiste à appliquer correctement les critères d’admissibilité prévus dans la loi, et de le faire avec équité pour tous les Canadiens.

La sénatrice Seidman : Merci, madame la ministre, d’être parmi nous aujourd’hui.

Notre comité a demandé qu’on lui fasse parvenir des statistiques sur l’âge et le sexe des demandeurs de CIPH, mais vous nous avez dit que l’agence, et je cite, « ne compile pas les données de cette façon ». Cela signifie-t-il que l’agence ne fait pas d’analyse sexospécifique du CIPH?

[Français]

Mme Lebouthillier : Effectivement, lorsque j’ai pris connaissance des chiffres, j’ai demandé des explications à l’ARC sur la collecte des données, car je n’avais pas de réponse à certaines questions. L’ARC m’a répondu qu’elle recueillait des données afin d’administrer ses programmes en fonction des exigences de la loi. J’ai demandé à l’ARC de travailler à une collecte de données.

[Traduction]

La sénatrice Seidman : Premièrement, ces données sont facilement accessibles avec les numéros d’assurance sociale, comme l’a fait remarquer l’un des témoins que nous avons entendus, mais je voudrais faire remarquer que le propre rapport de l’agence sur ses résultats en 2016-2017 dit que, et je cite :

L’Agence a pris part à l’engagement du gouvernement du Canada à l’égard de l’égalité entre les sexes au moyen de l’outil d’Analyse comparative entre les sexes plus ou d’ACS+.

L’outil évalue les effets des initiatives gouvernementales en prenant en considération le sexe et d’autres facteurs identitaires comme l’âge, le revenu, la langue et la géographie. L’Agence appuie l’engagement du gouvernement du Canada en utilisant cette approche…

[L’Agence] a élaboré et mis en œuvre son propre plan d’action pour améliorer l’application d’ACS+ dans l’évaluation des programmes, politiques et services.

Et pourtant, dans votre lettre, vous dites que l’agence ne compile pas de données de cette façon.

Je propose que le comité demande à l’agence de faire ce genre d’analyse le plus vite possible et de nous envoyer son rapport dans les semaines qui suivent. C’est l’un des programmes les plus importants que vous administrez, et je ne comprends vraiment pas pourquoi vous n’avez pas de données relatives à l’âge et au sexe. Comme nous avons entendu dire qu’un grand nombre de femmes en situation de précarité sont concernées, j’aimerais bien avoir ce genre de statistiques.

[Français]

Mme Lebouthillier : Je demanderais à la sous-commissaire de vous répondre, car c’est une question qui est davantage d’ordre administratif.

[Traduction]

Mme Chahwan : Nous faisons une analyse comparative entre les sexes pour chaque projet de loi, en collaboration avec le ministère des Finances qui est responsable du texte de la loi et de ses amendements. Chaque fois qu’une nouvelle mesure législative est présentée, nous procédons à une analyse comparative entre les sexes extrêmement approfondie.

Dans ce cas-ci, la ministre a voulu dire que, pour le CIPH, nous ne ventilons pas nos statistiques en fonction de ces critères, parce que nous ne tenons pas compte du sexe lorsque nous déterminons l’admissibilité d’un patient au crédit d’impôt.

La sénatrice Seidman : Je ne comprends toujours pas pourquoi vous n’avez pas besoin de ce genre de statistiques pour déterminer si votre programme donne des résultats. Il me semble que ce genre de données devrait vous être utile, et je ne comprends pas pourquoi vous ne les avez pas.

J’aimerais maintenant, madame la ministre, vous poser une question au sujet du projet de loi C-462, Loi limitant les frais imposés par les promoteurs du crédit d’impôt pour personnes handicapées. Nous avons affaire ici à des personnes extrêmement vulnérables, que des pseudo-promoteurs embobinent pour empocher jusqu’à 30 p. 100 de leurs prestations. Votre ministère a eu quatre ans pour élaborer des règlements fixant des frais maximums en vertu de la loi, laquelle, dois-je ajouter, a été adoptée à l’unanimité par le Parlement. Comment se fait-il que quatre ans plus tard, vous ne soyez toujours pas prêts? Que vous reste-t-il encore à faire pour être en mesure de protéger les gens qui sont victimes de ces promoteurs?

[Français]

Mme Lebouthillier : Madame la sénatrice, je suis entièrement d’accord avec ce que vous dites. Il y a deux ans, nous avons constaté que les promoteurs allaient récupérer jusqu’à 30 p. 100 au titre du remboursement du montant facturé aux personnes handicapées les plus vulnérables.

Je l’ai mentionné plus tôt, j’ai été travailleuse sociale. Pour ma part, il est essentiel que la majeure partie de l’argent soit destinée à ceux qui en ont le plus besoin, et non aux promoteurs. Conformément à la loi, nous avons veillé à prescrire un montant maximal qui est en voie de règlement. D’ailleurs, j’espère voir très bientôt la publication du règlement dans laGazette officielle du Québec. Pour l’instant, je ne peux pas vous préciser la date, mais je travaille avec mon collègue du Conseil du Trésor.

[Traduction]

La sénatrice Seidman : Vous serait-il possible de faire parvenir ces informations au comité, par écrit, dans les semaines qui suivent? Les années passent et, depuis 2015, l’agence ne cesse de dire la même chose : « Nous sommes en train d’élaborer les règlements », mais nous attendons toujours. J’aimerais bien avoir ces informations.

Le président : C’est une demande officielle. Je vais maintenant donner la parole au sénateur Munson, qui est celui qui a proposé que le comité fasse cette étude.

Le sénateur Munson : Merci beaucoup de comparaître devant notre comité. Je trouve tout cela très inquiétant. Vos collaborateurs et d’autres personnes ont entendu les témoignages bouleversants qui ont été déposés devant notre comité, mais nous ne savons toujours pas pourquoi autant de demandes ont été rejetées par le ministère. Je n’arrive pas à comprendre.

Vous avez parlé de la création du Comité consultatif des personnes handicapées, mais les dizaines voire les centaines de milliers de Canadiens qui souffrent d’autisme en ont été exclus. Dans votre tableau, il est question de santé mentale et de fonctions mentales. L’autisme est un trouble neurologique du développement. Il ne s’agit pas ici de santé mentale, même si parfois il y a un double diagnostic. La communauté autiste a demandé à faire partie du Comité consultatif des personnes handicapées, mais elle en a été exclue, et on les a mis dans la catégorie de la santé mentale. Madame la ministre, je trouve scandaleux qu’on ait ainsi exclu la communauté autiste. Tout le monde est au courant de ce qui est fait et de ce qui n’est pas fait, et c’est pour cela qu’il faut une stratégie nationale.

Seriez-vous prête à envisager d’inclure la communauté autiste dans ce comité qui avait été dissout en 2006, afin de lui permettre de témoigner concrètement de ce qui se passe? C’est important pour les membres de cette communauté, car ils sont des centaines, d’après ce que j’ai entendu, à avoir été rejetés.

Qui est-ce qui a décidé d’imposer un minimum de 14 heures par semaine? Pourquoi pas 12, 9 ou 15? Qui a pris cette décision? Il faudrait que cela soit plus flexible. C’est quelque chose qui fait partie intégrante du quotidien des gens, et je vous demande donc de revenir sur ces deux décisions.

[Français]

Mme Lebouthillier : Merci de vos questions. Comme cela a été mentionné un peu plus tôt, ni les critères d’admissibilité au crédit d’impôt pour personnes handicapées ni la loi n’ont changé. Ils sont exactement les mêmes.

Je tiens aussi à vous dire que le nombre de demandes acceptées est en hausse. J’ai également précisé dans mon discours d’ouverture que les sommes allouées augmentent aussi. En ce qui concerne le Comité consultatif des personnes handicapées, nous avons des professionnels actuellement autour de la table, et il y aura une rotation. D’ailleurs, nous avons rencontré l’Association canadienne de l’autisme et nous leur avons dit que nous accueillerons avec plaisir les gens qui travaillent au niveau de l’autisme lorsqu’il y aura une place de disponible dans la rotation des gens autour de la table du comité.

À titre de ministre du Revenu national, mon objectif est d’être équitable envers toutes les personnes handicapées et ne pas prioriser un handicap au détriment d’un autre. Toute personne handicapée doit être en mesure de recevoir les services, prestations et crédits auxquels elle a droit.

[Traduction]

Le sénateur Munson : Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse, mais elle n’est pas satisfaisante. Vous avez dit que rien n’avait changé. Pourtant, il y a beaucoup de personnes souffrant d’autisme, de diabète, de sclérose en plaques, et j’en passe, qui pouvaient se prévaloir auparavant du crédit d’impôt pour personnes handicapées et du régime enregistré d’épargne-invalidité, mais dont les demandes sont maintenant rejetées.

Vous avez dit : « quand une place se libérera au Comité consultatif des personnes handicapées ». Pourquoi pas aujourd’hui? Qu’est-ce qu’il faut pour qu’une place se libère? Que quelqu’un se retire? Le comité compte 12 membres. Bon sang, nous sommes en 2018 et il y a véritablement une crise dans la communauté autiste. Il y a quelque chose qui s’est passé, ce n’est pas possible autrement. Pouvez-vous nous le dire franchement?

[Français]

Mme Lebouthillier : Comme je vous l’ai mentionné, ni les critères d’admissibilité ni la loi n’ont changé. Nous sommes allés chercher des gens pour siéger au Comité consultatif des personnes handicapées, dont la Dre Karen R. Cohen, qui faisait partie de l’ancien comité dissous en 2006. Elle a une grande expertise auprès des personnes handicapées et elle défend leurs intérêts. Il y a aussi des Autochtones qui siègent au comité.

Je ne voulais pas avoir un comité de 40 personnes autour de la table. Chaque groupe de personnes handicapées mérite d’être entendu. Le comité consultatif avait carte blanche et pourra aussi rencontrer les divers groupes pour appuyer les recommandations formulées au gouvernement.

[Traduction]

Mme Chahwan : Puis-je intervenir? Je ne peux pas vous dire s’il y a une augmentation du nombre de dossiers présentés par des personnes souffrant d’autisme, parce que nous ne compilons pas nos données de cette façon.

Le sénateur Munson : Pourtant, vous devriez.

Mme Chahwan : Comme je l’ai dit tout à l’heure, l’agence est responsable de l’administration et de l’exécution de la loi telle qu’elle est formulée. Or, le texte de la loi établit les critères d’admissibilité en fonction de l’impact du handicap sur les activités quotidiennes.

Merci d’avoir fait mention du tableau que nous vous avons fait parvenir, sénateur. L’augmentation du nombre de demandes rejetées, en 2016-2017, concerne les fonctions mentales. Nous sommes en train d’analyser les raisons de cette augmentation.

Pour revenir sur ce qu’a dit la ministre, je tiens à préciser que le Comité consultatif des personnes handicapées consultera les autres groupes et associations qui n’ont pas de siège permanent autour de la table, afin de savoir quels sont leurs besoins précis. Le comité prendra également en considération les données existantes, y compris les analyses comparatives entre les sexes.

[Français]

La sénatrice Mégie : Tous les groupes que nous avons rencontrés nous ont dit qu’il faut beaucoup de temps avant de trouver un médecin qui remplira le formulaire. J’ai trouvé ça curieux, mais c’est leur commentaire et je tenais à vous le transmettre.

Je suis contente de constater que vous avez demandé l’aide des infirmières cliniciennes. C’est un progrès que je constate agréablement. Cela va peut-être enlever cet irritant en améliorant l’accès aux différents professionnels qui sont à même de remplir ce questionnaire.

L’autre question qui est restée en suspens et que nous avons posée à plusieurs reprises est la période des 14 heures qui a été choisie comme tournant pour l’admissibilité de la personne. Est-ce basé sur des données précises quant au nombre d’heures qu’il faut pour s’occuper des gens ou sur d’autres données? Est-ce immuable ou est-ce que cela peut être changé?

Mme Chahwan : Je vous remercie de votre question. Le critère des 14 heures est spécifié dans la loi à l’heure actuelle. La loi est régulièrement examinée pour voir s’il n’y a pas d’ajustement qui doit être fait en reconnaissance des avancées médicales et autres critères. Sa dernière modification remonte à 2005, si je ne me trompe pas, et le critère des 14 heures n’a pas changé. La consultation qu’effectue le comité mis sur pied par la ministre et le commissaire nous permettra de prendre conscience et surtout de faire le point, à savoir s’il serait temps pour le gouvernement de revoir certains critères, mais je ne peux pas présumer de la conclusion de ces conversations.

[Traduction]

Le président : À l’annexe B de la lettre de la ministre, les statistiques portent sur les activités quotidiennes : la vision, la marche, l’élocution et les fonctions mentales. Certains témoins se sont demandé pourquoi on ne tenait pas compte de la capacité de travailler, de faire des tâches ménagères et d’aller faire des courses, étant donné que les gens peuvent avoir toutes sortes de handicaps — des handicaps mentaux et neurologiques — qui peuvent avoir un impact sur ce genre de choses. Pourquoi cela n’est-il pas mentionné ici?

Quant aux représentants des personnes souffrant de sclérose en plaques, ils ont fait remarquer que ces gens-là avaient des crises épisodiques. Un grand nombre d’entre elles demandent le crédit d’impôt pour personnes handicapées, mais comme il faut que la déficience dure au moins 12 mois consécutifs, elles en sont exclues parce qu’elles ont des crises épisodiques. Comme leur demande est rejetée, cela a aussi un impact sur le REEI, car elles ne peuvent plus y cotiser. Pourquoi les critères d’admissibilité ne sont-ils pas plus flexibles pour tenir compte de ces autres facteurs?

[Français]

Mme Lebouthillier : En ce qui a trait à l’admissibilité au régime enregistré d’épargne-invalidité, la loi est très précise à cet égard. La gestion de ce programme est du ressort du ministre Duclos. Je crois que vous allez le rencontrer et je vous inviterais à demander plus de précisions aux fonctionnaires de ce ministère.

En ce qui concerne les personnes aux prises avec des maladies dégénératives et qui vivent des épisodes en dents de scie, j’ai demandé au comité consultatif d’étudier la question et de nous faire des recommandations sur des modifications à apporter à cet égard. Est-ce que le crédit d’impôt est le meilleur moyen de les aider? Cela sera analysé par le comité consultatif.

[Traduction]

La sénatrice Omidvar : Je vous remercie, madame la ministre et madame la commissaire déléguée. Je suis ravie que vous soyez parmi nous aujourd’hui. J’aimerais savoir ce que vous pensez du nouveau concept qui nous a été présenté hier et qui a piqué ma curiosité. Cela concerne précisément l’accès aux crédits d’impôt.

Nous avons un système fédéral qui évalue l’admissibilité au crédit d’impôt pour personnes handicapées, mais nous avons aussi une kyrielle de systèmes provinciaux pour évaluer et approuver les demandes de prestations d’invalidité et de prestations sociales au niveau provincial. La proposition qui nous a été faite est la suivante : l’évaluation et l’approbation ou rejet d’une demande par un gouvernement provincial devraient entraîner automatiquement l’admissibilité ou la non-admissibilité aux crédits fédéraux, au lieu d’avoir des systèmes parallèles qui imposent aux demandeurs deux processus différents. Autrement dit, l’évaluation faite par la province servirait de porte d’entrée dans votre système. Que pensez-vous de cette idée?

[Français]

Mme Lebouthillier : Je vais demander à Mme Chahwan de vous répondre d’un point de vue administratif.

[Traduction]

Mme Chahwan : C’est une question très importante, madame la sénatrice. Je ne sais pas si je vais pouvoir vous fournir une réponse adéquate, car ce n’est pas à moi de juger comment nous devons travailler avec les autres paliers de gouvernement, étant donné que c’est nous qui administrons la loi, mais je peux certainement transmettre cette proposition à mes collègues du ministère des Finances. Je peux toutefois vous dire que la province de Québec a un formulaire différent du nôtre, mais qu’il y a une certaine uniformité entre les autres provinces et le gouvernement fédéral dans la façon dont les demandes sont examinées. Je dis cela avec quelques réserves, car il faudra que je vérifie. Je vous ferai parvenir une réponse plus précise là-dessus.

La sénatrice Omidvar : Je vous remercie d’avance, ce sera très utile. Vous pourriez peut-être aussi vérifier s’il existe d’autres régimes où les prestations sont déclenchées par l’approbation provinciale. Cela serait utile, car s’il existe un précédent, cela facilitera les choses.

Le président : Cela nous amène à la fin de la période prévue pour ce groupe de témoins. Je vous remercie infiniment, madame la ministre et madame la commissaire déléguée, d’être venues nous rencontrer et d’avoir répondu à nos questions. Nous avons eu une bonne discussion. Nous allons vous faire parvenir un rapport sur les recommandations que nous aurons formulées à la suite de nos audiences. Merci beaucoup.

Nous allons maintenant entendre un deuxième groupe de témoins sur la question du crédit d’impôt pour personnes handicapées. De l’Agence du revenu du Canada, nous accueillons Frank Vermaeten, d’Emploi et Développement social Canada, nous accueillons Krista Wilcox, directrice générale, Bureau de la condition des personnes handicapées, et, du ministère des Finances, nous accueillons Pierre Leblanc, directeur général, Division de l’impôt des particuliers, Direction de la politique de l’impôt, qui est accompagné de Lesley Taylor, directrice, Politique sociale de l’impôt. Merci à tous de comparaître devant notre comité.

Monsieur Vermaeten, je crois comprendre que vous avez une déclaration liminaire à faire, et que les autres témoins sont là pour répondre aux questions. Allons-y. Monsieur Vermaeten, vous avez la parole.

Frank Vermaeten, sous-commissaire et coprésident du Comité consultatif des personnes handicapées, Agence du revenu du Canada : Bonjour monsieur le président, mesdames et messieurs.

[Français]

Bonjour. Je m’appelle Frank Vermaeten et je suis sous-commissaire de la Direction générale de cotisation, de prestation et de service à l’Agence du revenu du Canada. À ce titre, je suis responsable de la cotisation d’impôt et du versement des prestations ainsi que de la prestation de service aux Canadiens. Je suis aussi coprésident du Comité consultatif des personnes handicapées à l’ARC. Je vous remercie de m’avoir invité à comparaître devant votre comité. Je veux profiter de l’occasion pour vous donner plus de renseignements sur notre façon d’administrer le crédit d’impôt pour personnes handicapées ou le CIPH.

[Traduction]

Tout d’abord, j’insiste sur le fait que nous reconnaissons que la façon dont nous administrons les crédits d’impôt et les prestations peut avoir une incidence significative sur le quotidien des Canadiens. Nous savons que ce crédit est très important pour les Canadiens qui vivent avec un handicap.

La priorité de l’agence est très claire et elle l’a toujours été : s’assurer que les personnes admissibles au CIPH le reçoivent. Cela fait partie de notre engagement à servir les Canadiens. Notre objectif est de trouver un équilibre entre cet engagement et notre obligation de respecter les dispositions prévues dans la Loi de l’impôt sur le revenu, qui s’appliquent de manière égale à tous les Canadiens.

Le seuil d’admissibilité au CIPH prévu par la loi est très élevé, et les critères d’admissibilité au crédit sont très précis. Je peux vous assurer que l’agence utilise une approche rigoureuse pour évaluer l’admissibilité d’une personne au CIPH. Chaque demande est examinée individuellement par des employés ayant suivi une formation poussée. L’agence travaille en étroite collaboration avec des professionnels de la santé et des personnes handicapées afin de trouver la meilleure façon de recueillir les renseignements nécessaires pour établir l’admissibilité au CIPH.

Permettez-moi toutefois de préciser certains points.

On ne parle pas souvent du fait que ce ne sont pas toutes les personnes qui présentent une demande de CIPH qui sont admissibles selon la loi. L’agence a mis en place un processus pour que les personnes dont les demandes ont été refusées puissent ajouter des renseignements à leurs demandes initiales. L’agence a aussi un processus d’appel.

Certaines personnes qui satisfont aux critères d’admissibilité à un moment donné peuvent ne plus être admissibles si elles sont capables d’accomplir des activités courantes de la vie quotidienne, conformément à la Loi de l’impôt sur le revenu. C’est le cas lorsque l’état d’une personne s’améliore grâce à une intervention médicale ou à des progrès technologiques dans le domaine médical.

Pour ce qui est du régime enregistré d’épargne-invalidité, le REEI, il faut préciser que ce programme est administré conjointement par l’agence et Emploi et Développement social Canada. Le rôle de l’agence consiste à déterminer si un régime d’épargne-invalidité peut être enregistré selon la loi. Je laisserai mes collègues d’EDSC et du ministère des Finances répondre aux questions que vous aurez sur la politique générale du REEI.

On a soulevé de nombreuses questions concernant la façon dont l’agence recueille les renseignements liés au CIPH. La commissaire déléguée en a parlé tout à l’heure. Je tiens à ajouter que la Loi sur la protection des renseignements personnels nous permet de recueillir seulement certains renseignements, soit ceux dont nous avons besoin pour administrer le crédit. Comme l’admissibilité est fondée sur les effets de la déficience et non sur le diagnostic, nous ne recueillons aucune donnée sur les types de maladies, par respect pour la vie privée des demandeurs.

Nous avons reconnu que nous devons consulter les intervenants et les Canadiens. Le Comité consultatif des personnes handicapées a donc été rétabli avec l’appui complet de l’agence. Lors de la première réunion du comité le mois dernier, les membres ont participé à des discussions productives sur les lois qui régissent le CIPH, les pratiques administratives de l’agence et les objectifs du comité. À titre de coprésident, j’ai hâte de travailler avec les membres du comité pour trouver des façons d’améliorer la manière dont l’agence administre les mesures fiscales pour les personnes handicapées.

Je suis maintenant à votre disposition si vous avez des questions.

Le président : Comme il n’y a pas d’autres déclarations liminaires, nous allons passer tout de suite aux questions.

La sénatrice Seidman : Merci d’être venus pour éclairer notre lanterne. Je vais m’adresser à vous, monsieur Vermaeten, si vous me le permettez.

Notre comité a demandé à votre ministère des informations actualisées sur l’exercice financier 2017-2018, mais vous nous avez répondu dans une lettre du 7 février que cela n’était pas possible. J’aimerais savoir comment votre ministère peut administrer un programme sans en surveiller les résultats au fur et à mesure? L’agence n’a jamais publié de rapport d’étape semestriel?

M. Vermaeten : Bien sûr que nous recueillons des informations, conformément à la Loi sur la protection des renseignements personnels, et que nous voudrions que ces informations soient plus accessibles et plus transparentes. La publication des informations que nous vous avons transmises — et cela faisait partie du processus lié au Comité consultatif des personnes handicapées — contribue beaucoup à accroître la transparence. La ministre s’est engagée à faire plus, et nous allons collaborer davantage avec le Comité consultatif des personnes handicapées.

S’agissant des informations instantanées dont vous avez parlé, nous sommes très réticents à les publier parce qu’elles sont parfois très trompeuses. Le processus d’examen des demandes est saisonnier, dans une certaine mesure, et il dépend des cadences de traitement, des priorités et du moment auquel les formulaires nous parviennent.

Par exemple, une année donnée, nous recevons un grand nombre de demandes en avril et mai, et l’année d’après, pour toutes sortes de raisons, nous en recevons beaucoup moins pendant ces mois-là. Par conséquent, la publication de ces données pourrait être trompeuse et amener les gens à tirer des conclusions erronées.

Nous préférons faire preuve de la plus grande prudence et nous assurer que l’examen de ces données est aussi rigoureux que possible. À cet égard, nous avons également annoncé, tout récemment, la nomination d’une nouvelle dirigeante principale des données, qui s’assurera de leur qualité. Il faut que ces données soient de qualité, pour que les gens soient en mesure de les interpréter et d’en tirer une information correcte, plutôt que des chiffres sortis de leur contexte.

La sénatrice Seidman : Je ne comprends pas bien votre réponse. Je ne vous demande pas des données instantanées, je veux simplement savoir si vous préparez des rapports d’étape semestriels. Si je vous comprends bien, l’agence doit attendre l’exercice financier suivant pour savoir s’il y a des problèmes dans l’administration d’un programme de prestations.

M. Vermaeten : Nous surveillons de près l’administration des programmes, et ceux qui en sont responsables sont très rigoureux. Il existe, je pense, un processus interne qui permet de surveiller les délais de traitement des demandes et les taux d’approbation et de rejet. Bien sûr, ce n’est pas la même chose que la publication de données instantanées, mais quand je dis « instantanées », je veux dire après un court délai, car sinon, elles peuvent être trompeuses.

En effet, nous voulons avoir le temps de les analyser rigoureusement avant de les publier, ce qui peut se traduire par un délai de quelques mois après la fin de l’exercice financier. Cela représente beaucoup de données, et il est très facile de faire des erreurs dans ce genre de domaine. C’est donc parce que nous voulons avoir le temps de vérifier ces données que nous les publions seulement une fois par an.

La sénatrice Seidman : Permettez-moi de citer les paroles de l’un des témoins qui a comparu devant le comité. Voici ce qu’elle nous a dit :

L’absence de données liées à la population de personnes handicapées et au taux d’utilisation des prestations par cette même population empêche quasiment quiconque, y compris le gouvernement fédéral, d’évaluer dans quelle mesure le CIPH atteint sa population cible et de déterminer s’il faut prendre des mesures pour en accroître la visibilité et l’accès. C’est d’autant plus important que le CIPH est un passage obligé pour avoir droit à d’autres prestations.

Le président : Puis-je intervenir? Vous invoquez souvent la Loi sur la protection des renseignements personnels, mais vous pourriez certainement compiler les données et en faire une analyse statistique sans pour autant révéler le nom des gens. Pourquoi ne le faites-vous pas?

M. Vermaeten : Il faut faire la distinction entre la Loi sur la protection des renseignements personnels et les renseignements que nous recueillons pour l’administration de ce programme. Comme vous le savez, nous ne demandons pas de renseignements sur le sexe dans le formulaire initial, mais nous en demandons au sujet de l’âge. Nous ne demandons que les renseignements dont nous avons besoin. Les données fiscales du crédit d’impôt aux personnes handicapées se limitent à cela.

Certes, nous sommes en mesure de faire des liens avec d’autres bases de données à des fins d’analyse. C’est ce que nous faisons périodiquement. Nous avons fermement l’intention de le faire plus souvent, mais cela exige une grande rigueur et une bonne connaissance de toutes les complexités du dossier, notamment lorsqu’un dossier fait l’objet d’un appel, ce qui peut alors durer plusieurs années. C’est un travail qui est nécessaire et que nous nous sommes engagés à faire, mais la tâche est complexe.

Le président : Il faut penser non seulement aux besoins de l’agence, mais aussi à ceux des législateurs et des analystes de politiques qui ont besoin de mieux comprendre ce qui ne marche pas, étant donné le nombre de plaintes.

La sénatrice Petitclerc : J’aimerais avoir plus de précisions sur le comité consultatif, parce que nous avons entendu beaucoup de témoignages inquiétants. J’ai l’impression que ce n’est pas seulement une question d’ajustement, mais qu’il va falloir modifier radicalement notre approche, sans doute un peu désuète, à l’égard des personnes handicapées. Très franchement, quand on a affaire à des groupes de personnes souffrant de handicaps différents, je ne comprends pas vraiment ce critère des 14 heures. Pourriez-vous donner au comité des pistes de solutions et m’expliquer comment on en est arrivé à ce chiffre? Que peut faire notre comité? Quel processus avez-vous engagé? D’ici combien de temps peut-on espérer une solution?

M. Vermaeten : Je vais vous répondre.

La première responsabilité du Comité consultatif des personnes handicapées est de se pencher sur l’administration du programme, parce que c’est ce que nous faisons à l’agence.

À cet égard, le comité peut faire du travail très constructif. En fait, nous avons eu une première réunion très fructueuse, qui donne une bonne idée de ce que nous pourrons faire au cours des prochaines réunions.

Pour ce qui est de l’administration du programme, et je pense particulièrement au formulaire et à la lettre d’éclaircissement, nous avons mis sur pied des sous-groupes et nous allons consulter à la fois la communauté médicale et les préparateurs de déclarations d’impôt pour savoir comment nous pouvons rendre ces formulaires plus faciles à comprendre, à la fois pour les gens, les médecins et les infirmières. Voilà ce que nous allons faire.

Nous allons essayer de faire en sorte que nous administrons le programme de façon uniforme. Ce ne sera pas facile. Nous avons certes des gens très qualifiés, mais nous recevons aux alentours de 250 000 demandes par an, ce qui est beaucoup. Cela exige beaucoup de rigueur, et je pense que le Comité consultatif des personnes handicapées, avec toute son expertise, peut nous aider dans notre tâche.

Il peut également nous aider à propos des données dont la sénatrice a parlé. Nous avons besoin de recueillir davantage de données pour faire ce genre d’analyse, dans le but de documenter les politiques. Je crois vraiment que le comité pourra nous être utile à cet égard. Nous en avons justement discuté à la dernière réunion, et c’est ce que nous comptons faire.

Pour ce qui est de la politique à proprement parler, l’agence n’a pas le pouvoir de modifier le régime fiscal, mais il est vrai que vous ne pouvez pas examiner l’aspect administratif du programme sans tenir compte des dispositions de la loi qui sont fondamentales. Par conséquent, nous allons surtout nous intéresser, dans un premier temps, à l’aspect administratif, mais nous aurons certainement des discussions très animées sur l’interface entre l’administration et la loi.

Nous transmettrons nos conclusions au ministère des Finances et nous verrons si cela peut faire avancer les choses. Au final, c’est le ministère des Finances qui décide. Les membres du comité en sont parfaitement conscients, mais ils veulent avoir leur mot à dire, et c’est ce qu’ils entendent faire en soumettant leurs conclusions au ministère des Finances.

C’est un comité consultatif. Il n’a donc pas le pouvoir de modifier la loi ou la façon d’administrer le programme, mais nous sommes convaincus qu’il peut nous apporter une contribution très précieuse.

Le président : Jusqu’à présent, toutes les questions ont été adressées au représentant de l’agence. N’oubliez pas que nous avons d’autres témoins. Si vous voulez poser une question, faites-moi signe de la main. En attendant, c’est moi qui vais poser une question.

EDSC — à l’intention de ceux qui nous regardent, je précise qu’il s’agit d’Emploi et Développement social Canada — EDSC, dis-je, et l’agence administrent conjointement le REEI. Comment procédez-vous pour administrer conjointement le REEI, et pourquoi n’en faites-vous pas autant pour le CIPH?

Krista Wilcox, directrice générale, Bureau de la condition des personnes handicapées, Emploi et Développement social Canada : Je pense être en mesure de répondre aux deux questions.

Merci, monsieur le président, de votre invitation à comparaître devant le comité. Je suis heureuse d’avoir l’occasion de parler de ce programme très important pour les personnes handicapées.

Notre ministère est responsable de la cotisation que le gouvernement du Canada verse au REEI, soit le régime enregistré d’épargne-invalidité, car il faut savoir que ce régime comporte deux éléments : la Subvention canadienne pour l’épargne-invalidité et le Bon canadien pour l’épargne-invalidité, et que ces deux éléments sont subordonnés au revenu à différents niveaux. C’est nous qui administrons cela. Nous travaillons en collaboration avec les établissements financiers pour payer le bon aux prestataires admissibles.

Nous avons également la responsabilité de mieux faire connaître le REEI, et c’est ce que nous faisons auprès des différentes communautés de personnes handicapées. Nous collaborons avec les établissements financiers pour leur offrir de la formation. Je dis cela parce qu’une question a été posée à ce sujet tout à l’heure. Nous offrons donc de la formation aux établissements financiers qui proposent des REEI, et nous collaborons régulièrement avec eux pour essayer d’améliorer nos services aux Canadiens.

Nous travaillons en étroite collaboration avec l’agence, parce que le CIPH est un critère d’admissibilité au REEI. Autrement dit, pour avoir un REEI, il faut être admissible au CIPH et être résident du Canada. Ce sont les deux principaux critères d’admissibilité, conformément à la Loi de l’impôt sur le revenu.

Si nous ne sommes pas responsables de l’administration du CIPH, c’est parce que la Loi de l’impôt sur le revenu en délègue la responsabilité à l’agence. Cette loi relève du ministère des Finances, et je ne peux donc pas vous en dire plus sur les raisons de cette délégation.

Le président : Merci.

Le sénateur Munson : Vous savez ce que je pense du comité consultatif, qu’il devrait être élargi. J’en resterai là. C’est un comité très important, mais malheureusement des millions de Canadiens de la communauté autiste n’y sont toujours pas représentés.

Mais je ne comprends pas très bien, et on a l’impression que, pour les personnes en cause, cela entraîne un double risque. Qu’arrive-t-il, en effet, à la personne qui bénéficie depuis cinq ans du crédit d’impôt pour personnes handicapées, qui détient pendant toute cette période, un régime enregistré d’épargne-invalidité, et qui est soudainement déclarée non admissible à ce crédit d’impôt. Si je comprends bien, son REEI va alors devoir être dissous. Ainsi, pendant cinq ans, le gouvernement, les divers ministères, l’ont jugée admissible au crédit d’impôt et cette personne était confortée à l’idée qu’elle pourrait à toute époque faire appel à ce régime d’épargne. Or, on a, semble-t-il, entièrement perdu de vue cet aspect-là du problème. En fait, deux choses sont en cause, et l’intéressé se trouve soudainement privé de ces deux avantages et n’a plus alors qu’à solliciter de la province une prestation d’invalidité, ou demander le bien-être social.

Cela est-il fréquent? J’ai un peu de peine à comprendre comment on a pu, ces derniers mois, en arriver là. Les médias ont évoqué le cas de personnes qui se voient désormais refuser le bénéfice de ces dispositions. Ce genre de situation semble se produire plus souvent qu’auparavant. Comment peut-il en être ainsi? Serait-ce parce que le nombre de bénéficiaires éventuels n’a jamais été aussi élevé?

Il me semble injuste de voir priver de leurs moyens de subsistance des gens qui, faisant confiance au système et se comportant avec honnêteté, avaient jusque-là le sentiment d’avoir fait tout ce qu’il fallait faire.

M. Vermaeten : Vous m’avez posé là deux questions. La première a trait à la politique en vigueur. Cette politique est-elle équitable? Est-il juste qu’un REEI doive être dissous à partir du moment où son titulaire n’est plus admissible au CIPH? Je vais laisser à mes collègues le soin de vous répondre sur ce point.

Cela dit, je tiens à préciser que la dissolution du régime d’épargne n’intervient pas immédiatement, et que certaines dispositions font que le titulaire n’a pas à se hâter de dissoudre son REEI si son dossier doit être réexaminé ou s’il est possible qu’il devienne à nouveau admissible au crédit d’impôt.

En ce qui concerne maintenant l’aspect purement administratif — et vous avez évoqué le battage médiatique entourant la question des REEI — je vous assure que nous nous penchons sur chaque cas en particulier. Sur ce plan-là, il n’y a eu aucun changement. Ce programme existe depuis longtemps, mais il est vrai que depuis un certain temps on se penche de plus près les dossiers de CIPH, et je pense que c’est pour cela qu’on en parle tellement depuis.

Nous sommes conscients des difficultés que peut entraîner pour quelqu’un l’obligation de dissoudre un régime enregistré d’épargne-invalidité lorsqu’il cesse de bénéficier du CIPH. Nous en sommes parfaitement conscients et, dans l’exercice de la responsabilité qui est la nôtre d’administrer la Loi de l’impôt sur le revenu, nous ne prenons pas ce genre de situation à la légère.

Pierre Leblanc, directeur général, Division de l’impôt des particuliers, Direction de la politique de l’impôt, ministère des Finances Canada : Vous avez demandé ce qu’il advient d’un REEI lorsque son titulaire ne peut plus prétendre au CIPH. Permettez-moi d’expliquer un peu le contexte de ce genre de situation, et de rappeler en quelques mots l’architecture générale du régime enregistré d’épargne-invalidité. En 2006, le gouvernement a commandé un rapport intitulé Un nouveau départ, et c’est suite aux recommandations formulées dans ce rapport que le REEI a été institué, faisant sa première apparition dans le budget de 2007. Dans le budget, le REEI, nouvellement instauré, collait de près aux recommandations formulées dans le rapport. Une de ces recommandations était de destiner cette nouvelle mesure essentiellement aux personnes admissibles au CIPH.

Depuis le lancement du REEI, nous avons pris conscience des problèmes qui peuvent survenir, et, en 2011, on a procédé à un examen des mesures régissant ce régime d’épargne. C’est, effectivement, un des problèmes qu’ont fait ressortir les consultations que nous avons menées. C’est à la suite de ces consultations qu’il a été prévu, dans le budget de 2012, je crois, que dans certains cas, un REEI pourrait, à certaines conditions, demeurer en vigueur. Le titulaire n’aurait ainsi plus droit à la subvention et au bon que vient de décrire mon collègue d’Emploi et Développement social Canada, et il lui faudrait en outre avoir de bonnes chances de devenir, dans les cinq ans, à nouveau admissible au crédit d’impôt. Je reconnais que cela ne fait pas l’affaire de tout le monde, et nous sommes conscients que cela continue effectivement à poser un problème. Je tenais à vous fournir un peu plus de contexte, et à rappeler la genèse de cette mesure ainsi que les raisons qui expliquent la situation actuelle. Cela dit, nous reconnaissons que c’est effectivement problématique.

Le président : Nous allons devoir presser le pas, si nous voulons aboutir.

La sénatrice Omidvar : Je tâcherai d’être brève. La question est d’ailleurs assez simple. Elle touche le cheminement administratif des dossiers, l’accès à la procédure et les appels, c’est-à-dire l’essentiel de votre action.

Certains témoins ont évoqué devant le comité les difficultés liées à l’accès et à la procédure d’appel. Il semblerait que les médecins hésitent de plus en plus à remplir les formulaires. Dans certains cas, ils se font même rémunérer pour ce service. J’ajoute le problème des prédateurs, en l’occurrence ceux qui se proposent d’aider d’éventuels bénéficiaires du CIPH à remplir leur demande ou à faire appel, prélevant à l’occasion 30 p. 100 de la valeur du crédit obtenu.

C’est cela qui me porte à vous poser une question au sujet de l’aide qui serait disponible au sein de la communauté. Existe-t-il une ONG qui aide les gens à effectuer les formalités voulues, ou à faire appel d’une décision? Si ce n’est pas le cas, devrait-on prévoir quelque chose à cet égard? Si la réponse est non, EDSC devrait-il envisager de soutenir l’action d’une telle ONG qui aiderait à gérer toute cette procédure, afin à la fois de vous faciliter la tâche et d’aider les gens à remplir correctement les formulaires officiels? Cela faciliterait la vie des personnes concernées et leur épargnerait certains frais ainsi que l’argent que peuvent leur soutirer les prédateurs.

M. Vermaeten : Je vais vous donner un début de réponse, et puis passer la parole à ma collègue d’EDSC.

Votre question comporte plusieurs parties, dont une qui concerne les pratiques prédatrices. La ministre et la commissaire déléguée ont répondu qu’il existe, en effet, des dispositions législatives destinées à lutter contre cela. Le gouvernement s’attache actuellement à mettre en place un règlement à cet effet, afin, justement, de contenir ce genre de pratiques prédatrices. C’est une première chose.

En ce qui concerne, maintenant, les appels, je dois dire que personne n’aime ce type de procédure qui peut, effectivement, être assez lourde. Cela dit, nous faisons de notre mieux pour éviter aux gens d’avoir à exercer cet ultime recours. C’est ainsi qu’après que soit intervenue la décision initiale, les intéressés ont la possibilité de nous transmettre des renseignements complémentaires. S’il est décidé qu’ils ne sont pas admissibles au CIPH, ils peuvent en effet toujours nous fournir de nouveaux renseignements et nous réexaminerons leur dossier. S’ils le souhaitent, ils peuvent faire cela plusieurs fois. Voilà, donc, une première chose.

S’ils n’obtiennent toujours pas gain de cause, ils peuvent également présenter une nouvelle demande de CIPH. Ils peuvent aussi, s’ils le souhaitent, consulter un autre médecin, car la décision dépend en effet en partie du rapport du médecin. Il se peut, par exemple, que celui-ci n’ait pas très bien saisi comment il convenait de présenter l’état de santé de l’intéressé aux fins de cette démarche précise, soit parce que ce n’était pas le médecin habituel de la personne en question, soit parce que sa spécialité était dans un autre domaine médical. C’est dire que les gens ont la possibilité, aussi souvent qu’ils le veulent, de présenter une nouvelle demande.

Et puis, ils ont après cela, la possibilité de contester la décision. Nous avons tenté de simplifier la procédure d’opposition. Je dois dire que le nombre d’oppositions et le nombre d’appels sont très réduits par rapport à l’étendue du programme, ce qui me porte à croire que, dans la plupart des cas, le programme est administré correctement et que les dispositions applicables sont claires.

Je constate que le nombre de contestations a baissé et que celles-ci ne concernent qu’un très faible pourcentage de dossiers. Cela dit, face à ce genre de procédures, les gens auraient sans doute besoin d’un peu plus d’aide.

Je précise qu’il existe, au sein du Programme communautaire des bénévoles en matière d’impôt, un groupe de bénévoles extrêmement dévoués qui, dans de nombreux cas, parviennent à aider les gens à remplir les formalités voulues. Cela, cependant, ne correspond pas entièrement à l’idée que vous avez évoquée d’une ONG qui, avec l’appui financier du gouvernement, pourrait fournir une aide supplémentaire. Je vais m’en remettre sur ce point à Mme Wilcox.

La sénatrice Omidvar : Je voudrais d’abord faire un simple commentaire au sujet des procédures que vous nous avez exposées. Je tente de me mettre à la place d’une personne handicapée. Vous nous avez décrit les diverses procédures — et nous avons entendu parler des difficultés que tout cela présente — eh bien, certaines personnes vont simplement renoncer, car elles trouveront tout cela trop compliqué.

Pourriez-vous nous dire ce que vous pensez de cette idée d’apporter une réponse officielle à ce problème en mettant sur pied une ONG qui aurait pour mission de soutenir les gens qui se retrouvent face à ce genre de difficulté.

Mme Wilcox : Nous travaillons en très étroite concertation avec les personnes intéressées. Nous avons notamment institué des programmes d’appui à l’action des organisations nationales qui veillent aux intérêts des personnes handicapées. Nous faisons sur ce plan un effort tout à fait considérable.

Nous n’avons pas cependant discuté du soutien qu’EDSC pourrait éventuellement apporter à une ONG ayant pour mission d’aider les personnes souhaitant faire appel d’une décision les déclarant non admissibles au CIPH. La procédure applicable au Programme canadien pour l’épargne-invalidité est essentiellement binaire, c’est-à-dire que soit vous êtes admissible, soit vous ne l’êtes pas. Ce programme ne comporte pas de procédure d’appel.

Cela dit, nous sommes conscients des difficultés éprouvées par les personnes handicapées qui doivent présenter une demande de prestation. Nous œuvrons de concert avec divers organismes communautaires, par des actions de sensibilisation et de promotion, afin de voir dans quelle mesure nous pouvons profiter de leurs connaissances et faciliter les formalités qui conditionnent l’octroi du CIPH. Mon équipe travaille en étroite collaboration avec celle de Frank sur ce dossier ainsi que sur le dossier du REEI, les deux étant liés.

Le sénateur Christmas : Ma question s’adresse elle aussi au sous-commissaire. Dans votre exposé liminaire, vous avez dit que les équipes de l’ARC chargées d’étudier les demandes de CIPH suivent une « formation poussée ». J’aurais sur ce point deux questions à vous poser. Pourriez-vous nous dire en quoi consiste cette formation assurée aux employés, et nous dire aussi si ces équipes d’agents comprennent des employés de l’ARC qui seraient eux-mêmes handicapés.

M. Vermaeten : La formation que suivent les agents chargés des dossiers de CIPH est la plus longue de toutes les formations assurées à nos employés. Dans le cadre de ce programme de trois mois, les agents s’initient aux dispositions législatives applicables, à la manière de les interpréter et à la manière d’administrer le programme. C’est une formation pratique d’une durée considérable.

Après cette formation, le travail des agents chargés d’étudier un dossier va, pendant assez longtemps, être vérifié par un gestionnaire ou un responsable des politiques, selon le cas, afin d’assurer que tout est fait correctement. Cette mesure de sécurité s’applique à tous les nouveaux employés.

Mais il y a, en plus, un guide des opérations qui schématise très clairement ce qu’il faut faire dans les divers cas qui se présentent. J’ajoute que, en cas de difficulté, ou si l’agent ne comprend pas très bien de quoi il s’agit, ou que la décision pose des difficultés particulières, on fait appel à des infirmières dont c’est justement la fonction. Ça aussi c’est extrêmement utile. En cas d’incertitude, les infirmières contacteront le médecin afin d’obtenir des précisions nous permettant de nous prononcer en connaissance de cause.

Le sénateur Christmas : Si j’ai bien compris, la formation assurée est donc essentiellement consacrée aux politiques et procédures applicables, est-ce bien cela?

M. Vermaeten : Conformément à la procédure en vigueur, nous recevons les demandes, accompagnées des renseignements du médecin concernant le handicap en cause. Ces informations doivent permettre de dire si le handicap correspond à ceux qui sont prévus dans la législation. Satisfait-il aux conditions prévues dans la Loi?

Le sénateur Christmas : La formation assurée aux agents vise-t-elle en partie à aider les employés à comprendre en quoi consistent les principaux handicaps justifiant une demande de crédit d’impôt?

M. Vermaeten : Assurément, mais je tiens à préciser que le travail de nos agents n’est pas de substituer leur appréciation à celle du médecin. Leur travail consiste à vérifier que le dossier correspond bien aux conditions prévues dans la Loi de l’impôt sur le revenu.

Lorsque le médecin a indiqué le temps consacré aux soins thérapeutiques essentiels, l’agent de l’ARC a pour tâche de dire si ces soins sont effectivement admissibles, car certains ne le sont pas. Il va ensuite vérifier qu’au moins 14 heures y ont été consacrées. Si ce n’est pas le cas, l’agent demandera au médecin des précisions afin de voir si l’intéressé peut effectivement bénéficier du CIPH.

Mme Wilcox : Je tiens à préciser que ma direction générale est, au sein du gouvernement canadien, le point de coordination des actions visant les personnes handicapées. Nous travaillons en étroite collaboration avec l’École de la fonction publique du Canada pour assurer la formation des fonctionnaires fédéraux, les sensibiliser aux questions intéressant les personnes handicapées, les familiariser avec les difficultés d’accès et améliorer leur capacité à répondre aux besoins de ces personnes. C’est à cela que nous nous attachons. Cela ne vaut donc pas uniquement pour le secteur dont Frank a la charge, mais pour l’ensemble de la fonction publique fédérale.

Le sénateur Christmas : Ma seconde question était la suivante : ces équipes comprennent-elles des agents eux-mêmes handicapés?

Mme Wilcox : Pour ce qui est de l’équité en matière d’emploi de personnes handicapées, ma direction générale répond, à elle seule, aux objectifs globaux du ministère. Je pense même pouvoir dire que presque tous les membres de mon équipe comprennent fort bien ce qu’est un handicap, soit parce qu’un membre de leur famille en est atteint, soit en raison d’une expérience personnelle. Nous pouvons tous faire mieux, et certains types de handicaps sont, il est vrai, moins représentés au sein de nos services — je pense notamment aux personnes sourdes — mais nous employons une très forte proportion de personnes handicapées. Je ne peux pas vous citer le chiffre précis, mais au sein de mon équipe, la proportion est effectivement très élevée.

Le président : Pourrais-je, sur ce même point, obtenir la réponse de l’ARC?

M. Vermaeten : Comme à EDSC, il y a aussi, chez nous, parmi les agents chargés d’étudier ces dossiers, des personnes handicapées. Les personnes qui ont elles-mêmes eu à faire face à un handicap, le leur ou celui de quelqu’un qu’elles connaissent, s’intéressent naturellement de près à la question. Il en va ainsi dans nos services, et cela apporte à nos équipes un complément d’expérience très utile, qui contribue d’ailleurs sensiblement à la qualité du programme en question.

Le sénateur Neufeld : Je tiens à vous remercier tous d’avoir répondu à notre invitation.

Je ne suis pas membre du comité, mais, en Colombie-Britannique, où je vis, j’ai entendu bon nombre de personnes se plaindre d’un changement soudain et radical de situation. On a évoqué devant moi des « milliers de changements » et le cas de certaines personnes qui, ayant pendant cinq ans ou plus touché une pension d’invalidité, sont soudainement déclarées non admissibles. Le comité a entendu ce que la ministre a déclaré à cet égard. Elle affirme que rien n’a changé sur le plan de la réglementation ou de la législation applicables. Pourtant, il y a bien quelque chose qui a changé.

Vous pouvez peut-être m’aider sur ce point. Serait-ce que dans le cas de ces personnes on s’est trompé au départ, ou est-ce qu’on se trompe maintenant en les déclarant non admissibles? Je dis cela, car il est clair que quelque chose a changé. Les gens s’interrogent et ont droit à une réponse. Comment se peut-il qu’une personne puisse bénéficier d’une pension d’invalidité pendant cinq ans, huit ans ou plus, et puis que tout d’un coup on lui coupe les vivres? Soit il y a eu erreur au départ, soit il y a erreur maintenant, car le nombre de ces cas a beaucoup augmenté — tout le monde le reconnaît, même la ministre. Quelque chose a changé, mais ce n’est ni la législation ni la réglementation en vigueur. Pourriez-vous me dire un peu ce qu’il en est?

M. Vermaeten : Très volontiers.

Ainsi que la ministre l’a dit, les critères d’admissibilité n’ont pas changé en ce qui concerne le CIPH ou certains des sous-éléments de ce crédit d’impôt, mais il est clair qu’est intervenu un changement administratif qui a entraîné des conséquences imprévues. Permettez-moi de vous expliquer de quoi il s’agit.

Les demandes de CIPH qui nous sont présentées comportent deux parties, la partie à remplir par l’intéressé, et la partie à remplir par le médecin. C’est en fonction de cela que nous décidons si le demandeur est admissible ou non. Dans la plupart des cas, les renseignements qui nous sont fournis nous permettent de décider immédiatement si la personne est ou non admissible. Cela ne pose en général aucune difficulté.

Dans environ 30 p. 100 des cas, cependant, il nous faut demander au médecin un complément d’information, car les renseignements qui nous ont été transmis ne nous permettent pas de nous prononcer. Ces demandes d’éclaircissements s’inscrivent dans une pratique de longue date et il s’agit essentiellement d’obtenir un complément d’information.

De temps à autre, nous revoyons le texte de ces demandes d’éclaircissements pour voir si nous ne pourrions pas les améliorer afin d’obtenir les renseignements qu’il nous faut, compte tenu de l’évolution de la situation. Il n’est pas fréquent que le texte de ces lettres soit modifié, mais cela arrive.

Ce qui a changé, ces dernières années, c’est la lettre demandant des précisions au sujet des soins thérapeutiques essentiels. Nous l’avons modifiée en réponse à ce que nous disaient les médecins. Ils éprouvaient en effet des difficultés à répondre à cette partie de la lettre, et c’est pourquoi, en mai 2017, nous y avons apporté des changements.

Or, ces modifications ont eu, sur un groupe très précis de clients, des effets que nous n’avions pas prévus. C’est pour cela que la ministre nous a demandé de revenir à la formulation initiale, d’examiner à nouveau les demandes qui avaient été rejetées suite à l’envoi de la nouvelle lettre, et de leur appliquer les termes de la lettre initiale. C’est exactement ce que nous avons fait.

J’ajoute que la ministre a annoncé la nomination d’un Comité consultatif des personnes handicapées, afin de procéder désormais à de plus larges consultations, avant d’effectuer des changements tels que ceux que nous venons d’évoquer. Cela me paraît extrêmement important. Le Comité consultatif des personnes handicapées devrait nous permettre de faire en sorte que les changements que nous effectuons ou que nous proposons sont mieux compris des intéressés, et que nous sommes nous-mêmes pleinement conscients des conséquences qu’ils peuvent avoir.

Bref, il n’y a eu aucun changement au niveau des critères d’admissibilité — je peux vous l’assurer. Il y a eu un léger changement sur le plan administratif, ce changement a eu une incidence que nous n’avions pas prévue, et nous avons entre-temps réglé le problème.

Le sénateur Neufeld : Avant que cela se produise, et que les personnes se voient refuser leur prestation d’invalidité, il y a eu, selon vous, un petit changement qui a eu des conséquences dramatiques. En étiez-vous conscients avant d’écrire aux intéressés, ou de leur faire savoir qu’ils n’auraient désormais plus droit au crédit d’impôt? Au ministère, étiez-vous au courant de cela avant d’en informer les gens, et avez-vous agi en conséquence? J’imagine que le fait de revenir à la formulation initiale vous portera peut-être à modifier certaines des décisions qui sont intervenues. Est-ce exact?

M. Vermaeten : Les modifications apportées au texte de la demande de précisions ont été décidées au sein même du programme, en réponse à ce que les médecins nous disaient et après consultation des membres de nos équipes, y compris des infirmières qui y sont attachées. L’idée était d’améliorer le texte de la demande d’éclaircissements. Cette lettre a été envoyée, mais il a fallu quelque temps avant que l’on en connaisse les effets, car une fois la lettre envoyée, les gens présentent leur demande et ce n’est que plusieurs mois plus tard que l’effet s’en fait ressentir.

On nous a signalé une augmentation du taux de rejet et nous nous sommes immédiatement penchés sur la question afin de voir si c’était effectivement le cas. Nous avons réagi en en revenant à la formulation initiale. Le Comité consultatif des personnes handicapées va lui-même étudier le texte de ces demandes d’éclaircissements afin de voir s’il peut être amélioré, et continuer à l’adapter à une situation en constante évolution.

Je tiens à préciser que cela a effectivement affecté un certain nombre de personnes, mais uniquement une catégorie très restreinte de clients, étant donné que la lettre concernait les soins thérapeutiques essentiels. Le texte des autres demandes d’éclaircissements n’avait en effet pas changé. Aucune des autres procédures n’avait été modifiée. Il est clair que le changement en question a entraîné des conséquences pour les personnes d’un groupe en particulier, un groupe important, certes, mais relativement restreint. Nous avons, depuis, rectifié la situation.

Le président : Je vous remercie. Nous allons terminer cette partie de la séance en vous adressant, en bloc, trois questions auxquelles nous vous demanderons de répondre brièvement. La première va vous être posée par la sénatrice Seidman, et les deux autres par moi-même.

La sénatrice Seidman : On m’a cité le cas de personnes handicapées qui ont été contraintes d’aller en justice pour obtenir de l’ARC l’avantage auquel elles estimaient avoir droit. Pourriez-vous nous dire quel est le nombre de personnes qui, au cours des cinq dernières années, après avoir épuisé les recours devant l’ARC, ont été obligées d’intenter une action devant la Cour de l’impôt? Dans ce type d’affaires, combien de fois l’ARC a-t-elle eu gain de cause et combien de fois a-t-elle été déboutée. À combien se sont élevés les coûts de litige?

En outre, il a été dit hier devant le comité qu’un numéro d’appel sans frais devrait être institué en faveur des personnes présentant une demande de CIPH, afin de les aider à s’y retrouver dans les méandres de la procédure. Pourriez-vous nous dire si l’ARC offre un tel service affecté spécifiquement à d’autres types de demandes de prestations, et si un tel service n’a jamais été proposé aux personnes présentant une demande de CIPH?

Le président : Avant d’entendre votre réponse, j’aurais une ou deux questions que je voudrais vous poser très rapidement. Un projet expérimental actuellement en cours prévoit l’inscription automatique au Supplément de revenu garanti des personnes à faible revenu. Ne pourrait-on pas en faire autant pour les personnes admissibles au CIPH, les inscrivant automatiquement à un REEI?

Pourquoi les titulaires d’un REEI doivent-ils attendre 10 ans avant d’en retirer de l’argent? Je crois savoir que certains souhaiteraient ne pas avoir à attendre aussi longtemps avant d’effectuer un retrait. Pourquoi ne pas leur permettre d’en retirer de l’argent selon leurs besoins?

M. Leblanc : Je répondrai à votre dernière question, monsieur le sénateur, un peu comme j’ai répondu à celle du sénateur Munson. Les dispositions régissant les REEI se fondent sur le rapport remis en 2006 par le groupe d’experts chargé de la question. On a essentiellement vu dans ce régime le moyen d’assurer la sécurité financière à long terme des intéressés. La règle des 10 ans recommandée dans le rapport, a été adoptée lorsque le REEI a été instauré l’année suivante dans le cadre du budget de 2007.

M. Vermaeten : Permettez-moi de répondre brièvement aux deux premières questions.

Je n’ai pas en mémoire les renseignements que vous nous avez demandés au sujet des procédures d’appel, mais précise qu’au cours de l’exercice 2017-2018, la Cour de l’impôt a statué sur 28 appels, chiffre à comparer aux 15 qui avaient été entendus en 2016-2017, chiffre que l’on peut lui-même comparer à celui de 2014-2015, où les 45 appels qui ont été entendus, correspondent au nombre le plus élevé des cinq dernières années. Cela vous donne une idée de la situation.

La sénatrice Seidman : Si vous n’êtes pas en mesure de nous fournir les autres renseignements, tels que le nombre de dossiers dans lesquels l’ARC a obtenu gain de cause, le nombre d’affaires où l’agence a été déboutée et le coût des litiges auxquels l’agence a été partie au cours des cinq dernières années, pourriez-vous nous les transmettre par écrit dans les semaines qui suivent?

M. Vermaeten : Je peux demander à mes collègues si ces renseignements existent, et s’ils existent effectivement, nous vous les ferons naturellement parvenir.

Votre seconde question concernait, je crois, la création d’une ligne téléphonique réservée aux personnes qui auraient besoin d’aide pour présenter une demande de CIPH.

La sénatrice Seidman : Oui, un numéro sans frais.

M. Vermaeten : Naturellement. Je veux bien en proposer l’idée. Je ne sais pas ce qui s’est fait dans le passé, et si cela a déjà existé. Il y a une ligne réservée aux personnes présentant une demande de prestations. Selon la procédure en vigueur, lorsque quelqu’un appelle au sujet du CIPH, l’appel est, en général, transmis à un agent de niveau 2, c’est-à-dire un agent hautement qualifié capable de répondre aux questions du client. Les questions particulièrement complexes ou pointues sont transmises par le centre d’appels directement au programme, à des spécialistes du CIPH qui rappelleront le client pour lui donner les renseignements voulus. Voilà la procédure actuellement en vigueur.

La sénatrice Seidman : Je voudrais être absolument certaine de vous avoir bien compris. Est-ce à dire que vous avez une ligne réservée, un numéro sans frais, pour les personnes présentant une demande de prestations?

M. Vermaeten : Il y a effectivement une ligne réservée aux personnes souhaitant présenter une demande concernant certaines prestations, à distinguer des personnes dont l’appel concerne l’impôt sur le revenu des particuliers ou l’impôt sur les entreprises. Cette ligne est en effet réservée aux appels ayant trait aux diverses prestations, les prestations familiales par exemple.

Mme Wilcox : Je tiens à préciser, sur ce dernier point, que, dans le cadre du programme de CIPH, nous avons effectivement une ligne réservée à l’assistance de niveaux 2 et 3, un centre d’appels spécialisé réservé aux clients qui éprouvent des difficultés en matière de REEI.

En ce qui concerne, maintenant, l’inscription automatique, c’est une idée qui a été évoquée, mais ce n’est pas ce que le programme prévoit actuellement. L’idée a effectivement été lancée par certaines des parties prenantes, et nous en sommes au courant.

Le président : Cela aiderait les personnes à faible revenu, leur évitant les démarches répétées et réduisant le nombre de formulaires à remplir.

Voilà qui termine la partie de la séance consacrée à ce groupe de témoins. Je tiens à vous remercier de vous être rendus à notre invitation et d’avoir répondu à nos questions. Tout cela nous a été très utile.

(La séance se poursuit à huis clos.)

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