LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES AFFAIRES SOCIALES, DES SCIENCES ET DE LA TECHNOLOGIE
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le mercredi 12 avril 2017
Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, auquel a été renvoyé le projet de loi S-5, Loi modifiant la Loi sur le tabac, la Loi sur la santé des non-fumeurs et d’autres lois en conséquence, se réunit aujourd'hui, à 16 h 15, pour poursuivre son étude de ce projet de loi.
Le sénateur Kelvin Kenneth Ogilvie (président) occupe le fauteuil.
[Français]
Le président: Je vous souhaite la bienvenue au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.
[Traduction]
Je m’appelle Kelvin Ogilvie, de Nouvelle-Écosse, président du comité. J’invite mes collègues à se présenter, en commençant par ma gauche.
Le sénateur Eggleton: Sénateur Eggleton, de l’Ontario, vice-président du comité.
Le sénateur Neufeld: Sénateur Neufeld, de la Colombie-Britannique.
La sénatrice Frum: Linda Frum, de l’Ontario.
Le sénateur Dean: Sénateur Dean, de l’Ontario.
La sénatrice Hartling: Sénatrice Hartling, du Nouveau-Brunswick.
[Français]
La sénatrice Petitclerc: Chantal Petitclerc, du Québec.
Le sénateur Cormier: René Cormier, du Nouveau-Brunswick.
[Traduction]
La sénatrice Stewart Olsen: Carolyn Stewart Olsen, du Nouveau-Brunswick.
La sénatrice Seidman: Judith Seidman, de Montréal, au Québec.
Le président: Je précise que la séance d’aujourd’hui porte sur le projet de loi S-5, Loi modifiant la Loi sur le tabac, la Loi sur la santé des non-fumeurs et d’autres lois en conséquence.
Nous sommes ravis d’accueillir l’honorable Jane Philpott, ministre de la Santé, qui est accompagnée de fonctionnaires à la table. Je crois que d’autres fonctionnaires se trouvent aussi dans la salle et pourront lui prêter main-forte au besoin. Merci à tous d’être ici pour nous aider dans cette étude.
Madame la ministre, je vous invite à présenter votre déclaration liminaire comme il vous convient. Mes collègues vous poseront ensuite des questions.
Bienvenue, madame la ministre.
[Français]
L'honorable Jane Philpott, C.P., députée, ministre de la Santé: Merci beaucoup. Je suis très heureuse d'être ici. Je vous remercie de me donner l'occasion de m'adresser à vous cet après-midi pour vous parler du projet de loi S-5, Loi modifiant la Loi sur le tabac, la Loi sur la santé des non-fumeurs et d'autres lois en conséquence.
[Traduction]
Comme vous le savez, ce projet de loi fait partie intégrante du vaste programme gouvernemental de contrôle du tabac, qui comprend l’interdiction du menthol dans la plupart des produits, des exigences d’emballage neutre pour tous les produits et la modernisation de l’approche globale du Canada sur le contrôle du tabac.
Le contrôle du tabac demeure un enjeu de santé publique pressant, malgré des dizaines d’années d’efforts pour en limiter l’usage. Le pays compte toujours 4,5 millions de fumeurs. En 2015, 115 000 Canadiens sont devenus des fumeurs quotidiens.
Le tabac est un produit mortel qui tue environ 37 000 Canadiens chaque année en raison de maladies liées au tabac. C’est environ une personne toutes les 14 minutes. En fait, la moitié des fumeurs quotidiens au Canada vont mourir prématurément d’une maladie liée à leur consommation de tabac. Vous conviendrez sans doute, honorables sénateurs, que c’est inacceptable et que nous sommes confrontés à un grave problème de santé publique. C’est pourquoi notre gouvernement prend des mesures pour réduire la consommation de tabac au Canada. Notre objectif consiste à passer de 15 p. 100 de fumeurs en 2015 à moins de 5 p. 100 d’ici 2035.
Vous savez aussi que le contrôle du tabac est en évolution. Nous constatons une croissance rapide de la prévalence de certains produits, dont les produits de vapotage, qui sont de plus en plus utilisés. Le vapotage est moins nocif que la cigarette et peut entraîner des avantages pour la santé publique s’il réduit le nombre de morts et de maladies causés par le tabac. Mais le vapotage pourrait aussi nuire à nos efforts s’il amène les jeunes et les non-fumeurs à développer une dépendance à la nicotine ou à se tourner vers la cigarette.
[Français]
Mesdames et messieurs, sénateurs et sénatrices, il est essentiel de mettre tout en œuvre pour empêcher les Canadiens et Canadiennes de développer une dépendance à un produit qui tue un utilisateur de longue date sur deux.
[Traduction]
Lorsque j’étais médecin de famille, j’ai vu directement les méfaits du tabac et les difficultés qu’éprouvent ceux qui veulent cesser de fumer. Nous devons aider ces gens et décourager ceux qui pourraient commencer à fumer. Les Canadiens veulent que le gouvernement prenne des mesures pour diminuer le nombre de fumeurs au pays.
[Français]
Pour y arriver, nous devons résoudre plusieurs questions.
[Traduction]
Pour les fumeurs qui ne sont pas prêts à arrêter de fumer ou qui en sont incapables, nous devons trouver des façons de réduire les torts que la dépendance à la nicotine cause à leur santé et à la société en général. Nous devons également réfléchir aux nouvelles technologies et aux nouveaux produits, à l’influence qu’ils auront sur la consommation future au Canada et aux mesures que nous entendons prendre pour les contrôler.
[Français]
C'est pour cette raison que nous sommes ici aujourd'hui.
[Traduction]
Le projet de loi S-5 a été établi en réponse aux recommandations formulées par le Comité permanent de la santé de la Chambre des communes dans son rapport intitulé Vapotage: Vers l’établissement d’un cadre réglementaire sur les cigarettes électroniques, qui a reçu l’appui de tous les partis.
[Français]
Dans cette optique, le projet de loi S-5 vise à trouver un juste équilibre entre, d'une part, la protection des jeunes contre l’incitation à la dépendance à la nicotine et à l'usage du tabac et, d'autre part, l'accès légal des fumeurs adultes à des produits de vapotage comme solution de rechange moins nocive au tabac.
[Traduction]
À ce sujet, honorables sénateurs, j’aimerais réagir à certaines observations que le comité a reçues à ce jour.
Au cours des dernières réunions, je sais que vous avez entendu divers témoins vous parler de produits de vapotage. À ma connaissance, certains des témoins ont critiqué le projet de loi S-5 parce qu’ils veulent promouvoir les produits de vapotage comme étant des produits à risque réduit.
Le projet de loi S-5 n’interdit pas la publication de travaux scientifiques légitimes sur ces produits. Il n’interdit pas non plus aux gens d’expliquer les risques relatifs des produits de vapotage à condition qu’ils ne fassent pas la promotion d’une marque ou d’un produit particulier. Les restrictions en matière de promotion découlant du projet de loi S-5 s’appliquent à la publicité commerciale dirigée vers les consommateurs.
Néanmoins, Santé Canada a entendu ces préoccupations, et le ministère est ouvert à discuter de la façon dont les risques relatifs des produits de vapotage pourraient être communiqués aux consommateurs au moyen d’une promotion commerciale afin d’en éviter les effets néfastes sur la santé publique.
Toutefois, soyons clairs, honorables sénateurs. Les données probantes dont nous disposons aujourd’hui indiquent que même s’il est vrai que les produits de vapotage sont moins néfastes que les cigarettes, ils n’en demeurent pas moins dangereux. Ces produits peuvent être néfastes pour la santé des Canadiens et cela devrait nous préoccuper tous. C’est pour cette raison qu’en vertu du projet de loi S-5, les produits de vapotage ne pourraient être légalement vendus qu’aux adultes de plus de 18 ans et qu’ils ne pourraient pas faire l’objet d’une mise en marché qui valoriserait auprès des jeunes la dépendance à la nicotine et aux produits du tabac.
Les études démontrent que l’utilisation des produits de vapotage contenant de la nicotine est particulièrement néfaste pour les jeunes. Elle peut se traduire par une incidence accrue de dépendance à la nicotine et de conséquences néfastes pour le développement du cerveau. Malheureusement, les jeunes ne reconnaissent peut-être pas pleinement les répercussions de leur choix sur le reste de leur vie.
En outre, la mise en marché de ces produits partout dans le monde comprend une vaste gamme de saveurs comme les produits aromatisés au bonbon ou au chocolat, ce qui pourrait les rendre particulièrement attrayants aux jeunes.
Nous avons vu des campagnes de mise en marché y compris l’emballage et la conception de produits qui faisaient appel à des personnages de bande dessinée par exemple. Ces produits semblent être précisément conçus pour attirer nos citoyens les plus vulnérables, c’est-à-dire nos jeunes. C’est une pratique inacceptable qui ne sera plus permise une fois le projet de loi S-5 adopté.
[Français]
En adoptant cette loi, le Canada suivrait la soixantaine de pays qui se sont dotés d'une réglementation particulière à l'égard des produits de vapotage. Les approches des autres pays varient d'une réglementation très limitée à des interdictions complètes.
[Traduction]
Par exemple, aux États-Unis, la Food and Drug Administration a récemment mis au point son approche qui est de traiter les produits de vapotage comme des produits du tabac tandis que le Royal College of Physicians and Surgeons du Royaume-Uni a recommandé que les produits de vapotage soient présentés aux fumeurs comme étant une solution de rechange à la cigarette.
En dépit de ces différences, de nombreux pays comme ceux de l’Union européenne et les États-Unis ont les mêmes objectifs que le gouvernement canadien pour ce qui est de protéger les jeunes contre la dépendance à la nicotine tout en permettant aux adultes d’accéder aux produits de vapotage.
Autre volet important: le projet de loi S-5 vient appuyer le gouvernement dans la mise en œuvre de règles imposant un emballage neutre des produits de vapotage. Des études indépendantes menées dans divers pays ont démontré que les exigences concernant la banalisation des emballages, y compris la suppression de logos, de textures et d’images de marque, rendent les paquets de produits du tabac et leur contenu moins attrayants, surtout pour les jeunes.
L’emballage des produits du tabac est l’une des seules méthodes qui restent à l’industrie du tabac pour faire la promotion de ses produits. Je pense que nous pouvons tous être d’accord pour dire que les compagnies de tabac ne devraient pas être en mesure de se servir de l’emballage pour rendre attrayant un produit qui a des répercussions dévastatrices, indéniables et bien documentées sur la santé.
[Français]
Le 31 mai 2016, la Journée mondiale sans tabac, mon ministère a lancé des consultations publiques sur la mise en œuvre de mesures visant la banalisation des emballages des produits du tabac.
[Traduction]
Les Canadiens ont eu 90 jours pour faire des commentaires sur le document de consultation détaillé. Santé Canada a reçu un nombre impressionnant de réponses, 58 000 pour être précise, et la très grande majorité des répondants étaient pour l’emballage neutre des produits du tabac. Ces observations serviront à la rédaction d’un projet de règlement qui fera aussi l’objet d’une consultation publique.
En conclusion, honorables sénateurs, j’aimerais signaler de nouveau que le projet de loi S-5 est une mesure législative équilibrée qui vise à protéger les jeunes de l’incitation à la dépendance à la nicotine et au tabagisme tout en permettant aux adultes d’avoir légalement accès aux produits de vapotage comme solution de rechange moins néfaste que l’usage du tabac, et en appuyant les efforts du gouvernement pour la banalisation de l’emballage des produits du tabac.
[Français]
Je vous remercie encore une fois de m'avoir donné l'occasion de vous parler du projet de loi S-5. C'est avec plaisir que mes fonctionnaires et moi répondrons à vos questions.
[Traduction]
Le président: Je vous remercie beaucoup, madame la ministre. J’aimerais maintenant présenter les collègues qui vous accompagnent à la table.
À votre gauche immédiate se trouve Anne-Marie LeBel, avocate, Services juridiques de Santé Canada; à votre droite immédiate se trouve Hilary Geller, sous-ministre adjointe, Direction générale de la santé environnementale et de la sécurité des consommateurs; et à sa droite se trouve Mme Suzy McDonald, directrice générale, Direction de la lutte au tabagisme. Nous remercions ces trois témoins d’être des nôtres pour répondre aussi à nos questions.
Je rappelle à mes collègues qu’ils peuvent poser une question par tour.
[Français]
La sénatrice Petitclerc: Merci beaucoup d’être ici avec nous aujourd’hui, madame la ministre.
[Traduction]
Je vais commencer par poser une question sur les arômes, parce que nous en avons beaucoup entendu parler. Je sais que c’est préoccupant non seulement pour l’Association canadienne de la vape, mais également pour les particuliers qui étaient très attachés aux arômes.
Pourquoi est-ce si important? Dans quelle mesure êtes-vous persuadée que cela peut protéger efficacement nos jeunes?
Mme Philpott: Permettez-moi de vous remercier, sénatrice, du formidable leadership dont vous avez fait preuve en déposant cette mesure législative et des efforts vigoureux que vous déployez pour la protection de la santé des Canadiens. Je souligne l’énorme travail que vous avez accompli à cet égard.
Pour ce qui touche les arômes, il y a eu des éclaircissements dans vos discussions entourant les détails du projet de loi et la volonté de prendre des règlements connexes.
On ne cherche pas à éliminer la possibilité de fabriquer divers aromatisants chimiques. En fait, à ma connaissance, les arômes pouvant être utilisés pour les produits de vapotage sont presque illimités; nous cherchons plutôt à limiter la production de certains arômes qui pourraient être particulièrement attirants pour les jeunes. Vous constaterez comme vous le savez très bien que le thème récurrent du projet de loi vise à protéger les jeunes.
Une saveur particulière pourrait être perçue comme étant utile pour ceux qui cherchent à se libérer des produits du tabac et qui voudraient utiliser un produit de vapotage ayant bon goût. Mais ce que nous ne voulons pas voir, ce sont des produits qui pourraient goûter la gomme à mâcher par exemple et qui amèneraient des enfants ou des jeunes à estimer que c’est un produit qu’ils pourraient particulièrement aimer. Nous cherchons à limiter tout ce qui pourrait inciter ou encourager un jeune à consommer un produit qui lui semble attirant en raison de l’arôme ou du nom qu’il porte.
La sénatrice Seidman: Je vous remercie, madame la ministre, d’être ici aujourd’hui pour discuter de ce qui est manifestement une mesure législative importante.
Au début de votre exposé, vous avez soulevé une question que j’aimerais explorer davantage, si vous me le permettez, en citant directement ce qu’a dit M. Britton, directeur du Centre d’études sur le tabac et l’alcool et professeur en épidémiologie à l’Université de Nottingham quand il a comparu devant nous au début de la semaine. Voici ce qu’il a dit:
La simple raison pour laquelle j’ai demandé à témoigner aujourd’hui concernant le projet de loi canadien est la disposition qui touche aux comparaisons avec la sécurité du tabagisme. Je crois qu’il est absolument essentiel que les professionnels de la santé puissent dire ceci aux fumeurs: « Nous ne connaissons pas les risques à long terme de ces produits. Il serait de loin préférable que vous cessiez de fumer et de consommer de la nicotine pour toujours. Cependant, si vous en êtes incapables, il va de soi que vous devriez opter pour un produit moins nocif. » À mon avis, il n’y a aucun doute que les cigarettes électroniques sont moins dangereuses que les cigarettes ordinaires.
Puis, M. Hammond, professeur à l’Université de Waterloo, a fermement appuyé la position de M. Britton. J’aimerais nuancer un peu ce qu’a dit M. Britton, parce qu’il a reconnu ce qui suit, en guise d’ajout à ce qu’il nous avait proposé.
… Je crois donc que bien que nous préférerions tous que ces produits répondent aux normes médicinales afin de garantir un risque minimal pour les utilisateurs, il n’en demeure pas moins que la réglementation des médicaments est un processus trop lent et complexe. Des gens meurent à cause d’un manque de produits pendant que nous attendons l’approbation médicinale.
En tout cas, le Royaume-Uni a fait un compromis. Il a interdit toute allégation qui donne l’impression que le produit est un médicament, mais il permet aux entreprises de déclarer que le produit est probablement beaucoup moins nocif que le tabagisme et que les fumeurs devraient donc opter pour celui-ci.
Je suis désolée, c’était une longue citation, mais je crois qu’elle était importante.
De toute évidence, ce témoignage s’axe sur la réduction des torts et la comparaison des risques, notamment les risques relatifs. Ce projet de loi empêcherait-il des personnes comme un médecin de recommander un produit quelconque dans l’optique du continuum des risques?
Mme Philpott: Vous avez en fait soulevé deux ou trois questions différentes, et j’essaierai de répondre à chacune.
En ce qui concerne la capacité d’un professionnel de soins de santé, par exemple, de promouvoir un produit ou groupe de produits dans le cadre de sa relation avec un patient, rien dans ce projet de loi ne l’en empêche. J’espère que je l’ai bien clarifié dans mon exposé.
L’idée est de limiter la promotion d’un produit en particulier par une entreprise en particulier d’une façon qui ferait augmenter la vente du produit. Comme je l’ai dit, un médecin et son patient pourraient certainement avoir un entretien au cours duquel le médecin dirait à son patient que s’il n’utilise pas déjà un produit de vapotage ou un produit de tabac, il ne recommanderait pas qu’il commence; par contre, si le patient est déjà un fumeur, alors, il peut certainement recommander les produits de vapotage comme solution moins nocive que le tabac.
Les professionnels de la santé devraient bel et bien pouvoir avoir ce genre d’entretien avec leurs patients, et d’autres intervenants devraient également pouvoir en parler dans le contexte de la vente de produits. Il pourrait y avoir un entretien en général sur le fait que ce genre de produits est moins nocif que les produits de tabac.
Je vais traiter de quelques autres questions. J’espère que je me suis bien expliquée. J’espère également que mes fonctionnaires me donneront un coup de coude si je me suis mal exprimée, mais je crois que ce n’est pas le cas.
Vous avez aussi soulevé les risques pour les utilisateurs. Il faut souligner qu’il existe bel et bien des risques liés à ce genre de produits, par exemple, l’explosion des piles et la possibilité que des enfants puissent ouvrir un emballage qui contient de la nicotine. Des enfants ont été empoisonnés à la nicotine à cause de produits de vapotage. Nous avons donc la possibilité de prévenir les utilisateurs des risques qui sont associés à l’équipement comme tel.
Vous avez également parlé de la question des allégations relatives aux propriétés thérapeutiques. Je crois que j’ai répondu à cette question en disant que l’utilisation de ces produits peut être encouragée dans un contexte clinique.
En ce qui concerne les allégations relatives aux propriétés thérapeutiques, elles ont aussi déjà fait l’objet de discussion à ce comité. Pour qu’on puisse affirmer qu’un produit vous aidera à cesser de fumer et vous protégera contre le cancer, entre autres, ce produit doit être assujetti à la Loi sur les aliments et les drogues.
Le sénateur Eggleton: Je veux maintenant approfondir la question des arômes des produits de vapotage, car selon les témoignages que nous avons entendus jusqu’ici dans le cadre de nos audiences, c’est moins nocif pour les gens qui essaient de renoncer à la cigarette. Cela ne veut pas dire que ces produits sont tout à fait sans danger. En fait, nous ne connaissons pas encore les effets à long terme de ces produits.
Mais en ce qui concerne les arômes: Vous avez mentionné des arômes en particulier qui pourraient être attrayants pour les jeunes. Vous avez mentionné comme arômes le bonbon, le chocolat et la gomme balloune, ce que je comprends parfaitement. Or, nous ne voulons pas attirer les enfants vers ces produits. Mais ces mêmes arômes sont également attrayants pour les adultes qui essaient de cesser de fumer. Le chocolat par exemple est un arôme qui est attrayant pour tous.
Vous comptez prendre des règlements pour plusieurs choses. Tout ne se trouve pas dans le projet de loi. Une grande partie des mesures sera mise en œuvre ultérieurement. Je ne sais pas trop comment cela va fonctionner.
Je comprends, d’après ce que vous avez dit dans votre réponse à la sénatrice Petitclerc, que vous allez réglementer la publicité de façon à interdire la mention d’arômes comme le chocolat, la gomme balloune ou le bonbon dans les annonces, mais que vous n’allez pas en fait interdire d’offrir ce genre d’arômes aux adultes qui souhaitent s’en prévaloir pour les aider à cesser de fumer. Est-ce exact?
Mme Philpott: Oui, c’est exact. Il est vrai que nous allons procéder par voie de réglementation, et comme pour n’importe quel règlement, nous allons mener des consultations.
Mes fonctionnaires pourront peut-être compléter mon explication, mais d’après ce que j’ai compris, en raison de la structure chimique des arômes, il serait impossible d’énumérer ou de préciser un arôme particulier. Un même produit peut avoir divers arômes, et il est impossible d’interdire la production d’un produit savoureux et qui aiderait une personne qui essaie de cesser de fumer à passer à un produit moins nocif. Une fois de plus, nous tentons avant tout de protéger les jeunes en évitant de donner des noms à des arômes qui feraient croire aux jeunes qu’un produit est savoureux et attrayant.
Le sénateur Eggleton: Le chocolat peut avoir les deux effets.
Hilary Geller, sous-ministre adjointe, Direction générale de la santé environnementale et de la sécurité des consommateurs: Comme l’a dit la ministre, nous avons adopté une approche ancrée dans l’atteinte d’un juste équilibre: d’une part, l’atteinte de l’objectif d’aider les fumeurs à cesser de fumer, et d’autre part, protéger les jeunes contre une dépendance à la nicotine de toute une vie. C’est une question d’équilibre.
En fait, c’est parce que nous voulons aider les fumeurs à cesser de fumer que nous n’interdisons pas des arômes comme le menthol dans les produits de vapotage.
Le sénateur Eggleton: Le menthol n’est pas interdit.
Mme Geller: Non, mais en même temps, la ministre est en train de faire interdire le menthol dans les produits de tabac. C’est parce que nous reconnaissons que le menthol peut aider les fumeurs à cesser de fumer.
Sénateur, vous avez demandé comment nous déciderons ce qui peut être ajouté à l’avenir. La réponse est simple: selon les données qui seront accumulées au fil du temps. Nous avons reçu du financement pour mettre en œuvre ce projet de loi. Nous assortirons cette mise en œuvre d’un programme de contrôle et de renseignement sur le marché. Si, au fil du temps, nous constatons que certains arômes sont particulièrement attrayants pour les enfants, nous pourrons recourir à la réglementation et les ajouter à la liste des arômes proscrits. Voilà qui répond à votre question.
Le sénateur Eggleton: Vous dites « ajouter à la liste »; parlez-vous en termes de marketing ou de promotion?
Mme Geller: Je parle en termes d’interdiction de certains arômes en dehors de ceux qui touchent à la confiserie. Ces saveurs seront interdites du tout au tout.
Le sénateur Eggleton: J’aime la première réponse de la ministre.
Le président: Pourriez-vous répéter votre observation sur le menthol, s’il vous plaît?
Mme Geller: Nous ne proposons pas d’interdire le menthol comme arôme dans les produits de vapotage.
Le président: Je suis désolé, j’ai mal entendu.
Mme Geller: Nous ne proposons pas d’interdire la promotion du menthol dans les produits de vapotage, bien qu’il sera interdit pour les produits de tabac.
Le président: C’est bien ce que je croyais que la ministre avait dit, mais vous ne l’avez pas exprimé assez clairement. Je voulais que ce soit tout à fait clair. Le menthol est interdit dans les produits de tabac, mais pas dans les produits de vapotage.
Mme Geller: C’est exact.
Le président: Merci beaucoup.
La sénatrice Frum: À cet égard, demain, madame la ministre, vous aurez une journée particulièrement chargée, puisque vous déposez votre projet de loi sur la marijuana. J’ai remarqué qu’un des arômes interdits pour les produits de vapotage est celui du cannabis.
Je voulais vous demander ce qui suit: du point de vue d’une stratégie de réduction des torts, pourquoi accordez-vous un traitement différent au cannabis et au tabac? Le vapotage est considéré comme une stratégie de réduction des torts pour aider les gens à s’émanciper du tabac. Maintenant, il est légal de fumer du cannabis. J’estime qu’on fait maintenant la promotion du cannabis au Canada en vertu de cette nouvelle loi, mais en revanche, l’arôme de cannabis dans les produits de vapotage est interdit, alors qu’il s’agit d’une activité bien moins dangereuse que l’inhalation de feuilles de marijuana brûlées.
Il semble y avoir une incohérence entre le traitement des feuilles de tabac et des feuilles de marijuana. Je voudrais que vous me l’expliquiez.
Mme Philpott: Vous avez répondu en partie à votre propre question en reconnaissant, dans le contexte de la légalisation du cannabis, que le tabac et l’alcool, bien que des produits licites, ne sont pas nécessairement libres de tout risque. Le cannabis est un produit que nous sommes en train de légaliser, mais d’encadrer également, afin d’en restreindre l’accès à des adultes bien informés. Nous savons qu’il s’agit d’un produit qui présente son lot de risques, et nous ne voulons pas encourager qui que ce soit à commencer à fumer le cannabis.
C’est la même décision que pour n’importe quel autre produit ou arôme de vapotage. Nous ne voulons pas faire la promotion de l’arôme de cannabis au cas où une jeune personne décide de passer d’un produit à arôme de cannabis au cannabis même.
La sénatrice Frum: Par contre, l’inverse peut également se produire: un jeune passe du cannabis même au produit de vapotage à arôme de cannabis.
Mme Philpott: C’est une question intéressante. Comme vous le dites, c’est quelque chose que nous devrons peut-être envisager dans le cadre de notre stratégie de réduction des méfaits. Pour l’instant, le projet de loi que nous déposerons fera en sorte que le cannabis deviendra un produit légal. Cependant, nous reconnaissons que ce produit doit être mieux compris et qu’il comporte des risques pour la santé publique. Si à l’avenir nous sentions que les risques relatifs liés au vapotage et à l’utilisation d’un produit à arôme de cannabis offraient des avantages pour la santé publique et permettaient de réduire la dépendance au cannabis, nous pourrions changer la réglementation pour permettre les produits à arôme de cannabis. Nous n’aurions pas besoin de changer la loi.
À l’heure actuelle, nous sentions qu’il valait mieux interdire cet arôme.
Le président: Le vapotage peut aider à réduire le tabagisme parce qu’il y a de la nicotine dans les produits de vapotage. C’est à la nicotine que les fumeurs ont une dépendance. Ils n’ont pas une dépendance à l’arôme de la fumée ou aux autres produits chimiques, mais bien à la nicotine.
Dans le cadre de la marijuana, il faudrait sans doute ajouter quelque chose d’autre que l’arôme pour permettre à ceux qui ont une dépendance de plutôt utiliser un produit de vapotage. Cependant, l’idée est intéressante.
La sénatrice Stewart-Olsen: Merci d’être avec nous pour nous expliquer ce projet de loi.
L’Organisation mondiale de la santé a encore plusieurs interrogations sur le vapotage. Pouvez-vous nous expliquer comment votre gouvernement compte sensibiliser le public sur les méfaits possibles des produits de vapotage?
En d’autres mots, vous n’allez pas dire aux gens de délaisser le tabac au profit des produits de vapotage sans leur expliquer les risques potentiels n’est-ce pas?
Mme Philpott: Comme la sous-ministre adjointe vous l’a expliqué plus tôt, ce projet de loi sera appuyé par les mécanismes appropriés au sein de Santé Canada; nous serons donc en mesure d’effectuer un suivi, d’exercer une surveillance et d’évaluer en continu notre capacité d’informer le public sur les risques relatifs.
Avant ce projet de loi, il n’y avait pas de mesures législatives fédérales portant sur l’emballage neutre et le vapotage. Il s’agit pourtant d’un sujet important. D’ailleurs, les provinces et territoires m’avaient fait remarquer cette lacune importante quand nous travaillions ensemble. Si je ne me trompe pas, huit provinces ont maintenant des mesures législatives sur le vapotage.
Avec ce projet de loi, nous nous joignons aux 60 autres pays qui ont déjà légiféré en la matière. Vous avez raison de dire qu’il y a un fort intérêt pour ce sujet. À l’Organisation mondiale de la santé et à presque toutes les réunions des ministres de la Santé auxquelles j’assiste depuis mon entrée en fonction, il est question de la lutte contre le tabagisme, des cigarettes électroniques et du vapotage. Nous cherchons tous à savoir ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas dans les autres pays.
Comme Hilary l’a dit, ce projet de loi est équilibré puisqu’il reconnaît les risques potentiels associés au vapotage tout en garantissant que les produits de vapotage demeurent disponibles comme outil de réduction des méfaits.
Nous croyons que ce projet de loi nous permet de mettre en place la réglementation de base nécessaire. Nous suivrons de très près la sensibilisation du public, tant au ministère de la Santé qu’à l’Agence de santé publique du Canada. L’agence nous aidera à transmettre notre message aux Canadiens.
J’aimerais ajouter une dernière chose. Nous disposons de près de 7 millions de dollars pour améliorer les connaissances du public sur les risques associés aux produits de vapotage. Je n’ai pas le montant exact sous la main.
[Français]
Le sénateur Cormier: Ma question concerne les avertissements relatifs aux conséquences néfastes des produits pour la santé. Dans le mémoire qu’elle a présenté au comité, la Société canadienne du cancer a recommandé que les avertissements relatifs à la santé soient obligatoires, non seulement sur les emballages, mais aussi sur les cigarettes et les produits du tabac eux-mêmes, de même que sur le matériel pour pipes à eau. Votre ministère a-t-il envisagé cette option? Sinon, pourquoi ne l’a-t-il pas fait?
Mme Philpott: Merci de cette question. Elle concerne surtout les produits du tabac?
Le sénateur Cormier: Oui.
Mme Philpott: Il y aura encore des avis sur les emballages. Pour ce qui est des produits eux-mêmes, ma collègue pourra vous éclairer.
Suzy McDonald, directrice générale, Direction de la lutte au tabagisme, Santé Canada: Vous voulez savoir si des mises en garde seront apposées aux cigarettes elles-mêmes?
Le sénateur Cormier: Sur les cigarettes et aussi sur les pipes à eau.
Mme McDonald: La ministre a lancé, au mois de février, une consultation sur le renouvellement de notre stratégie fédérale. Cette consultation se terminera demain, et c'est justement le genre de question qui a été posée. Je sais que la Société canadienne du cancer l'a mentionné au comité. C'est certainement un aspect qu'on pourra examiner.
[Traduction]
Le sénateur Dean: Tout d’abord, j’aimerais vous féliciter pour ce projet de loi et pour tout ce que vous faites.
Madame la ministre, selon moi il ne faut pas perdre de vue que nous avons affaire à un produit très nocif, mortel même, et c’est pourquoi vous avez raison de proposer un équilibre entre une réglementation stricte et une stratégie de réduction des méfaits. Je crois que c’est la bonne combinaison.
Nous devons aborder la question sous l’angle de la réglementation et sous l’angle de la politique publique. Nous avons également des intérêts commerciaux en croissance rapide et des technologies perturbatrices, si je puis m’exprimer ainsi. Nous savons que les technologies perturbatrices sont novatrices et qu’elles sont également imprévisibles.
Nous savons également que lorsque nous mettons en place une réglementation, certains tenteront de s’y soustraire volontairement ou involontairement. Croyez-vous que le régime réglementaire que vous êtes en train de mettre en place sera assez souple, adapté et prévisible pour englober tout ce que nous pouvons envisager à l’heure actuelle?
Mme Philpott: Je vous remercie de vos félicitations, mais je pense qu’il faut également féliciter le Sénat et particulièrement votre collègue qui a déposé ce projet de loi au Sénat. Je tiens également à souligner votre commentaire voulant qu’il s’agisse d’un produit mortel et qu’il soit important que tous les parlementaires étudient cette question très sérieusement.
J’ai eu l’occasion de parler aux ministres de la Santé d’autres pays qui ont adopté des lois semblables, dont l’Australie et le Royaume-Uni, et ils m’ont affirmé qu’il y avait un vaste consensus au sein de leurs institutions parlementaires sur l’importance de légiférer, surtout en ce qui a trait à l’emballage neutre, et de protéger la santé publique. Je vous remercie d’en avoir parlé.
Maintenant, en ce qui a trait aux technologies perturbatrices et aux possibilités qu’elles entraînent, je pense que vous avez tout à fait raison de souligner l’importance de ce sujet. Je ne crois pas qu’il soit possible d’envisager toutes les possibilités qui pourraient se présenter dans un avenir prévisible. Évidemment, nous préférerions ne pas avoir à modifier la loi dans les prochaines années en raison de l’arrivée de nouvelles technologies.
Je pense que le ministère a adopté une approche très réfléchie en présentant un projet de loi qui prévoit des pouvoirs réglementaires suffisants afin de gérer la question des arômes et d’autres problèmes qui pourraient survenir. Nous menons présentement des consultations sur notre nouvelle stratégie de lutte contre le tabagisme que nous espérons pouvoir présenter au printemps prochain. Nous essayons de nous donner une marge de manœuvre suffisante pour présenter des mesures réglementaires dans cette nouvelle stratégie.
Mme Geller: À titre de sous-ministre adjointe responsable de la direction générale qui devra mettre en œuvre le projet de loi, je pense que ce dernier est moderne et à jour. Il reprend certains aspects très importants d’autres lois modernes de Santé Canada comme la Loi canadienne sur la sécurité des produits de consommation, qui existe depuis cinq ou six ans et qui se révèle un outil très efficace.
De plus, nous avons reçu plusieurs millions de dollars pour mettre en œuvre le projet de loi, ce qui est un facteur essentiel de succès. La loi, une fois adoptée, sera mise en œuvre par un groupe très expérimenté de responsables de la réglementation qui gère au quotidien des classes de produits semblables exigeant la même combinaison d’éducation, de sensibilisation du public, de conformité de l’industrie, d’application de la loi et d’inspection. Surtout, il faut une attitude tournée vers l’avenir.
Le président: Madame la ministre, plus tôt vous avez donné des exemples de ce qui sera permis sans être encouragé, et de ce qui sera interdit en matière de promotion ou de publicité de produits de vapotage. Si je vous ai bien comprise, vous avez affirmé que les fournisseurs du secteur pourraient utiliser et afficher ce qui sera fondé sur des « recherches scientifiques légitimes ». Vous n’avez pas utilisé le terme « afficher », mais j’aimerais savoir ce que vous vouliez dire lorsque vous avez affirmé que ce serait possible.
Peut-être que mon interprétation de ce que cela veut dire est différente de celle des autres. Pourriez-vous nous préciser ce que vous vouliez dire? La question des limites imposées au débat public dans le cadre de ce projet de loi est très importante.
Mme Philpott: Je vais répondre en premier et ensuite laisser la chance aux fonctionnaires de s’exprimer. Je sais que vous avez grandement parlé de cette question. Il faut revenir à l’esprit de ce projet de loi, c’est-à-dire de protéger les jeunes et donc de ne pas avoir de promotions destinées au grand public à des fins commerciales.
Nous reconnaissons par contre qu’il peut y avoir des occasions. Je veux revenir à ce que j’ai dit dans mon allocution sur les limites ou les interdictions imposées au discours sur les avantages que présente un mécanisme moins nocif de consommation excessive de nicotine, grâce à un produit de vapotage. Une étude scientifique faisant la comparaison des effets à long terme des cigarettes électroniques par rapport aux cigarettes traditionnelles pourrait en arriver à la conclusion que les produits de vapotage sont moins nocifs que les produits de tabac traditionnels.
Mme McDonald: Je pense qu’il est important de prendre un peu de recul. On lit hors de son contexte l’article 30.43, selon lequel « Il est interdit de faire la promotion d’un produit de vapotage… » et qui explique ensuite « les avantages pour la santé ». Il faut plutôt le lire dans le contexte de la partie de la loi qui offre une exemption « aux œuvres littéraires, dramatiques, musicales, cinématographiques, artistiques, scientifiques ou éducatives », puis plus loin, « au compte rendu, commentaire et opinion portant sur un produit de vapotage ».
Lorsque l’on considère ces deux éléments ensemble, il est clair que notre objectif est d’empêcher la promotion d’un produit à des fins commerciales à l’aide d’allégations relatives à la santé.
Le projet de loi n’impose aucune limite à la façon dont les gens parlent des produits de vapotage. Comme la ministre l’a expliqué, un magasin de produits de vapotage peut offrir de l’information sur ces produits de différente façon, y compris grâce à des revues professionnelles. Ces magasins peuvent parler de la catégorie de produits, mais ne peuvent pas le faire de façon promotionnelle ou dans l’objectif de vendre leurs produits.
Par exemple, on ne pourrait pas afficher une enseigne déclarant que selon Public Health U.K., c’est 95 p. 100 plus sûr, mais on pourrait faire référence au rapport de Public Health U.K. et à ses conclusions, qu’elles soient positives ou négatives, tant qu’on ne sélectionne pas certains renseignements plutôt que d’autres pour dire que c’est 95 p. 100 plus sûr, et cetera. Il s’agit de comprendre l’ensemble de la littérature et de s’assurer que le grand public en est bien informé.
On laisse beaucoup de liberté aux gens pour parler de produits de vapotage. On laisse beaucoup de liberté aux gens qui souhaitent exprimer leur opinion et publier des renseignements scientifiques, mais ils ne peuvent exprimer publiquement une opinion s’ils sont payés pour le faire.
Par exemple, sénateur, si je vous paie pour rédiger un blogue sur mon produit et en dire du bien, cela relève de la publicité commerciale.
Le président: Je comprends bien. L’expression précise qui a été employée est « un travail scientifique légitime. »
Si je lis entre les lignes et à la lumière de votre réponse, je suis porté à croire qu’un article publié dans une revue scientifique de référence pourrait être mis à la disposition des clients d’un magasin d’articles de vapotage, mais ne saurait être utilisé à des fins publicitaires officielles pour le vapotage. Est-ce exact?
Mme McDonald: C’est exact.
Le président: Si c’est exact, c’est l’expression que j’emploierai dorénavant.
Mme Philpott: Parfait.
La sénatrice Hartling: Merci de votre présence. C’est un sujet intéressant. C’est un peu une cible mouvante. On en apprend toujours plus.
L’un des témoins de l’Association pour les droits des non-fumeurs a recommandé de faire passer à 21 ans l’âge légal pour fumer. Je sais que vous avez fait de la recherche sur cette question. J’aimerais savoir ce que vous en pensez, et si cela s’applique à l’usage du tabac, qu’en est-il pour le vapotage? Que pensez-vous de cela?
Mme Philpott: Cette question porte sur ce que nous faisons en ce moment dans le cadre de la stratégie antitabac. Nous sommes fiers des progrès que nous avons réalisés et de la baisse du taux de tabagisme, qui est maintenant de 13 p. 100.
Nous voulions déposer une loi sur l’emballage neutre des produits du tabac et réfléchir à ce que nous pouvions faire de plus. Le ministère a produit une liste assez impressionnante d’autres mesures que nous pourrions prendre et qui sont à l’étude dans d’autres pays, comme les avertissements sur les cigarettes elles-mêmes, dont nous avons parlé plus tôt. L’une des mesures proposées est l’idée de faire passer à 21 ans l’âge légal de consommation du tabac.
Je n’ai pas encore pris connaissance des résultats de l’analyse de la rétroaction reçus dans le cadre de notre consultation sur la stratégie antitabac, mais à ma connaissance, il n’y a rien qui nous empêcherait de le faire à l’avenir si l’on décidait d’augmenter l’âge légal de consommation du tabac. Cela pourrait être fait. Est-ce exact?
Mme McDonald: Oui.
Mme Philpott: Je tiens à m’assurer de l’exactitude de mes propos.
Mme McDonald: Pour ce faire, il nous faudrait rouvrir la loi.
Mme Philpott: Pour ce faire, il nous faudrait rouvrir la loi. Pour le moment, nous sommes d’avis que nous n’avons pas suffisamment de renseignements.
Lorsqu’on traite de substances en général, il faut faire extrêmement attention à prendre des décisions qui n’auront pas de conséquences négatives non souhaitées. C’est quelque chose qu’il nous faudrait étudier très sérieusement, mais c’est en discussion.
La sénatrice Petitclerc: Je souhaite vous poser une question sur l’une des difficultés que j’entrevois pour vous, avec ce projet de loi. Au cours des derniers mois, tous ceux qui se sont penchés sur le projet de loi ont pu voir la rapidité à laquelle la science et la recherche évoluent, sans que la méthodologie soit toujours bonne. J’aimerais que vous me rassuriez sur le processus que vous avez employé dans le cadre de ce projet de loi afin de vous assurer de tenir compte de toutes les données scientifiques émergentes, que cela porte sur les risques ou les avantages possibles du vapotage.
D’une façon ou d’une autre, il s’agit de la santé des Canadiens et nous voulons nous assurer que cela avance rapidement tout en demeurant au fait des nouveaux résultats de recherche et des nouvelles données scientifiques disponibles.
Pourriez-vous nous parler un peu du processus? Comment y parviendrez-vous? Qu’en pensez-vous?
Mme Philpott: C’est une bonne question. Cela revient à ce à quoi un de vos honorables collègues a fait référence plus tôt, à savoir, l’évolution rapide des technologies disponibles, du nombre de substances offertes et des initiatives de l’industrie visant à adapter ses produits au fil du temps.
La bonne nouvelle, c’est que le portefeuille de la santé comporte un large éventail d’outils pour surveiller tout cela. Hilary pourrait vous parler de ce que fait Santé Canada, mais nous collaborons avec d’autres partenaires. Nous surveillons régulièrement l’utilisation de divers produits.
L’Enquête canadienne sur le tabac, l’alcool et les drogues est réalisée tous les deux ans. Certaines des nouvelles données auxquelles j’ai fait référence plus tôt étaient tirées de l’enquête la plus récente. Nous allons poursuivre dans cette voie. En outre, diverses organisations comme l’Institut canadien d’information sur la santé et les Instituts canadiens de recherche en santé étudient de façon continue la consommation de substances, et nous collaborons aussi avec l’Agence de santé publique du Canada pour en surveiller les effets.
Pouvez-vous expliquer en détail la façon dont Santé Canada fera le suivi des résultats?
Mme Geller: En bref, Santé Canada se considère comme un ministère scientifique et de réglementation au sens large. Il existe des exceptions comme notre Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits. Dans ce contexte, nous comptons un grand nombre de scientifiques chargés de faire de la recherche indépendante ou de faire le suivi de ce qui se passe afin d’en informer nos agents de réglementation.
Nous reconnaissons que c’est un domaine qui évolue rapidement et qui se distingue donc un peu de nos dossiers conventionnels. C’est la raison pour laquelle comme la ministre l’a indiqué, nous avons une entente avec les IRSC, les Instituts de recherche en santé du Canada. Nous avons déjà organisé une séance avec eux et certains experts internationaux. C’est quelque chose que nous allons faire de façon plus officielle et plus régulière. De cette façon, nous serons en mesure de nous assurer que nous demeurons au fait des données scientifiques les plus récentes.
La sénatrice Seidman: J’aimerais poursuivre sur le sujet de la surveillance, car il ne fait aucun doute que c’est un enjeu important. Lundi, nous avons discuté avec le Dr Hammond des dangers de la renormalisation du tabagisme et de la possibilité que cela soit une porte d’entrée pour les jeunes. C’est un sujet qu’on a banalisé, et très peu de gens en font grand cas, mais cela risque de banaliser de nouveau le tabagisme.
Nous avons parlé de l’importance du contrôle et de la surveillance des comportements. Je sais que ce projet de loi laisse beaucoup de place à la réglementation, et je me demande quels types de données vont être intégrées dans la réglementation à des fins de contrôle et de surveillance.
La question précise que je tiens à poser est la suivante: Santé Canada aura-t-il le pouvoir d’émettre rapidement des rappels portant sur des produits qui pourraient être considérés comme dangereux?
Mme Philpott: Je commencerai par répondre à la dernière partie de votre question. Il est indéniable que l’un des avantages de l’adoption de ce projet de loi est qu’il donne à Santé Canada un pouvoir de rappel s’il y a quelque indication que ce soit qu’un produit ou un de ses composants présentent un risque.
Plus tôt, Hilary a fait référence à la Loi canadienne sur la sécurité des produits de consommation qui s’est avérée une loi solide et extrêmement utile. Si vous suivez ce qui se passe à Santé Canada, nous procédons constamment à des rappels de certains produits. J’aurais donc recours au même type de pouvoirs afin de rappeler des produits dangereux, ce qui est une bonne nouvelle. C’est l’une des principales raisons pour lesquelles ce projet de loi est si important.
Pour ce qui est de la première partie de votre question, c’est-à-dire les plans du ministère, Mme McDonald pourra répondre.
Mme McDonald: Nous avons mis en place un système de contrôle scientifique plutôt robuste. Hilary a déjà parlé de notre travail avec les IRSC. De plus, comme l’a dit la ministre, nous avons l’Enquête canadienne sur le tabac, l’alcool et les drogues. Nous avons également un sondage semblable auprès des jeunes de la 7e à la 12e année, et au Québec, de la 1re à la 5e année du secondaire.
Nous avons également lancé un projet de sondage de l’opinion publique et de groupes de vapoteurs pour nous assurer de bien comprendre comment les gens considèrent ces produits, s’ils estiment que ces produits sont bénéfiques ou nocifs, comment les jeunes réagissent à ces produits, et s’ils sont attirés par ces produits. Nous pouvons continuer de recueillir ces données.
De plus, nous avons mené une analyse du marché très robuste pour mieux comprendre la composition actuelle du marché, à la fois dans le marché actuel et dans les magasins de produits de vapotage, qui actuellement ne sont pas couverts par nos enquêtes.
Je pense que vous parliez tout à l’heure de la réglementation concernant les rapports. Dans le domaine du tabac, nous recueillons déjà depuis plusieurs années des données sur le tabagisme en vertu du Règlement sur les rapports relatifs au tabac. En vertu de ce règlement, le secteur doit nous présenter des rapports sur les données de vente, les nouvelles recherches, la promotion des produits et d’autres types d’information. Nous utilisons cet ensemble robuste de données pour mieux comprendre la composition du marché et prendre de bonnes décisions politiques.
Un pouvoir réglementaire pourrait nous permettre de recueillir des données semblables pour le secteur du vapotage. Il faudrait suivre le processus réglementaire complet avant de mettre ce pouvoir en œuvre, y compris la publication dans la partie 1, puis dans la partie 2 de la Gazette du Canada, à des fins de consultation. Cependant, quoi qu’il arrive, il faudrait recueillir les mêmes données que pour le tabac afin de bien comprendre la configuration du marché et prendre des décisions bien informées.
Le sénateur Eggleton: Je voudrais cette fois vous poser une question sur le tabac. Un grand nombre d’intervenants devant ce comité ont parlé de la contrebande, qui ne semble pas vouloir ralentir. D’aucuns ont même dit que les dispositions d’emballage neutre contribueraient en fait à une augmentation de la contrebande, et j’aimerais savoir ce que vous en pensez. Je pense que nous pouvons tous être d’accord pour dire qu’il faut prendre des mesures plus musclées contre la production du tabac de contrebande.
L’une des solutions suggérées est de restreindre l’accès aux substances qui composent une cigarette, c’est-à-dire en restreignant l’accès aux fabricants autorisés. L’une de ces substances serait le boudin de filasse. Qu’en pensez-vous? Envisagez-vous cette possibilité?
Mme Philpott: Je vais répondre en soulevant plusieurs considérations qui ont probablement déjà été soulevées par d’autres. Nous savons que les produits de contrebande existent bel et bien au Canada. C’est un problème qu’il faut régler sans égard au reste de la situation. Or, c’est une situation à laquelle nous sommes déterminés à faire face.
Dans les pays où l’on a introduit l’emballage neutre, les données ne montrent aucune augmentation de la contrebande, y compris en Australie. Je tenais à l’affirmer très clairement.
Nous savons également que toutes les données, y compris des dizaines d’études très sérieuses, indiquent que les emballages neutres fonctionnent bel et bien en ce sens qu’ils rendent le produit bien moins attrayant. Nous devons nous assurer que tout cela est très clair.
Maintenant en ce qui concerne la contrebande, nous avons posé la question dans le cadre de notre consultation sur la stratégie de lutte contre le tabagisme. Nous attendons les réponses à cette consultation. En fait, vous avez demandé s’il serait efficace de restreindre l’accès aux ingrédients qui composent la cigarette. Nous estimons que c’est une idée prometteuse, et nous essayons de recueillir davantage d’information à ce sujet. Mais nous pensons que ce serait un outil probablement efficace.
Rien dans cette loi ne rend cette option plus ou moins nécessaire. C’est une option que nous examinerons quoi qu’il en soit.
Mme Geller: Il peut être intéressant de noter que notre sous-ministre a reçu un rapport du gouvernement de l’Australie dans lequel on décrit son expérience de l’emballage neutre.
Dans ce rapport, l’Australie affirme que selon son ministère de l’Immigration et de la Protection frontalière — l’agence australienne responsable des douanes —, rien n’indique que l’emballage neutre du tabac a eu des effets sur les marchés illicites de tabac depuis son introduction en 2012.
Nous allons continuer à prendre toutes les mesures possibles au Canada et à contrôler la situation, mais je voulais tout simplement vous le faire remarquer.
Le sénateur Eggleton: Avez-vous songé à la possibilité de contrôler l’accès au boudin de filasse?
Mme Philpott: C’est effectivement une option envisagée dans le cadre de la stratégie de lutte contre le tabagisme, qui devrait être lancée au mois de mars. Nous serons heureux de vous en parler.
Le sénateur Eggleton: Je vois que cela ne relève pas de ce projet de loi.
Mme Philpott: Effectivement, mais l’idée est intéressante néanmoins. J’attends encore les résultats de nos consultations à cet égard.
La sénatrice Stewart Olsen: J’aimerais une précision. Quand allons-nous voir cette réglementation, et quand la loi entrera-t-elle en vigueur?
En d’autres mots, verrons-nous la réglementation avant l’entrée en vigueur de la loi?
Mme Philpott: Il est difficile d’établir un calendrier, comme vous le savez. Nombre d’entre vous sont en politique depuis plus longtemps que moi, et donc vous savez que la chose est toujours imprévisible. De mon point de vue, le plus tôt sera le mieux.
Idéalement, nous espérons pouvoir faire passer ce projet de loi à l’autre endroit et le faire progresser dans les plus brefs délais. Ce serait après l’adoption du projet de loi.
Souhaitez-vous ajouter quoi que ce soit au sujet des échéanciers et des attentes?
Mme McDonald: Non.
La sénatrice Stewart Olsen: J’aimerais une précision. Les gens qui travaillent dans les magasins de produits de vapotage peuvent toujours vendre leurs produits en toute légalité avant la mise au point de la réglementation.
Mme Philpott: Pouvez-vous donner des précisions là-dessus?
Mme McDonald: Si j’ai bien compris, vous voulez savoir si les magasins de vapotage peuvent vendre leurs produits en l’absence d’un règlement.
La sénatrice Stewart Olsen: En toute légalité.
Mme McDonald: Une fois que le projet de loi aura la sanction royale, la plupart des produits contenant de la nicotine deviendront légaux et seront en vente libre au Canada. Certains des pouvoirs prendront effet immédiatement.
La ministre a mentionné la Loi canadienne sur la sécurité des produits de consommation, qui prévoit un droit de rappel et d’autres mécanismes pour intervenir en cas de problèmes. En fait, en règle générale, la réglementation vient après la loi.
Cela étant dit, soyons clairs. Nous estimons que certains aspects sont particulièrement importants, notamment l’idée des emballages à l’épreuve des enfants. Nous aurions le pouvoir d’intervenir immédiatement si des emballages ne sont pas à l’épreuve des enfants, et ce, dès l’obtention de la sanction royale.
Le président: Donc, ils peuvent continuer à vendre leurs produits dans la mesure où ils ne violent pas une loi existante concernant la protection de la société, par exemple les enfants dans ce cas-ci, ou encore par rapport à leur publicité.
Mme Philpott: C’est exact.
La sénatrice Frum: Je voudrais revenir à la question de la coexistence de cette loi avec celle que vous allez déposer concernant l’utilisation du cannabis.
Notre président et témoin a soulevé une bonne question. Ce n’est pas l’odeur ou la saveur du cannabis qui crée une dépendance, mais plutôt les THC. On ne trouve que neuf ingrédients sur votre liste d’ingrédients interdits, et le THC n’en est pas un.
Avez-vous pensé à la façon d’harmoniser cette liste d’ingrédients interdits avec la loi? Le THC est actuellement une substance interdite au Canada, mais cela changera bientôt. Par contre, le THC n’est pas une substance interdite dans les produits de vapotage.
Je ne comprends pas comment votre stratégie fonctionnera, et comment vous allez coordonner votre stratégie sur le vapotage et votre stratégie sur le cannabis.
Mme Philpott: Je ne suis pas sûre de bien comprendre votre question.
La sénatrice Frum: En clair, il y aura une liste d’ingrédients qu’on ne pourra pas inclure dans les produits de vapotage, par exemple, les vitamines, les acides aminés et la caféine. Par contre, les vendeurs de produits de vapotage pourront vendre des produits qui contiennent du THC. Ce sera légal.
Mme Philpott: Si je vous comprends bien, vous voulez savoir si l’on pourra utiliser des produits du cannabis dans un dispositif de vapotage.
La sénatrice Frum: C’est cela.
Mme Philpott: Cela relèverait des dispositions législatives visant le cannabis, si le cannabis était associé à un dispositif de vapotage.
La sénatrice Frum: Je voudrais savoir comment cela s’harmonisera avec le projet de loi S-5. Outre l’arôme de cannabis, aucun autre ingrédient de la marijuana ne sera interdit.
Mme Philpott: C’est exact, mais si l’on trouvait un ingrédient du cannabis dans un produit de vapotage, alors, cela tomberait sous la Loi sur le cannabis. Peut-être que vous pourrez répondre mieux que moi, Hilary.
Mme Geller: Il était illégal actuellement de mettre un produit du cannabis dans un produit de vapotage, car le cannabis est actuellement illégal. Si le cannabis devait être légalisé à l’avenir, alors la question serait la même que pour la saveur de la marijuana. Dans cette éventualité, il pourrait être possible d’ajouter le THC à la liste d’ingrédients interdits, avec les vitamines, la caféine et d’autres ingrédients. C’est effectivement une action que nous pourrions prendre à l’avenir pour harmoniser les deux lois, mais pour l’instant, ce n’est que pure spéculation.
Le président: C’était une excellente question, sénatrice.
La sénatrice Frum: Je ne faisais que suivre votre exemple.
Le président: Je pense que nous avions brièvement touché la question, mais je crois comprendre que la façon par laquelle les choses sont traitées aujourd’hui fait en sorte qu’il va falloir attendre la loi. Nous le mettrons donc dans cette catégorie.
Le sénateur Neufeld: J’aurais probablement dû poser cette question aux autres témoins qui ont déjà comparu, mais la ministre est ici maintenant et je l’en remercie. Nous avons beaucoup parlé du tabac de contrebande. Mais d’où vient ce tabac de contrebande? Ce tabac est-il fabriqué au Canada? Vient-il d’un autre pays? Est-il fabriqué aux États-Unis?
Mme Philpott: Le ministre de la Sécurité publique, qui est responsable de l’Agence des services frontaliers du Canada, pourrait vous donner une réponse plus complète sur la quantité et la nature des produits de contrebande saisis à la frontière.
Pouvez-vous répondre à cette question, madame McDonald? Quelle quantité de produits de contrebande franchit la frontière?
Le sénateur Neufeld: Vous ne savez pas exactement quelle quantité de contrebande entre au Canada, mais vous en parlez quand même.
Mme McDonald: Dans le cadre de la Stratégie fédérale de lutte contre le tabagisme, Santé Canada est responsable des divers aspects de la santé et de la sécurité des Canadiens. La Sécurité publique est un autre partenaire, tout comme la GRC, l’ARC et l’Agence des services frontaliers du Canada, dans le cadre de cette stratégie. Ils sont responsables du dossier du tabac de contrebande et ont davantage d’information sur ce phénomène.
Le Canada est dans une situation différente de celle d’autres pays où la contrefaçon est problématique. Le tabac de contrefaçon, c’est un produit qui ressemble à l’original, mais qui ne contient pas le produit original. Ces problèmes se posent surtout en Europe et ailleurs. Le problème de la contrefaçon ne se pose pas au Canada. Ici, notre problème, c’est la contrebande. Or, l’essentiel de ces produits de contrebande est fabriqué au Canada.
Le sénateur Neufeld: Merci.
La sénatrice Petitclerc: J’ai une question sur ce qui se passera lorsque le vapotage deviendra légal. Nous avons beaucoup parlé du vapotage comme stratégie de réduction des méfaits, mais le vapotage demeure un produit et il y aura un marché pour ce dernier. Il y aura des entreprises qui feront du profit grâce au vapotage.
Nous avons entendu les préoccupations de certains. Les associations de vapotage nous ont assurés que leur marché sera uniquement composé des fumeurs, mais il ne faut pas être naïf. Je veux m’assurer que le projet de loi S-5 comporte les mesures de sécurité nécessaires pour limiter les produits de vapotage aux fumeurs qui souhaitent arrêter de fumer.
Je vois votre réaction, mais je me demande si vous croyez réellement que le projet de loi S-5 a tout ce qu’il faut pour éviter que ce produit ne crée un nouveau marché.
Mme Philpott: Je pense que c’est une excellente question. Je ne sais pas si j’ai une réponse complète à vous donner. La réalité fait en sorte que les personnes qui ouvrent une entreprise souhaitent vendre leurs produits. Si ces derniers voient les marchés potentiels, ils vont généralement tenter d’en profiter.
Il faut donc s’assurer d’avoir un projet de loi équilibré. Nous avons tenté d’avoir une approche très équilibrée qui reconnaît que ces produits peuvent être des outils de réduction des méfaits tout en reconnaissant qu’il faut continuer de dire clairement qu’il y a des risques associés à ces produits. Il ne faut jamais perdre de vue que les produits de vapotage comportent des risques. Cependant, comme ces produits sont moins nocifs pour la santé, ils ont un rôle à jouer dans la réduction des méfaits pour les fumeurs actuels.
Maintenant, le projet de loi arrivera-t-il réellement à fermer cet autre marché? Il serait naïf de penser que ceux qui fabriquent ces produits n’essaieront pas de les vendre au plus grand nombre de personnes possibles. C’est pourquoi la réglementation entourant les produits de vapotage sera très importante. Il doit y avoir une réglementation très claire sur l’âge minimum pour se procurer ces produits et des restrictions très claires entourant la promotion de ces derniers.
Dans les derniers mois, j’ai eu l’occasion de rencontrer des jeunes. Par exemple, nous avons organisé des tables rondes avec des jeunes qui nous ont parlé de l’attrait des produits de vapotage et des idées fausses et des mythes qui existent dans nos écoles secondaires ici même à Ottawa.
À l’occasion d’une de ces tables rondes où vous étiez, nous avons parlé à certains de ces jeunes de l’attrait des cigarettes électroniques, des croyances qui perdurent dans les écoles secondaires selon lesquelles ces produits sont sûrs, amusants et agréables, et du fait qu’ils pourraient encourager les jeunes à utiliser des produits qui risqueraient de créer chez eux une dépendance.
Comme l’un de vos collègues l’a dit plus tôt, il nous manque encore de l’information sur les possibilités que le vapotage mène ensuite à l’utilisation du tabac, mais nous savons que le tabac est extrêmement nocif. Il nous reste beaucoup à apprendre sur ce sujet.
Nous espérons que le projet de loi dans sa forme actuelle a la portée et la rigueur nécessaires. Je serais ravie d’entendre les recommandations des honorables sénateurs quant aux façons de renforcer le projet de loi. Nous voulons respecter notre engagement de protéger les jeunes et de les empêcher d’adopter une habitude qui pourrait avoir des conséquences négatives sur leur santé.
La sénatrice Seidman: J’aimerais vous poser une question précise sur les restrictions de promotion des produits de vapotage. Nos témoins précédents nous ont beaucoup parlé de cette question. Je sais que le projet de loi ne prévoit pas les mêmes restrictions sévères pour les produits de vapotage que pour les produits du tabac. J’aimerais vous donner l’occasion de nous expliquer pourquoi.
Mme Philpott: Je peux vous parler d’un aspect en particulier et ensuite les fonctionnaires pourront en dire davantage.
L’une des différences touche l’emballage neutre pour les produits du tabac par rapport aux produits de vapotage. Nous sommes ravis de créer dans ce projet de loi les pouvoirs qui nous permettent de réglementer l’emballage neutre.
Nous savons que c’est une mesure qui fonctionne. Par exemple, nous savons qu’en limitant le type de caractère qui peut être utilisé, la couleur des emballages et la possibilité d’apposer des couleurs étincelantes et des logos sur les produits du tabac, nous diminuons l’attrait de ces produits, particulièrement pour les jeunes.
Nous croyons aussi respecter toutes les exigences de la Charte canadienne des droits et libertés. Il s’agit d’une question qui a dû être évaluée dans les autres pays qui ont voulu adopter une loi semblable tout en respectant leur constitution. Nous pouvons imposer des restrictions sur l’emballage neutre des produits du tabac puisque la Charte nous permet de le faire lorsque les recherches démontrent clairement que les risques pour la santé publique qui sont associés à ces produits surpassent le droit des entreprises du secteur de faire de la promotion.
Par contre, dans le cas des produits de vapotage, il n’y a pas ce même équilibre entre les preuves solides sur la nocivité des produits et notre capacité de limiter le droit des entreprises de l’industrie à faire de la promotion.
Je ne suis pas avocate, mais j’espère que vous avez bien compris mon explication de la Charte. J’espère que ma réponse vous aide à comprendre la différence dans les limites imposées à l’emballage.
La sénatrice Seidman: Vous avez parlé d’une des différences entre les produits de vapotage et les produits du tabac, c’est-à-dire l’emballage, mais il y en a d’autres. Par exemple, pour la publicité destinée aux enfants ou aux jeunes. Peut-être qu’« enfants » n’est pas le bon terme, mais plutôt la publicité destinée aux jeunes.
Il est encore permis de donner des renseignements et de faire de la publicité. Il est possible de faire de la publicité de style de vie destinée aux adultes. Or, des témoins ont affirmé que cette publicité de style de vie est dangereuse puisqu’elle peut également attirer les jeunes. Les jeunes verront aussi ces publicités et pourraient être davantage attirés par les cigarettes électroniques.
On nous a proposé de seulement permettre la communication d’information et la publicité fondée sur les faits et interdire toute forme de publicité de style de vie. Qu’en pensez-vous?
Mme Philpott: Vous voulez dire d’interdire toute publicité de style de vie pour les cigarettes électroniques?
La sénatrice Seidman: Exactement.
Mme Philpott: Cette interdiction ne serait pas conforme à la Charte. Selon les preuves que nous avons aujourd’hui sur les cigarettes électroniques, une telle interdiction ne répondrait pas aux exigences imposées par la Charte.
La sénatrice Seidman: Vous dites que c’est la même chose que pour l’emballage? D’accord je comprends.
Le président: Madame la ministre, je sais que vous nous avez déjà accordé beaucoup de temps. Je vois que certaines personnes à l’arrière commencent à s’agiter. Seriez-vous en mesure de répondre à une dernière question du sénateur Eggleton avant de partir?
Mme Philpott: J’espère que le sénateur Eggleton sera gentil.
Le sénateur Eggleton: Je le suis toujours.
Mme Philpott: C’est vrai que jusqu’à présent il a toujours été très gentil.
Le sénateur Eggleton: Absolument. La Société canadienne du cancer nous a présenté 22 suggestions d’amendement pour le projet de loi S-5. Je ne vous demanderai pas de réagir à chacune de ces suggestions et je ne vais pas lire chacune d’entre elles.
J’aimerais cependant souligner deux ou trois points et obtenir votre opinion sur ces derniers. Après votre départ, ceux qui resteront dans la salle pourront peut-être nous donner davantage de détails.
La société propose d’interdire tout incitatif à la vente de produits du tabac, en commençant par les détaillants. Par exemple, on interdirait les primes pour l’atteinte des cibles de volume de ventes, comme des billets pour des événements sportifs ou des concerts, des incitatifs comme les programmes de promotion, comme les concours permettant de gagner des vacances, ou tout autre programme incitatif.
Ces interdictions seraient imposées aux détaillants. La société nous a indiqué que ces incitatifs sont déjà interdits par la loi québécoise depuis novembre 2016.
La société fait également bon nombre d’autres recommandations, 22 au total. Selon elle, il doit y avoir des dispositions et des pouvoirs de réglementation visant les pipes à eau. Il y a plusieurs variantes de ces pipes qui l’inquiètent. La société parle aussi de la définition de produits du tabac qui exclut le tabac en feuilles destiné à la vente aux consommateurs. Cette exclusion n’est qu’une de leurs préoccupations.
Pouvez-vous nous donner vos impressions générales sur les suggestions de la Société canadienne du cancer, particulièrement celles que j’ai soulevées?
Mme Philpott: Tout d’abord, je suis ravie que vous ayez eu l’occasion de rencontrer la Société canadienne du cancer et que vous étudiiez les recommandations avec sérieux. Nous sommes présentement dans le mois de la sensibilisation au cancer. Il est donc très à propos que vous ayez rencontré la Société canadienne du cancer et que vous étudiiez ses recommandations.
Au sujet de ce que vous avez soulevé sur la promotion d’événements, je pense que vous parlez des produits de vapotage.
Le sénateur Eggleton: La société indique que c’est relié au tabac.
Mme Philpott: Nous avons déjà ce pouvoir pour le tabac n’est-ce pas?
Mme McDonald: Je pense que ce dont il est question ici, c’est la possibilité pour les fabricants de tabac de donner des incitatifs aux détaillants pour vendre leurs produits. Si je suis un détaillant, je peux dire: « Monsieur le sénateur, vendez 10 paquets de mes cigarettes et je vous donnerai un voyage à Cuba pour vos vacances. » En effet, le Québec a légiféré pour interdire ces incitatifs.
Du côté fédéral, il y a deux éléments dont il faut tenir compte: premièrement, comme la ministre l’a dit, il y a la question de la Charte. Il faut avoir des preuves suffisantes que le produit cause du tort et encourage les gens à fumer.
Deuxièmement, certains de ces éléments plus larges concernant la responsabilité de l’industrie sont au cœur de nos consultations actuelles sur le renouvellement de la stratégie fédérale et notre capacité de nous assurer que l’industrie est responsable de ses actions.
Le sénateur Eggleton: Avez-vous quelque chose à ajouter sur les pipes à eau? Croyez-vous qu’il faut les réglementer? C’est ce que suggère la Société canadienne du cancer.
Mme Philpott: Si je ne me trompe pas, c’est l’une des choses que nous avons envisagées dans le cadre de notre stratégie de lutte contre le tabagisme. Cet élément ne se retrouve pas nécessairement dans ce projet de loi, mais c’est une chose sur laquelle nous portons attention.
Le président: Madame la ministre, j’aimerais vous remercier d’avoir passé autant de temps avec nous aujourd’hui et d’avoir répondu clairement à nos questions. Vos collègues et vous avez certainement répondu à plusieurs questions très importantes que nous voulions vous poser directement. Nous remercions vos fonctionnaires de rester avec nous un peu plus longtemps.
Au nom du comité, j’aimerais vous remercier personnellement.
J’aimerais souhaiter la bienvenue à Denis Choinière, directeur, Bureau de la réglementation, et Adam Doane, conseiller scientifique principal.
La sénatrice Seidman: Il y a plusieurs provinces au Canada, par exemple le Québec, qui ont déjà mis en place une réglementation qui couvre la vaste gamme de produits, des plus minimalistes aux plus importants.
Pouvez-vous nous dire s’il y a des dispositions du projet de loi S-5 pour les produits de vapotage qui risquent d’être en conflit avec les lois provinciales? Dans l’affirmative, comment résoudre ces incompatibilités?
Denis Choinière, directeur, Bureau de la réglementation, Santé Canada: Nous avons tenu compte des lois provinciales dans la rédaction de ce projet de loi. La plupart des lois provinciales comportent des dispositions sur l’âge minimum pour la vente des produits de vapotage aux jeunes. Certaines lois contiennent également des restrictions promotionnelles pour les détaillants.
Jusqu’à présent, nous n’avons pas remarqué de conflits, mais nous avons plutôt constaté que certaines lois provinciales vont plus loin que la loi fédérale. Par exemple, dans certaines provinces, l’âge minimum pour la vente des produits de vapotage sera 19 ans alors que la loi fédérale indique 18 ans. Il ne s’agit pas d’un conflit puisque les provinces peuvent choisir d’être plus strictes tant et aussi longtemps qu’elles respectent le même objectif.
La sénatrice Seidman: Vous avez mentionné la vente au détail. S’agit-il d’un aspect qui sera déterminé dans les provinces par les provinces, ou s’agit-il de quelque chose qui est prévu dans la loi ou dans la réglementation? Je ne suis pas certaine de bien comprendre cet aspect.
M. Choinière: Prenons l’exemple du tabac. À l’heure actuelle, je crois que toutes les provinces limitent la visibilité des produits du tabac dans les commerces de détail. À l’échelon fédéral, c’est un pouvoir que nous avons, mais que nous n’exerçons pas pour les produits du tabac dans les commerces de détail, car les provinces le font déjà.
Parallèlement, bon nombre de provinces limitent aussi la visibilité des produits de vapotage dans les commerces de détail ou imposent des conditions afin de l’encadrer. Une fois encore, le projet de loi nous donne ce pouvoir, mais il est très peu probable que nous ayons à l’exercer étant donné que les provinces réglementent déjà ce secteur.
La sénatrice Seidman: Merci. C’est utile.
Le sénateur Eggleton: J’aimerais revenir au témoignage de la Société canadienne du cancer. Comme je l’ai indiqué, celle-ci nous demande d’adopter demain 22 amendements au projet de loi S-5. J’ai mis en relief trois aspects: les préoccupations liées aux incitatifs ou à la publicité auprès des détaillants, aux pipes à eau et au tabac naturel en feuilles.
C’est quelque chose qui semble avoir été abordé assez largement et je pense que vous avez abordé ce que nous faisons. Avez-vous des observations d’ordre général précises?
J’ajouterais aussi que nous avons entendu des témoignages ou reçu des mémoires de producteurs de cigares, et croyez-le ou non, de tabac à chiquer. Je croyais que les joueurs de baseball étaient les seuls à chiquer du tabac. Ces produits sont-ils traités différemment? Prévoit-on plutôt modifier la façon dont on les traite? Voilà ma question en deux volets.
Mme McDonald: Peut-être que je peux commencer. Nous avons en effet eu l’occasion d’examiner les amendements proposés par la Société canadienne du cancer. Nous les examinons attentivement en essayant de comprendre les pouvoirs que nous avons déjà, la mesure dans laquelle ils correspondent avec les objectifs du projet de loi dont nous sommes saisis, les cas où ces pouvoirs sont nécessaires et les cas où certains amendements auraient davantage leur place dans le renouvellement de la stratégie fédérale antitabac. Nous effectuons déjà des consultations sur un certain nombre d’éléments importants, notamment la transparence de l’industrie, la fabrication, et cetera.
En ce qui concerne la question que vous avez soulevée sur le tabac naturel en feuilles et les feuilles de tabac en particulier, c’est quelque chose que nous avons examiné attentivement et que nous continuons d’étudier.
Le problème, c’est que dans la définition précédente, nous avions les termes « feuilles de tabac » et que ceux-ci ont été délaissés dans la nouvelle définition, comme je l’ai indiqué. Nous sommes en train d’en déterminer les implications.
Le sénateur Eggleton: Comment procéderiez-vous pour apporter la correction nécessaire si vous en parvenez à la conclusion que cela a une implication? Pouvez-vous le faire dans la réglementation? Eh bien non, car il s’agit du libellé de la loi.
Mme McDonald: C’est exact. Cette correction nécessiterait un amendement.
Le sénateur Eggleton: Avez-vous d’autres observations sur ces dispositions? Qu’en est-il des producteurs de cigares et de tabac à chiquer? Qu’avez-vous à dire à leur sujet? Sont-ils traités différemment?
Mme McDonald: La question est la suivante: les cigares et le tabac à chiquer vont-ils être traités différemment dans le cadre de l’emballage neutre?
Le sénateur Eggleton: Oui.
Mme McDonald: Pour ce qui est de l’emballage neutre, la ministre a lancé une consultation publique au cours de laquelle elle a indiqué qu’on avait l’intention d’englober tous les produits du tabac administrés par la Loi sur le tabac. Cette consultation est maintenant terminée et nous en sommes à la phase d’élaboration de la réglementation. Vous en saurez donc plus ultérieurement.
La sénatrice Seidman: Nous avons reçu beaucoup de courriels sur ce projet de loi. Il suscite beaucoup d’intérêt chez les Canadiens. J’aimerais vous interroger sur l’une des idées que nous entendons, et cela s’adresse plus particulièrement aux fonctionnaires du ministère qui participent de près à l’élaboration de ce projet de loi.
Certains sont d’avis que le vapotage aurait dû faire l’objet d’un projet de loi distinct. Pourquoi a-t-il été ajouté sous forme d’amendement à la Loi sur le tabac?
Ma question est la suivante: avez-vous réfléchi à l’élaboration d’un projet de loi entièrement distinct pour le vapotage? Pourquoi avez-vous choisi de modifier la Loi sur le tabac pour y ajouter le vapotage sous forme d’article distinct de la Loi sur le tabac?
Mme McDonald: Dans le cadre de l’examen et de la mise à jour de la loi, toutes les possibilités ont été envisagées, y compris l’idée d’élaborer un projet de loi distinct et autonome, l’idée de l’inclure dans la Loi sur le tabac et bon nombre d’autres possibilités. Pour la raison que vous avez mentionnée, il existe un lien réel entre les produits de vapotage et les produits du tabac. Nous ne voulons pas que les produits de vapotage servent de moyen de transition vers les produits du tabac. Nous tenons à nous assurer de protéger les jeunes. Ce sont des objectifs très semblables. Nous voulons protéger les jeunes de ces dangers.
Cependant, nous reconnaissons que ce ne sont pas tous les aspects de l’actuelle Loi sur le tabac qui s’appliquent aux produits de vapotage. Il s’agit d’un différent type de produit et c’est la raison pour laquelle nous avons pris la décision de les traiter comme une classe de produits distincte en vertu de la même loi. Ils font l’objet de dispositions distinctes.
Je comprends le point de vue de bon nombre d’intervenants qui sont d’avis que cela revient à traiter les produits de vapotage comme le tabac, alors qu’en réalité il s’agit d’une catégorie de produits distincte et les dispositions qui s’y appliquent sont clairement définies.
Dans certains cas, il est logique que les mêmes dispositions s’appliquent aux deux. C’est manifestement le cas, notamment pour la vente et l’âge légal de vente. Ces dispositions devaient être harmonisées, et c’est ce qui a été fait dans la loi.
Cela répond-il à votre question?
La sénatrice Seidman: Oui. Je vous remercie.
La sénatrice McPhedran: Tout d’abord, je tiens à formuler une demande. Je sais que nous avons reçu des documents de l’Australie, mais je me demande si nous avons reçu ce qui a été envoyé récemment à votre sous-ministre. Je souhaite demander ces documents afin que nous puissions les examiner et nous assurer d’avoir les sources les plus complètes. Ce serait très utile.
Deuxièmement, je remarque qu’à partir du 20 mai, au Royaume-Uni, la loi instaurant l’emballage neutre entrera en vigueur. On verra progressivement disparaître toute marque des emballages. C’est une question quelque peu prospective. Je sais que vous ferez de votre mieux pour y répondre. Je sais qu’il y a des limites à ce que vous pourrez répondre, car il s’agit vraiment de l’avenir.
À la lumière des grandes sociétés de tabac au Canada et des arrêts de la Cour suprême concernant la liberté d’expression et l’appui qui est donné à la capacité de commercialiser les produits et de faire de la publicité, est-ce quelque chose qui pourrait concerner le vapotage? Si cela va de l’avant et qu’une réglementation s’applique au vapotage, l’industrie du vapotage a-t-elle des préoccupations équivalentes à celles qui ont été soulevées dans le cadre des grands procès sur le tabac?
Mme McDonald: Je vais commencer et céder ensuite la parole à notre conseiller juridique si nous devons préciser notre réponse. Nous serions ravis de transmettre la lettre de l’Australie à notre sous-ministre. Je précise que la lettre nous est parvenue en anglais d’Australie et que nous la déposerons donc uniquement en anglais. Nous sommes ravis de vous la transmettre.
Pour ce qui est de l’emballage neutre, la question est la suivante: vous allez banaliser l’emballage des produits du tabac. Allez-vous aussi à l’avenir banaliser l’emballage des produits de vapotage? Quelle est la réflexion à suivre?
Notre ministre nous a expliqué que nous avions la capacité d’aller de l’avant en matière d’emballage neutre, car bon nombre de données indiquent que les produits du tabac sont mortels et que l’emballage neutre fonctionne. C’est dans ce contexte que nous sommes en mesure d’aller de l’avant avec la réglementation sur l’emballage neutre. Nous avons en effet réalisé une analyse approfondie pour nous assurer de répondre à toutes ces exigences.
En réalité, les produits de vapotage sont tout simplement moins nocifs que les produits du tabac. Il s’agit de produits nocifs, mais ils le sont dans une moindre mesure. Le projet de loi a été rédigé afin de nous donner le pouvoir réglementaire de prendre des mesures visant l’emballage des produits de vapotage, mais pour le moment, nous n’avons aucunement l’intention d’imposer l’emballage neutre aux produits de vapotage, étant donné qu’ils sont très différents des produits du tabac. Cela nous ramène à la question de préjudice et à la Charte. Souhaitez-vous ajouter quelque chose à cela?
M. Choinière: Je préfère demander à notre conseillère juridique de répondre.
Anne-Marie LeBel, avocate, Services juridiques de Santé Canada: Comme vous le savez, la Charte protège les droits et libertés individuels. Toutefois, la Charte prévoit aussi que ceux-ci peuvent être limités par des lois si l’objectif est important. La loi doit prévoir l’adaptation des limites.
Santé Canada s’emploie à définir les limites à appliquer aux produits de vapotage en soupesant les risques, les avantages pour la santé et les méfaits de ces produits.
Si de nouvelles données probantes justifient l’imposition de limites supplémentaires, il faudra ajouter des mesures d’adaptation.
La sénatrice McPhedran: Puis-je poser une question supplémentaire à ce sujet? Je veux m’assurer de bien comprendre la réponse. Dites-vous que dans la mesure du possible, à l’heure actuelle, le cadre réglementaire que vous proposez pour le vapotage permettra des mesures d’adaptation si de nouvelles données probantes dévoilent des méfaits plus importants?
M. Choinière: Je peux répondre. Étant donné qu’il s’agit d’un marché en émergence, l’article 38 du projet de loi crée le nouvel article 30.45 qui permet que des mesures réglementaires soient prises au besoin concernant l’emballage. On interdirait la promotion des produits de vapotage sur l’emballage qui iraient à l’encontre du règlement.
Comme l’a dit précédemment ma collègue, madame McDonald, ce n’est pas ce que nous prévoyons faire, mais puisqu’il s’agit d’un marché en émergence, nous nous donnons les moyens de réagir à l’avenir.
Le président: J’offre à la marraine du projet de loi la chance de poser la dernière question si elle le souhaite.
[Français]
La sénatrice Petitclerc: Merci. J'aurais une toute dernière question à poser.
[Traduction]
J’ai une préoccupation personnelle qui n’est pas directement liée à la portée du projet de loi. Nous en avons déjà un peu entendu parler, et la sénatrice Mégie a posé une question sur le sujet. Je veux m’assurer que c’est abordé.
Nous verrons apparaître des magasins de produits de vapotage. Les propriétaires de ces magasins vendront des produits et offriront de l’information aux fumeurs qui veulent arrêter, et ce, sans formation médicale. Je veux m’assurer que nous gardons cela à l’esprit quand le projet de loi entrera en vigueur.
Y a-t-on déjà pensé? Cette question sera-t-elle abordée lors des consultations?
Mme McDonald: Vous avez entendu plusieurs témoins parler des magasins de produits de vapotage et de leur avenir. Dans les faits, nous avons des mesures législatives qui s’inscrivent dans le Code criminel. En droit criminel, on établit généralement des interdictions. Il s’agit ici plutôt d’un document informatif pour traiter de la question. Peut-être que ce serait inapproprié dans le cadre du projet de loi, mais nous savons que les provinces et les territoires se penchent sur la question pour voir ce qui peut être fait.
J’aimerais préciser que les propriétaires de magasins ne devraient pas offrir de conseils médicaux; ils n’ont pas le droit. Ils peuvent toutefois donner des renseignements sur les produits. Nous nous attendons à ce que les propriétaires et les commis de ces magasins renvoient les clients vers un professionnel de la santé pour obtenir des conseils pour cesser de fumer, entre autres.
Ils sont habilités à parler des produits. Je pense que l’Association de la vape a parlé de la possible mise en place de mesures visant la formation des commis en magasin afin qu’ils puissent transmettre les renseignements appropriés et qu’ils comprennent les paramètres à respecter.
De plus, comme Hilary l’a indiqué, nous avons à Santé Canada la capacité et le financement nécessaires pour expliquer clairement aux Canadiens en quoi consistent les produits de vapotage, et nous avons l’intention de le faire.
Encore une fois, bien que ce ne soit peut-être pas approprié pour ce projet de loi, nous nous attendons à ce que les provinces et les territoires se penchent sur la question. Nous savons que le secteur s’y penche et que cette question est prise très au sérieux.
Le président: Chers collègues, demain, nous procéderons à l’étude article par article. Je vous rappelle que si vous avez des observations à présenter, vous devez les fournir dans les deux langues officielles et prévoir suffisamment de copies pour tous les membres du comité.
Le sénateur Eggleton: Vous voulez dire pour les amendements.
Le président: Si vous avez un amendement à présenter, il faut le faire confirmer par le légiste parlementaire et apporter suffisamment de copies pour tous les membres du comité, et ce, dans les deux langues officielles. Voilà pour les amendements.
Sur ce, mesdames et messieurs, nous venons de terminer les audiences formelles avec témoins. Je remercie les fonctionnaires d’être venus nous donner des précisions.
(La séance est levée.)