Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie
Fascicule no 61 - Témoignages du 27 mai 2019
OTTAWA, le lundi 27 mai 2019
Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit aujourd’hui, à 16 h 11, afin de procéder à l’étude article par article du projet de loi C-83, Loi modifiant la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition et une autre loi.
La sénatrice Chantal Petitclerc (présidente) occupe le fauteuil.
[Français]
La présidente : Bon lundi à tous, et bienvenue au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie. Je m’appelle Chantal Petitclerc, sénatrice du Québec; c’est un plaisir et un privilège d’être avec vous aujourd’hui pour cette réunion, afin de poursuivre l’étude par article par article du projet de loi C-83, Loi modifiant la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition et une autre loi.
Nous avons avec nous, pour répondre à vos questions, Angela Arnet Connidis, directrice générale, Direction générale de la prévention du crime, des affaires correctionnelles et de la justice pénale à Sécurité publique Canada. Bienvenue.
Nous avons également, de Service correctionnel Canada, Jennifer Wheatley, commissaire adjointe, Services de santé; Luc Bisson, directeur général par intérim, Secrétariat exécutif et chef de cabinet; Marty Maltby, directeur général par intérim, Direction des initiatives pour les Autochtones; et, enfin, Lee Redpath, directrice exécutive, Mise en œuvre des unités d’intervention structurée. Bienvenue à vous.
Enfin, du ministère de la Justice Canada, nous avons parmi nous Juline Fresco, avocate. Bienvenue.
[Traduction]
Comme vous le savez, de nombreux amendements ont été apportés à ce projet de loi il y a une semaine ou 10 jours. Nous avons des amendements aujourd’hui. Certains amendements sont en train d’être imprimés pour vous, et vous pourrez en prendre connaissance très bientôt.
Dès le départ, je vous demande votre coopération et, probablement, votre indulgence au fur et à mesure que nous avançons dans ce processus, pour qu’il soit cohérent et le plus efficace possible.
Si vous vous en souvenez, nous étions rendus à l’article 23 quand nous avons arrêté la dernière fois. Nous revenons à l’article 23, à l’amendement proposé à ce moment-là.
[Français]
La sénatrice Bellemare : Je voudrais proposer un amendement, et je demande votre coopération pour que nous puissions revenir à l’article 10. Il s’agit d’un amendement du gouvernement, du ministre, et cela implique de revoir l’article 10, à la page 7, aux lignes 25 et 28.
[Traduction]
La présidente : Sénatrice Bellemare, je vous arrête tout de suite et fais appel à votre indulgence pour que nous finissions de traiter l’article 23. Un amendement était en cours à ce moment-là. Je crois que vous avez aussi un amendement à l’article 23 dans vos papiers, le DB-23.18. Je propose que nous nous attachions à terminer l’article 23, si vous voulez bien.
Si vous vous souvenez, pour le remettre en perspective, c’était un amendement portant sur des questions concernant le français et la traduction. Une certaine formulation semblait problématique, ce que la sénatrice Bellemare et la sénatrice Forest-Niesing ont souligné à ce moment-là. Il y a eu une certaine discussion à ce sujet et, si je ne m’abuse, la sénatrice Bellemare allait proposer un amendement qui remplacerait l’amendement de la sénatrice Pate.
Ai-je bien compris?
La sénatrice Bellemare : En fait, c’est l’utilisation d’une expression différente. Ce serait :
[Français]
« son passé en matière d’adoption », plutôt que « le fait qu’il ait été adopté ou non », dans l’amendement de la sénatrice Pate. Cependant, pour que ce soit plus clair, on changerait également la formulation en anglais.
[Traduction]
Ce serait « y compris sa famille »... Non, ce n’est pas ça. C’est l’adoption ou son passé en matière d’adoption.
La présidente : Tout le monde a-t-il une copie de cet amendement?
[Français]
La sénatrice Bellemare : L’amendement est le suivant : que le projet de loi C-83 soit modifié, à l’article 23, à la page 18, par substitution, à la ligne 28, de ce qui suit :
« c) l’identité et la culture autochtones du délinquant, son passé familial et le fait qu’il a été adopté ou non. ».
[Traduction]
La présidente : Plus précisément, il s’agissait de l’amendement de la sénatrice Bellemare, le DB-23.18.
[Français]
La sénatrice Bellemare : Pour le numéro 23.18a, il n’y a pas d’amendement.
[Traduction]
La présidente : Sénatrice Bellemare, dois-je comprendre que vous ne proposez pas un amendement?
[Français]
La sénatrice Bellemare : Par contre, il y a un amendement pour le numéro 23.18b.
[Traduction]
Que le projet de loi C-83, à l’article 23, soit modifié par substitution, à la ligne 32, page 18, de ce qui suit :
« tone, sauf s’ils ont pour effet d’atténuer le niveau de risque. »
[Français]
Et en français :
Que le projet de loi C-83 soit modifié, à l’article 23, à la page 18, par substitution, à la ligne 32, de ce qui suit :
« tone, sauf s’ils ont pour effet d’atténuer le niveau de risque. »
La présidente : Sénatrice Bellemare, je pense que cet amendement a déjà été adopté avant notre départ, si je ne me trompe pas. Je vais demander à M. Charbonneau de nous aider un peu.
Daniel Charbonneau, greffier du comité : Donnez-nous cinq minutes; nous allons vérifier.
[Traduction]
Angela Arnet Connidis, directrice générale, Direction générale de la prévention du crime, des affaires correctionnelles et de la justice pénale, Sécurité publique Canada : Nous devons nous assurer d’avoir le bon amendement pour cela.
La présidente : J’ai bien dit que je vous demanderais votre indulgence, et le moment est déjà là. Je vous demande donc votre indulgence. Nous avons des amendements. Nous essayons de les imprimer et de les classer. Nous allons suspendre la séance pendant deux minutes pour nous organiser et être efficaces. Toutes mes excuses.
La sénatrice Seidman : J’invoque le Règlement, madame la présidente. Je siège au Sénat depuis 10 ans. J’ai siégé à des comités pendant 10 ans. Je n’ai jamais vu une étude article par article dégénérer en un tel chaos, parce que le gouvernement décide d’apporter des amendements pendant que nous procédons à l’étude article par article. C’est absolument inouï. S’il y a des amendements à apporter, cela ne se fait absolument pas en interrompant notre séance de deux heures d’étude article par article pour nous assommer de tous ces amendements. Ça ne se fait tout simplement pas. Il faut les entrer à la troisième lecture, quand nous serons retournés en chambre. Je m’excuse, mais je ne peux pas croire que vous causiez ce genre de chaos pour la présidente et pour le greffier. C’est déplorable. Je suis désolée.
La présidente : Y a-t-il d’autres observations concernant cet appel au Règlement?
La sénatrice Omidvar : Je dois dire que je suis d’accord avec la sénatrice Seidman. Nous prenons notre travail très au sérieux et, madame la présidente, vous nous aidez beaucoup à le faire. Je ne vois pas comment nous pourrions faire un second examen objectif aussi précipitamment à moins que ce ne soit des amendements techniques et, dans ce cas, sénatrice Bellemare, je les recevrais volontiers. Cependant, si ce sont des amendements de fond, nous ne pourrons tout simplement pas faire le travail que les gens attendent de nous.
La sénatrice Bellemare : Je suis plutôt d’accord avec vous.
La sénatrice Omidvar : Merci.
La sénatrice Seidman : Vous retirez donc vos amendements?
La sénatrice Bellemare : Je les retirerai.
La présidente : Vous le ferez.
La sénatrice Seidman : Merci. Je vous en suis vraiment reconnaissante.
La présidente : Merci, sénatrice Bellemare.
Sénatrice Seidman, merci beaucoup.
Nous poursuivons avec l’article 23. C’était un amendement de la sénatrice Pate. Cet amendement est le KP-23.18a. Il a été reporté à ce moment-là, et je propose que nous le traitions maintenant, avant de poursuivre.
Sénatrice Forest-Niesing, je crois que vous aviez un sous-amendement pour cet amendement.
La sénatrice Forest-Niesing : En fait, ce n’est pas pour cet article que j’avais un sous-amendement. Cependant, si je comprends bien, le seul point de désaccord... J’ai oublié qui avait soulevé ce point, mais il me semble qu’il s’agissait du fait que la version française et la version anglaise ne concordaient pas.
La présidente : Oui.
La sénatrice Forest-Niesing : Pour que la version française suive la version anglaise, il suffirait d’adopter un sous-amendement pour retirer la mention de —
[Français]
— « le fait qu’il a été adopté ou non », et de le remplacer par : « et son historique d’adoption ».
[Traduction]
Je crois que cela réglerait le problème; cela le règle pour moi.
[Français]
La présidente : Absolument, et je crois que c’était la préoccupation de la sénatrice Bellemare également. Donc, vous allez proposer ce sous-amendement, si je comprends bien?
La sénatrice Forest-Niesing : Je peux?
La présidente : Absolument. Donc, nous aurons besoin d’avoir ce sous-amendement dans les deux langues officielles, j’imagine, ou nous l’avons déjà?
La sénatrice Forest-Niesing : Voulez-vous que je le lise à voix haute? C’est le même que celui que nous avons, à l’exception de la dernière partie du texte en français, après le mot « et ». Le numéro est KP-23.18a. Est-ce que la procédure exige que je le lise au complet?
La présidente : Je pense que oui.
La sénatrice Forest-Niesing : Ce serait une motion de sous-amendement à l’article 23, à la page 18.
Je propose que le projet de loi C-83 soit modifié, à l’article 23, à la page 18, par substitution, à la ligne 28, de ce qui suit :
« c) l’identité et la culture autochtones du délinquant, son passé familial et son historique d’adoption. ».
[Traduction]
En anglais, je propose :
Que le projet de loi C-83 soit modifié, à la page 18, par substitution, à la ligne 28, de ce qui suit :
« c) l’identité et la culture autochtones du délinquant, son passé familial et le fait qu’il a été adopté ou non. »
[Français]
La présidente : Je crois bien que tout le monde s’est exprimé là-dessus.
[Traduction]
L’honorable sénatrice Forest-Niesing propose que le projet de loi C-83 soit — puis-je dispenser de lire la motion?
Des voix : Suffit!
La présidente : Le sous-amendement est-il adopté?
Des voix : D’accord.
La présidente : Vous plaît-il d’adopter l’amendement?
Sénatrice Pate?
La sénatrice Pate : Je passais au suivant, parce qu’il y en a un autre qui avait été reporté.
La présidente : Nous devons d’abord terminer avec l’amendement pour lequel nous avons adopté un sous-amendement.
L’amendement est-il adopté?
Des voix : Oui.
La présidente : L’article 23 modifié est-il adopté?
Des voix : Oui.
La présidente : Bon.
Comme il avait été reporté, l’objectif est de revenir à l’ordre normal. Si vous vous en souvenez, à ce moment-là, nous avons aussi reporté l’amendement KP-2.1b à l’article 2.
C’était le sous-amendement que le sénateur Klyne et la sénatrice Forest-Niesing ont formulé ensemble. Il a été reporté, et nous allons le traiter maintenant.
La sénatrice Pate : Je demande au comité la permission de retirer mon amendement initial à l’article 2, KP-2.1b, et de proposer un nouvel amendement qui tient compte des changements qui ont été proposés la semaine dernière par la sénatrice Forest-Niesing et le sénateur Klyne.
Je propose :
Que le projet de loi C-83 soit modifié, à l’article 2, à la page 1, par adjonction, après la ligne 15, de ce qui suit :
« c.1) il assure la prestation efficace :
(i) de programmes de réadaptation des personnes incarcérées, notamment des programmes d’éducation, de formation professionnelle et de bénévolat,
(ii) de mesures de rechange à l’isolement carcéral, notamment des mesures de rechange élaborées conformément aux articles 29, 81 et 84; ».
Il s’agit du débat que nous avons eu sur la promotion d’un changement de culture. C’est un simple changement d’ordre.
La présidente : Avant d’accorder du temps aux sénateurs qui souhaitent en parler, j’ai besoin d’obtenir votre consentement pour le retrait de l’amendement de la sénatrice Pate.
Êtes-vous d’accord pour que la sénatrice Pate retire son amendement?
Des voix : D’accord.
La présidente : L’honorable sénatrice Pate propose que le projet de loi C-83...
La sénatrice Pate : Suffit!
La présidente : Merci.
Y a-t-il des observations ou des questions sur cet amendement?
La sénatrice Seidman : C’est un changement assez conséquent, sénatrice Pate. Je m’apprêtais à dire au comité que, à mon avis, votre amendement précédent — celui que vous avez retiré — pourrait être dans une zone grise en raison du fait que vous parliez de l’affectation de ressources financières. Du point de vue du Sénat, d’après le manuel et les règles de procédure concernant les droits de compétence du Sénat relativement aux lois, les choses deviennent très compliquées quand nous commençons à dire au gouvernement comment affecter ses fonds.
Vous avez changé votre amendement et, si je comprends bien, vous avez retiré la phrase « il priorise, dans l’affectation de ses ressources financières ». Je crois que c’est un bien meilleur amendement qui s’harmonise mieux avec la compétence du Sénat et j'aimerais donc vous en remercier.
La présidente : Merci, sénatrice Seidman.
Des observations ou des questions?
Le sénateur Munson : J’aimerais entendre les fonctionnaires.
La présidente : Le sénateur Munson demande l’avis des fonctionnaires.
Le sénateur Munson : Que pensez-vous de cet amendement?
Mme Arnet Connidis : Nous ne pouvons rien dire d’après notre seule perspective, mais si vous souhaitez avoir des conseils sur une chose en particulier, nous pouvons vous en donner.
Le sénateur Munson : J’aimerais avoir une meilleure idée de ce sur quoi nous votons.
Marty Maltby, directeur général par intérim, Direction des initiatives pour les Autochtones, Service correctionnel Canada : Serait-il possible de nous remettre une copie de l’amendement? Comme nous ne l’avons pas, nous n’avons pas pu le lire.
Le sénateur Munson : Je n’en ai pas besoin maintenant. Je pourrais aller...
La sénatrice Forest-Niesing : Comme j’ai un peu travaillé là-dessus, je pourrais peut-être répondre pendant que les fonctionnaires formulent leur réponse.
Le sénateur Klyne avait soulevé deux préoccupations en ce qui concerne l’amendement initial, pas celui que vous avez devant vous maintenant. D’abord, il y avait une directive apparente concernant l’attribution des ressources financières qui semblait inappropriée. Le deuxième élément qui méritait une révision était que nous pouvions exprimer avec davantage de force le désir de voir la prestation de programmes efficaces. Par conséquent, les changements que nous avons apportés, avec les conseils du Bureau du légiste, visaient à rectifier cela.
Le sénateur Munson : Ça me revient maintenant.
La sénatrice Forest-Niesing : Je suis d’avis que nous avons accompli ce qu’il fallait avec la formulation que vous avez ici.
Le sénateur Munson : Moi aussi. À moins que vous n’ayez...
Mme Arnet Connidis : Merci de nous avoir remis une copie de l’amendement. C’est utile de pouvoir le lire.
Deux ou trois points techniques. L’article 84 ne porte pas sur l’incarcération. Il porte sur les conditions de libération, et donc il n’est pas à sa place ici d’après l’intention de cette section. Dans cet amendement, le sous-alinéa c.1)(ii) renvoie aux articles 29, 81 et 84. À l’article 84, il s’agit de veiller à avoir des conditions de libération selon lesquelles la collectivité autochtone peut appuyer le délinquant autochtone à sa libération; il ne s’agit donc pas de questions carcérales.
L’autre point, c’est que l’« isolement carcéral » n’est pas un terme défini dans la LSCMLC.
La sénatrice Pate : Je voulais promouvoir un changement de culture. Les accords dont il est question à l’article 84 sont censés commencer à s’appliquer dès l’entrée d’une personne dans une prison, et des programmes sont conçus dans ce sens. Je soutiens que cela a sa place ici pour ce qui est de l’élaboration efficace des programmes et des initiatives dans le système carcéral.
Mme Arnet Connidis : Je conviendrais de cela, sauf que ce n’est pas une solution de rechange à l’incarcération. C’est une méthode de libération.
Monsieur Maltby, peut-être que vous pourriez nous parler de cela.
M. Maltby : Un aspect technique : l’article 84 ne constitue pas nécessairement un accord. C’est un processus de libération selon lequel nous assurons que les collectivités autochtones sont mobilisées dans le cadre d’un plan de mobilisation de la collectivité pour cette libération. Ce n’est pas un accord formel que nous signons avec une organisation ou une collectivité. C’est un processus d’engagement que nos agents de libération conditionnelle appliquent dans l’élaboration des plans de libération.
Cet élément de notre loi vise à faire en sorte que la collectivité est mobilisée tout au long de la période d’incarcération, ce qui est juste, mais ce n’est pas forcément un processus officiel de transfert de la compétence ou de transfert de la garde comme dans le cas de l’article 81. L’article 84 constitue plutôt une mobilisation de la collectivité qui s’engage à travailler avec le délinquant et à élaborer un bon plan de libération qui comporte des appuis positifs dans la collectivité.
La présidente : Merci.
Y a-t-il d’autres observations? Sommes-nous prêts à mettre aux voix cet amendement?
Le sénateur Kutcher : J’ai une question. Vous dites que l’« isolement carcéral » n’est pas un terme utilisé?
Mme Arnet Connidis : Il n’est pas défini dans la LSCMLC, la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition.
Le sénateur Kutcher : Qu’est-ce que ça veut dire?
La sénatrice Seidman : J’ai maintenant de la difficulté, bien sûr, avec tous ces nouveaux termes et ces nouvelles sections. L’amendement initial parlait des programmes, et il me semble ici que le sous-alinéa c.1)(ii), sur les mesures de rechange à l’isolement carcéral, est nouveau pour nous. J’ai l’impression que nous entendons des choses sur lesquelles bien des gens se posent des questions. La sénatrice Pate est-elle disposée à retirer le sous-alinéa c.1)(ii) séparément ou au moyen d’un sous-amendement?
La sénatrice Pate : Je crois qu’il y a un désaccord fonctionnel entre les fonctionnaires en ce qui concerne ce qui doit arriver pour que l’article 84 s’applique. Je serais disposée à enlever la mention de l’article 84, mais je ne crois pas que nous devrions enlever celle des articles 29 ou 81, puisque nous avons eu un amendement proposé par le sénateur Kutcher concernant les besoins des personnes ayant des problèmes de santé mentale.
La présidente : Merci.
La sénatrice Seidman : Aimeriez-vous enlever...
La sénatrice Pate : Oui, j’enlèverais... Si la question de l’« isolement carcéral » est préoccupante, nous pourrions dire simplement « des mesures de rechange élaborées conformément aux articles 29 et 81 ». À mon avis, nous devrions garder le 84.
La sénatrice Seidman : C’est bien. Ça marche.
La sénatrice Pate : Alors, on garde le 84?
La sénatrice Seidman : Oui.
La sénatrice Pate : Bien.
La présidente : Pouvez-vous nous le lire?
La sénatrice Pate : Donc, (i) resterait le même et (ii) serait : « notamment des mesures de rechange élaborées conformément aux articles 29, 81 et 84. »
La présidente : Êtes-vous d’accord pour que la sénatrice Pate retire cette partie?
Des voix : D’accord.
La présidente : Sommes-nous prêts à mettre aux voix cet amendement?
Des voix : Oui.
La présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion d’amendement?
Des voix : Oui.
Des voix : Avec dissidence.
La présidente : Avec dissidence.
L’article 2 modifié est-il adopté?
Des voix : Oui.
Des voix : Avec dissidence.
La présidente : Nous revenons là où nous étions, à l’article 24.
La sénatrice Pate : Conformément à l’article 10-5 du Règlement, je propose que le comité réexamine l’article 10.
La présidente : Y a-t-il des observations ou des questions?
La sénatrice Pate : J’aimerais préciser que, bien que le comité ait déjà travaillé très fort pour améliorer ce projet de loi au moyen de plusieurs amendements importants, j’estime que notre travail demeure incomplet si nous laissons en place des mesures qui, selon ce que nous avons clairement entendu, risquent de contrevenir aux droits de la personne et aux droits constitutionnellement protégés par la Charte, et que le projet de loi sera probablement invalidé par les tribunaux.
Tant les tribunaux que les témoins au comité ont défini trois problèmes importants comme pouvant donner lieu à des violations des droits constitutionnels et des droits de la personne, notamment : absence d’une limite ferme de la période qu’une personne peut passer en isolement, le non-respect des critères des tribunaux pour l’examen indépendant et la discrimination envers les personnes ayant des problèmes de santé mentale.
Les amendements apportés à l’article 10 régleraient tous ces problèmes. Les constitutionnalistes nous ont dit clairement que, sans ces amendements, le projet de loi risque fort d’être jugé inconstitutionnel. Nous savons qu’il a été renvoyé à la Cour suprême du Canada, et je crois qu’il nous incombe de faire de notre mieux. Bien que d’aucuns pensent que le comité est mal placé pour tenir compte des préoccupations d’ordre constitutionnel, compte tenu du fait que ce processus a été tellement précipité, nos collègues qui en font la troisième lecture et n’entendent pas de témoins auront encore moins le temps d’étudier le projet de loi et estimeraient qu’ils sont encore moins bien placés que nous pour apporter des amendements. Nous devons faire tout notre possible pour ne pas renvoyer un projet de loi qui présente des lacunes d’ordre constitutionnel. Sinon, nous risquons de transmettre le message que nous ne voyons aucun problème de nature constitutionnelle qui mérite de faire l’objet d’un amendement, alors que c’est exactement le contraire que nous avons entendu de nos témoins.
La présidente : Merci, sénatrice Pate.
Y a-t-il des commentaires sur le réexamen de l’article 10? Nous avons besoin d’un accord pour revenir à cet article.
La sénatrice Seidman : Je souligne, une fois de plus, que c’est tout à fait inhabituel. Normalement, nous procédons à l’étude article par article en une seule séance, et le fait que cela s’étend sur plusieurs séances est déjà quelque chose de nouveau pour ce comité. Que nous puissions reculer et reprendre un amendement que nous avons déjà examiné, mis aux voix — et, dans le cas présent, rejeté — et revenir maintenant tenter de reprendre l’amendement dans une formulation différente, c’est tout à fait anormal.
Sénatrice Pate, je respecte profondément votre expertise, votre professionnalisme, votre point de vue et ce que vous nous offrez à tous. Si le comité convient de revenir à l’article 10, je me soumettrai, bien sûr, à la volonté du comité. Cependant, j’estimais important de souligner que ceci est très inhabituel.
La sénatrice Stewart Olsen : À titre d’information seulement, cela ne se ferait-il pas mieux à la troisième lecture en chambre plutôt que par un retour en arrière? La plupart des comités auxquels j’ai siégé ne retournent pas en arrière pour refaire des amendements, mais c’est une chose qui peut être faite à la troisième lecture. Je n’en suis pas sûre. Je pose la question.
La présidente : Je dirais que cela ne se produit pas souvent. Ce n’est pas chose courante, mais le comité a le droit de revenir en arrière si c’est la volonté d’une majorité de sénateurs. C’est peut-être là que la sénatrice Pate pourrait nous aider. Pour justifier cela, nous devons nous assurer que les amendements diffèrent suffisamment des amendements précédents afin de justifier une chose si inhabituelle.
Estimez-vous qu’ils sont différents?
La sénatrice Pate : Je considère en effet que les amendements sont très différents. J’ai travaillé à ces amendements avec la sénatrice Forest-Niesing. Elle proposera une partie et j’en proposerai une autre. Cela revient à abroger la disposition tout entière, parce qu’elle est fondamentale pour l’objectif déclaré de cette mesure législative. L’amendement nous rapproche de l’objectif législatif.
Le sénateur Klyne : J’essaie de comprendre. Essayez-vous d’amender l’amendement, ou tentez-vous d’adopter cet amendement, ou encore présentez-vous l’amendement tel qu’il était initialement?
La sénatrice Pate : Nous essayons de revenir à l’article 10 pour le modifier, pas...
Le sénateur Klyne : Il y a beaucoup d’éléments ici.
La présidente : Sénateur Klyne, si vous me le permettez — et si j’ai tort, que quelqu’un me reprenne — la sénatrice Pate a l’intention de demander l’autorisation de revenir à l’article 10 et de présenter un nouvel amendement. Comme je l’ai dit, le comité a le droit de le faire si la majorité des sénateurs y consentent. Ainsi donc, à moins qu’il n’y ait d’autres questions ou observations, sommes-nous d’accord pour revenir à l’article 10?
La sénatrice Stewart Olsen : Je ne comprends pas pourquoi cela n’a pas été soulevé lors de l’examen initial de cet article, et peut-être que cela a été fait. Je suis la sénatrice Poirier, pour l’instant, et je ne suis donc pas sûre.
La sénatrice Pate : Mon opinion était fondée sur la façon dont le débat s’est déroulé quand nous étudiions l’article 10; celui-ci est tellement interconnecté et complexe que même en le lisant, je crois que les gens perdent le fil de l’objectif des amendements. En lisant cet amendement, on constate qu’il comporte la portion d’un article, et la portion d’un autre article. L’objectif est d’identifier clairement ce qui ne figure pas dans le projet de loi en ce moment, dans cet article crucial, l’article 10, qui définit la façon dont Service correctionnel Canada peut séparer les personnes au moyen de ce qui est considéré comme de l’isolement, à l’heure actuelle.
La sénatrice Forest-Niesing : J’aimerais, si vous me le permettez, parler en faveur de la motion. Si vous vous en souvenez, quand nous en avons débattu à notre dernière réunion, de nombreux membres du comité partageaient mon sentiment. C’était plutôt écrasant de constater que cet amendement avait une si grande portée et couvrait tant de points qui avaient été débattus et au sujet desquels nous avions entendu des témoins. Je crois, en toute justice, que l’article 10 est vraiment au cœur de cette mesure législative particulière.
Depuis, j’ai eu le temps de l’étudier davantage et suis arrivée à la conclusion qu’il y a lieu d’examiner sérieusement les amendements proposés dans cette nouvelle formulation. Je crois que vous les trouverez moins écrasants, je l’espère, si mes explications sont claires, et que vous et le gouvernement, en fin de compte, le trouverez plus acceptable.
Je n’entrerai pas dans les détails de l’amendement et j’espère avoir l’occasion d’exprimer les raisons pour lesquelles j’appuie non seulement que nous le réexaminions, mais votions pour l’amendement proposé à l’article 10.
La présidente : Merci.
La sénatrice Omidvar : J’appuie la motion de réexamen de l’article 10. Je suis d’avis que les trois amendements diffèrent suffisamment de ceux que nous avions reçus précédemment. Nous vivons des temps exceptionnels. Nous étions pressés la dernière fois. En sortant de ces séances, je me sens obligée de dire que le second examen objectif ne se fait pas en une nanoseconde. Ça prend du temps. En toute justice pour les personnes incarcérées, pour Service correctionnel Canada et pour les fonctionnaires, j’aimerais que nous réexaminions cet article. Cela ne veut pas dire que je serai pour ou contre. J’attends d’entendre les arguments.
La présidente : Merci. Je crois que le sénateur Klyne a quelque chose à dire, puis nous mettrons cette motion aux voix pour déterminer si nous pouvons retourner en arrière.
Le sénateur Klyne : Dans le même ordre d’idées que la sénatrice Omidvar, j’entends, entre autres, les mots « de fond ». C’est un énorme amendement. Comme l’a mentionné la sénatrice Omidvar, nous avons besoin de temps pour assimiler ceci, quelle qu’en soit la forme. À mon avis — que je développerai davantage si le réexamen a lieu — il y a ici trois gros obstacles. Je pourrais écouter les amendements, mais en fin de compte, il nous faudra peut-être avoir le temps de déterminer ce que cela signifie. Je ne suis pas sûr que nous arriverons à régler cela aujourd’hui.
La présidente : Nous avons entendu un nombre suffisant de points de vue. La permission est-elle accordée de revenir à l’article 10? Êtes-vous d’accord?
Des voix : D’accord.
Des voix : Avec dissidence.
La présidente : Sénatrice Pate, voulez-vous proposer un amendement?
La sénatrice Forest-Niesing : Je serais heureuse de le faire. Je vous demande d’être patients. Comme je l’ai précisé plus tôt, il s’agit ici du cœur de cette mesure législative. Je vous demande votre attention, mais je vous promets de ne pas en abuser. J’ai réduit à une page mes observations. J’espère que je peux couper dans le gras et vous donner les renseignements essentiels à prendre en compte.
Je commence donc par lire —
La présidente : Sénatrice Forest-Niesing, je cherche à m’assurer que tout le monde suit. Est-ce que tout le monde a une copie de l’amendement? Je veux m’en assurer parce que c’est un amendement de fond. C’est le KP-10.4(b).
La sénatrice Forest-Niesing : Conformément aux exigences procédurales, je vais lire l’amendement. Je propose :
Que le projet de loi C-83 soit modifié, à l’article 10 :
a) à la page 4, par substitution, aux lignes 28 à 34, de ce qui suit :
« 10 Les articles 32 à 37 sont remplacés par ce qui suit :
32(1) Le Service observe, à l’égard de l’isolement préventif ou de toute autre pratique consistant à séparer une personne incarcérée de la population carcérale générale :
a) les Règles des Nations Unies concernant le traitement des détenues et l’imposition de mesures non privatives de liberté aux délinquantes (Règles de Bangkok), adoptées le 21 décembre 2010;
b) les Règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus (Règles Nelson Mandela), adoptées le 17 décembre 2015;
c) les Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté, adoptées le 14 décembre 1990.
(2) Il est entendu que dans ces instruments, la mention « isolement cellulaire », « régime cellulaire », « isolement disciplinaire » ou « placement dans une cellule obscure » vaut mention de « isolement préventif » pour l’application de la présente loi. »;
b) à la page 5, par suppression des lignes 1 à 39;
c) à la page 6, par suppression des lignes 1 à 33;
d) à la page 7, par suppression des lignes 1 à 38;
e) à la page 8, par suppression des lignes 1 à 38;
f) à la page 9, par suppression des lignes 1 à 38;
g) à la page 10, par suppression des lignes 1 à 38;
(h) à la page 11, par suppression des lignes 1 à 30;
(i) à la page 12, par suppression des lignes 1 à 31;
(j) à la page 13, par suppression des lignes 1 à 37;
(k) à la page 14, par suppression des lignes 1 à 38;
(l) à la page 15, par suppression des lignes 1 à 24.
Comme j’ai entendu ma collègue, la sénatrice Seidman, le répéter plusieurs fois pendant que je vous lisais cet amendement pour le compte rendu, oui, l’amendement a pour effet d’abroger l’article 10. J’entends la surprise collective en réaction à cela, mais permettez-moi de vous expliquer l’incidence et l’objectif.
C’est, à première vue, un amendement dramatique. Le Bureau du légiste a confirmé qu’abroger l’article 10 est le moyen le plus simple d’arriver au but.
Le but est le suivant : l’abrogation de l’article 10 fait table rase et permet à cet amendement d’inclure les exigences internationales minimales en ce qui concerne les droits fondamentaux des personnes incarcérées. Cet amendement est particulièrement important, car, comme l’a soutenu la sénatrice Pate, il appuie la motion demandant la permission, à ce stade, de prendre en compte le fait que, entre le moment de l’élaboration de cette mesure législative à l’autre endroit et l’étude par notre comité de l’ébauche du projet de loi, le cadre juridique a complètement changé. Il a changé par suite de la décision de la Cour d’appel de l’Ontario rendue le 28 mars 2019, et il a changé en raison de l’opinion exprimée dans la décision de la Cour d’appel de la Colombie-Britannique. Ces deux décisions ont eu pour effet de rendre inconstitutionnel le contenu très important de l’article 10. Je soutiens, respectueusement, que ce serait une grave erreur de notre part d’ignorer le fait que le cadre juridique a changé, éliminant la constitutionnalité de cette mesure législative, et d’accepter une disposition qui contient des éléments contraires à notre Charte.
Cela dit, substituer ce que l’on propose à l’article 10 réduira la portée de celui-ci par rapport à l’amendement qui avait été proposé et qui avait causé un certain malaise chez les membres du comité. C'est un malaise que je partageais aussi, souvenez-vous.
La reconnaissance des normes internationales minimales établies dans les Règles Nelson Mandela, les Règles de Bangkok et les Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté, ainsi que l’exigence de leur respect par les services correctionnels, constituent un strict minimum. Plus précisément, en ce qui concerne les mineurs et les personnes souffrant d’une maladie mentale ou physique, il n’y a aucun changement.
Il y a, toutefois, un changement en ce qui concerne les femmes.
Il y a 10 jours, nous parlions de créer une section distincte pour toutes les femmes. Dans cet amendement, nous parlons de créer une exception qui est conforme aux Règles de Bangkok et s’applique aux femmes enceintes, qui ont de jeunes enfants ou allaitent. Rien de plus que cela et, en dépit du fait que j’ai probablement encore beaucoup de choses à dire, c’est le moment pour moi de mettre fin à mes observations et d’inviter vos questions concernant l’amendement.
[Français]
La sénatrice Bellemare : J’aimerais que vous m’expliquiez comment cet amendement est conforme au principe du projet de loi. Est-ce que cet amendement vient en contradiction avec le principe du projet de loi? Pour poser la question de manière plus positive, j’aimerais que vous m’expliquiez comment cet amendement est cohérent par rapport au principe du projet de loi. Je comprends que ce sont toutes les unités d’intervention structurée qui vont disparaître.
La sénatrice Forest-Niesing : Je vais tenter de donner une réponse concise à une question complexe.
[Traduction]
Les Unités d’intervention structurées créées à l’article 10 sont maintenant abrogées et remplacées par une attente ou une exigence plus générale de respect des Règles de Bangkok, des Règles Nelson Mandela et des Règles pour la protection des mineurs. Nous ne parlons pas d’UIS dans cet amendement.
[Français]
Rien dans cette loi, ni rien à cause de la loi ou du projet de loi tel qu’il était rédigé à l’origine, n’empêche le Service correctionnel de créer des UIS. Ces dernières auraient pu être créées depuis longtemps, conformément aux politiques de Service correctionnel Canada. Elles auraient pu être créées en dépit d’une exigence législative, et elles pourraient encore l’être, et ce, conformément aux politiques de Service correctionnel Canada. Rien n’empêche de créer ces unités.
Par contre, en éliminant ce langage et en remplaçant cet article par la confirmation selon laquelle nous nous conformons aux principes contenus dans les règles en question — les Règles de Nelson Mandela, les Règles de Bangkok et les règles destinées aux mineurs —, on assure le respect des critères internationaux minimaux non seulement par rapport aux catégories qui pourraient être exemptées de l’application d’une mesure de ségrégation ou de séparation carcérale, mais aussi en ce qui a trait à l’imposition d’une période maximale de 15 jours d’emprisonnement. Ce principe, précisément, est inconstitutionnel dans le projet de loi tel qu’il est rédigé actuellement. Nous avons entendu plusieurs témoins nous dire : « Il nous faut absolument un plafond de 15 jours. » Là-dessus, je n’ai aucun doute que, pour être constitutionnellement sain, le projet de loi doit au moins comporter cette disposition. En plus, il prévoit des mécanismes de revue judiciaire, comme l’a recommandé l’ancienne juge Louise Arbour, et il prévoit une exception pour les personnes souffrant d’incapacité physique ou mentale.
Je ne suis pas sûre d’avoir répondu à votre question, mais, essentiellement, en dépit du fait qu’on ne parle pas des UIS, ce n’est pas autour de ce sujet que devrait tourner la discussion. La discussion, de même que notre attention, devrait porter sur le respect d’un ensemble de règles minimales prévues dans les conventions internationales.
[Traduction]
La sénatrice Seidman : Merci beaucoup, sénatrice Forest-Niesing, de cette explication approfondie en réponse à la question de la sénatrice Bellemare, parce que c’était vraiment le fond de la question, n’est-ce pas? Je vous en suis reconnaissante.
Je reconnais aussi que vous tentez d’instituer des Règles des Nations Unies pour le traitement des prisonnières, ainsi que des normes fondamentales.
Je suis encore sous le choc, parce que j’ai l’impression que nous éviscérons complètement ce projet de loi en retirant son objet principal qui était l’établissement des unités d’intervention structurées. J’aimerais revenir, cependant, sur la prémisse fondamentale de tout ceci. Les fonctionnaires pourraient peut-être répondre à ma question parce que la prémisse est que toutes les décisions de tribunaux ont déjà été rendues, et que l’intervalle entre la création de ce projet de loi et les décisions prononcées rendent maintenant inutile et inconstitutionnelle cette mesure législative.
J’aimerais m’en assurer, parce que, si j’ai bien compris, il y a des tribunaux qui n’ont pas encore rendu leur décision. Il y a donc des causes en instance. J’aimerais que les fonctionnaires nous parlent de la question des décisions des tribunaux quant à la question de la constitutionnalité.
Juline Fresco, avocate, ministère de la Justice Canada : Merci de votre question. C’est exact. L’état du droit quant à l’isolement préventif fluctue continuellement. De fait, presque chaque décision a été portée en appel et, pour vous l’expliquer sans entrer dans des détails trop techniques, je dirais qu’il y a deux litiges constitutionnels. Un vient de la Colombie-Britannique, que je désigne par la BCCLA, la British Columbia Civil Liberties Association, et la Cour suprême a rendu sa décision, mais celle-ci a été portée en appel. Nous attendons cette décision, qui n’a pas encore été rendue. Nous espérons la voir bientôt, mais elle n’a pas encore été rendue.
Vous avez mentionné la CCLA, celle de l’Ontario, l’Association canadienne des libertés civiles. C’était ce dont vous avez parlé en ce qui concerne la limite ferme de 15 jours. C’est exact. Cependant, le Canada a demandé la permission de porter appel à la Cour suprême du Canada, et nous attendons encore la décision de cette dernière. Aussi, un des recours collectifs est également porté en appel. Je dirais donc que, oui, toutes ces causes sont en appel.
La sénatrice Seidman : Bien, merci. C’est très utile, parce que cela signifie que rien n’est définitif. Ce n’est pas comme si tout avait changé depuis que le projet de loi a été déposé.
Je respecte et comprends tout à fait ce que vous tentez de faire ici, mais nous n’avons toujours pas des décisions définitives de la Cour suprême et je reste sur l’impression que nous outrepassons les choses avec cela. Si la Cour suprême finit par se prononcer contre toutes ces causes, ce serait une autre histoire. Il nous faudra alors revenir à la case départ en nous disant : « Ce projet de loi ne respecte plus les décisions de la Cour suprême. »
Cependant, je ne suis pas prête maintenant à vider le projet de loi de sa substance sur l’hypothèse que ces causes sont perdues, en fin de compte, du côté de la Cour suprême.
La sénatrice Omidvar : J’ai obtenu réponse à mes questions. J’aimerais revenir avec une réflexion sur les diverses discussions que nous avons eues au Sénat et en comité sur les questions de constitutionnalité. Je ne suis pas une avocate et encore moins une constitutionnaliste; cependant, plusieurs de mes collègues le sont et je ne saurais compter le nombre de fois où ils ne s’entendaient pas sur les questions de constitutionnalité.
Je me suis disciplinée à écouter ceux et celles qui le sont, mais ce n’est pas mon travail. Je ne peux pas remettre en question l’opinion de la Cour suprême. Je ne peux tout simplement pas faire cela.
En ce qui concerne ce que vous avez dit au sujet des conventions internationales, je crois que vous avez soulevé un très bon point : le Canada est partie aux Règles Nelson Mandela et aux Règles de Bangkok. Ces règles sont des aspirations de notre part, mais elles n’ont pas force de loi. Je me souviens encore du sénateur Boehm nous expliquant en chambre, avec grande éloquence, la différence entre les conventions, les traités, les contrats, et cetera.
Pour en revenir à la question de l’objectif du projet de loi, je pourrais peut-être poser la question à nos fonctionnaires ici. Si cet amendement est adopté, quelles en seront les répercussions sur l’objectif du projet de loi?
Mme Arnet Connidis : En précisant que je viens tout juste de voir un amendement important, je dirais que les Règles Nelson Mandela visent essentiellement l’isolement cellulaire. Certaines personnes appellent ça l’isolement préventif. Cela ramènerait l’isolement cellulaire, avec des paramètres. Même avec une limite de 15 jours, il restera certaines personnes qui présenteront encore un danger si elles sont relâchées dans la population; il faudrait donc un autre mécanisme qui n’est pas l’isolement préventif, mais protégerait la sécurité. Ce serait probablement un genre d’unité d’intervention structurée. De fait, deux années moins un jour d’isolement préventif n’offriraient pas autant qu’une unité d’intervention structurée. Ensuite, si ces personnes présentent encore un danger, elles devront être placées dans une sorte d’UIS, mais sans le pouvoir d’une surveillance externe, et cetera. Sachez bien que je viens tout juste de voir cela.
La sénatrice Omidvar : Merci.
Le sénateur Munson : Pour dire les choses comme elles sont, tout cela est bien complexe. Nous examinons de nouveau cet après-midi toutes ces règles que nous avons étudiées, vues précédemment et adoptées, certaines dans le cadre de nos travaux internationaux. Ensuite, le gouvernement et les fonctionnaires produisent un projet de loi qui, d’après eux, répond à un besoin. Ensuite, nous examinons de nouveau ce que nous avons devant nous, formulé différemment pour la première fois. La complexité de tout cela empêche presque de prendre une décision.
Je m’abstiens rarement. Sénatrice Pate, j’ai travaillé avec vous et j’ai visité les prisons en ma qualité de président du Comité des droits de la personne. Je comprends, je vois. Je vois l’intention louable du gouvernement dans ses efforts à cet égard. Je vois aussi les causes en instance. À vrai dire, je vois des choses qui dépassent mon entendement.
J’ignore si je devrais admettre cela à ce stade, après avoir siégé au Sénat pendant de nombreuses années. Toutefois, quand on examine un paragraphe ou un alinéa qu’il faut mettre en contexte et comprendre, même du point de vue des droits de la personne, j’ai beaucoup de compassion. Je précise, pour le compte rendu, que je vais probablement m’abstenir en ce qui concerne cette question. Merci.
La sénatrice Pate : Merci pour tous les points que vous avez soulevés. J’aimerais revenir à un point qui a été soulevé, selon lequel le projet de loi avait pour objectif la création des unités d’intervention structurées. En fait, l’objectif du projet de loi déclaré par le ministre était d’éliminer le recours à l’isolement. Comme l’ont précisé de nombreux témoins, et notamment l’enquêteur correctionnel, les UIS auraient pu être créées sans une loi. Il est manifeste que cette loi est motivée par les procès dont nous avons parlé, et, depuis ces procès, différentes décisions ont été rendues. Elles sont en appel, mais il est clair que tous les tribunaux ont convenu que l’isolement est non recommandé et que les règles des Nations Unies pourraient s’appliquer.
Si le projet de loi a pour objectif d’éliminer l’isolement, je soutiens qu’en notre qualité de sénateurs, nous avons le devoir de contribuer à ce processus. Un des moyens de le faire — bien que, à mon avis, c’est encore insuffisant — serait l’approche de la sénatrice Forest-Niesing et de l’amendement que j’espère présenter. Cela nous aiderait à atteindre ce but, nous aiderait à combler le gouffre jusqu’à ce que la Cour suprême du Canada rende une décision et que nous ayons une certaine mesure de responsabilité à l’endroit de ceux qui sont en isolement, quel qu’en soit le nom : Unités d’intervention structurées, isolement cellulaire, isolement préventif, observation de l’état mental, soins psychiatriques intensifs, pavillon de sécurité — quel qu’en soit le nom, qu’il y ait une certaine mesure de surveillance. Cette loi ne prévoit pas cela.
La preuve, 90 jours s’écouleraient — bien après qu’une personne ait subi de graves conséquences — avant d’en arriver au stade de l’examen. Je crois que nous avons l’obligation d’agir différemment.
Comme vous l’avez peut-être vu ces derniers temps, les médias ont parlé d’autres exemples qui sont liés non pas à l’isolement des détenus, mais à des allégations d’agressions sexuelles. Ces agressions n’ont pas été signalées à la police. Le signalement aux autorités sur place ou à la police ne s’est pas fait avant trois mois, peut-être plus. On parle même de délais de sept ans durant lesquels des éléments de preuve ont été détruits. Des policiers impliqués m’ont dit que les éléments de preuve qui auraient dû être produits ont été supprimés. C’est ce genre de problèmes qu’il faut régler. En réalité, nous parlons de détenus qui sont enfermés dans des cellules verrouillées et à qui on interdit de faire un appel téléphonique ou d’avoir des contacts avec d’autres personnes, qui comptent sur les structures actuelles pour assurer la surveillance. Nous suggérons que de mettre en place d’autres mécanismes de reddition de comptes.
La présidente : Merci.
La sénatrice Stewart Olsen : J’écoute avec grand intérêt. J’entends les commentaires de personnes très compétentes qui savent vraiment de quoi elles parlent. Ce n’est pas mon cas puisque je n’ai pas suivi le processus autour du projet de loi. En vous écoutant, je me demande si ce projet de loi devrait aller de l’avant. Peut-être le gouvernement devrait-il le remanier au complet. Je ne vois pas l’intérêt de discuter d’amendements à un projet de loi aussi imparfait. C’est beaucoup de travail et, comme tout le monde l’a reconnu, nous ne sommes pas des constitutionnalistes. Nous ne savons pas vraiment de quoi nous parlons. Après avoir entendu tous les témoignages, je crois que le comité devrait recommander que le projet de loi ne soit pas adopté dans sa forme actuelle, mais qu’il soit remanié en tenant compte des jugements attendus de la Cour suprême. Les uns après les autres, vous avez soulevé les lacunes du projet de loi et les risques qu’il soit déclaré inconstitutionnel. C’est un de nos mandats de base. Si les lacunes d’un projet de loi nous semblent tellement importantes que sa constitutionnalité est mise en doute, je crois qu’il ne devrait pas être adopté.
La sénatrice Forest-Niesing : Je suis très troublée d’entendre que le projet de loi ne devrait peut-être pas être adopté. Cela m’inquiète après avoir entendu tant de témoins réclamer haut et fort un changement de culture. Les garanties prévues dans le projet de loi, et notamment par l’amendement que je propose, sont essentielles. En plus de prévoir des garanties essentielles, l’amendement que je propose, s’il est adopté, apportera certaines corrections nécessaires à ce projet de loi très imparfait, comme nous en avons tous convenu, en raison du contexte judiciaire ou juridique actuel.
Si je reviens au point soulevé plus tôt relativement au fait que l’état du droit demeure indéterminé ou imprécis... Je sais, il existe un risque que des décisions soient annulées, mais je ne peux faire abstraction du fait que l’état du droit est ce qu’il est aujourd’hui. Les tribunaux ont formulé des avis qui vont dans le sens de l’amendement que je propose. Si jamais la Cour suprême du Canada rend un jugement contraire, il sera toujours temps d’apporter des modifications. Je crois que le projet de loi est mieux que rien. Il serait insensé d’essayer de le rendre parfait, mais absolument rien ne nous empêche d’apporter ces amendements essentiels. Je dirais même que c’est notre devoir.
La sénatrice Seidman : Avant de faire un nouveau tour de table, je tiens à dire que je suis tout à fait d’accord avec les sénatrices Forest-Niesing et Pate. Je partage aussi l’avis de la sénatrice Omidvar et du sénateur Munson concernant l’immense complexité du processus. C’est clair que le projet de loi sous nos yeux est loin d’être parfait. Je comprends tout cela. Mes oreilles résonnent encore de l’écho du débat très houleux suscité par les questions constitutionnelles à l’étape de la deuxième lecture à la Chambre.
En même temps, je ne peux pas donner le feu vert à un amendement aussi important. Je trouverais plus judicieux de soumettre ce type d’amendement, ou cet amendement précis, à une troisième lecture à la Chambre. Cela nous permettrait de réentendre les avocats de droit constitutionnel et les grands sages qui sont venus nous éclairer à la deuxième lecture. J’aimerais connaître leur point de vue et leurs arguments au sujet de cet amendement, parce que je leur accorde énormément de valeur.
Je comprends bien les principes que vous défendez, je vous assure. Par contre, je suis convaincue qu’il faut en débattre de manière approfondie à l’étape de la troisième lecture à la Chambre. Cela nous permettrait d’entendre les points de vue éclairés de ceux de nos collègues qui peuvent parler avec une réelle autorité de la constitutionnalité de l’article 10.
La sénatrice Eaton : Je vais enfiler le costume de la cynique « qui en a vu d’autres depuis 10 ans ». Le ministre Goodale a énormément d’expérience. Nous étudions un projet de loi éminemment complexe. Je n’arrive pas à me faire à l’idée qu’il a délibérément fermé les yeux sur ce qui passe à la Cour suprême, ou que le ministère de la Justice n’en a pas tenu compte. Nous pouvons continuer de discuter — la sénatrice Pate en connaît plus au sujet des prisons que nous tous réunis —, mais si c’était l’intention derrière ce projet de loi, les amendements ne seront tout simplement pas adoptés.
Nous pouvons continuer de débattre jusqu’à ce que les poules aient des dents. Je l’ai vu avec le cannabis. Je l’ai vu avec le projet de loi sur le droit à la vie. Les amendements que nous avons proposés au projet de loi sur le cannabis n’étaient pas si importants. Ils portaient sur l’interdiction de la publicité s’adressant aux jeunes, l’indication de la puissance du cannabis sur les emballages, ce genre de choses. Le gouvernement les a rejetés. C’est son droit. Ce que je veux dire, c’est que si nous adoptons un amendement très complexe que le gouvernement juge incompatible avec l’intention de son projet de loi, nous pouvons toujours espérer, mais nous ne le ferons pas changer d’idée.
Pour obtenir des changements, nos propositions doivent être simples. J’ai appuyé les amendements proposés par le sénateur Kutcher en matière de santé mentale. Ils m’ont semblé raisonnables. C’est quelque chose que les établissements carcéraux pourraient et devraient faire. Leurs représentants nous ont dit eux-mêmes que 80 p. 100 des détenus présentent une forme ou une autre de maladie mentale. Bref, si nos propositions sont trop complexes, nous nous compliquons inutilement la vie parce qu’elles seront rejetées de toute façon.
La sénatrice Omidvar : J’aimerais revenir sur ce que la sénatrice Stewart Olsen a dit concernant le fait que le projet de loi est si imparfait qu’il ne devrait pas aller de l’avant.
Je sais que je suis loin d’avoir votre expérience, mais, depuis que je siège au Sénat, je n’ai jamais vu de projet de loi parfait. Tous les projets de loi sont imparfaits. Mes années de militantisme m’ont appris que le changement est rarement radical. C’est toujours un processus graduel. Jusqu’ici, si je ne m’abuse, nous avons approuvé les amendements concernant l’évaluation de la santé mentale. Nous avons apporté des modifications aux dispositions sur les mesures de rechange — pour obliger la prise en considération des mesures de rechange à l’isolement. Nous venons aussi d’approuver un amendement concernant l’affectation des ressources financières en fonction des priorités.
Je pense à un élément du projet de loi qui n’a pas été mentionné, soit l’augmentation de deux à quatre heures du temps pendant lequel les détenus devront avoir des contacts humains réels. Je pense à ces personnes... Je tiens à dire tout le respect et toute l’admiration que m’inspire votre travail assidu et en profondeur, sénatrice Pate, et je n’ai certainement pas une connaissance aussi approfondie. Toutefois, je suis un être humain et je peux m’identifier à quelqu’un qui est isolé dans une cellule, à ce que cela signifie d’avoir quatre heures de contact plutôt que deux.
L’espoir fait vivre, comme on dit. C’est ma nature. Nous pouvons continuer d’améliorer le projet de loi. Je suis tout à fait contre l’idée de le rejeter, de l’abandonner maintenant. Je propose que nous votions sur l’amendement proposé.
La présidente : Tout d’abord, avez-vous autre chose à ajouter avant que nous passions au vote?
La sénatrice Dasko : J’ai des questions au sujet de l’amendement. Comme j’ai accompagné la sénatrice Pate à l’établissement de Collins Bay cette semaine, je suis maintenant une experte des établissements carcéraux. Désolée pour cette remarque. Je voulais alléger un peu l’atmosphère.
Bien entendu, j’ai trouvé très instructif de voir de mes propres yeux les conditions d’isolement et la configuration d’une prison.
Ma question est relativement simple. Est-ce que le libellé du paragraphe 32(1) du projet d’amendement entraînerait des modifications dans la façon dont ces établissements sont administrés? Le texte exact est le suivant :
32(1) Le Service observe, à l’égard de l’isolement préventif ou de toute autre pratique consistant à séparer une personne incarcérée de la population carcérale générale [...]
La plupart des détenus sont séparés de la population carcérale générale, à cause de la configuration de l’établissement. Il est divisé en plusieurs secteurs et les détenus sont séparés de la population générale. Est-ce que l’amendement changera cela? Est-ce qu’il touchera seulement l’isolement ou d’autres pratiques de séparation des détenus de la population générale? À Collins Bay, par exemple, personne ne fait partie de la population générale. L’établissement est divisé en trois secteurs, et les détenus sont répartis dans des secteurs séparés. Personne ne fait partie de la population générale.
Ma question est la suivante : votre amendement changera-t-il le mode d’administration de l’établissement dans son ensemble?
La sénatrice Forest-Niesing : Je vous ai écoutée attentivement. Je ne suis pas certaine d’être d’accord avec votre interprétation. Je vous assure que ce n’est certainement pas l’intention. L’intention n’est pas d’appliquer la disposition à tous les établissements carcéraux dans lesquels des détenus sont séparés de la population générale parce que l’organisation ou la structure exige la formation de sous-groupes ou certaines divisions au sein de la population carcérale ou générale, si nous choisissons cette expression.
La sénatrice Dasko : Est-ce qu’on peut dire que le libellé de l’amendement pose problème?
La sénatrice Forest-Niesing : Si vous me le permettez, je vais demander à la sénatrice Pate de répondre à cette question.
La sénatrice Pate : Ce que vous avez vu à Collins Bay est le fruit du regroupement de plusieurs établissements qui étaient auparavant séparés. Ce regroupement s’inscrit dans un effort de réduction du déficit qui a été engagé par le service correctionnel il y a une dizaine d’années afin de réduire. Oui, il existe une population générale dans l’unité à sécurité maximale, une autre dans l’unité à sécurité moyenne et une dernière dans l’unité à sécurité minimale, à l’extérieur. Des programmes et des services sont offerts à chaque population, décrite comme une population générale.
J’avoue que c’était un peu déroutant parce que dans son allocution, le ministre a parlé des cellules d’isolement qui ressemblaient beaucoup aux cellules de l’unité à sécurité maximale. Il est clair que dans les pénitenciers pour femmes, le recours aux unités d’isolement a pris la même ampleur que dans certaines unités pour hommes, comme nous l’avons vu dans l’unité à sécurité maximale de Collins Bay.
Il s’agit effectivement d’un autre problème qui n’est pas traité dans le projet de loi. Les amendements proposés visent certains problèmes liés aux conditions d’isolement, mais aucun ne concerne les problèmes particuliers qui découlent du regroupement de plusieurs établissements.
La sénatrice Dasko : Ce que je dis, c’est que personne ne fait partie de la population générale. Les détenus se trouvent déjà dans des unités séparées. Quand je lis l’amendement, il me semble qu’il touche l’ensemble de l’établissement. Vous dites... C’est ce que je comprends, c’est tout.
La sénatrice Pate : Dans la plupart des établissements carcéraux, les détenus sont répartis selon la cote de sécurité qui leur est attribuée. Dans certains établissements, les détenus à sécurité minimale et moyenne sont mélangés, mais les détenus à sécurité maximale sont habituellement séparés.
Le sénateur Munson : Je crois fermement qu’après avoir écouté tout le monde, une troisième lecture — et aussi les arguments convaincants des sénateurs qui connaissent le droit constitutionnel et toutes ces questions, comme le sénateur Joyal et d’autres... Cela me semble vraiment la meilleure avenue. Notre ne sommes qu’un comité à qui on demande d’étudier une mesure législative capitale. Le point de vue d’un comité peut avoir un certain poids. Quand le Sénat s’exprime en tant qu’assemblée parlementaire, son point de vue a encore plus de poids. Si les gens sont convaincus à l’étape de la troisième lecture que c’est ce qu’ils souhaitaient, alors c’est ce qui se passera.
En revanche, attendez-vous à devoir reprendre le combat parce que si le projet de loi est renvoyé avec cet amendement, comme nous l’avons déjà entendu, il n’obtiendra pas l’appui du gouvernement. Ce sera fatal. Le gouvernement le rejettera et il nous reviendra. Il faudra recommencer. Serez-vous prêts à reprendre le combat? Cela reste à voir. Je comprends le rôle des sénateurs. Je comprends qu’on nous demande d’améliorer, d’amender et de renvoyer le projet de loi à l’autre chambre, selon le processus établi. Au bout du compte, et je le dis du haut de mes 16 années d’expérience, je ne crois vraiment pas que nous pourrons continuer la guerre de tranchées et que nous réussirons à faire pencher la balance.
Personnellement, je pense que peu importe nos nobles et merveilleuses intentions de ce côté-ci, les élus ont toujours le dernier mot. Merci.
La sénatrice Forest-Niesing : J’aurais une question. Vous me corrigerez si je me trompe, mais si le comité choisit de remettre l’examen de l’amendement à l’étape de la troisième lecture et qu’il est rejeté après un vote en comité, alors le Sénat n’aura pas l’occasion de l’examiner en troisième lecture, n’est-ce pas? C’est possible?
La présidente : Oui.
La sénatrice Forest-Niesing : Je suis rassurée. C’était tout ce que j’avais à dire.
Le sénateur Klyne : Plusieurs points ont été soulevés. Vous nous avez demandé si nous avions quelque chose à ajouter. Je n’ai rien à ajouter aux remarques du sénateur Munson ni à celles de la sénatrice Eaton. J’aimerais toutefois revenir sur une observation qui a été faite lors d’une réunion précédente du comité, par la sénatrice Seidman, je crois. Son avis éclairé était que nous devrions attendre la troisième lecture pour discuter des questions constitutionnelles.
Je pense en effet que le projet de loi, tel qu’il est présenté et compte tenu des amendements qui y sont apportés, respectera les exigences constitutionnelles. C’est pour nous en assurer que nous travaillons actuellement à l’améliorer. Pour ce qui concerne la séparation des individus, différents facteurs entrent en ligne de compte. Elle peut être nécessaire pour leur propre sécurité, celle des autres et celle du personnel. Les détenus ne sont pas tous prêts à sortir le 15e jour. Certains peuvent l’être le deuxième jour. La santé mentale et le bien-être jouent un rôle prépondérant, comme nous en avons déjà parlé.
Je soumets ces éléments à la réflexion du comité. Je n’en fais pas partie, mais je crois fermement qu’il faut aller de l’avant. Je ne crois pas que c’est le moment maintenant, mais si jamais des questions constitutionnelles surgissent, elles devraient être examinées en troisième lecture.
La sénatrice Pate : Je tiens à préciser, contrairement à ce qui a été dit au sujet de la prolongation de deux à quatre heures de la durée des contacts réels, que ce n’est pas ce que dit le projet de loi. Il y est prévu que les détenus devront passer quatre heures hors de leur cellule au lieu de deux. Des témoins ont mentionné que les détenus pourraient quand même rester en isolement et qu’il reste des problèmes importants concernant les contacts puisque des agents correctionnels pourront être présents et qu’il y aura toutes sortes d’exigences administratives.
Il faut faire attention à nos conclusions. Ce passage ne parle pas du tout de quatre heures de contacts réels.
La présidente : Nous avons eu une discussion très riche et je vous en remercie. Je crois que nous avons tous saisi qu’il s’agit d’un amendement complexe, important et aux conséquences très vastes.
Merci de vos commentaires éclairés et respectueux. Sénatrice Forest-Niesing, comme vous proposez l’amendement, je vous accorde 30 secondes.
La sénatrice Forest-Niesing : Nous pourrions gagner beaucoup de temps. Ce que j’entends, c’est que le comité s’inquiète de la portée et de l’incidence de cet amendement. Je vois très bien. Je comprends aussi que certains membres préféreraient qu’il fasse l’objet d’un débat approfondi en troisième lecture. Plutôt que de le soumettre au vote et de risquer que cet amendement très important soit rejeté, je serais prête à le retirer et à le soumettre de nouveau à un examen approfondi en troisième lecture. Toutefois, je tiens à ce qu’il soit consigné au compte rendu que j’appuierai l’amendement tel qu’il est libellé à l’étape de la troisième lecture.
Je vous invite dans l’intervalle à nous poser vos questions, à la sénatrice Pate et à moi-même, afin que nous puissions vous convaincre de l’importance de corriger les lacunes les plus flagrantes du projet de loi.
La présidente : Merci beaucoup. Nous devons cependant obtenir l’accord du comité pour retirer cet amendement. Êtes-vous d’accord pour que la sénatrice Forest-Niesing retire l’amendement?
Des voix : D’accord.
La présidente : Avec dissidence.
M. Charbonneau : Faut-il que le consentement soit unanime?
La présidente : Je suis désolée. Il faut le consentement du comité, donc il doit être unanime.
Des voix : D’accord.
La présidente : Merci.
Sénatrice Pate?
La sénatrice Pate : Voici ma proposition :
Que le projet de loi C-83 soit modifié, à l’article 10, à la page 5, par substitution, aux lignes 20 et 21, de ce qui suit :
« 33 (1) Toute incarcération dans une unité d’intervention structurée prend fin le plus tôt possible. Sauf si une cour supérieure l’autorise en vertu du paragraphe (2) [...]
La présidente : Le texte de l’amendement est distribué actuellement. Est-ce que c’est l’amendement KP-10.5?
La sénatrice Pate : Il en existe deux versions.
L’amendement KP-10.4c n’est pas la bonne version. Il a été remplacé par l’amendement KP-10.5.
Je propose :
Que le projet de loi C-83 soit modifié, à l’article 10, à la page 5, par substitution, aux lignes 20 et 21, de ce qui suit :
« 33 (1) Toute incarcération dans une unité d’intervention structurée prend fin le plus tôt possible. Sauf si une cour supérieure l’autorise en vertu du paragraphe (2), cette incarcération ne peut durer plus de quarante-huit heures.
(2) Sur demande du Service, la cour supérieure peut prolonger la durée de la période mentionnée au paragraphe (1) selon ce qui lui semble indiqué si elle estime que la prolongation est nécessaire pour les fins énoncées au paragraphe 32(1). ».
Cela nous ramène à la question de la constitutionnalité. C’est aussi conforme aux témoignages que nous avons entendus concernant la nécessité d’exercer une surveillance et au large consensus parmi les témoins selon lequel la surveillance du service correctionnel par les tribunaux, tel que l’a recommandé l’ancienne juge de la Cour suprême Louise Arbour, est la meilleure façon d’assurer efficacement le respect des droits de la personne et de la règle de droit. C’est aussi ce que la jurisprudence nous enseigne et ce qui ressort des témoignages au sujet de l’apparition de préjudices après 48 heures, ou plusieurs heures d’isolement. S’il existe une bonne raison, une raison légitime de maintenir une personne en isolement pendant plus longtemps, la responsabilité reviendra au Service correctionnel du Canada de soumettre une demande à une cour supérieure. Une décision pourra être prise.
Cela fait du Service correctionnel du Canada la dernière branche de l’administration de la justice à qui la Charte est appliquée et à être visée par ce genre de dispositions. C’est déjà le cas des dispositions sur la liberté sous caution, les mandats de perquisition et le droit aux services d’un avocat. Par contre, cela ne s’applique toujours pas aux dispositions concernant l’emprisonnement ou le placement en isolement à l’intérieur d’un établissement carcéral.
D’aucuns ont soulevé l’argument du trop grand nombre de cas. Selon les propres chiffres du Service correctionnel du Canada, il y aurait actuellement 300 hommes et 3 femmes environ en isolement. On peut penser que l’amendement incitera le service à recourir moins souvent à l’isolement et augmentera le nombre de mises en liberté. Par ailleurs, il pourrait soutenir les efforts des autorités correctionnelles, qui nous ont dit ne pas avoir recouru au placement en isolement pendant certaines périodes. C’est aussi ce que des experts nous ont affirmé.
Les arguments du Service correctionnel du Canada pour expliquer son opposition à une surveillance judiciaire ne sont pas sans rappeler ceux des policiers à l’époque de l’adoption de la Charte, il y a 40 ans. Ils affirmaient alors que les suspects auraient le temps de s’enfuir pendant qu’ils leur liraient leurs droits, que les éléments de preuve disparaîtraient avant qu’ils obtiennent un mandat de perquisition et que le processus serait échu avant la révision de la mise en liberté sous caution.
La Cour suprême du Canada vient tout juste de confirmer l’importance de ces révisions de la mise en liberté sous caution, même s’il y en a des milliers en même temps et malgré les délais dans les procédures judiciaires. Les chiffres sont beaucoup moins faramineux dans le cas qui nous occupe.
La présidente : Y a-t-il des questions ou des commentaires? Je sais que les fonctionnaires voudraient intervenir à ce propos.
Le sénateur Klyne : J’aimerais demander des précisions. J’avais aussi des questions pour les fonctionnaires concernant le passage « Sauf si une cour supérieure l’autorise [...] cette incarcération ne peut durer plus de quarante-huit heures » au paragraphe 33(1). J’essaie de comprendre la procédure exacte. Qui fera la demande à une cour supérieure?
La sénatrice Pate : Le Service correctionnel du Canada.
Le sénateur Klyne : Chaque fois que la limite de 48 heures serait dépassée, le service devra s’adresser à une cour supérieure?
La sénatrice Pate : Si le service veut placer un détenu en isolement et qu’il doit demander l’autorisation d’une cour, il s’agirait d’un mécanisme de contrôle en quelque sorte
Le sénateur Klyne : Dans chaque cas, il devra s’adresser à une cour supérieure?
La sénatrice Pate : C’est exact.
Le sénateur Klyne : Cette proposition pose plusieurs questions. Elle vise le bien des individus et il est évident que c’est ce qui doit être fait, mais faut-il vraiment qu’une cour supérieure intervienne?
La sénatrice Pate : Si la personne est d’accord et que la demande est faite à une cour supérieure, cela suffirait probablement à convaincre le juge.
Le sénateur Klyne : La question suivante concerne le fait que la Cour supérieure pourrait, si le service le lui demande... Là encore, chaque fois qu’il voudra prendre une mesure, il devra demander la permission. Pourquoi ne pas mettre à contribution le Bureau de l’enquêteur correctionnel? Il peut intervenir au même titre qu’un le décideur externe indépendant. Si jamais quelqu’un veut faire annuler une décision du bureau ou d’un décideur externe indépendant, il y aurait toujours la possibilité d’en appeler à une cour supérieure. Je le répète, je m’étonne qu’on propose que l’autorisation d’une cour supérieure soit exigée chaque fois et dans chaque cas.
La sénatrice Pate : L’enquêteur correctionnel n’a aucun pouvoir décisionnel. C’est l’une des raisons à l’origine de cette recommandation. Vous avez entendu Ivan Zinger recommander une surveillance judiciaire pour cette raison, comme tant d’autres. Comme je l’ai déjà dit, beaucoup d’initiatives... Je pense à Ashley Smith, aux événements à la prison des femmes, à Matthew Hines et à d’innombrables autres incidents mettant en cause des détenus. On ne compte plus les exemples d’inaction du Service correctionnel du Canada dans des situations où il était censé agir de sa propre initiative et appliquer ses propres politiques ou les lois qui le régissent.
Le sénateur Klyne : Sans vouloir nier les problèmes passés et actuels, si jamais les dispositions proposées dans le projet de loi sont mises en application, je pense que les problèmes seront atténués. Si ce n’est pas le cas... Beaucoup de problèmes seront atténués si les établissements se conforment au projet de loi. Nous devons parler de la manière dont les choses pourraient évoluer, pas de ce qui est arrivé par le passé. Le projet de loi doit marquer un pas en avant.
J’aimerais demander aux fonctionnaires ce qu’ils en pensent...
La sénatrice Pate : Je suis désolée de vous interrompre, mais si c’était vraiment le cas, les dispositions de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition seraient appliquées et nous n’aurions pas cette discussion sur la réduction des garanties procédurales qui existent, mais qui ne sont pas appliquées.
Sauf votre respect, l’exemple que j’ai donné tout à l’heure concernant les allégations d’agressions sexuelles se déroule en ce moment même. C’est une discussion que j’ai eue ce matin. En réalité, d’entendre des gens dire que les choses vont changer avec une mesure dans sa forme actuelle n’a rien de rassurant pour quiconque est au courant de ce qui se passe dans notre système carcéral.
La présidente : Je crains que la discussion se transforme en débat. Je sais que la sénatrice Seidman veut intervenir. Avez-vous des questions à poser aux fonctionnaires? Avez-vous autre chose à ajouter?
Mme Arnet Connidis : Le processus de soumission de demandes aux tribunaux n’est jamais rapide. Nous n’avons pas consulté les tribunaux relativement au surplus de travail, ce que nous aurions fait dans le cadre d’un processus judiciaire. J’en prends note.
Louise Arbour a fait des propositions fortes et très judicieuses, mais elle recommandait un délai de 30 jours avant que l’intervention des tribunaux soit sollicitée. Elle a aussi concédé que la surveillance judiciaire pourrait s’avérer impossible et que, dans ce cas, un processus externe indépendant pourrait être enclenché après 30 jours. Elle a cependant précisé que ce travail devrait être confié à des avocats. À notre avis, la surveillance externe devrait être exercée par des personnes qui connaissent bien les procédures en droit administratif.
Il faut placer les recommandations pertinentes de Louise Arbour dans un contexte plus large. Je vais m’arrêter ici, sauf si vous avez d’autres questions.
La sénatrice Seidman : Je voulais savoir entre autres si le processus de demande à une cour supérieure était long. Je crois que vous avez donné la réponse.
Mme Fresco : Les détenus ont différents choix. L’habeas corpus est plus rapide, mais le processus de demande de contrôle judiciaire peut être assez long.
La sénatrice Seidman : Je m’intéresse plus particulièrement à ce qui est proposé dans l’amendement concernant un placement en isolement pour plus de 48 heures.
Mme Fresco : Comme l’a mentionné Mme Connidis, nous n’avons pas consulté les tribunaux et je ne peux donc pas me prononcer pour l’instant. Selon ce que je sais pour l’instant, une cour supérieure pourrait intervenir à moins d’une autorisation contraire d’une cour supérieure, mais cela ne dit pas comment elle recevra la demande et rendra une décision. Ce n’est pas indiqué sur la page.
La sénatrice Seidman : Mon autre question porte sur le passage « prend fin le plus tôt possible » du paragraphe 33(1).
Je pense que la question s’adresse à la sénatrice Pate. Il est prévu que l’incarcération « prend fin le plus tôt possible », mais il est dit immédiatement après qu’elle « ne peut durer plus de quarante-huit heures ».
La sénatrice Pate : Merci de poser cette question. Il est précisé que la période maximale est de « quarante-huit heures » en raison des préjudices encourus au-delà de cette limite. C’est un fait bien établi. Toutefois, cela ne signifie pas que l’incarcération ne peut pas être prolongée. Si un juge est convaincu — et je présume que toutes les raisons justifiant la prolongation seraient présentées — qu’il existe de bonnes raisons de maintenir une personne en isolement, il pourra délivrer une ordonnance à cet effet. L’objectif est d’éviter que cette pratique reste aussi fréquente qu’elle l’a été par le passé.
Je rappelle que Louise Arbour a formulé ces recommandations il y a 23 ans déjà. Quiconque l’a entendue parler de cette question récemment — elle ne met pas de gants blancs et elle affirme aujourd’hui que le délai devrait être de 24 ou 48 heures. Il y a 23 ans, quand elle a fait ces recommandations, nous n’avions ni l’expertise ni les connaissances que nous avons maintenant sur les conséquences de l’isolement.
Ce matin, les policiers ont aussi parlé du fait que lorsque les autorités correctionnelles veulent porter des accusations criminelles contre quelqu’un — ils ont donné l’exemple d’une personne qui crache près du pied de quelqu’un — elles appellent la police pour qu’une accusation soit déposée. On n’hésite jamais à recourir aux tribunaux dans ce genre de situations, beaucoup plus nombreuses que les 300 cas par année au maximum dont nous parlons ici. Je pense que si nous demandons leur avis aux tribunaux, compte tenu surtout des décisions qu’ils sont appelés à rendre actuellement, ils n’auraient aucune réticence à recevoir chaque année 10, 20 ou 30 demandes du genre dont nous parlons ici.
La présidente : Sommes-nous prêts à passer au vote sur cet amendement?
La sénatrice Omidvar : Avez-vous consulté les tribunaux à ce sujet, ou les responsables du système?
La sénatrice Pate : Je n’ai pas fait de vaste consultation, mais j’ai discuté de la question avec des juges et des avocats qui travaillent dans ce domaine depuis un certain nombre d’années. Leur avis est qu’il est grand temps d’instaurer un mécanisme de surveillance judiciaire. L’abolition des placements en isolement ou des peines cellulaires, peu importe le nom que nous donnons à cette pratique, se fera probablement progressivement, un peu comme ce qui s’est passé pour la flagellation, la diète pain et eau ou la règle du silence.
La sénatrice Omidvar : Leur charge de travail le leur permettrait? C’est ce que je cherche à savoir.
La sénatrice Pate : Oui, c’est ce que j’ai compris.
La sénatrice Omidvar : Parce que nous parlons de 300 personnes seulement.
La sénatrice Pate : À l’échelle du pays.
La sénatrice Omidvar : Donc, 48 heures au plus.
La présidente : Les fonctionnaires auraient des remarques à ce sujet.
La sénatrice Pate : Et 30 000 personnes détenues dans des établissements provinciaux attendent leur procès.
Luc Bisson, directeur général par intérim, Secrétariat exécutif et chef de cabinet, Service correctionnel Canada : Il est important de rappeler que 300 détenus peuvent avoir été placés en isolement à un moment donné, mais que les cas se comptent par milliers chaque année. Il s’agit de très courtes périodes d’isolement dans beaucoup de cas. Il faudra s’attendre à 5 000 demandes de révision au moins.
La présidente : Merci. J’entends la sonnerie, mais comme nous sommes autorisés à nous réunir pendant que le Sénat siège, je vous propose de poursuivre jusqu’au vote. Nous serons à temps pour le vote, ne vous en faites pas.
Il est proposé par l’honorable sénatrice Pate que le projet de loi C-93 soit modifié, à —
Des voix : Suffit!
La présidente : Merci.
Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion d’amendement?
Des voix : D’accord.
Des voix : Non.
La sénatrice Eaton : Puis-je demander un vote par appel nominal?
La présidente : Oui, nous pouvons procéder à un vote par appel nominal. Auparavant, je vous rappelle que les membres d’office ont le même statut que les autres membres du comité selon la règle, y compris le droit de vote. Selon une convention mutuelle, les membres d’office ne participent pas aux votes des comités.
Nous allons procéder à l’appel nominal. Le greffier du comité appellera chaque membre par son nom, à commencer par la présidente, puis selon l’ordre alphabétique. Les sénateurs devront ensuite indiquer s’ils votent pour ou contre la motion, ou s’ils s’abstiennent.
[Français]
M. Charbonneau : L’honorable sénatrice Petitclerc?
La sénatrice Petitclerc : Oui.
M. Charbonneau : L’honorable sénatrice M. Deacon?
La sénatrice M. Deacon : Oui.
M. Charbonneau : L’honorable sénatrice Eaton?
La sénatrice Eaton : Non.
M. Charbonneau : L’honorable sénatrice Forest-Niesing?
La sénatrice Forest-Niesing : Oui.
M. Charbonneau : L’honorable sénatrice Mégie?
La sénatrice Mégie : Oui.
M. Charbonneau : L’honorable sénateur Munson?
Le sénateur Munson : Oui.
M. Charbonneau : L’honorable sénateur Oh?
Le sénateur Oh : Oui.
M. Charbonneau : L’honorable sénatrice Omidvar?
La sénatrice Omidvar : Oui.
M. Charbonneau : L’honorable sénatrice Pate?
La sénatrice Pate : Oui.
M. Charbonneau : L’honorable sénateur Ravalia?
Le sénateur Ravalia : Oui.
M. Charbonneau : L’honorable sénatrice Seidman?
La sénatrice Seidman : Abstention.
M. Charbonneau : L’honorable sénatrice Stewart Olsen?
La sénatrice Stewart Olsen : Abstention.
M. Charbonneau : Pour : 9; contre : 1; abstentions : 2.
[Traduction]
La présidente : La motion est adoptée.
Je crois qu’il n’y a pas d’autre amendement proposé à l’article 10, mais je vérifie quand même.
L’article 10 modifié est-il adopté?
Des voix : Oui.
Des voix : Avec dissidence.
La présidente : Avec dissidence.
L’article 24 est-il adopté?
Des voix : Oui.
La présidente : Je crois qu’un amendement a été proposé à l’article 24. L’amendement proposé par la sénatrice Pate à l’article 4 porte le numéro KP-24.19.
Sénatrice Pate, voulez-vous proposer cet amendement?
La sénatrice Pate : Je propose :
que le projet de loi C-83 soit modifié, à l’article 24, à la page 19, par substitution des lignes 1 à 9, de ce qui suit :
« 24 L’article 81 de la même loi est remplacé par ce qui suit :
81 (1) Le ministre ou son délégué peut conclure un accord prévoyant la prestation de services correctionnels avec l’une ou l’autre des entités suivantes :
a) un organisme autochtone;
b) un corps dirigeant autochtone;
c) un groupe communautaire axé sur les besoins d’un groupe défavorisé ou minoritaire;
d) un organisme communautaire œuvrant au service d’un groupe défavorisé ou minoritaire;
e) toute autre entité offrant des services de soutien en milieu communautaire, y compris à d’autres groupes spécifiques.
(2) Pour l’application des alinéas (1)c) et d), sont des groupes défavorisés ou minoritaires les groupes marginalisés en raison de la race, de l’origine nationale ou ethnique, de la couleur, de la religion, de l’âge, du sexe, de l’orientation sexuelle, de l’identité ou de l’expression de genre ou d’une déficience.
(3) L’accord peut prévoir le paiement par le ministre ou son délégué des services fournis par une entité visée à l’un ou l’autre des alinéas (1)a) à e).
(4) En vertu de l’accord, le commissaire peut, avec le consentement des deux parties, transférer une personne incarcérée dans un pénitencier à l’une ou l’autre des entités visées aux alinéas (1)a) à e).
(5) Le commissaire veille, dans la mesure du possible :
a) à identifier les entités visées aux alinéas (1)a) à e) en vue de conclure des accords;
b) à transférer toute personne incarcérée dans un pénitencier à l’une ou l’autre des entités avec lesquelles un accord a été conclu, en particulier si elle appartient à un groupe défavorisé ou minoritaire desservi par une telle entité.
(6) Nulle personne incarcérée dans un pénitencier ne peut se voir refuser le transfèrement à une entité avec laquelle un accord a été conclu si les deux parties y consentent, sauf si un tribunal compétent au Canada juge que le transfèrement n’est pas dans l’intérêt de la justice. ».
Cet amendement vise à encourager le recours aux dispositions en vigueur concernant le transfèrement immédiat des personnes concernées dans une collectivité autochtone afin qu’elles y purgent leur peine. Il s’agit de l’article 81 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition.
L’amendement oblige le Service correctionnel à prendre en considération toutes les mesures raisonnables. Il donne suite aux témoignages entendus dans différents contextes — le sénateur Munson, la sénatrice Omidvar et moi-même les avons aussi entendus au Comité des droits de la personne — de divers intervenants qui nous encourageaient à élargir une disposition adoptée en premier lieu pour réduire le nombre de détenus autochtones à d’autres groupes de plus en plus nombreux de la population. C’est ce que propose cet amendement.
La présidente : Sénateur Klyne, vous vouliez faire une remarque?
Le sénateur Klyne : Oui. Ces mesures ont été mises en place avant tout pour combler les besoins des détenus autochtones et dans ce contexte précis. Notre comité doit s’employer avec diligence à assurer la protection des droits des détenus autochtones et, conformément à l’esprit et à l’intention de cette partie du projet de loi et de la loi — à mes yeux, il est tout à fait inopportun de proposer une mesure qui ratisse aussi large dans ce contexte. L’essentiel est dit à l’alinéa 2g), à la page 1, qui propose de substituer ce qui suit au texte de la loi :
g) ses directives d’orientation générale, programmes et pratiques respectent les différences ethniques, culturelles, religieuses et linguistiques, ainsi qu’entre les sexes, l’orientation sexuelle, l’identité et l’expression de genre, et tiennent compte des besoins propres aux femmes, aux Autochtones, aux minorités visibles, aux personnes nécessitant des soins de santé mentale et à d’autres groupes;
Ces différents besoins sont pris en compte dans cette disposition. À mon avis, leur incorporation dans une disposition qui s’applique expressément aux détenus autochtones dénature son objectif. Les droits qui sont accordés, y compris ceux qui découlent de l’arrêt Gladue... En tant qu’Autochtone, je suis offensé par cette position. En terminant, si vous me le permettez, je note que le paragraphe (6) sous-entend que toutes les personnes visées aux alinéas c), d) ou e) pourront à un moment donné être transférée à une entité avec laquelle un accord a été conclu, et qu’aucune personne incarcérée dans un pénitencier ne peut être transférée à une entité avec laquelle un accord existe et si les deux y consentent, sauf si un tribunal compétent juge que le transfèrement n’est pas dans l’intérêt de la justice.
C’est déjà prévu pour les Autochtones, mais je ne vois pas de quelles entités on parle pour les personnes visées aux alinéas c), d) ou e).
La présidente : Merci.
Sénateur Kutcher, puis sénatrice Omidvar.
Le sénateur Kutcher : Peut-être ai-je du mal à saisir la terminologie juridique, mais je ne sais pas ce qu’on entend par le mot « entité ». Est-ce qu’il désigne un organisme quelconque? Comment pourra-t-on garantir qu’un organisme a la compétence ou le pouvoir pour accepter de fournir les services de soutien adéquats et nécessaires à un détenu? Je ne comprends pas.
La sénatrice Omidvar : J’aimerais entendre la réponse à cette question.
La présidente : Je suis désolée.
Sénatrice Pate.
La sénatrice Pate : Le mot « entité » a été utilisé parce que l’objectif de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, si on consulte le hansard et les débats sur cette question, était d’augmenter les possibilités de mise en liberté, comme l’a expliqué le sénateur Klyne, et notamment la possibilité pour les Autochtones de purger leur peine dans leurs collectivités. Cela dit, le paragraphe qui prévoit l’application aux non-Autochtones existe déjà.
Le mot « entité » — je précise que je suis ouverte à toute autre suggestion — a été choisi parce qu’il peut désigner des groupes de personnes. Il peut arriver en effet que des groupes comme les centres d’amitié autochtones ou des groupes communautaires, comme ceux qui ont aidé les réfugiés syriens, unissent leurs efforts pour offrir du soutien. Si vous connaissez un mot qui conviendrait mieux que le mot « entité », n’hésitez pas à le proposer. Je vous assure que je n’y verrai pas un amendement hostile. L’important est la capacité de fournir des services, bien entendu.
Le sénateur Kutcher : Je ne sais pas comment insérer ici une attente voulant que, quelle que soit l’entité, elle doit posséder les compétences et la capacité d’offrir les services nécessaires, mais je pense que ce serait important, n’est-ce pas?
La sénatrice Pate : Oui.
La présidente : Voulez-vous formuler des commentaires à ce sujet?
La sénatrice Pate : Je ne suis pas contre. Je pense que cela pourrait être fait assez facilement dans les règlements. Une chose est sûre, la politique actuelle est plus restrictive que la loi. Par conséquent, s’il y a contestation devant les tribunaux, il faudrait probablement faire preuve d’une plus grande ouverture.
La présidente : Sénatrice Omidvar, voulez-vous faire des observations?
La sénatrice Omidvar : Oui, j’aimerais faire des commentaires relativement à l’inconfort exprimé par le sénateur Klyne au sujet de cette modification. Comme nous le savons tous, la deuxième communauté en importance en incarcération est celle des personnes d’origine afro-canadienne. Je trouve que les communautés autochtones font preuve d’une telle sagesse qui s’exprime également dans la manière dont elles se structurent elles-mêmes, que cela nous dit dans ce contexte, que le moment est venu de tirer profit de leur enseignement, et le prolongement, sénateur Klyne, de cet amendement pour qu’il inclue d’autres communautés, plus précisément la communauté noire, est à mon sens une preuve d’ouverture très accueillante. Je vous en félicite, sénatrice Pate.
La présidente : Merci, sénatrice Omidvar.
Avez-vous d’autres commentaires ou questions? Sommes-nous prêts à procéder?
Le sénateur Klyne : Sénateur Kutcher, est-ce que votre question sur le terme « entité » visait les peuples autochtones ou les autres groupes?
Le sénateur Kutcher : Je ne savais pas ce que ce mot voulait dire.
Le sénateur Klyne : Parce qu’il existe des ententes avec des organismes autochtones.
Le sénateur Kutcher : Je pense que,pour plus de précision...
Le sénateur Klyne : Peut-être que les fonctionnaires pourraient nous renseigner sur les ententes qui existent déjà avec des organismes autochtones?
M. Maltby : À l’heure actuelle, en ce qui concerne les ententes au titre de l’article 81, il y en a cinq qui sont déjà en place. Alors, deux de ces ententes ont été conclues avec le National Native Council Service of Alberta, mais l’une concerne l’exploitation d’un centre pour les femmes appelé Buffalo Sage, et l’autre un organisme appelé Stan Daniels. Nous en avons une aussi au Québec, avec Waseskun. Nous en avons une qui relève d’Ochichakkosipi. Je ne me souviens plus de la cinquième. Ah, désolé, vous me faites penser. Oui, il y en a bien une cinquième. Je peux vous fournir le nom, si vous le souhaitez. Ça va me revenir, j’en suis sûr.
L’attente à l’égard des pavillons de ressourcement, si je peux me permettre, concerne véritablement le soutien en matière de garde. Même si les pavillons fournissent également un soutien communautaire, ce que l’on constate dans le cadre d’un plan qui relèverait de l’article 84 par exemple, c’est vraiment le besoin d’un soutien en matière de garde. Les gens ont des attentes, comme vous l’avez mentionné, au sujet de certains besoins, notamment s’assurer de disposer de la capacité et des compétences pour offrir ces services, ce qui relève absolument d’un partenariat que nous établissons avec les communautés et les organismes autochtones, mais il est certain qu’il faut y consacrer du temps et des efforts.
La présidente : Merci.
Sénatrice Pate, aviez-vous quelque chose à ajouter?
La sénatrice Pate : Non, c’est très bien.
La présidente : Parfait.
L’honorable sénatrice Pate propose que le projet de loi C-83...
La sénatrice Pate : Suffit.
La présidente : Merci.
Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion en amendement?
Des voix : D’accord.
La présidente : La motion est adoptée.
L’article 24 modifié est-il adopté?
Des voix : Oui.
La présidente : Les articles 25 à 30 sont-ils adoptés?
Il y a un nouvel amendement, à ce qu’il me semble.
La sénatrice Pate : Je propose :
que le projet de loi C-83 soit modifié, à l’article 25, à la page 20, par substitution des lignes 1 à 8, de ce qui suit :
« 84 (1) Si une personne détenue dans un pénitencier demande le soutien, à sa libération, de l’une des entités visées au paragraphe (2), le Service offre à l’entité l’occasion de proposer un plan pour la libération de la personne détenue et son intégration au sein d’une collectivité.
(2) Les entités compétentes sont les suivantes pour l’application du paragraphe (1) :
a) un corps dirigeant autochtone, le cas échéant;
b) un organisme autochtone actif dans la collectivité;
c) un groupe communautaire axé sur les besoins des populations défavorisées ou en situation minoritaire;
d) une organisation communautaire qui dessert une population défavorisée ou en situation minoritaire;
e) toute autre entité qui fournit des services de soutien dans la collectivité, notamment à d’autres populations précises.
(3) Pour l’application du paragraphe (2), une population défavorisée ou en situation minoritaire s’entend de toute population marginalisée pour des motifs de race, d’origine nationale ou ethnique, de couleur, de religion, d’âge, de sexe, d’orientation sexuelle, d’identité ou d’expression de genre, ou de handicap.
(4) Le Service :
a) prend toutes les mesures raisonnables afin d’informer les personnes détenues au sujet des entités visées aux alinéas 2a) à e);
b) donner à l’entité qui a proposé le plan visé au paragraphe (1) un préavis suffisant de l’examen en vue de la libération conditionnelle de la personne détenue ou de la date de sa libération d’office, selon le cas.
5) Si la Commission des libérations conditionnelles du Canada prend une décision qui est incompatible avec le plan proposé par une entité pour la libération de la personne détenue et son intégration au sein d’une collectivité, elle en donne les motifs par écrit. ».
Celui-ci est semblable au précédent, mais avec l’ajout de la Commission des libérations conditionnelles, afin que la personne puisse connaître les motifs de la décision.
La présidente : Avez-vous d’autres questions ou commentaires? Si vous cherchez l’amendement, il se trouve dans la nouvelle documentation. Sommes-nous prêts à procéder?
L’honorable sénatrice Pate propose que le projet de loi C-83 soit modifié à l’article...
La sénatrice Pate : Suffit.
La présidente : Merci.
Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion en amendement?
Des voix : D’accord.
La sénatrice Seidman : Avec dissidence.
La présidente : La motion est adoptée, avec dissidence.
L’article 25 modifié est-il adopté?
Des voix : Oui.
La présidente : L’article 26 est-il adopté?
Des voix : D’accord.
La présidente : L’article 27 est-il adopté?
Des voix : Oui.
La présidente : L’article 28 est-il adopté?
Des voix : Oui.
La présidente : L’article 29 est-il adopté?
Sénatrice Pate.
La sénatrice Pate : Merci.
Je propose :
Que le projet de loi C-83 soit modifié, à l’article 29, à la page 21, par substitution, à la ligne 21, de ce qui suit :
« isolement préventif ou tout autre isolement de la population carcérale régulière ou... ».
En fait, je vais retirer cet amendement. Il s’agissait d’un amendement corrélatif à celui de la sénatrice Forest-Niesing. De même que le prochain. Je vais tout simplement le retirer.
La présidente : Nous devons consentir au retrait de l’amendement. Êtes-vous d’accord?
Des voix : D’accord.
La présidente : L’article 29 est-il adopté?
Des voix : Oui.
La présidente : L’article 30 est-il adopté?
Des voix : Oui.
La présidente : En ce qui concerne l’article 31, je pense que la sénatrice Pate l’a retiré parce qu’il était corrélatif à l’amendement de la semaine dernière, si je ne me trompe pas.
Les articles 32 à 35 sont-ils adoptés?
Des voix : Oui.
La présidente : Sénatrice Pate, est-ce qu’un nouvel article s’en vient?
La sénatrice Pate : Oui. Merci, madame la présidente.
Je propose :
Que le projet de loi C-83 soit modifié, à la page 23, par adjonction, après la ligne 37, de ce qui suit :
« 35.1 La même loi est modifiée, par adjonction, après l’article 198, de ce qui suit :
Partie III.1
Injustice dans l’administration de la peine
198.1 (1) Toute personne incarcérée peut demander au tribunal qui a imposé la peine de rendre l’ordonnance de réduction de la période d’incarcération ou de la période d’inadmissibilité à la libération conditionnelle que celui-ci estime convenable et juste dans les circonstances si, selon le tribunal, il y a eu injustice dans l’administration de la peine.
(2) Au paragraphe (1), injustice dans l’administration de la peine s’entend des décisions, recommandations, actes ou omissions du commissaire ou de toute personne qui relève de celui-ci, ou qui fournit des services au nom du commissaire ou pour le compte de celui-ci, qui ont eu une incidence sur la personne incarcérée et qui sont, selon le cas :
a) contraires à la loi ou à une ligne de conduite établie;
b) déraisonnables, injustes, oppressants ou abusivement discriminatoires;
c) fondés en tout ou en partie sur une erreur de droit ou de fait;
d) une utilisation abusive d’un pouvoir discrétionnaire.
(3) La demande visée au paragraphe (1) doit être présentée, selon le cas :
a) au plus tard soixante jours après :
(i) soit les événements ayant mené à l’injustice dans l’administration de la peine alléguée,
(ii) soit la date à laquelle le Service a fourni au détenu un rapport d’incident ou tout autre document concernant les événements ayant mené à l’injustice dans l’administration de la peine alléguée,
(iii) soit la date à laquelle la personne incarcérée a été informée des conclusions et des recommandations de l’enquêteur correctionnel au titre de l’article 178 concernant ces événements;
b) tout autre délai établi par le tribunal, à son gré et en tout temps, si ce délai est plus long que celui prévu à l’alinéa a).
(4) Le présent article n’a pas pour effet de porter atteinte aux droits de la personne incarcérée ou à ses recours, notamment un droit ou un recours au titre de la présente loi. ».
Ce texte est l’une des recommandations qui avaient été formulées par Louise Arbour à la suite des incidents survenus à la Prison des femmes, et de la période d’isolement prolongée qui avait suivi; ces recommandations visaient à corriger l’utilisation et l’abus de pouvoir exercé par Service correctionnel du Canada, lorsque la manière dont la sentence est administrée équivaut à une sanction illicite, parce qu’elle dépasse l’objectif du juge au moment de prononcer la peine.
Le sénateur Klyne : Permettez-moi de faire une rapide observation, et ensuite j’aimerais poser une question à nos témoins à ce sujet.
Cette question semble aller au-delà du champ d’application de la loi, parce qu’elle vise précisément la sentence prononcée contre un délinquant, et non le placement dans une unité d’intervention structurée, ou UIS. Elle devrait, probablement, faire l’objet d’une étude ou d’observations séparées. Je ne suis pas en train de suggérer qu’elle ne mérite pas que l’on s’y attarde, mais à mon avis, elle dépasse le champ d’application de cette loi.
Voici maintenant ma question : Est-ce que cet amendement aura une incidence quelconque sur le projet de loi C-83 tel qu’il est présenté au comité?
Mme Arnet Connidis : Non, il n’aura pas d’incidence sur la loi, mais vous avez raison, il serait plus approprié dans le Code criminel, où il est question de sentences.
Le sénateur Klyne : Merci.
La sénatrice Pate : Ce pourrait pourtant être le cas. Cette recommandation avait été faite par Louise Arbour dans le même esprit que l’objectif dont le ministre a fait part à ce comité et aux autres témoins, c’est-à-dire, un changement de culture et un changement dans le recours à l’isolement et à d’autres mesures punitives utilisées contre les détenus en prison. Donc, il est conforme au champ d’application global de la loi.
La présidente : Merci. Y aurait-il d’autres commentaires ou questions? Sommes-nous prêts à procéder avec cet amendement?
Est-ce que l’honorable sénatrice Pate propose que le projet de loi C-83 soit modifié par l’adjonction de l’article 35.1 — Puis-je me dispenser de lire la motion?
Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion en amendement? D’accord? Oui ou non?
Une voix : Non.
La présidente : Devrions-nous prendre un vote par appel nominal?
Que ceux qui sont pour disent oui.
Des voix : Oui.
La présidente : Que ceux qui sont contre disent non.
Une voix : Non.
La présidente : À mon avis, les oui l’emportent.
Le sénateur Munson : Je suis désolé, mais c’est un peu confus. Je pense que l’on devrait prendre un vote par appel nominal. C’est un point important.
La présidente : D’accord. Nous procéderons par appel nominal. Le greffier fera l’appel, comme auparavant, à commencer par la présidente, et ensuite par ordre alphabétique. Les sénateurs devront alors indiquer s’ils sont pour, contre ou s’ils souhaitent s’abstenir de voter. Le greffier annoncera ensuite le résultat du vote.
[Français]
M. Charbonneau : L’honorable sénatrice Petitclerc?
La sénatrice Petitclerc : Abstention.
M. Charbonneau : L’honorable sénatrice M. Deacon?
La sénatrice M. Deacon : Oui.
M. Charbonneau : L’honorable sénatrice Eaton?
La sénatrice Eaton : Abstention.
M. Charbonneau : L’honorable sénatrice Forest-Niesing?
La sénatrice Forest-Niesing : Abstention.
M. Charbonneau : L’honorable sénatrice Mégie?
La sénatrice Mégie : Oui.
M. Charbonneau : L’honorable sénateur Munson?
Le sénateur Munson : Abstention.
M. Charbonneau : L’honorable sénateur Oh?
Le sénateur Oh : Abstention.
M. Charbonneau : L’honorable sénatrice Omidvar?
La sénatrice Omidvar : Contre.
M. Charbonneau : L’honorable sénatrice Pate?
La sénatrice Pate : Oui.
M. Charbonneau : L’honorable sénatrice Poirier?
La sénatrice Poirier : Abstention.
M. Charbonneau : L’honorable sénateur Ravalia?
Le sénateur Ravalia : Abstention.
M. Charbonneau : L’honorable sénatrice Seidman?
La sénatrice Seidman : Abstention.
M. Charbonneau : Pour : 3; contre : 1; abstentions : 8.
[Traduction]
La présidente : La motion est adoptée.
Le nouvel article 35.1 est-il adopté?
M. Charbonneau : Nous l’avons déjà fait.
La présidente : L’article 36 est-il adopté?
Nous avons deux amendements. Ils proviennent de l’ancienne documentation, je pense, KP-36.1-23 a) et b). Sénatrice Pate?
La sénatrice Pate : Merci, madame la présidente.
Je propose :
Que le projet de loi C-83 soit modifié à la page 23, par adjonction, après la ligne 38, de ce qui suit :
« Code criminel
36.1 Le paragraphe 720(2) du Code criminel est remplacé par ce qui suit :
(2) Il peut, si le procureur général et la personne déclarée coupable y consentent et en tenant compte de l’intérêt de la justice et de toute victime de l’infraction, reporter la détermination de la peine pour permettre à la personne de participer :
a) sous la surveillance du tribunal, à un programme de traitement agréé qui peut-être un programme culturellement adapté, tel un programme de traitement de la toxicomanie ou un autre programme d’aide ou d’éducation;
b) à un programme communautaire qui a pour but la réparation du tort causé, la réadaptation ou la réinsertion sociale et que le tribunal juge approprié.
(3) Malgré toute disposition législative prescrivant une peine minimale ou une ordonnance d’interdiction à l’égard de l’infraction pour laquelle la personne a été déclarée coupable, le tribunal, s’il juge que celle-ci a réussi un programme visé au paragraphe (2), n’est pas tenu d’infliger la peine ou de rendre l’ordonnance et peut prononcer l’absolution de la personne en vertu de l’article 730. ».
Cela vise essentiellement à rendre conforme pour les personnes ce que le gouvernement a adopté pour les organisations au sujet des accords de poursuite, et à permettre aux personnes d’avoir accès à ces mesures d’une manière qui réduit non seulement le recours à l’isolement, mais aussi à l’incarcération.
La présidente : Merci.
La sénatrice Seidman : Je tiens surtout à invoquer le Règlement.
Il s’agit d’un amendement au Code criminel. Si vous regardez la Procédure du Sénat en pratique de 2015, à la page 142, vous remarquerez le numéro 11 :
En règle générale, un amendement est irrecevable s’il vise à modifier une loi que le projet de loi à l’étude ne propose pas de modifier. De plus, d’après les ouvrages de procédure, seuls peuvent être modifiés les articles de la loi initiale que vise déjà à modifier le projet de loi dont est saisi le comité.
Donc, ce que je suggère ici, c’est que cet amendement vise à modifier une loi que le projet de loi à l’étude ne propose pas de modifier. En réalité, il y a deux amendements, nous étudions le 36.1-23 a), mais la situation est la même pour 36.1-23 b).
La présidente : Avez-vous des commentaires à formuler sur le rappel au Règlement de la sénatrice Seidman?
Comme vous le savez, si un sénateur éprouve des inquiétudes au sujet de la recevabilité d’un amendement, il peut faire un rappel au Règlement, et vous avez le droit de formuler des arguments, si vous souhaitez intervenir à ce sujet; par la suite, la présidente décidera si l’amendement est recevable.
Sénatrice Pate, souhaitez-vous vous exprimer sur ce point?
La sénatrice Pate : Je tiens à souligner qu’habituellement ce genre de lois sur les services correctionnels entraîne des amendements corrélatifs au Code criminel, mais nous comprenons bien que ce n’est pas le but de cette intervention. Je suis disposée à retirer les deux prochains amendements pour ce motif, si c’est la volonté du comité.
La présidente : Sénatrice Pate, est-ce que vous retirez les deux amendements? C’est ce que j’ai cru comprendre.
La sénatrice Pate : Oui.
La présidente : Avons-nous le consentement de retirer l’amendement qui a été proposé?
Les articles 37 à 39 sont-ils adoptés?
Des voix : Oui.
La sénatrice Seidman : Avec dissidence.
La présidente : L’article 40 est-il adopté?
Cet amendement se trouve dans la nouvelle documentation. Il porte le numéro KP-40.24. Sénatrice Pate?
La sénatrice Pate : Merci. Toutes mes excuses.
Je propose :
Que le projet de loi C-83 soit modifié, à l’article 40.1,
a) à la page 24, par substitution, aux lignes 24 à 29, de ce qui suit :
« 40.1 (1) Au début des deuxième et cinquième années suivant la date d’entrée en vigueur du présent article, un examen approfondi des dispositions édictées par la présente loi doit être fait par un comité du Sénat, et un comité de la Chambre des communes constitués ou désignés à cette fin.
(2) L’examen doit comprendre la revue des progrès accomplis dans l’élimination des pratiques consistant à séparer des personnes incarcérées de la population carcérale générale.
(3) Dans l’année suivant le commencement de l’examen, chaque comité remet à la Chambre l’ayant constitué un rapport comportant les modifications, s’il en est, qu’il recommande d’apporter aux dispositions de la présente loi afin d’éliminer les pratiques consistant à séparer des personnes incarcérées de la population carcérale générale. »;
Et ainsi de suite.
Cet amendement a pour but de faire ce que bon nombre de personnes nous ont recommandé : faire en sorte que ce qui est mis en œuvre, peu importe l’étape à laquelle on est arrivé, fasse l’objet d’un suivi, et que ce soit le Sénat et la Chambre des communes qui surveillent ce processus. C’est conforme à certaines des recommandations qui ont été formulées, non seulement par des témoins, mais aussi par d’autres comités de la Chambre des communes et ici, au Sénat, mais qui n’ont pas été prises en compte dans la loi. Donc, tel est le but de cet amendement.
Le sénateur Munson : Je pense que ce que vous dites est important. Seulement sur le plan du libellé, juste un point mineur : c’est la première fois que j’entends parler de « House of Parliament », dans la version anglaise. Voulez-vous parler du Parlement?
La sénatrice Pate : Oui. Désolée. Je voulais dire le Sénat et la Chambre des communes.
Le sénateur Munson : Donc, à la Chambre des communes et au Sénat du Canada. J’ignore ce qu’on entend par « House of Parliament » dans la version anglaise. C’est tout.
La sénatrice Pate : Je suis prête à modifier cet amendement.
Le sénateur Munson : Aux deux chambres?
La présidente : Êtes-vous d’accord pour apporter ce changement à l’amendement de la sénatrice Pate?
Des voix : D’accord.
La présidente : Avez-vous d’autres commentaires ou questions concernant l’amendement?
L’honorable sénatrice Pate propose que le projet de loi C-83...
Des voix : Suffit.
La présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion en amendement?
Des voix : D’accord.
La présidente : Adoptée.
L’article 40 modifié est-il adopté?
Des voix : D’accord.
La présidente : L’article 41 est-il adopté?
Des voix : D’accord.
La présidente : Le titre est-il adopté?
Des voix : D’accord.
La présidente : Le projet de loi modifié est-il adopté?
Des voix : Oui.
Des voix : Avec dissidence.
La présidente : Êtes-vous d’accord pour que le légiste et conseiller parlementaire soit autorisé à apporter des modifications techniques, numériques, typographiques et des corrections aux amendements adoptés par le comité?
Des voix : D’accord.
La présidente : Le comité souhaite-t-il que des observations soient annexées au rapport?
Le sénateur Munson : À quel moment le vote aura-t-il lieu?
La présidente : Il y aura un vote dans 15 minutes.
Des copies des observations sont distribuées dans les deux langues officielles.
Sénatrice Deacon.
La sénatrice M. Deacon : C’est en quelque sorte un travail d’équipe. J’aimerais formuler deux observations. Vous devriez les avoir reçues auparavant par courriel, et je pense que vous les avez toutes reçues imprimées dans les deux langues officielles maintenant. Je vais les lire. Lorsque j’aurai terminé, je vais laisser le sénateur Kutcher prendre la relève.
Le projet de loi C-83 parle de formation. Le comité est préoccupé parce que le projet de loi ne prescrit pas de programmes de formation en santé mentale à l’intention du personnel correctionnel, et qu’il n’établit pas le profil des compétences que le personnel correctionnel devrait normalement posséder pour pouvoir repérer et aider les personnes incarcérées qui souffrent d’une maladie mentale. Cette question est importante pour favoriser la réadaptation des détenus.
Ma deuxième observation porte sur la programmation des unités d’intervention structurée ou UIS. Le comité est préoccupé parce que le projet de loi ne fournit pas de précisions sur les programmes thérapeutiques ou de réadaptation pour les personnes incarcérées dans une UIS, ni sur les critères de sélection ou d’évaluation de ces programmes. Il s’agit d’un élément important pour comprendre et améliorer la santé mentale des personnes placées dans des UIS.
Sénateur Kutcher, si vous souhaitez formuler des commentaires collaboratifs, le moment serait bien choisi.
Le sénateur Kutcher : Ce sont deux des questions qui ont été soulevées par les témoins que nous avons entendus. En effet, les témoins ont exprimé des préoccupations importantes au sujet du genre de formation qui serait donnée au personnel correctionnel et à propos de la qualité de cette formation. Nous avons même entendu des agents correctionnels déplorer les lacunes de cette formation. Nous savons que se rendre dans une classe et écouter quelqu’un parler ne constitue pas une formation adéquate pour repérer et soutenir les personnes atteintes de troubles mentaux. Il faut également inclure une amélioration clairement démontrée des connaissances, il faut inclure une diminution démontrée de la stigmatisation, et il faut vraiment inclure les compétences requises pour que le personnel puisse réellement interagir avec les personnes atteintes d’une maladie mentale et les aider. Donc, cette question a suscité des inquiétudes importantes.
L’autre point est le suivant : il est réellement important de doter les UIS d’un programme thérapeutique ou d’un programme de réadaptation adapté aux besoins de la personne incarcérée et il ne faudrait pas que ce programme prenne fin simplement parce que la personne est incarcérée. Ce sont deux observations en lien avec la question à l’étude.
La sénatrice Forest-Niesing : J’appuie complètement l’observation. Je m’inquiète seulement de la formulation qui me semble un peu confuse. Dans la version anglaise, la troisième phrase se lit comme suit :
In order to identify and support of those incarcerated who have a mental illness.
Le sénateur Kutcher : C’est mon genre de formulation alambiquée. Je vous fais toutes mes excuses pour mon incapacité à m’exprimer correctement en anglais. Puis-je corriger ma formulation?
La sénatrice Forest-Niesing : Bien entendu.
Le sénateur Kutcher : Voici comment mon observation devrait se lire :
n’établit pas le profil des compétences que le personnel correctionnel devrait normalement posséder pour pouvoir repérer et aider les personnes incarcérées.
Toutes mes excuses pour mes imperfections en anglais, mais mon français est pire.
La présidente : Êtes-vous d’accord avec les observations de la sénatrice Deacon?
Des voix : D’accord.
La présidente : Je crois que la sénatrice Seidman veut faire une observation.
La sénatrice Seidman : Il s’agit en quelque sorte d’un préambule à notre rapport, parce que dans le cas d’une loi, il nous suffit de soumettre un rapport à la chambre. Je pense, à la lumière de tout ce dont nous avons discuté, surtout aujourd’hui, que nous devrions ajouter quelque chose au début, un préambule aux observations disant que le comité a examiné au mieux, le sujet que nous connaissons mal du projet de loi C-83 et qu’il a travaillé avec diligence en dépit des contraintes de temps. Le comité demande que les questions constitutionnelles qui ont été soulevées pendant l’étude du projet de loi C-83 soient examinées de plus près par la chambre lors de la troisième lecture.
La présidente : Pour plus de précision, sénatrice Seidman, c’est une observation que vous voulez que les analystes ajoutent au rapport?
La sénatrice Seidman : Exactement.
La présidente : Que l’observation soit présentée à la chambre, c’est bien cela.
La sénatrice Seidman : Exactement.
La présidente : Avez-vous d’autres commentaires? Êtes-vous d’accord?
Des voix : D’accord.
La présidente : Sénatrice Pate, je pense que vous aviez vous aussi une observation. Nous éprouvons des difficultés techniques, et sommes dans l’incapacité de l’imprimer; aussi je me demandais si vous ne pourriez pas nous la lire, et nous pourrions écouter très attentivement.
La sénatrice Pate : J’en ai deux. Voici la première :
Le Comité recommande, à la lumière des témoignages entendus, notamment de l’enquêteur correctionnel et de la Commission canadienne des droits de la personne, dans le prolongement des dispositions du projet de loi C-83 exigeant l’application de mesures moins restrictives et la prise en compte de l’histoire des Autochtones dans l’évaluation de la classification de sécurité, que le Service correctionnel du Canada (SCC) prenne des mesures immédiates pour s’occuper du sur classement des femmes, notamment en mettant en œuvre une recommandation formulée antérieurement dans une recherche réalisée par SCC, dans des rapports successifs de l’enquêteur correctionnel et conforme aux fondements philosophiques qui sous-tendent les prisons fédérales pour les femmes, à savoir que toute femme qui est incarcérée dans un pénitencier fédéral ne doit être classée en fonction des normes de sécurité les plus élevées que si c’est nécessaire pour des motifs de sécurité publique.
La présidente : Des commentaires?
La sénatrice Seidman : Merci, sénatrice Pate. Ma première réaction est que ce n’est pas une observation. Il s’agit plutôt d’un énoncé très complexe auquel il faudrait consacrer pas mal de temps pour le décortiquer et le comprendre vraiment. Je ne vois pas comment le comité pourrait soumettre cet énoncé comme s’il s’agissait d’une observation partagée par tous ses membres.
La présidente : D’autres commentaires? Êtes-vous d’accord avec cette observation? J’ai entendu un « non ». Avec dissidence?
La sénatrice Pate : C’est très bien.
La sénatrice Seidman : Si l’observation est adoptée avec dissidence, alors elle va aller de l’avant, et je pense que le comité doit faire très attention à ne pas soumettre d’observations susceptibles de détruire notre crédibilité. Si nous ne comprenons pas la complexité de cette observation et toutes les répercussions qu’elle entraîne, c’est comme un amendement à une mesure législative. Les observations sont simplement cela. Ce sont des points de vue assez légers que le comité souhaite signaler, mais dans le cas présent, cette observation me semble une directive très sérieuse et complexe. Je ne suis pas prête à approuver, à titre de membre de ce comité, une observation d’une telle complexité.
Je pense que nous devrions soumettre cette observation à un vote. À moins que certains ne soient prêts à déclarer immédiatement qu’ils ne sont pas prêts à appuyer ce genre d’observation, il faudra tenir un vote sur la question.
La présidente : Pas d’autres commentaires? Il me faut des indications claires, ou nous pouvons procéder à un vote par appel nominal.
Êtes-vous d’accord pour procéder avec l’observation de la sénatrice Pate?
Procédons à un vote par appel nominal. Nous allons faire l’appel de tous les membres du comité, à commencer par la présidente, et ensuite par ordre alphabétique. Veuillez indiquer si vous votez pour, contre ou si vous vous abstenez.
[Français]
M. Charbonneau : L’honorable sénatrice Petitclerc?
La sénatrice Petitclerc : Abstention.
M. Charbonneau : L’honorable sénatrice M. Deacon?
La sénatrice M. Deacon : Abstention.
M. Charbonneau : L’honorable sénatrice Eaton?
La sénatrice Eaton : Contre.
M. Charbonneau : L’honorable sénatrice Forest-Niesing?
La sénatrice Forest-Niesing : Abstention.
M. Charbonneau : L’honorable sénatrice Mégie?
La sénatrice Mégie : Abstention.
M. Charbonneau : L’honorable sénateur Munson?
Le sénateur Munson : Abstention.
M. Charbonneau : L’honorable sénateur Oh?
Le sénateur Oh : Abstention.
M. Charbonneau : L’honorable sénatrice Omidvar?
La sénatrice Omidvar : Abstention.
M. Charbonneau : L’honorable sénatrice Pate?
La sénatrice Pate : Pour.
M. Charbonneau : L’honorable sénatrice Poirier?
La sénatrice Poirier : Contre.
M. Charbonneau : L’honorable sénateur Ravalia?
Le sénateur Ravalia : Abstention.
M. Charbonneau : L’honorable sénatrice Seidman?
La sénatrice Seidman : Contre.
M. Charbonneau : Pour : 1; contre : 3; abstentions : 8.
[Traduction]
La présidente : La motion est rejetée.
Je pense que vous avez une autre observation.
Les cloches sonnent. Il se tiendra un vote à la chambre dans 15 minutes, je crois.
Voulez-vous essayer de la proposer?
La sénatrice Pate : Je ne vais pas proposer ma troisième observation parce que la suggestion de préambule de la sénatrice Seidman couvre la question.
Pour ce qui est de mon observation, la voici :
Le Comité prend note de témoignages selon lesquels l’incarcération est trop souvent une réponse par défaut du système de justice criminelle pour ceux qui souffrent d’une maladie mentale. Le Comité recommande que le gouvernement entreprenne une réforme des lois criminelles concernant la détermination des peines afin d’exiger des juges qu’ils prennent en considération toutes les solutions de rechange possibles avant d’imposer une peine d’emprisonnement, y compris les peines minimales obligatoires d’emprisonnement, et fournissent les motifs de leur décision lorsque de telles solutions n’ont pas été envisagées.
Le Comité recommande également qu’une disposition semblable à l’article 320.23 du Code criminel concernant la conduite avec facultés affaiblies et permettant de reporter la détermination de la peine du contrevenant pour lui permettre de participer à un programme de traitement, et éventuellement de bénéficier de l’exception à la peine minimale obligatoire, soit étendue à toutes les infractions aux lois pénales.
La sénatrice Seidman : Cette observation suscite chez moi, sénatrice Pate, sensiblement la même réaction que pour la précédente. À mon avis, les observations ne sont pas des recommandations. Et ces observations sont des recommandations concernant des articles très précis du projet de loi. Je ne pense pas qu’une observation devrait être formulée ainsi. Je vais devoir opposer de nouveau un « non » à cette observation. Je suis désolée.
La présidente : À moins que quelqu’un ne veuille ajouter quelque chose de très différent, je vais soumettre l’observation au vote pour que nous puissions nous rendre à la chambre pour voter.
Êtes-vous d’accord pour que l’observation de la sénatrice Pate soit adoptée?
Des voix : Non.
La présidente : Rejetée.
Êtes-vous d’accord pour adopter les observations et donner au comité de direction le pouvoir de faire les corrections nécessaires, au besoin?
Des voix : D’accord.
La présidente : Êtes-vous d’accord pour faire rapport au Sénat du projet de loi modifié, avec les observations?
Des voix : D’accord.
La présidente : Sur ce, je vous remercie tous de vos efforts, y compris les fonctionnaires et les greffiers.
(La séance est levée.)