LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES FINANCES NATIONALES
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le mardi 18 mai 2021
Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui, par vidéoconférence, à 9 h 30 (HE), pour étudier la teneur complète du projet de loi C-30, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 19 avril 2021 et mettant en œuvre d’autres mesures.
Le sénateur Percy Mockler (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Avant de commencer, j’aimerais rappeler aux honorables sénateurs et aux témoins de bien vouloir garder leurs microphones en sourdine en tout temps, à moins d’être appelés par leur nom par la présidence. Si vous avez des difficultés techniques, notamment en ce qui concerne l’interprétation, veuillez le signaler au président ou à la greffière et nous nous efforcerons de résoudre le problème. Si vous avez d’autres difficultés techniques, contactez le Centre de service de la DSI au numéro d’assistance technique qui vous a été fourni.
[Français]
Honorables sénateurs, l’utilisation de plateformes en ligne ne garantit pas la confidentialité des discours ou l’absence d’écoute. Ainsi, lors de la tenue de la réunion du comité, tous les participants doivent en être conscients et limiter la divulgation éventuelle d’informations sensibles, privilégiées et même privées du Sénat.
[Traduction]
Les participants devraient savoir qu’ils doivent le faire dans un endroit privé et être attentifs à ce qui se passe autour d’eux afin de garder les conversations à l’abri des oreilles indiscrètes et de respecter les règlements.
Nous allons maintenant commencer la partie officielle de notre réunion, conformément à l’ordre de renvoi reçu par le Sénat du Canada. Je m’appelle Percy Mockler, sénateur du Nouveau-Brunswick et président du Comité sénatorial permanent des finances nationales. Permettez-moi de vous présenter les membres du comité qui participent à la réunion d’aujourd’hui : le sénateur Dagenais, la sénatrice M. Deacon, la sénatrice Duncan, le sénateur Forest, la sénatrice Galvez, le sénateur Klyne, le sénateur Loffreda, la sénatrice Marshall, la sénatrice Moncion, le sénateur Richards et le sénateur Smith. Nous souhaitons également la bienvenue aux sénateurs qui se joindront à nous plus tard.
Je souhaite la bienvenue à chacun d’entre vous ainsi qu’à tous ceux qui, partout au pays, nous regardent sur sencanada.ca. Ce matin, nous poursuivons notre étude de la teneur complète du projet de loi C-30, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 19 avril 2021 et mettant en œuvre d’autres mesures, qui a été renvoyé à ce comité le 4 mai 2021 par le Sénat du Canada.
[Français]
Tout d’abord, nous accueillons M. Dan Kelly, président et chef de la direction de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante; M. Shannin Metatawabin, chef de la direction de l’Association nationale des sociétés autochtones de financement; Mme Alla Drigola, directrice, Affaires parlementaires et politique des PME, de la Chambre de commerce du Canada. Elle est accompagnée de M. Patrick Gill, directeur principal, Politiques fiscales et financières. Nous recevons également Mme Tabatha Bull, présidente et chef de la direction du Conseil canadien pour le commerce autochtone.
[Traduction]
Bienvenue à tous et merci d’avoir accepté notre invitation à comparaître devant le Comité sénatorial permanent des finances nationales. Nous allons entendre vos déclarations liminaires. Leur durée ne devrait pas dépasser cinq minutes. J’invite M. Kelly à commencer.
Dan Kelly, président et chef de la direction, Fédération canadienne de l’entreprise indépendante : Merci, sénateur Mockler. Merci à vous tous, sénateurs, d’avoir invité la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante à s’adresser à nouveau au comité. Il n’y a pas si longtemps, j’étais avec vous et, en fait, avec bon nombre de mes collègues du présent groupe d’experts, pour vous faire part de nos réflexions sur le précédent projet de loi d’exécution du budget. Nous voici de nouveau réunis.
Aujourd’hui, la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante marque le premier anniversaire de la promesse non tenue du premier ministre d’étendre aux nouvelles entreprises les programmes de soutien mis sur pied pour répondre à la COVID. Des milliers et des milliers d’entreprises qui ont été lancées en 2020 — beaucoup d’entre elles ont démarré en 2019, mais leurs activités n’ont commencé concrètement qu’en 2020 — n’ont pas pu, pendant toute la durée de la pandémie, recevoir un seul sou de soutien du gouvernement fédéral, contrairement à leurs autres homologues commerciaux.
Le 19 mai 2020, le premier ministre a promis de régler ce problème, mais absolument rien n’a été fait jusqu’ici. C’est profondément honteux. Je vous exhorte, sénateurs, à continuer de faire pression pour que ces entreprises, dont certaines sont parmi les plus vulnérables, aient accès à ces mesures de soutien. Souvent, il s’agit d’entreprises qui sont dirigées par des néo-Canadiens, des Autochtones et des femmes. C’est un problème que nous devons régler, et nous devons faire vite.
J’ai envoyé à la greffière un jeu de diapositives et je crois que vous en avez tous reçu une copie. Les choses ont empiré au cours des deux dernières semaines. À l’heure actuelle, le pourcentage de petites et moyennes entreprises qui sont entièrement ouvertes est tombé à 54 % à l’échelle du Canada, la majorité des petites entreprises en Ontario et en Nouvelle-Écosse étant présentement entièrement ou partiellement fermées. Il s’agit bien entendu d’une situation très préoccupante, puisque d’autres provinces ont décrété de nouvelles fermetures ou des fermetures prolongées un peu partout au pays.
À la troisième diapositive, vous pouvez voir que seulement 40 % des petites entreprises ont un effectif complet. Plus inquiétant encore, moins d’un tiers — 31 % — des petites entreprises ont des niveaux de revenus normaux. Il ne fait aucun doute qu’il est très difficile pour elles de bien fonctionner.
Les préoccupations liées à la pandémie sont nombreuses. On pense notamment aux répercussions économiques sur les petites entreprises et l’économie en général. Le stress que subissent les propriétaires d’entreprise est toutefois incroyable. Alors que beaucoup d’entre nous commencent à être un peu plus optimistes en regardant ce qui se passe aux États-Unis et au Royaume-Uni, où l’économie commence à se remettre sur pied, le Canada, malheureusement, a pris une direction très préoccupante en appelant à de nouveaux confinements.
Pour vous rafraîchir la mémoire, nous pensons qu’une entreprise sur six risque de fermer définitivement. Cela représente 180 000 entreprises au Canada qui, selon nous, fermeront définitivement leurs portes avant la fin de la pandémie, entraînant la suppression de 2,4 millions d’emplois dans le secteur privé.
Avant la troisième vague, la petite entreprise moyenne avait contracté une dette supplémentaire de 170 000 $. C’est une dette que ces entreprises porteront avec elles pendant la phase de reprise à laquelle nous aspirons. Bien qu’il y ait eu beaucoup, beaucoup de programmes de soutien gouvernementaux utiles, permettez-moi de vous faire part de quelques données récentes.
À la huitième diapositive, nous avons demandé à nos membres — des propriétaires de petites entreprises — si les programmes de soutien, la subvention salariale, la subvention pour le loyer, le programme de prêts du Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes, les subventions provinciales, etc., aidaient ou non les petites entreprises à compenser leurs pertes de revenus. Cela vous paraîtra surprenant, mais près des deux tiers des entreprises ont déclaré que les programmes de soutien du gouvernement [Difficultés techniques] — les manques à gagner qu’elles ont connus.
[Difficultés techniques] — s’en faire à ce sujet. Le budget a beaucoup d’aspects positifs. Je veux en parler dans une seconde. Je vois que ma connexion Internet est légèrement instable. Cependant, le budget de 2021 contenait de bonnes nouvelles pour les petites entreprises. Il a prolongé la subvention salariale et la subvention pour le loyer jusqu’à l’automne. Je signale que ces subventions sont censées être moins généreuses à l’été, ce qui est beaucoup trop tôt compte tenu de la durée des restrictions liées à la pandémie.
Il y a un nouvel incitatif à l’embauche : le programme d’embauche pour la relance économique du Canada. Nous l’aimons beaucoup. Nous avons demandé à la ministre Freeland de le mettre en œuvre. La passation en charges immédiate des propriétés admissibles acquises par une petite entreprise, à hauteur de 1,5 million de dollars, est une excellente nouvelle. Nous nous en réjouissons. De plus, l’engagement directionnel de réduire les frais de traitement des cartes de crédit pour les petites entreprises est un très bon plan.
En terminant, je tiens à souligner qu’il y a d’immenses lacunes. C’est ma dernière diapositive, la 11e, pour ceux qui ont la présentation. Il n’y a malheureusement pas de solutions dans le budget pour corriger une grande partie des programmes d’aide d’urgence. Il n’y a toujours pas d’accès pour les nouvelles entreprises qui ont ouvert leurs portes après le 1er mars 2020. Le programme de subvention pour le loyer présente encore des défis de taille. Il exclut ceux qui ont une société de portefeuille et une société en exploitation dans la plupart des circonstances, et il exige le plein paiement du loyer dans les 60 jours, ce qui le rend hors de portée et moins utiles pour beaucoup d’entreprises. Aucun correctif n’est apporté aux lacunes du Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes pour les entreprises qui ne sont pas admissibles en vertu du critère des dépenses non reportables, et il n’y a pas de troisième ronde de financement, ce qui est nécessaire selon nous.
Le président : Monsieur Kelly, je vais devoir vous arrêter, s’il vous plaît, et merci de nous avoir fourni votre document. C’est en partie ce qui est présenté. Je veux être certain que les sénateurs auront le temps de poser des questions.
Je passe maintenant immédiatement à M. Shannin Metatawabin pour qu’il fasse son exposé. Monsieur Metatawabin, vous avez la parole, s’il vous plaît.
Shannin Metatawabin, chef de la direction, Association nationale des sociétés autochtones de financement : Merci, mesdames et messieurs les sénateurs, de me donner l’occasion de m’adresser à vous aujourd’hui. C’est un moment important pour discuter du budget. Je m’appelle Shannin Metatawabin. Je viens des Premières Nations de Fort Albany, de la nation Mushkegowuk. Avant de commencer, je tiens à souligner que je me trouve actuellement sur le territoire traditionnel des Micmacs. Je suis PDG de l’Association nationale des sociétés autochtones de financement, ou l’ANSAF. C’est un réseau de prêteurs autochtones pour le développement d’entreprises qui a accumulé 50 000 prêts à des entreprises des Premières Nations, inuites et métisses, d’une valeur de 3 milliards de dollars sur plus de 35 ans. Parallèlement, le réseau gère une diminution des investissements gouvernementaux et un manque de capitaux.
L’année dernière, nous avons offert le programme de soutien aux entreprises autochtones pour soutenir les entreprises pendant la pandémie de COVID, et on nous a assurés qu’il y aurait une stratégie de relance. Cette année, on n’en a pourtant annoncé aucune dans le budget. Les entreprises qui ont obtenu un soutien l’année dernière n’en ont donc plus cette année. Quarante pour cent d’entre elles ont dit qu’elles ne pouvaient plus emprunter d’argent, et environ 44 % d’entre elles ont dit qu’elles ne survivraient pas plus de six mois. Nous nous tournons donc vers le gouvernement pour qu’il continue d’envisager cela comme une option.
Merci de m’avoir invité à parler du budget. Je pense que c’est un moment décisif pour l’avenir. Prenons l’investissement de 18 milliards de dollars pour l’ensemble des Autochtones, dont 64 millions de dollars pour les entreprises autochtones. L’investissement du budget de 2021 dans les Autochtones est important et sans précédent. Une somme supplémentaire de 42 millions de dollars sur trois ans est affectée au Programme d’entrepreneuriat autochtone de l’ANSAF, pour que le réseau des institutions autochtones soit prêt à accorder de nouveaux prêts dans le cadre du Fonds de croissance autochtone. Il y aura 22 millions de dollars sur trois ans pour poursuivre le développement des initiatives d’entrepreneuriat des femmes autochtones. L’investissement permettra à notre réseau d’adapter les prêts qu’il consent aux femmes autochtones qui cherchent à faire prendre de l’expansion à leurs entreprises ou à les démarrer. Le renouvellement du Programme de préparation à l’investissement permettra de développer le Fonds de croissance autochtone et doit promouvoir la capacité du réseau.
Enfin, on s’est engagé à ce que le Canada atteigne sa cible d’approvisionnement de 5 % des contrats fédéraux. Ces engagements, une fois remplis, seront essentiels pour que la prospérité autochtone devienne une réalité.
Le budget fédéral de 2021 montre que le Canada a commencé à comprendre le message concernant la nécessité d’inclure les Autochtones dans la prospérité du pays. L’ANSAF a aussi créé un fonds de croissance autochtone, le plus récent et plus grand fond à retombées sociales autochtone. Lancé en avril 2021, le fond n’est pas un programme gouvernemental. Il a plutôt été conçu par l’ANSAF, en collaboration avec le gouvernement, et il offre des capitaux adaptés aux pratiques des institutions financières autochtones en matière de prêts. Le Fonds de croissance autochtone a permis de recueillir 150 millions de dollars auprès de partenaires gouvernementaux au premier tour, et il offre aussi un outil d’investissement aux investisseurs qui souhaitent des retombées sociales pour qu’ils puissent apporter leur propre contribution à la réconciliation. Lorsqu’il sera pleinement utilisé, le Fonds de croissance autochtone augmentera le montant des prêts accordés chaque année par les institutions financières autochtones de 75 millions de dollars, ce qui permettra de prêter de l’argent à environ 500 entreprises autochtones. Ce fonds aidera à préparer le terrain à des mesures concrètes, à un engagement significatif des Autochtones.
Il est important que tout le monde reconnaisse l’incidence des Autochtones sur la prospérité future du Canada. Les dépenses gouvernementales portant sur les services aux Autochtones sont passées de 7 milliards de dollars en 1996 à 17 milliards de dollars en 2019, soit une hausse de 143 %, ce qui est intenable à long terme. La véritable durabilité réside dans la reconnaissance que les investissements actuels dans l’économie autochtone nous éloigneront de cette trajectoire et mèneront à des répercussions de 100 milliards de dollars sur le PIB, sur l’économie canadienne.
En quoi est-ce un investissement? Chaque prêt a permis d’améliorer les indicateurs de santé de 20 %. Les indicateurs de santé mentale ont augmenté de 52 % et la satisfaction personnelle, de 72 %. Chaque prêt crée 3,32 emplois, et les revenus doublent. Chaque dollar fourni à une entreprise autochtone se traduit par 3,6 $ pour le PIB, et 1,4 $ est retourné au Trésor sous forme de bienfaits sociaux. C’est considérable, et cela contribue grandement à l’élan économique dont la communauté autochtone a besoin pour assurer à l’avenir sa propre prospérité et celle de l’économie canadienne.
À l’ANSAF, nous rendons la pareille au gouvernement, qu’il s’agisse de ministères, de sociétés d’État ou d’agences de développement régional. Nous allons travailler pour faire en sorte que ces nouveaux investissements aient des effets bénéfiques pour les entreprises autochtones, les collectivités et les économies pendant des décennies.
Avec des partenaires privés, nous allons offrir un instrument de placement sûr pour leur permettre de montrer leur engagement envers la réconciliation économique. Avec nos clients autochtones, petits et grands, notre réseau continue de travailler comme il l’a toujours fait, prêt par prêt, entreprise par entreprise. Les institutions financières autochtones vont soutenir leurs visions et investir dans leurs forces. Au bout du compte, les propriétaires d’entreprises autochtones sont ceux qui favoriseront la prospérité dans nos collectivités. Ils aideront le pays à concrétiser une nouvelle vision de prospérité commune. Meegwetch.
Le président : Merci beaucoup, monsieur Metatawabin.
La troisième personne à intervenir est Mme Drigola. Vous avez la parole.
Alla Drigola, directrice, Affaires parlementaires et politique des PME, Chambre de commerce du Canada : Merci. Bonjour. Je suis heureuse d’être de retour devant le comité. Je m’appelle Alla Drigola. Je suis directrice, Affaires parlementaires et politique des PME, à la Chambre de commerce du Canada. Je suis accompagnée aujourd’hui de Patrick Gill, directeur principal, Politiques fiscales et financières.
Pendant la pandémie, le gouvernement fédéral a mis en œuvre un certain nombre d’excellents programmes qui ont aidé des milliers d’entreprises à survivre et qui ont préservé des millions d’emplois. La mise à jour de ces programmes dans le budget, y compris la prolongation de la Subvention salariale d’urgence du Canada et de la Subvention d’urgence du Canada pour le loyer, l’amélioration du Programme de financement des petites entreprises du Canada et la création du nouveau programme d’embauche pour la relance économique, est essentielle pour aider les entreprises à survivre pendant la troisième vague en cours.
Les entreprises sont toutefois frustrées par l’absence de plan gouvernemental de réouverture concret et clair, en particulier pour les secteurs les plus durement touchés. Plutôt que de planifier et de préparer leur réouverture, les entreprises doivent attendre en ayant peu ou pas d’information. La subvention salariale, la subvention pour le loyer, les programmes de liquidité, le Programme de crédit aux entreprises, le Programme de crédit pour les secteurs durement touchés et les prêts partiellement remboursables aux petites entreprises du Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes sont tous d’excellents programmes nécessaires à la survie et au rétablissement des entreprises, mais ils ne constituent pas un plan de réouverture. Ils ne disent pas aux entreprises quels indicateurs regarder, quelles restrictions seront levées ni quand, à quoi pourrait ressembler une réouverture de la frontière ou comment fonctionneraient les passeports vaccinaux pour les voyages ou peut-être même les activités des consommateurs.
L’initiative de relance dirigée par les entreprises de la Chambre de commerce du Canada a permis d’accomplir beaucoup dans ce domaine. Nous avons donné des directrices et des ressources aux entreprises pour qu’elles puissent rouvrir leurs milieux de travail en toute sécurité, pour que la reprise des voyages au Canada se fasse avec succès et en toute sécurité, pour qu’elles sachent à quoi s’en tenir au sujet des titres numériques sanitaires et ainsi de suite.
Plus récemment, nous avons conclu un partenariat avec le gouvernement du Canada pour aider à fournir des tests rapides aux PME d’un bout à l’autre du pays de concert avec les réseaux provinciaux, territoriaux et locaux de la chambre.
Mais tout comme le Canada ne peut pas augmenter sans cesse et sans réserve le déficit, les entreprises ne peuvent pas s’endetter indéfiniment. Un plan efficace de réouverture qui permet aux entreprises de reprendre leurs activités de façon sécuritaire et durable est la meilleure approche qui soit pour tout le monde. Un plan de réouverture doit comprendre des critères clairs que nous devons remplir pour lever différentes restrictions gouvernementales fédérales et il doit indiquer les nouveaux outils qui seront offerts et dire quand. Un plan de réouverture efficace doit comprendre un soutien ciblé pour les secteurs les plus durement touchés, y compris le maintien des taux actuels de la Subvention salariale d’urgence du Canada et de la Subvention d’urgence du Canada pour le loyer pendant l’automne et peut-être même au-delà, entre autres mesures. Au moment d’envisager notre plan de réouverture, nous devrions éviter de reproduire l’ensemble incohérent de mesures de confinement avec lequel les entreprises dans différentes régions du pays ont dû composer pendant la pandémie.
Le gouvernement fédéral doit manifestement faire preuve de leadership à cet égard, et nous l’encourageons à poursuivre le travail avec les provinces pour annoncer ce plan et l’exécuter le plus rapidement possible.
Au-delà de la transition de la survie pendant la pandémie à la relance, il reste un certain nombre de problèmes structurels qui empêchent le Canada de réaliser son plein potentiel de reprise.
Je vais maintenant céder la parole à M. Gill pour qu’il parle de certaines recommandations de la Chambre de commerce du Canada en vue d’assurer la reprise économique du Canada.
Patrick Gill, directeur principal, Politiques fiscales et financières, Chambre de commerce du Canada : Mesdames et messieurs les sénateurs, bonjour. L’accent que le budget a mis sur la croissance et l’emploi représente une étape importante vers la reprise économique, mais les moteurs de croissance de notre pays doivent pourtant passer des dépenses publiques aux investissements privés pour mettre de l’ordre dans les finances du Canada. Le plan du gouvernement réduit les déficits au cours des prochaines années, mais c’est toutefois tributaire de l’atteinte de cibles de croissance qui seront difficiles à toucher et à dépasser, à moins d’améliorer la compétitivité et le niveau d’activités économiques du Canada.
Nos entreprises, les entreprises indépendantes et les autres, veulent vraiment un plan clair et prévisible pour les aider à diriger la relance économique du Canada. Les entreprises sont prêtes à donner le coup d’envoi de notre reprise commune, mais elles ont besoin que le Canada apporte sa contribution en créant le contexte d’affaires nécessaire et en les encourageant. À cet égard, plusieurs aspects du budget pourraient être améliorés pour favoriser la relance économique du Canada.
Premièrement, il faut débloquer les investissements dans la création d’emplois, par exemple, en prévoyant dans le budget l’augmentation temporaire des déductions pour amortissement accordées aux sociétés privées sous contrôle canadien. Cette mesure pourrait et devrait également viser les sociétés cotées en bourse, comme c’est normalement le cas dans le cadre du système de déductions pour amortissement. On pourrait ainsi, par exemple, mobiliser le plus grand éventail possible d’investisseurs.
Deuxièmement, le gouvernement devrait être plus ambitieux dans son approche pour corriger la structure de réglementation coûteuse et lourde du Canada. De plus, il devrait faire preuve de prudence dans la façon dont il complexifie davantage ses cadres réglementaires et dans le moment choisi pour le faire. Le nouveau régime proposé pour la déductibilité des intérêts est un exemple de nouvelle complexification d’un régime déjà complexe, qui a généralement bien servi les intérêts des Canadiens.
Enfin, il faut fixer un objectif budgétaire plutôt que de mettre en place des garde-fous budgétaires pour guider et contrôler à l’avenir les choix de dépenses. Lorsque des dépenses importantes sont prévues à moyen terme, un objectif budgétaire est nécessaire pour imposer une discipline dans la prise de décisions en matière de politiques financières à long terme. On ne doit jamais permettre à la dette publique de mettre en danger les services publics. Sans cible ni contrôle, la dette publique subit des pressions inflationnistes et des pressions liées au crédit. Merci, et nous sommes impatients de discuter avec vous.
Le président : Merci. Pour terminer les exposés, madame Bull, vous avez la parole.
Tabatha Bull, présidente et chef de la direction, Conseil canadien pour le commerce autochtone : Merci beaucoup.
Bonjour. Je suis heureuse d’être de retour ici. En tant que présidente et chef de la direction du Conseil canadien pour le commerce autochtone, le CCCA, je veux vous remercier, monsieur le président, ainsi que tous les distingués membres du comité de me donner l’occasion de vous faire part de mes observations et de répondre aux questions.
Je suis vraiment optimiste de constater que la voix des entreprises autochtones se fait entendre avec celle de nos collègues des associations de gens d’affaires. Je vous parle à partir de mon bureau à domicile, et je souligne que je me trouve sur le territoire traditionnel de nombreuses nations, y compris les Mississaugas de Credit, la nation anishinaabe, la nation chippewa, les Haudenosaunees et le peuple Wendat.
En tant que fière dirigeante autochtone qui a d’abord évolué dans un milieu non traditionnel, je tiens à reconnaître l’importance historique du projet de loi C-30 en tant que premier budget présenté par la première femme ministre des Finances du Canada. Dans son allocution, la ministre Freeland a reconnu que les Autochtones ont donné l’exemple dans la lutte contre la COVID-19, et que cette réussite fait honneur à leur leadership et à leur autonomie gouvernementale. Dans le document budgétaire, on répète qu’aucune relation n’est plus importante pour le gouvernement fédéral que celle avec les Autochtones.
Plusieurs mesures annoncées dans le budget soutiendraient, si elles sont adoptées, la santé et le bien-être des Autochtones, y compris des investissements dans les soins de santé, l’éducation et l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées. Je tiens à souligner que ces investissements sont essentiels et nécessaires pour commencer à combler les vastes lacunes sociales et économiques actuelles, mais je veux surtout parler aujourd’hui des mesures de soutien à la prospérité autochtone.
Nous devons regarder au-delà de l’élimination des lacunes et chercher à soutenir la croissance de l’économie autochtone. C’est une économie qui comblera ses propres lacunes, grâce à l’emploi, aux mesures environnementales, à la responsabilité sociale ainsi qu’à la création d’une richesse et d’un espoir intergénérationnels.
Le budget propose plusieurs initiatives pour construire des infrastructures et soutenir la croissance économique autochtone. En plus des programmes que l’ANSAF pourra administrer, le budget prévoit également plus de 6 milliards de dollars pour aider à combler les lacunes en matière d’infrastructure dans les collectivités autochtones et 36 millions de dollars sur trois ans pour renforcer la capacité et créer des emplois dans les collectivités autochtones grâce à des projets d’énergie propre.
Le CCCA aimerait que le gouvernement du Canada ne ménage aucun effort afin que ces travaux d’infrastructure pour les collectivités autochtones soient effectués par des entreprises autochtones.
Le budget propose aussi des engagements importants pour soutenir la reprise économique de façon plus générale. Ces engagements sont certes importants, mais la mise en œuvre inclusive des mesures proposées sera essentielle pour renforcer la capacité des Autochtones et appuyer leur autodétermination, surtout en matière d’infrastructures. Je vous en parle, car le CCCA entend régulièrement ses membres dire qu’il est encore difficile d’avoir accès aux programmes gouvernementaux actuels, ce qui comprend la Subvention salariale d’urgence du Canada, la Subvention d’urgence du Canada pour le loyer ainsi que l’accès aux marchés publics du gouvernement fédéral.
De plus, le dernier Sondage auprès des entreprises autochtones dans le contexte de la COVID-19 que le CCCA a mené l’hiver dernier indique que moins de la moitié des entreprises sondées ont présenté une demande au titre d’un programme de relance d’entreprises.
Nous devons veiller à ce que les entreprises autochtones soient une priorité, pas une considération secondaire, non seulement lorsque nous concevons des programmes de relance d’entreprises, mais aussi dans la conception de chaque programme qui appuie le développement économique et l’entrepreneuriat au Canada, y compris les programmes qui soutiennent activement l’accès à ces initiatives.
Nous aurions aimé voir un engagement envers une stratégie pangouvernementale de développement de l’économie et de l’entrepreneuriat autochtones que l’ensemble des ministères et organismes fédéraux seraient obligés de soutenir pour que tous les programmes tiennent compte des circonstances juridiques et raciales uniques des entreprises autochtones. La stratégie comprendrait des cibles d’approvisionnement obligatoires et garantirait aux collectivités autochtones une participation dans les grands projets d’infrastructures pour qu’elles puissent générer leurs propres sources de revenus en vue de soutenir l’autodétermination.
Le CCCA aimerait aussi voir des sommes réservées aux Autochtones dans tous les domaines des programmes fédéraux. Cette mesure est nécessaire, car les travaux de recherche et les travaux stratégiques du CCCA indiquent que l’accès des entreprises autochtones aux programmes fédéraux généraux à l’intention des entreprises n’est pas proportionnel à leur population.
Par exemple, les entreprises autochtones sont sous-représentées dans les programmes gouvernementaux d’innovation. Parmi les 85 projets qui ont reçu un financement fédéral de 3,4 milliards de dollars dans le cadre du Fonds stratégique pour l’innovation, aucun n’a été confié à une entreprise autochtone. Le gouvernement fédéral doit faire un effort concerté pour que les entreprises autochtones aient accès aux fonds pour l’innovation dans tous les programmes d’aide aux entreprises afin d’appuyer la reprise économique autochtone.
Comme toujours, le CCCA est déterminé à collaborer avec le gouvernement, ses membres et ses partenaires pour aider à reconstruire et à renforcer la voie à suivre pour assurer la santé et la prospérité du Canada. Je vous remercie tous de votre temps. J’ai hâte de répondre à vos questions. Meegwetch.
Le président : Merci beaucoup.
La sénatrice Marshall : Merci. J’aimerais connaître le point de vue des témoins sur la Subvention salariale d’urgence du Canada et le Programme d’embauche pour la relance du Canada, parce que l’objectif est de remplacer la subvention salariale par le Programme d’embauche pour la relance du Canada.
La Subvention salariale d’urgence du Canada prendra fin le 25 septembre. Le gouvernement prévoit 10 milliards de dollars pour cela, dans le budget, mais le montant des prestations diminuera de façon considérable entre le 6 juin et le 25 septembre. Je sais que le gouvernement peut décider de la prolonger jusqu’au 30 novembre, mais je n’ai pas trouvé d’argent dans le budget pour cela.
En revanche, le Programme d’embauche pour la relance du Canada sera accessible dès le 6 juin jusqu’au 20 novembre, et le budget prévoit 595 millions de dollars pour cela. Si l’on compare cette somme aux 10 milliards de dollars consentis au titre de la subvention salariale, on ne peut que constater que l’ampleur des prestations diminue.
Les témoins pourraient-ils nous parler de la transition? L’objectif est de remplacer un programme par l’autre, mais croyez-vous que ce sera un succès? J’aimerais connaître votre point de vue sur les deux programmes, qu’il soit positif ou que vous ayez des inquiétudes, en ce qui concerne la transition et la diminution des prestations.
Le président : Merci. Pouvons-nous entendre les réponses des témoins selon l’ordre des déclarations, s’il vous plaît? Je donnerai d’abord la parole à M. Kelly.
M. Kelly : Je vous remercie de cette question, sénatrice. Comme toujours, c’en est une que se posent également beaucoup de petits entrepreneurs.
Nous aimons bien le nouvel incitatif à l’embauche qui est créé. Je pense que c’est une bonne idée que de nous doter de ce genre de programme pour aider les entreprises à faire la transition entre la subvention salariale et le paiement des salaires au moyen de leurs propres revenus. Je pense que ce serait une énorme erreur que d’éliminer tous les programmes d’aide trop vite.
Les petites entreprises ont hâte de se débarrasser des subventions et de voir leurs ventes les remplacer, mais tant que les gouvernements ne pourront par dire à l’ensemble des Canadiens qu’il est temps de retourner au travail, qu’il est temps de retourner au cinéma, qu’il est temps de voyager, ce serait une énorme erreur que d’éliminer ou même d’amputer considérablement les programmes de subventions actuellement offerts.
Je vous somme donc, honorables sénateurs, de recommander que les subventions demeurent telles quelles pour l’instant. Elles sont déjà adaptées aux revenus, de sorte qu’on touchera une plus faible subvention si l’on enregistre des pertes moins grandes. Ce n’est pas comme si 75 % des salaires étaient subventionnés, comme au printemps. Le programme cible désormais les secteurs les plus durement touchés.
L’incitatif à l’embauche est une bonne idée. Je crains qu’il ne soit pas offert assez longtemps. Je pense que la différence de coûts s’explique par le fait que l’incitatif à l’embauche cible les petites et moyennes entreprises, alors que la subvention salariale ciblait les entreprises de toutes tailles. C’est l’une des grandes différences à souligner.
M. Metatawabin : Je vous remercie de cette question. Il faut admettre que le degré d’incertitude n’a pas changé beaucoup depuis l’an dernier, et je me souviens d’avoir témoigné devant le comité sénatorial des finances l’an dernier, à la même période. Ces programmes venaient tout juste d’être annoncés, pour aider les entreprises à survivre. On ne peut pas alourdir le fardeau des entreprises si l’on veut qu’elles s’en sortent. Il faut les appuyer pleinement. Cela sous-entend de prolonger l’application de ces programmes pour les aider jusqu’à ce qu’on ait une certaine certitude quant au moment où l’économie sera rétablie et tous les commerces pourront rouvrir leurs portes. Nous n’avons pas cette certitude pour l’instant.
La campagne de vaccination se poursuit, mais il n’y a toujours pas de certitude quant au moment où l’économie reprendra.
On nous avait assuré que le plan d’urgence de l’an dernier était conçu pour les aider à survivre pendant la crise, mais qu’il y aurait ensuite un programme de reprise. Celui-ci n’existe pas encore.
Si nous voulons aider les entreprises autochtones et les entreprises en général, il faut prolonger l’application de ces programmes.
Mme Drigola : Je vous remercie de cette question, sénatrice. C’est très important de le souligner. La subvention salariale est essentielle à la survie des entreprises. Le nouveau programme d’embauche pour la relance sera tout aussi essentiel à leur rétablissement, mais le défi, pour l’instant, c’est que les entreprises ne savent pas quel genre d’été elles vont passer, ni de quoi aura l’air l’automne. On nous dit que nous pourrons peut-être vivre un été dehors. Pour les restaurateurs, cela signifie que les terrasses seraient ouvertes, mais pas les salles à manger intérieures. Or, la subvention salariale sera abaissée à 20 % si un restaurant réussit à générer 75 % ou plus des revenus nécessaires d’ici septembre. Il n’aurait alors qu’une subvention de 20 % pour le loyer et les salaires, alors que la majorité des activités seraient toujours interdites en raison des restrictions sanitaires. C’est problématique.
Le programme d’embauche pour la relance incite les entreprises à embaucher de nouveaux travailleurs, à leur donner plus d’heures ou à augmenter leurs salaires, ce qui est très bien. C’est un excellent incitatif pour aider les entreprises à se remettre en marche en vue de la reprise.
Le problème, comme nous l’avons déjà entendu, c’est qu’il y a une reprise en K, de sorte que beaucoup de secteurs se rétablissent et se portent bien, alors que d’autres auront besoin de beaucoup plus de temps pour se rétablir. Nous avons donc besoin d’une aide ciblée dans ces secteurs, au niveau actuel, pour subventionner les salaires et le loyer. Comme je l’ai déjà mentionné, ces deux programmes prévoient une diminution progressive. Lorsque les revenus reviennent, l’aide diminue. L’entreprise peut alors commencer à se tourner vers le programme d’embauche pour la relance, parce qu’elle a recommencé à générer des revenus, mais qu’elle aurait besoin d’encore un peu d’aide pour embaucher de nouveaux employés, entre autres choses. Cependant, les entreprises du secteur du voyage ou de l’hébergement n’en sont pas encore là, elles ne peuvent pas savoir si elles doivent embaucher et former des employés aujourd’hui en vue d’une réouverture en juillet ou en août, puisqu’elles ne savent pas si elles pourront rouvrir leurs portes. Elles ne peuvent pas prendre ce genre de décision aujourd’hui et profiter de ces programmes.
Bref, c’est effectivement un programme fantastique, mais il faut prolonger sa période d’application en plus de maintenir les subventions actuelles pour les salaires et le loyer.
Mme Bull : Je suis d’accord avec les autres témoins. J’ajouterais seulement que le programme pour la relance exige toujours d’être titulaire d’un numéro de l’ARC au moins depuis le 15 mai 2020. Pour cette raison, certaines entreprises ne pourront pas se prévaloir du programme, surtout des petites entreprises, mais aussi des entreprises dans les réserves.
Il y a le Fonds d’appui aux entreprises communautaires autochtones qui a été renouvelé. Cependant, il faudrait investir davantage dans ce fonds pour mieux aider les entreprises visées.
Le président : Sénatrice Marshall, il vous reste 30 secondes. Vous pouvez poser une question, mais nous demanderons probablement aux témoins de vous répondre par écrit.
La sénatrice Marshall : Ma prochaine question concerne les grandes entreprises cotées en Bourse. M. Gill pourrait peut-être me faire parvenir une réponse à ce sujet. Avez-vous l’impression que ces entreprises sont souvent laissées pour compte? Les dirigeants de grandes entreprises ont parfois l’impression qu’elles sont vues comme des ennemis. Si quelqu’un peut me répondre, je lui en serais reconnaissante. Merci.
Le président : Monsieur Gill, seriez-vous d’accord pour faire parvenir une réponse écrite à ce sujet à la greffière, s’il vous plaît?
M. Gill : Certainement, je m’efforcerai de le faire au nom de la chambre.
Le président : J’espère bien. Nous avons une date limite à respecter. Pourriez-vous nous la faire parvenir par écrit au plus tard le jeudi 27 mai, s’il vous plaît? Merci.
[Français]
Le sénateur Forest : Merci aux témoins de comparaître de nouveau, parce que nous avions plusieurs questions à leur poser dans le cadre de l’étude de nos projets de loi.
Ma question s’adresse aux représentants de la Chambre de commerce du Canada. Je suis particulièrement sensible à tout le secteur du tourisme, surtout les secteurs de l’hôtellerie et de la restauration, qui avaient de grandes attentes en ce qui a trait au budget.
Est-ce que vous estimez que les mesures contenues dans le budget et le projet de loi C-30, comme le fait d’accorder 1 milliard de dollars pour le tourisme et le prolongement des programmes d’aide, seront suffisantes pour éviter le pire pour ce qui est de ces industries particulièrement touchées par la crise et les mesures de confinement?
[Traduction]
Mme Drigola : Je vous remercie infiniment de cette question. Elle est excellente. Le budget prévoit environ 1 milliard de dollars pour le secteur du tourisme pour les trois prochaines années, dont pourront se prévaloir certains segments de l’industrie.
Je dirais que le gouvernement a établi les fondements nécessaires pour appuyer le secteur du tourisme, du voyage et de l’hébergement. Il y a la subvention au loyer, la subvention salariale, le nouveau programme de Garantie du PCSTT qui donne accès à des liquidités, le CUEC, et cetera. Le seul problème, c’est que tous ces programmes viendront à échéance un peu trop tôt pour que ces secteurs soient vraiment en phase de relance. Il leur faudra plus de temps que d’autres pour se rétablir. Toutes les restrictions en place dans ces secteurs seront les dernières à être levées. Nous avons besoin que ces programmes se continuent.
Il n’est pas nécessaire de les prolonger pour tous les secteurs. Il faut trouver le juste équilibre, laisser d’autres secteurs en mesure de se rétablir amorcer leur transition et s’en affranchir, question de bien utiliser l’argent des contribuables. En même temps, il faut continuer d’appuyer les secteurs qui en ont le plus besoin.
Le gouvernement est là. Il s’est doté des bons outils. Nous devons seulement veiller à ce que ces outils demeurent accessibles tout le temps nécessaire.
[Français]
Le sénateur Forest : Vous voulez que les programmes soient disponibles et mieux ciblés, si je comprends bien.
Ma deuxième question, si j’ai assez de temps, monsieur le président, concerne le budget : en plus d’étendre la TPS, le gouvernement a annoncé qu’il irait de l’avant avec une taxe sur les services numériques. Cette taxe ne figure pas dans le projet de loi C-30.
Je sais que vous privilégiez une approche plus multilatérale, où l’ensemble des États et des pays peuvent s’entendre afin que vos membres puissent faire concurrence aux entreprises étrangères qui sont peu ou pas taxées. Ne croyez-vous pas qu’il est temps de rétablir un peu d’équité fiscale entre Amazon, par exemple, et nos détaillants canadiens qui sont de plus en plus présents dans le commerce en ligne, qui a connu une augmentation assez fulgurante dans le contexte de la pandémie ?
Le président : Sénateur Forest, à qui avez-vous posé votre question?
Le sénateur Forest : Mme Drigola ou M. Gill, soit celui ou celle qui veut bien répondre à cette question.
[Traduction]
Mme Drigola : Je peux vous répondre. Je peux d’abord vous parler de la taxe sur les services numériques, après quoi M. Gill pourra peut-être approfondir. Je sais qu’il éprouve des problèmes avec l’interprétation, donc je me lancerai la première.
La Chambre de commerce du Canada réclame une taxe sur les services numériques depuis longtemps. Cette taxe doit être imposée au Canada. Nous devons nous assurer de taxer les ventes de services numériques de manière juste et équitable. Je pense que le budget jette les bases nécessaires pour cela.
Je ne sais pas si M. Gill veut ajouter quelque chose.
M. Gill : Cette mesure vise à combler l’écart qui existe dans les taxes sur les services numériques au Canada et à instaurer un régime fiscal juste et équitable. Il y a longtemps qu’on en parle dans le cadre du projet BEPS de l’OCDE, sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert des bénéfices. Bien que le Canada et divers pays européens participent au processus d’établissement d’un cadre multilatéral, ils ont annoncé leur intention de prendre des mesures unilatérales à court terme. Cela fait partie des grandes discussions internationales qui se dérouleront cette année. Il s’agit de bien positionner le Canada en vue de ces négociations autant qu’il s’agit de prélever de nouveaux revenus.
La Chambre de commerce du Canada estime qu’il serait préférable que le Canada évite de prendre des mesures unilatérales à cet égard, mais on peut comprendre que le Canada l’envisage après des années de discussions, pour mieux se positionner dans les négociations et créer un régime fiscal plus juste et plus équitable.
[Français]
Le sénateur Forest : Ai-je encore du temps, monsieur le président?
Le président : Oui, vous avez encore le temps de poser une question. Si on ne peut pas y répondre toute de suite, cela pourra se faire par écrit.
Le sénateur Forest : La section 18 du projet de loi C-30 modifie la Loi sur le financement des petites entreprises du Canada afin d’augmenter le plafond des prêts et de mieux couvrir des entreprises innovantes qui disposent de prêts liés à leurs brevets.
Dans l’esprit des membres de la Chambre de commerce du Canada, ces modifications sont-elles porteuses ou satisfaisantes, et vont-elles favoriser la recherche, le développement et l’innovation dans nos entreprises canadiennes?
[Traduction]
Mme Drigola : Absolument. L’augmentation de 350 000 $ à 500 000 $ au titre du Programme de financement des petites entreprises du Canada réjouit beaucoup nos membres, tout comme la création d’une marge de crédit en parallèle. Ce sera un outil supplémentaire pour les petites entreprises qui veulent démarrer, croître, prendre de l’expansion, et cetera. Il y a aussi des fonds pour la numérisation, pour le commerce électronique et tout le reste. Donc je pense qu’il y a beaucoup de choses pour les petites entreprises.
Cela dit, on commence à entendre que s’il y a beaucoup d’options d’endettement et de financement, les petites entreprises sont celles qui se sont le plus lourdement endettées depuis 14 ou 15 mois. Il vient donc un temps où les entrepreneurs doivent commencer à se demander s’ils doivent s’endetter davantage ou plutôt se concentrer sur le remboursement des dettes déjà encourues, ainsi que sur le maintien de leurs employés et de leurs activités.
Bref, ces options sont très intéressantes. Il est très important qu’elles existent, mais en même temps, il faudra aussi tenir compte de l’allégement de la dette nécessaire pour la reprise.
Le président : Monsieur Gill, avez-vous quelque chose à dire en réponse à cette question?
M. Gill : J’ajouterais simplement, et c’est important d’en prendre conscience, que selon Statistique Canada, environ 40 % des entreprises nous ont dit au dernier trimestre ne pas être en mesure de s’endetter davantage. Ce positionnement est très étroitement lié à leur degré de confiance et à leurs liquidités — il y a toute une série de facteurs qui entrent en ligne de compte —, mais cela dépend assurément beaucoup de leur confiance que l’économie rouvrira et qu’elles pourront payer ce nouvel investissement ou absorber ce nouveau fardeau financier.
Le président : Monsieur Gill, si vous voulez ajouter quoi que ce soit par écrit, n’hésitez pas à le faire, dans la mesure où vous faites parvenir votre réponse à la greffière d’ici le mercredi 26 mai. Nous vous en serons reconnaissants.
Le sénateur Klyne : Je souhaite la bienvenue à tous nos témoins. Mes premières questions s’adressent à la présidente du Conseil canadien pour le commerce autochtone. J’en poserai ensuite quelques-unes au représentant de l’Association nationale des sociétés autochtones de financement.
Prenons d’abord le Conseil canadien pour le commerce autochtone : le gouvernement s’est engagé, dans le budget de 2021, à réserver 22 millions de dollars pour aider les femmes entrepreneures autochtones. Dans votre étude de septembre 2020 intitulée Indigenous Women Entrepreneurs, vous citez diverses observations pour illustrer les défis divers, uniques et complexes auxquels sont confrontées les femmes autochtones souhaitant se lancer dans l’entrepreneuriat. Pourriez-vous dire au comité quels sont les défis uniques auxquels sont confrontées les femmes entrepreneures autochtones et comment ces 22 millions de dollars pourraient les aider à démarrer et à exploiter une entreprise, d’après vous?
Mme Bull : Je vous remercie de cette question. Oui, absolument, dans cette étude que nous avons réalisée en collaboration avec l’Institut de la diversité, nous avons constaté une formidable croissance de l’entrepreneuriat chez les femmes autochtones, tant de par la taille des entreprises que par leur propension à exporter leurs produits et à générer des revenus. Cependant, nous avons aussi observé que ces entreprises ont été très durement touchées au cours de la dernière année en raison de leurs domaines d’activités.
Le plus grand obstacle est certainement l’accès aux capitaux : l’accès au financement et l’allégement de la dette, comme nous l’avons souligné déjà. Bien sûr, c’est à M. Metatawabin d’administrer ce programme, mais si j’étais à sa place, j’envisagerais vraiment d’accorder des microprêts et des bourses à ces entreprises.
Au conseil, nous venons justement de lancer un fonds pour les femmes entrepreneures, grâce auquel nous avons accordé des bourses de 2 000 $. Nous avons reçu 40 demandes de femmes pour ce fonds. Nous n’en avions que 20 à distribuer, donc il y a nettement un besoin pour les entreprises détenues par des femmes.
Il importe aussi que ces entrepreneures aient accès à des réseaux, que les femmes autochtones entrepreneures aient accès aux réseaux de Bay Street et des grandes villes, qu’elles aient accès à de l’information et à du mentorat. Nous croyons qu’il serait également pertinent d’établir un programme pour cela.
Le sénateur Klyne : Merci. Dans le budget de 2021, le gouvernement a proposé d’injecter 2,5 milliards de dollars sur cinq ans dans une approche fondée sur les distinctions en matière d’apprentissage et de garde des jeunes enfants. Beaucoup d’études soulignent le caractère essentiel de l’apprentissage dès la petite enfance pour acquérir les connaissances, les compétences et les aptitudes dont une personne aura besoin dans sa vie adulte et pour approfondir ses apprentissages. Pouvez-vous expliquer au Comité quels seraient, d’après vous, les avantages de l’approche fondée sur les distinctions en matière d’apprentissage et de garde des jeunes enfants? Croyez-vous que cette approche est la bonne pour permettre aux jeunes Autochtones d’atteindre un niveau de scolarité plus élevé et combler l’écart entre les Autochtones et les non-Autochtones pour ce qui est de l’obtention d’un diplôme?
Mme Bull : Merci. Nous convenons tous que la vérité et la réconciliation passent d’abord et avant tout, au Canada, par l’éducation et l’apprentissage. De plus, l’apprentissage fondé sur les distinctions confère un espace sûr aux jeunes Autochtones, où être fiers de qui ils sont et de leur culture. Nous savons que cette confiance est essentielle et que c’est la qualité la plus nécessaire chez un entrepreneur. Nous répétons constamment aux femmes autochtones entrepreneures qu’elles doivent avoir confiance en leur entreprise et en leurs compétences afin de proposer un plan d’affaires et d’avoir accès à du financement. Cette confiance leur vient de leur jeunesse. Elles doivent comprendre très tôt qui elles sont, à quelle culture elles appartiennent et en être fières. Il est aussi très important, selon cette approche fondée sur les distinctions, de reconnaître les caractéristiques uniques de chaque culture.
Le président : Monsieur Metatawabin, avez-vous des commentaires à ajouter concernant les deux questions qui ont été posées?
M. Metatawabin : Certainement. Parlons d’abord des 22 millions de dollars prévus pour les femmes entrepreneures. Conformément à ce qu’elles nous ont demandé lorsque nous les avons consultées, un programme de microcrédit sera mis sur pied. Au fil des 35 dernières années, les femmes ont été bénéficiaires de 41 % de l’ensemble des prêts consentis par l’intermédiaire du réseau de l’ANSAF, mais nous visons une proportion de 50 % des prêts à des femmes autochtones. Nous allons en revenir à un programme fondé sur des cibles en essayant de verser une grande partie des subventions et des prêts à des femmes. En effet, les jeunes et les femmes ont besoin de programmes et de mesures de soutien particuliers pour acquérir de nouvelles capacités et se lancer en affaires. Il faut donc offrir une aide ciblée et nous sommes à même de constater de meilleurs résultats. Merci.
Le sénateur Klyne : Merci. Ma prochaine question est pour M. Metatawabin et l’Association nationale des sociétés autochtones de financement qui offre des services de consultation à plus de 50 institutions financières autochtones des différentes régions du Canada en plus de défendre leurs intérêts. La principale difficulté pour ces institutions est d’avoir accès à des capitaux pour pouvoir consentir des prêts à des Autochtones pour le démarrage, l’acquisition et la fusion d’entreprises. Dans le budget de 2021, le gouvernement a exprimé son soutien au Fonds de croissance autochtone géré par l’ANSAF dont vous nous avez parlé dans vos observations préliminaires en nous indiquant que 150 millions de dollars ont pu être obtenus de différentes sources lors du premier cycle de financement.
Pouvez-vous dire au comité comment ce fonds sera mis à contribution pour le financement d’entreprises autochtones qui arriveraient sans cela très difficilement à bénéficier d’autres investissements, et nous préciser s’il y a déjà eu des projets ou des partenariats témoignant des progrès réalisés par l’ANSAF et les institutions financières autochtones dans leurs efforts pour obtenir le concours des sources générales de financement et d’investissement à impact social?
M. Metatawabin : Merci pour cette question. Nous parlons du Fonds de croissance autochtone depuis quelques années déjà, et des sociétés d’investissement à retombées sociales et de gestion de patrimoine se sont renseignées pour savoir à quel moment elles pourraient investir.
Nous débutons avec des fonds de 150 millions de dollars. Cela nous permettra d’ajouter 500 entreprises à notre réseau, mais cela fera surtout en sorte que nous pourrons hausser le montant des prêts consentis pour contribuer de façon plus significative encore à la croissance de ces entreprises qui deviennent de plus en plus grandes et complexes. C’est la tendance que nous pouvons observer dans la croissance de nos entreprises. Il faut dire que 85 % des institutions de notre réseau consentent des prêts à cinq clients et moins. On peut vraiment parler d’une échelle microéconomique. Nous constatons qu’il y a entre les prêteurs du secteur financier et les institutions de notre réseau un fossé que nous cherchons à combler en offrant des prêts plus importants aux entreprises autochtones dont l’impact sur nos communautés va augmenter en conséquence.
C’est un important pas en avant pour le Canada, mais il faut aussi reconnaître qu’il y a eu une diminution de 70 % du soutien gouvernemental, notamment pour ce qui est des services d’aide aux entreprises. Comme vous l’indiquiez, les institutions financières autochtones offrent cette aide personnalisée aux entreprises autochtones. Nous avons constaté une diminution au cours de la dernière décennie. Nous devons revenir aux niveaux antérieurs de telle sorte que nos institutions financières puissent avoir un impact véritable et commencer à considérer des projets qui pourront tous être financés. Merci.
Le sénateur Richards : Merci à tous nos témoins. Ma question est sans doute pour Mme Drigola ou M. Kelly.
Si les ventes et les bénéfices n’augmentent pas, le Programme d’embauche pour la relance économique n’aura pas d’effet véritable étant donné le grand nombre d’entreprises qui seront déjà en faillite. Tôt ou tard, les mesures d’allégement de la dette finissent par devenir une dette pour le gouvernement, et je me demande si cela ne se traduira pas par des hausses de taxes et des prix plus élevés. Il faut débourser actuellement 26 $ pour acheter une planche de 2 pouces sur 6 pouces d’une longueur de 10 pieds. L’an dernier, la même planche coûtait 5 $. C’est une hausse astronomique, et je sais qu’elle est attribuable à la pandémie, mais est-ce que ces prix vont baisser à nouveau? Une fois que les prix montent, ils ont tendance à demeurer élevés.
Il y a aussi des considérations sociales à prendre en compte. Dans notre province, il y a maintenant beaucoup plus de jeunes qui consomment de la méthamphétamine et qui ont développé une dépendance à cette drogue, et ces jeunes deviennent des décrocheurs. Je me demande donc qui va pouvoir les embaucher et ce qu’il adviendra de ces jeunes s’ils n’obtiennent pas l’aide dont ils ont besoin et s’ils en viennent à former une génération perdue, ce que m’inquiète vivement.
Je ne sais pas si M. Kelly pourrait répondre à quelques-unes de mes interrogations à ce sujet?
M. Kelly : Merci, sénateur. Vous avez abordé de nombreux aspects. Vos inquiétudes concernant les niveaux d’endettement, tant pour la dette privée des entreprises que pour la dette gouvernementale, sont tout à fait fondées. Comme je le soulignais dans mon exposé, les petites entreprises ont hérité d’une dette moyenne de 170 000 $ résultant de la pandémie. C’est donc une nouvelle dette attribuable aux fermetures forcées et aux coûts plus élevés de différentes choses, comme vous l’avez mentionné. On pourrait aussi donner l’exemple de l’équipement de protection individuel. Ainsi, un petit gym a dû dépenser, lorsqu’on lui a permis d’ouvrir ses portes, 2 000 $ en un mois pour l’équipement de protection individuel et les mesures sanitaires. Les coûts ont grimpé pendant que les ventes chutaient, ce qui a créé une situation tout à fait insoutenable pour un grand nombre de petites entreprises.
Le gouvernement a pris selon moi une mesure bénéfique en prévoyant une radiation partielle des prêts consentis dans le cadre du Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes, la CUEC, lorsque le solde est remboursé avant une certaine date. Il s’agissait au départ d’un prêt maximum de 40 000 $ avec une portion de 25 %, soit 10 000 $, pouvant être radiée lorsque l’entreprise rembourse le reste du solde. On a maintenant porté ce maximum à 60 000 $ dont 20 000 $ peuvent être radiés. C’est une autre mesure positive.
Nous avons exhorté le gouvernement à hausser à 80 000 $ le montant maximal d’un prêt pouvant être consenti dans le cadre du CUEC avec une possibilité de radiation de 50 % de ce prêt. Nous recommandons également des changements aux règles d’admissibilité de telle sorte qu’il soit plus facile pour les petites entreprises d’obtenir des prêts d’un montant inférieur dans le cadre de ce programme. Nous estimons qu’il faudrait aussi prévoir une possibilité de radiation partielle pour l’aide offerte dans le cadre du Programme de crédit pour les secteurs très touchés.
Si nous allégeons une partie du fardeau de la dette des entreprises attribuable à la COVID, elles seront nettement plus aptes à réussir la transition de la fermeture à la reprise de leurs activités, ce qui serait selon nous profitable pour tous les Canadiens.
Il y a effectivement des préoccupations du point de vue de l’emploi des jeunes. Les petites entreprises sont souvent celles qui leur procurent leur premier emploi et bon nombre d’entre elles ont malheureusement dû interrompre leurs activités.
Il faut espérer qu’au courant de l’été à venir, ces entreprises pourront ouvrir à nouveau partout au pays. Nous croyons que bon nombre des emplois perdus pourront ainsi être récupérés. Dans certains cas, nous prévoyons même une pénurie de main-d’œuvre, surtout pour le travail à temps partiel étant donné la grande générosité des programmes de soutien gouvernemental pour les particuliers. Il y a certains employés qu’il sera difficile de rapatrier dans ce contexte. C’est à ce niveau que le programme d’incitatifs à l’embauche prévu dans le budget pourrait être utile.
Mme Drigola : Je suis d’accord en grande partie avec ce que M. Kelly vient de vous dire. Il y a là bien des mesures que nous pouvons prendre dès aujourd’hui pour éviter certaines faillites à venir. Il ne fait aucun doute que l’élaboration d’un plan de reprise des activités est au sommet de cette liste.
Par ailleurs, je crois qu’environ 71 % des emplois, soit 350 000, qui sont encore considérés comme perdus aujourd’hui comparativement à la situation qui prévalait avant la pandémie sont dans le secteur des services alimentaires et du tourisme d’accueil. Nous savons où se situent ces emplois. Nous savons quels secteurs ont encore besoin d’un soutien continu, et c’est la raison pour laquelle nous préconisons un plan de transition ciblant parmi toutes les entreprises bénéficiant des programmes de soutien celles qui ont besoin d’une aide à plus long terme.
M. Gill : On pourrait aussi parler des considérations liées à l’inflation. La poussée inflationniste est un sous-produit naturel des mesures d’assouplissement quantitatif prises au début de la pandémie ainsi que de la transformation des habitudes des consommateurs qui s’est amorcée dans toute l’Amérique du Nord pendant la pandémie. J’aimerais toutefois traiter brièvement des enjeux liés à la dette et au déficit.
La pandémie a forcé les gouvernements de tous les pays à s’endetter davantage pour que leurs citoyens et leurs entreprises n’aient pas à le faire. Avant la pandémie, les Canadiens et les entreprises canadiennes avaient un fardeau d’endettement privé parmi les plus lourds au sein du G20. Même si le budget établit un plan pour la réduction des déficits fédéraux à moyen terme et le retrait progressif des mesures liées à la pandémie, ce plan fédéral pourra se concrétiser uniquement si nous atteignons nos objectifs de croissance.
À cette fin, nous devons continuer d’éviter de nouvelles fermetures forcées en misant sur les mesures de santé publique comme la vaccination et les tests de dépistage rapide. Disons simplement que la réouverture doit mener à la croissance. En outre, il faut éviter de freiner les nouveaux investissements des entreprises au départ de la relance en leur imposant des frais additionnels ou un nouveau fardeau réglementaire.
Par ailleurs, la croissance de la dette fédérale demeure préoccupante et doit être prise très au sérieux. Il faut absolument éviter que cette croissance de l’endettement public mette en péril les services offerts à la population. C’est dans ce contexte qu’il est particulièrement préoccupant de constater que les frais de service de la dette vont presque doubler au fil des cinq prochaines années. Bien qu’ils demeurent inférieurs à leur niveau des années 1990, ces frais risquent de grimper à la faveur des pressions exercées par l’inflation et le coût du crédit. C’est en raison de la dette fédérale que le Canada doit s’assurer d’éviter le piège d’une croissance d’à peine 2 % lorsque la pandémie prendra fin. Une croissance de 2 % permettra de réduire les déficits fédéraux au cours des cinq prochaines années, mais n’empêchera pas la dette nette du Canada de croître indéfiniment.
M. Metatawabin : Je suis d’accord avec M. Kelly. Je conviens également qu’il ne faut pas laisser tout le fardeau aux entrepreneurs en les obligeant à rembourser une imposante dette qu’ils n’avaient pas avant le début de la pandémie. Il incombe de plus au gouvernement de protéger les investissements dans l’économie de manière à favoriser un partage de la dette. Je conviens donc avec M. Kelly que 50 % des prêts consentis aux entreprises canadiennes devraient pouvoir être radiés, ce qui permettra à ces entreprises — autochtones et autres — de retomber sur leurs pieds et de recommencer à générer des revenus pour que notre économie puisse être véritablement relancée. Merci.
Le président : Merci.
Le sénateur Richards : Un grand merci à tous.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Ma question s’adresse à M. Kelly.
Monsieur Kelly, j’ai écouté votre présentation et je partage votre indignation devant les promesses non respectées du premier ministre. Je comprends également vos frustrations devant ce que j’appelle « le traînage de pieds » auquel nous assistons dans certains dossiers depuis le début de la pandémie.
Je commence souvent mes questions en faisant écho aux paroles du premier ministre et de ses ministres; ceux-ci disent souvent qu’ils sont à l’écoute. Ma question est fort simple : avez-vous été consultés par le gouvernement avant la présentation du budget et, si oui, avez-vous été écouté?
[Traduction]
M. Kelly : Oui, je dirais que le gouvernement a considéré avec attention les suggestions formulées par la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante et par un grand nombre d’autres associations comme la nôtre, j’ose l’espérer. Nous avons pu communiquer régulièrement avec la vice-première ministre et plusieurs autres ministres pour leur faire part de nos façons de voir les choses. Je crois d’ailleurs que certaines des mesures contenues dans le budget de 2021 ont été inspirées par le travail de sensibilisation effectué par notre fédération et d’autres groupes du milieu des affaires. C’est le cas notamment du maintien de certains programmes de soutien gouvernemental pendant quelques mois encore ainsi que de la création du nouveau programme d’incitatifs pour l’embauche.
Bien que l’on ait donné suite à certaines de nos recommandations, il y a encore de graves lacunes à combler. Il y a notamment le fait que le gouvernement a négligé de corriger les failles qui freinent le soutien offert dans le cadre de plusieurs de ses programmes. L’énergie déployée à l’automne pour apporter des correctifs à ce niveau afin de mieux aider les entreprises ne semble tout simplement plus être là. Je sais que le gouvernement ne doit pas perdre de vue la reprise à venir et la protection des fonds publics. Je comprends ce rôle et je le respecte totalement. Il faut toutefois regretter qu’il nous ait été difficile à ce point d’inciter le gouvernement à corriger quelques-unes des principales lacunes. Le programme d’aide pour le loyer ne fonctionne tout simplement pas pour des milliers d’entreprises, le programme de prêts du Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes doit être bonifié dans le sens de ce que nous indiquions tout à l’heure, et il faut faire quelque chose pour les nouvelles entreprises qui n’ont accès à aucun des programmes de soutien offerts.
Le gouvernement a sans cesse répété qu’il comptait faire quelque chose, mais aucun progrès n’a été réalisé. Je ne sais pas exactement ce qui bloque le tout. Je suis conscient que le gouvernement fédéral doit bien sûr se préoccuper des questions de santé liées à la COVID, mais il n’en demeure pas moins que les répercussions sur le plan économique sont tout à fait concrètes. Je suis également d’avis, à l’instar de nombreux témoins précédents, que ces répercussions vont se faire ressentir pendant longtemps. À titre d’exemple, les entreprises du secteur événementiel ne pourront vraiment reprendre leurs activités que plusieurs mois après la réouverture des autres entreprises. Le gouvernement ne semble pas s’intéresser à leur sort. Ces entreprises n’ont pas dû cesser leurs activités parce qu’elles ont été mal gérées ou en raison d’erreurs qu’elles auraient commises. Cela peut arriver lorsque les choses se passent bien, mais aussi lorsqu’elles tournent mal. Nous ne sommes pas toujours en train de réclamer des subventions. Nous disons simplement que des entreprises ont dû fermer leurs portes dans le but de protéger la société. On a ainsi limité leur capacité à générer des revenus. Nous croyons qu’il incombe aux instances fiscales, tant à l’échelon fédéral qu’au niveau des provinces, d’apporter un soutien à ces entreprises tant et aussi longtemps que nous ne serons pas sortis de la pandémie.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Je pose la même question à Mme Drigola. La Chambre de commerce du Canada est une entité très importante pour l’économie du pays. Avez-vous été, vous aussi, consultés par le gouvernement avant la présentation du budget?
[Traduction]
Mme Drigola : Certainement. Nous avons eu des échanges réguliers avec la vice-première ministre, la ministre Ng et plusieurs autres ministres et les membres de leur personnel depuis le début de la pandémie, et tout particulièrement lors de la période d’élaboration du budget. Celui-ci renferme de nombreuses mesures positives que nous avons préconisées, comme l’ont fait d’autres groupes qui ont comparu devant votre comité. La situation est toutefois loin d’être parfaite, et il y a encore beaucoup à faire. Il y a vraiment lieu d’améliorer certains de ces programmes qui demeurent défaillants.
Le programme de subvention pour le loyer représente une importante amélioration par rapport à ce qui existait au départ. Il y a encore certains problèmes pour ce qui est de l’accessibilité des entreprises de taille moyenne et notamment de celles qui ont plusieurs adresses ou qui sont installées dans des secteurs où les coûts sont élevés, comme les centres-villes et les endroits tels que Toronto et Vancouver. Il y a donc encore des points qui peuvent être améliorés.
Les programmes ont été prolongés, mais ils perdent malheureusement de leur ampleur. Il y a beaucoup de dialogue et de consultation. Avons-nous obtenu tout ce que nous pouvions espérer? Non, certaines choses auraient pu être mieux faites.
[Français]
Le sénateur Dagenais : J’aimerais vous entendre brièvement, monsieur Kelly et madame Drigola, parler des conséquences du fait de maintenir encore la fermeture globale de nos frontières pour notre économie.
[Traduction]
Mme Drigola : Je peux commencer. Je ne crois pas que le moment soit venu d’ouvrir nos frontières. Nous avons toutefois besoin d’un plan pour établir quand il sera nécessaire de le faire, quel genre de résultats il faudra avoir atteint et quelle proportion de la population devra être vaccinée. Est-ce que la frontière va être ouverte à tous ou va-t-on adopter une approche plus ciblée semblable à celle du Royaume-Uni avec son système d’alerte rouge, jaune et verte suivant lequel un voyageur en provenance d’une région à faible risque peut entrer au pays en fournissant une simple preuve de vaccination ou de résultat négatif à un test de la COVID? Pour ceux qui proviennent de régions plus à risque, faut-il exiger une quarantaine? Il peut aussi y avoir des moments pendant la quarantaine où un test négatif permet d’y mettre fin.
Dans le cas de la frontière entre le Canada et les États-Unis, la nature très étroite des relations entre les deux pays fait en sorte qu’il est vraiment nécessaire pour les entreprises de savoir à l’avance à quoi s’en tenir quant aux mesures envisagées pour pouvoir se préparer en conséquence.
M. Kelly : Je ne vais pas répéter les excellentes réponses que Mme Drigola vient de vous donner. Je vous dirai simplement que l’organisation qu’elle représente, la Chambre de commerce du Canada, celle de Mme Bull, le Conseil canadien pour le commerce autochtone, ainsi que la mienne avons écrit aujourd’hui même une lettre demandant au premier ministre du Canada et à ses homologues provinciaux de fixer en vue de la reprise économique des balises qui porteraient notamment sur les mesures de contrôle à la frontière. Il n’est pas question de donner des dates précises, mais simplement de tracer un itinéraire assorti d’un calendrier provisoire sur lequel les entreprises pourraient baser leur plan de reprise des activités en tenant compte de l’importance cruciale des échanges transfrontaliers.
On accumule de plus en plus les exemples de situations où la fermeture de la frontière à long terme a causé des difficultés économiques à des entreprises canadiennes, y compris des PME. Il faut régler cette question sans tarder. J’ose espérer que cela pourra se faire sous peu, surtout si l’on considère ce qui se passe en Europe et ailleurs où une plus grande liberté de mouvement est devenue possible, grâce à des taux de vaccination plus élevés, comme au Royaume-Uni par exemple.
La sénatrice Galvez : J’aimerais remercier nos témoins. Ce comité mène une discussion très intéressante sur la reprise après la pandémie. Je suis ravie que nous ayons entrepris cette discussion.
J’ai trois questions. Ma première s’adresse à M. Gill. La COVID prend toute la place, et je sais que tout le monde est prêt à relancer l’économie et est pressé de le faire. Nous avons quelques signes de reprise, comme l’a expliqué Mme Drigola. Dans certains cas, on parle d’une reprise en forme de K, dans d’autres, d’une reprise en forme de L ou de V. Différents secteurs se rétablissent. Certains connaissent une croissance fulgurante, comme la vente de télévisions et de vidéos, mais d’autres mettront du temps à se rétablir parce qu’il y a une pandémie et que jusqu’à maintenant, les gens ne consomment que les produits et services de base.
Monsieur Gill, vous avez dit que les entreprises veulent atteindre leurs objectifs de croissance. Pourriez-vous nous en dire plus sur les attentes du milieu des affaires sur le plan de la croissance?
M. Gill : Merci, madame la sénatrice. La reprise est amorcée, mais elle se présente différemment là où l’on se trouve. La disparité liée à la reprise en K que nous avons observée sur le marché du travail, entre autres, s’exprime également sur une base sectorielle et correspond à ce que l’on observe du point de vue de la main-d’œuvre. Ce fut toute une année pour les entreprises. Lorsque la pandémie a frappé, on a demandé aux entreprises de mettre leurs activités et leurs employés en état d’hibernation, essentiellement. Toutes les réserves dont elles disposaient à l’époque sont épuisées depuis longtemps.
Les entreprises attendent le feu vert pour revenir à une certaine normalité. Comme mes collègues l’ont souligné, si la situation est claire pour les entreprises et leur permet de planifier leurs dépenses et de prendre des décisions en matière d’embauche, c’est extrêmement utile pour la reprise de leurs activités.
Nous avons également constaté que des entreprises de toutes tailles ont beaucoup innové et se sont grandement adaptées pendant la pandémie. La croissance pourrait nous surprendre si les entreprises continuent de s’adapter et d’innover de cette façon. Plus les choses s’éternisent et moins il y a de certitudes quant à la façon dont les choses peuvent commencer et au moment où elles peuvent commencer, plus la situation est difficile pour les entreprises vulnérables, les petites et moyennes entreprises des secteurs les plus touchés.
Sur le plan des dépenses publiques, nous devons prendre des décisions budgétaires difficiles quant à la manière dont l’argent est dépensé et au moment où il l’est. Bon nombre d’entre nous ont fait valoir que le financement reste nécessaire, mais pas partout. L’aide peut être fournie de façon plus ciblée.
La sénatrice Galvez : Ma deuxième question s’adresse à M. Metatawabin.
Vous avez dit souhaiter que le gouvernement augmente l’aide et les fonds pour qu’ils atteignent les niveaux antérieurs. Vous avez mentionné que vous en aviez mesuré l’importance, et vous avez parlé des indicateurs utilisés dans votre évaluation.
Pourriez-vous nous faire parvenir les rapports dans lesquels figure votre évaluation? C’est ce que vous utilisez pour plaider en faveur d’un soutien accru.
M. Metatawabin : Je vous remercie. Oui, nous allons vous envoyer un document.
L’OCDE a récemment mené une étude internationale sur les 80 millions d’Autochtones dans le monde. L’OCDE a souligné que le réseau dont dispose le Canada pour offrir des prêts au développement directement aux peuples autochtones et ses retombées sociales devraient être reproduits dans le reste du monde et étendus à d’autres pays.
Tous les indicateurs sociaux que j’ai fournis, nous allons les étoffer dans un rapport sur les retombées sociales que nous allons réaliser avec le Conference Board du Canada. Il rendra compte d’une augmentation de 20 % des indicateurs de la santé, de 52 % de ceux de la santé mentale et de 72 % de ceux de la satisfaction personnelle. C’est la pointe de l’iceberg. Cela se répercute sur l’économie et les communautés autochtones. Nous n’avons jamais eu d’économie auparavant, et nous commençons à en voir les bénéfices pour nous et pour le Canada.
La sénatrice Galvez : Monsieur Kelly, vous avez dit que le gouvernement recueille des renseignements sur les nouvelles entreprises. Pourriez-vous nous décrire ces nouvelles entreprises et nous donner quelques statistiques à leur sujet : la taille, le secteur et le type de compétences dont elles ont besoin?
Le président : Puisque M. Kelly est absent, nous pourrons y revenir au deuxième tour.
La sénatrice M. Deacon : Je vous remercie de votre présence. Les discussions sur certaines des questions abordées aujourd’hui devraient certainement se poursuivre avec le temps.
J’ai quelques questions, et il se peut qu’elles ressemblent à certaines des questions que mes collègues ont posées. J’ose espérer qu’il n’y aura pas trop de chevauchements, mais j’aimerais approfondir un peu les choses au sujet de deux ou trois questions qui ont été soulevées.
Madame Bull, du Conseil canadien pour le commerce autochtone, je vous remercie beaucoup de votre présence. Il y a quelques semaines, vous avez comparu devant notre comité pour discuter du projet de loi C-14. Vous avez mentionné qu’un certain nombre d’entreprises appartenant à des Autochtones avaient du mal à demander la subvention pour le loyer en raison de la nécessité d’avoir un numéro de l’ARC.
J’ai interrogé la ministre Freeland à ce sujet il y a quelque temps et elle a dit que si l’on exigeait qu’une entreprise ait un numéro de l’ARC, c’était pour s’assurer que les ressources limitées du gouvernement allaient là où elles étaient le plus nécessaires. Elle a ajouté qu’elle comprenait qu’il s’agissait d’un obstacle pour certaines entreprises et que le budget du printemps contenait des mesures visant précisément à corriger les lacunes pour les entreprises qui ne sont pas admissibles à la subvention pour le loyer pour une raison ou une autre.
Le budget contient-il des mesures qui répondent à vos préoccupations au sujet de la subvention pour le loyer?
Mme Bull : Je vous remercie de la question. Non, et je crois que la ministre Freeland parlait du Fonds d’appui aux entreprises communautaires, un fonds de 117 millions de dollars destiné à soutenir les entreprises appartenant à la communauté et les microentreprises au sein d’une communauté. Or, le processus de demande pour ce fonds est bien différent de celui qui est suivi pour un programme de subvention salariale ou de subvention pour le loyer. Il s’agit d’un fonds distinct auquel on doit accéder directement par l’intermédiaire des communautés ou de Services aux Autochtones Canada.
Nous avons vu qu’en Ontario, on a pu modifier le processus de demande pour s’assurer que les entreprises autochtones qui n’ont pas de numéro de l’ARC peuvent avoir accès au Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes ici, dans la province. Je me pose alors une question. Si l’Ontario peut le faire, pourquoi le gouvernement fédéral ne peut-il pas le faire?
La sénatrice M. Deacon : Merci.
Ma prochaine question s’adresse aux représentants de la Chambre de commerce du Canada, et j’invite tout autre témoin à y répondre s’il le souhaite.
Dans le communiqué de presse que vous avez diffusé le lendemain de la présentation du budget, vous avez demandé au gouvernement de veiller à ce que le soutien aux entreprises ne soit pas retiré trop tôt et à ce qu’il ne diminue pas trop rapidement. Il en a été question ce matin.
J’espérais que vous puissiez dire au comité quels sont, selon vous, les indicateurs sur lesquels on devrait se baser pour réduire le soutien apporté aux entreprises durant la pandémie. S’agit-il d’un niveau de revenu au cas par cas, par exemple, ou serait-ce lié à des indicateurs de la santé publique, comme le nombre de personnes entièrement vaccinées ou le nombre total de cas? Je n’ai pas vu la lettre qui a été envoyée aux premiers ministres provinciaux et fédéral. Il y a peut-être des éléments communs concernant cette lettre, dans laquelle vous demandez qu’on fixe des balises, mais si vous pouvez ajouter quoi que ce soit ce matin, nous vous en serions très reconnaissants.
Mme Drigola : Je vous remercie de la question. La lettre a été envoyée il y a environ 10 minutes. Il est donc tout à fait justifié que vous ne l’ayez pas encore vue. Nous pourrons la fournir au comité après la réunion.
En ce qui concerne les indicateurs, il y a différentes manières de voir les choses. Ce sont les spécialistes de la santé publique qui peuvent répondre à bon nombre de ces questions, ce que je ne suis pas. Je ne suis pas en mesure de dire s’il est sécuritaire de commencer à lever des restrictions pour différents secteurs.
Ce que je dirai, c’est que ces programmes — la subvention salariale, la subvention pour le loyer, le Programme de crédit pour les secteurs durement touchés, le Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes, et cetera — sont en place pour aider les entreprises pendant que les restrictions sont en vigueur. Si la plupart des restrictions sont levées et que la plupart des entreprises peuvent reprendre leurs activités normales, il est sensé qu’on commence à les retirer de ces programmes et à leur permettre de croître, de se rétablir et de contribuer à répondre à la demande refoulée des consommateurs qui, nous le savons, existe aujourd’hui.
Dans le cas d’autres entreprises — celles des secteurs de l’événementiel, des voyages et du tourisme —, ce sont vraisemblablement des restrictions qui les touchent qui seront levées en dernier, avec l’ouverture des frontières, ce qui favorisera les voyages internationaux, et cetera. Nous savons que ce sont ces entreprises qui ont besoin que les mesures de soutien soient maintenues. Pour ce qui est de l’échéance, je ne suis pas une spécialiste. Cela dépend si l’on parle d’un restaurant, d’un hôtel ou d’un centre de congrès, par exemple. Il y a différents indicateurs.
Lorsque des restrictions sont en place, lorsqu’une entreprise n’est pas autorisée à fonctionner normalement, on devrait lui offrir du soutien gouvernemental pour l’aider à se rétablir. Il ne s’agit pas seulement de la Subvention salariale d’urgence du Canada et de la Subvention d’urgence du Canada pour le loyer. Nous avons parlé du Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes, et il a été proposé ici aujourd’hui de le bonifier.
Il y a une autre chose dont il n’a pas été question et il s’agit de reporter l’échéance de remboursement. À l’heure actuelle, le 31 décembre 2022 est la date à laquelle on doit rembourser le montant du prêt pour avoir droit à une radiation partielle. En avril et en mars 2020, cela semblait être suffisant lorsque nous pensions que la pandémie durerait peut-être quelques semaines ou quelques mois. Quatorze ou quinze mois plus tard, on voit qu’il s’agit d’un délai très court que beaucoup d’entreprises qui sont encore confinées aujourd’hui ne pourront peut-être pas respecter et, par conséquent, elles ne pourront pas bénéficier de la radiation partielle des prêts consentis.
Il y a une foule de choses que nous pouvons faire pour aider les entreprises, qu’elles appartiennent à un secteur en reprise ou à un secteur plus durement touché qui aura besoin d’une aide à plus long terme. Encore une fois, il faut que des spécialistes de la santé publique participent à cette conversation.
Le président : Sénatrice Deacon, M. Kelly voulait répondre à votre question.
M. Kelly : C’est une excellente question, madame la sénatrice. L’une des choses que l’on oublie, je pense, dans tout cela, c’est que les programmes — la subvention salariale et la subvention pour le loyer — comportent déjà un ajustement automatique. Ce n’était pas le cas au tout début du programme. Le taux de subvention salariale était de 75 % pour une perte de 30 % ou plus des revenus. Mais aujourd’hui, la subvention salariale correspond essentiellement à 80 % de la perte, quelle qu’elle soit. Donc, si l’on a une perte de 10 %, on reçoit une subvention salariale de 8 %. Les montants visent les secteurs les plus durement touchés. Si un restaurant a une perte de 75 %, il reçoit une subvention salariale assez importante, comme il se doit.
Nous conseillons au gouvernement d’intégrer un mécanisme de réglage automatique aux programmes pour en réduire les coûts. Espérons que toutes les entreprises réaliseront près de 100 % de leurs ventes habituelles à l’automne. Si c’est le cas, les subventions ne coûteront presque rien au contribuable, car elles sont déjà adaptées.
Le président : Merci. C’est ce qui met fin au premier tour, sénatrice Deacon. La sénatrice Moncion est la marraine du projet de loi C-30.
[Français]
La sénatrice Moncion : Un des plus gros problèmes liés à la gestion de la pandémie concerne les mesures de confinement, qui sont différentes d’une province à l’autre. Elles sont appliquées de façon sporadique, et elles sont également mal ciblées et très punitives pour plusieurs régions.
Le gouvernement fédéral a mis en place des mesures pour aider les petites et moyennes entreprises et a adopté des mesures plus ciblées pour aider les plus grandes entreprises. Les gouvernements provinciaux ont également mis des programmes en place pour aider certaines petites entreprises, entre autres, la Subvention ontarienne pour le soutien aux petites entreprises, qui apporte une aide de 10 000 $ à 20 000 $ aux petites entreprises.
J’aimerais vous entendre parler des différents éléments relatifs à l’équité associée aux mesures de confinement et de l’aide provinciale fournie à vos petites et moyennes entreprises. Cela a des impacts importants lorsqu’un gouvernement décide de fermer la province pendant six semaines, sans tenir compte des régions ou de quoi que ce soit. J’aimerais entendre vos commentaires au sujet de la survie de vos petites et moyennes entreprises.
[Traduction]
M. Kelly : Merci, madame la sénatrice. Les entreprises ont été très durement touchées par les mesures de confinement provinciales. Dans toute l’Amérique du Nord, c’est l’Ontario qui a été l’endroit le plus susceptible d’avoir recours à des mesures de confinement et elle a imposé l’une des plus longues périodes de confinement dans le monde. Croyez-le ou non, des tonnes de membres de mon organisme dans la région de Toronto ont été confinées pendant 350 jours depuis le début des mesures de confinement.
L’Ontario semble être la seule province qui se sert du confinement comme une politique semi-permanente. D’autres provinces ont eu recours à des mesures de confinement, mais elles les appliquent et les annulent en fonction du nombre de cas de COVID et elles y ont recours de manière beaucoup plus raisonnable dans le but d’essayer de maintenir un certain niveau d’activité économique.
L’Ontario a été la pire province de tout le pays sur le plan de l’application des mesures de confinement. L’Ontario s’est empressé d’appliquer des mesures de confinement et de les utiliser comme un unique tour dans son sac pour lutter contre la pandémie, sans recourir aux tests rapides ou à d’autres moyens jusqu’à tout récemment pour trouver des moyens de permettre aux entreprises d’avoir un certain revenu. Par conséquent, les mesures d’aide économique ont été absolument nécessaires.
Je félicite le gouvernement fédéral d’avoir fait plus pour aider les petites entreprises à traverser la pandémie que la plupart des gouvernements provinciaux. La majeure partie des fonds qui ont permis aux entreprises de traverser la pandémie proviennent du gouvernement fédéral. Les provinces en ont fourni beaucoup moins. Je comprends que leurs ressources financières sont plus limitées, mais ce sont les gouvernements provinciaux qui ont mis en place les mesures de confinement et non le gouvernement fédéral.
Encore une fois, l’Ontario a mis en place de très mauvais programmes tout au long de la pandémie, mais de nombreuses provinces doivent en faire davantage. Il y a, sur le site Web de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante ou FCEI, un sommaire de recherche qui montre quels sont les programmes qui fonctionnent le mieux ou le moins bien par province à travers le Canada.
La sénatrice Moncion : On parle de renseignements importants. Je vais le consulter. Merci.
Mme Drigola : La multitude de restrictions qui ont été imposées partout au Canada, qui varient d’une région à l’autre, avec différents paramètres utilisés pour les renforcer ou les assouplir, a posé de très grands défis pour les petites et, en particulier, les moyennes entreprises, celles qui mènent des activités dans plusieurs provinces. Il est très difficile de s’assurer que l’on respecte certaines règles à un endroit et d’autres règles ailleurs. Toute une partie du Canada a été essentiellement fermée. Je parle de la bulle atlantique. La Chambre de commerce du Canada et d’autres organisations préconisent qu’on essaie d’éviter une telle chose à l’avenir, en particulier lorsqu’on parle d’un plan de réouverture. Nous voulons éviter d’ajouter des obstacles et des difficultés avec lesquelles les petites et moyennes entreprises doivent essayer de jongler tout en maintenant leur entreprise à flot.
Les provinces ont mis en place différentes mesures pour les petites entreprises. La province de la Colombie-Britannique annonce une aide au tourisme. Je pense que c’est aujourd’hui, ou que c’était hier en fin de journée. Des mesures ont été prises. Mais pour faire écho à ce qu’a dit M. Kelly, le gouvernement fédéral a vraiment pris les devants à cet égard et a mis en place des programmes — la subvention salariale, la subvention pour le loyer, les programmes de liquidités — qui ont pu aider la grande majorité des entreprises.
Ces programmes sont-ils parfaits? Non. Les programmes présentent-ils toujours des lacunes et peut-on encore les améliorer? Certainement. En fin de compte, la meilleure chose que nous puissions faire, c’est d’avoir un plan de réouverture pour remettre ces entreprises sur la bonne voie, afin qu’elles puissent ouvrir et faire ce qu’elles font de mieux, tout en fournissant des emplois sécuritaires aux Canadiens. Encore une fois, dans ce cas-ci, il est essentiel d’avoir un plan cohérent pour l’ensemble du pays et non pas un ensemble de restrictions disparates où une personne peut faire quelque chose en Ontario, mais pas en Nouvelle-Écosse, ou elle peut le faire en Colombie-Britannique, mais lorsqu’elle arrive à Ottawa, les mêmes indicateurs de santé donnent lieu à des réalités d’exploitation différente. Nous suivons certainement ce dossier de près.
La sénatrice Moncion : Je vous remercie. Les représentants des groupes autochtones pourraient-ils formuler des commentaires à ce sujet, s’il vous plaît?
Mme Bull : Je vous remercie de votre question. Oui, je suis d’accord avec Mme Drigola et M. Kelly. Nous observons une incidence réelle sur le tourisme, ici en Ontario, dans les régions du Nord où un certain nombre d’entreprises autochtones étaient en train de développer des occasions touristiques. Nous observons que les cas sont beaucoup moins nombreux dans le Nord de l’Ontario, mais ces entreprises sont tout de même fermées. Cela a un impact à l’échelle du pays qui ne semble pas correspondre aux différents indicateurs de santé, comme l’a dit Mme Drigola.
Certaines provinces ont offert des soutiens spéciaux supplémentaires en plus de ceux du gouvernement fédéral, ce qui montre que ces entreprises sont fermées depuis beaucoup plus longtemps, surtout ici, en Ontario. Ces provinces ont veillé à ce que les différents programmes répondent aux besoins des entreprises autochtones.
Au début des programmes mis en place très rapidement par le gouvernement fédéral — et c’est louable —, on a réellement tenté de combler ces lacunes, et le gouvernement a été très réceptif aux demandes en ce sens. Cependant, dernièrement, il reste encore des lacunes qui, selon nous, doivent être comblées.
M. Metatawabin : Tout d’abord, je tiens à féliciter les provinces de l’Atlantique pour la bulle qu’elles ont créée dès le début. Je pense que cela a eu un impact énorme dans les provinces de l’Atlantique, où les entreprises ont l’impression qu’il est possible de se déplacer. Il serait donc souhaitable d’avoir une certaine uniformité à l’échelle du pays en matière de pratiques exemplaires.
Je tiens aussi à souligner que l’Association touristique autochtone du Canada a indiqué que son industrie touristique est sur le point de s’effondrer. L’an dernier, l’industrie avait reçu 16 millions de dollars pour lui permettre de survivre. Toutefois, cette année, elle n’a reçu aucune aide et l’Association nationale des sociétés autochtones de financement n’a reçu aucune aide directe pour les entreprises touristiques autochtones dans le cadre de la reprise, mais ce sont ces entreprises qui mettront le plus de temps à se rétablir. En effet, il faudra attendre de six mois à un an avant que les gens se sentent libres de voyager et de profiter des services de ces entreprises.
Je pense que tout le monde a soulevé ce problème. Il faut prévoir un soutien ciblé pour certaines industries, et je répète que c’est ce qui doit se produire à l’avenir, c’est-à-dire que certaines industries doivent être ciblées dans le cadre de la reprise.
La sénatrice Duncan : Bonjour. Je vous remercie. Tout d’abord, j’aimerais respectueusement reconnaître que je suis reconnaissante de vivre et de travailler sur le territoire traditionnel de la Première Nation des Kwanlin Dün et du Conseil des Ta’an Kwäch’än. J’aimerais également remercier nos témoins qui comparaissent aujourd’hui de leurs déclarations préliminaires et de la discussion très intéressante qui est en cours.
J’aimerais poursuivre la discussion au sujet du plan détaillé et des questions frontalières. Comme l’a mentionné Mme Drigola, nous n’avons pas encore vu le plan détaillé. Je crois savoir qu’il invite les premiers ministres provinciaux et le gouvernement fédéral à régler la question des restrictions frontalières et des déplacements interprovinciaux. Non seulement les voyages interprovinciaux, mais aussi les voyages aux États-Unis sont essentiels à la reprise du secteur touristique et à la reprise économique en général.
Vous avez mentionné que vous n’appuyez pas l’approche fragmentée. Mais je répondrais qu’une approche fragmentée est peut-être nécessaire, car nous avons des situations uniques partout au pays. Par exemple, les sénateurs de l’Alaska ont exercé des pressions pour le redémarrage de l’industrie des navires de croisière. La Colombie-Britannique a annoncé que les navires ne peuvent pas s’arrêter sur ses côtes cette année, mais on parle de navires de croisière en Alaska. Cela a une incidence énorme sur l’industrie touristique du Yukon. De plus, le Nouveau-Brunswick est très proche de l’État du Maine, et certains voyages transfrontaliers sont essentiels pour l’industrie du tourisme. Il y a aussi le Nord de l’Ontario et l’expérience de la nature sauvage.
Les organisations commerciales appuieront-elles une approche unique en matière de restrictions frontalières lorsqu’il s’agit de lever les restrictions frontalières visant les États-Unis?
Le président : Votre question s’adresse-t-elle aux représentants de la Chambre de commerce et de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante?
La sénatrice Duncan : Oui, ainsi qu’aux représentants des associations d’entreprises autochtones, car l’industrie touristique est essentielle pour de nombreuses entreprises autochtones.
Le président : Nous entendrons d’abord M. Kelly, qui sera suivi de Mme Drigola et de Mme Bull.
M. Kelly : Oui, je pense effectivement que nous devons adapter les approches selon la situation. Je crois que la différence, dans ce cas-ci, c’est que nous devons établir un cadre pour y parvenir. C’est ce qu’on demande sans cesse. Ce cadre ne signifie pas que l’ensemble du pays ouvre le même jour ou que seuls certains aspects sont ouverts, mais il établit la marche à suivre. L’Ontario a adopté une approche par code de couleurs. D’autres provinces ont ouvert certaines régions et pas d’autres par l’entremise de certains pouvoirs. Certaines entreprises ont été autorisées à ouvrir.
En ce qui concerne les mesures liées aux frontières, il y a évidemment le grand débat sur la question de savoir si le Canada autorisera l’entrée de personnes entièrement vaccinées ou partiellement vaccinées ou refusera l’entrée à toute personne en provenance des États-Unis ou de l’étranger. Une foule de questions se posent à cet égard. La communauté des entreprises souhaite donc participer à certaines de ces discussions — nous exerçons certainement des pressions en ce sens —, mais elle souhaite aussi que le gouvernement expose son plan, afin que les entreprises sachent à quoi s’attendre.
Le premier ministre a parlé à quelques reprises des travaux qui sont menés de façon bilatérale avec l’administration du président Biden sur ce front. C’est une bonne nouvelle, mais nous aimerions savoir ce que le gouvernement fédéral pense du calendrier. Les entreprises touristiques du Canada doivent-elles présumer qu’aucun touriste étranger ne sera autorisé à entrer au Canada pour le reste de l’année? Ou est-ce que cela pourrait se produire, du moins dans certaines régions, par exemple avec l’industrie des croisières dans le Nord, comme vous l’avez mentionné à juste titre?
M. Metatawabin : Je pense qu’il est très difficile d’offrir des certitudes en période d’incertitude, mais nous pouvons tirer de nombreuses leçons des réussites de certaines régions d’un bout à l’autre du Canada.
L’industrie du tourisme sera celle qui se remettra sur pied le plus lentement après la reprise de l’économie, mais nous devrions avoir un plan en œuvre, et je suis heureux qu’une lettre soit envoyée pour demander une feuille de route à cet égard. Cette feuille de route pourrait être élaborée dès qu’une certitude se pointera à l’horizon. Elle pourrait alors être mise en œuvre et tout le monde saurait comment planifier en conséquence. J’appuie donc certainement cette idée. Je vous remercie.
Mme Drigola : Oui, et je pense que vous soulevez un élément très important de la discussion. En effet, je ne connais aucun pays qui permet aujourd’hui l’utilisation d’une approche « tout ou rien ». Ce ne sera pas soit nous ouvrons la frontière et tout le monde est autorisé à entrer, soit elle reste complètement fermée et personne ne peut entrer. Par définition, il faut adopter une approche graduelle.
Nous souhaitons donc connaître les paramètres qui doivent être atteints, que ce soit en matière de santé publique, de taux de vaccination ou de nombre de cas, et les paramètres et les indicateurs semblables que nous devons vérifier chez les voyageurs étrangers qui entrent dans notre pays. Il faut préciser ces choses pour que les entreprises puissent commencer à se faire un portrait de la situation au Canada à cet égard. Par exemple, si les analystes prévoient où en sera le pays dans deux ou trois semaines, les entreprises peuvent commencer à se préparer aujourd’hui, afin d’être prêtes le moment venu.
Lorsque nous disons que nous souhaitons éviter une série de restrictions fragmentées, nous pensons à des choses comme les attestations de vaccination. Si une personne se fait vacciner en Colombie-Britannique, par exemple, sa preuve de vaccination ne sera pas la même qu’une personne qui se fait vacciner en Ontario.
Comment pouvons-nous veiller à ce que les Canadiens puissent obtenir des attestations numériques uniformes en matière de santé et les télécharger ensuite dans d’autres passeports de vaccination étrangers s’ils souhaitent voyager à l’étranger? Si nous exigeons un passeport de vaccination pour entrer au Canada et que les personnes venant d’autres pays possèdent leurs propres attestations en matière de santé, comment pouvons-nous veiller à ce qu’elles puissent les télécharger dans notre système?
C’est ce dont nous parlons lorsque nous disons que nous avons besoin d’un cadre cohérent à l’échelle du pays. Toutefois, en ce qui concerne la réouverture de la frontière, il faut absolument adopter une approche graduelle et progressive. Nous demandons simplement des échéanciers et des paramètres pour pouvoir planifier en conséquence.
La sénatrice Duncan : Madame Drigola, si vous me le permettez, j’aimerais savoir si le groupe d’affaires soutiendrait les cadres en place. Par exemple, si une province et l’État voisin atteignaient les paramètres requis, pourrait-il y avoir une réouverture limitée de la frontière à cet endroit? Je ne parle pas vraiment de l’ensemble des frontières nationales et internationales. Je vous suis reconnaissante de cette discussion, mais pourrions-nous assister à un assouplissement progressif, province par territoire, des restrictions frontalières si les paramètres nécessaires étaient en place?
Mme Drigola : Certainement, et je pense que c’est un élément important de la conversation. Je ne pense pas que nous soyons en mesure aujourd’hui de répondre avec certitude par oui ou par non. Je pense que nous devons d’abord évaluer la situation dans chaque région, ainsi qu’à l’échelle internationale.
Toutefois, je dirais que nous devons d’abord nous assurer que les Canadiens puissent voyager à l’intérieur du pays avant d’envisager des déplacements internationaux et des allers-retours entre différents pays. Je tiens à le préciser.
Le sénateur Loffreda : Je remercie tous les témoins d’être ici aujourd’hui. Ma question s’adresse à tous les témoins, mais M. Kelly pourrait répondre en premier. Je pose cette question parce que vous avez tous soulevé des préoccupations majeures au sujet des lacunes et vous avez parlé des mesures qui pourraient être prises pour corriger la situation.
Certains centres d’influence ont communiqué avec nous et il y a de nombreuses discussions au sujet des liquidités excédentaires qui se trouvent dans de nombreux comptes bancaires d’entreprises. Voyez-vous cela dans le secteur des petites et moyennes entreprises ou ce phénomène touche-t-il uniquement les grandes entreprises?
Certaines communautés d’intérêts ont formulé des commentaires sur cette situation. Nous avons également vu de nombreux reportages dans les médias. Certains estiment que 85 % de nos entreprises se portent bien. Un grand nombre d’entre elles seraient même florissantes. Nous sommes préoccupés par les 15 % qui ne vont pas bien, mais vous pouvez peut-être formuler des commentaires et approfondir la question pour vos secteurs.
M. Kelly : Permettez-moi d’intervenir. Je pense qu’il y a des critiques légitimes à l’égard de certains programmes de soutien du gouvernement tels qu’ils ont été conçus au tout début de la pandémie.
En effet, le gouvernement a mis du temps à annoncer une subvention salariale substantielle. Il subissait d’intenses pressions pour offrir quelque chose de plus substantiel que la première subvention minuscule dont le plafond était de 25 000 $. Mon groupe et de nombreux autres groupes et médias l’ont poussé à offrir quelque chose de plus substantiel, comme cela se faisait en Europe.
Le gouvernement a répondu à la demande et a créé une subvention salariale de 75 % dans le cas d’une baisse de revenus de 30 % ou plus. Cette formule est en grande partie restée en vigueur jusqu’à l’été. Elle ne correspondait toutefois pas à notre recommandation. Le maximum de 75 % correspondait à notre recommandation, mais la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante a toujours suggéré d’utiliser une échelle mobile.
Mais le gouvernement a offert cette subvention aux entreprises de toutes tailles. Ainsi, si une entreprise subissait une perte de 30 %, elle obtenait une subvention de 75 %. Si elle subissait une perte de 75 %, elle recevait une subvention salariale de 75 % et si elle subissait une perte de 25 %, elle ne recevait rien.
Le fonctionnement de ce programme n’était pas très logique. Par conséquent, au cours des premiers mois, un grand nombre d’entreprises ont vu leurs revenus diminuer rapidement et ont reçu ces subventions si leurs pertes étaient d’environ 30 % et dans certains cas, ces subventions étaient supérieures au montant des pertes que l’entreprise avait subies.
Cette situation a été corrigée au cours de l’été 2020, lorsque le gouvernement a mis en œuvre des programmes à échelle mobile, ce qui signifiait que lorsque les pertes étaient importantes, les subventions étaient élevées, mais lorsque les pertes étaient faibles, les subventions étaient moins élevées.
Je pense que dans la plupart des cas, les lacunes et les problèmes ont été résolus à l’été 2020, et l’argent dépensé depuis ce temps a mieux ciblé les entreprises. Je pourrais reprocher au gouvernement d’avoir créé cette lacune qui a permis à des entreprises de gagner beaucoup plus. En même temps, il a élaboré ces programmes rapidement, et je suis certain que nous nous rendrons compte, à la fin de ce processus, que certains fonds ont effectivement été utilisés d’une manière qui n’avait probablement pas de sens. Je peux vous dire avec certitude que si le gouvernement n’avait pas agi... Il n’a pas agi rapidement, mais s’il n’avait pas agi de façon raisonnablement rapide, un nombre d’entreprises beaucoup plus élevé aurait fait faillite.
M. Metatawabin : Pendant la pandémie, nous avons mené une enquête ayant révélé que 57 % des établissements sont demeurés ouverts, à essayer de faire ce qu’ils pouvaient pour survivre. Il y a 37 % des entreprises qui ont fermé temporairement, tandis que 2 % ont cessé leurs activités définitivement. Quelque 44 % des répondants disent ne pas pouvoir tenir six mois de plus, alors que près de 50 % d’entre eux affirment ne pas être en mesure de contracter d’autres prêts. Les entreprises sont donc dans une position difficile. Vous avez peut-être dit que 85 % des répondants affirment que certaines entreprises se portent bien, mais ce sont probablement les grandes sociétés. De leur côté, les PME sont en difficulté; elles ont besoin d’un appui indéfectible et de certitude.
Mme Drigola : Je vais en parler très brièvement avant de céder la parole à M. Gill. Dans le cas de la Subvention salariale, les responsables ont dû construire l’avion pendant qu’ils le pilotaient. Ils ont déployé ces programmes de façon à aider le plus grand nombre d’entreprises possible.
Au début de la pandémie, les revenus étaient en chute libre, et les entreprises devaient chaque mois présenter une demande et établir à nouveau leur admissibilité à ces programmes, avant de trouver une façon de se réorienter et de poursuivre leurs activités malgré le contexte.
La Subvention salariale d’urgence du Canada a atteint son objectif. Elle a aidé les entreprises à garder leurs employés, à conserver leurs avantages sociaux et à maintenir la relation avec leurs employés pendant qu’elles cherchaient à se réorienter. Je peux laisser M. Gill parler de la situation actuelle et des liquidités.
M. Gill : Je vous remercie de votre question, sénateur.
Il y a deux sources de capitaux privés qui pourraient être débloquées. Ainsi, l’investissement intérieur privé et les dépenses de consommation sont des enjeux en veilleuse qui pourraient déterminer si nous sortons de la pandémie avec un but précis ou si nous nous débrouillons tant bien que mal, comme nous l’avons fait après la grande récession.
Pour diverses raisons, le taux d’investissement intérieur privé du Canada a toujours été parmi les plus faibles des pays de l’OCDE. La faiblesse persistante de l’investissement au Canada est exacerbée par des taux d’imposition du capital non concurrentiels et par d’autres facteurs réglementaires. Voici les trois volets de l’investissement intérieur privé : les structures non résidentielles, la machinerie et l’équipement, de même que la propriété intellectuelle.
Le capital dont disposent aujourd’hui les entreprises est presque équivalent aux fonds qui étaient disponibles au début de la grande récession. Nous n’avons pas nécessairement mis en place les mesures incitatives adéquates pour encourager l’investissement privé après la grande récession, mais nous pouvons trouver d’autres façons de les inciter à passer à l’action cette fois-ci.
En plus de l’investissement des entreprises, vous avez probablement entendu dire que les Canadiens ont économisé près de 200 milliards de dollars pendant la pandémie. Il faut trouver des moyens d’encourager les Canadiens à dépenser ces économies de manière ciblée, par exemple dans des activités liées au tourisme ou dans le tourisme, et dans d’autres activités de consommation. Voilà qui aiderait assurément les industries canadiennes en difficulté.
Nous espérons tous que les gens commenceront à dépenser à la réouverture de l’économie, comme nous l’avons constaté dans quelques pays comme l’Australie. Nous devons cependant être prêts si les Canadiens hésitent à ouvrir leur portefeuille. C’est pourquoi la Chambre de commerce du Canada et d’autres organisations ont lancé l’idée d’un congé fiscal temporaire et ciblé de la taxe à la consommation, dans le but d’inciter les gens à dépenser au moment opportun, quand ils le pourront.
Mme Bull : Les entreprises autochtones, dont 99,8 % sont des PME, ont certainement été touchées. Bien que nous ayons vu certaines petites entreprises s’en sortir, il s’agit d’un très faible pourcentage d’entre elles. Plus précisément, les secteurs de la construction et des industries secondaires disent avoir besoin d’un soutien financier supérieur aux autres. Je pense que la situation est propre à certains secteurs, comme nous l’avons dit.
Le sénateur Loffreda : J’essaie d’être optimiste ce matin, car cette attitude serait un gage de longévité, de bonheur et de santé. J’appuie les mesures, et je vous remercie de vos réponses.
Le sénateur Smith : Je remercie nos témoins. J’ai une question à l’intention de M. Metatawabin et de Mme Bull : la communauté autochtone a-t-elle été consultée comme il se doit pendant la pandémie quant aux mesures gouvernementales et à la mise en œuvre des divers programmes salariaux pour la relance, entre autres? Avez-vous l’impression d’avoir eu des échanges suffisants avec le gouvernement au sujet du plan du soutien?
M. Metatawabin : Eh bien, au début de la pandémie, je pense qu’il y a eu un retard d’environ trois mois dans l’introduction de notre mesure d’urgence, après que le Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes ait été lancé pour la population générale. Il a fallu trois mois avant qu’une mesure destinée expressément aux Autochtones ne soit mise en place. Nous pouvons le comprendre, puisque la pandémie était du jamais vu. Nous devons toutefois admettre que les Autochtones sont toujours envisagés après coup. Au contraire, les peuples autochtones doivent contribuer à la prospérité du Canada, alors ils doivent être consultés souvent et sans tarder.
Je félicite le gouvernement de nous avoir fait participer au processus budgétaire. Bon nombre des mesures indispensables que nous avions mises en lumière ont été adoptées. Il ne manque qu’un plan de relance pour les entreprises autochtones qui ont bénéficié d’une aide l’année dernière, mais pas cette année. La mesure a été prolongée jusqu’au 30 juin, mais je pense qu’une véritable stratégie de relance doit comprendre un peu moins de sommes remboursables puisque les entreprises sont surendettées en ce moment. Ces petites entreprises ne verront pas la lumière au bout du tunnel à la réouverture de l’économie. Elles croulent sous les dettes, et nous devons les aider.
Le sénateur Smith : Avez-vous des commentaires, madame Bull?
Mme Bull : Oui. Je conviens que lorsque les programmes ont été déployés, il y avait un intérêt à combler les écarts, comme je l’ai dit plus tôt. Ce qui est décevant, c’est que les programmes sont lancés sans que les responsables se demandent s’ils s’appliqueront aux entreprises autochtones, ou s’il y a une raison pour laquelle elles n’y seraient pas admissibles. C’est ce qui entraîne un retard.
Lors de l’élaboration d’un programme, il faut s’assurer que les entreprises autochtones, dont les circonstances sont uniques, seront incluses, plutôt que de créer des programmes de fortune qui causent des obstacles supplémentaires.
Prenons l’exemple du Fonds d’appui aux entreprises communautaires autochtones, qui exige de ces entreprises qu’elles élaborent un plan de relance, puis en démontrent l’efficacité. Il s’agit d’un obstacle supplémentaire que les entreprises autochtones doivent surmonter pour obtenir des fonds, à la différence des autres entreprises au Canada. Nous devons nous assurer que tous les programmes sont inclusifs.
Le sénateur Smith : Monsieur Metatawabin, vous avez parlé du fonds d’infrastructure de 6 milliards de dollars, dont la population d’entreprises autochtones devrait selon vous s’occuper.
Quelle a été la nature de vos échanges avec le gouvernement fédéral au sujet du fonds d’infrastructure? De quel genre de suivi avez-vous bénéficié? Le gouvernement a-t-il fait son travail de mise en œuvre des infrastructures? Nous convenons qu’il y a encore un problème majeur d’eau potable dans les collectivités au pays. Vous avez insisté sur le programme d’infrastructure et sur les possibilités qu’il offre.
Vous avez également dit que les Premières Nations devaient s’approprier les programmes d’infrastructure. Pourriez-vous nous en dire plus là-dessus?
M. Metatawabin : De manière générale, les programmes et les services destinés aux Autochtones devraient être administrés par des institutions autochtones au pays. L’infrastructure fait partie des programmes de soutien qui sont offerts par l’Autorité financière des Premières Nations, ou l'AFPN. L’objectif, c’est que les infrastructures commencent à être déployées dans les collectivités. L'AFPN mobilise des capitaux du secteur privé grâce à l’émission d’obligations, puis les verse aux collectivités sous la forme de prêts afin qu’elles puissent commencer à combler les lacunes dans leurs régions. Il en découle un développement économique et de meilleurs indicateurs de santé.
La Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones indique que les Autochtones doivent être autonomes et pouvoir gérer leurs propres programmes. Cette initiative va dans ce sens. Je vous remercie.
Le sénateur Smith : Je m’adresse peut-être à tous les témoins. J’essaie de comprendre le programme de relance dans toute sa complexité. En ce qui concerne l’embauche, pensez-vous qu’il peut porter ses fruits au fil du temps? Les entreprises familiales et les petites entreprises y auront-elles accès? Peut-être que M. Kelly ou les autres témoins pourraient essayer de répondre en abordant la complexité de ce programme de réembauche.
M. Kelly : Je vous remercie de la question, sénateur. Nous voyons d’un bon œil les grandes lignes du programme qui se trouvent dans le budget, mais nous avons malheureusement très peu de détails pour le moment sur la façon dont il sera mis en œuvre. C’est flou. Le milieu des affaires et vous ne serez pas surpris d’apprendre que les gouvernements peuvent faire un véritable gâchis d’une idée et d’un concept formidables.
C’est malheureusement ce qui s’est produit dans plusieurs programmes. Ceux qui ont été administrés par l’Agence du revenu du Canada, que je complimente rarement, ont été très bien gérés. En revanche, ceux qui ont été administrés par d’autres organismes gouvernementaux ont en fait donné de piètres résultats. Tous les programmes de la Banque de développement du Canada n’ont été qu’une perte de temps. Ils n’ont vraiment rien donné.
J’ai bon espoir que le gouvernement mettra en place un programme de qualité et rigoureux. Les décideurs semblent reprendre en partie l’infrastructure de la Subvention salariale, qui a raisonnablement bien fonctionné. Je crois avec optimisme que le programme sera utile, mais il est trop tôt pour le dire et pour répondre pleinement à votre question, je le crains.
Le sénateur Smith : Est-ce que d’autres intervenants ont des commentaires avant de clore la séance?
Mme Drigola : Je pense que ce sont toujours les détails qui posent problème. L’intention du programme est évidemment louable. Elle est conforme à ce que nous et d’autres organisations d’entreprises avons demandé. Le programme encouragera les entreprises à embaucher de nouveaux employés et à augmenter les heures de travail ou les salaires.
La seule chose que nous voulons éviter, c’est de compliquer la tâche des petites entreprises qui veulent soumettre une demande. Souvent, les propriétaires de petites entreprises ont des ressources très limitées; ils portent plusieurs chapeaux. Nous avons constaté très tôt la complexité de certains programmes de Subvention salariale et de Subvention pour le loyer. Le système de demande de Subvention pour le loyer a ensuite été relié à celui de la Subvention salariale, ce qui a très bien fonctionné. C’est convivial. Il y a une calculatrice qui permet à l’utilisateur de voir le montant exact auquel il a droit et qu’il recevra chaque mois. Les entreprises seraient ravies que ce programme fonctionne de manière semblable.
Le sénateur Smith : Je tiens à vous remercier. Monsieur le président, je vous remercie de cette belle amorce.
Le président : Je vous remercie, honorables sénateurs. Comme vous le savez, le projet de loi C-30 et la Loi d’exécution du budget sont très importants pour tous les Canadiens et les parlementaires. Nous avons un dénominateur commun avec les témoins. Il s’agit d’un désir de transparence, de responsabilité, de prévisibilité et de fiabilité. Cependant, je vois que le temps file et qu’il reste huit minutes. Au deuxième tour, une seule question sera autorisée. Sénateurs, vous pourrez poser une question directe, puis recevoir une brève réponse des témoins, je vous prie.
Le sénateur Klyne : J’aurais aimé avoir du temps pour m’adresser aux représentants de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante et de la Chambre de commerce du Canada. J’ai cependant une question à poser à Mme Bull et à M. Metatawabin. Vous pourrez envoyer vos réponses par écrit. En ce qui concerne l’approvisionnement, il semble être difficile d’atteindre l’objectif de 5 %, et j’ai cru comprendre que ce n’est pas par manque de capacité. Nous pourrions probablement obtenir un approvisionnement supérieur à cet objectif. Les fournisseurs sont prêts à le faire.
Pourriez-vous évaluer l’ensemble du processus d’approvisionnement et nous expliquer pourquoi nous avons du mal à atteindre 5 %? De même, pouvez-vous confirmer que nous pourrions même atteindre 20 ou 30 %, si nous en avions l’occasion?
Le président : À qui s’adresse la question?
Le sénateur Klyne : À Mme Bull et à M. Metatawabin.
Le président : Vous avez 30 secondes, madame Bull.
Mme Bull : D’accord, je vous remercie. Avec l’appui de Services aux Autochtones Canada, nous avons réalisé une étude des dépenses fédérales sur une année, ainsi que des entreprises autochtones dans chaque secteur correspondant aux codes du Système de classification des industries de l’Amérique du Nord. Nous avons constaté que les entreprises autochtones pourraient fournir un approvisionnement correspondant à 24 % des dépenses fédérales sur une année. Il est évident que les 5 % constituent un plancher. Je pourrai vous faire parvenir l’information.
M. Metatawabin : Au cours des 30 dernières années, l’approvisionnement auprès d’entreprises autochtones a été inférieur à 1 %. Le dicton « quand on veut, on peut » est certainement valable dans ce cas-ci. Il y a une véritable culture d’obstacles systémiques. Si nous parvenons à changer le système et à permettre aux responsables de première ligne de sélectionner une entreprise autochtone en fonction d’arguments, d’objectifs et de besoins — et à prévoir des conséquences —, nous parviendrons à atteindre la cible.
[Français]
Le sénateur Dagenais : J’ai une très courte question pour M. Kelly et Mme Drigola.
Trouvez-vous que le présent budget met de l’avant des mesures qui permettront de régler le manque de main-d’œuvre, ce qui me semble crucial, ou est-ce que certaines personnes pourraient choisir de prolonger leur absence du marché du travail en continuant de profiter des programmes d’aide?
[Traduction]
M. Kelly : Il y a un volet qui, à mon avis, n’a pas reçu beaucoup d’attention. Bien sûr, le programme de la Prestation canadienne d’urgence a ensuite été intégré au système d’assurance-emploi au moyen de la Prestation canadienne de la relance économique. Les prestations se chiffrent à 500 $ par semaine. Lorsque l’économie a repris un peu au cours de l’été dernier, la PCU et la PCRE ont nui en quelque sorte au retour des gens sur le marché du travail. Les travailleurs à temps partiel qui gagnaient peut-être 100 ou 200 $ par semaine pouvaient ainsi recevoir 500 $ en prestations gouvernementales. Si j’ai bien compris, le gouvernement s’est engagé dans le budget à réduire ce montant de 500 à 300 $ lorsque l’économie commencera à redémarrer. Je crois qu’il s’agit d’une mesure positive qui incitera certains Canadiens à retourner sur le marché du travail.
Je conviens qu’il faut verser un soutien généreux aux Canadiens et aux entreprises canadiennes jusqu’à la fin de la pandémie, mais le montant ne devrait pas être supérieur au revenu précédant la pandémie.
Le président : Je vous remercie.
La sénatrice Galvez : Monsieur Kelly, vous avez dit que les nouvelles entreprises n’ont pas été prises en compte par le gouvernement. Pouvez-vous s’il vous plaît soumettre au comité le nom de ces entreprises, leur nombre, leurs secteurs d’activité et les compétences qu’elles recherchent?
M. Kelly : Je vous remercie.
Le président : Si vous le pouvez, monsieur Kelly, je vous prie d’envoyer l’information dans les deux langues officielles.
M. Kelly : À vrai dire, sénatrice, je pense que nous avons envoyé cette lettre la dernière fois. Je crois que le comité a déjà l’information, mais je la renverrai avec plaisir.
La sénatrice Moncion : Ma question s’adresse à Mme Drigola. Depuis 13 mois, le gouvernement suit la situation de la COVID et ajuste son programme dans la mesure du possible. Au début de votre exposé, vous avez dit qu’en raison des dates de fin des programmes qui se trouvent dans le budget actuel, vous n’êtes pas très optimiste quant à leur mise en exécution. Ma question est la suivante : qu’est-ce qui vous fait douter que d’autres mesures soient mises en place au besoin, puisque le gouvernement l’a déjà fait? J’aimerais connaître votre réponse à cette question.
Mme Drigola : Bien sûr. Nous ne doutons pas que d’autres mesures soient mises en place. Je pense plutôt que nous n’avons pas besoin de réinventer la roue. Les programmes déjà en place fonctionnent très bien et soutiennent les entreprises. Ce que nous voulons éviter, c’est qu’ils soient supprimés trop rapidement et que les entreprises ne soient pas en mesure de se rétablir d’ici l’automne. À nos yeux, il est essentiel de les maintenir.
La vice-première ministre a indiqué à la Chambre de commerce du Canada que le gouvernement est prêt à faire preuve de souplesse et à adapter ces programmes, et nous lui en sommes reconnaissants. Il faut simplement s’assurer que le maintien du taux fait partie de la solution.
La sénatrice Moncion : Je vous remercie.
La sénatrice Duncan : En réponse à ma dernière question, j’ai appris que la Chambre de commerce du Canada et cette feuille de route sont davantage axées sur les déplacements interprovinciaux. Je veux simplement rappeler aux témoins que les petites collectivités frontalières sont incroyablement importantes pour l’économie du Canada.
Ma question est la suivante — et j’aimerais obtenir une réponse écrite. Le budget de 2021 propose d’allouer 21 millions de dollars à compter de 2021-2022 pour s’attaquer au problème et accélérer la réduction des barrières commerciales interprovinciales au Canada. La mesure budgétaire parle de « partenaires intéressés ». Les témoins présents sont-ils des partenaires intéressés? Quel travail avez-vous réalisé? J’aimerais que vous nous présentiez par écrit les efforts que vous déployez pour réduire les obstacles au commerce interprovincial au Canada. Je vous remercie.
Le président : Honorables sénateurs, mesdames et messieurs les témoins, c’est la fin de notre réunion. Je vous remercie infiniment de votre participation. Je souhaite dire aux témoins qu’ils ont donné des réponses fort instructives et directes.
Quant aux sénateurs, je les remercie de leurs questions. Il ne fait aucun doute que la discussion met en perspective notre devise sur la transparence, la responsabilité, la fiabilité et la prévisibilité.
Honorables sénateurs, notre prochaine réunion aura lieu le jeudi 20 mai, à 13 heures, HNE.
(La séance est levée.)