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AGFO - Comité permanent

Agriculture et forêts


LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DE L’AGRICULTURE ET DES FORÊTS

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le jeudi 28 septembre 2023

Le Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts se réunit aujourd’hui, à 9 heures (HE), par vidéoconférence, pour examiner le projet de loi C-234, Loi modifiant la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre.

Le sénateur Robert Black (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Bonjour à tous. Je tiens d’abord à souhaiter la bienvenue à nos témoins qui comparaissent en personne et en ligne ainsi qu’aux membres du Comité et aux personnes qui nous regardent sur le Web. Merci d’être ici ce matin. Je m’appelle Robert Black, je suis sénateur de l’Ontario et président du Comité de l’agriculture et des forêts.

Je vais demander aux sénateurs de se présenter, en commençant par la vice-présidente.

La sénatrice Simons : Bonjour. Je suis la sénatrice Paula Simons, de l’Alberta, territoire du Traité no 6.

Le sénateur Cotter : Bonjour. Je m’appelle Brent Cotter, sénateur de la Saskatchewan.

[Français]

La sénatrice Petitclerc : Bonjour. Sénatrice Chantal Petitclerc, du Québec.

[Traduction]

La sénatrice Osler : Gigi Osler, sénatrice du Manitoba.

Le sénateur Woo : Bonjour. Je m’appelle Yuen Pau Woo, de la Colombie-Britannique.

Le sénateur Oh : Bonjour. Je suis le sénateur Victor Oh, de l’Ontario.

Le président : Aujourd’hui, le Comité se réunit pour étudier le projet de loi C-234, Loi modifiant la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre. Nos témoins du premier panel sont M. Yves Giroux, directeur parlementaire du budget, accompagné de M. Nasreddine Ammar, conseiller-analyste. Nous sommes heureux de vous accueillir tous deux en présentiel aujourd’hui. Monsieur Giroux, vous avez cinq minutes pour nous présenter votre déclaration préliminaire. À vous la parole.

Yves Giroux, directeur parlementaire du budget, Bureau du directeur parlementaire du budget : Bonjour, monsieur le président et membres du comité. Je vous remercie de m’avoir invité à comparaître devant vous aujourd’hui pour discuter de notre plus récent rapport sur l’estimation des coûts du projet de loi C-234. Je suis accompagné de M. Ammar, analyste principal de l’estimation des coûts.

Le 23 juin 2021, nous avons publié une note législative évaluant ce que coûterait l’exemption de la taxe fédérale sur le carbone pour le gaz naturel commercialisable et pour le propane utilisés par les machines agricoles admissibles, comme le prévoyait le projet de loi C-206 présenté au cours de la 43e législature. Un projet de loi connexe, le C-234, Loi modifiant la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre, a été déposé au Parlement le 7 février 2022. Il propose d’allonger la liste des machines agricoles admissibles à l’exemption de la taxe fédérale sur le carbone afin d’inclure les biens servant à fournir du chauffage ou de la climatisation à un immeuble, ou à une structure semblable, particulièrement s’il sert à élever ou à loger du bétail ou s’il contient des séchoirs à grain.

[Français]

En avril 2022, nous avons publié une estimation du coût du projet de loi C-234 pour l’Alberta, la Saskatchewan, le Manitoba et l’Ontario.

Plus récemment, le 15 septembre 2023, nous avons affiné notre estimation des coûts du projet de loi C-234 en élargissant l’estimation pour inclure les provinces de l’Atlantique, et en y intégrant de nouvelles projections de la consommation de gaz naturel et de propane dans l’agriculture, par province, fournies par Environnement et Changement climatique Canada.

Nous estimons que le projet de loi C-234, s’il est adopté, se traduirait par des exemptions de la taxe sur le carbone pour les agriculteurs d’une valeur de 76 millions de dollars en 2023-2024, augmentant à 162 millions de dollars en 2030-2031.

Pour conclure, monsieur le président et les membres du comité, je tiens à exprimer mes remerciements pour l’occasion qui nous est offerte de vous présenter ces informations. Nous restons à votre disposition pour éclaircir tout aspect de notre estimation des coûts ou pour fournir des informations supplémentaires.

Merci beaucoup.

[Traduction]

Le président : Merci, monsieur Giroux. Nous allons passer aux questions. Avant cela toutefois, je voudrais rappeler aux députés et aux témoins qui sont dans la salle de ne pas parler trop près de leur microphone afin d’éviter les réactions acoustiques qui risquent d’incommoder le personnel de soutien qui travaille dans cette salle.

Comme toujours, je rappelle aux sénateurs qu’ils ont cinq minutes pour poser leur question et obtenir une réponse. S’il le faut, nous passerons à un deuxième et à un troisième tour.

Nous allons commencer par notre vice-présidente.

La sénatrice Simons : Merci beaucoup, monsieur Giroux. C’est toujours un plaisir de vous avoir ici.

J’ai bien de la peine à comprendre. J’avoue que ce rapport m’a beaucoup surprise. Je viens des Prairies — de l’Alberta — et je pensais que ce changement avantagerait l’Alberta et la Saskatchewan plus que toutes les autres provinces. Je comprends mal. Je sais que l’Ontario est une plus grande province et qu’on y utilise beaucoup plus de gaz naturel et de propane, si l’on se fie à ces chiffres, par rapport aux sommes dépensées.

Vous semblez estimer, si j’ai bien compris, que d’ici à 2027-2028, ce changement — en Ontario — causerait un manque à gagner de 63 millions de dollars dans le cas du gaz naturel et de 13 millions de dollars pour le propane, alors qu’au Manitoba, où l’on utilise que très peu ces carburants, le Trésor fédéral ne perdra rien sur le gaz naturel et seulement 5 millions de dollars sur le propane. En Saskatchewan, on n’utilise pas de propane, et l’exemption sur le gaz naturel causera un manque à gagner de 22 millions de dollars; en Alberta, le gouvernement perdra 22 millions de dollars sur le gaz naturel et une quantité minimale sur le propane.

Ces chiffres m’intriguent, et je voudrais d’abord vous demander si vous comprenez pourquoi le montant de l’Ontario est si élevé. Est-ce simplement à cause de la grandeur de cette province, ou est-ce dû aux types de cultures, puisque l’on y cultive plus de maïs que de blé? Je ne sais pas si cette question correspond à votre champ d’expertise.

M. Giroux : C’est une question intéressante, et je me la suis posée en examinant ces chiffres. Tout d’abord, soulignons que « zéro » ne signifie pas nécessairement « nul ». Dans ce rapport, ce chiffre représente tout ce qui est inférieur à un demi-million de dollars; nous avons arrondi cela à zéro. Il ne désigne pas nécessairement le taux d’utilisation de propane ou de gaz naturel. Il s’agit du montant d’exemption de la taxe sur le carbone prévue dans le projet de loi C-234. Il pourrait donc encore y avoir une utilisation mesurable du propane et du gaz naturel dans les provinces où nous affichons une consommation nulle, mais tout compte fait, cette exemption de la taxe sur le carbone ne constitue pas une somme importante, d’autant plus qu’au cours des deux premières années, cette taxe sera moins élevée.

Quant à la différence considérable entre l’utilisation et les exemptions de l’Ontario et celles du Manitoba, par exemple, elle s’explique par la structure de leurs secteurs agricoles. M. Ammar a peut-être plus d’information que moi à ce sujet. Cette différence découle des diverses utilisations et de l’apport énergétique au logement du bétail et aux serres, qui sont un peu plus répandues en Ontario que dans les autres provinces.

Nasreddine Ammar, conseiller-analyste, Bureau du directeur parlementaire du budget : Vous avez raison, la taille de la province est aussi un facteur important. Si je regarde les chiffres fournis par Statistique Canada, par exemple, on constate qu’en Ontario, environ 40 000 fermes ont déclaré des dépenses d’exploitation positives, alors que le Manitoba n’en compte que 11 ou 12 000. Cela explique en partie pourquoi l’Ontario bénéficie d’une plus grande part de cette exemption.

Les types d’activités expliquent également cette différence. Ils sont très divers dans les provinces, comme les types d’exploitation agricole, de production animale, de culture végétale, qu’il s’agisse de serres, de grains, et autres. Ces secteurs utilisent différents types de carburants.

La sénatrice Simons : J’ai été extrêmement surprise de constater que ces changements n’épargneraient presque rien aux agriculteurs du Manitoba par rapport à ceux de l’Ontario.

Dans le tableau, les chiffres montent et descendent. Prenons le cas de l’Ontario, qui affiche les chiffres les plus élevés. Vous estimez qu’en 2023-2024, cette exemption coûterait au gouvernement fédéral 38 millions de dollars dans le cas du carbone émis par le gaz naturel, puis qu’elle continuerait à augmenter jusqu’à 2027-2028, où elle atteindrait 63 millions de dollars.

On nous dit qu’à un certain point, les gens trouveront des façons plus écoénergétiques de soutenir ces activités. Pourtant, votre courbe monte en flèche, et je me demande pourquoi.

M. Giroux : C’est surtout à cause de l’augmentation de la taxe sur le carbone, qui passera de 65 $ la tonne d’équivalents CO2 pour l’année en cours à 170 $ la tonne d’ici à 2030-2031. On s’attend à une transition pendant laquelle certains producteurs abandonneront des combustibles fossiles, mais les effets de l’augmentation de la taxe sur le carbone compenseront largement cette transition.

La sénatrice Simons : Cette énorme différence m’ébahit. Les agriculteurs des Prairies n’économiseront que très peu par rapport à ceux de l’Ontario.

M. Giroux : Oui, cela me surprend un peu. Ces données nous viennent d’Environnement et Changement climatique Canada. Elles nous surprennent aussi.

La sénatrice Simons : Très bien. Merci beaucoup.

Le sénateur Oh : Je remercie les témoins d’être venus. Pourriez-vous nous fournir des chiffres plus précis? À première vue, votre dernière estimation des coûts du projet de loi C-234 indique zéro pour le Canada atlantique, mais si j’ai bien compris, cela est dû à l’arrondissage, et le coût réel n’est pas nul.

Pourriez-vous indiquer au comité le montant réel que les agriculteurs du Canada atlantique qui ne bénéficieront pas de ces exemptions paieront en taxe sur le carbone émis par le propane et le gaz naturel?

M. Giroux : Nous pouvons certainement fournir au comité les chiffres réels et non arrondis. Cependant, comme ces montants sont relativement bas, ils pourraient ne pas être aussi fiables. S’il s’agit par exemple d’une somme de 358 000 $, je ne voudrais pas que les membres du comité présument que les agriculteurs paieront exactement ce montant. En deçà d’un certain seuil, nous arrondissons les chiffres à la hausse ou à la baisse afin d’éviter de donner une fausse impression de précision. Toutefois, nous nous ferons un plaisir de fournir au comité les chiffres non arrondis pour le Canada atlantique.

M. Ammar : En fait, ces chiffres se trouvent dans le site Web. La note y est affichée. Vous y trouverez un lien vers le fichier Excel, qui indique ces coûts jusqu’à la troisième décimale. On y indique les coûts exacts en milliers de dollars.

Le sénateur Oh : C’est donc dans le site Web?

M. Ammar : Oui, il y a un lien. Je peux vous envoyer le lien pour que vous puissiez consulter ces chiffres.

Le sénateur Woo : Merci, monsieur Giroux et monsieur Ammar. J’ai trois questions techniques. J’espère que mes cinq minutes nous suffiront. La première nous ramène au commentaire de la sénatrice Simons. Pouvez-vous nous donner une idée de l’effet qu’aura la substitution éventuelle de carburants au gaz naturel et au propane jusqu’en 2030? Si vous n’avez pas la réponse exacte, vous pourriez peut-être nous renvoyer aux hypothèses sous-tendant le remplacement du gaz naturel et du propane par de meilleurs carburants.

M. Ammar : Qu’entendez-vous exactement par « substitution »?

Le sénateur Woo : Certains supposent que les gens utiliseront le gaz naturel et le propane en moins grande quantité lorsque le prix du carbone augmentera. J’aimerais savoir en quoi consistent ces hypothèses. Les fermes consommeront-elles la moitié moins de gaz naturel et de propane d’ici à 2030? Quelles hypothèses comportementales entrent en ligne de compte dans vos calculs? Si je comprends bien, vous n’avez pas tenu compte de ces facteurs, mais j’aimerais savoir sur quoi repose votre estimation des coûts.

M. Ammar : Bien sûr, nous pourrons examiner cette question, sénateur, mais je tiens à vous dire que ces chiffres, comme la projection de l’utilisation du gaz naturel et du propane, nous viennent des fonctionnaires d’Environnement et Changement climatique Canada. Nos calculs reposent implicitement sur leurs hypothèses. Nous pourrions peut-être leur poser la question et voir s’ils peuvent fournir des réponses au sujet de la substitution.

Le sénateur Woo : Merci. Ce serait très utile.

M. Giroux : Je crois comprendre, sénateur, que la substitution des combustibles fossiles par la biomasse, par de nouveaux combustibles et par l’énergie solaire, par exemple, aura une certaine incidence.

Le sénateur Woo : Je voudrais savoir quels en sont les effets sur la composition, quelle sera la rapidité des changements, etc., parce que, de toute évidence, le moindre changement de ces hypothèses modifiera considérablement vos chiffres.

Ma deuxième question a trait aux coûts relatifs de l’incidence de ces exemptions sur les coûts globaux de l’exploitation agricole. J’essaie de me faire une idée de leur importance relative. Suivant la façon de les examiner, ces chiffres semblent soit assez élevés, soit relativement bas. Pour bien les mesurer, il faudra les comparer aux coûts globaux de l’exploitation des fermes. Avez-vous une idée à ce sujet?

M. Giroux : Oui, nous avons des estimations à cet égard. Selon les données disponibles, les dépenses du secteur agricole ont totalisé 77 milliards de dollars — dont 3,4 milliards attribuables à tous les types de carburant. Le gaz naturel et le propane représentent moins de 1 % des dépenses d’exploitation des fermes, mais ce terme peut être défini au sens large.

Le sénateur Woo : Ces chiffres que vous avancez semblent élevés, mais en fait, ils sont très faibles par rapport au total des dépenses d’exploitation des fermes.

M. Giroux : Oui, comparativement aux dépenses totales des exploitations agricoles, la taxe carbone est minime.

Le sénateur Woo : C’est moins de 1 %. Je passe à ma troisième question. Nous parlons du coût de l’exemption, ou du coût de la taxe sur le carbone. Parfois, nous en parlons comme étant le coût pour le Trésor étant donné qu’il ne perçoit pas ses recettes. Parfois, nous en parlons comme étant le coût pour les exploitations agricoles qui doivent payer ces taxes. En fait, de la manière dont le programme est conçu, s’il n’y a pas d’exemption, la totalité des recettes que perçoit le gouvernement est remboursée globalement aux exploitations agricoles. Je sais qu’il pourrait y avoir un risque de dérapage parce qu’il faut fixer ce montant, mais n’est-il pas exact de dire que le coût est nul pour tout le monde parce que le programme est conçu de manière à ce que tout l’argent provenant du secteur agricole — par le biais de la surtaxe sur les carburants — soit retourné à l’ensemble du secteur agricole afin d’annuler le coût? Il n’y a donc pas de coût réel ni de coût net pour personne, est-ce exact?

M. Giroux : C’est vrai que l’argent est retourné aux Canadiens, à hauteur d’environ 90 %, les 10 % restants étant attribués aux secteurs les plus touchés. Par contre, si un producteur paie une taxe sur le carbone, cela ne veut pas nécessairement dire que ce montant lui sera remboursé. Il est remboursé aux citoyens de la province. Pour l’ensemble de l’économie, il est vrai que les recettes provenant de la taxe sur le carbone sont recyclées à hauteur d’environ 90 %.

Le sénateur Woo : Il y a un autre remboursement offert aux agriculteurs pour l’utilisation de propane et de gaz naturel. Ce remboursement est destiné seulement aux agriculteurs et non pas à l’ensemble des consommateurs, n’est-ce pas? En somme, je dirais que le montant qui est remboursé à l’ensemble du secteur agricole correspond plus ou moins à vos estimations. Il n’est donc pas tout à fait exact de parler d’un coût pour le Trésor ou pour les agriculteurs. C’est comme donner d’une main et reprendre de l’autre.

M. Ammar : C’est vrai si nous parlons de la valeur monétaire. Vous avez raison; les recettes que nous percevons et la redevance sur les combustibles sont remboursées aux agriculteurs. Une grande partie des 10 % restants sera remboursée aux agriculteurs, mais cela dépend toutefois de l’usage qu’ils font de cet argent. L’idée n’est pas seulement de retourner l’argent directement aux agriculteurs. Si nous comparons les redevances perçues sur les combustibles par le biais de [difficultés techniques] aux ménages. C’est différent. Les [difficultés techniques] pourraient servir à soutenir les technologies propres, et d’autres aspects de l’investissement.

Oui, le coût serait techniquement nul parce qu’il s’agit d’un remboursement de cet argent, mais le coût indirect, c’est que nous évitons ce genre de transfert.

L’objectif de la tarification du carbone, c’est d’obtenir un prix plus élevé pour ce genre de produit, tout en incitant le consommateur à réduire sa consommation. Pour ce qui est des gaz à effet de serre, ou GES, par exemple, des produits à forte intensité d’émissions, si vous exemptez les agriculteurs de la taxe sur le carbone, il n’y a pas de transfert de coûts. Dans ce cas, le prix n’augmentera pas en fonction du prix du carbone. Cela pourrait inciter les consommateurs à changer leurs comportements.

Le sénateur Woo : Nous aurons peut-être besoin de précisions. Des fonds ont été mis de côté pour inciter ou aider les agriculteurs à adopter de nouvelles technologies, mais ces fonds n’ont rien à voir avec les remboursements versés inconditionnellement aux agriculteurs en fonction de la taille de leur exploitation. Ce que je veux dire, c’est qu’étant donné que tout cet argent est retourné à l’ensemble du secteur agricole, il n’est pas tout à fait exact de parler d’un coût pour le secteur agricole. Lorsque les agriculteurs disent que cela a un coût pour eux, il est vrai que certains agriculteurs recevront un montant inférieur à leurs dépenses, mais, dans l’ensemble, il n’y a pas de coût net pour le secteur agricole. C’est simplement ce que je voulais dire.

M. Giroux : Vous avez raison pour l’ensemble du secteur, mais pour les producteurs, individuellement, la situation est différente. Bref, vous avez raison. C’est probablement ce que vous souhaiteriez que je répète.

Le sénateur Woo : Non.

M. Giroux : Quand ma femme et mes enfants me disent que j’ai raison, je leur demande de répéter, juste pour le plaisir de les entendre.

Le président : Vous n’avez plus besoin de le répéter.

Je me prévaux de la prérogative de la présidence pour revenir sur cette question. Si un producteur de champignons du Sud d’Ottawa verse 150 000 $ en taxe sur le carbone, il ne reverra pas la couleur de cet argent, n’est-ce pas? Il recevra 875 $. C’est le secteur agricole qui aura l’argent. Je prends un chiffre au hasard.

M. Giroux : Oui, à cause de la manière dont le programme est conçu.

Le sénateur Cotter : Messieurs, je vous remercie d’être à nouveau parmi nous. Nous vous remercions pour les précieux renseignements que vous nous donnez à chaque rencontre. J’essayais de lire deux rapports en ligne en même temps, mais je pense que ce sera plus facile de vous poser la question directement.

Sur l’écran, je vois l’incidence que le projet de loi C-234 aurait. J’essayais aussi de voir quelle serait l’exemption globale sur les combustibles agricoles. Pouvez-vous nous donner une idée de ce qu’elle représente par rapport à l’exemption générale sur le carburant agricole et à l’étude que vous avez menée?

M. Ammar : Quand vous parlez de l’exemption plus générale sur les combustibles agricoles...

Le sénateur Cotter : Je parle de l’exemption offerte pour l’utilisation d’un tracteur dans les champs et pour les récoltes, comparativement à celle-ci qui vise surtout les séchoirs à grains et les bâtiments agricoles.

M. Ammar : Vous parlez de l’exemption pour le diésel et l’essence?

Le sénateur Cotter : C’est exact.

M. Ammar : Nous n’avons pas les chiffres exacts devant nous, mais nous pourrons vous les faire parvenir plus tard.

Le sénateur Cotter : Je vous remercie.

Le sénateur Dalphond : Pour revenir à la question du sénateur Cotter, ai-je raison de supposer que l’exemption actuelle qui s’applique exclusivement à l’utilisation de moissonneuses-batteuses, de tracteurs et d’autres machines agricoles sera peu élevée comparativement au montant que vous avez estimé pour le gaz naturel et le propane, parce que ces carburants sont utilisés non seulement pour certains équipements, mais aussi pour le chauffage qui, je suppose, coûte plus cher que l’utilisation d’un tracteur toute la journée?

M. Giroux : Vous avez raison. Si nous parlons seulement de la machinerie et de l’équipement, le montant varie grandement en fonction du type d’opération et du type d’exploitation agricole. Cependant, il pourrait être beaucoup plus bas, surtout si on parle de serres ou de séchoirs à grains. Dans ces cas, le propane et le gaz naturel pourraient représenter une part ou une dépense beaucoup plus élevée par rapport à l’utilisation de tracteurs et de machines en général.

M. Ammar : Je n’en suis pas certain. Il est vrai que le chauffage nécessite une grande quantité de gaz naturel et de propane, mais quand je regarde les chiffres ici, je constate que les dépenses en carburant pour la machinerie et les véhicules à moteur sont presque quatre fois plus élevées que celles pour le carburant utilisé pour le chauffage et le séchage des grains. Techniquement, je pense que le coût de l’essence et du diésel utilisés par les agriculteurs pourrait dépasser, en dollars, celui du gaz naturel et du propane.

Nous devons obtenir tous les chiffres et voir quelle part de chaque type de carburant est utilisée pour ces différentes opérations.

Le sénateur Dalphond : Vous avez révisé le troisième. Je vous en remercie.

Au fil des ans, vous avez fourni beaucoup d’information sur le projet de loi C-234 et le précédent. L’Ontario, par exemple, représente la part du lion. D’après mes calculs approximatifs, 57 % de la taxe sur le carbone sera perçue en Ontario. Avez-vous une idée de la quantité de gaz naturel et de propane utilisée pour le séchage des grains?

M. Ammar : J’ai le chiffre des dépenses en dollars, mais pas précisément pour le gaz naturel et le propane. Il s’agit plutôt des dépenses totales en combustible pour le chauffage et le séchage des grains. Selon nos estimations, entre 8 et 10 % de ces dépenses sont pour la culture des oléagineux et des céréales.

Le sénateur Dalphond : Le séchage représenterait donc entre 8 et 10 % du montant indiqué pour l’Ontario?

M. Ammar : C’est seulement pour les produits oléagineux et céréaliers. La part des dépenses totales pour le chauffage pour l’ensemble des exploitations agricoles se situe entre 8 et 10 %.

Le sénateur Dalphond : Pour ce type de production, le séchage représente entre 8 et 10 % des dépenses. Avez-vous les chiffres pour le maïs et d’autres produits?

M. Ammar : En Ontario, par exemple, ce sont les serres et les pépinières qui utilisent la part la plus importante du combustible de chauffage. Les serres et les pépinières consomment près de 57 % de la quantité totale du combustible de chauffage utilisé par les exploitations agricoles. C’est la part la plus importante. La part la plus faible revient aux produits oléagineux et céréaliers. Quant à la valeur monétaire, elle est indiquée dans les données de Statistique Canada de 2021.

Le président : Quel était ce chiffre, encore une fois?

M. Ammar : Le combustible de chauffage utilisé pour les serres représente environ 57 % de la quantité totale utilisée par l’ensemble des exploitations agricoles de l’Ontario.

Le sénateur Cotter : Désolé de vous interrompre, sénateur Dalphond, mais la question précédente portait-elle aussi sur le séchage des oléagineux et des grains en Ontario?

M. Ammar : Oui, ce sont les 8 % dont nous avons parlé. Comme la plupart des serres sont exemptées, près de 80 % du carburant utilisé est donc exempté de la tarification du carbone.

Le sénateur Dalphond : Je sais. Les chiffres que vous avez indiqués pour l’Ontario ne portent que sur les 20 % restants, je suppose.

M. Ammar : Nous avons inclus ces 20 % dans ces estimations, mais nous avons exclu les 80 % qui sont déjà exemptés du calcul.

Le sénateur Dalphond : En Ontario, le montant révisé pour 2023-2024 est de 44 millions de dollars. Cela comprend le coût du gaz naturel et du propane utilisés pour chauffer les serres, mais c’est seulement le prix que paient les agriculteurs, ce qui équivaut à 20 % de la taxe sur le carbone.

M. Ammar : Oui, cela inclut les 20 % pour les serres.

Le sénateur Dalphond : En incluant le séchage des céréales et des oléagineux dans ces 44 millions de dollars, quel serait le pourcentage ou le montant? Si vous n’avez pas ce chiffre en tête, vous pouvez nous le faire parvenir plus tard.

M. Ammar : Je n’ai pas les chiffres en ce moment par type d’exploitation agricole, mais je peux vous le trouver plus tard. Pour en avoir une idée, vous n’avez qu’à appliquer les 8 à 10 %. Cependant, comme nous n’appliquons que 20 % pour les serres, qui utilisent la plus grande part, nous devons refaire les calculs pour avoir une idée du montant que cela représenterait.

Le sénateur Dalphond : J’aimerais me concentrer sur l’opération de séchage. En Ontario, ce projet de loi prévoit une exemption de la taxe carbone pour le tiers, grosso modo, du séchage des grains. Les deux tiers qui restent demeureront assujettis à la surcharge.

M. Ammar : En fait, dans nos calculs, nous ne tenons pas compte de cette distinction entre ce qui est utilisé par les silos à grains commerciaux, parce que nous n’avons pas ces données, mais aussi parce que les estimations pourraient être considérées comme étant le plafond des coûts.

Je le répète, étant donné que la part des produits céréaliers n’est pas très importante pour l’Ontario — et surtout parce que cela n’a pas une forte incidence sur le résultat, les chiffres que nous avons présentés devraient être exacts, et devraient représenter le plafond des estimations.

Le sénateur Dalphond : Merci. Je présume qu’on va nous fournir ces renseignements.

Le président : Oui, merci.

La sénatrice Simons : Pour faire suite directement aux propos du sénateur Dalphond, pouvez-vous nous donner des chiffres comparables pour les trois provinces des Prairies? On y trouve des serres, mais beaucoup plus modestes. Prenons l’Alberta, puisque c’est ma province.

Quel serait le pourcentage consacré au séchage des céréales et des oléagineux par opposition à l’élevage du bétail, aux granges, aux serres et ainsi de suite?

M. Ammar : Vous voulez parler des émissions de GES?

La sénatrice Simons : Je demande les chiffres correspondant à ceux que vous avez donnés au sénateur Dalphond pour l’Ontario.

M. Ammar : Pour l’Alberta? Oui, je dois pouvoir vous fournir cette information.

Selon les données publiées par Statistique Canada pour 2021, la part de la production d’oléagineux et de céréales est beaucoup plus élevée en Alberta, en fait. Le combustible de chauffage et de séchage dans la production d’oléagineux et de céréales en Alberta représente 34 % des dépenses totales en combustible pour le chauffage en agriculture. En Alberta, c’est le secteur qui pèse le plus lourd. La province consacre aussi une grande part à la production animale, soit 46 %.

La sénatrice Simons : Il s’agit donc du chauffage des étables?

M. Ammar : Oui, en Alberta, il s’agit des frais de chauffage. Je parle ici des dépenses en chauffage.

La sénatrice Simons : Très intéressant.

Pour en revenir aux chiffres de l’Ontario, si nous accordons déjà un remboursement de 80 % aux exploitants de serres — il n’est peut-être pas juste de vous le demander, mais je vais quand même le faire —, est-il logique qu’il en soit question dans le projet de loi?

M. Giroux : La question est intéressante, mais il appartient aux législateurs de trancher.

La sénatrice Simons : Désolée. La question m’est venue à l’esprit. Il est probablement déplacé de vous la poser.

Pour revenir aux propos du sénateur Woo, on ne peut pas dire que le contribuable canadien ou le Trésor canadien vont perdre cet argent, car il serait réinjecté de toute manière, même si — pour reprendre la réflexion du sénateur Black — il ne retourne pas aux agriculteurs pris individuellement. Nous ne pouvons donc pas dire que le Trésor va perdre 131 millions de dollars de recettes qui devraient venir de l’Alberta.

M. Giroux : Oui, vous avez raison.

La sénatrice Simons : Monsieur Ammar, pouvez-vous nous fournir pour toutes les provinces la ventilation sectorielle, comme vous venez de le faire pour l’Ontario et l’Alberta? Ce serait extrêmement utile.

M. Ammar : Oui, je pense pouvoir le faire.

La sénatrice Simons : Merci beaucoup.

Le président : Encore une fois, à titre de président, je vous ferai remarquer qu’il serait formidable que vous puissiez nous communiquer cette information le plus tôt possible.

Merci beaucoup.

Le sénateur Cotter : Monsieur Ammar, avez-vous à portée de main, pour la Saskatchewan, la ventilation — en pourcentage — que vous venez de présenter pour l’Ontario et l’Alberta? L’avez-vous sous les yeux?

M. Ammar : Une précision : ces chiffres de Statistique Canada correspondent à la valeur en dollars du combustible de chauffage utilisé. Dans notre estimation, nous utilisons cependant la projection d’Environnement et Changement climatique Canada pour le gaz naturel et le propane utilisés dans l’ensemble du secteur agricole.

Les chiffres, pour ce qui est des émissions de GES — et ensuite pour les coûts liés au carbone — seront différents, puisqu’il faut tenir compte de l’intensité des émissions de chaque type de combustible et de la part de chacun dans chaque activité et dans chaque province.

Malheureusement, nous n’avons pas ces données pour l’instant, mais nous pourrions peut-être proposer une approximation pour donner une vague idée de la part de chaque type d’exploitation dans chaque province, comme vous l’avez demandé. Mais le chiffre que je vous ai donné est celui des dépenses en combustible de chauffage — il s’agit des combustibles de chauffage et pas seulement du gaz naturel et du propane. Il se pourrait que de faibles volumes d’autres types de combustible soient utilisés dans ce genre d’exploitation.

Le sénateur Cotter : Je répète ma question : quels sont les chiffres pour la Saskatchewan?

M. Ammar : Désolé.

Le sénateur Cotter : J’ai appris auprès du sénateur Dalphond.

M. Ammar : Oui, bien sûr. Je peux vous donner un chiffre rapide.

En Saskatchewan, par exemple, c’est dans le secteur des oléagineux et des céréales qu’on utilise le plus de combustible de chauffage dans les exploitations agricoles. Les producteurs d’oléagineux et de céréales de la province utilisent environ 60 % du combustible de chauffage.

Le sénateur Cotter : Y a-t-il un chiffre pour l’élevage du bétail?

M. Ammar : Pour la production animale, c’est environ 34 ou 35 %. Ce sont les données de 2021.

Le sénateur Cotter : Merci.

Le sénateur Woo : Vous nous avez beaucoup aidés. Je vous remercie du travail que vous avez fait pour comparaître.

Si vous êtes en mesure de nous fournir les données supplémentaires et les hypothèses qui sous-tendent les projections relatives à l’utilisation du gaz naturel et du propane, pourriez-vous également nous communiquer les hypothèses sur le prix du gaz naturel et du propane? Comment cela entre-t-il en ligne de compte dans votre simulation?

M. Ammar : Le prix lui-même?

Le sénateur Woo : Oui, la projection des prix.

M. Ammar : Les prix n’ont pas eu d’incidence sur notre calcul des coûts puisqu’il se fonde sur le taux de la redevance sur les combustibles, et que ce taux est fixe. Ce qui nous permet de connaître le montant qui sera prélevé jusqu’en 2030-2031. Cela ne dépend pas vraiment du prix. Le prix influera sur l’utilisation de ce carburant en fonction de la consommation, ce qui pourrait avoir une incidence indirecte sur la projection.

Mais, je le répète, ce travail a été fait par Environnement et Changement climatique Canada, qui a ses hypothèses sur le prix du gaz naturel et du propane à l’avenir, et je présume que le ministère a fait ses projections en conséquence.

Le sénateur Woo : J’espère que nous pourrons prendre connaissance des hypothèses sur lesquelles reposent les projections d’Environnement et Changement climatique Canada et voir comment elles influent sur la substitution supposée.

Le sénateur Dalphond : Dans le même ordre d’idées, je sais que ce n’est pas une taxe; c’est pourquoi l’argent est réinjecté. Et la Cour suprême a dit que c’est une redevance et non une taxe.

J’en reviens aux questions du sénateur Woo. Vous calculez simplement le coût à la tonne. Vous savez à l’avance à quoi vous en tenir, à supposer que nous atteignions un certain montant chaque année. Alors vous faites un calcul.

Dans votre banque de données, avez-vous de l’information sur le coût réel de l’énergie dans l’exploitation d’une ferme? Cela comprend le coût du produit. Par exemple, si le prix du gaz était de 36 $ le mètre cube en octobre de l’année dernière, mais qu’il est de 26 $ le mètre cube cette année, cela devrait se traduire par une baisse des coûts énergétiques — pour l’agriculteur — malgré l’augmentation de la redevance.

Avez-vous ces données?

M. Ammar : Nous n’avons pas ces données sous les yeux, mais je pense que nous pouvons vous les fournir.

Vous avez raison; le prix du gaz naturel, en particulier, est très instable au long de l’année, et la part de la tarification du carbone varie également. Ce pourrait être 8 % ce mois-ci, ou ce pourrait être moins — 5 ou 2 % — plus tard. Cela dépend de la fréquence mensuelle.

Bien entendu, pour ce qui est de la fréquence annuelle, nous devrions également tenir compte de la hausse de la tarification du carbone. Mais il est vrai que la part va fluctuer, et nous pouvons voir ce qu’il en est pour vous donner des réponses sur la part du carbone par rapport au prix du gaz naturel et du propane.

Le sénateur Dalphond : Merci.

Le sénateur Woo : Si vous étudiez l’instabilité des coûts agricoles et mettez l’accent plus particulièrement sur le gaz naturel, vous pourriez peut-être nous renseigner sur les éléments des coûts agricoles qui sont les plus instables. Si ce que vous nous avez dit est exact — et je n’ai aucune raison d’en douter —, les coûts du gaz naturel ne représentent qu’une très faible fraction du coût total, et l’instabilité des prix du gaz naturel, aussi instables soient-ils, ne compte pas autant, à mon avis, que les nombreux autres coûts que doivent assumer les exploitations agricoles. Si vous aviez une idée de l’origine de l’instabilité réelle, ce serait intéressant.

M. Giroux : Je ne suis pas certain que nous ayons cette information, car il nous faudrait examiner l’ensemble des coûts d’exploitation de l’agriculture. Par exemple, les engrais seraient probablement un intrant qui pèse lourd dans de nombreuses exploitations agricoles et dont les coûts fluctuent également.

Le sénateur Woo : Merci.

M. Ammar : Autre chose à ajouter. Yves Giroux a dit tout à l’heure que les dépenses en combustibles représentent moins de 1 % du prix total, mais si on tient compte de la nature des activités, cela devrait varier selon le type d’exploitation. Par exemple, pour le grain, c’est encore moins, soit environ 0,4 % par rapport au total des frais d’exploitation. Par contre, dans l’exploitation des serres, par exemple, c’est 10 fois plus parce qu’elles consomment beaucoup de ce combustible. Je parle de la moyenne pour le Canada.

Bien sûr, il faut tenir compte de la taille des exploitations. Nous n’avons pas d’analyse de cette nature et nous n’avons aucune idée de la variation des proportions selon la taille des exploitations.

Le sénateur Woo : Merci.

Le président : Nous vous remercions en vous chargeant de quelques tâches, si vous le voulez bien. Nous attendons un complément d’information. Merci. Je n’ai pas d’autres questions et aucun autre sénateur ne souhaite en poser. Merci beaucoup aux témoins, M. Giroux et M. Ammar. Ce fut un plaisir de vous accueillir cette fois encore.

Nous allons maintenant passer au deuxième groupe de témoins qui nous parleront du projet de loi C-234, Loi modifiant la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre. Ce groupe comprend M. Nicholas Rivers, professeur agrégé, Affaires publiques et internationales, Faculté des sciences sociales, Université d’Ottawa, qui comparaît en personne. M. Murray Jowett, coordonnateur de la politique climatique de l’Union nationale des fermiers, et M. Ian Boxall, président de l’Agricultural Producers Association of Saskatchewan, qui comparaissent tous deux par vidéoconférence. Bienvenue à vous trois.

Nous allons entendre les exposés liminaires de MM. Rivers, Jowett et Boxall. Vous aurez chacun cinq minutes. À vous la parole, monsieur Rivers.

Nicholas Rivers, professeur agrégé, Affaires publiques et internationales, Faculté des sciences sociales, Université d’Ottawa, à titre personnel : Je vous remercie de m’avoir invité à comparaître. J’ai beaucoup aimé les derniers échanges. J’espère que ceux que nous aurons seront également féconds.

Dans ma déclaration liminaire, je vous livrerai d’abord quelques réflexions sur la politique canadienne de tarification du carbone en général, puis je vous présenterai mon point de vue sur le projet de loi C-234, qui propose de soustraire à la tarification du carbone les combustibles utilisés pour le séchage des grains et pour le chauffage et la climatisation des bâtiments agricoles.

Les économistes sont très favorables au recours à la tarification du carbone, comme celle qui est mise en œuvre au Canada, pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Cette méthode est considérée comme le moyen le moins coûteux de réduire les émissions parce qu’elle offre aux émetteurs une grande souplesse pour choisir les modalités de réduction des émissions les mieux adaptées à leur situation.

La tarification du carbone fonctionne mieux lorsque le tarif est le même pour toutes les émissions de gaz à effet de serre. Le Canada a généralement suivi cette recommandation en établissant sa propre tarification du carbone et en exigeant qu’elle soit appliquée dans les provinces. Cette politique vise à inciter tous les émetteurs de gaz à effet de serre à réduire leurs émissions.

Le Canada n’est pas le seul pays à avoir mis en place une tarification du carbone. La Banque mondiale nous apprend qu’environ le quart des émissions dans le monde est visé par ce type de régime. L’adoption de plus en plus large de la tarification du carbone à l’échelle internationale contribue à réduire les émissions et à uniformiser les règles du jeu à l’échelle internationale.

Cependant, même si l’application de la tarification du carbone à l’échelle mondiale continue d’augmenter, bon nombre de nos partenaires commerciaux, y compris les États-Unis, n’ont pas imposé de tarification du carbone sur leurs émissions. Cela soulève des préoccupations quant au fait que les producteurs de biens échangeables au Canada pourraient devenir moins concurrentiels ou moins rentables que les producteurs d’autres pays qui n’appliquent pas de tarification du carbone.

La politique canadienne de tarification du carbone offre des remboursements aux grands émetteurs industriels de biens échangeables, comme les fabricants de ciment ou d’acier, afin de contrer cette préoccupation en matière de compétitivité. Les remboursements aux grands émetteurs sont fondés sur la production, comme la quantité d’acier produite, tandis que la tarification du carbone est prélevée sur les émissions. Cette conception de la politique fait en sorte que les grands émetteurs industriels continuent d’être incités à réduire leurs émissions, mais qu’ils ne sont pas désavantagés par rapport à la concurrence internationale.

Cependant, de nombreuses fermes ne sont pas couvertes par les remboursements sur la tarification du carbone dans le secteur industriel. Il y a certaines exemptions à la tarification du carbone pour les combustibles utilisés dans les fermes, mais ces exemptions ne s’appliquent pas actuellement au combustible utilisé pour le séchage des grains ou pour le chauffage des bâtiments. Cela signifie que les céréaliculteurs doivent payer la totalité de la tarification du carbone sur le combustible utilisé pour le séchage des grains et ne reçoivent pas de remboursements fondés sur le rendement. Cependant, tout comme le ciment et l’acier, les céréales sont un produit échangeable à l’échelle internationale, et on craint à juste titre que la tarification du carbone désavantage les céréaliculteurs canadiens par rapport à leurs concurrents internationaux.

Une façon de répondre à cette préoccupation serait d’exempter de la tarification du carbone le combustible utilisé pour le séchage du grain, comme on le propose dans le projet de loi C-234. Cette approche a l’avantage d’être simple et d’assurer la compétitivité internationale des producteurs de grains canadiens alors que la tarification du carbone continue d’augmenter. Cependant, les exemptions à la tarification du carbone signifient également que les producteurs de grains ne seront plus incités à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. Alors que le Canada s’efforce d’atteindre la carboneutralité d’ici une génération, il sera important de veiller à ce que tous les émetteurs soient fortement incités à réduire leurs émissions. Les exemptions à la tarification du carbone augmenteront les émissions et iront à l’encontre de nos objectifs en matière de réduction des gaz à effet de serre.

Même si le séchage du grain produit une quantité relativement faible d’émissions dans l’ensemble, par rapport au total canadien — de sorte que l’exemption proposée n’aura pas d’incidence importante sur les émissions globales de notre pays —, je m’inquiète du précédent qu’elle créerait. La force de la tarification du carbone réside dans le fait qu’elle incite tous les émetteurs à réduire leurs émissions. Les exemptions à la tarification du carbone affaiblissent le système. Si le séchage du grain est exempté de la tarification du carbone, d’autres groupes voudront demander des exemptions à la tarification du carbone, ce qui affaiblira davantage le système.

Une solution de rechange aux exemptions serait un système de remboursement, semblable au système utilisé pour les grands émetteurs industriels. Dans le cadre d’un système de remboursement, le combustible agricole continuerait d’être assujetti à la tarification du carbone. Cependant, les revenus tirés de la tarification du carbone seraient remboursés aux producteurs de grain en proportion de la quantité de grain produite. Tout comme les remboursements actuels pour les grands émetteurs industriels, ce système continuerait de fournir aux agriculteurs un incitatif pour réduire les émissions provenant du séchage des grains et d’autres activités agricoles, mais il permettrait aussi de veiller à ce que les céréaliculteurs canadiens ne soient pas désavantagés sur les marchés internationaux.

Cette approche serait un peu plus complexe qu’une exemption, mais elle aurait l’avantage de continuer à offrir des incitatifs pour la réduction des gaz à effet de serre, de maintenir la compétitivité internationale et de préserver l’intégrité du système actuel de tarification du carbone. Pour ces raisons, je pense que c’est une approche supérieure à l’exemption proposée dans le projet de loi C-234. Merci beaucoup.

Murray Jowett, coordinateur de la politique climatique, Union nationale des fermiers : Merci beaucoup d’avoir invité l’Union nationale des fermiers, ou UNF, à contribuer aux délibérations d’aujourd’hui. Je conviens avec M. Rivers que les échanges d’aujourd’hui ont été très intéressants et stimulants jusqu’à maintenant.

Je suis un membre associé actif de l’UNF depuis 2017. L’UNF est une organisation dirigée par des agriculteurs, qui en sont des membres directs. Elle a été fondée par une loi fédérale en 1969, et ses racines remontent à plus d’un siècle. L’UNF représente des milliers de familles et de travailleurs agricoles d’un océan à l’autre. Les positions de principe de l’UNF sont élaborées démocratiquement au moyen de discussions et de débats entre les membres.

En 2019, année d’une récolte notoirement humide, bon nombre de nos membres ont été forcés de faire fonctionner des séchoirs à grains pendant de longues périodes, et le coût de l’alimentation en combustible de ces séchoirs est devenu énorme. Pour cette raison, l’Union nationale des fermiers a adopté en 2019 une résolution de principe demandant que le gouvernement fédéral accorde un remboursement de la redevance sur le carbone sur le combustible agricole utilisé pour le séchage des grains. La distinction entre le combustible des séchoirs à grains et celui des tracteurs dans la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre, que j’appellerai maintenant la « Loi sur la tarification de la pollution », nous a laissés perplexes.

Dans la foulée de l’adoption de cette résolution de l’Union nationale des fermiers, le projet de loi C-8 a instauré un crédit d’impôt visant à remettre le produit de la redevance sur le carbone aux entreprises agricoles des provinces où le filet de sécurité fédéral de la Loi sur la tarification de la pollution s’applique, soit l’Alberta, la Saskatchewan, le Manitoba et l’Ontario. L’UNF a accueilli favorablement ce nouveau crédit d’impôt, car il a aidé à atténuer les pertes pour les agriculteurs tout en préservant le signal des prix du combustible de chauffage agricole.

Ce qui nous préoccupe au sujet du projet de loi C-234, c’est son intention d’exempter complètement les combustibles de chauffage agricoles de la Loi sur la tarification de la pollution. Cela élimine le signal de prix envoyé. Les signaux du prix du carbone sont essentiels, car ils incitent les producteurs à adopter des pratiques qui réduisent les émissions lors du chauffage des granges et du séchage du grain. Le système actuel, tel que modifié par le projet de loi C-8, assure un meilleur équilibre en maintenant le signal du prix du carbone sans compromettre la production alimentaire. C’est pourquoi nous exhortons le comité à tenir compte de l’urgence de s’attaquer aux changements climatiques dans son évaluation des changements proposés dans le projet de loi C-234.

Le problème avec le projet de loi C-234, c’est qu’une exemption complète ne fait pas la promotion des technologies propres et des solutions de rechange à faibles émissions. Bien qu’une exemption ait pu être logique au moment de la rédaction initiale de la Loi sur la tarification de la pollution, elle devient beaucoup moins appropriée à mesure que des solutions de rechange plus propres deviennent disponibles.

Étant donné que de plus en plus de données scientifiques sur le climat soulignent l’urgence de s’attaquer aux répercussions catastrophiques des changements climatiques, nous croyons que les points suivants devraient être pris en compte dans le contexte de l’agriculture canadienne et du projet de loi C-234.

Premièrement, nous devons assurer un approvisionnement suffisant en aliments. La Loi sur la tarification de la pollution l’a déjà reconnu en exemptant la plupart des combustibles agricoles de la tarification de la pollution. Deuxièmement, la réduction de la pollution par les gaz à effet de serre devrait être une priorité absolue, et il n’existe pas de solutions simples et gratuites pour atteindre cet objectif. Les signaux du prix du carbone sont essentiels pour tous les participants à une économie de marché, y compris les agriculteurs. Troisièmement, la tarification du carbone devrait être considérée comme une solution, et non comme le problème, puisqu’elle vise à assurer la sécurité alimentaire et à juguler l’inflation dans la perspective à long terme des changements climatiques.

C’est pourquoi l’Union nationale des fermiers recommande que le gouvernement continue d’aider les agriculteurs à faire la transition vers des séchoirs à grains et des installations d’élevage plus efficaces en offrant des incitatifs et en continuant d’envoyer des signaux de prix.

En ce qui concerne le projet de loi C-234, nous proposons que le comité le modifie afin d’y inclure une disposition de temporisation pour l’exemption qui vise le séchage du grain et le combustible de chauffage des granges comme un combustible agricole. Cette période de temporisation laisserait le temps aux technologies de séchage du grain propres de mûrir et donnerait aux agriculteurs la possibilité de moderniser l’isolation des bâtiments agricoles et les systèmes de chauffage, ce qui réduirait les émissions de gaz à effet de serre de leurs activités.

Merci. L’UNF est prête à répondre à vos questions.

Le président : Merci beaucoup. Nous allons maintenant entendre M. Boxall.

Ian Boxall, président, Agricultural Producers Association of Saskatchewan : Bonjour, monsieur le président et membres du comité. Je suis ici aujourd’hui en tant que président de l’Agricultural Producers Association of Saskatchewan, ou APAS, et en tant qu’agriculteur passionné de Tisdale, dans le Nord-Est de la Saskatchewan.

Je suis venu aujourd’hui pour vous faire part des points de vue de ceux qui ne sont pas seulement touchés par la politique actuelle de tarification du carbone, mais qui sont également à l’avant-garde de la protection de l’environnement pour les terres et les cours d’eau qui nous tiennent à cœur. Dans le cadre des discussions sur le bien-fondé du projet de loi C-234, je souhaite vous faire part de points de vue uniques que vous n’avez peut-être pas encore entendus.

Les agriculteurs se sont attaqués aux changements climatiques bien avant que l’expression ait été inventée, et l’agriculture a mené la charge en matière de réduction des émissions de dioxyde de carbone avant que la réduction des émissions de carbone ne devienne une priorité de la politique publique. Les agriculteurs de la Saskatchewan ont fait un don environnemental au Canada lorsque nous sommes passés à la culture sans labour. Nous l’avons fait sans attendre l’orientation du gouvernement, parce que nous étions convaincus que c’était à la fois prudent sur le plan environnemental et économiquement rentable pour nos exploitations agricoles. Cependant, ce don est souvent négligé et minimisé aujourd’hui parce qu’il est considéré comme une pratique courante. Avons-nous vraiment quantifié la valeur économique de ce don ayant contribué aux efforts environnementaux du Canada? Comment se compare-t-il à l’aide que le projet de loi C-234 pourrait apporter aux agriculteurs?

La plupart des agriculteurs sont déjà passés des chaudières à charbon pour le chauffage à des solutions de rechange plus propres comme le gaz naturel et les combustibles mélangés à l’éthanol ou au biodiesel. Mais il y a un obstacle important : le manque de soutien en matière d’infrastructure pour les sources d’énergie nouvelles et plus vertes. Bien que des technologies comme l’hydrogène, l’énergie solaire, l’énergie éolienne, la biomasse et la géothermie soient prometteuses, leur application demeure limitée en raison de nos conditions environnementales uniques et de notre vaste territoire.

Ces technologies s’amélioreront sans aucun doute au fil du temps, mais pour l’instant, elles ne peuvent pas égaler la fiabilité des sources existantes pour le chauffage des étables pendant les températures hivernales extrêmes ou le séchage des grains pendant une saison de récolte humide.

Néanmoins, nous, les agriculteurs, connaissons bien l’innovation. Nous sommes déterminés à nous adapter et à innover au besoin pour contribuer à un avenir plus vert.

Ce serait un rêve qui se réaliserait si nous n’avions pas à sécher un seul boisseau de grain, de sorte que la taxation de l’énergie utilisée à cette fin ne poserait aucun problème. Malheureusement, ce n’est pas notre réalité. Lorsque nous devons sécher de grandes quantités de grain, c’est souvent parce que les conditions de récolte ne sont pas en notre faveur. Lorsque cela se produit, cela ajoute du stress, de l’anxiété et un fardeau financier pendant une période déjà difficile pour les agriculteurs.

Je suis convaincu qu’il s’agit d’une conséquence imprévue de la politique de tarification du carbone que le projet de loi C-234 vise à corriger.

Grâce à un soutien gouvernemental approprié qui facilite la transition vers des sources d’énergie plus propres, les agriculteurs de la Saskatchewan continueront d’améliorer notre responsabilité écologique tout en assurant notre viabilité financière. Les agriculteurs sont profondément attachés à l’intendance de l’environnement. Pourquoi? Nous voulons que nos fermes soient meilleures, plus productives et plus durables pour les générations qui nous suivront. C’est l’héritage qui compte vraiment pour moi, pour mes voisins et pour les agriculteurs de partout au Canada. C’est pourquoi nous cherchons sans relâche des solutions pour améliorer notre durabilité.

Cependant, ne nous contraignons pas par des politiques qui réduisent notre capacité d’investir dans les solutions mêmes que vous voulez que nous adoptions. Le passage à des sources d’énergie plus propres peut être un processus graduel et coûteux, et il est déraisonnable de nous pénaliser pour notre dépendance aux combustibles fossiles à ce stade-ci.

En terminant, je tiens à exprimer ma gratitude d’avoir été invité ici, monsieur le président. J’attends avec impatience la discussion qui suivra. Merci.

Le président : Merci, monsieur Boxall, et merci à nos autres témoins également.

Nous allons passer aux questions. Comme je l’ai dit plus tôt, je demanderais aux témoins et aux membres du comité de bien vouloir s’abstenir de se pencher trop près du microphone, car cela pourrait nuire à la qualité du son et entraîner une rétroaction acoustique à notre personnel dans la salle.

Comme nous le faisions auparavant, nous aurons chacun cinq minutes pour les questions, puis nous passerons à un deuxième et à un troisième tour, au besoin. Puisque les cinq minutes comprennent les questions et les réponses, je demanderais de faire preuve de concision.

Je vais prendre la prérogative de poser la première question.

Monsieur Jowett, combien y a-t-il de membres à l’UNF? Quelle est la taille moyenne des fermes de vos membres?

M. Jowett : Je n’ai pas cette information, mais je peux l’obtenir et la fournir ensuite au comité.

Le président : Je pense que vous avez souligné la nécessité d’une disposition de temporisation. Le projet de loi C-234 prévoit une disposition de temporisation étalée sur huit ans. Le saviez-vous?

M. Jowett : À quoi sert la disposition de temporisation actuelle? Est-ce pour l’ensemble...

Le président : Le projet de loi C-234 comporte une disposition de temporisation qui serait réexaminée au bout de huit ans. Vous disiez qu’il fallait modifier le projet de loi pour inclure cela.

M. Jowett : Je n’étais donc pas bien renseigné.

Le président : Enfin, avez-vous dit que vos membres utilisent des solutions de rechange plus propres pour le séchage des grains? Vous en avez peut-être parlé. Dans l’affirmative, quelles sont ces solutions plus propres?

M. Jowett : Je peux obtenir cette information pour vous. Je ne le sais pas précisément parce que cela varie d’une ferme à l’autre, et nous sommes représentés partout au pays. Cependant, nous avons des membres qui sont très déterminés à chercher des solutions de rechange pour toutes les activités à la ferme.

Le président : Merci.

La sénatrice Simons : Monsieur Rivers, j’aimerais commencer par vous.

Les grains sont un produit commercialisé à l’échelle internationale, et nous ne voulons pas désavantager nos agriculteurs sur le plan de la concurrence. J’ai trouvé très instructif le lien que vous avez établi avec une industrie lourde comme la production de ciment.

Le projet de loi dont nous sommes saisis ne propose pas de remboursements. En tant que comité sénatorial, notre latitude est limitée pour ce qui est d’affirmer que nous avons une meilleure idée et que nous devons faire les choses différemment. Dans le cadre de la discussion que nous avons eue plus tôt avec le directeur parlementaire du budget — dont vous avez pu prendre connaissance —, lui et son équipe ont fait remarquer que le séchage des grains et des oléagineux ne représente qu’un petit pourcentage, même en Alberta, et surtout en Ontario, de la somme totale.

Pensez-vous que nous pourrions aller à mi-chemin de ce que vous proposez en modifiant la portée du projet de loi pour nous concentrer spécifiquement sur le séchage des grains et des oléagineux — pour lequel il existe très peu de technologies de rechange — et en supprimant l’exemption pour le chauffage des bâtiments, puisqu’il y a beaucoup plus d’options pour chauffer un bâtiment que pour sécher le grain? Cela nous permettrait de nous concentrer davantage sur le fait de ne pas nuire à l’avantage concurrentiel de nos agriculteurs.

M. Rivers : C’est une bonne question.

Je dirais deux choses. Tout d’abord, mon argument général concerne les exemptions en général. Nous devrions nous tenir le plus loin possible de cela. L’objectif de la politique de tarification du carbone est d’envoyer des signaux uniformes. Vous me mettez un peu mal à l’aise lorsque vous dites qu’il n’existe pas de solution de rechange à ce projet de loi, mais je dirais qu’il y en a qui sont plus appropriées.

Deuxièmement, je ne suis pas un expert des technologies agricoles, mais j’ai vu des progrès ou des changements spectaculaires dans le paysage des technologies dans des secteurs où nous pensions qu’il était difficile de procéder à des réductions. Le ciment et l’acier sont deux bons exemples de secteurs dont nous pensions qu’ils utilisaient la meilleure technologie disponible et qu’ils ne disposaient que de peu d’options à faible coût pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, cette situation ayant évolué considérablement au cours des dernières années. Il en va de même pour le transport. Nous pensions qu’il n’existait pas de moyen d’éliminer facilement les émissions de gaz à effet de serre du transport de passagers, et nous voyons maintenant le paysage changer radicalement.

Ce changement découle en partie des incitatifs financiers. Si vous les supprimez, vous éliminez une partie de la motivation des innovateurs à trouver des moyens de réduire les émissions de gaz à effet de serre. En ayant une exemption, on se tire un peu dans le pied. Il y aura moins d’innovation dans ce secteur.

La sénatrice Simons : Je conviens qu’un système de remboursements serait plus approprié. Le problème, c’est que nous devons travailler avec le projet de loi qui nous a été soumis. La rédaction d’un nouveau projet de loi en comité dépasse la portée de nos pouvoirs.

S’il me reste du temps, j’aimerais poser la même question à nos deux autres invités. Nous avons entendu de nombreux témoignages selon lesquels le séchage des grains, en particulier, est très difficile sans ces séchoirs à gaz à haute intensité. Toutefois, le chauffage des bâtiments pourrait se faire de toutes sortes d’autres façons.

Que pensez-vous de l’élargissement de la portée de ce projet de loi de façon à éliminer l’exemption pour les serres — qui bénéficient déjà d’un remboursement de 80 % — et celle pour le chauffage des granges, afin de se limiter au séchage des grains pour lequel il y a des lacunes technologiques? C’est quelque chose que nous pourrions faire, hypothétiquement, au lieu de rédiger le projet de loi différemment pour l’axer sur les remboursements.

Ma question s’adresse aux représentants de l’Agricultural Producers Association of Saskatchewan et de l’Union nationale des fermiers.

M. Boxall : J’ai une question : quelles sont ces autres options? À moins 40 degrés en Saskatchewan, avec une étable pleine de porcs ou d’autres animaux d’élevage, quelles sont les solutions de rechange?

La sénatrice Simons : Il existe d’autres façons de chauffer les bâtiments en ce sens qu’il est possible d’utiliser l’énergie solaire, le chauffage géothermique ou les thermopompes. Je ne dis pas que cela est facile à réaliser; je dis qu’il s’agit habituellement d’une question moins technique à résoudre que celle du séchage des grains.

M. Boxall : Je suis tout à fait d’accord pour dire que nous en viendrons à cela, mais nous n’en sommes pas encore là. Ces technologies ne sont pas adaptées au froid de l’hiver en Saskatchewan.

Soyons honnêtes : la tarification du carbone n’est pas un incitatif au changement, mais plutôt une pénalité.

Il existe des programmes qui offrent des incitatifs pour modifier la façon dont nous séchons nos grains ou nous chauffons nos étables, mais ces incitatifs sont loin d’être suffisants pour permettre des changements massifs. Je pense que cela a été reconnu.

Soyons honnêtes. La tarification du carbone ne nous incite pas à changer nos façons de faire parce qu’il n’existe actuellement pas de technologie le permettant.

M. Jowett : Merci. C’est une idée très intéressante, et je pense que je laisserais à ceux qui rédigent ce projet de loi le soin de peaufiner cela.

Si nous avons la possibilité de stimuler l’innovation sur ces deux fronts, cela semble être une occasion — les solutions de rechange découlant de l’innovation, et l’innovation ne venant pas si elle n’est pas stimulée par quelque chose comme un signal au niveau des prix.

La sénatrice Simons : Merci beaucoup à tous.

Le sénateur Oh : Ma question s’adresse à tous les témoins.

Dans la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre, le carburant diesel et l’essence utilisée à des fins agricoles sont actuellement exemptés, et pourtant, vous êtes d’avis que le propane et le gaz naturel ne devraient pas être exemptés, alors qu’il s’agit de carburants plus propres que le diesel et l’essence.

Cela me semble incohérent, et je me demande si vous pourriez nous expliquer pourquoi nous devrions exempter des combustibles qui émettent une plus grande quantité de GES, et pourquoi nous refuserions d’exempter des combustibles qui émettent moins de GES.

M. Rivers : Si je devais concevoir le système à partir de zéro, je n’offrirais pas d’incitatifs. J’utiliserais les remboursements pour répondre aux préoccupations qui ont été soulevées au sujet de la compétitivité ou du manque d’options pour préserver l’intégrité des activités agricoles, tout en continuant d’offrir un incitatif à la réduction des gaz à effet de serre.

Je suis d’avis que toutes ces exemptions posent un problème, mais permettez-moi de soulever un autre point connexe. D’après ce que je comprends, le séchage des grains se fait à la fois à la ferme et en sous-traitance, de sorte qu’une exemption s’appliquant au propane et au gaz naturel utilisés à la ferme aura un effet sur la compétitivité entre le séchage des grains à la ferme et le séchage en sous-traitance. Cela créera des gagnants — les agriculteurs qui sèchent eux-mêmes leurs grains — et des perdants qui souffriront de cette politique, c’est‑à-dire ceux qui assurent le séchage en sous-traitance. Je pense que nous devons garder les yeux ouverts dans la conception de cette politique.

Le président : Monsieur Boxall, avez-vous un commentaire?

M. Boxall : À l’heure actuelle, il n’y a pas de solutions de rechange, et alors que vient le temps de sécher les grains — comme en 2019 —, nous sommes déjà aux prises avec un stress énorme et nous faisons face à d’autres fardeaux financiers qui accompagnent un automne difficile, un élément de plus venant s’ajouter.

Selon nos chiffres, la tarification du carbone coûte aux agriculteurs de la Saskatchewan 5,17 $ l’acre, dont 33 % pour le séchage des grains, soit 1,64 $. Selon les chiffres que nous compilons depuis 2019, nous payons encore une énorme taxe sur le carbone.

Je pense que l’exemption est nécessaire pour nous permettre de demeurer concurrentiels sur la scène mondiale.

M. Jowett : Le crédit d’impôt prévu dans le projet de loi C-8, je crois, a déjà permis d’indemniser les agriculteurs pour la redevance sur le carbone imposée sur ces carburants plus propres. Il faut donc comprendre qu’il y a déjà eu un certain allégement de cette façon, mais il s’agit toujours de carburants à forte intensité de carbone, qui ne bénéficient pas de passe-droit.

Le sénateur Oh : J’ai une autre question pour l’Union nationale des fermiers. L’Agriculture Carbon Alliance regroupe 15 organisations agricoles nationales qui représentent au total 190 000 entreprises agricoles canadiennes. Pouvez-vous me dire combien de membres compte actuellement l’Union nationale des fermiers?

M. Jowett : Comme je l’ai déjà mentionné, je n’ai pas ces chiffres sous la main, mais je peux vous les fournir.

Le sénateur Oh : Oui, veuillez nous revenir avec ces chiffres. Merci.

Le sénateur Woo : Merci aux témoins.

J’aimerais m’adresser tout d’abord à M. Rivers. Je comprends la logique du mécanisme de remboursement que vous proposez — qui est fondé sur la production — et qui n’est qu’une variante du système de remboursement actuel. Dans quelle mesure sera-t-il plus avantageux que le mécanisme qui existe déjà — les remboursements étant accordés aux fermes en utilisant la taille comme indicateur, ce qui n’est pas mauvais dans le contexte des exportations?

Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur les avantages supplémentaires que comporterait une mesure axée davantage sur la production?

M. Rivers : Voici une bonne occasion de clarifier les choses.

D’après ce que je comprends, le système actuel prévoit un remboursement en argent qui est fondé sur la taille de l’exploitation agricole. Il s’agit donc d’un crédit d’impôt remboursable, et chaque tranche — je ne suis pas certain — de 1 000 $ de ce montant est remboursé.

Toutes les fermes sont traitées de la même façon. Les agriculteurs qui sèchent leurs grains obtiennent un remboursement, et ceux qui ne le font pas obtiennent un remboursement. La façon de voir les choses, c’est que les fermes qui produisent le plus de carbone — celles qui paient le plus pour le prix du carbone — contribuent davantage à cette réserve d’argent qui sert à rembourser toutes les fermes également.

Une façon de revoir cette façon de faire, afin de préserver la compétitivité internationale — si c’est votre but — serait peut-être de réserver les fonds recueillis dans le cadre du séchage des grains pour les remettre aux producteurs, afin qu’ils demeurent concurrentiels à l’échelle internationale. Si nous retirons de l’argent d’une seule source dans les faits et que nous subventionnons des exploitations agricoles, par exemple, qui ne font même pas de commerce international, nous diluons les sommes totales disponibles.

Comme vous l’avez souligné plus tôt, ce n’est pas de l’argent qui provient de l’économie canadienne; c’est de l’argent qui passe d’un producteur à un autre. Mais si nous essayons de préserver la compétitivité des agriculteurs, une petite réforme sensée consisterait peut-être à fonder ces remboursements sur le type d’exploitation agricole. C’est ainsi que fonctionnent les remboursements au titre du carbone dans le secteur industriel. Il existe différents points de repère pour l’acier, le béton et les divers produits de ce secteur.

Le sénateur Woo : Merci. Il s’agit donc d’appliquer une mesure ciblée, sans supprimer l’incitatif de prix.

Monsieur Jowett, vous avez soulevé la question d’une disposition de temporisation, et votre réflexion à ce sujet ne semble pas très claire, étant donné que c’est votre propre organisation qui a proposé un remboursement, ce qui figurait dans le projet de loi C-8. S’il y avait à la fois une période temporaire d’exemption — concernant à la fois le gaz naturel et le propane — et un remboursement, cela n’équivaudrait-il pas à une double déduction, si je peux m’exprimer ainsi, pour les fermes?

M. Jowett : Oui, je suppose que vous avez raison. En fait, je ne suis pas certain de l’interaction qu’il y aurait entre les deux.

Le sénateur Woo : Si je suis la logique de votre argument, vous croyez aux signaux de prix. Vous croyez qu’il faut offrir des incitatifs aux agriculteurs et aux innovateurs pour qu’ils mettent au point de nouvelles technologies, et c’est en partie pourquoi il faut un prix et peut-être une disposition de temporisation. Préconiseriez-vous une disposition de temporisation pour l’utilisation de tous les carburants à la ferme, selon la même logique que celle que vous avez utilisée? Je parle de l’essence et du diesel.

M. Jowett : Les changements imminents importants au chapitre du climat représentent en quelque sorte une clause de temporisation en ce qui a trait à notre utilisation des combustibles fossiles en agriculture. À un moment donné, nous devrons trouver une solution.

Le sénateur Woo : Je comprends ce que vous dites, à savoir que nous devons nous éloigner des combustibles fossiles dans les exploitations agricoles en général. Dans la mesure où il y aura des exemptions, elles devraient être au mieux temporaires, et si elles s’appliquent au gaz naturel et au propane, elles pourraient aussi s’appliquer au diesel et à l’essence.

M. Jowett : Oui, mais il n’a pas été du tout question de cela à l’Union nationale des fermiers. Cela dépasse la portée du projet de loi actuel.

Le sénateur Woo : Merci.

Le sénateur Dalphond : Voici quelques précisions pour le deuxième témoin, M. Jowett. M. Glenn Wright — qui, je crois, était membre de l’Union nationale des fermiers — a comparu devant le Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire de la Chambre des communes en octobre 2022. Sauf erreur, il est question de la même présentation et de la même suggestion, au bout du compte, pour une sorte de période de transition. Je comprends aussi que vous ne saviez pas qu’après votre présentation — lors de l’étude article par article de ce projet de loi —, une disposition serait ajoutée prévoyant des exemptions de huit ans, cette disposition allant beaucoup plus loin que ce que vous aviez proposé parce qu’elle prévoit un prolongement de huit ans par suite d’une résolution des deux Chambres.

Ma question s’adresse à M. Rivers. Si nous mettons l’accent sur la compétitivité, quelle est la logique d’exempter le chauffage des étables et d’autres bâtiments des fermes qui servent à produire du lait, des œufs et des poulets — fermes qui font partie de systèmes de gestion de l’offre où la compétitivité ne pose pas de problème? Il n’est pas question de preneurs de prix, mais plutôt de fixeurs de prix. Du point de vue de la compétitivité, est-il logique d’exempter de la taxe ce chauffage sur les fermes?

M. Rivers : Il faudrait rappeler M. Giroux. Je ne sais pas quel pourcentage...

Le sénateur Dalphond : Je ne parle pas de pourcentage.

M. Rivers : Des producteurs en serres font aussi partie de ce groupe d’exploitants qui doivent chauffer des bâtiments, et qui sont aussi exposés aux aléas du commerce international. Il convient tout à fait de dire qu’une grande partie du chauffage des bâtiments permet de produire des extrants qui ne devraient pas être soumis aux pressions de la compétitivité internationale. Je n’ai pas les chiffres devant moi, mais je pense que ce raisonnement se tient tout à fait.

Le sénateur Dalphond : Je conclus de votre réponse que les dispositions de ce projet de loi sont peut-être trop générales, selon l’objectif recherché. Si l’objectif est de stimuler la compétitivité, alors ce texte va beaucoup plus loin.

M. Rivers : C’est cela. D’après ce que je comprends, ce projet de loi découle de préoccupations relatives au séchage des grains et il a peut-être été élargi au-delà de cet objectif initial. Sur un plan économique, il y aurait lieu de s’inquiéter des secteurs incapables de répercuter leurs coûts sur les consommateurs. Les céréaliculteurs qui subissent les prix mondiaux du maïs doivent vendre à des prix tels qu’ils doivent encaisser la différence d’une façon ou d’une autre. Ce n’est pas le cas pour les produits soumis à la gestion de l’offre.

Le sénateur Dalphond : Si je comprends bien, vous semblez dire qu’il existe peut-être des rabais spécifiquement conçus pour le séchage des grains — si ce sont les options que nous privilégions pour protéger la compétitivité —, mais ce n’est pas ce que nous essayons de faire ici. Nous sommes aux prises avec les mêmes travers que les actuels systèmes du projet de loi C-8. Les abattements fiscaux sont accordés à ceux qui ne chauffent même pas au propane, et ce projet de loi propose que ces abattements profitent à ceux qui n’en ont en fait pas besoin.

M. Rivers : Je pense que c’est cela.

Le sénateur Dalphond : Merci.

Le président : J’ai une question pour M. Boxall. À votre avis, monsieur Boxall, puisque vous êtes le seul agriculteur sur nos trois témoins, les agriculteurs canadiens pourraient-ils être concurrentiels à l’échelle internationale si le projet de loi n’est pas adopté? Deuxièmement, par rapport à ce dont nous parlons, pensez-vous que les remboursements de taxes pourraient permettre aux agriculteurs d’être concurrentiels?

M. Boxall : Nous sommes effectivement désavantagés. On parle beaucoup aujourd’hui de cet abattement, et ce projet de loi porte sur le coût du chauffage des granges et des séchoirs à grains. Nous n’avons pas parlé des 40 millions de dollars que les producteurs de la Saskatchewan versent en taxe sur le carbone pour le transport de leurs produits par chemin de fer — un coût qui leur est répercuté —, et pourtant, les compagnies de chemin de fer ne voient aucun intérêt à apporter des changements parce qu’elles aussi doivent absorber ces coûts.

On peut bien parler de remboursements des taxes et de tout le reste, mais au final, nous nous trouvons à payer des dizaines de milliers de dollars. Ce n’est pas équitable. Il n’existe aucune solution que nous pourrions mettre en œuvre à l’échelle qui s’impose, ce qui nous place dans une situation tout à fait désavantageuse sur la scène mondiale.

Le président : Merci, monsieur Boxall. Nous allons passer au deuxième tour.

La sénatrice Simons : Monsieur Boxall, vous avez fait une excellente remarque dans votre déclaration liminaire à propos des agriculteurs qui n’ont tiré aucun gain, ni sur le plan économique ni sur celui des relations publiques, pour tout ce qu’ils ont fait au titre de la séquestration du carbone en adoptant les techniques de culture sans labour, surtout dans les Prairies. Vous savez peut-être que notre comité est au beau milieu d’une vaste étude sur la santé des sols qui consiste à examiner les différentes façons dont l’agriculture contribue à la séquestration du carbone. Une fois terminée l’étude de ce projet de loi, nous entendrons des témoins qui nous parleront de la création des marchés du carbone.

Je diverge du propos de cette réunion pour vous demander une chose, ainsi qu’à M. Rivers. Si vous pouviez obtenir des crédits carbone au titre des techniques agricoles régénératrices, pensez-vous que nous pourrions mettre en place un système selon lequel vous pourriez utiliser ces crédits pour compenser une partie de la taxe sur le carbone que vous devez payer?

M. Boxall : Je pense que ce serait possible. C’est toujours une question d’argent. Combien les organismes de réglementation perçoivent-ils dans tout cela? C’est comme pour tout programme de remboursement de taxe. Combien prélève-t-on sur ce que rapporte la taxe carbone au titre du financement du programme, en dehors de ce qui est versé aux bénéficiaires désignés afin de les inciter à apporter des changements? Voilà ma crainte. Combien d’argent est-il englouti dans le processus? Je dirais que, le temps aidant, si un système de tarification du carbone était mis en place, ou que nous commercions dans ces conditions, nous pourrions compenser une partie de ce que nous payons.

La sénatrice Simons : Il me semble qu’à long terme, ce serait là la façon logique et holistique d’aborder la question afin que — dans le cycle du carbone — les agriculteurs obtiennent des crédits pour leur travail, en tant qu’intendants de l’environnement, pour compenser la taxe carbone sur leur production. Monsieur Rivers, avez-vous réfléchi à la question?

M. Rivers : Vaste sujet que celui-là. À mon avis, les marchés de compensation sont excellents en théorie, mais très difficiles à mettre en pratique.

La sénatrice Simons : Vous ne voulez pas que ces crédits se transigent comme des indulgences au Moyen Âge.

M. Rivers : Nous avons constaté beaucoup d’échecs dans la mise en œuvre, et je crois préférable que le gouvernement appuie directement les agriculteurs par le biais de pratiques novatrices de gestion des sols ou de gestion du carbone, et qu’il ne les lie pas à un marché de compensation qui risque de diluer notre système de tarification du carbone industriel.

Le sénateur Woo : Monsieur Rivers, vous avez remarqué, comme nous tous, qu’une des questions centrales de notre réflexion sur ce projet de loi touche à la frontière technologique. Sommes-nous loin de cette frontière et comment pourrait-on la repousser afin que les agriculteurs aient le temps de s’adapter? Je sais que vous n’êtes pas expert en machinerie agricole et en séchage des grains, mais vous travaillez en partie sur les changements climatiques, et vous vous êtes penché sur d’autres secteurs qui, je suppose, cherchent à régler le même problème et dont certains évoluent dans des conditions où la décarbonation est difficile. Pouvez-vous nous parler de la façon dont évolue cette frontière technologique et de ce à quoi nous pouvons nous attendre en ce qui concerne le séchage des grains et le chauffage des bâtiments agricoles?

M. Rivers : Je m’en remettrai à M. Boxall pour les détails technologiques.

Je dirai d’abord que le Canada a promis d’atteindre l’objectif zéro émission en une génération, ce qui revient à dire que toute source d’émissions devra être éliminée dans les 25 prochaines années. La promesse ne laisse place à aucune émission résiduelle importante. Nous devons trouver des moyens de tout décarboner.

Nous avons été témoins d’énormes progrès technologiques en matière d’atténuation des gaz à effet de serre. Nous avons constaté ces progrès dans l’économie en général et dans nos vies au quotidien : les voitures électriques sont plus abordables et elles s’améliorent rapidement. Nous avons vu le coût des énergies renouvelables, comme l’énergie solaire et l’énergie éolienne, diminuer de 90 % au cours de la dernière décennie. Nous l’avons vu dans des secteurs que nous pensions essentiellement impossibles à décarboner, comme la cimenterie et l’aciérie. Dans ces secteurs, des solutions ont été proposées et mises en œuvre, et des projets de démonstration, qui permettent maintenant une production à faibles émissions de carbone, ont été entrepris. Nous avons vu des propositions de captage et de stockage du carbone et de mise en valeur des hydrocarbures en vue de permettre à ce secteur de produire du pétrole et du gaz présentant une empreinte carbone beaucoup plus faible. À l’échelle de l’économie en général, tandis que nous incitons maintenant ces secteurs à trouver des façons de réduire leurs émissions, nous constatons que les innovateurs et les acteurs de ces secteurs commencent à réagir.

Encore une fois, je ne suis pas expert en séchage des grains, mais je pense qu’une solution consisterait à produire de la chaleur avec peu d’émission de carbone. De nombreux procédés industriels dépendent de systèmes de production de chaleur à faible émission de carbone. Il existe de plus en plus de solutions de rechange à cet égard, qu’il s’agisse de biocarburants, de technologies naissantes comme l’hydrogène propre ou d’utilisations novatrices de l’électricité.

Comme l’a dit M. Boxall, ce ne sont pas des solutions que nous pourrons mettre en œuvre demain, mais il y a des technologies qui évoluent rapidement, et qui iront encore plus vite moyennant une incitation plus forte pour l’adoption.

Le sénateur Woo : Merci.

Le sénateur Dalphond : Merci. Ma question s’adresse à M. Boxall. J’aimerais en savoir davantage sur la situation en Saskatchewan. Le gouvernement de l’Ontario, par exemple, parraine des projets faisant appel à de nouvelles technologies de séchage des grains qui permettent de réduire la consommation d’énergie de 30 %. Le gouvernement de la Saskatchewan offre-t-il des programmes à cet égard?

M. Boxall : Pas que je sache.

Le sénateur Dalphond : Je crois savoir que le gouvernement fédéral a également lancé de nombreux programmes pour rendre l’agriculture plus verte. Savez-vous combien de vos membres auraient profité de ce genre de programmes? On nous dit que la demande pour ces programmes a nettement dépassé l’offre et que beaucoup sont refusés en conséquence. Vos associations se préoccupent-elles aussi de cette question?

M. Boxall : Je trouve fantastiques tous les programmes concernant les technologies propres. Ce sont tous de bons programmes. Le problème, comme je l’ai dit tout à l’heure, c’est l’échelle. Les inscriptions interviennent quelques mois après la mise en place des programmes, et la demande est tout simplement supérieure à l’offre.

Je connais une entreprise en Saskatchewan qui, l’an dernier, a reçu des fonds fédéraux pour un système de séchage plus propre. Mais cela ne suffit pas vraiment, n’est-ce pas? Je trouve effectivement que les programmes gouvernementaux de technologies agricoles propres sont très bien, mais ils sont trop limités.

Le sénateur Dalphond : Si vous deviez proposer quelque chose au gouvernement, recommanderiez-vous un élargissement substantiel de ce genre de programmes?

M. Boxall : Bien sûr. Les agriculteurs sont des innovateurs et ils l’ont toujours été. Nous apporterons des changements quand ceux-ci contribueront à la durabilité de nos exploitations, tant sur le plan environnemental qu’économique.

Le sénateur Dalphond : Je sais, car je viens de la campagne, du milieu agricole. J’ai assisté à cette évolution autour de moi sur les quelque 60 dernières années. Ne pensez-vous pas que ce serait une meilleure option que de simplement obtenir un abattement fiscal pour le moment?

M. Boxall : C’est possible, mais est-ce que le financement destiné à ces programmes visant à apporter des changements d’une telle ampleur est disponible?

Le sénateur Dalphond : Nous devrions peut-être puiser dans les redevances sur le carbone pour financer ce type d’innovation, plutôt que d’essayer de la redistribuer à tout le monde.

M. Boxall : Bien sûr. Cela pourrait fonctionner. Mais si nous voulons nous débarrasser des combustibles fossiles, qu’est-ce qui fera fonctionner mon tracteur ou ma moissonneuse-batteuse 18 heures par jour au printemps? Qu’est-ce qui alimentera la locomotive pour acheminer jusqu’au port les produits cultivés en Saskatchewan, au beau milieu du pays?

Nous devons avoir des attentes réalistes. Des améliorations peuvent être apportées sur tous les fronts, mais nous devons être réalistes quant à ces attentes. Parfois, je me demande si nous n’avons pas un peu raté la cible.

Le sénateur Dalphond : Oui, mais je comprends que les moissonneuses-batteuses et les tracteurs soient visés par l’abattement fiscal.

M. Boxall : Les carburants agricoles sont effectivement exemptés, mais M. Rivers parle d’atteindre la carboneutralité. Quels combustibles vont alimenter mes installations à la ferme? Il existe peut-être des façons novatrices d’alimenter mon séchoir à grains ou de chauffer mon atelier ou ma grange. Mais que dire de mes équipements? Nous n’en sommes pas encore là, et nous sommes loin d’y être.

Le sénateur Dalphond : Merci, monsieur Boxall.

La sénatrice Petitclerc : Je remercie nos témoins d’aujourd’hui. Je remercie mes collègues de leurs excellentes questions. Nous avons abordé certains aspects techniques bien précis. Je vais, cependant, inviter M. Rivers à revenir un peu en arrière.

Vous avez parlé d’échéance et d’urgence. Je lisais un document de l’Institut Fraser datant de 2019, je crois. S’agissant de l’établissement de conditions devant favoriser et encourager la mobilisation pour changer non seulement la technologie, mais aussi le comportement des utilisateurs — pour les amener à vouloir changer —, je crois avoir lu quelque part que les abattements fiscaux ne sont peut-être pas la meilleure façon d’y parvenir. Il est question de favoriser cette transition qui n’a peut-être pas encore été entamée, mais que nous voulons réaliser.

Ai-je raison? Ai-je bien lu?

M. Rivers : Il faudrait peut-être que vous me précisiez la question. Je n’ai pas lu ce rapport.

La sénatrice Petitclerc : Je raisonne à voix haute.

Quelle est la meilleure approche pour s’assurer que tout le monde participe à la transition vers de meilleures solutions de rechange? Un abattement fiscal? Je crois avoir lu quelque part que cette solution n’est peut-être pas aussi satisfaisante que d’autres approches.

M. Rivers : C’est une bonne question. Tout d’abord, nous n’avons jamais fait cela auparavant, nous n’avons cherché à réduire les émissions à zéro ou à atteindre la carboneutralité. C’est une transition plus rapide et plus ambitieuse que toutes celles que nous avons entreprises auparavant. Il serait naïf de présumer que nous savons ce dont nous avons besoin au départ. Nous apprenons au fur et à mesure.

Ce que nous savons, c’est que si nous voulons atteindre ces objectifs, il nous faudra apporter des changements de très grande envergure dans chaque système. Je dirais que des changements technologiques et comportementaux s’imposent. C’est un défi auquel tout le monde doit faire face.

Pour ce qui est de l’exemption fiscale, j’ai l’impression que vous avez raison. Quand tout le monde ne peut pas se prévaloir de programmes destinés à encourager la réduction des émissions, les émissions augmentent et l’envie de les réduire diminue. C’est ce que nous disent les études économiques que je connais. Cependant, il est également clair qu’il ne s’agit pas d’une question purement économique. Amener les gens à accepter politiquement ce défi de la décarbonation est peut-être encore plus fondamental que la nécessité de modifier nos comportements face aux changements technologiques. C’est une question d’équilibre, et nous n’avons pas encore la réponse.

Encore une fois, je dirais que cette politique sur les gaz à effet de serre milite fortement en faveur d’une réduction des émissions. Or, le non-accès aux programmes ira à l’encontre de l’objectif visé, mais beaucoup d’éléments devront être pris en considération au fur et à mesure que nous progressons en tant que société face à ce défi.

La sénatrice Petitclerc : Merci. C’est apprécié.

Le sénateur Oh : J’aimerais revenir sur la question de la sénatrice Petitclerc et parler d’aspects plus généraux.

Nous travaillons très fort pour sauver le monde. Je rentre tout juste du Vietnam où j’ai assisté à un forum sur le thème « zéro émission nette ». Qu’en est-il de l’autre côté du monde? Nous travaillons très fort, et les changements climatiques coûtent très cher sur le plan économique. Jusqu’où devons-nous aller? Les autres pays du sud ont des enjeux économiques plus importants. Font-ils ce que nous faisons? Sommes-nous tous en train d’intervenir pour sauver la planète des changements climatiques?

M. Rivers : C’est une bonne question.

C’est un problème difficile à régler parce que tous les pays doivent collaborer, ce qui n’est pas gagné. Pour aboutir, il faut que tout le monde réduise ses émissions. Comme nous le savons — nous l’avons souvent entendu dans les médias —, si le Canada réduit ses émissions à zéro et que personne d’autre n’agit, rien ne changera.

Toutefois, si des pays comme le Canada abandonnent et ne réduisent pas leurs émissions, il est certain que le reste du monde ne fera rien. C’est une question de confiance réciproque. Nous devons tous mettre la main à la pâte. Si certains pays ne font rien, la confiance disparaît.

Si le Canada n’est pas un précurseur, il ne traîne pas non plus de l’arrière. Nous essayons de déterminer comment réduire les émissions. D’autres pays sont nettement en avance sur nous et il est certain que certains sont derrière nous. Le défi consiste à maintenir l’élan international en l’absence d’un accord international contraignant que nous risquons de ne jamais atteindre. Pour moi, cela suppose des efforts authentiques destinés à réduire les émissions, et sans de tels efforts authentiques, nous annihilerons nos chances de parvenir à créer un élan international à cet égard.

Le sénateur Oh : Merci.

Le président : Monsieur Boxall, j’aimerais revenir sur la question et sur les remarques du sénateur Dalphond. Il a parlé de l’idée d’améliorer les programmes existant ou d’ajouter des programmes concernant le développement des technologies propres et d’autres solutions de rechange.

Vous avez présenté une demande et vous avez probablement eu accès à certains des programmes par le passé. Quand allez-vous recevoir votre argent? Combien de temps faut-il pour obtenir son argent?

M. Boxall : En fait, je n’ai jamais présenté de demande. Nous avons acheté un autre séchoir un an avant la mise en œuvre des programmes, de sorte que nous n’avons pas pu demander à en bénéficier

J’ai toutefois entendu dire que cela prend des mois et des mois. J’ai aussi entendu dire qu’il faut des mois et des mois pour pouvoir communiquer avec les fonctionnaires sensés nous aider à remplir ce genre de demande complexe. Cela prend donc un certain temps.

Nous parlons effectivement d’une exemption pour le secteur agricole, et le débat se retrouve en partie sur la scène mondiale. Les agriculteurs sont des innovateurs, pour reprendre les propos de M. Rivers. Nous ne cesserons jamais d’innover, que nous soyons taxés ou que nous devions acquitter une redevance sur le carbone. La tarification carbone nous dissuade d’investir. Voilà une dimension du problème que nous ne devons pas perdre de vue.

Le président : C’était ma prochaine question. Le projet de loi C-234 prévoit des investissements ou des capitaux pour les agriculteurs. Sinon, est-ce que beaucoup d’agriculteurs ont les moyens financiers d’assumer les coûts d’immobilisation d’équipements plus propres et de mise en place de telles techniques agricoles?

M. Boxall : Nous innoverons toujours; nous l’avons toujours fait. Depuis des générations, les agriculteurs innovent, mais les 5 $ que nous payons en taxe sur le carbone nous empêchent d’investir davantage dans la technologie.

Le président : Merci.

Le sénateur Dalphond : Pour faire suite aux questions de notre président et à la réponse que vous lui avez donnée, vous avez dit avoir acheté un nouveau séchoir l’an dernier, ce qui, si j’ai bien compris, représente un investissement important. Cela vous a-t-il permis de réduire votre facture d’énergie?

M. Boxall : C’est exact. Nous avions un vieux séchoir que mon père avait acheté en 1974, et il était temps de le moderniser pour le rendre plus efficace. Nous l’avons fait il y a trois ans; je crois que c’est le troisième automne que nous l’utilisons.

Je voulais le chauffer au gaz naturel, mais ce combustible naturel qui aurait alimenté mon séchoir à grains m’aurait coûté 580 000 $ rien que pour les branchements. Nous fonctionnons maintenant au propane, car nous n’avions pas eu le choix. Pour moi, une immobilisation de 580 000 $ aurait représenté 35 années d’alimentation au propane.

Et puis, il y a un autre élément dissuasif qui nous empêche de parvenir à la meilleure solution ou à la solution la plus écologique pour faire fonctionner le séchoir. Je parle du coût d’accès à cette source d’énergie sur le plan des infrastructures. La question qui entre en ligne de compte dans n’importe quelle province est celle du coût d’obtention de ce qu’il y a de mieux...

Le sénateur Dalphond : Vous parlez de la connexion au fournisseur de gaz ou à la ligne de transmission d’électricité?

M. Boxall : Pour acheminer le gaz naturel jusqu’à ma ferme et ainsi chauffer mon séchoir à grains, j’aurais dû débourser 580 000 $ rien que pour tirer la conduite. Nous avons donc opté pour le propane. Nous n’avions pas les moyens d’acheter du gaz naturel. C’est aussi une question d’économie. Nous avons effectivement acheté un séchoir plus efficace qui nous coûte peu à faire fonctionner. Il est efficace, mais j’aurais préféré le faire tourner au gaz naturel qui est, pour le moment, la meilleure solution. Cependant, je n’ai pas les moyens d’y recourir.

Le sénateur Dalphond : La province de la Saskatchewan offre-t-elle des programmes pour aider les agriculteurs à se brancher aux services publics existants?

M. Boxall : Pas à ce que je sache. Il n’y en avait pas quand j’ai soumis ma demande.

Le sénateur Dalphond : Vous avez présenté une demande et on vous a dit qu’il n’y avait pas de programmes?

M. Boxall : J’ai présenté une demande pour faire tirer la conduite de gaz jusqu’à ma ferme, et l’on m’a présenté un devis de 580 000 $.

Le sénateur Dalphond : Merci beaucoup de cette information.

Dois-je comprendre que le nouveau séchoir vous permet d’économiser sur les coûts d’exploitation par rapport à ce que vous payiez avant?

M. Boxall : Absolument.

Le sénateur Dalphond : De beaucoup?

M. Boxall : Sensiblement.

Le sénateur Dalphond : Vous économiserez jusqu’à 30 %?

M. Boxall : Je n’irai pas jusque-là. Je fais sécher plus de boisseaux en moins de temps, mais cet été, pour remplir mes réservoirs de propane en vue du séchage, j’ai dû payer la taxe carbone qui représentait 17 % de la facture. Il y a, certes, le prix du propane, mais 17 %, c’est seulement sur la taxe. Ensuite, il faut ajouter la TPS.

Le sénateur Dalphond : Merci.

Le président : Monsieur Boxall, pourriez-vous nous dire combien vous a coûté ce séchoir?

M. Boxall : Bien sûr. Le séchoir lui-même? c’est-à-dire sans compter son installation? m’a coûté 200 000 $. Tout compris, le système complet d’approvisionnement et de distribution des grains a coûté un demi-million de dollars.

Le président : Merci beaucoup.

Le sénateur Woo : Monsieur Boxall, vous avez soulevé un point très important au sujet des infrastructures nécessaires pour acheminer des combustibles à faible teneur en carbone jusqu’aux exploitations agricoles. J’espère que nous en avons pris bonne note dans notre rapport.

J’aimerais vous poser une question au sujet de l’utilisation de séchoirs des années 1970 dans les exploitations agricoles. Est-ce que beaucoup d’autres fermes utilisent aussi — comme vous l’avez fait jusqu’à il y a quelques années — des séchoirs à faible rendement datant des années 1970?

M. Boxall : On n’en trouve plus beaucoup, selon moi. Nous avons plutôt constaté que le changement de type de séchoir à grains est une des conséquences des changements climatiques. Nous utilisons l’ancien séchoir au besoin, sinon les choses ont changé.

Compte tenu de la conception des nouveaux séchoirs à grains, de leur efficacité et du fait qu’ils peuvent remplacer une moissonneuse-batteuse — notamment parce qu’on peut commencer à récolter plus tôt —, la plupart des céréaliculteurs se sont adaptés et ont investi dans ce genre d’équipements. Cependant, c’est un gros investissement et il faut une génération entière pour économiser l’argent nécessaire. Voilà le raisonnement.

Le sénateur Woo : Savez-vous où nous pourrions obtenir des données sur l’âge des séchoirs en exploitation dans les fermes et sur leur modernisation?

M. Boxall : Je l’ignore.

Le sénateur Woo : Votre association dispose-t-elle de ce genre d’information?

M. Boxall : Pas actuellement. Je suppose que nous pourrions sonder nos membres et voir les types de séchoirs à grains dont ils disposent, mais nous ne faisons actuellement aucun suivi à ce titre. Je ne sais pas si quelqu’un d’autre le fait.

Le sénateur Woo : Merci.

Le président : Je vois qu’il n’y a pas d’autres questions. Je tiens à remercier nos témoins d’aujourd’hui, en personne et en ligne. Nous vous sommes très reconnaissants de l’aide que vous avez apportée au comité dans la poursuite de son étude du projet de loi. Merci.

Je remercie les membres du comité de leur participation active et de leurs questions judicieuses. Je vais aussi prendre un moment pour remercier toutes celles et tous ceux qui appuient notre travail, c’est-à-dire les interprètes et les membre de l’équipe de transcription des débats, le préposé de la salle de comité, les techniciens des services multimédias, les membres de l’équipe de radiodiffusion, du centre d’enregistrement et de la DSI, ainsi que notre page. Nous apprécions vraiment tout ce que vous faites pour nous.

Notre prochaine réunion, chers collègues, est fixée au mardi 3 octobre, à 18 h 30, et nous continuerons alors d’entendre des témoins au sujet du projet de loi C-234, Loi modifiant la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre. Nous pourrions alors passer à l’étude article par article. Nous ne pouvons pas le confirmer tout de suite, mais c’est dans le domaine du possible. Les membres du comité qui ont l’intention de proposer des amendements sont invités à consulter le Bureau du légiste au Sénat pour s’assurer que les amendements se présentent sous la forme appropriée et dans les deux langues officielles.

Il serait également très utile que les sénateurs fassent parvenir leurs amendements à l’avance à la greffière du comité. Cela lui permettra d’organiser et de distribuer des copies pour la réunion, mais veuillez noter que chaque amendement sera traité de façon confidentielle et ne sera pas distribué avant la réunion, à moins que vous ne le souhaitiez.

Après l’étude article par article, le comité voudra peut-être annexer ses observations au rapport. Il est recommandé que les membres fournissent un texte préparé à cet égard au titre des observations provisoires. Je rappelle que ce texte devra être bref et être rédigé dans les deux langues officielles. Notre greffière pourra vous aider à faire traduire le document.

Y a-t-il d’autres questions, chers collègues?

Le sénateur Dalphond : J’ai une question sur les procédures prévues. Cela veut-il dire que nous n’allons pas attendre que le comité des finances nationales nous éclaire sur le projet de loi?

Le président : Si je ne m’abuse, le comité des finances nationales a annoncé qu’il ne ferait pas de commentaires sur le projet de loi.

Le sénateur Dalphond : Le comité a-t-il pris cette décision?

Le président : Oui, la décision a été prise.

Le sénateur Dalphond : Je l’ignorais.

Le président : C’est officiel, madame la greffière? Moi, je le tiens du président.

Le sénateur Dalphond : Une motion indiquant la conduite à tenir a-t-elle été adoptée en ce sens? Je ne sais pas si le président peut renverser une motion de la Chambre haute.

Le président : Je ne peux pas me prononcer là-dessus.

Le sénateur Dalphond : Nous pourrions vérifier auprès du Sénat.

Le sénateur Woo : Vous lui avez demandé son avis et la chambre aurait refusé de vous répondre?

Le président : Oui, il faudrait poser la question au Sénat.

Le sénateur Woo : Je pense qu’il est important de le savoir avant de passer à l’étude article par article.

Le sénateur Dalphond : Je crois comprendre que nous allons poursuivre sur notre lancée en attendant de disposer de toute l’information voulue, ce qui s’entend des amendements qui pourraient s’imposer après le dépôt du rapport du comité des finances nationales.

Le président : La greffière signale que les deux rapports sont destinés à la chambre, et que l’autre rapport ne nous est pas adressé. Nous pourrons parler de notre rapport, mais l’autre est destiné au Sénat. C’est la règle.

Le sénateur Dalphond : Monsieur le président, je comprends qu’on puisse interpréter les choses ainsi, mais la logique serait d’attendre le rapport du comité des finances nationales pour proposer des amendements lors de l’étude article par article, amendements qui pourraient refléter les recommandations du comité des finances nationales.

Le président : Ces autres amendements pourront également être apportés au Sénat, quand le rapport du comité des finances nationales y sera présenté.

Le sénateur Woo : Une autre option serait d’inviter le président du comité des finances nationales à nous dire ce que son comité a entendu au sujet de ce projet de loi afin que nous puissions en tenir compte dans nos délibérations.

Le président : C’est une option. Nous pourrions envisager de lui demander de venir la semaine prochaine. Nous en tiendrons compte, et le comité de direction se penchera également sur la question. Merci.

(La séance est levée.)

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