LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES PEUPLES AUTOCHTONES
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le mercredi 8 mars 2023
Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones se réunit aujourd’hui, à 18 h 45 (HE), avec vidéoconférence, afin de discuter de la réponse du gouvernement au septième rapport (provisoire) du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones intitulé C’est assez! Finissons-en avec la discrimination quant à l’inscription au registre des Indiens, déposé auprès du greffier du Sénat le 27 juin 2022. Le comité examinera aussi à huis clos les responsabilités constitutionnelles, politiques et juridiques et les obligations découlant des traités du gouvernement fédéral envers les Premières Nations, les Inuits et les Métis et tout autre sujet concernant les peuples autochtones.
Le sénateur Brian Francis (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Honorables sénateurs, permettez-moi d’abord de reconnaître que la terre sur laquelle nous nous réunissons se trouve sur le territoire traditionnel, ancestral et non cédé de la Première Nation algonquine anishinabe. Je suis le sénateur mi’kmaq Brian Francis, d’Epekwitk, également connu sous le nom d’Île-du-Prince-Édouard, et je suis le président du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones.
Je demande maintenant aux membres du comité présents de se présenter en indiquant leur nom et leur province ou territoire.
La sénatrice LaBoucane-Benson : Patti LaBoucane-Benson, du territoire visé par le Traité no 6, de l’Alberta.
Le sénateur Arnot : David Arnot, de la Saskatchewan, la meilleure région du territoire visé par le Traité no 6.
La sénatrice Boniface : Gwen Boniface, de l’Ontario.
La sénatrice Greenwood : Margo Greenwood, de la Colombie-Britannique, la meilleure région du territoire visé par le Traité no 6.
Le président : Merci, sénateurs. Aujourd’hui, à l’occasion de la Journée internationale des femmes, je tiens à célébrer les femmes extraordinaires qui travaillent au Sénat. Je tiens aussi à magnifier toutes les femmes autochtones de l’île de la Tortue.
Aujourd’hui, nous poursuivons notre discussion sur la réponse du gouvernement reçue le 23 février au septième rapport du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones intitulé C’est assez! Finissons-en avec la discrimination quant à l’inscription au registre des Indiens, publié en juin 2022.
Sur ce, je vais présenter les témoins. De Services aux Autochtones Canada, nous accueillons Mme Lori Doran, directrice générale, et M. Stuart Hooft, directeur de la réforme de l’inscription. Merci de votre présence aujourd’hui. Je crois savoir que vous aimeriez faire quelques remarques préliminaires avant de commencer.
La parole est à vous.
Lori Doran, directrice générale, Services aux Autochtones Canada : Merci. Je n’ai pas de déclaration liminaire officielle, mais je tiens à faire quelques brèves observations afin de donner suite à vos remarques liminaires, monsieur le président, pour reconnaître qu’il s’agit de la Journée internationale des femmes et pour souligner expressément le leadership, la persévérance et le dévouement de nombreuses femmes qui ont travaillé sans relâche pour remédier aux inégalités — à savoir les inégalités fondées sur le sexe — dans la Loi sur les Indiens, et qui ont donc rétabli les droits des femmes et de leurs descendants. Bon nombre de ces femmes figurent dans la réponse du gouvernement et certaines ont comparu devant ce comité, dont Mme Sharon McIvor, pas plus tard qu’hier.
Je tiens aussi à remercier le comité de son travail sur le rapport et de nous avoir invités aujourd’hui à en parler davantage. Nous sommes heureux d’être ici pour répondre à toutes vos questions.
Le président : Merci. Monsieur Hooft, voulez-vous ajouter quelque chose avant de commencer?
Stuart Hooft, directeur de la réforme de l’inscription, Services aux Autochtones Canada : Je crois que Mme Doran a tout dit.
Le président : Merci. Je rappelle à tous ceux qui sont présents dans la salle de garder les échanges brefs. Je commencerai à poser des questions à Mme Doran et à M. Hooft.
Comme vous le savez, on s’inquiète du fait que les Premières Nations ne puissent obtenir, renouveler et remplacer leurs cartes de statut à cause de problèmes de traitement. En raison de ces retards, les gens sont incapables, entre autres, d’accéder aux droits et aux avantages auxquels ils ont légalement droit, ce qui est pour le moins inquiétant. Dans la réponse du gouvernement, on indique qu’environ 16 000 demandes sont en attente au 31 décembre 2022. Quelles mesures le ministère a-t-il prises depuis cette date pour remédier à cette situation et quand compte-t-il mettre fin au processus d’élimination de l’arriéré? En outre, quelles mesures le ministère prend-il maintenant pour éviter d’autres arriérés?
Mme Doran : D’abord, je pense qu’il est important de mentionner la différence entre une demande d’inscription aux termes de la Loi sur les Indiens et une demande de carte de statut. La carte de statut est délivrée après l’inscription d’une personne aux termes de la loi. Les cartes de statut sont généralement traitées dans un délai de 8 à 12 semaines, lorsque la demande reçue est complète. Il n’y a pas d’inventaire ou d’arriéré actuellement en ce qui concerne les cartes de statut.
En ce qui concerne l’inscription aux termes de la loi, il faut suivre un processus. Nous sommes conscients qu’il peut s’agir d’un processus pénible et compliqué pour certains, et plus compliqué pour certains demandeurs que pour d’autres. Cela s’explique en partie parce qu’il faut fournir des preuves d’identité et de liens ancestraux.
En reconnaissance de cela, nous prenons des mesures pour faciliter le plus possible le processus. Nous y travaillons depuis quelques années et continuons d’investir afin d’améliorer l’efficacité du traitement. Certains de ces gains d’efficience sont indiqués dans la réponse du gouvernement, et je vais profiter de l’occasion pour en mentionner quelques-uns.
Cela commence par la communication. Il est important de communiquer de façon claire et précise aux demandeurs potentiels les exigences, le processus et la façon de le suivre. Nous nous sommes employés à regrouper l’information à cet égard dans un format consolidé plus facile à utiliser et convivial. Nous avons effectué des essais de l’expérience des utilisateurs avec des demandeurs afin qu’ils nous disent directement ce qu’ils trouveraient le plus utile à cet égard. Nous intégrons activement ce que nous avons entendu de ces essais de l’expérience des utilisateurs.
Le deuxième aspect de la communication, bien sûr, est de veiller à joindre les personnes qui ont le droit de s’inscrire et qui l’ignorent peut-être. C’est ce que nous cherchons à faire. Nous utilisons des canaux différents, parce que nous savons que les personnes que nous voulons atteindre ne sont peut-être pas des abonnés réguliers aux plateformes et canaux normaux. Nous travaillons avec des organismes de services à l’enfance et à la famille, des organisations de femmes et d’autres partenaires pour diffuser le message et offrir, dans ces espaces, des renseignements sur la façon de présenter une demande.
En ce qui concerne le processus de demande en soi, nous cherchons activement à délaisser le processus de demande sur papier au profit d’un processus de demande en ligne plus moderne et numérique. C’est vraiment le point de mire de nos efforts à ce jour : non seulement cela facilitera le processus d’application et accélérera le traitement, mais cela offrira une meilleure expérience pour le client. Nous savons que les demandes numériques ont un taux d’erreur plus faible. Nous sommes plus susceptibles de recevoir des demandes complètes et de les traiter en temps opportun.
Nous avons actuellement une demande en ligne en direct pour la carte de statut, ce qui, comme je l’ai mentionné précédemment, est le processus de demande le plus simple. Nous cherchons également à créer une demande en ligne complète pour le processus d’inscription aux termes de la loi. Dans un avenir assez rapproché, si tout va bien, cette technologie sera disponible à n’importe qui n’importe où et fournira un processus et une expérience auxquels la plupart des citoyens s’attendent actuellement des gouvernements dans les services auxquels ils ont accès.
Je cède la parole à M. Hooft, qui parlera de l’inventaire et des statistiques sur le traitement.
M. Hooft : Merci. Étant donné que la première partie de la question portait sur la carte de statut, je présenterai quelques statistiques sur le traitement pour l’année civile 2022.
Au cours de cette période, nous avons traité 82 000 demandes, ce qui a donné lieu à l’émission de 70 000 cartes, 70 761 plus précisément. Ce sont les statistiques pour la carte de statut. Dans la réponse du gouvernement, on indique qu’il y avait un inventaire de 16 000 demandes d’inscription dans la file d’attente au 31 décembre. En date d’aujourd’hui, ce nombre a baissé à 13 450.
Au cours de la dernière année, nous avons reçu 34 152 demandes, et nous en avons traité 35 481, ce qui nous a permis d’inscrire 29 821 personnes. Il s’agit de l’optique globale du côté de l’inscription. À l’échelle nationale, environ 50 % de tous les demandeurs qui présentent leur demande en personne à leur bureau régional sont inscrits dans un délai d’environ six semaines.
L’étude du comité portait en partie sur le projet de loi S-3, et étant donné l’importance du traitement de ces demandes en temps opportun, nous avons mis en place des unités spécialisées à cet égard. Je voudrais vous présenter ces statistiques en date du 3 novembre 2022. Depuis l’entrée en vigueur de la loi, le 22 décembre 2017, nous avons reçu 58 224 demandes. Nous en avons traité 52 556 et avons inscrit 39 745 demandeurs. Nous avons 1 838 demandes en cours et 3 830 qui doivent encore être examinées dans notre file d’attente. Nous traitons les demandes reçues le 3 novembre 2022.
Le président : Parlez-moi un peu plus de ce que vous faites pour réduire l’arriéré. Quand j’ai présenté une demande de carte de statut par le passé — la carte de statut sécurisée, comme on l’appelait —, il a fallu près de trois mois avant que je ne l’obtienne. Le délai de traitement d’une demande de passeport est de 10 à 20 jours. Que faites-vous? Il est essentiel pour nos gens d’obtenir ces cartes. Ils en ont besoin pour diverses raisons, à des fins fiscales, ou autres. Alors, quelles mesures précises prenez-vous pour traiter les 16 000 demandes encore en retard? C’est un assez grand nombre.
Mme Doran : Oui. Les chiffres qui viennent d’être présentés sont assez impressionnants. J’essaierai de les segmenter un peu : il n’y a pas d’arriéré sur les cartes de statut. Quand nous recevons une demande de carte de statut complète pour une personne déjà inscrite, nous traitons les cartes de statut conformément à notre norme de service, qui est de 8 à 12 semaines, donc de deux à trois mois. Dans certains cas, nous les traitons encore plus rapidement.
Ce temps de traitement a été considérablement réduit grâce à un certain nombre de gains d’efficience que nous avons intégrés au processus de demande pour le faciliter, y compris la demande numérique, qui est maintenant disponible dans certains kiosques de services. Nous sommes souvent comparés aux services de passeport, et ce genre de comparaison soulève quelques problèmes, mais nous respectons bel et bien notre norme de service de 90 % pour la carte de statut lorsque nous recevons une demande complète.
La carte de statut permet d’accéder plus facilement aux services, aux prestations et aux programmes, mais c’est réellement le fait d’être inscrit qui est la preuve requise pour obtenir une exemption de la taxe au point de vente, par exemple. Ainsi, la carte de statut permet d’accéder plus facilement à ces programmes et services, mais c’est la confirmation de l’inscription qui devrait, en soi, servir à cette fin.
En ce qui concerne les demandes d’inscription, notre inventaire est passé d’environ 16 000 à environ 13 000. Nous traitons régulièrement plus de demandes que le nombre de demandes qui arrivent. L’inventaire commence donc à diminuer, ce que nous voulons, et va dans la bonne direction. Cet inventaire baissera encore plus grâce aux investissements continus que nous faisons pour améliorer l’efficacité du traitement.
À l’heure actuelle, nous respectons la plupart du temps notre norme de service relative aux demandes. Certaines demandes complexes ne sont pas assujetties à cette norme de service. Comme je le mentionnais plus tôt, certaines de ces demandes sont complexes à cause des preuves supplémentaires qu’un demandeur pourrait être tenu de présenter. Nous sommes très sensibles à des situations comme celle-ci, où une personne doit produire de l’information, parce qu’elle a déjà été prise en charge par les services à l’enfance et à la famille ou qu’elle a été adoptée, afin que sa demande puisse être évaluée. Sur cet aspect, cependant, nous invitons les demandeurs à présenter toute preuve afin de nous permettre de la soupeser et de rendre une décision aussi rapidement que possible, selon la prépondérance des probabilités, et ce, même dans ces cas complexes.
J’espère que cela répond à votre question, honorable sénateur.
Le président : Je suis toujours préoccupé par les 13 000 demandes en suspens. Ce sont, à mon avis, des gens qui ont besoin d’avoir leur carte de statut.
Mme Doran : Oui. Ce sont des gens qui attendent une décision sur leur demande, mais ces demandes sont examinées et évaluées. Dans ce genre de cas, on s’attend à ce que les décisions soient rendues dans un délai de six mois.
Monsieur Hooft, avez-vous quelque chose à ajouter ou des précisions à apporter?
M. Hooft : Plus précisément, la question portait entre autres, selon moi, sur les mesures que nous prenons pour améliorer le processus de délivrance de cartes de statut depuis l’exercice mené par le comité. Nous avons publiquement lancé l’examen avec 13 partenaires urbains afin d’aider les gens et d’échanger de l’information. Il s’agit de partenaires différents à l’échelle du pays; nous les appelons des partenariats de confiance. C’est le reflet des 600 partenariats des Premières Nations au sein desquels nous travaillons activement dans l’ensemble du pays.
En ce qui concerne les outils, la carte de statut a une période de renouvellement de 10 ans. Nous voulons que l’expérience des gens, qu’ils présentent une demande ou qu’ils renouvellent leur carte, soit beaucoup plus positive que par le passé. C’est pourquoi nous avons une application photo pour simplifier le processus de prise de photo. Nous continuons d’accélérer le traitement et de rendre les services plus accessibles, notamment en offrant une formation aux administrateurs des Premières Nations qui s’occupent de l’inscription dans l’ensemble du pays. Au cours des dernières années, nous avons formé plus de 1 300 administrateurs d’inscription sur le projet de loi S-3 et sur le processus de carte de statut sécurisée.
Le sénateur Arnot : Merci aux témoins présents aujourd’hui. Je dis de mémoire ce que l’on a affirmé au sujet de ces demandes par le passé. Je ferai un commentaire et je vous demanderai ensuite de m’aider à mieux comprendre la situation.
L’une des préoccupations que nous avons entendues, c’est qu’il n’a pas suffisamment de sensibilisation pratique dans les communautés pour joindre les personnes qui pourraient pouvoir présenter une demande. On nous a également dit que les communautés des Premières Nations croyaient qu’il n’y avait pas assez d’éducation ou d’information au sujet de cet accès.
J’ai aussi constaté que l’on s’inquiète qu’il ne soit pas aussi convivial que l’on croit de rendre la demande numérique ou facile à remplir au moyen d’un ordinateur pour la circonscription qui tente de présenter la demande; en fait, il pourrait s’agir d’un obstacle réel.
Je regarde les chiffres que vous avez mentionnés au sujet du nombre de personnes qui ont présenté une demande et du nombre de personnes qui ont réussi à présenter une demande, et je constate que le facteur de rejet est assez élevé. Il s’établit à environ 20 % ou un pourcentage du genre. Je trouve cela étonnant.
Quelles sont les raisons des rejets que vous constatez? Sont-elles d’ordre administratif ou sont-elles plus graves? Comment pouvez-vous corriger cette situation? Voilà les domaines généraux que je voudrais explorer. Avez-vous des commentaires à formuler à ce sujet?
Mme Doran : Merci de me poser la question. Je répondrai d’abord à votre question sur le taux de refus ou de rejet. M. Hooft pourra peut-être nous indiquer le taux de rejet ou de refus exact.
Nous savons qu’il s’agit d’un processus difficile pour certaines personnes, et c’est pourquoi nous tentons de joindre de toutes les façons possibles un demandeur pour obtenir l’information nécessaire au traitement d’une demande. Nous avons souvent plusieurs échanges avec les demandeurs et nous essayons de leur offrir le plus d’information et de soutien possible. Nous effectuons même une partie de la recherche nous-mêmes, avec notre propre équipe de recherche généalogique et archivistique. Nous travaillons avec le demandeur et nous gardons cette demande ouverte. Souvent, nous ne refusons pas la demande; nous la considérons plutôt comme inactive jusqu’à ce que nous obtenions les renseignements nécessaires pour rendre une décision.
Certaines demandes sont refusées ou rejetées parce que l’information ne permet pas d’étayer une décision d’inscription. Dans le cadre de notre sensibilisation et de nos efforts auprès des clients, nous visons toutefois à travailler avec eux, car nous savons qu’ils présentent une demande pour une raison. Ils présentent une demande parce qu’ils estiment qu’ils en ont le droit, et nous voulons travailler avec eux pour que ce processus soit mené à bien de façon compatissante et utile.
Le sénateur Arnot : Peut-être pourrez-vous aussi m’aider à répondre à la question suivante. Sharon McIvor et Shelagh Day en ont parlé dans des témoignages antérieurs. Le processus de demande semble avoir surpris certaines personnes. Par exemple, les Premières Nations sont étonnées que le nombre de demandeurs ne soit pas plus élevé, tandis que le ministère — quelles étaient vos attentes? Cette évaluation est-elle exacte? Pourquoi y a-t-il un décalage?
Mme Doran : Cela se rapporte aux projections démographiques. Le projet de loi S-3 comportait un certain nombre de projections démographiques, et une série de chiffres ont été présentés. Les projections étaient différentes parce que des variables et des hypothèses différentes ont été utilisées dans certains de ces modèles, qui ont été élaborés par des tiers. Certains indiquaient un nombre global et d’autres projetaient la participation au fil du temps. La réponse du gouvernement fait référence aux projections établies jusqu’en 2041. Cela tient compte des personnes qui ne sont peut-être pas encore nées et qui auraient droit aux termes des dispositions de la loi modifiée. Ces projections nous aident à planifier notre capacité de traitement, mais aussi à planifier les répercussions sur les programmes et les services.
Les projections démographiques liées à l’inscription ont aussi une autre composante, à savoir la nature volontaire de l’inscription. Certaines personnes qui ont le droit d’être inscrites choisissent de ne pas présenter de demande. Il se pourrait aussi que les gens présentent une demande s’ils savaient qu’ils y avaient droit. C’est pourquoi nous avons fait de grands efforts pour sensibiliser ceux qui peuvent avoir droit au statut et ne pas être au courant, et pour offrir des soutiens et des conseils sur la façon de présenter une demande d’inscription. De toute évidence, il faut tenir compte de cette variable.
Les projections sont mises à jour au fil du temps. En 2022, Statistique Canada a fait des projections mises à jour — pas à notre demande, mais pour son propre compte — qui prenaient en considération certaines données mises à jour du recensement. Il a présenté des projections mises à jour et peut-être plus précises. Les projections présentées par Statistique Canada — et je sais qu’elles ont été présentées au comité au printemps — sont en fait plus conformes à ce que nous constatons actuellement en ce qui concerne le nombre réel de demandes présentées.
Nous ne gérons pas ce processus en fonction des projections. Il s’agit d’un facteur important dont nous devons tenir compte. En fait, nous surveillons étroitement le traitement des demandes qui arrivent, qui nous sont présentées aux fins de traitement, de la manière la plus efficace possible.
J’espère que cette information vous est utile. Nous ne savons pas encore si nous avons joint ceux qui ont droit au statut, mais nous continuons de travailler avec des partenaires et différents groupes qui pourraient joindre ce public.
M. Hooft : Oui. Des témoins qui ont comparu hier ont dit que nous devrions utiliser l’analyse Clatworthy pour mesurer l’incidence du projet de loi S-3. Je tiens à répéter que c’est ce que le gouvernement a fait; il a accepté l’analyse faite par Stewart Clatworthy pour le projet de loi S-3. Cette analyse portait sur l’effet global de la loi — de 270 000 à 450 000 personnes —, mais n’établissait pas d’échéancier. Elle ne prescrivait pas de ventilations d’une année à l’autre. Nous avons travaillé en partenariat avec l’équipe de simulation démographique, qui a témoigné ici précédemment, pour élaborer des estimations affinées à l’aide de son modèle de projection démographique. Selon son estimation pour la fin de 2022, nous aurions dû inscrire 33 530 personnes à la suite du projet de loi S-3, et nous l’avons fait. Elle estime 48 674 inscriptions d’ici la fin de l’année 2023, et nous sommes sur la bonne voie pour atteindre ce nombre.
Encore une fois, cette répercussion du projet de loi S-3 est très significative et continuera de se faire sentir pour les générations à venir.
Le président : Je vous remercie.
La sénatrice LaBoucane-Benson : Merci de nous avoir présenté tous ces renseignements. Je ne siégeais pas au comité lorsque l’équipe des projections démographiques a comparu, donc c’est tout nouveau pour moi et vraiment intéressant.
Ma question porte sur un sujet que vous avez brièvement abordé. Je pense qu’un kiosque numérique est une excellente idée pour mes petits-enfants, par exemple. Mon mari est un Indien visé par un traité, tout comme mon fils. Quand il est allé inscrire ses enfants, la démarche a été facile. Il avait tout là-bas. L’idée d’avoir un kiosque est logique. Je crois toutefois que, pour beaucoup de gens, l’inscription à leur bande ou l’obtention d’une carte de statut est liée à un grand nombre de traumatismes historiques. Les histoires sont si douloureuses. Quelle que soit la raison pour laquelle ils ne font pas partie de leur communauté, cela fait partie d’une histoire de traumatismes plus vaste — une histoire de traumatismes subis par leur famille, leur communauté. Il pourrait aussi s’agir de leur propre histoire d’expériences traumatisantes en famille d’accueil ou d’adoption, ou autre. Dans ces cas-là, je me demande vraiment s’il est logique d’offrir une plateforme numérique.
Vous avez dit que vous avez des partenariats de confiance. Puis-je savoir qui sont ces partenariats de confiance? De quelles organisations s’agit-il? À mon avis, les travailleurs des services juridiques aux Autochtones d’un bout à l’autre du pays pourraient être une très bonne organisation pour le faire parce qu’ils ont affaire à des gens qui interagissent avec le système judiciaire, ce qui est une expérience traumatisante en soi, et ils aident souvent les gens à remplir des formulaires d’aide juridique ou autre. Ils s’y connaissent dans ce genre de travail. Alors, qui sont les partenaires de confiance? Vos employés et eux sont-ils formés pour fournir des services qui tiennent compte des traumatismes historiques? Voilà mes questions.
Mme Doran : Merci de me poser ces questions. Ces partenariats visent à faire ce que vous suggérez, à mon avis, à savoir de rapprocher le processus de demande des communautés, là où les gens se sentent à l’aise et vivent une expérience culturellement appropriée, respectueuse et sécuritaire.
Nous travaillons actuellement avec 13 organisations à l’échelle du pays. Il s’agit d’organisations qui se trouvent où nos clients ou cette population pourraient avoir accès à d’autres services. Encore une fois, elles offrent donc une approche plus complète, qui permet de rencontrer les gens où ils reçoivent déjà des services et se sentent à l’aise.
Bien sûr, ces organisations reçoivent une formation qui leur permet d’aider les gens à s’y retrouver dans le processus de demande.
Nous pensons également aux administrateurs de l’inscription communautaire qui se trouvent dans la plupart des communautés. Nous cherchons à les aider à travailler avec les membres de leur communauté sur le processus de demande, que ce soit pour l’inscription ou pour l’obtention d’une carte. Nous offrons de la formation, des soutiens et des outils.
En ce qui concerne votre point selon lequel le numérique ne convient peut-être pas à tous, je suis entièrement d’accord avec vous. Il s’agit d’une option. Nous voulons offrir des options aux gens afin que ceux qui choisissent de présenter une demande en ligne puissent le faire en 2023, et que ceux qui se sentent plus à l’aise de suivre ce processus dans un environnement de soutien en personne continuent d’avoir cette option. Je répondrais ainsi à votre question.
Tous les employés de SAC, ou Services aux Autochtones Canada, qui travaillent dans ce domaine suivent une formation obligatoire sur les compétences culturelles. Étant donné que les employés qui travaillent au ministère interagissent directement avec les clients, nous ne ménageons aucun effort pour nous assurer qu’ils sont formés et qu’ils possèdent les outils pour travailler avec les demandeurs, dans le cadre d’une démarche qui tient compte des traumatismes et qui est adaptée à la culture et axée sur le client et sur l’humain.
La sénatrice LaBoucane-Benson : Vous avez parlé un peu des preuves à présenter. Je conviens de la nécessité de présenter des preuves. Toutefois, en ce qui concerne le fardeau de la preuve, ces preuves n’existent souvent pas, et la personne qui se trouve devant vous n’en est aucunement responsable. Les églises gardaient des registres, mais elles ont été détruites par le feu. Les services à l’enfance sont reconnus comme de très mauvais responsables de la gestion des documents lorsqu’il s’agit d’enfants autochtones.
Je vous ai entendu parler de la prépondérance des probabilités. Je suis très curieuse. Qu’est-ce que cela signifie? Comment gérez-vous cette situation précaire en ce qui concerne les preuves?
Mme Doran : Merci de me poser cette question. Il est vrai que parfois, les preuves n’existent tout simplement pas, pour toutes les raisons que vous venez d’expliquer. Nous acceptons toutes les preuves. Il peut s’agir de coupures, d’affidavits ou de renseignements de recensement et j’en passe. Nous réunissons tous ces genres de preuves. Le registraire des Indiens, qui est en fin de compte la personne responsable des décisions relatives à l’inscription, participe à l’application de la prépondérance des probabilités dans ces cas, de sorte que la preuve soit pondérée selon que la personne a droit à l’inscription ou pas.
La sénatrice Martin : J’ai moi aussi manqué l’étude. Je suis une néophyte dans ce dossier, mais après avoir écouté les questions qui ont été posées avant moi et les réponses que vous avez données, j’aimerais poser quelques questions qui, à mon avis, correspondent à celles que d’autres ont déjà posées.
Vous avez une plateforme numérique, et elle pourrait être très bien conçue, mais ne pas permettre d’entrer en contact avec les publics difficiles à joindre. Cela attise grandement ma curiosité. Vous travaillez avec vos partenaires de confiance et vous dites qu’il y a en a 13 d’un bout à l’autre du pays. Cela semble bien peu. Qu’en est-il des publics très difficiles à joindre, comme les personnes âgées de 65 ans et plus, celles qui habitent dans les centres urbains et dans des endroits très éloignés, et même celles qui ignorent peut-être qu’elles ont le statut? J’aimerais savoir à quoi ressemblent vos efforts de sensibilisation. Comment mesurez-vous le succès de cette sensibilisation?
Mme Doran : Merci de me poser la question. En ce qui concerne la plateforme numérique, je tiens à préciser que nous avons actuellement une plateforme numérique pour les demandes de carte de statut. Nous cherchons à faire évoluer cette plateforme afin qu’elle accepte les demandes d’inscription. Nous n’en sommes pas encore là, mais, je vous donne raison : nous devons construire cette plateforme, cette application en ligne, en ayant à l’esprit l’utilisateur et en tenant compte des facteurs comme la connectivité, les outils et les appareils mobiles, pour utiliser la technologie. Nous tenons compte de tous ces facteurs et nous offrirons toujours un service papier en personne si un client préfère cette approche.
Vous avez raison que 13 partenaires semblent bien peu. Nous voulons augmenter ce nombre. Nous mettons à l’essai le modèle et nous apprenons sur lui, et nous voulons nous assurer qu’il fait ce que nous voulons qu’il fasse avant de l’étendre trop loin. Tout indique qu’il fonctionne très bien et que les offres de services pourraient être élargies dans ces partenariats de confiance au fil du temps.
La sensibilisation est essentielle. J’ai déjà fait quelques commentaires au sujet des efforts que nous déployons actuellement pour atteindre ce public difficile d’accès et les gens qui ne savent peut-être pas qu’ils pourraient avoir droit à l’inscription. Nous essayons de travailler avec de nouveaux partenaires, comme les organisations de femmes et les organisations de services à l’enfance et à la famille. Nous avons créé des messages sur mesure pour le public âgé de 65 ans et plus. Nous essayons des choses différentes. Nous évaluons, dans la mesure du possible, l’incidence de ces efforts de sensibilisation sur les demandes que nous recevons afin de déterminer si un effort de sensibilisation particulier a entraîné une augmentation du nombre de demandes reçues, par exemple. Les essais de l’expérience des utilisateurs auxquels j’ai fait référence nous aident également à mieux concevoir des produits de communication et de sensibilisation, des messages, des guides et des vidéos, entre autres.
M. Hooft : Plus précisément, afin de répondre à votre question, nous avons communiqué avec plus de 1 000 organisations de femmes pour diffuser des messages sur le projet de loi S-3. Nous avons également fait appel à un fournisseur de services tiers pour communiquer avec 28 000 personnes et organisations différentes qui utilisent le service Indigenous Link.
Nous avons entièrement l’intention d’élargir les partenariats. D’autres partenaires se joindront à nous au cours du nouvel exercice et nous avons déjà obtenu des propositions à cet effet. L’élargissement aux services juridiques et à d’autres populations difficiles à joindre est l’une des principales priorités. Qu’il s’agisse de l’aide juridique ou autre, nous savons que certaines situations peuvent être difficiles. Tout soutien supplémentaire pouvant être offert aux gens — pas seulement de façon numérique, mais en personne, et pas seulement de façon générale, mais précise — sera bien reçu et donnera lieu à une augmentation des demandes, ce qui est notre objectif ultime.
La sénatrice Martin : Dans la réponse du gouvernement, on explique que Services aux Autochtones Canada continuera d’« […] explorer la traduction de l’information sur le droit à l’inscription dans certaines langues autochtones […] ».
Vos activités de sensibilisation comprennent-elles la diffusion d’information dans différentes langues autochtones, et les gens le savent-ils? J’aimerais savoir de quelle façon cette sensibilisation précise est menée.
Mme Doran : C’est le comité qui avait recommandé d’explorer la traduction de notre matériel dans diverses langues autochtones. Nous prenons cette recommandation au sérieux et nous examinerons, en tenant compte des ressources, ce que nous pouvons faire pour fournir de l’information dans les langues autochtones.
Jusqu’à présent, nous n’avons pas produit beaucoup de ressources en langues autochtones. Dans certains cas, les administrateurs de l’inscription communautaires peuvent travailler avec les membres de leur communauté dans leur propre langue, ce qui est très utile, bien accepté et très apprécié. Il s’agit d’un aspect sur lequel nous continuerons...
La sénatrice Martin : Vous en êtes à l’étape de l’exploration.
Mme Doran : ... d’explorer, encore une fois, en tenant compte des commentaires des utilisateurs et d’autres conseils que nous pourrions recevoir en cours de route.
Le président : Je me demande si vous pouvez me dire si le ministère envisage des initiatives pour présenter des excuses ou des réparations ou pour indemniser ceux qui ont perdu leur statut en raison de discrimination fondée sur le sexe, et dans la négative, pourquoi pas?
Mme Doran : Merci de me poser la question. La réponse reconnaît les torts historiques et les dommages causés par des décennies d’inégalités fondées sur le sexe et l’incidence qu’ils ont depuis si longtemps sur les femmes et leurs descendants. Les répercussions de cette situation sont assez vastes en ce sens que des femmes se sont vu refuser des droits, des avantages et des services, y compris des services de santé, par exemple, et qu’elles ont souvent été exclues de la communauté et de la culture. C’est très bien reconnu. Nous nous efforçons de trouver rapidement des solutions aux inégalités qui subsistent afin de garantir que les autres personnes dont les droits doivent être rétablis puissent recevoir ces droits et avantages en temps voulu. Voilà ce sur quoi nous nous concentrons : travailler rapidement, dans le cadre de consultations, à l’élaboration de solutions aux inégalités restantes.
Le président : Pour être clair, vous me dites que le ministère ne présentera pas d’excuses et n’offrira aucune indemnisation.
Mme Doran : La réponse au rapport n’expose aucun engagement à présenter des excuses ou à accorder une indemnisation. Le rapport indique que nous reconnaissons les torts et préjudices historiques et que nous cherchons rapidement à remédier concrètement aux injustices qui subsistent.
M. Hooft : Je tiens également à mentionner que le rapport devrait souligner la contribution importante de Stéphane Descheneaux et de Susan et Tammy Yantha pour leur incidence sur le projet de loi S-3, ainsi que de Mme Gehl, à qui l’on fait référence, je crois, dans la réponse.
Pour revenir à la question précédente, ces pratiques, politiques ou lois se sont fait sentir sur un grand nombre de personnes au fil du temps, et il s’agit d’un défi commun, que le gouvernement s’emploie à relever avec des partenaires. Les défenseurs et les alliés des Premières Nations ont répété qu’il est difficile de joindre les personnes qui ont été déconnectées de leur communauté. On reconnaît que c’est sur ce point qu’il faut continuer de mettre l’accent.
La sénatrice Boniface : Merci beaucoup et bienvenue à nos invités. J’étais membre du comité lors de l’étude du projet de loi S-3 il y a longtemps, mais je ne le suis plus. Je remplace la sénatrice Sorensen.
Je veux revenir sur les efforts de sensibilisation parce que j’essaie de clarifier les problèmes précis que vous avez. Regardez-vous les tendances qui se manifestent? Quelles ressemblances y aurait-il avec celles que vous n’avez pas encore reçues?
Mme Doran : Permettez-moi de préciser ceci : demandez-vous comment nous suivons l’efficacité de nos efforts de sensibilisation?
La sénatrice Boniface : Par exemple, vous parlez des « publics plus difficiles à joindre », et je lis ensuite « urbains », « ruraux », « éloignés » et « 65 ans et plus ». Puis-je en conclure que la majorité des demandeurs seraient âgés de moins de 65 ans? Je cherche à voir si vous l’avez analysé de cette façon.
Mme Doran : Pour les personnes qui ont nouvellement droit à l’inscription en vertu du projet de loi S-3, il arrive, dans certains cas, que des personnes âgées présentent une demande parce que le projet de loi rétablit un droit à l’inscription qui remonte à plusieurs décennies. Nous avons adopté une politique, en fait, pour le traitement prioritaire des demandes de personnes âgées de 65 ans et plus, parce que nous reconnaissons qu’elles ont peut-être attendu toute leur vie, et nous ne voulons pas retarder le traitement de leur dossier.
Nous savons également, d’après ces projections démographiques, que pour certaines des mêmes raisons, la population nouvellement admissible au projet de loi S-3 résiderait en grande partie dans des endroits urbains parce qu’elle avait perdu, dans certains cas, son lien avec sa communauté. C’est en partie pour cette raison que nous nous concentrons sur les milieux urbains, et c’est là que nos partenariats de confiance sont en grande partie établis — en outre, il ne s’agit pas seulement des femmes, mais des demandeurs âgés également.
Nous cherchons à vérifier si ces efforts atteignent ce public et nous corrigeons le tir au fur et à mesure.
Cela dit, nous recevons des demandes conformément à ce que nous devions recevoir selon les projections démographiques les plus récentes, de sorte que nous pouvons affirmer avec une certaine certitude que nous atteignons cette population parce que nous recevons le nombre prévu de demandes. C’est une mesure pour laquelle nous avons une balise.
M. Hooft : La population difficile à joindre est vraiment celle qui a perdu son statut au départ, parce que cela pourrait remonter jusqu’à 150 ans. Nous constatons en fait une expérience réellement familiale. Une fois qu’une personne d’une lignée familiale est inscrite, on voit des descendants et des parents, entre autres, présenter une demande. C’est une autre raison pour laquelle l’effet se produit au fil du temps. Il ne s’agit pas d’une demande pour une personne. Il faut y penser de manière générationnelle, selon les lignées familiales. Il peut s’agir d’un ancêtre source, par exemple, dont de nombreux descendants présentent une demande par la suite. Ce serait la première observation.
En ce qui concerne la difficulté, il ne s’agit pas seulement de connaître cet ancêtre, mais de pouvoir prouver l’existence d’un lien entre cet ancêtre et vous. À mesure que nous remontons dans le temps, les preuves peuvent parfois être difficiles à obtenir. Le ministère dispose de dossiers accessibles par l’intermédiaire soit de demandes de membres de la famille, soit de dossiers de recensement et de traités auxquels les gens pourraient avoir difficilement accès. Nous essayons donc de compléter ces renseignements lorsque quelqu’un présente une demande.
En ce qui concerne les inscriptions de façon générale, l’âge moyen d’inscription à l’heure actuelle est d’environ cinq ans. La grande majorité des personnes inscrites chaque année sont des nouveau-nés, des bébés et des enfants. Mais, bien sûr, cela sera légèrement différent pour la population visée par le projet de loi S-3 parce que des gens et leurs descendants ont perdu leur statut, de sorte que l’âge moyen d’inscription a également augmenté au cours des dernières années.
La sénatrice Boniface : En ce qui concerne les 13 000 demandes dont le président a parlé, vous appelez cela un inventaire. Pour être certaine de bien comprendre, est-ce plutôt comme une file d’attente? Par exemple, les gens sont dans la file d’attente et certaines de ces 13 000 demandes pourraient avoir été reçues hier, tandis que d’autres l’ont été il y a plus longtemps? Est-ce exact?
Mme Doran : Oui. Je laisserai M. Hooft parler de l’inventaire. Je crois que la plus vieille demande date de six mois.
M. Hooft : Nous traitons les demandes en fonction de la date de réception, qu’elles soient complètes ou incomplètes. En moyenne, à l’échelle nationale, nous traitons 3 000 demandes par mois. Lorsque nous examinons un inventaire d’environ 13 500 personnes, cela représente un inventaire de quatre mois et demi. Nous continuons de recevoir des demandes chaque jour, ce qui signifie que l’inventaire ne s’approche pas de zéro, mais nous espérons l’éliminer en temps opportun. Tous n’ont pas la même situation. C’est pourquoi nous disons que notre objectif est de traiter 80 % des cas selon une norme de service de six mois. Nous traitons les demandes en fonction de leur date de réception. C’est l’ordre de traitement que nous suivons.
Mme Doran : Environ 50 % des demandes sont simples, ce qui signifie qu’elles sont pour l’enfant d’un parent qui est déjà inscrit. Elles sont traitées en quelques semaines. Il s’agit de situations comme celles-ci pour 50 % des demandes que nous recevons. Il y a des demandes plus complexes, qui prennent plus de temps. Mais, oui, une file d’attente est une bonne façon de le décrire parce que nous sommes dans un scénario constant de traitement et de réception étant donné l’absence d’échéance. Il n’y a pas de date limite pour présenter une demande. C’est un processus continu.
La sénatrice LaBoucane-Benson : Ma question porte sur l’expiration des cartes de statut. Pour les personnes qui gèrent les cartes de statut, il serait logique de les faire expirer : c’est bon pour la collecte de données, en particulier les nouvelles cartes, qui contiennent plus de renseignements.
Toutefois, du point de vue des Autochtones — les gens qui m’entourent et qui ne font généralement pas confiance au gouvernement —, il existe un problème de confiance. Il leur semble que le fait que les cartes expirent maintenant est une façon de réévaluer si cette personne devrait avoir sa carte de statut tous les cinq ans et que, lorsqu’il s’agit de renouveler une carte de statut, le gouvernement pourrait décider que cette personne n’a plus de carte de statut. Je ne crois pas que ce soit vrai en tant que sénatrice siégeant ici, mais je sais qu’il existe un véritable problème de confiance entre les peuples autochtones et le gouvernement.
Je pense que la décision de faire expirer les cartes de statut n’a pas été prise du point de vue du client. Elle a été prise du point de vue de celui qui administre les cartes.
Pourquoi avez-vous pris cette décision? Est-il encore possible de revenir sur la décision? Mon mari serait vraiment déçu si je ne disais pas qu’il croit qu’il n’expire pas en tant qu’Indien.
Mme Doran : Je suis d’accord avec votre mari. Le statut n’expire jamais. Une fois que vous êtes inscrit aux termes de la Loi sur les Indiens, le statut est valable à perpétuité. Il n’expire pas. Il n’a pas besoin d’être renouvelé. Il existe pendant toute la vie d’une personne.
En ce qui concerne la carte de statut offerte aux gens, c’est un choix. Elle est accessible aux personnes qui sont inscrites et, pour revenir sur ce que je disais précédemment, elle permet d’accéder plus facilement aux programmes et aux services, bien qu’elle ne soit pas nécessaire.
Elle a une date de renouvellement parce qu’elle sert également de pièce d’identité officielle du gouvernement fédéral. La personne peut la présenter à l’Agence des services frontaliers du Canada pour traverser la frontière terrestre entre les États-Unis et le Canada, ou pour ouvrir un compte bancaire et monter à bord d’un avion. Elle est utilisée en tant que pièce d’identité officielle du gouvernement fédéral. Pour cette raison, elle doit être renouvelée périodiquement. C’est une politique gouvernementale.
Pour revenir sur ce que vous disiez, nous reconnaissons que cela peut être un problème, au minimum, et une expérience un peu traumatisante également pour certaines personnes qui doivent interagir avec le gouvernement afin de renouveler cette carte.
Nous avons pris des mesures pour tenter de rendre le processus aussi simple que possible tout en veillant à ce qu’elle puisse servir de pièce d’identité officielle du gouvernement fédéral que beaucoup de gens apprécient et détiennent comme unique pièce d’identité.
Nous avons étendu la période de renouvellement de 5 à 10 ans et nous avons facilité le processus de demande. J’ai fait référence à l’outil numérique qui est maintenant disponible. Nous avons également lancé et offert une application de photo mobile. C’est pourquoi l’exigence de renouvellement existe : l’apparence d’une personne change avec le temps et peut-être que certains renseignements de base ont changé. Son nom a peut-être changé. C’est à ce moment que la photo peut être mise à jour et que toute information peut être mise à jour.
En ce qui concerne cette application photo, nous avions entendu les commentaires selon lesquels il était long, coûteux et peu pratique d’obtenir une photo de qualité passeport, et nous y avions répondu. Nous offrons donc cette application, que vous pouvez utiliser n’importe où et qui prendra cette photo de qualité passeport sans frais. Environ 126 000 personnes ont accepté cette option que nous offrons. Si l’on estime de façon approximative les éventuels coûts liés au fait de se rendre au Walmart pour obtenir une photo de passeport, il s’agit peut-être d’une économie de 1,8 million de dollars qui vont dans les poches des gens, qui n’ont pas à payer pour obtenir cette photo.
Encore une fois, ce n’est pas la seule option offerte. Les gens peuvent choisir de présenter une demande dans le cadre d’un processus sur papier ou en personne.
M. Hooft : Je tiens à préciser que le statut n’est pas réexaminé. Il n’est pas réexaminé au moment où vous demandez une carte de statut. Il s’agit d’une pièce d’identité utile délivrée par le gouvernement fédéral et il existe des solutions de rechange. Les bureaux des Premières Nations délivrent encore la version papier laminée. Nous reconnaissons qu’il s’agit peut-être de la version préférée, mais il ne s’agit pas de choisir entre les deux. Vous pouvez obtenir une version papier laminée pendant que vous attendez d’obtenir le certificat sécurisé de statut d’Indien.
Nous avons vu augmenter le nombre de demandes au cours des dernières années, et nous avons l’intention de lancer un processus de renouvellement simplifié parce que nous sommes exactement 10 ans après le lancement du certificat de statut d’Indien. Nous constatons un plus grand nombre de renouvellements, de sorte que nous lancerons un processus de renouvellement simplifié afin d’appuyer les personnes dans cet effort.
Le président : La réponse du gouvernement mentionne la publication d’un rapport annuel sur l’inscription qui pourrait inclure des renseignements comme le nombre total de demandes reçues par inscription par année et le nombre total de décisions d’inscription contestées par année, entre autres.
Comment le ministère déterminera-t-il quels renseignements seront inclus dans le rapport annuel sur l’inscription? S’agira-t-il des mêmes renseignements chaque année pour permettre de faire des comparaisons?
Mme Doran : Merci de me poser la question. Il s’agissait d’une recommandation de produire un rapport annuel dans un esprit de transparence et de reddition de comptes, et nous acceptons la recommandation. Nous travaillons à produire un rapport annuel. Nous espérons recueillir le plus de renseignements possible dans ce rapport sur les demandes reçues et les statistiques de traitement de base, mais aussi saisir d’autres activités et efforts connexes en ce qui concerne la consultation sur les inégalités restantes.
Nous ne serons peut-être pas en mesure de produire un rapport aussi exhaustif que nous le souhaiterions ou auquel nous pourrions nous attendre en raison de limites du système, mais nous nous efforcerons de produire un rapport. Nous espérons que les renseignements de base seront cohérents d’une année à l’autre afin de permettre un genre d’analyse comparative.
Nous prévoyons consulter un groupe d’experts sur l’élaboration de ce rapport afin de recueillir les avis de personnes qui ont une expertise et un intérêt dans ce domaine, pour garantir que le rapport sera utile et qu’il présentera le plus clairement possible des renseignements clés sur l’inscription.
M. Hooft : Je répète ce que Mme Doran a dit. Nous sommes certainement ouverts au contenu du rapport et nous proposons de le faire en partenariat avec les Premières Nations, les alliés et les défenseurs. Certains de ces réseaux existent déjà parce que nous avons mené des consultations sur l’élaboration du projet de loi C-38 et que nous avons un dialogue régulier, que ce soit par l’entremise de nos partenaires de confiance et de leur expérience ou des administrateurs de l’inscription qui travaillent dans 600 communautés d’un bout à l’autre du pays.
Nous voulons aussi leur contenu. Nous voulons inclure ce qui compte, et certaines des personnes qui ont comparu ici à titre de témoins ont indiqué clairement ce qui était important, ce qui nous donne un éventail de points de vue. Parce qu’il ne s’agit pas seulement de chiffres; il s’agit aussi de l’expérience de suivre le processus de demande. C’est ce qui est ressorti haut et fort du rapport.
Le président : Merci, madame Doran et monsieur Hooft, de votre témoignage. Nous vous remercions d’avoir pris le temps de répondre à nos questions ce soir.
(La séance se poursuit à huis clos.)