LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES PEUPLES AUTOCHTONES
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le mercredi 10 mai 2023
Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones se réunit aujourd’hui à 18 h 45 (HE) avec vidéoconférence afin d’étudier le projet de loi C-29, Loi prévoyant la constitution d’un conseil national de réconciliation.
Le sénateur Brian Francis (président) assure la présidence.
[Traduction]
Le président : Honorables sénateurs, j’aimerais pour commencer reconnaître que nous nous réunissons aujourd’hui sur le territoire traditionnel, ancestral et non cédé de la nation algonquine anishinabe, qui compte aujourd’hui de nombreux peuples des Premières Nations, métis et inuits de l’île de la Tortue.
Je suis le sénateur Brian Francis, un Mi’kmaq d’Epekwitk, que l’on appelle aussi Île-du-Prince-Édouard, et je suis président du Comité des peuples autochtones.
Je demanderais maintenant aux membres du comité de se présenter et de nommer leur province.
Le sénateur Arnot : David Arnot, de la Saskatchewan.
La sénatrice Martin : Yonah Martin, de la Colombie-Britannique.
La sénatrice LaBoucane-Benson : Patti LaBoucane-Benson, du territoire du Traité no 6, en Alberta.
La sénatrice Hartling : Nancy Hartling, du Nouveau-Brunswick.
La sénatrice Moodie : Rosemary Moodie, de Toronto.
Le sénateur Tannas : Scott Tannas, de l’Alberta.
La sénatrice Sorensen : Karen Sorensen, du territoire du Traité no 7, en Alberta.
La sénatrice Coyle : Mary Coyle, Mi’kmaq de la Nouvelle-Écosse.
[Français]
La sénatrice Audette : Kwe, [mots prononcés en innu-aimun]. Michèle Audette, du Québec.
[Traduction]
Le président : Merci. La sénatrice McCallum se joint également à nous ce soir.
Nous entreprenons aujourd’hui notre étude du projet de loi C-29, Loi prévoyant la constitution d’un conseil national de réconciliation.
Je vous rappelle que vos interventions doivent être les plus brèves possible. En raison des contraintes de temps et de l’intérêt que suscite cette étude, nous allons accorder à chaque sénateur cinq minutes pour poser une question et obtenir la réponse des témoins. Nous allons accorder la priorité aux membres du comité, puis nous entendrons les autres collègues. Si nous avons le temps, nous tiendrons une deuxième série de questions.
Pour la première partie de la réunion, nous recevons Denis Gros-Louis, qui est directeur général du Conseil en éducation des Premières Nations, et Ian Mosby, qui est collaborateur de recherche au Yellowhead Institute. Nous vous remercions tous deux de vous joindre à nous aujourd’hui.
Nous allons entendre les déclarations préliminaires des témoins, d’au plus cinq minutes chacune, puis nous passerons à une série de questions et réponses. Lorsque vous en serez à quatre minutes, je lèverai ce carton que m’a donné Mme Mugny; ce sera le signe qu’il vous reste une minute. Sur ce, j’inviterais maintenant M. Gros-Louis à faire sa déclaration préliminaire.
[Français]
Denis Gros-Louis, directeur général, Conseil en éducation des Premières Nations : Kwe. Bonjour. Mon nom traditionnel est Wahka;onwe Daziatsi qui signifie l’homme de la liberté. Je suis membre de la nation Wendat, près de Québec, Wendake’ndare.
Je suis le directeur général du Conseil en éducation des Premières Nations. Le CEPN est une association d’éducation qui regroupe 8 des 10 Premières Nations au Québec. C’est un honneur pour moi d’être ici pour témoigner au sujet du projet de loi C-29, Loi prévoyant la constitution d’un conseil national de réconciliation.
Tout d’abord, j’aimerais commencer par une phrase de l’honorable Murray Sinclair, ancien sénateur et commissaire en chef de la Commission de vérité et réconciliation du Canada qui disait ce qui suit : « L’éducation nous a mis dans ce pétrin... et c’est l’éducation qui nous en sortira. »
Comme l’a exprimé votre ancien collègue M. Sinclair, les politiques colonialistes et assimilatrices du gouvernement canadien, comme pour les pensionnats autochtones, ont délibérément et systématiquement empêché les enfants des Premières Nations d’être fiers de leur identité, de leur langue, de leur culture, et de leur savoir; autrement dit, d’être eux-mêmes. M. Sinclair considère que l’éducation est aussi l’outil indispensable pour entreprendre des efforts de vérité, de réconciliation, de progrès et même de renaissance.
C’est dans ce sens que le CEPN travaille pour garantir que nos nations membres puissent offrir une éducation de qualité en lien avec nos traditions, nos langues et nos cultures. Je crois aussi fermement que le projet de loi C-29 tient à bâtir le pont entre la vérité et l’avenir dont M. Sinclair parle et sur lequel le CEPN œuvre chaque jour.
[Traduction]
Toutefois, le Conseil en éducation des Premières Nations est aussi d’avis que certaines dispositions du projet de loi doivent être modifiées. Étant donné l’objectif de l’organisation que je représente, je vais me centrer sur celles du domaine de l’éducation.
L’article 16.1 exige du ministre qu’il présente un rapport annuel sur le bien-être des enfants, l’éducation, la santé et la victimisation criminelle des Autochtones. De façon particulière, aux alinéas b) et c), on s’attend à ce que le ministre fasse état « des niveaux de scolarisation et de revenu des Autochtones par comparaison avec ceux des non-Autochtones ».
Le Conseil en éducation des Premières Nations salue ces ajouts, qui émanent directement de l’appel à l’action 55 du rapport de la Commission de vérité et réconciliation du Canada. Toutefois, nous souhaitons vous faire part de certaines de nos préoccupations relatives à la capacité du ministre des Relations Couronne-Autochtones de faire état avec justesse du financement et du niveau de scolarité des étudiants autochtones vivant dans les réserves et hors réserve.
Bien que la responsabilité de la collecte de données incombe à Services aux Autochtones Canada et non à Relations Couronne-Autochtones, le ministère a à plusieurs reprises reconnu son incapacité à fournir des mesures précises, notamment sur les taux de diplomation des étudiants des Premières Nations. Par exemple, dans son rapport de 2018, le vérificateur général avait conclu que Services aux Autochtones Canada n’avait pas été en mesure de recueillir des renseignements significatifs et de les transmettre aux Premières Nations ou de fonder ses décisions stratégiques sur des données probantes objectives. Dans le rapport de Services aux Autochtones Canada de décembre 2022 à l’intention du Parlement, le ministre des Services aux Autochtones avait reconnu « [...] que le manque de données avait rendu difficile le suivi des écarts socioéconomiques entre les Autochtones et les non-Autochtones au Canada [...] ».
Toutefois, le ministère est partie prenante à de nombreux processus associés au financement, à la conception et au contrôle de l’éducation des Premières Nations, notamment des ententes régionales en matière d’éducation. Étant donné le large éventail d’accords conclus en matière d’éducation des Premières Nations, il est difficile de comprendre comment le ministère pourrait recueillir des indicateurs régionaux sur le financement et le taux de diplomation. Par exemple, les 22 membres québécois du Conseil en éducation des Premières Nations ont signé une entente régionale en matière d’éducation avec le gouvernement du Canada qui vise la souveraineté et la collecte des données sur l’éducation et les éducateurs.
Dans l’ensemble, nous ne savons pas comment le ministre des Relations Couronne-Autochtones pourra s’acquitter de la responsabilité de faire rapport annuellement des résultats et du financement en matière d’éducation. Nous ne savons pas non plus si ces renseignements seront exacts et s’ils permettront d’atteindre les objectifs du Conseil national pour la réconciliation.
Le Conseil en éducation des Premières Nations croit qu’il est essentiel de modifier l’article 16.1, notamment pour prévoir la participation directe des organisations des Premières Nations comme la nôtre, afin de répondre à l’appel à l’action 55, de combler l’écart actuel et d’assurer un avenir prometteur à nos communautés.
Merci.
Le président : Merci, monsieur Gros-Louis. J’inviterais maintenant M. Mosby à faire sa déclaration préliminaire.
Ian Mosby, collaborateur de recherche, Yellowhead Institute : Je remercie le président et les membres du comité de m’avoir invité aujourd’hui. Je suis heureux de pouvoir me joindre à vous à partir du territoire des Mississaugas de Credit.
Je suis un colon et un professeur d’histoire à l’Université métropolitaine de Toronto. On m’a invité à témoigner devant vous aujourd’hui parce que je travaille depuis quatre ans à une série de rapports qui ont pour objectif de suivre les progrès du Canada en vue de répondre aux 94 appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation, en collaboration avec ma collègue, Eva Jewell, qui est directrice de recherche pour le Yellowhead Institute.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que les résultats sont extrêmement décevants. Lorsque nous avons entrepris notre travail en 2019, par exemple, nous avons constaté que le Canada n’avait répondu qu’à huit appels à l’action en tout. En 2020, ce nombre n’avait pas changé. En 2021, le Canada a répondu à plus d’appels à l’action dans les trois semaines suivant la découverte de tombes non identifiées au pensionnat indien de Kamloops qu’il ne l’avait fait au cours des trois années précédentes. Depuis que des organisations représentant des archivistes et des professionnels de la muséologie ont répondu à deux appels à l’action l’année dernière, nous en sommes à un total de 13 appels à l’action ayant fait l’objet d’une réponse. Pour mettre les choses en perspectives, notre taux de progression d’un peu moins de deux appels à l’action par année signifie que le Canada devrait avoir répondu aux 94 appels à l’action en 2065, lorsque mon fils qui a aujourd’hui 10 ans en aura 52. Je crois que nous pouvons tous convenir que ce délai est inacceptable.
Ma collègue et partenaire de recherche, Eva Jewell, aurait bien aimé être des nôtres ce soir pour discuter de ce projet de loi et de nos travaux. Bien que je témoigne aujourd’hui à titre personnel, je sais qu’elle joindrait sa voix à la mienne pour exprimer notre soutien sans réserve à la création d’un conseil national de réconciliation. Nous avons toujours préconisé la mise en place d’une telle instance nationale dotée des ressources et de la légitimité nécessaires pour demander des comptes à tous les ordres de gouvernement. Cela dit, je veux souscrire aux commentaires de la grande cheffe Mandy Gull-Masty, qui a également témoigné devant vous, en précisant bien que nous n’allons appuyer la création d’un conseil national que dans la mesure où celui-ci est doté d’un financement suffisant, est vraiment représentatif des communautés de Premières Nations, métisses et inuites, et peut avoir accès aux données et à l’information dont il a besoin pour s’acquitter de son important mandat.
Comme le Canada ne progresse pas vraiment relativement aux suites à donner aux différents appels à l’action, il y a tout lieu de s’inquiéter. J’abonde notamment dans le sens de ceux qui ont fait part au comité de leurs préoccupations quant à l’absence de mécanisme de financement permanent pour le conseil national dans le projet de loi C-29. On n’a pas vraiment réussi à démontrer que le fonds de dotation de 125 millions de dollars annoncé jusqu’à maintenant sera suffisant. Comme l’analyse effectuée par notre institut a révélé que le financement inadéquat est le principal facteur ayant empêché le Canada de donner suite à de nombreux appels à l’action importants — dans des domaines comme la santé, le bien-être des enfants, l’éducation et la justice —, cela demeure une grande source d’inquiétude.
Nous avons par ailleurs d’importantes réserves du fait que le conseil est établi à titre d’organisme sans but lucratif, si bien qu’il devra peut-être éventuellement s’en remettre davantage aux dons de charité. Nous vous posons la même question que nous avons posée aux Canadiens dans notre plus récent rapport. Pourriez-vous vous imaginer que la capacité de travail du directeur parlementaire du budget ou de la vérificatrice générale soit assujettie à des dons? J’espère que vous conviendrez avec moi que cela est totalement inconcevable, et que tout cela vous amènera à réfléchir aux raisons pour lesquelles on traite si différemment la nécessité de rendre des comptes lorsqu’il s’agit des peuples autochtones.
Nous voulons également faire écho aux critiques formulées par des organisations autochtones comme l’Assemblée des Premières Nations, l’APN, l’Inuit Tapiriit Kanatami, ou ITK, et le Ralliement national des Métis, le RNM, qui ont toutes soulevé de vives inquiétudes quant au caractère représentatif du conseil, surtout du fait que la loi autorise le gouvernement fédéral à nommer pas moins des deux tiers des membres du premier conseil d’administration. Nous convenons que cela s’inscrit tout à fait dans l’attitude paternaliste qui a toujours caractérisé la relation du gouvernement fédéral avec les peuples autochtones. Nous vous demandons donc dans quelle mesure la loi proposée nous garantit que ce conseil sera véritablement représentatif des survivants des pensionnats indiens et de leurs descendants.
Nous voulons enfin reprendre à notre compte les préoccupations exprimées par la présidente du Ralliement national des Métis, Cassidy Caron, quant au fait que le conseil ne disposera pas des pouvoirs juridiques lui permettant d’avoir accès aux données dont il aura absolument besoin, notamment du fait qu’il ne pourra pas assigner des témoins à comparaître. J’aimerais rappeler aux membres du comité que les commissaires de la Commission de vérité et réconciliation ont dû poursuivre le gouvernement fédéral en justice à de multiples reprises du fait que le Canada a refusé de remettre des millions de documents aux chercheurs de la commission. Cette considération est d’autant plus importante que le Canada s’est récemment montré réticent à fournir des données significatives à jour dans des domaines comme le bien-être des enfants, l’éducation, la santé et la justice — en vous rappelant que c’est précisément ce qui est demandé dans les appels à l’action 2, 9, 19 et 30.
L’efficacité future d’un conseil national de réconciliation dépend en grande partie des gestes qui seront posés à ce moment-ci et des décisions que le Sénat prendra au cours des semaines et des mois à venir.
Je vais en rester là pour l’instant, mais je me réjouis à la perspective de discuter avec vous aujourd’hui au nom du Yellowhead Institute et de répondre à toutes vos questions à ce sujet.
Le président : Merci, monsieur Mosby. Nous allons maintenant passer aux questions des sénateurs.
Le sénateur Arnot : Merci aux témoins qui comparaissent devant nous aujourd’hui. Je pense que nous pourrons avoir une discussion fort intéressante.
Je me réjouis également de la création d’un conseil national de réconciliation parce que j’y vois une source d’espoir. Ce conseil devra faire rapport sur l’évolution du processus de réconciliation, ce qui nous permet à tous d’espérer. Cela dit, j’inviterais maintenant nos témoins à réfléchir aux considérations suivantes.
C’est un mandat extrêmement complexe et varié qui est confié à ce conseil. Tout cela s’articule cependant autour de la capacité d’effectuer des recherches et de compiler des données, c’est‑à‑dire des données désagrégées de qualité sur l’évolution des choses, pour pouvoir établir les rapports nécessaires. M. Gros‑ouis a déjà abordé la question de l’éducation, mais le mandat porte aussi sur le bien-être des enfants, la santé et la justice. Comment doit-on s’y prendre? Comment le conseil national va‑t‑il collecter les données dont il a besoin? Qui va s’en charger? Comment seront-elles analysées? Ces données doivent être compilées d’une manière permettant leur analyse adéquate pour que ce conseil puisse s’acquitter de son vaste mandat.
L’autre élément à considérer — et vous en avez déjà traité — est le fonds de dotation qui est établi à 125 millions de dollars. On a l’impression que c’est une grosse somme d’argent, et c’est bel et bien le cas. Mais, si l’on anticipe un rendement annuel de 2 % — et il pourrait être supérieur —, cela donne 2,5 millions de dollars. C’est bien peu compte tenu de l’ampleur du mandat que cette commission devra assumer.
J’aimerais savoir ce que nos témoins en pensent. Merci.
M. Mosby : Je me pose aussi de sérieuses questions à ce sujet. Il ne m’apparaît pas crédible de penser qu’une organisation comptant 13 commissaires et tout leur personnel puisse fonctionner avec un budget de 2 millions de dollars par année. Il faut prévoir dans le projet de loi un mécanisme de financement quelconque, mais ce n’est pas le cas actuellement. Ce serait vraiment l’une des principales recommandations de notre institut.
Le sénateur Arnot : On serait porté à croire que le gouvernement fédéral aurait un rôle à jouer à cet égard.
M. Mosby : Effectivement.
Le sénateur Arnot : Le financement devrait venir du gouvernement fédéral, même s’il s’agit d’une organisation de la société civile.
M. Mosby : Je suis tout à fait d’accord.
M. Gros-Louis : Je voudrais seulement ajouter qu’il y a une petite distinction à faire entre les données à gérer et les résultats souhaités. Si l’on veut vraiment que les données collectées puissent permettre d’améliorer les choses pour contribuer au processus de réconciliation, ce qui est l’objectif de cette loi, il faut accorder aux 13 commissaires le pouvoir de demander des comptes pour veiller à ce que les différents partenaires — le gouvernement, les ministères et les organismes — agissent tous en fonction des besoins particuliers des Premières Nations. C’est ce que nous avons pu observer avec le projet de loi C-91 concernant les langues autochtones ainsi que dans le secteur de l’éducation. Le commissaire aux langues autochtones ne dispose pas de moyens suffisants pour interagir avec les provinces et les territoires et jeter des ponts avec le gouvernement afin de s’assurer d’enchâsser dans la loi les outils à mettre en œuvre pour contribuer à la prospérité de nos jeunes. J’estime donc qu’il faudrait que les commissaires puissent d’une manière ou d’une autre faire en sorte que le gouvernement et certains sous‑ministres et ministres soient tenus de présenter des rapports et de prendre des engagements.
Le sénateur Arnot : Vous parlez d’obliger le gouvernement fédéral à témoigner devant la commission de réconciliation et à lui fournir les données dont elle a besoin pour mener ses recherches.
M. Gros-Louis : Si ces données permettent effectivement de faire progresser le Canada sur le sentier de la réconciliation. On ne peut pas arriver à des résultats en travaillant tout seul. Cela signifie que les Premières Nations et les différentes organisations comprennent bien les résultats attendus et estiment qu’ils sont tout à fait sensés. Il faut faire ressortir l’aspect humain des données pour pouvoir bien cerner le fossé à combler afin d’établir le lien entre nos deux communautés.
Le sénateur Arnot : Merci.
La sénatrice LaBoucane-Benson : Monsieur Gros-Louis, merci beaucoup pour votre témoignage. Vous avez évoqué la notion de souveraineté en matière de données, et j’aimerais savoir ce que cela signifie pour vous et comment ce concept s’inscrit dans le contexte de ce projet de loi.
M. Gros-Louis : Le Conseil en éducation des Premières Nations a signé une entente régionale historique de 1,1 milliard de dollars avec le Canada en matière d’éducation. Cet accord a été conçu en fonction des besoins véritables de nos Premières Nations, et nous avons pu faire valoir tous nos besoins financiers afin que nos jeunes puissent bénéficier d’une éducation dont la qualité est équivalente à celle qui est offerte partout ailleurs au Québec. Comme le Canada ne disposait pas de cette capacité, il s’en est remis à notre expertise. Cette reconnaissance de notre expertise était à mes yeux un geste de réconciliation.
La sénatrice LaBoucane-Benson : Merci.
Monsieur Mosby, je suis ravie de vous rencontrer. Je vous suis sur Twitter et je suis au courant de ce que vous faites. Je suis reconnaissant au Yellowhead Institute pour le travail qu’il accomplit. Dans le cadre de vos recherches, est-ce que votre groupe et vous-même avez pu déterminer comment on pourrait s’y prendre pour obliger les provinces et les territoires à divulguer des données? Une partie des données nécessaires pour permettre au conseil d’effectuer son travail ou pour donner suite aux appels à l’action ne sont pas détenues par le gouvernement fédéral. Avez-vous des conseils ou des trucs à donner au comité quant aux dispositions à prendre pour obliger les provinces et les territoires à communiquer les données en question?
M. Mosby : C’est une excellente question. Je ne suis pas avocat, et je pourrais difficilement vous dire comment il faut gérer les relations fédérales-provinciales. On pourrait peut-être ajouter à ce projet de loi un pouvoir législatif en matière de collecte des données et la possibilité, par exemple, de citer des témoins à comparaître pour obliger les provinces à fournir les données requises.
La sénatrice LaBoucane-Benson : J’aimerais que nous parlions également de souveraineté en matière de données. Qu’est-ce que cela signifie exactement? Il existait auparavant un centre pour la collecte des données concernant les Premières Nations, mais le gouvernement précédent a décidé de mettre fin à ses activités. Qu’est-ce que le Yellowhead Institute entend par « souveraineté en matière de données »?
M. Mosby : J’ai déjà parlé des appels à l’action 2, 9, 19 et 30. Ils visent à obtenir des données de base sur le traitement réservé aux peuples autochtones au Canada. Ce sont des données sur les Autochtones qui sont nécessaires à la création de programmes et à l’adoption de lois. Il est extrêmement problématique que l’on n’ait toujours pas donné suite à ces appels à l’action, huit ans après qu’ils aient été lancés — alors que nous approchons de la date anniversaire du mois de juin. Notre institut n’a pas manqué de faire valoir qu’il serait presque impossible d’aller de l’avant avec les autres appels à l’action, si l’on ne donne pas suite d’abord à ceux déjà mentionnés pour obtenir les données permettant de cerner les problèmes.
M. Gros-Louis : J’ajouterais à ce que vient de dire M. Mosby qu’il suffirait d’indiquer dans la loi — probablement dans son préambule — les résultats à obtenir pour conclure qu’il y a réconciliation et de fournir le financement suffisant à cette fin, et nous nous chargerions du reste. Il n’est pas nécessaire que ce soit le gouvernement qui le fasse. Nous pouvons maintenant compter sur une certaine expertise en la matière au sein notamment d’organisations comme la nôtre et comme le Conseil en éducation des Premières Nations. Vous n’avez qu’à nous dire ce que vous voulez, et nous travaillerons ensemble pour vous l’offrir de manière à réellement confirmer qu’il nous est possible de conjuguer nos efforts pour combler les fossés existants.
La sénatrice LaBoucane-Benson : Voulez-vous dire par là qu’il est impossible de savoir si nous réussissons à colmater les brèches au bénéfice des Autochtones ou à réduire leur surreprésentation à certains égards si nous ne disposons pas d’information de qualité nous permettant de savoir où nous nous situons actuellement et où nous en serons rendus dans deux ans ou dans six ans d’ici? Est-ce bien ce que vous êtes en train de nous dire?
M. Gros-Louis : À la nuance près qu’il nous est possible d’ajouter des compléments d’information, parce que nous collectons des données sur le terrain, notamment en matière d’éducation. Nous gérons en effet notre propre secteur de l’éducation. Vous n’avez donc qu’à nous faire part de vos besoins, et nous vous dirons comment il faut procéder pour faire le nécessaire en collaboration avec le gouvernement. Permettez‑nous d’être un partenaire dans la collecte et l’analyse des données.
La sénatrice LaBoucane-Benson : Merci.
La sénatrice Sorensen : Bienvenue à nos témoins.
Au cours des dernières semaines, j’ai eu de nombreux échanges concernant la représentation des différents groupes au sein du conseil, mais il y a un sujet que je n’ai pas vraiment abordé. Au moins les deux tiers des administrateurs doivent être des Autochtones. Vous pouvez tous les deux vous prononcer à ce propos. Pensez-vous que l’on devrait compter une plus grande proportion d’Autochtones au sein du conseil? Quels avantages voyez-vous à l’inclusion de Canadiens allochtones à titre d’administrateurs?
M. Mosby : Je pense qu’il devrait y avoir davantage d’Autochtones. Il est peut-être bon que les colonisateurs assument certaines responsabilités aux fins de la réconciliation, mais j’estime qu’il serait exagéré de leur attribuer le tiers des places au conseil d’administration.
M. Gros-Louis : Il faut indiquer clairement dans le préambule quelles sont les attentes. Si la loi n’a pas le mordant nécessaire pour permettre au conseil de s’acquitter de son mandat pour tendre véritablement vers la réconciliation, peu importe que les deux tiers ou la totalité des administrateurs soient autochtones. Il faut surtout savoir quelles sont les attentes et dans quelle mesure les différentes organisations vont y souscrire. Ce sera le facteur clé pour que cette loi soit efficace, car je n’ai pas l’impression que l’on pourra disposer de ressources financières suffisantes. Vous devriez donc faire appel à nos organisations et à notre expertise pour poursuivre votre parcours de réconciliation, si vos ressources financières vous le permettent.
La sénatrice Sorensen : Merci à tous les deux.
La sénatrice Coyle : Merci à M. Gros-Louis et à M. Mosby.
Monsieur Gros-Louis, je ne crois pas vous avoir entendu parler de la structure retenue pour le conseil qui serait considéré comme une organisation à but non lucratif. Nous avons eu droit à des opinions divergentes à ce sujet. J’aimerais bien savoir ce que vous en pensez. Vous avez seulement évoqué un amendement lié aux données qui viserait notamment l’inclusion des organisations autochtones en matière d’éducation comme sources d’information pour permettre d’aller au fond des choses. Si vous avez une réponse à nous donner concernant la constitution du conseil lui-même, pourriez-vous me le faire savoir?
M. Gros-Louis : À mes yeux, il importe peu qu’il s’agisse d’une agence, d’une société d’État ou d’une organisation sans but lucratif. C’est vraiment le mandat qui compte. Il s’agit de déterminer ce que l’on souhaite voir cette organisation faire tout en s’assurant le soutien des Premières Nations et des organisations autochtones pour nouer effectivement ce lien. Le type d’organisation n’a aucune importance. Le préambule et certains articles — dont encore une fois l’article 16.1 — vont certes procurer le mordant requis pour établir une relation et obliger les organisations et la bureaucratie à travailler vraiment dans un esprit de réconciliation, comme celui que nous avons connu lors de la signature de l’Entente nationale en matière d’éducation avec les Premières Nations du Québec. C’était là un excellent exemple de réconciliation.
La sénatrice Coyle : Merci. Tout cela est très utile.
Monsieur Mosby, vous nous avez fait part de nombreuses lacunes que vous avez relevées, même si vous appuyez la création d’un conseil national de réconciliation. Il y a notamment un financement qui vous semble insuffisant et un problème d’accès aux données. Vous avez par ailleurs exprimé vos réserves quant au fait qu’il s’agisse d’une organisation sans but lucratif, et vous avez aussi traité de la question de la représentation. Vous avez répondu en partie à ma question lors de votre échange avec la sénatrice Sorensen, mais je pense que vous avez fait valoir qu’il ne fallait pas s’arrêter aux chiffres. J’ai eu l’impression que vous souhaitiez aborder la question de l’instance qui procède aux nominations et peut-être aussi d’autres aspects. Pourriez-vous nous dire comment vous pensez qu’il faudrait s’y prendre pour constituer ce conseil en nous indiquant la forme qu’il pourrait prendre dans un scénario idéal? Quel serait le processus à privilégier et qui y participerait? Il est bien sûr difficile d’envisager une telle situation idéale, mais j’aimerais que vous nous en disiez un peu plus long à ce sujet.
M. Mosby : Merci. Je vous dirai qu’il serait de loin préférable si c’était les grandes organisations autochtones qui nommaient certains des premiers membres du conseil d’administration. On voit donc un problème structurel dans le projet de loi, c’est‑à‑dire qu’il n’a pas été conçu en collaboration avec les parties prenantes. Quand on parle d’un conseil national, les parties prenantes devraient y jouer un rôle prioritaire. Ce sont les survivants qui sont les plus importants. Cindy Blackstock a dit que les appels à l’action sont le plan de travail des survivants pour le pays. Lorsque moi-même et Mme Jewell avons tenté de voir à quoi ressemblerait un conseil idéal, nous avons conclu que ce serait un conseil créé par les survivants. Ce serait un conseil à l’abri des débats politiques. Je ne peux vous préciser la composition exacte et je ne peux pas vous donner l’avis du Yellowstone Institute, mais essentiellement, les appels à l’action doivent être la priorité, c’est-à-dire le plan de travail des survivants pour le pays. Les survivants et les groupes qui les représentent doivent occuper un rôle clé.
La sénatrice Coyle : Merci.
La sénatrice Moodie : Je remercie les témoins de leur présence aujourd’hui.
J’aimerais en savoir plus sur le conseil et le processus de nomination. Évidemment, de nombreuses organisations ont fait part de leurs préoccupations sur la composition du conseil d’administration et le processus de nomination, qui prévoit que le premier conseil sera constitué de personnes choisies par le ministre en collaboration avec le comité de transition, dont les membres auront été nommés par le gouvernement. Ma question est la suivante : pensez-vous que le gouvernement devrait jouer un rôle moins important dans le choix des membres du conseil d’administration? Devrait-il en céder la responsabilité? Devrait-il renoncer à un rôle quelconque dans le processus?
M. Gros-Louis : Le Conseil en Éducation des Premières Nations…
La sénatrice Moodie : Si le gouvernement devait y occuper un rôle, en quoi consisterait-il?
M. Gros-Louis : Nous n’avons aucun avis là-dessus, car notre priorité, c’est que le conseil crée les conditions aptes à une réconciliation réelle de façon à ce qu’au final, la jeunesse et notre jeunesse en particulier, ait un espace propice pour son épanouissement, dans la fierté de notre patrimoine. Nous ne nous intéressons pas vraiment au processus de nomination. Ce qui nous importe, c’est une loi qui créera les conditions propices.
M. Mosby : Ce que nous voulons voir, c’est que le premier conseil d’administration soit constitué à la suite de réelles consultations auprès des groupes qui représentent les survivants, et que des organisations comme l’APN, l’ITK et le RNM veuillent réellement en faire partie. L’ITK a indiqué qu’il risque de ne même pas y proposer un candidat. Il faut apporter de grands changements au processus. Je ne peux pas vous dire exactement quels seraient ces changements, car je vous parle en tant que colonisateur blanc, et il ne devrait pas revenir à des gens comme moi de décider de la composition du conseil d’administration.
La sénatrice Moodie : Merci.
La sénatrice Audette : Kwe, monsieur Gros-Louis et monsieur Mosby.
Ici au Canada, nous avons plusieurs ordres de gouvernement qui permettent aux citoyens de choisir un maire, un premier ministre provincial et le premier ministre du pays; il existe également un espace politique que les citoyens peuvent occuper pour y défendre leurs valeurs. Ces systèmes se complètent. Moi‑même, en tant que femme innue et ancienne présidente de l’Association des femmes autochtones du Canada, je suis d’accord que des organisations comme celles que vous avez mentionnées existent, des parties prenantes, mais au final, pourquoi devons-nous toujours nous adresser à la même organisation, alors qu’il existe d’autres groupes formidables qui œuvrent dans le domaine de la réconciliation économique, par exemple? Pensez-vous que si nous nous bornons à une certaine façon de faire, nous risquons de passer à côté de groupes extraordinaires?
Monsieur Gros-Louis, je suis ravie que vous soyez venu témoigner devant le comité. Vous êtes expert en matière d’éducation et avez conclu une entente historique pour 22 communautés dans le domaine de l’éducation. Comment envisagez-vous votre participation, votre responsabilisation ou votre relation si nous passons par l’AFN, le cas échéant? Je ne sais pas comment cette organisation communiquera avec vous.
[Français]
M. Gros-Louis : C’est une excellente question, madame la sénatrice. [mots prononcés dans une langue autochtone]
Je pense que l’important — et on l’a vécu avec l’Entente régionale en matière d’éducation — est qu’il y avait à la base une règle de travail fondée sur le respect et la reconnaissance de l’expertise. Le Canada a écouté les besoins des jeunes et de notre organisation pour démontrer qu’on était rendu à une étape de la prise en charge.
C’est ce qu’on s’attend à ce que le conseil en réconciliation fasse en matière d’éducation partout au Canada. Oui, on est chanceux au Québec, mais le conseil doit être capable d’amener le ministère à s’assurer que cette expertise et son financement sont légaux et équitables partout. C’est ce à quoi je m’attendrais de la part d’un conseil solide.
[mots prononcés dans une langue autochtone]
[Traduction]
M. Mosby : Je pense que c’est raisonnable. Il devrait y avoir un conseil réunissant une grande diversité. En fait, puisque l’un des principaux objectifs du conseil consiste à tenir le Canada responsable, il serait formidable d’y voir des gens venant des secteurs comme celui de la justice, de la santé ou de la protection de la jeunesse qui participent à la lutte visant à exiger des comptes du Canada. C’est très important. Mais si c’est le ministre qui nomme les membres du conseil, quelles sont les chances que les personnes qui militent pour la responsabilisation du Canada soient nommées?
Le Yellowhead Institute aimerait que le conseil soit doté de pouvoirs, qu’il fasse le travail essentiel pour exiger des comptes et qu’il puisse émettre des critiques et être indépendant. C’est vraiment cela que nous voulons. Nous nous soucions moins des organisations individuelles qui puissent avoir des représentants au sein du conseil; nous voulons davantage voir une organisation efficace. Mon collègue ici présent, M. Gros-Louis, l’a dit maintes fois. À moins que l’organisation n’ait les fonds nécessaires dès le départ, à moins d’avoir une loi bien structurée, peu importe qui siégera au conseil.
La sénatrice Martin : Je remercie les témoins d’être des nôtres.
Ma première question est fort simple. J’aimerais savoir si vous-mêmes ou vos organisations avez participé aux consultations qui ont précédé le projet de loi C-29.
M. Gros-Louis : Merci, sénatrice Martin.
Je ne pense pas que nous ayons été consultés officiellement, mais il y a eu une certaine consultation officieuse au moyen de discussions qui ont eu lieu avec quelques bureaux. Je n’ai pas de données précises là-dessus. Encore un problème de données.
M. Mosby : Nous sommes nombreux au Yellowhead Institute, ce qui fait que je ne suis pas sûr. Je ne peux répondre à votre question.
La sénatrice Martin : Je vous ai posé la question, car j’ai fait des recherches sur vos organisations respectives. Je suis devenu membre du comité récemment. Il me semble que vous avez énormément de connaissances et que vous faites un excellent travail qui cadre bien avec les objectifs du conseil.
Passons au paragraphe 7(a). Nous avons parlé de l’objectif. Peu importe le type d’organisation : l’essentiel, c’est ce qu’elle va faire. Le paragraphe 7(a) indique que tout d’abord, il faut élaborer et mettre en œuvre un plan d’action pluriannuel national afin de faire avancer les efforts de réconciliation. C’est déjà énorme comme objectif. Ma question est posée à vous deux. Existe-t-il des obstacles qui pourraient gêner l’élaboration d’un plan d’action national? Qu’aimeriez-vous voir dans ce plan d’action?
M. Gros-Louis : Ce que j’aimerais voir relève de l’utopie. J’aimerais que tous les premiers ministres des provinces et des territoires se réunissent avec la cheffe nationale, l’ITK et les organisations des Premières Nations autour d’une table dans une salle, se donnent la main et disent : « Nous allons travailler ensemble pour donner un meilleur avenir à nos jeunes. » Ce serait formidable. C’est toute une tâche que de concevoir un projet de loi portant sur les relations du gouvernement fédéral avec les provinces et territoires et les Premières Nations. Je ne sais pas si c’est possible de tout mettre dans le projet de loi. Toutefois, ce serait déjà un exploit de réunir tous ces intervenants dans une seule salle et de les voir apposer leur signature à côté de celle de la gouverneure générale, car cela assurera la réussite du conseil.
M. Mosby : J’aimerais voir une organisation qui a la capacité de concevoir un plan pluriannuel et d’engager, par exemple, les chercheurs et les analystes nécessaires. Il faut impérativement prévoir un budget suffisant dès le départ. Comme je l’ai dit avant, le libellé actuel du projet de loi ne prévoit pas suffisamment de fonds.
M. Gros-Louis : J’ajouterai que le gouvernement a réduit les fonds accordés à notre organisation pour le développement de sa structure. Il faudra certainement plus que 2 millions de dollars, ne serait-ce qu’au chapitre de l’éducation, et il en faudra beaucoup plus pour la santé, où les besoins sont énormes. Nous aurons besoin de plus de fonds.
La sénatrice Martin : Cet article comporte des paragraphes de a) à i) énonçant des objectifs, dont le premier qui est ambitieux. Vous avez parlé d’une utopie, mais si nous pouvions réaliser ce type de communication, si nous pouvions le faire, comment devrions-nous procéder? Vous en avez présenté un portrait idéal. Feriez-vous partie du processus?
M. Gros-Louis : L’éducation fait certainement partie des éléments clés, car elle nous permettra de faire fond sur la fierté de notre identité lorsque nous apprendrons que les organisations et les gouvernements renonceront à leur pouvoir de prise de décisions unilatéral et nous accorderont une réelle capacité de créer une organisation en vue de défendre et d’assumer pleinement nos droits inhérents. Je crois que le financement serait un bon début, mais il faudrait aussi accorder au conseil les pouvoirs nécessaires pour détecter les faiblesses.
La sénatrice Martin : Merci.
La sénatrice Hartling : J’aimerais remercier les témoins d’alimenter cette conversation fort intéressante.
Vous avez tous les deux parlé du mandat, des partenariats et de la volonté de travailler ensemble. Vous avez indiqué votre volonté d’agir, en précisant que le projet de loi devait avoir du mordant et comprendre un cadre, puisqu’il existe un problème structurel à régler pour que les parties prenantes, notamment les survivants, puissent participer. Il y a ensuite le problème propre aux ONG. Je suis d’accord. J’ai travaillé au sein d’une ONG, et je reconnais que c’est difficile, car le travail est sous-estimé.
Nous avons ensuite parlé du financement. Comment insérer le financement dans le projet de loi? On ne peut y préciser des montants. Faudrait-il éviter le statut d’OGN? Comment prévoir le financement à long terme? Le risque d’échec est réel sans le financement nécessaire. Je réfléchis à tout ce que vous avez dit. Vous avez soulevé des idées et des problèmes importants. Comme prévoir le financement et la structure organisationnelle nécessaires?
M. Gros-Louis : Je pense que le Sénat, en tant que chambre haute, devrait avoir un certain pouvoir, probablement sous la forme d’un amendement, pour autoriser ou obliger dans une certaine mesure le gouvernement à accorder un financement à long terme à l’organisation et à s’engager auprès d’organisations éducatives comme le CEPN, car je ne peux parler que du secteur de l’éducation. Nous aurons ainsi les fonds nécessaires pour recueillir les données dont vous avez besoin et, plus important encore, avoir la capacité de réaliser la réconciliation.
Comme je l’ai dit, lorsque nous avons participé aux négociations, ce n’était pas en vue d’obtenir une entente en matière d’éducation. Nous avons travaillé sur une entente tout court. Si cette entente était valide pour l’éducation, pourquoi pas pour la santé? Lorsque l’éducation vient s’ajouter à la santé, à l’assistance sociale, au logement, au final, tout cela crée une meilleure vie pour notre jeunesse. Je ne peux parler que de l’éducation et de notre jeunesse. Une fois les conditions nécessaires réunies, nos communautés grandiront, et tout le monde en bénéficiera.
Il faut trouver un équilibre dans les relations. Le Canada ne doit pas gouverner et prendre des décisions. Il faut prévoir un équilibre dans le projet de loi qui permettra aux Premières Nations de dire : « Ça, ça ne fonctionne pas. Pouvez-vous trouver une solution? » On aurait ainsi la capacité d’effectuer de la recherche et le personnel pour le faire. Dans certains cas, on pourrait trouver des solutions. Je vous donne l’exemple des langues. Le projet de loi C-91, Loi concernant les langues autochtones, n’a pas aidé dans le cas de la loi 96 du Québec. Le commissaire est en mesure d’aider, ainsi que le conseil, pour combler les lacunes sans accorder de financement, car il est impossible de prévoir suffisamment de pouvoir dans un projet de loi de façon à ce que le gouvernement soit obligé d’accorder un financement afin que l’esprit de la loi soit respecté.
Je suis désolé, monsieur Mosby, j’ai parlé trop longuement.
M. Mosby : Mais non.
Je ne suis pas juriste, ce qui fait que je ne saurais proposer un amendement quelconque, mais je suis sûr que le gouvernement fédéral a créé d’autres organisations indépendantes au moyen de lois qui ont un financement stable et permanent. Vu l’importance de l’organisation, surtout pendant les premières années de son existence, c’est là où on devrait accorder la priorité. On ne peut pas se permettre de tout simplement se croiser les doigts.
La sénatrice McCallum : Merci d’avoir fait vos exposés, et bienvenue au Sénat.
Les Euro-Canadiens et certains de nos propres gens ne peuvent s’empêcher d’être des colonisateurs en raison de leur mentalité et leur comportement façonnés par la culture dominante et de leur participation aux systèmes d’inspiration européenne de santé, de justice et d’éducation sur les terres autochtones occupées par le Canada. Si je le dis, c’est parce que je sais que c’est une discussion difficile. Je sais ce que c’est d’être colonisatrice, car c’est un rôle que j’ai endossé pendant de nombreuses années après ma diplomation. J’ai mis beaucoup de temps à comprendre que je devais me décoloniser et épouser la façon d’être Autochtone. Nous sommes aussi plus que des colonisateurs. Nous sommes des êtres humains. Comment la réconciliation peut-elle réellement changer la donne à l’échelle de la société? En redonnant ce qui a été enlevé, comment faire la promotion des connaissances et des façons de faire autochtones, en sachant qu’elles se heurtent parfois à notre passé?
M. Gros-Louis : Ma réponse, c’est l’équité. Comme je l’ai dit plus tôt, ce fut une grande occasion pour le Conseil en Éducation des Premières Nations et les 22 chefs de se réunir avec la ministre Hajdu l’année dernière et de signer une entente nous donnant la capacité de concevoir nos propres programmes linguistiques et nos propres curriculums dans nos écoles. L’apprentissage en milieu naturel est maintenant offert aux jeunes dans nos communautés pour le bien de tous. Toutefois, ce n’est pas le cas partout. Le conseil responsable du paragraphe sur l’éducation devrait obliger SAC à demander pourquoi il y a eu des réussites. Quelles sont les leçons à retirer? Pourquoi ces efforts ont-ils porté fruit au Québec et avec d’autres organismes, mais pas ailleurs?
Le conseil pourrait alors travailler sur la capacité. Vous avez parlé d’un plan d’action. L’éducation, c’est un cheminement sur le long terme. Le Canada a tenté de détruire nos nations et nos façons de faire pendant 120 ans, et pourtant, nous avons survécu. La plupart de nos langues existent toujours et nous leur insufflons une nouvelle vie. De nombreuses communautés participent aux efforts.
Le conseil pourrait jouer un rôle important pour indiquer à certains ministères et organismes que de tels efforts ont donné des résultats, et voilà les leçons à en tirer. Nous avons parlé de la collecte de données. Des leçons positives qui ont été apprises, et on devrait les mettre en œuvre ailleurs, avec l’engagement des ministres et du gouvernement. Ensuite, comment trouver des façons d’assurer un financement suffisant? La réponse est l’éducation. C’est essentiel, mais il faut aussi des logements décents avec de la place pour tous. Vous connaissez déjà le problème.
M. Mosby : Le conseil devrait être autonome. Voilà pourquoi la nomination des premiers membres du conseil d’administration est tellement importante, car c’est ainsi qu’on créera une entité représentative qui puisse établir des protocoles reposant sur les valeurs autochtones. C’est primordial, et c’est pour cela qu’il faut absolument partir de bon pied.
Le vice-président : Merci. Nous avons terminé la première série de questions. Nous en commençons une deuxième.
La sénatrice Coyle : Vous nous avez tous les deux donné beaucoup de matière à réflexion. Il est évident que tout le monde veut assurer le succès du conseil et, du même coup, le succès des peuples autochtones du Canada.
Pour réussir, il faudra se doter d’un premier conseil d’administration de la bonne façon, en choisissant les gens qu’il faut et en prévoyant un budget suffisant. En passant, j’aime bien l’idée d’un fonds de dotation dopé. Un fonds de dotation serait très utile. Il aiderait l’organisation à exister indépendamment des changements de gouvernement et d’autres facteurs. Je comprends le raisonnement. C’est un outil logique et utile, mais j’ai aussi entendu vos arguments sur la suffisance et la permanence du financement.
Dans le cadre de cette préparation à la réussite, j’examine ce que doit inclure la composition du conseil selon le projet de loi actuel. Un grand nombre d’entre nous ont entendu les représentants du Congrès des peuples autochtones. En vertu du projet de loi actuel, un membre est élu après avoir été nommé par l’Assemblée des Premières Nations, un autre par Inuit Tapiriit Kanatami, un autre par le Ralliement national des Métis et un autre par l’Association des femmes autochtones du Canada. Les représentants du Congrès des peuples autochtones n’ont pas encore comparu devant le comité, mais beaucoup d’entre nous les ont rencontrés individuellement. Ils estiment qu’ils devraient faire partie de la même catégorie que les autres organismes autochtones que j’ai mentionnés. L’un ou l’autre d’entre vous a‑t-il des conseils à nous donner ou avez-vous pris position à ce sujet ou pouvez-vous formuler des commentaires?
M. Gros-Louis : Nous n’avons pas encore adopté de position à ce moment-ci, car les objectifs de l’association sont de fournir de bons services à nos jeunes dans nos collectivités, de veiller à entretenir de bonnes relations avec les écoles voisines, de travailler efficacement avec le gouvernement provincial dans le domaine de l’éducation et de mettre en œuvre un accord qui a été élaboré en tenant compte de la réconciliation. Nous n’avons encore adopté aucune position sur les besoins du Congrès des peuples autochtones. Je suis désolé de ne pas pouvoir vous en dire plus.
M. Mosby : De même, le Yellowhead Institute n’a pas adopté de position précise au sujet de cet organisme, mais le fait d’avoir au sein du conseil d’administration des personnes qui ont lutté pour obtenir une reddition de comptes au sujet de la réalisation des appels à l’action est la chose la plus importante. C’est encore plus important que d’avoir des représentants des divers organismes.
La sénatrice Coyle : Je vous remercie beaucoup.
La sénatrice Audette : Je vais maintenant vous suivre sur Twitter, mais je vous suivais déjà sur votre site Web. J’y ai souvent recherché des renseignements. Si j’étais une politicienne dans une province ou ailleurs, j’irais régulièrement voir ce dont vous parlez sur votre site Web. Au bout du compte, je suis certaine que c’est grâce à ce que vous dîtes sur votre site que nous voulons améliorer ou changer la façon dont nous faisons les choses ou honorer ce qu’est la réconciliation ou la façon dont nous la définissons. Dans votre déclaration préliminaire, vous dites que c’est nécessaire, et il est important de savoir que vous travaillez avec votre institution et que vous affirmez qu’il est très important d’avoir une présence dans ce projet de loi.
De même, les rapports que vous publiez sur votre site Web sont importants, car ils nous permettent de suivre la situation grâce à vos annonces, par exemple, au sujet d’un appel à la justice qui vise expressément les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées ou un appel à l’action pour la Commission de vérité et réconciliation du Canada, car vous fournissez une mise à jour et des résultats. Parfois, cela peut prendre des mois ou des années, mais vous affichez les résultats dans les rapports que vous publiez sur votre site Web.
M. Mosby : Je vous remercie.
Je dirais que l’un des objectifs communs de Mme Eva Jewell et moi-même a toujours été de ne plus avoir à rédiger ces rapports et d’avoir un organisme qui fasse tout ce travail tout en ayant les ressources et la capacité nécessaires pour y arriver. C’est la raison pour laquelle nous sommes de fervents partisans de la création de ce conseil national. La route a été longue et il a été très difficile de rédiger les rapports et de rassembler l’expertise nécessaire. Nous espérons donc que cet organisme sera solide, bien financé et légitime.
Nous travaillons avec les appels à l’action depuis les sept dernières années, et nous avons pu observer la sagesse des commissaires dans le cadre de ces appels, surtout celui qui concerne le conseil national, car il représente une excellente orientation pour le Canada. C’est aussi un organisme dont on a grandement besoin.
La sénatrice Audette : Pour conclure, monsieur Mosby et monsieur Gros-Louis, ce conseil est aussi un endroit, je présume, où nous pouvons toujours communiquer les bonnes nouvelles, n’est-ce pas?
M. Mosby : Oui.
[Français]
M. Gros-Louis : Absolument. J’aimerais compléter avec votre exemple, sénatrice Audette. L’entente régionale qu’on vient de signer demandait de changer les paramètres avec le Conseil du Trésor sur la manière de rendre compte. Au début, le ministère disait qu’il était l’interlocuteur et on a finalement réussi à rencontrer le Conseil du Trésor qui a accepté — il a lâché prise — notre expertise et que l’on change la façon dont on rendra compte des résultats.
La définition du succès était la définition du succès des Premières Nations et non pas celle du Canada.
Ce que je vois de la part du Conseil du Trésor, c’est que l’expert — ou s’il y a un expert en éducation — doit être aux tables afin d’observer ces changements qui sont en train de s’opérer dans la relation. Il pourra constater que si c’est bon de changer la façon dont les Premières Nations rendent des comptes, cela pourrait s’appliquer à tous. À ce moment, le Conseil du Trésor pourrait se dire qu’il pourrait travailler ainsi parce que c’est une manière réconciliée de travailler ensemble.
Merci.
La sénatrice Audette : Merci.
[Traduction]
Elle dit que vous êtes bon.
La sénatrice Coyle : C’est vrai.
Le président : Je vous remercie. Le temps imparti pour ce groupe de témoins est maintenant écoulé. Je tiens à remercier une nouvelle fois tous nos témoins d’avoir participé à la réunion d’aujourd’hui. Si vous souhaitez nous communiquer des renseignements supplémentaires en rapport avec une question posée aujourd’hui, je vous invite à les envoyer par l’entremise d’un mémoire écrit à l’attention de la greffière, Andrea Mugny, d’ici mercredi prochain.
Avant d’entamer la discussion avec notre deuxième groupe de témoins, j’aimerais rappeler à chacun d’entre vous que vos interventions doivent être aussi brèves que possible. En raison des contraintes de temps, chaque sénateur disposera de cinq minutes au total pour poser une question et recevoir une réponse des témoins. Comme d’habitude, nous donnerons la priorité aux membres du comité, puis aux autres collègues. S’il reste du temps, nous entamerons une deuxième série de questions.
J’aimerais maintenant vous présenter notre deuxième groupe de témoins. De l’Institut Macdonald-Laurier, nous accueillons Melissa Mbarki, analyste politique et coordinatrice de la sensibilisation, Programme des affaires autochtones. Nous accueillons également Neil Belanger, chef de la direction d’Indigenous Disability Canada. Je vous remercie de vous joindre à nous aujourd’hui.
Nos témoins auront chacun jusqu’à cinq minutes pour faire une déclaration préliminaire. Ces déclarations seront suivies d’une séance de questions et réponses avec les sénateurs. J’invite maintenant Mme Mbarki à faire sa déclaration préliminaire.
Melissa Mbarki, analyste politique et coordinatrice de la sensibilisation, Programme des affaires autochtones, Institut Macdonald-Laurier : Je tiens tout d’abord à vous remercier de me permettre de m’exprimer devant le comité aujourd’hui.
J’ai été élevée dans la Première Nation de Muskowekwan par mon mushum, qui signifie « grand-papa » et par ma kokum, qui signifie « grand-maman ». Le pensionnat autochtone dans ma réserve a été ouvert de 1889 à 1997, ce qui signifie qu’il a été en activité dans ma collectivité pendant 108 ans. Chaque membre de ma collectivité est donc un survivant ou un descendant de survivant de ce pensionnat.
Un organisme autochtone dont les membres sont nommés ne représentera pas pleinement ma collectivité du centre-nord de la Saskatchewan. Les cercles de discussion nationaux n’auront qu’un impact limité, et de nombreuses voix de la communauté sont exclues du dialogue et de la prise de décision.
J’aimerais aborder brièvement l’importance des voix de la communauté. Ma kokum a passé toute son enfance dans un pensionnat autochtone. Elle avait cinq ans lorsqu’elle a été emmenée de force et n’est pas retournée dans sa famille avant l’âge de 19 ans. Elle a été victime de mauvais traitements et elle était consciente des mauvais traitements qui étaient infligés dans ces pensionnats. Elle est devenue travailleuse sociale et a commencé à militer pour la fermeture du pensionnat de ma collectivité. Si une seule personne l’avait écoutée au milieu des années 1970, cela aurait évité à deux générations d’enfants de fréquenter ce pensionnat. C’est la raison pour laquelle les voix de la communauté sont essentielles lorsqu’il s’agit de la réconciliation.
Ma kokum faisait également la promotion de l’éducation et de l’emploi. Elle a trouvé un apaisement dans le fait d’avoir une carrière qui lui permettait de s’occuper de sa famille. Elle est devenue travailleuse sociale, ce dont elle a toujours été très fière. Elle parlait des besoins à combler dans notre collectivité et du manque d’emplois et de capacité à prendre soin de nous-mêmes.
J’ai quitté la réserve à l’âge de 17 ans parce qu’il n’y avait pas d’emploi. Si j’étais restée, j’aurais choisi une vie de pauvreté et les difficultés qui en découlent. Je vivrais dans un logement surpeuplé, avec de la moisissure et de l’eau qui ne serait pas forcément potable. Aujourd’hui, l’approvisionnement en eau est également limité. Ma famille reçoit un réservoir d’eau par semaine. Telle est la réalité des habitants des réserves.
Je suis pour le projet de loi C-29 parce qu’il permet aux Autochtones de se faire entendre dans le cadre du processus de réconciliation. Je suis quelque peu surprise que la réconciliation économique ne fasse pas l’objet d’une discussion plus approfondie, car la majorité des réserves ont des taux de chômage élevés. La création de possibilités pour les personnes qui vivent dans les réserves changera la donne. Nous avons besoin de voir des résultats concrets, et nous devons voir des changements.
Je suis aussi très surprise de ne pas avoir vu plus de commentaires sur la participation des Autochtones dans les grands projets de ressources. Il peut s’agir d’oléoducs, de projets pétroliers et gaziers ou de l’exploitation minière pour les minéraux critiques. De nos jours, il s’agit d’un sujet de discussion important dans le cadre de la lutte contre le changement climatique. Nous devons investir dans des technologies qui réduiront les émissions. Nous devons définir le champ d’application et établir des partenariats avec l’industrie pour mettre en œuvre des technologies de réduction des émissions telles que le piégeage du carbone ou la géothermie.
Je travaille dans ce secteur depuis près de 15 ans. Les peuples autochtones possèdent des connaissances traditionnelles axées sur la terre qui peuvent nous aider à réaliser des progrès. Ceux d’entre nous qui ont travaillé dans cette industrie peuvent combler les lacunes. Une fois de plus, où est notre voix? J’espère vraiment que lorsque nous nous pencherons sur des enjeux aussi importants que le changement climatique, toutes les voix autochtones seront prises en compte.
Je vous remercie de m’avoir permis de m’exprimer devant vous aujourd’hui. En unissant nos voix, je sais que nous pourrons transformer le désespoir qui règne dans les réserves. Hiy hiy.
Le président : Je vous remercie, madame Mbarki, de votre déclaration préliminaire.
La parole est maintenant à M. Belanger.
Neil Belanger, chef de la direction, Indigenous Disability Canada : Simgiigyet, Sigidim hanuak, K’ubawilxsihxw. J’aimerais remercier le comité de m’avoir donné l’occasion de parler brièvement aujourd’hui du projet de loi C-29, Loi prévoyant la constitution d’un conseil national de réconciliation.
Avant de commencer, j’aimerais reconnaître et remercier la Première Nation Esquimalt et la Première Nation des Songhees, car je vous parle aujourd’hui depuis leurs territoires non cédés. Je tiens aussi à reconnaître les territoires où vous êtes situés et où d’autres participants sont situés.
Comme je l’ai indiqué, je m’appelle Neil Belanger et je suis membre du clan Lax Se’el, dans la maison Nikate’en de la Première Nation Gitxsan. Je suis également chef de la direction d’Indigenous Disability Canada et de la British Columbia Aboriginal Network on Disability Society, un organisme autochtone national des personnes handicapées qui fournit des services depuis plus de 31 ans.
Le projet de loi C-29, Loi prévoyant la constitution d’un conseil national de réconciliation, vise à répondre aux appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation du Canada, et en particulier aux appels à l’action no 53 à 56. Cependant, comme la plupart des projets de loi adoptés au Canada, le projet de loi C-29 omet l’inclusion et la reconnaissance des personnes handicapées autochtones. Cette exclusion ne tient pas compte de leur expérience vécue, de leurs connaissances et de la contribution et de l’orientation précieuses que ces personnes pourraient apporter à la réconciliation.
On justifie souvent cette exclusion en déclarant que les personnes handicapées autochtones relèvent d’une autre catégorie ou d’un autre descripteur fourre-tout, par exemple les personnes « vulnérables » ou « diverses », ou qu’elles sont incluses par hasard, par exemple, en vertu de l’article 12 du projet de loi proposé, à titre de membres de l’un des groupes identifiés qui se trouvent à être aussi composés de personnes qui sont malheureusement handicapées.
Aujourd’hui, au Canada, le taux de handicap dans la population générale est de 22 %, alors qu’il est nettement plus élevé chez les Autochtones, soit 35 %. Les personnes handicapées autochtones sont plus touchées par la pauvreté et subissent le racisme envers les Autochtones et la discrimination fondée sur le handicap dans tous les secteurs. Elles ont survécu aux pensionnats autochtones ou sont des membres de la famille des survivants. Elles vivent au quotidien avec les traumatismes et les préjudices causés par ce système, tout en continuant à subir des politiques d’assimilation à tous les niveaux, car elles sont autochtones et handicapées.
Leurs voix dans l’orientation de la réconciliation ne doivent pas et ne peuvent pas être négligées et elles méritent une place permanente au sein des discussions. Il s’agit de voix comme celles du président du conseil d’administration de notre organisme, M. Stephen Lytton, un Autochtone qui a vécu toute sa vie avec un handicap. C’est un survivant des pensionnats qui a enduré 16 ans de mauvais traitements et de traumatismes dans le cadre de ce système génocidaire. Lui et d’innombrables autres personnes possèdent une expérience et des connaissances propres aux personnes handicapées autochtones qui permettent de faire connaître des perspectives et des points de vue qui sont souvent omis ou sous-estimés. Compte tenu de tout cela, il serait regrettable que le conseil national ne prévoie pas une représentation permanente désignée au titre de l’article 12 pour inclure les personnes handicapées autochtones.
J’ajouterai que l’inclusion des personnes handicapées autochtones à titre de représentants permanents et clairement définis au sein du conseil national est requise par la Loi canadienne sur l’accessibilité. En effet, voici les principes pertinents énoncés dans cette loi :
[...] les lois, politiques, programmes, services et structures doivent tenir compte des handicaps des personnes, des différentes façons dont elles interagissent au sein de leurs environnements ainsi que des formes multiples et intersectionnelles de discrimination et de marginalisation vécues par celles-ci;
De plus, la Loi canadienne sur l’accessibilité stipule ce qui suit :
[...] les personnes handicapées doivent participer à l’élaboration et à la conception des lois, des politiques, des programmes, des services et des structures [...]
Le conseil national de réconciliation peut contribuer à faire progresser la réconciliation et les droits des peuples autochtones à l’échelle du Canada, mais pas sans la voix des personnes handicapées autochtones.
Dans le cadre de la progression du projet de loi, je recommanderais d’envisager d’apporter les amendements suivants :
À l’article 10, qui s’intitule « Mise en candidature », afin d’assurer la représentation des Autochtones vivant en milieu urbain, il faudrait ajouter un nouvel alinéa e) dont le libellé serait « un doit avoir été élu après avoir été mis en candidature par le Congrès des peuples autochtones ». De plus, à l’article 12, qui s’intitule « Représentativité », il faudrait inclure le sous‑alinéa (1)a.3) dont le libellé serait « des personnes handicapées autochtones » et le sous-alinéa (1)f.1), dont le libellé serait « des Autochtones dont la langue apprise est la langue des signes autochtone, la langue des signes américaine ou la langue des signes québécoise », ou LSQ.
Je vous remercie de m’avoir accordé votre temps et je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
Le président : Je vous remercie beaucoup, monsieur Belanger.
J’aurais dû mentionner plus tôt que je brandirais un carton lorsque nous atteindrons les quatre minutes pour indiquer à chaque intervenant que son temps de parole touche à sa fin.
Cela dit, nous passons maintenant aux questions.
Le sénateur Arnot : Je serai bref.
Madame Mbarki, nous sommes heureux de voir une représentante de la Première Nation de Muskowekwan, en Saskatchewan, présenter des idées aussi bien formulées devant le comité aujourd’hui. J’aime l’idée d’assurer une représentation des voix de la communauté, et c’était l’un de vos points fondamentaux, l’autre étant la réconciliation économique. Je pense que vous avez raison de soulever cette notion, car la pauvreté est au cœur d’un grand nombre de problèmes auxquels les peuples autochtones du Canada font face aujourd’hui.
J’ai une question à poser à M. Belanger. Monsieur Belanger, si l’on considère le mandat du conseil national de réconciliation, pensez-vous qu’il existe suffisamment de données ou de paramètres relatifs aux personnes handicapées autochtones pour mesurer la réconciliation fondée sur les droits pour les personnes que vous servez? Je pose cette question dans le contexte des grands enjeux comme la protection de l’enfance, l’éducation, la santé et la justice, qui sont tous des enjeux de longue date pour les Autochtones, en particulier les personnes handicapées autochtones. J’aimerais beaucoup avoir votre avis à ce sujet.
M. Belanger : Est-ce que je pense qu’il y a suffisamment de données? Non, je ne pense pas qu’il y ait suffisamment de données à notre disposition. Cela devrait faire partie du processus du conseil pour veiller à ce que les données soient collectées et que le conseil y ait accès pour faire son travail. Mais je ne pense certainement pas qu’il y ait suffisamment de données.
Le sénateur Arnot : Êtes-vous convaincu que les membres du conseil national de réconciliation auront les outils nécessaires pour avoir accès aux données qui les aideront à faire leur travail?
M. Belanger : Ai-je bon espoir? Je ne suis certainement pas un expert en matière de création d’un conseil national de réconciliation, mais je sais que, compte tenu des fonds engagés et de l’ampleur du travail attendu, il pourrait y avoir d’importantes difficultés s’il n’y a pas une sorte de plan de viabilité et d’efficacité, et si le conseil n’est pas en mesure de faire son travail. Cela nécessitera un investissement important. Sans cet investissement et sans plan de viabilité — et je sais que les témoins précédents en ont parlé —, nous risquons de nous ne retrouver qu’avec un beau projet sur papier au lieu d’honorer l’intention du conseil national. C’est possible de le faire, mais d’autres éléments doivent être mis en place. Voilà ma réponse courte.
Le sénateur Arnot : Je vous remercie.
La sénatrice LaBoucane-Benson : Je remercie nos deux témoins.
Madame Mbarki, je vous remercie de votre témoignage. Je suis assez d’accord avec le sénateur Arnot sur le fait que la réconciliation économique et la pauvreté sont au cœur de certains des problèmes auxquels les peuples autochtones sont confrontés. Lorsque je consulte la composition de l’organisation et du conseil, je vois l’article 13(2) qui dit que le conseil doit consulter des personnes qui possèdent des expériences variées. Rien de tout cela n’exclut la réconciliation économique, mais peut-être nous demandez-vous d’inclure dans le rapport annuel du ministre une section qui vise plus précisément la réconciliation économique? C’est la première question que je vous pose.
Ma deuxième question est la suivante : comment définiriez-vous ou exprimeriez-vous cette réconciliation économique dans ce projet de loi? Il s’agit d’un concept très large. Il peut inclure tellement de choses. Pouvez-vous nous aider à ce sujet?
Mme Mbarki : Oui. Je reviens à ce qu’ont dit les autres témoins plus tôt à propos de l’acquisition de données. Il s’agit de l’un des principaux facteurs qui ont permis d’évaluer la pauvreté dans les réserves et à l’extérieur des réserves, mais nous manquons de statistiques à cet égard. Lorsque vous examinez les chiffres propres à une industrie, ces chiffres deviennent plus vagues lorsque vous tentez de savoir combien de personnes y occupent un emploi et combien n’y travaillent pas.
Il faut un mécanisme qui nous permette de saisir ces données de manière respectueuse. L’un des problèmes a trait à la confiance. Je participe à un programme de politique autochtone et je suis en contact avec un grand nombre de communautés. Ce que je constate, c’est qu’il y a beaucoup de méfiance et que les gens ne sont pas toujours prêts à fournir leurs données personnelles. Je le constate partout. C’est le cas dans les réserves et à l’extérieur des réserves. Je pense que la collecte de données sera un défi de taille, car c’est un sujet qui a été abordé à plusieurs reprises. Il faut examiner cela plus en détail.
La sénatrice LaBoucane-Benson : C’est très bien. Nous parlons de statistiques sur l’emploi et nous essayons d’obtenir une représentation précise de la situation. Nous parlons du taux de pauvreté dans les réserves et à l’extérieur des réserves, sur les terres désignées et non-désignées, dans les zones urbaines et rurales, et nous essayons de trouver des données fiables à ce sujet. Y a-t-il autre chose? Ce sont là deux ajouts concrets à propos des données publiées qui pourraient être apportés au projet de loi.
Mme Mbarki : Non, je n’ai rien à ajouter. Nous devons simplement obtenir ces données. Pour rendre des comptes à la communauté, aux Premières Nations, aux Inuits et aux Métis, nous devons être en mesure de leur fournir des données et des chiffres concrets qui démontrent si nous avons atteint nos objectifs ou non. Nous pouvons réussir dans certains domaines et moins bien dans d’autres, et c’est peut-être sur ces domaines-là que nous devons nous concentrer. Nous ne pouvons toutefois pas le savoir tant que nous n’avons pas de chiffres, et ces chiffres existent aujourd’hui, mais ils ne rendent pas compte de ce qui se passe à plus grande échelle, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur des réserves.
La sénatrice LaBoucane-Benson : C’est très bien. Je dirais que si nous nous intéressons à l’emploi et à la pauvreté, il serait bon d’examiner également les investissements dans les industries et les communautés afin d’avoir des éléments de comparaison.
Mme Mbarki : Certaines industries nous donnent des chiffres et nous pouvons les utiliser, mais il s’agit vraiment de chiffres qui sont propres à chaque entreprise. Nous devons élargir le tout pour pouvoir examiner la situation par province, par exemple, et voir à quoi ressemblent les statistiques dans les provinces des Prairies ou même en Ontario. Nous n’en sommes pas encore là, mais il faut absolument y arriver.
La sénatrice LaBoucane-Benson : Mes excuses. Je suis chercheuse, et pendant que vous parliez, j’étais en train de réfléchir à la manière de recueillir ces données. Je vous remercie de tous vos commentaires.
La sénatrice Martin : Je remercie nos témoins de ce soir. Vous avez tous dit quelque chose qui m’a interpellée, et je voulais revenir sur chacun de ces commentaires.
Madame Mbarki, comme mes collègues, j’ai aussi entendu dire que la réconciliation économique était très importante. J’aimerais savoir si cette réconciliation économique doit être explicite dans le projet de loi. Recommandez-vous un amendement à l’article 12, car c’est là que l’on énumère les groupes qui doivent être représentés au sein du conseil? Je sais que cet amendement a été proposé en Chambre et qu’il a été rejeté. Je me demande si cet aspect est assez important pour que l’on inclue explicitement la représentation d’un expert ou d’un organisme qui se concentre sur la réconciliation économique.
Mme Mbarki : Nous devons absolument avoir un représentant en matière d’économie, d’emploi et de formation. Dans ma réserve, le taux de chômage est de 95 %. Les seuls emplois disponibles sont ceux offerts au Bureau de la bande. Nous n’avons pas d’emplois, et dans la majorité des communautés de ma région et même de la Saskatchewan, comme dans le Sud — certaines communautés du Nord sont un peu mieux loties parce qu’elles participent aux activités d’extraction de l’uranium et d’exploitation minière —, il ne se passe pas grand-chose. Il y a bien quelques nouveaux emplois en lien avec des puits de gaz, mais encore une fois, nous ne pouvons pas mesurer le succès de ces initiatives dans l’état actuel des choses. Nous devons examiner la situation à plus grande échelle et nous devons être représentés. Nous avons besoin de statistiques, car la pauvreté est l’une des principales raisons pour lesquelles nous sommes ici aujourd’hui et pour lesquelles nos communautés éprouvent des difficultés. Si nous ne corrigeons pas la situation et si nous ne commençons pas à examiner ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas, nous ne pourrons jamais aller de l’avant.
La sénatrice Martin : Y a-t-il une organisation ou un représentant qui, à votre avis, serait le mieux placé pour faire partie du conseil?
Mme Mbarki : L’Indigenous Resource Network est un des organismes que j’ai rencontrés au cours des deux dernières années. Les gens qui y travaillent ont passé récemment en entrevue environ 2 000 membres des Premières Nations dans le cadre d’une étude. Ils leur ont demandé dans quelle mesure ils soutenaient le secteur des ressources. L’étude s’est soldée par des données de très grande qualité et des relations solides au sein des communautés autochtones interrogées. Les Premières Nations participent surtout au secteur des ressources naturelles, mais elles pourraient être présentes dans d’autres secteurs, comme le secteur minier, car bon nombre de ces compétences sont transférables. Je mentionne les mines, car je sais que des indicateurs ont été établis pour être en mesure de décrire la situation dans ce secteur. Nous pourrions aussi regrouper les données recueillies à plus petite échelle sur des communautés en particulier, mais je suggérerais en premier lieu l’Indigenous Resource Network.
La sénatrice Martin : Très bien. Merci.
Monsieur Belanger, vous avez mentionné un amendement qui pourrait être apporté à l’article 10. Vous avez parlé également de l’importance de la représentation au niveau des villes. Le Congrès des peuples autochtones apparaissait dans un amendement présenté à la Chambre, mais l’amendement a été rejeté. J’ai rencontré des représentants du congrès, et je pense que la plupart des membres du comité les ont rencontrés également. Le Congrès des peuples autochtones représente environ 800 000 personnes, qui vivent en majorité hors réserve et dans les centres urbains. Diriez-vous que le Congrès des peuples autochtones devrait être inclus dans le projet de loi?
M. Belanger : Je pense en effet qu’il devrait être inclus. Indigenous Disability Canada fournit des services aux personnes handicapées appartenant aux communautés autochtones et non autochtones. Le Congrès des peuples autochtones fournit des services et du soutien dans les centres urbains. Je ne comprends pas pourquoi quatre des cinq organismes qui siégeraient au conseil pourraient proposer des candidatures, mais pas le congrès. Je ne saisis pas la logique. Les personnes et les familles que nous servons vivent en grande partie en milieu urbain.
La sénatrice Martin : Merci.
La sénatrice Coyle : Encore une fois, vous nous donnez énormément de matière à réflexion. Merci à vous deux.
Madame Mbarki, parmi les principaux points que vous avez soulevés, il y avait l’importance d’inclure une représentation de personnes aux prises avec les séquelles des pensionnats, que ce soit des survivants, des descendants de survivants ou des communautés, pour que le conseil soit arrimé à la communauté de toutes les manières possibles. C’est ce que j’ai retenu de vos observations.
Vous avez parlé également de l’importance de la réconciliation économique, car honnêtement, tant que les peuples autochtones seront aux prises avec des taux de pauvreté entièrement disproportionnés par rapport au reste des Canadiens, il ne pourra y avoir de véritable réconciliation. La pauvreté est la cause première de certaines des autres formes de disparités que nous dénonçons, que ce soit dans les services de protection de l’enfance ou dans le système d’éducation. Il existe diverses manières d’intégrer l’économie dans le processus. L’intention était là. L’idée n’a pas été abandonnée, mais elle n’était pas énoncée explicitement. Merci d’en avoir parlé.
Vous avez mentionné également les changements climatiques. En ce moment, le Sénat du Canada se penche sur le racisme environnemental. Nous savons que les communautés autochtones subissent beaucoup plus les effets des changements climatiques que la plupart des autres Canadiens, et cela ne peut que s’aggraver.
Merci d’avoir soulevé des idées et des concepts très importants. Est-ce que j’ai manqué un point important? Je veux être certaine de ne rien avoir oublié.
Mme Mbarki : Vous avez très bien cerné tous les points à retenir.
La sénatrice Coyle : D’accord. C’est plutôt vous qui avez bien tout cerné, et moi, je vous ai bien écoutée. Merci beaucoup. Je voulais que vous me confirmiez que c’est bien ce que vous vouliez faire ressortir.
Monsieur Belanger, félicitations pour le travail vital que fait votre organisme. Le projet de loi vise la constitution d’un conseil national de réconciliation. Y a-t-il certains aspects des relations efficaces que vous avez développées avec d’autres organismes autochtones ou avec des organismes non autochtones qui pourraient nous guider dans la mise sur pied du nouveau conseil pour que ce dernier soit efficace une fois établi?
M. Belanger : Merci pour votre question et vos commentaires.
Ma foi, je l’espère. Il faudrait demander aux autres organismes ce qu’ils font, mais dans notre cas, nous travaillons avec des partenaires autochtones et non autochtones partout au Canada afin de répondre aux besoins des personnes et des familles que nous servons, et surtout, de faire connaître ces besoins pour que de nouvelles politiques et de nouvelles mesures soient mises en œuvre dans les communautés. Nous serions vraiment ravis de donner notre point de vue et de faire part de notre expérience lors du processus d’établissement du nouveau conseil national. Les administrateurs du conseil pourraient ensuite décider comment concrétiser notre contribution. Je ne sais pas si je réponds à votre question, sénatrice, mais la réponse est oui, évidemment.
La sénatrice Coyle : Je crois qu’il me reste une minute. Je voudrais seulement approfondir un peu plus cette question. Votre groupe entretient un grand nombre de partenariats. Quels éléments de ces partenariats permettent de bâtir des relations efficaces et productives avec les personnes avec qui vous travaillez? Pourrions-nous apprendre de ce que vous faites?
M. Belanger : Comme d’autres témoins l’ont mentionné, les éléments sont les échanges d’informations et de données portant notamment sur les obstacles à la réconciliation, ainsi que sur les aspects qu’elle devrait englober tels que le développement économique et les déterminants sociaux de la santé. Souvent, les gouvernements ne savent pas vraiment ce que vivent les populations sur le terrain. Que se passe-t-il dans les communautés? Quels sont les éléments qui affectent les membres de ces communautés? Le gouvernement est déconnecté de la réalité sur le terrain. Lorsque nous transmettons aux partenaires gouvernementaux ou aux autres organismes non autochtones des informations que nous donnent les personnes que nous servons, ces gouvernements et ces organismes peuvent mieux comprendre ce qui se passe chez nous. Ils peuvent ainsi nous aider à renforcer nos partenariats et à déterminer nos orientations futures. Ce sont ces informations et ces données, mais aussi ces relations avec les communautés qui font souvent défaut au gouvernement fédéral et dans les gouvernements provinciaux et territoriaux.
La sénatrice Coyle : Merci.
La sénatrice Audette : Merci beaucoup aux deux témoins.
Vous êtes membre de la nation des Gitxsans. C’est un grand honneur de vous rencontrer. Mon fils Eamon est en partie Gitxsan. Nous avons donc, vous et moi, des liens d’un bout à l’autre du Canada.
Merci pour le travail que vous accomplissez, et merci de nous rappeler que les projets de loi, les études ou les lois ne tiennent pas toujours compte des réalités et des talents de nombreuses personnes. C’est très important.
Madame Mbarki, vous avez parlé des données. Je ne sais pas si vous vivez encore dans votre communauté. Vous n’êtes pas obligée de répondre, mais vous avez mentionné votre kokum et votre mushum. Les réserves ont été créées au titre de la Loi sur les Indiens, mais en fait, notre territoire s’étend bien au-delà des réserves.
Pour revenir à cela, supposons que nous voulions organiser quelque chose pour les membres de notre nation parce que les taux de chômage sont très élevés, comme vous nous l’avez mentionné. Puisque vous êtes engagée en politique, vous savez que les données sont nécessaires à l’instauration de politiques ou d’autres éléments dans les communautés. Pensez-vous que les dirigeants autochtones pourraient eux aussi utiliser ces données pour améliorer les conditions de vie de leur peuple? Certes, les gouvernements doivent évidemment savoir ce qui va bien ou ce qui ne va pas. Les dirigeants des communautés pourraient-ils mettre quelque chose en place pour le bien-être et la sécurité? Le conseil pourrait faciliter les recherches, la collecte de données et ainsi de suite. Pensez-vous que cet aspect est important?
Mme Mbarki : Je suis tout à fait d’accord. Dans l’esprit de la réconciliation, nous devons cultiver des relations non seulement avec le gouvernement fédéral, mais aussi avec les provinces, car les territoires traditionnels n’étaient pas reconnus dans le passé et que bon nombre de communautés les considèrent aujourd’hui comme des terres sacrées. Ces discussions doivent se tenir avec les gouvernements, mais aussi avec les joueurs de l’industrie, qui ont eux aussi besoin de savoir où se trouvent ces territoires. Nous devons pallier le manque de données, mais aussi travailler en collaboration. Nous pourrons ainsi mettre en place des relations plus fortes, plus saines et plus productives. J’espère que le nouveau conseil nous permettra d’y parvenir.
La sénatrice Audette : Si nous poussons la réflexion un peu plus loin, il y a les joueurs de l’industrie, comme vous l’avez mentionné. Je pense aux secteurs des mines et des forêts. Dans ma nation, par exemple, souvent, nous faisons la cuisine ou nous nettoyons les chambres pour les gens de passage. Grâce aux données, nous pourrions brosser un tableau plus précis qui nous permettrait, par exemple, de savoir dans quelle formation investir pour que davantage de personnes possèdent les compétences exigées dans ces secteurs. Nous pourrions alors occuper n’importe quelle fonction. Selon vous, cela pourrait-il aider l’industrie et les dirigeants autochtones à agir d’une façon qui ne correspond pas forcément aux attentes et aux demandes habituelles à leur égard?
Mme Mbarki : J’ai constaté qu’un syndicat en Colombie-Britannique faisait de l’excellent travail. Les membres de ce syndicat s’efforcent de recueillir le plus de données possible sur les personnes qu’ils embauchent et qu’ils forment, de même que sur les personnes qui possèdent des compétences spécialisées ou telle ou telle qualification professionnelle. Ils se sont rendu compte qu’ils avaient un bassin de personnes prêtes à travailler, et ce, grâce à ces données. Quand un projet est lancé dans la province, ils n’ont qu’à déterminer quelles personnes y sont intéressées. Des données de cette nature nous seraient très utiles. Il suffit de trouver comment nous pourrions les recueillir.
La sénatrice Audette : Merci à vous deux.
La sénatrice Hartling : Je vous félicite, madame Mbarki. Vous êtes une fonceuse. Votre grand-mère a dû être une grande source d’inspiration pour vous.
Je vais m’adresser à M. Belanger au sujet des handicaps. Tout d’abord, félicitations pour votre organisme. Sauf erreur, vous existez depuis 34 ans. C’est une durée de vie très respectable. Je sais que le financement est le talon d’Achille des organismes comme le vôtre. J’ai été frappée lorsque vous avez mentionné le nombre de personnes handicapées autochtones. J’aimerais approfondir cette question et l’importance vitale de donner une voix à ces personnes au nouveau conseil.
Je voudrais m’attarder sur les handicaps en tant que tels, car ils sont souvent associés à des difficultés comme la pauvreté et l’accessibilité. Ces obstacles sont notoires. Pourriez-vous nous donner un historique ou un aperçu de certains des handicaps? Selon vous, certains sont-ils causés par des traumatismes?
M. Belanger : Merci, sénatrice, pour la question. C’est indubitable.
Si nous regardons la population autochtone au Canada, nous pouvons estimer à environ 600 000 le nombre de personnes autochtones vivant avec un handicap. Ces chiffres sont conservateurs.
Nous travaillons avec des personnes aux prises avec un handicap physique, une maladie mentale, une incapacité épisodique, des difficultés d’apprentissage et des déficiences développementales. Un bon nombre de ces personnes et de ces familles font appel à nos services parce qu’elles-mêmes ou leur famille vivent avec les séquelles du système de pensionnats depuis des générations. Nous aidons des personnes et des familles aux prises avec ce problème précis. Tout le monde a entendu parler des effets dévastateurs des pensionnats. Un grand nombre de nos clients sont des survivants ou des proches de survivants des pensionnats.
La sénatrice Hartling : À votre avis, votre organisme devrait-il avoir une voix au conseil pour être en mesure de soulever certaines de ces questions?
M. Belanger : Eh bien, notre organisme, je le répète, pourrait exercer un rôle de leadership auprès des autres organismes. Notre contribution serait utile, mais il y a certainement d’autres organismes qui possèdent une expérience pertinente.
Les personnes handicapées autochtones au Canada n’ont jamais été une grande priorité, y compris aux yeux des dirigeants de nos propres communautés. Leur voix est souvent complètement occultée. Comme je l’ai mentionné, nous avons vu défiler plusieurs mesures législatives, notamment la Loi sur le Canada accessible qui prévoit une exemption pour les Premières Nations jusqu’en 2026. Cette mesure n’aide pas les personnes handicapées membres des Premières Nations. Par ailleurs, les lois sur l’aide médicale à mourir, qui visent les personnes aux prises avec un handicap en fin de vie ou non, sont adoptées sans consultations auprès des communautés autochtones. Les trois rapports sur l’aide médicale à mourir ne font état d’aucune participation concrète des communautés autochtones.
Si nous ne faisons pas en sorte que les personnes handicapées autochtones aient une voix au conseil, cette tendance pourrait se poursuivre. Parce que ces personnes ne sont pas toujours une priorité, elles doivent le devenir au conseil. Si nous voulons faire progresser la réconciliation, leur voix doit être entendue, et elles méritent un siège permanent au conseil.
La sénatrice Hartling : Merci beaucoup.
La sénatrice Moodie : Bienvenue aux témoins.
Je vous souhaite encore une fois la bienvenue, monsieur Belanger. Nous nous sommes rencontrés au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie. Je suis heureuse de vous revoir. Ma prochaine question s’adresse à vous. Vous avez touché un mot au sujet de la représentation. À votre connaissance, votre organisme ou des organismes similaires ont-ils pu participer à la rédaction du projet de loi C-29? Avez-vous pu soulever vos préoccupations au cours du processus législatif? Le cas échéant, pourriez-vous faire part de ces préoccupations au comité?
Ensuite, vous avez parlé de la représentation au conseil. Avez‑vous eu l’occasion de souligner l’importance, selon vous, de donner une voix aux personnes handicapées autochtones au sein du conseil?
M. Belanger : Merci, sénatrice, pour les questions.
Malheureusement, nous n’avons pas été invités à participer à l’élaboration du projet de loi. Nous entretenons des relations avec les gouvernements et nous faisons part des préoccupations et des priorités que nous observons et que nous communiquent les personnes et les familles que nous servons. Nous n’avons pas été consultés et nous n’avons pas participé officiellement au processus législatif. La comparution d’aujourd’hui est la première occasion qui nous est offerte d’en parler. Lorsque j’ai su que le projet de loi allait être étudié par le comité, j’ai communiqué avec la greffière pour lui dire que nous aimerions en parler si l’occasion se présentait.
Cela dit, nous n’avons malheureusement pas participé au processus législatif. Notre absence témoigne du statut non prioritaire des personnes handicapées autochtones dans l’élaboration des projets de loi de ce type ou d’autres mesures législatives. Nous sommes souvent mis dans une catégorie fourre-tout, comme je l’ai dit dans ma déclaration liminaire. Il faut régler ce problème vu le nombre élevé de personnes handicapées au sein des communautés autochtones.
La sénatrice Moodie : Merci.
La sénatrice McCallum : Je vous remercie pour vos déclarations liminaires. J’ai également deux questions à vous poser. J’espère que vous aurez le temps d’y répondre.
Monsieur Belanger, en tant que fervent défenseur des intérêts de la communauté des personnes handicapées depuis plus de 30 ans, vous constatez la nécessité d’éduquer continuellement la société, y compris les parlementaires, concernant l’identité de cette communauté sur les plans social et politique et les identités complexes qui émergent au sein des divers systèmes d’oppression interdépendants. Votre travail a porté sur les expériences interpersonnelles et intercollectives reliées au sexe, à la race, à l’ethnie et aux capacités, qui s’entremêlent de façon complexe, dans le cadre des grands systèmes de pouvoir, d’oppression et de privilège. Étant donné que les personnes qui subissent de la discrimination fondée sur la race et la classe sociale sont au cœur de la création d’un avenir meilleur, sur quels grands problèmes persistants doit-on se pencher et quel travail doit-on faire au sein de la communauté des personnes handicapées et avec elle? Pouvez-vous aussi nous expliquer pourquoi la communauté des personnes handicapées doit être représentée afin qu’on parle en son nom?
Madame Mbarki, que doit-on faire pour faire progresser la réconciliation en vue de créer et de maintenir des relations mutuellement respectueuses permettant de se reconnecter à nos propres identités tout en établissant des liens avec les Autochtones et les non-Autochtones? L’une des principales choses à faire consiste à reprendre conscience de l’existence d’histoires, de relations, de responsabilités et de lois sur les terres autochtones qui remontent à des temps immémoriaux. Pourquoi est-il si essentiel de remettre les terres en état et, par conséquent, de l’envisager? Quel devrait être le processus? Merci.
Mme Mbarki : Je vais répondre en premier. Je crois que votre première question s’adressait à M. Belanger.
Remettre les terres en état est essentiel pour les collectivités autochtones. J’ai grandi sur les terres, où on m’a enseigné beaucoup de choses. J’allais dans les bois avec mes grands‑parents pour cueillir des petits fruits et des plantes médicinales et repérer certaines essences d’arbres. Ces terres s’étendaient dans le nord de la Saskatchewan et le nord de l’Alberta. C’est sur ces terres que nous trouvions différentes plantes et herbes. Il est très important que l’industrie et les gouvernements comprennent l’importance de ces terres. Il est très important aussi qu’ils comprennent notre relation avec la terre et la nécessité de remettre les terres dans l’état dans lequel elles étaient lorsque nous les avons trouvées à l’origine. Je pense que cela pourrait être un principe directeur, surtout pour l’industrie, dans le cadre du travail de cessation d’exploitation et de remise en état qu’elle effectue actuellement. Nous pourrions nous assurer qu’elle remet les terres dans son état d’origine. Je crois que les peuples autochtones ont un rôle à jouer à cet égard.
Il est très important de tenir compte de notre vision du monde et de notre savoir, car ils s’étendent sur des centaines d’années. Les connaissances que mon grand-père m’a transmises lui ont été transmises par son grand-père et ainsi de suite. Il est très important que nos enseignements et notre savoir bénéficient aux personnes à l’extérieur de notre communauté. Je suis d’avis qu’il y a beaucoup de travail à faire, mais si nous nous assoyons à la table avec les bons partenaires et les bonnes personnes, nous pourrons accomplir de grandes et belles choses, et nous pourrons bien faire les choses du premier coup, ce qui nous évitera d’avoir à recommencer. Je pense que la réconciliation repose sur la création de relations et la capacité de rejoindre tout le monde afin de prendre des décisions qui conviennent à tous. Merci.
M. Belanger : Sénatrice, je serai bref. C’est toujours un plaisir de vous revoir.
Pour répondre à votre question, je dois dire qu’il faut travailler dans tous les domaines. J’aimerais vous dire que nous avons observé des progrès considérables au chapitre de la pauvreté, du logement, de l’emploi et de l’accessibilité dans les collectivités, mais ce n’est pas le cas. Les Autochtones handicapés sont encore confrontés à de nombreux obstacles, qui ne cessent d’augmenter. Certaines mesures sont en train d’être élaborées, et elles pourraient améliorer la situation, mais je dirais qu’il faut travailler sur tous les déterminants de la santé. Il reste énormément à faire.
La sénatrice Coyle : J’ai d’autres questions à poser à M. Belanger, car je veux comprendre un peu mieux. Vous nous avez clairement expliqué que, malheureusement, les Autochtones handicapés se trouvent toujours au bas de la liste des priorités, dans le cadre non seulement du présent projet de loi, mais aussi de diverses mesures législatives, entre autres. Votre principal message est que la voix des Autochtones handicapés doit être entendue et qu’il faut déterminer la meilleure façon de faire en sorte qu’elle soit entendue. J’ignore qu’elle peut être cette façon, mais ce qu’il faut retenir, c’est qu’elle doit être entendue. Est-ce exact?
M. Belanger : Il est certain que leur voix doit être entendue, mais ce qu’il faut retenir, c’est que le conseil doit compter un représentant permanent des Autochtones handicapés, car autrement, nous pouvons être certains que les Autochtones handicapés demeureront au bas de la liste des priorités, non pas intentionnellement, mais simplement parce qu’il y a de nombreuses autres priorités. Les peuples autochtones doivent être représentés à la table, pour s’assurer que la voix des Autochtones handicapés, des survivants des pensionnats handicapés et de leurs familles soit entendue, pour faire part de leurs besoins liés à leur handicap aux gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux et pour faire progresser la réconciliation. Sans cette représentation permanente, je crains que les Autochtones handicapés ne soient pas une priorité.
La sénatrice Coyle : Quelle est votre expérience sur le plan de vos rapports avec les organismes autochtones? Vous avez parlé de vos rapports avec les gouvernements non autochtones, etc. Qu’en est-il de vos rapports avec les organismes autochtones? Nous savons qu’ils ont des façons de faire différentes et une vision différente. Pouvez-vous nous donner des exemples d’une relation saine, respectueuse et inclusive avec des Autochtones handicapés dans le cadre de laquelle leurs intérêts sont pleinement pris en compte par des organismes non autochtones qui travaillent précisément sur la condition des personnes handicapées, mais aussi sur tous les autres aspects sur lesquels travaillent les organismes autochtones?
M. Belanger : Nous entretenons d’excellents rapports avec les organismes autochtones au pays. Nous travaillons avec l’Assemblée des Premières Nations, l’Association des femmes autochtones du Canada, le Congrès des peuples autochtones et le Ralliement national des Métis. Nous travaillons également avec des collectivités des Premières Nations partout en Colombie-Britannique et ailleurs au Canada. Nous entretenons des liens avec eux.
La sénatrice Coyle : J’essaie de comprendre comment vous faites entendre votre voix.
M. Belanger : Nous siégeons aux comités consultatifs de sociétés d’État et aux comités consultatifs de ministères, d’organismes œuvrant pour les personnes handicapées, d’organismes autochtones, de programmes de développement des nourrissons autochtones, etc. Nous apportons toujours le point de vue des personnes handicapées, et nous bénéficions toujours d’une relation de réciprocité, qui permet à chaque partie d’apprendre de l’autre. Nous entretenons de nombreuses relations avec des entités autochtones et non autochtones, afin de faire entendre la voix des personnes handicapées. En général, il y a une soif d’apprendre, et l’apprentissage se traduit parfois par des actions, mais d’autres fois, ce n’est pas le cas.
La sénatrice Coyle : Nous avons dit que le Congrès des peuples autochtones est une organisation qui travaille avec certains de vos membres dans des régions urbaines. J’imagine qu’un très grand nombre des personnes que vous servez vivent dans des régions urbaines. Je ne vous ai pas entendu parler de l’Association nationale des centres d’amitié ni de l’importance de cet organisme en ce qui a trait à la réconciliation et de son contact étroit avec les Autochtones vivant en milieu urbain au Canada. Pouvez-vous nous en parler?
M. Belanger : Je pense que ce serait une erreur de ne pas inclure les centres d’amitié dans une certaine mesure. Nous avons un solide partenariat avec les centres d’amitié de la Colombie-Britannique. Notre travail complète le leur, et vice versa. Nous apprenons bien des choses d’eux, et ils apprennent de nous.
Je pense que de nombreux représentants des Autochtones et des organismes autochtones peuvent apporter une contribution, car ils ont sans doute des connaissances qui nous font défaut, et nous avons sans doute des connaissances qu’ils n’ont pas. Cette collaboration ne peut qu’être bénéfique.
En outre, selon la portée du mandat du conseil, le travail des 13 membres et le soutien qu’ils vont fournir à ces organismes et à ces autres groupes et collectivités pour guider leur travail et contribuer à la collecte de données et de renseignements seront garants de succès. Si la portée du mandat est restreinte, ce sera un échec assuré. Tout dépend, comme l’ont mentionné les premiers témoins, de la façon dont il sera financé et du niveau de financement, qui doit être adéquat. Certaines initiatives, comme le plan de travail national pluriannuel, nécessiteront beaucoup de travail. Si on accorde 2 millions de dollars, c’est bien beau sur papier, encore une fois. Il y a de nombreuses questions auxquelles nous devons obtenir des réponses avant que nous puissions aller de l’avant, mais il ne fait aucun doute que de nombreux organismes autochtones en milieu urbain devraient jouer un rôle.
Le président : Le temps prévu avec ce groupe de témoins est écoulé. Je tiens à remercier tous nos témoins pour leur présence aujourd’hui. Je veux aussi rappeler aux témoins que, s’ils souhaitent nous transmettre de l’information supplémentaire concernant les questions qui leur ont été posées aujourd’hui, ils peuvent l’envoyer par écrit à la greffière du comité, Andrea Mugny, d’ici mercredi.
(La séance est levée.)