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ENEV - Comité permanent

Énergie, environnement et ressources naturelles


LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DE L’ÉNERGIE, DE L’ENVIRONNEMENT ET DES RESSOURCES NATURELLES

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le mardi 19 mars 2024

Le Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd’hui, à 19 h 3 (HE), avec vidéoconférence, pour étudier le projet de loi C-226, Loi concernant l’élaboration d’une stratégie nationale visant à évaluer et prévenir le racisme environnemental ainsi qu’à s’y attaquer et à faire progresser la justice environnementale.

Le sénateur Paul J. Massicotte (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Bonsoir. Je m’appelle Paul J. Massicotte, je suis un sénateur du Québec et je suis président du comité.

Aujourd’hui, nous tenons une séance du Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles. J’aimerais commencer par faire un petit rappel. Avant de poser des questions et d’y répondre, je demanderais aux membres du comité et aux témoins présents dans la salle de s’abstenir de se pencher trop près du microphone ou de retirer leur oreillette lorsqu’ils le font. Cela permettra d’éviter tout retour sonore qui pourrait avoir un impact négatif sur le personnel du comité qui se trouve dans la salle.

Je vais demander à mes collègues du comité de se présenter, en commençant par ma droite.

[Traduction]

Le sénateur Arnot : David Arnot, sénateur de la Saskatchewan, territoire du Traité no 6.

La sénatrice White : Judy White, sénatrice de Terre-Neuve-et-Labrador.

La sénatrice Sorensen : Karen Sorensen, Alberta, parc national Banff, territoire du Traité no 7.

La sénatrice McPhedran : Marilou McPhedran, sénatrice indépendante du Manitoba.

La sénatrice Galvez : Rosa Galvez, du Québec.

[Français]

Le président : Aujourd’hui, le comité a invité à comparaître la marraine du projet de loi, la marraine du projet de loi au Sénat et des fonctionnaires du gouvernement dans le cadre de son examen portant sur le projet de loi C-226, Loi concernant l’élaboration d’une stratégie nationale visant à évaluer et prévenir le racisme environnemental ainsi qu’à s’y attaquer et à faire progresser la justice environnementale.

[Traduction]

Permettez-moi maintenant de vous présenter mes excuses pour le retard. Les règles sont très claires; le comité ne peut pas se réunir si le Sénat siège encore. Je suis désolé du retard, mais, en conséquence, nous devrons malheureusement avoir terminé notre séance à 20 h 30. Nous allons réduire chaque séance de 40 minutes, si possible. Ce n’est pas excessif. Je vous saurais gré de votre coopération pour y arriver.

[Français]

Pour notre premier groupe, nous sommes heureux d’accueillir Elizabeth May, députée de Saanich—Gulf Islands et marraine du projet de loi. C’est une dame très reconnue par nous tous et très appréciée. Nous accueillons aussi l’honorable Mary Jane McCallum, sénatrice et marraine du projet de loi. Je vous souhaite la bienvenue et je vous remercie d’avoir accepté notre invitation.

Vous avez 10 minutes chacune pour faire vos allocutions d’ouverture et nous permettre de vous poser des questions.

La sénatrice Galvez : Monsieur le président, une sénatrice vient d’arriver.

Le président : Pouvez-vous vous présenter?

La sénatrice Oudar : Bonjour. Manuelle Oudar, du Québec.

Le président : Merci, et toutes nos excuses pour le retard. Madame May, la parole est à vous.

Elizabeth May, députée, Saanich—Gulf Islands, marraine du projet de loi : Merci, monsieur le président. C’est un grand honneur d’être parmi vous. Je vous remercie de m’avoir donné l’occasion de présenter ce projet de loi si important, le projet de loi C-226, Loi concernant l’élaboration d’une stratégie nationale visant à évaluer et prévenir le racisme environnemental ainsi qu’à s’y attaquer et à faire progresser la justice environnementale. Il faut créer un programme qui va fonctionner et faire une grande différence en faveur de la justice environnementale.

[Traduction]

Je regarde mon horloge. Je sais que je dispose de 10 minutes exactement. Je sais que vous êtes pressés par le temps, et je veux m’assurer que nous ayons suffisamment de temps pour la discussion.

Je voulais souligner, dans la présentation de ce projet de loi d’initiative parlementaire… et aussi, bien sûr, je tiens à remercier la sénatrice Mary Jane McCallum d’avoir parrainé ce projet de loi au Sénat. Je veux remercier le Sénat en tant qu’institution et ses membres d’avoir déjà examiné le projet de loi jusqu’à l’étape actuelle, après la deuxième lecture au Sénat et devant le présent comité.

J’ai certainement l’intention de mettre l’accent sur le fait que j’espère que le projet de loi sera adopté rapidement. Les délais prévus dans ce projet de loi signifient qu’une fois qu’il aura reçu la sanction royale, le gouvernement disposera de deux ans pour mettre en œuvre la partie la plus importante du projet de loi, qui consiste non seulement à parler du problème, mais aussi à mettre en place une stratégie qui fonctionnera.

En essayant de trouver comment présenter le projet de loi, je suis toujours déchirée entre l’idée d’exposer toutes les données empiriques montrant que le Canada a un problème de racisme environnemental et que c’est une chose qui existe… Je ne devrais faire aucune mention des médias sociaux en bonne compagnie de toute manière, mais, vu la façon dont la question est traitée dans les médias sociaux, je sais que certaines personnes se moquent de la notion même. Je veux exposer, plutôt que d’expliquer, toutes les raisons pour lesquelles nous savons qu’une telle chose existe. Je sais que vous entendrez d’autres témoins experts. Je veux résumer brièvement comment j’en suis arrivée à cet enjeu, mais surtout, expliquer ce que d’autres pays ont déjà fait, parce qu’au Canada, nous n’avons pas affaire à un problème inconnu ou à une table rase. Nous disposons de l’expérience d’autres pays, et j’espère que nous en tirerons parti.

Encore une fois, je tiens à remercier le président et les membres du comité de leur présence aujourd’hui.

J’ai commencé à travailler sur ce dossier il y a très longtemps. Avant de venir de l’île de Vancouver, je venais de l’île du Cap‑Breton, et j’ai travaillé sur un dossier dont certains d’entre vous se souviennent peut-être, celui des étangs bitumineux de Sydney. C’était la plus grande décharge de déchets toxiques au Canada. J’ai travaillé sur cet enjeu dans les années 1990 et au début des années 2000. La plus grande décharge de déchets toxiques du pays était la création d’une aciérie dans ce qui est devenu le Cap‑Breton industriel au début du XXe siècle. Cette aciérie utilisait du charbon local extrêmement contaminé du Cap‑Breton; en conséquence, ce qui avait été un lieu de pêche autochtone a été transformé en une décharge de déchets toxiques. L’aciérie a créé les Sydney Tar Ponds.

[Français]

Il s’agit en français des étangs de goudron de la Nouvelle-Écosse à l’île du Cap-Breton, à Sydney.

[Traduction]

Les taux de cancer y étaient les plus élevés au Canada.

Je vivais de l’autre côté de l’île, un endroit assez idyllique appelé Margaree Harbour, dont la population était de 42 personnes. Si quelqu’un m’avait dit — en fait, on me l’a dit — qu’il y avait du racisme au Cap-Breton, j’aurais été étonnée, et j’aurais nié l’existence de ce racisme. L’une de mes meilleures amies, Clotilda Yakimchuk, est originaire des Caraïbes. Elle a été la première femme noire de la Nouvelle-Écosse à obtenir son diplôme de la Nova Scotia Hospital School of Nursing. Elle a été la première femme noire à présider ce qu’on appelle maintenant le College of Registered Nurses of Nova Scotia. Elle a reçu un insigne de l’Ordre du Canada pour son leadership dans de nombreux domaines. Elle m’a raconté une histoire qui m’a choquée. Elle m’a dit que, lorsqu’elle était revenue des Caraïbes où elle avait dirigé un hôpital, alors qu’elle était mère monoparentale de jeunes enfants, elle avait trouvé un emploi à l’hôpital St. Rita de Sydney, et elle a voulu louer un logement décent pour élever ses enfants.

Aucun propriétaire ne voulait lui louer une maison convenable où que ce soit à Sydney, sauf entre l’aciérie et les fours à coke. La ségrégation était appliquée dans ma collectivité, et je n’en savais rien. La capacité de vivre seulement entre les fours à coke et l’aciérie signifiait que l’endroit où l’on vivait équivalait au fait de fumer plusieurs paquets de cigarettes par jour à cause de la pollution émanant de ces installations.

La première personne et la première communauté avec qui j’ai commencé à travailler sur le racisme environnemental ont été Clotilda Yakimchuk et la communauté de Sydney. À la suite d’une série de coïncidences, et surtout dans le cadre de mon travail à titre de directrice du Sierra Club Canada, nous avons appris qu’il existait aux États-Unis un programme de justice environnementale offert par l’intermédiaire de l’Environmental Protection Agency de ce pays. Nous avons fait du jumelage avec une communauté afro-américaine de Fort Valley, en Géorgie, où on était aux prises avec une ancienne usine de pesticides qui avait été fermée. Les gens de cette communauté avaient accès à des programmes offerts par l’Environmental Protection Agency des États-Unis afin de lutter contre le racisme environnemental et pour la justice environnementale. Vous pouvez consulter le site Web de l’EPA américaine. Lorsque vous recevrez mon mémoire...

[Français]

J’ai demandé une traduction du système à la Chambre des communes et malheureusement, nous avons une erreur.

[Traduction]

Je n’ai qu’une version anglaise, mais ce site Web contient la définition de « environmental justice » — ou, en français, « justice environnementale » —, que je vous recommande à tous, et en voici une traduction :

Par « justice environnementale », on entend le traitement juste et la participation significative de toutes les personnes, indépendamment de leurs revenus, de leur race, de leur couleur, de leur origine nationale, de leur appartenance tribale ou de leur handicap, au processus décisionnel de l’agence et à d’autres activités fédérales qui ont une incidence sur la santé humaine et l’environnement [...]

Il s’agit d’une définition intersectionnelle qui signifie qu’aux États-Unis, les membres des communautés marginalisées peuvent avoir accès à des experts. Ils peuvent s’attaquer au portefeuille bien garni des pollueurs grâce à leurs propres experts — des avocats, des épidémiologistes, des hydrologues, des médecins — pour mieux corriger le déséquilibre des pouvoirs entre les pollueurs et les collectivités. Nous avons abordé le projet de loi C-226 en tenant compte de l’expérience d’autres administrations.

Je tiens également à féliciter le comité du travail qu’il a effectué en Europe. La Commission économique des Nations unies pour l’Europe a ratifié une convention appelée la Convention d’Aarhus, qui porte sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement. Aarhus est une ville au Danemark. La convention a créé un certain nombre d’outils, et je pense qu’ils aideront aussi notre gouvernement lorsque, je l’espère, le projet de loi sera adopté. Nous avons maintenant un site Web d’Environnement Canada et des gens de ce ministère qui se consacrent à l’élaboration d’un programme de justice environnementale. Le site Web énonce que : « ces notions — le racisme environnemental et la justice environnementale —constituent un nouveau domaine de travail pour le gouvernement du Canada [...] »

Si je ne vous laisse avec rien d’autre, je veux vous laisser avec ceci : il ne s’agit pas d’un nouveau domaine de travail dans le monde. C’est un nouveau domaine de travail au Canada. Nous bénéficions de l’expérience des États-Unis, un programme offert depuis 1994, qui a pris de l’ampleur et qui en a récemment pris encore plus sous l’administration Biden. Les outils de justice environnementale ne sont pas des autocollants de pare-chocs. Ils sont réels. Les communautés marginalisées, les peuples autochtones et les communautés racisées ont entre les mains des outils qui permettent d’accéder aux droits et à la justice, et ce sont des droits qui existent.

Ce projet de loi changera énormément la donne, mais il faudra travailler sans relâche. Je suis prête à répondre à vos questions. Je vous remercie de votre attention.

[Français]

Le président : Merci. C’est très apprécié. Passons maintenant à la sénatrice McCallum.

[Traduction]

L’honorable Mary Jane McCallum, marraine du projet de loi : Merci à vous tous d’être présents aujourd’hui, et je vous remercie tout particulièrement de parrainer ce projet de loi.

Selon la justice sociale et les attentes sociétales, tous les Canadiens ont droit à l’air, à l’eau, à la terre et à la santé. Cependant, d’innombrables communautés des Premières Nations et noires de l’île de la Tortue continuent de faire face à l’une des pires dévastations et dégradations environnementales de notre pays. Pourtant, les gouvernements canadiens ne s’attaquent toujours pas aux inégalités environnementales et au racisme en tant que problème politique important.

L’éthique environnementale tient compte de la relation entre les humains et l’environnement et de la façon dont l’activité humaine influe sur les écosystèmes qui nous entourent. La pollution, l’épuisement des ressources naturelles, la perte de diversité, la destruction des écosystèmes et les changements climatiques font tous partie du débat éthique.

L’éthique est essentielle à la survie de l’humanité parce que, si nous n’y adhérions pas maintenant, le monde dont hériteraient nos générations futures serait inhabitable.

Voici une traduction d’un extrait de l’article intitulé « Environmental Racism and First Nations : A Call for Socially Just Public Policy Development » :

Bien que le mouvement pour la justice environnementale américain ait évolué à un rythme exponentiel, les efforts canadiens ont été beaucoup moins efficaces; en conséquence, l’attention accordée à la justice environnementale et les mesures prises à cet égard ont été inégales [...] il n’existe pour l’essentiel aucune loi canadienne qui traite directement des inégalités créées par l’injustice environnementale [...] on a besoin de la politique publique actuelle concernant la justice environnementale pour les peuples des Premières Nations afin d’assurer l’égalité des droits à un environnement sûr pour tous les Canadiens, indépendamment de leur race ou de leur situation économique. Le défaut de s’engager à apporter un tel changement équivaut à l’approbation du maintien de pratiques racistes, ce qui est bien loin de l’objectif d’une société juste.

Vous allez entendre des témoins directs vous parler de leur propre réalité, de la façon dont le racisme environnemental, par le biais du colonialisme capital, a gravement perturbé leur communauté, leur famille, leur gouvernance, leur vie, leur santé, leur autodétermination et leur culture. Voilà pourquoi la justice sociale pour les Premières Nations suppose des relations fondées sur le respect, sur le maintien des systèmes de connaissances et des visions du monde, sur l’identité et la culture des Premières Nations et sur la compréhension de ce que la colonisation a fait à notre peuple.

Dans son livre intitulé It’s All About the Land, Alfred Taïaiake déclare ceci :

Depuis le début, le projet est de nous retirer de nos terres [...] là où les Autochtones s’opposent à l’aménagement des terres à des fins d’exploitation, on rend ces Autochtones inexistants par définition ou on les expulse dans l’inexistence. Le but ultime de la colonisation est que nous nous en remettons à cette notion d’Autochtones et que nous tentions de nous structurer et de conceptualiser nos objectifs en conséquence [...]

Depuis les sept années que je suis sénatrice, j’ai entendu parler, ainsi que d’autres membres du Comité de l’énergie, des dangers pour l’environnement et la santé auxquels les communautés autochtones sont exposées partout au Canada, mais on n’a pas fait grand-chose pour corriger cette injustice. En guise de solution à long terme à ces problèmes liés à la prévention de la pollution, il faut notamment renforcer la réglementation. L’industrie ne tient pas compte de la plupart des mesures correctives équitables. Il suffit de regarder le nombre de puits orphelins ou les fuites des bassins de résidus dans nos réseaux d’aqueduc. Il est temps de s’attaquer au racisme environnemental, qui crée systématiquement des iniquités en conférant des avantages à un groupe racial au détriment des autres.

Le pouvoir et les privilèges sont distribués de façon inégale; ainsi, l’industrie et le gouvernement peuvent permettre le contrôle privé des systèmes d’extraction, alors que, dans la quête de profits et de terres, le public est exposé à des risques et à des effets disproportionnés connus et que l’on prend peu de mesures de protection ou de prévention.

Le projet de loi C-226 n’est intentionnellement pas prescriptif quant à la façon d’élaborer et de mettre en œuvre une stratégie nationale, car celle-ci doit être élaborée de concert avec les personnes et les collectivités touchées. Alors que nous entamons les délibérations sur le projet de loi C-226, j’ai formulé des commentaires sous les rubriques portant sur l’évaluation et la prévention du racisme environnemental et sur le fait de s’y attaquer.

Pour évaluer le racisme environnemental, l’iniquité environnementale devient du racisme lorsque les dommages environnementaux et le manque d’accès à des fonctions de protection touchent de façon disproportionnée les communautés racisées. Le terme est employé pour attirer l’attention sur le rôle démesuré que joue le racisme structurel dans la contribution aux iniquités environnementales. Il y a de l’iniquité environnementale depuis longtemps au Canada, mais il n’existe aucune initiative nationale pour contrer l’exposition disproportionnée et délibérée de certaines populations aux dangers environnementaux. Les données sur l’évaluation de la santé, y compris celle de la terre, de l’eau, de l’air et de l’écosystème, et de ses effets sur les humains et les non-humains qui vivent dans ces régions, demeurent rares et insuffisantes.

En évaluant le racisme environnemental, nous ne devons plus nous fier à des hypothèses; nous avons besoin de faits.

La cartographie à l’échelle des quartiers est très prometteuse en ce qui a trait au fait d’aider les collectivités à cerner les risques que présentent les dangers environnementaux pour divers groupes sociaux et d’élaborer des renseignements plus détaillés, complets et précis en ce qui concerne les positions en y intégrant les connaissances locales.

Sous la rubrique de la prévention, la prévention exige que l’on comprenne comment le racisme structurel contribue aux iniquités environnementales. La contribution des communautés racisées à la collecte de données sur l’utilisation des terres, sur la santé publique et sur les conditions environnementales peut aider à influencer les décisions en matière de politiques et de planification. Pour aborder le racisme environnemental, l’environnement est inextricablement lié à la santé humaine. L’approche holistique envisagée pour apporter des changements intersectionnels profitera le plus de la participation de multiples secteurs, dont les communautés racisées, les organismes communautaires, les chercheurs, les professionnels de la santé, les chefs de file de l’industrie et le gouvernement.

Le capitalisme extractif perpétue violemment et continuellement des inégalités sociales et économiques dramatiques qui limitent la souveraineté et l’autonomie des Premières Nations. En tant que membres des Premières Nations, nous avons été témoins de la technique de capitalisme extractif consistant à dominer par l’expansion grâce à une série de moyens juridiques, économiques et politiques qui effacent l’autonomie des Premières Nations sur leurs territoires.

Le président : Nous allons vous accorder deux autres minutes, après quoi nous passerons à la période des questions.

La sénatrice McCallum : D’accord.

C’est au cœur de ces territoires riches en ressources que les Premières Nations vivent des tensions complexes causées par le capitalisme extractif et la défense des terres, où elles protègent les terres et se protègent les unes les autres à des coûts personnels et communautaires souvent extrêmement élevés.

Je veux encourager toutes les personnes ici présentes à favoriser la prise de décisions à la suite de délibérations dans cette entreprise cruciale. Nous devons nous rappeler que l’intérêt supérieur de tous les enfants et des générations à venir est encore en jeu et qu’en raison de ces droits, nous pouvons procéder à un examen complet et équitable des répercussions du racisme environnemental. Merci.

Le président : Merci beaucoup. Nous allons maintenant passer à la période des questions.

Le sénateur Arnot : J’espère pouvoir poser deux questions. Je sais que le temps file, alors je vais aller droit au but.

Sénatrice McCallum, dans le discours que vous avez présenté, vous avez souligné les points de vue et l’expérience uniques qu’apportent les peuples autochtones. Comment les connaissances, les façons de savoir et les pratiques autochtones devraient-elles être intégrées dans la stratégie nationale pour que l’on puisse lutter efficacement contre le racisme environnemental?

Ma question qui s’adresse à Mme May concerne le fait qu’elle a évoqué le programme américain de justice environnementale en tant que modèle. À votre avis, quels éléments précis de l’approche américaine devraient être adaptés ou évités dans le contexte canadien pour que l’on puisse lutter efficacement contre le racisme environnemental?

Je ne suis pas certain que j’obtiendrai une réponse orale en temps voulu, alors j’aimerais une réponse écrite si ce n’est pas possible.

Le président : Qui voudrait répondre?

La sénatrice McCallum : Je vais commencer.

Les gardiens du savoir sont les mieux placés pour s’occuper des connaissances autochtones. Voilà pourquoi j’ai dit que les membres des communautés et les gens de la base doivent participer, et j’espère qu’ils le feront. Ce sont les personnes les mieux placées pour apporter ces connaissances.

Mme May : J’ai manqué à mon devoir, et je tiens à remercier Mme Ingrid Waldron et à lui exprimer officiellement ma profonde gratitude. Je sais qu’elle témoignera devant le comité, alors je voulais dire que sa recherche universitaire fixe la barre à cet égard.

Il est essentiel que les peuples autochtones — et d’autres communautés marginalisées et racisées — participent aux consultations. L’expérience que j’ai vécue relativement au programme de justice environnementale de l’EPA américaine, et la partie que je voudrais recommander au gouvernement d’examiner une fois que le projet de loi sera adopté, c’est celle où l’on met les outils entre les mains des communautés mêmes afin de leur permettre d’exploiter leurs propres connaissances autochtones et de mobiliser leurs propres pouvoir d’agir, habilitation et souveraineté pour apporter des solutions à leur propre communauté en leur donnant accès aux outils nécessaires.

Nous avons intégré dans notre système juridique — j’ai déjà exercé le droit — des obstacles pour les communautés qui n’ont pas beaucoup d’argent. Il s’agit de choses comme l’attribution de dépens pour punir un groupe qui cause des problèmes, de choses comme des mesures injonctives qui vont en grande partie aux entreprises et non aux communautés qui tentent de protéger la santé humaine, et de choses comme les poursuites-bâillons — ou SLAPP en anglais — qui ne sont interdites que dans certaines provinces… SLAPP est un acronyme pour « strategic litigation against public participation » c’est-à-dire en français des poursuites stratégiques contre la mobilisation publique.

Alors, à chaque étape, les objectifs sont la mobilisation des communautés marginalisées là où nous les trouvons et leur habilitation à agir en leur propre nom, à l’aide des outils juridiques qui rééquilibrent ce que la sénatrice McCallum a déjà qualifié d’habitudes de colonialisme, de déresponsabilisation, d’exploitation et d’abus qui ont créé des déséquilibres structurels qui correspondent absolument à la définition du racisme environnemental.

Le président : Aviez-vous une question supplémentaire?

Le sénateur Arnot : Je ne pense pas vouloir prendre le temps. Je cède la parole à d’autres sénateurs. Il y a beaucoup de questions que j’aurais aimé poser, mais j’ai réussi à poser les deux que je voulais, alors je vous remercie.

La sénatrice Sorensen : Ma première question sera très brève, et je vais essayer d’en poser une deuxième. Le projet de loi vise à recueillir de l’information et à mettre en place une stratégie pour contrer et prévenir le racisme environnemental et promouvoir la justice environnementale; cependant, le texte du projet de loi C-226 ne contient pas de définition officielle de ces deux notions. Pensez-vous qu’il serait utile que ces termes soient définis dans le corps de la loi pour plus de clarté? Je donnerai d’abord la parole à Mme May afin de savoir si nous pouvons fournir de l’aide à cet égard et si elle estime que c’est nécessaire.

Mme May : Une autre personne que j’ai négligé de remercier, c’est l’auteure initiale de ce projet de loi, l’ancienne députée Lenore Zann. Lorsque j’ai examiné le projet de loi et que je l’ai présenté moi-même, et parce qu’il avait déjà été étudié en comité, je me souciais davantage de veiller à ce qu’il soit adopté que d’y apporter des ajouts ou des amendements. Étant donné qu’il existe une idée générale et des définitions bien comprises, le Comité de l’environnement de la Chambre des communes s’est penché là-dessus et a décidé d’aller de l’avant sans ajouter de définitions.

La sénatrice Sorensen : Merci. C’est parfait. Si on en a besoin dans le rapport, on pourra les y apporter.

Ma deuxième question s’adresse à vous deux. La sénatrice McCallum pourrait peut-être répondre en premier. De nombreux exemples du racisme environnemental au Canada sont les conséquences du chevauchement des compétences entre les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux et les administrations municipales. Croyez-vous que la stratégie qui découlera de ce projet de loi pourra régler ce problème? Que faut-il faire pour s’assurer que le racisme environnemental sera pris en compte dans la planification communautaire? Et je ne parle pas des communautés autochtones; je parle des non autochtones. Comme vous le savez, cet enjeu relève non pas de la compétence fédérale, mais de celle des provinces et des territoires.

La sénatrice McCallum : Le problème des écarts de compétence entre les administrations a toujours existé pour les Premières Nations. Il existe depuis toujours. Lorsque nous commençons à discuter d’un enjeu au Sénat… une grande partie de ce problème a été portée à mon attention par des membres des Premières Nations et d’autres personnes marginalisées. Lorsque nous amorçons cette conversation, cela leur permet de se faire entendre dans leur propre province et de commencer à travailler avec le gouvernement provincial et leur municipalité.

Au Manitoba, il existe une politique sur le racisme environnemental et sur la façon de travailler avec les Premières Nations. Parfois, elle ne fonctionne pas, comme dans le cas de l’hydroélectricité, mais c’est un travail en cours. C’est le travail continu qui fait ressortir le caractère des gens, de sorte qu’ils reviennent comme ils étaient avant la colonisation. Ils donnent une voix; ils deviennent plus forts, et ils savent qu’ils sont résilients.

La sénatrice Sorensen : Merci.

La sénatrice Galvez : Je vous remercie d’avoir présenté ce projet de loi. Cela fait longtemps que nous l’attendions, et il est absolument nécessaire. Il y a de gros cas, comme la vallée du fleuve Mississippi, la vallée toxique qui touche des millions de personnes, mais il y a aussi de petits cas. Par exemple, dans ma propre ville de Québec, il y a la Basse-Ville, qui souffre de la pollution par le nickel venant du port. Elle y est depuis des années.

Nous connaissons tous des cas qui perdurent depuis des années. Les gens recueillent des données, des données médicales, sur les effets, mais il y a aussi des événements récents qui ont lieu, comme la région de Fort Chipewyan et le déversement de toutes sortes de substances toxiques.

Je veux savoir comment ce cadre incitera les gens à poser des gestes concrets pour régler les problèmes. C’est ma première question.

La sénatrice McCallum : Les mesures qui s’imposent doivent venir des communautés. Ce sont elles qui subissent activement le racisme environnemental. Elles connaissent leur territoire. Elles connaissent leur système de gouvernance. Chacune de ces communautés proposera des solutions uniques. C’est pourquoi il est important qu’elles participent au travail que nous faisons.

Mme May : C’est tout à fait exact. J’ajouterais aussi, concernant la question de la sénatrice Sorensen, qu’il n’est pas nécessaire de déterminer, sur le plan constitutionnel, dans quelle catégorie le problème se classe. C’est une question de droits existants. L’accès à ces droits doit être rééquilibré par l’élimination des obstacles. Ensuite, les outils donnant le pouvoir d’agir seront entre les mains des communautés pour qu’elles puissent régler les problèmes.

Les problèmes auront des caractéristiques différentes. Comme vous le dites, certaines existent depuis longtemps, d’autres sont nouveaux. Mais si on a accès aux droits et à la justice, on les poursuit de façon à rétablir l’équilibre au moyen d’outils qu’une communauté qui a beaucoup d’argent pourrait ne pas… si la communauté est racisée et non autochtone et qu’elle fait partie d’une structure qui suppose que le pouvoir existe, et de manière à ce que nous ne voyions pas de site de déchets toxiques à Rockcliffe Park et à ce que nous ne voyions pas de contamination à Rosedale.

Ce sont des choses évidentes partout au Canada. Voilà pourquoi, si les outils sont entre les mains de la communauté, ses membres vont trouver et apporter des changements concrets. Les tribunaux et les autorités vont s’en assurer une fois que ces communautés auront accès aux outils nécessaires pour obtenir une justice égalitaire.

La sénatrice Galvez : Cela m’amène à ma deuxième question. Comment ce projet de loi est-il lié à ou interagit-il avec d’autres projets de loi, comme celui que nous avons récemment adopté, le projet de loi S-5, Loi sur le renforcement de la protection de l’environnement pour un Canada en santé, ou même la LCPE, la Loi canadienne sur la protection de l’environnement, que nous venons de moderniser?

Mme May : Ils sont étroitement liés, comme toute proposition que le Canada mette en place des droits environnementaux quantifiables et exécutoires. C’est très étroitement lié à cela. À l’heure actuelle, le site Web d’Environnement Canada établit des liens entre les deux. Le projet de loi ne pourrait pas tenir seul sans ces autres projets de loi, mais il est évident que le travail qui a été fait, y compris celui effectué par de nombreux sénateurs sur le projet de loi S-5, a amélioré les caractéristiques et la qualité de ce qu’on peut décrire comme des droits à un environnement sain… pas des droits « pour » l’environnement. Le Canada n’a pas fait le saut que, par exemple, la Bolivie et d’autres pays ont fait, mais cet enjeu est très axé sur le fait de se demander si les humains ont le droit à de l’air pur, à de l’eau propre et à des sols sains. Quoi qu’il en soit, les humains, qu’ils soient Autochtones ou racisés, riches ou pauvres, ont-ils ces droits? Ces droits nous sont maintenant conférés grâce à l’évolution du projet de loi S-5.

Le président : Merci beaucoup à nos experts et à nos témoins. C’est très apprécié. Je vous remercie de nous avoir communiqué vos connaissances. Je suis certain que nous en tirerons beaucoup d’enseignements. C’est le début d’un processus important pour ce qui est de nous informer et de recommander les mesures appropriées.

[Français]

Pour notre deuxième groupe, nous accueillons des témoins d’Environnement et Changement climatique Canada, soit Heather McCready, directrice générale, Affaires législatives et réglementaires; Susan Martin, directrice générale, Direction de la politique stratégique; Amanda Monforton, directrice, Développement des politiques, justice environnementale et ACS plus.

Si je comprends bien, c’est Mme Monforton qui va prendre la parole au nom du groupe. Vous disposez de 10 minutes. Veuillez procéder.

Amanda Monforton, directrice, Développement des politiques, justice environnementale et ACS plus, Environnement et Changement climatique Canada : Merci beaucoup et bonsoir.

[Traduction]

La justice environnementale en tant que principe et concept a grandi et évolué depuis ses débuts dans les années 1980. Il n’existe pas de définition établie; cependant, les principes et les concepts de justice environnementale sont généralement considérés comme comprenant l’amélioration de la justice procédurale, de la justice de reconnaissance et de la justice distributive. La justice procédurale et la justice de reconnaissance cherchent à améliorer la façon dont les décisions sont prises et à s’assurer que les personnes touchées par l’injustice environnementale sont prises en compte et incluses dans les espaces décisionnels.

La justice distributive consiste à déterminer les façons dont certaines populations sont aux prises avec des fardeaux environnementaux disproportionnés, comme la pollution, et à chercher à améliorer les avantages environnementaux pour ces collectivités.

Au Canada, on étudie le problème du racisme environnemental depuis des décennies. À l’échelon provincial, un projet de loi semblable est débattu depuis 2015 en réponse aux communautés autochtones et afro-néo-écossaises qui ont été les plus touchées par le racisme environnemental. Les communautés afro-néo-écossaises de Birchtown et de Shelburne, en Nouvelle-Écosse, ont toujours compté parmi les plus grands établissements de Noirs à l’extérieur de l’Afrique, et ces Canadiens continuent de subir les préjudices causés par le racisme environnemental.

La semaine dernière, le ministre Guilbeault a entendu la communauté noire de Shelburne, et j’ai eu le privilège de me joindre à lui. Nous avons entendu parler des répercussions continues de la décharge de Morvan Road, située à la limite sud de la ville, en amont et à proximité directe d’une communauté d’Afro-Néo-Écossais. La décharge était utilisée pour les déchets résidentiels, industriels et médicaux de l’est du comté de Shelburne et a été brûlée pendant 75 ans. Bien qu’on l’appelle une « décharge », il s’agit d’un terrain excavé qu’on utilise pour stocker des déchets, sans protection des eaux souterraines ou de surface, et il est permis d’y brûler les déchets à l’air libre.

Elle a été fermée en raison d’une initiative lancée par la communauté locale en 2016 relativement aux répercussions disproportionnées du fardeau environnemental continu et des conséquences socioéconomiques connexes pour la communauté noire. Chris Jacklyn, Christina Farmer et Darlene Cooper, des membres de la communauté qui ont pris la parole lors de la table ronde, m’ont fait visiter le sud de la ville et, surtout, m’ont amenée à la décharge pour me raconter leur histoire. Dans ces histoires, ils ont dépeint la décharge comme un terrain de jeu de leur enfance, où ils trouvaient de la nourriture, des jouets et plus encore. Maintenant qu’ils sont adultes, ils comprennent les dangers et défendent les intérêts des générations futures.

[Français]

À l’échelle fédérale, le concept d’une stratégie nationale de justice environnementale a été envisagé pour la première fois lorsque le député de Cumberland—Colchester a présenté le projet de loi d’initiative parlementaire C-230 en février 2020. Je comprends que la situation à Shelburne, en Nouvelle-Écosse, a été l’un des principaux moteurs de la présentation du projet de loi. Le projet de loi C-230 est mort au Feuilleton lors du déclenchement des élections de 2021, et un projet de loi modifié, celui dont nous discutons aujourd’hui, a été présenté de nouveau en février 2022.

[Traduction]

Le projet de loi, s’il est adopté, obligerait la ministre de l’Environnement et du Changement climatique à élaborer, en consultation ou en collaboration avec les personnes, organismes, organisations ou communautés intéressés, une stratégie nationale d’évaluation, de prévention et d’atténuation du racisme environnemental. Une telle stratégie constituerait la première approche ciblée au niveau national pour remédier au racisme environnemental.

L’exigence du projet de loi C-226 d’élaborer une stratégie nationale concernant le racisme environnemental et la justice environnementale est conforme à la lettre d’engagement relative au mandat de 2021 du ministre de l’Environnement et du Changement climatique du Canada.

Comme la justice environnementale est un vaste ensemble de principes ou de concepts, il y a plusieurs allusions directes à la justice environnementale dans les initiatives fédérales. L’analyse comparative entre les sexes plus est un élément clé du processus décisionnel du gouvernement et sert à évaluer la façon dont différents sous-groupes de la population peuvent vivre les politiques, les programmes et les initiatives. Il y a d’autres exemples concrets de possibilités de régler les problèmes liés à la justice environnementale au moyen de programmes comme le Plan d’action pour les sites contaminés fédéraux et dans le mandat qu’a notre ministre de recenser les sites contaminés et de donner la priorité à leur nettoyage dans les régions où vivent les peuples autochtones et les Canadiens racisés et à faible revenu.

Il existe des initiatives stratégiques plus vastes, comme la Stratégie fédérale de lutte contre le racisme, qui vise à tenir compte de façon plus générale des répercussions des politiques et des programmes sur les communautés racisées, autochtones et religieuses minoritaires.

La Stratégie nationale d’adaptation du Canada est un autre exemple de cadre stratégique fédéral récent qui tient compte des concepts de justice environnementale, où « la promotion de l’équité, du climat et de la justice environnementale » est l’un des quatre principes directeurs de la stratégie.

Sur le plan législatif, le gouvernement du Canada reconnaît maintenant que chaque personne au Canada a droit à un environnement sain en vertu de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement — ou LCPE — modernisée. La LCPE exige maintenant la prise en compte d’un certain nombre de principes, dont la justice environnementale, dans le contexte de la mise en œuvre du droit à un environnement sain sous le régime de la loi.

Bien que les questions liées à la justice environnementale soient prises en compte dans de nombreux contextes au sein du gouvernement du Canada, une stratégie nationale telle que l’exige le projet de loi aurait des objectifs et un objet qui lui sont propres. À la lecture du préambule, l’objet du projet de loi est clair. Il serait important d’axer la stratégie sur l’intersection des dangers environnementaux et des communautés marginalisées pour maintenir une portée gérable dans le cadre du vaste concept de justice environnementale dans le court délai prévu par la loi et pour obtenir des résultats significatifs et mesurables.

Dans le champ d’application, une stratégie éventuelle pourrait expliquer les lois, les politiques, les programmes et les initiatives qui contribuent aux résultats de la stratégie, démontrer la cohérence des politiques et cerner les lacunes à combler par des interventions ciblées dans les programmes existants.

Du point de vue des Autochtones, pour respecter la Loi sur la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, le gouvernement étudierait les approches possibles pour élaborer une stratégie qui reflète les droits des peuples autochtones partout au Canada, quel que soit l’endroit, et qui garantit le respect des modes de connaissance autochtones.

Afin de se préparer à répondre aux exigences du projet de loi C-226 et d’éclairer une approche propre au Canada pour l’élaboration d’une stratégie de justice environnementale, le ministère a entrepris des recherches sur le concept, ainsi que sur les politiques, les initiatives et les modèles qui existent dans d’autres administrations.

En terminant, j’aimerais vous remercier de nous avoir invitées, mes collègues et moi-même, à nous entretenir avec vous aujourd’hui. Nous serons heureuses de répondre à vos questions concernant votre étude du projet de loi C-226. Meegwetch.

Le président : Merci beaucoup.

La sénatrice Galvez : Merci beaucoup d’être des nôtres ce soir pour répondre à nos questions.

Premièrement, il est percutant que vous admettiez que vous connaissez l’existence du racisme environnemental depuis des décennies. Il a donc fallu des décennies avant que l’on amène ce projet de loi jusqu’ici et qu’on l’appuie… parce qu’il est maintenant soutenu par le gouvernement, ce qui est très bien. Mais le diable est dans les détails, et, lorsque nous avons étudié la modernisation de la LCPE ici même, il y a eu deux changements importants. D’abord, nous avons remplacé le mot « prévention » par « réglementation et gestion » de la pollution, mais, si nous ne prévenons pas la pollution, nous nous retrouverons toujours dans une situation où nous devrons nettoyer tout ce qui est contaminé. Je voudrais que vous mettiez ces changements en contexte.

L’autre chose, encore une fois, c’est qu’un autre changement important apporté à la LCPE, c’est que le nom de l’annexe 1, substances toxiques létales, a été changé, et, maintenant, elle s’appelle seulement « Annexe 1 ». Or, devant les tribunaux, les gens débattent de ce qui est toxique, de ce qui ne l’est pas; le plastique est toxique ou il ne l’est pas. Tous ces débats créent beaucoup de confusion, et celle-ci ne rend pas la cause judiciaire claire, ou bien nous exerçons trop de pression sur les tribunaux pour qu’ils prennent position.

Pouvez-vous, s’il vous plaît, préciser comment vous allez harmoniser ce projet de loi avec la LCPE et avec d’autres, l’autre évaluation d’impact environnemental qui a également été modernisée, selon laquelle les effets cumulatifs des changements climatiques devraient être pris en compte aujourd’hui? Madame McCready, vous avez la parole.

Heather McCready, directrice générale, Affaires législatives et réglementaires, Environnement et Changement climatique Canada : Je m’appelle Heather McCready et je suis directrice générale, Affaires législatives et réglementaires, à Environnement et Changement climatique Canada. Je vous remercie de poser la question. Nous voudrons peut-être faire un suivi par écrit auprès de vous, parce que nos collègues de Santé Canada pourraient apporter une contribution importante à votre question sur les substances toxiques.

Je commencerai par dire que la justice environnementale et le concept du droit à un environnement sain sont liés et complémentaires, mais pas identiques. Comme les témoins nous l’ont dit plus tôt ce soir, ces deux concepts sont importants et s’appuient mutuellement. Le droit à un environnement sain, tout d’abord, s’applique spécifiquement à la LCPE et aux choses qu’elle régit, ainsi qu’à l’administration de cette loi en particulier, et non pas d’autres lois, où la justice environnementale pourrait être plus large, alors que la justice environnementale se concentre sur la réparation des torts causés par le racisme environnemental, elle se concentre donc nécessairement sur des communautés et des secteurs particuliers, mais ils sont liés.

Les changements précis qui ont été apportés à la LCPE en conséquence du projet de loi S-5 comprenaient un certain nombre de choses. Il y avait deux grands axes, dont vous vous souviendrez tous très bien, puisque vous avez joué un rôle important à cet égard, l’un étant le renforcement du Plan de gestion des produits chimiques et l’autre, l’ajout du droit à un environnement sain. Sur la question des produits chimiques, encore une fois, concernant les particularités, nous consulterons probablement nos collègues de Santé Canada pour qu’ils nous aident à expliquer un peu mieux certaines d’entre elles, mais l’objectif global est de renforcer notre façon de gérer les produits chimiques au Canada. Bien que vous ayez posé des questions précises au sujet du mot « prévention », je pense que l’intention générale est de fournir des outils supplémentaires et une clarté qui permettront en fait d’établir un régime plus solide qu’auparavant. Il se peut donc qu’il y ait des changements au libellé qui créent un peu de confusion, parce qu’ils sont nouveaux, mais on travaille sur ces choses dans le cadre de la mise en œuvre du droit à un environnement sain et des éléments connexes qui accompagnent la mise en œuvre du projet de loi S-5.

Je vais m’arrêter là, à moins que vous ayez quelque chose à ajouter?

La sénatrice Galvez : Qui effectue l’étude de cause à effet visant à établir si de la pollution a causé des problèmes de santé et du racisme environnemental dans des communautés racisées? Qui mène cette étude?

Susan Martin, directrice générale, Direction de la politique stratégique, Environnement et Changement climatique Canada : Merci de la question. Comme vous le savez, le projet de loi mentionne qu’une étude est requise. Cette étude comprend des statistiques sur l’emplacement des dangers environnementaux et des profils socioéconomiques. Le gouvernement du Canada dispose d’une mine de renseignements sur les rejets dans l’environnement et la situation socioéconomique. Par conséquent, si le projet de loi entre en vigueur, le gouvernement du Canada a l’intention d’entreprendre cette étude et de s’en servir pour étayer l’élaboration de la stratégie.

La sénatrice White : Merci pour votre exposé. Lorsque vous avez parlé des consultations et de la collaboration avec les personnes intéressées, je serais curieuse de connaître la portée des consultations. Il manque des renseignements dans le projet de loi, mais je ne m’attendais pas à ce que ceux-ci y figurent de toute façon. Dans quelle mesure sera-t-il exhaustif? Quand allez‑vous tenir les consultations? Quand allez-vous collaborer, et quels groupes seront déterminés? C’est une grande question, mais je serais très curieuse de connaître vos réflexions en ce moment.

Mme Martin : Je vous remercie de la question. Oui, il est certain que le projet de loi met l’accent sur les consultations; vous avez raison. Nous pensons que ce sera un élément important de notre travail au cours des deux prochaines années, mais, comme vous l’avez entendu dire plus tôt ce soir, la collaboration avec les communautés ne se terminera pas à la fin de la période de deux ans, quand la stratégie sera présentée.

Je pense qu’on tient une certaine quantité de consultations sur ce que les gens aimeraient voir dans la stratégie et qu’il y a une certaine collaboration lorsque l’on parle à des communautés particulières qui ont vécu le racisme environnemental afin de mieux déterminer de quoi elles ont besoin, les outils dont elles ont besoin pour faire face à la situation. Ces activités contribueront à éclairer certaines des mesures générales qui pourraient se retrouver dans la stratégie, mais elles pourront aussi éclairer le genre de mesures qui pourraient découler de la publication de la stratégie au fil du déroulement des travaux au cours des prochaines années.

La sénatrice White : Dans ce cas, à quel moment pensez-vous que l’obligation du ministre, en ce qui a trait aux consultations et à la coopération avec ces groupes, sera respectée?

Mme Martin : C’est une excellente question. Je pense que l’obligation de tenir des consultations sur la stratégie sera remplie dans le délai de deux ans prévu par le projet de loi. Quel que soit le genre de stratégie que le gouvernement élabore, il y a toujours une période de consultation permettant de s’assurer que la politique en cours d’élaboration répond aux besoins des personnes qu’elle sert. Ce ne sera pas différent dans ce cas-ci. Alors, je pense qu’une partie de l’exigence relative aux consultations sera respectée dans le contexte de l’élaboration de la stratégie, donc au cours des deux premières années.

La sénatrice McCallum : Je vous remercie de votre exposé.

Dans mon mémoire, j’ai dit qu’on a fait très peu de choses, et, lorsque je regarde ce que le gouvernement a mis en place — l’analyse comparative entre les sexes plus, la Stratégie canadienne de lutte contre le racisme, la Stratégie nationale d’adaptation du Canada, puis la LCPE — nous avons adopté une loi qui devrait déjà éliminer ou atténuer les répercussions de l’extraction des ressources. Alors, il semble que l’on ait mis en place des mesures de protection qui favoriseraient la justice environnementale et l’égalité conformément à l’article 22 et au paragraphe 185(2) de la LCPE, mais il semble aussi qu’il y ait une rupture lorsque vient le temps de mettre en œuvre et de suivre la réglementation de la loi.

Notre bureau travaille avec les Premières Nations de partout au Canada, et la situation ne s’améliore pas. Voilà pourquoi j’ai dit qu’on ne fait rien, parce que personne n’écoute ou ne met en œuvre… et je parle de l’industrie. Vous affirmez avoir déjà une mine de renseignements sur les statistiques, alors il semble que tout soit en place. Qu’est-ce qui va changer, maintenant, pour que les choses avancent comme elles le devraient et que les Premières Nations et la communauté noire ne continuent pas à vivre dans des endroits qui sont malsains, alors que nous avons toujours un droit inhérent à un environnement sain?

Mme Monforton : Merci beaucoup de poser la question. Je pense qu’il y a là deux ou trois éléments, et je demanderai peut‑être à mes collègues d’ajouter leur contribution, mais il est important de reconnaître que le droit à un environnement sain se limite à la LCPE et que, par conséquent, les problèmes liés au racisme environnemental vont bien au-delà de la LCPE. C’est la première partie.

Le deuxième élément, c’est l’établissement d’une stratégie qui peut réunir des efforts concentrés et ciblés et le fait de comprendre réellement comment ces initiatives fonctionnent pour faire progresser la justice environnementale en général, mais plus précisément quels sont les éléments qui sont nécessaires, parce que chaque communauté est différente. Les problèmes liés à l’injustice environnementale peuvent être très différents dans une communauté par rapport à une autre, alors il s’agit vraiment de s’assurer qu’il y a une chose pour un élément national et qu’il y a une autre chose lorsqu’on examine la question de façon un peu plus ciblée. Toutefois, l’existence de cette stratégie ciblée attire l’attention sur le problème, et peut‑être que je verrai s’il y a autre chose à ajouter.

Mme Martin : Vous avez bien couvert le sujet. Merci, madame Monforton.

Je pense que c’est la véritable différence de ce projet de loi; il met au premier plan l’objectif de s’attaquer au racisme environnemental en tant que problème, plutôt que d’en faire une question secondaire qui est prise en compte dans le contexte d’autres politiques, programmes et initiatives relevant du gouvernement du Canada.

Le sénateur Arnot : J’aimerais obtenir des précisions sur les préoccupations relatives aux consultations. En ce qui concerne le projet de loi C-226, certaines personnes ont soutenu que la portée du processus de consultation est trop vaste, et je sais que la collecte de renseignements et les consultations sont au cœur de votre travail, plus particulièrement le genre de processus décrits dans ce projet de loi. Pourriez-vous nous expliquer comment vous comptez mettre en œuvre un processus de consultation optimal et ce que vous faites pour vous assurer que certains groupes et intervenants particuliers participent directement aux discussions?

Mme Martin : Merci pour la question.

Vous avez soulevé deux éléments importants du travail qui nous attend si ce projet de loi entre en vigueur. Comme vous l’avez mentionné, il y a une étude qui va nous aider à comprendre l’enjeu et à savoir où se situent les problèmes, où ils sont les plus graves et, par conséquent, à qui nous devrions parler, afin de comprendre exactement ce qu’il faut faire pour régler ce problème important.

Je pense qu’il est juste d’affirmer que les consultations se dérouleraient en deux étapes, une qui est plus vaste et qui viserait à comprendre, auprès de toute partie intéressée, ce qu’elle pense de cet enjeu avant d’utiliser l’information accessible dans le cadre de l’étude qui serait entreprise pour mieux nous concentrer sur la mobilisation des groupes les plus touchés par le racisme environnemental.

Comme je l’ai mentionné plus tôt, le travail avec ces communautés se poursuivrait au-delà de la publication de la stratégie. C’est nécessairement pour que l’on puisse s’assurer que ces problèmes sont réglés.

Le sénateur Arnot : En ce qui concerne les connaissances, les façons de savoir et l’expérience autochtones, comment croyez-vous qu’elles seront intégrées à l’élaboration de cette stratégie?

Mme Monforton : Je vous remercie de poser la question. C’est très important, car il faut également examiner les façons de savoir autochtones selon une approche fondée sur les distinctions. Ce que font les Premières Nations peut être différent de ce que, disons, les titulaires de droits métis pourraient envisager.

De ce point de vue — l’aspect de cette intégration —, c’est là que nous nous sommes demandé si nous devions adopter une approche plus ciblée pour respecter la Loi sur la Déclaration des Nations unies. Je pense qu’il s’agit du texte important au titre duquel nous devons préciser, en tant que gouvernement du Canada, comment nous interagissons. Comment pouvons-nous veiller à ce que nous soyons en mesure d’utiliser la nature holistique du fonctionnement des façons de savoir autochtones et cette approche holistique plutôt que de dire que ce n’est qu’une considération? Il faut que ce soit intégré dans tout le travail que nous faisons.

Le sénateur Arnot : Il y a un autre élément que j’aimerais que vous abordiez, si vous le pouvez. Si le projet de loi C-226 n’est pas adopté, serait-il possible de mettre en œuvre en tant que politique des modifications précises à des lois existantes, comme la LCPE, pour lutter contre le racisme environnemental et faire progresser la justice environnementale?

Mme McCready : C’est une réponse que je trouve toujours frustrant de donner parce qu’elle est probablement frustrante à recevoir. Il ne nous appartient pas de nous prononcer sur des amendements que le gouvernement devrait ou ne devrait pas apporter, car c’est une question qui relève du Cabinet. Toutefois, il y a un certain nombre d’initiatives en cours au sein du ministère — Mme Monforton en a mentionné plusieurs dans sa déclaration préliminaire — qui sont pertinentes par rapport aux enjeux dont il est question.

J’ai aussi mentionné plus tôt le droit à un environnement sain, c’est-à-dire qu’il s’agit d’une première étape importante pour le gouvernement du Canada que de le faire enchâsser dans le principal texte de loi qui protège l’environnement et la santé humaine. C’est une mesure extraordinaire. Je pense qu’on y effectue une partie du travail, mais ce projet de loi irait plus loin et compléterait les efforts existants.

Mme Martin : Simplement pour faire suite à ce que Mme McCready a déjà dit, je pense qu’il existe un certain nombre de programmes qui fonctionnent dans ce domaine, alors, selon moi, le fait d’envisager d’apporter des amendements à différents textes complexifierait plus les choses qu’un seul projet de loi qui traite directement de cet enjeu.

La sénatrice Sorensen : Je vais profiter de l’occasion pour obtenir une mise à jour sur la situation. Je pense que la plupart des gens ici présents sont au courant de cette histoire, mais peut-être pas tous.

L’an dernier, Imperial Oil et l’organisme de réglementation de l’énergie de l’Alberta ont caché à la Première Nation des Chipewyans d’Athabasca le fait qu’un déversement massif s’était produit dans leur collectivité. Si vous êtes d’accord, j’aimerais profiter de l’occasion pour demander une mise à jour sur cette situation.

Pour faire le lien avec le projet de loi, croyez-vous que la stratégie qui découlera de celui-ci aidera le gouvernement fédéral à se doter de meilleurs outils qui lui permettront d’assurer la protection de communautés comme la Première Nation des Chipewyans d’Athabasca et une plus grande responsabilisation, dans ce cas-ci, de l’organisme de réglementation?

Mme McCready : En ce qui concerne la mise à jour, nous devrons vous répondre par écrit. Il est bien que vous l’ayez fait consigner au compte rendu, mais nous vous obtiendrons une meilleure réponse de la part des fonctionnaires compétents.

La sénatrice Sorensen : Oui, je serais curieuse de savoir où nous en sommes. Je lisais un article qui date de plusieurs mois.

Mme McCready : Pour ce qui est du projet de loi, je vais céder la parole à quelqu’un d’autre.

Mme Monforton : Le projet de loi en soi prévoit des interventions ciblées, bien sûr. Je pense que ce serait le résultat de la stratégie. Si vous pensez à cette communauté en particulier, il est important que les communautés se considèrent comme ayant été victimes de racisme environnemental. Ce n’est pas quelque chose qu’on peut dire, mais il s’agit aussi de comprendre ce qu’elles croient être les solutions de leur côté, et ensuite, comment le gouvernement fédéral les soutient-il afin qu’elles continuent à faire avancer leur cause et à militer pour que le problème soit réglé? Parce que, encore une fois, les questions de compétence entrent en ligne de compte. J’ajouterais que l’important, c’est la façon dont ces textes fonctionnent ensemble pour arriver à un résultat final.

La sénatrice Sorensen : Le projet de loi me semble très philosophique. Je dois simplement accepter qu’il est important qu’il soit adopté et que le problème soit cerné, que la véritable substance arrivera au moment où nous commençons à travailler sur cette stratégie et qu’il y aura un échéancier pour le faire.

Mme Monforton : Absolument.

Le président : Comme vous le remarquez, bon nombre des questions portent sur le fait que les gouvernements ont la réputation d’avoir de grandes ambitions, mais que, parfois, les résultats ne sont pas au rendez-vous. Vous pouvez voir un peu de scepticisme de notre part, alors vous vous demandez si ce sera différent. Dans quelle mesure est-ce sérieux? Avez-vous assez d’argent? Possédez-vous les compétences nécessaires? Ou bien nous retrouverons-nous dans cinq ans à dire que c’était une bonne occasion, que nous avons failli le faire, mais que nous n’y sommes pas parvenus, et tout le monde sera de nouveau frustré?

Dans votre situation personnelle, avez-vous suffisamment de pouvoir? Avez-vous assez d’argent pour faire le travail?

Mme Martin : Je vous remercie de votre question. Je pense que c’en est une valable à prendre en considération.

Je dirai que, comme il a été mentionné dans la déclaration préliminaire, cet engagement figure dans la lettre de mandat de notre ministre depuis l’automne 2021 et que nous sommes maintenant rendus à l’hiver 2024. Nous avons certainement eu assez de temps pour réfléchir à ce que signifierait une éventuelle entrée en vigueur de ce projet de loi et à l’aspect que prendrait le plan de travail et pour obtenir les ressources dont nous avons besoin pour entreprendre le travail d’élaboration d’une stratégie au cours des deux années qui suivraient cette entrée en vigueur.

Je peux confirmer que nous sommes prêts à entreprendre cette tâche. Nous comprenons le travail qui doit être fait; on prendra une décision sur la portée et l’échelle à une date ultérieure, lorsque la stratégie sera élaborée, et on affectera les ressources en conséquence.

La sénatrice McCallum : J’ai effleuré le sujet de la justice sociale et le fait que ce sera différent pour les Premières Nations en raison de ce qu’elles ont perdu, c’est-à-dire la gouvernance. Ce n’est pas seulement l’économie. C’est notre histoire, notre identité. C’est ce que nous avons perdu à cause du vol de terres qui se poursuit encore aujourd’hui. Nous ne voulons tout simplement pas travailler avec une industrie. Nous devons nous libérer de leur oppression.

Voyez-vous comment vous pourriez travailler avec les nations? Parce que ce sont des nations. C’est une relation complètement différente de celle avec les autres groupes. Comment travailleriez-vous avec les nations de manière à éviter la recolonisation?

Mme Monforton : À ce sujet, il est important de se reporter à la Loi sur la Déclaration des Nations unies et d’intégrer le consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause dans le cadre de l’élaboration de cette stratégie.

Il faudrait que notre façon de travailler avec les Premières Nations et les titulaires de droits autochtones soit l’élément clé pour la suite des choses. Je pense que la collaboration de nation à nation et le fait de veiller à ce que les collectivités des Premières Nations comprennent aussi la nature de ce problème… elles comprennent comment il les touche, comment elles pourraient vouloir participer à l’élaboration de la stratégie et comment elles pourraient avoir besoin de participer également. Il est important que ces discussions aient lieu avec les collectivités et les titulaires de droits, car la façon dont une collectivité travaille avec le gouvernement fédéral peut être différente de la façon dont une autre collectivité à l’autre bout du Canada pourrait vouloir travailler sur cet enjeu. À cet égard, je pense qu’en ce moment, nous attendons avant de préciser la façon dont nous allons nous y prendre afin de nous assurer qu’elle répondra à leurs exigences, pour revenir encore une fois au consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause.

La sénatrice Galvez : Merci infiniment. C’est très important. Je sais que vous allez répondre par « oui » ou « non » à ma question, mais je me disais que la façon dont trois ou quatre lois sur la protection de l’environnement se complètent n’était pas encore assez claire. Je me demandais si nous pouvions songer à une observation qui harmoniserait l’évaluation d’impact, la LCPE modernisée et le racisme environnemental.

Comme je l’ai dit plus tôt, le diable est dans les détails, et, si vous n’avez pas de bonnes définitions, nous ne réglerons pas le problème, et il sera tout simplement retransmis dans l’avenir.

Mme Martin : Merci pour la question. Sans émettre d’opinion sur les modifications qui pourraient être apportées, il est important de comprendre l’intention qui sous-tend la stratégie. La stratégie consiste à tenir compte de toutes les interventions existantes dans cet espace, du genre de politiques, de programmes, de lois et d’autres initiatives qui sont mis en œuvre, y compris d’autres facteurs qui ont mené à une situation particulière.

La stratégie en soi n’a pas de mesure. Elle regroupe tous les éléments existants. En un sens, la stratégie aide à assurer la cohérence de la façon dont ces différents textes fonctionnent ensemble et, peut-être, des modifications ou des changements qu’il pourrait falloir apporter à certains de ces textes, si l’on constate qu’ils contribuent au problème.

Le président : Merci beaucoup. Vous avez une énorme tâche et une immense responsabilité. Vous êtes très importants pour le Canada. Je vous souhaite la meilleure des chances. Si nous pouvons vous aider, dites-le-nous. C’est très important.

(La séance est levée.)

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