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NFFN - Comité permanent

Finances nationales


LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES FINANCES NATIONALES

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le mercredi 12 juin 2024

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd’hui, à 18 h 2 (HE) avec vidéoconférence, pour étudier le Budget supplémentaire des dépenses (A) pour l’exercice se terminant le 31 mars 2025 et pour étudier le projet de loi C-59, Loi portant exécution de certaines dispositions de l’énoncé économique de l’automne déposé au Parlement le 21 novembre 2023 et de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 28 mars 2023; et à huis clos, pour étudier la teneur complète du projet de loi C-69, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 16 avril 2024 (étude d’une ébauche de rapport).

Le sénateur Claude Carignan (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Avant de commencer notre réunion, je voudrais demander à tous les sénateurs et aux autres participants qui sont ici en personne de consulter les cartes sur la table pour connaître les lignes directrices visant à prévenir les incidents liés au retour de son.

Veuillez prendre note des mesures préventives suivantes, qui ont été mises en place pour protéger la santé et la sécurité de tous les participants, y compris les interprètes.

Dans la mesure du possible, veillez à vous asseoir de manière à augmenter la distance entre les microphones. N’utilisez qu’une oreillette noire homologuée. Les anciennes oreillettes grises ne doivent plus être utilisées. Tenez votre oreillette éloignée de tous les microphones à tout moment. Lorsque vous n’utilisez pas votre oreillette, placez-la, face vers le bas, sur l’autocollant placé sur la table à cet effet.

Merci à tous de votre coopération.

Je m’appelle Claude Carignan, sénateur du Québec et président du Comité sénatorial permanent des finances nationales. Bienvenue à tous les sénateurs et sénatrices et aussi à tous les Canadiens qui nous regardent sur sencanada.ca. Je vais maintenant demander à mes collègues de se présenter, en commençant par ma gauche.

Le sénateur Forest : Éric Forest, de la division du Golfe, au Québec.

Le sénateur Gignac : Clément Gignac, du Québec.

La sénatrice Oudar : Manuelle Oudar, du Québec.

Le sénateur Dalphond : Pierre Dalphond, de la division De Lorimier, au Québec.

[Traduction]

La sénatrice LaBoucane-Benson : Sénatrice Patti LaBoucane-Benson, du territoire du Traité no 6 — la seule sénatrice d’une province située à l’ouest de l’Ontario à siéger à la table —, en Alberta.

Le sénateur Loffreda : Bienvenue. Je suis le sénateur Tony Loffreda, de Montréal, au Québec.

La sénatrice Kingston : Bienvenue. Joan Kingston, du Nouveau-Brunswick.

La sénatrice MacAdam : Bienvenue. Jane MacAdam, de l’Île-du-Prince-Édouard.

La sénatrice Ross : Krista Ross, du Nouveau-Brunswick.

La sénatrice Marshall : Elizabeth Marshall, de Terre-Neuve-et-Labrador.

Le sénateur Smith : Larry Smith, de Hudson, au Québec.

[Français]

Le président : Merci. Honorables sénateurs et sénatrices, nous commençons aujourd’hui notre étude sur le Budget supplémentaire des dépenses (A) pour l’exercice se terminant le 31 mars 2025.

Nous sommes heureux d’accueillir virtuellement Yves Giroux, directeur parlementaire du budget. Il est accompagné de Mme Kaitlyn Vanderwees, analyste. Bienvenue et, comme d’habitude, un grand merci d’avoir accepté notre invitation. Monsieur Giroux, vous avez la parole pour cinq à sept minutes, et on vérifiera ensuite auprès des sénateurs s’ils ont des questions. Nous avons prévu 75 minutes pour notre séance.

Yves Giroux, directeur parlementaire du budget, Bureau du directeur parlementaire du budget : Monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité, bonsoir. Je vous remercie de m’avoir invité à comparaître devant vous. J’aurais préféré être là en personne, comme c’est mon habitude, mais un engagement de longue date m’oblige à comparaître virtuellement.

Nous avons été invités pour discuter de notre rapport sur le Budget supplémentaire des dépenses (A) de 2024-2025, qui a été publié le 30 mai 2024. Je suis accompagné aujourd’hui de Kaitlyn Vanderwees, analyste principale pour ce rapport.

Le Budget supplémentaire des dépenses (A) de 2024-2025 prévoit des dépenses budgétaires supplémentaires de 12,7 milliards de dollars, pour lesquelles le Parlement doit approuver 11,2 milliards de dollars. Le montant de 1,5 milliard de dollars qu’il reste représente une augmentation des dépenses législatives prévues pour lesquelles le gouvernement a déjà obtenu l’approbation du Parlement par l’intermédiaire d’autres lois.

L’augmentation prévue des dépenses législatives est principalement attribuable à deux éléments : d’une part, une augmentation de 1,9 milliard de dollars des coûts de la dette publique, qui est principalement attribuable aux taux d’intérêt plus élevés prévus et aux exigences d’emprunt plus grandes; d’autre part, une diminution de 533 millions de dollars des prestations aux aînés, qui s’explique par des révisions apportées au nombre de bénéficiaires projeté.

Je vais maintenant poursuivre en anglais.

[Traduction]

Près des deux tiers des dépenses proposées dans le Budget supplémentaire des dépenses — 7,8 milliards de dollars — relèvent du portefeuille des Autochtones et sont destinées principalement à des règlements et aux revendications autochtones. Les dépenses prévues pour les services professionnels et spéciaux représentent 704 millions de dollars en dépenses proposées, ce qui porte à 19,8 milliards de dollars le total des autorisations proposées pour 2024-2025 relativement à ces services.

Près de 1,6 milliard de dollars des dépenses proposées est destiné à 11 mesures du budget de 2024. Plus particulièrement, ces dépenses comprennent 605 millions de dollars destinés au programme Incitatifs pour les véhicules zéro émission. Afin d’aider les parlementaires à examiner la mise en œuvre du budget de 2024, nous avons préparé et publié des tableaux de suivi qui énumèrent toutes les initiatives budgétaires avec les dépenses prévues pour l’exercice 2024-2025, les montants des dépenses prévues et l’autorisation législative correspondante. Ces tableaux sont accessibles sur notre site Web et seront mis à jour au cours de l’année à mesure que le gouvernement présentera son programme législatif.

Mme Vanderwees et moi-même serons heureux de répondre à vos questions concernant notre analyse des prévisions budgétaires ou le travail du directeur parlementaire du budget, ou DPB.

Merci.

Le président : Merci, monsieur Giroux.

La sénatrice Marshall : Je vous remercie, madame Vanderwees, de votre présence, et je remercie M. Giroux de comparaître, même si nous vous voyons habituellement en personne.

Je reprends certains des renseignements que vous avez fournis, non seulement dans votre rapport sur le Budget supplémentaire des dépenses (A), mais aussi dans le Budget de 2024 : enjeux pour les parlementaires. En ce qui concerne toutes les initiatives que le gouvernement a mises en place pour réduire les dépenses, j’aimerais savoir si vous pensez qu’il cherche à économiser de l’argent ou s’il va simplement déplacer l’argent pour le dépenser ailleurs parce qu’il utilise l’expression « recentrer ».

La raison pour laquelle je pose cette question est… je regardais les dépenses de fonctionnement qu’on prévoit pour l’avenir dans le document budgétaire. On dit que l’an dernier, on a dépensé 130 milliards de dollars, que cette année, les dépenses seront réduites pour passer à 123 milliards de dollars et qu’il n’y aura pas de croissance. Elle plafonne pratiquement depuis plusieurs années. Je voulais savoir dans quelle mesure ces chiffres sont pratiques ou plausibles, compte tenu du fait que le gouvernement s’est engagé à économiser de l’argent ou à faire quelque chose avec un financement réduit et à recentrer l’argent qu’il a économisé.

Pourriez-vous simplement formuler un commentaire et me donner des précisions à ce sujet?

M. Giroux : Bien sûr. Le gouvernement a annoncé des examens successifs des dépenses au fil du temps, dès... quand nous avons commencé à en faire le suivi dans le budget de 2022, et il a annoncé divers types d’examens des dépenses; des réductions des dépenses prévues dans le contexte d’une reprise plus vigoureuse; une réduction des dépenses pour les consultations, les services professionnels et les déplacements… ainsi que l’efficacité des programmes pangouvernementaux des sociétés d’État.

La majorité de ces examens sont toujours en cours. L’un d’eux a été annulé — l’examen de la politique stratégique annoncé dans le budget de 2022 — et l’autre visait à réaliser des économies pour les exercices 2023-2024 à 2026-2027, mais le gouvernement s’est plutôt attribué le mérite d’avoir réduit les dépenses en 2022-2023.

Tout cela pour dire que ces divers examens des dépenses semblent consister principalement à réaffecter les dépenses à d’autres secteurs parce que nous n’avons pas de détails concernant la plupart d’entre eux, mais aussi parce que nous constatons que les dépenses augmentent dans les budgets successifs.

Si vous regardez le budget de 2021, vous constaterez qu’il comportait un plan financier et que les dépenses budgétaires augmentaient. Dans le budget de 2022, il y avait un changement à la hausse pour toutes les années subséquentes. Tous les documents financiers successifs affichent une tendance à l’augmentation des dépenses pour toute année donnée, ce qui m’amène à votre commentaire sur les dépenses de fonctionnement qui restent au même niveau dans les années à venir.

Compte tenu de l’historique des dépenses gouvernementales, de l’augmentation de la taille de la fonction publique et du fait qu’il est difficile de réduire des dépenses qui devraient être plus faciles à dépenser, comme les services de consultation, je ne suis pas convaincu que les dépenses de fonctionnement ne continueront pas d’augmenter.

Lorsque nous voyons les dépenses de fonctionnement…

La sénatrice Marshall : Merci. Si nous regardons les services professionnels et spéciaux, seulement cette catégorie de dépenses, déjà… nous venons tout juste de recevoir le Budget supplémentaire des dépenses (A), et il s’élève déjà à 19,8 milliards de dollars. Dans quelle mesure êtes-vous convaincu que le gouvernement va garder ses dépenses en services professionnels et spéciaux sous contrôle?

M. Giroux : Il faudrait qu’il fasse preuve d’une discipline considérable pour le reste de l’année. Cela dit, des fonds supplémentaires pourraient être affectés à ces types de dépenses dans le Budget supplémentaire des dépenses (B) et le Budget supplémentaire des dépenses (C), s’il y en a un. Il est possible que les dépenses soient inférieures à celles des années précédentes, mais, jusqu’à présent, les autorisations ne portent pas à le croire.

Toutefois, ce sont des montants maximums, alors il est fort possible que le gouvernement finisse par dépenser moins ou beaucoup moins, mais ce n’est pas ce qu’indiquent les signes.

La sénatrice Marshall : Merci, monsieur Giroux.

[Français]

Le sénateur Forest : Merci d’être parmi nous, monsieur Giroux.

Ma première question concerne les services professionnels qui sont encore à la hausse, malgré l’engagement du gouvernement de mieux contrôler les dépenses des consultants externes à la suite de l’affaire McKinsey. Vous notez que ce Budget supplémentaire des dépenses comprend des dépenses de 704 millions de dollars pour les services professionnels et spéciaux, ce qui porte les autorisations proposées totales pour 2024‑2025 à un impressionnant montant de 19,8 milliards de dollars. On n’a pas encore reçu les budgets supplémentaires (B) et (C), donc il y a de fortes chances qu’on soit aussi performant dans ce domaine que l’an dernier avec un investissement record de 21,6 milliards de dollars.

Comment peut-on expliquer qu’on soit encore dans cette situation, malgré ce qui s’est passé avec McKinsey et malgré l’engagement du gouvernement?

M. Giroux : C’est une bonne question. C’est difficile à expliquer puisque le gouvernement s’était engagé, après les récentes controverses, à réduire de façon importante le recours aux services professionnels et spéciaux. Par contre, comme vous le mentionnez, jusqu’à maintenant — on est seulement au Budget supplémentaire des dépenses (A) —, on est presque au niveau de 2023-2024.

C’est possible que le gouvernement fasse preuve de retenue et qu’on autorise les ministères à dépenser près de 20 milliards de dollars ou un peu plus, mais que les ministères et les agences se contraignent et finissent l’année en cours avec des dépenses moins élevées en matière de services professionnels et spéciaux. Jusqu’à maintenant, on voit que les autorisations sont presque au même niveau que l’année dernière, et cela n’augure pas vraiment bien pour une réduction considérable du total des dépenses dans cette catégorie.

Le sénateur Forest : Surtout une réduction considérable. Est‑ce que, selon votre expérience, vous avez déjà vu des situations où l’on a autorisé, par exemple, des dépenses de l’ordre de 20 milliards de dollars, mais où l’on n’aurait pas utilisé les sommes autorisées?

M. Giroux : Oui, cela arrive. En général, les ministères peuvent dépenser jusqu’à 5 % de moins que leurs autorisations pour les dépenses de fonctionnement et reporter ces fonds inutilisés d’une année à l’autre. Ce n’est pas rare que des ministères et agences dépensent 95 % ou un peu moins de leurs allocations budgétaires avec l’objectif de reporter cela. C’est possible, mais dans le cas des services professionnels et spéciaux, avec l’engagement que le gouvernement a pris et répété à plusieurs reprises, c’est étonnant que les autorisations soient encore aussi élevées considérant les engagements qui ont été pris, encore une fois.

Le sénateur Forest : Dans le domaine des ressources humaines, en ce qui concerne l’engagement de couper 5 000 postes, selon votre analyse, vous semblez peu optimiste sur l’atteinte de cet objectif. Qu’est-ce qui vous amène à faire cette conclusion?

M. Giroux : Encore une fois, c’est l’historique du gouvernement en la matière. Lorsqu’on regarde les plans ministériels qui sont déposés en février ou mars, on voit que les ministères prévoient une baisse de leurs effectifs, mais l’année prochaine. Peu importe l’année que l’on examine, c’est toujours l’année prochaine. L’historique fait en sorte que, plutôt qu’une baisse, on a souvent expérimenté une hausse des effectifs. Donc, quand le gouvernement annonce une réduction de 5 000 employés sur quatre ans, cela ne me semble absolument pas ambitieux et c’est quelque chose qui pourrait être atteint en quelques mois, étant donné la taille de la fonction publique qui dépasse les 400 000 employés, ou 400 000 équivalents temps plein.

Le sénateur Forest : N’y a-t-il pas là une conjoncture inquiétante où l’on augmente les budgets consacrés à des consultants externes et où l’on augmente la fonction publique en même temps? L’addition des deux fait qu’on se retrouve dans une tendance un peu inquiétante.

M. Giroux : En effet. Je pense que j’en ai déjà parlé au comité, mais quand la taille de la fonction publique s’accroît de façon aussi importante, on s’attendrait à ce que le recours aux consultants soit moins nécessaire. Par contre, ce qu’on a vu au cours des dernières années, c’est une augmentation en parallèle des services professionnels et de la taille de la fonction publique.

Le président : Merci.

Le sénateur Gignac : Bienvenue, monsieur Giroux. Parlons donc des véhicules à zéro émission, puisque je pense qu’on a une demande de 605 millions de dollars dans ce Budget supplémentaire des dépenses qui est devant nous. C’est quand même une portion importante du montant de 11 milliards de dollars qui est demandé.

Vous avez produit un beau tableau de l’évolution du pourcentage d’immatriculations des véhicules à zéro émission. Pouvez-vous nous parler un peu plus de la répartition par province et nous dire jusqu’à quel point les mesures incitatives qu’il peut y avoir par province ou les infrastructures peuvent varier? Pouvez-vous nous donner un peu plus de données sur la répartition par province?

M. Giroux : Je n’ai pas les chiffres exacts de la répartition par province devant moi, mais le Québec et la Colombie-Britannique mènent le bal en ce qui a trait au nombre d’immatriculations de véhicules à zéro émission, des véhicules électriques. L’Ontario suit de près, mais il est clair qu’avec le Québec et la Colombie-Britannique qui représentent une partie plus importante que leur population, c’est étroitement lié au fait que ces deux provinces ont encore — aux dernières nouvelles, du moins — des incitatifs financiers pour l’achat de véhicules électriques.

Je sais qu’au Québec, on est en train de les éliminer progressivement. Les incitatifs financiers expliquent en bonne partie la forte présence de véhicules électriques dans ces deux provinces.

Une des raisons plus souvent évoquées qui freinent l’adoption des véhicules électriques par les automobilistes, outre le fait que le prix est plus élevé, c’est l’inquiétude par rapport à l’autonomie des véhicules et la disponibilité de points de recharge. Toutefois, ce n’est pas une question qu’on a étudiée encore. On prévoit de faire un peu plus d’analyse sur les véhicules à zéro émission et sur le mandat du gouvernement selon lequel 100 % des nouvelles immatriculations seront à zéro émission en 2035.

Le sénateur Gignac : Je vais vous amener sur un autre sujet, qui n’est pas lié au Budget supplémentaire des dépenses. Je m’excuse, mais je ne peux pas laisser passer cette occasion d’en parler, puisque vous êtes là. Ces jours-ci, on en parle beaucoup. Cette mesure est parmi les plus importantes du budget de 2024, mais elle ne se trouve pas dans le projet de loi d’exécution du budget sur lequel on se penche actuellement. Il s’agit de la taxe sur les gains en capital. Un avis de motion de voies et moyens a été déposé, mais le projet de loi sera déposé plus tard cet été.

Vous souvenez-vous de la dernière fois où une mesure fiscale aussi importante est entrée en vigueur? Elle était d’une autre nature peut-être, mais le projet de loi n’avait pas été déposé alors qu’elle ne faisait pas partie du projet de loi d’exécution du budget? Si vous ne pouvez pas répondre, une réponse écrite serait appréciée. Je suis les finances publiques depuis 35 ans et je n’ai jamais vu une chose pareille.

M. Giroux : Je ne me souviens d’aucune mesure de cette importance. Je sais que plusieurs modifications techniques à la Loi de l’impôt sur le revenu sont souvent annoncées par des motions de voies et moyens, mais généralement des modifications législatives suivent. Il peut arriver qu’elles suivent un an ou deux ans après. Toutefois, je n’ai pas souvenir d’une mesure de cette importance. Si on trouve d’autres précédents, on va sûrement se faire un plaisir de vous les envoyer par écrit.

Le sénateur Gignac : Merci.

[Traduction]

Le sénateur Smith : Monsieur Giroux, je suis heureux de vous voir.

M. Giroux : De même.

Le sénateur Smith : Nous étions simplement inquiets que vous ne vouliez pas revenir nous voir.

Dans votre rapport sur le Budget supplémentaire des dépenses (A) 2024-2025, vous signalez que votre bureau a recensé environ 200 initiatives du budget de 2024 qui contiennent des dépenses prévues cette année. Des quelque 13 milliards de dollars d’autorisations budgétaires dans ce budget supplémentaire des dépenses, une somme d’environ 1,6 milliard de dollars est liée à 11 mesures budgétaires.

Étant donné que 200 postes du budget de 2024 nécessitent un financement cette année, mais qu’un financement a été demandé pour seulement 11 postes jusqu’à maintenant, j’aimerais savoir ce que vous pensez du rythme et de la planification. Je me demande si vous avez des préoccupations au sujet de la direction que prend le gouvernement.

M. Giroux : Le fait que relativement peu de mesures ont été financées jusqu’à présent au cours de l’exercice reflète probablement le fait que le budget a été tardif dans le cycle par rapport à ce que nous observions avant la pandémie ou même auparavant. Un budget déposé à la mi-avril n’a certainement pas laissé aux responsables le temps d’inclure des mesures dans le Budget principal des dépenses puisque celui-ci doit être déposé au plus tard le 1er mars. En ce qui concerne le Budget supplémentaire des dépenses (A), les fonctionnaires ont eu peu de temps pour y inclure des mesures budgétaires... au moins un nombre considérable de mesures.

Il s’agit d’une bonne occasion pour moi de répéter les nombreux avantages qu’offrirait le dépôt d’un budget beaucoup plus tôt dans le cycle, de sorte que plus de mesures budgétaires se retrouveraient dans le Budget principal des dépenses et, si ce n’est pas dans le Budget principal des dépenses, à tout le moins dans le Budget supplémentaire des dépenses (A). Le fait qu’il y ait si peu de mesures dans le budget des dépenses jusqu’à maintenant met en péril la mise en œuvre de certaines des mesures qui doivent être financées durant l’exercice en cours.

Le sénateur Smith : Ma question complémentaire est la suivante : la lenteur de la mise en œuvre du budget constitue‑t‑elle un problème permanent pour le gouvernement fédéral et ses ministères? S’agit-il d’un indicateur de rendement ou de faiblesses en matière de leadership? Que se passe-t-il?

M. Giroux : Je n’ai pas examiné l’intérieur du processus budgétaire depuis un certain temps, mais je crois que les décideurs préfèrent que le budget soit présenté plus tard dans le cycle. Les raisons peuvent être multiples, mais je ne sais pas lesquelles sont le facteur déterminant.

Ce pourrait être un facteur d’incertitude économique. La ministre des Finances et vice-première ministre et l’ensemble du gouvernement veulent se laisser plus de temps pour voir ce qui se passe dans l’économie. Ce pourrait aussi être à des fins de communication ou pour des raisons tactiques que l’on dépose le budget tard dans le cycle. Le dépôt tardif pourrait aussi être attribuable à l’absence de planification et de préparation appropriées en vue du budget… quoique je serais surpris que ce soit le cas, car la préparation du budget est une machine très bien huilée, certainement au ministère des Finances et chez ses partenaires des principaux ministères ainsi qu’au Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada.

[Français]

Le sénateur Dalphond : Bonsoir. J’ai une question pour vous. Je n’ai pas eu le temps d’analyser attentivement le budget supplémentaire. Toutefois, puisque vous l’avez vous-même fait, je vais profiter de votre analyse.

Je remarque que, sur pratiquement 12 milliards de dollars en dépenses supplémentaires, les deux tiers sont liés aux affaires autochtones, dont 5,6 milliards sont affectés à différents règlements. Avez-vous analysé la raison pour laquelle c’est le cas? Est-ce parce que les chiffres n’étaient pas connus alors qu’ils commencent à l’être maintenant? On vient à peine de déposer les estimations. Or, on a déjà plus de 5 milliards et demi dans le Budget supplémentaire des dépenses.

M. Giroux : C’est une question intéressante. Il faut tenir compte de deux choses lorsqu’on considère les dépenses pour les règlements de demandes ou les règlements relatifs à des réclamations ou à des litiges avec les peuples autochtones. D’une part, il y a le moment où cela affecte le déficit, lorsqu’on reconnaît et qu’on accepte que le gouvernement a une obligation juridique face aux Autochtones. C’est une détermination qui est faite par les avocats du ministère de la Justice. Cela affecte le déficit lorsqu’on reconnaît qu’on aurait une bonne probabilité de perdre si jamais la question était soumise aux tribunaux.

D’autre part, lorsque l’entente est réglée, soit par décision d’un tribunal ou à l’amiable, c’est là qu’on a besoin des fonds et qu’il faut faire un chèque. Je présume qu’on n’a pas inclus ces éléments au budget principal, parce que les montants ou les détails n’étaient peut-être pas tous connus. Il était probablement prématuré de les mettre dans le budget principal. Ces dépenses se retrouvent maintenant dans le Budget supplémentaire des dépenses.

Le sénateur Dalphond : C’est comme si on avait conclu tous les règlements depuis le budget. Je vois un montant de 1,7 milliard de dollars pour un fonds, 1,4 milliard pour un autre fonds, 1 milliard pour un troisième fonds et 500 millions pour un quatrième fonds. Tous les règlements ont été rendus depuis quelques semaines?

M. Giroux : Cela semble étrange, en effet. Le budget principal doit être finalisé en février, ce qui voudrait dire que tous ces règlements se sont cristallisés ou se sont confirmés entre la fin de février et probablement la mi-mai. Comme vous le mentionniez, cela ne laisse pas une longue période pour avoir autant de dépenses finalisées.

Je ne suis malheureusement pas la meilleure personne pour vous donner la raison pour laquelle il y en a autant dans le Budget supplémentaire des dépenses. À moins que Mme Vanderwees ne vous fasse signe dans la salle, ce serait probablement une bonne question pour le ministère.

Le président : Elle fait signe que non. Si vous me le permettez, j’aimerais approfondir sur ce point. Selon ce que je comprends, si les opinions juridiques avaient indiqué que ce sont des cas pour lesquels on devra payer ou si les règlements avaient été conclus en janvier, par exemple, ils auraient dû les mettre dans le budget que la ministre a déposé au mois d’avril. Le déficit aurait alors été de presque 10 milliards de plus.

M. Giroux : Oui. Lorsque les avocats du gouvernement reconnaissent que c’est une réclamation fondée, le gouvernement doit probablement payer un montant. Donc, il estime le montant des dédommagements ou des réclamations qui doit être versé. Cela devient un compte à payer et c’est inscrit au déficit dans l’année où cette obligation est reconnue, mais le moment de faire le chèque, c’est quand on a besoin des fonds dans le compte de banque du gouvernement; c’est là où les fonds sont demandés dans le Budget principal des dépenses ou les budgets supplémentaires.

Le président : Avez-vous accès à ces ententes pour valider la date à laquelle elles ont été conclues?

M. Giroux : Je ne crois pas qu’on ait accès aux ententes, parce qu’elles sont souvent confidentielles. On ne connaît certainement pas le moment où elles sont reconnues et les raisons pour lesquelles les avocats disent que c’est une obligation qui devrait être reconnue. Tout cela est couvert par le secret professionnel entre l’avocat et le client.

Le président : Parfait. Désolé, je voulais simplement poursuivre dans la même veine.

Le sénateur Loffreda : Merci d’être avec nous, monsieur Giroux.

[Traduction]

Et merci à Mme Vanderwees d’être des nôtres.

Monsieur Giroux, c’est toujours un plaisir de vous recevoir. Vous êtes toujours intéressant.

J’aimerais maintenant parler de l’engagement du gouvernement à réduire les dépenses consacrées aux services professionnels et spéciaux. La figure 2.3 de votre rapport est assez révélatrice et montre à quel point le gouvernement a augmenté les dépenses pour ces services depuis 2015. Il est question d’être passé de 11 milliards de dollars à plus de 20 milliards de dollars en moins de 10 ans.

De plus, nous savons que la taille de l’administration centrale de la fonction publique a atteint près de 275 000 employés; il s’agit d’une augmentation de 40,4 % depuis 2014-2015. Si on inclut toute la population de la fonction publique — les organismes et tout le reste —, on parle de 357 000 employés.

Je sais que nous avons abordé la question, et beaucoup se plaindront de la taille croissante de la fonction publique, mais il vaut la peine de souligner que la population canadienne croît à un rythme plus rapide. En 2015, nous avions 132 citoyens par fonctionnaire et, en 2023, nous avions 111 Canadiens par employé.

Je ne considère pas que ce soit aussi grave que cela en a l’air quand on regarde ces chiffres. Vous pourriez peut-être nous dire ce que vous en pensez.

Pourriez-vous nous parler de la difficulté que vous éprouvez à obtenir du gouvernement des données sur les réductions des dépenses prévues dans le cadre de l’exercice de recentrage des dépenses gouvernementales? Pourriez-vous nous dire dans quelle mesure vous êtes convaincu que les dépenses finiront par diminuer et que nous verrons la lumière au bout du tunnel?

M. Giroux : Je vous remercie, monsieur le sénateur. Nous avons examiné le nombre d’employés pour 100 Canadiens. Vous avez raison d’affirmer qu’il met les choses dans une perspective légèrement différente parce qu’il tient compte de la croissance de la population, et on s’attend normalement à ce qu’une population croissante ait également besoin de plus de services.

Si on regarde le nombre de fonctionnaires pour 100 Canadiens, on constate qu’il a été plus élevé, mais qu’il a aussi augmenté. Même si on tient compte de la taille de la population, le nombre d’employés par rapport à la population canadienne a aussi augmenté au cours des dernières années, et ce, pour diverses raisons.

En ce qui concerne votre question sur la possibilité que le gouvernement réduise ou réaffecte les dépenses ou sur son engagement à cet égard, je ne suis pas trop optimiste à ce sujet pour deux ou trois raisons. On a procédé à un exercice de réduction des dépenses qui a été conclu de façon prématurée.

En réponse à la sénatrice Marshall, je ne l’ai peut-être pas bien expliqué, mais le gouvernement de l’époque s’était engagé à réduire les dépenses pour l’avenir. Au lieu de le faire, il est revenu en arrière et a remarqué que les dépenses dans certains secteurs étaient moins élevées, notamment en raison de la COVID, et il a revendiqué la victoire sur ce front. Cette manœuvre a évité au gouvernement de procéder à un examen des dépenses relativement à cet aspect particulier.

Un autre examen des dépenses a été annulé, et le reste des réductions, des examens ou des réaffectations des dépenses est en cours. Dans le cas de ceux qui sont en cours, certains renseignements ont été fournis, notamment en ce qui concernait la réduction des déplacements et des services de consultation. Dans un grand nombre de ces cas, il n’y a pas eu de réduction réelle de ce genre de dépenses; il s’agissait plutôt de mesures qui allaient réduire nos fonds de prévoyance ou assurer une efficience générale.

Tout cela pour dire que ces examens des dépenses pourraient entraîner la réaffectation de dépenses; cependant, si l’on se fie à l’histoire, je ne suis pas très optimiste.

La sénatrice MacAdam : Pour en revenir à la question des véhicules électriques, dans le Budget supplémentaire des dépenses (A), vous soulignez une augmentation impressionnante du nombre de nouveaux véhicules enregistrés au Canada, de 10,8 % en 2023. Mais le manque d’investissement dans l’infrastructure de recharge et le fait qu’elle n’est pas accessible partout au pays, surtout dans les régions rurales et éloignées, suscitent des préoccupations chez les Canadiens, malgré le programme d’incitatifs pour les véhicules électriques.

L’an dernier, le commissaire à l’environnement et au développement durable a soulevé des préoccupations semblables. De même, Ressources naturelles Canada a reconnu qu’il s’agit d’un obstacle important à l’adoption des véhicules électriques et a annoncé le Programme d’infrastructure pour les véhicules à émission zéro de 680 millions de dollars, qui est actuellement à l’étape de l’adoption.

Avez-vous des constatations préliminaires sur la façon dont ce programme d’infrastructure sera mis en œuvre pour appuyer les objectifs de vente de véhicules électriques du Canada?

M. Giroux : C’est une question intéressante parce que, comme vous l’avez mentionné, les bornes de recharge sont un élément essentiel de l’adoption généralisée des véhicules électriques. Nous ne nous sommes pas encore penchés sur cet aspect précis, mais nous sommes en train d’examiner le mandat relatif aux véhicules à émission zéro que le gouvernement a mis en place, qui exigera que 60 % des véhicules soient à émission zéro d’ici 2030, et 100 % d’ici 2035. Nous aborderons la question de l’accessibilité des bornes de recharge pour véhicules électriques dans le cadre de cet examen.

La sénatrice MacAdam : Merci.

La sénatrice Kingston : Merci de comparaître, monsieur Giroux et madame Vanderwees. Je vais essayer de faire des liens avec quelque chose, alors je vous demande d’être patients pendant une minute.

Dans votre document sur le Budget supplémentaire des dépenses, vous décrivez le financement du Programme fédéral de santé intérimaire, et les demandeurs d’asile font partie de ces dépenses. Nous savons qu’il y a eu une augmentation du nombre de demandeurs d’asile et de leurs besoins.

Dans l’autre document que vous avez fourni, vous parlez de l’argent qui est consacré — 411 millions de dollars — aux soins de santé pour les demandeurs d’asile et les réfugiés. J’ai une certaine expérience à cet égard aux échelons local et provincial, et cette information pose certains problèmes.

Y a-t-il un lien entre la somme inscrite dans votre tableau — 411 millions de dollars — et l’argent destiné aux services professionnels? Est-ce qu’une partie de cet argent est consacrée aux soins de santé pour les demandeurs d’asile? Parce qu’ils sont dans un hôtel et qu’il y a des travailleurs de la santé, mais qu’ils ne sont pas très connectés au système. Il y a tout un tas de problèmes.

Y a-t-il une interaction entre l’argent destiné aux services professionnels qui est dépensé et l’argent qu’on dit être consacré aux soins de santé pour les demandeurs d’asile?

M. Giroux : Il pourrait y en avoir une, mais pour en être certains, nous devrons examiner de plus près les contrats précis pour savoir où va l’argent destiné aux services de santé pour les demandeurs d’asile et quel genre d’ententes contractuelles sont conclues par Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, ou IRCC, afin de voir si certains de ces services sont considérés comme des services de consultation et des services spéciaux. Nous n’avons pas ce niveau de détail.

Nous faisons une macroanalyse. Nous devons poser à IRCC des questions au sujet des ententes de financement particulières qui existent pour les demandeurs d’asile et de la façon dont le ministère fournit ses services et dont il les qualifie.

La sénatrice Kingston : Ce que je tente de comprendre, c’est comment on peut savoir ce qui constitue la somme d’argent consacré aux services professionnels et spéciaux? Il me semble que ce pourrait être un domaine. Le ministère retenait les services d’entreprises qui embauchaient des travailleurs de la santé, qui se rendaient ensuite là où les demandeurs d’asile sont logés temporairement. Comment pouvons-nous connaître le contenu de cette liste de services professionnels et spéciaux? Ils doivent être répartis entre différents ministères, ou différents ministères doivent les inclure dans leur budget. Est-ce exact?

M. Giroux : Tout à fait. Oui, c’est exact. Chaque ministère doit identifier ses dépenses, ou presque chaque facture — pour ainsi dire — doit entrer dans une catégorie particulière. S’agit-il de fournitures de bureau? Est-ce destiné à l’acquisition d’immobilisations? S’agit-il de frais de consultation, de services de consultation et de services spéciaux? Elles sont comptabilisées dans leur ensemble. La somme est fondée là-dessus ainsi que sur les projections.

Celles-ci suivent le même chemin. Les ministères doivent dire au Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada, par exemple, qu’on aura besoin de 100 000 $ pour des contrats avec telle société ou telle entreprise. La totalité de ces fonds, selon la façon dont ils sont affectés… on marque ou identifie ceux qui relèvent des services de consultation et des services spéciaux. C’est ainsi que nous obtenons le total de 19,8 milliards de dollars demandé jusqu’à présent cette année pour ces services.

Nous n’effectuons pas une analyse ligne par ligne pour chaque ministère afin de déterminer le contenu exact de cette liste.

La sénatrice Kingston : Ces services sont probablement très coûteux, voilà ce que j’essaie de dire.

M. Giroux : Oui.

La sénatrice Kingston : Parce que je sais que les services d’infirmières d’agence, à l’échelon provincial, coûtent très cher.

La sénatrice Ross : Monsieur Giroux et madame Vanderwees, je vous remercie de comparaître.

Je m’intéresse à vos observations au sujet du fait que ce budget ne contient que 1,6 milliard de dollars liés aux mesures du budget de 2024, comparativement à 7,2 milliards de dollars qui étaient liés aux mesures du budget de 2023 à ce stade-ci l’an dernier. Il ne faut pas oublier qu’une grande partie des fonds prévus dans cette autorisation sont liés non pas à des mesures budgétaires, mais à d’autres choses, comme le règlement de revendications et ainsi de suite.

M. Giroux : Eh bien, c’est un peu surprenant. Mme Vanderwees et moi-même en avons discuté avant la séance. Elle aura peut-être quelque chose à ajouter. C’est un peu surprenant.

C’est aussi dû au fait que le budget a été présenté en retard et qu’un tel retard ne permet pas aux ministères de préparer les documents requis pour être inclus dans le Budget supplémentaire des dépenses. Ils doivent souvent faire une présentation au Conseil du Trésor.

Lorsque vous découvrez le 16 avril que vous avez de l’argent dans le budget, cela vous laisse peu de temps pour préparer une présentation au Conseil du Trésor qui débloquerait le financement.

Il y a la question de l’œuf et de la poule qui se pose puisque le fait que le budget soit en retard ne permet pas aux ministères de préparer les documents nécessaires parce que, très souvent, les ministères apprennent, la veille du budget ou le jour même, combien d’argent, le cas échéant, leur est attribué pour des initiatives précises.

Kaitlyn Vanderwees, analyste, Bureau du directeur parlementaire du budget : Oui. Je peux mentionner que, comparativement au budget de 2022, les dépenses sont un peu plus élevées. Dans le Budget supplémentaire des dépenses (A) de 2022, il y avait environ 1,02 milliard de dollars. L’année dernière a peut-être été une exception dans la mise en œuvre.

Comme M. Giroux l’a mentionné, c’est probablement en raison du moment où le budget a été déposé.

La sénatrice Ross : Vous pensez qu’on rattrapera le retard la prochaine fois?

Mme Vanderwees : Il est possible que le Budget supplémentaire des dépenses indique le nombre de mesures supplémentaires qui ont été financées. Il faudra voir les années précédentes. Je n’ai pas de prédiction quant à ce qui se passera après 2024.

La sénatrice Ross : Merci.

La sénatrice Pate : Monsieur Giroux et madame Vanderwees, je vous remercie de votre présence et de tout votre travail.

Votre rapport sur le Budget supplémentaire des dépenses (A) énonce que près des deux tiers des dépenses proposées — quelque 7,8 milliards de dollars ou 61,8 % — relèvent du portefeuille des Autochtones, ce qui représente une augmentation de 175 % par rapport aux dépenses budgétaires combinées de 2017-2018.

La majorité des dépenses proposées se rapportent aux règlements et aux revendications autochtones, qui s’élèvent à plus de 5 milliards de dollars et comprennent 1,8 milliard de dollars pour la stratégie de règlement accéléré des revendications relatives aux avantages agricoles, 1,5 milliard de dollars pour les externats indiens fédéraux et le règlement relatif aux anciens élèves externes des pensionnats indiens, 1 milliard de dollars pour le fonds de règlement des revendications particulières et 448 millions de dollars pour le règlement de revendications historiques. Ces règlements témoignent de la reconnaissance du défaut du gouvernement d’avoir rempli son devoir et des torts qui ont été causés aux peuples autochtones.

J’ai deux questions à poser. Les dépenses pour les règlements et les revendications autochtones représentent plus de trois fois le montant total des dépenses proactives prévues liées à la mise en œuvre du budget de 2024, qui était de 1,6 milliard de dollars.

Ce budget contenait peu d’engagements à l’égard de la mise en œuvre des appels à la justice de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées. La grande majorité de ces appels, bien sûr, n’ont toujours pas été mis en œuvre cinq ans plus tard.

La répartition des dépenses dans le Budget supplémentaire des dépenses vous préoccupe-t-elle en ce qui concerne la solidité financière de la façon dont le gouvernement aborde et, trop souvent, ne respecte pas les obligations des peuples autochtones?

Considéreriez-vous qu’il est plus rentable et plus avantageux à long terme pour le gouvernement d’investir proactivement afin de s’attaquer aux causes profondes des inégalités auxquelles font face les communautés autochtones; par exemple, au moyen du revenu de subsistance garanti recommandé et de tant d’autres recommandations de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées?

M. Giroux : C’est une question intéressante. Je ne me suis pas demandé s’il était approprié ou non que ce mélange de dépenses se retrouve dans le Budget supplémentaire des dépenses en ce qui concerne le règlement des revendications par rapport aux programmes, parce qu’il faudrait examiner l’ensemble des affectations entre ces deux grandes catégories de dépenses. Il faudrait examiner non seulement le Budget supplémentaire des dépenses, mais aussi le Budget principal des dépenses.

Le fait que nous dépensions pas mal d’argent pour le règlement des revendications découle probablement du fait que celles-ci ont été laissées en suspens pendant des décennies, et parfois davantage.

Concernant votre deuxième point, je pense qu’il est généralement reconnu qu’il vaut beaucoup mieux prévenir que guérir. Ce principe s’applique probablement aussi aux Premières Nations en général, surtout en ce qui a trait aux services.

J’ai formulé un commentaire selon lequel les sommes mises de côté par le gouvernement l’an dernier ou l’année précédente pour les Services à l’enfance et à la famille des Premières Nations, lesquels ont fait l’objet d’une poursuite judiciaire, étaient très importantes, alors qu’en rétrospective, les mesures de réparation n’auraient pas coûté très cher pour permettre aux enfants placés sous garde de bénéficier de services de garde appropriés plutôt que de régler une revendication coûteuse des années après le fait. C’est un exemple qui me vient à l’esprit à l’appui de votre affirmation selon laquelle il est plus facile ou préférable de prévenir plutôt que d’essayer de réparer les torts causés.

La sénatrice Pate : Merci.

Le président : Merci, sénatrice Pate.

Nous aurons le temps pour une deuxième série de questions de trois minutes chacune.

La sénatrice Marshall : Merci. Je voulais revenir sur la question soulevée par le sénateur Dalphond. La mienne porte sur la provision pour les passifs éventuels, car elle comprend parfois des revendications liées aux Autochtones.

Je me demandais, monsieur Giroux… et nous en avons déjà parlé… j’avais l’impression que vous alliez travailler sur cette provision.

Le budget compte deux pages. Il contient une liste de plusieurs règlements et ententes. La plupart sont de l’ordre de milliards de dollars. Parfois, ils sont financés par l’intermédiaire de la provision pour les passifs éventuels. J’ai toujours eu de la difficulté à suivre les règlements, alors je me demandais si vous alliez encore faire du travail ou si vous aviez commencé à en faire?

M. Giroux : C’est quelque chose qui figure toujours dans notre plan de travail et qui exigerait beaucoup de travail et de ressources. Cela en vaut probablement la peine pour la simple et bonne raison que les montants en jeu sont très élevés.

Il y a probablement des milliers de revendications contre la Couronne, non seulement des Autochtones, mais de toutes sortes. Il serait très difficile, mais aussi intéressant, de faire le lien entre la somme mise de côté pour une revendication particulière et le montant que le gouvernement finit par payer. Des années sépareraient probablement ces deux éléments dans bien des cas, alors c’est quelque chose qui nécessiterait beaucoup de travail, mais qui figure toujours sur ma liste de choses à faire.

La sénatrice Marshall : J’ai essayé de le faire dans mon bureau, mais comme vous le dites, c’est très compliqué.

Pour revenir à une question qui vous a été posée au sujet de la lenteur du gouvernement à présenter les nouvelles initiatives budgétaires, pensez-vous que cette lenteur pourrait être en partie attribuable au fait que le gouvernement n’a pas déterminé ce qu’il allait faire des gains en capital? Il compte sur cet argent pour combler un certain déficit budgétaire.

Pensez-vous qu’il tarde à mettre en œuvre certaines de ces nouvelles initiatives parce qu’il ne voulait pas qu’elles aient d’incidence négative sur son déficit, au cas où les recettes ne se réaliseraient pas?

M. Giroux : C’est une possibilité. Le fait que la loi régissant les gains en capital n’ait pas été incluse dans la loi d’exécution du budget tend à confirmer cette interprétation.

Cependant, je n’en suis pas certain parce qu’on ne m’a pas communiqué les secrets entourant l’établissement du budget. Mais c’est une hypothèse très plausible.

[Français]

Le sénateur Forest : Dans votre rapport, vous mentionnez ne pas avoir reçu les informations nécessaires pour être en mesure de déterminer le montant exact de la réduction des dépenses prévues pour les services professionnels et les services spéciaux. Lorsque vous demandez des informations au Conseil du Trésor ou au ministère, y a-t-il un délai avant de recevoir une réponse? Comment cela fonctionne-t-il? Comment peut-on vous appuyer en tant que législateurs? Je pense que c’est un prérequis important d’avoir les bonnes informations pour faire les analyses les plus objectives et précises possibles.

M. Giroux : Je suis d’accord pour dire que l’information est essentielle à notre travail. En général, lorsqu’on identifie le besoin d’avoir accès à des renseignements, une lettre est envoyée de ma part au ministre concerné ou à la ministre concernée, avec une copie au sous-ministre, et on leur accorde généralement deux semaines pour nous transmettre les renseignements. Parfois, c’est possible d’obtenir les renseignements et dans d’autres cas, les ministères ont besoin de plus de temps.

En général, avant d’envoyer une lettre, on discute avec les fonctionnaires des ministères concernés pour voir si l’information existe et si on doit raffiner notre demande pour bien obtenir ce dont on a besoin. Il y a normalement du travail qui se fait en amont pour s’assurer qu’on demande la bonne chose et que ces choses existent.

Les questions les plus délicates ayant trait à l’accès aux renseignements concernent les renseignements fiscaux. La question des données fiscales est toujours plus délicate, parce que l’Agence du revenu garde jalousement la confidentialité — et avec raison — des données fiscales des contribuables; cela inclut les sociétés, les fiducies et les individus. Ils ont très peur de ce qu’on appelle la « divulgation résiduelle ». Donc, ils craignent qu’on puisse par inadvertance, en nous donnant accès à des données qui sont anonymisées, mais pas agrégées à un niveau suffisant, deviner de quelle société, de quelle fiducie ou de quel contribuable on parle. Donc, une modification à la section 241 de la Loi d’impôt sur le revenu nous permettant d’avoir accès à ces informations faciliterait notre travail en matière de renseignements fiscaux.

Le sénateur Forest : Je suis interpellé par quelque chose — et je suis convaincu que mes collègues le sont également. Y aurait-il moyen que votre bureau fasse un résumé très vulgarisé? Quand on examine les dépenses budgétaires, il y a les crédits votés, les dépenses législatives et les dépenses non budgétaires. Donc, lorsqu’un citoyen ordinaire regarde tout cela, c’est très compliqué pour lui de se faire une idée — on parle de chiffres vraiment importants.

Est-ce qu’il y aurait moyen d’avoir sur votre site Web une explication très vulgarisée de ce qui compose le budget fédéral?

M. Giroux : C’est certainement possible. L’accès aux renseignements ou à l’information, en langage clair, c’est quelque chose qu’on essaie de faire, mais c’est difficile d’atteindre cette cible tout en restant précis et rigoureux. C’est une bonne suggestion; on va tenter de vulgariser sans être vulgaire. Merci pour la suggestion.

Le sénateur Forest : Vous avez toute notre confiance.

Le sénateur Gignac : Ce soir, on analyse 11 nouvelles initiatives, c’est-à-dire que le budget supplémentaire contient 1,6 milliard de dollars pour 11 nouvelles initiatives; le reste, ce sont des choses qui existaient déjà, comme le programme pour les Autochtones.

Vous mentionnez dans votre rapport que, dans le budget de 2024, il y a eu 241 nouvelles initiatives budgétaires; c’est considérable. J’ai trouvé très intéressante votre petite note à la fin qui mentionnait que cela ne comprenait même pas les mesures hors cycle. Les mesures hors cycle, c’est ce qui est annoncé entre deux budgets ou des mises à jour. Il y a une phrase qui m’inquiète, parce que c’est ce que vous mentionnez en annexe, et je cite :

À l’heure actuelle, il n’y a aucune façon de suivre le financement présenté par l’entremise du budget des dépenses pour des mesures hors cycle incluses dans le budget.

Pouvez-vous nous éclairer à ce sujet? Avez-vous des recommandations à nous faire sur le plan de la gouvernance?

M. Giroux : Oui, je peux certainement vous éclairer là‑dessus. Les mesures hors cycle sont identifiées dans les documents budgétaires par une ligne en général. C’est une disposition pour les mesures qui n’ont pas encore été annoncées, mais pour lesquelles les fonctionnaires du ministère des Finances et la ministre des Finances prévoient octroyer des fonds et prévoient que le gouvernement devra débourser de l’argent.

Il est difficile, une fois que les annonces sont faites, de réconcilier combien avait été mis de côté parce qu’évidemment, on parle d’un ensemble de dépenses dont le détail demeure confidentiel, parce que cela n’a pas encore été annoncé et parce que, dans certains cas, cela n’a pas été approuvé par le Cabinet. Il est difficile d’avoir les renseignements sur les sources de fonds et de savoir ce qui est inclus dans tout cela, puis, quand les mesures sont annoncées, de savoir si elles étaient incluses dans cette ligne confidentielle. Il est très difficile pour nous d’avoir ces détails en raison de la confidentialité des délibérations du Cabinet.

Par contre, je dois dire que c’est mieux maintenant qu’auparavant. Par exemple, dans des cycles précédents, je devais être prudent dans certaines prévisions de dépenses pour permettre de financer ces mesures hors cycle sans que cela affecte négativement le déficit ou le surplus.

En matière de gouvernance, c’est difficile de faire des recommandations spécifiques, car c’est difficile de garder le secret des délibérations du Cabinet tout en faisant une bonne réconciliation. Il y a beaucoup de contraintes et je n’ai pas de réponse facile à cette équation.

Le sénateur Gignac : C’est opaque, mais peut-être moins qu’avant; est-ce bien le cas?

M. Giroux : Vous avez une capacité de résumer ma pensée qui me stupéfie; c’est exactement cela.

Le sénateur Gignac : Merci, vous me rendez heureux.

Le président : J’imagine que quand vous disiez « avant », vous parliez de l’année dernière, et non de la dernière décennie.

[Traduction]

Le sénateur Smith : Je voudrais donner suite à la question de la sénatrice Marshall et revenir sur la lenteur de la mise en œuvre des postes budgétaires.

J’aimerais que vous nous disiez ce que vous pensez de la taille des budgets fédéraux au fil du temps. Par exemple, je me demande comment les quelque 200 postes budgétaires prévus dans le budget de 2024 qui nécessiteront un financement cette année se comparent à ceux inclus dans le Budget supplémentaire des dépenses précédent? Vous êtes-vous penché là-dessus? Les budgets sont-ils de plus en plus importants et complexes? Notre fonction publique peut-elle suivre le rythme?

M. Giroux : Me demandez-vous si notre fonction publique peut s’adapter à la taille du budget? Est-ce bien votre question?

Le sénateur Smith : Oui. Peut-elle livrer la marchandise de façon proactive afin de ne pas toujours reporter les choses à 2030 et 2035 dans le cas de certains de ses plans? Il semble y avoir un ralentissement, une forme de malaise. Je n’essaie pas d’être combatif. Je tente simplement de comprendre, directionnellement, où va la fonction publique, surtout en ce qui concerne les finances, avec la gestion des budgets.

M. Giroux : La fonction publique a la capacité de livrer la marchandise à la condition que la directive vienne d’en haut. J’ai observé ce phénomène dans la fonction publique — mais aussi depuis que j’occupe ce poste — chaque fois qu’il y a des directives fermes ou une orientation claire de la part de la haute direction, les fonctionnaires peuvent livrer la marchandise et le font parce qu’ils ont été formés à cette fin. C’est la raison pour laquelle ils entrent dans la fonction publique. Toutefois, lorsqu’il n’y a pas de gros incitatif ou de pression pour qu’ils livrent la marchandise, c’est là que les choses commencent à prendre un peu plus de temps.

En ce qui concerne la taille du budget, j’en ai vu qui comportaient près de 600 postes budgétaires, alors un budget qui comprend 240 initiatives ou postes de dépenses n’a rien d’extraordinaire.

La taille du budget et le nombre de propositions ou de mesures fluctuent… il est plus élevé certaines années, parfois moins. Tout dépend des décisions politiques qui sont prises et de la volonté du gouvernement de prévoir de nombreuses initiatives moins ciblées, plusieurs petites initiatives ciblées ou quelques postes principaux plus importants.

Je n’ai pas remarqué de forte tendance à prévoir un plus grand nombre d’initiatives ou un moins grand nombre. Il n’y a pas de tendance ni de chiffre magique; voilà ce que j’essaie de dire.

Le sénateur Smith : Merci.

[Français]

Le sénateur Dalphond : Monsieur Giroux, dans votre rapport, vous faites référence à 1,9 milliard de dollars de plus pour la dette. Avez-vous parlé d’évaluations des taux d’intérêt qui étaient incorrectes?

Les taux d’intérêt n’ont pas augmenté au cours des trois derniers mois; ils ont même baissé récemment.

Cela veut-il dire que, dans le Budget principal des dépenses, on avait estimé que la baisse se ferait plus vite que celle qui a été annoncée par la Banque du Canada?

M. Giroux : Le fait que le gouvernement demande 1,9 milliard de dollars de plus pour les frais de la dette aussi rapidement après le budget suggère en effet qu’il y a eu une baisse moins rapide que celle qu’avaient anticipée les fonctionnaires du ministère des Finances lorsqu’ils ont contribué au Budget principal des dépenses en février. Je suis d’accord avec votre évaluation.

Le sénateur Dalphond : Une boule de cristal ne peut pas prévoir deux mois d’avance.

M. Giroux : C’est difficile de prévoir, surtout quand on a un stock aussi important de dettes; lorsqu’on parle de 1 500 milliards de dollars de dette, une petite différence de 0,1 % sur les taux d’intérêt des bons du Trésor, cela signifie des centaines de millions de dollars en intérêt supplémentaire ou en moins, mais en plus dans ce cas-ci.

Le sénateur Dalphond : Est-ce que ce serait une indication qu’on a fait une évaluation des dépenses plus optimiste pour arriver à certains chiffres?

M. Giroux : Cela pourrait être le cas, mais je ne voudrais pas être celui qui prête de mauvaises intentions à qui que ce soit au ministère des Finances dans l’établissement de leurs prévisions de dépenses.

Le sénateur Dalphond : Étrangement, vous parlez aussi de toutes ces dépenses qui augmentent, mais il y en a une qui diminue, soit les 533 millions de dollars pour les bénéfices pour les personnes âgées. Il me semble pourtant que la démographie montre que le nombre de personnes âgées ne diminue pas, mais augmente. Est-ce en raison d’une difficulté d’accès aux services?

M. Giroux : Je ne sais pas si c’est une difficulté à se qualifier, parce qu’Emploi et Développement social Canada (EDSC) a fait beaucoup de bon travail au cours des dernières années en versant automatiquement les prestations aux gens qui se qualifient. C’est peut-être une prévision, ou alors des gens retardent leur demande de pension de la Sécurité de la vieillesse (SV) pour bénéficier de la bonification actuarielle. Quand les gens la demandent un peu plus tard, ils ont droit à une bonification. Ce pourrait être une explication, avec la littératie financière qui s’améliore et de plus en plus de conseillers financiers qui suggèrent de retarder le moment où les gens reçoivent la prestation. Cela pourrait aussi être lié au taux d’activité qui s’accroît modestement, mais qui s’accroît un peu pour les gens âgés de 65 ans et plus. Ce sont des possibilités, mais on n’a pas fait d’analyse approfondie.

Le sénateur Dalphond : Et si c’est le premier scénario, soit des gens qui reportent la demande, est-ce que cela signifie qu’on est en train de faire une espèce de ballon qui apparaîtra dans deux, trois ou quatre ans?

M. Giroux : C’est possible, mais peu probable, parce que si c’est une tendance, il serait peu probable que ce soit un événement isolé à une cohorte de gens qui ont atteint l’âge de 65 ans cette année. Cela risque d’être quelque chose qui va se répéter d’une année à l’autre. Mais c’est possible aussi que ce soit juste à cause des prévisions actuelles dans le Budget supplémentaire des dépenses et que ce soit renversé dans le Budget supplémentaire des dépenses (B) ou (C), par exemple.

Le sénateur Dalphond : Merci.

Le président : Cela pourrait-il être un effet de surmortalité à cause de la COVID?

M. Giroux : C’est possible, mais dans ce cas, ce serait apparu plus tôt; on aurait eu la même chose.

Le président : On aurait eu l’information avant.

M. Giroux : Oui.

Le président : Je comprends. Merci.

[Traduction]

Le sénateur Loffreda : Monsieur Giroux, j’allais continuer à parler des prestations aux aînés. Je me posais des questions sur le même sujet, la diminution. Avez-vous confiance en la viabilité de la Sécurité de la vieillesse? Votre bureau a-t-il fait du travail à cet égard au cours des derniers mois? Sommes-nous prêts pour l’afflux de pensionnés et de retraités?

Pour poursuivre dans la même veine, je vais citer directement votre rapport sur le budget, votre rapport sur le Budget supplémentaire des dépenses :

En incluant le présent Budget supplémentaire des dépenses, les autorisations budgétaires proposées depuis le début de l’exercice s’élèvent au total à 461,8 milliards de dollars, ce qui représente une baisse de 30,7 milliards de dollars (ou 6,2 pour cent) comparativement au Budget des dépenses établi au même moment lors de l’exercice précédent.

Là aussi, c’est le retard du budget. Je suis d’accord avec votre observation selon laquelle il y a eu de plus gros budgets. Ce projet de loi d’exécution du budget, qui compte 686 pages, est le troisième en importance depuis 2003. Je ne pense pas que le problème tienne au fait que les budgets deviennent de plus en plus gros. Je suppose qu’il s’agit d’un retard. Pourriez-vous formuler un commentaire à ce sujet?

Enfin, j’ai examiné le Budget supplémentaire des dépenses et les dépenses du ministère des Finances. En 2022-2023, elles s’élevaient à environ 117 milliards de dollars. Ce montant est passé à 136 milliards de dollars l’année suivante, et, jusqu’ici, les autorisations proposées s’établissent à 145 milliards de dollars. Si je comprends bien, c’est attribuable au coût du service de la dette publique.

Dans votre rapport, vous dites qu’après 2024-2025, cela va se stabiliser, ce qui ralentira la croissance des frais de la dette publique. Vous prévoyez que les frais de la dette publique atteindront 62 milliards de dollars en 2028-2029. Vos prévisions relatives aux frais de la dette ont-elles changé depuis le dépôt du budget en avril, compte tenu de ces autorisations de dépenses supplémentaires et de ce Budget supplémentaire des dépenses?

C’est une question à trois volets, mais par souci de concision, j’ai tout mis ensemble.

M. Giroux : Merci, sénateur. J’ai pris de bonnes notes, alors j’espère pouvoir répondre aux trois volets de votre question.

En ce qui concerne la viabilité de la Sécurité de la vieillesse, nous examinons la viabilité financière globale du gouvernement fédéral et des gouvernements provinciaux, et nous le faisons chaque année. La dernière fois, c’était en juillet 2023. Nous procédons actuellement à une mise à jour à cet égard.

La Sécurité de la vieillesse est un élément important des dépenses du gouvernement fédéral. La dernière fois, nous avons constaté que le gouvernement fédéral était viable malgré le fait qu’on prévoit un vieillissement de la population qui entraînera des dépenses supplémentaires au titre de la Sécurité de la vieillesse. Dans l’ensemble, le gouvernement fédéral est viable, y compris pour ce qui est des paiements de la Sécurité de la vieillesse.

Quant à la diminution de 30,7 milliards de dollars par rapport au même moment de l’exercice précédent, c’est simplement une conséquence de… Nous avons effectué une comparaison avec les autorisations de l’an dernier, les autorisations totales, et à ce jour, elles ont diminué de 30,7 milliards de dollars, mais nous savons qu’il y aura un Budget supplémentaire des dépenses (B), et fort probablement un Budget supplémentaire des dépenses (C).

Somme toute, lorsque nous aurons le total pour le présent exercice, nous prévoyons que, en fin du compte, une fois tous les budgets des dépenses déposés, les dépenses du gouvernement auront augmenté par rapport à l’exercice précédent.

Pour ce qui est de votre question concernant le budget des dépenses du ministère des Finances, cela est en grande partie attribuable à l’augmentation des coûts du service de la dette. C’est aussi lié au fait que les transferts aux provinces augmentent en fonction de la croissance du produit intérieur brut, pour simplifier les choses. C’est une combinaison de l’augmentation des coûts du service de la dette et des transferts aux provinces.

Enfin, est-ce que nos prévisions relatives aux coûts du service de la dette ont changé depuis le budget? Nous n’avons pas encore fait la mise à jour de nos perspectives économiques et financières. Nous le faisons habituellement deux fois par année, soit au printemps, avant le budget, puis à l’automne, avant l’Énoncé économique de l’automne. Lorsque nous préparerons nos perspectives économiques et financières de l’automne, nous ferons une mise à jour des coûts du service de la dette pour l’exercice, s’ils sont à la hausse.

La sénatrice MacAdam : Je reviens aux véhicules zéro émission. Vous avez dit tout à l’heure que vous n’aviez pas de ventilation par province des immatriculations de véhicules, puis vous avez mentionné les incitatifs provinciaux et le fait que la Colombie-Britannique et le Québec ont une longueur d’avance sur la plupart des provinces. Savez-vous si toutes les provinces offrent des incitatifs pour compléter les mesures du gouvernement fédéral concernant les véhicules zéro émission?

M. Giroux : Je ne connais pas toutes les particularités des programmes provinciaux, mais je sais que certaines provinces n’offrent pas d’incitatifs. Si ma mémoire est bonne, l’Alberta et la Saskatchewan n’en offrent pas, et peut-être l’Ontario, mais je n’en suis pas certain.

Je sais que le Québec et la Colombie-Britannique ont assurément quelque chose, mais pour ce qui est des autres provinces, je n’en suis pas certain.

La sénatrice MacAdam : D’accord. Merci.

M. Giroux : Peut-être que Mme Vanderwees, qui est dans la salle, le sait.

Mme Vanderwees : L’Ontario en offrait un, mais je crois qu’elle l’a éliminé récemment.

La sénatrice MacAdam : Merci.

La sénatrice Kingston : Dans votre document, il est question d’une augmentation d’environ 175 % en ce qui concerne Services aux Autochtones Canada, bien que vous ayez déjà dit qu’une grande partie de cela se rapporte aux relations entre la Couronne et les Autochtones. Avez-vous une idée de ce que cette augmentation de 175 % représente comme augmentation du budget de Services aux Autochtones Canada?

M. Giroux : Je sais que Services aux Autochtones Canada a été créé en 2017 et qu’au cours de sa première année, son budget était relativement modeste parce qu’il s’agissait d’une année partielle. En 2018-2019, son budget était de 11,6 milliards de dollars, et il a augmenté au point d’atteindre les 23,2 milliards de dollars prévus cette année. Il a plus que doublé de 2018-2019 à 2024-2025. Même en tenant compte de la croissance démographique, il s’agit d’une importante augmentation par habitant.

La sénatrice Kingston : Le document que vous avez fourni ce soir comporte un tableau où il est question d’un montant de 239 millions de dollars dans le Budget supplémentaire des dépenses (A), et dans votre description, dans votre autre document, vous mentionnez que c’est pour les enfants et pour améliorer l’accès à des choses comme un logement adéquat.

Avez-vous une idée des améliorations qui ont été apportées pour les enfants et leurs parents en ce qui concerne le logement ou est-ce quelque chose qui est en quelque sorte dissimulé dans ces dépenses?

M. Giroux : C’est quelque chose de plus détaillé que ce qui est mentionné dans ce rapport. Mme Vanderwees a peut-être de plus amples renseignements, mais je ne dispose certainement pas d’informations détaillées de ce genre.

La sénatrice Kingston : D’accord. Merci.

La sénatrice Marshall : Une brève question. Monsieur Giroux, au sujet de la dette, le gouvernement établit annuellement des prévisions quinquennales quant aux sommes qu’il va emprunter chaque année. Ensuite, si on fait le suivi, lorsqu’on passe du document budgétaire à la mise à jour financière puis au document budgétaire suivant, les chiffres augmentent considérablement. Vous êtes-vous déjà penché là‑dessus?

M. Giroux : Il y a quelques années, nous avons élaboré la Stratégie de gestion de la dette, si je ne m’abuse, mais c’était peut-être pendant la pandémie ou même avant. En un mot, la réponse est non, pas récemment.

La sénatrice Marshall : Mme Vanderwees pourrait peut-être me dire en quelle année c’était, et je pourrais revenir en arrière. Cela pourrait nous éclairer, car certaines de ces choses sont… Il y a une constante d’une année à l’autre.

M. Giroux : Oui. Le ministère des Finances publie un bon document sur la Stratégie de gestion de la dette, très souvent comme document d’accompagnement du budget ou même comme chapitre du budget. Pour ceux que cela intéresse, une séance d’information des fonctionnaires du ministère des Finances est quelque chose qui en vaut la peine. J’ai moi-même assisté à une telle séance lorsque j’étais au Bureau du Conseil privé, et c’est beaucoup plus intéressant que de simplement lire le document sur la Stratégie de gestion de la dette. Mais peut-être suis-je bizarre et que cela n’intéresse personne d’autre que moi.

[Français]

Le président : Merci beaucoup, monsieur Giroux. C’est toujours un plaisir de vous entendre. Vous êtes toujours aussi informatif et vous vulgarisez bien les choses pour les gens. C’est très apprécié. Merci aussi à Mme Vanderwees de vous avoir accompagné.

[Traduction]

Nous allons procéder à l’étude article par article du projet de loi C-59.

Est-il convenu de procéder à l’étude article par article du projet de loi C-59, Loi portant exécution de certaines dispositions de l’énoncé économique de l’automne déposé au Parlement le 21 novembre 2023 et de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 28 mars 2023?

Des voix : D’accord.

Le président : C’est la première fois que j’occupe le fauteuil et que je vote.

L’étude du titre est-elle reportée?

Des voix : D’accord.

Le président : L’étude de l’article 1, qui contient le titre abrégé, est-elle reportée?

Des voix : D’accord.

[Français]

Le président : Avec votre consentement, est-il convenu que le comité puisse regrouper les articles selon les cinq parties identifiées dans la table analytique du projet de loi C-59 lorsque cela est à propos?

Des voix : D’accord.

Le président : Adopté.

Nous en sommes à la partie 1, intitulée Modification de la Loi de l’impôt sur le revenu et de textes connexes, qui comprend les articles 2, à la page 1, à 95, à la page 248.

Est-ce que la partie 1, intitulée Modification de la Loi de l’impôt sur le revenu et de textes connexes, qui comprend les articles 2 à 95, est adoptée?

Des voix : D’accord.

Des voix : Avec dissidence.

Le président : Adoptée avec dissidence.

[Traduction]

Le président : Est-ce que la partie 2, intitulée Loi sur la taxe sur les services numériques, qui comprend les articles 96 à 128, est adoptée?

La sénatrice Marshall : Avec dissidence.

Le président : Partie 2, avec dissidence. Parfait.

[Français]

Nous sommes à la partie 3, intitulée Modification de la Loi sur la taxe d’accise et de textes connexes, qui comprend les articles 129, à la page 371, à 144, à la page 384.

Est-ce que la partie 3, intitulée Modification de la Loi sur la taxe d’accise et de textes connexes, qui comprend les articles 129 à 144, est adoptée?

Des voix : D’accord.

Des voix : Avec dissidence.

Le président : Adoptée avec dissidence.

Nous en sommes maintenant à la partie 4, intitulée Modification de la Loi de 2001 sur l’accise et de textes connexes, qui comprend les articles 145, à la page 385, à 167, à la page 395.

Est-ce que la partie 4, intitulée Modification de la Loi de 2001 sur l’accise et de textes connexes, qui comprend les articles 145 à 167, est adoptée?

Des voix : D’accord.

Des voix : Avec dissidence.

Le président : Adoptée avec dissidence.

[Traduction]

Partie 5, « Mesures diverses », articles 168 à 365.

Je pense que nous avons un amendement. Sénatrice Ross, pouvez-vous commencer?

La sénatrice Ross : Certainement. Il s’agit de l’amendement numéro KR-C59-236-429-20.

Je propose :

Que le projet de loi C-59 soit modifié à l’article 236, à la page 429, par substitution, aux lignes 29 et 30, de ce qui suit :

« suffisants et appropriés, dont la ».

Le président : Pouvez-vous expliquer votre amendement?

La sénatrice Ross : Bien sûr.

Je propose cet amendement parce que je pense que le projet de loi doit être très clair et très direct. Je ne suis pas contre l’article. Je pense que c’est un bon article, mais je ne crois pas que nous puissions laisser dans le projet de loi des termes dont nous ne connaissons pas la signification. Nous devons éliminer l’ambiguïté et l’incertitude.

Il n’y a pas de définition claire de l’expression « méthode reconnue à l’échelle internationale », et lors de l’unique réunion du comité sur ces amendements, les représentants du gouvernement et les intervenants ont dit qu’ils ne savaient pas ce que cela signifiait. L’article ne faisait pas partie du projet de loi original du gouvernement ni, je présume, de ses intentions.

En fait, ces amendements ont été ajoutés lors de l’étude article par article du comité homologue de l’autre endroit, de sorte qu’il n’y a pas eu de consultation ni d’examen sur la façon dont cette expression serait appliquée. Voilà donc la raison principale de ma motion.

Je dirais que nous avons tous reçu un grand nombre de documents, de lettres et de mémoires sur cette question. Même le commissaire à la concurrence a déclaré, pendant une réunion d’un comité à l’autre endroit : « Je dirais que la Loi sur la concurrence n’est probablement pas le bon véhicule pour ce genre de réglementation ou législation. »

Cela m’inquiète beaucoup, et je pense que…

Le sénateur Smith : Pourriez-vous nous donner quelques renseignements d’ordre général sur la notion d’écoblanchiment?

La sénatrice Ross : Certainement. Cela se rapporte au volet du projet de loi concernant l’écoblanchiment. Essentiellement, le libellé actuel est le suivant : « […] si les indications ne se fondent pas sur des éléments corroboratifs suffisants et appropriés obtenus au moyen d’une méthode reconnue à l’échelle internationale […] »

En gros, tous ceux qui ont témoigné ou pris la parole devant le comité, y compris les représentants du gouvernement, ont dit qu’il n’y avait pas de méthode précise reconnue à l’échelle internationale. C’est donc une grande préoccupation pour moi.

[Français]

La sénatrice Moncion : Je vais m’opposer à cet amendement. Lorsque l’amendement a été présenté au Comité des finances de la Chambre des communes, une proposition avait été faite, en vertu d’une entente entre les différents partis, justement pour combattre l’écoblanchiment. Cela a fait l’objet d’un consensus entre les partis et c’était aussi reconnu par plusieurs parties prenantes.

De plus, la disposition qui modifie la Loi sur la concurrence a été adoptée à l’unanimité à la Chambre des communes. Lorsque le projet de loi a été étudié en comité et débattu à la Chambre des communes, on a adopté les parties une à la fois. Les 12 mesures incluses à la partie 5 ont été adoptées, les unes après les autres, de façon indépendante. Celle qui touchait le Bureau de la concurrence, tel qu’elle a été amendée, a été adoptée à l’unanimité par tous les partis. Ces informations n’ont fait l’objet d’aucune controverse.

Les représentants du Bureau de la concurrence, lorsqu’ils ont témoigné, ont mis l’accent sur le renforcement des critères qui reconnaissent l’étendue de l’écoblanchiment et le problème qui y est associé. Le bureau avait cité l’exemple de Keurig. Vous connaissez peut-être bien ce cas. Keurig prétendait que ses contenants de café étaient recyclables; or, ils ne l’étaient pas et l’entreprise a dû payer une amende de 3 millions de dollars.

Le 31 mai dernier, le Bureau de la concurrence a fait parvenir une lettre au Comité des banques. Hier, un des témoins a fait référence à des propos émis par le Bureau de la concurrence selon lesquels le Bureau s’opposait à l’amendement présenté, qui parle justement des normes internationales. Aujourd’hui, le Bureau de la concurrence nous a fait parvenir une lettre. Je ne sais pas si vous avez eu le temps de la lire. Nous l’avons reçue avant 18 heures, donc je vais vous la lire. Elle est en anglais, mais c’est pour que vous puissiez avoir l’information du Bureau de la concurrence.

[Traduction]

Je m’appelle Anthony Durocher, et je suis sous-commissaire de la Direction générale de la promotion de la concurrence au Bureau de la concurrence. Nous avons noté avec inquiétude qu’hier, lors d’une discussion portant sur un amendement au sous-alinéa 74.01(1)b)(ii) de la Loi sur la concurrence, la Chambre de commerce a déclaré que votre comité devrait tenir compte du conseil du commissaire à la concurrence selon lequel cet amendement devait être complètement retiré. Le commissaire n’a rien dit de tel. Comme je l’ai souligné récemment dans une lettre adressée au Comité sénatorial permanent des banques, du commerce et de l’économie, l’avis du Bureau au sujet de cet amendement est le suivant :

Bien que nous ayons recommandé une étude plus approfondie, nous respectons la décision du Comité permanent des finances de la Chambre des communes d’apporter des modifications au paragraphe 236 sur cette question importante. Comme nous l’avons mentionné plus haut, il a pris cette décision après avoir entendu les différents intervenants. Les modifications ont finalement été adoptées à l’unanimité par la Chambre des communes en troisième lecture le 28 mai 2024.

Le Bureau reconnaît également l’importance de fournir une orientation au milieu des affaires à la suite de nouvelles modifications législatives. Par exemple, le Bureau a communiqué de nouvelles directives sur la fixation des salaires et les accords de non-débauchage à la suite des modifications apportées à la Loi sur la concurrence en 2022. La lettre envoyée au Comité des banques est jointe aux présentes.

Il convient également de souligner qu’on nous a aussi invités à nous en remettre à l’expertise et aux compétences du Bureau de la concurrence, qui nous a dit explicitement qu’il respecte la décision des représentants élus et qu’il considère la proposition qui est devant nous aujourd’hui comme une mise à niveau tant attendue et nécessaire de notre cadre de droit de la concurrence.

Ce qu’il dit, c’est que, de surcroît, les fonctionnaires d’Innovation, Sciences et Développement économique Canada, ou ISDE, ont longuement témoigné devant le comité au sujet du processus habituel qui suivra l’adoption du projet de loi sans amendement. Il dit que ce sont des éléments importants que fournit le Bureau de la concurrence, qui s’est engagé à examiner et à élaborer des lignes directrices pour intégrer les modifications proposées dans le projet de loi C-56 et le projet de loi C-59 après avoir consulté les parties prenantes.

La Loi sur la concurrence est un cadre raisonné et indépendant du marché. Les termes généraux de la loi sont d’abord précisés par le Bureau de la concurrence au moyen de lignes directrices élaborées avec les parties prenantes, puis par les tribunaux au moyen de la jurisprudence. Ce processus devrait s’appliquer aux modifications récentes.

Tout cela pour dire qu’il s’agit d’un premier pas. Lorsque des plaintes peuvent déclencher des enquêtes du Bureau de la concurrence, celui-ci doit déterminer si une requête auprès du tribunal est justifiée, et il doit le faire de façon pragmatique, en tenant compte de la nouveauté de la disposition.

En résumé, le Bureau de la concurrence dit qu’il va établir des lignes directrices en fonction des changements apportés par le ministère des Finances. Il discutera de ces lignes directrices avec les intervenants pour s’assurer qu’elles peuvent être bien mises en place, et qu’elles ne nuisent pas aux différents groupes ni n’exercent de pression excessive sur eux.

La sénatrice Marshall : J’aimerais simplement dire que j’appuie l’amendement, car nous avons reçu je ne sais combien de courriels, d’appels téléphoniques et de lettres soulevant des préoccupations particulières au sujet de l’expression en question. Je ne pense pas que le fait que le Bureau de la concurrence s’engage à fournir des lignes directrices apaisera les inquiétudes. Cette expression suscite de vives préoccupations, et c’est la seule chose que l’amendement change, cette expression en particulier.

Les gens qui m’ont transmis des commentaires et des courriels ne disent pas simplement : « Je n’aime pas cette expression ». Ces organisations ou ces gens fournissent d’assez longues explications quant aux raisons pour lesquelles cette partie de l’amendement les rend très mal à l’aise. Donc, oui, je pense qu’il y a là un problème pour les intervenants.

La sénatrice Kingston : Je tiens à souligner que nous avons reçu une lettre — elle a été envoyée au comité par courriel le 31 mai 2024 — de l’Association canadienne des médecins pour l’environnement, d’Ecojustice et d’autres organismes. La lettre cite des lignes directrices du Bureau de la concurrence, qui dit qu’il existe plusieurs méthodologies internationalement reconnues qui sont facilement accessibles aux entreprises qui sont prêtes à faire des déclarations environnementales. La lettre contient des références : le Conseil international des normes sur la durabilité et le rapport des Nations unies intitulé L’intégrité compte : Engagements en faveur du zéro émission nette des entreprises, des institutions financières, des villes et des régions.

Selon eux et selon le Bureau de la concurrence, apparemment, parce qu’ils ont tiré cela d’une lettre adressée au Comité permanent des finances de la Chambre des communes et au Comité sénatorial permanent des finances nationales le 1er mars 2024… dont je crois que la sénatrice Moncion a également parlé, et qui est tiré d’une partie d’une citation de cette lettre.

Le sénateur Tannas : Je remercie la sénatrice Moncion de son intervention, ainsi que la sénatrice Kingston. Je suis en faveur de l’amendement.

Tout d’abord, cela ne change rien à l’intention de l’amendement qui a été présenté. L’amendement traite simplement du fait que ces trois mots sont si nébuleux et dangereux qu’ils inquiètent de nombreuses industries et organisations de l’industrie, qui ont dû se mobiliser en raison de l’absence de consultation sur ce sujet en particulier dans un très bref délai. C’est un fait.

Nous recevons des lettres, des appels téléphoniques, des demandes urgentes de réunions, des appels de toutes sortes d’industries, d’autres organisations, de premiers ministres, etc., selon lesquels le Sénat doit faire son travail parce que la Chambre des communes n’a pas fait son travail… et le Bureau de la concurrence non plus; il ne tenait pas de consultations sur ce point particulier.

Nous pouvons respecter l’intention de la Chambre des communes. Nous pouvons renoncer complètement à notre rôle de législateurs et dire : « Cela sort de nulle part. Voilà votre intention. » Cependant, ces paroles obligent les tribunaux et le Bureau de la concurrence à trouver des normes internationales dans tous les cas.

Pourquoi devrions-nous — pourquoi n’importe qui, n’importe quel bon législateur au Canada — forcer les tribunaux à se prononcer sur une question pour laquelle il y a toutes sortes de preuves et de bon sens d’une façon ou d’une autre, mais « Oh, non, je dois trouver une norme internationale sur laquelle me prononcer »?

Nous ne devrions pas obliger le Bureau de la concurrence à faire cela. Il fait de l’excellent travail par lui-même. Il sera en mesure de bien faire les choses; j’en suis convaincu. Mais avec ces paroles, nous leur lions les mains. Selon Ecojustice et l’Association canadienne des médecins pour l’environnement, il pourrait être très avantageux que le Bureau de la concurrence et les tribunaux aient les mains liées par quelque norme internationale que nous devons appliquer. Il s’agira peut-être d’une norme de l’Arabie saoudite pour…

La sénatrice Moncion : Ils ont cité une lettre du Bureau de la concurrence.

Le sénateur Tannas : D’accord. Le fait est que le Bureau de la concurrence n’avait pas prévu cela. Même s’il s’est peut-être démené au cours des derniers jours, il n’avait pas prévu que cela se produirait, à moins qu’il n’y ait un complot selon lequel le Bloc québécois obéissait aux ordres du gouvernement en proposant cet amendement.

Nous avons un problème. Nous devrions le régler. Si nous ne pouvons pas régler le problème parce que nous avons peur de le faire, je pense que nous sommes au mauvais endroit. C’est généralement de notre ressort. Nous devrions faire notre travail.

Le sénateur Loffreda : Je remercie la sénatrice Ross d’avoir présenté l’amendement et je remercie les sénatrices Moncion et Kingston ainsi que le sénateur Tannas de leurs observations.

Je ne vais pas répéter ce que la sénatrice Moncion vient de dire, mais je suis d’accord avec elle pour dire que le Bureau de la concurrence est une source très crédible. Il ne s’agit pas d’une source non crédible. Il a parlé du respect de la décision. Il a mentionné qu’il avait consulté différents intervenants. Il a été adopté à l’unanimité à la Chambre des communes.

Je suis d’accord avec le fait que certains de ces groupes environnementaux acquièrent trop de pouvoir. Bon nombre d’entre eux sont financés par le gouvernement fédéral. Ils ne devraient pas diriger notre économie ni notre système judiciaire. J’en conviens. C’est la raison pour laquelle je suis d’accord avec le sénateur Dalphond au sujet du projet de loi C-59. C’est une observation ferme, énoncée clairement.

Je ne fais que dire ce que je pense. Je n’adopte pas l’observation.

D’après mon expérience, il existe des normes internationalement reconnues qui peuvent parfois être difficiles à trouver; cependant, sur le sujet, puisqu’on en discute — l’écoblanchiment ou je ne sais quoi d’autre —, il existe des normes claires reconnues à l’échelle internationale. Je crois que la sénatrice Kingston en a parlé.

Je n’appuie pas l’amendement. Je crois que nous devrions faire une observation ferme et aller de l’avant. Je suis d’accord avec certains éléments — à savoir que cela ne devrait pas se produire et que nous devrions faire notre travail —, mais je pense que nous faisons notre travail avec une observation ferme.

[Français]

Le sénateur Forest : Quand je regarde l’amendement, l’objectif est extrêmement louable, et c’est justement l’enjeu. Pour ce qui est des termes « suffisants et appropriés », ce qui est l’objet de l’amendement par rapport aux normes internationales, si je regarde la lettre que le Bureau de la concurrence a envoyée, on peut faire une observation : dans le fond, notre objectif, c’est que le Bureau de la concurrence définisse des normes précises pour que l’ensemble des compagnies et des gens qui sont interpellés, comme l’ensemble des gens qui doivent se défendre sur le plan de l’écoblanchiment, sachent quelles sont les balises. Avec le libellé actuel, je ne trouve pas que l’amendement apporte une plus-value. Cela mériterait plutôt que nous fassions une observation. Éventuellement, quand je regarde le libellé de l’observation que nous allons étudier plus tard, je crois que cela pourrait répondre à la question.

[Traduction]

La sénatrice Ross : Ce que je dirais en réponse aux commentaires de tout le monde, dont je vous suis très reconnaissante, c’est qu’en supprimant ces trois mots, l’objectif n’est pas de modifier l’intention de cette disposition. L’intention est bonne et elle est toujours là. Le fardeau de la preuve continuerait d’être inversé pour les entreprises. La seule chose qu’il éliminerait, c’est l’incertitude et le libellé non défini.

J’aimerais citer M. Chhabra, d’ISDE, qui a dit : « Comme je l’ai mentionné dans ma déclaration préliminaire, le terme “méthodologies internationalement reconnues” est non défini […] ».

Des fonctionnaires nous l’ont dit lors de nos réunions; cela ne vient pas seulement des lettres que nous avons reçues… même si, je le répète, nous en avons reçu beaucoup.

La sénatrice LaBoucane-Benson : Je remercie la sénatrice Ross d’avoir présenté cet amendement. C’est son premier amendement. Félicitations. Bon travail.

Je remercie la sénatrice Moncion et toutes les personnes qui sont intervenues.

Je ne vais pas ressasser les choses. Je veux parler de la façon dont l’amendement a été présenté à la Chambre des communes.

C’était un amendement proposé par un des partis de l’opposition. Le gouvernement a proposé le sous-amendement en disant qu’il allait trop loin et il l’a retiré. Il a été adopté par 316 voix contre 0. Je précise que les députés de l’Alberta et de la Saskatchewan sont compris dans ce nombre. La Chambre l’a divisé en sections, de sorte qu’elle a voté à l’unanimité sur ce groupe d’articles.

Sachant que les partis de l’autre endroit en sont venus à cette collaboration prudente — et, je dirais, à ce compromis —, je veux que ce groupe envisage la possibilité d’un retour en arrière et qu’il renonce à ce compromis.

Je pense qu’il vaut la peine d’y réfléchir, car tous les partis ont fait un compromis sur cet amendement. Nous devrions réfléchir à la possibilité de renoncer à ce compromis.

La sénatrice Pate : La sénatrice LaBoucane-Benson a répondu à ma question. J’allais demander s’ils avaient eu l’avantage de cette information, car il semble que les gens d’Ecojustice aient été au courant de cet amendement. Est-ce exact?

La sénatrice LaBoucane-Benson : Le premier amendement proposé par un parti d’opposition répondait aux observations des intervenants. Ils voulaient que cela ne concerne pas seulement les produits, mais aussi la pratique. Le gouvernement a dit : « Un instant. Cela va un peu trop loin. Il faut revenir en arrière. »

C’est le résultat d’un compromis soigneusement négocié en réponse non seulement aux intervenants qui disaient qu’il n’allait pas assez loin, mais aussi à ceux qui disaient qu’il allait trop loin.

La sénatrice Ross : Je pense qu’il ne nous appartient pas, en tant que sénateurs, de spéculer sur la façon dont ils pourraient réagir à un amendement que nous proposons. C’est notre devoir de diligence. Je comprends votre point de vue.

Je pense aussi que, bien qu’il ait été adopté, ils n’ont pas pu bénéficier de la réaction que nous avons reçue, parce qu’elle est survenue après l’amendement. L’amendement a été proposé. Il n’y a pas eu de consultation sur ce libellé précis de l’amendement, et toutes ces réactions en ont découlé.

La sénatrice LaBoucane-Benson : [Difficultés techniques] commencé à l’étape de la troisième lecture. Il a été adopté en comité.

[Français]

Le président : Je pense qu’on a fait le tour, donc je pose la question. L’honorable sénatrice Ross propose :

Que le projet de loi C-59 soit modifié à l’article 236, à la page 429, par substitution, aux lignes 29 et 30, de ce qui suit :

« suffisants et appropriés, dont la ».

Quelles sont les personnes qui sont pour? Qui est contre? Y a‑t‑il des abstentions?

L’amendement est donc rejeté. Voulez-vous qu’on tienne un vote par appel nominal?

[Traduction]

Mireille K. Aubé, greffière du comité : Je veux simplement signaler aux membres que nous avons un changement dans la composition du comité. La sénatrice Galvez est remplacée par la sénatrice Moncion.

[Français]

L’honorable sénateur Carignan, c.p.?

Le sénateur Carignan : Abstention.

Mme Aubé : L’honorable sénateur Dalphond?

Le sénateur Dalphond : Abstention.

Mme Aubé : L’honorable sénateur Forest?

Le sénateur Forest : Contre.

Mme Aubé : L’honorable sénateur Gignac?

Le sénateur Gignac : Contre.

Mme Aubé : L’honorable sénatrice Kingston?

La sénatrice Kingston : Contre.

Mme Aubé : L’honorable sénateur Loffreda?

Le sénateur Loffreda : Contre.

Mme Aubé : L’honorable sénatrice MacAdam?

La sénatrice MacAdam : Contre.

Mme Aubé : L’honorable sénatrice Marshall?

La sénatrice Marshall : Pour.

Mme Aubé : L’honorable sénatrice Moncion?

La sénatrice Moncion : Contre.

Mme Aubé : L’honorable sénatrice Pate?

La sénatrice Pate : Contre.

Mme Aubé : L’honorable sénatrice Ross?

La sénatrice Ross : Pour.

Mme Aubé : L’honorable sénateur Smith?

Le sénateur Smith : Pour.

Mme Aubé : L’honorable sénatrice LaBoucane-Benson?

La sénatrice LaBoucane-Benson : Contre.

Mme Aubé : Pour : 3; contre : 8; abstentions : 2.

Le président : La motion est donc rejetée. On continue avec la partie 5, intitulée Mesures diverses, qui comprend l’article 168, à la page 395, à l’article 365, à la page 526.

Est-ce que la partie 5, intitulée Mesures diverses, qui comprend les articles 168 à 365, est adoptée?

[Traduction]

Avec dissidence. L’article 1, qui contient le titre abrégé, est-il adopté?

Des voix : Avec dissidence.

Le président : Le titre est-il adopté?

Des voix : Avec dissidence.

Le président : Avec dissidence. J’aime ça. Le projet de loi est-il adopté?

[Français]

Des voix : D’accord.

Le président : Est-ce que le comité souhaite annexer des observations au rapport? On a reçu deux propositions d’observations; on peut commencer par celle du sénateur Dalphond.

Est-ce que vous voulez fonctionner à huis clos pour les observations? Je pense qu’on peut y aller en public; d’accord?

Des voix : D’accord.

Le président : On va donc commencer par l’observation du sénateur Dalphond.

Le sénateur Dalphond : Mon observation découle d’un inconfort. Je pense que plusieurs membres du comité, y compris ceux qui n’ont pas voté en faveur de l’amendement proposé par la sénatrice Ross, comprennent le dilemme dans lequel nous nous trouvons à quelques jours de la fin de la session. Personnellement, j’ai entendu des témoins, notamment des représentants des alumineries au Québec et ceux d’une association de l’Ouest canadien, ainsi que des gens de l’Alberta et de la Saskatchewan.

[Traduction]

Ils ont exprimé de graves préoccupations au sujet de ces normes reconnues à l’échelle internationale. J’ai aussi été inquiet lorsque j’ai entendu les fonctionnaires du ministère dire : « Eh bien, c’est un nouveau concept, qui pourrait être interprété de bien des façons, mais nous croyons que le bureau fera les choses correctement. »

Je suis également impressionné par le fait que le bureau a, par le passé, fait preuve d’un grand professionnalisme et s’est montré en phase avec ce qui se passe au Canada, en comprenant la législation et en surveillant ce qui se passe aux États-Unis et ailleurs.

J’ai bon espoir qu’il fera le travail, parce que je crois aussi comprendre que le commissaire était en faveur non seulement de l’écoblanchiment des produits, mais aussi de l’écoblanchiment des entreprises. C’est de cela qu’il s’agit; c’est tout nouveau. La sénatrice Moncion a parlé de l’écoblanchiment davantage en lien avec des produits précis, mais il s’agit ici de l’entreprise, ce qui est un concept nouveau.

J’ai des préoccupations. Je ne suis pas contre l’idée, mais je pense que ces mots auraient pu être un peu plus étoffés, et j’aurais été beaucoup plus à l’aise avec le processus qui est devant nous. Voilà où nous en sommes. Nous sommes à quelques jours de l’ajournement pour l’été. L’autre endroit est plus près de l’ajournement que nous.

J’ai rédigé les observations qui vous ont été fournies. Voulez‑vous que je les lise? Mes explications sont suffisantes, mais je peux les lire pour la transcription si vous le voulez. Est‑ce nécessaire? Je peux les lire pour ceux qui nous écoutent :

Le comité souligne qu’une proportion significative d’acteurs industriels actifs au Canada ont fait de réels efforts pour soutenir le passage à une économie zéro émission nette et pour différencier leurs produits et leurs entreprises sur cette base. Ces efforts légitimes ne doivent pas être découragés ou entravés par crainte des conséquences involontaires de la poursuite d’actions d’écoblanchiment.

Votre comité estime qu’il est important que le Bureau de la concurrence procède à une consultation sérieuse afin d’établir des lignes directrices claires dans ce domaine, et que tout droit d’action privé soit éclairé par ces lignes directrices quant à ce qui peut être considéré comme trompeur dans le domaine de la protection de l’environnement.

En outre,

— et je vais ajouter le paragraphe 236(1) du projet de loi C-59 —

bien que le projet de loi C-59 souligne l’importance d’une méthodologie internationalement reconnue pour justifier de telles affirmations, le comité estime que l’analyse devrait inclure les meilleures pratiques qu’elles soient fédérales, ou de partout ailleurs au Canada, telles que celles définies par Environnement et Changement climatique Canada.

Les lignes directrices internationales sont certes importantes, mais il faudrait aussi tenir compte des lignes directrices canadiennes, surtout les projets approuvés par le gouvernement fédéral ou le gouvernement provincial du Québec, dont j’ai parlé dans mes questions à un témoin; elles devraient aussi faire partie de l’analyse.

[Français]

Le sénateur Gignac : Merci, sénateur Dalphond. J’ai travaillé un peu en collaboration avec mon collègue. Je ne suis pas avocat, juste économiste. J’ai trouvé qu’à l’autre endroit, on est allé plutôt vite en ajoutant que maintenant, cela ne touche pas seulement les produits, mais aussi les activités des entreprises. Je pense qu’en anglais, on parle d’« uncharted territory », donc un « territoire inconnu ». On se lance là-dedans.

La lettre du Bureau de la concurrence m’a un peu rassuré — je dois le dire —, mais je trouve que ce n’est pas très favorable aux affaires. On se lance dans quelque chose qui pourrait amener de nouvelles entreprises qui font des propositions innovantes pour lutter contre les changements climatiques à passer plus de temps et d’argent avec leurs conseillers juridiques à traiter des poursuites, plutôt que d’investir dans de nouvelles technologies.

J’ai bien l’intention de suivre de près le Bureau de la concurrence pour connaître le nombre de plaintes et de poursuites qui seront lancées à ce sujet. Comme le sénateur Loffreda l’a mentionné, il est important de respecter nos groupes environnementaux financés par des fonds publics — surtout dans mon cas, en tant que sénateur et grand-père —, mais ce n’est pas vrai que ce sera un buffet ouvert pour qu’on puisse intenter des poursuites frivoles. On va beaucoup se fier sur le Bureau de la concurrence pour connaître le nombre de poursuites. Sinon, les entreprises vont s’installer aux États-Unis au lieu du Canada pour éviter les poursuites frivoles, surtout les jeunes entreprises qui n’ont ni temps ni argent à dépenser là-dessus.

Comme vous le savez, il y a des régulateurs, des valeurs mobilières qui surveillent les déclarations que peuvent faire les entreprises, et elles sont soumises à la réglementation. Je salue l’initiative du sénateur Dalphond, mais il se pourrait que ce dossier revienne devant nous dans la prochaine année si cet amendement suscite un trop grand nombre de plaintes de la part d’entreprises. On ne parle pas seulement des entreprises dans les secteurs pétrolier et gazier. On peut penser aux secteurs de l’aluminium et du transport et au secteur agricole, entre autres. Voilà mon observation.

La sénatrice Moncion : Je voudrais juste mentionner que le premier changement qu’on a vu dans la Loi sur la concurrence portait sur une autre section proposée par le gouvernement l’an dernier.

La deuxième section de la révision de la Loi sur la concurrence a été beaucoup plus approfondie. Il y a eu énormément de consultations qui ont été faites sur le marché. J’ai rencontré les représentants du Bureau de la concurrence, qui nous ont expliqué les grands changements et les nouvelles orientations. C’est vraiment une mise à jour de tout le travail qui se fait au Bureau de la concurrence. J’ai été rassurée de voir, et surtout de connaître, tous les gens qui ont travaillé sur la nouvelle mouture et sur les modifications apportées au Bureau de la concurrence.

Je suis beaucoup plus à l’aise avec l’observation tout simplement, parce que le bureau s’est modernisé. Avec le projet de loi C-59, on a une loi beaucoup plus modernisée. Il y a beaucoup de travail qui va se faire au Bureau de la concurrence avec cette nouvelle mouture; ils vont examiner les nouvelles tendances et les nouvelles normes.

Il y a quand même une ouverture, et nous serons des chiens de garde. C’est important de le faire. De plus, lorsqu’ils feront des consultations sur tout ce qui touche l’écoblanchiment, on aura quelque chose d’adapté à la réalité actuelle, et non à ce qui date de 15 ou 20 ans.

[Traduction]

La sénatrice Ross : Merci. Je comprends votre observation, sénateur Dalphond. Je suis d’avis qu’elle ne va pas assez loin parce que je ne pense pas qu’elle traite de la « méthodologie internationalement reconnue ».

Je ne sais pas combien de temps encore je pourrai continuer de dire « en tant que nouvelle sénatrice », mais, en tant que nouvelle sénatrice, je me sens mal à l’aise de constater que la formulation de votre explication incluait notre pause estivale imminente, car je ne crois pas que nous devrions limiter le temps que nous passons — ou les décisions que nous prenons pour légiférer — en fonction de notre pause estivale ou de celle de l’autre endroit.

Le sénateur Dalphond : Excusez-moi, la réalité ou le genre de cadre dans lequel nous fonctionnons ne font pas partie de l’observation. Je dois dire que, cependant, au dernier paragraphe, l’observation porte précisément sur le terme « méthodologie internationalement reconnue ». C’est donc dans le dernier paragraphe.

La sénatrice Ross : D’après ce que je comprends, il semble…

Le sénateur Dalphond : Non.

La sénatrice Ross : L’importance d’une méthodologie internationalement reconnue…

Le sénateur Dalphond : Nous reconnaissons cela. Nous pourrions peut-être utiliser un autre mot.

Ce que je veux dire, c’est que nous reconnaissons qu’il s’agit d’un des facteurs à prendre en considération. C’est précisément ce à quoi la loi fait référence. Mais ce ne devrait pas être le seul facteur à prendre en considération. Il devrait faire partie d’un cadre d’analyse plus large. C’est ce que j’essaie de faire. Le libellé pourrait être corrigé si vous avez une meilleure suggestion. Je suis ouvert.

La sénatrice Ross : Peut-être « plutôt ». Quelque chose du genre « le Comité estime que l’analyse devrait plutôt suivre ou inclure les meilleures pratiques qu’elles soient fédérales, ou de partout ailleurs au Canada ».

Le sénateur Dalphond : « devrait plutôt » ou « devrait mettre l’accent »?

La sénatrice Ross : Je ne dirais pas « aussi », mais « au lieu de », plutôt « au lieu de ».

L’analyse devrait plutôt inclure les meilleures pratiques qu’elles soient fédérales, ou de partout ailleurs au Canada.

Le sénateur Dalphond : Devrait aussi inclure les meilleures pratiques qu’elles soient fédérales…

Le sénateur Loffreda : Oui, « devrait aussi inclure », pas « plutôt », parce que dans ce cas, c’est strictement…

[Français]

Le président : Est-ce que ça va? Est-ce qu’on a besoin de le relire tel qu’il a été modifié? Je pense que c’est clair. Est-ce que les sénateurs sont d’accord? Parfait.

[Traduction]

La sénatrice Pate : Dans ses observations préliminaires devant le comité, la ministre Freeland a présenté le logement et l’abordabilité des aliments comme des objectifs cruciaux du projet de loi C-59. J’ai le témoignage. J’ai tout cela, si les sénateurs veulent plus de détails.

Par conséquent, j’ai pensé qu’il serait prudent de notre part d’inclure une observation selon laquelle, puisque le gouvernement a fait du logement et de l’abordabilité des aliments des priorités dans le projet de loi C-59, il doit veiller à ce que ses décisions stratégiques soient appuyées par une mise en œuvre adéquate des mesures d’équité fiscale proposées dans le projet de loi et à ce qu’elles tiennent compte efficacement de la sécurité du revenu et de l’inclusion des Canadiens en situation d’instabilité financière et de ceux qui sont les plus démunis.

[Français]

Le président : Est-ce que quelqu’un a des commentaires sur la proposition d’observation de la sénatrice Pate? Est-ce que tout le monde est à l’aise?

Des voix : D’accord.

Le président : Est-il convenu que le Sous-comité du programme et de la procédure soit autorisé à approuver la version finale des observations qui seront annexées au rapport, dans les deux langues officielles, en tenant compte de la discussion d’aujourd’hui et en apportant tout changement nécessaire lié à la forme, à la grammaire ou à la traduction?

Des voix : D’accord.

Le président : Est-il convenu que je fasse rapport au Sénat de ce projet de loi avec des observations dans les deux langues officielles?

Des voix : D’accord.

Le président : Nous allons suspendre la séance et reprendre à huis clos pour discuter de notre rapport sur le projet de loi C-69.

(La séance se poursuit à huis clos.)

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