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NFFN - Comité permanent

Finances nationales


LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES FINANCES NATIONALES

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le jeudi 5 décembre 2024

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd’hui, à 11 h 2 (HE), avec vidéoconférence, pour étudier le projet de loi C-78, Loi concernant l’allègement temporaire du coût de la vie (abordabilité), et pour procéder à l’étude article par article.

Le sénateur Claude Carignan (président) occupe le fauteuil.

Le président : Honorables sénateurs et sénatrices, avant de commencer, je voudrais demander à tous les sénateurs et aux autres participants qui sont ici en personne de consulter les cartes sur la table pour connaître les lignes directrices visant à prévenir les incidents liés au retour de son. Veuillez tenir votre oreillette éloignée de tous les microphones à tout moment. Lorsque vous n’utilisez pas votre oreillette, placez-la, face vers le bas, sur l’autocollant placé sur la table à cet effet. Merci à tous de votre coopération.

Je m’appelle Claude Carignan, je suis président du Comité sénatorial permanent des finances nationales et je suis un sénateur du Québec. J’aimerais demander à mes collègues de se présenter, en commençant par ma gauche.

Le sénateur Forest : Éric Forest, de la division sénatoriale du Golfe, au Québec.

Le sénateur Gignac : Clément Gignac, de la division sénatoriale de Kennebec, au Québec.

Le sénateur Dalphond : Pierre Dalphond, de la division sénatoriale De Lorimier, au Québec.

Le sénateur Moreau : Pierre Moreau, de la division sénatoriale des Laurentides, au Québec.

Le sénateur Gold : Marc Gold, de la division sénatoriale de Stadacona, au Québec.

La sénatrice Miville-Dechêne : Julie Miville-Dechêne, de la division sénatoriale d’Inkerman, au Québec.

[Traduction]

La sénatrice MacAdam : Bonjour. Jane MacAdam, de l’Île-du-Prince-Édouard.

La sénatrice McBean : Bonjour. Marnie McBean, sénatrice de l’Ontario.

La sénatrice Ross : Bonjour. Krista Ross, du Nouveau-Brunswick.

Le sénateur Smith : Larry Smith, du Québec.

[Français]

Le président : Merci, chers collègues. Aujourd’hui, nous continuons notre étude du projet de loi C-78, Loi concernant l’allègement temporaire du coût de la vie (abordabilité), qui a été renvoyé à ce comité par le Sénat du Canada le 3 décembre 2024.

Pour notre premier groupe de témoins, nous avons le plaisir d’accueillir aujourd’hui par vidéoconférence Luc Godbout, professeur titulaire, Chaire de recherche en fiscalité et en finances publiques, Université de Sherbrooke. Bonjour, monsieur Godbout. Nous accueillons également David Dodge, conseiller principal, Bennett Jones s.r.l. Bienvenue, monsieur Dodge. Directement de l’Allemagne par vidéoconférence, nous accueillons Sylvain Charlebois, professeur et directeur, Laboratoire d’analyse agroalimentaire, Université Dalhousie. Merci beaucoup de vous joindre à nous malgré votre voyage à l’étranger.

Bienvenue et merci d’avoir accepté notre invitation à comparaître aujourd’hui. Nous allons maintenant entendre les déclarations préliminaires de M. Godbout, qui seront suivies de celles de M. Dodge et de M. Charlebois. Par la suite, nous aurons sûrement des questions. Nous sommes prêts à entendre vos remarques liminaires.

Luc Godbout, professeur titulaire, Chaire de recherche en fiscalité et en finances publiques, Université de Sherbrooke, à titre personnel : Bonjour, honorables sénatrices et sénateurs. Je vous convie à analyser le projet de loi un peu plus en détail.

La manière dont le gouvernement fédéral a choisi d’intervenir en modifiant l’application de la TPS/TVH est extrêmement surprenante. La joute politique a manifestement prévalu sur la logique économique. Si un tel projet hypothétique avait été présenté par des étudiants à des fins de formation, j’aurais été très critique quant à sa pertinence, aux moyens utilisés pour atteindre l’objectif, au fardeau administratif pour les commerçants et aux enjeux interprovinciaux qu’engendre un tel projet de loi. Il s’agit d’une mesure mal ciblée, à mon avis.

Si l’objectif premier du gouvernement est de lutter contre la hausse du coût de la vie, ce congé n’est pas dirigé vers les bonnes personnes. Il aurait été plus judicieux de procéder autrement, sans modifier la liste des produits taxables à la TPS.

En politique fiscale, on dit souvent qu’une vieille taxe est une bonne taxe. Cela veut dire de ne pas y toucher; le message subliminal est de ne pas y toucher. Avec les changements proposés à la liste des produits taxables, il y a un risque réel que plusieurs organisations se mettent en ligne pour réclamer à leur tour la détaxation de certains produits ou activités.

Ce qui laisse le plus perplexe est, sans l’ombre d’un doute, la sélection de produits qui seront exemptés. Alors que plusieurs administrations dans le monde adoptent une taxe sur les boissons sucrées, le projet de loi fait le choix d’appliquer un congé aux boissons gazeuses et même aux chips. La liste de produits détaxés inclut un arbre décoratif semblable à un arbre de Noël. Comment le commerçant doit-il interpréter ce qui est semblable à un arbre de Noël? Elle inclut des enregistrements sonores, pourvu que ce soit la lecture orale d’un livre imprimé. Comment le commerçant doit-il démontrer l’existence d’un livre imprimé avant de détaxer l’enregistrement? La liste de produits comprend les jeux de société conçus pour être utilisés par un enfant de moins de 14 ans. Que doit faire le commerçant si le jeu est destiné aux 7 à 77 ans? Donc, il y a beaucoup d’ambiguïté.

Si l’objectif était d’aider les contribuables, la détaxation de certains produits va générer une économie beaucoup plus importante en valeur absolue pour les ménages à revenus élevés. Si on va voir du côté des dépenses des ménages selon le quintile de revenu, selon des données disponibles de Statistique Canada, le manque à gagner découlant des dépenses des plus riches sera 7,5 fois plus élevé lorsqu’on parle de vêtements pour enfants de moins de 14 ans. Lorsqu’on parle des boissons alcoolisées achetées en magasin, les dépenses des plus riches sont 3,3 fois plus élevées que chez les plus pauvres, et lorsqu’on parle des repas au restaurant, elles sont 3,1 fois plus élevées pour les riches que pour les plus pauvres.

Les provinces qui, au fil des années, ont accepté d’abroger leur loi sur la taxe de vente pour adhérer de bonne foi à la TVH se retrouvent aujourd’hui avec un manque à gagner. En matière de fédéralisme fiscal, il aurait été indiqué de consulter les provinces préalablement avant d’élaborer un tel congé. Il reste difficile d’imaginer que le gouvernement fédéral puisse décider unilatéralement de changer les règles du jeu sans compenser les provinces.

Du côté de l’uniformité de la mesure, jusqu’ici, lorsque le gouvernement fédéral mettait en place des mesures ponctuelles pour aider les contribuables canadiens, les mesures s’appliquaient uniformément d’un océan à l’autre. Dans le cas du congé temporaire de TPS/TVH, le traitement est différencié selon la province où les gens vivent. Cela apparaît difficilement justifiable. Le congé est de 5 points de TPS dans les cinq provinces où elle s’applique, mais il varie entre 13 et 15 points selon les provinces où la TVH s’applique.

Pour ce qui est des commerçants, pour plusieurs, les coûts administratifs découlant des modifications sont considérables. N’oubliez pas que comme il s’agit d’un congé temporaire de deux mois seulement, ils devront changer deux fois leurs systèmes informatiques en peu de temps. Il ne faut pas sous-estimer le risque important d’erreurs de codification. De telles erreurs, considérant la fréquence des transactions, amèneront un risque accru d’être imposé de nouveau par les administrations fiscales pour avoir mal géré et mal perçu la TPS/TVH.

En terminant, on rappelle que le gouvernement fédéral n’a toujours pas présenté de mise à jour économique. S’il peut être acceptable, dans certaines situations, qu’une politique fiscale aggrave les déficits, par exemple en voulant lutter contre les changements climatiques au nom de l’équité intergénérationnelle, ce n’est manifestement pas le cas en accordant un congé de TPS sur les boissons gazeuses ou les croustilles.

Les raisons soulevées auraient dû suffire à renoncer à un tel projet, et en deux mots, je vous dirais que le congé de TPS et de TVH est de la mauvaise politique fiscale. Merci.

[Traduction]

Le président : Monsieur Dodge, veuillez commencer votre présentation.

David Dodge, conseiller principal, Bennett Jones s.r.l., à titre personnel : Merci beaucoup, monsieur le président.

À l’instar du professeur Godbout, je crois que la réduction temporaire de la TPS sur une série d’articles est une mauvaise politique économique à court et à long terme. À court terme, elle entraîne des coûts d’adaptation très réels, comme vient de le dire M. Godbout, tant pour le gouvernement que pour les entreprises. Cela signifie que le coût fiscal de cette mesure est susceptible de dépasser les avantages réels pour les consommateurs. De plus, comme ce coût fiscal sera probablement financé par une augmentation des emprunts, l’avantage pour les consommateurs aujourd’hui se traduira simplement par une réduction des avantages au cours des années à venir, car le gouvernement devra réduire les services ou augmenter les impôts pour gérer les charges accrues du service de la dette fédérale.

En bref, sénateurs, il s’agit d’une douceur immédiate pour laquelle il faudra éventuellement payer.

Or, les conséquences à long terme sont encore pires.

Tout d’abord, le principe de la TPS est d’avoir une base de revenus étendue avec un taux aussi bas que possible. En réduisant cette base, même temporairement, la taxe devient un moyen beaucoup moins efficace de collecter les recettes nécessaires aux programmes gouvernementaux. Cela signifie qu’il faudra augmenter les impôts tous azimuts ou imposer des réductions aux programmes qui soutiennent les citoyens ordinaires.

Deuxièmement, et c’est peut-être encore plus important, c’est qu’à l’heure actuelle, ce que nous devons faire collectivement, c’est d’augmenter les investissements et non la consommation. Sans une augmentation des investissements pour donner aux travailleurs les outils dont ils ont besoin pour augmenter la productivité et, par conséquent, les revenus qu’ils sont capables de gagner, nous nous condamnons à la stagnation, voire à la baisse de notre niveau de vie. En optant pour une mesure fiscale qui augmente la consommation, le gouvernement se prive de la possibilité d’augmenter les investissements d’un montant équivalent.

Mesdames et messieurs les sénateurs, je vous remercie de votre attention. Sachez que je serai heureux de répondre à vos questions.

Le président : Merci, monsieur Dodge.

[Français]

Sylvain Charlebois, professeur et directeur, Laboratoire d’analyse agroalimentaire, Université Dalhousie, à titre personnel : Je vous remercie de l’invitation. J’ai visité le Sénat à plusieurs reprises dans ma carrière et j’apprécie toujours mes visites.

Malheureusement, je n’ai pas eu le temps de préparer de notes pour ma présentation d’aujourd’hui. J’ai tout de même soumis le rapport annuel des prix alimentaires à la greffière. Le rapport est publié aujourd’hui, donc vous pouvez le consulter. Le rapport concerne l’abordabilité alimentaire, un sujet qui me tient à cœur.

Vous avez invité aujourd’hui trois témoins qui pensent de la même façon. Nous sommes tous les trois inquiets de ce qui se passe actuellement. La façon dont on instrumentalise les taxes au détail est inquiétante, surtout pour ce qui est du domaine alimentaire. C’est là-dessus que je vais me pencher pour mes remarques liminaires.

La nature temporaire du congé de taxes est vraiment problématique. M. Godbout a soulevé ce point : on parle de 100 à 200 heures de travail supplémentaires par commerçant indépendant à deux reprises, donc maintenant et en février 2025. Il y a 4 600 produits taxés dans un supermarché; c’est beaucoup de produits et de catégories et c’est énormément de travail et de minutie.

Il y a une chose que les sénateurs devraient savoir : chaque année, il y a de plus en plus de produits qui sont taxés en raison de la réduflation. Selon les règles de l’Agence du revenu du Canada, un produit sera souvent réduit à un point tel qu’il devient une collation taxable. On pense que chaque année, le nombre de produits augmente de 25 à 100 unités. Donc, le fardeau de travail augmente chaque année.

Au Laboratoire d’analyse agroalimentaire, on a estimé qu’au détail, le consommateur moyen épargnera 4,51 $ sur deux mois. C’est la moyenne par Canadien, si l’on s’en tient au volume de vente et selon les taxes perçues par les épiciers. On parle de 4,51 $, ce qui n’est pas énorme.

Une chose que j’aimerais soulever — et M. Dodge l’a mentionnée —, c’est qu’il pourrait y avoir de l’opportunisme dans les prix. On l’a vu en 2006 et 2008 avec la réduction de la TPS sous M. Harper. Si vous regardez en détail les données sur l’inflation générale, vous pouvez voir que durant les premiers mois où l’on avait réduit la TPS de 1 % en 2006 et d’un autre 1 % en 2008, l’inflation avait augmenté, ce qui n’est pas surprenant, parce que souvent, surtout dans le domaine alimentaire, on va chercher l’espace que la taxe délaisse. Puisque c’est une mesure temporaire, on craint qu’il puisse y avoir une inflation supplémentaire, et en février, avec le retour de la TPS, on pourrait voir une taxe supplémentaire appliquée sur des prix.

En ce qui concerne les services alimentaires, la situation est différente; puisque tout est taxé de la même façon, c’est moins de travail pour les restaurateurs. On parle d’un rabais de 20 à 30 % par personne sur deux mois. Le Canadien moyen dépense 186 $ par mois au restaurant, donc ce sont quand même des rabais intéressants. Par contre, il y a une disparité entre les provinces, par exemple entre le Québec et l’Ontario. À Gatineau, il y aura la TVQ, mais de l’autre côté, en Ontario, il n’y aura aucune taxe. Donc, il pourrait y avoir un flux de consommateurs qui iront d’un côté à l’autre simplement pour éviter la taxe, ce qui est inquiétant, surtout durant la période des Fêtes. C’est tout ce que j’ai pour vous pour l’instant. Je suis prêt à répondre à vos questions.

Le président : Merci beaucoup. Nous allons maintenant passer à la période des questions.

Le sénateur Forest : Je vous remercie infiniment de vos présentations fort intéressantes. Ma première question s’adresse à M. Godbout. Il u a un aspect qui me préoccupe : avec un congé de TPS, si l’objectif est de faire en sorte que les Canadiens aient plus d’argent dans leur compte de banque après les Fêtes, pourquoi les pousser à dépenser pour bénéficier de l’aide gouvernementale? Ne va-t-on pas dans la direction inverse de l’objectif? Comment expliquer que le gouvernement privilégie un congé de taxes plutôt qu’un autre véhicule? Pouvez-vous nous expliquer la logique?

M. Godbout : C’est probablement pour des raisons de visibilité; il voulait trouver une nouvelle façon d’offrir de l’aide aux Canadiens. Si on avait simplement bonifié le crédit pour la TPS, cela aurait tout autant ajouté de l’argent dans les poches des ménages, mais on aurait pu cibler plus précisément les ménages à revenus modestes et les gens auraient été libres de consommer ou de ne pas consommer davantage.

Comme les trois témoins l’ont souligné, jouer dans les éléments imposables de la TPS, ce n’est pas une bonne chose à court terme ni à long terme. Donc, on aurait dû procéder autrement. Le gouvernement l’avait fait en 2022 et en 2023, il avait augmenté ponctuellement le crédit pour la TPS; cela aurait été la bonne chose à faire et cela aurait été beaucoup mieux ciblé pour un même coût en matière de recette fiscale.

Le sénateur Forest : Vous indiquez que ces mesures ne sont pas dirigées vers les bonnes personnes. Lorsque vous faites cette affirmation, vous le faites à la suite de l’analyse des produits touchés par la mesure. Donc, on vise plus la classe moyenne supérieure que les gens économiquement fragiles?

M. Godbout : Plus vous consommez, plus vous bénéficiez du congé. C’est vrai qu’on dit qu’il y aura une détaxation de la restauration. Si vous consommez 5 $ chez Tim Hortons, cela n’a pas la même valeur que si vous consommez 300 $ dans un restaurant haut de gamme. Donc, il est clair que de cette façon, quand on regarde la quantité de dépenses réparties entre les ménages, les 20 % des plus riches vont dépenser 3,1 fois plus d’argent dans la restauration que les 20 % des ménages les plus pauvres. C’est la même chose pour une quantité de produits; les vêtements pour enfants sont un autre bel exemple où les plus riches consacrent beaucoup plus de dépenses en volume que les plus pauvres — donc, ils vont profiter davantage du congé.

Le sénateur Forest : Monsieur Charlebois, vous avez, dans vos remarques préliminaires, fait part de la menace selon laquelle les marchands pourraient occuper l’espace libéré par la taxe. Cela pourrait devenir un effet pervers. Si les marchands occupent l’espace, j’imagine que, à la fin du congé de taxes, ils ne libéreront pas plus cet espace et que les gens seront taxés. C’est une mesure qui pourrait avoir un impact inflationniste.

M. Charlebois : Effectivement. En fait, on a failli écrire quelques commentaires à ce sujet dans notre rapport annuel de 2025. On craint qu’il puisse y avoir un effet inflationniste.

Dans le domaine alimentaire, les marges sont tellement minces qu’on va aller chercher à peu près n’importe quelle occasion ou excuse pour augmenter les prix. Comme l’a dit M. Godbout, les taxes laissent toujours un héritage derrière elles. Si la taxe disparaît de façon temporaire, c’est comme la marée, cela laisse une ligne sur les quais et on va essayer d’occuper cet espace de façon opportune.

[Traduction]

Le sénateur Smith : J’ai une question à vous poser, monsieur Dodge. Merci beaucoup de votre contribution : une petite douceur aujourd’hui pour bien plus de peine demain.

Où croyez-vous que ces ressources devraient être investies pour résoudre les problèmes sous-jacents de faible productivité et de stagnation des revenus? Comment des investissements stratégiques dans des domaines tels que le développement de la main-d’œuvre, l’innovation ou les infrastructures pourraient-ils créer une base plus solide pour l’avenir économique du Canada et améliorer le niveau de vie des Canadiens à long terme?

M. Dodge : Sénateur, comme Bennett Jones le soutient depuis plusieurs années, le principal problème de notre pays est sa faible productivité. C’est ce qui explique le fait que le revenu réel que peuvent gagner les Canadiens stagne depuis la grande crise financière de 2010.

Notre problème collectif est de trouver un moyen d’augmenter les investissements pour améliorer la productivité des travailleurs et, par conséquent, d’améliorer les revenus de ces derniers et leur capacité d’acheter des produits. Pour ce faire, le gouvernement doit investir — et il s’agit d’investissements dans les services tirés du capital que le gouvernement fournit, tels que les transports, la justice, etc. — pour compléter l’investissement privé afin de fournir aux travailleurs les outils supplémentaires dont ils ont besoin pour augmenter leur productivité et, par conséquent, leurs revenus.

Tel est le problème fondamental auquel nous sommes confrontés. Lorsque nous observons le monde aujourd’hui et depuis la grande crise financière, nous disons que le problème est en quelque sorte la hausse des prix. Cette évocation de la hausse des prix est gratuite et dogmatique. Ce que l’on ne dit pas, c’est que notre productivité et notre capacité de payer des salaires réels aux travailleurs pour compenser les hausses de prix ont reculé. La chose sur laquelle le gouvernement devrait se concentrer pour tenter de faire face à ce qui est perçu comme une augmentation du coût de la vie, c’est en fait la baisse de la capacité à produire et, par conséquent, le recul de la capacité à augmenter les revenus.

Je crois que cette mesure, ainsi que d’autres mesures proposées pour augmenter la consommation — telles qu’une subvention en espèces, comme l’a proposé l’Ontario ou comme la ministre fédérale l’a évoqué —, n’est pas la solution qui nous permettra, en tant que Canadiens, d’avoir un niveau de vie plus élevé. Les investissements à cet égard doivent se faire par l’intermédiaire des suivants : le capital humain, soit l’amélioration des compétences de nos travailleurs; le capital physique, soit le fait de donner aux travailleurs les outils dont ils ont besoin pour travailler; le capital gouvernemental, pour rendre l’investissement privé plus productif.

[Français]

Le sénateur Dalphond : Merci beaucoup à nos témoins; c’est très intéressant. Ma question s’adresse d’abord à M. Godbout et à M. Charlebois.

Vous parlez des difficultés pour les opérateurs, les petits commerçants, etc. Vous avez fait des expériences en laboratoire à Dalhousie. Je ne sais pas si vous avez entendu nos audiences d’hier et avant-hier, mais nous avons entendu les témoins suivants : Restaurants Canada, le Conseil canadien du commerce de détail et la Fédération canadienne des épiciers indépendants. Ils sont tous en faveur de cette réduction de la fiscalité; ils sont tous prêts à jouer cette partie et ils ont évoqué les difficultés qui pourraient y être associées.

On a entendu hier l’Agence du revenu du Canada nous dire qu’elle va fournir de l’information et qu’elle va appliquer la politique avec un certain degré de tolérance, sachant qu’elle est temporaire.

Est-ce que cela ne répond pas à certaines de vos préoccupations? Et est-ce que cela ce sont des gens qui sont sur le plancher, avez-vous tenu compte de la situation pour faire vos évaluations plutôt théoriques?

M. Godbout : Je peux commencer et je laisserai M. Charlebois compléter.

Vous avez raison, mais dans le cas de la restauration, la détaxation est simple à appliquer. Dans le cas d’une épicerie, d’un dépanneur indépendant à côté d’une station-service qui gère son petit commerce seul, gérer la liste des produits qui seront détaxés est beaucoup plus difficile et il faut le refaire deux fois, soit pour le 14 décembre et le 15 février. Il y a un coût à cela.

On a beau dire que l’Agence du revenu du Canada dit qu’elle appliquera la mesure avec ouverture, vous savez que si vous vous trompez sur un seul produit et que vous le vendez 200 fois par jour, quand Revenu Canada arrivera trois ans plus tard pour vous dire que vous vous êtes trompé 365 jours, 200 fois par jour, pendant trois ans, la petite erreur de mauvaise perception de TPS peut représenter des centaines de milliers de dollars.

Si l’Agence du revenu du Canada s’engage à ce qu’une erreur de codification ne soit pas imposée de nouveau, ce n’est pas mal, mais sinon le fardeau repose sur le commerçant et non pas sur l’agence dans ce contexte; c’est le point que je voulais souligner.

M. Charlebois : Pour compléter, en fait, je pourrais dire que les groupes que vous avez mentionnés, Restaurants Canada, la Fédération canadienne des épiciers indépendants et le Conseil canadien du commerce de détail, sont des groupes qui représentent toutes sortes d’entreprises; c’est une chose. À la base, ce que je vois, c’est un transfert d’affaires entre le commerce au détail et les restaurants.

Pour deux mois, dans le fond, le gouvernement canadien dit : « Allez au restaurant, vous allez épargner plus d’argent pendant le temps des Fêtes et après le temps des Fêtes. »

Restaurants Canada ne sera pas contre cela et on peut le comprendre. Cependant, on discrimine un peu contre le détail pour aider la restauration; c’est un peu cela qui se passe actuellement. Quand on parle de taxes et de la taxe harmonisée dans certaines provinces, c’est sûr que cela déstabilise les choses dans certains cas.

Ce qui m’inquiète le plus, c’est la distorsion que l’on crée temporairement sur le marché. Si la mesure avait été permanente, je ne crois pas que j’aurais les mêmes inquiétudes.

Le sénateur Dalphond : Ma prochaine question s’adresse plus à l’ancien gouverneur de la banque, M. Dodge.

Les restaurateurs parlent de ventes additionnelles de 1,5 milliard de dollars. On peut présumer qu’il y a des employés qui vont travailler un peu plus d’heures qu’ils auraient travaillé qu’avant. Lesdits employés auront plus de pourboires qu’ils en auraient eu autrement, des entreprises vont acheter des produits qu’ils vont vendre dans ce montant de 1,5 milliard de dollars et qu’ils vont acheter auprès d’un fabricant qui va faire la livraison.

N’y aura-t-il pas un effet? Il n’y a pas seulement le coût fiscal, mais aussi une autre récupération fiscale qui se fera par toutes ces transactions qui vont rapporter de l’argent et qui seront taxables.

[Traduction]

M. Dodge : C’est tout à fait vrai à court terme. À moins que nous n’ayons magiquement généré plus de production dans le pays, alors sur une certaine période, ce que nous avons fait, c’est déplacer la consommation pour cette courte période et hors de la période future. Ce déplacement n’est pas utile. Il n’augmente pas le revenu réel des Canadiens au fil du temps. Ce qu’il faut assurément, c’est de modifier le moment où certaines activités se produisent.

[Français]

Le sénateur Loffreda : Merci à nos témoins d’être avec nous aujourd’hui.

[Traduction]

Merci, monsieur Dodge. C’est toujours un plaisir de vous recevoir. Je suis d’accord pour dire qu’au Canada, nous avons deux problèmes : la productivité et la compétitivité. Avec cette mesure et cette politique — cette économie sur la taxe —, on reconnaît que de nombreux Canadiens ont besoin d’un répit. La question la plus importante est la suivante : pourquoi? Vous verrez où je veux en venir. N’est-il pas plus facile de donner aux Canadiens un répit temporaire de cette manière plutôt que — et c’est temporaire; j’insiste sur le mot « temporaire » — de procéder à des investissements qui sont généralement permanents? Il s’agit d’un répit temporaire.

Sommes-nous à court d’idées pour créer des investissements permanents qui augmenteront la productivité, ou est-ce notre capacité financière qui nous empêche de le faire?

M. Dodge : Ce sont les deux.

De façon générale, ces investissements doivent être créés par le secteur privé. Il n’est pas facile de créer un environnement qui permette au secteur privé de réaliser ces investissements. Cela touche à toute une série d’enjeux, y compris la politique fiscale, les dépenses publiques pour les investissements complémentaires, les programmes publics qui aident les travailleurs à améliorer leurs compétences, etc.

Ce n’est pas facile, sénateur. Comme vous l’avez dit, nous nous débattons avec cela depuis plusieurs années.

Cela ne signifie pas que nous devrions transférer l’argent que le pays ne produit pas aux particuliers pour qu’ils améliorent leur sort. La seule façon d’améliorer notre situation est d’améliorer ce que nous produisons. En un sens, en tant que pays, à moyen terme, nous ne pouvons pas consommer ce que nous ne produisons pas. Le problème de notre pays est en fait un problème de production.

Les membres de ce comité et la ministre des Finances ont essayé de résoudre ce problème, et cela s’est produit non seulement dans ce gouvernement, mais aussi dans les gouvernements précédents. Or, ce n’est pas parce que c’est difficile que nous abandonnons, dans la mesure où, chaque fois que nous rencontrons un problème, nous essayons de compenser en augmentant la consommation plutôt que l’investissement. En faisant cela, nous ne faisons que repousser le jour où nous pourrons raisonnablement espérer une augmentation permanente du niveau de vie.

Le sénateur Loffreda : Merci.

Je demanderai peut-être à d’autres intervenants de répondre à ma deuxième question, mais, monsieur Dodge, étant donné que vous êtes sur une bonne lancée, les Services économiques de la Banque de Montréal, ou BMO, prévoient que le taux de croissance du PIB passera de 1,7 % à 2,5 % au cours du premier trimestre. C’est un point positif pour le Canada et les Canadiens. Pensez-vous que ce soit également temporaire et que nous en subirons les contrecoups au deuxième trimestre avec un recul du PIB? Nous avons posé la question à la ministre Freeland hier. Elle m’a répondu que ce serait temporaire, qu’il n’y avait pas de marge de manœuvre.

M. Dodge : Le monde actuel se révèle difficile pour les Canadiens. Nous sommes confrontés à une dynamique complètement différente chez nos voisins du Sud. Il sera extrêmement difficile de prédire ce qui se passera en 2025. Je ne pense pas que nous puissions nous appuyer sur le fait qu’en octobre dernier, nous pensions savoir où nous allions. Le monde est plus incertain maintenant qu’il ne l’était hier. C’est une raison de plus pour laquelle nous ne devrions pas dépenser de l’argent en ce moment pour augmenter la consommation, car nous pourrions avoir besoin de cet argent dans l’année qui vient pour faire face aux difficultés très réelles qu’on prépare pour nous au-delà de nos frontières.

La sénatrice MacAdam : Je remercie tous les témoins de leur présence. J’aimerais que chacun d’eux réponde à quelques questions.

Vous avez tous parlé des nombreux problèmes associés à ce congé de TPS. J’aimerais que vous indiquiez quel est, selon vous, le problème le plus important. Si vous aviez une recommandation à faire au gouvernement pour résoudre la crise de l’abordabilité, quelle serait-elle? J’aimerais connaître l’avis de chacun de vous.

[Français]

M. Godbout : L’un des enjeux les plus importants, c’est que le congé n’est pas uniforme d’une province à l’autre. C’est difficilement imaginable. Si quelqu’un m’avait posé cette question il y a un mois, j’aurais dit que cela n’a pas de sens et que cela ne peut pas être proposé ainsi. Un congé de 5 points de TPS dans cinq provinces et entre 13 et 15 points de TVH dans cinq autres provinces, déjà, pour les Canadiens, ce devrait être un non-sens; le manque à gagner que cela génère pour les provinces devrait être un non-sens, et elles n’ont pas été consultées.

S’il y avait un moyen d’agir autrement, cela aurait été moins glorieux du point de vue de l’annonce, mais le fait de bonifier temporairement le crédit de TPS aurait permis de mieux cibler à qui l’on voulait offrir de l’aide. L’aide aurait alors pu diminuer au fur et à mesure que les revenus des ménages augmentent et cela n’aurait pas eu les effets pervers que les experts semblent décrire de façon relativement unanime.

[Traduction]

M. Charlebois : Je vous remercie de votre question.

Notre laboratoire a eu le plaisir de travailler avec le ministre Champagne l’an dernier sur la question de la hausse du prix des aliments. La seule recommandation que je lui ai faite était de se débarrasser définitivement de la TPS. À mon avis, le fait de taxer les aliments est immoral. C’est une méthode régressive qui, dans le secteur de l’alimentation, pénalise surtout les pauvres. Terre-Neuve fournit un exemple de cela. Il y a deux ans, la province a décidé de taxer les boissons gazeuses pour décourager les gens d’en boire. Or, cette année, les ventes ont augmenté au lieu de diminuer. Les gens boivent plus de boissons gazeuses, malgré la taxe. Ils perçoivent donc 12 millions de dollars de recettes tout en étant toujours aux prises avec un problème de santé publique.

Le fait de taxer les aliments est une mauvaise idée. Ma recommandation serait de se débarrasser définitivement de la TPS.

M. Dodge : Je ne suis pas du tout d’accord avec le dernier intervenant. Le fait de taxer les aliments est tout à fait sensé, comme l’est le fait de taxer une base très large. Les gens ont différentes capacités de dépenser; ils dépenseront des montants différents pour des choses différentes.

Si, en effet, nous voulons traiter le problème et donner un « répit » aux consommateurs — tout en gardant à l’esprit que mon argument serait que ce n’est pas la politique économique appropriée en ce moment —, la chose à faire est d’augmenter le crédit pour la TPS. Cela résout tous les problèmes de répartition des revenus que les professeurs ont soulevés, ainsi que les problèmes sur le plan administratif. Cela permet de résoudre la question « interprovinciale ».

Si vous voulez bel et bien accorder un répit, émettez un chèque correspondant à une augmentation donnée du remboursement de la TPS en janvier, ou à l’occasion du prochain chèque trimestriel. Augmentez-le.

Si l’objectif était d’augmenter la consommation et la capacité des gens à consommer, c’est cet outil qui aurait dû être utilisé, et non cette suppression temporaire très difficile à administrer tant pour l’Agence du revenu du Canada, ou ARC, que pour le contribuable.

La sénatrice Kingston : Ma question s’adresse à M. Dodge, M. Godbout et, peut-être, M. Charlebois. Je sais que M. Dodge aura quelque chose à dire.

J’examine certaines des choses dont on a parlé au moment où cette annonce a été faite. L’une d’entre elles était une déclaration de Royce Mendes du Mouvement Desjardins. Il a parlé de l’effet que cela pourrait avoir sur les éventuelles mesures prises par la Banque du Canada. Il a dit qu’il pensait que les réductions et les rabais pourraient avoir une incidence négative sur la rapidité et l’ampleur de la baisse des taux d’intérêt. M. Mendes soutenait que cette mesure allait faire une croix sur la possibilité d’une baisse de 50 points de base des taux en décembre.

J’aimerais que vous me disiez ce que vous en pensez.

M. Dodge : Je pense que son observation est tout à fait juste. Le fait que nous augmentions la consommation et la demande pendant cette période n’a rien pour inciter la Banque du Canada à continuer à réduire les taux d’intérêt.

En ce qui concerne la réduction des taux d’intérêt pratiquée par la Banque du Canada au fil du temps, la taille précise de la réduction annoncée au fil des réunions n’a pas autant d’importance que la direction que nous prendrons vers la fin de l’année 2025.

Que la banque réduise ses taux de 25 ou 50 points de base la semaine prochaine ou qu’elle passe son tour, cela n’a pas beaucoup d’importance en fin de compte. Ce qui compte, c’est de que nous soyons descendus à 3 %, 3,25 % ou quelque chose dans ces parages vers la fin de 2025. L’important, ce n’est pas le chemin particulier que la banque prendra pour y arriver.

La sénatrice Kingston : Cette chose particulière n’est peut-être pas ce qui fera une différence quant à la direction que la banque prendra.

M. Dodge : L’effet serait très marginal. Mais à mesure que nous avançons, les politiques gouvernementales — n’oublions pas que le gouvernement de l’Ontario vient d’ajouter 200 $ à la consommation de cette province — et toutes ces mesures qui accroissent les pressions exercées par la consommation accroissent également le risque que de nouvelles réductions des taux d’intérêt conduisent à des taux d’inflation plus élevés.

Du point de vue de la direction suivie, Royce Mendes avait vu juste. Quant à savoir si la tendance correspond exactement à ce qu’il a décrit, c’est une autre histoire.

La sénatrice Kingston : Je vous remercie de vos réponses. Monsieur Godbout, je ne sais pas si vous souhaitez ajouter quelque chose.

[Français]

Le président : Monsieur Godbout, avez-vous quelque chose à ajouter?

M. Godbout : Je n’ai pas de valeur ajoutée après les propos de M. Dodge, donc je me limite à ceci.

[Traduction]

La sénatrice Ross : Je ne sais pas lequel d’entre vous voudra répondre à cette question, mais mon collègue, le sénateur Dalphond, a énuméré les organisations qui étaient en faveur du projet de loi C-78 et du congé de taxe. J’aimerais noter que ces mêmes organisations ont mentionné le fardeau administratif que les petites entreprises devront supporter.

Même si les ventes sont stimulées par cette mesure, pensez-vous que ces éventuelles ventes supplémentaires compenseront les coûts occasionnés par l’administration de ce projet de loi?

M. Dodge : Ces coûts administratifs représentent clairement une perte économique, à la fois du côté de l’ARC et du côté des détaillants. C’est tout à fait vrai.

Certainement dans le cas des restaurants, j’aurais pensé qu’ils enregistreraient sans aucun doute des ventes supplémentaires à cause de cela ou que — permettez-moi de l’exprimer ainsi — les restaurants accapareraient une plus grande part du budget alimentaire à cause de cela. J’aurais pensé que pour les restaurateurs, oui, il y aurait une perte économique liée aux coûts occasionnés, mais que le volume global des ventes augmenterait.

Je ne suis pas étonné que les restaurateurs aient soutenu cette initiative. Ils sont favorables à tout ce qui pourrait accroître la part du budget des consommateurs que les restaurants peuvent obtenir.

La sénatrice Ross : Quelqu’un d’autre souhaite-t-il formuler des observations? Sinon, j’ai une autre question à poser.

[Français]

M. Godbout : Pour compléter ce qu’a dit M. Dodge, évidemment, les restaurants vont être pour. On diminue les coûts pour aller au restaurant, donc c’est clair qu’ils seront pour. Mais l’objectif de la mesure n’est pas d’aider l’industrie de la restauration, c’est de lutter contre la hausse du coût de la vie. On atteint mal notre objectif si on le fait en détaxant la restauration.

[Traduction]

M. Charlebois : Je n’ai rien d’autre à ajouter, mais je vous remercie de vous en informer.

La sénatrice Ross : L’entente sur la TVH conclue entre le gouvernement fédéral et la province du Nouveau-Brunswick stipule que si la perte de recettes est supérieure à 1 %, le gouvernement fédéral est tenu de la compenser. Le Nouveau-Brunswick prévoit une perte fiscale d’environ 62 millions de dollars. Pensez-vous que cela soit suffisant pour déclencher une compensation prévue par la loi?

M. Dodge : Je vais laisser à d’autres personnes le soin d’intervenir, car je ne connais pas la réponse à cette question.

[Français]

M. Godbout : Sans être un spécialiste des ententes qui ont été signées au moment de la mise en place de la TVH, il faut quand même souligner qu’il y avait un accord sur le fait que les changements devaient être présentés aux provinces avant d’être faits et qu’il fallait avoir l’autorisation écrite de la province pour réduire la quantité de matières imposables. Je comprends qu’en période de COVID, on a pu détaxer un bien sans le demander aux provinces, parce qu’il y avait une urgence, mais dans ce cas-ci, il n’y en a pas. Il aurait fallu s’entendre avec les provinces au préalable.

À défaut d’entente préalable avec les provinces, les ententes stipulent que le gouvernement fédéral devrait les compenser si l’assiette de produits non taxables est changée de plus de 1 %. À vue de nez, le changement dans l’assiette fiscale semble être de plus de 1 %, parce que quand on regarde du côté fédéral, le manque à gagner par rapport aux recettes escomptées est d’environ 3 %. Pour les provinces, le changement de taxation devrait être d’à peu près 3 %. Elles devraient être compensées par le gouvernement fédéral.

[Traduction]

Le président : Comme nous accueillons un excellent groupe d’experts, nous avons de nombreuses questions à poser.

[Français]

Le sénateur Moreau : Si on avait plus de temps, je demanderais à M. Godbout si l’arbre derrière lui, à sa gauche, correspond à la définition d’un arbre semblable à un arbre de Noël.

Le président : Vous venez de voler ma question.

Le sénateur Moreau : Je ne le lui demanderai pas. Ma première question s’adresse à vous particulièrement, monsieur Godbout.

Vous avez indiqué que la mesure qui aurait été plus équitable et qui aurait probablement atteint le même objectif aurait été d’augmenter le crédit sur la TPS. Je ne connais pas très bien le mécanisme de crédit avec la TPS. Je pense qu’on émet des chèques périodiquement dans l’année. L’objectif du gouvernement était d’avoir un effet immédiat, d’où l’idée de dire qu’on élimine la TPS pour une partie de l’année, c’est-à-dire entre le 14 décembre et le 15 février. Est-ce que vous estimez qu’agir en augmentant le crédit de TPS aurait eu un effet aussi immédiat que la mesure proposée, indépendamment de son bien-fondé? Je comprends que vous en avez contre le bien-fondé de la mesure, mais est-ce qu’on aurait eu le même effet immédiat?

M. Godbout : En ce moment, on demande à des centaines de milliers de commerçants de changer leur système informatique. Si on avait dit à une seule organisation, l’ARC, d’envoyer immédiatement à tous les bénéficiaires du crédit de TPS — il y a 11 millions de ménages — 200 $ par individu ou 500 $ par couple dès maintenant, cela aurait été plus facile à faire. Les gens auraient reçu 200 $, 500 $, ou le montant de TPS. On aurait pu choisir le montant qu’on voulait. On aurait pu dire que quiconque a reçu un montant en septembre dernier est admissible à recevoir par la poste un montant X qui sera immédiatement distribué par l’ARC. Par la poste... Vous comprenez que cela peut être des transferts bancaires. Ce n’est pas obligé d’être un chèque.

Le sénateur Moreau : Oui, surtout que la poste n’est pas bien fluide par les temps qui courent. Essentiellement, ce que vous dites, c’est qu’on aurait pris le même capital ou l’effort fiscal suggéré par le gouvernement, qu’on aurait dû le réduire pour ceux qui bénéficient à l’heure actuelle d’un crédit de TPS et qu’on aurait dû imposer à l’agence l’obligation d’effectuer le virement.

M. Godbout : Cela aurait été beaucoup plus simple et efficace de le faire ainsi. On aurait évité les biais qui ont été soulevés, comme le fait qu’un restaurant de Gatineau aura un congé de 5 %, tandis qu’un restaurant d’Ottawa en aura un de 13 %. On aurait évité plein de choses. Cela aurait été bien plus simple à gérer. Il n’y aurait pas eu de coûts pour les commerçants et pas de risques d’erreurs dans le changement de leur système informatique. On aurait pu beaucoup mieux cibler les efforts. Les ménages les plus riches n’auraient rien reçu, mais est-ce vraiment eux qu’on veut aider avec ce congé?

Le sénateur Moreau : Monsieur Charlebois, je suis assez d’accord avec vous pour dire que les restaurants ont subi la tempête parfaite : pénurie de main-d’œuvre, fermeture obligatoire à cause de la COVID et augmentation des coûts des produits. Il va y avoir une tentative naturelle d’essayer de récupérer l’espace libéré par la taxe en augmentant les prix. Ce sera probablement la même chose dans le domaine de l’alimentation chez les épiceries. À votre connaissance, est-ce qu’il existe une mesure ou un outil qui pourrait nous permettre d’évaluer si, effectivement, cet espace est récupéré par une augmentation des prix?

M. Charlebois : Merci pour la question. C’est ce que nous faisons au laboratoire. Nous vérifions les prix de façon très régulière. Nous allons savoir au mois de février s’il y a eu de l’opportunisme sur le marché, que ce soit au détail ou en restauration. En restauration, les rabais risquent d’être importants dans certaines provinces. Avec un menu, on peut faire toutes sortes de choses. C’est facile de jouer avec les prix sans que les gens s’en aperçoivent, finalement, mais nous pouvons quelque peu calculer l’impact de cette mesure.

Le sénateur Moreau : Mais est-ce qu’il y a une façon de mesurer, que ce soit chez les restaurateurs ou les autres commerçants visés par les mesures de réduction, si cet espace est occupé? Est-ce qu’il y a un outil qui nous permet de le voir? Pour conclure ma question, est-ce qu’on ne devrait pas prévoir dans la loi un mécanisme en cas de découverte de cette récupération, comme une modification à la loi?

M. Charlebois : Ce sont les lois du marché. Les restaurateurs vont profiter d’une manne, car il y aura carrément une manne. Il y aura un transfert entre le détail et le service. À l’heure actuelle, les Canadiens dépensent 36 % de leur budget alimentaire au restaurant. Cela risque d’augmenter pendant deux mois, j’imagine. Statistique Canada pourra nous le dire, en passant, sénateur. Chaque mois, avec l’IPC, on pourrait voir s’il y a eu une augmentation des prix en restauration pendant les mois de décembre, janvier et février.

Le président : Merci beaucoup.

[Traduction]

La sénatrice McBean : Monsieur Charlebois, par rapport aux questions d’insécurité alimentaire, vous avez affirmé qu’il est grand temps d’évaluer la possibilité de mettre en œuvre un revenu minimum garanti pour que tous les gens bénéficient d’une plus grande équité financière. Nous savons que les mesures temporaires du projet de loi C-78 combinées au chèque ponctuel de 250 $ coûteront plus de 6 milliards de dollars, et le directeur parlementaire du budget, ou DPB, évalue à 3 milliards de dollars le coût net annuel d’un revenu minimum garanti. La question qui se pose est la suivante : quels sont les avantages concrets et les économies concrètes en matière de résultats sanitaires, sociétaux, économiques et autres que nous pouvons nous attendre que les Canadiens les plus démunis obtiennent grâce à l’adoption du projet de loi C-78, comparativement à l’adoption d’une mesure telle que le revenu minimum garanti?

M. Charlebois : Sénatrice, je vous remercie de cette question. Personnellement, je suis favorable au revenu minimum garanti. Il serait important que le Canada examine cette option, au lieu de se contenter d’envoyer des chèques et de soumettre l’économie à un afflux de capitaux temporaires. Il est plus important de stabiliser l’économie en créant un apport constant et prévisible de revenus pour les ménages qui en ont besoin. Je préférerais certainement que l’on étudie la possibilité de mettre en œuvre un revenu minimum garanti.

La sénatrice McBean : Je vous remercie de vos réponses.

[Français]

Le président : Moi aussi, j’ai une question. Je l’ai posée hier à la ministre. Monsieur Charlebois, vous avez effleuré le sujet : qui a fait le choix de ces produits? Moi, je suis plutôt de l’idée qu’il faut un esprit sain dans un corps sain. Là, je me dis que c’est tout l’inverse ou presque : on parle de bonbons, de breuvages, de sodas et d’alcool. Quand on regarde les jouets, on a la copie de l’instrument de musique, mais pas l’instrument de musique. On a le soulier, mais pas le soulier de danse. On a un vêtement, mais pas le tutu. On n’a pas de patins à glace. Je trouve particulier qu’on ait choisi un jeu Nintendo pour un enfant plutôt qu’un livre à colorier; ce dernier est spécifiquement exclu.

J’aimerais vous entendre sur ces choix. Hier, en poussant avec les fonctionnaires, on a fini par comprendre que le gouvernement avait décidé et les fonctionnaires ne savaient pas trop sur quels critères s’était basé le gouvernement. J’aimerais vous entendre là-dessus.

M. Charlebois : Oui certainement. On comprend que c’est une mesure politique. Ce n’est pas une mesure fiscale bien réfléchie. Je suis d’accord avec le professeur Godbout là-dessus. Je ne m’en tiens qu’à l’alimentation avec mon travail.

Pour ce qui est de l’alimentation, c’est certain que beaucoup de gens dans le secteur se grattent la tête. Dans le fond, on encourage les gens à manger des croustilles, du chocolat et des choses comme cela. Le prêt à manger, par contre, c’est différent. Une salade César pour quatre personnes qui est taxée, c’est sûr qu’il y a des produits...

Je reviens à la réduflation. Je trouve que c’est un problème de taxation au détail. C’est sûr que c’est difficile à suivre, et c’est temporaire. En passant, cela se passe pendant la période noire de la distribution alimentaire. Du mois de novembre au mois de février, normalement, il y a un gel des prix en amont de la chaîne, mais avec le travail qu’on impose aux épiciers, on ajoute un fardeau incroyable. On parle de deux fois sur deux mois durant la période la plus occupée de l’année, car 40 % des profits des bannières se passent entre novembre et décembre. C’est sûr que le moment choisi n’est pas très bon, disons.

Le président : Merci.

M. Godbout : En ce qui concerne la liste, vous comprenez que si on n’a pas choisi de détaxer des produits sains, c’est parce qu’ils étaient déjà détaxés. On s’est confronté à un problème : « Ah! mais ce n’est déjà pas taxable, qu’est-ce qu’on fait? » Il a fallu ajouter des produits, comme du prêt à consommer — qui passe peut-être mieux —, mais on a ajouté des choses comme les boissons gazeuses et les croustilles. C’est inimaginable que cela ait été détaxé. Même chose pour la bière : il y a des taxes spécifiques sur la bière, alors pourquoi la détaxe-t-on? C’est pour cela que nous disons que la joute politique a prévalu sur les décisions économiques dans un tel contexte.

Le président : Par opposition aux équipements sportifs, culturels ou artistiques?

M. Godbout : C’est cela. Ce sont des choix. Si vous me dites qu’hier, la ministre a eu du mal à les défendre, j’aurai plus de difficulté à les expliquer qu’elle a eu du mal à les défendre. Cette sélection-là est évidemment politique.

[Traduction]

Le président : Monsieur Dodge, avez-vous quelque chose à ajouter à cela, ou est-ce que c’est bon?

M. Dodge : Non. Ce que j’ai dit, c’est qu’à mon avis, c’est une très mauvaise idée d’éroder l’assiette de la TPS, qui est le moyen fondamental dont le gouvernement dispose pour continuer à percevoir des recettes à l’avenir afin de financer ses programmes.

[Français]

Le sénateur Gignac : Merci à nos experts-témoins pour leur présence et l’éclairage qu’ils apportent.

Ce qui me perturbe un peu, c’est ce que vous avez souligné, messieurs Charlebois et Godbout, sur le plan de l’iniquité de cette décision fédérale unilatérale qui avantage les Canadiens différemment selon la province où ils habitent, alors que cinq d’entre elles l’ont suivie automatiquement sans même qu’on leur donne la permission.

Ma question s’adresse à M. Godbout. J’aimerais comprendre les implications à court terme ou à long terme sur Revenu Québec. On sait que Revenu Québec perçoit et administre la TPS au Québec.

Donc, à court terme, y aura-t-il des coûts supplémentaires? Quel est l’intérêt de Revenu Québec d’enquêter pour vérifier si les gens ont bien codé ou non pour la perte de revenus au gouvernement fédéral, étant donné que ça ne les touche pas?

À long terme, j’aimerais comprendre. C’est une entente de 2012 qui a été mise en place. S’il est entendu que le Québec n’est pas une succursale d’Ottawa, si le gouvernement fédéral s’amuse à tout bout de champ à changer l’assiette fiscale, est-ce que Québec pourrait décider de mettre fin à cette entente, surtout s’ils ne sont pas dédommagés?

M. Godbout : Il y a les ententes de TVH avec certaines provinces, et Québec en a une depuis le lendemain de l’Accord du lac Meech sur la perception de la TPS dans cette province. Selon cette entente, Revenu Québec s’engage à assurer la perception et la vérification adéquates de la loi, et ce, de manière uniforme.

Donc, lorsqu’ils entrent dans des entreprises, ils devront faire des vérifications pour voir si la TVQ et la TPS sont bien perçues. S’il y a des erreurs de perception, il faut normalement émettre un avis de cotisation et ensuite recotiser.

Encore une fois, pour ce qui est des détails sur le partage des coûts, il faudrait que je revoie l’entente comme telle. C’est plutôt du côté du contribuable qu’il faut se tourner pour se demander pourquoi le taux est réduit différemment d’une province à l’autre.

Lorsque vous parliez de l’entente de 2012, je rappelle que le Québec a harmonisé la TVQ à la TPS. Il aurait pu dire : « Je renonce à ma TVQ, je mets la loi aux poubelles et j’adhère à la TVH. » Dans ce cas-là, il se serait retrouvé avec un manque à gagner, comme l’Ontario et les provinces de l’Atlantique. Mais là, le Québec a dit qu’il gardait sa TVQ et qu’il ne serait pas affecté.

Le sénateur Gignac : Je m’excuse de vous interrompre. C’est la première fois depuis l’entente de 2012, depuis que le Québec s’est harmonisé, que le gouvernement fédéral va jouer dans l’assiette fiscale sans consulter au préalable le Québec, qui administre et perçoit la TPS. Est-ce que je me trompe?

M. Godbout : On pourrait regarder s’il y a eu des changements de part et d’autre à certains moments sur la détaxation de certains produits. C’était assez ciblé. Je ne me souviens pas en quelle année cela a été fait. Il y a eu des détaxations de produits hygiéniques, par exemple.

Chacun a sa loi, donc on peut le faire d’une loi à l’autre. À partir du moment où l’on décide d’uniformiser, si l’on dit qu’on n’a plus de loi et qu’on adhère à la loi fédérale — les provinces de l’Atlantique et l’Ontario ont renoncé à leur autonomie fiscale en échange d’une harmonisation. Le Québec s’est harmonisé, il n’a pas renoncé à son autonomie fiscale, mais cela vient avec une loi en parallèle.

La sénatrice Moncion : Ma question porte sur l’invisibilité de l’utilisation du crédit d’impôt dont vous parliez, par exemple, sur la TPS et la TVH, ainsi que sur l’invisibilité de la mesure, par exemple, pour l’incitatif sur le carbone.

Ce sont des mesures invisibles, ou à peu près, pour les Canadiens, alors qu’en parlant de congé de TPS sur certains articles, on fait peut-être un coup d’éclat. J’aimerais vous entendre sur cet élément.

M. Godbout : En matière d’élaboration de politique fiscale, on doit essayer d’exclure les coups d’éclat pour prendre de bonnes décisions économiques et budgétaires à long terme.

Il n’y a rien de structurant dans ce congé. On ne sait pas qui va en profiter ni à quel niveau. Les gens sont contents d’entendre qu’il y a un congé de TPS, mais ils ne savent pas combien d’argent cela remettra dans leurs poches. Je ne suis pas sûr que le Québécois est conscient qu’il en aura moins que l’Ontarien, car le taux du congé est différent.

La sénatrice Moncion : En général, on s’entend pour dire que les gens qui connaissent bien le milieu auront davantage un meilleur équilibre mental pour faire ces calculs.

M. Godbout : Les gouvernants, ceux qui nous dirigent, devraient avoir cette volonté du bien commun, adopter des politiques budgétaires éclairantes et écouter les conseils de l’administration fiscale ou les gens du ministère des Finances, qui ne doivent pas être très chauds à cette idée. Ce ne sont que des supputations, car je n’ai pas eu de discussion avec eux.

Le président : Merci aux témoins de leur disponibilité malgré un si court délai. La question demeure : est-ce que l’arbre de Noël qui est à côté de M. Godbout est taxable ou non?

Merci beaucoup. On va suspendre la séance deux minutes pour faire place aux prochains témoins. Merci et bonne fin de voyage.

M. Charlebois : Merci et au revoir.

Le président : Merci de prendre place pour la suite de nos travaux sur l’étude du projet de loi C-78. Nous avons actuellement, pour le deuxième groupe de témoins, M. Yves Giroux, directeur parlementaire du budget, qui est accompagné de Jason Stanton, conseiller-analyste. Bienvenue, monsieur Giroux. La parole est à vous pour vos remarques liminaires, puis nous passerons aux questions.

Yves Giroux, directeur parlementaire du budget, Bureau du directeur parlementaire du budget : Honorables sénatrices et sénateurs, je vous remercie de l’invitation à comparaître aujourd’hui.

Nous sommes heureux d’être ici, et je le dis sincèrement, dans le cadre de votre étude du projet de loi C-78, Loi concernant l’allègement temporaire du coût de la vie.

Je suis accompagné aujourd’hui de Jason Stanton, conseiller-analyste, qui a travaillé et travaille encore sur cette question.

Comme vous le savez, le projet de loi C-78 présente des modifications à la Loi sur la taxe d’accise afin de mettre en œuvre un congé temporaire de TPS/TVH pour les Fêtes entre le 14 décembre 2024 et le 15 février 2025.

La liste proposée des articles exonérés comprend certains produits d’épicerie, repas au restaurant, boissons, collations, vêtements pour enfants et cadeaux — et ce qui me tient particulièrement à cœur, les croustilles.

Nous estimons que cette mesure réduira les recettes fédérales de 1,5 milliard de dollars au cours du présent exercice, soit celui de 2024-2025.

[Traduction]

Nous avons également examiné l’incidence que le projet de loi C-78 pourrait avoir sur la compensation que le gouvernement fédéral devra verser aux gouvernements provinciaux qui perçoivent la taxe de vente harmonisée, ou TVH, en vertu de leurs ententes intégrées globales de coordination fiscale respectives. Ces gouvernements provinciaux sont ceux de l’Ontario, de Terre-Neuve-et-Labrador, de l’Île-du-Prince-Édouard, de la Nouvelle-Écosse et du Nouveau-Brunswick. Si ces provinces ne renoncent pas à la compensation requise en vertu de ces ententes, nous estimons que les coûts que cette mesure occasionnerait au gouvernement fédéral augmenteraient de 1,3 milliard de dollars.

M. Stanton et moi-même nous ferons un plaisir de répondre à toutes les questions que vous pourriez avoir concernant notre estimation des coûts du projet de loi C-78.

Je vous remercie de votre attention.

[Français]

Le président : Merci beaucoup, monsieur Giroux.

Le sénateur Forest : Merci d’être ici. Croyez-vous que la réduction temporaire de la TPS pourrait avoir un effet inflationniste à court terme?

L’analyste que l’on vient d’entendre, M. Sylvain Charlebois, donne l’exemple de la réduction de la TPS, qui est passée de 7 à 6 % en 2006, puis de 6 % à 5 % en 2008. Il semble que le prix à la consommation a paradoxalement augmenté.

Selon vous, est-ce que cette mesure pourrait avoir un effet pervers où les gens iraient chercher de l’espace et, par la suite, cet espace resterait vacant, donc on paierait encore plus cher nos produits?

M. Giroux : On n’a pas fait d’analyse économétrique raffinée là-dessus. Par contre, je peux dire que c’est une exemption temporaire sur une liste de produits qui est assez limitée. Donc, si jamais il y avait un effet inflationniste par l’entremise d’un accroissement des dépenses et de l’activité économique, il serait de toute façon temporaire par définition, mais il serait aussi contre-balancé par la réduction de la TPS sur ces produits.

Donc, il n’est pas clair pour moi que cette mesure ait un effet inflationniste indéniable.

Pour ce qui est de l’autre aspect du plan gouvernemental, les chèques de 250 $, son impact est un peu plus facile à déterminer, du moins qualitativement, mais pour l’allègement de la TPS pour certains produits, c’est loin d’être clair pour moi.

Le sénateur Forest : Ce qui me paraît un peu préoccupant, c’est que la ministre nous a répété hier, et je pense qu’il faut la croire, que son objectif était de laisser plus d’argent dans les poches des Canadiens et Canadiennes après la période des Fêtes.

Ce que je trouve paradoxal, c’est que pour que les gens aient plus d’argent dans leurs poches, il faut qu’ils dépensent plus. Ça me rappelle un peu l’époque où les municipalités devaient profiter des programmes d’infrastructure, mais pour en profiter, il fallait augmenter notre endettement, parce qu’il fallait réaliser des travaux. Il me semble qu’il y a une incohérence entre l’objectif de laisser plus d’argent et le chemin pour y arriver.

M. Giroux : Je comprends votre point de vue, mais dans la mesure où l’on a des consommateurs qui, comme la plupart d’entre nous, devront engager certaines dépenses dans le temps des Fêtes pour s’acheter divers biens, par exemple, cela va entraîner des économies et laisser plus d’argent dans les poches des gens qui avaient, de toute façon, prévu de s’acheter de l’alcool, d’aller au restaurant, et cetera. Oui, cela va laisser plus d’argent dans les poches des gens pour les dépenses qu’ils avaient déjà prévu de faire. Mais si quelqu’un voulait, par exemple, maximiser la valeur de l’exemption de TPS en dépensant plus, en se disant :« J’en profite, je ne paie pas de TPS », là, c’est sûr que c’est tout à fait contre-productif.

Le sénateur Smith : Bonjour et bienvenue, monsieur Giroux.

[Traduction]

En défendant hier le projet de loi C-78, la ministre des Finances a répondu aux critiques selon lesquelles des mesures à court terme comme celle-ci ne font qu’exacerber les problèmes à long terme. La ministre a déclaré à notre comité que le gouvernement met en œuvre une stratégie fiscale globale qui donne la priorité à la croissance et à la productivité. Elle a cité en exemple des initiatives telles que les investissements dans l’énergie propre.

Compte tenu de votre rôle d’analyste des politiques fiscales du gouvernement, pensez-vous que les politiques fiscales globales du gouvernement contribuent à accroître la productivité à long terme? Le projet de loi C-78 a-t-il un effet négatif sur cet objectif à long terme?

M. Giroux : Je ne crois pas que le projet de loi C-78 soit un instrument qui permet d’accroître la productivité. Il est clairement axé sur la consommation et son objectif déclaré est de rendre la vie des Canadiens plus abordable en ce qui concerne leurs dépenses de consommation. Le projet de loi ne fait rien pour améliorer la productivité. Son coût est estimé à 1,5 milliard de dollars, auxquels pourraient s’ajouter 1,3 milliard de dollars si les provinces exercent les droits que leur confèrent les accords de perception fiscale.

Le projet de loi exercera des pressions supplémentaires sur les finances du gouvernement fédéral de l’ordre d’au moins 1,5 milliard de dollars et potentiellement de 2,8 milliards de dollars si toutes les provinces reçoivent la compensation à laquelle elles ont droit en vertu des accords de perception fiscale, qui sont tout à fait clairs à cet égard.

Le sénateur Smith : Étant donné que les comptes publics pour 2023-2024 n’ont pas encore été déposés, ce qui empêche le Parlement de bien comprendre l’ampleur du déficit actuel, comment envisagez-vous la transparence et la responsabilisation dans le cadre de l’approbation de mesures de dépenses supplémentaires prévues en vertu du projet de loi C-78? Ce retard devrait-il nous préoccuper pendant notre évaluation de la situation financière du gouvernement?

M. Giroux : C’est en effet une source d’inquiétude parce que, si l’on examine le passé — en excluant l’année 2020 qui était une année de pandémie, et les années électorales où les élections ont eu lieu à l’automne ou à la fin de l’été —, on constate que 2024 est l’année récente où les comptes publics ont été déposés le plus tard, et de loin.

Cela vous place, vous les législateurs, dans la position très inconfortable d’approuver des dépenses dans le cadre du Budget principal des dépenses, de budgets supplémentaires des dépenses et maintenant de mesures particulières sans avoir une idée du déficit qui a été enregistré pour l’année qui s’est achevée en mars, c’est-à-dire il y a plus de huit mois. Et collectivement, nous ne savons toujours pas quel était le déficit pour cette année-là, ce qui est inquiétant.

[Français]

Le sénateur Dalphond : Merci, monsieur Giroux. Je comprends que vous en êtes encore à faire de petits calculs. Je vais vous poser des questions pour mieux comprendre vos chiffres.

Vous avez parlé d’un coût direct de 1,5 milliard de dollars. Est-ce que cela tient compte, par exemple, des retombées qui peuvent être positives? Par exemple, les associations des restaurateurs nous ont dit qu’ils estimaient, d’après leurs économistes, qu’ils auraient 1,5 milliard de dollars de plus de ventes, ce qui va faire travailler des gens. Les gens qui vont au restaurant, chez St-Hubert ou Pizza Hut, laissent des pourboires. S’il y a 1,5 milliard de dollars de plus, il y a 10 % ou 150 millions de dollars de pourboires de plus au moins, peut-être même 300 millions de dollars de pourboires. Ces pourboires sont taxables.

Il y a aussi des employés qui vont travailler des heures supplémentaires sur lesquelles ils seront taxés sur le salaire qu’ils vont gagner. Des gens qui livrent des produits achetés pour être vendus vont faire du travail supplémentaire.

Est-ce qu’on tient compte des avantages de cette augmentation de la consommation, qui va aussi générer des incidences fiscales?

M. Giroux : C’est une question intéressante, qui rejoint la question de votre collègue le sénateur Forest.

On a considéré cette possibilité. Aux États-Unis, il y a une pratique dont je n’étais pas au courant, où il y a des congés de taxes pour des périodes assez limitées, par exemple, pour des week-ends sans taxes d’État.

La Réserve fédérale américaine s’est penchée sur l’impact de ces congés. Ils ont trouvé qu’il n’y avait pas d’accroissement de la consommation directe, mais plutôt un déplacement. Il n’y a pas beaucoup de transferts d’un État à l’autre de nouvelles activités économiques.

Ils ont plutôt observé qu’on retarde un peu certaines dépenses et qu’on fait des provisions avant l’expiration de la mesure quand on sait d’avance que la mesure va entrer en vigueur.

Vous pouvez imaginer que les gens vont peut-être acheter un peu plus d’alcool ou de croustilles, dans mon cas, ou retarder les achats pour profiter de l’exemption de taxes. Il n’y a pas vraiment de nouvelles activités économiques qui sont générées, du moins pas de façon mesurable et significative.

Le sénateur Dalphond : Lorsqu’on parle de déplacement de l’argent pour la consommation, au lieu d’acheter à l’épicerie, on va aller au restaurant. À l’épicerie, on ne paie pas de pourboire, par exemple. Ce n’est pas tout à fait la même chose que le week-end de congé fiscal.

Est-ce que vous pouvez nous donner un tableau? Vous parlez de 1,3 milliard de dollars avec les cinq provinces qui ont une entente. Est-ce qu’on peut avoir une répartition par province?

Le sénateur Downe a parlé hier de 14 millions de dollars pour l’Île-du-Prince-Édouard et la sénatrice Ross a parlé de 63 millions de dollars pour le Nouveau-Brunswick. Est-ce à peu près les mêmes chiffres que vous avez? Est-ce qu’on peut avoir le tableau? Pour les quatre autres provinces, il devra y avoir des discussions, mais pour les cinq provinces, est-ce qu’on peut avoir le détail par province, si vous l’avez déjà?

M. Giroux : Oui. Pour les provinces qui ont été mentionnées, je crois que c’est pour l’Île-du-Prince-Édouard et le Nouveau-Brunswick, on est à peu près dans les mêmes eaux. En ce qui concerne l’Ontario, évidemment, étant donné sa taille, on est autour d’un milliard de dollars. Pour la Nouvelle-Écosse, on est autour de 90 millions de dollars et pour Terre-Neuve-et-Labrador, on est dans les 60 millions de dollars. Je vois que mon collègue est un peu mal à l’aise que je donne ces chiffres, puisque ce sont des estimations de données imparfaites. Étant donné que les biens détaxés ou exemptés sont très spécifiques, on n’a pas les détails à ce sujet. On les a, par exemple, étonnamment, pour les arbres de Noël, mais pas pour certains autres biens. Ce sont des estimations. Les ordres de grandeur sont exacts, mais pour avoir les chiffres précis, cela va dépendre, étant donné l’imprécision de certaines données.

Le sénateur Loffreda : Merci, monsieur Giroux.

[Traduction]

Je vous remercie, monsieur Stanton, de vous être joint à nous. C’est toujours un plaisir de vous recevoir, vous et vos collègues. Nous avons eu la chance d’entendre M. Dodge, et j’ai posé la question suivante.

À l’instar de nombreux économistes, la Direction des études économiques de la Banque de Montréal prévoit que le PIB augmentera en passant de 1,7 % à 2,5 %. Au Canada, nous avons besoin de productivité, mais vous avez indiqué que les mesures n’engendreraient pas une nouvelle activité économique. Alors, j’ai posé la question suivante : Pourquoi? Pourquoi ne faisons-nous pas d’investissements à long terme, au lieu d’investissements à court terme qui sont temporaires?

Je sais que vous ne vous occupez pas des politiques, mais pour défendre cette politique, il fait valoir qu’elle est temporaire. Nous donnons aux Canadiens un répit bien nécessaire, car nous entendons parler des banques alimentaires et des sans-abri, mais les investissements — et il aimerait voir des investissements à long terme — sont permanents. Il a dit que le projet de loi démontrait à la fois un manque de créativité et un manque de capacité financière. Je sais que vous êtes l’expert en matière de capacité financière. Vous pourriez peut-être nous dire quelques mots à ce sujet et au sujet de l’augmentation du PIB. Est-il réaliste de faire ces projections, compte tenu de votre déclaration selon laquelle aucune nouvelle activité économique ne sera créée? D’après les économistes, il y en aura pendant le premier trimestre.

M. Giroux : Il est tout à fait possible que la Réserve fédérale se soit trompée lorsqu’elle a estimé les répercussions économiques qu’un congé de taxe de vente pourrait avoir dans certains États, une mesure que M. Stanton a portée à mon attention. Je ne savais pas qu’elle existait, et certainement pas au point d’être suffisamment répandue pour que la Réserve fédérale l’étudie. Il est tout à fait possible que cette mesure crée une nouvelle activité économique. Toutefois, dans le secteur de la consommation, certains biens sont produits à l’échelle nationale, alors que d’autres sont importés. Par exemple, les consoles de jeu, comme la PlayStation, ne sont pas produites dans notre pays.

Le sénateur Loffreda : Je pourrais moi-même acheter une PlayStation.

M. Giroux : J’espère que vous ne l’utiliserez pas au cours de mon témoignage devant le Comité sénatorial permanent des finances nationales.

Il est possible que cela crée un accroissement de l’activité économique, mais nous croyons qu’il est possible et probable que cela causera un déplacement des dépenses de consommation. Tout cela pour dire que la capacité financière est un aspect important.

Vous m’avez demandé ce que je pensais de la capacité financière du gouvernement. Nous avons publié cet été notre rapport sur la viabilité financière, qui indique que, dans le cadre des politiques actuelles et des hypothèses démographiques, la situation financière au Canada est viable. Le gouvernement fédéral pourrait dépenser davantage ou abaisser les impôts, ou les deux, et demeurer viable au cours des 75 prochaines années. Le Canada a-t-il donc la capacité financière d’investir davantage? La réponse est « oui ». Est-ce souhaitable? Je ne suis pas ici pour donner des conseils, tout comme je ne suis pas ici pour formuler des observations sur la pertinence du projet de loi C-78.

Le sénateur Loffreda : Je vous remercie beaucoup de vos réponses; je vous en suis très reconnaissant.

La sénatrice MacAdam : La plupart de mes questions ont déjà été posées. Je suis préoccupée par le dépôt des comptes publics et l’incidence que ces mesures auront sur les provinces qui ont harmonisé leur taxe de vente, et nous avons effectivement parlé un peu de ce scénario. Il y a une autre question au sujet de laquelle j’aimerais obtenir vos commentaires.

L’organisation Comptables professionnels agréés du Canada, ou CPA Canada, a récemment déclaré ce qui suit :

L’utilisation d’une politique fiscale pour atteindre des objectifs sociaux n’a rien de nouveau...

La modification temporaire de la TPS alourdit le fardeau des entreprises, surtout celles de petite et de moyenne taille, sans s’attaquer au coût de la vie, cause profonde des difficultés que rencontrent les Canadiens.

Ce message a également été repris par certains témoins du comité. Je me demande simplement si vous avez des commentaires à ce sujet.

M. Giroux : Ce n’est pas un aspect que nous avons étudié, mais il est clair que, compte tenu de la façon dont les systèmes de points de vente sont configurés, il faudra que des milliers d’entreprises réorganisent et recodent les systèmes de points de vente, ce qui occasionnera des coûts. Je ne peux pas me prononcer sur l’ampleur des coûts que chaque entreprise devra assumer, mais, oui, c’est un problème. D’autres organismes comme CPA Canada ou la Chambre de commerce du Canada sont bien mieux placés que nous pour se prononcer sur cet aspect particulier de l’enjeu.

La sénatrice MacAdam : Je vous remercie de vos réponses.

La sénatrice Kingston : Je tenais à dire que les croustilles Tempête et leur concept sont nés au Nouveau-Brunswick. Si vous aimez les croustilles, les croustilles Tempête sont excellentes en hiver.

Ma question porte sur la compensation des provinces. Je viens du Nouveau-Brunswick. Au Nouveau-Brunswick, une mesure a déjà été mise en place dans le cadre du discours du Trône, afin de fournir l’équivalent d’un remboursement de la TVH pour les factures d’électricité. À l’époque, étant donné qu’il s’agissait d’une promesse électorale, le gouvernement a déclaré qu’il allait procéder d’une autre manière, en raison des négociations avec le gouvernement fédéral qui auraient été nécessaires.

Nous parlons de compensations, et vous parlez peut-être de pommes et d’oranges. Pouvez-vous me dire comment ces types de compensations ont été gérés dans le passé?

M. Giroux : Je ne sais pas si une compensation a été versée dans le passé, sauf pour l’adhésion initiale au cadre de la TVH dans les provinces. Je dirai cependant que les ententes intégrées globales de coordination fiscale, ou EIGCF, comme nous aimons les appeler dans le jargon des fonctionnaires, contiennent des dispositions qui permettent aux provinces de s’écarter de l’assiette fiscale jusqu’à concurrence de 5 %, afin d’avoir une assiette fiscale différente. Si ma mémoire est bonne, les provinces peuvent s’en écarter jusqu’à concurrence de 5 %.

Dans le cas du Nouveau-Brunswick et de l’exemption de la TVH pour les factures d’électricité, je ne sais pas si cet écart serait inférieur ou légèrement supérieur au seuil de 5 %. C’est une question à laquelle les fonctionnaires du Nouveau-Brunswick et les fonctionnaires du ministère des Finances seraient en mesure de répondre.

En ce qui concerne les changements qui déclenchent une compensation, je précise que, dès que le gouvernement fédéral apporte un changement qui réduirait les recettes provinciales de 1 % ou plus, il doit fournir une compensation — les EIGCF sont très claires à ce sujet —, à moins que la province ne renonce explicitement à son droit d’obtenir une telle compensation. Dans le cas du projet de loi C-78, selon nos calculs, la réduction des recettes dépasserait nettement le seuil de 1 % dans chacune des cinq provinces harmonisées.

La sénatrice Kingston : Je vous remercie beaucoup de vos réponses.

La sénatrice Ross : Je vous remercie tous les deux d’être présents aujourd’hui. Je voudrais également poser une question concernant la partie provinciale de l’adoption de ce projet de loi.

Tout d’abord, pourriez-vous confirmer le chiffre que vous avez pour le Nouveau-Brunswick? Je pense que c’est moi qui ai mentionné le chiffre en question, alors quel est le chiffre que vous avez?

M. Giroux : C’est à peu près la même chose. Je crois que nous avons calculé 70 millions de dollars pour le Nouveau-Brunswick. Vos 62 millions de dollars sont donc à peu près pareils. Je dois dire que M. Stanton m’a averti de ne pas citer de chiffre précis, mais vous m’avez posé la question.

La sénatrice Ross : Vous avez parlé de la possibilité pour les provinces de renoncer à leur droit d’obtenir une compensation. À votre avis, serait-il logique que les provinces le fassent? Pourquoi le feraient-elles?

M. Giroux : C’est une bonne question. L’Ontario laisserait tomber un milliard de dollars? Il est possible que la province le fasse, mais je ne saurais dire pourquoi.

La sénatrice Ross : J’ai lu l’entente entre le Nouveau-Brunswick et le gouvernement fédéral. Il est très clair qu’ils doivent être consultés à l’avance, sinon ils ont droit à une compensation si la réduction des recettes est supérieure à 1 %.

M. Giroux : Oui.

La sénatrice Ross : Je ne vois pas pourquoi un gouvernement laisserait tomber cet argent.

M. Giroux : Cela pourrait faire partie d’une discussion entre les différents ordres de gouvernement. À ce stade, cela s’inscrit dans le cadre d’une dynamique liée aux relations entre le gouvernement fédéral et les provinces, et je ne suis pas dans le secret de ces relations. Ce que je peux dire, c’est que les ententes sont très claires.

La sénatrice Ross : Je vous remercie de vos réponses.

La sénatrice McBean : Le directeur parlementaire du budget, ou DPB, a évalué le coût annuel net du revenu minimum garanti à environ trois milliards de dollars. Nous savons que les mesures temporaires du projet de loi C-78, combinées au chèque ponctuel de 250 $, coûteront plus de 6 milliards de dollars.

Pour ce qui est d’aider les personnes les plus démunies à sortir de la pauvreté, quelle incidence à long terme attendez-vous des approches adoptées dans le projet de loi C-78, comparativement à une mesure comme le revenu minimum garanti?

M. Giroux : Eh bien, je pense qu’un revenu de base garanti présente un autre point de vue ou un autre objectif que le congé de TPS et de TVH, qui est d’application générale. Règle générale, plus on consomme, plus on profite du projet de loi C-78, tandis qu’avec le revenu de base, c’est tout à fait l’opposé. Les ménages à faible revenu en profitent plus, et ceux qui ont des revenus moyens ou élevés ne profitent pas du revenu de base garanti, de par la nature de cette mesure.

Ce sont deux instruments très différents avec des objectifs politiques différents, le projet de loi C-78 étant d’application très générale. Si l’on achète un vin dispendieux, on pourrait bénéficier bien davantage du congé de TPS que si l’on achète un sac de croustilles, par exemple.

La sénatrice McBean : Merci beaucoup.

[Français]

Le président : J’ai une question sur les autres provinces. Monsieur Giroux, vous avez parlé de l’entente; cela va bien, c’est prévu. Cependant, pour le Québec, ce sont eux qui administrent la TPS, donc, il y a tout un changement dans l’administration et dans la perception; pour les fonctionnaires, cela génère du travail supplémentaire. Il y a un coût pour ces gens, pour la province et pour les commerçants qui doivent administrer cette taxe. Est-ce que vous avez fait des calculs concernant les coûts indirects — je dis que c’est indirect, mais c’est presque direct — engendrés par la mise en place de cette politique?

M. Giroux : Nous n’avons pas estimé les coûts pour les commerçants et les détaillants ni les coûts additionnels potentiels pour l’administration de la TPS pour le gouvernement du Québec, qui la perçoit au Québec au nom du gouvernement fédéral. Il est fort probable qu’il y aura des coûts additionnels, comme les témoins précédents l’ont mentionné, pour faire des vérifications, par exemple. Il y aura une période de deux mois où certains produits seront détaxés pour la TPS, mais pas pour la TVQ au Québec.

En ce qui concerne les autres provinces qui ne sont pas harmonisées et qui ont une taxe de vente, il n’y aura pas d’impact pour les administrations provinciales; il y en aura partout au pays pour les commerçants, mais on n’a pas estimé ces coûts.

Le président : Donc, vous n’avez aucune idée de l’ordre de grandeur?

M. Giroux : Non, et on n’est pas bien outillé pour avoir une idée des coûts pour les commerçants, étant donné que ce sont des coûts pour le secteur privé. Donc, les autres groupes sont en meilleure posture pour les estimer.

Le président : En ce qui concerne le gouvernement canadien et les coûts supplémentaires liés à la mise en place de cette mesure, on a parlé de la gestion et des centres d’appels. Selon ce que l’on a compris hier des témoignages, l’ARC s’attend à recevoir et reçoit déjà des appels, et elle semble sous-entendre qu’elle n’a pas les ressources ni les budgets requis pour répondre à ces appels. Je ne sais pas si j’ai bien saisi l’ampleur du problème. Avez-vous évalué ces coûts supplémentaires pour la mise en place de cette politique?

M. Giroux : Non, on n’a pas cette estimation. En général, on n’a pas de données ni d’expérience assez significatives pour estimer les coûts d’administration pour des changements temporaires comme ceux-là. C’est sûr qu’il y aura des coûts pour les centres d’appels et certains systèmes, mais il y a une certaine flexibilité à l’Agence du revenu en ce qui concerne les vérifications. Par exemple, si les vérifications sont plus complexes, ils en feront un peu moins ou ils pourront décider de maintenir le même niveau de vérification en demandant des ressources additionnelles. L’Agence du revenu serait en meilleure position pour répondre à ces questions.

Le président : Merci.

Le sénateur Gignac : Bienvenue, monsieur Giroux; c’est toujours un plaisir de vous retrouver. Vous suivez les finances publiques depuis plusieurs années, voire des décennies, et vous êtes un expert en fiscalité; à votre connaissance, est-ce la première fois que le fédéral va jouer dans l’assiette fiscale et dans les produits à ce point depuis qu’il y a une harmonisation avec cinq provinces? Le taux, ça va, ce n’est pas très compliqué; s’il y a une baisse de taux, cela affecte seulement le fédéral, mais si on modifie l’assiette fiscale, cela affecte les provinces qui se sont harmonisées et cela affecte le fédéral.

À part la pandémie, est-ce la première fois qu’on va jouer dans l’assiette fiscale et qu’on introduit le concept d’âge? C’est la première fois que je vois cela. Je suis curieux d’avoir votre réponse à sujet.

M. Giroux : À ma connaissance — mais étant donné l’âge que j’ai, c’est possible que ma mémoire me fasse défaut —, et à ce niveau important qui engendrerait le seuil du 1 %, oui, c’est la première fois depuis le régime de taxe de vente harmonisée.

Le sénateur Gignac : On comprend que le gouvernement est bien intentionné et qu’il veut aider les Canadiens qui ont subi une hausse du coût de la vie de 23 ou 28 %, selon l’endroit où ils vivent, et cela vient évidemment réduire la facture. Cependant, cela amène des distorsions, et on en a parlé dans la région de Gatineau depuis deux ou trois jours. Si le gouvernement avait décidé de réduire la TPS de 1 % sur tout au lieu de la supprimer sur certaines choses... Dans le fond, c’est 4,5 milliards de dollars par mois, sauf erreur, que le fédéral touche grâce à la TPS. Si on réduisait de 1 %, cela coûterait environ 1 milliard de dollars, mais cette nouvelle mesure coûtera 800 millions de dollars par mois, donc on n’est pas très loin des 800 millions par mois si on coupe la TPS de 1 % pour un mois pour le temps des Fêtes.

Quels auraient été les avantages et les inconvénients de choisir cette approche beaucoup plus simple? Elle n’aurait pas eu d’impact sur les provinces, tandis qu’en ce moment, on va jouer dans l’assiette fiscale et cela crée des distorsions; les Canadiens sont plus avantagés selon leur province de résidence. Si vous aviez été un proche conseiller de la ministre, auriez-vous opté pour la suggestion de la réduction de 1 % de la TPS ou auriez-vous opté pour le choix de la ministre?

M. Giroux : C’est difficile pour moi de dire lequel est le plus désirable, car cela dépend de l’objectif qui est recherché. L’exemple que vous mentionnez, soit réduire la TPS de 1 % pendant deux mois, c’est un allègement du fardeau fiscal général, donc on ne cible pas d’éléments particuliers. Par contre, si on veut cibler des dépenses typiques du temps des Fêtes, on manque le bateau avec cela et cela donne des cadeaux aux gens qui achètent des cadeaux.

Dans le cas d’une réduction de taxe pour des gens qui s’achèteraient un véhicule, par exemple, ce n’est pas lié au temps des Fêtes, donc l’objectif n’est pas le même. L’un des risques avec une baisse de la TPS, comme on l’a vu par le passé avec les changements permanents, c’est que les provinces utilisent cet espace et l’occupent. Quand la TPS est passée de 7 % à 5 %, certaines provinces en ont profité pour augmenter leur taxe de vente et récupérer cet espace fiscal. Donc, c’est possible que cela se produise.

Le sénateur Gignac : Si j’interprète bien votre réaction, même si nous sommes tous surpris et que nous ne sommes pas toujours tout à fait à l’aise avec cette mesure à cause des distorsions que cela crée, notamment les problèmes administratifs et les coûts pour les commerçants, si l’on souhaite vraiment toucher les Canadiens à plus faible revenu ou à moindre revenu de façon ciblée, cette mesure est préférable à une réduction de 1 %. C’est ce que je comprends.

M. Giroux : Ce n’est pas ce que j’ai dit; je n’essaie pas de faire de recommandations ou de dire quelle mesure est la meilleure. Chaque mesure a ses objectifs qui lui sont propres dans l’exemple que vous mentionnez. Chacune a des inconvénients et des avantages; cela dépend des objectifs en matière de politique publique et je ne me prononcerai pas sur les meilleurs objectifs ou les moins mauvais.

Le sénateur Gignac : C’est sage de me reprendre.

Le sénateur Moreau : J’aimerais revenir sur un sujet qu’a soulevé la sénatrice Ross sur la question de la compensation. Vous semblez avoir analysé en détail les ententes entre le gouvernement fédéral et les provinces qui ont choisi la taxe harmonisée. Ce que je ne saisis pas dans le calcul de votre montant, soit l’élément déclencheur, c’est le 1 %; est-ce exact? Lorsque l’élément déclencheur est arrivé, quel est le niveau de compensation? Est-elle totale ou n’est-elle qu’au-delà de 1 %?

M. Giroux : Ma compréhension, c’est que la compensation est pour le montant total. Il n’y a pas de 1 % gratuit. Si l’on dépense le 1 %, on compense pour la perte.

Le sénateur Moreau : Alors, c’est 100 % de la perte. Selon les ententes, la sénatrice Ross semble dire que les provinces doivent être consultées; ce n’est pas certain, mais la ministre a dit qu’elle avait eu des conversations avec tout le monde. On ne sait trop si les provinces ont été consultées. Si on présume qu’elles n’ont pas été consultées ou si elles estiment ne pas avoir été consultées, selon les ententes, pour ne pas être compensées, est-ce qu’elles doivent poser un geste positif et renoncer? Ou alors, elles ont droit à la compensation sans même avoir renoncé?

[Traduction]

Jason Stanton, conseiller-analyste, Bureau du directeur parlementaire du budget : Merci de cette question. Selon notre compréhension des conventions fiscales, si les pertes de revenus excèdent 1 %, la province est admissible. C’est seulement si elle décidait de ne pas recevoir une compensation qu’elle ne la recevrait pas.

Le sénateur Moreau : Elle devrait renoncer à cette compensation pour ne pas la recevoir?

M. Stanton : Oui. D’après notre compréhension, il faudrait que la province reconnaisse officiellement qu’elle renonce aux revenus qui lui sont dus.

[Français]

Le sénateur Moreau : Le montant que vous calculez est basé sur le fait qu’elles n’auraient pas renoncé — qu’aucune d’entre elles n’aurait renoncé?

M. Giroux : Exactement, parce que nous ne sommes pas au courant. Nous n’avons pas vu de communication explicite; il y a eu des commentaires dans les médias, mais pas de communication officielle des provinces au gouvernement fédéral pour dire explicitement qu’elles renonçaient à la compensation à laquelle elles ont droit en vertu des ententes de perception.

Le sénateur Moreau : Selon les ententes, pourriez-vous dire au comité quelle forme devrait prendre cette renonciation? Est-ce une décision, un décret du Conseil des ministres de la province? Quelle est la forme que doit prendre la renonciation?

M. Giroux : Je ne sais pas quelle est la forme exacte; je sais que les ententes ont été faites entre le ministre des Finances fédéral et ses homologues provinciaux à l’époque, et ma compréhension est que le ministre des Finances de chaque province doit écrire une lettre formelle pour dire au gouvernement fédéral qu’il renonce à la compensation qui serait autrement payable à la province de l’Ontario, par exemple, en vertu de l’entente en raison du changement inclus dans le projet de loi C-78.

Le sénateur Moreau : Généralement, les ententes fédérales-provinciales nomment un ministre responsable dans chacune des provinces; êtes-vous certain que c’est le ministre des Finances dans chacune des provinces qui est responsable de l’application de l’entente?

M. Giroux : J’ai regardé celle de l’Ontario juste avant la réunion du comité et c’est le ministre des Finances de l’Ontario dans ce cas.

Le sénateur Moreau : Qui représente la province aux fins de l’entente.

M. Giroux : Exactement. Sur la question de savoir si la province a besoin d’un décret, cela dépend de la gouvernance de chaque province. Pour un montant d’un milliard de dollars, je m’attendrais à ce que le premier ministre donne des instructions au ministre des Finances.

Le sénateur Moreau : Si le ministre des Finances signe la lettre, on présume qu’il a reçu l’instruction.

M. Giroux : Ça pourrait être quelque chose qui limite les possibilités de carrière futures d’un ministre.

Le sénateur Moreau : Oui. Il pourrait retourner manger ses croustilles rapidement.

Le président : Cette série de questions me mène à une autre. Si le gouvernement fédéral décide de donner un milliard de dollars à l’Ontario pour compenser le manque à gagner, ce montant génère d’autres effets. Il vient du fond général, et c’est l’ensemble des Canadiens qui paient la réduction de taxes que les Ontariens ont eue, en plus d’avoir un effet pervers où les commerçants de Gatineau auront une fuite de consommation vers Ottawa?

M. Giroux : C’est une possibilité, mais on suppose que les provinces n’ont pas renoncé à leur droit à la compensation. Or, il est fort possible que la ministre des Finances ou d’autres ministres d’influence au gouvernement aient eu des discussions avec leurs homologues provinciaux et qu’il y ait une entente tacite qui sera formalisée au cours des prochaines semaines afin que ces provinces fassent une renonciation. Je ne suis pas au courant s’il y a eu des discussions ou non. Je vous parle de ce que les ententes de perception fiscale prévoient en matière de compensation, et selon nous, les seuils pour entraîner cette compensation seront atteints en vertu du projet de loi C-78.

Le président : Ce serait un double effet négatif pour certaines provinces.

M. Giroux : C’est une possibilité bien réelle, selon ce que l’on comprend du projet de loi.

Le président : Pouvez-vous être encore avec nous pour une quinzaine de minutes?

La sénatrice Moncion : Dans la même série de questions, si l’on tient compte de la probabilité que les seuils dépassent 1 % et qu’il y a une probabilité de compensation du gouvernement, une province qui n’embarquerait pas dans le projet serait très mal vue par les gens de cette province?

M. Giroux : Dans le régime harmonisé et selon ce qui a émané du gouvernement fédéral, il semble que, pour les cinq provinces harmonisées, la TVH sera éliminée temporairement des biens indiqués. Il ne s’agit pas uniquement d’une baisse pour éliminer la partie TPS, mais la TVH. Le fait qu’une province n’embarque pas ne semble pas être un choix possible.

La sénatrice Moncion : On parle de 5 % pour les provinces qui n’embarquent pas dans l’harmonisation.

M. Giroux : En ce qui concerne les provinces qui n’ont pas déjà la taxe de vente harmonisée, donc le Québec, la Colombie-Britannique, l’Alberta, qui n’a pas de taxe de vente, le Manitoba et la Saskatchewan, ces provinces n’ont pas indiqué si elles élimineraient temporairement leur taxe de vente.

La sénatrice Moncion : Pour les provinces comme l’Ontario, qui ont la taxe harmonisée, le montant qui serait possiblement retourné à cette province prendrait donc en compte la TVH, et pas seulement la portion TPS.

M. Giroux : Il s’agit là de notre compréhension. Le projet de loi, tel qu’il est rédigé, vise que la TVH dans les provinces harmonisées ne s’appliquera pas sur les biens admissibles. Ce ne sera pas une baisse qui correspond à la partie fédérale, mais toute la TVH; en Ontario, c’est 13 %.

La sénatrice Moncion : C’est le fait qu’on parle de 13 % dans ces provinces qui fait que cela les amène au-dessus du 1 %.

M. Giroux : Oui, les revenus générés.

La sénatrice Moncion : Cela signifie que les provinces qui n’embarquent pas dans le projet pourraient pénaliser leurs consommateurs.

M. Giroux : Exactement. Les consommateurs du Québec, par exemple, ou ceux du Manitoba, à la frontière de l’Ontario, auront un rabais au détail de 5 %, alors que ceux de l’Ontario, pour les mêmes biens, auront un rabais 13 %.

La sénatrice Moncion : Ils ne dépasseront pas le seuil du 1 % avec le 5 %.

M. Giroux : Il n’y a pas de seuil, parce qu’ils ne sont pas harmonisés, et leur portion et leurs revenus ne sont pas du tout affectés.

La sénatrice Moncion : Merci beaucoup.

Le sénateur Dalphond : J’aimerais poursuivre sur cette lancée. Les provinces dont la taxe n’est pas harmonisée auraient le choix politique d’emboîter le pas pour donner un congé de taxe de vente provinciale. Les provinces dont la taxe est harmonisée n’ont pas le choix d’être harmonisées, car l’entente prévoit que c’est automatique. Le seuil est fixé à 1 %. Selon vous, si cela représente pour la province une perte de revenus de 1,5 %, elle recevra l’équivalent de 1,5 %, et non de 0,5 %. Tant qu’à faire une concession, elles n’ont qu’à espérer que la concession sera plus importante que moins, car elles auront alors droit à une compensation.

Pour ce qui est du Québec, qui administre la taxe — et la question du sénateur Gignac allait en ce sens —, avez-vous regardé l’entente entre le Québec et le gouvernement fédéral? Cette entente n’est pas récente, elle remonte à 2012. Des modalités doivent bien exister dans le cas où l’on ajoute des produits et l’on doit faire plus de vérifications. Si on révisait la liste, il y aurait moins de vérifications à faire. Y a-t-il des ajustements qui pourraient être apportés? Le gouvernement fédéral verse-t-il un montant annuel à la province?

M. Giroux : Je n’ai pas regardé cette entente spécifique récemment. J’ai dû la regarder dans mon poste précédent, je dois dire malheureusement, parce qu’elle est assez compliquée. À l’époque, la conclusion à laquelle mes collègues et moi en étions arrivés, c’est que le Québec était généreusement compensé pour ses activités. Cette constatation va peut-être faire sursauter vos collègues qui ont déjà été au gouvernement du Québec. La conclusion à laquelle on en était arrivé, c’est que le Québec était généreusement compensé pour ses activités de perception de la TPS au Québec. Je ne me rappelle pas si des mécanismes existent pour des modifications ponctuelles et temporaires comme celle-là pour une compensation additionnelle au gouvernement du Québec. Je sais que notre évaluation, à l’époque, était que le gouvernement du Québec recevait une compensation qui allait probablement au-delà de ce que le gouvernement fédéral aurait à payer pour l’administration de la TPS dans la province.

Le sénateur Dalphond : Je suis bien content de savoir que le Québec avait bien négocié.

M. Giroux : Très bien.

[Traduction]

Le sénateur Loffreda : Selon vous, y a-t-il des risques à mettre en œuvre des baisses d’impôt temporaires? Dans un de vos rapports, vous dites que le fardeau fiscal des Canadiens va augmenter d’ici 2035, à cause de la démographie et des tranches d’imposition. Est-ce qu’on crée des attentes pour d’autres allègements fiscaux à l’avenir? Pensez-vous qu’il y a d’autres risques, ou que c’est bien fait dans le sens qu’on aide les Canadiens avec un congé de taxe temporaire, avant le retour à la normale dans deux mois?

M. Giroux : En matière de risques, je ne vois pas beaucoup de grands risques systémiques. Vous avez parlé du risque de la pression à poursuivre la mesure. Oui, c’est une possibilité. S’agit-il d’un grand risque? Je pense que non. Ce congé est circonscrit et se limite au temps des Fêtes et à quelques semaines après cela. Donc, c’est une mesure limitée dans le temps.

La liste des produits est bien connue, et je pense qu’ils sont assez bien identifiés. Il y aura toujours des cas limités, comme un jouet pour enfant ou pour adulte. Nous n’allons pas nous attarder là-dessus ici. Il y a certains risques administratifs et des complexités, mais je pense que les risques financiers sont assez limités, étant donné que la liste des produits admissibles est connue, que la durée est connue et que la mesure est enchâssée dans la loi. Je dirais que les risques financiers sont assez limités.

Le sénateur Loffreda : Merci.

La sénatrice MacAdam : J’ai seulement une question brève. L’Île-du-Prince-Édouard a la taxe de vente harmonisée. Quelles sont les prévisions de baisse de revenus fiscaux pour cette province?

M. Giroux : C’est environ 20 millions de dollars pour les deux mois.

La sénatrice MacAdam : C’est 20 millions de dollars. Merci.

La sénatrice Ross : Je n’ai pas de question, mais j’aimerais préciser qu’on ne parle pas de consultation avec la province dans la convention fiscale. On dit seulement que la province doit donner son accord par écrit au préalable. On mentionne spécifiquement qu’une conversation ne suffit pas; il faut signer un accord écrit d’avance. Je ne sais pas comment formuler une question avec cela.

[Français]

Le président : Avez-vous des commentaires à faire, monsieur Giroux?

M. Giroux : Non.

[Traduction]

Le président : Merci, sénatrice Ross. Vous soulevez un excellent argument.

[Français]

Le sénateur Gignac : Merci, monsieur Giroux, encore une fois. Vous avez mentionné que le Québec était généreusement compensé pour sa gestion administrative. Mon collègue et moi sommes liés par le secret ministériel. Je ne commenterai donc pas vos propos. Par contre, je veux m’assurer que les Canadiens et les Québécois comprennent bien ce qui se passe.

Le Québec perçoit et administre la TPS au nom du gouvernement fédéral. Toutefois, parce que sa taxe de vente n’est pas harmonisée, la taxe de vente du Québec ne diminue pas. Si le système du Québec avait été comme celui de l’Ontario et des autres provinces, en vertu des chiffres que vous nous avez fournis, il aurait droit à une compensation. On est d’accord pour dire que la TPS et la TVQ auraient alors baissé. Vous avez parlé d’un milliard de dollars pour l’Ontario, et c’est sans doute aux environs de 600 ou 700 millions de dollars pour le Québec, d’après ce que je comprends. Les Québécois sont donc privés de cette économie, car plutôt qu’avoir le régime de la TVH, le Québec a gardé son autonomie fiscale, bien qu’il administre et perçoive le tout. Ne voit-on pas un élément d’iniquité et d’injustice dans toute cette histoire? L’Ontario a renoncé publiquement au milliard de dollars. Les autres provinces n’ont toutefois pas renoncé à cette somme. S’il y a compensation pour les provinces qui n’y renoncent pas, il aurait été bien pour le Québec de le savoir lorsqu’il a signé l’entente de 2012. L’entente aurait peut-être contenu une clause additionnelle.

M. Giroux : Je comprends votre question. Les provinces dont la taxe est harmonisée avec le gouvernement fédéral, ce qui élimine la TVH — et la TPS pour les provinces dont la taxe n’est pas harmonisée —, n’ont pas leur mot à dire. Elles perdent donc des revenus, alors que les provinces qui n’ont pas harmonisé leur taxe de vente, comme le Québec et le Manitoba, ne perdent pas de revenus. Ce sont les contribuables et les consommateurs dans ces provinces qui ne bénéficient pas de la baisse de la taxe de vente.

Le sénateur Gignac : Je comprends très bien. Toutefois, on ne parle pas du taux; on va jouer dans l’assiette fiscale.

M. Giroux : Oui.

Le sénateur Gignac : Les provinces qui ont signé une entente pour la TVH ont la possibilité, d’après ce que vous nous dites, de réclamer le manque à gagner.

M. Giroux : Exactement. Les provinces ont perdu la flexibilité en étant harmonisées. D’un autre côté, si le gouvernement prend une décision unilatérale, elles sont compensées, alors que le Québec, par exemple —

Le sénateur Gignac : Mais cela amène de la distorsion, par exemple, dans la région d’Ottawa, à Gatineau.

M. Giroux : Tout à fait.

Le sénateur Gignac : Les gens auront sans doute avantage à magasiner pour des vêtements d’enfants à Ottawa plutôt qu’à Gatineau s’ils veulent économiser 13 %. Je veux juste m’assurer d’avoir bien compris.

M. Giroux : Oui.

Le président : Monsieur Giroux, monsieur Stanton, merci beaucoup. Vos propos sont toujours aussi clairs et pertinents.

Cela conclut cette partie de notre étude. Pendant notre séance de travail, nous avons reçu deux communications de la Saskatchewan et de Terre-Neuve. Nous allons prendre connaissance de ces deux communications.

Nous procédons maintenant à l’étude article par article du projet de loi C-78, Loi concernant l’allègement temporaire du coût de la vie (abordabilité). Je souhaite la bienvenue aux fonctionnaires du ministère des Finances Canada et de l’Agence du revenu du Canada, qui sont présents dans la salle. Ils ne témoigneront pas, mais pourront répondre aux questions des membres du comité s’ils ont des questions spécifiques.

Avant de commencer, je voudrais rappeler certaines choses aux sénateurs. Si à un moment ou à un autre vous ne savez plus trop où nous en sommes dans le processus, n’hésitez pas à demander des précisions.

[Traduction]

Quand on propose plus d’un amendement à un article, il faut proposer ces amendements dans l’ordre des lignes de l’article.

Si un sénateur s’oppose à un article en entier, il ne doit pas proposer une motion pour supprimer l’article en entier, mais voter contre l’article dans le cadre du projet de loi.

[Français]

Certains amendements proposés peuvent avoir des conséquences sur d’autres parties du projet de loi. Il serait très utile qu’un sénateur qui propose un amendement indique au comité quels sont les autres articles du projet de loi sur lesquels son amendement pourrait avoir une incidence.

[Traduction]

Si les membres du comité ont des questions sur le processus ou le bien-fondé de quelque chose, ils peuvent invoquer le Règlement. En tant que présidente, je vais écouter vos arguments, puis décider quand on aura assez discuté de la question ou de l’ordre et rendre une décision.

Au bout du compte, le comité est maître de ses propres affaires dans les limites établies par le Sénat, et on peut interjeter appel devant le comité plénier pour voir si le jugement sera maintenu.

[Français]

Si vous avez le moindre doute quant aux résultats d’un vote de vive voix ou d’un vote à main levée, la façon la plus harmonieuse d’intervenir, c’est de demander un vote par appel nominal. Finalement, les sénateurs savent que, en cas d’égalité des voix, la motion est rejetée.

Avez-vous des questions sur ce que je viens de dire? Est-ce que c’est clair? On est habitué au processus, donc je crois que nous pouvons commencer. Est-il convenu de procéder à l’étude article par article du projet de loi C-78, Loi concernant l’allègement temporaire du coût de la vie (abordabilité)?

Des voix : Oui.

Le président : Merci. Êtes-vous d’accord pour suspendre l’adoption du titre?

Des voix : Oui.

Le président : Êtes-vous d’accord pour suspendre l’adoption de l’article 1, qui contient le titre abrégé?

Des voix : Oui.

Le président : L’article 2 est-il adopté?

Des voix : Oui.

Le président : Je vais me permettre d’ajouter « avec dissidence », parce que je m’oppose au projet de loi. Pour chaque article, je n’aurai pas besoin de le dire chaque fois. L’article 2 est-il adopté?

Des voix : Oui.

Des voix : Non.

Le président : Adopté avec dissidence. L’article 3 est-il adopté?

Des voix : Oui.

Des voix : Non.

Le président : Adopté avec dissidence. L’article 4 est-il adopté?

Des voix : Oui.

Des voix : Non.

Le président : Adopté avec dissidence. L’article 1, qui contient le titre abrégé, est-il adopté?

Des voix : Oui.

Le président : Adopté. Le titre est-il adopté?

Des voix : Oui.

Le président : Adopté avec dissidence. Je trouve que le titre ne correspond pas à l’atteinte de l’objectif. Le projet de loi est-il adopté?

Des voix : Oui.

Des voix : Non.

Le président : Adopté avec dissidence. Est-ce que le comité voudrait annexer des observations au rapport? La greffière a reçu deux suggestions d’observations. On peut commencer à les examiner. Est-ce que les sénateurs veulent passer à huis clos pour la discussion sur les observations?

Des voix : Non.

Le président : En public? Parfait. J’aimerais le faire en public, car cela permet aux gens de comprendre les raisonnements. Je pense que personne n’est mal à l’aise avec cela, à moins qu’on trouve que c’est préférable. Moi, je préfère toujours le faire en public.

Le sénateur Loffreda : C’est vous qui décidez.

Le président : Je suis entre vos mains. Donc, ça va?

Le sénateur Dalphond : Le public a le droit de savoir.

Le président : Parfait, donc on est au même endroit. La première observation qu’on a reçue est celle de la sénatrice Ross. Le texte a été distribué.

[Traduction]

Puis-je demander à la sénatrice Ross de présenter son observation?

La sénatrice Ross : C’est avec plaisir que je vais vous la lire, si vous le voulez.

Le président : Oui. Si vous le pouvez, lisez-la pour le public, car nous sommes en séance publique.

La sénatrice Ross : Bien sûr. Mon observation proposée se lit comme suit :

Votre comité est d’accord, en principe, avec les objectifs prévus du projet de loi C-78 visant à « mettre plus d’argent dans les poches des Canadiens » pour les aider à faire face au coût de la vie.

Toutefois, le comité estime que cette mesure est trop modeste et mal ciblée, et qu’elle échoue à améliorer la situation de ceux qui en ont vraiment besoin. Le comité souhaite également souligner le témoignage concernant le fardeau administratif qui reposera en grande partie sur les petites entreprises, comme l’ont mentionné les représentants d’un éventail d’associations d’entreprises et des fiscalistes. En outre, aucune entreprise n’a été consultée à propos des changements fiscaux proposés.

En fin de compte, le comité croit que le gouvernement aurait dû choisir un mécanisme plus approprié qu’un congé de taxe.

C’est avec plaisir que je vais aussi commenter mon observation.

Le président : S’il vous plaît.

La sénatrice Ross : Je souhaite ajouter ceci, car c’est important de reconnaître que cette mesure ne cible pas ceux qui en ont le plus besoin et qu’on n’a pas consulté ceux qui seront en grande partie responsables de la mise en œuvre.

On n’a pas étudié ce projet de loi dans l’autre endroit. Je crois que c’est important que les témoignages que nous avons entendus fassent partie d’une observation pour les Canadiens qui n’ont peut-être pas suivi ou n’ont pas pu suivre nos délibérations au comité.

En outre, le représentant du gouvernement au Sénat et la marraine du projet de loi nous ont parlé du fardeau administratif que devront assumer les PME, ainsi que du manque de consultation.

Le sénateur Gold nous a dit ce qui suit en réponse à l’une de mes questions le 28 novembre :

Il est certain qu’il faudra du temps et de l’énergie pour gérer ces changements. Dans certains cas, il faudra peut-être y consacrer des heures-personnes supplémentaires et, par conséquent, des ressources financières.

En deuxième lecture, la sénatrice Moncion nous a dit le 3 décembre que le gouvernement n’avait pas mené de consultations.

Nous l’avons aussi entendu de la part de témoins devant notre comité et, oui, de ceux qui appuyaient la mesure. La Chambre de commerce du Canada a dit que les entreprises étaient obligées de faire des pieds et des mains pour s’adapter à ces changements avec un préavis de moins d’un mois.

Le Conseil canadien du commerce de détail a dit :

Il y a certains défis, bien sûr, et il ne faut pas les sous-estimer, tant en ce qui concerne la rapidité et l’effort requis pour se préparer à ces changements...

La Fédération canadienne des épiciers indépendants a dit :

Je dirais que ces défis seront assumés de façon disproportionnée par les petites et moyennes entreprises et non par les grandes.

Je pense que la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante a résumé la situation le plus succinctement en parlant d’un processus presque insurmontable.

Je pense que nous devons reconnaître ceux qui n’en profitent pas autant qu’ils le pourraient et ceux qui auront des maux de tête pour administrer tout cela.

Le président : D’autres commentaires?

Le sénateur Loffreda : Quelqu’un d’autre veut faire un commentaire? Je pourrais commencer. Merci.

Merci de cette observation, qui est éloquente. Mais j’y vois quelques problèmes.

Tout d’abord, venant du comité des finances nationales, je pense que ce ne serait pas responsable sur le plan financier de mentionner que cette mesure est trop modeste, même si nous avons la capacité de le faire. Le DPB nous a dit que nous en avions la capacité financière.

Notre objectif ne consiste pas à ébaucher des politiques. C’est l’objectif du gouvernement. Peut-être que la cible dans ce cas-ci n’était pas ceux qui en ont le plus besoin. On visait peut-être la classe moyenne, pour lui donner du répit à elle aussi. Tous les Canadiens méritent une pause, pas seulement les gens dans le besoin. Nous sommes tous dans le besoin. Nous entendons tous parler d’itinérance et des banques alimentaires à la Chambre tous les jours.

Ce n’est pas à nous de déterminer si la politique est trop modeste ou mal ciblée; c’est la prérogative du gouvernement démocratiquement élu. C’est au gouvernement de déterminer où il veut cibler cet avantage, qui est temporaire.

Par ailleurs, nous disons aussi que « en outre, aucune entreprise n’a été consultée à propos des changements fiscaux proposés ». Toutefois, la ministre des Finances nous a dit éloquemment hier qu’elle avait parlé à tellement de gens. Ce serait injuste de dire qu’aucune entreprise n’a été consultée.

Je suis certain que des témoignages indiquent qu’on aurait aimé être consultés. Cependant, est-ce qu’aucune entreprise n’a été consultée? Je remets cette affirmation en doute.

On parle au « nous » lorsqu’on dit qu’en fin de compte, le comité croit que le gouvernement aurait dû choisir un mécanisme plus approprié qu’un congé de taxe. J’ai posé mes questions à M. Dodge aujourd’hui — c’était un plaisir de l’avoir parmi nous —, concernant nos enjeux de productivité et de concurrence. C’est un allègement temporaire, et le fardeau fiscal est là, mais la mesure est temporaire. On peut espérer qu’elle soit compensée par la hausse du PIB. Quand je dis « espérer », je parle des économistes qui ont soumis cette idée.

Quand on parle de « mettre plus d’argent dans les poches des Canadiens », je vais laisser le comité décider. C’est un congé de consommation ou un allègement, n’est-ce pas? La mesure va-t-elle mettre plus d’argent dans les poches des Canadiens?

Je veux toujours faire des commentaires neutres. Le sénateur Smith me regarde et le sait. J’aime regarder les deux côtés, pas seulement le pour, mais aussi le contre. C’est pourquoi j’estime qu’il n’est pas nécessaire d’avoir cette observation. Si nous l’ajoutons, je pense qu’il faudrait l’adoucir en fonction des témoignages que nous avons entendus. Voilà ce que je voulais dire.

Le président : D’accord. D’autres commentaires?

[Français]

Le sénateur Moreau : Moi, je serais à l’aise avec l’observation proposée par la sénatrice Ross avec deux petites modifications.

Dans la première phrase du deuxième alinéa, j’enlèverais les mots suivants :

[Traduction]

... est trop modeste et mal ciblée. Si nous pouvions plutôt dire que « toutefois, le comité estime que cette mesure échoue à améliorer la situation de ceux qui en ont vraiment besoin ».

Ce serait mon seul changement dans ce paragraphe.

Et à la fin, à la dernière ligne sur les consultations auprès des entreprises, je dirais que « en outre, aucune entreprise n’a été consultée officiellement à propos des changements fiscaux proposés ».

Ce serait les seuls changements que je vous propose.

La sénatrice MacAdam : Je n’aimais pas qu’on parle d’une mesure « trop modeste », et je ne verrais pas de mal à retirer « mal ciblée » non plus. Cela se trouve à la première ligne.

Concernant le fait d’améliorer la situation de ceux qui en ont vraiment besoin, je parlerais d’une amélioration pour ceux qui vivent des difficultés en matière d’abordabilité, parce que je pense que le projet de loi est lié à l’abordabilité.

La seule autre chose que j’inclurais peut-être dans l’observation, c’est toute la question des consultations fédérales avec les provinces avant l’annonce, parce que de nombreux témoins — il y en avait au moins un aujourd’hui — ont dit que c’était le principal problème de tout ce congé de TPS. Je pense qu’on en a abondamment parlé. Je pense que nous devrions dire quelque chose là-dessus, mais je n’ai pas le libellé exact.

Nous pourrions dire à peu près que « le comité a aussi entendu des témoignages voulant que cette mesure touche les provinces différemment » et que « les provinces n’ont pas été consultées adéquatement à l’avance ».

Le président : Merci, sénatrice MacAdam.

Le sénateur Dalphond : J’aurais tendance à être d’accord avec ma collègue pour une partie de son observation. Je n’aime pas le dernier paragraphe, mais je n’ai rien à redire sur le premier. Dans le deuxième, on dit que la mesure est « trop modeste et mal ciblée », et je présume que cela signifie que nous sommes favorables à plus d’exemptions fiscales et de mesures de ce genre. Je comprends que le sentiment général, c’est que nous n’appuyons pas le versement des 250 $ plus tard ou ce genre de mesures. Les gens se posent la question.

Je serais d’accord que cette mesure échoue ou pourrait échouer — nous verrons bien — à améliorer la vie des ceux qui vivent des difficultés en matière d’abordabilité, comme l’a dit la sénatrice MacAdam.

Je pense que je changerais la phrase suivante pour dire ceci : « Le comité a aussi entendu des témoignages voulant que certaines petites entreprises doivent assumer le fardeau administratif, » parce qu’on nous a dit que ce n’était un grand enjeu ou que ce n’est peut-être pas un enjeu du tout pour les restaurants. Ce n’est pas un grand enjeu pour les grandes chaînes et les Amazon de ce monde. Mais nous avons entendu que pour de petites entreprises, ce pourrait être un problème. C’est ce que reflètent les témoignages; ce n’est pas tout le monde qui est concerné.

Et je dois dire que j’aime qu’on dise « n’a été officiellement consultée, » parce que les représentants de certaines entreprises nous ont dit qu’ils avaient discuté avec le ministère. La dernière ligne dit : « En fin de compte, le comité croit que le gouvernement aurait dû choisir un mécanisme plus approprié qu’un congé de taxe. » Je dirais que je ne suis pas prêt à dire cela. Je supprimerais ce paragraphe, qui est un genre d’énoncé de politique sur la façon de réaliser cette politique. Ce n’est pas fondé sur les témoignages que nous avons reçus, et je ne pense pas que ce soit notre rôle non plus.

Je continue de me concentrer davantage sur les témoignages que nous avons entendus. Merci.

La sénatrice Ross : Certains de ces changements me conviennent, comme les mots « ceux qui vivent des difficultés en matière d’abordabilité ». Si l’on supprime « trop modeste et mal ciblée » et que l’on intègre « pourrait échouer », « certaines petites entreprises » et « officiellement, » je pense que ce serait acceptable pour moi et que cela ajoute de la clarté.

Concernant la dernière ligne, je présume que c’est la prérogative du comité de dire si c’est selon lui un énoncé de politique approprié. Je présume que...

Le président : Si je pouvais... non, je le peux; j’ai pris des notes. Si vous le permettez, je vais le dire en français, et ce sera sans doute l’essentiel de la discussion.

[Français]

En français, la première phrase resterait telle quelle.

La première ligne se lirait ainsi : « Toutefois, le comité estime que cette mesure échoue ». Donc, on enlèverait « est » jusqu’à « elle ». On dirait : « cette mesure échoue à améliorer la situation de ceux qui en ont vraiment besoin. »

Le sénateur Dalphond : En anglais, c’était « may fail ». En français, ce serait...

Le président : En anglais, on dit « may fail ». En français, c’est un peu plus dur.

Le sénateur Dalphond : C’est « ne pourrait peut-être pas » ou « ne livrera possiblement pas ».

Le sénateur Moreau : On pourrait dire : « risque de ne pas ».

Le président : Ou bien : « risque de ne pas améliorer la situation de ceux qui en ont vraiment besoin. »

Le sénateur Moreau : Peut-être plutôt « qui ont des enjeux d’abordabilité. »

Le président : Donc, le texte serait : « risque de ne pas améliorer la situation de ceux qui ont des enjeux d’abordabilité. »

Le sénateur Moreau : Voilà, « qui ont des enjeux d’abordabilité. »

Le président : On continue en disant : « Le comité souhaite également souligner le témoignage concernant le fardeau administratif qui reposera en grande partie sur certaines petites entreprises ».

Je ne dirais pas « certaines petites », parce que cela touchera aussi les grosses. Je dirais plutôt « sur certaines entreprises ». Si vous me le permettez, sénateur Gold, je vais juste terminer et on travaillera sur la finition, si vous voulez. Donc : « qui reposera en grande partie sur certaines entreprises, comme l’ont mentionné les représentants d’un éventail d’associations, d’entreprises et de fiscalistes. »

[Traduction]

Le sénateur Dalphond : Je pense que nous laissons les choses telles quelles en anglais aussi, parce qu’on parle de certaines entreprises. Voilà le message.

[Français]

Le président : Je vais continuer : « En outre, aucune entreprise n’a été officiellement consultée à propos des changements fiscaux. »

Donc, ce serait la proposition telle que modifiée.

Le sénateur Gold : En raison des questions posées à la sénatrice Ross. J’ai aussi entendu, je ne sais pas de la part de qui, mais quelqu’un a dit qu’au lieu de dire « underlining the testimony » ou « souligné le témoignage », on devrait dire qu’on a entendu le témoignage à cet effet. Je ne sais pas si...

[Traduction]

Le sénateur Dalphond : On parle aussi « d’entendre » en anglais?

[Français]

Le président : En français, ce serait « le comité souhaite », au lieu de « souligner le témoignage », « le comité souhaite attirer l’attention sur le témoignage ».

Le sénateur Dalphond : Ou plutôt « a entendu les témoignages ».

Le président : Je dirais « a entendu le témoignage ».

Le sénateur Dalphond : On devrait dire « des témoignages », peut-être? Il y en a eu plus d’un, je pense.

Le président : Alors, « a entendu les témoignages concernant le fardeau administratif ».

[Traduction]

La sénatrice McBean : En disant « souligner », on attire l’attention. Nous avons entendu beaucoup de choses.

Le président : Je le sais. J’ai d’abord essayé d’écrire une version en français. Je vais la lire à la fin et m’assurer que nous ayons les bons mots en anglais et en français.

La sénatrice Ross : Je suis d’accord que « souligner » veut dire quelque chose d’autre que « entendre ». Si je comprends bien, nous allons laisser « souligner »?

Le sénateur Dalphond : Si l’on parle de ce que l’on a entendu, c’est un fait, mais si l’on souligne quelque chose, on émet une opinion.

La sénatrice Ross : Pourrions-nous dire que nous voulons souligner ce que nous avons entendu?

Le sénateur Dalphond : Je préférerais dire: « J’ai résumé ce que j’ai entendu ».

Le président : Sénatrice Ross, si nous formulons une observation, nous attirons l’attention sur son objet.

La sénatrice Ross : L’observation en elle-même attire déjà l’attention.

Le président : Oui, c’est ce que je crois.

La sénatrice Ross : Puis-je faire un autre commentaire? Vous avez mentionné les mots « certaines petites entreprises » et les avez remplacés par « certaines entreprises », mais je pense qu’il serait plus logique de dire « petites entreprises » ou d’utiliser le terme courant « PME », c’est-à-dire les petites et moyennes entreprises, parce que c’est vraiment d’elles qu’il s’agit : les PME.

Le sénateur Gold : C’est vraiment d’elles qu’il s’agit, en effet.

[Français]

Le sénateur Moreau : « Abordabilité », ce n’est pas un mot en français; je dirais qu’il y a des enjeux avec le coût de la vie.

Le président : C’est le titre du projet de loi en français, donc je suis mal à l’aise...

On reprend, parce qu’il est 13 h 30. On dit :

Toutefois, le comité estime que cette mesure risque de ne pas améliorer la situation de ceux qui ont des enjeux d’abordabilité. Le comité a entendu les témoignages concernant le fardeau administratif qui reposera en grande partie sur certaines petites et moyennes entreprises, comme l’ont mentionné les représentants d’un éventail d’association, d’entreprises et de fiscalistes. En outre, aucune entreprise n’a été officiellement consultée à propos des changements fiscaux proposés.

Est-ce qu’on a un consensus?

Le sénateur Dalphond : Si on dit « reposera sur certaines petites et moyennes entreprises », ce n’est pas « en grande partie sur eux ».

[Traduction]

: Nous soulignons que c’est un problème pour les petites et moyennes entreprises, mais qu’en est-il d’Amazon?

[Français]

Le président : Donc, « qui reposera en grande partie sur certaines petites et moyennes entreprises ».

Le sénateur Dalphond : Vous avez dit « en grande partie ».

Le président : Oui, cela reposera « en grande partie » sur certaines PME.

[Traduction]

Le sénateur Dalphond : Le fardeau administratif reposera sur toutes les entreprises.

Le président : Non, pas nécessairement sur toutes les petites et moyennes entreprises. L’entreprise de mon frère n’est pas dans ce domaine. Il n’est pas touché par cela.

[Français]

Donc, cela ne touche pas nécessairement toutes les entreprises.

Le sénateur Moreau : On ne peut pas dire « en grande partie sur les petites et moyennes ». C’est simplement « reposera sur certaines petites et moyennes entreprises ». C’est « en grande partie » qui...

Le sénateur Dalphond : C’est le fardeau.

Le président : C’est le fardeau qui est « en grande partie ».

Le sénateur Forest : Ce qu’on a entendu, c’est que le fardeau est plus important pour les petites et moyennes entreprises. Le fardeau sera plus lourd à porter pour les petites et moyennes entreprises.

Le président : Je pense qu’on a un consensus.

[Traduction]

Je pense qu’il y a consensus. C’est clair? Parfait.

[Français]

Ce sera en anglais et en français. On a une autre proposition. On doit aller un peu plus vite, car on étire déjà un peu le temps. On a une proposition de la sénatrice Pate.

[Traduction]

La sénatrice Ross : La sénatrice MacAdam a également parlé de l’impact sur les provinces.

Le président : J’en ai reçu une en bonne et due forme.

La sénatrice Ross : Nous allons examiner celle-ci, celle-là, puis l’autre à part?

Le président : Oui.

La sénatrice Ross : Merci. Désolée.

Le président : Pas de problème. Sénatrice McBean, pourriez-vous nous faire part de votre observation?

[Français]

La sénatrice Moncion : Avant de passer à l’autre, la sénatrice MacAdam voulait que son commentaire soit ajouté à la proposition actuelle, et non pas faire une nouvelle proposition.

Le président : Je pensais que c’était une phrase complètement à part sur les provinces.

[Traduction]

Vous voulez l’intégrer à cette proposition ou en ajouter une autre?

La sénatrice MacAdam : Non, j’ajouterais simplement une phrase à l’observation de la sénatrice Ross.

Le président : Nous pouvons le faire tout de suite.

[Français]

On ajouterait que « le comité déplore que les provinces n’aient pas été consultées »?

Le sénateur Forest : Si on mentionne qu’il n’y a pas eu de consultations officielles, on pourrait à ce moment-là ajouter...

Le président : On peut le mettre dans une phrase qui suit ou dans un paragraphe. On dirait que « le comité déplore que l’ensemble des provinces », au minimum, car il y en a peut-être qui ont été consultées, mais elles n’ont pas été adéquatement consultées.

Le sénateur Dalphond : Il faudrait dire « il semble », parce qu’il y a peut-être des provinces qui ont été consultées.

Le président : Non, tout le monde nous a dit qu’elles n’avaient pas été consultées.

Le sénateur Dalphond : On n’a entendu aucun représentant d’une province.

Le président : Non, mais même la ministre l’a dit. C’est l’ensemble des provinces qui n’ont pas été consultées. Donc, il y en a peut-être une ou deux qui l’ont été avec un appel la veille, mais...

Le sénateur Dalphond : C’est peut-être cela et la suggestion de mon voisin est bonne.

Le président : Quelle serait-elle?

Le sénateur Dalphond : « En outre, aucune entreprise ou province n’aurait été officiellement consultée ».

Le président : « En outre, aucune entreprise ou province n’aurait été officiellement consultée ». On peut le mettre là.

Le sénateur Moreau : Je suggérerais de mettre « les provinces » avant « les entreprises ».

Le président : « En outre, aucune province ou entreprise n’aurait été officiellement consultée ».

Le sénateur Loffreda : Est-ce qu’on est certain qu’« aucune entreprise n’aurait été consultée »? Et en anglais, cela va se lire comment?

Le président : On laisse cela ouvert. En anglais, cela se lirait comment?

[Traduction]

« However, no provinces or businesses... »

La sénatrice MacAdam : « Businesses and provinces were not officially consulted. »

Le président : Je suis d’accord avec vous. Allons-y au plus simple.

La sénatrice MacAdam : C’est moins risqué, au cas où il y aurait une personne en mesure de produire un document.

Le président : Pouvez-vous répéter cela, sénatrice MacAdam, pour la greffière?

La sénatrice MacAdam : Il suffit d’enlever le mot « no » et d’écrire « Businesses and provinces were not adequately consulted » ou « were not officially consulted ».

Le sénateur Moreau : Je pense qu’il est plus sûr d’utiliser le mot « officially ».

Le président : Oui, c’est plus sûr.

La sénatrice MacAdam : Ce serait donc « Businesses and provinces were not officially consulted ». Cela nous laisse de la marge de manœuvre au cas où...

Le président : Très bien. C’est parfait.

Le sénateur Dalphond : Je crois que le sénateur Moreau voulait que l’on mentionne d’abord les provinces et ensuite les entreprises.

Le président : Oui, c’est correct. Nous pourrons jouer avec cela à la fin. C’est une question de rédaction.

Sénatrice McBean, pourriez-vous nous présenter votre observation, s’il vous plaît?

La sénatrice McBean : Oui. Je vous remercie. La sénatrice Pate, qui, comme vous le savez, est un membre permanent de ce comité, présente l’observation suivante :

Le comité porte à l’attention du gouvernement le témoignage au comité soulignant que le projet de loi C-78 ne répond pas adéquatement aux besoins des Canadiens qui ont du mal à se procurer des produits de première nécessité, notamment de la nourriture et un abri, et préconisant des mesures de soutien du revenu comme un revenu de base garanti suffisant afin de s’attaquer aux coûts humains, sociaux et financiers de la pauvreté et de l’insécurité économique.

À l’appui de cette proposition, elle ajoute que cette observation vise à mettre l’accent sur les Canadiens qui se situent sous le seuil de la pauvreté et qui sont le plus dans le besoin.

Certains témoins ont souligné que bien qu’on aborde la question de l’abordabilité et de l’accès à la nourriture et aux autres produits essentiels dans le projet de loi C-78, il n’accorde pas suffisamment d’attention aux besoins des Canadiens les plus vulnérables à la faim et à l’itinérance, comme nous l’avons entendu à maintes reprises aujourd’hui.

L’un des témoins a mentionné qu’il faudrait mettre en place des mesures de soutien du revenu pour les personnes vivant sous le seuil de la pauvreté, notamment le revenu de base garanti, afin d’assurer l’efficacité des investissements gouvernementaux axés sur des résultats tels que la prévention de l’utilisation des banques alimentaires et de ne pas laisser pour compte les personnes les plus démunies.

Elle a cité un exemple où la vice-première ministre et ministre des Finances a défendu l’objectif général du projet de loi, mais a reconnu que le projet de loi ne répondait pas aux besoins des plus démunis, et que ces derniers avaient souvent besoin de mesures de soutien supplémentaires.

Le sénateur Dalphond : Je suis d’accord avec l’esprit de cette proposition, et je suis d’accord avec le texte jusqu’à la quatrième ligne. Après, cela devient un manifeste en faveur d’un revenu de base garanti, alors que nous n’avons pas encore tranché la question. Elle est toujours en suspens au sein du comité, je pense par conséquent qu’il est prématuré de prendre position.

Je proposerais plutôt d’écrire « à se procurer des produits de première nécessité, notamment de la nourriture et un abri, et préconisant l’amélioration des mesures existantes, comme le crédit d’impôt pour la TPS », qui a apparemment été décrit comme un moyen plus ciblé et plus efficace d’aider les personnes dans le besoin. Telle est ma proposition. Je suis ouvert à...

[Français]

Le président : Ou on peut arrêter à « abri » et « shelter ».

[Traduction]

Le sénateur Dalphond : Nous pourrions aussi nous arrêter là.

Le président : Nous avons entendu quelques exemples de M. Dodge, et il semble que ce n’était pas ce sur quoi il voudrait se concentrer.

Le sénateur Loffreda : Cette politique est étroite. Je comprends parfaitement qu’elle la défende, et nous l’admirons pour cela, c’est une autre occasion de le rappeler dans notre rapport, mais nous devons aussi traduire avec crédibilité ce que nous avons entendu et l’intention du projet de loi. Le projet de loi a pour intention de faire ce que nous avons entendu, n’est-ce pas?

Nous pourrions nous arrêter là. Je suis d’accord avec cela.

Le sénateur Moreau : Il n’y a qu’un seul témoin qui a dit cela. C’était M. Macdonald. Parce qu’en français, il est évident que...

[Français]

On dirait : « Le comité porte à l’attention du gouvernement le témoignage au comité soulignant que [...] ».

Le président : C’est rare qu’on mette « un témoignage », à moins que ce soit vraiment fort.

Le sénateur Moreau : Je ne connais pas les usages, mais j’ai l’impression qu’on généralise un peu.

Le président : Il y a autre chose, sénateur Moreau. Il y a le projet de loi S-233, que la sénatrice Pate a déposé et qui est encore à l’étude à notre comité, où on a commencé à étudier la question d’un revenu minimum garanti. Donc, un peu comme ce que le sénateur Dalphond disait, son point est de dire qu’on anticipe sur nos travaux en incluant cette conclusion, alors qu’on n’a pas encore fini l’étude du projet de loi S-233.

Le sénateur Dalphond : C’est un seul témoin qui a dit cela.

Le président : Je sais.

Le sénateur Dalphond : Cela ne mérite pas d’être mentionné de cette façon.

[Traduction]

La sénatrice McBean : Nous voulons donc nous en tenir à la première partie, c’est bien cela? Retirons le renvoi à la politique alors et arrêtons-nous après « notamment de la nourriture et un abri ».

Le président : Je pense qu’il peut y avoir consensus là-dessus.

[Français]

Le sénateur Forest : Le gouverneur l’a dit clairement, mais j’ai posé la question à presque tous les témoins, et beaucoup de témoins ont dit que les mesures et les produits choisis favorisaient plutôt la classe moyenne supérieure, donc je suis très à l’aise de dire que c’est ce qu’on a entendu et de ne pas donner de précisions sur un témoin.

[Traduction]

Le président : Il y a donc consensus? Très bien.

[Français]

Donc, cela termine les observations. Les membres du comité sont-ils d’accord avec les observations?

Des voix : Oui.

Le président : Est-il convenu que le Sous-comité du programme et de la procédure soit autorisé à approuver la version finale des observations qui seront annexées au rapport, dans les deux langues officielles, en tenant compte de la discussion d’aujourd’hui et en apportant tout changement nécessaire lié à la forme, à la grammaire ou à la traduction?

Des voix : Oui.

Le président : Est-il convenu que je fasse rapport de ce projet de loi avec observations au Sénat, dans les deux langues officielles, dès cet après-midi?

Des voix : Oui.

Le président : Merci à toute l’équipe de soutien, aux interprètes, à la greffière et aux analystes d’avoir organisé cette réunion dans un aussi court délai; c’est vraiment impressionnant, merci beaucoup.

(La séance est levée.)

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