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SOCI - Comité permanent

Affaires sociales, sciences et technologie


LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES AFFAIRES SOCIALES, DES SCIENCES ET DE LA TECHNOLOGIE

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le jeudi 7 novembre 2024

Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit aujourd’hui, à 11 h 30 (HE), avec vidéoconférence, pour élire un président par intérim; et pour étudier le projet de loi C-252, Loi modifiant la Loi sur les aliments et drogues (interdiction — publicité d’aliments et de boissons destinée aux enfants).

[Traduction]

Emily Barrette, greffière du comité : En tant que greffière de votre comité, je dois vous informer de l’absence inévitable de la présidente et du vice-président et présider l’élection d’un président par intérim. Je suis prête à recevoir une motion en ce sens. Y a-t-il des propositions? Sénatrice Dasko?

La sénatrice Dasko : J’aimerais proposer que la sénatrice Petitclerc occupe le poste de présidente pour cette réunion-ci.

Mme Barrette : Y a-t-il d’autres propositions? Non. L’honorable sénatrice Dasko propose que l’honorable sénatrice Petitclerc préside ce comité. Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : Oui.

Mme Barrette : Je déclare la motion adoptée. J’invite l’honorable sénatrice Petitclerc à occuper le fauteuil.

[Français]

La sénatrice Chantal Petitclerc (présidente suppléante) occupe le fauteuil.

La présidente suppléante : Bonjour, chers collègues. Bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie. C’est un grand plaisir d’être ici ce matin. Je m’appelle Chantal Petitclerc, je suis une sénatrice du Québec et je vais présider la réunion.

Aujourd’hui, nous commençons notre étude du projet de loi C-252, Loi modifiant la Loi sur les aliments et drogues (interdiction — publicité d’aliments et de boissons destinée aux enfants).

[Traduction]

Avant de commencer, j’aimerais que nous fassions un tour de table pour que les sénateurs se présentent.

[Français]

Le sénateur Boudreau : Bonjour. Victor Boudreau, du Nouveau-Brunswick.

Le sénateur Dagenais : Jean-Guy Dagenais, du Québec.

Le sénateur Cormier : René Cormier, du Nouveau-Brunswick.

[Traduction]

La sénatrice Bernard : Wanda Thomas Bernard, du territoire mi’kmaq, en Nouvelle-Écosse.

[Français]

La sénatrice Mégie : Marie-Françoise Mégie, du Québec.

[Traduction]

La sénatrice Dasko : Donna Dasko, sénatrice de l’Ontario.

[Français]

La présidente suppléante : Nous aurons deux groupes de témoins aujourd’hui.

En premier lieu, nous avons le privilège d’avoir avec nous Mme Patricia Lattanzio, députée de la circonscription de Saint-Léonard—Saint-Michel et marraine de ce projet de loi.

Je vous remercie d’être avec nous aujourd’hui, madame Lattanzio. Nous allons commencer par votre déclaration, qui sera suivie de questions des membres du comité. Vous disposerez de cinq minutes pour votre déclaration d’ouverture.

La parole est à vous, madame Lattanzio.

Patricia Lattanzio, députée, Saint-Léonard—Saint-Michel, marraine du projet de loi : Bonjour, madame la présidente suppléante et honorables sénateurs.

[Traduction]

Chers sénateurs, je vous remercie beaucoup de m’avoir invitée à vous présenter le projet de loi C-252, Loi modifiant la Loi sur les aliments et drogues (interdiction — publicité d’aliments et de boissons destinée aux enfants) et à répondre à vos questions. Ce projet de loi vise à restreindre la publicité des aliments et des boissons qui contiennent des niveaux élevés de sucre, de sodium et de gras saturés pour les enfants de moins de 13 ans. Ce projet de loi est essentiel et, bien que nous ayons longtemps discuté de son contenu, le moment est venu de passer à l’action sous la forme d’une législation. Le projet de loi C-252 aidera les parents à protéger la santé de leurs enfants et incitera ces derniers à développer des habitudes alimentaires saines qui les suivront tout au long de leur vie.

À l’heure actuelle, l’industrie canadienne des aliments et des boissons dépense environ 1,1 milliard de dollars par an pour commercialiser des aliments et des boissons directement auprès des enfants. L’examen des publicités produites révèle que plus de 90 % d’entre elles mettent l’accent sur des aliments ultra‑transformés, qui ont tendance à être très riches en sucre, en sel ou en gras saturé et qui contribuent à une alimentation malsaine.

C’est d’autant plus inquiétant que l’on connaît l’importance de l’alimentation et de la nutrition sur les résultats futurs et la création d’un mode de vie sain. En effet, une alimentation malsaine avec une consommation excessive de sucre, de sodium ou de gras saturé est un facteur de risque important qui peut conduire à toutes sortes de maladies, qu’il s’agisse de maladies chroniques comme le diabète ou de maladies cardiovasculaires. Nous savons également que nos habitudes alimentaires se forment très tôt, en fait pendant l’enfance. Cela signifie que lorsque nous nous efforçons d’améliorer les habitudes de nos enfants, nous leur inculquons de bonnes habitudes qui les aideront à rester en bonne santé tout au long de leur vie.

La liberté de choix est un principe absolument important, et les gens sont libres de décider quels types d’aliments ils mangeront, mais est-il juste de dire que ce choix est libre alors que l’industrie des aliments et des boissons dépense plus de 1 milliard de dollars par an pour des produits destinés directement aux enfants? C’est pourquoi il est essentiel que nous améliorions le déséquilibre de pouvoir qui existe actuellement et que nous mettions en place des protections entre les enfants et l’industrie des aliments et des boissons afin de veiller à ce que leur pouvoir d’influencer nos enfants soit réglementé. En tant que parent, je sais à quel point il peut être difficile de faire manger des légumes à nos enfants. Imaginez maintenant à quel point cela devient difficile lorsque plus de 1 milliard de dollars d’investissements marketing sont consacrés à la promotion directe auprès de nos enfants d’aliments ultra-transformés.

Heureusement, ce projet de loi a bénéficié d’un soutien remarquable et très large de la part de la Chambre des communes et des acteurs du secteur de la santé. De nombreux défenseurs de la santé, tels que la Fondation des maladies du cœur et de l’AVC et la Société canadienne du cancer, sont de fervents partisans du projet de loi et soutiennent depuis des années les efforts déployés pour faire adopter ce type de législation.

Parallèlement, plusieurs organisations internationales ont appelé à une action urgente et immédiate dans ce domaine. En fait, il y a près de 15 ans, l’Organisation mondiale de la santé, l’OMS, a publié son premier rapport appelant ses pays membres à agir et à restreindre la commercialisation d’aliments riches en graisses saturées, en sucres ou en sodium auprès des enfants, et elle a continué à amplifier cet appel à l’action au cours des années qui ont suivi.

Ces dernières années, de nombreux autres pays ont répondu à cet appel, notamment la Norvège, la Suède, le Chili, le Mexique et l’Argentine. Cette situation est d’autant plus préoccupante que l’industrie elle-même a reconnu l’existence d’un problème, avec la création en 2022 d’un code, qui a commencé à être administré par les Normes publicitaires en 2023.

Cet effort est certes louable, mais il est également très imparfait. Bien que les Normes publicitaires fassent un excellent travail en imposant certaines normes au secteur, la vérité demeure. Le fait est que la plupart des membres de son conseil d’administration sont des présidents et des PDG d’organisations travaillant dans l’industrie de la publicité, et le code est laxiste. De plus, il n’est pas obligatoire et n’a donc pas force de loi. Le Royaume-Uni et l’Espagne élaborent aussi leur propre législation après avoir constaté pendant des années l’inefficacité de l’autoréglementation de l’industrie.

Au Canada, aucune loi ne garantit la reddition de comptes de l’industrie. Nous devons nous assurer de prendre des mesures qui visent directement à protéger les droits et la santé des enfants, au lieu de chercher à réduire au minimum les inconvénients pour l’industrie. Il est temps que notre pays, le Canada, réponde aux appels de nombreux défenseurs de la santé d’ici au Canada et de partout dans le monde. Cette mesure est attendue depuis longtemps. Elle aidera les parents et profitera aux enfants. Mettons la santé de nos enfants en priorité, plutôt que les intérêts monétaires d’industries multimillionnaires.

Je vous remercie et suis maintenant prête à répondre à toutes vos questions avec plaisir.

La présidente suppléante : Merci de cet exposé. Nous allons, en effet, passer aux questions des sénateurs. Pour ce groupe de témoins, sénateurs, nous aurons des tours de cinq minutes pour les questions et les réponses. Sénateurs, permettez-moi de poser la première question. Nous passerons ensuite à la sénatrice Dasko, la marraine du projet de loi au Sénat.

[Français]

Madame Lattanzio, j’ai envie de vous entendre davantage sur ce cas de la publicité destinée aux enfants à la radio et à la télévision. C’est un code volontaire. Le comité entame l’étude de ce projet de loi. Je sais qu’on va en entendre parler régulièrement. J’aimerais avoir votre avis sur les forces, les faiblesses et les résultats qu’on a obtenus jusqu’à maintenant avec ce code.

[Traduction]

Mme Lattanzio : Je ne suis pas au courant des résultats de l’application de ce code. Comme je l’ai dit dans mon exposé, il est très récent. Mais pour l’avoir lu, je peux vous dire qu’il comporte des lacunes. Il est lacunaire pour les raisons que je vous ai mentionnées : il est laxiste et n’est pas obligatoire. Il est entièrement facultatif, et j’ai souligné que les membres du conseil d’administration sont des acteurs de l’industrie de la publicité.

Je dois dire que ce code est permissif et ne protégerait pas les enfants; c’est donc un code d’ordre général. Il n’a pas de ramifications. Il ne prévoit pas de conséquences, sauf pour dire : « Retirez cette annonce. » Le temps est venu, et nous avons besoin de quelque chose de bien plus fort et bien plus applicable pour protéger les enfants de moins de 13 ans en matière d’alimentation.

La présidente suppléante : Merci.

La sénatrice Dasko : Bienvenue, madame Lattanzio. Vous avez beaucoup travaillé à ce projet de loi. C’est vraiment merveilleux qu’il ait atteint cette étape-ci, donc merci beaucoup de tout votre travail.

À l’intention de mes collègues du comité, j’ajouterais que cette initiative politique a une histoire distinguée au Sénat. L’ancienne sénatrice Nancy Greene Raine, qui a commencé ici en 2016, je crois, avait présenté le projet de loi S-228, qui avait été renvoyé à la Chambre des communes pour qu’elle y apporte des amendements, avant de nous revenir. Il est mort au Feuilleton en 2019. C’est une partie de notre histoire.

L’autre partie, c’est que ce comité — et c’est mentionné dans le préambule du projet de loi — a mené une étude spéciale sur l’obésité chez les enfants en 2016 et a recommandé d’interdire la publicité des aliments et des boissons destinée aux enfants. Ce comité a donc une histoire distinguée dans ce domaine. Je me suis dit que les membres du comité pourraient en profiter s’ils connaissaient cette histoire.

J’ai deux ou trois questions à vous poser. Santé Canada planche sur la réglementation dans ce domaine depuis de nombreuses années pour mettre fin à la commercialisation de ce genre d’aliments destinée aux enfants de moins de 13 ans. Pourquoi avons-nous besoin d’un projet de loi si l’on élabore une réglementation? Elle n’a pas été publiée dans la gazette, mais on l’élabore. Pourquoi avons-nous besoin d’un projet de loi?

Mme Lattanzio : Habituellement, quand nous adoptons un projet de loi, il peut être exécuté et entraîne des conséquences. Il rend la conformité obligatoire. Lorsque le projet de loi franchit les étapes de l’étude en comité, de l’adoption au Sénat et de la sanction royale, il prend force de loi, puis des règlements seront formulés après de vastes consultations avec tous les intervenants, qu’ils représentent des intérêts privés, des organisations de la santé ou l’industrie de la publicité. Donc, de vastes consultations auront lieu avec tout le monde. La réglementation fera suite à l’édiction du projet de loi.

La sénatrice Dasko : Je voulais dire par là que Santé Canada réalise un excellent travail en la matière.

Mme Lattanzio : En fait, si je me souviens bien, on a mené des consultations à trois reprises : en 2017, en 2018 et en 2023.

La sénatrice Dasko : Oui, on a aussi établi un ensemble de critères pour aller de l’avant.

Mme Lattanzio : Oui, et je pense que vous allez entendre des représentants de Santé Canada plus tard aujourd’hui. Ils vont présenter les ratios de sucre, de sel et de gras qui seraient des mesures ou des pourcentages acceptables et que l’industrie devrait respecter.

La sénatrice Dasko : Il y a des dizaines d’années, votre province, le Québec, a interdit la publicité pour tous les produits destinés aux enfants. Donc, nous avons déjà un exemple de cette initiative politique ici au pays. Pouvez-vous me dire si cela fonctionne?

Mme Lattanzio : La Loi sur la protection du consommateur, édictée en 1978, il y a des dizaines d’années comme vous l’avez dit, a une portée très large, car elle vise toutes les publicités destinées aux enfants. Le projet de loi C-252 cible la commercialisation de ces aliments qui ne figure pas dans la Loi sur la protection du consommateur. Mais permettez-moi de dire tout d’abord qu’il y a certains types de publicité au Québec, parce que la loi englobe tous les enfants au Québec qui regardent la télévision en français.

On a mené une étude qui indique que le taux d’obésité est bien plus faible que celui des enfants anglophones qui regardent les chaînes américaines, par exemple. L’Office de la protection du consommateur connaît beaucoup de succès en matière de délivrance d’amendes quand on contrevient à la loi. Parce qu’il y a une loi, il y a des conséquences. Je peux vous parler, par exemple, d’infractions qui ont été commises, mais l’objectif de ce projet de loi, c’est bien sûr qu’il ne s’applique pas qu’à une seule province. Ce serait une loi fédérale s’appliquant à tout le Canada, donc toutes les provinces au pays, d’un océan à l’autre, bénéficieraient de ces protections pour nos enfants.

La sénatrice Dasko : Merci.

[Français]

Le sénateur Cormier : Bienvenue, madame la députée, et bravo pour le travail que vous faites sur le sujet. On ne peut pas faire autrement que de penser à notre ancienne collègue la sénatrice Nancy Greene, qui avait défendu cette question avec beaucoup d’intérêt.

On sait que la commercialisation des produits est un concept qui englobe beaucoup d’éléments : la publicité, la conception, l’emballage, le placement des produits et les produits dérivés.

Dans le titre et le préambule du projet de loi, on parle de la commercialisation, mais le projet de loi lui-même ne fait mention que de la publicité. Pourquoi le projet de loi ne limite-t-il pas d’autres formes de commercialisation destinées aux enfants, comme le Chili l’a fait, par exemple, en 2016?

[Traduction]

Mme Lattanzio : Merci de cette excellente question. Le préambule parle de commercialisation, mais si l’on regarde plus loin dans le projet de loi, il est aussi question de publicité. Il englobe à la fois la publicité et la commercialisation.

Différents pays ont adopté différents moyens législatifs, mais je pense que le but est le même. L’objectif commun, c’est de s’attaquer aux industries qui persistent et cherchent à influencer les choix des enfants. Comme je l’ai dit dans mon exposé, on parle de liberté de choix sur le plan alimentaire. Le projet de loi C-252 va aider à éliminer les pressions constantes, les publicités et les tentatives d’influencer la diète des enfants. Il pourra jouer un rôle important et positif.

[Français]

Le sénateur Cormier : Quel impact ce projet de loi aura-t-il sur le Programme national d’alimentation scolaire du Canada, que votre gouvernement a adopté? J’essayais de voir s’il aura un impact direct. En réfléchissant à votre projet de loi, je ne peux faire autrement que de réfléchir à l’alimentation en milieu scolaire et me demander comment un projet de loi comme celui‑là pourrait avoir un impact et influencer le Programme national d’alimentation scolaire du Canada. Qu’est-ce que vous pouvez nous dire à ce sujet?

Mme Lattanzio : Je pense qu’il va aller de pair et qu’il sera complémentaire à ce qui existe déjà. Le projet de loi ne fera que solidifier ce concept, qui est de s’assurer que les enfants ont une alimentation saine, et non malsaine.

Déjà, le programme en lui-même, celui qui est mis de l’avant par le gouvernement, est une étape fort importante et positive, et je ne peux que vous dire que le projet de loi serait un complément, tout simplement. Ce serait un avantage, et cela vient peut-être marteler le message qu’une alimentation saine est celle que vise notre gouvernement et les Canadiens.

Le sénateur Cormier : Comment s’assurer, puisqu’il y aura une interdiction, que cela sera respecté?

Mme Lattanzio : Une loi implique qu’il y aura des conséquences. Je reviens à l’exemple de la Loi sur la protection du consommateur. Quand il y a des conséquences, les gens sont toujours plus réticents à agir d’une certaine façon. S’il n’y a pas de conséquences, cela devient de plus en plus difficile. Des conséquences et une loi exécutoire pourront, je le souhaite, aider la situation.

Le sénateur Cormier : Les gens n’auront alors aucun moyen de la contourner. Je pense aux écoles, où on peut faire circuler de la documentation sur papier pour promouvoir un produit. Bien souvent, des entreprises privées sont situées près des écoles. À votre avis, y a-t-il un danger ou non à ce point de vue?

Mme Lattanzio : Je pense que oui. Dès qu’on a une loi et qu’elle est exécutoire... Vous savez, l’Office de la protection du consommateur est là pour veiller à ce que les lois à ce sujet soient —

Le sénateur Cormier : Est-ce que cela passe par des inspecteurs?

Mme Lattanzio : Au Québec, cela passe par des plaintes. En procédant de cette façon, on pourra agir ainsi.

Le sénateur Cormier : Merci beaucoup, madame la députée.

La sénatrice Mégie : Bonjour, madame Lattanzio. Je suis contente de vous voir au Sénat.

Je regardais le projet de loi et le document sur la protection des consommateurs. Je trouvais qu’il y a parfois des interdictions qui sont mixtes. Par exemple, c’est comme si l’adulte pouvait recevoir de la publicité, mais pas les enfants. Dans un document de la Santé publique du Québec, on peut lire ce qui suit :

Autrefois observés uniquement chez les adultes, de plus en plus de jeunes reçoivent un diagnostic d’hypertension ou de diabète de type 1.

Normalement, ils devraient être plus âgés pour développer un diabète de type 2 — et c’est récent. L’impact, et le sénateur Cormier vous a posé la question, est-il vraiment visible? La Santé publique ne dit pas que les jeunes ont mangé quelque chose en particulier. On dit juste qu’on observe qu’il y a de plus en plus d’hypertension et de plus en plus de diabète, ce qui signifie que les jeunes mangent de plus en plus mal. On se demande où on pourrait trouver les données ou les critères qui nous permettraient de dire que la loi a fonctionné.

Mme Lattanzio : Je ne suis pas médecin; je ne suis que députée et avocate. Je peux toutefois vous dire que ce phénomène me semble multisectoriel. Si un enfant est diabétique, j’imagine que différents facteurs l’ont amené à ce diagnostic, et pas seulement la diète. La diète joue tout de même un rôle et y contribue.

La sénatrice Mégie : On regardait les âges. L’OMS parlait de la publicité destinée à toutes les personnes âgées de moins de 18 ans. Pourquoi le projet de loi C-252 concernera-t-il les moins de 13 ans?

Mme Lattanzio : Je vous remercie pour la question.

Au départ, le projet de loi S-228 visait une plus large population. Le projet de loi C-252 a été restreint parce qu’on prend en considération le fait que, jusqu’à l’âge de 13 ans, un enfant n’a pas la capacité de discerner ou d’avoir un jugement éclairé. C’est pourquoi j’ai restreint un peu plus sa portée; c’était pour vraiment protéger ces enfants qui n’ont peut-être pas l’habileté, le sens du jugement ou encore le discernement requis.

Le projet de loi vise aussi cet autre groupe de personnes âgées de 14 à 18 ans. Pendant les cinq prochaines années, on va se pencher de près sur ce groupe d’âge et une recherche sera faite pour voir comment l’industrie se comporte vis-à-vis de lui. Si la loi est exécutoire — et je souhaite qu’elle le soit très bientôt — , on mettra en place un mécanisme pour voir ce que fait l’industrie pour cibler l’autre groupe de personnes âgées de 14 à 18 ans. On se donne un mandat de cinq ans pour superviser le tout et avoir une idée de ce qui se passe.

La sénatrice Mégie : Merci.

Je pensais aux jeunes des milieux défavorisés. Ce n’est pas leur faute; ils n’ont pas de quoi bien manger, comme des légumes qui coûtent cher, par exemple. C’est sûr qu’ils se dirigent vers ce qui est le plus facile à prendre dans une machine. Est-ce qu’on peut penser à une façon de faire? Je ne sais pas si la loi peut mentionner un élément qui pourrait les protéger aussi?

Mme Lattanzio : Dans une ancienne vie, j’ai été commissaire scolaire pendant 14 ans. Au moment de quitter ces fonctions et de venir ici, les machines distributrices n’étaient plus dans les écoles. Elles étaient complètement prohibées et elles n’existaient plus. Je vous répondrai en allant dans le sens du sénateur Cormier, pour dire que notre gouvernement a mis en place un programme national d’alimentation pour s’assurer que les enfants aient des collations et une diète saines, et non de la nourriture malsaine. Ce projet de loi va faire en sorte que les écoles ou les enfants dans les milieux défavorisés ne soient pas assujettis à cette nourriture malsaine.

La sénatrice Mégie : Merci.

Le sénateur Boudreau : Merci d’être ici. J’apprécie certainement l’intention du projet de loi et je vous félicite de cette très belle initiative.

J’aimerais revenir à la question de l’application de la loi. Une loi est seulement aussi bonne que la mise en œuvre qu’on en fait. En réponse à la question de mon collègue le sénateur Cormier, vous avez dit que la mise en œuvre de la loi est basée sur des plaintes. Est-ce le seul mécanisme en place pour mettre cette loi en application? Dans l’affirmative, j’ai l’impression qu’on n’obtiendra peut-être pas les résultats espérés. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur la façon dont le système — ou vous‑même — envisage qu’une telle loi sera appliquée?

Mme Lattanzio : Si les critères de Santé Canada ne sont pas respectés, le produit ne pourra pas être commercialisé. Vous comprenez? Déjà, il y a un frein et il n’est mis en place que si la loi existe. Si elle n’existe pas, vous n’aurez pas cette première étape à franchir. Une fois cette étape franchie, il suffit de porter plainte, comme avec toute autre loi. Quelqu’un vous reproche des voies de fait? Si vous ne faites rien, la loi ne sera pas appliquée. Si, par contre, vous portez plainte à la police, elle sera mise en application.

Le sénateur Boudreau : Est-ce qu’elle s’appliquera uniquement à la publicité produite et diffusée au Canada? On regarde beaucoup la télévision américaine. Notre loi aura-t-elle une portée sur la publicité à la télévision américaine?

Mme Lattanzio : Elle vise toute publicité. Tout ce qui franchit le territoire canadien est couvert dans ce projet de loi.

Le sénateur Boudreau : Il a été mentionné que, depuis le début des années 1980 et peut-être même avant, une telle loi existe au Québec. Je comprends votre argument selon lequel sa portée est peut-être un peu plus large que celle que vous proposez ici. Il existe tout de même quelque chose au Québec depuis maintenant 40 ans. Les jeunes du Québec sont-ils moins obèses qu’ailleurs au pays? Y a-t-il des statistiques qui indiquent que la loi a réussi?

Mme Lattanzio : Justement, j’en ai parlé plus tôt : oui, nous avons ces statistiques. Je sais que des médecins ont été invités à comparaître devant vous et ils auront des statistiques précises à vous communiquer. Vous aurez alors l’occasion d’entendre les mêmes réponses qui m’ont été données. Beaucoup de recherches ont été faites et les statistiques sont factuelles et fiables.

Le sénateur Boudreau : Merci.

[Traduction]

La sénatrice Bernard : La sénatrice Mégie a posé les deux questions que je voulais vous poser aujourd’hui. L’une porte sur l’âge, et l’autre concerne le lien avec la pauvreté. Le projet de loi ne dit rien à cet égard. Les enfants et leurs parents n’ont pas trop le choix, quand ils n’ont pas accès à des aliments plus nutritifs.

J’aimerais que vous nous en disiez un peu plus à ce sujet. J’aimerais aussi en savoir plus sur la publicité dans les réseaux sociaux. Cet enjeu va au-delà de la télévision et de l’accès des enfants à la télévision. J’aimerais que vous nous parliez davantage de l’enjeu de l’âge, parce que je ne suis pas sûre qu’on puisse effectuer plus de contrôle pour le groupe plus âgé — concernant le changement que vous avez évoqué en matière de recherche qui sera effectuée. Je craindrais fortement que l’industrie change de stratégique et commercialise ses produits auprès de ce groupe d’âge avec plus d’ardeur, surtout sur les réseaux sociaux.

Mme Lattanzio : Exactement, et c’est pourquoi ne nous donnons cette possibilité. Le projet de loi C-252, au fond, nous permettra de protéger le groupe des très jeunes enfants. Pour les raisons que j’ai expliquées, ces enfants ne prennent pas de bonnes décisions, manquent de discernement et de jugement. C’est pourquoi nous voulons nous donner la possibilité d’examiner le groupe des 13 à 18 ans et de voir comment l’industrie commercialisera ses produits auprès d’eux. Au besoin, nous réévaluerons la situation à un moment donné.

Le projet de loi initial était très vaste, et sa portée aussi — jusqu’à 18 ans. À l’époque, notre Chambre et le Sénat avaient discuté d’amendements. Les députés estimaient qu’il était trop vaste. Le projet de loi C-252 répond à ces préoccupations ou à ces questions qu’on a soulevées et divise donc les groupes d’âge en deux. Cela nous donnera l’occasion de voir ce qui se produit.

Si nous parvenons à contraindre le comportement de ces industries concernant les enfants de 13 ans et moins, nous espérons que le prochain groupe nous donnera aussi des résultats positifs. Dans le cas contraire, nous pourrons nous pencher à nouveau sur la question et prendre des règlements pour cet autre groupe d’âge.

La sénatrice Bernard : Je vous remercie.

La sénatrice Burey : C’est un domaine qui m’intéresse beaucoup. Je suis pédiatre, alors je vois cela dans la pratique. J’ai examiné le préambule. Je vais poursuivre sur la question des médias sociaux. Premièrement, le préambule précise que les publicités d’aliments et de boissons destinées aux enfants demeurent répandues, malgré l’adoption de mesures sur une base volontaire. Deuxièmement, il est largement reconnu que la publicité destinée aux enfants s’étend bien au-delà des médias traditionnels que sont la télévision et la presse écrite.

J’ai vérifié ce matin une étude réalisée par le département de la santé des populations de la Grossman School of Medicine, à l’Université de New York. Cette étude a révélé un nombre important de placements de boissons et de produits alimentaires malsains sur des vidéos YouTube, mais il s’agissait d’influenceurs d’âge mineur. Ce n’est donc pas une entreprise qui vient simplement insérer une publicité. Ce sont des influenceurs âgés de 3 à 14 ans qui font des placements de produits. En analysant plus de 400 vidéos des cinq enfants influenceurs les plus populaires en 2019, les chercheurs ont constaté que 90 % des aliments et des boissons mis en vedette étaient des marques de malbouffe — je n’en nommerai aucune —, et ces vidéos ont été visionnées, dans l’ensemble, des milliards de fois par des jeunes. Cela soulève donc la question du placement de produits et des enfants influenceurs.

À la lumière de ce constat, quelles mesures réglementaires Santé Canada envisage-t-il ou met-il en œuvre pour surveiller et restreindre cette promotion par des enfants influenceurs? C’est ma première question.

Mme Lattanzio : Je commencerais par dire que c’est une question de comportement. La mise en œuvre du projet de loi C-252 permettrait de favoriser certains comportements. Une fois que cette mesure législative entrera en vigueur et que les enfants seront sensibilisés à cet enjeu ou ne seront plus soumis à une commercialisation massive d’aliments ultra-transformés, on commencera à créer ou à inculquer certains comportements. Nous espérons que les enfants ne seront plus exposés à de telles publicités.

Je vous dirais aussi que la plupart des influenceurs sont payés. Or, qui les paie? Ce sont les annonceurs. C’est toujours la même chose : on revient à la racine du problème. Ce sont ces influenceurs qui créent ces infopublicités et qui font la promotion d’un produit auprès des enfants. Au Québec, par exemple, des produits sont mis de l’avant. Je vais vous donner l’exemple facile de Lucky Charms. Il y a le nom de marque « Lucky Charms », qui est acceptable au Québec, mais il est interdit de présenter le personnage de Lucky Charms, car les tout-petits seront attirés par les couleurs scintillantes et le personnage de dessin animé. C’est donc ce que nous voulons limiter. Cela nous ramène encore une fois aux annonceurs. Le cas échéant, l’influenceur gagnera de l’argent ou recevra gratuitement un produit pendant toute une année. Encore une fois, derrière l’enfant, il y a l’annonceur.

La sénatrice Burey : Le projet de loi va-t-il mettre fin à cela? C’est ce que je veux savoir.

Mme Lattanzio : Eh bien, cela correspondrait — en ce qui me concerne — à une publicité destinée aux enfants. Il s’agit d’aliments à forte teneur en sucre, en sodium et en gras saturés. Ces publicités seront interdites. S’il s’agit d’aliments sains — comme des carottes, du brocoli, et cetera — et qu’un enfant est placé devant des aliments bons pour la santé, il n’y a pas de problème.

La sénatrice Burey : Au cours de cette campagne — si le projet de loi est adopté —, Santé Canada compte-t-il faire de la sensibilisation auprès des parents? Je n’entrerai pas dans les détails, mais diverses mesures législatives seront présentées. Qu’en est-il de la sensibilisation à ce problème?

Mme Lattanzio : Je vous remercie de cette question. Comme je l’ai mentionné plus tôt, à la suite de l’adoption de cette loi, Santé Canada tiendra un vaste processus de consultation auprès de tous les intervenants, qu’il s’agisse des parents, des annonceurs, de l’industrie, des enfants ou des professionnels de la santé. De vastes consultations auront lieu, après quoi le ministère mettra en place des règlements.

La sénatrice Burey : Allez-vous sensibiliser ces groupes : les parents, les fournisseurs de soins de santé, les écoles, et cetera?

Mme Lattanzio : Cela fera partie de la consultation.

La présidente suppléante : C’est une rare occasion au sein de notre comité, mais aujourd’hui, nous avons le luxe de faire un deuxième tour pour ceux qui ont d’autres questions à poser à notre témoin.

[Français]

Le sénateur Cormier : Il est très intéressant d’essayer de saisir l’impact qu’aura le projet de loi et de déterminer comment se fera la sensibilisation. On se souvient tous de l’impact qu’a eu ParticipACTION dans le domaine du sport avec ses grandes campagnes de sensibilisation. Dans sa réflexion sur ce projet de loi, le gouvernement se penche-t-il aussi sur l’importance d’avoir une campagne de sensibilisation contre ces produits, mais en faveur des bons produits? En d’autres mots, avec tous les enjeux liés à l’obésité et les conséquences de la malbouffe et de la malnutrition au Canada, est-ce qu’une réflexion est en cours sur l’idée de mettre sur pied une campagne de sensibilisation qui aiderait notamment à faire en sorte qu’on ne puisse pas contourner la possible mise en œuvre de cette loi?

Mme Lattanzio : Encore une fois, je crois que toute initiative visant à garantir la santé de nos enfants est une bonne nouvelle.

Je crois sincèrement que ce projet de loi, s’il devient loi, donnera au gouvernement l’impulsion requise pour aller encore plus loin et faire cette campagne, en disant qu’au Canada, on a adopté une loi pour mettre fin à ce marketing de la nourriture malsaine auprès des enfants, que la loi existe et qu’on encourage les familles et les Canadiens à adopter une alimentation plus saine.

Le sénateur Cormier : Je comprends que vous pouvez transmettre cette information à la Chambre des communes pour faire en sorte qu’il y ait une campagne de sensibilisation. J’estime que c’est fondamental si on veut avoir un impact réel. Pour remédier à l’utilisation des médias sociaux dans le but de contourner les lois, une campagne de sensibilisation serait probablement très utile.

Merci beaucoup. Je m’arrête là-dessus.

Le sénateur Boudreau : J’aimerais revenir à la question de la publicité produite à l’extérieur du Canada. Un extrait du mémoire de la Fondation des maladies du cœur nous a été transmis. Malheureusement, je n’ai que la version anglaise, mais j’aimerais en lire un passage rapidement. On parle de la loi qui existe au Québec.

[Traduction]

Même si la loi québécoise montre que les restrictions législatives en matière de publicité peuvent avoir un effet positif, il est important de souligner qu’il y a des lacunes. Comme cette loi n’a pas été conçue pour protéger les enfants contre l’exposition à la publicité d’aliments malsains, les enfants sont toujours exposés à la publicité télévisée d’aliments malsains qui s’adresse aux adultes. Notamment, les enfants anglophones du Québec ne bénéficient pas de la même protection que les enfants francophones, car ils consomment plus de contenu provenant de l’extérieur de la province et sont donc plus exposés à la publicité alimentaire destinée aux enfants.

[Français]

De la même manière que cette loi québécoise peut avoir un effet négatif sur les jeunes anglophones au Québec, ma crainte serait que la minorité francophone canadienne à l’extérieur du Québec puisse en subir les effets. Encore une fois, la télévision américaine est bien présente. Au sud-est du Nouveau-Brunswick, mais peut-être un peu moins dans le nord, les jeunes regardent autant la télévision américaine que la télévision canadienne. Selon vous, le projet de loi que vous proposez vient-il combler cet écart qui existe présentement dans la loi québécoise?

Mme Lattanzio : Justement, c’est la raison pour laquelle je vous ai dit dès le départ que la loi que nous avons est bonne et que nous sommes très fiers au Québec d’avoir cette loi inspirante qui existe depuis déjà 40 ans. Cette loi sert de modèle. Grâce au projet de loi C-252, je souhaite que ce modèle s’étende au reste du pays, et pas seulement au bénéfice des enfants du Québec et de ceux qui ne regardent que la télévision en langue française. J’aimerais qu’elle soit mise à la disposition de tout le monde et que cette protection inclue les enfants francophones à l’extérieur du Québec, les enfants anglophones qui vivent au Québec et tous les enfants anglophones à travers le pays d’un océan à l’autre.

Le sénateur Boudreau : Merci.

[Traduction]

La sénatrice Bernard : J’ai hésité à poser cette question, mais j’ai décidé d’être courageuse et audacieuse et de la poser quand même. Pour revenir à la question du sénateur Cormier sur la sensibilisation et à la réponse que vous lui avez donnée, ma question serait la suivante : le gouvernement envisage-t-il d’arrimer ce projet de loi à un revenu minimum garanti? Ainsi, lorsque nous sensibiliserons les familles pauvres de tout le pays, nous les aiderons à comprendre comment le gouvernement travaille également à instaurer un revenu minimum garanti afin que ces familles aient effectivement les moyens de faire ce qu’on leur demande de faire en ce qui concerne leur alimentation.

Mme Lattanzio : Je vous remercie de votre question audacieuse, et merci aussi d’avoir eu le courage de me la poser. Malheureusement, je ne peux pas parler au nom du gouvernement parce que, comme vous le savez, le projet de loi C-252 est un projet de loi d’initiative parlementaire. Je comparais donc devant vous pour parler de ce projet de loi, dont je suis responsable.

Encore une fois, je tiens à répéter que toute bonne idée visant à protéger la santé et le bien-être des enfants est louable et devrait être prise en considération. Votre proposition mérite probablement d’être examinée, peut-être dans le cadre du projet de loi d’initiative parlementaire d’un autre député, mais à ce stade-ci, ce projet de loi ne porte que sur la publicité et la commercialisation d’aliments malsains à forte teneur en gras saturés, en sodium et en sucre auprès des enfants de moins de 13 ans. C’est donc un projet de loi d’initiative parlementaire.

La sénatrice Dasko : En réponse à la sénatrice Bernard, le gouvernement appuie ce projet de loi. Je pense que vous vous souvenez peut-être de l’intervention du sénateur Gold à l’étape de la deuxième lecture du projet de loi. Des fonctionnaires vont venir, alors ils connaissent peut-être la réponse. Vous pourrez peut-être poser cette question si un discours est prononcé au Sénat à l’étape de la troisième lecture. Votre question sur les autres initiatives qui pourraient accompagner le projet de loi est excellente. Permettez-moi d’ajouter qu’il s’agit d’une mesure très audacieuse en soi, qui vise à interdire la publicité de tels aliments auprès des enfants. Il s’agit d’une initiative audacieuse et importante en matière de santé publique. Je ferme la parenthèse.

Pour revenir à la question du Québec, aussi audacieux que soit le projet de loi, le Québec était, en fait, plus audacieux il y a des décennies. Il est allé plus loin que le projet de loi à l’étude. Cette mesure législative est certes louable, mais le Québec a évidemment interdit la publicité de tous les produits et aliments destinée aux enfants et, d’ailleurs, sa décision a fait l’objet d’une contestation de la part d’une entreprise de jouets il y a des décennies. La légitimité de la loi québécoise a été confirmée par les tribunaux.

Le projet de loi dont nous sommes saisis n’interdit que certains aliments. A-t-on envisagé d’aller plus loin, par exemple, en interdisant la publicité de tous les aliments et boissons, et pas seulement ceux qui sont riches en sodium, en gras et en sucre? Aussi ambitieuse que cette mesure législative puisse être, elle n’est pas aussi audacieuse que celle de nos frères et sœurs du Québec, qui ont pris cette initiative il y a plusieurs décennies.

Mme Lattanzio : Tout d’abord, je veux prendre deux secondes du temps du comité pour remercier la sénatrice Dasko d’avoir coparrainé le projet de loi. J’ai oublié de le faire tout à l’heure, alors commençons par le commencement.

En ce qui concerne la loi québécoise, elle est de nature générale. Le projet de loi dont nous sommes saisis porte précisément sur les aliments à forte teneur en sucre, en sodium et en gras saturés. Comme vous vous en souviendrez, une version précédente du projet de loi, le projet de loi S-228, comportait également un vaste mandat et une large portée. Par conséquent, les membres des deux Chambres ont soulevé des questions ou formulé des observations qui auraient pu nuire à l’objectif principal du projet de loi à l’époque.

En ratissant trop large et en créant une portée trop générale, on perd parfois l’essence de l’objectif d’un projet de loi. Par conséquent, des pays du monde entier — ceux que j’ai déjà mentionnés — ainsi que Santé Canada se sont penchés sur le problème de la commercialisation. C’est pourquoi la portée et l’objectif du projet de loi se concentrent uniquement sur les taux élevés de sodium, de sucre et de gras saturés, car c’est ce qui contribue vraiment aux mauvaises habitudes alimentaires des enfants.

La sénatrice Dasko : Je vous remercie. C’était très utile.

La sénatrice Burey : J’ai une question très brève à vous poser. En ce qui concerne le processus de consultation qui aura lieu, avez-vous inclus les plateformes de médias sociaux?

Mme Lattanzio : Tout le monde sera inclus, et je veux dire par là qu’il y aura une consultation très vaste et générale.

La sénatrice Burey : Je vous remercie.

La présidente suppléante : J’ai une petite question à vous poser, si vous me le permettez. Ceux d’entre nous qui étaient là pour le projet de loi S-228 se souviendront que l’un des sujets de discussion portait sur le libellé concernant la commercialisation d’aliments « malsains ». Je me souviens que l’industrie n’était pas à l’aise avec ce libellé. Si le mot « malsains » est remplacé par les mots « faibles en sodium, en gras et en sucre » — ce qui, sauf erreur, est conforme à d’autres initiatives —, êtes-vous convaincue qu’un tel libellé sera plus acceptable pour l’industrie?

Mme Lattanzio : Je l’espère bien, parce que nous avons pris les mesures nécessaires pour rendre le libellé plus acceptable, bien que l’objectif ici ne soit pas de rassurer l’industrie. Mon objectif principal est de protéger le bien-être et la santé des enfants. C’est un élément à prendre en considération, et si cela permet à l’industrie de comprendre qu’un tel mécanisme s’impose — et comme je l’ai mentionné dans mon discours, je pense que l’industrie l’a compris, parce qu’elle a proposé un code, qui n’est toutefois pas obligatoire, mais volontaire. Je tiens à le souligner. Ne vous méprenez pas : le code est volontaire, et non pas obligatoire, et il n’aura jamais force de loi comme un projet de loi qui reçoit la sanction royale. Par conséquent, au cours des consultations et des délibérations, on a beaucoup réfléchi à la possibilité d’ajouter au projet de loi des critères qui appuieraient son objectif principal.

La présidente suppléante : Merci beaucoup.

Chers collègues, il ne semble pas y avoir d’autres questions pour notre témoin. Je vous remercie d’avoir été des nôtres aujourd’hui. Cela met fin à la première partie de notre réunion.

[Français]

Honorables sénateurs, pour notre deuxième groupe, nous accueillons Mme Joyce Boye, directrice générale, Direction des aliments et de la nutrition, Direction générale des produits de santé et des aliments, Santé Canada. Elle est accompagnée de M. Alfred Aziz, directeur, Bureau des sciences de la nutrition, Direction des aliments et de la nutrition, Direction générale des produits de santé et des aliments, Santé Canada, ainsi que de David K. Lee, dirigeant principal de la réglementation, Direction générale des produits de santé et des aliments, Santé Canada. Bienvenue à notre comité. Je vous remercie d’être ici aujourd’hui.

Nous allons commencer par une déclaration de cinq minutes, qui sera suivie des nombreuses questions des membres du comité.

[Traduction]

Joyce Boye, directrice générale, Direction des aliments et de la nutrition, Direction générale des produits de santé et des aliments, Santé Canada : Bonjour, madame la présidente et honorables membres du comité. Je vous remercie de me donner l’occasion de parler aujourd’hui de ce projet de loi d’initiative parlementaire, le projet de loi C-252, également connu sous le nom de Loi sur la protection de la santé des enfants.

Le gouvernement reconnaît l’importance de la nutrition pour soutenir la santé des enfants. Les enfants en bonne santé sont plus susceptibles de réussir à l’école, de contribuer de manière positive à la société et de mener une vie épanouissante. Malheureusement, les données d’un sondage national montrent que les enfants canadiens ont des régimes alimentaires à forte teneur en sodium, en sucres et en gras saturés, aussi appelés nutriments préoccupants pour la santé publique.

L’examen scientifique de Santé Canada a révélé des liens convaincants entre la consommation accrue de ces nutriments et l’augmentation des problèmes de santé comme l’hypertension artérielle, l’obésité, le diabète de type 2, la carie dentaire et les maladies cardiovasculaires.

[Français]

En même temps, nous savons que la publicité alimentaire fait principalement la promotion d’aliments riches en nutriments comme ceux-là.

Des études canadiennes ont montré que plus de 90 % des aliments annoncés à la télévision et sur les sites Web préférés des enfants et des adolescents sont des produits qui nuisent à une saine alimentation.

Des recherches menées au Canada et à l’échelle internationale ont montré que la publicité alimentaire influence les attitudes, les préférences, les demandes d’achat et la consommation des enfants en matière d’alimentation. Il est également difficile pour les parents de protéger leurs enfants de ces influences, malgré tous leurs efforts.

La publicité alimentaire est omniprésente et sophistiquée.

Les enfants voient et entendent de la publicité alimentaire tout au long de la journée, sur toute une série de plateformes médiatiques, comme la télévision, les services de diffusion en continu, les médias sociaux et les jeux vidéo. On la retrouve également dans divers milieux, comme les magasins d’alimentation au détail, les cinémas et les centres de loisirs, ainsi que sur les emballages des aliments.

Les enfants sont les plus vulnérables, car ils ne possèdent pas encore les capacités cognitives nécessaires pour reconnaître et comprendre les intentions persuasives qui se cachent derrière la publicité alimentaire.

L’importance de cet enjeu est également reconnue à l’échelle internationale. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a appelé les États membres à mettre en place des politiques visant à réduire l’impact de la publicité sur les aliments riches en sodium, en sucre ou en gras saturés destinée aux enfants.

L’année dernière, l’OMS a publié des orientations actualisées sur les politiques recommandées pour protéger les enfants des effets néfastes de la publicité alimentaire. L’OMS a également indiqué que les approches obligatoires, comme celle proposée au moyen du projet de loi C-252, sont plus efficaces que les mesures volontaires.

D’autres pays mettent en œuvre des restrictions sur la publicité alimentaire destinée aux enfants. Il s’agit notamment du Mexique, du Chili, de l’Argentine, du Royaume-Uni, du Portugal et de l’Espagne.

[Traduction]

Le projet de loi C-252 est également conforme au rapport de mai 2024 du Comité permanent de la santé, intitulé Favoriser une enfance saine, qui recommande que le gouvernement du Canada impose des restrictions à la publicité d’aliments malsains destinée aux enfants. Le projet de loi fonctionnerait de concert avec d’autres initiatives de Santé Canada dans le cadre de sa stratégie en matière de saine alimentation afin d’améliorer l’environnement alimentaire au Canada. Le ministère a mené à bien plusieurs initiatives dans le cadre de cette stratégie, y compris la mise à jour du Guide alimentaire canadien, qui fournit un fondement scientifique pour une saine alimentation.

La restriction de la publicité alimentaire destinée aux enfants est le dernier pilier de cette stratégie, et le projet de loi C-252 viendrait appuyer cet objectif.

Entre avril et juin 2023, le ministère a mené des consultations sur une approche stratégique qui a éclairé l’intention du gouvernement de modifier le Règlement sur les aliments et drogues afin de restreindre la publicité alimentaire destinée aux enfants. L’approche proposée visait à restreindre la publicité à la télévision et sur Internet destinée aux enfants de moins de 13 ans pour les aliments qui contribuent à une consommation excessive de sodium, de sucres et de gras saturés.

Bien que la Loi sur les aliments et drogues accorde des pouvoirs pour mettre en œuvre des règlements, le projet de loi C-252 clarifie la loi, prévoit un examen quinquennal obligatoire pour surveiller l’évolution des publicités auprès des 13 à 17 ans et donne au Parlement l’occasion d’examiner pleinement la question.

En conclusion, le projet de loi C-252 répond à une préoccupation urgente en matière de santé publique et s’inscrit dans le droit fil de l’engagement pris par le gouvernement en vue de protéger la santé et le bien-être des enfants au Canada. Il s’agit également d’un grand pas en avant dans cet important dossier, et le tout est complémentaire aux travaux en cours à Santé Canada. J’ai hâte d’en discuter avec vous et de répondre à vos questions.

La présidente suppléante : Je vous remercie de votre déclaration préliminaire. Nous allons passer aux questions des membres du comité. Les sénateurs disposent de cinq minutes pour les questions et les réponses. Nous allons commencer par la marraine du projet de loi au Sénat, la sénatrice Dasko.

La sénatrice Dasko : Je vous remercie tous de votre présence aujourd’hui et du travail que vous faites depuis très longtemps dans ce dossier.

Je vais commencer par deux questions. La première concerne ce que l’industrie décrit comme son code obligatoire. Les représentants de l’industrie ont précisément utilisé le mot « obligatoire » et se sont parfois opposés à la façon dont nous qualifions leur code de volontaire.

Pourriez-vous nous dire exactement pourquoi leur code n’est pas obligatoire? Je suppose qu’ils le qualifient de la sorte parce que tous les membres de leur association doivent s’y conformer, mais les annonceurs au grand complet ne font pas partie de leur organisation. Quoi qu’il en soit, c’est ainsi que je vois les choses, mais j’aimerais que vous nous expliquiez pourquoi leur code n’est pas obligatoire. Merci.

David K. Lee, dirigeant principal de la réglementation, Direction générale des produits de santé et des aliments, Santé Canada : Je vous remercie de la question. C’est une piste de réflexion importante. Nous félicitons l’industrie de s’être réunie et d’avoir essayé de créer des règles pour elle-même en ce qui concerne la publicité destinée aux enfants, mais nous considérons cela plutôt comme une forme d’autoréglementation. Si, par exemple, l’un de ses membres faisait de la publicité dans une émission pour enfants et que cela contrevenait à son code, une lettre pourrait être écrite, et on pourrait le persuader de retirer l’annonce. En revanche, l’industrie alimentaire est déjà très fortement réglementée par les lois. Aux termes de la Loi sur les aliments et drogues, si quelqu’un contrevenait dans le même scénario, par exemple, cela constituerait une infraction. Il pourrait y avoir des poursuites, des amendes et des sanctions, ainsi que des mesures très claires et décisives.

La sénatrice Dasko : Pour clarifier à nouveau, ce n’est pas obligatoire parce qu’ils ne sont pas tenus d’appartenir à cette organisation. Est-ce que je me trompe?

M. Lee : Si ce projet de loi vient effectivement modifier la Loi sur les aliments et les drogues, l’identité du contrevenant n’aura pas d’importance. Si vous transgressez la loi, celle-ci s’applique à vous.

En ce qui concerne le code, nous estimons qu’une entreprise non membre qui commet une infraction peut quand même être interpellée. Cependant, là encore, il s’agit d’une simple prise de contact; il n’est pas vraiment alors possible d’appliquer la loi. Nous pensons que le terme « obligatoire » s’applique à l’effet d’une loi.

La sénatrice Dasko : Donc, s’ils ne sont pas membres, on ne fait que les interpeller. On n’a aucunement compétence sur...

M. Lee : C’est ce que nous avons cru comprendre.

La sénatrice Dasko : D’accord. Merci. Je voulais préciser que le projet de loi, en modifiant la Loi sur les aliments et les drogues, prévoirait également différentes dispositions et notamment un mécanisme de plainte, un contrôle de l’environnement publicitaire et des sanctions. Même si ces termes ne sont pas expressément utilisés dans le projet de loi, toutes ces mesures seront-elles intégrées à la Loi sur les aliments et les drogues? Pourriez-vous nous confirmer que ce sera bel et bien le cas?

Mme Boye : Merci beaucoup pour la question. Les activités visant la conformité et l’application de la loi constitueront une partie essentielle de la démarche réglementaire qui soutiendra la mise en œuvre de ce projet de loi s’il est adopté, ainsi que les initiatives que Santé Canada s’emploie à mettre de l’avant.

Pour ce faire, on peut procéder de différentes manières. Il s’agit notamment de mesures d’inspection et de contrôle de la conformité fondées sur la notion de risque. Il faut pouvoir s’en remettre à un cadre solide pour assurer la conformité. Cela inclut également la promotion de la conformité, les initiatives d’éducation et de sensibilisation en la matière ainsi qu’un suivi permettant de bien saisir l’évolution du contexte afin d’éclairer les actions ultérieures. Cela peut aller jusqu’à des poursuites judiciaires si nécessaire.

La sénatrice Dasko : Quels sont les types de sanctions possibles en vertu de la loi?

M. Lee : Il existe diverses sanctions envisageables. Il y a les infractions sommaires, mais aussi les mises en accusation. Les sanctions peuvent aller jusqu’à 5 millions de dollars par infraction — ou plus si l’infraction est commise de manière insouciante et délibérée. On laisse donc une certaine marge discrétionnaire. Ce sont toujours les tribunaux qui déterminent la gravité de l’infraction, mais la loi prévoit des sanctions assez sérieuses.

La sénatrice Dasko : Merci.

Le sénateur Cormier : Je vous remercie. Ma première question fait suite à celles posées par la sénatrice Dasko.

[Français]

Comme vous le constatez, la préoccupation est liée à l’application et à la surveillance de la loi ainsi qu’à l’évaluation de sa mise en œuvre. Quels sont les défis auxquels Santé Canada devra faire face, ou quelles mesures précises Santé Canada devra-t-il mettre en place pour s’assurer de la juste application de la loi?

[Traduction]

Mme Boye : Si ce projet de loi reçoit la sanction royale, Santé Canada élaborera des règlements à l’appui de sa mise en œuvre. Au cours des dernières années, Santé Canada a consulté les gens sur les politiques en la matière. L’année dernière, nous avons mené une consultation sur une politique relative à la publicité destinée aux enfants, et nous avons reçu de nombreuses réponses. Nous prenons en considération tous ces commentaires, qui alimentent nos réflexions sur la forme que pourrait prendre cette réglementation.

Dans le cadre de cette consultation, nous avons notamment examiné les critères qui seront utilisés dans la réglementation touchant les nutriments. Nous nous sommes également penchés sur la définition du terme « publicité», qui est souvent un peu floue pour les programmes d’autoréglementation. Il s’agit également de définir la catégorie d’aliments, pour ainsi dire, qui sera visée par la réglementation et, en même temps, d’être clair quant à la teneur des mécanismes d’assurance de la conformité et d’application de la loi. C’est donc sur ce point que nous mènerions des consultations si ce projet de loi devait recevoir la sanction royale. Cela fera partie des consultations que nous réaliserons dans le cadre de la publication dans la partie I de laGazette du Canada.

Le sénateur Cormier : Pouvez-vous nous faire part de ce que vous avez entendu lors des consultations menées par votre ministère ?

Mme Boye : Nous sommes en train de revoir le tout, et cela sera intégré au résumé de l’analyse d’impact de la réglementation, une composante du processus de consultation qui nous permet d’examiner ces questions et ces commentaires et d’y répondre.

Le sénateur Cormier : Vous avez parlé de sensibilisation. Je suis un adepte des campagnes de sensibilisation. Il est important de s’assurer que les gens sont au fait de la situation. Avez-vous des idées ou des réflexions à ce sujet? Avez-vous l’intention de mettre en place une campagne de sensibilisation pour veiller à ce que l’on se conforme à ces nouvelles dispositions?

Mme Boye : En ce qui concerne la sensibilisation, nous avons mis en œuvre en 2016 la Stratégie en matière de saine alimentation dans le cadre de laquelle nous surveillons ce qui se passe au chapitre de la publicité destinée aux enfants. Nous avons par ailleurs lancé l’initiative Ami du guide alimentaire qui s’accompagne de nombreuses activités de sensibilisation et de promotion, tout cela dans le but de faire en sorte que le choix le plus sain soit aussi le choix le plus facile pour les Canadiens.

Le sénateur Cormier : Pouvez-vous nous indiquer si cela produit vraiment les résultats escomptés? Si l’on considère le taux d’obésité, peut-on dire que les mesures mises de l’avant fonctionnent? Y a-t-il autre chose que nous pourrions faire? C’est ce que je voudrais savoir.

[Français]

Alfred Aziz, directeur, Bureau des sciences de la nutrition, Direction des aliments et de la nutrition, Direction générale des produits de santé et des aliments, Santé Canada : Il faut savoir que ce genre de maladie chronique et les conditions sont multifactoriels. Il n’y a donc pas une solution magique à ces enjeux. C’est pourquoi Santé Canada a adopté une approche multidimensionnelle avec la stratégie en matière de saine alimentation. On a mis de l’avant des initiatives qui complètent le projet de loi C-252, comme l’étiquetage pour les produits à teneur élevée en sucre, en sodium ou en gras saturés. Il y a aussi le guide alimentaire.

Vous avez demandé si on faisait des campagnes de sensibilisation. Le guide alimentaire contient une recommandation spécifique indiquant qu’on devrait être conscient de la publicité alimentaire. On a transmis des messages dans la promotion du guide alimentaire qui ciblent effectivement cet enjeu de la publicité alimentaire. Notre programme de surveillance des publicités alimentaires destinées aux enfants nous fournira aussi des données pour savoir comment les pratiques vont changer et la façon dont tout cela assurera un complément à nos initiatives en matière d’éducation. Il n’y aura pas une seule mesure qui résoudra l’ensemble du problème. Il faudra entamer des démarches à plusieurs niveaux, pas seulement au gouvernement fédéral. Tout le monde est responsable de promouvoir une saine alimentation.

Le sénateur Cormier : Merci.

Le sénateur Boudreau : Merci aux témoins d’être ici aujourd’hui.

J’aimerais revenir sur la question que j’ai posée au premier groupe pour comprendre la mise en œuvre d’une telle loi. Supposons que le projet de loi est adopté et que la loi entre en vigueur. Comment pouvons-nous mettre en place des paramètres pour faire en sorte que les jeunes de moins de 13 ans ne voient pas de publicités qui leur sont nuisibles? Disons qu’un enfant de 10 ans, à la maison, regarde la télévision à une chaîne américaine. On dira que la publicité ne vise pas les jeunes. Toutefois, les jeunes la verront malgré tout. Comment pouvons-nous déterminer qu’une publicité vise les jeunes? Comment pouvons‑nous renforcer ces éléments? C’est ce que je cherche à mieux comprendre.

[Traduction]

Mme Boye : Dans le cadre des consultations que nous avons menées sur la politique, nous avons justement cherché à définir précisément ce qu’on entend par « publicité » et par « publicité destinée aux enfants ». Dans ce dernier cas, si la plateforme sur laquelle la publicité est diffusée cible les enfants, on présume que cette publicité leur est destinée.

Si la plateforme s’adresse à un public général, mais que la publicité se démarque par un contexte, un contenu, des personnages, des caractéristiques, une conception, une technologie ou des techniques ciblant expressément les enfants, on pourrait également être amené à conclure qu’ils en sont les destinataires. Plusieurs facteurs seront donc pris en considération pour déterminer si une publicité est spécifiquement destinée aux enfants. Le critère de l’attrait pour les enfants est également pris en compte en s’appuyant sur une variété d’éléments.

Le sénateur Boudreau : Tous ces facteurs seraient-ils précisés dans les règlements pris dans la foulée de ce projet de loi?

M. Lee : C’est ce que prévoit le projet de loi en autorisant le gouverneur en conseil à énoncer explicitement ces facteurs. Comme vous l’avez dit, ce sera un travail difficile qui exigera une grande précision. Le projet de loi fait en sorte que cela devienne possible.

[Français]

Le sénateur Boudreau : Des amendements ont été apportés au projet de loi lors de l’étude en comité à la Chambre des communes. On dit que l’interdiction visait la publicité d’aliments et de boissons. Or, on parle maintenant d’aliments réglementaires. Pouvez-vous nous dire ce qu’est un aliment réglementaire par rapport à un aliment en général? Quelle est la différence?

[Traduction]

M. Lee : Il sera important de bien définir le champ d’application de l’interdiction. Nous devrons notamment déterminer quelles catégories de denrées alimentaires pourraient être établies. Nous nous concentrerons principalement sur les aliments préemballés, par opposition aux aliments complets. Il est certain que cela doit être lié à un préjudice possible, de sorte que les pommes, les carottes et les denrées semblables ne sont pas vraiment visées par l’interdiction. Nous devons pouvoir dire que tel ou tel aliment est préemballé et peut-être entrer encore davantage dans les détails. Mais c’est le genre d’exercice auquel nous nous livrerons.

Le sénateur Boudreau : Lorsque le projet de loi fait référence aux « aliments réglementaires », s’agit-il des aliments qui seront spécifiés dans les règlements?

M. Lee : Oui, c’est cela. Il est bien indiqué dans la loi qu’il s’agit des aliments prescrits par la réglementation.

[Français]

La sénatrice Mégie : J’ai trois questions qui sont interreliées et vos réponses vont probablement répondre aux trois.

Comment fonctionne le programme de surveillance du contenu des aliments? Concrètement, qu’est-ce que vous faites? Ce contenu des aliments, l’industrie continue de le produire. Le projet de loi empêche la publicité de ces produits, si je comprends bien, mais ils sont produits quand même et ils sont quand même sur les tablettes. Alors, quel est le lien avec la surveillance?

Ensuite, quand ils ont fait le code de l’industrie sur la publicité, est-ce que cela s’est fait en collaboration avec Santé Canada ou avec d’autres professionnels de la santé qui sont dans le domaine de la nutrition?

[Traduction]

Mme Boye : En ce qui concerne la première question portant sur le contenu des aliments et la distinction à faire entre commercialisation et publicité, les règlements cibleront surtout la publicité, conformément à l’objet de la Loi sur les aliments et drogues et, je crois, à l’objet de ce projet de loi. Dans le cadre de la réglementation, nous définirons les différents types d’aliments et les critères nutritionnels qui s’appliqueront à chacun. Ainsi, pour déterminer si un produit alimentaire est conforme, nous devrons en examiner la composition et vérifier si l’on dépasse les seuils que nous avons prescrits dans les règlements. Si cette denrée alimentaire fait l’objet d’une publicité ciblant les enfants, elle tombera sous le coup de l’obligation de conformité et d’application de la loi. Plusieurs facteurs seront pris en compte pour s’assurer que les publicités ne ciblent pas les enfants et qu’elles sont conformes à la réglementation.

En ce qui concerne la deuxième question au sujet du code, je dois vous dire qu’il a été élaboré par l’industrie et par différents intervenants dans ce contexte. Il n’a pas été conçu conjointement avec Santé Canada. C’est un code de l’industrie.

[Français]

La sénatrice Mégie : La députée Lattanzio a parlé des plaintes qu’on peut faire pour dire que telle publicité concerne tel aliment malsain. Qui peut faire la plainte et à quel organisme peut-on la faire? Est-ce que ce peut être un concurrent qui veut nuire ou monsieur et madame Tout-le-Monde qui trouvent que leur enfant ne devrait pas manger un aliment en particulier? Qui peut porter plainte, et à qui?

[Traduction]

Mme Boye : L’Agence canadienne d’inspection des aliments est responsable de l’application des règlements touchant l’alimentation. Dans le cadre des efforts déployés pour élaborer une réglementation visant à restreindre la publicité destinée aux enfants, nous collaborons avec l’agence pour la mise en place des mécanismes d’assurance de la conformité et d’application de la loi, ce qui permettra de recevoir les plaintes et d’assurer la surveillance nécessaire pour garantir la conformité. Il n’en demeure pas moins que nous sommes aussi disposés à travailler avec d’autres entités, comme Normes de la publicité, qui seraient prêtes à collaborer avec nous. Je sais que Normes de la publicité travaillent actuellement avec l’industrie pour l’élaboration de son code. Dans le cadre de la consultation, nous serons donc disposés à envisager différents mécanismes pour soutenir leur travail d’assurance de la conformité et d’application de la loi.

[Français]

La sénatrice Mégie : Merci.

[Traduction]

La sénatrice Burey : Merci d’être des nôtres aujourd’hui et merci pour l’exposé que vous nous avez présenté. Je reviens à la question que j’ai posée à la députée qui parraine ce projet de loi au sujet des influenceurs d’âge mineur. Pouvez-vous me donner une idée de la forme que prendront les règlements qui seront établis dans ce contexte?

Mme Boye : Les règlements et les mesures visant la conformité et l’application de la loi s’appliqueront aux annonceurs, et ils prendront en compte la rémunération versée pour la publicité diffusée. Ainsi, si un enfant influenceur reçoit une rémunération pour faire la promotion d’un produit alimentaire, il est considéré comme étant un annonceur du fait qu’il est rémunéré pour le faire. C’est ce qui sera pris en compte, en particulier en ligne et sur les réseaux sociaux.

La sénatrice Burey : Les mesures d’application de la loi viseraient-elles la personne qui paie l’enfant influenceur?

M. Lee : Nous voudrons sans doute faire comprendre à l’influenceur qu’il existe une loi et que nous le tiendrons au courant de la suite des choses, mais, comme nous l’avons indiqué, nous concentrerons généralement nos efforts sur l’instigateur de la publicité.

La sénatrice Burey : C’est un très gros problème. Merci de nous avoir fourni toutes ces précisions, notamment quant à la définition de la publicité et à l’importance qu’elle revêt.

Je voulais soulever l’enjeu de la sensibilisation dont le sénateur Cormier vient de vous entretenir. J’aurais tout de même à ce sujet une question qui peut paraître ridicule, mais que je vous pose quand même. Par exemple, on peut placer ces aliments préemballés juste à côté de tout un étalage de fruits et de légumes. Se demande-t-on quel pourcentage de la publicité est conforme? Est-ce qu’un seul faux pas suffit pour être reconnu coupable? Qu’avez-vous envisagé à ce titre? Les gens peuvent être très sournois lorsqu’il s’agit de camoufler ainsi certaines choses.

Mme Boye : Dans le cadre du processus réglementaire, nous consulterons l’industrie et les différentes parties prenantes au sujet des divers aspects de la réglementation. Si ce projet de loi reçoit la sanction royale — et nous sommes en train d’élaborer des règlements pour en appuyer la mise en œuvre —, nous prendrons en compte tous ces éléments.

Comme je l’ai mentionné, plusieurs voies seront explorées pour assurer la conformité et l’application de la loi, ce qui inclut la collaboration avec les parties prenantes concernées et l’industrie pour les amener à se conformer. Donc, comme nous l’avons dit, des efforts seront déployés pour éduquer et sensibiliser les gens et pour les inciter à se conformer aux nouvelles dispositions. En outre, différentes initiatives pourront être envisagées afin d’aider l’industrie à respecter la réglementation. En fait, cela dépendra du contexte, en fonction des règlements qui seront pris et des consultations qui seront menées à cet effet.

La sénatrice Burey : Merci pour cette réponse, mais vous ne manquerez pas de voir des fruits et des légumes au milieu des produits dont nous voulons interdire la publicité. S’agit-il d’une approche de type « tout ou rien »? Ce projet de loi adopte-t-il la position selon laquelle nous ne voulons pas de publicité pour les enfants, même si elle porte sur des fruits sains? Vous dites vouloir promouvoir les aliments sains.

M. Lee : L’interdiction ciblerait vraiment les comportements non souhaitables.

La sénatrice Burey : Très bien.

M. Lee : Dès lors que vous faites de la publicité pour un produit dont la teneur dépasse le maximum que nous avons fixé au titre des principaux ingrédients ciblés, c’est suffisant. La présence d’autres ingrédients ne pose pas problème.

La sénatrice Burey : Merci beaucoup.

La présidente suppléante : J’aurais une brève question complémentaire. Les taux de sel, de sucres et de gras saturés seront pris en compte. Je présume que cela est coordonné avec l’ensemble de la stratégie, et notamment avec l’emballage sur le devant de l’étiquette, et que le tout est basé sur des données. Comment déterminons-nous ces taux? Le système est-il suffisamment flexible? Lorsque les données évolueront, comme c’est le cas dans les domaines de la santé et de la nutrition, de la teneur en sucres, en sel, etc., le système sera-t-il suffisamment souple pour s’adapter à d’éventuels changements scientifiques?

M. Aziz : Merci pour la question, madame la présidente. Nous savons, comme nous l’avons mentionné précédemment, que les enfants canadiens dépassent les limites recommandées de gras saturés, de sodium et de sucres dans leur alimentation, et que la plupart de ces excès proviennent d’aliments hautement transformés dont le guide alimentaire canadien recommande de limiter la consommation. Nous avons mené des consultations pour savoir quel sens donner à tout cela et quels types d’aliments seront soumis à l’interdiction, et nous avons déterminé que le produit alimentaire doit satisfaire à deux critères. Premièrement, il doit contenir des matières grasses ajoutées, du sodium ajouté ou des sucres libres. Pour que les choses soient bien claires, nous entendons par « sucres libres » les sucres ajoutés et les sucres naturellement présents dans les jus, les sirops, le miel, etc. Un maximum a été fixé pour la quantité totale de ces nutriments. S’ils dépassent ce seuil, ils seront soumis à l’interdiction.

Cette mesure a été élaborée pour protéger les enfants canadiens qui risquent de consommer des aliments dépassant le seuil recommandé pour ces quantités de nutriments.

Lorsque nous tiendrons nos consultations sur la proposition réglementaire à venir, nous aurons l’occasion d’examiner ce qu’indiquent les données disponibles et ce que les parties prenantes auront à dire à ce sujet, et il y aura une certaine flexibilité pour effectuer les ajustements nécessaires en fonction des éléments probants qui ressortiront de cette démarche.

La présidente suppléante : Merci pour ces précisions.

La sénatrice Bernard : J’aimerais revenir sur cette dernière question et sur le fait que le processus repose sur les données. Disposons-nous de données ventilées? Est-ce que tous les enfants sont concernés au même titre ou avons-nous des données ventilées qui laisseraient entendre que certains enfants sont plus exposés que d’autres?

M. Aziz : Dans une certaine mesure, oui. Nous nous appuyons sur les données nationales. Nous ventilons généralement les données en fonction de l’âge et du sexe. Par exemple, nous savons qu’environ 72 % des enfants de 4 à 13 ans consomment trop de sodium par rapport à ce qui est recommandé. Ce chiffre est un peu moins élevé pour les enfants plus jeunes dans la tranche de 1 à 4 ans : 50 % d’entre eux dépassent le seuil recommandé. Pour ce qui est de sous‑populations plus ciblées, nous devrons voir si les données nous permettent d’effectuer ces analyses et de tirer des conclusions semblables. Je n’ai pas la réponse pour l’instant, mais je peux vérifier si nous disposons de ce type d’informations.

La sénatrice Bernard : Il serait utile de ventiler ces données en fonction du statut socioéconomique. Je pense que c’est un élément important.

Ma deuxième question porte sur vos consultations avec les parties prenantes. À plusieurs reprises, vous avez mentionné la tenue de ces consultations aux fins de l’élaboration des règlements. Qui sont les parties prenantes que vous consultez ainsi?

Mme Boye : Conformément à la Directive du Cabinet sur la réglementation, la consultation est un élément essentiel du processus réglementaire, et nous tâtons le pouls d’une grande variété d’intéressés dans les différentes régions au Canada. Ainsi, nous consultons notamment des intervenants du secteur de la santé et des citoyens canadiens. Nous tenons de vastes consultations.

Nous avons une liste de parties prenantes à qui nous envoyons des informations, et le public peut également participer à ces consultations.

En ce qui concerne votre question sur le statut socioéconomique, Santé Canada s’assure toujours de protéger l’ensemble des Canadiens au moyen des règlements qui sont mis en place. C’est une considération qui est au cœur de notre processus réglementaire.

La sénatrice Bernard : Cependant, tous les Canadiens n’ont pas le même accès aux produits selon l’endroit où ils vivent, l’importance de leurs revenus, etc. C’est pourquoi je pense qu’il serait utile de ventiler les données dans ce contexte.

Le sénateur Boudreau : J’ai toujours été d’avis qu’il ne fallait pas réinventer la roue. On nous a dit ce matin que cinq pays ont actuellement une loi similaire. Deux autres pays y travaillent; le travail législatif est en cours. Santé Canada a-t-il comparé la version actuelle du texte législatif à ce qui existe déjà dans d’autres pays? Notre texte serait-il parmi les meilleurs dans ce groupe de sept ou huit pays? Serait-il au milieu? Serait-il parmi les pires? Comment notre loi se compare-t-elle par rapport à celles des autres pays qui ont légiféré?

Mme Boye : Merci beaucoup pour cette question. L’Organisation mondiale de la santé a fourni des conseils sur la restriction de la publicité destinée aux enfants. Elle a fourni des conseils sur les modèles de profils nutritionnels à prendre en compte. Des pays comme le Chili, l’Argentine, le Mexique, le Portugal, le Royaume-Uni, l’Espagne, la Suède et d’autres ont tenu compte des recommandations de l’Organisation mondiale de la santé et ont mis en œuvre des restrictions à la publicité alimentaire de différentes manières.

En plus du modèle de profil nutritionnel et du champ d’application de la réglementation, il sera également question du créneau horaire et du contenu diffusé, ce qui indiquera quand les publicités alimentaires pourraient passer à la télévision, par exemple.

Dans le cadre du processus d’élaboration du règlement, Santé Canada mènera des consultations à ce sujet et nous avons pris en considération le travail effectué dans le monde entier sur cette question. Nous attendons avec impatience les commentaires que nous recevrons au cours du processus de la partie 1 de la Gazette du Canada, et qui serviront à l’élaboration de la version définitive du règlement.

Le sénateur Boudreau : Tel qu’il est rédigé actuellement, le projet de loi se concentre sur les enfants de moins de 13 ans, et propose d’inclure la tranche d’âge des 13 à 18 ans dans cinq ans. Or, dans le mémoire que nous avons reçu du Fonds international d’urgence pour l’enfance des Nations unies, ou UNICEF, il est suggéré de cibler immédiatement les enfants de 18 ans. Santé Canada a-t-il une opinion sur l’âge visé? Le ministère pense-t-il que ce qui est proposé dans le projet de loi est la bonne approche? Devrions-nous être plus agressifs dès le départ?

M. Lee : Merci. Comme vous le savez, on en discute depuis longtemps. Le projet de loi S-228 visait une tranche d’âge plus étendue. À l’époque, les discussions ont porté sur la nécessité de s’assurer que l’interdiction elle-même ne ratissait pas trop large. La publicité pour adultes tombait également dans le collimateur, ce qui pose des problèmes pour ce qui est de faire respecter la loi et d’autres questions de ce genre. On pensait, entre autres, que si l’on visait les enfants de moins de 13 ans, on serait certainement en mesure de le faire avec beaucoup plus de succès. C’était l’une des considérations.

En outre, à l’époque, il a été décidé de mettre en place la surveillance avant de revenir devant votre comité et la Chambre des communes, car on craignait que la surveillance ne s’étende à cette autre tranche d’âge. C’est une mesure qui a été mise en place pour s’assurer que cela ne se produise pas.

Le sénateur Boudreau : Merci.

La sénatrice Dasko : Madame Boye, vous avez mentionné que l’accent allait être mis sur la publicité à la télévision et sur Internet. C’est ce que prévoit le règlement et c’est ce que vous avez indiqué. Mais il y a de la publicité dans les points de vente et dans d’autres endroits. Les enfants sont exposés à la publicité dans les épiceries et ailleurs. Pourriez-vous me dire comment cela s’inscrit dans le cadre de l’objectif? Il est évident, comme l’a dit la sénatrice Burey, que la télévision et Internet occupent une place prépondérante, en particulier Internet dans le cas des enfants, mais les enfants sont exposés à la publicité à d’autres endroits. Allez-vous étendre le champ d’application de la réglementation à ces lieux? S’agit-il d’une mesure temporaire visant à se concentrer sur ces deux médias qui, on s’entend, occupent une place démesurée?

Mme Boye : De 2016 à 2019, nos consultations sur la politique ont porté sur de nombreux facteurs. En 2023, à la lumière des commentaires que nous avons reçus, nous avons décidé de donner la priorité aux consultations sur les publicités diffusées à la télévision et en ligne, auxquelles les enfants sont grandement exposés.

Les enfants âgés de 2 à 6 ans passent en moyenne 24 heures par semaine devant les écrans de télévision et d’appareils. Cela représente une journée entière par semaine. Les enfants âgés de 7 à 11 ans passent près d’une journée et quart, soit environ 30 heures par semaine, devant les écrans de télévision et d’appareils. Or, des études récentes indiquent que les enfants y sont grandement exposés à la publicité alimentaire, soit environ 5 800 publicités par année. Cela représente quelque 112 publicités par semaine. Les consultations sur la politique ont ciblé la télévision et Internet, car les enfants y sont bombardés par les publicités.

M. Aziz : Cela fera également partie des consultations. Nous pourrons entendre ce que les parties prenantes auront à dire dans le cadre du processus réglementaire. Il est également important de noter que nous surveillons les paramètres, mais nous ne proposons pas de les réglementer pour l’instant.

Notre surveillance est très complète. Elle vise les paramètres et les médias qui ne sont pas couverts par la proposition. C’est pourquoi il est important de voir comment le changement va se produire et quelles tendances se manifesteront afin de pouvoir apporter d’autres mesures en complément, dont des mesures d’éducation et de sensibilisation, comme cela a été soulevé plus tôt, et d’autres types d’intervention si nécessaire.

La sénatrice Dasko : La surveillance est essentielle, car elle permet de vérifier ce qui se passe ailleurs et de déterminer où la publicité peut se déplacer ou se développer, voire même repérer de nouvelles technologies.

M. Aziz : Tout à fait.

La sénatrice Dasko : J’ai une question connexe qui concerne le parrainage. Je comprends que la loi québécoise n’interdit pas le parrainage, comme le parrainage d’équipes de hockey. Ces équipes sont très importantes pour les enfants. Je comprends que le parrainage est toujours possible. Par exemple, si vous avez une franchise Tim Hortons, vous pouvez mettre une enseigne Tim Hortons, mais vous ne pouvez pas mettre de grandes images de beignes bourrés de sucre et ce genre de choses. Si quelqu’un pouvait tirer au clair la question du parrainage, ce serait utile. Merci.

Mme Boye : En ce qui concerne les consultations menées jusqu’à présent et l’orientation de la politique, nous ne visons pas le parrainage dans la réglementation. J’espère que cela clarifie les choses.

La sénatrice Dasko : Oui, bien sûr. Il est important de le savoir, car il s’agit d’une source de revenus importante pour de nombreux sports d’équipe dans tout le pays. Merci.

La présidente suppléante : Chers collègues, je constate qu’il n’y a plus de questions. Je remercie les témoins. Nos échanges ont été fort utiles.

[Français]

Merci beaucoup d’avoir été là; cela nous aide beaucoup alors que nous entamons l’étude de ce projet de loi. Nous reprendrons l’étude du projet de loi C-252 le mercredi 20 novembre prochain, donc merci d’avoir été là et merci de vos questions, chers collègues.

(La séance est levée.)

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