Aller au contenu
RIDR - Comité permanent

Droits de la personne

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Droits de la personne

Fascicule 8 - Témoignages du 13 février 2012


OTTAWA, le lundi 13 février 2012

Le Comité sénatorial permanent des droits de la personne se réunit aujourd'hui, à 17 heures, pour étudier les questions de discrimination dans les pratiques d'embauche et de promotion de la Fonction publique fédérale, étudier la mesure dans laquelle les objectifs pour atteindre l'équité en matière d'emploi pour les groupes minoritaires sont réalisés et pour examiner l'évolution du marché du travail pour les groupes des minorités visibles dans le secteur privé.

Le sénateur Mobina S. B. Jaffer (présidente) occupe le fauteuil.

[Français]

La présidente : Honorables sénateurs, je déclare ouverte cette neuvième séance de la quarante et unième législature du Comité sénatorial permanent des droits de la personne.

Le Sénat nous a confié le mandat d'examiner les questions relatives aux droits de la personne au Canada et ailleurs dans le monde.

Je suis Mobina Jaffer et je vous souhaite la bienvenue à cette réunion.

[Traduction]

La présidente : Avant de continuer, j'aimerais inviter mes collègues à se présenter.

[Français]

Le sénateur Brazeau : Sénateur Patrick Brazeau, du Québec.

[Traduction]

Le sénateur Ataullahjan : Sénateur Ataullahjan, de Toronto, en Ontario.

Le sénateur Meredith : Sénateur Don Meredith, de l'Ontario.

Le sénateur Martin : Sénateur Yonah Martin, de Vancouver, Colombie-Britannique.

Le sénateur Oliver : Don Oliver, de la Nouvelle-Écosse.

Le sénateur Hubley : Sénateur Elizabeth Hubley, de l'Île-du-Prince-Édouard.

[Français]

La présidente : Chers collègues, nous sommes à nouveau ici aujourd'hui pour discuter des questions de discrimination dans les pratiques de recrutement et de promotion dans la fonction publique fédérale.

[Traduction]

Le comité a été autorisé à examiner ces questions. Nous avons examiné la mesure dans laquelle les objectifs de la Loi sur l'équité en matière d'emploi sont atteints dans la fonction publique.

Cette loi a pour objet de garantir que les organisations réglementées par le gouvernement fédéral offrent des chances égales d'emploi aux membres des quatre groupes désignés, soit les femmes, les Autochtones, les personnes handicapées et les membres des minorités visibles.

Elle impose aux employeurs d'évaluer dans quelle mesure les principes de l'équité en matière d'emploi sont réellement respectés dans leur milieu de travail et, suite à cette évaluation, de mettre en oeuvre, s'il y a lieu, des politiques pour apporter les changements nécessaires.

La loi s'accompagne aussi de directives sur la façon de procéder à ces évaluations, par exemple en comparant la représentation des membres des quatre groupes désignés au sein d'un milieu de travail donné à la disponibilité des membres de ces quatre groupes dans l'ensemble de la population active canadienne.

La loi désigne également les trois principaux organismes chargés de sa mise en oeuvre : le Conseil du Trésor du Canada, la Commission de la fonction publique et la Commission canadienne des droits de la personne. Le Conseil du Trésor et la Commission de la fonction publique s'acquittent des obligations du gouvernement fédéral à titre d'employeur en vertu de la loi, conformément à leurs autres responsabilités en vertu de la Loi sur la gestion des finances publiques ou de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, selon le cas.

La Commission canadienne des droits de la personne est chargée d'assurer la conformité à la loi, notamment en effectuant des vérifications pour déterminer si les employeurs assujettis à la loi remplissent les exigences prévues par la loi et en imposant des mesures correctives au besoin.

Dans son rapport de 1984 sur l'égalité en matière d'emploi pour la Commission royale d'enquête sur l'équité en matière d'emploi, la juge Rosalie Abella a écrit : « L'égalité en matière d'emploi ne deviendra réalité que si nous mettons tout en oeuvre pour y parvenir. »

Même si le mot « nous » implique que l'équité en matière d'emploi est une responsabilité partagée entre nous tous, ce sont ces trois grands organismes qui assurent le leadership pour que l'équité en matière d'emploi devienne une réalité dans la fonction publique fédérale.

[Français]

Le comité permanent a déjà produit des rapports sur ces questions. Il a commencé, en 2004, par examiner les pratiques d'embauche et de promotion dans la fonction publique fédérale et par étudier dans quelles mesures les objectifs d'équité en matière d'emploi étaient atteints.

En 2007, il a poursuivi son analyse des pratiques d'embauche et de promotion de la fonction publique fédérale et a publié un rapport intitulé L'équité en matière d'emploi dans la fonction publique fédérale : Nous n'y sommes pas encore. En 2010, il a publié son rapport le plus récent, intitulé Refléter le nouveau visage du Canada : L'équité en matière d'emploi dans la fonction publique fédérale.

[Traduction]

La grande préoccupation du comité est que l'équité en matière d'emploi dans la fonction publique fédérale n'est pas une réalité pour les quatre groupes désignés.

Les employés autochtones travaillent principalement dans seulement trois ministères : Affaires autochtones et Développement du Nord Canada, Service correctionnel Canada et Ressources humaines et Développement des compétences Canada.

En règle générale, les femmes occupent encore des postes administratifs peu rémunérés et accusent du retard par rapport aux hommes dans les nominations aux postes de gestion.

Le taux de recrutement des personnes handicapées est inférieur à leur taux de disponibilité au sein de la population active.

Le comité est particulièrement inquiet de voir que les membres des minorités visibles ne sont pas encore représentés dans la fonction publique d'une manière qui correspond à leur disponibilité sur le marché du travail. Il s'inquiète aussi de la lenteur des changements.

Avant de céder la parole aux témoins, je veux souligner le travail effectué par Maria Barrados, de la Commission de la fonction publique, pendant de nombreuses années. Elle était un témoin toujours fort bienvenu à notre comité et elle nous a aidés dans ces dossiers. Je sais que Mme Robinson saura la remplacer, mais je voulais prendre le temps de souligner le travail que Mme Barrados a fait pour la Commission de la fonction publique, pour les Canadiens et avec notre comité.

Dans un premier temps, nous accueillons, du Secrétariat du Conseil du Trésor, Daphne Meredith, dirigeante principale des ressources humaines; et Angela Henry, directrice, Politiques et programmes en milieu de travail.

Je pense que vous avez une déclaration à nous faire. Nous aurons ensuite quelques questions pour vous.

[Français]

Daphne Meredith, dirigeante principale des ressources humaines, Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada : C'est un honneur pour moi de comparaître devant ce comité pour parler de l'équité en emploi, un sujet que vous avez étudié longuement au cours des sept dernières années. Je sais que les membres du comité continuent d'avoir des préoccupations au sujet des objectifs du gouvernement en matière d'équité en emploi. Je veux consacrer mon temps aujourd'hui à les aborder.

[Traduction]

Le comité a récemment exprimé le regret qu'on n'ait pas toujours atteint l'équité en emploi dans la fonction publique pour les quatre groupes visés par la Loi sur l'équité en matière d'emploi : les femmes, les Autochtones, les personnes handicapées et les membres des minorités visibles.

Permettez-moi de décrire ma conception de la question, en tant que dirigeante principale des ressources humaines.

Je tiens à me référer au plus récent rapport sur l'équité en matière d'emploi dans la fonction publique, déposé vendredi dernier par le président du Conseil du Trésor.

Dans le rapport, on a souligné que le respect de la dignité humaine, c'est-à-dire la reconnaissance de la valeur et le traitement équitable de chaque personne, fait partie intégrante des valeurs de la fonction publique qui sous-tendent la façon dont le gouvernement recrute, promeut et évalue les membres de son personnel. Ces valeurs nous obligent à accorder des nominations fondées sur le mérite, à donner accès aux emplois de la fonction publique à tous les Canadiens qualifiés et à déployer des efforts pour garantir que les processus ne comportent pas d'obstacles systémiques.

Pour le greffier du Conseil privé, la nécessité pour l'ensemble des niveaux de la fonction publique de refléter la diversité de la population canadienne continue de constituer une priorité.

[Français]

Dans son programme pour le renouvellement de la fonction publique, le greffier a insisté sur l'importance d'élaborer des plans ministériels intégrés sur les activités et les ressources humaines qui comprennent des stratégies concrètes pour accroître la représentation, et assurer le perfectionnement des membres des groupes désignés aux fins de l'équité en emploi.

De plus, aux termes de son programme, les administrateurs généraux doivent fournir à leurs gestionnaires un ensemble de pratiques exemplaires, de méthodes concrètes permettant d'accroître la diversité.

[Traduction]

J'aimerais maintenant examiner certains chiffres tirés de notre dernier rapport sur l'équité en matière d'emploi.

Au cours de l'exercice 2010-2011, trois des quatre groupes désignés au titre de l'équité en emploi, c'est-à-dire les femmes, les Autochtones et les personnes handicapées, ont continué d'être bien représentés relativement à leur disponibilité au sein de la population active. La représentation des employés membres d'une minorité visible a augmenté pour atteindre 11,3 p. 100. Toutefois, ce groupe est demeuré sous-représenté par rapport à sa disponibilité au sein de la population active.

Au 31 mars 2010, les femmes représentaient 54,8 p. 100 de l'effectif de l'administration publique centrale. C'est le même pourcentage que pour l'exercice précédent. Ce taux de représentation était supérieur à la disponibilité des femmes au sein de la population active, qui est de 52,3 p. 100.

Les Autochtones formaient 4,7 p. 100 de l'administration publique centrale, ce qui constituait une faible hausse par rapport à 4,6 p. 100 enregistré l'exercice précédent. Ce niveau de représentation dépassait la disponibilité des Autochtones au sein de la population active, qui est de 3 p. 100.

La représentation des personnes handicapées dans la fonction publique s'établissait à 5,6 p. 100, ce qui constituait une légère baisse par rapport aux 5,7 p. 100 enregistrés l'exercice précédent. Cependant, elle est demeurée supérieure à la disponibilité de ce groupe au sein de la population active, qui est de 4 p. 100 pour ce groupe.

Entre 1996 et 2010-2011, la représentation des employés membres d'une minorité visible a connu la plus importante hausse parmi les quatre groupes désignés au sein de la fonction publique. Au cours de cette période, leur représentation a plus que doublé. Et pourtant, la représentation des employés faisant partie du groupe des minorités visibles est demeurée inférieure à leur disponibilité au sein de la population active, qui est de 12,4 p. 100.

[Français]

Il ne fait aucun doute qu'il faut déployer plus d'efforts dans ce domaine. L'examen horizontal des ressources humaines de 2009, et le passage à une gouvernance plus rationalisée en matière de gestion des ressources humaines, ont amené le bureau du dirigeant principal des ressources humaines à repenser à la meilleure façon de fournir des services à la collectivité des ressources humaines.

En 2009-2010, le réseau interministériel sur l'équité en matière d'emploi a été créé. Le réseau reposait sur un nouveau modèle de responsabilités ministérielles partagées, plutôt que sur une approche descendante centralisée. Les membres eux-mêmes sont responsables de l'établissement du programme et de la coordination des réunions et des activités du réseau. Ils échangent de l'information et des idées sur les moyens les plus efficaces pour atteindre les objectifs liés à l'équité en emploi.

[Traduction]

Par exemple, le Groupe de travail sur l'auto-identification continue de s'employer à déterminer les meilleures approches concernant l'auto-identification et à les communiquer. Cette nouvelle façon de faire donnera lieu à l'élaboration d'un programme plus pertinent sous l'impulsion d'une collectivité active et motivée.

Le Réseau interministériel sur l'équité en matière d'emploi est un excellent exemple d'organisations puisant dans les connaissances et les ressources collectives pour travailler différemment et partager la responsabilité de trouver de meilleures solutions à des problèmes communs. Le Groupe de travail sur l'auto-identification constitue un exemple de collaboration qui a porté fruit grâce à une collectivité de praticiens dévoués.

Le travail des nouveaux comités des champions et des présidents de l'équité en matière d'emploi est un autre exemple. Ils constituent un modèle de gouvernance qui présente de nombreux avantages permettant d'atteindre les objectifs de la fonction publique en matière d'équité en emploi. Ils permettent aux ministères de mieux faire du réseautage et de mieux échanger leurs pratiques exemplaires; ils offrent une approche commune pour les quatre groupes; et ils permettent aux employés d'avoir un accès plus facile et direct aux cadres supérieurs de leur ministère et aux sous-ministres champions chargés de l'équité en emploi, qui sont en mesure de donner suite à des recommandations.

En raison de la Loi sur la modernisation de la fonction publique et du virage amorcé récemment pour la simplification des rôles des organismes centraux, les administrateurs généraux assument maintenant un plus grand nombre de responsabilités et disposent de plus de souplesse pour gérer leur organisation et l'adapter à leurs besoins organisationnels et à leur milieu.

[Français]

Il est vrai que pour atteindre notre objectif d'une fonction publique diversifiée, une fonction publique qui soit le reflet de la société canadienne, il faut s'efforcer de recruter davantage dans les prochaines années.

Pourtant, il existe des exemples dans l'ensemble du gouvernement qui démontrent que les ministères ont reconnu, dans leurs plans et stratégies, la nécessité d'accroître la représentation des groupes désignés.

Une occasion nous est offerte aujourd'hui de nous pencher sur les enjeux liés à l'équité en emploi avec un regard différent et d'une manière davantage fondée sur la collaboration.

[Traduction]

La présidente : Merci beaucoup. Madame Henry, voulez-vous intervenir?

Angela Henry, directrice, Politiques et programmes en milieu de travail, Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada : Non, merci.

La présidente : Une précision, avant que je passe aux questions. Pour les chiffres que vous nous avez donnés, vous vous fondez sur les statistiques de 2006, n'est-ce pas?

Mme Meredith : Ce sont les statistiques du recensement de 2006 sur la disponibilité au sein de la population active. J'ai mentionné, par exemple, 12,4 p. 100 pour les minorités visibles, 4 p. 100 pour les personnes handicapées et 3 p. 100 pour les Autochtones.

La présidente : Il y a eu un recensement il n'y a pas longtemps, mais je sais qu'il faut un certain temps avant de compiler les résultats. Quand attendez-vous les nouveaux résultats du recensement pour pouvoir travailler avec les nouveaux chiffres? Ce qui m'inquiète, c'est que six années se sont écoulées, et nous savons que bien des choses ont changé au Canada depuis six ans. Chose certaine, le taux est très bas pour les minorités visibles et nous n'arrivons même pas actuellement à atteindre le taux de disponibilité qui remonte à 2006.

Mme Meredith : Oui, et c'est une question très pertinente. Nous savons que les résultats du recensement existent maintenant, c'est à Statistique Canada de déterminer quand nous aurons les données à partir desquelles nous pourrons établir les statistiques sur la disponibilité au sein de la population active. Je crains qu'il faudrait poser cette question à Statistique Canada.

La présidente : Madame Meredith, avant de venir, je suis certaine que vous avez lu la déclaration de Mme Barrados la dernière fois qu'elle est venue ici. Elle a déclaré qu'elle n'avait pas une grande confiance dans les données utilisées pour calculer le nombre de membres des minorités visibles qui travaillent actuellement au gouvernement fédéral. Elle croyait que les chiffres étaient inexacts et elle a indiqué qu'on arrivait mal à suivre les employés après leur embauche.

Elle a déclaré au comité :

Une méthodologie améliorée et des données fiables sont essentielles à l'obtention d'une idée précise de l'état de l'équité en matière d'emploi à la fonction publique et à la réduction des exigences en matière de rapports à l'égard des organisations.

Quand vous répondez à nos questions, n'oubliez pas que Mme Barrados nous a donné l'impression que les données collectées ne sont pas très exactes, et que cela nous inquiète.

J'ai de nombreuses autres questions à poser, mais je cède la parole au sénateur Ataullahjan.

Le sénateur Ataullahjan : Merci, madame la présidente. Avec l'annonce récente de la réduction des effectifs dans la fonction publique, que ferez-vous pour que les objectifs de représentation soient atteints et que nous ne perdions pas un fort pourcentage des membres des quatre groupes cibles?

Mme Meredith : Merci de la question. Même en cas de réduction des effectifs dans la fonction publique, les ministères sont toujours tenus d'atteindre les objectifs fixés dans leurs plans d'équité en matière d'emploi. Nous nous attendons donc que, dans leur réflexion sur leurs effectifs à l'avenir, ils examineront non seulement le nombre total de personnes qu'ils emploieront mais aussi la représentation des quatre groupes visés par l'équité en matière d'emploi. C'est prévu dans la Loi sur l'équité en matière d'emploi. Les ministères y seront attentifs et ils seront aussi attentifs à la manière dont la réduction des effectifs influera sur leurs statistiques.

Le sénateur Ataullahjan : Y a-t-il des stratégies en place pour recruter des membres des quatre groupes cibles?

Mme Meredith : Je pense que tous les ministères ont leur propre stratégie de recrutement et qu'ils ont évidemment des objectifs reliés à leurs plans d'équité en matière d'emploi, de sorte que même dans une période de réduction des effectifs, ils voudront atteindre leurs objectifs, tout comme maintenant.

Le sénateur Oliver : J'ai des questions visant à demander la protection de la documentation, parce que je ne comprends pas tout ce que vous avez déclaré.

À la page 2, vous affirmez que le greffier a insisté sur l'importance d'élaborer des plans ministériels intégrés sur les activités et les ressources humaines, qui comprennent des stratégies concrètes pour accroître la représentation. Pouvez- vous nous fournir certaines de ces stratégies concrètes, pour que nous puissions les examiner, les étudier et les comparer à d'autres?

Deuxièmement, vous affirmez qu'aux termes de ce programme, les administrateurs généraux doivent fournir à leurs gestionnaires un ensemble de pratiques. Pourrais-je vous demander également de produire certaines de ces pratiques, afin que nous puissions comprendre exactement ce qui se fait et ne se fait pas?

Ensuite, vous avez affirmé que le Réseau interministériel sur l'équité en matière d'emploi a été créé en 2009-2010. Pouvez-vous nous donner un peu plus d'information et nous expliquer ce qu'est ce réseau? Pourrions-nous voir sa constitution et sa structure? Pourrions-nous connaître son mandat, sa composition et la fréquence de ses réunions? Pourrions-nous voir le budget et les procès-verbaux des réunions afin de pouvoir comprendre ce qu'il fait, s'il sert à quelque chose?

Enfin, le comité a étudié ces questions en profondeur et a publié un rapport en juin 2010, il y a moins de deux ans. Ce rapport contenait toute une série de recommandations touchant à un grand nombre des aspects que vous avez abordés aujourd'hui. Mais je n'ai entendu aujourd'hui aucun commentaire de votre part sur les suites que vous auriez données aux diverses recommandations faites par le comité.

Par conséquent, pouvez-vous prendre le rapport du Comité sénatorial des droits de la personne et nous décrire ce qui a été fait pour mettre en oeuvre les nombreuses suggestions faites par le comité dans son rapport de 2010? Merci.

Mme Meredith : Merci, sénateur. Je pense que vos questions visent à obtenir de la documentation après la réunion. Nous nous engageons à fournir cette documentation.

Le sénateur Oliver : Si, après avoir reçu votre documentation, le comité effectue un suivi, le greffier et la présidente pourraient-ils vous écrire pour vous demander des compléments d'information, advenant que votre information soit insuffisante?

Mme Meredith : Oui. J'aimerais préciser un peu ce que vous demandez. Il est évidemment question de la réponse au rapport du comité sénatorial et des mesures qui ont été prises concernant les recommandations que vous avez adressées au Secrétariat du Conseil du Trésor. Nous serons très heureux de vous renseigner à ce sujet.

Il y a le mandat du réseau interministériel et ses réunions. Nous avons participé aux convocations, alors nous serons ravis de vous fournir ce que vous demandez.

Le sénateur Oliver : Le présidez-vous?

Mme Meredith : Non, je ne le préside pas. Il se situe au niveau des directeurs et des directeurs généraux. Mme Henry serait donc plus engagée dans les travaux de ce comité que moi, personnellement.

Vous avez évoqué les plans ministériels. Je ne crois pas que les plans ministériels viennent dans mon organisation lorsqu'ils sont créés. Je crois que c'est le greffier qui a demandé ces plans. Je mentionne simplement que c'est une question un peu délicate, parce qu'il faut voir comment cette documentation serait communiquée. Je peux certainement signaler votre intérêt et chercher le bon moyen d'obtenir cette information pour vous.

Le sénateur Hubley : Bienvenue et merci pour votre exposé.

J'ai une question sur le terme « minorité visible ». À quel moment une minorité visible devient-elle une majorité visible?

Pendant que vous y réfléchissez, je vous dirai pourquoi je pose la question. Nous regroupons peut-être une grande partie de la population sous le vocable « minorité visible », alors qu'en réalité, nous devrions peut-être cibler des communautés particulières, comme la communauté italienne ou la communauté chinoise, puisque nous savons que, dans certaines régions, il y a de nombreux membres de ces nationalités.

Les questions auxquelles je vous demanderais de répondre sont : Que peut-on faire pour accroître la représentation des minorités visibles dans la fonction publique fédérale? Qu'est-ce qui les attirera? J'aimerais aussi savoir qui est inclus dans cette description des « minorités visibles » et s'ils devraient l'être.

Mme Meredith : La définition se trouve dans la Loi sur l'équité en matière d'emploi et Mme Henry peut peut-être donner des précisions.

Mme Henry : La définition a une histoire législative et une histoire qui, si je ne m'abuse, remonte au rapport de la juge Abella. Ce rapport identifiait certains groupes défavorisés dans l'emploi au sein des effectifs sous réglementation fédérale. Le terme « minorité visible » a fait son chemin dans la loi à cause de ce rapport.

Nous n'avons pas de preuve de sous-représentation ou de désavantage en emploi pour les groupes que vous avez mentionnés. Il y a une définition législative et les gens s'identifient volontairement en fonction de cette définition. Le recensement emploie la même définition, je crois, et c'est pour cette raison que nous comparons la représentation de ces groupes dans les effectifs internes et à leur représentation dans l'ensemble de la population active.

Le sénateur Hubley : Si vous êtes anglophone — avec tout ce que cela comporte — ou francophone, vous restez dans le groupe majoritaire, n'est-ce pas?

Mme Henry : Je pense que, lorsque la loi a été rédigée et que la juge Abella a présenté son rapport, c'était effectivement le cas. Il s'agit de savoir si ces groupes sont représentés dans la fonction publique proportionnellement à leur disponibilité dans la population active canadienne. Si vous regardez le pourcentage de personnes qui s'identifient volontairement, ces groupes sont encore moins représentés que les autres que vous avez mentionnés.

Le sénateur Hubley : Dans ce cas, prend-on des mesures pour accroître la représentation de ces groupes dans la fonction publique?

Mme Henry : Je pense qu'il faudrait pour cela modifier la loi, parce que nous n'interrogerions pas les gens sur leur origine ethnique, sauf dans le cadre de la Loi sur l'équité en matière d'emploi. Il faudrait probablement modifier la loi.

Le sénateur Meredith : Merci pour votre exposé, madame Meredith.

Pour revenir à ce que le sénateur Oliver a déjà demandé, l'une des questions que je voulais vous poser, et je pense que le sénateur Hubley l'a abordée également, porte sur le rapport de 2010, qui recommandait entre autres que le gouvernement adopte une approche systémique face aux personnes embauchées dans la fonction publique qui s'identifient volontairement ou pour identifier ces personnes. Pouvez-vous nous décrire ce qui a été fait sur ce front?

Mme Meredith : Les ministères demandent à leurs employés de s'identifier volontairement tous les ans. Ils le font, en partie, parce qu'ils élaborent leurs plans d'équité en matière d'emploi et qu'ils veulent savoir où ils se situent par rapport à ces plans.

Toute auto-identification est volontaire et évidemment confidentielle. La question, c'est comment encourager les gens à s'identifier volontairement, puisque c'est ce que nous souhaitons. On peut se demander si l'auto-identification est exacte. Il y a peut-être des pratiques différentes que nous découvrons en côtoyant nos collègues d'autres ministères sur la réaction des employés à l'invitation à s'identifier. C'est une question qui est discutée activement entre les ministères par l'entremise du groupe de travail sur l'auto-identification.

Par exemple, nous avons justement eu cet après-midi une réunion au cours de laquelle nous avons examiné la représentation chez les sous-ministres adjoints. Quelques dirigeants des organisations affirmaient qu'il y a un problème concernant l'auto-identification, parce que nous avons l'impression de ne pas obtenir des chiffres qui correspondent vraiment à la réalité. Il y a un grand intérêt pour les moyens d'encourager l'auto-identification volontaire dans trois groupes : les Autochtones, les minorités visibles et les personnes handicapées.

Nous avons également eu diverses conversations avec la Commission de la fonction publique, qui demande des déclarations volontaires à ceux qui entrent dans la fonction publique, et nous nous demandons si l'on obtient la même identification à cette étape que plus tard, lorsque les fonctionnaires sont déjà employés et ont lancé leur carrière.

Le sénateur Meredith : Merci, madame Meredith.

La présidente : Sénateur Meredith, avez-vous objection à ce que je pose une question supplémentaire?

Le sénateur Meredith : Pas du tout.

La présidente : Madame Meredith, parce qu'il y a des gens qui nous regardent, je voudrais apporter une précision. Si je comprends bien, la « déclaration volontaire », c'est lorsqu'une personne fait une demande d'emploi. L' « auto- identification », c'est lorsqu'on a un emploi et qu'on s'identifie volontairement au fil des années, n'est-ce pas?

Mme Meredith : L'auto-identification se fait effectivement par les employés existants, les personnes qui travaillent déjà dans la fonction publique.

La présidente : Depuis 2004, le comité s'est tourné vers vous, vers la Commission de la fonction publique et vers le Conseil du Trésor pour créer un climat incitant les fonctionnaires à s'identifier volontairement. De nombreux fonctionnaires disent qu'ils ont cessé de s'identifier pour plusieurs raisons. J'aimerais que vous m'expliquiez les mesures que vous prenez pour créer une culture où les fonctionnaires ne se sentent pas menacés et sont à l'aise pour s'identifier volontairement.

Mme Meredith : Nous devons certainement insister sur le fait que l'auto-identification est volontaire et, évidemment, sur la nature confidentielle de l'auto-identification. C'est crucial pour que les fonctionnaires se sentent à l'aise. C'est ce que toute organisation s'efforce de faire. Je sais que dans mes organisations — et les membres du groupe interministériel reconnaissent que c'est ainsi qu'on procède — il faut une discussion aux plus hauts échelons du ministère sur la façon d'encourager les employés, sans être intrusifs dans le cas de certains employés en particulier. C'est volontaire. Nous ne voulons certainement pas les pointer du doigt et insister pour qu'ils s'identifient. Il s'agit de créer le bon climat.

Madame Henry, vous avez peut-être des observations sur les activités du groupe de travail?

Mme Henry : C'est vraiment un grand exercice de communication pour expliquer aux fonctionnaires pourquoi on leur demande de s'identifier et pour les rassurer sur la confidentialité. Je sais que quelques ministères, dont le ministère de la Justice, n'estimaient pas que le taux de réponse était suffisant et qu'ils ont organisé une grande campagne de communication à tous les niveaux et dans toutes les régions, ce qui a grandement amélioré les taux d'auto- identification. Mais il faut se rappeler que la Loi sur l'équité en matière d'emploi empêche l'employeur de s'adresser à un employé et de lui dire qu'il devrait s'identifier volontairement dans l'un des groupes visés par l'équité en matière d'emploi.

Par conséquent, il est difficile de cibler ceux qui, selon nous, devraient s'identifier volontairement, sans contrevenir à la loi. Comme je le vois dans les ministères qui ont réussi à accroître leurs taux de réponse, ils avaient une bonne stratégie de communication et ils ont expliqué clairement aux employés ce qu'ils font, que les renseignements sont confidentiels et qu'ils aident l'organisation et le climat dans le milieu de travail en général.

Mme Meredith : Si je peux intervenir, des cadres font partie de ces groupes. Ils sont presque les mieux placés pour persuader les employés que c'est une bonne chose à faire, que cela permet une bonne évaluation du milieu de travail et de sa représentativité et qu'il ne peut qu'en ressortir du bien. Par conséquent, déployer des cadres qui ont à coeur l'intérêt de l'organisation et qui peuvent être d'ardents et convaincants défenseurs de l'auto-identification, est certainement quelque chose que nous essayons de faire.

Nous avons des communautés que nous pouvons mobiliser à cet égard. J'ai rencontré la semaine dernière une communauté de cadres des minorités visibles qui s'est constituée par elle-même et qui était très intéressée à me parler de la manière dont elle peut aider des collègues au gouvernement à faire face à la réduction des effectifs et à ses problèmes. Nous avons un groupe de membres enthousiastes des trois groupes qui peuvent participer pour encourager l'auto- identification. Je pense que c'est aussi une bonne stratégie.

Le sénateur Oliver : Au niveau EX?

Mme Meredith : Oui.

La présidente : Madame Henry, je suis contente que vous mentionniez le ministère de la Justice, parce que si vous avez suivi nos audiences la dernière fois, après avoir entendu un ancien employé du ministère de la Justice, ils se sont livrés à une introspection. Nous les avons félicités dans notre rapport, parce qu'ils ont obtenu de grandes améliorations après avoir rencontré notre comité.

Mais je suis encore un peu perdue et j'apprécie que le sénateur Meredith me laisse poser des questions supplémentaires. Vous ne m'avez pas donné d'exemple de mesures prises pour créer un climat qui incite les employés à s'identifier volontairement. Vous avez parlé en général, mais y a-t-il des programmes particuliers? Prenez-vous des mesures précises pour aider les employés à être à l'aise et à s'identifier volontairement?

Mme Henry : L'équité en matière d'emploi est mise en oeuvre au niveau ministériel, alors même si nous donnons des orientations et des conseils stratégiques généraux aux ministères, ce sont eux qui mettent en oeuvre des aspects comme les enquêtes d'auto-identification.

Ce que nous pouvons faire, c'est présenter aux ministères des pratiques exemplaires, et je pourrais me renseigner sur les pratiques exemplaires dans les ministères. Mais en ce qui concerne une communication générale, mis à part le fait que le message est communiqué périodiquement à ses collègues par la dirigeante principale des ressources humaines ou par le greffier, je ne pourrais pas donner d'exemples maintenant.

Le sénateur Meredith : Merci, madame Henry. Vous avez parlé de communication. Ma prochaine question portera sur l'éducation pour encourager la communication. Elle est reliée à celle de la présidente concernant la manière de créer un climat où les employés se sentent à l'aise de parler des défis qu'ils doivent surmonter et concernant l'existence de liens entre cette communication et les possibilités de promotion et d'avancement au sein des divers ministères et la manière de communiquer tout cela. Pouvez-vous en parler? Vous avez évoqué la communication, mais je voudrais en savoir plus sur l'éducation qui montre les avantages. Madame Meredith, vous avez mentionné que c'est bien pour les ministères, et ainsi de suite. Nous essayons d'obtenir des statistiques pangouvernementales pour voir comment faire monter ce faible taux de 12,4 p. 100. Avez-vous des précisions à nous donner?

Mme Henry : Voulez-vous dire la communication aux employés sur la façon dont cela les aidera à avancer dans la fonction publique?

Le sénateur Meredith : Oui.

Mme Henry : Je devrais aller au ministère.

Le sénateur Meredith : Il n'y a pas de précisions à ce sujet?

Mme Meredith : Je devrais peut-être situer un peu plus le contexte. Je pense que si les membres de ces trois groupes voient des améliorations dans leur milieu de travail grâce à une espèce d'approche systémique, où la direction écoute leurs préoccupations et apporte des améliorations concrètes, alors je pense que cela peut créer un climat où ils sentiront qu'ils ont avantage à s'identifier. Ils voient des mesures concrètes; il ne s'agit pas seulement d'une enquête. Cela fait partie d'une approche qui entraîne des améliorations.

Nous avons été actifs, nous avons appris des autres et des ministères qui s'y prennent bien, de sorte que nous pouvons élargir les efforts de communication et utiliser les cadres pour qu'ils encouragent leurs collègues à s'identifier volontairement. Nous nous sommes aussi efforcés de mobiliser les employés dans les ministères pour qu'ils nous aident à déterminer ce qui fonctionne et incite les membres de ces groupes à éprouver un sentiment d'appartenance et à sentir que leur carrière progresse dans leurs ministères. Je pense que nous avons une structure prometteuse afin de mobiliser les représentants des ministères à une table interministérielle où ils peuvent dire : « Voici ce qui nous importe et voici comment nous voulons améliorer notre situation dans le ministère. »

Je pourrais continuer, mais je pense que voir des améliorations et voir que les problèmes sont soulevés et vraiment résolus par la direction peut aussi être encourageant pour ceux qui s'identifient volontairement.

Le sénateur Meredith : Si je peux poursuivre, j'ai deux questions. Vous avez parlé, madame Meredith, des comités des champions et des présidents de l'équité en matière d'emploi. Comment sont-ils établis? Cherchez-vous activement des membres des minorités visibles pour les diriger? Vous avez indiqué qu'ils viennent vous dire qu'ils veulent aider. Quel est le processus de recrutement pour obtenir les pratiques exemplaires que vous avez évoquées?

Mme Meredith : Nous les appelons des comités des champions et des présidents de l'équité en matière d'emploi parce que chaque ministère désigne un champion choisi par l'administrateur général et un président choisi par les employés du ministère. Ils siègent ensuite comme représentants au comité interministériel, qui est présidé par le sous-ministre champion, choisi par le greffier du Conseil privé. Ce sont des rôles très spéciaux. Le greffier désigne un sous-ministre, comme champion du conseil des minorités visibles, par exemple. Ils sont ensuite appuyés par mon organisation notamment pour organiser les réunions, établir les mandats et fournir le soutien à la communication.

Ce sont les tribunes au sein desquelles les problèmes et les pratiques exemplaires sont identifiés et où les priorités sont fixées et réalisées collectivement. Il est très crucial d'avoir un sous-ministre champion efficace de ces comités, parce qu'il a accès à l'ensemble de la communauté des sous-ministres, que je réunis régulièrement, une ou deux fois par année, afin que les questions soulevées dans ces tribunes sur les minorités visibles, les Autochtones et les personnes handicapées sont présentées à la table des sous-ministres. Ils peuvent aussi y entendre ce qui fonctionne dans d'autres ministères. Je pense que c'est un moyen très puissant pour obtenir un changement et des améliorations.

Le sénateur Meredith : Vous avez déclaré que pour atteindre notre objectif d'une fonction publique diversifiée, qui reflète vraiment la société canadienne, il faudra multiplier les efforts de recrutement dans les années qui viennent.

Ma dernière question est la suivante : Quels sont les défis pour que la société canadienne se reflète dans la fonction publique au cours des cinq prochaines années et quels changements sont nécessaires? Évidemment, Mme Henry et vous-même avez toutes les deux réfléchi aux défis et aux obstacles ministériels à surmonter. Comment notre comité peut-il s'assurer que certains de ces défis sont surmontés?

Mme Meredith : Je ne voulais pas déposer le Rapport annuel sur l'équité en matière d'emploi à la dernière minute. J'ai cependant pensé qu'il serait utile de le déposer avant cette discussion.

Dans ce rapport annuel, vous verrez tous les ministères et organismes indiquer où ils en sont à l'égard de chacun des quatre groupes. J'ai été frappée par les écarts de représentation entre les ministères. Je me suis dit qu'il y a peut-être une difficulté à attirer des membres de certains groupes dans certaines professions.

Je pense qu'il convient que chaque ministère ait l'obligation, en vertu de la Loi sur l'équité en matière d'emploi, de développer son plan et d'atteindre ses cibles, parce que chacun d'eux doit réfléchir à la manière d'y parvenir compte tenu de la nature différente des emplois qu'il offre. Chaque marché peut être différent pour chaque organisation, et il faut trouver des solutions adaptées à chaque situation.

En ce qui concerne les personnes handicapées, nous avons constaté un léger déclin de la représentation, comme je l'ai indiqué. Je sais que Mme Barrados a exprimé son inquiétude au sujet de ce groupe particulier et je partage cette inquiétude. De fait, elle et moi sommes allées visiter nos homologues américains il n'y a pas longtemps, et ils ont le même problème. La question, c'est comment encourager la représentation des personnes gravement handicapées au sein des effectifs? Cela peut poser des problèmes particuliers et nous devrions nous demander comment les résoudre.

Mon organisation a vraiment mis l'accent ces deux dernières années sur ce que nous appelons la « gestion du mieux-être dans le milieu de travail ». On y aborde une foule de problèmes liés à l'invalidité et aux mesures d'adaptation. Je pense que nous voudrons accorder davantage d'attention à ce domaine à l'avenir. C'est un vaste domaine sur lequel nous devons nous concentrer, à mon avis, pour améliorer la représentation de ce groupe particulier. Je pense aussi que chaque ministère et la communauté qu'il veut intégrer dans l'organisation devraient réfléchir à la manière de régler certains de leurs problèmes particuliers.

Le sénateur Martin : Merci. En ce qui concerne l'accent sur les handicapés physiques, je l'ai mentionné à Mme Barrados, lorsqu'elle a témoigné devant nous par le passé, il existe une organisation nationale qui travaille avec les handicapés physiques. Il s'agit de la Neil Squire Society. Le siège social se trouve en Colombie-Britannique, et je sais que l'un de ses mandats consiste à fournir de l'information, de l'éducation et du matériel pour accroître l'accessibilité des handicapés physiques. Je pense qu'un groupe de ce genre serait une très bonne organisation communautaire avec laquelle on pourrait s'allier.

Cela m'amène à ma première question. Pour atteindre ces quatre groupes cibles, avez-vous consulté les communautés pour trouver comment abolir certains de ces obstacles et éliminer l'effet de silo? Je pense que tous les groupes communautaires ou régionaux souffrent de cloisonnement, du simple fait de la géographie du Canada et des différences régionales. Cela peut aussi être un effet pour les groupes des minorités visibles ethniques. Nous pouvons combler ces fossés en consultant les groupes communautaires pour savoir comment mieux communiquer aux éventuels candidats. Il s'agit de faire tomber ces obstacles et de communiquer plus efficacement.

Avez-vous fait ce type de consultations avec les groupes communautaires pour parler des bonnes stratégies permettant de recruter et d'accroître la participation des membres des minorités visibles ou d'autres groupes cibles dans le secteur public?

Mme Meredith : J'ai parlé personnellement à certains groupes, y compris Embauche Immigrants Ottawa, qui cible plus particulièrement les nouveaux immigrants au pays et les aide à obtenir leur premier emploi, notamment au sein de plusieurs ministères fédéraux. J'ai parlé à ce groupe, ainsi qu'à d'autres groupes qui s'occupent de gestion de l'invalidité, dont un en Colombie-Britannique. Je ne pense pas que c'était le Neil Squire, mais plutôt un autre groupe à qui nous avons parlé de la manière dont nous intégrons les employés handicapés et comment nous formons des agents responsables des questions relatives à l'invalidité dans les ministères. Oui, nous avons parlé à des gens à qui il nous paraissait utile de parler pour promouvoir ces objectifs, mais il faudrait peut-être le faire davantage.

Le sénateur Martin : Je pense que le plus important c'est qui est à la table pour élaborer les stratégies, et qui pourrait être présent lors des activités de recrutement, si elles existent, dans les universités, par exemple, voire peut-être dans les groupes communautaires. Que ce soit à Toronto ou Vancouver, il y a de grandes organisations communautaires.

Chacun des groupes ethniques avec qui j'ai travaillé a sa propre organisation d'encadrement ou son propre gouvernement — un gouvernement dans le Canada. Ces organisations d'encadrement travaillent avec des centaines d'organisations communautaires et seraient les mieux placées pour contribuer à la promotion et à la diffusion efficace de l'information.

Je pense que faire participer ces groupes de parties intéressées à l'établissement et la mise en oeuvre des stratégies serait une bonne approche.

Voici ma dernière question. Lorsque vous recrutez des membres de ces quatre groupes cibles et qu'ils sont embauchés, la première année peut être très importante pour déterminer s'ils continueront et auront une belle carrière ou s'ils resteront seulement les premières années de la période de transition. Y a-t-il des programmes en place — un programme de mentorat ou un réseau de soutien — qui créent le climat que vous souhaitez pour favoriser une plus grande réussite?

Mme Meredith : En ce qui concerne un climat favorable, je fais remarquer qu'il y a un Sondage auprès des fonctionnaires fédéraux. Les résultats ont été compilés et publiés le 2 février. Ce sondage a été mené en septembre 2011, plus ou moins. Il y avait des questions précises dans le sondage sur les perceptions de discrimination au travail — quelque chose qui nous intéresse grandement. Nous avons constaté que, même si les résultats du sondage dans l'ensemble de la fonction publique sont assez stables dans des domaines comme l'engagement des employés, les résultats concernant la discrimination perçue ont nettement diminué, chez les fonctionnaires qui s'identifient dans les catégories des femmes, des Autochtones, des minorités visibles et des personnes handicapées.

Par rapport au sondage que nous avons mené en 2008, il y a eu un net déclin de la perception de discrimination au travail. Le pourcentage d'employés qui perçoivent de la discrimination est passé de 18 p. 100 en 2008 à 14 p. 100 en 2011. De plus, les répondants sentent que leurs ministères s'efforcent activement de prévenir la discrimination au travail. Nous ne pourrons jamais être suffisants dans ce domaine et nous devons poursuivre nos efforts. Ce n'est pas l'idéal, mais la tendance est bonne. Le fait que les fonctionnaires ont confiance que les ministères déploient des efforts est également très rassurant. Je pense que nous pouvons montrer ces résultats à ceux qui cherchent du travail et affirmer que nous avons un milieu de travail où ils ont l'assurance qu'ils ne feront pas l'objet de discrimination.

Le sénateur Brazeau : Je vais vous répéter ce que mon collègue m'a chuchoté à l'oreille il y a un bout de temps. Si vous voulez avoir une séance de réflexion stratégique, regardez de ce côté-ci de la table; nous sommes tous des minorités visibles.

Ma question porte sur les Autochtones dans la fonction publique. Si je comprends bien — et corrigez-moi si j'ai tort — lorsqu'un Autochtone fait une demande d'emploi dans la fonction publique, il peut se déclarer Autochtone, Amérindien, Métis ou Inuit. Ceux qui décident de s'identifier comme Autochtones ne sont pas tenus de fournir une preuve de leurs antécédents autochtones. Si c'est effectivement la pratique actuelle — parce que je sais que ce l'était il y a plusieurs années — peut-il y avoir des situations où des non-Autochtones cochent la case Autochtones, sont embauchés et sont comptés dans la catégorie des Autochtones, mais en réalité, ne sont pas Autochtones?

Mme Meredith : On s'est inquiété de ce problème par le passé, du fait que des gens qui s'identifiaient comme Autochtones alors qu'ils n'étaient pas Autochtones. La Commission de la fonction publique en particulier — je ne sais pas si vous en avez parlé à Mme Barrados — s'est penchée sur ce problème et surtout sur la déclaration volontaire de ceux qui entrent dans la fonction publique. Il faut porter attention à cette question.

Le sénateur Brazeau : Fait-on quelque chose actuellement? À mon avis, certains ne veulent peut-être pas ouvrir une boîte de Pandore en demandant des documents pour prouver les origines autochtones. Mais on le fait ou pas. Si on ne le fait pas, les statistiques sont faussées et montrent qu'au fil du temps, de plus en plus d'Autochtones sont employés dans la fonction publique, alors que ce n'est peut-être pas le cas.

Mme Meredith : Oui. Je ne veux pas parler au nom de la Commission de la fonction publique, mais elle voulait plus de rigueur afin d'inciter les gens à déclarer correctement leurs origines autochtones. En ce qui concerne l'auto- identification, on en revient au fait que c'est volontaire et confidentiel. Il y a peu de choses qu'on peut vérifier. Il faut être réalistes.

Le sénateur Brazeau : Merci.

Le sénateur Zimmer : Merci. Excusez mon retard. J'ai trouvé très bonne la dernière question du sénateur Meredith. Il a parlé des défis des minorités visibles, mais j'aimerais y revenir par l'autre bout de la lorgnette et la reformuler.

À votre connaissance, quel est le principal obstacle qui empêche une hausse des taux de représentation des minorités visibles dans la fonction publique? Quel est le plus gros obstacle à surmonter?

Mme Meredith : D'après ce que nous entendons du groupe des représentants des minorités visibles qui se réunit — les comités des champions et des présidents de l'équité en matière d'emploi — ils veulent favoriser le développement de carrière, le mentorat, préparer les employés aux occasions de promotion. Ils veulent offrir une aide douce pour faire avancer les carrières. Je pense que le but du comité des minorités visibles actuellement consiste à offrir cette aide au réseautage et au perfectionnement professionnel.

Le sénateur Zimmer : Le Bureau du dirigeant principal des ressources humaines a annoncé récemment une modification de la gouvernance des obligations d'équité en matière d'emploi dans la fonction publique à l'égard des Autochtones, des personnes handicapées et des membres des minorités visibles. Par le passé, ces groupes étaient représentés par trois conseils nationaux d'équité en matière d'emploi : le Conseil national des minorités visibles, le Conseil national des employés handicapés fédéraux et le Conseil national des employés fédéraux autochtones. Désormais, ils seront représentés par des comités des champions et des présidents de l'équité en matière d'emploi — présidés dans chaque cas par un sous-ministre champion — qui élaborera les stratégies, et présentera des résultats au Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada sur l'équité en matière d'emploi.

Pourquoi a-t-on décidé d'adopter un nouveau modèle de gouvernance pour ces trois groupes? Quelles sont les différences entre le nouveau modèle et l'ancien?

Mme Meredith : Merci de la question. Cela remonte à un certain temps — probablement il y a quatre ans — lorsque le nouveau modèle pour financer les conseils a été mis en place. Il fallait examiner le modèle lorsqu'il a été mis en place. C'était un examen prévu, un examen triennal du modèle, et nous avons tenu de vastes consultations avec tous les groupes visés pour déterminer où ils voulaient aller.

J'avais mon point de vue. Il me semblait que cette gouvernance n'avait pas produit de priorités et de mesures de gestion pouvant mener quelque part. Je pensais qu'il y avait un problème de reddition des comptes dans ce modèle et, parce que je travaillais au Conseil du Trésor, je voulais la resserrer.

J'ai vu également des sous-ministres champions nommés à ce rôle par le greffier déconnectés de la gouvernance en place, et j'ai fait valoir à la communauté qu'il serait peut-être très utile qu'ils essaient de se rapprocher des représentants de divers ministères. En un sens, j'exprimais mon point de vue que nous pouvions obtenir de solides améliorations de gestion en les réunissant dans un groupe plus resserré, les trois groupes étant appuyés par le Secrétariat du Conseil du Trésor pour assurer l'uniformité des fonctions de secrétariat. Je les financerais et les mandats seraient semblables. Il y aurait une certaine rigueur dans tout cela.

Après des consultations assez approfondies, les groupes ont appuyé la nouvelle approche, et c'est ce que nous sommes en train de mettre en oeuvre depuis l'automne 2011.

Le sénateur Zimmer : Merci.

Le sénateur Oliver : Je suis au Sénat depuis 21 ans et j'ai siégé à un nombre incalculable de comités. Une chose qui me frappe dans les comités est que la plupart des témoins sont Blancs plutôt que des membres des minorités visibles ou des Autochtones.

J'ai toujours trouvé triste et je trouve encore triste que des hauts fonctionnaires de la fonction publique du Canada qui témoignent devant les comités parlementaires ne représentent pas la mosaïque du Canada, et aujourd'hui ne fait pas exception.

Pouvez-vous nous donner la ventilation au Conseil du Trésor pour les quatre groupes cibles? Quelle est la représentation au sein du Conseil du Trésor? Deuxièmement, s'il y a 79 sous-ministres dans la fonction publique du Canada et seulement trois sont membres des minorités visibles, pouvez-vous dire au comité si c'est une représentation suffisante et convenable des minorités visibles aux échelons supérieurs de la catégorie EX, comme sous-ministre? Enfin, si comme moi vous ne trouvez pas cela acceptable pour le Canada, pensez-vous que si nous avions un commissaire à la diversité responsable envers le Parlement et qui devait rendre des comptes à la Chambre des communes et au Sénat à cause de l'absence de représentation, cela pourrait aider à élever la représentation, en particulier chez les minorités visibles?

Mme Meredith : En réponse à la première question concernant la représentation au Secrétariat du Conseil du Trésor, d'après le rapport sur l'équité en matière d'emploi de 2010-2011, nous avons 62,5 p. 100 de femmes, 2,7 p. 100 d'employés qui s'identifient comme des Autochtones, et 7,5 p. 100 de personnes handicapées; et environ 14,3 p. 100 de membres des minorités visibles.

Je ne suis pas certaine, mais je pense qu'à l'échelon le plus élevé au secrétariat, celui de sous-ministre adjoint, la représentation est assez bonne pour les personnes handicapées et les minorités visibles. Ces groupes sont représentés au niveau des SMA.

Le Bureau du Conseil privé est responsable du groupe des sous-ministres. Il y a actuellement 72 personnes au niveau de sous-ministre et au sein de ce groupe, il y a une personne handicapée qui s'est identifiée comme telle; trois sous- ministres des minorités visibles et trois sous-ministres autochtones.

En ce qui concerne la question de savoir s'il serait utile d'avoir un commissaire à la diversité, je signale simplement qu'à mon avis la Loi sur l'équité en matière d'emploi prévoit une excellente structure pour obliger les ministères à réagir lorsqu'ils s'écartent des taux de disponibilité sur le marché du travail et à établir des plans pour améliorer la représentation des groupes définis dans la loi.

Je dirais qu'au fil des années, nous avons constaté une amélioration assez marquée de la représentation des trois groupes dans la fonction publique. Je pense qu'il y a eu de nets progrès non seulement concernant la représentation mais aussi concernant la perception de discrimination, comme je l'ai déjà indiqué, ce qui est très important et utile, je pense. J'ajouterais, parce que je participe aussi activement à l'examen des promotions dans la fonction publique, que se soit au niveau des sous-ministres adjoints ou des sous-ministres, que la représentation est toujours prise en considération. C'est certainement sur notre écran radar chaque fois qu'il est question de promotions et des échelons supérieurs.

Le sénateur Oliver : Les intentions sont bonnes, mais elles ne se reflètent pas dans les chiffres.

Vous avez déclaré qu'il y a au Conseil du Trésor 14,3 p. 100 de membres des minorités visibles et 72 sous-ministres, dont trois sont des membres des minorités visibles.

Mme Meredith : Dans l'ensemble de la fonction publique.

Le sénateur Oliver : D'accord.

La présidente : Cela représente 4 p. 100.

Le sénateur Oliver : C'est insuffisant. Il n'y a pas de membres compétents des minorités visibles dans la fonction publique du Canada pour monter à ces niveaux? C'est ça le problème?

Mme Meredith : Je pense que nous avons constaté des améliorations de la représentation et tel qu'indiqué dans le rapport annuel, c'est une question de vitesse peut-être, mais il y a eu une amélioration.

Le sénateur Meredith : Madame Meredith, pour revenir à la question du sénateur Oliver sur le commissaire à la diversité, qu'arriverait-il si les ministères savaient qu'ils ont une certaine responsabilité, que tous les ans, il y aurait un rapport du commissaire, qui serait sur leurs talons pour s'assurer que les chiffres s'améliorent? Vous avez évoqué la loi, mais du point de vue des facteurs de reddition des comptes pour les ministères, de la responsabilité et des rapports décrivant les vastes travaux dans les ministères, est-ce que cela ferait une différence? Je ne dis pas que les ministères ne le font pas. Comprenez-moi bien. Il y aurait quelqu'un qui constaterait les améliorations minimes ou importantes. Nous regardons les chiffres évoluer au fil des années, et ils augmentent péniblement. Il faut un effort soutenu des dirigeants des ministères pour que les objectifs soient atteints, pour en revenir au facteur environnemental de la hausse du nombre de membres des minorités visibles, de femmes ou d'Autochtones dans les ministères. Par conséquent, ne pensez-vous pas qu'il y aurait un certain élan pour justifier que nous nous orientions dans cette direction?

Mme Meredith : Je pense que la Loi sur l'équité en matière d'emploi établit les responsabilités des ministères de créer leurs plans et de présenter des rapports au Parlement sur leurs plans. La Commission canadienne des droits de la personne effectue des vérifications et des examens de conformité. Le Conseil du Trésor présente des rapports sur les réalisations ministérielles par rapport aux plans. Je me demande simplement s'il n'y a pas assez de mécanismes en place pour obtenir des améliorations.

Le sénateur Hubley : Au niveau des sous-ministres, parmi les 72, vous nous avez donné le nombre de personnes handicapées, de membres des minorités visibles et d'Autochtones. Combien y a-t-il de femmes?

Mme Meredith : Il y a 27 femmes sur les 72.

Le sénateur Hubley : Merci.

La présidente : Nous avions le Conseil national des minorités visibles qui travaillait avec vous par le passé. À mon avis, ce conseil travaillait à l'extérieur, en ce sens qu'il s'agissait d'un groupe indépendant. Vous avez expliqué pourquoi ce conseil n'existe plus et qu'il y maintenant des champions qui travaillent dans le système.

L'une des préoccupations que nous ont exprimées les champions est que, quand on travaille à l'intérieur du système, il est très difficile de faire une différence ou d'être un porte-parole de poids, comme l'était le Conseil national des minorités visibles.

Bien des gens estiment qu'on a perdu quelque chose en abolissant le Conseil national des minorités visibles dans la fonction publique fédérale. Ces champions sont-ils des porte-parole puissants et comment les aidez-vous à l'être?

Mme Meredith : Je le répète, les champions sont nommés par leur administrateur principal, ce qui est une bonne chose, je crois. Cela veut dire qu'ils ont un pont direct; ils peuvent se faire entendre par l'administrateur général. C'est important, pour faire des progrès.

De plus, nous avons des présidents, comme nous les appelons, qui représentent leurs communautés dans les ministères. Nous pensons aussi que, collectivement, ils se font entendre par les administrateurs généraux et par les communautés qu'ils représentent dans les ministères.

Structurellement, je pense que nous avons une bonne recette, et vous constaterez probablement qu'un grand nombre des membres actifs du Conseil national des minorités visibles sont aussi des représentants à la table actuellement.

Le but n'était pas d'éliminer des organes mais plutôt de donner plus de pouvoir aux structures de gestion existantes, un accès et les rouages nécessaires pour obtenir des améliorations.

La présidente : Puis-je demander un éclaircissement? Je ne comprends pas quand vous dites « leurs communautés ». Qu'est-ce que vous voulez dire quand vous affirmez qu'ils représentent leurs communautés?

Mme Meredith : Dans les ministères, les employés intéressés par les questions relatives aux minorités visibles dans une organisation donnée.

La présidente : Une des préoccupations que j'ai entendues partout où je suis allée est que les champions sont nommés par le sous-ministre. Le sous-ministre nommera quelqu'un qui pense comme lui au poste de champion, pas quelqu'un qui brassera la cage. L'une des principales plaintes que j'ai entendues est que le champion est quelqu'un que le sous-ministre peut manipuler et donc, que le changement souhaité ne se fera pas.

Je vous dis cela parce que beaucoup craignent que les champions ne parlent pas au nom des quatre groupes. Ils disent ce que veut entendre le sous-ministre. Je vous le dis ouvertement, parce que je suis certaine que vous l'avez entendu. Je déclare publiquement qu'il y a une réelle crainte qu'on ait fait taire les minorités visibles, surtout, en abolissant le Conseil national des minorités visibles. Des champions dans le ministère, nommés par le sous-ministre et relevant du sous-ministre, semblent être une structure problématique.

Mme Meredith : C'est en partie pour cette raison que les présidents assistent eux aussi aux réunions. Ils ne sont pas nommés par l'administrateur général et ils sont donc un porte-parole indépendant dans ce groupe.

Je ne nie pas qu'il puisse y avoir des critiques, mais je n'ai pas entendu celle-là. J'ajoute qu'au forum des sous-ministres, que je copréside avec le secrétaire du Conseil du Trésor, où nous discutons de ces questions, la dynamique est vraiment que les sous-ministres veulent engager leurs employés de ces communautés et déterminer les besoins. Ce n'est pas une approche descendante. C'est beaucoup plus participatif.

Je dirais que le défi consiste à créer de très bons instruments et à tirer des leçons de ce qui se fait ailleurs. C'est pour cela que la perception de discrimination diminue dans le sondage et que les employés eux-mêmes pensent que les ministères s'efforcent réellement de réduire la discrimination. C'est ce que nous ont dit les employés dans ces sondages.

Cela ne m'étonne pas. Dans la communauté des sous-ministres que j'ai vus à ces réunions, ils veulent engager leurs employés et répondre à leurs besoins.

La présidente : Je sais que le programme des champions est récent, mais vous avez affirmé que vous donniez de la formation. Quelles évaluations avez-vous faites auprès des employés concernant la qualité du travail des champions? Quels mécanismes avez-vous mis en place pour entendre les quatre groupes désignés s'exprimer sur le travail des champions? Comment le changement se fait-il?

Mme Meredith : D'abord, trois groupes sont représentés. Les femmes n'ont pas de conseil.

Je dirais que nous en sommes aux premiers balbutiements. Ils n'ont commencé à se réunir qu'à l'automne 2011, alors il n'y a pas encore de bilan. C'est assez nouveau et nous faisons des efforts.

Le sénateur Meredith : Madame Meredith, parmi les quatre groupes mentionnés, nous avons parlé des minorités visibles. Sont-ils les seuls touchés par le fait que des titres de compétence étrangers ne sont pas reconnus au Canada? Est-ce un problème sur lequel vous vous êtes penchés? S'ils étaient reconnus, est-ce que cela accroîtrait le nombre de fonctionnaires promus à des postes plus élevés? La reconnaissance des titres de compétence étrangers relèverait-elle les statistiques? En a-t-il été question? Est-ce qu'on y a réfléchi?

Mme Meredith : Je n'ai pas entendu le comité dire qu'il s'intéressait à cette question. Il faudrait que je me renseigne pour voir jusqu'à quel point c'est un problème.

Le sénateur Meredith : Pouvez-vous le faire et nous communiquer le résultat de vos recherches? Je sais que les titres de compétence sont un problème pour les immigrants qui arrivent au pays et qui essaient d'entrer dans la fonction publique et de progresser dans leur carrière. Je pense que ce serait utile pour le comité.

Le sénateur Martin : Quand vous dites c'est nouveau, je suppose que vous parlez du programme des champions?

Je suis moi aussi « déçue », j'imagine que c'est le meilleur mot, d'apprendre que les progrès sont très lents. Je vis à Vancouver, où une minorité visible est comme une majorité visible dans mon quartier. Quand j'enseignais, je faisais toujours attention aux types de lectures que je proposais en classe, parce que je devais m'assurer que les protagonistes reflétaient la diversité qui existait dans la classe.

C'est important, ce taux de 14 p. 100 de membres des minorités visibles dans la fonction publique du Canada. Souvent, on les voit à peine. J'ai vu quelques membres des minorités visibles ici, en travaillant à Ottawa. Se sentir comme une minorité est une expérience très étrange pour moi, qui fais des allers-retours à Vancouver.

J'espère que dans le programme des champions, dans les types de stratégies que vous déclarez déployer, il y a ce genre de consultation. Nous devons abolir ces obstacles, parce qu'ils existent. C'est pour cette raison que les progrès ont été si lents.

Je vous félicite, vous et les autres, pour vos efforts, mais je crois vraiment qu'il faut des progrès. Les progrès doivent être plus visibles.

La présidente : Merci, madame Meredith et madame Henry, d'être venues. Nous avons hâte de recevoir votre documentation et nous vous demanderions, comme l'a fait le sénateur Oliver, que vous nous donniez un compte rendu sur les recommandations faites par le comité. Puisque nous n'avons pas eu l'occasion d'examiner votre rapport sur l'équité en matière d'emploi, il se pourrait que nous vous invitions à nouveau lorsque nous aurons eu le temps de l'étudier. Nous avons hâte de travailler avec vous.

Mme Meredith : Merci beaucoup.

Mme Henry : Merci à vous.

La présidente : Nous entendrons maintenant notre deuxième groupe. De l'Alliance de la Fonction publique du Canada, nous accueillons Patty Ducharme, vice-présidente nationale, et Seema Lamba, agente des droits de la personne.

Bienvenue. Nous sommes ravis que vous soyez ici. Nous croyons comprendre que vous avez une déclaration à faire.

Patty Ducharme, vice-présidente nationale, Alliance de la Fonction publique du Canada : Merci de nous avoir invités. Nous sommes toujours heureux de venir vous présenter nos points de vue.

D'abord, il me paraît très important de souligner le mérite du travail du comité et de son rapport, publié en juin 2010, et intitulé Refléter le nouveau visage du Canada. Notre syndicat, l'Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC) appuie les recommandations formulées dans ce rapport. Nous continuons de revendiquer la mise en place de ces changements dans la fonction publique fédérale.

Aujourd'hui même, nous avons reçu le rapport annuel du Conseil du Trésor sur l'équité en matière d'emploi dans la fonction publique fédérale pour 2010-2011. J'ai tenté d'en intégrer brièvement quelques éléments. Vous constaterez donc que certaines des statistiques indiquées dans notre mémoire ont changé.

Avant de me pencher sur ces changements, j'aimerais soulever une question très grave concernant le rapport proprement dit.

Le rapport de 2010-2011 est très différent des rapports précédents. Contrairement aux rapports antérieurs, il est beaucoup plus court — de fait, il compte 21 pages, tandis que le dernier en comptait 73 — et il ne contient aucune analyse des données collectées. En outre, il y a maintenant six tableaux contenant des données sur l'équité en matière d'emploi au lieu de 16 dans le rapport précédent. Des données cruciales ne sont plus présentées, y compris des renseignements sur les employés nommés pour une durée déterminée et des données sur l'équité en matière d'emploi en fonction des groupes professionnels.

Notre première réaction est que ce rapport contribuera très peu à faire avancer l'équité en matière d'emploi dans la fonction publique fédérale. Nous ne sommes pas en mesure de fournir une critique détaillée du rapport aujourd'hui, mais nous serons ravis de vous transmettre notre analyse lorsque nous aurons pu examiner le rapport en profondeur.

D'après les plus récentes statistiques du rapport, les travailleurs racialisés représentent maintenant 11,3 p. 100 des fonctionnaires fédéraux. C'est un peu plus que le taux de 10,7 p. 100 dans le rapport 2009-2010, mais c'est encore inférieur à la disponibilité sur le marché du travail. Le taux de recrutement a cependant beaucoup diminué par rapport à l'année précédente et il est lui aussi inférieur au taux de disponibilité sur le marché du travail.

Le taux de recrutement des personnes handicapées dans la fonction publique fédérale a augmenté l'an dernier, après avoir baissé pendant trois années d'affilée, mais il est encore inférieur au taux de disponibilité sur le marché du travail et au taux de départ de ce groupe.

Les travailleurs autochtones ne sont toujours pas représentés dans l'ensemble de la fonction publique. Dans sept des 25 grands ministères, leur représentation est inférieure à leur taux de disponibilité sur le marché du travail.

Les femmes sont encore cantonnées dans des postes administratifs et représentent moins de 25 p. 100 des employés dans la catégorie technique. En fait, leur représentation diminue dans cette catégorie.

Nous avons également reçu très récemment les résultats du Sondage auprès des fonctionnaires fédéraux de 2011, et la discrimination est encore signalée par un fort pourcentage de répondants des divers groupes visés par l'équité en matière d'emploi.

Actuellement, des centaines de membres de l'AFPC ont déposé des griefs et des plaintes pour atteinte aux droits de la personne et discrimination au travail. Il semble actuellement y avoir peu d'appui politique à l'égard des projets d'équité sans parler du manque de soutien financier ou de volonté politique pour mettre en oeuvre les recommandations formulées par le comité en 2010. Nous nous retrouvons maintenant dans une période d'incertitude, dans un contexte de compressions imminentes au sein de la fonction publique. Les ministères ont préparé des plans pour réduire les dépenses de programmes de 10 p. 100. Nous avons demandé de l'information sur ces compressions proposées et demandé au gouvernement de consulter le Parlement avant de prendre des décisions qui seront très lourdes de conséquences pour la fonction publique et les emplois de nos membres, sans succès jusqu'ici.

Jusqu'à présent, le comité s'est surtout concentré sur la manière de recruter des membres des groupes visés par l'équité au sein de la fonction publique. Cette question demeure préoccupante. Mais il y a maintenant d'autres raisons de s'inquiéter : l'équité pourrait perdre du terrain si ces mises à pied touchaient de façon disproportionnée les femmes, les personnes handicapées, les Autochtones et les personnes racialisées. Si les suppressions d'emplois sont faites sans égard aux répercussions qu'elles auraient sur ces groupes de travailleuses et de travailleurs, les progrès enregistrés au cours des dernières années pourraient tout simplement être abolis.

La dernière fois que l'on a sabré les dépenses de la fonction publique, dans les années 1990, le taux de mises à pied des Autochtones et des personnes handicapées était sensiblement plus élevé que celui des autres fonctionnaires.

L'ancienne présidente de la Commission de la fonction publique a déclaré que le taux de recrutement des personnes handicapées dans la fonction publique ne correspond pas à leur disponibilité sur le marché du travail. C'est vrai depuis un certain nombre d'années. Il faut également savoir que les travailleuses et travailleurs handicapés sont, en moyenne, généralement plus âgés. Si, comme par le passé, ces personnes sont plus nombreuses à quitter le service public, quelles en seront les conséquences sur la représentation globale des personnes handicapées dans la fonction publique?

Nous savons également que le taux de chômage au Canada est plus élevé parmi les personnes handicapées, les Autochtones et les personnes racialisées. Ces groupes font encore l'objet de pratiques discriminatoires et doivent surmonter des obstacles, tant au sein de la fonction publique que sur le marché du travail en général. Les compressions généralisées vont empirer la situation de ces travailleuses et travailleurs.

Ce sont des questions importantes et, comme l'a souligné la juge Rosalie Abella, l'équité n'est pas l'apanage d'une période économique faste; quelle que soit la conjoncture économique, tous les membres de la société devraient avoir un accès équitable à l'emploi.

Parlons maintenant d'un autre obstacle de taille à l'application de l'équité en matière d'emploi : la perte de données importantes recueillies grâce au questionnaire détaillé du recensement et à d'autres enquêtes.

Le comité ne sait peut-être pas qu'en plus du questionnaire détaillé du recensement, une autre enquête importante, l'Enquête sur la participation et les limitations, ou l'EPLA, a aussi été abolie en 2010. L'EPLA collectait des données sur les personnes handicapées. Ces données étaient utiles pour les projets d'équité en matière d'emploi et pour d'importants services offerts aux personnes handicapées par tous les ordres de gouvernement. L'EPLA était réalisée tous les cinq ans, après le recensement, à l'aide d'un échantillonnage tiré des données fournies dans le questionnaire détaillé du recensement. Maintenant que nous avons perdu ces importants outils, nous ne savons plus quelles données nous posséderons pour fonder les objectifs de l'équité en matière d'emploi ni quelle sera la qualité des données dont nous disposerons.

Les chiffres sont importants. En leur absence, l'équité en matière d'emploi est comme une maison sans fondation.

J'aimerais aussi parler brièvement des recommandations faites dans le rapport de 2010 de votre comité. Après que le rapport a été rendu public, nous avons pu rencontrer la présidente de la Commission de la fonction publique et la dirigeante principale des ressources humaines pour discuter de ces recommandations. On nous a alors assurés que ces recommandations recevaient un appui et qu'un plan serait rapidement mis en place pour y donner suite. Depuis, le Conseil du Trésor n'a pas donné suite aux recommandations du comité concernant une nouvelle politique d'équité en matière d'emploi, la formation linguistique sur le lieu de travail; la reconnaissance des titres de compétence étrangers; la recherche de moyens concrets pour que les gestionnaires rendent compte des mesures prises pour atteindre leurs objectifs d'équité en matière d'emploi, et cetera. À notre connaissance, très peu de ces recommandations ont été suivies, et aucun plan ne semble avoir été élaboré pour les mettre en oeuvre. De fait, la décentralisation des ressources humaines et le démantèlement de la fonction du Conseil du Trésor dans l'élaboration et la surveillance de politiques pangouvernementales ont affaibli la surveillance centrale de l'équité en matière d'emploi dans la fonction publique fédérale.

En résumé, l'AFPC croit qu'il est capital que le gouvernement donne des renseignements sur la manière dont il entend réduire ses dépenses dans la fonction publique fédérale. J'exhorte le comité à joindre le choeur de ceux et celles qui veulent que les propositions de chaque ministère et du cabinet d'experts-conseils Deloitte soient rendues publiques, puis qu'elles soient transmises aux comités permanents du Parlement. Nous recommandons, plus précisément que le Conseil du Trésor et les ministères consultent les agents de négociation au niveau national et au niveau ministériel au sujet des modifications des niveaux de dotation, des mesures d'adaptation de la main-d'oeuvre et des conséquences éventuelles sur les membres des groupes désignés; que le Conseil du Trésor, à titre d'employeur de la fonction publique fédérale, publie une directive à l'intention de tous les ministères afin qu'ils tiennent compte de l'équité en matière d'emploi lorsqu'ils modifient les niveaux de dotation et prennent des mesures d'adaptation de la main-d'oeuvre; que des mesures de reddition des comptes particulières soient mises en place afin que le Conseil du Trésor et les ministères rendent compte des éventuelles répercussions négatives disproportionnées des compressions dans la fonction publique sur les membres des quatre groupes désignés visés par l'équité en matière d'emploi; que le gouvernement rétablisse le questionnaire détaillé du recensement ou, tout au moins, ajoute dans le questionnaire abrégé des questions qui fournissent des données sur l'équité en matière d'emploi; que le gouvernement rétablisse le financement de l'EPLA; et que RHDCC continue de l'administrer.

Enfin, j'aimerais vous remercier à nouveau de nous donner la possibilité d'exprimer nos points de vue. Nous sommes évidemment prêts à répondre à vos questions.

La présidente : Parce que des spectateurs regardent votre exposé, pouvez-vous préciser ce qu'est l'EPLA?

Mme Ducharme : L'EPLA, c'est l'Enquête sur la participation et les limitations. Cette enquête était menée tous les cinq ans et se fondait sur un échantillonnage des renseignements tirés du questionnaire détaillé du recensement collectés pour les personnes handicapées.

La présidente : Quand vous parlez de la disponibilité sur le marché du travail, vous vous fondez sur les données du recensement de 2006, n'est-ce pas?

Mme Ducharme : Je crois que oui.

La présidente : Vous étiez dans la salle quand j'ai posé des questions sur le démantèlement du Conseil national des minorités visibles et la nomination des champions. Puis-je vous demander à toutes les deux de nous décrire quelles sont, selon vous, les conséquences sur la fonction publique fédérale du démantèlement du Conseil national des minorités visibles et ce que vous pensez du fonctionnement des champions?

Mme Ducharme : Des membres de l'AFPC participaient au conseil partout au Canada. Je crois comprendre qu'ils ne peuvent plus promouvoir l'équité en matière d'emploi pour les membres des minorités visibles par ce mécanisme.

Je pense que des champions transversaux, à tous les niveaux des organisations, sont extrêmement importants. Même si c'était une initiative financée et créée par l'employeur, c'était une initiative à laquelle ont participé des membres de l'AFPC et des membres d'autres agents de négociation et qu'ils ont appuyée.

La présidente : La Loi sur l'équité en matière d'emploi est entrée en vigueur en 1986. Cela fait 26 ans et il y a encore des problèmes. La représentation est encore problématique.

Vous ne pourrez peut-être pas répondre tout de suite, auquel cas, vous pourrez nous fournir la réponse plus tard. Avez- vous deux ou trois suggestions à faire pour rendre la loi plus efficace et rendre la représentation comparable à la disponibilité sur le marché du travail? Quels obstacles pourraient être éliminés pour que l'équité en matière d'emploi devienne une réalité dans notre pays?

Mme Ducharme : Il y a de nombreux obstacles, mais si vous voulez modifier la loi de manière à ce que la Loi sur l'équité en matière d'emploi donne les résultats escomptés, énoncer la responsabilité dans la loi et prévoir un mécanisme d'exécution de la loi pousseraient certainement les employeurs à agir pour promouvoir l'équité en matière d'emploi.

J'ai entendu les questions sur la reddition des comptes. Je sais que le gouvernement fédéral a décidé, par exemple, de verser aux cadres supérieurs une prime au rendement pouvant atteindre 15 000 $ par année s'ils rationalisent et réduisent la taille de la fonction publique fédérale. Je me demande aussi pourquoi le gouvernement n'a pas trouvé bon de fonder la rémunération au rendement en partie sur les objectifs de l'équité en matière d'emploi et de veiller à ce que les ministères et les dirigeants des ministères respectent leurs obligations relatives à l'équité en matière d'emploi prévues dans la loi. Ce serait un exemple.

En ce qui concerne les obstacles, les problèmes de reconnaissance des titres de compétence étrangers, d'expérience canadienne et de formation linguistique sont tous des facteurs qui constituent des obstacles pour les travailleurs racialisés, les travailleurs nés à l'étranger. Les mécanismes d'adaptation pour les travailleurs handicapés constituent aussi d'énormes obstacles qui empêchent ces travailleurs de participer pleinement sur le marché du travail.

Seema Lamba, agente des droits de la personne, Alliance de la Fonction publique du Canada : Pour que la Loi sur l'équité en matière d'emploi soit parfaite, il faut donner un solide rôle aux agents de négociation. Il y a déjà un rôle pour les agents de négociation, mais il est très faible et se limite à des consultations. Il faut dans le processus de l'équité en matière d'emploi un porte-parole capable de dénoncer ce qui se passe et de formuler des critiques pour promouvoir l'équité et améliorer la situation.

J'ajouterais également que les mécanismes d'exécution de la loi sont très très faibles. La Commission canadienne des droits de la personne est censée jouer le rôle de chien de garde, mais vu la pénurie de ressources et les délais de vérification, les ministères peuvent ne pas atteindre leurs objectifs relatifs à l'équité en matière d'emploi, sans que cela porte à conséquence. Il faut renforcer cet aspect, et fournir des ressources suffisantes pour exécuter les initiatives d'équité en matière d'emploi. C'est crucial. On entend dire d'en haut qu'il y a une volonté de promouvoir l'équité en matière d'emploi, mais il faut aussi des ressources centralisées. Avec la décentralisation, le Conseil du Trésor nous dit essentiellement que ce n'est plus son problème et que c'est devenu le problème des ministères. Il joue simplement ce rôle de surveillance. Il faut aussi un rôle de surveillance centralisé, surtout par rapport à la Loi sur l'équité en matière d'emploi.

Comme Mme Ducharme vient de le mentionner, le nouveau rapport sur l'équité en matière d'emploi n'est plus aussi utile. Il fournit si peu d'information qu'il est difficile, pour nous, de présenter une critique constructive, parce que nous n'avons plus les données pour le faire.

Voilà quelques suggestions.

Le sénateur Zimmer : Quand les représentantes de la Commission de la fonction publique ont témoigné devant le comité en octobre 2011, elles ont indiqué que de légers progrès avaient été accomplis pour élargir la représentation des Autochtones dans l'ensemble des ministères fédéraux. Mais les Autochtones ne travaillent que dans quelques ministères fédéraux.

Que devrait faire le gouvernement fédéral pour accroître la représentation des Autochtones dans l'ensemble de la fonction publique en général?

Mme Ducharme : C'est probablement une question à un million de dollars. Il y a d'énormes problèmes liés à l'accès à l'éducation pour les jeunes Autochtones, les Autochtones qui vivent hors des réserves et les personnes qui n'ont pas le statut d'Indien inscrit, comme les Métis ou les Inuits. Les problèmes de pauvreté et d'accès aux possibilités sont énormes eux aussi. Recruter de jeunes autochtones, dans les écoles secondaires par exemple et faciliter leur entrée dans les établissements postsecondaires, ou recruter de jeunes travailleurs autochtones lorsqu'ils sont à l'université et leur donner des possibilités d'emploi significatives dans la fonction publique fédérale seraient des mesures concrètes à prendre.

Les résultats du sondage sur l'équité en matière d'emploi sur lesquels nous avons mis la main aujourd'hui révèlent que le taux de recrutement des travailleurs autochtones est actuellement de 3,5 p. 100 et le taux de départ, de 4,4 p. 100. Les travailleurs autochtones qui quittent la fonction publique sont plus nombreux que ceux qui y entrent.

Il faut également examiner les problèmes liés au harcèlement et à l'hostilité au travail, lorsque des gens allèguent qu'un travailleur n'est pas Autochtone ou que des travailleurs ont été embauchés uniquement parce qu'ils sont Autochtones. Il faut éliminer certains de ces obstacles qui existent encore dans les milieux de travail et trouver des façons d'appuyer les travailleurs autochtones.

Le sénateur Zimmer : Merci de votre candeur.

Lorsque les représentantes de la commission ont témoigné devant le comité, elles ont également indiqué que le taux de nominations externes pour les personnes handicapées avait diminué pour une troisième année consécutive. Le plus récent rapport du Secrétariat du Conseil du Trésor sur l'équité en matière d'emploi indique lui aussi une baisse de la représentation des personnes handicapées dans la fonction publique fédérale et une hausse de leur taux de départ.

À votre avis, quelles sont certaines des raisons pour lesquelles les nominations externes diminuent pour les personnes handicapées, et que devrait faire la fonction publique pour que les taux de représentation des personnes handicapées restent supérieurs à la disponibilité sur le marché du travail pour ce groupe?

Mme Ducharme : Pour les travailleurs handicapés, il y a de nombreux obstacles, selon la nature du handicap et franchement, pour obtenir de l'information sur les postes. Vu que les emplois dans la fonction publique fédérale sont de plus en plus occasionnels actuellement, je crois que de nombreux membres ne disent pas à leur employeur quelles sont les mesures d'adaptation dont ils pourraient avoir besoin. Ils ne sentent pas qu'ils peuvent exprimer ces besoins. Ils veulent se fondre dans la masse. Par conséquent, ils ne peuvent parfois pas donner le rendement dont ils seraient capables dans le milieu de travail créé par l'employeur.

Dans des situations comme celles-là, et je répète que l'emploi occasionnel devient plus habituel que jamais, s'il y a des problèmes de rendement et que l'employeur ne sait pas que l'employé est handicapé, ou que le travailleur invoque une invalidité après qu'un problème de rendement a été constaté, l'employeur pourrait être moins enclin à tenter de résoudre le problème — à savoir, prendre des mesures d'adaptation — et plus enclin à ne pas renouveler le contrat. Je pense que c'est un obstacle important.

Nous savons que, pour les travailleurs handicapés en poste — je le dis ici dans cette salle — à mesure qu'on vieillit, on devient malade et on développe des invalidités ou des maladies chroniques — quand on a un emploi à durée indéterminée, on est plus porté à communiquer cette information à l'employeur et à être plus franc à propos de ses limites, quelles qu'elles soient. Je pense qu'il est tout à fait compréhensible que ceux qui ont un emploi précaire, comme les employés occasionnels, soient moins portés à le faire.

Mme Lamba : Tout ce que je voudrais ajouter, c'est qu'il arrive que nos membres handicapés — pas tous — demandent des prestations d'assurance-invalidité et partent, mais à un moment donné, ils doivent revenir au travail. Pour résoudre ces problèmes avec nos membres, nous constatons qu'il est difficile de faciliter une réintégration correcte au travail ou d'obtenir des mesures d'adaptation raisonnables, et ils finissent souvent par ne pas travailler, parfois pendant des années, jusqu'à ce que l'employeur finisse par les mettre à pied. Souvent, c'est parce qu'il n'y a pas de mesures d'adaptation, ou alors ces employés ont besoin d'un peu plus de temps pour surmonter leur invalidité avant de retourner au travail.

C'est un problème important, qui nous inquiète beaucoup actuellement, à cause des compressions, parce que les membres qui touchent des prestations d'assurance-invalidité pourraient être mis à pied afin de faire réaliser des économies.

Le sénateur Brazeau : Quelle est la position de l'Alliance de la Fonction publique? Je pense que vous étiez ici quand j'ai posé la question sur les pratiques de recrutement des Autochtones qui se déclarent comme tels. Quelle est la position de l'alliance concernant les personnes qui prétendent peut-être être Autochtones sans l'être, et qui sont ensuite recrutées? Quelle position avez-vous exprimée à ce sujet?

Mme Ducharme : Nous avons eu des discussions à notre Cercle national des peuples autochtones au sujet de l'identité autochtone. Nous avons eu des discussions sur la citoyenneté autochtone et l'affirmation autochtone, si c'est ce à quoi vous faites allusion, l'affirmation autochtone comme l'entend la Commission de la fonction publique, pour les candidats à des postes autochtones.

Notre position est que l'employeur a toujours la possibilité de discuter avec les travailleurs à propos de la déclaration volontaire de leur identité autochtone et que, franchement, mettre les Autochtones à part des autres groupes visés par l'équité en matière d'emploi n'est pas nécessairement le processus le plus invitant ou ouvert. Pour les membres des Premières nations qui ont des cartes, le processus est beaucoup plus direct pour établir qu'ils appartiennent à une Première nation. Si vous êtes Métis en Colombie-Britannique, le B.C. Metis Council demande que vous établissiez votre ascendance pour sept générations. C'est beaucoup plus difficile d'établir votre identité autochtone et vos obligations pour ce faire.

Nous avons interrogé la commission au sujet du fait que, par exemple, quelqu'un pourrait aussi déclarer avoir une invalidité. Je n'ai jamais entendu parler d'affirmation pour un travailleur handicapé. Nous avons parlé du fait que les Autochtones sont une fois de plus traités différemment des autres, et nous demandons quelle est la justification.

Je conviens qu'il est arrivé que des personnes mentent sur leurs origines. Nous pensons qu'il y a des façons de s'occuper de ces cas directement et qu'imposer des règles à tous les travailleurs qui s'identifient volontairement comme Autochtones n'est pas nécessairement la meilleure façon de procéder.

Le sénateur Brazeau : Vous parlez de la responsabilité des employeurs et de la responsabilité du gouvernement fédéral, ce qu'ils devraient faire, mais quelle est la responsabilité de l'Alliance de la Fonction publique du Canada? En réalité, lorsqu'une personne se déclare Autochtone et ne l'est pas, et qu'elle est recrutée dans la fonction publique, l'Alliance de la Fonction publique la représente, n'est-ce pas?

Mme Ducharme : Pouvez-vous répéter la question?

Le sénateur Brazeau : Si un non-Autochtone s'identifie comme Autochtone, du fait qu'il n'a pas à faire la preuve de ses origines autochtones, il serait représenté par l'Alliance de la Fonction publique du Canada, n'est-ce pas?

Mme Ducharme : Nous avons une obligation, à titre de syndicat représentant les travailleurs, de les représenter en vertu des lois fédérales, comme agent de négociation. Nous ne ménageons aucun effort pour nous assurer de faire ce qu'il convient lorsque nous représentons des membres à des auditions de grief ou de mesures disciplinaires. Franchement, indiquer à un employeur qu'un membre n'est pas ce qu'il prétend être placerait notre personnel dans une situation difficile.

Nous avons tenté de résoudre les problèmes autochtones. Nos membres ont mis sur pied un réseau national. Nous avons un Cercle national des peuples autochtones. Je pense que nous sommes le seul syndicat au Canada qui a eu des conférences nationales sur les peuples autochtones. Vous savez que nous nous sommes efforcés d'aplanir les difficultés reliées au jour de la réconciliation, et nous avons une campagne en cours sur la justice pour les travailleurs autochtones. Nous nous efforçons de faire en sorte que les travailleurs autochtones ont accès à des possibilités d'emploi. Cela ne veut pas dire pour autant que nous appuyons ceux qui déclarent avoir des origines autochtones quand ils n'en ont pas.

Le sénateur Brazeau : Tout ce que je disais c'est qu'il se peut que vous représentiez ces gens.

Mme Ducharme : Nous avons l'obligation positive de représenter les membres de l'AFPC, tout comme nous aurions une obligation si un membre de l'AFPC faisait quelque chose d'inacceptable au travail, comme avoir un accident dans une auto de l'employeur ou avoir un comportement inacceptable face à un membre du public. Nous aurions l'obligation positive de représenter ce membre.

Le sénateur Ataullahjan : Merci de votre exposé.

J'aimerais savoir ce qu'il faudrait faire pour encourager la promotion des membres des quatre groupes cibles aux échelons supérieurs de la direction.

Mme Ducharme : Je ris parce que j'ai choisi d'emprunter la voie syndicale plutôt que les circuits de l'employeur pour gravir les échelons.

Il y a beaucoup à faire, notamment ouvrir les possibilités pour les membres des groupes de l'équité. Nous avons parlé de formation linguistique, de reconnaissance des titres de compétence étrangers, de possibilités d'affectation de perfectionnement et d'affectations intérimaires. Des possibilités d'acquérir des compétences ou de participer à des programmes de mentorat ou de partenariat avec les gestionnaires ou le niveau de gestion supérieur — afin de mettre ses compétences et habiletés à l'épreuve — voilà autant de façons d'accroître la capacité des groupes visés par l'équité en matière d'emploi de monter dans la hiérarchie de la fonction publique fédérale.

Le sénateur Ataullahjan : Y a-t-il un plafond de verre et prend-on des mesures pour le briser?

Mme Ducharme : J'écoutais Mme Meredith quand elle vous a présenté des statistiques. Il y a un plafond. Je ne suis par convaincue que c'est un plafond de verre, parce que si c'était du verre, on pourrait voir au travers. Si on pouvait voir au travers, il serait transparent.

Je pense que les problèmes de discrimination au travail sont extrêmement complexes. Ce n'est pas seulement une question de possibilités. Soyons honnêtes. Il y a des problèmes de racisme, de classe, d'accès, de pauvreté, et le sexisme existe encore. Les données par catégories professionnelles dans le dernier rapport qui vient d'être publié révèlent que, dans le groupe de la direction, la représentation des femmes est de 44,9 p. 100. Statistiquement, 80 p. 100 des femmes sont cantonnées dans les groupes administratifs au sein de la fonction publique fédérale. Il y a 3,8 p. 100 d'Autochtones dans le groupe de la direction. Dans la catégorie du soutien administratif, il y en a 5,6 p. 100, et la disponibilité au sein de la population active est nettement plus élevée pour les Autochtones. Pour les membres handicapés, le taux est de 5,4 p. 100 dans le groupe de la direction, et je serais curieuse de voir — je n'ai pas accès à la même information que vous dans cette salle — si ces 5,4 p. 100 ont été promus à l'interne ou recrutés à l'externe. De même, chez les minorités visibles, le taux pour le groupe de direction est de 7,8 p. 100 et le taux global que j'ai utilisé plus tôt était de 11,3 p. 100.

Il y a d'importants obstacles à la promotion des groupes cibles de l'équité en matière d'emploi, et pas seulement au niveau des cadres; c'est généralisé dans l'ensemble de la fonction publique. Le tableau 3 du rapport annuel présente des statistiques assez intéressantes.

La présidente : Merci.

Le sénateur Oliver : Vous avez fait beaucoup de travail concernant la représentation dans le milieu de travail et les obstacles à la représentation. Vous en avez parlé un peu aujourd'hui.

J'aimerais vous interroger sur un sujet que vous n'avez pas vraiment abordé. Les fonctionnaires peuvent être employés à plein temps, nommés pour une durée déterminée, nommés pour une durée indéterminée, occasionnels, et ainsi de suite. Par le passé, vous avez expliqué ce qui arrive quand on est membre d'une minorité visible et qu'on est recruté comme employé occasionnel ou nommé pour une durée déterminée.

Pouvez-vous nous expliquer quels sont les désavantages lorsque des membres des minorités visibles sont recrutés dans la fonction publique comme occasionnels? Est-ce que cela est préjudiciable ou nuit d'une certaine façon à leurs chances de promotion?

Mme Ducharme : Je ne dirais pas que c'est préjudiciable. Recruter des membres des groupes visés par l'équité en matière d'emploi dans la fonction publique fédérale, c'est une bonne chose. On m'a toujours dit que, lorsqu'on a mis le pied dans la porte, on peut continuer à avancer, n'est-ce pas? Mais nous constatons que ce n'est pas nécessairement vrai. Je me tourne vers Mme Lamba, parce que j'ai vu une statistique dans mon énorme cartable au sujet du recrutement d'employés occasionnels et du pourcentage de travailleurs des groupes visés par l'équité en matière d'emploi qui sont recrutés comme occasionnels et mis à pied par la suite. Il me semble que le taux de mises à pied des membres des groupes visés par l'équité en matière d'emploi est nettement plus élevé que pour les occasionnels qui ne font pas partie des groupes cibles.

Je ne sais pas si Mme Lamba...

Le sénateur Oliver : Elle cherche.

Mme Ducharme : Elle cherche et moi aussi.

La présidente : Madame Ducharme, pendant que Mme Lamba continue de chercher, vous pouvez répondre à la prochaine question.

Mme Ducharme : Certainement.

Le sénateur Hubley : J'ai une question supplémentaire, peut-être dans la même veine, peut-être pas.

J'attendais ce chiffre, mais je supposerai que le taux est plus élevé pour les employés occasionnels ou nommés pour une durée déterminée chez les minorités visibles. Comment cela fausse-t-il les chiffres que nous avons reçus aujourd'hui, que je supposais porter sur les employés à plein temps, selon lesquels il y avait 4,7 p. 100 d'Autochtones?

S'il y a davantage de membres de nos groupes cibles parmi ces employés occasionnels ou nommés pour une durée déterminée, les statistiques sont un peu faussées. Il y a peut-être 4,7 p. 100 d'Autochtones, mais pas nécessairement dans des emplois à plein temps, comme on pourrait l'imaginer. Les employés occasionnels et nommés pour une durée déterminée sont-ils inclus dans ce taux?

Mme Ducharme : Les employés nommés pour une durée déterminée pourraient bien l'être, et cela pourrait expliquer en partie les taux de départ plus élevés que nous avons signalés, les taux de départ pour les promotions dans la fonction publique par groupe désigné et les départs. Le rapport ne fournit plus de données portant expressément sur les emplois à durée déterminée.

Par le passé, il y avait des tableaux sur les employés nommés pour une durée déterminée. Ces données n'existent plus dans le rapport. Les données sont regroupées.

Les taux de recrutement sont plus faibles que les taux de départ pour les Autochtones et pour les personnes handicapées. Ce sont les deux groupes pour lesquels le taux de départ est nettement plus élevé que le taux de recrutement.

Le sénateur Hubley : En période de réduction des effectifs, les employés occasionnels ou nommés pour une durée déterminée seraient-ils les premiers à partir?

Mme Ducharme : Oui. La durée déterminée et les contrats prendraient fin et ne seraient probablement pas renouvelés. Les occasionnels partiraient les premiers, en théorie, les employés nommés pour une durée déterminée partiraient ensuite, puis la discussion porterait sur les employés nommés pour une durée indéterminée.

Le sénateur Hubley : De fait, les Autochtones, les personnes handicapées ou les membres des minorités visibles seraient très probablement les premiers à partir.

Mme Ducharme : C'est certainement ce que nous craignons, en effet.

Le sénateur Hubley : Merci.

Le sénateur Meredith : Madame Ducharme, vous avez abordé quelques sujets sur lesquels mon collègue le sénateur Ataullahjan vous a interrogée afin d'engager ces employés et de leur permettre de monter dans la hiérarchie, et de l'éducation que cela suppose. Comment engager les employés qui veulent obtenir ces postes?

Vous avez aussi parlé de racisme et de discrimination. Il est arrivé que certains de vos membres estiment s'être fait refuser un poste et avoir fait l'objet de discrimination. Comment réagissez-vous dans ces cas-là?

Mme Lamba : Ces cas arrivent de temps en temps. Le problème avec le racisme et les allégations de racisme, c'est que c'est très difficile à prouver. Une modification a été apportée à la Loi sur l'équité en matière d'emploi il y a quelques années afin d'interdire l'utilisation de données sur l'équité en matière d'emploi dans une plainte à la Commission des droits de la personne, par exemple, concernant la discrimination. Il faut pouvoir le prouver autrement.

Le racisme au Canada n'est pas toujours aussi flagrant. Il est subtil. C'est l'un des problèmes auxquels nous sommes confrontés sans cesse. On peut estimer qu'il y a eu un acte répréhensible, mais c'est souvent difficile à prouver.

Parfois, lorsque nous tentons d'explorer l'affaire en essayant de voir quel était le processus, s'il s'agissait de dotation ou d'autre chose, c'est très difficile à établir.

La contestation des processus de dotation relève de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique. Il existe donc un mécanisme et nous constatons qu'il est très difficile de prouver la discrimination dans ce processus. Il faut utiliser un processus d'abus de l'autorité. C'est une définition très étroite qui laisse peu de marge de manoeuvre.

Mme Ducharme : Sur l'autre front, en ce qui concerne les possibilités d'avancement, je vois dans les statistiques que j'ai pu trouver qu'en 2007-2008, 73 p. 100 des candidats racialisés avaient un diplôme universitaire, comparativement à 50 p. 100 chez les autres travailleurs qui sont entrés dans la fonction publique fédérale. Si j'étais gestionnaire dans la fonction publique fédérale, je parlerais au personnel compétent, à ceux qui sont de bons employés et qui montrent qu'ils veulent faire carrière dans la fonction publique fédérale, et je ferais ces connexions personnelles afin de créer un profil de carrière, des profils de perfectionnement pour ceux qui ont des possibilités et, au besoin, qu'ils aient une formation linguistique, afin de tester leurs compétences et de pouvoir les aider à progresser et à utiliser les compétences de ces gens.

Je ne suis pas un employeur au gouvernement, mais je suis une représentante d'un employeur. Je suis patronne, à titre de vice-présidente d'un syndicat, et nous nous efforçons que le personnel ait des possibilités d'avancement. Nous les invitons à nous indiquer quel type de possibilités ils souhaiteraient lorsqu'il y a des postes à pourvoir. Ils ont la possibilité de participer à des affectations intérimaires, à montrer leur intérêt et à appliquer leurs compétences dans des postes différents.

Le gouvernement a la même responsabilité en tant qu'employeur et nous savons qu'il y a de nombreuses possibilités au gouvernement pour que les gens innovent, soient inventifs et proposent de bonnes idées.

Je sais bien que le gouvernement et les gestionnaires au gouvernement sont eux aussi sous la menace de la réduction des effectifs, mais il y a des possibilités pour nous, le public, et pour vous, le Comité sénatorial des droits de la personne. J'espère que vous encouragerez le Secrétariat du Conseil du Trésor et les autres organes de gestion du gouvernement fédéral à innover.

Le sénateur Meredith : Vous m'avez entendu interroger Mme Meredith sur les titres de compétence étrangers et les possibilités qui existent d'entrer et de monter dans la fonction publique. Vous avez parlé du plafond de verre. Vous avez déclaré qu'il n'est pas transparent. C'est un mur de brique sur lequel un grand nombre de ces employés viennent se heurter, et ils sont frustrés, à juste titre.

Que faites-vous pour tenir compte des titres de compétence étrangers et permettre aux immigrants d'obtenir cette expérience canadienne dont ils ont besoin pour gravir les échelons? Pouvez-vous nous décrire comment votre service agit avec ceux qui viennent vous voir ou qui veulent devenir membres?

Mme Ducharme : Je répète que nous ne sommes pas le gouvernement fédéral, mais l'expérience canadienne est cruciale pour finir par faire reconnaître des titres de compétences étrangers au Canada. Du point de vue organisationnel, nous avons travaillé avec une foule d'organisations ici à Ottawa et partout au Canada. Embauche Immigrants Ottawa est une organisation qui travaille d'arrache-pied, par l'entremise de Centraide, pour que les nouveaux immigrants au Canada puissent acquérir de l'expérience canadienne. Selon l'organisme de réglementation, les immigrants ne font pas toujours reconnaître leurs titres de compétence proprement dits, mais ils peuvent acquérir une expérience canadienne et passer des examens ou suivre une formation abrégée.

Je ne vois rien de bon pour aucun de nous à ce que des médecins et des ingénieurs soient chauffeurs de taxi. Des immigrants possèdent une importante formation technique, une expérience scientifique dont notre pays pourrait profiter, mais nous n'avons pas trouvé comment éliminer les obstacles qui les empêchent de contribuer.

Mme Lamba : L'AFPC fait partie d'un mouvement syndical plus vaste, et le Congrès du travail du Canada a fait beaucoup de travail lui aussi sur les titres de compétence étrangers. En tant que mouvement syndical, nous essayons de faire avancer les politiques et de promouvoir la reconnaissance des titres de compétence étrangers, dans le secteur public fédéral mais aussi dans d'autres secteurs parce que les conséquences sont généralisées.

Le sénateur Meredith : Merci.

La présidente : J'ai quelques questions. Quand l'AFPC a témoigné en juin 2009, vous avez exprimé des inquiétudes concernant le virage du bureau des ressources humaines vers une structure plus ministérielle, un rôle ministériel dans la gestion des ressources humaines, en déléguant des pouvoirs et des responsabilités aux administrateurs généraux, et la décentralisation. Nous en avons entendu parler aujourd'hui, quand ils ont dit que ce n'est plus leur rôle maintenant et que c'est aux sous-ministres à répondre. Inviterons-nous 72 sous-ministres pour qu'ils répondent à nos questions? Est-ce là où nous allons avec cette délégation de la responsabilité de l'application de la Loi sur l'équité en matière d'emploi aux sous- ministres?

Vous aviez exprimé vos inquiétudes à l'époque. Estimez-vous que vos craintes se sont confirmées?

Mme Ducharme : Je suis convaincue que les statistiques sur le recrutement, les promotions et les départs contenues dans le rapport que nous avons obtenu aujourd'hui sur l'équité en matière d'emploi dans la fonction publique confirment nos inquiétudes, nos craintes et nos réserves. Je le répète, pour plusieurs des groupes désignés, les taux de départ sont nettement plus élevés que les taux de recrutement.

Mme Lamba : Je dirais que nos inquiétudes demeurent. Elles portent sur l'uniformité et l'absence de reddition des comptes. Essentiellement, ce que nous entendons du Conseil du Trésor, c'est qu'il ne joue plus ce rôle, de sorte que plus personne n'est responsable. C'est le rôle de chaque ministère, du sous-ministre. C'est ce que nous entendons.

La responsabilisation est censée être intégrée dans leurs cadres de responsabilisation de gestion, mais l'équité en matière d'emploi n'est qu'un critère parmi tant d'autres. Comme l'a fait remarquer Mme Ducharme, si un administrateur général réussit à réduire le budget ou à faire autre chose avec son budget, il touchera sa prime — parce que c'est à cela que revient le cadre de responsabilisation de gestion — alors, l'équité en matière d'emploi pourrait se retrouver tout au bas de leur liste.

Tant qu'ils indiquent avoir pris des mesures quelconques concernant l'équité en matière d'emploi, avoir rencontré quelqu'un ou fait quelque chose, ils remplissent le critère de l'équité en matière d'emploi, peut-être.

La délégation des responsabilités nous inquiète encore beaucoup. À notre avis, le Conseil du Trésor est encore l'employeur, mais le Conseil du Trésor ne joue pas ce rôle autant qu'il le devrait, selon nous.

La présidente : Il a abandonné son rôle de surveillance.

Mme Ducharme : Oui.

La présidente : Ce qui nous inquiète aussi, c'est la situation des personnes handicapées. Souvent, on entre dans la fonction publique et, malheureusement, on devient malade, puis une statistique permettant d'affirmer que la fonction publique a atteint son quota de personnes handicapées.

Dans quelle mesure recrute-t-on activement des personnes handicapées dans la fonction publique?

Mme Ducharme : Je ne peux pas répondre à cette question. Je pense qu'il vaudrait mieux la poser au Secrétariat du Conseil du Trésor. Une fois de plus, les statistiques montrent que le taux de départ des travailleurs handicapés est deux fois plus élevé que le taux de recrutement, d'après les plus récentes statistiques.

Je pense que c'est très important. J'ai des informations selon lesquelles, en 2010 et 2011, 2,6 p. 100 des nouveaux employés dans la fonction publique fédérale étaient des personnes handicapées, alors que le taux de disponibilité au sein de la population active est de 4 p. 100.

Il convient de souligner que, d'après le Sondage auprès des fonctionnaires fédéraux de 2008, environ la moitié des employés handicapés déclaraient avoir été harcelés au travail, et 49 p. 100 déclaraient avoir été harcelés depuis un an ou deux.

La présidente : Merci beaucoup. Nous avons hâte de recevoir vos observations sur le rapport publié par le Conseil du Trésor aujourd'hui. Je ne veux pas vous imposer une lourde tâche, mais si vous pouvez nous donner un compte rendu sur certaines de nos recommandations — comme nous l'avons demandé au Bureau des ressources humaines du Conseil du Trésor — nous pourrions faire des comparaisons.

Mme Ducharme : Nous n'y manquerons pas. Nous sommes très heureux de pouvoir rencontrer le comité et de vous présenter nos idées et nos points de vue sur ces questions. Nous trouvons ces questions extrêmement importantes, pas seulement pour nos membres, mais aussi pour le public en général. Si nous voulons vraiment que la fonction publique soit le reflet de la société canadienne, nous avons tous un énorme travail à faire. Nous ferons tout ce que nous pourrons pour vous aider dans ce processus.

La présidente : En terminant, j'aimerais vous poser une question sur les champions. C'est un nouveau programme, alors si vous pouvez nous donner votre opinion, après avoir parlé à vos membres, sur ce programme, ce serait très utile pour nous, ou si un membre veut nous faire ses observations, nous aimerions avoir son nom.

Nous vous remercions. Vous êtes toujours à notre disposition et nous ne pourrons pas faire ce travail sans votre partenariat. Nous vous remercions infiniment de votre temps et de vos exposés toujours sérieux.

(La séance se poursuit à huis clos.)


Haut de page