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ENEV - Comité permanent

Énergie, environnement et ressources naturelles

 

LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DE L’ÉNERGIE, DE L’ENVIRONNEMENT ET DES RESSOURCES NATURELLES

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le jeudi 1er mai 2014

Le Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd’hui à 8 heures pour poursuivre son étude sur le développement des énergies renouvelables et non renouvelables dans les trois territoires du Nord, y compris le stockage, la distribution, la transmission et la consommation d’énergie, de même que les technologies émergentes.

Le sénateur Richard Neufeld (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles. Je suis Richard Neufeld. Je représente la province de la Colombie-Britannique au Sénat, et je suis président du comité.

J’aimerais souhaiter la bienvenue aux honorables sénateurs et aux membres du public qui sont ici avec nous et aux téléspectateurs de partout au pays qui nous regardent à la télévision ou sur le Web. J’aimerais rappeler à ceux qui nous regardent que ces audiences du comité sont publiques et qu’elles sont diffusées sur le Web dans le site Internet sen.parl.gc.ca. Vous trouverez davantage de renseignements sur l’horaire de comparution des témoins dans le site Web sous la rubrique « Comités du Sénat ».

J’aimerais maintenant demander aux sénateurs de se présenter. Je commence par présenter le vice-président du comité, le sénateur Grant Mitchell de l’Alberta.

Le sénateur MacDonald: Michael MacDonald, Nouvelle-Écosse.

Le sénateur Massicotte: Paul Massicotte, Québec.

Le sénateur Patterson: Denis Patterson, Nunavut.

La sénatrice Seidman: Judith Seidman, de Montréal, Québec.

Le sénateur Wallace: John Wallace, Nouveau-Brunswick.

Le sénateur Black: Douglas Black, Alberta.

Le président: J’aimerais également présenter notre personnel, en commençant par la greffière, Lynn Gordon, et nos deux analystes de la Bibliothèque du Parlement, Sam Banks et Marc LeBlanc.

Le 4 mars 2014, le Sénat a autorisé le comité à entreprendre une étude sur le développement des énergies renouvelables et non renouvelables dans les trois territoires du Nord, y compris le stockage, la distribution, la transmission et la consommation d’énergie, de même que les technologies émergentes.

La réunion d’aujourd’hui est la troisième que nous consacrons à cette étude, et je suis ravi d’accueillir, pour la première partie de notre réunion, les témoins suivants — et veuillez m’excuser si je ne prononce pas correctement vos noms. D’Environnement Canada, Mark Cauchi, directeur exécutif, Pétrole, gaz et énergie de remplacement; et Lynne Patenaude, gestionnaire, Gaz naturel et pétrole brut. De l’Agence canadienne de développement économique du Nord, Sandra LaFortune, directrice générale, Politique et planification; et Matthew Spence, directeur général, Bureau de gestion des projets nordiques. Du ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement, Susan Harper, directrice générale et haute représentante de l’Arctique pour le Canada; et Marc Tessier, chef, Section de l’énergie et directeur adjoint, Affaires circumpolaires et énergie.

Je crois savoir que M. Cauchi sera le premier à faire un exposé de cinq minutes au nom d’Environnement Canada et qu’il sera suivi de Mme LaFortune, suivie à son tour de M. Hardin, d’Affaires étrangères.

Mark Cauchi, directeur exécutif, Pétrole, gaz et énergie de remplacement, Environnement Canada: Bonjour à tous. Je suis le directeur exécutif par intérim de la division du Pétrole, du gaz et de l’énergie de remplacement à Environnement Canada. Je suis accompagné de Lynne Patenaude, gestionnaire de Gaz naturel et pétrole brut. Nous sommes ravis d’être ici et de témoigner devant le comité.

J’aimerais d’abord rappeler la situation particulière liée à la responsabilité de cette région. Comme vous le savez, Environnement Canada a pour mandat de protéger l’environnement, de conserver le patrimoine naturel du Canada et de fournir des prévisions météorologiques et environnementales aux Canadiens afin de les informer et d’assurer leur sécurité. L’environnement étant un secteur de responsabilité partagée, le Nord est une région complexe à ce chapitre.

Environnement Canada applique les lois et les règlements environnementaux comme la Loi canadienne sur la protection de l’environnement, les dispositions de prévention de la pollution prévue dans la Loi sur les pêches, la Loi sur la convention concernant les oiseaux migrateurs et la Loi sur les espèces en péril. De plus, nous travaillons conjointement avec Santé Canada au plan de gestion des produits chimiques. Entre autres choses, ces instruments confèrent le pouvoir de gérer les rejets de substances dans l’air, l’eau et le sol par les secteurs de l’énergie, ainsi que leurs répercussions sur les écosystèmes et les espèces sauvages.

Une initiative clé qui contribue à la protection de l’écosystème du Nord est le règlement de la LCPE qui concerne les réservoirs de stockage de pétrole sur les terres fédérales à l’échelle des territoires, par exemple dans les aéroports et les installations de défense.

À l’instar d’autres ministères fédéraux, Environnement Canada donne des avis aux conseils de cogestion de l’évaluation environnementale et de la réglementation dans le Nord qui ont été établis par la conclusion d’ententes sur la revendication territoriale globale.

En ce qui concerne les urgences environnementales, Environnement Canada est prêt à prodiguer des conseils scientifiques 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Ces conseils guident les mesures d’atténuation des conséquences des urgences environnementales, y compris dans le Nord.

Au cours d’un incident de pollution urgent, les services scientifiques d’Environnement Canada peuvent comprendre des prévisions météorologiques et la modélisation de la dispersion des contaminants et de la trajectoire, la détermination du sort et du comportement des substances dangereuses, l’établissement des priorités et des techniques de nettoyage, de même que la protection des écosystèmes et des espèces sauvages susceptibles, tels que les oiseaux migrateurs et les poissons. Nous menons aussi des études de référence environnementales afin de cartographier les zones écosensibles le long de certaines côtes du Nord.

Environnement Canada dirige aussi deux des initiatives du Conseil de l’Arctique sous la présidence canadienne de 2013 à 2015. La première vise à réduire les polluants de courte durée de vie ayant un effet sur le climat et la deuxième vise à assurer la conservation des oiseaux migrateurs. Le Canada contribuera aussi à d’autres initiatives, selon leur portée. Le secteur pétrolier et gazier fait activement l’exploration de pétrole brut dans des formations de schiste situées dans la région de Sahtu, près de Norman Wells, dans les Territoires du Nord-Ouest. Environnement Canada est l’un des ministères qui participent à la recherche visant à formuler des données de référence pour ces développements de la vallée centrale du Mackenzie. Il reconnaît que les Canadiens veulent plus de renseignements sur les répercussions environnementales de l’exploitation du gaz de schiste et l’exploitation d’autres activités connexes où l’on a recours à la fracturation hydraulique.

Nous accueillons l’évaluation scientifique réalisée par le Conseil des académies canadiennes à notre demande, qui a été publiée aujourd’hui. Les sénateurs n’ont peut-être pas vu le rapport, mais il est intéressant et au cours des semaines et des mois à venir, des représentants examineront l’évaluation et en détermineront les implications pour le gouvernement du Canada.

Conformément à l’approche sectorielle qu’utilise le gouvernement pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, Environnement Canada est responsable de l’élaboration de règlements visant les secteurs. Nous avons déjà publié des règlements liés aux gaz à effet de serre pour les secteurs de l’électricité et du transport. Nous collaborons avec d’autres secteurs, dont le secteur pétrolier et gazier.

Des progrès ont été réalisés dans le cadre des discussions tenues avec l’industrie, les provinces et les autres partenaires au fil de l’élaboration d’une approche visant à réduire les émissions tout en continuant de créer des emplois.

En septembre 2012, Environnement Canada a publié la version finale d’un règlement visant à limiter les émissions de dioxyde de carbone découlant de la production d’électricité à partir de charbon, qui encourage la disparition progressive des centrales au charbon traditionnelles. Il n’y a toutefois pas d’électricité produite au charbon dans le Nord. Environnement Canada entend réglementer la production d’électricité à partir de gaz naturel.

En ce qui concerne les questions d’utilisation de l’énergie liée au transport, nous sommes actifs dans de nombreux dossiers réglementaires. Nous avons publié plusieurs règlements, en harmonie avec les États-Unis, régissant le transport et visant à réduire les polluants atmosphériques et les gaz à effet de serre. Un des plus importants est le règlement sur les gaz à effet de serre concernant les automobiles et les véhicules utilitaires légers mais on en a aussi récemment publié un dans la gazette sur les camions de gros tonnage.

Environnement Canada tient compte des questions particulières au Nord au moment d’élaborer des règlements sur les carburants, et ce point est important. Par exemple, le Règlement sur les carburants renouvelables, qui exige que l’essence et le diesel contiennent un carburant renouvelable comme de l’éthanol ou du biodiesel, permet une exemption relative au carburant utilisé dans le Nord.

Un autre exemple est le Règlement sur le benzène dans l’essence, qui tient compte d’une saison estivale différente dans le Nord que dans le reste du Canada.

Nous pouvons nous attendre à ce que le développement, y compris le développement énergétique dans le Nord, entraîne une hausse du trafic des pétroliers. Environnement Canada et Transports Canada évaluent l’incidence possible des émissions de polluants atmosphériques issus de la navigation maritime sur les écosystèmes de l’Arctique. La limite actuelle du soufre du combustible pour les navires qui se trouvent dans l’Arctique canadien est compatible avec la limite mondiale imposée par l’Organisation maritime internationale et est supérieure à la limite imposée dans la zone de contrôle des émissions dans les régions côtières de l’Amérique du Nord pour les navires situés au sud du 60e parallèle.

Pour conclure, j’aimerais souligner qu’Environnement Canada est un ministère à vocation scientifique et que nos activités de recherche et de surveillance soutiennent les responsabilités réglementaires du ministère, ainsi que de nombreuses autres décisions réglementaires fédérales dans le Nord.

[Français]

Sandra LaFortune, directrice générale, Politique et planification, Agence canadienne de développement économique du Nord: Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, je m’appelle Sandra LaFortune. Je suis directrice générale de la politique et de la planification à l'Agence canadienne de développement économique du Nord, ou CanNor. Je suis accompagnée aujourd'hui de Matthew Spence, directeur général du Bureau de gestion des projets nordiques (BGPN) de CanNor.

Je me réjouis de participer à cette réunion du comité, au nom de CanNor, afin de discuter de certains des enjeux liés à l'énergie dans les territoires nordiques.

CanNor a été créée en 2009, dans le cadre du Plan d'action économique du Canada, pour favoriser une économie diversifiée, durable et dynamique dans les trois territoires canadiens, afin de faciliter la création d'emplois et la croissance, et de contribuer à la prospérité de tous les Canadiens. CanNor reconnaît qu'un accès fiable, sûr et abordable à l'énergie fait partie intégrante de tout effort visant à promouvoir le développement économique du Nord pour le secteur des ressources et le développement des entreprises, et en vue d'assurer la viabilité à long terme des collectivités nordiques.

[Traduction]

L’agence collabore avec divers partenaires et intervenants, dont les ministères fédéraux et territoriaux, des organismes autochtones, des organisations non gouvernementales et le secteur privé, pour définir des approches qui permettront de répondre aux besoins en énergie du Nord. Ces approches doivent comprendre des solutions énergétiques novatrices qui augmentent l’efficience et la diversité tout en conciliant le besoin d’une alimentation énergétique des collectivités et de développement avec le besoin de protéger l’environnement.

Chaque territoire est aux prises avec une situation qui lui est propre. Au Yukon, l’hydroélectricité assure la plus grande partie de l’alimentation électrique, mais le système a atteint sa capacité. Dans les Territoires du Nord-Ouest l’alimentation énergétique est plus diversifiée: bon nombre de collectivités continuent d’utiliser des groupes électrogènes diesel alors que d’autres comme Yellowknife comptent presque exclusivement sur l’hydroélectricité. Les granules de bois, la biomasse et l’énergie solaire et éolienne ont été ajoutées au cocktail énergétique, mais dans l’ensemble, la capacité demeure limitée. Le Nunavut est alimenté en électricité par des groupes électrogènes diesel et le carburant est transporté jusqu’au territoire par voie aérienne ou maritime, ce qui est très coûteux.

À certains égards, CanNor contribue à relever les défis relatifs à l’énergie. Tout d’abord, nous disposons de programmes de contribution qui permettent de réaliser des investissements dans certaines initiatives particulières visant l’infrastructure énergétique, la production d’énergie électrique et des projets énergétiques novateurs et de remplacement. Deuxièmement, notre Bureau de gestion des projets nordiques met à profit son réseau avec le secteur de la mise en valeur des ressources pour s’assurer que les collectivités profitent des projets de développement, qui peuvent comprendre des projets visant l’infrastructure et le développement énergétique.

J’aimerais tout d’abord vous présenter quelques exemples d’investissements que nous avons effectués grâce à nos programmes de contribution pour aider le Nord à relever les défis liés à l’énergie.

CanNor a investi 2,5 millions de dollars sur trois ans pour faciliter le développement de la biomasse énergétique par l’entremise de l’initiative de développement de la foresterie et de la biomasse dans les Territoires du Nord-Ouest. Le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest a installé des systèmes de chauffage alimentés par copeaux de bois dans plusieurs immeubles du gouvernement territorial et appuie la production de copeaux de bois dans de nombreuses collectivités.

L’année dernière, nous avons annoncé un financement de 124 000 $ pour aider la Première Nation Kaska à explorer le potentiel que pourraient présenter les ressources géothermiques sur ses terres. Nous avons aussi investi plus de 100 000 $ dans un projet de développement énergétique sur le territoire traditionnel des Premières Nations de Champagne et d’Aishihik au Yukon. CanNor finance une étude de faisabilité pour permettre à la Dakwakada Development Corporation d’évaluer la viabilité économique et commerciale d’un mini-projet hydroélectrique sur la rivière Kathleen, et explorer la possibilité d’utiliser d’autres rivières comme mini-sources d’hydroélectricité.

Notre agence investit plus de 130 000 $ dans le projet pilote du Centre d’innovation en climat froid du Collège du Yukon, qui convertit des plastiques en pétrole brut — suffisamment pour réchauffer le centre de recyclage dans lequel il se trouve.

Ce mois-ci, la ministre Aglukkaq a annoncé le financement d’un projet pilote qui pourrait transformer la gestion des déchets au Nunavut. Le microsystème autonome de gazéification constitue une nouvelle technologie de pointe qui réduit considérablement le volume de déchets traités, par la décomposition thermique des déchets solides et des huiles usées. En plus de réduire les déchets, le microsystème autonome de gazéification produit suffisamment d’énergie pour s’autoalimenter et chauffer les édifices à proximité. Nous avons aussi investi 500 000 $ pour un bloc électrogène diesel plus efficient à Qikiqtarjuaq, au Nunavut.

J’aimerais maintenant discuter du Bureau de gestion des projets nordiques, le BGPN, qui a été mis sur pied pour améliorer l’examen environnemental et les processus de délivrance de permis pour les grands projets régionaux de mise en valeur des ressources et d’infrastructures dans le Nord du Canada.

Le bureau s’est révélé un outil efficace pour rallier les partenaires et les intervenants à l’égard de nombres d’aspects de la mise en œuvre des ressources, y compris pour aider les entreprises à collaborer étroitement avec les collectivités afin de s’assurer que celles-ci tirent parti des projets.

Permettez-moi de décrire le contexte dans lequel s’inscrit la mise en valeur des ressources dans le Nord du Canada.

L’énergie continue d’être un inducteur de coûts importants de projets de mise en valeur des ressources, ce qui compromet la faisabilité financière de ces projets. Les réseaux électriques de la plupart des collectivités ont une capacité limitée et ne sont pas raccordés aux réseaux régionaux ou territoriaux, de sorte que de grandes parties des territoires ont une capacité limitée, sinon inexistante, de produire de l’énergie électrique. Les promoteurs de projets de développement des ressources doivent habituellement générer leur propre électricité.

Comme le comité le sait certainement, le coût de l’énergie dans le Nord est élevé. Les prix d’électricité par kilowattheure sont cinq fois plus élevés au Nunavut qu’en Ontario.

Le coût de chauffage des locaux par unité d’énergie à Sachs Harbour, dans les Territoires du Nord-Ouest, est sept fois plus élevé que le prix du gaz naturel vendu à Edmonton. Les dépenses annuelles consacrées aux activités liées à l’énergie représentent 20 p. 100 du budget annuel du gouvernement territorial du Nunavut.

Le coût élevé de l’énergie se fait sentir par tous y compris par les petites entreprises à travers le Nord, et bien entendu dans le secteur de la mise en valeur des ressources qui représente un si grand potentiel pour l’avenir de l’économie du Nord. Les projets miniers, d’exploitation du gaz et du pétrole et de pipeline comptent parmi les plus importants consommateurs d’énergie dans le Nord, et les coûts énergétiques sont cruciaux pour déterminer si un projet sera viable.

Les sociétés minières cherchent des méthodes novatrices et de remplacement pour produire de l’énergie à plus faible coût. En outre, elles désirent examiner comment les investissements qu’elles effectuent dans l’infrastructure énergétique pourraient contribuer à résoudre les problèmes d’alimentation énergétique dans les collectivités avoisinantes. Ces efforts ont mené à des pratiques novatrices.

Par exemple, Diavik Diamond Mines a récemment investi dans des éoliennes, ce qui a réduit sa production d’énergie à partir de blocs électrogènes diesel. Iqaluit effectue des travaux dans le but de développer l’hydroélectricité afin d’aiguiller une certaine partie de cette énergie vers une éventuelle mine de diamant dans le nord de la collectivité. Les entreprises comme Kivalliq Energy, qui s’intéresse à l’exploration de l’uranium, font la promotion de l’utilisation de l’énergie nucléaire. Enfin, on a tenu récemment une réunion pour discuter des moyens que pourrait prendre le Manitoba pour offrir de l’hydroélectricité à coût moindre dans la région de Kivalliq.

La production énergétique intérieure, bien qu’elle en soit encore à ses balbutiements, présente un potentiel de croissance grâce à une entreprise du Yukon — à savoir Northern Cross, qui cherche à produire et à raffiner des hydrocarbures qui pourraient être fournis à des clients du Yukon et des Territoires du Nord-Ouest à partir de la région de la plaine d’Eagle au Yukon.

[Français]

Comme vous pouvez le voir, CanNor se sert de ses programmes de contribution, des services du BGPN et de ses partenariats avec les clients et les intervenants pour régler les principaux enjeux auxquels est confronté le secteur de l'énergie du Nord. Nous n’avons eu le temps d'aborder que quelques exemples de ce que nous accomplissons. Monsieur Spence et moi serons heureux de répondre à vos questions afin de vous donner des précisions supplémentaires sur les activités de CanNor.

[Traduction]

Le président: Merci beaucoup. Nous passons maintenant à Mme Susan Harper.

Susan Harper, directrice générale et haute représentante de l’Arctique, ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du développement: Bonjour monsieur le président et honorables sénateurs. Merci de cette occasion de témoigner devant votre comité. Je m’appelle Susan Harper et je suis directrice générale et haute représentante du Canada pour l’Arctique au ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement.

J’aimerais tout d’abord mentionner que la plupart des questions que le comité prévoit examiner relèvent du mandat d’autres ministères que le comité a également invités à témoigner. Chacun des territoires a produit des plans d’action pour ses futurs approvisionnements en énergie et je crois comprendre qu’ils témoigneront aussi devant le comité.

Je me concentrerai aujourd’hui sur les principales questions se rapportant directement au rôle que mon ministère joue dans le développement énergétique des territoires nordiques. De plus, en tant que haute représentante du Canada pour l’Arctique, je parlerai brièvement du travail qu’accomplit le Conseil de l’Arctique dans ce contexte.

[Français]

Le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement joue un double rôle dans l'examen du comité. En première lieu, conformément à notre mandat ministériel principal, les ministres Baird et Fast œuvrent activement à promouvoir le Canada comme partenaire sécuritaire et fiable en matière d'investissement et de commerce, en insistant particulièrement sur la diversification des relations futures du Canada en matière d'investissement et de commerce des produits énergétiques.

En deuxième lieu, le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement est le ministère responsable de la participation du Canada au Conseil de l'Arctique. Nous appuyons Leona Aglukkaq, ministre de l'Environnement, ministre de l'Agence canadienne de développement économique du Nord et ministre du Conseil de l'Arctique, dans les travaux du Conseil de l'Arctique.

Le Canada est actuellement le président du Conseil de l'Arctique jusqu’en 2015. Le thème principal de notre présidence est « Le développement au service de la population du Nord ».

[Traduction]

Monsieur le président, le premier point que j’aimerais porter à votre attention concerne l’intention de votre comité d’examiner des moyens d’améliorer et de diversifier la production d’énergie pour les besoins nationaux et les marchés d’exportation.

Le Canada a la chance d’être doté d’abondantes ressources naturelles et possède des secteurs de l’énergie propre et des services énergétiques de calibre mondial. En tant que ministère responsable du commerce international, nous comprenons pleinement l’importance vitale du secteur de l’énergie pour l’économie du Canada et notamment pour le PIB, les revenus d’exportation et l’emploi. De plus, le secteur de l’énergie est également responsable d’attirer certaines de nos plus importantes sources d’investissement étranger au Canada.

L’Agence internationale de l’énergie prévoit que la demande mondiale en énergie augmentera d’un tiers d’ici à 2035, et que plus des trois quarts de la demande sera encore comblée par des combustibles fossiles.

Dans ce contexte, on s’attend à ce que les ressources et services énergétiques du Canada continuent de contribuer à la stabilité des marchés et à la sécurité énergétique mondiale en général — et cela comprendra des ressources énergétiques provenant de nos territoires nordiques qui sont actuellement coupés des marchés.

En même temps, toutefois, le développement de sources d’énergie non conventionnelle rend les États-Unis, le principal client du Canada en matière d’énergie, de plus en plus autosuffisant. Nous devons donc diversifier nos marchés.

Monsieur le président, nos ministres travaillent avec des partenaires des provinces et de l’industrie pour promouvoir des solutions pour diversifier le profil du Canada en matière de commerce énergétique dans le monde — en particulier vers les marchés en croissance rapide de la région de l’Asie-Pacifique. Le Canada a manifestement besoin de développer l’infrastructure nécessaire pour relier ses ressources énergétiques aux marchés mondiaux, et cela comprend les ressources des territoires nordiques du Canada.

Je crois comprendre que nos collègues de Ressources naturelles Canada et d’Affaires autochtones et Développement du Nord Canada ont traité du potentiel de ressources dans le Nord lors du témoignage qu’ils ont fait cette semaine au comité.

Le deuxième point que je souhaite porter à votre attention est le rôle du Conseil de l’Arctique et la présidence du conseil par le Canada de 2013 à 2015.

La politique étrangère du Canada pour l’Arctique repose sur la vision du gouvernement du Canada pour l’Arctique, telle qu’elle est présentée dans la Stratégie pour le Nord du Canada, à savoir: une région stable et fondée sur des règles, avec des frontières clairement définies, caractérisée par une croissance économique vigoureuse, des communautés dynamiques et des écosystèmes sains.

Cette stratégie souligne l’engagement qu’a pris le gouvernement de travailler avec tous les intervenants, dont les gouvernements provinciaux et territoriaux et les groupes autochtones, pour établir un équilibre entre les considérations économiques, sociales et environnementales dans le développement du Nord canadien. La même vision a guidé le thème principal du mandat du Canada en tant que président du Conseil de l’Arctique, à savoir « le développement au service de la population du Nord ».

Plus précisément, on trouve au sein du Conseil deux filières de travail distinctes qui ont trait au pétrole dans l’Arctique. La première a mené à l’accord de coopération sur la préparation et la lutte en matière de pollution marine par les hydrocarbures dans l’Arctique, un accord juridiquement contraignant qui a été signé par huit États arctiques à la réunion ministérielle du Conseil de l’Arctique tenue à Kiruna, en Suède, le 15 mai 2013. Le principal objectif de l’accord est de permettre aux États arctiques de s’entraider afin d’intervenir efficacement en cas de déversements marins d’hydrocarbures dans l’Arctique qui dépassent les moyens d’un seul État.

La deuxième filière de travail connexe consistait à élaborer des pratiques recommandées en matière de prévention des déversements d’hydrocarbures pour l’Arctique, et cela constitue une priorité durant la présidence du Conseil de l’Arctique par le Canada. Les ministres présents à Kiruna ont établi un groupe de travail chargé d’élaborer un plan d’action pour le Conseil de l’Arctique sur la prévention de la pollution par les hydrocarbures, et ces travaux seront présentés à la prochaine réunion ministérielle, qui aura lieu au Canada en 2015.

[Français]

En outre, sous la présidence du Canada, qui reconnaît le rôle essentiel des entreprises dans le développement durable de l'Arctique, les États arctiques et les organisations autochtones ayant le statut de participants permanents œuvrent à la création du Conseil économique de l'Arctique, une tribune indépendante formée de représentants d'entreprises.

[Traduction]

Le but du Conseil économique de l’Arctique est de favoriser le développement durable, la croissance économique, la protection de l’environnement et le développement social. Nous nous attendons à ce qu’il le fasse en améliorant la coopération économique régionale, et en servant de tribune pour communiquer les points de vue des entreprises sur les travaux du Conseil de l’Arctique. Le Conseil économique de l’Arctique s’efforcera également de veiller à ce que l’activité économique tienne compte de la protection environnementale et qu’elle ait une incidence positive sur les communautés, la vie et la culture des peuples autochtones. Le développement responsable des ressources constituera l’un des centres d’intérêt initiaux du Conseil économique de l’Arctique, tel que l’ont approuvé les ministres à Kiruna en mai dernier.

Je répondrai avec plaisir aux questions des membres du comité au sujet du rôle du ministère.

Le président: Nous allons commencer la ronde de questions par le sénateur Mitchell, le vice-président.

Le sénateur Mitchell: Merci à tous d’être présents. L’un des principaux problèmes, ce sont les coûts; on en revient toujours aux coûts, même si l’on ne tient pas compte des coûts environnementaux des énergies renouvelables et des économies des énergies renouvelables, qui sont des sujets très controversés et que nous n’avons pas encore abordés. Je les laisserai donc de côté pour l’instant.

Est-ce que l’un d’entre vous ou vos ministères ont des renseignements relativement aux coûts de production d’un kilowatt d’électricité en fonction du mode de production actuel, on parle surtout du diesel ici, par rapport à l’éolien, à la production hydroélectrique par des centrales au fil de l’eau, ou la géothermie? Et je sais qu’il y a des facteurs géographiques et circonstanciels qui entrent en jeu. Est-ce qu’on a déjà fait ce genre d’analyse, et est-ce qu’on pourrait obtenir des chiffres?

Matthew Spence, directeur général, Bureau de gestion des projets nordiques, Agence canadienne de développement économique du Nord: On développe actuellement un projet de centrale hydroélectrique près d’Iqaluit, et l’entreprise de production d’électricité de la région, QEC, a fait des estimations préliminaires. À l’heure actuelle, les prix se situent entre 52 ¢ et 1,17 $ par kilowattheure d’électricité au Nunavut.

Le sénateur Mitchell: Et si on compare ceci au diesel?

M. Spence: Il s’agit d’une centrale thermique au diesel. Le projet en cours réduirait le prix pour le faire passer à 26 ȼ. Donc le projet de centrale hydroélectrique réduirait le prix de l’électricité en le faisant passer de 52 ȼ à 26 à Iqaluit.

Le sénateur Mitchell: Et pour l’éolien?

M. Spence: Nos données pour l’éolien ne sont pas très précises. Il y a l’initiative de Diavik, qui souhaite réduire davantage la quantité de carburant consommé. Je ne sais donc pas si l’on constate une réduction nette des coûts d’électricité ou une réduction nette du carburant consommé.

Le sénateur Mitchell: Et une réduction de la pollution.

M. Spence: Exactement.

Le sénateur Mitchell: Donc la motivation est d’ordre environnemental.

M. Spence: Oui. On n’a pas à transporter autant de carburant par camion jusqu’au site. Il s’agit d’un réapprovisionnement saisonnier. De nombreux camions circulent sur cette route: 8 000 camions en trois mois pour alimenter les mines de diamant.

Le sénateur Mitchell: Alors si on tient compte de ces coûts, est-ce que l’éolien devient plus intéressant?

M. Spence: Oui, mais l’investissement initial en capital pour produire de l’énergie éolienne est très élevé.

Le sénateur Mitchell: Qu’en est-il des granules de bois?

M. Spence: Ce qui est intéressant de savoir, c’est que dans les territoires, nous importons une grande partie des granules de bois. On essaie donc de mettre sur pied une industrie locale, mais on fait fi des déchets de production des scieries du sud, qui rend le produit relativement bon marché. Pour nous, les granules de bois seraient un produit, et non un déchet. Le coût en serait probablement plus élevé, mais quand même moins que le carburant diesel.

Le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest souhaite assurément développer l’industrie des granules de bois. En fait, certains édifices publics à Yellowknife, notamment celui de l’Assemblée législative, sont désormais équipés de chaudières pour granules de bois.

Le président: J’ai un détail à ajouter. Il est facile de dire qu’il suffirait de passer à l’énergie éolienne, mais ce n’est pas une valeur sûre. Il faut quand même pouvoir compter sur quelque chose de solide, si bien que les générateurs au diesel sont encore nécessaires pour garantir un approvisionnement permanent.

M. Spence: Tout à fait.

La sénatrice Seidman: On nous a fourni beaucoup de documentation à passer en revue en peu de temps.

Vous avez tous évoqué le développement durable et la croissance économique, sans oublier les éléments clés que sont la protection de l’environnement et le développement social. J’ai été agréablement surprise d’entendre que les compagnies minières, même si elles cherchent à innover en matière de production d’énergie à un coût plus bas, souhaitent que les infrastructures mises sur pied puissent être utiles aux collectivités avoisinantes. C’est la bonne approche à avoir et le coût de lancement est un facteur crucial.

Avez-vous examiné la situation des pays nordiques qui éprouvent le même genre de problèmes graves, à savoir trouver des sources d’énergie moins chères pour les localités moins peuplées des régions très froides du pays. Par exemple, la Finlande brûle ses déchets pour produire de l’énergie et a mis sur pied de vastes installations à cette fin. Je suis sûre que vous avez regardé ce qui se fait dans d’autres pays, n’est-ce pas?

Mme Harper: À ce que je sache, il n’y a pas eu de travaux menés dans ce domaine. Il est vrai que le Conseil de l’Arctique a pour mandat de susciter la collaboration entre les huit États de l’Arctique. Actuellement, il y a 90 projets en cours dans le contexte du Conseil de l’Arctique.

Je vais me renseigner et vous ferai savoir ce qui se fait à cet égard, mais pour l’heure, à ce que je sache, il n’y a rien.

La sénatrice Seidman: Je trouve cela étonnant. Voilà que nous avons l’occasion de regarder ce que d’autres pays situés dans les régions nordiques font pour relever les mêmes défis et j’aimerais croire que nous nous y intéressons. Il se peut qu’ils aient une longueur d’avance sur nous en raison de leur densité de population.

J’aurais aimé vous entendre dire: « Oui, nous avons étudié les pratiques exemplaires de tel ou tel pays et voilà celles qui pourraient nous servir. »

M. Spence: Je peux vous citer un cas, à Yellowknife, où une compagnie allemande s’est intéressée à un éventuel projet d’utilisation des déchets d’enfouissement pour produire de l’énergie.

La difficulté vient des économies d’échelle. Nous pouvons nous intéresser à ce genre de possibilités, mais nous n’avons pas la même population dans le Nord que la Finlande et d’autres pays. Notre population est beaucoup plus dispersée. Tôt ou tard, nous atteindrons l’objectif, mais on n’en est pas encore là, parce que les travaux limités que nous avons menés jusqu’ici n’ont pas donné de résultats concluants. Le défi est le même que dans n’importe quel projet de mise en valeur des ressources: un coût élevé, une infrastructure limitée et une population limitée.

La sénatrice Seidman: Je souhaiterais vivement obtenir une réponse du Conseil de l’Arctique… si vous regardez la liste de vos projets, vous pourrez sans doute me dire qu’il y a des études concernant les pratiques exemplaires de pays nordiques qui pourraient nous inspirer, puisque les choses ne font que démarrer.

Le sénateur Black: Merci de vos excellents exposés. Le whip étant à ma droite, je vais vous poser des questions précises auxquelles j’attends des réponses précises.

Mes deux premières questions s’adressent aux représentants d’Environnement Canada. Pouvez-vous nous dire de quoi vous disposez actuellement dans le Nord pour gérer un éventuel dégât environnemental?

M. Cauchi: Comme je l’ai dit tout à l’heure, Environnement Canda est prêt à intervenir 24 heures sur 24 et sept jours par semaine pour mettre à la disposition des exploitants sur le terrain, des gouvernements territoriaux et des autres autorités les dispositifs scientifiques nécessaires. Environnement Canada a ses propres installations et bureaux dans le Nord et est prêt à apporter son appui. Nous pouvons fournir au comité plus de détails.

Le sénateur Black: Ce serait fort utile. Je songe ici à des installations physiques et non pas des installations de recherche, d’appui ou téléphoniques. Il est possible que vous ayez des contacts avec la Garde côtière ou d’autres organismes.

M. Cauchi: Nous pouvons vous fournir ces renseignements.

Le sénateur Black: En Alberta, j’ai été avocat dans le domaine de l’énergie. C’est pour cela que je vous pose la question. D’aucuns — mais pas moi — prétendent qu’au lieu d’être considéré comme un partenaire, votre ministère est souvent vu comme un adversaire du développement. Pouvez-vous me dire ce que vous en pensez?

M. Cauchi: Je ne vais pas parler de ce commentaire d’ordre général. Environnement Canada, comme je l’ai dit, a pour objectif de faire le meilleur travail possible en vue de protéger l’environnement, de conserver notre patrimoine naturel et d’offrir des services météorologiques au Canadiens. Que ce soit en vertu de la réglementation ou des mesures législatives, je pense que nous jouons un rôle positif dans le Nord.

Le sénateur Black: Merci beaucoup.

Je vais passer à un autre sujet en ce qui concerne CanNor. La population d’environ 100 000 habitants du Nord est dispersée sur plusieurs millions de milles carrés. Vous nous avez dit que diverses compagnies œuvrant dans le développement énergétique assumaient elles-mêmes les coûts de leurs besoins énergétiques. À court terme, ne serait-il pas judicieux d’aider les consommateurs du Nord à assumer leurs coûts énergétiques plutôt que de concentrer vos efforts sur les projets de mise en valeur et le développement des infrastructures? Je voudrais que vous nous parliez de la répartition des fonds destinés au Nord.

Mme LaFortune: Si nous appuyons en ce moment la mise en valeur des ressources dans le Nord, c’est parce que ce pourrait être le meilleur moyen d’améliorer l’économie dans son ensemble. Une fois que les ressources tirées de ces projets seront à la disposition des gouvernements territoriaux, du gouvernement fédéral, du Canada et des Canadiens, il y aura plus de retombées et une grande partie des infrastructures nécessaires vont se concrétiser d’elles-mêmes. C’est un peu comme donner un poisson à quelqu’un plutôt que de lui enseigner à pêcher. Cela se fait en continu. Quant à la priorité à accorder à la contribution fédérale, ce n’est pas moi qui en décide.

Le sénateur Black: Très bien. Je voulais simplement que cette priorité soit précisée officiellement.

Je m’adresse maintenant aux représentants du ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement. Quelle est la stratégie du ministère pour encourager l’investissement asiatique dans le Nord? Ensuite, pouvez-vous me décrire les obstacles qui, selon vous, empêchent votre ministère d’encourager ce développement?

Mme Harper: En matière de commerce international, le ministère s’occupe des enjeux concernant la négociation d’accords internationaux visant à lever les obstacles au commerce et à l’investissement. La responsabilité va dans les deux sens. Il me faudrait pouvoir consulter mes collègues responsables de cet autre volet de notre ministère pour vous donner plus de renseignements.

Le sénateur Black: Je vous en prie.

Mme Harper: Avec plaisir. Pouvez-vous me dire quels éléments vous souhaitez obtenir exactement?

Le sénateur Black: Je le ferai.

Le sénateur Patterson: Permettez-moi de vous donner un complément d’information sur cette question. Les représentants de CanNor nous ont dit qu’il y a eu récemment au Manitoba une réunion — à laquelle j’ai d’ailleurs assisté — où l’on a discuté d’une éventuelle expansion de la ligne de transmission d’hydroélectricité. On nous a dit qu’il y avait deux mines dans la région de Kivalliq. L’une d’entre elles, près de Rankin Inlet, pourrait être une mine d’or et j’espère que les membres du comité pourront la visiter, car la demande est de 25 mégawatts pour une durée d’exploitation de 12 à 15 ans. L’autre mine, AREVA, concerne un projet d’extraction de l’uranium à 200 kilomètres de Rankin Inlet, exigeant 27 mégawatts d’électricité, d’une durée potentielle utile de 20 à 30 ans. On prévoit qu’on devra brûler 140 millions de litres de diesel par année et un milliard de litres pendant la durée utile du projet. Ainsi, on s’intéresse vivement à l’accès à de l’énergie à bon marché venant du Manitoba, et la ligne de transmission rejoint Churchill actuellement.

Les parties prenantes ont formé un groupe de travail, composé des compagnies d’électricité et des gouvernements du Manitoba et du Nunavut, des maires et des chefs de la région, ainsi que de représentants de l’industrie. Ils souhaitent la participation du gouvernement fédéral.

Lors d’une réunion récente du comité, j’ai demandé aux représentants de Ressources naturelles Canada si le gouvernement fédéral avait l’intention de participer au groupe de travail car ce groupe souhaite présenter une analyse de rentabilisation. Cela semble bien cadrer dans notre stratégie, qui vise le développement socioéconomique et la protection de l’environnement, de même que le maintien de notre souveraineté dans le Nord. Si le gouvernement fédéral décide d’y participer, par qui serait-il représenté? En effet, on nous a dit qu’Infrastructure Canada, Ressources naturelles Canada, et d’autres ministères sont concernés. Cette réponse m’a un peu renversé.

Pouvez-vous nous dire quelle forme prendra l’éventuelle participation du gouvernement fédéral dans un projet aussi important?

M. Spence: Le Bureau de gestion des projets nordiques est l’organe qui coordonne la participation fédérale aux évaluations environnementales et à la délivrance réglementaire des permis. Il pourrait donc être tout désigné pour représenter le gouvernement fédéral puisqu’il est déjà en liaison avec tous les ministères en cause sauf Infrastructure Canada, même si nous avons travaillé avec ce dernier ministère pour le projet de route reliant Inuvik à Tuk, qui a nécessité un investissement fédéral considérable. Je pense que nous pourrions jouer le rôle de facilitateur au nom du gouvernement fédéral, en rassemblant les intéressés et en désignant un ministère fédéral responsable. Nous pouvons certainement jouer un rôle clé en facilitant la discussion et nous serions ravis de le faire.

Le sénateur Patterson: Je m’adresse aux représentants de CanNor. Vous avez dit que vous participez à un projet potentiel d’hydroélectricité à Iqaluit, qui brûle 30 p. 100 du diesel consommé au Nunavut. Cela produit d’énormes quantités de gaz à effet de serre et de particules de carbone. Quel est le rôle de CanNor dans ce projet? Je pense que vous avez préparé une étude de faisabilité, n’est-ce pas?

M. Spence: C’est exact. Bien entendu, comme CanNor a un programme de financement, l’organisme a accordé son appui, à hauteur d’environ 150 000 $ pour étudier le potentiel hydroélectrique de certains sites. L’étude de faisabilité concernait Jaynes Inlet et Armshow South.

Pour ce qui est de la gestion du projet, on a demandé une évaluation environnementale à la commission du Nunavut chargée de l’examen des répercussions si bien que nous avons facilité les discussions entre le promoteur du projet et les agences de réglementation. S’il y a des entretiens avant que la commission ne soit contactée et s’il y a des entretiens entre les experts fédéraux, l’Agence de réglementation et les promoteurs, l’examen du projet coûte moins cher et est plus efficace. Tout ce que nous pouvons faire pour réduire le coût de ce projet hydroélectrique serait bénéfique pour le gouvernement du Nunavut et celui du Canada en général et pourrait en accélérer la réalisation et contribuer à la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

[Français]

Le sénateur Massicotte: Je vous remercie tous d’être parmi nous ce matin. C'est très important et très intéressant. Je poursuis dans le même ordre de questionnement en ce qui concerne les gens de CanNor. J'essaie de comprendre la situation dans son ensemble, y compris la stratégie et le plan d'affaire. On nous dit que l’on possède des ressources très importantes, immenses, disponibles et rentables dans le Nord. On nous dit que le coût de l’énergie est très élevé, sans doute de cinq à six fois supérieur aux territoires plus au Sud. Il est certain que ces coûts sont trop élevés et qu’il existe des réalités dans cette région: le froid et les infrastructures qui sont probablement délaissées ou qui ne sont pas disponibles. Cependant, quel est le plan, quelles sont les priorités et les solutions que l’on devrait envisager pour bénéficier de toutes ces ressources d'une manière rentable? Comment peut-on arriver à réduire les coûts d'électricité? Quelles sont les initiatives que le Canada devrait mettre en œuvre pour réussir à développer les ressources du Nord d’ici 10 ans? Quelles sont les deux ou trois priorités sur lesquelles on devrait miser?

[Traduction]

M. Spence: Je ne suis pas sûr de bien comprendre la question. Vous demandez s’il y a deux ou trois mesures que l’on pourrait prendre pour faciliter la mise en valeur des ressources dans le Nord, n’est-ce pas?

Le sénateur Massicotte: Des mesures qui seraient fructueuses sans faire de tort à l’environnement. Le Nord ne se réchauffera pas — sinon un petit peu en raison du réchauffement de la planète — et les contraintes existent. Nous pouvons nous plaindre et déplorer le coût élevé de l’énergie, mais c’est sans aucun doute une réalité. Alors que devons-nous faire pour que l’entreprise connaisse un certain succès?

M. Spence: La première chose est de veiller à faire participer les collectivités. Il y a certaines petites collectivités autochtones dans le Nord, et toutes doivent relever des défis en matière de développement économique. Dans bien des cas il y a…

Le sénateur Massicotte: Très bien. Vous avez fait cela. Ensuite?

M. Spence: Ensuite, il faudrait développer les infrastructures à l’échelle de toute la région, d’où la nécessité d’investissements stratégiques. Par exemple, s’il y avait grappe de projets miniers dans une région, on pourrait veiller à investir dans des infrastructures qui profiteraient à plus d’une mine et éventuellement aux collectivités.

Le sénateur Massicotte: Sur ce point, si un promoteur voulait exploiter une mine et que ce n’était pas réalisable, cela veut-il dire qu’il abandonnera son projet? La rentabilité est-elle si basse ou si insignifiante que le promoteur ne cherchera pas de solution? Si le projet est réalisable, je suis sûr qu’on peut trouver une solution mais peut-être que ce ne l’est pas parce que c’est trop coûteux. Vous ai-je bien compris?

M. Spence: Oui, c’est ce que nous disons. Essentiellement les obstacles sont multiples pour ce qui est des projets d’exploitation des ressources dans le Nord et voilà pourquoi pour être rentables il faut que les gisements soient de calibre mondial. Il y en a dans cette catégorie. Actuellement, certains font face…

Le sénateur Massicotte: Ils sont rares.

M. Spence: Excusez-moi?

Le sénateur Massicotte: Les gisements de calibre mondial sont rares, n’est-ce pas? La plupart des projets sont modestes.

M. Spence: La plupart des projets indiqués sur la carte que vous avez devant vous sont des gisements d’envergure et de calibre mondial.

Le sénateur Massicotte: Cela dit, nous parlons de toutes ces réserves, un grand nombre de réserves, mais vous dites qu’étant donné la réalité actuelle, les contraintes actuelles, l’exploitation n’est pas réalisable, n’est-pas?

M. Spence: Non, ce n’est pas ce que je dis. Pour les réaliser, il faudra compter sur les promoteurs eux-mêmes. Assurément, pour les mines de métaux de base, le problème est que les prix sont bas. Par contre, les mines d’or sont encore exploitées et les mines de diamant le seront indéfiniment, car le prix du diamant se maintient.

Pour les perspectives à court terme, nous comptons essentiellement sur le pétrole et le gaz, les diamants et l’or. Nous espérons que l’investissement dans les infrastructures consenti par ces minières va permettre de faire baisser le coût et que l’extraction des métaux de base va démarrer.

Le sénateur Massicotte: Dans tous les secteurs dont vous avez parlé, les prix sont assez bas. Cela n’a rien à voir avec vous, nous ou le froid. Le marché ne va pas disparaître.

M. Spence: Tout à fait, car la concurrence est mondiale. Beaucoup de ces gisements sont la propriété de grandes multinationales si bien que c’est dans les conseils d’administration que les décisions se prennent. On peut choisir d’aller au Brésil, en Argentine ou ailleurs.

Le sénateur Massicotte: Mais quelle est la part du coût énergétique… on prétendra toujours qu’il est trop élevé. On veut constamment que quelqu’un d’autre en fasse les frais.

M. Spence: L’énergie représente 30 à 40 p. 100 du coût d’exploitation.

Le sénateur Wallace: Monsieur Cauchi, la plupart des gens ont tendance à croire qu’on dépend trop de l’électricité produite à partir du diesel dans le Nord, ce qui représente un coût supplémentaire, mais il y a aussi des considérations environnementales en raison des effets néfastes de cette production sur l’environnement.

Vous rappelez que les règlements sur les carburants renouvelables, qui exigent que l’éthanol et le biodiesel soient présents dans le diesel, ne s’appliquent pas dans le Nord. Si l’on s’inquiète autant de l’environnement dans le Nord, pourquoi l’exempterait-on de l’obligation d’utiliser un carburant de haute qualité?

M. Cauchi: Il y a des soucis techniques qui empêchent l’utilisation efficace de l’éthanol dans les régions extrêmement froides. Ainsi, cela fait problème pour l’utilisation et le fonctionnement d’un moteur dans des conditions extrêmement froides. Nos règlements tiennent compte de cela.

Nous pouvons vous fournir plus de détails à ce propos, mais ce n’est pas un problème majeur dans le Nord car l’exigence est levée pour l’essence.

Le sénateur Wallace: Pour contrer les effets néfastes du carburant diesel sur l’environnement, y a-t-il d’autres améliorations apportées au carburant utilisé par l’industrie dans le Nord?

M. Cauchi: Je dirais que ce n’est pas spécifique au Nord mais que cela se fait à l’échelle du Canada. Par exemple, notre ministère a publié récemment des règlements sur le carburant diesel à faible teneur en soufre. C’est une chose positive pour l’environnement.

Le sénateur Wallace: Est-ce qu’on a l’obligation d’utiliser ce carburant dans le Nord?

M. Cauchi: Je pense que la réglementation est nationale. C’est un aspect très important. Notre ministère étudie actuellement les éventuelles répercussions sur la santé d’un environnement où on utilise de l’électricité produite au diesel. Ce faisant, nous cherchons des mesures d’atténuation pour l’avenir.

Comme vous le savez, on parle beaucoup du diesel propre. Pour nos véhicules ici au Canada, nous avons des normes d’utilisation du diesel qui sont de classe mondiale et respectent les normes de l’EPA aux États-Unis. Cela atténue l’impact du diesel dans le domaine du transport mais nous cherchons encore des solutions en ce qui concerne l’utilisation du diesel dans des installations stationnaires.

Le sénateur Wallace: Vous avez dit que votre ministère faisait des études préliminaires dans des zones fragiles sur le plan de l’environnement le long des côtes nordiques. Pouvez-vous nous dire l’état d’avancement de ces études? Manifestement, il y a un enthousiasme pour intensifier les activités de prospection dans le Nord et pour les encourager. Votre ministère est-il prêt?

M. Cauchi: Ce n’est pas moi qui entreprends ces études.

Le sénateur Wallace: Je me demandais si vous pouviez nous donner une idée de…

M. Cauchi: Nous allons vous obtenir ces renseignements. Je comprends l’intérêt que vous portez au sujet et je ne veux pas parler sans savoir et induire le comité en erreur quant à l’avancement de ce travail.

La sénatrice Seidman: Certains d’entre vous avez parlé de plans de protection d’urgence advenant une pollution par déversement pétrolier. Madame Harper, vous avez parlé plus particulièrement d’ententes. S’il y avait une telle catastrophe dans le Nord, un déversement de pétrole par exemple, à qui reviendrait la responsabilité de s’en occuper? Au cours de nos délibérations en comité, nous avons constaté qu’il est toujours crucial de savoir qui s’acquitterait de cette responsabilité. Il pourrait y avoir plusieurs pays en cause en l’occurrence. Il est certes rassurant de savoir que plusieurs organismes se regrouperaient, mais je voudrais savoir quel serait celui qui aurait la responsabilité première?

Mme Harper: Permettez-moi de préciser. Quand nos ententes sont internationales, la responsabilité incombe à notre ministère. Je pense toutefois que vous me posez la question en ce qui concerne le Canada, n’est-ce pas?

La sénatrice Seidman: Advenant une pollution par déversement pétrolier dans le Nord, ce qui représenterait un travail supplémentaire là-bas, vous dites qu’il existe une entente aux termes de laquelle plusieurs pays se prêteraient assistance mutuelle. C’est ce que vous dites dans votre exposé. Quelle est la chaîne de commandement? Sait-on d’avance qui aura telle ou telle responsabilité et quand?

Mme Harper: Puis-je vous fournir des renseignements supplémentaires plus tard? Je sais qu’il s’agit d’une équipe interministérielle. Je pense savoir qui aurait la responsabilité, mais je veux m’assurer que je vous fournirai des renseignements exacts. Autrement dit, vous voulez savoir quelle est la chaîne de commande au Canada: quels ministères sont interpellés, quels sont leurs rôles en cas de déversement pétrolier, n’est-ce pas?

La sénatrice Seidman: C’est cela.

Mme Harper: Je peux obtenir ces renseignements.

La sénatrice Seidman: Je vous en remercie.

À ce propos, le budget principal des dépenses a été déposé à la Chambre des communes en février. On y prévoit 8,5 millions de dollars d’augmentation pour financer la première phase d’une stratégie visant à mettre en place un régime de prévention, de préparation et de réaction de classe mondiale en cas de déversement pétrolier à partir d’un navire-citerne.

Le président: Je vais devoir vous interrompre.

La sénatrice Seidman: Il serait important de savoir si une partie de ces ressources concerne précisément d’éventuels déversements pétroliers dans le Nord.

Le sénateur Black: Madame Harper, pouvez-vous nous parler davantage du rôle que le développement des ressources et le développement du Nord jouent de façon générale par rapport à la souveraineté canadienne?

Mme Harper: Comme partout au Canada, quand on est en territoire canadien, on a la responsabilité de respecter les lois et les règlements canadiens…

Le sénateur Black: Excusez-moi. Permettez-moi de préciser ma question pour que ce soit clair. Est-il utile que les responsables de la mise en valeur des ressources continuent d’aider votre ministère à défendre la souveraineté du Canada dans le Nord?

Mme Harper: Je ne pense pas que la souveraineté du Canada soit en cause sur le territoire que nous avons dans le Nord. Par conséquent, s’il est vrai que la mise en valeur des ressources rejaillit sur d’autres aspects au Canada, la souveraineté de la masse terrestre du Canada n’est pas contestée.

Si l’on parle du plateau continental, la question ne relève pas du ministère, même si elle le concerne. Vous savez probablement que cela fait actuellement l’objet d’un débat international. Mais le territoire canadien proprement dit n’est pas en question.

Le sénateur Mitchell: Madame LaFortune, vous avez parlé des ressources géothermiques de la Première Nation Kaska Dena. L’Association canadienne de l’énergie géothermique est chatouilleuse à propos de ce terme. La géothermie implique le forage, souvent à des kilomètres de profondeur, permettant d’atteindre une nappe d’eau chaude. Ce n’est peut-être pas vrai nécessairement dans le Nord mais dans ma ville d’Edmonton, ça l’est. À huit pieds de profondeur, il est possible de trouver la chaleur suffisante pour chauffer une maison et également pour la climatiser. Ainsi, quand vous utilisez le terme « géothermique » à quoi songez-vous?

M. Spence: Nous n’avons pas ce renseignement sous la main. Nous allons devoir vous les fournir plus tard.

Le président: J’aimerais remercier grandement les témoins pour leurs exposés et leurs réponses. Ce fut très intéressant.

Si vous avez des réponses à nous faire parvenir, veuillez les envoyer à la greffière pour que nous en recevions tous des copies. Merci d’être venus.

Nous sommes maintenant reliés à Calgary pour nos prochains témoins. Les représentants de l’Office national de l’énergie nous ont rejoints par vidéoconférence. Je veux souhaiter la bienvenue à Shelley Milutinovic, économiste en chef, et Jim Fox, chef du secteur de la stratégie et de l’analyse.

Merci d’être avec nous depuis Calgary. Nous sommes prêts à entendre vos exposés, et puis nous passerons aux questions. Vous avez la parole.

Jim Fox, chef du secteur, Stratégie et analyse, Office national de l’énergie: Bonjour honorables sénateurs. Je suis ravi de m’adresser à vous aujourd’hui sur les enjeux énergétiques qui sont propres au Nord canadien. Je traiterai du rôle de l’Office national de l’énergie dans cette région et Mme Milutinovic offrira une vue d’ensemble des ressources énergétiques qui s’y trouvent.

L’Office national de l’énergie est un organisme de réglementation fédéral indépendant fondé en 1959 par le Parlement pour promouvoir, dans l’intérêt public, la sûreté et la sécurité, la protection de l’environnement et l’efficience économique en matière de réglementation des pipelines, de mise en valeur des ressources énergétiques et de commerce de l’énergie.

En vertu de la Loi sur l’Office national de l’énergie, l’une des principales responsabilités de l’office est de réglementer les projets de pipelines qui traversent des frontières provinciales, territoriales ou internationales. Dans le Nord, cela touche entre autres la canalisation d’Enbridge dans la région de Norman Wells et le projet gazier de la vallée du Mackenzie.

L’essentiel des responsabilités de nature réglementaire de l’office pour le Nord canadien est défini dans la Loi sur les opérations pétrolières au Canada, ou LOPC, et la Loi fédérale sur les hydrocarbures, ou LFH.

Les responsabilités de l’office provenant de la LOPC ont principalement trait à la sécurité du public et des travailleurs, à la protection de l’environnement, à la conservation des ressources pétrolières et gazières et à l’efficience de l’infrastructure énergétique. Elles s’étendent également aux accords conjoints de production. Pour ce qui est des responsabilités de l’office issues de la LFH, elles concernent les évaluations techniques réalisées à la suite d’une demande de déclaration de découverte importante ou de déclaration de découverte exploitable d’une société afin de déterminer la taille des ressources pétrolières et gazières potentielles. La LFH fixe certaines limites concernant la manière dont l’office peut communiquer les renseignements obtenus dans le cadre d’une demande ou autrement en vertu de la LFH et de la LOPC.

Je crois que le comité a reçu la carte que nous lui avons envoyée, parce que l’explication géospatiale de nos responsabilités réglementaires est assez compliquée.

Dans le Nord, la LOPC et la LFH s’appliquent à la partie extracôtière de l’Arctique, aux réserves prouvées de la région de Norman Wells et à l’ensemble du Nunavut. Par conséquent, la réglementation des activités liées au pétrole et au gaz dans ces régions relève de l’office.

L’office n’a pas compétence sur les questions touchant le régime foncier ou les droits, les plans de retombées économiques et la gestion des redevances. Ces domaines relèvent d’Affaires autochtones et Développement du Nord Canada ou Ressources naturelles Canada là où ils n’ont pas été transférés au gouvernement des territoires. Il y a quelques années, le gouvernement du Canada a transféré la responsabilité de la gestion des ressources pétrolières et gazières au Yukon au gouvernement territorial, et le mois dernier, le gouvernement a transféré les responsabilités relatives à la gestion des ressources pétrolières et gazières dans les Territoires du Nord-Ouest au gouvernement de ce territoire.

La réglementation de l’office continue de s’appliquer aux réserves prouvées de la région de Norman Wells et, conformément aux lois territoriales habilitantes analogues à la LOPC, l’office demeurera l’organisme de réglementation responsable de la partie terrestre de la région désignée des Inuvialuit pendant 20 ans.

L’office s’emploiera à aider le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest afin d’assurer un transfert harmonieux des responsabilités de réglementation des ressources pétrolières et gazières. À cette fin, l’office et le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest ont élaboré et mis en œuvre une entende de services. De plus, la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale de 2012 confère à l’office des responsabilités dans certaines régions, telles que la RDI dans les régions extracôtières où la LOPC s’applique. Dans le cas des projets qui ne sont pas assujettis à la LCEE de 2012, l’office continue de faire des évaluations environnementales dans le cadre de son processus d’examen intégré.

En plus de ses fonctions de réglementation, l’office surveille les marchés de l’énergie et formule des avis sur les besoins énergétiques du Canada ainsi que sur les perspectives liées aux découvertes de pétrole ou de gaz naturel. Dans le cadre de sa surveillance régulière, l’office publie périodiquement des analyses de l’offre et de la demande et des marchés énergétiques. Par exemple, l’office a publié l’an dernier Avenir énergétique du Canada, un important rapport établissant une projection de l’offre et de la demande d’énergie jusqu’à l’horizon 2035. Toutes nos publications sont disponibles sur notre site Web.

Ayant défini le rôle de l’office dans le Nord, je cède la place à Mme Milutinovic qui vous donnera une vue d’ensemble des ressources énergétiques de cette région.

Shelley Milutinovic, économiste en chef, Office national de l’énergie: Bonjour honorables sénateurs. Je suis heureuse de m’adresser à vous aujourd’hui sur les enjeux énergétiques qui sont propres au Nord canadien.

Comme mon collègue l’a dit, l’office surveille et évalue les ressources pétrolières et gazières potentielles dans le Nord, ressources que nous savons considérables. Depuis plusieurs dizaines d’années, de nombreux puits ont été forés dans le but de découvrir du pétrole et du gaz classique. Si les découvertes ont été nombreuses, l’exploitation des ressources recensées est demeurée très limitée jusqu’à maintenant. À ce jour, le plus gros de la production est venu du champ de pétrole Norman Wells où, depuis 1932, on a extrait quelque 274 millions de barils de pétrole.

On estime les ressources gazières commercialisables totales du Nord canadien à 117 billions de pieds cubes. Pour mettre cette donnée en perspective, la consommation de gaz naturel au Canada en 2012 a totalisé 3,1 billions de pieds cubes. L’information sur les ressources du pétrole brut récupérable dans cette région n’est pas aussi abondante, mais des études récentes du U.S. Geological Survey indiquent qu’elles pourraient excéder les 10 milliards de barils.

Parallèlement, dans le Nord comme ailleurs en Amérique du Nord, les ressources de pétrole et de gaz non classiques retiennent de plus en plus l’attention des acteurs du secteur énergétique. Certains producteurs s’emploient à évaluer les zones schisteuses du sud du Yukon et des Territoires du Nord-Ouest pour y découvrir du gaz et celles de la vallée du Mackenzie dans l’espoir d’y trouver du pétrole. Toutefois, on ignore toujours la taille de ces ressources.

Même si le potentiel de ressources classiques et non classiques est énorme, les obstacles sur le plan commercial sont nombreux, que ce soit les coûts élevés de forage, les conditions environnementales difficiles, l’infrastructure limitée et la vive concurrence sur les marchés nord-américains.

Vu l’étendue de l’offre potentielle des ressources, l’intérêt de l’industrie dans le Nord augmente toujours. Ainsi, dans la partie centrale de la vallée du Mackenzie, désormais assujettie à la réglementation du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, on a observé une hausse notable de l’intérêt de l’industrie depuis 5 à 10 ans. De 2011 à 2013, des soumissions visant 14 parcelles ont été acceptées à l’issue d’appels d’offres. Les engagements de travaux s’élèvent à plus de 600 millions de dollars.

Au large des côtes de l’Arctique, il y a actuellement 13 licences d’exploration délivrées par le ministère des Affaires autochtones et Développement du Nord Canada, et qui représentent des engagements de travaux d’environ 2 milliards de dollars.

À l’heure actuelle, aucune demande de forage extracôtier n’a encore été adressée à l’office. Cependant, nous nous attendons à en recevoir au cours des prochaines années. Par exemple, Imperial Oil, à titre de représentant pour le projet d’exploration en coentreprise dans la mer de Beaufort, a manifesté son intérêt pour forer au moins un puits d’exploration en eau profonde dans la mer de Beaufort. Le processus d’examen réglementaire s’est amorcé avec le dépôt, à l’automne 2013, d’une description de projets auprès du Comité d’étude des répercussions environnementales des Inuvialuit. Celle-ci a depuis été soumise au Bureau d’examen des répercussions environnementales. ConocoPhillips a aussi fait part de son désir de mettre en valeur le champ Amauligak au large des côtes.

La participation des populations constitue un élément clé du travail de l’office dans le Nord. Depuis 15 ans, l’office s’est fait de plus en plus présent dans cette région, où il travaille avec les habitants pour leur faire mieux comprendre son rôle et ses processus et partager avec eux connaissances et pratiques exemplaires. L’office a aussi été à l’écoute des habitants du Nord, auprès de qui il a recueilli des connaissances et des renseignements dans le cadre d’une démarche de participation des communautés et d’un dialogue sérieux.

À la suite de l’explosion de la plate-forme Deepwater Horizon mettant en cause le puits Macondo de BP, en 2010, l’office a lancé une revue des forages extracôtiers dans l’Arctique canadien, appelée communément la revue du dossier arctique. Au cours de cet examen, l’office a étudié en profondeur les exigences en matière de sécurité et d’environnement pour les forages extracôtiers dans l’Arctique canadien. Les leçons qu’il en a tirées ont été intégrées à ces exigences de dépôt pour activités liées au pétrole et au gaz dans le Nord. Le rapport sur la revue du dossier arctique de l’office est disponible sur son site Web.

Pour conclure, l’intérêt croissant pour le Nord canadien a amené l’office à renforcer son cadre de réglementation. À partir des renseignements recueillis au cours de sa revue du dossier arctique, l’office a élaboré de nouvelles exigences de dépôt touchant les activités de forage faisant usage de la fracturation hydraulique. L’office s’apprête à mettre en œuvre les modifications proposées dans le projet de loi C-22, s’il est adopté par le Parlement.

De plus, l’office mise sur des partenariats fédéraux, provinciaux et territoriaux et avec des organisations de réglementation des revendications territoriales afin de clarifier les attributions de chacun et d’atteindre des objectifs communs en matière de réglementation. L’office s’est engagé à conclure des ententes de coopération avec les organismes de réglementation et de revendications territoriales et à améliorer celles qui sont déjà en place. C’est ainsi qu’il a mis à la disposition du Bureau d’examen des répercussions environnementales des membres de son personnel expert pour l’aider à mettre en place ses processus d’audiences et lui prêter main-forte pour l’analyse technique du projet d’exploration en coentreprise dans la mer de Beaufort.

L’office misera également sur les leçons tirées de ces échanges avec les habitants et les institutions du Nord. Il poursuivra aussi le dialogue amorcé afin d’atteindre les objectifs qu’il partage avec eux en matière de sécurité et de protection de l’environnement.

Merci. M. Fox et moi sommes prêts à répondre à vos questions.

Le président: Merci. Nous avons un peu plus de temps pour les questions. Je vais commencer par le sénateur Mitchell, le vice-président.

Le sénateur Mitchell: Dans le domaine du forage extracôtier dans le Nord, quel genre de progrès a-t-on fait pour s’occuper des déversements, des émissions ou des éruptions sous la glace?

M. Fox: D’un point de vue technique, il y a eu très peu de progrès. La revue du dossier arctique de l’office a présenté nos attentes en matière d’une demande de forage extracôtier dans la mer de Beaufort, et l’entreprise devrait devoir démontrer sa capacité de forer un puits de secours pendant la même saison, ou une capacité équivalente, pour bloquer le déversement de pétrole d’un puits hors de contrôle pendant la saison de forage, afin qu’il n’y ait pas d’éruption sous la glace.

Le sénateur Mitchell: On a beaucoup parlé, avec raison, de la nécessité de demeurer concurrentiels si l’on veut exploiter nos ressources pétrolières et gazières. Cela coûte évidemment beaucoup moins cher de le faire dans le Sud que dans le Nord, mais les entreprises continuent de s’intéresser à l’exploitation des ressources pétrolières et gazières dans le Nord — qui coûte beaucoup plus cher — donc, la question de la compétitivité s’applique immédiatement.

Est-ce que les entreprises le font parce qu’elles croient pouvoir trouver des façons d’être plus concurrentielles et de réduire leurs coûts, et, en fin de compte, est-ce qu’on réfléchit de la même façon à la création et au développement des ressources renouvelables dans le Nord? Est-ce que l’office fait cette comparaison?

M. Fox: Nous ne nous occupons pas des ressources renouvelables à moins qu’elles ne circulent dans un pipeline que nous réglementons. En ce qui a trait à l’exploration et à la production de pétrole et de gaz, cela ne concerne évidemment que le pétrole.

À propos des entreprises qui continuent de faire de l’exploration dans l’Arctique, je répéterai ce que l’un de nos experts a dit hier: ils chassent de gros éléphants. On pourrait en trouver d’énormes, et si c’est le cas, cela serait rentable. Il ne s’agit donc pas de faire diminuer les coûts de production comme cela est possible dans le Sud ou d’autres régions.

Mme Milutinovic: Et elles voient à très long terme.

Le sénateur Mitchell: Certains ont parlé de relier les collectivités du Nord aux réseaux électriques. On en a discuté récemment en comité. Est-ce quelque chose que vous envisagez ou pas?

Mme Milutinovic: Cela ne relève pas des responsabilités de l’office.

[Français]

Le sénateur Boisvenu: Merci beaucoup de votre présence. J'aimerais discuter avec vous de la problématique environnementale. J'essaie de comprendre le rôle de l'Office national de l'énergie par rapport à celui du Bureau d'examen des répercussions environnementales. Est-ce que le bureau d'examen relève de l'Office national de l'énergie?

[Traduction]

M. Fox: Oui, nous examinons les questions environnementales pour fixer les conditions des projets réglementés par l’Office national de l’énergie.

[Français]

Le sénateur Boisvenu: Comment réussissez-vous à la fois à jouer votre rôle de promoteur de développement dans l'utilisation de l'énergie et à porter un autre chapeau, qui consister à régulariser la problématique environnementale, donc toute la réglementation liée à la protection de l’environnement? Comment réussissez-vous à établir un équilibre entre les deux? Pour le commun des mortels, il semblerait contradictoire que le responsable de la promotion et du développement de l'énergie porte en même temps le chapeau de la protection de l’environnement?

[Traduction]

M. Fox: Je ne sais pas si quelqu’un s’est mal exprimé, mais l’Office national de l’énergie n’a pas la responsabilité de faire la promotion du développement de l’énergie. L’office examine les projets qui nous sont présentés et qu’on réglemente. Nous examinons la sécurité, la protection de l’environnement, la conservation des ressources pétrolières et gazières, mais nous ne faisons pas la promotion du développement de l’énergie. Si un projet ne peut être réalisé…

[Français]

Le sénateur Boisvenu: Quant aux projets d'exploration de l'avenir, quel est le rôle de l'Office national de l’énergie par rapport au développement de cette industrie?

[Traduction]

M. Fox: Un projet est présenté à l’office. Le demandeur nous fournit les renseignements sur la sécurité du projet, la protection des travailleurs, de la population et de l’environnement. L’office évalue la demande présentée par l’entreprise pour voir si elle respecte les normes appropriées en matière de protection de l’environnement. Si c’est le cas, l’office délivre une autorisation pour que l’entreprise puisse mettre en œuvre le projet. Sinon, on ne délivre pas d’autorisation.

Le sénateur Patterson: J’aimerais parler de l’Examen des exigences en matière de forages extracôtiers dans l’Arctique, et j’aimerais dire que l’office a fait un bon travail de consultation auprès des résidants du Nord pour préparer ce rapport. Je pense que cela les a rassurés, car ils s’inquiétaient du forage extracôtier dans l’Arctique, et cela a été fait à un moment opportun étant donné les problèmes qu’il y a eus ailleurs dans le monde par rapport au forage extracôtier.

Cependant, j’aimerais parler des levées géophysiques et des essais séismiques. J’ai vu que l’office, dans le cadre de son examen du dossier arctique, a examiné les régimes en place au Groenland, en Norvège, au Royaume-Uni et aux États-Unis pour les eaux du nord de l’Arctique. Premièrement, est-ce que vous avez compétence sur les essais séismiques, ou est-ce que vous les réglementez, ailleurs que dans l’Arctique, au Canada?

M. Fox: L’office réglemente les essais séismiques dans d’autres régions extracôtières, en particulier dans le golfe du Saint-Laurent, et dans d’autres régions extracôtières qui ne sont pas couvertes par des accords provinciaux-fédéraux. Si des essais séismiques avaient lieu au large des côtes de la Colombie-Britannique, c’est l’office qui les réglementerait.

Le sénateur Patterson: Bien. C’est une question qui préoccupe les gens au Nunavut, et je sais qu’il y a une demande présentée à l’office actuellement, et je ne vous demanderai pas d’en parler, mais est-ce qu’il y a des renseignements disponibles sur les effets des essais séismiques sur les mammifères marins, et est-ce que cela a été mentionné dans le cadre de l’examen du dossier arctique? Est-ce qu’on en a parlé dans le cadre de cet examen, ou y a-t-il eu des recommandations à ce sujet?

M. Fox: Je ne sais pas si cela a été mentionné dans le cadre de l’examen du dossier arctique. L’examen ne ciblait pas particulièrement les travaux géophysiques, mais nous pourrons vérifier et transmettre une confirmation au comité à ce sujet.

Je sais que pendant un certain nombre d’années, peut-être la dernière décennie, le ministère des Pêches et Océans et d’autres agences qui ont de l’expertise dans ce domaine, y compris l’Office national de l’énergie, se sont penchés sur un protocole pour s’assurer que les essais géophysiques ne sont pas faits dans certaines conditions où des mammifères marins sont présents, et que ce protocole est suivi. Nous avons travaillé avec le ministère des Pêches et Océans à ce sujet. Je ne suis pas un expert dans ce domaine, mais je sais qu’il existe, et nous en tiendrions compte avant de permettre des travaux géophysiques, et si la situation le justifie, ce serait inclus comme condition de l’autorisation.

Le sénateur Patterson: Je crois que le comité aimerait obtenir ces renseignements.

Je suis curieux à propos de tout le pétrole et le gaz dans l’Arctique, et je pense qu’on planifie même faire de l’exploration dans la mer de Beaufort. Je crois que cela ne relève pas de vous, n’est-ce pas?

M. Fox: Non, cela relève en fait de nous.

Le sénateur Patterson: Pourriez-vous nous décrire ce qui est proposé ou ce qui a été approuvé, s’il vous plaît?

M. Fox: À ce jour, un permis d’exploration a été délivré. Il l’a été par Affaires autochtones et Développement du Nord Canada. Une entreprise s’est engagée à faire de la prospection et elle a le droit d’explorer dans cette région. Mis à part cela, rien d’autre n’a été approuvé.

Le sénateur MacDonald: Merci d’être avec nous ce matin.

Monsieur Fox, j’aimerais en savoir un peu plus sur ce qui se passe lorsqu’on transfère des responsabilités. Vous avez parlé des responsabilités dans le Nord à la deuxième page de votre exposé. Les questions touchant le régime foncier ou les droits, les plans de retombées économiques et la gestion des redevances qui n’ont pas été transférées au gouvernement des Territoires du Nord-Ouest ou du Yukon sont gérées par Affaires autochtones et Ressources naturelles Canada. Vous ajoutez ensuite que le gouvernement du Canada a transféré la responsabilité de la gestion des ressources pétrolières et gazières au Yukon en 2003. Les effets de ces transferts m’intéressent. Que se passe-t-il lorsqu’on transfère ces responsabilités? Quelles sont les conséquences en matière de prise de décisions? Est-elle plus rapide? Est-elle plus efficace? Y a-t-il des blocages? Est-il plus difficile de prendre des décisions? Quelle a été l’expérience avec le Yukon au cours des 11 dernières années?

M. Fox: Depuis le transfert de responsabilités au Yukon il y a 11 ans, nous avons conclu une entente de service avec ce gouvernement et lui avons fourni parfois des services techniques, ou différents types de conseils qu’il veut avoir sur des questions concernant le pétrole et le gaz, mais je ne suis pas au courant des effets sur la prise de décisions elle-même, à savoir si elle est plus rapide ou moins.

Depuis le transfert, il n’y a eu que très peu d’activités d’exploration pétrolière et gazière au Yukon.

Le sénateur MacDonald: Si je regarde la carte, il semble y avoir plus d’activités encore au Yukon que dans les autres territoires, certainement plus qu’au Nunavut. Est-il possible de mesurer cela? Lorsqu’on transfère ces pouvoirs, est-il possible de mesurer les effets de ce transfert?

M. Fox: Je pense qu’il est possible de les mesurer par rapport à la durée des cycles entrepris par les parties. Quant à la carte, je ne crois pas qu’elle vise à démontrer le volume des activités en cours. D’expérience, je peux vous dire qu’il y a eu plus d’activités dans les Territoires du Nord-Ouest au cours de la dernière décennie dans la partie centrale de la vallée du Mackenzie, et dans la partie sud avant. Au cours des 10 dernières années, on a procédé au forage de nouvelles réserves de gaz, qu’on a reliées aux réseaux de gaz de l’Alberta et de la Colombie-Britannique.

Le sénateur MacDonald: Nous n’avons pas encore transféré ces responsabilités. Y a-t-il un délai ferme pour savoir quand ce sera fait?

M. Fox: Le transfert aux Territoires du Nord-Ouest a eu lieu le 1er avril.

Le sénateur MacDonald: C’est déjà fait. Merci.

La sénatrice Seidman: Merci d’être ici.

J’aimerais vous poser une question sur la Station de recherche du Canada dans l’Extrême-Arctique. Je ne sais pas si vous avez des liens avec elle, mais elle va certainement être en activité. L’une de ses priorités à court terme, c’est de prévoir les effets des changements de la glace, du pergélisol et de la neige sur le transport des marchandises, l’infrastructure et les collectivités.

On pourrait croire, en matière de protection environnementale, que les changements au pergélisol, son dégel, pourraient avoir un effet sur l’élaboration de nouveaux projets d’infrastructure énergétique, comme la construction de routes et de pipelines.

Savez-vous où en est la recherche à ce sujet? Avez-vous des liens avec la station? Et quelle est la connexion avec votre rôle en tant que protecteur de l’environnement?

M. Fox: Pour l’instant, nous n’avons pas de relation précise et officielle avec la station. L’office a une équipe importante qui s’occupe des questions environnementales et qui se tient au courant des recherches. Nous avons un chef professionnel pour l’environnement, notre scientifique en chef pour l’environnement, qui s’assure que le personnel est au courant de la recherche en cours. Si les résultats de recherche provenant de la station permettaient de mieux étayer les décisions de l’office, nous les examinerions pour nous en informer et pour voir ce qu’un demandeur dirait à leur sujet.

La sénatrice Seidman: Êtes-vous au courant de l’état actuel de la recherche concernant le pergélisol, surtout dans les domaines de la cartographie et de l’arpentage?

M. Fox: Non, pas précisément. Notre personnel spécialisé dans l’environnement le serait.

Le sénateur Wallace: Dans votre exposé, vous nous avez rappelé l’incident du puits Macondo survenu en 2010 et l’examen exhaustif que l’office a entrepris sur les exigences en matière de sécurité et d’environnement pour le forage extracôtier.

Pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet? Je comprends que vous nous avez renvoyés au rapport d’examen, mais pourriez-vous nous parler de l’état de préparation pour intervenir en cas de déversement dans le Nord comparativement à ce qui se fait généralement dans le Sud? Tout le monde s’y intéresse. La plupart des gens nous encouragent à faire davantage d’exploitation et d’exploration, compte tenu de tous les avantages économiques qui en découlent, mais sommes-nous prêts, du point de vue environnemental? Sommes-nous préparés? Pourriez-vous nous donner une idée de l’état de préparation pour intervenir en cas de déversement dans le Nord, selon l’examen et les recommandations de l’office? Qu’avez-vous à dire à ce sujet?

M. Fox: Il y a très peu de capacité d’intervention en cas de déversement dans les régions extracôtières de l’Arctique actuellement. Ce à quoi on s’attend, et c’est appuyé par certaines des demandes dans le rapport de la revue du dossier Arctique, c’est que l’entreprise apporte avec elle cette capacité d’intervention en cas de déversement si elle va faire du forage dans l’Arctique. Il n’y a pas eu de forage extracôtier dans l’Arctique depuis plusieurs années. Un puits a été foré en 2005, mais il a été foré sur la banquise côtière, et à l’époque, la capacité d’intervention d’urgence avait été apportée par l’entreprise et placée autour du puits, y compris un appareil de forage pour forer un puits de secours pendant la même saison, si nécessaire.

Alors, nous nous attendrions à ce qu’une entreprise présente un plan d’intervention en cas de déversement ainsi qu’un plan et un programme d’intervention d’urgence dans le cadre desquels elle s’engage à apporter toute cette capacité d’intervention là-bas avec elle lorsqu’elle irait forer.

Le sénateur Wallace: Est-ce que l’ONE, dans ses recommandations, a tenu compte des circonstances uniques qui règnent dans le Nord, pour le forage qui pourrait avoir lieu en haute mer? Y a-t-il des recommandations qui se rapportent précisément aux conditions climatiques et à l’état des glaces de cette région? Il est à mon avis impossible de copier-coller les exigences en matière de forage dans le golfe du Mexique, pour l’Arctique. Est-ce que l’ONE l’a pris en compte dans son analyse et ses recommandations?

M. Fox: Oui, c’est pris en compte. Pour le forage et les opérations connexes, le cadre réglementaire de l’office exige de l’entreprise qu’elle ait fait une évaluation appropriée des risques et qu’elle dispose d’un plan pour les atténuer. Que le forage se fasse en haute mer à Terre-Neuve, en Nouvelle-Écosse, dans le golfe du Mexique ou dans la mer de Beaufort, les risques sont différents. Une fois qu’on a cerné ces risques, il faut trouver des mesures appropriées pour les atténuer.

Quand une entreprise propose une opération de forage, nous vérifions si tous les risques afférents ont été ciblés, pas seulement pour le lieu générique, mais pour le lieu bien précis — par exemple, s’il y aura un couvert de glace et quel pourrait être l’effet de l’environnement et du climat. Il faut qu’il y ait un programme de gestion des risques approprié.

Le sénateur Wallace: Est-ce que les travaux de l’ONE ont tenu compte de la nécessité de réaliser des études environnementales de référence pour les rives en Arctique? Où en est-on aujourd’hui? Ces études existent-elles?

M. Fox: Une évaluation environnementale de la région de Beaufort est en cours. C’est un projet réalisé par diverses agences gouvernementales pour obtenir des renseignements de base sur l’environnement de la région. Pour les zones à proximité des opérations de forage, je ne sais pas s’il existe des données environnementales de base, mais on pourrait en trouver dans des documents sur l’évaluation environnementale de la construction de la route entre Inuvik et Tuk, qui a été achevée l’an dernier, je crois.

Pour ce qui est de savoir si l’office a cherché ces renseignements dans le cadre de l’examen des forages extracôtiers en Arctique, il faut dire que cet examen s’est concentré sur l’adéquation du cadre réglementaire de l’office pour l’évaluation des demandes de forage dans la mer de Beaufort. Nous avons constaté que c’était le cas, que les entreprises seraient tenues de satisfaire à certaines exigences en matière de déclaration et aussi de mobilisation des populations locales, qui doivent avoir l’occasion d’exprimer leurs préoccupations pour que nous puissions y répondre.

Nous ne nous sommes pas demandé si les données de l’évaluation environnementale seraient disponibles, mais si elles ne l’étaient pas, l’office aurait raison de refuser l’autorisation ou d’exiger que les données lui soient d’abord fournies.

Le sénateur Wallace: Ne croyez-vous pas que la création d’un cadre réglementaire pour approuver les projets d’exploration extracôtière doit prévoir des conditions assorties à l’émission de permis, notamment qu’il y ait eu une évaluation des répercussions en cas d’incident, à proximité des forages? N’est-ce pas là quelque chose à envisager pour l’office?

M. Fox: Absolument, nous en tiendrions compte. Il incombe à l’entreprise qui fait la demande de présenter ces renseignements à l’office, quand elle lui demande de prendre une décision. L’entreprise devrait faire une étude environnementale et fournir l’information nécessaire pour prouver qu’en cas de déversement, il n’y aurait pas d’effet négatif sur la population ou sur l’environnement. Cette information doit être présentée à l’office pour être ensuite soigneusement examinée par nos experts. Des recommandations seraient formulées à l’intention de l’office, qui décidera au bout du compte si l’autorisation sera accordée.

Le président: J’ai quelques questions pour Mme Milutinovic. Vous avez déclaré qu’il y avait dans le Nord des ressources gazières conventionnelles et commercialisables, pour un volume de 177 billions de pieds cubes. Un témoin nous a dit récemment qu’il y avait dans le Nord 38 p. 100 des réserves prouvées de gaz naturel au Canada. Je vois le chiffre dans votre document, et il se rapproche un peu plus de celui auquel je pense, et ce n’est pas 38 p. 100. Je peux me tromper. Qu’en dites-vous?

Mme Milutinovic: Je ne sais pas d’où vient ce chiffre de 38 p. 100. Les 117 billions de pieds cubes sont une évaluation des ressources ultimes dans le Nord. La dernière évaluation des ressources ultimes pour le bassin sédimentaire de l’Ouest canadien est de 632 billions de pieds cubes, et ce nombre est monté en flèche depuis 2010, en raison des évaluations raisonnables qui englobent aussi les ressources non conventionnelles.

L’office et les gouvernements de la Colombie-Britannique et de l’Alberta ont fait récemment une évaluation de la formation de Montney et ont estimé que les réserves récupérables et commercialisables de cette zone pétrolière étaient de 449 billions de pieds cubes. Sur les 632, il y en a donc 449 pour la formation de Montney. Il y en a aussi 78 en ressources non conventionnelles dans la formation de Horn River. Ces deux zones sont les éléments importants des 632 billions de pieds cubes.

Ce chiffre de 632 devrait augmenter dans les prochaines années en raison des évaluations d’autres ressources non conventionnelles qui ne sont pas encore prises en compte, dont la formation de Duvernay, le gaz du Deep Basin en Alberta et le bassin de la Liard. Ce nombre augmente rapidement.

Le président: J’en suis bien conscient. Je suis de Fort St. John et j’ai passé presque toute ma vie dans le secteur des hydrocarbures. C’est pourquoi les nombres qu’on nous a fournis m’ont étonné. Vous me confirmez donc que les chiffres fournis par le ministère ne sont pas à jour. Je parle du ministère des Affaires autochtones et du Développement du Nord. Est-ce que vous partagez vos données, pour que tout le monde soit au parfum?

L’autre donnée qui m’a surpris, c’est qu’on prétend que 35 p. 100 des réserves prouvées de pétrole sont dans le Nord. J’ai du mal à y croire, ne serait-ce qu’à cause des sables pétrolifères.

Mme Milutinovic: Oui. Je ne sais pas quels chiffres on vous a fournis, mais on tient compte du potentiel ultime pour le pétrole dans l’ensemble du Canada. On a 339 milliards de barils, arrondis au milliard près. De ce nombre, il y en a 306 milliards dans les sables pétrolifères et 12 milliards dans le Nord, dont 1 milliard découvert jusqu’ici.

Le président: J’en déduis qu’il doit y avoir un meilleur échange d’information entre les ministères pour que vous nous fournissiez les bons chiffres. Ce n’est peut-être pas votre responsabilité, mais ce doit bien être celle de quelqu’un.

Mme Milutinovic: Toutes nos évaluations sont du domaine public.

Le président: Je pourrais simplement leur dire de consulter votre site Web pour avoir les bons chiffres.

Mme Milutinovic: Je le répète: je ne sais pas ce qu’eux donnent comme chiffres.

Le président: Je vous ai donné les chiffres qu’ils nous donnent, et c’est consigné au compte rendu.

Vous dites qu’il y a moins de données sur le pétrole classique récupérable dans le Nord canadien, même si de récentes études du U.S. Geological Survey prévoient plus de 10 milliards de barils. Pourquoi ces chiffres sur le Nord canadien seraient-ils fournis par le U.S. Geological Survey? Aidez-moi à comprendre.

Mme Milutinovic: J’ai posé la même question. Apparemment, ce sont les chiffres les plus récents. Cette évaluation a été faite en 2008, puis a été mise à jour. La Commission géologique du Canada a aussi mené d’autres travaux. Ils ne sont toutefois pas aussi récents, ni regroupés ou publiés, que je sache. Voilà pourquoi nous nous sommes servis des chiffres américains.

Le président: Dites-vous que le U.S. Geological Survey a mené des travaux dans le Nord canadien pour présenter ces chiffres, ou est-ce de l’extrapolation à partir des données recueillies en Alaska? J’aimerais savoir.

Mme Milutinovic: Je crois qu’il a réalisé des travaux au Canada, mais il faudrait que je confirme. Je crois qu’il a étudié l’ensemble de l’Arctique.

Le président: Bien, merci.

Deuxièmement, j’aimerais vous poser la même question que celle que le sénateur Massicotte vous a posée tout à l’heure. Là où je vis, à Fort St. John, notre accès aux marchés mondiaux du pétrole passe par Vancouver. Nous avons accès depuis 50 ans au marché nord-américain du gaz naturel. C’est la même chose en Alberta. Des gens du secteur pétrolier me répètent toujours qu’il est bien plus coûteux d’exploiter des hydrocarbures dans le Nord-Est de la Colombie-Britannique qu’en Louisiane ou dans le Sud de l’Alberta ou de la Saskatchewan. Je peux le concevoir. Quand je regarde la carte, plus au nord, dans l’Arctique, et que je songe aux conditions climatiques et au manque d’infrastructure, je me rappelle qu’il n’y a rien d’autre qu’un oléoduc à partir de Norman Wells.

D’après vous, que faut-il faire pour avoir accès à ces gisements? Faut-il attendre la grande découverte de pétrole pour convaincre les grandes entreprises d’y aller, ou est-ce que le gouvernement doit faire quelque chose? Norman Wells existe à cause de la guerre, mais bien franchement, l’oléoduc de Canol devait se rendre initialement à Whitehorse, avant que le projet soit annulé. Le pétrole est maintenant acheminé en Alberta pour le raffinage. Le gouvernement doit-il faire quelque chose?

Je me demande comment nous aurons accès à ces réserves, étant donné que le prix du gaz naturel est déterminé par le marché nord-américain et celui du pétrole, par les marchés mondiaux. Avec le gaz naturel liquéfié, tout pourrait changer pour le prix du gaz naturel, et ce serait un prix mondial. À votre avis, quel élément permettra l’exploitation non pas extracôtière, étant donné qu’elle est plus facile, mais des réserves continentales dans le Nord, et pour toute cette région, pas seulement pour les Territoires du Nord-Ouest, mais aussi pour le Nunavut et le Yukon?

Mme Milutinovic: Je ne saurais spéculer sur les politiques. L’office n’a pas pour rôle de créer des politiques. Si l’on découvre des réserves en quantité suffisante et à un endroit où leur exploitation est rentable, cela se fera. Pour le reste, je ne veux pas spéculer.

Le président: Vous dites donc comme moi que ce qui va déterminer l’exploitation à court terme, c’est l’aspect économique. Il coûte très cher de forer dans l’Extrême-Arctique pour extraire du gaz et construire des gazoducs pour acheminer le gaz vers les marchés mondiaux. Que l’exploitation se fasse en Louisiane, dans le Sud de l’Alberta ou dans l’Extrême-Arctique, le prix du produit reste le même.

Mme Milutinovic: Oui, essentiellement.

Le président: Merci.

Personne n’a d’autres questions. Nous apprécions beaucoup vos réponses. Merci d’avoir été des nôtres.

(La séance est levée.)


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