Aller au contenu
NFFN - Comité permanent

Finances nationales

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Finances nationales

Fascicule n° 18 - Témoignages du 16 novembre 2016


OTTAWA, le mercredi 16 novembre 2016

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui, à 18 h 48, afin d'examiner des questions soulevées de temps à autre à l'égard des prévisions budgétaires fédérales en général, notamment les comptes publics, les rapports du vérificateur général et les finances publiques.

Le sénateur Larry W. Smith (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Bonsoir à tous. Bienvenue au Comité sénatorial permanent des finances nationales.

Chers collègues et téléspectateurs, le comité est ravi d'accueillir le président du Conseil du Trésor, l'honorable Scott Brison. Pendant la première partie de la réunion, le ministre et ses collaborateurs nous feront part de certaines modifications proposées au processus budgétaire.

Je m'appelle Larry Smith; je suis sénateur du Québec et président du comité. J'aimerais prendre quelques instants pour présenter les autres membres du comité : le sénateur Grant Mitchell, le sénateur André Pratte, la sénatrice Diane Bellemare, la sénatrice Salma Ataullahjan, la sénatrice Nicole Eaton, le sénateur Tobias Enverga, la sénatrice Beth Marshall et la sénatrice Raynell Andreychuk.

[Français]

Bonjour, monsieur le ministre. Nous vous souhaitons la bienvenue au comité. J'aimerais préciser que votre document de consultation sur des changements possibles au processus budgétaire a été distribué à l'avance aux membres du comité.

[Traduction]

Une période sera réservée aux questions après votre exposé. Le ministre est accompagné de M. Brian Pagan, secrétaire adjoint, Secteur de la gestion des dépenses, qui lui prêtera main-forte durant la période des questions.

Monsieur le ministre, je vous donne la parole.

L'honorable Scott Brison, C.P., député, président du Conseil du Trésor : Merci, monsieur le président. Je suis très content de rencontrer de nouveau le comité. J'ai le plaisir d'être accompagné de Brian Pagan, le secrétaire adjoint du Secteur de la gestion des dépenses du Conseil du Trésor.

Lors de ma comparution en avril dernier, j'ai été ravi de constater l'intérêt, l'engagement et j'irais même jusqu'à dire l'expertise des membres du comité à l'égard de la réforme du budget des dépenses.

Le Sénat possède une expertise impressionnante dans toutes sortes de domaines. Cette réforme en fait partie, et nous nous réjouissons de votre engagement actif. Plusieurs sénateurs ont assisté à la seconde séance d'information que j'ai donnée aux parlementaires, en octobre dernier. Vous étiez à la première. Beth, vous assistiez à la plus récente, et je vous remercie de votre intérêt.

[Français]

Nous continuons de mettre en œuvre ce programme, en particulier la question touchant l'harmonisation entre le moment du dépôt du budget et celui du budget des dépenses, que j'aborderai plus en détail dans un instant.

La réforme du budget des dépenses est essentielle, parce que la capacité d'exercer la surveillance est le rôle le plus important que nous, parlementaires, pouvons remplir pour le compte de ceux que nous représentons. Toutefois, le processus actuel fait en sorte qu'il nous est difficile d'assumer cette fonction.

[Traduction]

En juin prochain, je célébrerai mes 20 ans dans cette fonction. Ma vision de celle-ci sera alors le fruit de mon expérience de 4 ans à titre de ministre et de 16 ans comme parlementaire siégeant dans l'opposition. Je considère que notre système actuel est tout sauf fonctionnel. Si je vous demandais de concevoir un système opaque, illogique et difficile à expliquer, je ne pense pas que vous pourriez arriver à un pire résultat.

Le Globe and Mail vient de publier un éditorial qui met exactement le doigt sur le problème :

[...] l'échéancier actuel est tellement insolite qu'il confine à l'absurde. Les prévisions de dépenses sont établies avant le budget, selon une méthode comptable différente, ce qui les vide pratiquement de leur sens. Ce processus obsolète est tout juste bon à garder les députés...

J'ajouterais « les sénateurs ».

... dans l'ignorance quant à la manière dont les fonds publics sont dépensés. On pourrait difficilement faire pire.

C'est ce qui m'a convaincu de m'engager personnellement à opérer la réforme du budget des dépenses promise par notre gouvernement. L'objectif est de soumettre des documents beaucoup plus clairs aux parlementaires qui doivent les étudier, et que cette clarté profite également à la population canadienne.

En fait, Robert Marleau, un ancien greffier à la Chambre des communes, a indiqué que la forme et le contenu du Budget principal des dépenses n'ont été modifiés qu'à quatre occasions depuis la Confédération, la dernière fois en 1997. Dans chaque cas, l'intention découlait de la volonté d'améliorer la qualité et l'utilité des renseignements fournis aux parlementaires.

Toutefois, il reste encore beaucoup à faire. Je crois fermement que la vision que nous proposons dans le document que vous avez reçu contribuera grandement à régler les nombreuses questions soulevées au sujet de l'inefficacité du processus actuel du budget des dépenses.

[Français]

Parmi ces questions, mentionnons les préoccupations du vérificateur général qui a souligné l'importance d'une meilleure harmonisation entre le moment du dépôt du budget et du budget des dépenses.

[Traduction]

Notre vision comprend quatre points qui sont actuellement une source de grande frustration pour les parlementaires.

Le premier point a trait au moment du dépôt du Budget principal des dépenses et du budget. À l'heure actuelle, le Règlement de la Chambre des communes exige que le Budget principal des dépenses de l'année à venir soit déposé au Parlement avant le 1er mars. En pratique, cela signifie que le budget rend compte uniquement des décisions arrêtées jusqu'en janvier environ, soit bien avant la publication du budget réel. Ce calendrier empêche les parlementaires de remplir efficacement leur fonction de surveillance.

Les budgets principaux des dépenses, censés faire l'objet d'un examen attentif avant d'être mis aux voix, ne tiennent pas compte des priorités et des plans que le gouvernement a présentés dans son dernier budget. L'étude du Budget principal des dépenses mobilise énormément d'énergie mais, à l'annonce du budget, une bonne partie des résultats de ce travail est soit caduque, soit inutile.

Nous avons donc proposé de changer la date du dépôt du Budget principal des dépenses pour que celui-ci puisse refléter les postes du budget. C'est déjà le cas dans d'autres administrations, où le budget des dépenses principales est déposé après le budget.

Il faudra du temps pour mettre en œuvre ce changement important et substantiel. Nous avons donc proposé que, pour les deux prochains cycles du budget et du budget des dépenses, le Budget principal des dépenses soit déposé le 1er mai au plus tard. Les ministères auront ainsi le temps d'apporter les modifications nécessaires et de s'assurer que le Budget principal des dépenses reprend les éléments du budget. Le budget des dépenses deviendra un document plus utile et plus pertinent parce qu'il tiendra compte des priorités du budget.

Cette approche évitera aussi aux parlementaires de perdre leur temps à faire une analyse rigoureuse d'un Budget principal des dépenses qui aura perdu toute sa pertinence une fois que le budget sera publié.

Si le Budget principal des dépenses est déposé plus tard, il ne sera plus nécessaire de présenter un Budget supplémentaire des dépenses au printemps. Par ailleurs, les parlementaires pourront se concentrer sur un seul budget des dépenses au cours de la période d'octroi de crédits se terminant le 23 juin. Après les deux cycles budgétaires qui se termineront au 31 mai, le Parlement pourra examiner la réforme et décider s'il y a lieu de modifier le Règlement de la Chambre.

Le deuxième problème a trait aux différences de portée et de méthodes comptables entre le budget et le budget des dépenses, dont nous avons déjà parlé lors de mon dernier passage. Il ne s'agit pas seulement de concepts comptables. Le budget présente l'ensemble des dépenses du gouvernement fédéral, c'est-à-dire les comptes consolidés comme le compte de l'assurance-emploi, ainsi que les dépenses fiscales comme la nouvelle Allocation canadienne pour enfants. Quant à lui, le budget des dépenses renferme les demandes de crédit plus limitées des ministères et des organismes.

Les parlementaires doivent pouvoir comparer les éléments du budget et ceux du budget des dépenses. Le dépôt du Budget principal des dépenses après le budget permettrait un rapprochement de haut niveau des dépenses prévues par rapport au budget, et une étude plus efficace des besoins de trésorerie figurant aux budgets des dépenses, calculés à partir du budget établi selon la comptabilité d'exercice. Il est projeté d'améliorer la capacité de rapprochement entre les calculs effectués selon la comptabilité d'exercice et la comptabilité de caisse, pour permettre aux parlementaires de mieux comprendre le processus entourant le budget des dépenses et le budget.

D'autres administrations ont adopté la méthode de la comptabilité d'exercice. Je crois que c'est le cas de l'Ontario. Il a fallu une dizaine d'années pour mener le processus à bien. Pour l'instant, si nous voulons aller de l'avant, le plus important sera d'assurer un rapprochement intégral entre les documents.

Le troisième point concerne la difficulté qu'ont les parlementaires à établir un lien entre les crédits votés et le programme auquel ils serviront. Les ministères obtiennent des autorisations de dépenses du Parlement en fonction des crédits prévus dans les lois de crédits, qui décrivent comment les fonds sont dépensés pour des postes comme les immobilisations, le fonctionnement, les subventions et contributions. Nous aimerions plutôt nous concentrer sur pourquoi nous dépensons, et renforcer le lien entre les crédits et les programmes qu'ils financent.

Concernant la production de rapports sur les dépenses en fonction des programmes, je souligne qu'un projet pilote a été entrepris avec Transports Canada pour mettre à l'essai une nouvelle structure de crédits fondée sur les programmes.

Nous attendons avec intérêt les résultats de ce projet, qui devrait améliorer la reddition de comptes aux parlementaires et leur permettre de vérifier, grâce à des mécanismes plus clairs, que les programmes reçoivent le financement qui leur a été expressément octroyé. Il s'agit donc d'un grand pas en avant. Comme je l'ai déjà dit, le projet pilote est en cours à Transports Canada.

[Français]

Finalement, bon nombre des rapports ministériels ne sont ni pertinents ni informatifs.

[Traduction]

La nouvelle Politique sur les résultats du Conseil du Trésor simplifiera la façon dont le gouvernement rend compte des ressources qu'il utilise et des résultats qu'il obtient.

Beaucoup de fonctionnaires rédigent des rapports au nom de leur ministère ou de leur organisme. Je ne sais pas combien de personnes les lisent vraiment, mais celles qui le font trouvent souvent leur contenu peu utile et plutôt compliqué. À notre avis, les rapports devraient porter sur les objectifs d'un programme et sur la manière dont la réussite est mesurée, pour que les résultats puissent être mesurés en fonction des plans et des réalisations. C'est l'orientation que nous avons adoptée au Conseil du Trésor, et nous collaborons avec les ministères et les organismes pour qu'ils y adhèrent à leur tour.

De plus, un état détaillé des dépenses de programmes et des ressources humaines qui y sont affectées sera fourni dans une base de données en ligne conviviale.

Monsieur le président, ce sont là les grandes lignes de notre vision pour changer fondamentalement le processus d'établissement du budget des dépenses afin que les parlementaires puissent plus facilement exiger des comptes au gouvernement. Dans cette optique, j'espère pouvoir compter sur votre appui et votre collaboration pour faire avancer la réforme du budget des dépenses au profit de tous les parlementaires. J'aimerais maintenant céder la parole à Brian, qui vous présentera un exposé plus détaillé des réformes que nous proposons. Vous avez probablement pris connaissance du document, mais Brian vous en donnera les grandes lignes.

Le président : Merci. Monsieur Pagan, nous vous écoutons.

[Français]

Brian Pagan, secrétaire adjoint, Secteur de la gestion des dépenses, Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada : Je propose de vous donner un aperçu de cette vision pour la réforme des budgets des dépenses, très rapidement, afin qu'on puisse répondre à vos questions.

Comme l'a mentionné le président du Conseil du Trésor, la vision est axée sur quatre piliers qui visent à mieux informer les parlementaires afin qu'ils puissent faire leur travail et tenir le gouvernement responsable.

[Traduction]

La réforme est éclairée par le rapport produit en 2012 par le Comité des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires de la Chambre des communes. Nous avons également tiré profit des échanges fort intéressants que nous avons eus lors de nos nombreuses comparutions devant le comité sénatorial des finances, de même que des rétroactions qui ont suivi une séance d'information technique donnée aux nouveaux députés en février 2016.

Brièvement, j'aimerais vous demander d'aller à la diapositive 4 de la présentation, et plus particulièrement au premier pilier, intitulé Alignement. Comme l'a souligné le président, le Règlement de la Chambre des communes oblige le gouvernement à déposer le Budget principal des dépenses avant le 1er mars. J'ai moi-même comparu à plusieurs reprises devant le comité pour expliquer des budgets principaux des dépenses.

Le président a évoqué par ailleurs la difficulté que nous pose cet échéancier, puisque nous élaborons ce document avant la fin de janvier, et le budget est publié généralement entre la mi-février et la mi-mars. Par conséquent, le portrait et les priorités qui sont présentés du gouvernement sont faussés dès le départ puisqu'ils reflètent des décisions que le Conseil du Trésor a prises avant la fin de janvier, en sachant que les budgets suivront et qu'ils seront tributaires des priorités.

Ce décalage crée de la confusion et il empêche sans doute les comités de faire leur travail de manière optimale, car il manque des renseignements importants dans les documents qui sont soumis à leur examen. Nous sollicitons donc l'appui des comités pour que cette disposition du Règlement de la Chambre soit modifiée. Le gouvernement continuerait de déposer un Budget principal des dépenses provisoire au plus tard le 1er mars, puisque l'exercice débute le 1er avril et qu'il doit fournir les autorisations dont les ministères ont besoin pour lancer leur exercice. Au lieu d'établir le budget des dépenses provisoire et les crédits provisoires à partir de quelque chose qui est encore inconnu — le budget —, l'idée serait de prolonger l'exercice en cours pour octroyer des autorisations de dépenses provisoires aux ministères.

Pour être plus précis, en ce qui concerne l'exercice en cours, soit 2016-2017, une version très allégée et provisoire du Budget principal des dépenses serait déposée au Parlement. Cette version renfermerait des renseignements détaillés sur les ministères et les organismes qui demandent des crédits. Le document détaillerait les autorisations de dépenser qui leur ont été octroyées pour l'année jusque-là, dont une fraction serait automatiquement reportée à l'exercice suivant. Par conséquent, l'information présentée au Parlement ne serait pas inexacte.

Il y a deux ans, lorsque le Budget principal des dépenses de 2015-2016 a été présenté, l'organisme Marine Atlantique Inc. a dénoncé le fait que les crédits qui lui avaient été accordés pour l'exercice s'établissaient à 19,4 millions de dollars, contre 127 millions pour l'exercice précédent. Marine Atlantique en a conclu qu'il s'agissait d'une compression ou d'une réduction de l'ordre de 100 millions de dollars de ses affectations.

Ce n'était pas le cas. C'était une conséquence de l'échéancier. L'argent versé à Marine Atlantique provenait d'une affectation sur cinq ans annoncée dans le budget de 2010, et cette période était écoulée. Étant donné que nous présentons le Budget principal des dépenses avant le budget, nous sommes revenus aux crédits qui avaient été accordés en 2010. Ensuite, dans le budget, les engagements de 2010 sont non seulement maintenus, ils y sont augmentés. En effet, le Budget supplémentaire des dépenses établi pour cet exercice prend en compte de nouveaux besoins qui ont fait grimper les autorisations de dépenses de l'organisme à 354 millions de dollars.

Nous utilisons cet exemple parce qu'il illustre bien les problèmes causés par le fait qu'un document présenté avant le budget sert de base aux décisions concernant l'affectation des ressources. Nous proposons de reconduire les autorisations de dépenses en vigueur dans le Budget principal des dépenses, pour permettre aux ministères de lancer leur exercice, et d'annoncer dans le budget toutes les nouvelles affectations, les réductions ou les réaffectations envisagées par le gouvernement, qui seront ensuite prises en compte dans le Budget principal des dépenses déposé le 1er mai.

C'est un volet primordial du programme, qui nous permettra de rectifier la séquence du processus. Beaucoup de nos problèmes et de nos défis sont dus à la confusion inhérente au processus même du budget et du Budget principal des dépenses.

Mesdames et messieurs, si vous me le permettez, je prendrai cinq minutes pour parler des trois autres piliers. Je répondrai ensuite à vos questions.

Comme le ministre l'a évoqué, le deuxième pilier englobe la portée et la méthode comptable. En quelques mots, disons que le budget fédéral englobe la totalité des dépenses du gouvernement fédéral, y compris les dépenses fiscales, les dépenses comptabilisées dans des comptes distincts, le compte de l'assurance-emploi et les sociétés d'État indépendantes, qui ne sont pas financées par des crédits votés par le Parlement.

L'écart entre le budget et le Budget principal des dépenses du dernier exercice avoisinait les 65,7 milliards de dollars. Une grande partie de cet écart, soit 60 milliards de dollars environ, est attribuable à la portée différente des deux instruments, c'est-à-dire au fait que le budget est global, alors que le Budget principal des dépenses présente seulement les besoins de trésorerie des entités financées.

Les quelque 4,85 milliards restants s'expliquent par la méthode comptable et la différence entre les charges d'amortissement des immobilisations, les créances douteuses et l'intérêt sur les obligations futures. Pour tous ces postes, notre système budgétaire utilise la méthode de la comptabilité d'exercice, alors que, dans notre présentation des besoins de trésorerie des ministères au Parlement, nous ne rendons pas compte des charges d'amortissement et d'intérêt sur les obligations futures. Dans le Budget supplémentaire des dépenses (A) du dernier exercice, nous avons rapproché les deux documents. Comme le ministre l'a mentionné, nous voulons aller plus loin et fournir aux ministères des renseignements obtenus au moyen de la comptabilité d'exercice qui seront plus utiles, l'idée étant de faire une planification selon la comptabilité d'exercice et des contrôles selon la comptabilité de caisse.

Le ministre a donné un exposé assez complet de la structure des crédits. Je n'y reviendrai donc pas.

Pour ce qui est des rapports, je me bornerai à souligner que non seulement nous comptons améliorer les rapports imprimés en appliquant la nouvelle Politique sur les résultats, mais nous voulons également que ces rapports puissent être complétés par des données en ligne accessibles en temps réel. C'est pourquoi nous avons créé l'InfoBase du Secrétariat du Conseil du Trésor. Nous avons exploré ce qui se fait ailleurs, et notamment aux États-Unis, où la qualité des données est excellente grâce à des outils comme Performance.gov et USASpending.gov. Je vous invite à prendre connaissance de ces sites. Ils sont en quelque sorte nos modèles et nous ferons de notre mieux pour parvenir à présenter des renseignements similaires.

Le sénateur Enverga : Je vous remercie d'être ici ce soir. Je remplace le sénateur Mockler.

Monsieur Brison, vous avez fait référence à un document de travail sur une structure de contrôle fondée sur les programmes. Vous avez mentionné par ailleurs qu'un projet pilote était en cours à Transports Canada.

Pourriez-vous nous en dire un peu plus au sujet de cette structure fondée sur les programmes, de même que sur les avantages obtenus du projet pilote de Transports Canada? Avez-vous relevé des inconvénients ou des coûts associés à ce projet pilote?

M. Brison : Avec plaisir. Tout d'abord, du point de vue de l'obligation de rendre compte au Parlement et de l'approbation des dépenses d'un ministère, le système actuel permet à celui-ci de faire à peu près ce qu'il veut avec l'argent obtenu parce qu'il n'existe pas vraiment de mécanismes de contrôle ou de rapport au Parlement. En théorie, le gouvernement pourrait utiliser des fonds affectés à un programme d'infrastructure frontalière pour construire un belvédère ou que sais-je. Ce n'est pas impossible. Je veux dire qu'historiquement, les ministères n'ont pas été empêchés de le faire après que le Parlement a approuvé leur budget. Dans la structure proposée, les affectations viseraient des programmes précis.

D'un autre côté, il se peut que les niveaux de fonds inutilisés augmentent. Pour pallier cet inconvénient, nous proposons de réserver un certain pourcentage des dépenses d'un programme, disons 10 p. 100, que le ministère pourrait utiliser à sa guise. La reddition de comptes serait améliorée, mais les ministères disposeraient de la latitude voulue, ce qui est important. Les ministères ont besoin d'une certaine marge de manœuvre. Ce serait un net progrès, puisque les parlementaires seraient mieux informés et pourraient donc assurer un contrôle plus serré et plus précis des dépenses du gouvernement.

Le sénateur Enverga : Vous avez aussi parlé de la tenue d'un projet pilote à Transports Canada.

M. Brison : Brian est mieux placé que moi pour vous en parler. Quand le projet a-t-il été créé, Brian?

M. Pagan : Dans le Budget principal des dépenses de cette année.

M. Brison : C'est très récent.

M. Pagan : Nous projetons d'étendre le projet pilote. Le cadre actuel prévoit son application seulement à Transports Canada, et exclusivement aux crédits liés aux subventions et aux contributions. Auparavant, il recevait un seul crédit pour subventions et contributions de 700 millions de dollars environ, qui était réparti entre plusieurs programmes.

Dans le cadre du projet pilote, nous avons créé trois crédits distincts pour les subventions et les contributions octroyées par Transports Canada. Le premier crédit, d'une valeur de 258 millions de dollars environ, vise le secteur de programme portes d'entrée et corridors commerciaux; le deuxième, consacré au programme d'infrastructure des transports, s'établit autour de 103 millions de dollars, et le troisième crédit regroupe en une seule catégorie, très populaire, de petits programmes de subventions et de contributions totalisant 38 millions de dollars.

Dans l'ancien système, le ministère administrait un grand éventail de programmes regroupés à l'intérieur d'un crédit unique de près de 600 millions de dollars, mais il peut maintenant administrer des programmes distincts en fonction de ces crédits.

C'est un projet pilote. À la fin de l'exercice, nous ferons un compte rendu au ministère des Transports et aux comités responsables des transports sur leur utilisation. Est-ce que les renseignements clarifiés ont été utiles? Est-ce que des leçons ont été tirées? Nous nous inspirerons des leçons apprises pour élargir le projet pilote.

Concernant l'avenir, le président a évoqué la nouvelle Politique sur les résultats qui sera appliquée à tous les ministères d'ici à 2017. Comme il l'a mentionné, la Politique servira de fondement à l'application générale d'une formule axée sur l'objet des crédits. Si nous prenons notre propre exemple, les responsabilités essentielles du Secrétariat du Conseil du Trésor englobent ses fonctions d'employeur, d'autorité en matière d'approbation des dépenses et de réglementation pour le compte du gouvernement.

Dans une formule axée sur l'objet du crédit, les fonds seraient octroyés en fonction de ces responsabilités et des programmes sous-jacents plutôt que sur la base d'un budget de fonctionnement unique, comme c'est le cas actuellement. Le Parlement pourra ainsi assurer une meilleure surveillance de la manière dont les fonds sont utilisés à des fins particulières et pour des programmes précis.

Le sénateur Enverga : Utilisez-vous déjà ce modèle de budget des dépenses? Ce projet pilote est-il mis en pratique actuellement?

M. Pagan : Le projet pilote est mené à Transports Canada. Nous nous sommes inspirés de ce qui se fait ailleurs, dans d'autres administrations, et notamment en Australie, en Ontario et au sein du gouvernement du Québec.

Cette approche est axée sur l'objet du crédit plutôt sur une structure de contrôle en fonction des dépenses de fonctionnement, de subventions et de contributions, et cetera

La sénatrice Eaton : Bienvenue, monsieur le président. J'estime que vous faites un travail fabuleux, parce que nous devons composer avec ce chaos année après année.

Si un budget provisoire des dépenses précède le dépôt du Budget principal des dépenses avant le 1er mai, est-ce que vous envisagez de fixer une échéance pour le dépôt du budget? Est-ce qu'il y aura une échéance pour le dépôt du budget en début d'exercice?

M. Brison : Merci. J'aimerais tout d'abord préciser que le Règlement ne prévoit pas d'échéance pour le dépôt du budget. C'est la prérogative du ministre et du ministère des Finances.

J'ai examiné le modèle australien, dans lequel le budget et le Budget principal des dépenses sont présentés à peu près en même temps. À mon avis, c'est un modèle intéressant.

La mise en œuvre prendra du temps. C'est pourquoi nous pensons qu'il est important, comme nous le proposons, de déplacer la date de dépôt du Budget principal des dépenses, et d'assurer que le budget sera déposé avant. La période d'essai serait de deux ans. Nous ferons alors un rapport au Parlement et nous examinerons s'il est possible de rapprocher l'échéance pour le dépôt du Budget principal des dépenses de celle du budget. Nous sommes ouverts à la discussion, mais nous ne pouvons pas faire les changements maintenant. Nous voulons faire un essai.

La première étape consistera à mieux synchroniser le système et à mettre les changements en œuvre dans ce secteur d'activité du gouvernement. Il faut trouver la bonne solution avant d'envisager d'autres changements.

La sénatrice Eaton : Merci. J'imagine que vous espérez que les prochains ministres des Finances tiendront compte de ce que vous considérez comme un échéancier optimal?

M. Brison : Cela nous permettrait d'enclencher la mise en œuvre et de réfléchir à la suite des opérations après la période d'essai de deux années du processus budgétaire proposé. J'y vois un processus évolutif. Pour l'instant, nous n'avons pas de réponse définitive. Nous devons mettre la formule à l'essai et, après quelques années, nous aurons une idée plus claire des améliorations à y apporter.

La sénatrice Eaton : J'aurais une dernière petite question sur ce thème avant de passer à un autre. Par sa nature, le budget n'est-il pas un instrument visionnaire, au contraire du Budget principal des dépenses? Êtes-vous d'accord que le budget expose une vision des choses, ce que nous aimerions faire?

M. Brison : Vous avez raison. De façon globale, sa portée est plus large que celle du Budget principal des dépenses, dont le contenu est assez étroit et pointu. Je suis d'accord pour dire que les budgets sont de nature visionnaire.

La sénatrice Eaton : Le quatrième pilier m'intéresse particulièrement, et je vais vous dire pourquoi. Le comité est souvent appelé, et je suis certaine que M. Pagan a été témoin de cet exercice, à étudier des éléments regroupés dans un Budget supplémentaire des dépenses (A), un Budget supplémentaire des dépenses (B) et un Budget supplémentaire des dépenses (C). Je pense tout particulièrement à une dépense qui était liée aux pêches des Premières Nations de la côte ouest, qui s'élevait à 45 millions de dollars. Je répète que c'est un exemple que je donne. Si la même dépense réapparaît, nous pouvons poser des questions. « Cette dépense était inscrite l'année dernière et l'année d'avant. Est-ce que le programme a eu de bons résultats? Combien de personnes ont appris à pêcher? Le programme a-t-il permis d'acheter des embarcations? » Invariablement, les fonctionnaires à qui nous posons ces questions nous répondent qu'ils n'en savent rien.

Dans le cadre de votre réorganisation, il serait bien de prévoir une étape qui permettrait d'établir si un programme visant à apprendre à des personnes à pêcher, par exemple, a atteint son objectif au cours du dernier exercice.

M. Brison : Madame la sénatrice, l'élaboration de politiques est l'une des grandes forces de nos gouvernements. Souvent, nous consacrons 90 p. 100 des efforts à l'élaboration, et à peine 10 p. 100 à la mise en œuvre. Nous avons donc d'excellentes politiques, mais pour ce qui est de la mise en œuvre, il reste beaucoup de chemin à faire, de manière générale.

Notre objectif, notamment pour ce qui concerne la planification ministérielle et les résultats, est d'instaurer une formule qui sera plus axée sur les résultats.

Par exemple, pour ce qui concerne les présentations des ministères et des organismes au Conseil du Trésor, nous exigeons que des paramètres de base soient fournis pour permettre la mesure des résultats après un certain temps. Nous voulons être en mesure de déterminer si un programme fonctionne bien. Plus les paramètres sont segmentés, plus l'évaluation des résultats est précise. Ce n'est pas une tâche facile, mais elle est importante. Il est primordial de pouvoir évaluer l'efficacité d'un programme et sa valeur.

La sénatrice Eaton : Et s'il est approprié de le renouveler pour une autre période de deux ans. Je suis d'accord.

M. Brison : Certains des programmes donnent d'excellents résultats, d'autres ne fonctionnent pas du tout. Nous constatons parfois que des programmes qui fonctionnent très bien auraient en fait besoin de plus de ressources. La mesure des résultats est déterminante pour permettre au Conseil du Trésor de faire son travail. Comme Brian l'a mentionné au sujet de l'outil InfoBase et du site Performance.gov, l'outil de production de rapports du gouvernement américain est impressionnant. Le site web contient des données de mesure concernant toutes les activités gouvernementales, que ce soit l'écologisation de l'appareil public ou tout autre objectif stratégique, qui donnent un état de la situation de chaque département et organisme.

La sénatrice Eaton : Ce serait très bien si le Budget principal des dépenses était déposé avant le 1er mai et si nous pouvions poser ce genre de questions sur son contenu. Les mesures existent, mais...

M. Brison : À mon avis, le fait de les publier contribue à maintenir les intéressés sur le qui-vive et disposés à nous informer sur ce qui fonctionne ou non, et ce qu'il y aurait lieu d'améliorer.

[Français]

La sénatrice Bellemare : Je vais poursuivre dans le même ordre d'idée. J'aimais bien l'approche des plans et des priorités. J'aimais voir ce qu'un ministère faisait en fonction de ses programmes, et quels étaient ses plans et ses priorités. J'y voyais une certaine correspondance avec la publication du budget des dépenses. On recevait les données macroéconomiques, mais on voyait ensuite les dépenses selon les grandes catégories stratégiques. Il y avait une relation entre les résultats stratégiques de chacun des ministères et ses plans et priorités. Bien entendu, quant à l'évaluation des résultats, c'était ténu dans les plans et priorités, mais je m'étais habituée à fonctionner avec cela. Votre façon de faire va-t-elle modifier le document des plans et priorités, et le cas échéant, de quelle façon?

M. Brison : Notre objectif est de rendre les renseignements du gouvernement plus simples et plus directs pour refléter simplement les objectifs et les résultats. Je suis très heureux que vous aimiez l'approche actuelle, mais n'êtes-vous pas d'accord avec le fait qu'elle soit trop compliquée? Il est possible de modifier l'approche afin de produire des rapports qui soient plus faciles à comprendre et plus directement accessibles.

[Traduction]

Nous voulons exposer les objectifs du programme et ses résultats. Les plans et les résultats sont en fait les axes de notre nouvelle approche. Cependant, assez peu de parlementaires ont cette expérience, qui est admirable. Notre souhait est que tous les parlementaires et, en fait, tous les Canadiens puissent comprendre l'objectif d'un programme et si cet objectif est atteint.

[Français]

La sénatrice Bellemare : Peut-être que je serai satisfaite lorsque je verrai les documents, mais avec la méthode actuelle, on peut relever certains détails de programme que l'on peut remettre en question au besoin. J'ai peur que nous n'ayons plus accès à ces détails.

Je vous encourage à offrir des détails élaborés, et pas seulement les grandes priorités, parce qu'en ce moment, dans le budget principal du ministère des Transports, par exemple, je vois les détails par programme et les sommes qui y sont allouées. Est-ce que ces renseignements seront toujours offerts?

M. Brison : On va continuer à fournir les détails complets, mais dans un format plus efficace.

M. Pagan : Le but de la nouvelle pratique sur les résultats est de rendre les renseignements plus simples et plus utiles pour les parlementaires. Cela fait plus de 30 ans qu'on fait le travail selon l'approche axée sur les résultats. L'une de nos forces est la possibilité de ventiler les réponses selon certains programmes, et cela se poursuivra dans la nouvelle approche. Il y a une exigence de la part du ministère de présenter le budget et de le ventiler selon certains programmes et priorités. La différence, c'est la façon d'expliquer les principales responsabilités.

La sénatrice Bellemare : Cela ne changera donc rien à l'architecture des programmes que le Conseil du Trésor demande à chaque département?

M. Brison : On change le format des soumissions au Conseil du Trésor afin de se concentrer sur les résultats.

[Traduction]

Nous avons déjà changé le format. Les données ne seront pas moins détaillées, mais nous voulons qu'elles soient plus transparentes.

[Français]

C'est pour rendre nos rapports plus utiles pour les parlementaires et pour les citoyens également.

La sénatrice Bellemare : Merci beaucoup.

[Traduction]

La sénatrice Marshall : J'aimerais poursuivre sur le sujet des rapports. Quand recevrons-nous des rapports rédigés conformément à la nouvelle politique? Est-ce qu'ils porteront sur l'exercice 2015-2016 ou sur l'exercice 2016-2017?

M. Pagan : Merci, madame la sénatrice. La nouvelle Politique sur les résultats du Conseil du Trésor est entrée en vigueur le 1er juillet. Pour l'instant, nous travaillons de concert avec les ministères à la mise au point de nouveaux cadres de présentation des résultats. Nous collaborons actuellement avec quelques ministères seulement, et le Conseil du Trésor prendra très bientôt des décisions les concernant. Les cadres retenus seront utilisés dans le Budget principal des dépenses de 2017-2018, peu importe la date de dépôt, ainsi que dans les nouveaux plans ministériels qui l'accompagneront. Les autres ministères, comme je l'ai déjà dit, mettront la politique en application l'année suivante, soit à l'automne 2017.

Il y aura donc un délai. Nous devons approuver le cadre avant que les ministères l'utilisent dans leurs rapports, mais nous ferons ce travail pour quelques ministères au moins.

La sénatrice Marshall : Serait-il possible de nous remettre un exemplaire de cette nouvelle politique et des nouveaux modèles de rapports?

M. Pagan : Oui.

La sénatrice Marshall : J'ai très hâte d'en prendre connaissance. Mon autre question concerne la structure des crédits proposée. Vous êtes-vous donné une échéance pour arrêter votre décision? Je sais qu'un projet pilote est en cours à Transports Canada. Êtes-vous optimiste concernant les résultats et une éventuelle mise en œuvre? Cette solution me semble prometteuse.

M. Brison : Comme l'a mentionné Brian tout à l'heure, d'autres gouvernements appliquent déjà cette formule, y compris le Québec, mais d'autres administrations utilisent une structure d'approbation des dépenses en fonction des programmes ou de l'objet du crédit, dont l'Australie et l'Ontario. C'est possible, mais il faudra du temps. Le projet mené par Transports Canada se déroule bien.

La sénatrice Marshall : Avez-vous une échéance? Le travail sera fait en partie pour Transports Canada. Est-il toujours question d'une mise en œuvre progressive?

M. Pagan : Notre intention, madame la sénatrice, est de nous appuyer sur la nouvelle Politique sur les résultats et le cadre des résultats de quelques ministères pour élaborer une structure que nous disons fondée sur l'objet du crédit. Comme aucune décision n'a encore été prise pour les ministères en question, je ne peux pas vous répondre, mais je peux vous garantir que plusieurs ministères utiliseront le nouveau cadre des résultats aux fins du Budget principal des dépenses de 2017-2018. Nous choisirons certains de ces ministères pour mettre à l'essai la structure d'affectation de crédits selon leur objet en fonction de leur nouveau cadre des résultats.

La sénatrice Marshall : Le projet pilote mené à Transports Canada porte sur les subventions et les contributions, n'est-ce pas?

M. Pagan : C'est exact.

La sénatrice Marshall : Élargirez-vous le modèle à tous les types de dépenses?

M. Pagan : Par exemple, si le Secrétariat du Conseil du Trésor décide d'aller de l'avant avec le nouveau cadre des résultats, un ministère pourra collaborer avec lui pour que son crédit actuel pour dépenses de fonctionnement de 200 millions de dollars, supposons, soit octroyé selon une structure de crédit qui correspondra au cadre des résultats approuvé par le Conseil du Trésor. C'est ce qui est prévu.

Le sénateur Mitchell : Merci, monsieur le ministre et monsieur Pagan. C'est très intéressant, éminemment complexe, et cela me laisse l'impression étrange de n'être pas certain si quelque chose m'échappe. Je vous demanderai donc d'être très indulgents à l'égard de mes questions. J'aimerais comprendre votre proposition concernant le report d'une fraction des autorisations. Je ne comprends pas vraiment en quoi le nouveau modèle est différent du modèle actuel, qui prévoit le report des trois douzièmes de l'exercice, selon les autorisations antérieures. Quelle est la différence avec le report d'une fraction des autorisations dont vous nous avez parlé? Dans les deux cas, il s'agit d'une fraction.

M. Pagan : Le concept reste exactement le même. Rien ne change, sauf le fait que, dans le processus actuel, la fraction reportée provient du Budget principal des dépenses déposé avant le budget. Or, comme nous le savons bien, le Budget principal des dépenses peut souvent donner l'impression qu'il y a eu des réductions, ce que l'exemple de Marine Atlantique illustre parfaitement. Le document soumis au Parlement donne parfois à penser que le gouvernement a opté pour une réduction ou la suppression d'un programme, alors que ce n'est pas du tout la réalité. En fait, la décision budgétaire n'a pas encore été prise parce que le budget des dépenses est déposé avant le budget. Je suis désolé, je crois que mon explication est confuse.

Je reprends l'exemple de Marine Atlantique. Dans le Budget principal des dépenses de 2014-2015, l'autorisation de dépenses s'établissait à 127 millions de dollars. Pour l'exercice suivant, 2015-2016, comme le montant inscrit au Budget principal des dépenses était 20 millions de dollars, le Parlement en a déduit à tort qu'il avait été décidé de diminuer l'autorisation de 100 millions de dollars. Les 100 millions de dollars manquants au Budget principal des dépenses correspondaient à un octroi de 5 ans annoncé dans le budget de 2010, et cette période était échue. Le gouvernement devait prendre une décision à l'égard de Marine Atlantique en vue d'une annonce dans le budget, mais le Budget principal des dépenses avait été déposé avant. Par conséquent, la décision du gouvernement était encore inconnue lorsque l'information a été présentée au Parlement.

Dans l'approche que nous proposons, les autorisations en vigueur pour l'exercice en cours seraient tout simplement reportées telles quelles, sans hausse et sans diminution.

Le sénateur Mitchell : Ce qui donnerait l'impression que le financement a été reconduit.

M. Pagan : Le budget constituera la base, la composante stable, dont une fraction sera reportée pour lancer l'année. Le nouveau budget publié énoncera les hausses et les diminutions apportées aux priorités gouvernementales. Le Budget principal des dépenses sera modifié en conséquence.

Le sénateur Mitchell : Si le gouvernement avait décidé de ne pas reconduire le financement de Marine Atlantique, le montant reporté serait beaucoup trop élevé, et non le contraire, ce qui est positif. Est-ce ce que vous tentez de nous expliquer?

M. Pagan : Oui. Si la fraction reconduite a été établie à partir d'autorisations appelées à être réduites, la base de calcul est artificiellement élevée. Toutefois, je le répète, la fraction reportée correspond seulement aux trois douzièmes des autorisations, pour couvrir les besoins financiers en début d'exercice. Si des rajustements ou des réductions sont décrétés, ils seront pris en compte dans le Budget principal des dépenses, qui serait tout à fait transparent et refléterait les décisions du gouvernement relativement aux réductions ou à l'arrêt d'un programme. Le Parlement pourrait voter les crédits à la lumière des besoins véritables des entités plutôt qu'en s'appuyant sur des renseignements incomplets, comme il le fait depuis des années.

Le sénateur Mitchell : Je comprends très bien pour l'instant, mais j'aurai peut-être oublié demain matin.

Voici ma prochaine question : Concernant le cadre des résultats, je trouve très bien d'exiger des rapports sur les objectifs et les mesures du succès, mais il y a un autre côté à la médaille : le risque d'un manque à gagner. Combien en coûtera-t-il de plus aux ministères pour produire les données supplémentaires exigées? De toute évidence, il y a des avantages, mais avez-vous déterminé le point de bascule vers la contre-productivité?

M. Brison : Cette question mérite quelques précisions. La production de rapports coûte déjà très cher. Chaque ministère dispose d'une infrastructure de production des rapports. Exception faite de la sénatrice Bellemare, très peu de gens les lisent. Cela s'explique en partie par le fait que les rapports ne sont pas conçus pour être compréhensibles. Ils exigent des connaissances techniques. Ce n'est pas normal. Les rapports devraient être rédigés de manière claire et centrée sur les objectifs. Quel est le plan du ministère? Quel est l'objectif du programme et quels sont les résultats? Pour en revenir à votre question, les ressources sont déjà mobilisées, des fonctionnaires très compétents consacrent beaucoup de leur temps à la production de rapports. La qualité de l'information présentée dans ces rapports — je ne critique pas la fonction publique, soit dit en passant, quand je dis que l'utilité de l'information laisse à désirer. Je n'en ai pas contre le travail des fonctionnaires, mais contre la manière dont les rapports sont conçus. Nous voulons les rendre plus utiles, non seulement pour les parlementaires, mais pour l'ensemble de la population, afin qu'elle puisse comprendre comment l'argent des contribuables est utilisé et quels sont les résultats de ces investissements. Ces changements assureront une responsabilité accrue de notre gouvernement et de ceux qui lui succéderont.

Le sénateur Mitchell : Ai-je le temps pour une autre question? Est-ce que le changement de format proposé aura une incidence sur la présentation des comptes publics, c'est-à-dire sur la reddition de comptes après-coup?

M. Brison : Je réitère, comme je l'ai dit tout à l'heure à la sénatrice Bellemare, que les rapports ne seront pas moins détaillés. Cela fait partie de nos engagements. Brian voudra peut-être ajouter quelque chose à ce sujet.

M. Pagan : Le volume 1 des Comptes publics est entièrement rapproché avec le budget. Le volume 2 est rapproché avec le Budget principal des dépenses en fonction des crédits votés par le Parlement. Par conséquent, vous votez actuellement sur l'octroi de crédits pour les dépenses de fonctionnement, les immobilisations, les subventions et les contributions, et nous les ventilons ou les subdivisons en fonction des programmes existants. Nous proposons de modifier la structure des crédits. Au lieu de l'articuler autour des dépenses de fonctionnement, d'immobilisations, de subventions ou de contributions, elle serait fondée sur les responsabilités essentielles, le mandat des ministères. C'est l'un des changements proposés. L'autre concerne les programmes sous-jacents. Des rajustements et des rapprochements seront également requis pour refléter le nouveau cadre des résultats.

Le concept reste le même, que la structure soit fondée sur le crédit ou sur le programme, mais nous proposons de modifier la nature du crédit et d'apporter des simplifications ainsi que des clarifications aux programmes.

Le président : Notre groupe se concentre sur les deux dernières années et la collaboration accrue avec les fonctionnaires des secteurs opérationnels et des finances des ministères. Nous cherchons en effet à comprendre les pratiques opérationnelles, pour vous donner un meilleur appui, monsieur le ministre, sur le plan des objectifs et des résultats, et pouvoir établir dans quelle mesure les réalisations des ministères sont à la hauteur de leurs objectifs.

Je trouvais important de souligner ce point pour que vous compreniez bien son importance.

La plupart des ministères sont très coopératifs et acceptent volontiers de nous envoyer leurs principaux responsables des opérations et des finances. C'est à eux que nous voulons parler parce que nous voulons comprendre ce qui se passe et comment ils interprètent le concept des résultats. Disons que nous nous intéressons moins au nombre de mises à pied et à ce genre de choses, parce que ces données financières sommaires nous en disent très peu.

Apparemment, le délai de production des rapports sur les résultats est très long. Si je comprends bien, l'information est publiée six mois environ après la fin d'un exercice. Serait-il possible d'accélérer la collecte des données les résultats — pardonnez-moi si je me trompe —, pour que nous puissions lier plus rapidement les résultats aux chiffres réels. Je comprends que c'est une question d'échéanciers et que vous cherchez des correctifs, mais quand nous recevons ces chiffres, il semble toujours y avoir des contradictions avec les documents publiés, que ce soit le budget des dépenses ou le budget. Si j'ai bien compris, vous cherchez à réduire les contradictions et à accélérer le processus.

Cependant, pour le comité, les efforts devraient faire en sorte de réduire les délais, pour qu'il ait plus de temps pour faire des comparaisons. S'agit-il d'un aspect dont vous avez discuté?

M. Brison : L'InfoBase du Conseil du Trésor représente un important progrès en ce sens. Elle contribuera énormément à améliorer l'accès aux données en temps réel.

Je ne sais pas dans quelle mesure les sénateurs utilisent l'InfoBase actuellement. Si vous ne l'utilisez pas, nous pourrions vous donner une séance d'information. C'est un outil extrêmement utile. Selon nous, c'est un très bon début. Ce n'est rien à comparer avec Performance.gov aux États-Unis, un outil plus évolué, mais l'InfoBase a été créée pour permettre l'accès aux données et aux résultats plus rapidement, en temps réel.

Actuellement, l'une des difficultés liées aux rapports ministériels tient au fait qu'ils ne sont pas suffisamment axés sur les résultats. En fait, les changements proposés suscitent beaucoup d'enthousiasme au sein de la fonction publique. Ces derniers temps, nous avons rencontré beaucoup de fonctionnaires dans différents ministères et organismes. Sans surprise, nous avons constaté qu'ils travaillent dans la fonction publique principalement parce qu'ils veulent améliorer les choses. Par conséquent, ils veulent pouvoir déterminer si les choses se déroulent comme prévu. Il est impossible de gérer ce qui ne peut être mesuré. C'est une partie importante du travail de la fonction publique.

À plus long terme, nous aimerions également réaliser plus d'examens horizontaux des activités et des objectifs. Par exemple, l'innovation est sur toutes les lèvres, dans tous les gouvernements. Tous les ministères ont un groupe de travail sur l'innovation. C'est pourquoi il est essentiel d'effectuer un examen horizontal pour évaluer ce qui fonctionne réellement dans ce domaine d'activités à l'échelle de tous les ministères et de tous les organismes. Quelles sont les pratiques exemplaires qui pourraient profiter à d'autres ministères et organismes? Y a-t-il des activités qui fonctionnent particulièrement bien, qui nécessiteraient plus de ressources et qui pourraient être reproduites et mises en valeur?

Ce genre d'examen centré sur les objectifs — et plus précisément, sur l'innovation dans ce cas —, mais également sur les résultats favorisera une approche réellement axée sur les résultats au sein du gouvernement. Selon moi, c'est essentiel pour faire avancer les choses.

Le président : Ce serait très utile, particulièrement quand le comité étudie les programmes d'infrastructures. Ces études ont révélé, du moins si j'ai bien compris, que plus d'une vingtaine de ministères gèrent des fonds destinés aux infrastructures. Lorsque nous avons demandé à un représentant du ministère de l'Infrastructure qui était chargé du contrôle du financement, nous n'avons pas eu droit à un regard vide, mais plutôt à un regard qui voulait dire : « Ce n'est pas nous. » Essentiellement, l'argent d'une enveloppe unique est distribué à différents projets menés partout au pays dans le cadre de multiples programmes.

Or, dans un modèle de participation horizontale de plusieurs ministères, il y a lieu de se demander où sont les points de contrôle et si une autorité centrale surveille ce qui se passe. Ce peut être la responsabilité du Trésor, mais il n'en reste pas moins qu'il est parfois difficile de suivre les transferts d'argent. Où se trouve l'argent et quel est l'état d'avancement des projets? Nous avons constaté que chaque année de 2006 à 2015 — nous étudions le passé —, des crédits ont été inutilisés. Il faut s'interroger sur les mécanismes de rapports, savoir s'ils doivent rendre compte seulement des affectations, ou rendre compte à la fois des affectations et des résultats.

De notre côté, nous essayons de comprendre — et nous sommes de tout cœur avec vous sur ce point... Il est important pour nous de rencontrer le personnel responsable des opérations et des finances, pour pouvoir faire des liens. Nous l'avons bien vu avec la question du traitement des données. Dans un cas, lorsque nous avons rencontré les représentants d'un ministère, la sénatrice Marshall a été la première à sentir que quelque chose n'allait pas. Nous avons vite réalisé que tout n'était pas aussi rose que ce que laissaient entendre les projections qui nous avaient été remises. Il nous serait très utile dans ces cas d'avoir rapidement à notre disposition les rapports sur les résultats pour être en mesure de faire des comparaisons avec les chiffres réels.

M. Brison : Concernant l'approche centrée sur les résultats, le Bureau du Conseil privé a mis sur pied une unité qui travaille sur les résultats et la livraison. Sous la direction de Matthew Mendelsohn, l'équipe se concentre sur les nouvelles dépenses et les nouveaux programmes du gouvernement. Le Conseil du Trésor s'emploie à évaluer tous les programmes existants qui font l'objet de présentations et qui englobent la majorité des dépenses. À plus long terme et dans une optique d'évolution continue, nous voulons faire un examen des programmes en fonction des résultats. C'est un travail que nous avons entrepris.

Parmi tous les comités parlementaires, le vôtre est celui dont les travaux sont les plus étroitement liés aux activités du Conseil du Trésor. Nous allons poursuivre sur notre lancée, et Brian viendra vous donner une séance d'information sur l'InfoBase. Nous sommes impatients d'entendre vos commentaires sur les changements que nous apporterons. Bien entendu, certains changements seront plus concluants que d'autres, qui nécessiteront des ajustements. Toutefois, comme je l'ai déjà dit, nous travaillons dans une optique d'évolution continue et nous mettons tout en œuvre pour que notre gouvernement et ceux qui lui succéderont adoptent une gestion qui sera de plus en plus centrée sur les résultats, afin de renforcer la reddition de comptes à l'égard du Parlement.

Le président : Chers collègues, c'est une immense chance que nous avons eue de pouvoir discuter avec le ministre et M. Pagan pendant une heure. Nous tenons à vous remercier personnellement, monsieur, mais nous sommes également très heureux que le Dr Buckley vous ait procuré le soulagement qui vous a permis d'être des nôtres. J'ai moi-même ma provision de sirop Buckley à ma chambre d'hôtel.

M. Brison : Est-ce que la séance est télédiffusée? C'est un produit des Maritimes, fabriqué avec le miel des abeilles de l'Île-du-Prince-Édouard. C'est un bon produit des Maritimes.

Le président : Au nom de tous mes collègues ici présents, je vous remercie tous les deux. Monsieur Pagan, nous comptons sur vous pour nous faire un suivi sur le modèle de système d'information sur lequel vous travaillez.

M. Brison : Nous remercions le comité. J'ai vraiment apprécié cette rencontre. J'aimerais aussi remercier Brian et son équipe. Nos fonctionnaires sont extraordinaires. Le Conseil du Trésor peut compter sur un personnel hors pair, et Brian ainsi que son équipe font de l'excellent travail. Je sais que le comité travaille en étroite collaboration avec eux, et que vous appréciez énormément leur travail. Je tiens pour ma part à souligner que mon rôle au sein du Conseil du Trésor me permet de réaliser à quel point leur collaboration est précieuse. Nous savons que vous faites aussi de l'excellent travail, et nous reviendrons vous voir avec grand plaisir.

Le président : Merci beaucoup.

Chers collègues et téléspectateurs, nous poursuivrons notre étude spéciale sur les infrastructures.

[Français]

Nous accueillons, d'Infrastructure Canada, Darlene Boileau, sous-ministre adjointe des Services ministériels, et Marc Fortin, sous-ministre adjoint, Opérations des programmes. Je vous souhaite tous les deux la bienvenue. Madame Boileau et monsieur Fortin, lequel d'entre vous aimerait commencer? Monsieur Fortin, vous avez la parole. Nous avons jusqu'à 20 h 45.

[Traduction]

Je sais qu'il est tard pour beaucoup d'entre vous. Nous vous écoutons.

[Français]

Marc Fortin, sous-ministre adjoint, Opérations des programmes, Infrastructure Canada : Bonsoir, monsieur le président. Je vous remercie de votre accueil. Je suis accompagné de ma collègue, Darlene Boileau, sous-ministre adjointe à la Direction générale des services ministériels d'Infrastructure Canada.

Vous nous avez invités ce soir, entre autres, pour vous expliquer le fonctionnement des principaux programmes d'infrastructure.

[Traduction]

Infrastructure Canada a été le ministère responsable de nombreux programmes d'immobilisations différents au cours des années, et bon nombre de ces programmes prévoyaient divers critères et exigences. Par exemple, aux termes du Fonds de la taxe sur l'essence fédéral, établi au départ en 2005, Infrastructure Canada fait des paiements deux fois par année aux provinces et aux territoires, qui versent ensuite ces fonds à leurs municipalités. Les municipalités peuvent conserver ces fonds pour une utilisation future et déterminer elles-mêmes les projets à financer.

Pour recevoir un financement aux termes du Financement de base pour les provinces et les territoires, ceux-ci devaient soumettre un plan d'immobilisations avec une liste d'initiatives correspondant aux catégories admissibles, en vue d'un partage des coûts avec le fédéral.

Aux termes d'autres programmes d'Infrastructure Canada, notamment le Plan Chantiers Canada créé en 2007 et la composante Nouveau Plan Chantiers Canada, créée en 2014 pour les infrastructures provinciales et territoriales, les provinces et les territoires recevaient des affectations particulières pour des projets. Les projets jugés prioritaires par les municipalités dans le cadre de ces programmes étaient présentés aux provinces et aux territoires. Il s'agit d'une toute nouvelle génération de programmes, qui marquent un renouveau dans notre relation avec les municipalités et les provinces.

Les provinces et les territoires présentaient au ministère les projets choisis en priorité. Infrastructure Canada examinait et approuvait alors les projets en fonction des critères d'admissibilité. Selon les modalités de versement de fonds dans le cadre de nos programmes de contribution, pour la plupart des programmes relevant du Fonds Chantiers Canada et du Nouveau Fonds Chantiers Canada, le ministère exigeait que des ententes de contribution soient signées avec les promoteurs des projets. Ces ententes de contribution comprenaient des renseignements comme le montant maximum du financement et le pourcentage maximum des coûts admissibles totaux, qui était généralement fixé à un tiers.

[Français]

Le ministère a mis en place plusieurs mesures pour encourager les saines pratiques de gestion financière et les processus solides de planification des projets. Tout d'abord, le ministère rembourse les demandes de remboursement présentées par les bénéficiaires de l'entente de contribution pour les coûts réels engagés. Cette approche clé à la gestion des risques nous permet de nous assurer que des paiements sont faits uniquement pour les travaux qui ont été entrepris et non pas seulement pour des travaux qui ont été annoncés.

[Traduction]

De plus, le ministère ne finance pas les dépassements de coûts, une clause qui figure dans les ententes de contribution que les promoteurs des projets signent avec le ministère.

Les dépassements de coûts sont la responsabilité des signataires des ententes, qui peuvent être aussi bien des municipalités, des provinces, des territoires que d'autres bénéficiaires, à l'occasion.

Enfin, dans le cadre des programmes d'Infrastructure Canada, des fonds fédéraux sont reportés au besoin à des années futures pour répondre aux besoins des partenaires en matière de construction. Le financement engagé pour un projet n'est pas perdu.

[Français]

Infrastructure Canada a d'excellents antécédents en ce qui concerne l'administration responsable du financement du gouvernement et la mise en place d'infrastructures répondant aux besoins de notre pays et des communautés. Dans le budget de 2016, le gouvernement fédéral a annoncé la phase 1 de son plan d'infrastructures à long terme. On a mis l'accent sur les travaux de réparation et de remise en état, et on a approuvé le financement de plus de 760 projets, dont 70 p. 100 d'entre eux étaient déjà en cours.

[Traduction]

Plus récemment, dans l'Énoncé économique de l'automne, on a prolongé l'engagement du gouvernement dans le domaine des infrastructures, et on propose maintenant d'investir plus de 180 milliards de dollars sur 12 ans. Cela comprend l'établissement de la Banque de l'infrastructure du Canada, qui constituera un autre outil d'investissement dans des infrastructures.

Monsieur le président, mesdames et messieurs, je vous remercie de nous avoir invités à venir vous parler du travail essentiel de notre ministère. Mme Boileau et moi-même serons très heureux de répondre à vos questions.

Le sénateur Mitchell : Merci. Vous tombez à point. J'ai reçu des demandes de la part de municipalités de ma province, l'Alberta. Nous avons de la difficulté à comprendre vos programmes, et nous ne sommes pas les seuls. Si ma mémoire est bonne, des maires et des hauts fonctionnaires qui ont comparu devant le comité sur des questions d'infrastructure nous ont aussi parlé de l'incompréhension générale de la procédure d'accès aux fonds. Je prendrai l'exemple de la très belle petite ville de Drumheller, en Alberta, renommée mondialement pour son musée de dinosaures — tout comme le ministre, j'en profite pour faire de la publicité pour Drumheller... Il s'agit d'un endroit incroyable, fantastique, qui a toutefois un terrible sort : lorsque la ville de Calgary est inondée, le déluge déferle sur Drumheller dans les 35 heures qui suivent, à cause des digues. La ville a besoin de 30 millions de dollars pour en remonter le niveau. Elle a reçu 90 p. 100 de ce montant de la province, du moins pour ce que la ville en comprend, mais elle doit trouver 3 autres millions, ce qui est pratiquement impossible pour une population de 8 000 personnes.

La question est de savoir quels sont les mécanismes offerts et d'où viennent les 90 p. 100. Est-ce qu'une partie de l'argent vient du fédéral? Et comment la municipalité y a-t-elle accès? Vous serait-il possible de nous donner des éclaircissements pour que je n'aie plus à poser cette question?

M. Fortin : J'aimerais parler de la question de la clarté, si vous me le permettez.

Nous avons fait énormément d'efforts dans la dernière année pour améliorer l'accès à l'information. Je sais que vous avez l'impression d'entendre la réponse classique, mais nous avons versé au site web toute l'information dont nous disposons pour assurer la transparence, et notamment le montant des affectations que chaque province reçoit selon les programmes, de même que l'état mensuel de leurs dépenses. Les membres du grand public peuvent connaître la situation de leur province pour ce qui est des programmes et des affectations, ainsi que les critères et les fonds accessibles.

Dans mon exposé, j'ai parlé de la relation très importante entre les municipalités et les provinces. Nous signons des ententes bilatérales avec les provinces. Elles classent les projets selon un ordre de priorité de présentation à notre ministère. Je vais m'appuyer sur les exemples des projets d'autoroutes ou de traitement des eaux usées. Au moyen d'un processus de sélection, les provinces et les territoires invitent les municipalités à leur faire part des projets qu'elles souhaitent soumettre dans le cadre de tel ou tel programme. Il existe une collaboration entre les provinces et les municipalités.

Le sénateur Mitchell : Si la municipalité veut obtenir les renseignements dont elle a besoin, selon ce qui m'a été rapporté, à qui doit-elle s'adresser? À quel numéro de téléphone peut-elle obtenir les explications nécessaires pour comprendre les mécanismes?

M. Fortin : Elle doit en premier lieu s'adresser à la province, mais elle pourrait communiquer avec le ministère pour obtenir de l'information.

Le sénateur Mitchell : D'accord, l'information est sur le site web. Soit dit en passant, j'ai consulté le site. Mais à qui faut-il parler? Quel est le secteur du ministère responsable? À qui faut-il s'adresser et à quel numéro de téléphone? Pouvez-vous me donner ces renseignements?

M. Fortin : Ces renseignements se trouvent sur le site web. La municipalité peut communiquer avec un service.

Le sénateur Mitchell : D'accord. Merci.

Le président : J'aimerais poursuivre sur la même lancée. À en croire certains commentaires que nous avons reçus concernant les programmes pour lesquels il faut présenter une demande, ils sont très complexes et difficiles à comprendre. Apparemment, ils ne tiennent pas suffisamment compte de la taille de la municipalité ou de la ville. Il y a peut-être un lien avec la question du sénateur Mitchell.

L'autre commentaire que nous avons entendu concerne, vous l'aurez deviné, le Fonds de la taxe sur l'essence. Toutes les villes, grandes et petites, le trouvent fantastique parce qu'il est prévisible, cohérent et que les liens sont faciles à faire. Vous obtenez 110 p. 100 d'appuis pour ce fonds.

La sénatrice Eaton : Ma question est très élémentaire. Infrastructure Canada administre à l'heure actuelle 15 programmes, et le budget de 2016 annonce la création de 27 programmes d'infrastructures qui seront administrés par 10 organismes différents. Quelles mesures prenez-vous pour réduire et consolider le nombre de programmes d'infrastructures administrés par le ministère? Envisagez-vous de créer un guichet unique afin que les municipalités et les organismes communautaires puissent avoir accès facilement et simplement à tous les programmes fédéraux de financement des infrastructures? Enfin, pouvez-vous nous indiquer la valeur des fonds inutilisés qui sont reportés chaque année?

M. Fortin : Concernant votre question sur la création d'un guichet unique, c'est un sujet qui a été abordé lors de nos discussions avec les provinces et les municipalités l'été dernier. Nous avons mené des consultations, et cette demande est ressortie très clairement. Nous nous efforçons de simplifier la procédure autant que possible.

J'aimerais notamment attirer l'attention du comité sur le fait que, quand nous avons lancé la phase 1, l'un de nos objectifs pour ce programme de deux ans, ce qui est très peu pour mettre des projets en place — et c'est lié à votre commentaire sur le nombre de ministères que nous devons coordonner, la raison de cela... Oui, allez-y.

La sénatrice Eaton : J'aimerais avoir un peu plus de détails. Les 27 programmes d'infrastructures regroupent-ils les travaux de construction de bâtiments, de routes, de voies navigables et autres ouvrages du genre? Les programmes sont-ils organisés de cette façon?

M. Fortin : Non, pas forcément. Ces ouvrages sont admissibles, et il existe des cas particuliers. Vous avez parlé d'eaux usées. C'est un nouveau programme, qui a été instauré dans la phase 1. Cependant, la catégorie des infrastructures vertes peut être très diversifiée.

La sénatrice Eaton : Pouvez-vous nous donner quelques exemples de programmes?

M. Fortin : Les programmes sont très nombreux, mais ils ne relèvent pas tous d'Infrastructure Canada. J'allais dire que pour accélérer le déblocage des fonds, nous pouvons passer par les programmes en place dans d'autres ministères. Cela permet de verser l'argent le plus rapidement possible. C'est peut-être pour cette raison que vous avez l'impression que nous avons créé une multitude de programmes, mais beaucoup d'entre eux existaient déjà au sein du gouvernement fédéral avant la phase 1.

La sénatrice Eaton : Donc, les 27 programmes d'infrastructures annoncés dans le budget de 2016 et administrés par 10 organismes dont il est question ici étaient des programmes déjà en place?

M. Fortin : Certains existaient déjà et d'autres ont été créés. Nous pourrons vous remettre une liste plus détaillée des programmes qui ont été créés après le dépôt du budget et de ceux qui étaient déjà en cours dans les ministères.

La sénatrice Eaton : Vous avez déjà répondu à ma question sur le guichet unique. Quelle est la valeur annuelle moyenne des affectations inutilisées reportées?

Darlene Boileau, sous-ministre adjointe, Services ministériels, Infrastructure Canada : L'an dernier, les fonds inutilisés qui ont été reportés s'élevaient à 450 millions de dollars environ. Les reports sont généralement de l'ordre de 15 à 22 p. 100, selon les autorisations de dépenses ou les fonds versés au cours de l'année. Lorsque les investissements annuels annoncés dans le budget ou le Budget supplémentaire des dépenses sont particulièrement élevés, et suivant la capacité à engager des fonds, les reports se situent entre 400 et 600 millions de dollars.

La sénatrice Eaton : Les fonds ne sont pas retirés du programme, ils sont reportés.

Mme Boileau : C'est exact. L'argent n'est jamais perdu. Les fonds sont transférés dans nos niveaux de référence annuels. Ils sont engagés en fonction des projets désignés et, s'ils ne sont pas versés durant l'année, ils suivent jusqu'à l'achèvement du projet.

Le sénateur Enverga : Dans son Énoncé économique de l'automne 2016, le gouvernement a annoncé des investissements de 10,1 milliards de dollars sur 11 ans dans la sécurité maritime et ferroviaire, ainsi que dans divers projets liés au commerce et aux transports visant à décongestionner les très importants corridors commerciaux et les centres de transport ainsi que les ports donnant accès aux marchés étrangers.

Dans quelle mesure le financement destiné aux infrastructures commerciales sera-t-il consacré aux projets liés aux corridors commerciaux qui, à en croire la Chambre de commerce du Canada, ont déjà été très efficaces?

Et j'ajouterai la question suivante : votre étude englobe-t-elle le projet Northern Gateway?

M. Fortin : Pour ce qui est de l'énoncé de l'automne auquel vous faites allusion, les montants ne sont pas encore fixés. Nous sommes en pourparlers avec d'autres ministères actuellement. Je ne peux donc pas vous donner de montants exacts concernant le corridor commercial ou d'autres projets. Il est encore trop tôt pour annoncer les montants précis.

Le sénateur Enverga : Madame Boileau, pouvez-vous répondre à la question? Je pensais surtout au projet Northern Gateway. Est-ce que vous y travaillez actuellement?

M. Fortin : Il est encore trop tôt pour faire une annonce.

Mme Boileau : Oui, c'est trop tôt.

[Français]

Le sénateur Pratte : Une des questions fondamentales que le comité doit envisager est la suivante. Les représentants des villes qui ont comparu devant le comité pour parler des programmes d'infrastructure ont insisté sur les avantages du programme de la taxe sur l'essence. On a l'impression que ce qu'elles voudraient, c'est que tout l'argent consacré aux infrastructures provienne de la taxe sur l'essence. Nous devons donc nous demander quel serait l'équilibre idéal entre un programme comme celui de la taxe sur l'essence et les programmes qui sont basés sur la présentation de demandes. Quel est l'avantage, dans la perspective, des programmes basés sur des demandes, de type applications based, par rapport à un programme de taxe sur l'essence? Quel est l'avantage de tels programmes? Pourquoi ne pas transférer tout simplement l'argent dans le cadre d'un programme comme celui de la taxe sur l'essence aux gouvernements provinciaux et municipaux? Après tout, ce sont eux qui connaissent leurs besoins et qui sont redevables envers leurs citoyens.

M. Fortin : C'est une très bonne question. Je vais tenter, en tant que fonctionnaire de l'État, de m'en tenir à mon domaine. On parle ici du désir de livrer une plateforme et du mandat d'un gouvernement. Dans le cas de la taxe sur l'essence, on parle de critères très larges. On veut être capable, par rapport aux programmes basés davantage sur des allocations, de s'assurer qu'il y ait un équilibre. Il faut s'assurer que les priorités du gouvernement sont prises en compte, en ce qui a trait aux enjeux environnementaux et au transport collectif, par exemple. On doit s'assurer que les choses sont faites de façon équitable.

Le sénateur Pratte : L'enjeu est là. Dans le fond, plus les programmes sont complexes et difficilement accessibles, comme le disait le sénateur Mitchell, plus les provinces et les municipalités demandent un programme qui est simple. Plus les programmes sont compliqués et comportent des exigences importantes de la part du gouvernement, plus la résistance des gouvernements provinciaux et municipaux est forte. C'est pourquoi nous insistons tant sur la simplification des programmes.

M. Fortin : Je comprends. Dans ce qu'on appelait la phase 1, on a fait un pas en avant dans le but d'être plus équilibré. Notre démarche s'est effectuée à deux niveaux. Premièrement, nous avions nos legacy funds, d'anciens programmes qui dataient de plusieurs années. Ceux-ci étaient basés sur des allocations également. Dans le cadre de la phase 1, on a fixé l'échéance à avril 2016 pour que ces fonds soient consacrés à des projets au lieu qu'ils restent dans des comptes de banque et soient perçus comme disponibles. Cela s'étend sur plusieurs années. Ce sont des fonds alloués aux provinces par personne. Cette initiative a connu un certain succès. Nous avions au début quelques millions de dollars et nous sommes arrivés à un montant d'environ 20 millions de dollars qui sera transféré à la taxe sur l'essence, selon les mêmes formules que la taxe originale sur l'essence.

De plus, nous avons tenté de simplifier les demandes d'information que nous adressions aux provinces au sujet des projets. Nous tentons aussi d'être rigides dans la façon dont nous gérons nos risques. Toutefois, au lieu d'examiner les plans d'affaires un projet à la fois, nous demandons aux provinces de nous fournir des listes plus restreintes et des gabarits plus précis. Nous travaillons étroitement avec elles dans le cadre de comités de surveillance pour gérer les risques. Dans le passé, nous le faisions au début du projet. Maintenant, nous le faisons pendant l'évolution du projet, en partenariat avec les provinces.

[Traduction]

La sénatrice Ataullahjan : Dans quelle mesure les priorités du gouvernement fédéral en matière d'infrastructures cadrent-elles avec celles des municipalités ou des provinces? Des maires nous ont affirmé qu'ils voulaient décider eux mêmes de leurs priorités.

M. Fortin : Je pense que nos priorités concordent assez souvent. Notamment, les investissements dans les réseaux urbains de transport en commun comptent parmi les grandes priorités du gouvernement. La question de l'accès des petites communautés à l'eau potable revient souvent. Nous avons plusieurs priorités en commun. Si j'en juge par les discussions auxquelles le ministre participe sur diverses tribunes et avec les municipalités, les priorités se recoupent souvent.

De toute évidence, comme le sénateur Pratte l'a dit tout à l'heure, on nous demande d'assouplir les règles d'accès. Toutefois, pour ce qui a trait aux grandes priorités, je pense que nous sommes à peu près sur la même longueur d'onde que les autres paliers de gouvernement.

La sénatrice Marshall : J'aimerais discuter avec vous du Fonds de la taxe sur l'essence. Quelques-uns de mes collègues ont mentionné que nous avions accueilli des maires de diverses provinces et qu'ils ont louangé cette initiative. Dans ma province, Terre-Neuve-et-Labrador, les municipalités apprécient vraiment le Fonds de la taxe sur l'essence. Elles souhaiteraient que le financement du Fonds soit augmenté et qu'il soit plus souple.

Lorsque la commissaire à l'environnement et au développement durable a fait son examen du Fonds de la taxe sur l'essence plus tôt cette année, elle a formulé plusieurs recommandations, concernant notamment l'établissement de cibles, d'un calendrier, d'indicateurs, la nécessité de se concentrer sur les résultats, et d'autres choses du genre.

Où en est la mise en œuvre de ces recommandations? Par ailleurs, après la mise en œuvre des recommandations de la commissaire, pensez-vous que les municipalités auront toujours le même engouement pour le Fonds de la taxe sur l'essence?

M. Fortin : C'est une très bonne question.

À l'origine, le Fonds de la taxe sur l'essence a été mis en place pour assurer une source de financement prévisible aux municipalités. Le fonds était alors assorti d'un très large éventail de critères et les fonds admissibles étaient très nombreux. Le rapport soulève le fait que nous sommes maintenant dans une époque où les résultats sont mesurés en fonction d'indicateurs de rendement, et nous en avons pris bonne note.

Le programme qui a suivi impose un processus de conformité très rigoureux — je crois à cet égard que la sénatrice Eaton a parlé des liens avec le restant de la famille fédérale, et de la manière dont nous gérons tous les projets et les programmes qui relèvent d'autres ministères que le nôtre.

Nous avons instauré un processus très élaboré, nous avons créé des comités mixtes avec les autres ministères, des processus de rapports horizontaux, des évaluations, des dispositifs de communication par l'intermédiaire desquels nous transmettons des données et des renseignements mensuels aux fins de la mesure des incidences et des succès de ces projets.

La sénatrice Marshall : Est-ce que c'était pour donner suite à une recommandation de la commissaire?

M. Fortin : Ce n'était pas nécessairement une réponse à un rapport en particulier, mais l'évolution de la nouvelle génération de programmes, qui sont différents du Fonds de la taxe sur l'essence, nous a amenés à intégrer de nouveaux critères sur la communication des données et la mesure du rendement.

Ce sont les deux nouveaux programmes que nous avons créés. Le programme du transport en commun et celui des eaux usées découlent d'ententes bilatérales que nous avons signées avec toutes les provinces et tous les territoires. Ils doivent rendre des comptes sur l'avancement des projets.

La sénatrice Marshall : Ces changements sont assez récents, n'est-ce pas?

M. Fortin : Oui, ils ont été apportés à la phase 1.

La sénatrice Marshall : Quelle a été la réaction de vos clients?

M. Fortin : Depuis l'an dernier, nous avons entamé la mise en place d'une structure de concertation avec d'autres ministères fédéraux, mais nous avons quand même créé un comité de surveillance avec les provinces et les territoires. Les nouveaux programmes ont à peine un an, alors il est encore tôt pour tirer des conclusions.

La sénatrice Marshall : Est-ce que les changements touchent aussi le Fonds de la taxe sur l'essence?

M. Fortin : Pour ce qui est du Fonds de la taxe sur l'essence, les provinces doivent soumettre un rapport tous les cinq ans, mais un processus d'attestation annuel les oblige à nous soumettre un rapport détaillé sur les projets menés dans le cadre du fonds.

La sénatrice Marshall : C'est un dilemme, parce que les municipalités demandent que davantage d'argent soit versé dans le Fonds de la taxe sur l'essence à cause de la latitude qu'il leur offre.

M. Fortin : Et parce qu'elles ont moins de rapports à faire.

La sénatrice Marshall : Tout à fait. C'est la direction qui a été choisie, mais il a été décidé de changer les critères après coup. Il est risqué de continuer de rouler dans cette direction et de constater que, quand elles prendront connaissance des changements apportés, les municipalités changent d'idée, qu'elles ne veulent plus de cet argent.

M. Fortin : Les changements dont je parle ne touchent pas la taxe sur l'essence.

La sénatrice Marshall : Ils ne touchent pas la taxe sur l'essence?

M. Fortin : Non. Comme je vous l'ai dit au sujet de la taxe sur l'essence, des rapports annuels et du plan quinquennal, les comptes rendus demandés aux municipalités sont prévus depuis le début.

La sénatrice Marshall : Et qu'en est-il des recommandations? La commissaire vient à peine de les formuler, non? Elles découlent d'un examen qui a été fait en 2016.

Mme Boileau : J'aimerais compléter la réponse de mon collègue. Plusieurs de ces recommandations correspondent à des mesures déjà prévues dans le programme de la phase 1 du nouveau fonds pour le transport en commun et le traitement des eaux usées. Nous nous orientions déjà dans cette direction lorsque les recommandations ont été formulées. En fait, elles nous confortaient dans nos choix.

La sénatrice Marshall : Pensez-vous que les municipalités garderont leur bel enthousiasme à l'égard du Fonds de la taxe sur l'essence quand les changements auront été opérés? J'aimerais bien le savoir. C'est un sujet dont nous avons discuté entre nous. Cette question m'intéresse beaucoup.

Il serait dommage qu'après avoir élargi le Fonds de la taxe sur l'essence à la demande des maires, nous leur annoncions que les règles souples tant appréciées ont changé.

M. Fortin : Ce n'est pas seulement une question de souplesse. Nous voulons être en mesure de présenter des rapports sur les projets et de faire la preuve aux contribuables que les critères sont respectés et qu'une diligence raisonnable est exercée. Quant à la taxe sur l'essence elle-même, j'ai fait allusion à l'entente initiale à deux reprises au début.

La sénatrice Marshall : Toutefois, dans son rapport, la commissaire vous demande de la renforcer.

M. Fortin : Nous prenons bonne note des commentaires de la commissaire, et nous ferons de notre mieux pour y donner suite dans la prochaine génération de programmes.

La sénatrice Marshall : Quand la vérification de suivi aura-t-elle lieu? La commissaire vous a-t-elle donné cette information? Vous la reverrez, j'en suis assez certaine.

La sénatrice Andreychuk : Elle sait quelque chose que nous ne savons pas. Des témoins nous ont dit que l'attestation annuelle ne contenait pas des données fondamentales ou utiles. C'est un document qui indique que l'argent a été dépensé, mais il ne nous dit pas si les objectifs ont été atteints ou si les échéanciers ont été respectés.

D'un côté, le document est apprécié parce qu'il est simple mais, selon d'autres sources, l'information qui s'y trouve n'est apparemment pas très productive.

Vous nous informez que vous ne changerez absolument rien au système de la taxe sur l'essence, qu'il continuera de fonctionner de la même façon. Notre comité a besoin de savoir quel type d'information est recueilli.

M. Fortin : C'est pourquoi des rapports sont exigés pour la taxe sur l'essence elle-même. Le ministère peut réaliser des vérifications et des évaluations de tous nos programmes.

La sénatrice Andreychuk : Les documents concernant la taxe sur l'essence sont-ils publiés sur le site web?

M. Fortin : Les rapports ne sont pas automatiquement publiés sur le site web, mais nous pouvons les communiquer.

La sénatrice Andreychuk : Est-ce que ces documents sont publics?

M. Fortin : Le cycle quinquennal du plan n'est pas terminé, mais chaque municipalité nous transmet chaque année un bilan des projets qui ont été réalisés grâce à la taxe sur l'essence.

La sénatrice Andreychuk : Pour donner suite à la question de la sénatrice Marshall, la commissaire à l'environnement et au développement durable formule des recommandations dont nous prenons connaissance avec grand intérêt. Vous affirmez que vous en prenez bonne note. Avez-vous une obligation quelconque d'y répondre, ou devons-nous attendre la prochaine vérification? Il semble que ce soit là où le bât blesse.

Tout le monde surveille tout le monde. La commissaire fait un commentaire. Nous n'avons aucun moyen de savoir ce qu'il advient s'il n'y a pas une forme quelconque de réponse officielle. C'est exactement, si je puis dire, ce qui se passait auparavant pour nos rapports. Le Sénat soumettait des rapports et des recommandations au gouvernement. Le gouvernement en accusait réception, nous remerciait, et c'était tout jusqu'à nous décidions de déposer des motions pour demander une réponse, une méthode qui s'est avérée beaucoup plus productive.

Où est le lien entre le ministère et votre bon travail et celui de la commissaire? Elle a formulé des recommandations, mais nous n'avons aucun moyen de savoir comment elles sont mises en œuvre.

La sénatrice Marshall : Le rapport que la commissaire donne à la fin résume les recommandations et la réponse. Selon celui-ci, le ministère a répondu qu'il était d'accord avec toutes ses recommandations.

La sénatrice Andreychuk : Et que veut dire « d'accord » au juste? Comment faites-vous le suivi? Prendre bonne note, être d'accord... Comment pouvons-nous vérifier si les recommandations sont applicables et réalisables? Un autre niveau de difficulté s'ajoute au processus de suivi.

M. Fortin : Pour TOUTES les recommandations adressées à un ministère, que ce soit le nôtre ou un autre, s'il dit qu'il est d'accord, cela sous-entend généralement qu'un suivi sera fait, et que le ministère en question doit préparer une réponse.

La sénatrice Marshall : Le ministère adoptera une stratégie plus pratique de rapports sur le rendement.

La sénatrice Andreychuk : Et qu'est-ce que cela signifie?

M. Fortin : Cela fait référence à la nouvelle approche que nous avons instaurée pour les programmes suivants.

Le président : Des représentants des municipalités nous ont également parlé de la complexité des demandes, comme l'a mentionné le sénateur Pratte tout à l'heure. Ils nous ont parlé de la lourdeur du processus, apparemment très bureaucratique. Je ne parle pas du programme de la taxe sur l'essence, mais des programmes du Fonds Chantiers Canada, fondés sur des demandes.

Avez-vous réfléchi à des façons de le simplifier? Selon ces représentants, c'est tellement long avant de soumettre les demandes qu'il arrive que la date limite soit dépassée, et qu'ils ratent leur chance avant la publication du budget.

M. Fortin : Je ne peux pas dire le contraire. J'ai oublié de mentionner quelque chose au sujet de la complexité, de l'accès à l'information et de la soumission de demandes aux programmes. Je vous en prie, n'interprétez pas mon commentaire comme un blâme à l'égard des provinces ou des territoires, mais ces administrations ont un système qui les met en lien direct avec les municipalités, ce qui n'est pas le cas d'Infrastructure Canada. Certaines provinces recueillent l'information et les propositions de projets des municipalités par l'intermédiaire d'un processus de sélection. Pour certains aspects, la complexité peut donc venir du système provincial, et aucunement d'Infrastructure Canada.

Le président : Étant donné que les provinces sont en lien direct avec les municipalités, on pourrait penser que c'est une occasion pour le ministère de collaborer avec les ministères provinciaux pour simplifier le système et le rendre plus efficient. Peut-être avez-vous déjà entrepris cette démarche?

M. Fortin : Oui, nous sommes en pourparlers. Nous travaillons actuellement en concertation avec les provinces et les territoires sur les questions des résultats et des rapports.

Le président : J'aimerais soulever un dernier point avant de vous donner cinq minutes pour livrer votre exposé sur le Budget supplémentaire des dépenses. Voici ce que vous soutenez :

Dans le budget de 2016, le gouvernement fédéral a annoncé la phase 1 de son plan d'infrastructure à long terme. On a mis l'accent sur les travaux de réparation et de remise en état, et on a approuvé le financement de plus de 760 projets, dont 70 p. 100 sont déjà en cours.

Des reportages dans les journaux affirment que les fonds prévus pour la phase 1 se faisaient attendre, et qu'à un certain moment, seulement huit projets étaient en cours.

M. Fortin : C'est exact, mais cet énoncé fait allusion aux projets pour lesquels des fonds ont été engagés. J'ai dit par ailleurs que nous gérons des risques. L'argent est transféré du cadre financier lorsque nous recevons une demande de remboursement, et il peut être versé entre le moment où le projet est démarré et celui où nous recevons une demande. Nous ne versons pas toujours une avance pour la réalisation de projets. Par exemple, un projet dont le démarrage est prévu pour 2018 peut être précédé d'une phase de planification ou d'étude obligatoire avant la mise en œuvre.

Le président : La phase 1 englobait des projets prêts à démarrer, mais aussi des projets importants qui exigeaient des études, notamment les projets liés à des réseaux urbains de transport en commun.

Parmi les 760 projets, quelle était la proportion de ceux qui étaient prêts à démarrer et qui devaient être achevés avant la fin du présent exercice? En principe, les projets « prêts à démarrer » ne devraient-ils pas commencer immédiatement?

M. Fortin : Dans le cadre des nouveaux programmes, il s'agit d'une période de deux ans.

Le président : Est-ce que vous devrez modifier votre énoncé ou est-ce que le nombre de projets dont le financement a été approuvé restera le même? Est-ce que ce nombre reste 760?

M. Fortin : Oui, c'est exact.

Le président : Et est-il toujours exact de dire que 70 p. 100 des projets sont en cours, mais que le financement n'a pas nécessairement été versé?

M. Fortin : Non. Nous versons les fonds quand nous recevons une demande de remboursement. Toutefois, les fonds sont réservés pour un projet. L'argent est là.

Le président : Je vous propose d'en rester là parce que nous voulons avoir le temps de vous poser nos autres questions.

Madame Boileau, pouvez-vous nous faire le point sur le Budget supplémentaire des dépenses?

[Français]

Mme Boileau : Les subventions sont la deuxième composante dont vous nous avez demandé de vous parler ce soir.

[Traduction]

Infrastructure Canada demande un financement additionnel de 47,2 millions de dollars, ce qui portera notre financement total pour 2016-2017 à 5,31 milliards de dollars. Ce financement additionnel tient compte du report des fonds non dépensés au cours des dernières années, ainsi que des transferts entre les ministères. Les fonds additionnels que nous demandons sont répartis entre trois principaux secteurs : les dépenses opérationnelles, les dépenses en immobilisations et le report des fonds non dépensés, dont mon collègue a parlé précédemment au sujet des affectations au Fonds de la taxe sur l'essence.

[Français]

Comme vous le savez déjà, Infrastructure Canada est maintenant le ministère responsable de la supervision du projet de corridor du nouveau pont Champlain et du pont international Gordie-Howe, qui enjambera la rivière Detroit et qui reliera Windsor, en Ontario, et Detroit, au Michigan. Plusieurs éléments de notre Budget supplémentaire des dépenses (B) sont liés à la gestion et à la supervision de ces deux projets importants.

[Traduction]

Le premier élément que j'aimerais aborder se trouve dans la catégorie des dépenses opérationnelles, qui comprend un transfert de 20 000 $ à Affaires autochtones et du Nord Canada. Ce financement appuiera la participation du Conseil des Mohawks de Kahnawake au processus de consultation de l'État portant sur le projet de corridor du nouveau pont Champlain. Il s'agit d'un transfert annuel récurrent.

En termes simples, nous versons 20 000 $ à AANC pour lui permettre d'aider le Conseil des Mohawks à participer à toutes les consultations qui pourraient avoir lieu au sujet du corridor du pont Champlain. Si le conseil souhaite être représenté aux rencontres du comité ou à d'autres événements, cet argent lui donne cette possibilité. Ce budget est affecté aux consultations.

Nous souhaitons également transférer plus de 2,4 millions de dollars de Transports Canada pour les coûts de gestion des projets liés au pont international Gordie-Howe. En novembre dernier, il a été décidé de transférer de Transports Canada à Infrastructure Canada la responsabilité des travaux du pont Gordie-Howe. Il s'agit d'un transfert officiel de fonds pour soutenir le personnel affecté au projet du pont Gordie-Howe.

[Français]

Le deuxième point que j'aimerais aborder est lié à nos dépenses en capital. Le ministère demande 23,9 millions de dollars pour le report du financement consacré au projet de corridor du nouveau pont Champlain. Ce financement doit être reporté de 2015-2016 afin de couvrir les coûts des événements et des travaux imprévus, comme le retrait du sol non contaminé.

[Traduction]

Le dernier élément a trait au report au Fonds de la taxe sur l'essence des fonds non dépensés dans le cadre d'anciens programmes. Au titre de cet engagement pris par le gouvernement du Canada dans le budget de 2016, un montant de 21 millions de dollars sera versé au Fonds de la taxe sur l'essence. Le fonds a été modifié pour permettre le transfert des anciens fonds d'Infrastructure Canada qui n'ont pas été réservés pour des projets décrétés prioritaires par les provinces et les territoires au 31 mars 2016. La modification a été jugée nécessaire parce que le Fonds de la taxe sur l'essence découle d'une loi qui établit ses règles d'indexation et d'affectation.

[Français]

Les fonds dont nous demandons le transfert proviennent du Fonds sur l'infrastructure municipale rurale, annoncé en 2004 et conclu en 2014, et du Fonds sur l'infrastructure frontalière, annoncé en 2003 et conclu en 2014.

[Traduction]

De l'argent provenant de deux fonds temporaires a été remis dans nos coffres. Cet argent vient de projets qui ont coûté moins cher que prévu et dont les excédents ont été versés au Fonds de la taxe sur l'essence.

Pour appuyer le mandat de notre ministère en matière de transparence, nous continuerons de présenter les résultats de nos investissements alors que nous allons de l'avant en vue d'exécuter nos programmes et de verser les fonds qui sont essentiels à l'avenir de notre pays.

Voilà pour ce survol très bref du Budget supplémentaire des dépenses (B) d'Infrastructure Canada.

La sénatrice Marshall : Nous revenons encore une fois au Fonds de la taxe sur l'essence. Est-ce que l'argent du fonds peut être transféré à l'une quelconque des provinces, ou est-ce que les transferts prévus pour une province en particulier lui sont réservés?

M. Fortin : Oui.

La sénatrice Marshall : Et combien de provinces se partageront ces 21 millions de dollars?

Mme Boileau : Actuellement, je crois qu'il y en a deux, mais c'est un transfert initial. Il pourrait y en avoir d'autres.

La sénatrice Marshall : Quelles sont les deux provinces en question?

Mme Boileau : L'Ontario et le Québec, pour une bonne partie.

Ces deux provinces recevront la plus grosse part des affectations.

Le président : Y a-t-il d'autres questions?

[Français]

Je tiens à remercier M. Fortin et Mme Boileau du temps qu'ils nous ont consacré.

[Traduction]

Nous sommes ravis de la relation que nous entretenons avec vous. Nous vous remercions de votre aptitude à agir rapidement et de votre empressement à venir nous rencontrer pour nous tenir informés et répondre à nos questions.

Au nom de mes collègues, je vous remercie. Bonsoir.

(La séance est levée.)

Haut de page