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NFFN - Comité permanent

Finances nationales

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Finances nationales

Fascicule n° 35 - Témoignages du 13 juin 2017


OTTAWA, le mardi 13 juin 2017

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui, à 14 h 15, en séance publique et à huis clos, pour étudier le Budget principal des dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 2018.

Le sénateur Percy Mockler (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Bienvenue au Comité sénatorial permanent des finances nationales.

[Traduction]

Je suis le sénateur Percy Mockler du Nouveau-Brunswick, président du comité. Je voudrais maintenant demander aux sénateurs de se présenter.

Le sénateur Neufeld : Je suis le sénateur Neufeld, de la Colombie-Britannique.

La sénatrice Stewart Olsen : Carolyn Stewart Olsen, du Nouveau-Brunswick.

La sénatrice Marshall : Elizabeth Marshall, de la Terre-Neuve-et-Labrador.

Le sénateur Ogilvie : Kelvin Ogilvie, de la Nouvelle-Écosse.

Le président : Nous poursuivons aujourd'hui notre étude du Budget principal des dépenses 2017-2018. Le comité directeur a décidé d'inviter M. Kevin Page, président-directeur général de l'Institut des finances publiques et de la démocratie de l'Université d'Ottawa.

L'institut a publié ce printemps quelques rapports qui présentent un intérêt particulier pour notre comité. Nous avons voulu entendre M. Page avant d'examiner notre projet de rapport pour déterminer si des événements tels que la crise immobilière que nous avons déjà étudiée pouvaient avoir des répercussions sur le cadre financier et les plans de dépenses du gouvernement.

Monsieur Page, nous vous souhaitons la bienvenue au comité. Nous vous remercions d'avoir accepté notre invitation à venir nous faire profiter de vos observations et de votre point de vue. Après votre exposé préliminaire, les sénateurs voudront certainement vous poser des questions. Nous disposons à cette fin d'une période de 45 minutes.

À titre de président du comité, je dirai que nous partageons avec vous un dénominateur commun en trois lettres : TRP, pour transparence, responsabilité et prévisibilité du cadre financier du Canada, document que nous appelons budget quand nous nous adressons aux clients de Tim Hortons et de McDonald.

Cela dit, la parole est à vous, monsieur Page.

Kevin Page, président-directeur général, Institut des finances publiques et de la démocratie, Université d'Ottawa, à titre personnel : Je remercie le président, la vice-présidente et les membres du Comité sénatorial permanent des finances nationales. C'est un honneur pour moi de comparaître devant vous aujourd'hui. Merci pour le travail que vous faites sur le Budget principal des dépenses 2017-2018. Comme nous n'avons pas beaucoup de temps, je présenterai quelques observations qui peuvent servir de contexte à vos questions.

Les observations se fondent sur des analyses et des articles publiés par l'Institut des finances publiques et de la démocratie, ou IFPD. L'IFPD est un nouvel institut de recherche indépendant de l'Université d'Ottawa, qui s'intéresse particulièrement aux questions de finances publiques qui sont au cœur de la politique publique et des institutions de gouvernance.

[Français]

Notre personnel se compose de sept personnes.

[Traduction]

Nous travaillons avec des étudiants du premier cycle et des cycles supérieurs à l'Université d'Ottawa et ailleurs dans le pays.

L'IFPD concentre ses efforts sur les questions liées aux finances publiques qui ont des effets à tous les paliers de gouvernement du Canada et travaille au renforcement de l'action parlementaire dans le pays et à l'étranger. Les questions auxquelles l'institut s'intéresse actuellement comprennent la planification et les perspectives économiques et financières, l'innovation et les compétences, l'infrastructure, les soins de santé et le bien-être des enfants des Premières Nations.

Je voudrais aborder trois points.

Premièrement, notre système de prévisions budgétaires est détraqué. Vous examinez le Budget principal des dépenses 2017-2018. Ces prévisions budgétaires sont alignées sur le budget 2016, et non le budget 2017. Il y a donc un an de retard. De plus, le système a des faiblesses liées à la comptabilité, à la structure des crédits et au lien entre les renseignements financiers et non financiers.

[Français]

Le gouvernement s'est engagé à réformer le système. Les parlementaires devraient montrer l'exemple.

[Traduction]

Deuxièmement, la politique financière du Canada a changé. Pour 2017-2018 et 2018-2019, le Budget principal des dépenses a pour contexte l'expansion de programmes financés par le déficit. Notre cadre de planification financière est faible. Les perspectives économiques sont exposées à des risques importants liés à l'endettement des ménages, au prix des maisons et à la stabilité de la politique internationale.

[Français]

Les générations futures auraient à payer le coût de l'expansion d'un programme.

[Traduction]

Le Parlement doit veiller à l'équité intergénérationnelle. Les générations futures doivent pouvoir profiter des budgets déficitaires d'aujourd'hui.

Troisièmement, enfin, le gouvernement fédéral du Canada s'est engagé à affronter les défis politiques à long terme. Dans un monde où le cynisme politique et la méfiance du public ne cessent de croître, nous avons besoin de souplesse et de progrès au Canada. L'IFPD a mis en évidence des failles qui se développent dans les politiques relatives à la santé, à l'infrastructure, à l'innovation et aux compétences.

[Français]

Les enjeux sont élevés.

[Traduction]

Nous avons besoin d'un second examen objectif. Il nous faut une perspective non partisane à long terme ancrée dans la vie des Canadiens de tous les coins du pays. Si le Sénat est à la recherche d'un environnement pouvant faciliter le renouveau institutionnel, cet environnement est déjà là.

Je vous remercie de votre attention. Je suis maintenant prêt à répondre à vos questions.

La sénatrice Stewart Olsen : Je vous remercie de votre exposé, monsieur Page.

C'est assez surprenant, mais je crois que les Canadiens commencent à se rendre compte que notre situation financière n'est pas très bonne et qu'elle ne s'améliore pas.

Si vous le permettez, je voudrais vous poser quelques questions sur la Banque proposée de l'infrastructure. Avez-vous eu l'occasion d'examiner l'effet combiné des changements touchant le Régime de pensions du Canada et la Banque de l'infrastructure? Je vais vous dire pourquoi je pose la question. Dans la deuxième phase du RPC, je crois savoir que l'argent doit servir à financer la Banque de l'infrastructure.

Je suis très inquiète de voir que la planification budgétaire se fonde sur un château de cartes. C'est un aspect du problème, mais je crois qu'il est très important. Je m'inquiète de toutes les choses qui se passent en l'absence d'un contexte solide.

Pouvez-vous nous parler de cette situation, je vous prie?

M. Page : Sénatrice, pour moi, la fragilité possible de la Banque de l'infrastructure et du Régime de pensions du Canada est surtout attribuable à l'insuffisance du travail fait pour définir les besoins et le futur plan d'infrastructure du Canada. Je crois qu'il est difficile pour les députés et les sénateurs de comprendre le rôle exact de la Banque de l'infrastructure en l'absence d'une vaste évaluation des besoins et d'un plan.

La vision sur laquelle repose la Banque de l'infrastructure est en évolution. J'avais personnellement l'impression que le gouvernement envisageait une institution indépendante relevant du secteur privé et des attributions beaucoup plus étroitement définies. Aujourd'hui, je trouve les choses moins claires après avoir vu le projet de loi d'exécution du budget. Compte tenu des liens étroits devant exister entre le gouvernement et la Banque de l'infrastructure, celle-ci semble devoir jouer le rôle d'une branche politique du gouvernement. Les choses me semblent un peu confuses.

À mon avis, mieux la Banque de l'infrastructure sera définie dans la loi, plus le Sénat trouvera le projet acceptable et moins il s'inquiétera des investissements qu'y feraient les fonds de pension du Canada et d'ailleurs.

La sénatrice Stewart Olsen : Je vous remercie.

La sénatrice Marshall : Je vous remercie, monsieur Page, de votre présence au comité aujourd'hui.

La question du logement au Canada nous occupe depuis plusieurs mois. Nous avons l'impression d'assister à de nouveaux développements chaque semaine. Nous examinons différents aspects du problème, comme l'augmentation de l'endettement des consommateurs. C'est une source d'inquiétude. Nous avons également étudié la situation du logement à Vancouver et à Toronto. Nous avons entendu des responsables de la SCHL à cause de l'importance prise par le programme d'assurance hypothécaire. Nous avons ensuite eu une augmentation des primes de l'assurance hypothécaire. Je ne sais pas si c'était une coïncidence.

Plus tard encore, nous avons eu le problème de la société Home Capital. Puis Moody a baissé la cote de crédit des six grandes banques. Nous avons entendu des rumeurs dans le passé, mais elles s'intensifient maintenant : une hausse des taux d'intérêt serait imminente au Canada. Nous avons un peu l'impression de voir les signes avant-coureurs d'un tsunami.

Quel est votre point de vue sur les risques que courent l'économie et le gouvernement?

M. Page : Je vous remercie, sénatrice. C'est une excellente question.

En fait, les risques s'accumulent dans le secteur de l'habitation. Ils ne se sont pas dissipés depuis la crise financière de 2008-2009. Beaucoup d'autres pays, et particulièrement les États-Unis, ont été témoins d'un important rajustement des prix de l'immobilier par rapport aux revenus, alors qu'au Canada, le prix des maisons continue à monter. Il y a des marchés comme ceux que vous avez mentionnés — Vancouver, Toronto et quelques autres — où les risques sont maintenant très élevés. La situation menace les perspectives macro-économiques du pays.

Un économiste, Herb Stein, a dit dans les années 1970 que si une chose n'est pas durable, on peut supposer qu'elle prendra fin. Elle ne peut pas durer. Nous avons besoin d'un rajustement. Nous espérions un atterrissage en douceur. Je crois que c'est ce qu'espère aussi le gouverneur de la Banque du Canada. Entretemps, les prix n'arrêtent pas de monter. Nous constatons maintenant que les intérêts hypothécaires sont en hausse. Le lien entre le prix des maisons et l'endettement des ménages est évident.

Dans un scénario où l'économie connaîtrait un important ralentissement, la situation du secteur de l'habitation — ne serait-ce qu'à cause des pertes d'emplois — entraînerait une très grave récession au Canada. Nous n'avons pas été en mesure de réduire ces risques. Ils sont là, et nous essayons de les gérer.

Qu'est-ce que cela signifie? Pour notre économie, cela signifie que nous sommes très exposés à un ralentissement encore plus important. Pour notre situation financière, cela signifie que, tandis que le gouvernement vise un ratio dette- PIB de 31 p. 100 dans cinq ans, si nous devions avoir un ralentissement — encore une fois, tout se fonde sur une croissance nominale continue du PIB et de l'économie —, cet objectif ne serait pas réalisable en présence d'une crise immobilière.

La sénatrice Marshall : Dans ses projections, le gouvernement se base sur un certain scénario. Toutefois, même dans ce cas, l'actuel projet de loi d'exécution du budget prévoit une dette publique dépassant 1 000 milliards de dollars d'ici trois ans ainsi qu'une augmentation d'un tiers du service de la dette. Je crois que l'intérêt sur la dette se situe actuellement à environ 24 milliards de dollars et que le gouvernement prévoit une hausse à peut-être 33 ou 34 milliards. Et c'est presque le scénario le plus optimiste.

Même si ces chiffres se confirment, ne sommes-nous pas fondés à nous inquiéter du montant de la dette et de l'augmentation des intérêts à payer?

M. Page : Sénatrice, nous devrions tous nous inquiéter. J'ai commencé ma carrière dans la fonction publique au début des années 1980. J'ai travaillé aux Finances et dans les autres ministères financiers. J'ai vécu les déficits des années 1980 et du début des années 1990. J'ai vu ce que c'était de vivre au Canada au milieu des années 1990, au moment où les ratios dette-PIB étaient proches de 70 p. 100 pour le gouvernement fédéral et de 100 p. 100 pour l'ensemble des gouvernements du Canada.

Nous avons ensuite connu une période de 10 ou 11 ans pendant laquelle nous avons eu des excédents budgétaires successifs. Honnêtement, sénatrice, c'est un peu du déjà-vu pour moi. Depuis 2007-2008, nous avons eu un déficit chaque année. Sous le gouvernement précédent, je crois que nous avons ajouté près de 150 milliards de dollars à la dette. Pour les cinq ou six prochaines années, il est question, avec le budget 2017, d'ajouter quelque 140 milliards supplémentaires à la dette fédérale, qui s'élèvera à environ 600 milliards de dollars. Par conséquent, le montant de la dette est en hausse.

La seule chose qui masque l'impact réel de cette dette — même si, comme vous l'avez noté, les intérêts à payer doivent passer d'environ 24 ou 25 milliards à 33 milliards d'ici la fin de la période de prévision —, ce sont des taux d'intérêt plus bas qu'ils ne l'ont jamais été. C'est le résultat d'un incroyable aménagement monétaire qui, paradoxalement, crée un problème sur le marché de l'habitation. Lorsque les gens peuvent se permettre de gros prêts hypothécaires à cause de ces taux d'intérêt exceptionnellement bas, ils ont tendance à s'endetter davantage. En un certain sens, nous sommes en train d'alimenter nous-mêmes le risque.

Je suis en fait très inquiet à ce sujet. Je crains beaucoup la montée de l'endettement. Il n'est possible de maintenir les ratios actuels dette-PIB que si les taux d'intérêt effectifs demeurent aussi bas. À mesure qu'ils monteront, probablement plus tôt que nous l'attendions, comme l'impliquait le mot d'ouverture du président, le scénario pourrait changer radicalement.

Dans les six prochaines années, le montant de la dette augmentera de plus de 20 p. 100. Il conviendrait alors de se demander : Qui profitera de cette hausse? Ma génération paie moins d'impôts en contrepartie de ces avantages. La génération de mes enfants et celle de mes petits-enfants paieront plus d'impôts et auront une moindre marge de manœuvre.

L'augmentation de la dette a un coût réel. Je ne crois pas que nous en parlons suffisamment. La Défense nationale vient de publier un livre blanc. Je félicite le gouvernement de l'avoir rendu public, mais, même dans ce cas, nous parlons d'une hausse des dépenses consacrées à la défense de 0,5 p. 100 du PIB pendant les 10 prochaines années. Cela signifie que ces déficits que nous estimions à 20 milliards de dollars ne se résorberont pas. Au contraire, ils augmenteront.

La sénatrice Marshall : Oui, ils augmenteront. Merci beaucoup.

Le sénateur Ogilvie : J'ai deux questions à poser. La première a pour but de m'assurer que j'ai bien compris ce que vous avez dit, à savoir que nous examinons actuellement un Budget principal des dépenses basé sur le budget 2016. Vous ai-je bien compris?

M. Page : Encore une fois, en examinant les pouvoirs de dépenser demandés dans le Budget principal des dépenses 2017-2018, qui a paru avant le dépôt du budget 2017, on se rend compte qu'il est basé sur le budget 2016 et non le budget 2017. C'est bien le contexte.

Le sénateur Ogilvie : Si, en fonction de votre expérience de ce domaine, le Budget principal des dépenses se base sur le contexte du budget précédent et que, pour l'exercice courant, le gouvernement a promis de faire d'importantes dépenses à l'avenir — vous venez de donner l'exemple du budget de la Défense —, alors dans une optique commerciale normale, j'aurais tendance à croire que nous courons à la catastrophe.

M. Page : Sénateur, ce n'est pas une façon saine de procéder. Je crois en fait que c'est très malsain.

Du temps où il était dans l'opposition, le gouvernement s'était engagé à aligner le budget et les prévisions budgétaires. Dans la situation actuelle, avec un Budget principal des dépenses qui est présenté avant le dépôt du budget et avec des budgets prévoyant de nouvelles mesures, comme vous l'avez mentionné, tout le processus d'affectation de crédits exercera des pressions indues sur le processus des budgets supplémentaires. Cela signifie que vous examinez en fait un budget des dépenses dans lequel les plans de dépenses ministériels ne correspondent pas au bon budget, qui est celui de 2017.

Sénateur, ce n'est pas une façon de gérer une entreprise dont les dépenses s'élèvent à 300 milliards de dollars par an.

Le sénateur Ogilvie : Je vous remercie.

Ma seconde question fait suite à celle de la sénatrice Stewart Olsen. Au départ, j'ai trouvé intéressante l'idée de financer partiellement la Banque de l'infrastructure en recourant à la partie 2 du RPC. Si j'ai bien compris, il doit y avoir, dans le cadre du RPC, une nouvelle catégorie qui aurait des règles légèrement différentes. Tout d'abord, est-ce exact?

Deuxièmement, j'ai l'impression que nous courons le risque de réduire sensiblement la solidité que le RPC a acquise depuis sa création. Aujourd'hui, le régime constitue un élément très important de la structure de planification de base de tous les Canadiens. Toute faiblesse de la surveillance et de la planification financière de la partie 2 risque, à mon avis, de compromettre sensiblement les paiements que le RPC pourra faire. Trouvez-vous ma préoccupation raisonnable?

M. Page : Elle est très raisonnable. La situation et le fonctionnement de la Banque de l'infrastructure, d'après ce que nous avons aujourd'hui... Je vais peut-être revenir un peu en arrière pour noter qu'il n'y a pas eu de livre blanc sur la Banque de l'infrastructure. Comme je l'avais mentionné, il y en a eu un dans le cas de la stratégie de la Défense nationale.

Pour revenir à la mise à jour financière, elle ne contenait qu'une seule page sur la Banque de l'infrastructure. Dans le budget 2017, elle n'a fait l'objet que d'une page ou deux dans un document de 300 pages. De nombreuses questions fondamentales se posent dans ce cas : en particulier, de quelle façon les prix seront-ils fixés et comment les risques seront-ils répartis entre des organisations telles que l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada et la Banque de l'infrastructure? Nous ne savons pas vraiment comment les choses se feront.

Et tout l'ensemble est affaibli par le fait que nous n'avons procédé à aucune évaluation nationale des besoins en infrastructures. D'après le FMI et d'autres organisations, une telle évaluation est absolument essentielle.

Nous parlons d'un instrument que nous ne savons pas comment situer dans ce vaste contexte. Faut-il s'inquiéter des investissements faits dans le Régime de pensions du Canada? Le RPC s'est doté de quelques très bons conseillers financiers, qui travailleront fort pour s'assurer que les risques assumés sont appropriés.

Pour le moment, je m'inquiète davantage de la Banque de l'infrastructure. Elle est organisée pour subventionner les entreprises qui investissent dans des infrastructures. Les contribuables canadiens paieront de deux façons différentes. D'une part, leurs impôts couvriront les 35 milliards de dollars que vous avez mentionnés et leurs cotisations alimenteront le Régime de pensions du Canada. De l'autre, il est possible que les Canadiens aient aussi à payer des frais d'utilisation plus élevés.

Tant que nous ne saurons pas comment les prix seront fixés et comment les risques seront répartis, il sera difficile de répondre à ces questions. Toutefois, je crois que le Régime de pensions du Canada se montrera à la hauteur. Il demandera des rendements élevés. Je ne crois pas qu'il y aura des changements de ce côté.

Le sénateur Neufeld : Je voudrais aborder deux questions. À votre avis, avons-nous vraiment besoin d'une Banque de l'infrastructure au Canada? Je viens d'une province qui a une autorité financière municipale et où les municipalités empruntent à des taux raisonnables, je crois, depuis des décennies. Je pense que c'est la même chose partout dans le pays.

Pourquoi aurions-nous besoin d'une institution qui ferait double emploi avec ce que nous avons déjà? Qu'avez-vous à dire à ce sujet, monsieur Page?

M. Page : Je vous remercie de votre question, sénateur.

Pour ce qui est du besoin d'une banque de l'infrastructure, on peut dire, d'une façon générale, que les besoins d'infrastructure du Canada n'ont pas été suffisamment analysés. Nous n'avons pas vraiment défini les lacunes de capacité et les coûts correspondants pour les 10 ans ou les 20 ans à venir, comme il est nécessaire de le faire dans le cas des investissements en capital.

Quel serait l'objet d'une banque de l'infrastructure? Si nous n'avons pas défini les besoins généraux et n'avons pas dressé un plan, il est difficile de situer cette banque dans un contexte général.

Comme spécialiste des questions macro-économiques, je suis en faveur d'une telle institution. Je suis même en faveur du financement par déficit des infrastructures si nous pouvons être certains que le programme sera bien géré.

La Banque de l'infrastructure est un instrument pouvant réaliser ces objectifs. Si l'évaluation des besoins généraux révèle l'existence d'un créneau dans lequel le secteur privé, le public ou des dirigeants politiques comme vous-même croient qu'il n'est pas nécessaire d'utiliser l'argent des contribuables et qu'il est possible de mettre à contribution le secteur privé, s'il y a un groupe de citoyens qui soit disposé à acquitter des frais pour utiliser une route à péage ou franchir un pont, une telle banque peut être très utile. Si nous pouvions évaluer les besoins généraux en infrastructures, établir un plan et situer la Banque de l'infrastructure dans ce contexte, je n'éprouverai pas la même inquiétude. Il est bien possible qu'un besoin existe.

J'ai participé hier à une émission du réseau BNN au cours de laquelle on me disait que cette initiative plaît beaucoup au secteur privé. Si j'avais fait partie du secteur privé, j'aurais moi aussi beaucoup aimé cette initiative. Si on me disait qu'en participant, je serais subventionné par les contribuables, je ferais la queue pour en profiter. Qui ne le ferait pas? Bref, il y a sûrement de bonnes raisons de participer.

Je crois qu'il incombe au gouvernement, à l'administration publique, de définir les besoins, d'établir les plans et d'organiser cette institution d'une façon qui permette aux gens d'être confiants quant à son rôle, à son objet et à la façon dont les prix seront fixés et les risques répartis entre le secteur public et le secteur privé. Entretemps, je crois qu'il reste encore du travail à faire.

Le sénateur Neufeld : Je vous remercie beaucoup de cette réponse.

Venant de la Colombie-Britannique, je pense au pont Port Mann quand on parle de frais d'utilisation. Le pont a été financé selon une formule basée sur ces frais. Que s'est-il passé? Nous avons eu des élections, et le nouveau gouvernement dit qu'il va éliminer les frais d'utilisation. Par conséquent, ce genre de choses n'est pas toujours très durable.

À l'autre bout du pays, nous avons l'Île-du-Prince-Édouard qui dit qu'il faudrait réduire le péage pour le pont, comme on le fait ailleurs.

Quand je pense aux frais d'utilisation et à la participation du secteur privé, je ne sais pas comment on peut faire en sorte que ces frais soient maintenus pendant la période voulue — 50 ans peut-être — jusqu'à ce que le prix du projet ait été acquitté. Je ne suis donc pas très confiant au sujet de ces choses.

Je voudrais maintenant passer à votre troisième point concernant le Sénat, le second examen objectif et l'environnement opportun. Que vouliez-vous dire par là?

M. Page : En marchant de l'Université d'Ottawa jusqu'ici, je lisais un article de l'un des meilleurs journalistes du pays qui estimait que le Sénat devrait peut-être s'abstenir de faire des histoires en proposant de modifier un projet de loi d'exécution du budget parce que les sénateurs ne sont pas élus. À titre d'ancien directeur parlementaire du budget, je veux avoir des freins et des contrepoids. Si le Sénat juge bon de recommander des amendements, je veux qu'il y ait un certain équilibre entre ce que la Chambre veut et ce que le Sénat veut et que des solutions soient trouvées.

Je dis cela parce que j'ai eu à me prononcer sur une longue liste de dossiers semblables à celui de la Banque de l'infrastructure, dont certains faisaient les manchettes des journaux tous les jours ou presque, comme dans le cas des chasseurs, des services partagés ou des systèmes de paie. Si nous ne faisons pas assez tôt notre travail de contrôle des finances, nous aurons à payer très cher au bout du compte.

En toute honnêteté, je crois que nous avons besoin du Sénat pour jouer ce rôle, peut-être plus que cela n'a jamais été le cas. Ce sont là des questions à long terme dont les répercussions toucheront les générations futures et se manifesteront au-delà des cycles politiques.

Le sénateur Neufeld : Je vous remercie. J'avais besoin d'éclaircissements à ce sujet parce que certains croient qu'il est préférable de se débarrasser d'un Sénat non élu.

La sénatrice Cools : Je voudrais souhaiter à M. Page la bienvenue au comité. J'ai une question à poser qui peut sembler très simple.

Monsieur Page, je siège au Sénat depuis plus de 30 ans, mais j'arrive au bout de mon mandat. Dans 14 mois, je serai une ancienne sénatrice. J'essaie donc d'utiliser le temps qui me reste aussi sagement que possible.

Dans les notes qui vous ont servi d'introduction, vous dites au point 2 :

La politique financière du Canada a changé. Pour 2017-2018 et 2018-2019, le Budget principal des dépenses a pour contexte l'expansion de programmes financés par le déficit.

Écoutez bien ces mots. Vous avez dit que notre cadre de planification financière est faible. Pouvez-vous nous expliquer ce que vous entendez par là, s'il vous plaît?

M. Page : Je voudrais commencer par vous remercier de vos services, pour le cas où je n'aurais pas l'occasion de revenir au comité.

La sénatrice Cools : Je vous remercie.

M. Page : Pour ce qui est du point 2, sénatrice, du milieu des années 1990 jusqu'en 2007-2008, nous avions des excédents budgétaires. Nous examinions des budgets principaux des dépenses dans lesquels les gouvernements demandaient l'autorisation de rembourser la dette. Aujourd'hui, nous augmentons la dette, qui s'alourdira de plus en plus, puis sera transmise aux générations suivantes.

Lorsque nous parlons de programmes prévoyant des dépenses d'infrastructure ou d'autres programmes figurant dans le budget 2016 sur lequel se base le Budget principal des dépenses 2017-2018, ces programmes sont financés grâce à un déficit budgétaire. Ils seront essentiellement payés par les générations futures. Le contexte est donc très différent de celui qui existait à l'époque des excédents.

Lorsque je dis que notre cadre de planification financière est faible, c'est parce que la seule contrainte qui existe actuellement, et que le gouvernement s'est imposée lui-même, c'est le ratio dette-PIB dans cinq ans. Il n'y a pas de cibles annuelles. Nous ne nous engageons pas à maintenir le déficit en deçà de 25 milliards de dollars cette année ou de 20 milliards l'année prochaine. Il n'y a pas de cibles pour le contrôle des dépenses. Nous disons simplement que la croissance des dépenses cette année et l'année prochaine ne dépassera pas un certain pourcentage dans cinq ans.

Ayant pour dénominateur une économie de 2 000 milliards de dollars et pour numérateur un montant de 300 milliards, nous pouvons monter et descendre. C'est un cadre de planification très relâché. Comme la sénatrice Marshall l'a dit, en cas de récession, l'endettement restera assez semblable à la cible actuelle.

Certains pays d'Europe se limitent à un déficit annuel nominal ou à des cibles de déficit rajustées en fonction du cycle économique et font faire une analyse indépendante de leur capacité de respecter ces cibles. Nous n'avons rien de pareil, mais nous allons quand même augmenter le montant de notre dette de 140 milliards de dollars dans les six prochaines années, ce qui représente plus de 20 p. 100.

Il s'agit maintenant de l'examen du budget des dépenses. Qu'est-ce que cela rapporte aux citoyens d'aujourd'hui, sénatrice? Nous devons nous interroger sur ce que les citoyens des générations futures obtiendront de cette dette puisque ce sont eux qui auront à payer.

Sénatrice, j'ai une bonne trentaine d'années d'expérience dans la fonction publique. J'ai vécu les situations financières des années 1980 et des années 1990. Je me souviens des séances d'information que je tenais à l'intention des responsables des finances vers le milieu des années 1990 lorsque sur chaque dollar de recettes, nous avions à payer 38 cents d'intérêts sur la dette. Aujourd'hui, comme la sénatrice Marshall l'a dit, le service de la dette s'élève à environ 24 milliards de dollars, ce qui représente 8 à 9 p. 100 de nos recettes. Pouvez-vous imaginer la différence avec les gouvernements du début et du milieu des années 1990 qui devaient payer 38 cents d'intérêts sur chaque dollar de recettes? Nous en sommes maintenant à 9 cents, mais nous alourdissons sensiblement notre dette. Lorsque les taux d'intérêt auront monté, le service de la dette augmentera aussi assez rapidement.

Ainsi, tandis que vous examinez le Budget principal des dépenses dans le contexte de ce cadre de planification relâché, vous aurez à vous interroger sur ce que les générations futures tireront de nos dépenses. Lorsque vous posez des questions sur la Banque de l'infrastructure ou sur les pensions, vous évoquez les enjeux liés à l'équité intergénérationnelle. C'est dans ce contexte, sénatrice, que j'ai dit au point 3 que nous n'avons jamais eu autant besoin d'un Sénat qui examine la durabilité financière à long terme et l'équité intergénérationnelle. Ces mots ne sont même pas utilisés à la Chambre des communes.

La sénatrice Cools : Ils seront peut-être utilisés davantage dans un proche avenir si nous les répétons assez souvent. Merci beaucoup.

La sénatrice Marshall : Monsieur Page, je sais que vous avez parlé d'indicateurs de rendement dans certains de vos rapports. Je crois que vous en avez un pour l'innovation, que j'ai vu dans le contexte de votre observation sur l'infrastructure. Le présent gouvernement se vante beaucoup du fait que son action est axée sur les résultats dans tous les domaines. À l'heure actuelle, le Conseil du Trésor fait une revue pour s'assurer que nous avons de bons indicateurs de rendement. Le processus est amorcé. On ne sait pas vraiment s'il a beaucoup avancé.

Vous avez été pendant longtemps proche du gouvernement. Pouvez-vous nous parler des indicateurs de rendement, de leur historique, de ce que nous en faisons actuellement et de ce qui nous attend à l'avenir? Je ne suis pas trop confiante pour ce qui est de la situation actuelle et de l'orientation que nous avons prise, mais j'aimerais avoir votre avis là-dessus.

M. Page : Sénatrice, c'est une excellente question concernant le rendement, l'optimisation des ressources, le financement sur le déficit et une grande expansion des programmes. Par rapport au budget 2015, nous ajoutons probablement aux dépenses de programmes près d'un point entier de pourcentage du PIB, soit plus de 20 milliards de dollars.

Où allons-nous trouver cette somme? Nous mettons en train ces nouveaux programmes. Nous disons que nous réduirons les lacunes de l'infrastructure. Il y a déjà des cadres de rendement — dans le domaine de l'infrastructure, par exemple — qui sont agréés par le Fonds monétaire international. À ma connaissance, nous ne les utilisons pas. Je m'inquiète donc de l'avenir.

J'ai travaillé pour les trois organismes centraux ainsi que dans quelques ministères opérationnels. Je me souviens d'avoir travaillé pour Agriculture Canada. Je m'occupais des programmes de crédit agricole. Je me souviens que lorsque le ministre d'alors — je ne mentionnerai pas son nom, mais c'était un bon ministre — me rencontrait dans un corridor, il me demandait : « Kevin, où en sommes-nous sur le plan du traitement? Quels délais de service avons-nous dans les programmes de stabilisation et l'assurance-récolte? » Je crois qu'il y a des ministres et des ministères qui s'intéressent de près à ces questions. Nous devons développer ce genre de cadres de rendement.

Pour revenir à votre question, je vous remercie d'avoir mentionné notre travail dans le domaine de l'innovation et des compétences. J'aimerais consacrer quelques instants à ce dossier.

Sur des dépenses budgétaires d'environ 300 milliards de dollars, nous consacrons chaque année plus de 20 milliards au financement de programmes d'innovation et de développement des compétences. Nous avons bien plus d'une centaine de programmes différents dans ce domaine. Je le sais parce que j'ai demandé à deux étudiants de quatrième année de passer deux mois à examiner chaque ministère, en commençant par Agriculture Canada pour arriver, dans l'ordre alphabétique, au ministère Z, et de noter chaque programme d'innovation et de développement des compétences.

On trouve évidemment de tels programmes à Ressources humaines et Développement social, mais vous serez sans doute surprise d'apprendre qu'il y en a aussi aux Affaires autochtones, à l'Agriculture, au Conseil de recherches, et cetera. J'ai demandé aux étudiants de prendre note d'absolument tous les programmes, de leur description, des montants qui y ont été consacrés et des indicateurs de rendement correspondants. Je leur ai enfin demandé de répondre à la question suivante : Vous êtes un jeune de 22 ou 23 ans; si vous étiez député ou sénateur, seriez-vous en mesure d'évaluer le rendement de ces programmes? Diriez-vous dans chaque cas que les contribuables en avaient pour leur argent? Estimez-vous que tel ou tel programme devrait être réévalué à cause de son rendement trop faible ou trop élevé? Avons-nous peut-être besoin de lui affecter plus de fonds? Ces étudiants ont trouvé que moins de 10 p. 100 des programmes étaient bien documentés au chapitre du rendement.

Lors du dépôt du budget, nous avions déjà fait ce travail. Les deux étudiants avaient compilé les résultats à l'Université d'Ottawa. Nous savions en 2016 que le budget suivant serait axé sur l'innovation et les compétences. Le gouvernement aurait pu mener lui-même cette étude. En toute franchise, sénatrice, je recevais des appels de fonctionnaires qui me demandaient : « Où avez-vous trouvé ces données? » Ces données étaient pourtant celles du gouvernement. Elles avaient été extraites des rapports ministériels sur les plans et les priorités.

Des étudiants avaient réussi à examiner méticuleusement chaque programme, à en noter les détails sur une feuille de calcul et à mettre les données à la disposition de tous les Canadiens. Nous savions un an d'avance que le programme du gouvernement serait axé sur l'innovation et les compétences et avions donc mené notre propre étude. Les ministères ont les moyens de revoir leurs propres programmes pour déterminer s'ils en tirent un rendement satisfaisant.

Bref, il est possible de faire des choses importantes, des choses extraordinaires en matière de rendement dans l'administration publique. Certains ministères ont déjà ce genre de culture organisationnelle.

Ai-je confiance? Non, sénatrice, je ne suis pas confiant. Je partage votre inquiétude.

La sénatrice Marshall : Comme vous le savez, les représentants de différents ministères comparaissent devant le comité pour nous renseigner sur leurs programmes. Nous leur posons presque toujours des questions sur les indicateurs de rendement. Je dois dire que certaines des réponses m'ont surprise, même dans le contexte de l'innovation, lorsque je leur demandais des détails sur leurs indicateurs de rendement, sur leurs connaissances dans ce domaine et sur la qualité des indicateurs mis au point.

Nous nous sommes également intéressés aux évaluations. Très souvent, lorsque les ministères parlent de leurs programmes, ils disent qu'ils en ont confié l'évaluation à des tiers et semblent satisfaits. Toutefois, lorsque nous avons examiné certaines des évaluations l'année dernière — je crois que c'était dans le cas des programmes autochtones du ministère de la Santé —, j'avais été très déçue par la qualité des évaluations. J'ai donc l'impression que le gouvernement devrait en faire un peu plus à cet égard.

Je sais qu'une initiative est actuellement en cours, mais je me demande si elle est réalisée assez rapidement. Nous parlons d'un gouvernement qui est censé axer ses efforts sur les résultats et s'en servir pour répartir l'argent des contribuables. Si c'est bien le cas, la vitesse à laquelle il agit me laisse un peu sceptique.

Merci beaucoup pour ces observations.

Le sénateur Neufeld : Vous avez parlé du niveau des taux d'intérêt. Nous savons tous, je crois, que la faiblesse des taux d'intérêt est à l'origine de l'endettement croissant des Canadiens. Je dois en conclure qu'à votre avis, nous devrions faire monter les taux d'intérêt. Quels en seraient les effets sur l'ensemble de l'économie? Si les taux d'intérêt sont la cause fondamentale, y a-t-il d'autres facteurs à considérer pour atténuer ces effets?

En ce qui concerne le ratio dette-PIB, lorsque j'étais ministre en Colombie-Britannique, le premier ministre Campbell disait que ce ratio ne dépasserait pas 13 p. 100. Il affirmait : « Peu importe si nous devons tout arrêter, nous ne laisserons pas le ratio aller au-delà de 13 p. 100. »

Je sais qu'il y a beaucoup d'autres indicateurs, mais quelles autres mesures importantes — qui veulent vraiment dire quelque chose — devrions-nous utiliser à la place du ratio dette-PIB? Vous êtes d'avis que ce ratio peut monter et que nous avons beaucoup de marge de manœuvre. Quels autres indicateurs pouvons-nous utiliser?

M. Page : Je vous remercie de votre question, sénateur.

En ce qui concerne les taux d'intérêt, nous avons en ce moment une politique monétaire très accommodante. Le taux de la Banque du Canada n'a jamais été aussi bas. Il s'est maintenu aux alentours de 1 p. 100 depuis la récession de 2008-2009, ce qui est pour moi sans précédent. Les taux hypothécaires et les taux d'emprunt de 1 à 5 ans de même que les taux variables sont incroyablement bas. Lorsque le crédit est si peu coûteux, il n'est pas surprenant de voir les gens recourir à l'endettement pour financer leurs activités.

À un moment donné, nous assisterons à une certaine normalisation. Depuis un an, la Réserve fédérale des États- Unis parle de relever les taux d'intérêt.

Sénateur, nous avons été témoins d'une poussée de croissance au Canada depuis le printemps 2016. En glissement annuel, le taux de croissance se situe probablement aux alentours de 3 p. 100 si on examine le PIB et les prix de base du dernier mois et qu'on les compare à ceux de l'année dernière. La croissance sur 12 mois est donc assez importante.

La sous-gouverneure de la Banque du Canada nous a dit de ne pas perdre de vue que les taux d'intérêt pourraient monter sous peu.

Si nous devons affronter cet incroyable rapport entre l'endettement et le revenu des ménages et s'il y a des mesures différentes, comment allons-nous gérer la situation? De quelles autres variables devons-nous nous soucier?

De toute évidence, le gouverneur de la Banque du Canada et le ministre des Finances sont conscients du fait que nous devons laisser l'économie continuer à croître. Si nous avions une récession aujourd'hui, ce serait très grave.

Nous devons considérer la croissance réelle du revenu. Comment pouvons-nous nous assurer que les salaires et le taux d'emploi continuent à augmenter? Ils sont actuellement en hausse, ce qui est positif. C'est le genre d'indicateur que des gens comme moi examinent.

En ce qui concerne l'endettement, nous pouvons beaucoup apprendre en étudiant ce que font d'autres pays pour renforcer leur cadre financier. Nous pouvons même tirer parti de notre propre expérience. Si nous voulons être en mesure d'affronter le problème du déficit au Canada, nous devons revenir à la situation qui existait au milieu des années 1990, lorsque nous nous sommes astreints à respecter des cibles annuelles et avons prévu des réserves à cette fin. Ce sont des cibles à court terme.

De plus, chaque fois que nous mettons en œuvre de nouveaux programmes, comme nous l'avons fait la semaine dernière en annonçant aux Canadiens que nous ferions passer les dépenses consacrées à la défense d'environ 1 à 1,5 p. 100 du PIB dans les 10 prochaines années, nous devons immédiatement prévoir une évaluation. Nous devons déterminer l'effet de telles dépenses sur la stabilité financière du pays. Il y a des analyses que tous les pays doivent faire.

Le Bureau du directeur parlementaire du budget procède à ce genre d'analyse, mais ce n'est pas le cas du ministère des Finances. Cela devrait être automatique chaque fois que nous publions des documents importants de cette nature. L'analyse devrait faire partie intégrante de ces documents.

Le président : Honorables sénateurs, on nous informe qu'il y aura un vote à 15 h 15. Par conséquent, monsieur Page, si vous voulez bien rester, nous pourrons poursuivre après le vote. Autrement, cela mettra fin...

La sénatrice Cools : Je devrais peut-être poser tout de suite ma question pour que nous puissions ajourner.

Le président : Posez votre question, sénatrice Cools.

La sénatrice Cools : Je vous remercie encore de votre témoignage. Vous avez suscité de nombreuses questions dans mon cœur et mon esprit.

Pendant que vous parliez de ce projet de Banque de l'infrastructure, je me posais une question. Pouvez-vous me dire quelle est la nature de cette nouvelle créature? J'aimerais savoir ce qu'il en est exactement. Qu'est-ce qui est proposé? Nous croyons tous savoir ce qu'est une banque, mais pouvez-vous nous le dire d'une façon très concise?

Le président : Nous devons partir. Il n'y a pas quorum.

Monsieur Page, vous avez entendu la question. Pouvez-vous nous envoyer une réponse écrite, s'il vous plaît?

M. Page : Oui.

Le président : Merci beaucoup. Nous allons maintenant lever la séance parce que nous sommes appelés dans la salle du Sénat.

(La séance est levée.)

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